La Russie d'Aujourd'hui

8
La Cité des étoiles, c’est 6 700 habitants, une légende de l’as- tronautique et la plus forte concentration de « héros » de l’Union soviétique et de la Rus- sie (plus haute décoration hono- rifique du pays) au km2. Cet an- cien « coin communiste », comme on l’appelait à l’époque soviéti- que pour la qualité de la vie qu’il offrait, est situé à 25 km au nord- est de Moscou. À l’approche, la carte de la région disparaît de l’écran du GPS, la ville est en- core aujourd’hui « fermée », se- crète. En y pénétrant, on se rend compte que le temps a contour- né la Cité des étoiles. Jadis fier- té nationale, elle est devenue un musée de l’architecture soviéti- que. C’est au cœur de la ville, protégé par un poste de contrô- le, que se situe le centre d’étu- des Gagarine. C’est ici que sont formés les astronautes et héber- gées les représentations perma- nentes de la NASA et de l’ Agence spatiale européenne. ANASTASIA GOROKHOVA LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI La Russie a considérablement investi dans la sûreté nucléaire après la catastrophe de Tchernobyl. Et n’est pas prête à renoncer aux lucratives exportations de centrales. L’électrochoc de Tchernobyl a remis les pendules à l’heure. Les réacteurs ont été modernisés puis inspectés et certifiés par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). « Nous avons implanté un sys- tème intelligent de sécurité pas- sive afin d’éviter toute erreur humaine », affirme Igor Kony- chev, de l’Agence atomique russe Rosatom. Cette dernière s’affirme telle- ment convaincue de la sécuri- té des centrales russes qu’elle exporte son programme nu- cléaire dans les pays européens, en Turquie et même jusqu’en Chine. « La Russie contrôle aujourd’hui 20% du marché mondial des centrales nucléai- res », selon Konychev. Une telle position n’est pas en phase avec l’opinion publique mondiale mais elle repose en revanche sur une solide logique commerciale et industrielle. Nucléaire : la sécurité d’abord Énergie Après Fukushima, le gouvernement russe continue de privilégier l’atome mais vérifie ses installations SUITE EN PAGE 2 Distribué avec Mercredi 20 avril 2011 15 ans après le vol historique, Paul Ricard invitait le premier cosmonaute chez lui sur la Côte d’Azur. L’interprète de cette rencontre insolite relate pour nous quelques anecdotes. Gagarine chez Ricard PAGE 3 Dans un entretien exclusif, Arkadi Dvorkovitch, conseiller économique du président, évoque les privati- sations et la nécessité d’offrir aux investisseurs étrangers le même « niveau de confort » qu’en Europe. PAGE 5 PAGE 4 Caucase grand luxe Dans l’écrin du Caucase, une future station de ski, baptisée Lagonaki, ambitionne de rivali- ser avec Courchevel. L’État, qui prend le projet à bras-le-corps, assure le financement. PAGE 6 VERONIKA COLOSIMO SPÉCIALEMENT POUR LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI SUITE EN PAGE 2 Pour pénétrer dans la « zone d’exclusion », un rayon de trente kilomètres autour de la centra- le de Tchernobyl et de son réac- teur numéro 4 qui a brûlé dans la nuit du 25 au 26 avril 1986, il faut passer un point de contrô- le muni d’une autorisation ob- tenue au préalable. Avant d’être admis, tout visiteur doit signer un papier : il prend l’entière res- ponsabilité des risques encou- rus. À l’approche du réacteur abîmé, recouvert depuis la fin de 1986 d’un sarcophage de béton et d’acier, les dosimètres s’emballent, en montrant des ni- veaux de radioactivité des di- zaines fois supérieurs à la nor- male. Mais les guides de l’agence gouvernementale Cher- nobyl Interinform, qui gère et Les traces indélébiles de la catastrophe Anniversaire 25 ans après, dans les ruines de Tchernobyl OPINIONS contrôle la zone, se veulent ras- surants : « La dose reçue en une journée passée ici est inférieure à celle d’une radiographie den- taire », explique Youri Tatar- chouk, qui travaille sur le site depuis 1998. Non loin du réac- teur, des pilots d’acier s’élancent dans le ciel : c’est le chantier du nouveau sarcophage qui doit venir recouvrir l’ancien, devenu vétuste. Le projet, mené depuis 2007 par le groupement fran- çais Novarka, fait débat. Alors que la date de péremption de l’ancien, fabriqué pour tenir 25-30 ans, approche, le chantier peine à démarrer, s’inquièteVla- dimir Tchouprov, le directeur du département énergétique de Greenpeace Russie. À un quart de siècle d’intervalle, Fukushima et Tchernobyl rappellent le coût humain et économique monstrueux des erreurs commises par l’industrie nucléaire. Gérard Depardieu incarne le personnage mythique dans le film éponyme que José Dion tourne dans la région d’Arkhangelsk. Vue du quatrième réacteur de la centrale nucléaire Mayak, à Tchéliabinsk. PHOTO DU MOIS Depardieu en Raspoutine Poutine mise sur le pragmatisme L’économiste Roland Nash juge que désormais, la politique étrangère russe se fonde essen- tiellement sur les intérêts éco- nomiques du pays, sans souci de suivisme ou d’opposition par rapport à l’Occident. PHOTOSHOT/VOSTOCK-PHOTO Porte de l’espace La Cité des étoiles ou « ville de Gagarine », à proximité de Moscou, ne figure sur aucune carte. C’est là que sont formés les astronautes internationaux. VLADIMIR ROUVINSKIY LA RUSSIE D'AUJOURD'HUI SUITE EN PAGE 3 Ce supplément de huit pages est édité et publié par Rossiyskaya Gazeta (Russie), qui assume l’entière responsabilité de son contenu Publié en coordination avec The Daily Telegraph, The Washington Post et d’autres grands quotidiens internationaux L’ère de la féminisation et de la non-fiction Akhmatova divise les mélomanes La littérature russe connaît une renaissance et affiche de nouvelles tendances. La presse se montre très critique envers la création, à l’Opéra Bastille, du spectacle de Bruno Mantovani. P. 7 P. 8 Le 50 ème anniversaire du 1er vol humain dans l’espace NASA ITAR-TASS VOSTOCK-PHOTO LORI/LEGION MEDIA NIKOLAY KOROLEV ELISA HABERER L’économie en mutation

description

La Russie d'Aujourd'hui est une source d'informations politiques, économiques et culturelles internationalement reconnue. Elle propose une couverture médiatique réalisée sur le terrain par des journalistes possédant une connaissance en profondeur du pays, ainsi que des analystes et un vaste éventail d'opinions sur les événements actuels.

Transcript of La Russie d'Aujourd'hui

Page 1: La Russie d'Aujourd'hui

La Cité des étoiles, c’est 6 700 habitants, une légende de l’as-tronautique et la plus forte concentration de « héros » de l’Union soviétique et de la Rus-sie (plus haute décoration hono-rifi que du pays) au km2. Cet an-cien « coin communiste », comme on l’appelait à l’époque soviéti-que pour la qualité de la vie qu’il offrait, est situé à 25 km au nord-est de Moscou. À l’approche, la carte de la région disparaît de l’écran du GPS, la ville est en-core aujourd’hui « fermée », se-crète. En y pénétrant, on se rend compte que le temps a contour-né la Cité des étoiles. Jadis fi er-té nationale, elle est devenue un musée de l’architecture soviéti-que. C’est au cœur de la ville, protégé par un poste de contrô-le, que se situe le centre d’étu-des Gagarine. C’est ici que sont formés les astronautes et héber-gées les représentations perma-nentes de la NASA et de l’ Agence spatiale européenne.

ANASTASIA GOROKHOVALA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

La Russie a considérablement

investi dans la sûreté nucléaire

après la catastrophe de

Tchernobyl. Et n’est pas prête à

renoncer aux lucratives

exportations de centrales.

L’électrochoc de Tchernobyl a remis les pendules à l’heure. Les réacteurs ont été modernisés puis inspectés et certifi és par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). « Nous avons implanté un sys-tème intelligent de sécurité pas-sive afi n d’éviter toute erreur humaine », affirme Igor Kony-chev, de l’Agence atomique russe Rosatom.Cette dernière s’affirme telle-ment convaincue de la sécuri-té des centrales russes qu’elle exporte son programme nu-cléaire dans les pays européens, en Turquie et même jusqu’en Chine. « La Russie contrôle aujourd’hui 20% du marché mondial des centrales nucléai-res », selon Konychev.Une telle position n’est pas en phase avec l’opinion publique mondiale mais elle repose en revanche sur une solide logique commerciale et industrielle.

Nucléaire : la sécurité d’abordÉnergie Après Fukushima, le gouvernement russe continue de privilégier l’atome mais vérifie ses installations

SUITE EN PAGE 2

Distribué avec

Mercredi 20 avril 2011

15 ans après le vol historique, Paul Ricard invitait le premier cosmonaute chez lui sur la Côte d’Azur. L’interprète de cette rencontre insolite relate pour nous quelques anecdotes.

Gagarine chez Ricard

PAGE 3

Dans un entretien exclusif, Arkadi Dvorkovitch, conseiller économique du président, évoque les privati-sations et la nécessité d’offrir aux investisseurs étrangers le même « niveau de confort » qu’en Europe.

PAGE 5 PAGE 4

Caucase grand luxe

Dans l’écrin du Caucase, une future station de ski, baptisée Lagonaki, ambitionne de rivali-ser avec Courchevel. L’État, qui prend le projet à bras-le-corps, assure le financement.

PAGE 6

VERONIKA COLOSIMOSPÉCIALEMENT POURLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

SUITE EN PAGE 2

Pour pénétrer dans la « zone d’exclusion », un rayon de trente kilomètres autour de la centra-le de Tchernobyl et de son réac-teur numéro 4 qui a brûlé dans la nuit du 25 au 26 avril 1986,

il faut passer un point de contrô-le muni d’une autorisation ob-tenue au préalable. Avant d’être admis, tout visiteur doit signer un papier : il prend l’entière res-ponsabilité des risques encou-rus. À l’approche du réacteur abîmé, recouvert depuis la fi n de 1986 d’un sarcophage de béton et d’acier, les dosimètres s’emballent, en montrant des ni-veaux de radioactivité des di-zaines fois supérieurs à la nor-male. Mais les guides de l’agence gouvernementale Cher-nobyl Interinform, qui gère et

Les traces indélébiles de la catastrophe

Anniversaire 25 ans après, dans les ruines de Tchernobyl

OPINIONS

contrôle la zone, se veulent ras-surants : « La dose reçue en une journée passée ici est inférieure à celle d’une radiographie den-taire », explique Youri Tatar-chouk, qui travaille sur le site depuis 1998. Non loin du réac-teur, des pilots d’acier s’élancent dans le ciel : c’est le chantier du nouveau sarcophage qui doit venir recouvrir l’ancien, devenu vétuste. Le projet, mené depuis 2007 par le groupement fran-çais Novarka, fait débat. Alors que la date de péremption de l’ancien, fabriqué pour tenir 25-30 ans, approche, le chantier peine à démarrer, s’inquiète Vla-dimir Tchouprov, le directeur du département énergétique de Greenpeace Russie.

À un quart de siècle d’intervalle,

Fukushima et Tchernobyl

rappellent le coût humain et

économique monstrueux des

erreurs commises par l’industrie

nucléaire.

Gérard Depardieu incarne le personnage mythique dans le film

éponyme que José Dion tourne dans la région d’Arkhangelsk.

Vue du quatrième réacteur de la centrale nucléaire Mayak, à Tchéliabinsk.

PHOTO DU MOIS

Depardieu en Raspoutine

Poutine mise sur le pragmatismeL’économiste Roland Nash juge que désormais, la politique étrangère russe se fonde essen-tiellement sur les intérêts éco-nomiques du pays, sans souci de suivisme ou d’opposition par rapport à l’Occident.

PHO

TOSH

OT/

VO

STO

CK-

PHO

TO

Porte de l’espaceLa Cité des étoiles ou « ville de

Gagarine », à proximité de

Moscou, ne figure sur aucune

carte. C’est là que sont formés

les astronautes internationaux.

VLADIMIR ROUVINSKIYLA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

SUITE EN PAGE 3

Ce supplément de huit pages est édité et publié par Rossiyskaya Gazeta (Russie), qui assume l’entière responsabilité de son contenu

Publié en coordination avec The Daily Telegraph, The Washington Post et d’autres grands quotidiens internationaux

L’ère de la féminisation et de la non-fiction

Akhmatova divise les mélomanes

La littérature russe connaît une renaissance et affiche de nouvelles tendances.

La presse se montre très critique envers la création, à l’Opéra Bastille, du spectacle de Bruno Mantovani.

