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des IAA Revue de l’Observatoire La N° 135 - OCTOBRE 2019 ISSN 1299 - 8095 FLASHS : TOUS LES FAITS MARQUANTS Le couvoir de la gare d’Uzel repris par Novogen Whaou!, les crêpes changent de Directeur La Brasserie Sainte-Colombe déménage à Corps-Nuds Le Lavandier parie sur la vente en ligne p.24 Les Chambres d’agriculture de Bretagne vous accompagnent lors de deux événements : le Concours Général Agricole et le salon Rest’Hôtel p.30 TENDANCES AGROALIMENTAIRES DOSSIERS VIENT DE PARAÎTRE ACTIVITÉ Stabilisation de l’activité des entreprises des secteurs agroalimentaires breton et national au deuxième trimestre 2019. Léger attentisme de la part des acteurs pour la suite. p.2 EXPORTATIONS Exportations bretonnes au deuxième trimestre 2019 : forte demande chinoise en viande porcine p.4 EMPLOI Après le fléchissement de sa hausse, l’emploi est stable dans agroalimentaire breton au deuxième trimestre 2019 p.6 INTERVIEW : HERVE MATTEI, BANQUE DE FRANCE Les opinions des chefs d’entreprise agroalimentaire restent favorables pour 2019 p.7 RETOUR DES RENCONTRES ECONOMIQUES ET SOCIALES DES FILIERES AGRICOLES ET AGROALIMENTAIRES BRETONNES Se sentir fier de son métier, agir, coopérer ! p.9 INTERVIEW : PIERRE GALIO, ADEME Lutte contre le gaspillage alimentaire, des actions sur toute la chaîne alimentaire p.14 LAIT BIO Une filière en expansion face aux questionnements de la massification p.17 Service Économie-Emploi, Chambres d’agriculture de Bretagne Rue Maurice Le Lannou - CS 74223, 35042 RENNES Cedex www.chambre-agriculture-bretagne.fr DOSSIER : LE GROS PLAN La filière bretonne du lait bio face à la massification Compte tenu du potentiel du marché des produits laitiers bio, les opérateurs de l’aval de la filière, industriels comme distributeurs, se positionnent tous, avec diverses stratégies. Les maillons agricole et industriel se retrouvent confrontés aux multiples effets de la massifica- tion des volumes en produits laitiers bio. Forte de sa dynamique de production et de son tissu industriel, la Bretagne a des atouts à faire valoir.

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desIAA Revue

de l’Observatoire La

N° 135 - OCTOBRE 2019 • ISSN 1299 - 8095

FLASHS : TOUS LES FAITS MARQUANTS • Le couvoir de la gare d’Uzel repris par Novogen

• Whaou!, les crêpes changent de Directeur

• La Brasserie Sainte-Colombe déménage à Corps-Nuds

• Le Lavandier parie sur la vente en ligne p.24

Les Chambres d’agriculture de Bretagne vous accompagnent lors de deux événements : le Concours Général Agricole et le salon Rest’Hôtel p.30

TENDANCES AGROALIMENTAIRES

DOSSIERS

VIENT DE PARAÎTRE

ACTIVITÉ

Stabilisation de l’activité des entreprises des secteurs agroalimentaires breton et national au deuxième trimestre 2019. Léger attentisme de la part des acteurs pour la suite. p.2

EXPORTATIONS

Exportations bretonnes au deuxième trimestre 2019 : forte demande chinoise en viande porcine p.4

EMPLOI

Après le fléchissement de sa hausse, l’emploi est stable dans agroalimentaire breton au deuxième trimestre 2019 p.6

INTERVIEW : HERVE MATTEI, BANQUE DE FRANCELes opinions des chefs d’entreprise agroalimentaire restent favorables pour 2019 p.7

RETOUR DES RENCONTRES ECONOMIQUES ET SOCIALES DES FILIERES AGRICOLES ET AGROALIMENTAIRES BRETONNESSe sentir fier de son métier, agir, coopérer ! p.9

INTERVIEW : PIERRE GALIO, ADEMELutte contre le gaspillage alimentaire, des actions sur toute la chaîne alimentaire p.14

LAIT BIOUne filière en expansion face aux questionnements de la massification p.17

Service Économie-Emploi, Chambres d’agriculture de BretagneRue Maurice Le Lannou - CS 74223, 35042 RENNES Cedex

www.chambre-agriculture-bretagne.fr

DOSSIER : LE GROS PLAN

La filière bretonne du lait bio face à la massification Compte tenu du potentiel du marché des produits laitiers bio, les opérateurs de l’aval de la filière, industriels comme distributeurs, se positionnent tous, avec diverses stratégies. Les maillons agricole et industriel se retrouvent confrontés aux multiples effets de la massifica-tion des volumes en produits laitiers bio. Forte de sa dynamique de production et de son tissu industriel, la Bretagne a des atouts à faire valoir.

