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This article was downloaded by: [Ryerson University] On: 09 October 2014, At: 22:55 Publisher: Routledge Informa Ltd Registered in England and Wales Registered Number: 1072954 Registered office: Mortimer House, 37-41 Mortimer Street, London W1T 3JH, UK Loisir et Société / Society and Leisure Publication details, including instructions for authors and subscription information: http://www.tandfonline.com/loi/rles20 La représentation sociale du football chez les jeunes adultes issus d’un milieu social défavorisé: une étude exploratoire Sandrine Gaymard a & Pauline Joly a a Université d’Angers Published online: 02 Jul 2013. To cite this article: Sandrine Gaymard & Pauline Joly (2012) La représentation sociale du football chez les jeunes adultes issus d’un milieu social défavorisé: une étude exploratoire, Loisir et Société / Society and Leisure, 35:2, 263-292, DOI: 10.1080/07053436.2012.10707844 To link to this article: http://dx.doi.org/10.1080/07053436.2012.10707844 PLEASE SCROLL DOWN FOR ARTICLE Taylor & Francis makes every effort to ensure the accuracy of all the information (the “Content”) contained in the publications on our platform. However, Taylor & Francis, our agents, and our licensors make no representations or warranties whatsoever as to the accuracy, completeness, or suitability for any purpose of the Content. Any opinions and views expressed in this publication are the opinions and views of the authors, and are not the views of or endorsed by Taylor & Francis. The accuracy of the Content should not be relied upon and should be independently verified with primary sources of information. Taylor and Francis shall not be liable for any losses, actions, claims, proceedings, demands, costs, expenses, damages, and other liabilities whatsoever or howsoever caused arising directly or

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Loisir et Société / Society andLeisurePublication details, including instructions forauthors and subscription information:http://www.tandfonline.com/loi/rles20

La représentation socialedu football chez les jeunesadultes issus d’un milieusocial défavorisé: une étudeexploratoireSandrine Gaymarda & Pauline Jolya

a Université d’AngersPublished online: 02 Jul 2013.

To cite this article: Sandrine Gaymard & Pauline Joly (2012) La représentationsociale du football chez les jeunes adultes issus d’un milieu social défavorisé: uneétude exploratoire, Loisir et Société / Society and Leisure, 35:2, 263-292, DOI:10.1080/07053436.2012.10707844

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la représentatIOn sOcIale du fOOtball chez des jeunes adultes

Issus d’un mIlIeu sOcIal défavOrIsé : une étude explOratOIre

Sandrine gAyMArDPauline Joly

Université d’Angers

Préambule

Le football est le sport le plus populaire dans le monde (Harris Interactive Poll., 2010 ; Lindner et Hawkins, 2012). Il est d’ailleurs défini par Bromberger (1994) comme « …la bagatelle la plus sérieuse du monde ». Particulièrement visibles dans le stade, on observe toutefois des pratiques dans les quartiers ou les cités que l’on appelle « de pied d’immeuble ». Le football constitue par ailleurs un loisir privilégié chez les garçons des milieux populaires (Zotian, 2010). Si plusieurs champs théoriques ont investi cette thématique, le football n’a pas été étudié en tant qu’objet de représentation sociale. Cette approche sociocognitive permet de voir comment l’objet a été approprié par le groupe étudié, comment il a pu être modifié à travers les pratiques.

Dans un premier temps, nous ferons référence à la sociologie et à l’anthropologie du sport, qui ont permis des articulations essentielles avec les notions de valeurs et de classes sociales, notamment. Nous présenterons ensuite les pratiques du football en partant de ses origines pour évoquer son incroyable développement dans le monde. Les pratiques institutionnelles et celles dites « de pied d’immeuble » seront alors mises en perspective. Nous définirons ensuite le concept de représentation sociale que nous illustrerons avec quelques applications dans le domaine des pratiques sportives. Après avoir présenté les deux outils et la population, nous exposerons les résultats qui seront ensuite discutés au regard de la littérature existante.