P. 7

P. 8

Le 50 èmeanniversaire

du 1er vol humain dans l’espace

NASA

ITA

R-T

ASS

VOSTOCK-PHOTO LORI/LEGION MEDIA NIKOLAY KOROLEV

ELIS

A H

ABE

RER

L’économie en mutation

Page 2: La Russie d'Aujourd'hui

02LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR

COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA

DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO Politique & Société

Les traces indélébiles de la catastrophe

libérés par le réacteur endom-magé. Depuis, les habitants de ces régions s’exposent à travers la nourriture : champignons, baies et lait tiré des vaches qui pâturent librement sont porteurs de radionucléides. « 70 à 95 % des irradiations aujourd’hui sont internes, contre 5 à 30% exter-nes », précise Valery Kashparov, directeur de l’Institut ukrainien de radiologie agricole. « On n’a pas de diagnostic officiellement reconnu, mais les enfants des zones contaminées ont un systè-me immunitaire affaibli, présen-tent souvent des insuffisances de croissance », se désole Olga Vas-silenko, médecin au centre mé-dical français de Kiev, « Les en-fants de Tchernobyl ». Ivan Nevmerzhitski, médecin en chef de l’hôpital de Lipniki, dans la région de Jitomir, s’inquiète : « Les cas de cancers de l’esto-mac et du poumon ont augmen-té ces 25 dernières années ; une bronchite se soigne pendant des semaines, car les gens n’ont plus d’immunité. Selon moi, c’est di-rectement lié à l’irradiation par la nourriture ». Les produits ven-dus dans les supermarchés sont strictement contrôlés, mais pas ceux bradés à la sauvette par les paysans eux-mêmes, sur les bords de route. Ni ceux que les villageois consomment au quo-tidien. Selon des analyses me-nées par Greenpeace, dans cer-taines régions, comme celle de Rivnenska (nord-ouest du pays, à 250 km de la centrale), la concentration de césium 137 dans le lait peut monter jusqu’à 16 fois le niveau acceptable, tan-dis que 73% des pâturages sont contaminés.

Le directeur de la zone d’exclu-sion, Volodymyr Kholocha, se veut rassurant : « Restauré, le sarcophage peut encore servir 15 ans ». Mais il souligne qu’il man-que 600 millions d’euros sur le milliard et demi nécessaire à la modernisation et à l’entretien du site. Plus grave, les experts dénoncent la défi cience du projet retenu : « Le principal objectif d’un nou-vel abri était de permettre le dé-mantèlement du vieux sarcopha-ge et l’extraction de tous les combustibles nucléaires », expli-que Nikolay Karpan, ingénieur de la centrale depuis 1969 puis liquidateur des conséquences de l’accident de 1986 à 1989, actuel-lement directeur des program-mes d’expertise du Parti national de Tchernobyl. « Mais ce but a été totalement perdu de vue, et le projet actuel n’est qu’une co-quille vide, un hangar, qui ne pré-voit aucun mécanisme de démon-tage, pas plus qu’il ne permet de protéger les gens qui travailleront à l’intérieur. À l’heure actuelle, le principal danger réside dans la poussière radioactive qui pro-voque des irradiations internes lorsqu’elle est inhalée ». Un quart de siècle après la ca-tastrophe, c’est effectivement l’absorption d’éléments radioac-tifs qui menace les employés de la centrale, mais aussi les mil-liers de personnes vivant dans les zones contaminées. Au-delà de la « zone d’exclusion », éva-cuée au lendemain de l’accident, sur des centaines de kilomètres carrés toujours peuplés, les sols ont absorbé les rejets toxiques

Pripyat, à 2 km de la centrale, est devenue une ville fantôme.

SUITE DE LA PREMIÈRE PAGE

MACHA FOGELLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

La communauté juive, brimée

sous l’ère soviétique, observait

ses traditions dans la

clandestinité. Aujourd’hui, elle

tente de redonner vie à des

coutumes parfois oubliées.

Une Pâque juive aux multiples facettes Religion 20 ans après la Perestroïka, le judaïsme connaît un essor et une liberté sans précédent en Russie

« Mon grand-père fut exécuté en 1950 à Leningrad par l’État soviétique parce qu’il fabriquait de la matsah, cette galette plate que les juifs mangent à la place du pain levé pendant les huit jours de la fête de Pessah, la Pâque juive. Aujourd’hui, mon fi ls, qui porte le nom de mon grand-père, est chargé par le Président Dmitri Medvedev de cachériser la cuisine du Kremlin quand Benyamin Netanyahou, le Premier ministre israélien, est en visite à Moscou », se ré-jouit le rabbin Ytshak Kogan, qui dirige la principale syna-gogue Loubavitch de Moscou. Depuis la Perestroïka, la vie re-ligieuse juive renaît de ses cen-dres en Russie. L’immigration

Pendant les décennies soviéti-ques, les rites de la fête de Pes-sah comptaient parmi les rares à avoir été transmis chez les juifs russes. La famille se réu-nissait les deux premiers soirs de la fête, et l’on mangeait un peu de cette matsah interdite. « Je me rappelle que ma grand-mère savait encore lire l’hébreu et regardait quelque chose dans un livre, mais pour moi, cette fête était l’équivalent d’un sim-ple anniversaire », raconte Rita, la secrétaire du Rabbin Kogan. Ce dernier vient au contraire d’un milieu resté toujours très religieux, une rareté chez les juifs de Russie. « Ma famille ac-cueillait tous ceux qui le sou-haitaient pour entendre le récit en hébreu de la sortie d’Égyp-te ; à Pessah, la porte restait ouverte toute la nuit, ce qui, dans les années 1950, représen-tait encore un péril », relate en yiddish le rabbin à longue barbe blanche, coiffé du cha-peau noir traditionnel des Has-sidim Loubavitch.

La fête de Pessah est l’occasion pour les juifs russes de se réunir.

Aujourd’hui, la synagogue qu’il dirige, à quelques centaines de mètres du Kremlin, accueille 800 personnes pour les repas de la Pâque.La synagogue chorale de Mos-cou, celle qui était restée ac-tive pendant l’ère soviétique, invite elle aussi un millier de fi dèles pour ces festins. « Ce

n’est pas forcément une bonne chose », tempère Yitshak Lifshitz, responsable du ser-vice de nourriture cachère. « La fête de Pessah est fami-liale par essence, elle consti-tue un moment de transmis-sion essentiel entre les parents et les enfants, les premiers ex-pliquant aux derniers l’essen-ce et l’histoire du peuple juif.

De nos jours, de nombreuses personnes ont oublié comment la fêter, c’est pourquoi ils vien-nent ici ».Les communautés juives géor-giennes, caucasiennes ou azer-baïdjanaises, sont restées da-vantage pratiquantes. Abigail Iakobishvili, qui dirige la com-munauté des femmes géor-giennes, en est fi ère : « À Tbi-lissi, nous avons toujours eu de la matsah et de la viande cachère ». De nos jours, les synagogues de Moscou comptent presque toutes une salle réservée à la communauté géorgienne, et souvent une autre pour les juifs des montagnes. À Moscou, c’était une autre ambiance, se rappelle Rita : « Quand j’étais enfant, les gens se rendaient à la synagogue chorale, la seule en état de marche ; on faisait la queue dans un immense es-calier avec nos propres sacs de farine. Et tout en haut, des juifs fabriquaient la matsah, en silence ».

Nombreux sont ceux qui ont oublié comment fêter Pessah, c’est pourquoi ils vont à la synagogue

Une leçon de sécurité nucléaire supplémentaire

gumente Vladimir Slivyak, le co-directeur du mouvement éco-logique Écodéfense.L’énergie nucléaire est un « bu-siness » bien avantageux. Le prix d’un réacteur nucléaire at-teint 3,5 milliards d’euros, sans compter celui de la maintenan-ce et de la modernisation. Ro-satom a aujourd’hui 33 réac-

teurs en Russie et le plan pour 2020 prévoit la construction de 32 supplémentaires, basés sur la technologie des neutrons ra-pides. « Cette technologie est plus efficace et respectueuse de l’environnement puisqu’elle per-met d’utiliser le combustible nu-cléaire à plusieurs reprises afi n de réduire les fuites », explique

le président russe Dmitri Med-vedev, en ajoutant que « la Rus-sie doit construire de nouveaux réacteurs au lieu de moderni-ser ceux devenus obsolètes ».

Plus sûr que Fukushima ?Les experts n’estiment pas pour autant que l’énergie nucléaire soit sûre, même si la répétition des catastrophes de Tchernobyl ou de Fukushima paraît peu probable. « Même si les centra-les peuvent subir un séisme de magnitude 9 sur l’échelle de Richter alors qu’une magnitu-de 5 est le maximum envisagé en Russie, elles restent des ins-tallations dangereuses. Il exis-te toujours un risque d’impré-vu », affirme Iouri Vishnevsky, l’ex-directeur de l’Autorité fé-dérale de sûreté nucléaire et des radiations (Gosatomnadzor), in-tégrée dans Rosatom en 2005. Selon lui, la sécurité est la pré-occupation principale : « Il n’existe pas aujourd’hui en Rus-sie d’autorité de sûreté nucléai-re qui imposerait systématique-ment des réglementations dans ce domaine ». Vladimir Slivyak, qui joue le rôle d’écharde plantée dans le pied de l’industrie nucléaire russe depuis déjà bien long-temps, commente : « Rosatom fait ce qu’il veut. Il n’y a que quelques organisations environ-nementales qui surveillent ses activités. C’est une situation sans issue ». Igor Konyshev s’op-pose à ce point de vue : « Les environnementalistes ont tort. Il y a un service interne de contrôle, ainsi que Rostekhna-dzor, le Service fédéral de su-pervision écologique, technolo-gique et nucléaire ».Pourtant Vladimir Slivyak ne croit pas que les mesures de sé-curité de Rostekhnadzor soient fi ables. Selon lui, « onze réac-teurs sur les 33 en service sont vétustes et doivent être mis hors d’usage ». Et de relater qu’« un incident dans le réseau électri-que dans la région de Sverdlo-vsk en 2000 a privé d’alimen-tation la centrale nucléaire Mayak pour trois quarts d’heu-re. Le responsable de la sécu-rité de la centrale a affirmé que si cela avait duré cinq minutes de plus, nous aurions connu un autre Tchernobyl ».La société civile russe est consciente du danger, même si elle ne manifeste pas ouverte-ment contre le nucléaire. Une étude nationale d’Écodéfense faite en 2007 a montré que 70% des interrogés étaient contre le nucléaire et favorables aux énergies renouvelables.

Alors que le Japon se débat encore en pleine crise nucléaire, la Russie campe sur ses positions.

Des alternatives au nucléaire ?

SI LES RÉSERVES DE PÉTROLE

ET DE GAZ SE TARISSAIENT,

QUELLE ÉNERGIE ALTERNATIVE

POURRAIT PRENDRE LE RELAIS ?

SONDAGE

" Nous sommes favorables à l’abandon des nouveaux projets et pour la ferme-

ture progressive des centrales en activité. Notre position est très simple : aujourd’hui, chaque centrale est un risque a priori, une menace de répétition de la catastrophe qu’on observe actuel-lement au Japon ».

IL L’A DIT

Vladimir TchouprovDIRECTEUR DU DÉPARTEMENT ANTINUCLÉAIRE

DE GREENPEACE RUSSIE

" Dans chaque génération, chacun doit se considérer comme s’il était lui-même

sorti d’Égypte ».HAGGADDAH, (LIVRE DE PESSAH)

IL L’A DIT

Rabin Kogan

« Le pétrole et le gaz naturel deviennent de plus en plus coû-teux et les réserves seront un jour épuisées. Il est logique que la Russie veuille garder son rôle de fournisseur énergétique ma-jeur et même gagner le titre de leader du marché mondial », ar-

SUITE DE LA PREMIÈRE PAGE

FAUT-IL DÉVELOPPER ACTIVEMENT L’ÉNERGIE

ATOMIQUE, GARDER LE MÊME NIVEAU D’UTILI-

SATION, LA DIMINUER PROGRESSIVEMENT OU

L’ABANDONNER TOTALEMENT ?

de masse vers Israël et les États-Unis a retardé une re-naissance apparue avec le re-dressement de l’économie des années 2000. La capitale comp-te désormais une quinzaine de synagogues, contre deux à l’époque soviétique. Un chiffre à comparer avec la soixantai-ne de synagogues de Paris intra muros.