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DOSSIER

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SE SENTIR FIER DE SON MÉTIER, AGIR, COOPÉRER ! RETOUR SUR LES RENCONTRES ÉCONOMIQUES ET SOCIALES DES FILIÈRES AGRICOLES ET AGROALIMENTAIRES BRETONNES

1 Expertise du contexte agricole et agroalimentaire d’aujourd’hui

Le diagnostic de la situation agricole et agroalimentaire est posé : la valeur ajoutée agricole a chuté de 30 % en 50 ans (source : Insee). Si les crises des marchés agricoles à répétition sont une des raisons de cette baisse, les relations délétères avec la grande distribution sont aussi souvent mises en avant. En parallèle, les prix agricoles sont soumis à une forte volatilité des marchés mondiaux. Pour faire face à cette situation, les agriculteurs ont réussi à mettre en œuvre d’importants gains de productivité. Mais cette situation se constate aussi dans la dégradation des performances des industries agroalimentaires : selon l’ANIA la valeur ajoutée de ce secteur a perdu 14,5 % en 10 ans. En 2018, le taux de marge des industries agroalimentaires est de 34,8 % quand il est de 36,3 % pour le secteur manufacturier (source : Insee, calculs Ania).

Il y avait donc un véritable état d’urgence à mener les Etats Généraux de l’Alimentation en 2017. Les rapports de force sont asymétriques dans la chaîne de valeur alimentaire avec un goulot d’étranglement au niveau de la distribution, secteur extrêmement concentré avec seulement quelques centrales d’achat. La loi issue des Etats Généraux de l’Alimentation, dite loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable, a pour objectif de mieux répartir la valeur au sein de la chaîne alimentaire. Pour autant, cela ne devrait jouer qu’à la marge puisque les prix agricoles dépendent surtout des marchés mondiaux et finalement peu des prix payés par les consommateurs : les composantes agricoles et agroalimentaires représentent moins de 20 % du budget dédié à la consommation alimentaire par les Français (Source : calculs OFPM d’après Insee et Eurostat).

Se sentir fier de son métier, agir, coopérer ! Retour sur les Rencontres économiques et sociales des filières agricoles et agroalimentaires bretonnes

Delphine Scheck, Service Economie-Emploi des Chambres d’agriculture de Bretagne

Fortes du succès de la première édition des Rencontres économiques et sociales des filières agricoles et agroalimentaires bretonnes en 2018, les Chambres d’agriculture de Bretagne et l’ABEA (Association Bretonne des Entreprises Agroalimentaires) ont organisé la deuxième édition le mercredi 3 juillet 2019 à Locminé. Une centaine de participants a assisté aux échanges de cette matinée professionnelle, ainsi qu’au cocktail déjeunatoire proposé à partir de produits médaillés au Concours Général Agricole.

L’agriculture et l’agroalimentaire bretons poursuivent leurs adaptations : on assiste en 2018 à un fourmillement de démarches de différenciation de la part de l’ensemble des acteurs des différentes filières. Mais elles ne représentent encore qu’une faible part de la production régionale face aux marchés de masse. Si certaines lignes ont bougé sur le front des relations commer-ciales entre les acteurs suite à la loi Egalim, la commission des affaires économiques du Sénat est pourtant catégorique : « non, non, rien a changé ». Ainsi, un constat d’« entre-deux » semble prévaloir dans toutes les filières. Pour en sortir, les Chambres d’agriculture de Bretagne et l’ABEA ont souhaité s’inspirer de quelques trajectoires gagnantes issues d’entreprises régionales.

Figure 1 : En 2015, la valeur ajoutée perçue par l’agriculture, la pêche et l’aquaculture représente 6,5 € pour 100 € de consommation alimentaire finale ; celle perçue par les industries agroalimentaires est de 11,2 €

Source : Extrait de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, rapport au Parlement, 2019 (p342).

Note de lecture : L’euro alimentaire montre la répartition de la dépense alimentaire en valeurs ajoutées induites dans les différentes branches de l’économie, ainsi qu’en importations et taxes. Pour 100 euros de dépenses alimentaires, ce sont 63,7 euros de valeurs ajoutées en 2015.

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DOSSIER

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Pas de hausse de revenu pour les agriculteursLa loi a été publiée le 1er novembre 2018 pour une application dès février 2019 de ses trois mesures phares : contractualisation en marche avant, relèvement du seuil de revente à perte et encadrement des promotions. Mais les négociations commer-ciales avaient déjà commencé depuis septembre ; ce décalage temporaire a rendu difficile la prise en compte des dispositions de la loi dans ces négociations commerciales.

Pour autant, les débats lors des Etats Généraux de l’Alimenta-tion ont permis d’avoir des dialogues constructifs, d’afficher des volontés de partage de la valeur tout au long de la chaîne et de prendre conscience des enjeux de chaque maillon de la filière. C’est ainsi que le résume le sénateur Michel Raison, lors de la table ronde dans le cadre du suivi de la mise en application de la loi organisée par la commission des affaires économiques du Sénat : « le commerce, il a besoin de souplesse, mais il a aussi besoin de morale ; et la loi ne peut pas régler ni la souplesse, ni la morale ». Reste à voir si les acteurs ont fait preuve d’éthique, d’écoute et de compréhension dans les négociations pour une meilleure répartition de la valeur ajoutée à chaque maillon de la filière.

Mais sans contraintes, contrôles et transparence, les bénéfices de la hausse du seuil de revente à perte ne « ruissellent » pas tout au long de la filière. Car si les prix de vente ont effective-ment augmenté pour les produits alimentaires dans la grande distribution (+3 % en février selon l’Insee), cela n’a eu que peu d’impact sur les prix payés aux producteurs. Ces bénéfices sont en réalité détournés en grande partie par la grande distribution avec des remises de 10 % sur les cartes de fidélité. On observe de plus un décalage de la guerre des prix sur les marques distributeurs qui accusent une sérieuse baisse des prix, tout comme pour les produits issus des PME. Le compte n’y est donc pas pour les agriculteurs qui ne bénéficient d’aucune hausse de revenu.

Des négociations commerciales dans un climat délétèrePour les industries agroalimentaires, le climat général est toujours aussi dégradé dans les box de négociations avec la grande distribution. Ce climat est objectivé par l’observatoire des négociations commerciales créé par l’Ania dont les chiffres suivants sont issus. 88 % des entreprises répondantes consi-dèrent que leurs relations avec leurs clients sont inchangées ou dégradées par rapport à l’année dernière : il y a eu plus de 800 signalements de mauvaises pratiques et 59 % des entreprises enquêtées ont subi des menaces de déréférencement. Face à une demande initiale des industriels de hausse de tarif de 4 %, les négociations s’achèvent avec une nouvelle déflation de -0,5 % sur les prix des produits alimentaires selon l’Ania (-0,4 % selon l’Observatoire unique des négociations commer-ciales, mis en place sous l’égide du Médiateur des relations commerciales). D’après l’Ania, 77 % des entreprises se sont vues demander des baisses tarifaires (de 1,5 à 4 %) et 49 % ont dû les accepter. Les marques de distributeurs enregistrent la plus forte déflation, notamment parce qu’elles ne sont pas concernées par le relèvement du seuil de revente à perte.

Les TPE, PME et PMI aussi sont en difficulté car elles souffrent des effets pervers de la mesure d’encadrement des promotions. En effet, ces entreprises n’ont pas les moyens de financer des campagnes de publicité suffisamment importantes pour obtenir

davantage de place dans les rayons des grandes surfaces. Les promotions sont un des seuls moyens pour elles de s’imposer face aux grandes marques internationales. Dorénavant limitées à 25 % de leur chiffre d’affaires en magasin, l’encadrement des promotions leur fait perdre un outil de conquête de parts de marché.