GETTY

IMA

GES/FO

TOB

AN

K

GET

TY IM

AG

ES/F

OTO

BA

NK

KOM

MER

SAN

T

Contenu multimédia surlarussiedaujourdhui.fr

Page 3: La Russie d'Aujourd'hui

03LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR

COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA

DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO Politique & Société

Natalia GevorkyanSPÉCIALEMENT POUR

LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Au début, j’enrageais. Je n’espionne pas par le trou de la serrure, tout de même ! Je filme

dans des lieux publics, dans la rue, au marché, à la brocante. Mais on m’ordonne d’effacer. Tout a commencé quand une chaîne de télévision russe m’a demandé d’illustrer mes pro-pos sur la vie parisienne à l’aide de vidéos filmées avec mon iPhone. Je n’ai jamais été pho-tographe, ni n’ai jamais tra-vaillé pour la télévision. Les premiers problèmes ont surgi au marché. Un vendeur haut en couleurs blaguait, al-paguait les acheteurs. J’ai al-lumé ma « caméra ». Subite-ment, il s’est assombri et m’a dit : « Non ! ». J’ai voulu lui ex-pliquer ce que je faisais. Il m’a écoutée patiemment avant de répondre : « Vous auriez pu de-mander ». Je me suis dit que c’était une particularité de son caractère. La deuxième fois, c’était lors d’une expo-vente de jeunes artistes. Je fi lmais une lampe échappant à toute des-cription verbale. Tout à coup, une dame a fait irruption et m’a intimé : « Effacez cela immédia-tement ! » J’ai avancé un argu-ment naïf : j’ai tellement envie de montrer cette merveille à nos spectateurs ! Elle a secoué la tête en vérifi ant que j’effaçais bien la vidéo, avant de lancer : « Vous auriez pu demander ». Je me suis posée dans un café pour réfl échir à ma malchance et aux limites de la sphère pri-vée. Mon regard s’est posé sur les pieds nus dans des tongs de mon voisin de table. Avec cela, il portait une veste en fourrure.

CES SACRÉS FRANÇAIS

Un espion derrière l’iPhoneJ’adore quand les Parisiens se dévêtissent subitement au pre-mier rayon de soleil, et peu im-porte que le haut jure avec le bas. Ils peuvent porter un t-shirt et des bottes fourrées, ou des tongs avec une fourrure. Ne cherche pas les ennuis, disait ma voix intérieure. Mais ma voix réelle articulait déjà :- Puis-je fi lmer vos pieds ?Il s’est servi du vin, a regardé ses pieds, puis m’a répondu : « Al-lez-y ! » Avant d’ajouter, lisant mes pensées : « Et le manteau aussi, si vous voulez ». L’expérience a donc réussi. En plus, c’était rigolo. - Ça ne me serait jamais venu à l’esprit de vous filmer sans autorisation, mais pourquoi m’a-t-on interdit de fi lmer une lampe dans une foire ?- Et qui sait si vous n’étiez pas en train de piquer le modèle ? m’a répondu le jeune homme. C’est vrai que le modèle était étonnant et complètement ori-ginal. Il y a un tas de choses aux-quelles je n’avais pas songé avant d’avoir pris en main une camé-ra. En fait, l’espace privé, c’est chacun de nous, et ce qui s’y rap-porte, où que nous soyons. Hier, à Moscou, j’ai croisé un caniche royal avec une tonsure féérique et j’ai demandé l’autorisation au propriétaire. L’animal a approu-vé en se levant sur ses deux pat-tes arrières. - D’où venez-vous ? m’a de-mandé le vieux monsieur.- Pourquoi pensez-vous que je ne suis pas d’ici ?- Parce que mon chien se fait photographier tout le temps, mais personne ne me demande l’autorisation.

Natalia Gevorkyan est corres-pondante à Paris du journal en ligne gazeta.ru.

François PerreaultSPÉCIALEMENT POUR

LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

sommeil pénible, Jean-Pierre est réveillé par la vie du wagon : déjà debout, le voisinage s’affaire aux obligations ferroviaires - une grand-mère coupe le saucisson, deux trentenaires sifflent une première bouteille de vodka, trois gamins courent dans le corridor et deux vieilles jacassent derriè-re une montagne de graines de tournesol. Peu familier des longues distan-ces en train, ce benêt de Jean-Pierre n’a rien préparé. Antici-pant un wagon-restaurant qui n’existe pas, il n’a pas pensé au ravitaillement. Tout au long du périple, il ne devra son salut qu’à la solidarité des voyageurs. L’oc-casion aussi de nouer le dialo-gue et de siffler des verres avec Micha et Sacha, qui font passer les heures avec de la vodka fre-latée, et la vodka frelatée, avec des bières chauffées au soleil.Les 38 heures semblent bien lon-gues à Jean-Pierre, de plus en plus ivre, gavé de hareng salé, et souffrant d’une migraine cara-binée en raison du manque d’air dans le wagon surchauffé.C’est dans un état semi-coma-teux qu’il sort, enfi n, à Sotchi, soutenu par Micha et Sacha qui semblent plus frais que notre héros. Eux aussi vont à Sotchi pour prendre du soleil, et coup de bol : comme Jean-Pierre, ils ont réservé une chambre au Sa-natorium №2 ! Le temps de dé-poser les bagages, les deux nou-veaux copains sont déjà au bord de la piscine et appellent Jean-Pierre pour qu’il descende : ils ont trouvé du hareng à l’épice-rie du coin, et une bouteille de vodka bien pleine pour fêter les vacances !

Pour les traditionnelles vacances du mois de mai, Jean-Pierre a choi-si la route des fl ots bleus

en optant pour un séjour sur la mer Noire : direction, Sotchi ! Un choix parfaitement logique : à Sotchi, on mange mal, les hôtels sont dégueulasses, le ser-vice est pourri, les plages sont crades et c’est beaucoup plus cher que la Turquie.Pour corser l’affaire, Jean-Pier-re a voulu s’y rendre en train. Manque de bol : il ne restait de place que dans le tortillard qui met 38 heures pour se rendre à destination, plutôt que l’ex-press qui n’en prend que 24.Arrivé en gare de Kourskaïa (départ : 4h31 du matin), il est d’abord harponné sur le quai par la cheftaine de son wagon, qui vérifie scrupuleusement passeport et billet. Ayant choi-si le tarif le moins cher, Jean-Pierre atterrit en troisième clas-se, un wagon sans compartiment où une soixantaine de person-nes ronfl ent déjà depuis le dé-part de Saint-Pétersbourg, dans des remugles de transpiration et d’oignons.À bord, Jean-Pierre parvient tant bien que mal à trouver sa couchette, non sans avoir au préalable écrasé une grand-mè-re et morfl é un coup de tatane de son voisin de couche, réveillé en sursaut par ce nouvel arri-vant. Incapable de trouver des draps dans le noir, notre cama-rade s’endort en sueur sur la couchette en skaï, après avoir jeté un dernier coup d’ œil à sa montre. Il reste 37 heures.Après quelques heures d’un

CES SACRÉS RUSSES

Solidarité ferroviaire

François Perreault est expatrié à Moscou depuis quatre ans.

2011 :

Sol de Phobos

La sonde spatiale est censée ap-porter des échantillons de terre depuis le satellite naturel de Mars Phobos. Date prévue du lance-ment : le 11 novembre 2011.

2011 :

Navigation Glonass

L’équivalent russe du GPS améri-cain et de l’européen Galileodevrait être disponible sur 25 satellites dès la fin 2011.

2015 :

Cosmodrome Vostotchny

La construction de la nouvelle gare spatiale à la frontière chinoi-se commencera en 2011. La pre-mière fusée sera lancée en 2015.

2030 :

Base lunaire

L’agence spatiale russe Roskosmos prévoit d’établir une station de recherche habitée sur la lune.

2040 :

Mission habitée

vers Mars

Le vol vers la pla-nète rouge durera environ 500 jours.

Avec le test « Mars 500 »,

Moscou s’y prépare déjà.

L’avenir

Le programme spatial russe

pour les 30 prochaines

années.

Astronautes de tous pays à l’école de la Cité des étoiles

ou deux une importante com-mission ‘‘ torture ’’ l’astronaute, lui pose des questions », sourit Polanski. « Aux États-Unis ce

système n’existe pas, tout est moins formel, on privilégie les exercices pratiques ». Rybkine rêve de transformer la ville en Mecque du tourisme,

Ayant traversé un immeuble de trois étages, nous pénétrons dans un immense hangar qui abrite des maquettes grandeur nature du vaisseau spatial Soyouz. « Ce sont des simulateurs, précise Oleg de la Cité, une équipe interna-tionale est en train de passer des examens dessus, deux Russes et un Américain ». À l’heure actuel-le, la Station Spatiale Interna-tionale (ISS) n’est accessible qu’en Soyouz. « C’est pour cela que le gros de la préparation et des entraînements se fait ici », dit le directeur du bureau local de la NASA, Marc Polanski.Ils sont une trentaine d’astro-nautes à s’entraîner au centre Gagarine, explique le maire de la ville Nikolaï Rybkine. Parmi eux, entre trois et cinq spécia-listes sont des étrangers, des Américains, Canadiens, Japonais, Allemands, mais aussi la qua-trième femme astronaute russe, Elena Sazonova. La préparation des cosmonautes russes dure entre trois et cinq ans contre six mois et un an pour les étrangers. Selon Polanski, les différences sont surtout culturelles. « Ici, on organise de grandes interroga-tions orales ; pendant une heure

d’attirer des investisseurs, de construire des hôtels, des cen-tres d’affaires et de divertisse-ment, de fonder un lycée Gaga-rine pour les futurs astronautes, de relier la capitale en train... Au premier abord, tout cela sem-ble irréalisable, d’autant plus que la municipalité conserve le sta-tut de « ville fermée », inacces-sible aux non-résidents sans autorisation spéciale. Mais le maire reste confi ant. C’est sur-tout grâce aux touristes que la ville a survécu après la chute de l’URSS. « Les cheikhs ou les Européens payaient des salaires à la ville entière », affirme-t-il.

SUITE DE LA PREMIÈRE PAGE

Le maire rêve de transformer la ville en Mecque du tourisme, attirer des investisseurs et construire des hôtels

MARIA TCHOBANOVLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Quatre ans après avoir effectué

le premier vol humain dans

l’espace, Youri Gagarine est

venu se détendre en France, à

l’invitation de l’inventeur du

pastis, Paul Ricard.

La tournée de Ricard pour les cosmonautes

Souvenirs Quand Gagarine bronzait sur la Côte d’Azur

Youri Gagarine a pu contempler les calanques à bord du petit avion sportif du fi ls de Paul Ri-card. Sur l’île de Bendor, les cos-

Gagarine sur la côte varoise.

Youri Gagarine aurait été invi-té sur l’île de Bendor par son propriétaire Paul Ricard, le cé-lèbre inventeur du pastis. Com-muniste convaincu, Paul Ricard avait les faveurs des autorités soviétiques, obtenant ainsi la vi-site privée des cosmonautes rus-ses sur la côte d’Azur.Le jeune Georges Klimoff fut in-tronisé interprète officiel à seu-lement vingt-deux ans. Fils d’un immigrant russe et vice-prési-dent du club des passionnés d’astronomie « Antarès », Geor-ges se souvient avec émotion des nombreuses fl eurs jetées par la foule excitée et admirative au passage, en cabriolet, des héros russes de l’espace.

Par une belle journée de juin 1965, un petit bateau accoste au port de St-Pierre des Embiez. À son bord, Youri Gagarine, le premier homme à avoir voyagé dans l’espace, et ses trois amis cosmonautes, Vladimir Koma-rov, Konstantin Feoktistov et Boris Egorov, venus faire du ski nautique depuis l’île voisine de Bendor.

monautes ont bien sûr goûté à la quiétude et la douceur des plages, ainsi qu’aux saveurs sub-tiles de la cuisine méditerra-néenne… Et ils furent bien sur-pris d’apprendre qu’une telle merveille insulaire puisse appar-tenir à un seul homme.Georges Klimoff se souvient de Gagarine comme du plus timi-de de la compagnie. Sobre et mo-déré, il répondait posément à toutes les questions du jeune in-terprète impatient et passionné par l’exploration spatiale. « Les réponses de Youri Gagarine res-taient vagues sur les projets fu-turs de son pays. Malgré la pru-dence des cosmonautes, il a été fait allusion à la création d’une future station spatiale perma-nente qui se réaliserait quelques années plus tard, et serait la cé-lèbre station MIR », raconte Georges, aujourd’hui ingénieur à la retraite, et qui, depuis cette rencontre historique, aime à se faire appeler Youri Klimoff.

OLYMPIADE SPATIALE

Finale du « Relais d’étoiles »L’Olympiade spatiale mondiale Re-lais d’étoiles a été lancée en dé-cembre 2010 par l’Agence fédéra-le russe Rossotrudnichestvo pour célébrer le 50ème anniversaire du premier vol spatial habité. La fi-nale a désigné comme vainqueurs vingt jeunes hommes et jeunes filles de différents pays (de Russie, d’Inde, d’Arménie, du Kazakhstan,

de France, de Belgique, de Litua-nie et d’Azerbaïdjan) qui concour-ront pour le grand prix. Le 20 avril, les finalistes défendront leurs projets créatifs devant un jury de spécialistes, comprenant des cos-monautes soviétiques. La remise des prix aux finalistes aura lieu le lendemain au siège de l’UNESCO. www.starchallenge.org

RIA NOVOSTI

SER

VIC

E PH

OTO

RIC

AR

D -

JEA

N M

INA

SSIA

N

Diaporama surlarussiedaujourdhui.fr

La gigantesque piscine où les

sorties dans l’espace sont si-

mulées.

Page 4: La Russie d'Aujourd'hui

04LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR

COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA

DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO Économie

VLADIMIR ROUVINSKYLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Un des projets les plus avancés

se situe sur le plateau de

Lagonaki, à quelques dizaines

de kilomètres de la mer Noire.

L’État prendra entièrement à sa

charge les investissements.

Le Caucase russe vise le tourisme haut de gamme

Investissements Le plateau de Lagonaki rêve de devenir le Courchevel oriental

Le meurtre de touristes russes en février dans la région de l’El-brouz n’a pas entamé la volon-té du Kremlin de développer le tourisme dans le Caucase du nord. Mais le drame a eu son effet sur les villégiateurs. Ori-ginaire de Moscou et skieur de-puis 15 ans, Sergueï Michtchen-

Epargné par la guerre et les attentats, le plateau de Lagonaki revêt un grand potentiel touristique.

L’objectif est de concurrencer les stations de ski alpines.

3RAISONS DE PARIER SUR LA RÉGION

1 La future station du pla-teau de Lagonaki devrait accueillir 20 000 à 25 000

touristes par jour d’ici à 2019. Sa fréquentation n’aurait donc rien à envier aux stations alpines.

2 Le gouvernement four-nit des garanties permet-tant de récupérer jusqu’à

70% des sommes investies en cas de force majeure, et envisage une exonération d’impôts de 10 ans sur le revenu et sur le patrimoine.

3 La région a déjà fait ses preuves comme centre d’attraction : les investis-

sements ont permis d’y faire pas-ser le flux touristique de 80 000 en 2007 à 240 000 en 2010.

ko déclare que l’assassinat de trois des ses compatriotes au pied de l’Elbrouz l’oblige à en-visager de renoncer à ses voya-ges dans la région. « Les mon-tagnes y sont parfaites, mais y aller avec sa famille, ça fait peur, c’est uniquement pour les ama-teurs de sensations extrê-mes ». Les autorités russes ont consi-déré le triple meurtre et le dy-namitage d’un téléphérique comme une tentative de torpiller leur ambitieux programme de développement du tourisme dans le Caucase du nord, avec lequel elles prévoient de relan-

cer l’économie de cette région sensible. Dans le cadre de ce program-me, on prévoit de créer cinq vas-tes stations de sports d’hiver, à l’aide d’investissements privés atteignant 11 milliards d’euros. L’une d’elles se situe sur le pla-teau de Lagonaki. D’une super-fi cie de 650 kilomètres carrés, le site est à 95% en Adyguée et à deux heures et demie de route de Krasnodar. Épargnée par la guerre et les attentats, l’Adyguée est la république caucasienne la plus tranquille. Les autorités d’Adyguée et du kraï de Kras-nodar, avec lequel la république partage le plateau, croient beau-coup au succès de la station. On estime qu’en 2019, elle accueille-ra entre 20 000 et 25 000 per-sonnes par jour et qu’elle sera du même niveau que les stations alpines. Bien que l’Adyguée ne possède pas de frontières communes avec les autres républiques nord-cau-

casiennes, les questions relati-ves à la sécurité sont souvent posées à ses dirigeants. « Nous sommes au milieu du kraï de Krasnodar. Si l’on peut investir là-bas, pourquoi pas ici ? », s’in-terroge le président de la répu-blique Aslan Tkhakouchinov. Actuellement, des négociations sont en cours sur le projet de la station de sports d’hiver de La-gonaki. L’ensemble des infras-tructures des stations nord-cau-casiennes seront fi nancées sur le budget fédéral. À cette fi n, on a créé en 2010 la société anonyme « Stations du Nord-Caucase » (KSK), dotée d’un budget de 1,5 milliard d’euros. Ces fonds ser-viront à construire et réparer les routes, lignes aériennes, et amé-nagements techniques. Tous les sites (hôtels, pistes de ski, res-taurants) sont censés être réali-sés par des investisseurs qui de-vraient débourser 9,67 milliards d’euros. Le directeur de KSK, Akhmed Bilalov, indique que le gouvernement fournit aux inves-tisseurs des garanties permettant en cas de force majeure de ré-cupérer jusqu’à 70% des som-mes investies. En outre, le gouvernement n’est pas opposé à l’idée de dispen-ser les investisseurs de l’impôt sur le revenu et le patrimoine pour 10 ans (la période néces-saire au retour sur investisse-ment), et à fournir des baux de 49 ans sur les terrains, a racon-té l’adjoint du président russe, Arkadi Dvorkovitch. Avec le soutien fi nancier de Mos-cou, la république développe ac-tivement le tourisme depuis cinq ans, en construisant routes et lignes aériennes, et en stimu-lant la construction d’hôtels et de bases touristiques. Un mil-liard de roubles (25 millions d’euros) a été dépensé pour ce faire. Ce qui a permis, selon le chef du comité du tourisme d’Adyguée Vladimir Petrov, de faire passer le fl ux de touristes de 80 000 en 2007 à 240 000 en 2010.

RACHEL MORARJEEBUSINESS NEW EUROPE

L’insatiable appétit de Pékin

pour les matières premières

comble les besoins

d’investissement dans les

provinces reculées de l’extrême

orient russe.

La Chine stimule la croissance sibérienne

Régions Jusqu’alors menaçant, le voisin se révèle opportun

Avec ses milliers de kilomètres de forêts inexploitées et sa toun-dra enneigée, la région ne pos-

Région autonome juive), inves-tissant au total trois milliards de dollars. Un chiffre que la pres-se russe a rapproché du million de dollars débloqué par Moscou pour ces mêmes régions en 2011. Le gouvernement russe a fait sa-voir qu’il souhaitait investir 100 milliards de dollars dans le dé-veloppement de l’extrême orient du pays au cours des cinq pro-chaines années ; il affirme que la Chine sera un partenaire clé dans la construction de routes, de chemins de fer et de ports. « La Chine n’a jamais été inté-ressée par l’acquisition de blocs de contrôle de compagnies rus-ses », commente Boris Krasno-jenov, analyste du secteur métal et mines de Renaissance Capi-tal. « Ce que veulent les Chinois, c’est garantir l’approvisionne-ment stable en matières premiè-res dont ils ont besoin, et construi-re des infrastructures pour les acheminer sur leur marché in-térieur. C’est le modèle de déve-loppement qu’ils appliquent par-tout ailleurs ». Svetlana Kostromitinova, spé-cialiste du secteur minier, pré-cise : « Nous utilisons des tra-vailleurs chinois pour développer nos mines. C’est gagnant-ga-gnant pour tout le monde ».

Les ouvriers chinois permettent au pays de développer ses mines.

sède que 6,7 millions d’habitants, soit à peine une personne par kilomètre carré. Un chiffre dé-risoire comparé aux 84 habitants par kilomètre carré dans la four-millante province du Heilon-gjiang, située de l’autre côté du fl euve Amour, frontière naturel-le entre la Chine et la Russie. Mais l’insuffisance démographi-que de la Sibérie et de l’extrême orient est compensée par son

abondance en matières premiè-res : veines de minerai de fer, métaux rares, or et charbon. Des biens nécessaires à la Chine pour approvisionner le moteur de sa croissance économique. Les in-vestisseurs chinois ont déjà mis en place 34 zones spéciales dans les principales régions de l’ex-trême orient (région de l’Amour, territoires du Primorié et de Khabarovsk, et Birobidjan - la

Milliards d’euros ont déjà été in-vestis par la Chine dans les ré-gions de l’extrême orient russe. Un chiffre qui représente exacte-ment trois fois le montant consa-cré par Moscou en 2011 au dé-veloppement de ces mêmes provinces (700 000 euros).

2,1CHIFFRE CLÉ

PAUL DUVERNETLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

On l’appelle sur place « le

chantier du siècle » : un

immense campus regroupant

toutes les universités de

Vladivostok prévu sur la petite

île Rousski, non loin du Japon.

Une île pour un super campus universitaire

BTP Des milliards pour développer l’Orient

Abonnez-vous gratuitement à notre e-paper mensuel !

www.larussiedaujourdhui.fr/inscription

ni chauffage, ni électricité. Avec 90 milliards [2,2 milliards d’euros], on peut construire ». L’infrastructure doit être ache-vée avant la fi n de cette année. Soit une centaine de bâtiments, des digues de granit, des routes, un immense pont et des pistes pour hélicoptères. Car au-delà des universités, c’est cinq mil-liards d’euros qu’il faudra inves-tir pour construire l’ensemble des équipements nécessaires à la tenue du sommet ATES. Beaucoup s’interrogent sur le fait que Crocus ait décroché un contrat aussi juteux alors que la société n’est active qu’à Moscou. « C’est vrai que la décision a pro-voqué des jalousies », admet un responsable de Crocus, sous cou-vert d’anonymat. « On nous a fait confi ance davantage qu’aux sociétés locales parce qu’on nous connaît bien à Moscou ». Alaga-rov explique que vu les délais extrêmement courts, l’organisa-tion d’un appel d’offre n’était pas possible. Et même sans appel d’offre, une telle tâche en à peine un an semble irréalisable...

Foin de Fukushima et des ru-meurs catastrophistes sur la ra-dioactivité circulant dans l’Ex-trême-Orient russe ! Le groupe de BTP moscovite Crocus Inter-national a dévoilé début avril un projet pharaonique dont l’inau-guration doit coïncider avec le sommet ATES (21 pays de la zone Pacifi que) qui se déroulera l’an prochain, a priori lui aussi sur l’île Rousski, située en face de Vladivostok. L’ensemble sera fi nancé sur le budget russe. « La somme allouée est connue : 60 milliards de rou-bles [1,5 milliards d’euros] », a révélé Aras Alagarov, PDG de Crocus International. Et de pré-ciser : « J’y ai rajouté 50% car il n’y a rien sur l’île : ni routes, ni eau, ni gaz, ni canalisations,

Diaporama surlarussiedaujourdhui.fr

LEGIO

N-M

EDIA

REU

TERS/V

OSTO

CK-PH

OTO

LE SERV

ICE D

E PRESSE D

U PR

ÉSIDEN

T D’A

DYG

UÉE

Page 5: La Russie d'Aujourd'hui

05LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR

COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA

DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO Économie

EN BREF

Après avoir introduit sur le marché russe ses hôtels de mar-que Sofi tel, Novotel et Ibis, le groupe français Accor pourrait y lancer sa marque Formule 1. Bien que la chaîne démente tout projet, elle a déposé auprès de RosPatent (l’organisme qui pro-tège les marques commercia-les) une demande de droits ex-clusifs sur la marque « Hôtels Formule 1 », et ce jusqu’en 2020. Accor mène une politique d’ex-pansion rapide de sa chaîne d’entrée de gamme dans toute l’Europe, alors que le marché russe est justement très sous-développé dans cette catégorie d’hôtels accessibles au plus grand nombre. Aucune chaîne étrangère n’est présente sur ce segment en Russie.

Hôtels Formule 1 :

rumeurs de lan-

cement en Russie

Les médecins russes se mobilisent face aux défis du monde

contemporain.

Le leader mondial de la sépa-ration de gaz investit 40 mil-lions d’euros dans une nouvelle usine en association avec le si-dérurgiste russe Severstal (dont il est déjà le partenaire dans une co-entreprise à Tcherepo-vets). Il s’agit d’un nouveau complexe sidérurgique situé dans le bassin de la Volga (ville de Balakovo). La capacité de l’usine est de 300 tonnes par jour. La production devrait dé-marrer dès 2012. Air Liquide ne se contentera pas d’assurer des livraisons à Severstal mais alimentera également d’autres clients industriels des environs de Samara et de Saratov.

Air Liquide fran-

chit la Volga

Propos recueillis parBen Aris

gouvernement pourrait renflouer

l’économie tout entière. Mais la

Russie a connu l’une des pires ré-

cessions. Quels ont été au final les

principaux effets de la crise ?

Regardez : il n’y a pas eu de ruée vers les banques, pas de banque-routes majeures. Il y a une confi ance dans le secteur bancaire et le rouble que nous n’avions pas précédemment. Nous avons besoin de changer la structure de l’économie et de ne pas re-faire les mêmes erreurs. Main-tenant, après la crise, les gens commencent à comprendre, de mieux en mieux, que nous ne pouvons compter sur notre seul marché. Si cela avait été une crise locale, nous aurions eu assez de fonds pour la gérer.