Ce contexte délétère est confirmé par les premiers résultats de l’étude nationale de l’Ania sur la compétitivité des indus-tries agroalimentaires. Les dirigeants de ces entreprises ont un esprit défensif mais combatif lors des négociations commer-ciales, une période difficile et traumatisante où il devient impossible de fixer les prix de vente en fonction des évolu-tions des matières premières. Les ordonnances prises sur les conditions générales de vente doivent y remédier puisque les acheteurs devront motiver le refus des conditions générales de vente proposées par les industriels. D’autre part, il est difficile de se positionner sur la segmentation de l’offre et du marché en raison des coûts liés à la diversification de la production et à l’adaptabilité des process. Enfin, les PME notent dans cette étude un sérieux manque de ressources internes pour s’adapter à la réglementation.

2 Perspectives partagées et expériences enrichissantes pour le secteur agricole et agroalimentaire de demain

Si la loi issue des Etats Généraux de l’Alimentation semble déjà montrer certaines limites après quelques mois d’application, il sera nécessaire de prendre davantage de recul pour en analyser tous les effets. Pour autant, chacun attend légitimement de la loi qu’elle oriente et qu’elle protège, mais ce sont bien aux acteurs économiques, par le biais de leurs propres initiatives, d’impulser les évolutions positives de l’agriculture et l’agroalimentaire de demain. Les Chambres d’agriculture de Bretagne et l’ABEA ont ainsi fait témoigner des chefs d’entreprises aux démarches inno-vantes, au côté d’un grand témoin régional : Jean-Guy Le Floch, PDG d’Armor-Lux. Ces trajectoires gagnantes doivent être vues non comme des modèles à suivre, mais plutôt comme des pistes de réflexions et des sources d’inspiration pour les secteurs agri-coles et agroalimentaires. La restitution qui suit se base sur les propos échangés lors de cette table ronde.

SE SENTIR FIER DE SON MÉTIER, AGIR, COOPÉRER ! RETOUR SUR LES RENCONTRES ÉCONOMIQUES ET SOCIALES DES FILIÈRES AGRICOLES ET AGROALIMENTAIRES BRETONNES

Figure 2 : André Sergent, Joël Tingaud, Kévin Thomazo, Laurent Kerlir et Annie Saulnier lors de la table ronde des Rencontres économiques et sociales des filières agricoles et agroalimentaires bretonnes du 3 juillet 2019

Crédit photo : Chambres d’agriculture de Bretagne.

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DOSSIER

Impliquer le consommateurEn 2012, conscient des attentes de transparence, d’authenticité et de préservation de l’environnement de la part des consom-mateurs, le groupe d’aucy a engagé les premières conver-sions bio. Aujourd’hui, en 2019, la coopérative a voulu faire participer les consommateurs à la construction d’une nouvelle gamme pour accompagner les producteurs pendant les trois années de conversion. Ils ont pu choisir les légumes qu’ils souhaitaient voir convertis en bio, mais aussi le conditionne-ment, l’étiquette, et même le prix des produits !

Kévin Thomazo, coopérateur du groupe d’aucy témoigne :

Jean-Guy Le Floch, PDG d’Armor-Lux l’affirme :

Cela fait écho aux études prospectives sur les comportements alimentaires de demain et les tendances de consommation (cf. La Revue de l’Observatoire des IAA n°134 - juillet 2019). Il est important d’en prendre connaissance pour s’assurer d’être en phase avec les attentes des consommateurs. Parmi celles-ci, trois attentes sont dites émergentes : la baisse du gaspillage alimentaire, le lien entre le digital et l’alimentation, et enfin l’alimentation durable. Aller voir les clients doit être une obli-gation pour chaque entreprise, sans être une contrainte, pour toujours adapter son modèle économique.