ENTRETIEN

ARKADI DVORKOVITCH

« Nous ne pouvons compter sur notre seul marché »ARKADI DVORKOVITCH EST CONSEILLER ÉCONOMIQUE

SPÉCIAL AUPRÈS DU PRÉSIDENT DMITRI MEDVEDEV

La Russie est-elle prête à affron

ter le marché mondial de l’auto-

mobile, dans l’optique d’une

adhésion à l’Organisation mon-

diale du commerce (OMC) et d’une

baisse des tarifs à l’importation ?

Nous ne sommes pas tout à fait prêts à affronter les producteurs mondiaux, mais l’OMC a mis en place une période de transition de sept ans, et c’est assez pour se préparer. Les grands construc-teurs comme Avtovaz [marque Lada] et GAZ ne sont pas en-core compétitifs, si bien que nous avons besoin de ces sept années. Nous avons aussi besoin d’investisseurs stratégiques. Nous espérons attirer des constructeurs, et pas seulement pour assembler des voitures.

Le gouvernement semble suivre

un plan similaire pour l’automo-

bile à celui retenu pour le secteur

pharmaceutique.

La situation y est un peu dif-férente. Il y a une forte deman-de domestique de l’État et la taille du marché peut à elle seule attirer des investissements. S’il y a un certain degré de cer-titude (concernant la croissan-ce de la demande), alors les compagnies internationales ins-talleront leur production en

Russie sans que l’on ait besoin d’augmenter les tarifs.

Les investisseurs étrangers

reprochent à l’État russe de jouer

un rôle trop important dans

l’économie.

Nous avons déjà décidé de pri-vatiser, c’est juste une question de calendrier. Sberbank est un cas à part et il nous faut être prudents car la composante so-ciale est ici importante [une ma-jorité de Russes y conservant leurs économies, ndlr]. Gazprom, les chemins de fer, le réseau électrique et le monopole des oléoducs sont égale-ment des cas spéciaux – mais le reste, comme la banque VTB, n’exige pas de participation de l’État. Or, le marché ne pourra en avaler qu’une quantité limi-tée, nous ne pouvons pas tout vendre d’un coup.

Il y a un an, des articles d’opinion

ont appelé au retrait du « R » dans

l’acronyme BRIC. Pensez-vous

que cela soit justifié ?

La Chine et l’Inde sont beau-coup plus vastes que la Russie. C’est un point important pour les investisseurs. Elles totalisent 2,5 milliards de personnes, contre 142 millions en Russie.

Mieux vaut comparer la Russie au Brésil, où la taille de la po-pulation et les niveaux techno-logiques sont similaires. Mais les attentes pour la Russie sont beaucoup plus élevées [que cel-les pour le Brésil], dans la me-sure où nous sommes traités comme un pays européen et que nous devons atteindre le même niveau de confort pour les in-vestisseurs étrangers.

Le plus gros reproche fait à la Rus-

sie concerne l’étendue de la cor-

ruption. Y-a-t-il des progrès dans

ce domaine ?

La campagne anti-corruption fonctionne et la tendance à l’amélioration est là. Mais cela ne se fera pas en un an. Les pots-de-vin augmentent, mais c’est en partie dû au fait que ceux qui soutirent des pots-de-vin com-prennent que cela ne durera pas très longtemps. Ils ne veulent pas rater le dernier train. C’est un problème systémique et non pas juste le fait d’une bande de cri-minels ; la corruption existe à tous les niveaux et tient à la par-ticipation de l’État dans l’éco-nomie. Si on la réduit, le poten-tiel de corruption chutera. La corruption est liée au traitement préférentiel dont les entreprises d’État bénéfi cient.

Avec plus de 600 milliards de dol-

lars de devises en réserves injec-

tés dans la crise, il a semblé que le

ÂGE : 39 ANS

FORMATION : ÉCONOMISTE

CURSUS : Diplômé de l’Université d’État de Moscou (cybernétique économique) et de la Nouvelle École d’Économie à Moscou, Mas-ter d’économie (Duke University).

FONCTIONS : Conseiller du Pré-sident Medvedev, représentant et sherpa de la délégation russe auprès du G8.

CURRICULUM VITAE

ANNA PERETOLTCHINAVEDOMOSTI

ERDF, filiale d’Électricité de

France, gèrera le réseau de

Tomsk. Il s’agit d’un projet

pilote qui pourrait attirer

d’autres opérateurs étrangers.

EDF étend jusqu’en Sibérie ses lignes de savoir-faire

Électricité Le réseau de distribution russe en quête d’expertise étrangère

Pour l’instant, les parties ont dé-terminé les principales condi-tions selon lesquelles ERDF as-surera la gestion, notamment les objectifs en termes d’améliora-tion de l’état économique, fi nan-cier et technique de la compa-gnie, le perfectionnement des équipements de sécurité, ainsi que la durée de gestion et le prin-cipe de rémunération d’ERDF. Mme Bellon n’a pas dévoilé les détails de l’accord. On sait seu-lement que le rapprochement,

La holding MRSK (réseau à basse tension de Russie) et ERDF, fi liale Distribution d’EDF, sont parvenues à un accord sur les conditions de transfert de la ges-tion de la société de distribution d’électricité de Tomsk (TRK) à la compagnie française. Selon la présidente de son di-rectoire Michèle Bellon, ERDF va créer une fi liale russe et pré-voit d’obtenir la gestion du ré-seau de Tomsk d’ici à trois mois. Dans ce but, il reste nécessaire d’obtenir le feu vert du gouver-nement russe (MRSK appartient à l’État à hauteur de 53%).

qui fera d’ERDF la société de gestion de TRK, ne se traduira pas par un rachat d’actions. Pour l’instant, ERDF ne prévoit pas d’entrer dans le capital de TRK, mais elle envisage à terme de se pencher sur cette question.TRK, qui assure 0,8% de la dis-tribution d’électricité du pays, possède 15,9 millions de km de lignes à 35-110 kW dans la ré-gion de Tomsk où elle compte environ 200 000 clients ; l’état de ses lignes est légèrement

PAUL DUVERNETLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Le Premier ministre russe s’est

emporté contre l’Organisation

mondiale du commerce,

refusant tout effort

supplémentaire tant que la

Russie n’y sera pas intégrée.

Admission à l’OMC : Poutine s’impatiente

Commerce Les négociations s’éternisent

la Russie ne peut augmenter les taxes à l’importation. Ce mouvement d’humeur sur-vient alors que le Kremlin ta-blait sur un aboutissement des pourparlers ce printemps. Il pourrait au contraire entraîner un nouveau report de l’admis-sion, car nombre d’acteurs en Russie considèrent avec scepti-cisme l’OMC. Peu concurrentiel-le, l’industrie manufacturière russe voit dans l’organisation une menace. De leur côté, les expor-tateurs de matières premières craignent que les mesures anti-dumping liées à l’adhésion ne leur offrent pas une meilleure protection. Quant au gouverne-ment, il sera forcé d’adopter une bien plus transparence concer-nant les commandes de l’État. La Russie, seule économie ma-jeure hors de l’organisation, tente sans succès d’intégrer l’OMC de-puis 18 ans.

La lenteur des négociations pour l’entrée de la Russie au sein de l’OMC a mis à l’épreuve la pa-tience de M. Poutine : « C’est un ordre : n’honorez aucun engage-ment tant que nous ne serons pas membres à part entière [de l’OMC] », a lancé le chef du gou-vernement à ses ministres le 8 avril dernier. Il s’adressait en par-ticulier au vice-ministre de l’éco-nomie Andreï Klepatch, qui se plaignait de la concurrence des équipements chinois au détri-ment du secteur russe de la construction de machines : « les mains liées » par les négociations,

meilleur que le niveau national (60% d’usure contre 69% pour la moyenne russe) et la compa-gnie n’a jusqu’à présent connu aucun problème financier sé-rieux. Selon le directeur de la holding MRSK Nikolaï Chvets, ERDF connaît bien les points faibles du système de distribution local, ses experts ayant étudié pendant un an, sur place, le marché russe de l’énergie. Un marché sur le-quel EDF lorgne depuis long-temps. Au départ, le français comptait acquérir des actifs de SEU, l’ancien monopole de l’élec-tricité russe, mais le projet n’a pas abouti. En revanche, la fi -liale italienne d’EDF Fenice a créé, avec Inter RAO, la compa-gnie Interenergoeffekt, détenue à parts égales, spécialisée dans l’efficacité énergétique. En juin 2010, EDF a signé avec Rosatom un accord de coopération dans le domaine de la recherche et du développement. Le français Dal-kia a, quant à lui, créé avec TGK-4 une co-entreprise pour la production, le transport et la distribution de chaleur.

121 700kmLongueur totale des li-gnes haute tension en 201O, contre 118 000 km en 2008.

6%Part des investisseurs étrangers dans la gé-nération d’électricité en Russie.

4,5 milliardsValorisation en euros de MRSK à la mi-avril. Bénéfice net : 540 millions en 2009.

EN CHIFFRES

[email protected] larussiedaujourdhui.fr/lettres

RIA

NO

VO

STI

PHO

TOX

PRES

S

WWW.RU.AIRLIQUIDE.COM

Page 6: La Russie d'Aujourd'hui

06LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR

COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA

DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO Opinions

POUTINE MISE SUR LE PRAGMATISME

Roland Nash THE MOSCOW TIMES

Le rapprochement qu’a fait le Premier ministre Vla-dimir Poutine entre l’opé-ration militaire de la coa-

lition en Lybie et les croisades du Moyen-Age a été considéré par certains comme le dernier exemple de l’opportunisme russe. Il pourrait paraître cynique d’at-taquer ainsi une coalition qui a voulu soigner son image en po-sant comme but premier de l’in-tervention la protection de la po-pulation civile contre un dictateur. La prise de position semble d’autant plus hypocrite, que le Kremlin, membre perma-nent du Conseil de sécurité des Nations Unies, a apporté son sou-tien à l’opération en Libye en s’abstenant lors du vote.Les critiques n’ont pas vraiment compris ce qu’il se passait. Pou-tine ne s’est pas démarqué des pays occidentaux parce qu’il sou-tient Mouammar Kadhafi ou qu’il trouve amusant de titiller les États-Unis. Au contraire, ses propos refl ètent un pragmatis-me basé sur des intérêts écono-miques bien compris. Après s’être comparée à l’Occi-dent pendant deux décennies, la Russie a enfi n trouvé son propre statut sur la scène internationa-le. Car l’un des principaux pro-blèmes auquel elle s’est vue confrontée depuis l’effondrement soviétique, c’est qu’elle ne par-venait à se classer dans aucune des catégories institutionnelles ou géopolitiques traditionnelles. Elle a connu la défaite en tant que superpuissance, elle est le pays BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) ayant la croissance la plus faible, l’intrus du G8 et le mouton noir de l’Europe. Quel-le que soit la catégorie, elle était perçue au mieux comme un pays à la traîne, au pire comme un collectionneur d’échecs. La politique étrangère de ces der-nières années permet de sortir de l’ornière. L’amélioration éco-

aujourd’hui moins de 4% du commerce extérieur russe. C’est l’Asie et le golfe Persique qui dé-terminent les prix des principa-les exportations russes. L’efficacité et la compétitivité sont loin d’être le point fort de la Rus-sie. Mais une fois la politique et l’économie associées, sa position apparaît considérablement ren-forcée. Le pays mêle les accords commerciaux et la politique au niveau domestique comme à l’in-ternational. Cette approche est conforme à celle de nombreux pays, où les limites entre État et secteur privé sont fl oues. C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre Poutine. La Russie n’est jamais allée très loin en se défi nissant comme pro- ou anti-occidentale. Elle se veut simple-ment plus pragmatique. Cela pourrait paraître cynique en Occident, mais cette tendance re-fl ète l’idée que se fait Moscou de l’évolution de la situation mon-diale.

nomique et une période de rela-tive stabilité à l’intérieur du pays ont permis de générer une nou-velle stratégie nationale et étran-gère. Cette stratégie est compo-sée de plusieurs éléments. Le premier, c’est une règle d’or : ne pas se faire d’ennemis, ou du moins, en avoir le moins possi-ble. La Russie bâtit des relations internationales à une très gran-de échelle. L’amélioration du cli-mat politique avec les États-Unis et l’Europe fait les gros titres de la presse. Les traités sur la ré-duction des armes nucléaires, une meilleure coopération avec les pays occidentaux sur l’Iran, des progrès dans les négociations concernant l’entrée dans l’Orga-nisation Mondiale du Commer-ce, l’approvisionnement stable

en gaz de l’Europe et une abs-tention lors du vote de l’ONU pour éviter une confrontation di-recte : autant d’améliorations si-gnificatives dans les relations entre l’Occident et la Russie. L’établissement de liens forts avec les pays émergents est éga-lement très important. La Rus-sie développe ses relations avec les pays d’Asie, d’Afrique, d’Amé-rique du Sud et du Moyen-Orient. Les pays émergents sont une source importante d’investisse-ments en Russie. Autre élément tout aussi consi-dérable : les grandes entreprises russes sont encouragées à se ma-nifester sur la scène internatio-nale, notamment en Inde, au Ve-nezuela, au Brésil, dans les États du golfe Persique, en Afrique sub-saharienne et tout particu-lièrement en Chine. En 2010, la Chine est devenue le premier partenaire commercial de la Russie devant l’Allemagne, et c’était avant le lancement of-fi ciel du premier oléoduc depuis la Sibérie orientale. Il convient de comparer ce partenariat avec les États-Unis, qui représentent

Roland Nash est conseiller prin-cipal en investissement chez Verno Capital.