Si les acteurs des filières agricoles et agroalimentaires ne se prennent pas en main aujourd’hui pour répondre aux attentes des consommateurs, d’autres s’en chargeront pour eux. Il n’y a qu’à voir la grande distribution qui parle et oriente le commerce au nom des consommateurs, mais pour le profit du distributeur ! Les fruits calibrés, par exemple, sont une demande des distri-buteurs et non pas des consommateurs : cela contribue à la massification et à la standardisation. Autre acteur à s’accaparer les attentes des consommateurs : les associations antispécistes qui viennent tout récemment de contraindre le groupe Avril à supprimer les œufs issus de poules en cage, tant pour les œufs coquilles que pour les ovoproduits. A grand renfort de médiatisation, ces associations extrémistes poussent les entre-prises à adapter leurs plans stratégiques au risque de difficultés économiques pour l’ensemble des maillons de la filière. Alors qu’une concertation directe avec les consommateurs aurait pu permettre d’arriver à la même finalité, mais en abordant cette transition avec sérénité et confiance. Pour favoriser ce travail en partenariat avec le consommateur, les Chambres d’agricul-ture de Bretagne ont créé un groupe de travail « alimentation » au printemps 2019.

Diversifier son portefeuille clientsLa filiale Loc Maria Biscuits, du groupe Galapagos, a réalisé une partie de son développement avec la grande distribution. Aujourd’hui, l’entreprise souhaite diversifier ses circuits de distribution pour aller chercher de nouveaux gisements de croissance durable, notamment via l’export. L’objectif affiché de l’entreprise est d’augmenter son chiffre d’affaires à l’export de 30 à 45 %. Pour contribuer à cette stratégie, un bureau vient d’ouvrir à Hong Kong pour appuyer une démarche d’exporta-tion et promouvoir les produits de l’entreprise à forte identité régionale et à haute valeur ajoutée.

Pour sa part, c’est aussi sur la qualité, tant du produit que des savoir-faire, et la marque ancrée en Bretagne, qu’a investi Armor-Lux pour diversifier son portefeuille clients : 40 % des ventes se font à destination des professionnels, entreprises ou services publics notamment. Pourtant, les écarts de compéti-tivité et de coûts de production sont sans commune mesure dans l’entreprise du textile mondiale : le coût minute d’une opératrice de confection est de 50 centimes d’euros en France, alors qu’il est de 1 à 2 centimes d’euros au Bangladesh. Face à cette concurrence étrangère et au risque de se voir prendre des parts de marchés par des produits importés à bas coût,

Jean-Guy Le Floch, PDG d’Armor-Lux répond :

Cette attention doit aussi être valable pour l’alimentation. Aux filières agricoles et agroalimentaires de passer les bons messages pour que, dans la restauration commerciale comme dans la restauration collective, le respect des consommateurs passe par une alimentation issue des filières agricoles et agroa-limentaires françaises.

C’est en poursuivant cette stratégie qu’est née Breizh Alim, pilotée par les Chambres d’agriculture de Bretagne et le Conseil Régional notamment. Cette démarche territoriale concertée a pour ambition de développer un approvisionne-ment de la restauration collective dans un esprit économi-quement responsable. Le principe est de faciliter la mise en relation entre acheteurs et entreprises locales en rapprochant l’offre et la demande : le premier guide des achats publics a été réalisé pour les œufs, les autres filières vont suivre. Il est important de se parler et de se rassembler pour construire des cahiers des charges communs, et pour faire évoluer les filières et les territoires.

Construire des relations partenariales fortes et durablesLa capacité des acteurs des filières à se mettre autour de la table pour pouvoir construire l’avenir semble plus importante en Bretagne qu’ailleurs, du fait d’un maillage agricole et agroa-limentaire fort sur ce territoire et de leur poids dans l’économie régionale. Pour autant, avoir un juste prix, qui soit travaillé par les filières et partagé jusqu’aux consommateurs n’est pas si simple ! Il faut arriver à passer de la notion de prix à celle de valeur en intégrant toutes les dimensions de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) : sociale, environnementale et économique.

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« Il faut co-construire avec le consommateur et commu-niquer pour redonner de la fierté au producteur. »

« On a trouvé des intermédiaires qui restent dans une relation respectueuse des gens qu’ils habillent, et qui sont très préoccupés par le bien-être des salariés. »

« L’idéal est effectivement d’aller jusqu’au consom-mateur. Si les agriculteurs ont créé collectivement les coopératives dans cet objectif, dans le secteur du textile, chaque entreprise a dû aller, seule, au-devant des consommateurs ; et celles qui ne l’ont pas fait n’existent plus. Aujourd’hui, 50 % des clients d’Armor-Lux sont des consommateurs directs, et c’est une fierté pour l’en-treprise qui revendique deux préceptes pour réussir : qualité du produit et respect du consommateur. »

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Face à cette situation, un changement de paradigme va s’im-poser. L’entreprise du futur devra répondre aux évolutions des attentes des salariés : formation virtuelle, exosquelette, organisation du temps de travail,…

Joël Tingaud, Président de la commission économie de l’ABEA témoigne : « Il nous faut inventer des nouveaux modes de collaboration avec nos futurs salariés pour asseoir notre modèle économique ».