La Russie n’a jamais rencontré beaucoup de succès en se définissant comme pro- ou anti-occidentale

Rouslan

PoukhovTHE MOSCOW TIMES

CE SUPPLÉMENT DE HUIT PAGES EST ÉDITÉ ET PUBLIÉ PAR ROSSIYSKAYA GAZETA (RUSSIE), QUI ASSUME L’ENTIÈRE RESPONSABILITÉ DU CONTENU. SITE INTERNET WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR EMAIL [email protected] TÉL. +7 (495) 775 3114 FAX +7 (495) 9889213 ADRESSE 24 / 4 RUE PRAVDY, ÉTAGE 12, MOSCOU 125 993, RUSSIE. EVGENY ABOV : DIRECTEUR DE LA PUBLICATION, JEAN-LOUIS TURLIN : DIRECTEUR DÉLÉGUÉ, MARIA AFONINA : RÉDACTRICE EN CHEF, EMMANUEL GRYNSZPAN : RÉDACTEUR EN CHEF ADJOINT, DIMITRI DE KOCHKO : CONSEILLER DE LA RÉDACTION, MILLA DOMOGATSKAYA : RESPONSABLE DE L’ÉDITION (VERSION PAPIER), ANDREI ZAYTSEV: SERVICE PHOTO. JULIA GOLIKOVA : DIRECTRICE DE PUBLICITE & RP ([email protected]) OU EILEEN LE MUET ([email protected]). MARIA TCHOBANOV : REPRÉSENTANTE À PARIS ([email protected], 06 60 70 11 03). TRADUCTEURS : VERONIKA DORMAN, CHLOÉ VALETTE.© COPYRIGHT 2011, ZAO ‘ROSSIYSKAYA GAZETA’. TOUS DROITS RÉSERVÉS.ALEXANDRE GORBENKO : PRÉSIDENT DU CONSEIL DE DIRECTION, PAVEL NEGOITSA : DIRECTEUR GÉNÉRAL, VLADISLAV FRONIN : DIRECTEUR DES RÉDACTIONS. TOUTE REPRODUCTION OU DISTRIBUTION DES PASSAGES DE L’OEUVRE, SAUF À USAGE PERSONNEL, EST INTERDITE SANS CONSENTEMENT PAR ÉCRIT DE ROSSIYSKAYA GAZETA. ADRESSEZ VOS REQUÊTES À [email protected] OU PAR TÉLÉPHONE AU +7 (495) 775 3114. LE COURRIER DES LECTEURS, LES TEXTES OU DESSINS DES RUBRIQUES “OPINION” OU “COMMENTAIRES” RELÈVENT DE LA RESPONSABILITÉ DES AUTEURS OU DES ARTISTES. LES LETTRES DESTINÉES À ÊTRE PUBLIÉES DOIVENT ÊTRE ENVOYÉES PAR ÉMAIL À [email protected] OU PAR FAX (+7 (495) 775 3114). LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI N’EST PAS RESPONSABLE DES TEXTES ET DES PHOTOS ENVOYÉS.

PARTENAIRES MÉDIA

LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI ENTEND OFFRIR DES INFORMATIONS NEUTRES ET FIABLES POUR UNE MEILLEURE CONNAISSANCE DE LA RUSSIE.

DIVISIONS DANS L’ARMÉE

tère de la Défense a passé des commandes importantes pour des séries d’armes classiques, notam-ment 130 nouveaux avions de combat et plus de 100 hélicoptè-res. La Marine a obtenu des en-gagements sans précédent. Le mi-nistère de la Défense prévoit de passer des contrats d’une valeur globale de 670 milliards de dol-lars au cours des dix prochaines années pour renouveler le parc militaire. Le matériel porte sur huit sous-marins nucléaires à missiles balistiques de classe Borei, 10 missiles de brigade Is-kander, 600 nouveaux avions, 1000 hélicoptères, 28 bataillons du dernier système de missiles

anti-aériens S-400 et 100 navi-res de guerre. Le ministre de la Défense, Anatoli Serdioukov, hé-site pourtant à assumer la res-ponsabilité de la réorganisation de l’industrie militaire. Des que-relles ont éclaté concernant les défauts des systèmes d’armes rus-ses, se traduisant par une ten-dance du pouvoir à acheter des armes à l’étranger, comme ce fut le cas pour le porte-hélicoptères français Mistral. Le complexe militaro-industriel russe est désormais divisé au ni-veau de ses deux éléments consti-tutifs. Ceux-ci sont à couteaux tirés, comme au temps de la Guerre Froide. Normalement, le travail de coordination entre l’ar-mée et l’industrie d’armement doit être effectué par une com-mission militaro-industrielle di-rigée par le vice-premier minis-tre Sergueï Ivanov. Mais cette commission n’a jamais obtenu les pouvoirs nécessaires et n’est donc pas en mesure de remplir sa fonction principale, à savoir le contrôle de la réalisation des commandes militaires. Le minis-tère de la Défense et les fournis-seurs doivent trouver un nouveau mode de fonctionnement, ce qui ne sera possible que si le gou-vernement apprend à gérer effi-cacement les ministères concer-nés et nomme des responsables plus compétents pour supervi-ser tout le secteur.

secteur de la défense s’est prin-cipalement orienté vers le mar-ché de l’exportation, devenant leader mondial dans de nombreux domaines. Une grande partie des projets de recherche et de déve-loppement est d’ailleurs menée pour des commandes étrangères, ce qui est dû au fait qu’il n’y avait quasiment pas de commandes ve-nant de l’armée russe durant les années 90. Ce n’est qu’en 2007 que les commandes nationales ont dépassé celles destinées à l’ex-portation. La piètre performance de l’armée russe durant la guer-re russo-géorgienne d’août 2008 fut aussi un déclic. Au cours des deux dernières années, le minis-

Le débat autour de l’effi-cacité de la défense russe s’amplifi e. La polémique de ces dernières années a

enflé suite aux propos d’Alexandre Postnikov, commandant en chef de l’armée de Terre, qui a critiqué à la fin du mois de mars la qualité du char russe ul-tramoderne T-90S. En le com-parant au char allemand Leo-pard, de meilleure qualité et moins cher que le T-90, Postnikov a clairement voulu faire pression sur les fournisseurs de l’armée pour qu’ils améliorent leur qua-lité et leur productivité.Peu de temps après, c’est Dmitri Medvedev qui s’est fâché contre les responsables de l’industrie de la défense, parce qu’ils n’honorent pas correctement les commandes de l’armée. Medvedev a concré-tisé ses propos en limogeant le pré-sident de la seule entreprise russe produisant des submersibles nu-cléaires. Des interventions prési-dentielles aussi radicales sont d’autant plus notables que l’in-dustrie de la défense a toujours été considérée comme le pré carré de Vladimir Poutine. Au cours des 15 premières an-nées de l’ère post-soviétique, le

Une majorité de Russes perçoi-vent négativement l’augmentation des prix du pétrole, en dépit de l’apport massif de devises pour le budget de l’État. Ils estiment que les revenus supplémentaires en-gendrés par la hausse ne profi-teront pas à la population mais seront accaparés par les hauts fonctionnaires et les oligarques qui se les répartiront, tandis que les prix des biens et services subi-ront, eux, une forte inflation.

Pétrole cher : pas de quoi se réjouirCONSIDÉREZ-VOUS QUE LES PRIX ACTUELLEMENT ÉLEVÉS DU PÉTROLE SONT

FAVORABLES OU DÉFAVORABLES À LA RUSSIE, PAYS PRODUCTEUR ?

SONDAGE

Rouslan Poukhov est directeur du Centre d’analyse stratégique et technologique.

Préparé parVeronika Dorman

LU DANS LA PRESSE

QUI ORGANISE LA TERREUR AU BÉLARUS ?

Un attentat dans le métro de Minsk a fait 12 morts et 150 blessés le 11 avril. L’énigme s’épaissit autour des commanditaires et de leurs motifs, alors que les autorités affirment avoir découvert les exécutants.

FRÈRES DE SANG

Egor MaïkineMOSKOVSKIÏ KOMSOMOLETS

LA GUERRE DES MÉDIAS

ÉditorialGAZETA.RU

TOUR DE VIS

Konstantin EggertKOMMERSANT

Le mythe du « paradis socia-liste » calme et sécurisé s’est définitivement écroulé. Après ce terrible épisode, quelque chose doit immanquablement changer au Bélarus. Le premier à avoir désigné les coupables

L’une des conséquences de l’at-tentat de Minsk est la « guerre médiatique » que les autori-tés sont prêtes à mener par la propagande et la répression. Le régime de Loukachenko a utilisé une méthode adminis-

La veille de l’explosion, les Bié-lorusses prenaient d’assaut les bureaux de change dans l’at-tente d’une dévaluation du rou-ble local et d’une crise éco-nomique inévitable. Ajoutez à cela la fuite réussie en Occident

potentiels est le Président Louka-chenko lui-même. « Nous avons

reçu ce ‘‘cadeau’’ de l’extérieur », a-t-il déclaré, sans préciser d’où vient l’agression. La géographie est vaste, de Moscou à Washing-ton. Une autre version, celle de l’attentat organisé par l’opposition biélorusse, est peu crédible. Pres-que tous ses leaders sont en assi-gnation à résidence ou en déten-tion provisoire. Surtout, elle [...] n’abrite pas d’extrémistes ni de chefs de bande. Ses responsables ne sont pas prêts à tout, même pour le pouvoir.

trative éprouvée pour régler la si-tuation : il a menacé les médias et commencé à interpeller les « col-

porteurs de rumeurs provocatri-

ces dans les réseaux sociaux et les

forums en ligne ». Cette solution simple aurait pu fonctionner dans les années de stabilité, quand les rumeurs s’éteignaient d’elles-mê-mes. Mais la transparence est telle aujourd’hui que la dissimulation d’une information n’est possible qu’accompagnée de mesures po-licières violentes, que le régime biélorusse, malgré son autoritaris-me, n’a pas utilisées à ce jour.

de certains opposants politiques et l’isolation croissante d’un ré-gime dont même Moscou ne veut plus entendre parler. Les révolu-tions arabes n’ont pas arrangé les affaires de Loukachenko : elles ont rappelé qu’il existe une dernière dictature en Europe. Lentement mais sûrement, le président tombe en disgrâce. Mais le terrible atten-tat détourne l’attention des pro-blèmes économiques et lui donne l’occasion d’accuser l’opposition et les journalistes indépendants, pro-céder à des arrestations et intro-duire la censure sur Internet.

LE COURRIER DES LECTEURS, LES OPINIONS OU DESSINS DE LA RUBRIQUE “OPINIONS” PUBLIÉS DANS CE SUPPLÉMENT

REPRÉSENTENT DIVERS POINTS DE VUE ET NE REFLÈTENT PAS NÉCESSAIREMENT LA POSITION DE LA RÉDACTION DE LA RUSSIE

D’AUJOURD’HUI OU DE ROSSIYSKAYA GAZETA. MERCI D’ENVOYER VOS COMMENTAIRES PAR COURRIEL :

[email protected]

NIY

AZ

KA

RIM

DM

ITRY

FIV

IN

Le ministre de la Défense, Anatoli Serdioukov, hésite pourtant à

assumer la responsabilité de la réorganisation de l’industrie militaire.

Page 7: La Russie d'Aujourd'hui

07LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR

COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA

DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO Culture

ELENACHIZHOVA

NÉE EN 1957

ŒUVRES : LE TEMPS DES FEMMES , LE SANG-MÊLÉ, LE CRIMINEL.

VIKTORPELEVINE

NÉ EN 1962

ŒUVRES : GÉNÉRATION P, LE LIVRE SACRÉ DU LOUP-GAROU, OMON-RA.

EVGUENI GRICHKOVETS

NÉ EN 1967

ŒUVRES : LA CHEMISE, LES RIVIÈRES, L’HIVER, COMMENT J’AI MANGÉ DU CHIEN.

VLADIMIRSOROKINE

NÉ EN 1955

ŒUVRES : LE LARD BLEU, LA JOURNÉE D’UN OPRICH-NIK, LA GLACE, LA VOIE DE BRO.

ALEXEI IVANOV

NÉ EN 1969

ŒUVRES : LE COEUR DE PARME, LE GÉOGRAPHE A BU SON GLOBE.

LUDMILAOULITSKAÏA

NÉE EN 1943

ŒUVRES : DANIEL STEIN INTERPRÈTE, SONIECHKA, SINCÈREMENT VÔTRE, CHOU-RIK.

LUDDISTE : romancier, dramaturge, c’est aussi un blogger célèbre, bien qu’il déclare savoir à peine comment allumer son PC.

RÉVOLTÉ : auteur engagé dans ses livres et dans la vie. Ses publications font régu-lièrement grincer des dents les autorités.

SURVIVANTE : économiste de formation, elle s’est lancée dans l’écriture en 1996 après avoir réchappé d’un incendie.

ÉSOTÉRIQUE : l’œuvre de cet adepte des cultures orientales et du bouddhisme est marquée d’absurde et d’ésotérisme.

HOMME AU FOYER : écrivain russe parmi les plus en vue, il n’a, à l’image de Pou-chkine, jamais quitté le sol national.

CLANDESTINE : la généticienne a per-du sa chaire en 1970 après avoir prêté sa marchine à écrire au Samizdat.

Les grandes plumes du roman contemporain

PAVEL BASINSKIROSSIYSKAYA GAZETA

Les années 2000 ont apporté

de profonds changements dans

l’édition. Les lecteurs sont

revenus à la littérature de

qualité et nombreux sont les

jeunes auteurs à s’être révélés.

L’ère de la féminisation et de la biographie

Littérature Décryptage des nouvelles tendances de la prose russe des « années zéro »

Oural natal, qu’il surnomme « la colonne vertébrale » de la Rus-sie. Dans son merveilleux roman Les Eltyshev, Roman Sentchine raconte l’agonie d’une famille russe ordinaire, oppressée par les nouvelles conditions économi-ques. Preuve qu’un roman peut, sur le thème de la dégradation sociale, devenir un excellent cru littéraire.Enfi n, le genre biographique a le vent en poupe. Dans la célè-bre collection russe « Vie des gens extraordinaires », se suc-cèdent les nombreuses biogra-phies d’écrivains rédigés par des écrivains eux-même. Dmitri Bykov raconte Boris Pasternak et Boulat Okoudjava, Alexeï Varlamov retrace la vie de Mikhaïl Boulgakov, Alexandre Grin, Alexeï Tolstoï et Andreï Platonov, Valéri Popov écrit sur Sergueï Dovlatov, etc. L’origine d’un tel succès ? De grands écri-vains, racontés par de grands auteurs.

Les années 90 furent celles du divorce total entre la critique d’une part, les grandes maisons d’édition et le grand public d’autre part. Bien qu’ils soient de plus en plus nombreux, les prix littéraires russes (Booker russe, Best-Seller national, Yas-naya Poliana, Grand Livre, etc.) semblaient n’avoir aucun effet sur les ventes. Inversement, la littérature grand public était ignorée par les critiques.La donne a changé avec les « an-nées zéro ». Les amateurs de lit-térature de gare ou de genre ont fi ni par se rabattre sur les séries télé. Seuls les vrais amateurs de littérature sont restés.Autre signe des temps moder-nes, ces lecteurs sont pour la plu-part des lectrices. L’un des ro-mans les plus populaires ces deux dernières années ? Le Temps des femmes. L’auteur, Elena Chizhova, une universitaire pé-tersbourgeoise, a reçu le prix Booker russe 2009. En Russie, les femmes lisent beaucoup plus que les hommes. Ces lectrices sont plus réceptives aux femmes écrivains, d’où le succès des ro-mans de Dina Rubina, Liudmi-la Oulitskaïa, Tatiana Tolstoï, Elena Chizhova, Olga Slavniko-va, Elena Katishonok... sans par-ler de ces « reines du roman po-licier féminin » que sont Alexandra Marinina, Tatiana Oustinova et Daria Dontsova. Les « années zéro », c’est aussi l’âge d’or des découvertes litté-raires russes des années 1990, en particulier de Viktor Pelevine et de Vladimir Sorokine. Ils ont su se constituer un public très fi -dèle. Lire le dernier Pelevine ou Sorokine est en outre un signe d’appartenance à un certain mi-lieu intellectuel. Autre tendance signifi cative des « années zéro », l’émergence d’une génération de trentenaires, avec Zakhar Prile-pine, Alexeï Ivanov, Roman Sent-chine, Dmitri Novikov. Proches du réalisme, ils refusent toute approche psychologique de la lit-térature. Leader emblématique de ce mouvement, Zakhar Pri-lepine a séduit le public mosco-vite avec son roman San’kia, qui raconte les périples d’un jeune révolutionnaire révolté contre le capitalisme. Le jeune Alexeï Iva-nov a percé dans le monde de la littérature grâce à ses romans L’Or de la révolte et Le Cœur de Parme. Originaire de Perm (Oural), il est aussi ethnographe spécialiste des peuples de son

TATIANA CHABAÏEVALA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

L’approche documentaliste

s’impose peu à peu dans les

rayons des librairies, avec

plusieurs travaux d’envergures

jetant un regard nouveau sur le

passé soviétique.

Démythification généraleTendance La non-fiction puise son inspiration dans l’histoire récente

annoncé), la non-fi ction se tour-ne aussi vers le passé. Verbatim, publié par Astrel, est certaine-ment la plus poignante de ces œuvres. Son auteur, Liliana Lounguina, mère du cinéaste Pavel Lounguine (Taxi Blues, l’Île), fut la traductrice d’Astrid Lindgren, Heinrich Böll, Boris Vian, Henrik Ibsen et bien d’autres. Elle était l’amie de nombreux écrivains soviétiques. Ses compagnons ont été un à un les victimes de la terreur, broyés

Pendant que le monde de la lit-térature organise des prix rétro-actifs pour rendre justice aux chefs-d’œuvres soviétiques cen-surés (le prix NOS 73 vient d’être

ou tués dans les camps de Joseph Staline. Sa maison s’est convertie en un îlot de sécurité pour de nombreux auteurs per-sécutés, trahis par leurs amis et leurs collègues. Elle-même est devenue la gardienne et le té-moin de leur destin. Juste avant son décès en 1998, Lounguina a conté sa vie à Oleg Dorman. Son récit a donné nais-sance à un documentaire puis au livre Verbatim. Pendant onze ans, on n’avait manifesté aucun

« Mon sujet le voici : un camp ordinaire en URSS ». Au milieu des marais et des forêts à perte de vue, les Ze-ka, des hommes en haillons, décharnés, éreintés par le travail, les privations, le froid, la crasse. Des baraques branlantes où des rats affamés disputent aux hommes le moin-dre rogaton. Ce camp « ordinai-re », Julius Margolin y est arri-vé au terme d’un voyage interminable, commencé en Pa-lestine où il vit depuis 1936. En 1939 il est de passage à Lodz, comme beaucoup il ne croit pas à la guerre imminente et se trou-ve pris au piège du pacte ger-mano-soviétique qui signe la fi n de la Pologne. Alors commence l’aventure kafkaïenne de Julius Margolin et de milliers de ses semblables. Car à la différence des détenus soviétiques, Mar-golin ne sait rien de l’URSS et de sa machine à broyer. C’est la volonté de comprendre qui per-mettra à cet intellectuel chétif

CHRONIQUE LITTÉRAIRE

Broyé par l’absurde

Christine Mestre

Découvrez d’autreschroniques surlarussiedaujourdhui.fr

et myope de traverser l’univers concentrationnaire et son cortè-ge de calamités. « Malheur au fai-ble ! », prévient–il. S’il n’atteint pas les normes fi xées, sa ration alimentaire est réduite, il devient donc de jour en jour plus faible, incapable de résister à la rigueur de l’hiver, au travail accablant, à la brutalité des chefs et de ses codétenus. Margolin décrit le pro-cessus de déshumanisation et l’absence totale de bonté ou de solidarité. Margolin aura lui aussi recours à la violence, c’est sa pire rancune : ses tortionnaires auront fait de lui « leur complice, leur élève, leur prosélyte ». Cinq années passent : « Cinq ans auparavant, par une belle jour-née, les portes de la prison s’étaient refermées sur moi. Aujourd’hui, blanchi et brisé je marchais le long de la voie ferrée de Kotlas ; le sac pesait sur mes épaules. J’étais libre ; le poids n’était pas sur mon dos, mais dans mon cœur »... Margolin revient de son Voyage au pays des Ze-Ka, il n’a désormais qu’un devoir, celui de rendre compte et « de trans-mettre l’appel au secours des hommes coupés du monde ». Il écrit La Condition inhumaine que Calmann-Lévy publie en 1949, amputé d’un bon tiers. Nina Ber-berova et Mina Journot signent la traduction. Le livre aura peu d’écho, l’époque a ses complai-sances dans d’autres directions. Le Bruit du temps et Luba Jur-g e n s o n n o u s re s t i t u e n t aujourd’hui la part manquante de l’ouvrage, enrichi d’un appa-reil de notes précieux..

TITRE : VOYAGE AU PAYS

DES ZE-KA

ÉDITIONS : LE BRUIT

DU TEMPS

AUTEUR : JULIUS MARGOLIN

Zakhar

PrilepineÉCRIVAIN

En fait, quand cela me tombe des-sus, j’ai du mal à imaginer que l’un d’entre eux puisse être un rat de bibliothèque ; le président semble se contenter de ses gadgets pour occuper son temps libre et le pre-mier ministre, passer le sien sur des skis ou aux commandes d’un avion. Dans l’ensemble, la vie de l’écri-vain n’a probablement jamais été aussi paisible qu’aujourd’hui. Aucune crainte de se faire haran-guer, huer ou piétiner. Le risque est plus grand d’être poursuivi pour sédition. Aujourd’hui, autorités et écrivains existent indépendamment et se croisent rarement, essentiellement lorsqu’il s’agit de respecter les for-mes. Et quand cela arrive, leurs rencontres sont tout à fait insipi-des. Alors, que se passe-t-il si Boris Akounine ou Lioudmila Oulitskaïa soutiennent Mikhaïl Khodorkov-ski ? Que se passe-t-il si Boris Gre-benchikov et Konstantin Kintchev, des stars du rock célèbres qui sont aussi de merveilleux poètes, écri-vent une lettre à la veille de la Saint Sylvestre pour demander que Kho-dorkovski ne soit pas emprisonné de nouveau pour des faits pour lesquels il a déjà payé ? C’est une démocratie que nous avons ici, n’est-ce pas ? Vous voulez écrire ? Je vous en prie. Vous voulez pro-tester ? Soyez sans crainte. Dans ce type de démocratie, on peut parler de soi-même, de son pays, du futur, des autorités… de tout. Mais cela n’affecte en rien les dirigeants.

Né près de Riazan en 1975, Zakhar Prilepine est écrivain et journaliste.

Ce n’est que durant les 15 dernières années que la situation a qua-litativement changé. Je

ne devrais même pas essayer de déterminer si cela est meilleur ou moins bon. La vé-rité est que la littérature (et l’art dans son ensemble) n’est plus perçue par les autorités comme quelque chose qui donne du sens à la vie et qui, par consé-quent, est utile pour gouverner un pays. Nicolas Ier a été le censeur per-sonnel de Pouchkine. Staline a écrit « Pourriture ! » dans la marge des livres d’Andreï Pla-tonov. Tandis que Mikhaïl Gor-batchev comprenait la valeur des mots et a sincèrement fl ir-té avec plusieurs ensorce-leurs. Je ne peux cependant pas en-visager de décrire Dmitri Med-vedev ou Vladimir Poutine comme des censeurs ni comme des lecteurs attentifs et des par-tenaires de conversation, di-sons, de l’écrivain postmoder-ne ésotérique Viktor Pelevine. Je ne peux pas non plus ima-giner Vladimir Poutine en train de lire les ouvrages d’Edouard Limonov, auteur radical et lea-der du Parti national bolché-vique, laissant un « Pourritu-re ! » dans la marge. Et cela demande un certain pouvoir d’imagination que de les voir se lancer dans un groupe de discussion sur la prose du réa-lisme psychologique de Vladi-mir Makanine.

OPINION

Dirigeants et écrivains : une indifférence mutuelle

Pourquoi, selon vous, les dix

auteurs les plus populaires de

Russie sont-ils presque exclusive-

ment des auteurs de polar ?

D’abord ce genre est relativement nouveau en Russie, où il n’existe que depuis 15 ou 20 ans. À l’époque soviétique, faire figurer un crime dans la littérature était tout simple-ment impensable, comment aurait-il pu y avoir des crimes dans le pays du socialisme victorieux ? Deuxiè-

ENTRETIEN

Fontaine de pétrole et de sang

intérêt pour son histoire, jusqu’à ce que le romancier Boris Akou-nine et le journaliste Léonid Par-fi onov s’en mêlent. Le documen-taire et le livre ont tous deux rencontré un énorme succès pu-blic. De son côté, Parfi onov, un des plus célèbres journalistes de télévision, planche sur le cinquiè-me volume de Notre Temps, une encyclopédie englobant l’URSS et la Russie actuelle. Chaque vo-lume aborde une décennie dif-férente. Notre Temps est illustré de photographies de haute qua-lité, vivantes et pertinentes, qui aident à donner vie à l’histoire pour le lecteur russe.