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Jean-Guy Le Floch, PDG d’Armor-Lux précise :

Mais dans cette économie libérale et cette concurrence mondiale, l’agriculture et l’agroalimentaire français laissent trop souvent la place aux importations ; et les accords de libre-échange comme celui avec le Mercosur devraient intensifier cette pression des importations étrangères. Si la question de la compétitivité est

évidente, et qu’il faut en identifier les causes pour redresser la situation, il faut aussi se poser la question des relations partena-riales entretenues avec les fournisseurs et les acheteurs.

Laurent Kerlir, vice-Président de la Chambre d’agriculture de Bretagne ajoute :

Joël Tingaud, Président de la commission économie de l’ABEA conclue :

Le recrutement des salariés, un enjeu fort pour les filières agricoles et agroalimentaires

Le contexte de reprise économique accentue les difficultés à recruter pour les filières agricoles et agroalimentaires. En Bretagne, l’emploi salarié progresse de 3,1 % entre les quatrièmes trimestres 2016 et 2018, et le taux de chômage baisse de 1,4 point sur cette même période. Avec un taux de chômage de 7 %, la Bretagne affiche le plus bas niveau fran-

çais, avec les Pays de la Loire, et le plus bas que la région ait connu depuis dix ans. Cette situation créé une concurrence intersectorielle pour le recrutement de salariés.

L’enquête annuelle BMO (Besoins en main d’œuvre) de Pôle Emploi permet d’objectiver l’amplification des difficultés de recrutements dans les secteurs agricoles et agroalimentaires :

Des difficultés de recrutements qui s’accentuent

Source : Pôle emploi, enquête BMO (Besoins en main d’œuvre).

« Armor-Lux est adepte de la RSE dont la dimension économique veut que chacun puisse gagner normalement et librement de l’argent. Nous avons mis en place des partenariats qui dépassent les relations clients-fournisseurs et qui sont normés ISO 26 000 avec un coefficient excellence, preuve de l’exemplarité des relations. Le prix n’est pas un tabou et les prix pratiqués par la concurrence sont connus de tous. Dans cette extrême transparence mondiale, l’entreprise bretonne trouve sa place sans ne rien cacher à personne. »

« La différenciation et la montée en gamme opérées par les filières agricoles et agroalimentaires françaises doivent être expliquées et valorisées dans des relations partenariales durables qui répondent à des stratégies communes de filière. »

« Tout seul on va plus vite, ensemble, on va plus loin ! »

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DOSSIERSE SENTIR FIER DE SON MÉTIER, AGIR, COOPÉRER ! RETOUR SUR LES RENCONTRES ÉCONOMIQUES ET SOCIALES DES FILIÈRES AGRICOLES ET AGROALIMENTAIRES BRETONNES

Regards croisés d’André Sergent, Président de la Chambre régionale d’agriculture de Bretagne et d’Annie Saulnier, Présidente de l’Association bretonne des entreprises agroalimentaires.

Comment sont nées ces Rencontres économiques et sociales des filières agricoles et agroalimentaires de Bretagne ?

André Sergent : En 2017, les Chambres d’agriculture de Bretagne se sont impliquées dans les Etats Généraux de l’Alimentation en organisant un débat régional sur la créa-tion et la répartition de la valeur. Cette journée avait donné lieu à de riches échanges entre l’agriculture et l’agroalimen-taire et nous ne voulions pas en rester là ! Les Rencontres économiques et sociales des filières agricoles et agroalimen-taires ont donc vu le jour dès 2018.

Annie Saulnier : Nous avions conscience, lors de la mise en place des EGA, de la forte tentation de diviser les parties prenantes, en opposant l’agriculture et l’agroalimentaire. Notre intuition en Bretagne a été, au contraire, d’avancer encore plus unis et engagés dans la création de valeur. Pour cette deuxième édition en 2019, l’objectif reste le même : que les liens entre agriculture et agroalimentaire se poursuivent et se renforcent. Nos relations durables permettent d’avoir ces moments de partage et de prospective indispensables à une dynamique de filière. L’esprit de co-construction entre agri et agro porte haut et fort notre ambition autour du bien-manger pour transformer nos essais en réussite collective.