« La Russie

d’Aujourd’hui »

a interviewé

Boris Akounine,

un des auteurs

de polar les

plus populaires

de Russie.

mement, le polar est le genre le plus intéressant. Il encourage le lec-teur à se creuser les méninges pour découvrir qui est l’assassin. Le polar russe est-il spécifique ?

Il est beaucoup plus varié que le polar scandinave, par exemple. Par-ce que la vie ici a toujours été une fontaine débordante : une fontaine de pétrole, de sang, d’émotions... Pourquoi votre personnage cen-

tral, Fandorine, est-il si populaire ?

Fandorine possède de nombreuses qualités qui manquent cruellement dans notre peuple. Les opposés s’attirent, vous savez bien. Fando-rine est réservé, il a du sang-froid, il est scrupuleux, et ne considère pas les autorités comme quelque cho-se de sacré. Au fond, mes lecteurs veulent être comme lui.

Écrivaines ou lectri-

ces, les femmes sont

la nouvelle figure

des librairies.

LEG

ION

-MED

IAR

IA N

OV

OST

I

PHO

TOX

PRES

S

KOM

MER

SAN

T

KOM

MER

SAN

T

ITA

R-T

ASS

DPA

/VO

STO

CK-

PHO

TO

ITA

R-T

ASS

Page 8: La Russie d'Aujourd'hui

08LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR

COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA

DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO Loisirs

À L’AFFICHE

ANNA NETREBKO EN

CONCERT

LE 26 AVRILSALLE PLEYEL, PARIS

Celle que l’on qualifie d’Audrey Hepburn du chant revient à Pa-ris avec le Stabat Mater de Gio-vanni Battista Pergolesi. La diva russe, reconnue comme l’une des plus belles voix de notre époque, interprétera également une sélection de cantates du même compositeur.

www.sallepleyel.fr ›

TOUS LES DÉTAILS SUR NOTRE SITELARUSSIEDAUJOURDHUI.FR

« VIVRE DANS LE FEU »

D’APRÈS MARINA TSVETAEVA

DU 26 AU 30 AVRILTNBA, BORDEAUX

Libre adaptation du recueil épo-nyme présenté par Tzvetan Todo-rov, la pièce donne vie aux écrits éparpillés de la célèbre poétesse russe - carnets, poèmes et mê-me brouillons de lettres - ainsi qu’à des extraits de son recueil Le ciel brûle. Et c’est à Natacha Régnier, prix d’interprétation du festival de Cannes 1998 pour son rôle dans La vie rêvée des anges, que la réalisatrice Bérangère Jan-nelle confie la délicate tâche de se glisser dans la peau de Ma-rina Tsvetaeva. Son enfance, ses amours, l’écriture et finalement son suicide, c’est la fresque de toute une vie qui est offerte en guise d’hommage passionné à l’écrivaine.

www.tnba.org ›

SEMIANYKI

DU 3 MAI AU 2 JUILLETTHÉÂTRE DU ROND-POINT, PARIS

Portrait acerbe mais hilarant d’une famille déjantée, Semianyki allie le burlesque à la poésie. Un père alcoolique, une mère sur le point d’accoucher et une ribambelle d’enfants se jouant des tours tou-jours plus inventifs : telle est la recette de la troupe Licedeï pour une soirée de rire sans bornes.

www.theatredurondpoint.fr ›

PRINTEMPS DU FILM RUSSE

DU 4 AU 10 MAICINÉMA ÉLYSÉES LINCOLN, PARIS

Le festival du film russe « Vesna » se donne pour ambition de faire découvrir les meilleures produc-tions de l’année, primées à l’inter-national et en Russie. Pour cette édition, les films 2010 présentés seront La lisière d’Alexeï Outchitel, déjà remarqué à Honfleur, et Zone

de turbulence d’Evgenia Tirdatova. Une place de choix est réservée aux studios Mosfilm, qui marque-ront l’ouverture et la clotûre du festival avec respectivement Nuit

de Carnaval et La jeune fille sans

adresse d’Eldar Riazanov. De nom-breuses projections sont en outre prévues autour du thème des films noirs et d’espionnage.

www.festival-russe.fr ›

EN BREF

Maestros en herbe de tous les pays, unissez-vous ! La chaîne publique Kultura est dans les starting-blocks pour la douziè-me édition du concours musi-cal « Casse-noisette », réservé aux moins de quatorze ans. Le conte, mis en ballet par Tchaïkovski, est un hymne à l’enfance et à la féérie du rêve et du voyage. De même, le concours organisé par Kultura est une grande fête dont les en-fants, venus des quatre coins du monde, sont rois. Du tirage au sort pour l’ordre de passage au gala fi nal, tout est jeu et réjouis-sance. Les candidats au concours, russes et étrangers, se dispute-

Le Casse-noisette des jeunes talents

ront les Casse-noisettes d’or, d’ar-gent et de bronze, en jouant face à au public, avec un orchestre pro-fessionnnel. Tatiana Essaoulova, porte-parole de la chaîne Kultu-ra, souhaite que « cette grande célébration du talent juvénile soit un rendez-vous véritablement international ». Douzième concours télévisuel de musique classique « Casse-noi-settes », du 1er au 8 novembre 2011. Dossiers de candidature à en-voyer avant le 10 août.

PAUL DUVERNETLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

La critique n’a pas été tendre

envers la création très

médiatique, le 28 mars dernier,

d’un opéra portant le nom de

l’immense poétesse acméiste

russe Anna Akhmatova.

L’œuvre tonitruante de Mantovani fait des vagues

Art lyrique La presse internationale à l’assaut d’« Akhmatova » à l’Opéra Bastille

déborde « d’éruptions orchestra-les » trop fréquentes, et qui par conséquent forment une succes-sion de « dissonances terribles perdant progressivement de leur efficacité ».Même constat pour Anne Das-takian : « Pour justifi er ce délu-ge sonore, le compositeur invo-que le chaos de la seconde guerre mondiale, les horreurs du stalinisme... Mais nombreux étaient ceux, dans la salle, qui auraient aspiré à une musique plus en harmonie avec l’œuvre de la poétesse ». Certains justi-fi ent la redondance : « Pour trai-ter un tel destin, le compositeur n’avait aucune raison de choisir une musique voluptueuse ou sé-duisante : la tension politique et

La vie tragique de la poétesse russe Anna Akhmatova (1889-1966), bâillonnée par le stalinis-me, a inspiré au compositeur français Bruno Mantovani un opéra, créé à l’Opéra Bastille.Ce jeune compositeur (36 ans), très prolixe, en est à sa deuxiè-me création. Sa première, L’Autre côté, abordait déjà la probléma-tique de l’artiste face à l’impos-ture d’une utopie politique. Comme le fait remarquer Phi-lippe Venturini, dans Les Échos, « avant d’avoir écouté la moin-dre note, on entendait les voix grincer ». La production partait avec un handicap, car de nom-breuses critiques pleuvaient déjà sur le côté « entre-soi » du di-recteur de l’Opéra de Paris Ni-colas Joël, qui se charge lui-mê-me de la mise en scène, tandis que le livret était confi é à son dramaturge Christophe Ghristi, et le rôle-titre d’Akhmatova… à son épouse Janina Baechle.Amateurs de musique russe, ne cherchez pas d’exotisme dans la partition. Anne Dastakian, dans Marianne souligne qu’on « cher-chera vainement la moindre ré-férence musicale aux composi-teurs soviétiques contemporains de la poétesse, tels Dmitri Chos-takovitch », car comme l’expli-que le librettiste, « on n’a pas voulu faire couleur locale ».Ce qui a été fait, force est de le constater, n’a guère plu. Pour George Loomis, célèbre critique du New York Times, la partition

mann, de Libération, elle « a bien du mal à se frayer un chemin jusqu’aux voix ». Furieux, Re-naud Machart, du Monde, esti-me que « le premier défaut de cette musique est que l’orches-tre couvre le plus souvent les voix et qu’on ne peut guère se priver des surtitres pour comprendre ce qui se dit ».On rappellera au lecteur que tou-tes ces critiques, sans doute jus-tifi ées, tombent après une pre-mière mondiale. Tout compositeur digne de ce nom procède à des ajustements après la création. Bruno Mantovani a d’ailleurs confessé en sortant de la pre-mière répétition : « Je n’avais pas conscience d’avoir composé un opéra d’une telle dureté ».

Un enregistrement d’« Akhmatova » sera diffusé sur France Musique le 27 avril.

l’angoisse subséquente étreignent donc les poitrines et serrent les gosiers », défend Venturini, qui trouve que « la prosodie reste très claire, le débit de la parole, par-fois proche du parler, très natu-rel et la voix ne disparaît jamais derrière l’orchestre ». Il est bien le seul. C’est Le Figaro qui se montre le plus dur, sous la plume de Christian Merlin : « De ce mu-sicien toujours en éveil, on at-tendait une partition foisonnan-te. On a entendu la même chose pendant deux heures. Des à-plats de cordes pour laisser passer les voix, puis des coups de boutoir des cuivres, une déclamation pre-nant systématiquement le contre-pied de la prosodie française ».Quant à l’oreille d’Éric Aeschi-

RECETTE

La chasse aux moules

Les mets de la Pâque orthodoxe reflètent les symboles liturgiques de la résurrection, du triomphe de la lumière sur les ténèbres et du retour du printemps. Du-rant la semaine sainte, les Russes préparent une brioche pascale, le koulitch, et colorient des œufs durs. Avec la paskha, un fromage blanc épais, sucré, truffé d’épi-ces et de fruits confits, ce sont les spécialités fondamentales du festin de Pâques, qui suit la lon-gue messe nocturne, ponctuée des exclamations « Le Christ est

ressuscité ! » auxquelles les fidè-les répondent « En vérité, il est

ressuscité ! » Cette phrase est rendue par les initiales « XB » qui sont un motif décoratif ré-current sur les œufs, la paskha et le koulitch. Je me souviens de ma première Pâque russe comme d’une chas-se frénétique non pas aux œufs et chocolats, mais aux ustensiles de pâtisserie. J’avais pourtant à ma disposition tout un arsenal de pots, poêles, et autres moules à tarte, mais aucun ne convient aux spécialités pascales. Je vou-lais faire les choses bien : le kou-litch est cylindrique, élancé, et coiffé d’un chapeau, comme un champignon. La paskha est pré-parée dans un moule en forme de trapèze, appelé pasotchnit-sa et décoré de « XB » ou de la croix orthodoxe sur chaque face, qui s’impriment dans le fromage. J’ai commencé par la pasotchnit-sa, pensant que c’était l’épreuve principale. J’ai rôdé en vain dans les marchés, supermarchés et magasins de cuisine spécialisés. En vain, hormis quelques bons conseils.

« Essayez les églises », me suis-je entendue dire. Mais après un dé-tour par trois églises de quartier, je me suis tournée vers le super-marché appartenant au patriar-cat, Sofrino. J’ai retenu mon souf-fle pendant que quatre prêtres me doublaient dans la file (oui, ils ont le droit). Finalement, j’ai mis la main sur une pasotchnitsa. Mais le moule à koulitch s’est avé-ré être encore plus insaisissable. Rien chez Sofrino, ni nulle part ailleurs. De retour à la maison, j’ai fondu en larmes de rage, de dépit. « Qu’est ce qui ne va pas ? », m’a demandé mon mari russe. En-tre deux hoquets, je lui ai expli-qué que notre Pâque était gâchée parce que je n’avais pas trouvé de moule à koulitch. Après un glous-sement, il a disparu dans le garde-manger, pour en rapporter quatre boîtes de conserve de tailles diffé-rentes, qui contenaient des toma-tes, du café, des haricots et des champignons marinés. « Moules à koulitch », dit-il. « En

vérité, moules à koulitch », répon-dis-je, sur un ton liturgique.

Jennifer Eremeeva SPÉCIALEMENT POUR

LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Lisez la recette surlarussiedaujourdhui.fr

Lisez davantage surlarussiedaujourdhui.fr/12133

Votre publicité

dans ce

supplément

[email protected]

Tél.: +7 (495) 775 3114

Ne manquez pas notre « Photo du jour » sur Facebook !

www.facebook.com/

larussiedaujourdhui

La Russie d’Aujourd’huiconvie à une leçon linguistique

larussiedaujourdhui.fr/12021

ITA

R-T

ASS

ITA

R-T

ASS

PHIL

IPPE

DEL

AC

RO

IX

ELIS

A H

AB

ERER

WWW.TVKULTURA.RU

Retrouvez la vidéo surlarussiedaujourdhui.fr