Quelle lecture avez-vous du contexte économique d’au-jourd’hui et quelles sont les perspectives pour maintenir un tandem agriculture - agroalimentaire performant en Bretagne demain ?

André Sergent : Si les marchés mondiaux sont plus porteurs aujourd’hui, l’agriculture décline au niveau national. Sans les vins et les spiritueux, la France ne serait plus une nation forte dans le commerce agricole et agroalimentaire mondial. Il faut inverser la tendance ! Notre Bretagne a des atouts naturels pour faire évoluer son agriculture et se positionner sur l’ensemble des marchés, du local à l’international. L’agriculture et l’agroalimentaire bretons d’aujourd’hui doivent, de plus, assurer un délicat dosage entre la réponse aux attentes sociétales et les réalités du marché.

Annie Saulnier : Une étude nationale sur la compétitivité des industries agroalimentaires montre un positionnement très défensif des entreprises sans vraie visibilité sur l’avenir. La loi Egalim et sa promesse de meilleure répartition de la valeur tout au long de la chaîne alimentaire ne fera pas tout. Les acteurs de la filière prennent aussi des initiatives et actionnent leurs propres leviers. Nous devons aller cher-cher les moteurs de croissance là où ils sont, en avançant ensemble, acteurs économiques, politiques et partenaires institutionnels. Quand la Bretagne joue collectif, elle est redoutable !

Cette matinée a permis d’identifier de nouveaux gisements de croissance durable grâce à des exemples concrets. Quel est l’élément essentiel à retenir ?

Annie Saulnier : Les échanges qui ont eu lieu doivent être considérés comme des curseurs de la situation économique et sociale de nos filières agricoles et agroalimentaires et comme une boussole nous indiquant la direction à suivre pour prendre les bonnes décisions et faire les bons inves-tissements. L’évolution de notre modèle économique doit bénéficier d’une action proactive : adaptons-nous en perma-nence et soyons souples dans nos mises en œuvre, de la production à la commercialisation, pour rester en phase avec le consommateur, où qu’il soit !

André Sergent : Le consommateur, c’est lui, le client final, et toute une génération d’agriculteurs, dont je fais partie, l’a oublié. Produire, on sait le faire, et on le fait bien. Mais vendre, bien vendre, on ne s’est pas impliqué là-dessus. Pour-tant, nos aînés ont créé les coopératives dans cet objectif : bien vendre collectivement nos produits. Nous devons nous réengager à ce sujet, et saisir l’opportunité de toute la diversité des modes de commercialisation qui existent aujourd’hui. Il faut s’inspirer des trajectoires gagnantes mises en avant lors de cette journée.

Pour finir, un mot sur le contexte social dans les filières agricoles et agroalimentaires en Bretagne aujourd’hui ?

Annie Saulnier : L’économique et le social sont évidemment intimement liés pour pouvoir performer durablement. Dans un contexte de reprise économique en Bretagne, tous les secteurs voient leurs difficultés de recrutement s’accentuer. L’agriculture et l’agroalimentaire n’échappent pas à la règle ! Nos métiers sont réellement en tension : manque de candi-dats ou candidats à former avant d’être opérationnels. Le recrutement de salariés est un véritable enjeu pour main-tenir un tissu agricole et agroalimentaire fort en Bretagne. Nourrir l’humanité au sens profond du terme, est le plus beau métier du monde !

André Sergent : En agriculture, nous avons aussi un autre enjeu majeur : la transmission des outils qui vont se libérer pour des projets d’installation. Dans certaines filières, plus de 50 % des exploitations vont changer de main dans les dix ans à venir. Il faut trouver des jeunes qui ont envie de s’y engager et leur donner des perspectives durables. Nous avons notamment su adapter nos schémas d’organisation du travail, via le développement des formes sociétaires, du salariat ou des délégations d’activités, pour être en phase avec leurs attentes. Je suis confiant et optimiste : il y a de l’avenir pour la production agricole dans nos territoires !

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Comité de rédaction

Elise BEKARIConseil régional de Bretagne

Gilbert BLANCHARDExpert associé

Roland CONANECCBB Capbiotek

Nicolas DEBETHUNEChambres d’agriculture de Bretagne

Gwénola FLOC’H PENNChambres d’agriculture de Bretagne

Kristina FRETIEREDRAAF Bretagne

Marie KIEFFERABEA

Nathalie LE DREZENChambres d’agriculture de Bretagne

Youenn LOHEACBrest Business School

Valérie MARIETTEINSEE Bretagne

Guillaume MILLAUChambre de commerce etd’industrie de région Bretagne

Catherine MINIOTChambre de commerce etd’industrie Ille-et-Vilaine

Sandrine MOUTAULTDRAAF Bretagne

Julie RIOChambres d’agriculture de Bretagne

Patrick ROLANDINBanque de France

Hervé THIBOULTChambre régionale d’agriculturede Bretagne (Collège salariés)

Joël TINGAUDAtelier de l’Argoat

Dépôt légal 3ème trimestre 2019

Directeur de la publication : André SERGENT

Responsable de la rédaction : Julie RIO

Maquette et exécution : PYGMALION - Rennes

La reproduction des informations contenues dans cette revue est autorisée sous réserve de la mention de la source : “Revue de l’Observatoire des IAA des Chambres d’agriculture de Bretagne”.

Cette revue trimestrielle d’informations bénéficie du soutien financier du Conseil Régional de Bretagne.

A C T U A L I T É S

Le Concours Général Agricole : 5 bonnes raisons de participer !1 - Être reconnu en France pour la qualité de vos produits

Participer au Concours Général Agricole et obtenir une médaille permet de bénéficier d’une forte reconnaissance en France. Un produit médaillé est un gage de qualité indéniable qui permet aux consommateurs d’être assurés d’acheter un produit français et de qualité.

2 - Faire parler de l’ancrage régional de votre entreprise

Plusieurs années de travail, voir celles de toute une vie, sont nécessaires pour développer ces savoir-faire uniques et précieux souvent propre à une région.

3 - Une ouverture vers l’international

Le médaillon à la feuille de chêne apposé sur les produits permet de rassurer les consommateurs et surtout d’ouvrir plusieurs portes à l’international. Les consommateurs étrangers font confiance à ce médaillon et savent que sa présence garantie l’excellence d’un produit du terroir français.

4 - Valoriser les filières agricoles

Participer au Concours Général Agricole permet de se mesurer à d’autres entreprises, producteurs, artisans et de conforter la qualité de ses produits. Mais c’est surtout l’occasion de mettre un coup de projecteur sur les filières agricoles bretonnes.

5 - Être fier de sa passion du goût

Le Concours Général Agricole c’est avant tout des hommes et des femmes de talents qui s’engagent pour le goût. Quelle fierté d’être récompensé pour cet engagement quotidien pour la gastronomie française.

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Rejoignez le pôle agricole et alimentaire Bretagne en tant qu’exposant sur le salon Rest’Hôtel les 09 et 10 février à RennesPendant deux jours, les professionnels des CHR (cafés, hôtels, restaurants), des métiers de bouche et de la restauration collective se donnent rendez-vous au parc des expositions de Rennes à l’occasion du salon Rest’Hôtel.

A cette occasion, la Chambre d’agriculture de Bretagne et l’UMIH Bretagne (Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie), organisent le Pôle Agricole et Alimentaire de Bretagne pour rassembler en un seul espace, les exposants bretons professionnels du secteur.

Vous êtes une coopérative, un industriel ou un artisan, vous entretenez des relations de collaboration étroite avec vos agriculteurs fournisseurs, ce pôle Agricole et Alimentaire est fait pour vous !

Vous souhaitez développer vos ventes et votre chiffre d’affaires, trouver de nouveaux relais de croissance et de distribution, identifier des réseaux de référencement pour vos produits et services ? Venez nous rejoindre en exposant sur cet espace professionnel qui vous est entièrement dédié et rencontrez les 3 000 établissements professionnels de l’alimentation qui sont attendus pour découvrir votre savoir-faire et votre gamme de produits.

La présence de vos fournisseurs agricoles est nécessaire sur votre espace.

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