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Sociologie et anthropologie du sport : définition et valeurs modernes

Le sport est un ensemble de pratiques, d’activités physiques, individuelles ou collectives. Il met en œuvre des qualités physiques, est institutionnalisé par des règles fédérées et son objectif premier est la compétition. Le sport détient une place importante dans notre société. Selon le CNOSF1, en 2010, la France comptait 16 millions de licenciés et 14 millions de sportifs non licenciés. Les objectifs de pratique sont différents : détente, évasion, passion, compétition, profession, santé et bien être, amusement… Le sport, par sa popularité, a des objectifs bien précis en termes d’influence. Il touche à un grand nombre de problématiques actuelles et s’en rapproche, en disposant d’un champ d’intervention de plus en plus important (problématiques d’em-ploi, de développement durable, de santé, de citoyenneté…). Pour certains auteurs, le sport est un phénomène universel qui a toujours existé (depuis les Jeux Olympiques antiques). Pour d’autres, il est apparu au XIXe siècle en Angleterre, suite à l’industrialisation, et s’est institutionnalisé peu à peu (Bourdieu, 1984 ; Bourdieu et Chartier, 2010 ; Brohm et Adoino, 1991).

En 1974, Snyder et Spreitzer, proposant une vue d’ensemble de la sociologie du sport, situent cette spécialité par rapport aux autres spécialités plus conventionnelles comme la famille ou la religion. Ils suggèrent que la sociologie du sport est « une espèce de sociologie des loisirs » et évoquent la composition multidisciplinaire de cette spécialité. Cette ouverture disci-plinaire, nous la retrouvons dans l’anthropologie du sport qui interroge le phénomène sportif en tant que « fait social global » (Bambuck, 1991).

Dans les sociétés modernes, le sport constitue un modèle social de référence et repose sur trois principesessentiels : « une liberté d’accès à la pratique, des règles écrites et connues de tous, une institution qui valide les résultats obtenus par l’intermédiaire d’un agent mandaté afin de veiller au respect des règles édictées » (Chapron, 2004, p. 71). La valeur la plus prégnante du sport, du fait de son universalité, fait écho au principe fondateur de toute démocratie : la liberté. Le sport doit avant tout être garant de l’égalité des chances : « La construction réglementaire du sport tend à œuvrer dans le sens commun d’une justice équitable, car elle assure une mission d’universalité et d’uniformité des modalités de pratique. » (Chapron, 2004, p. 73). Pour Liotard (2004), la principale valeur du sport se trouve dans son caractère éducatif, « au sens où il permet aux individus d’intérioriser les significations sociales, d’incorporer des valeurs et des idéaux non seulement corporels mais également relationnels » (p. 120). Les spécialistes du champ des sciences de l’éducation confirment d’ailleurs les fonctions éducatives du sport. Pour Mialaret (1991), le sport renvoie « à un système de valeurs qui n’est pas incompatible avec le système de valeurs de l’éducation ; nous ne signalerons

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ici que la notion de dépassement personnel, la dialectique de l’individuel et du groupe au sein de l’équipe, la participation à une réalité sociale qui a ses règles qu’il faut apprendre et appliquer ensuite, le sentiment d’appartenance à une communauté » (p. 126). Le sport a aussi des fonctions symboliques évoquées par Defrance (1995) ; celles-ci sont liées aux identités collectives, aux figures héroïques et aux faits mythiques. L’expression du talent, la médiatisation des sports et la forte audience qu’elle suscite contribuent à la production des figures héroïques. L’auteur fait par exemple référence à « des figures de la réussite complète », comme le skieur Jean-Claude Killy, des figures de la popularité, comme le cycliste Raymond Poulidor ou à des figures de courage représentant le destin brisé, comme le tennisman Arthur Ashe.

Holt (1991) évoque pour le football la figure de « Denis Law », qui fut le plus jeune joueur international d’Écosse de l’après-guerre. Considéré comme « un patriote modèle », on reconnait dans la description de ce héros les enjeux identitaires de l’Écosse à l’époque : « à la fois un emblème de la société écossaise et, de façon plus controversée, un “Anglo2” » (p. 50). Bozonnet (1996) présente également le mythe du champion en le définissant comme « un puissant moyen d’identification et de gratification des individus et des groupes sociaux » (p. 193). L’auteur explique que le champion a une « utilité sociale » plurielle car c’est un modèle au niveau du sport, mais aussi pour tout un peuple.

Même si le sport a ce pouvoir de rassemblement des individus, il existe des différences sociales qui persistent. Ordioni (2002) présente deux approches : l’approche « légitimiste » et l’approche « relativiste ». La première renvoie aux travaux de Bourdieu (1979) qui définit des groupes sociaux asso-ciés à trois pratiques différentes : les classes populaires,qui ont un rapport au corps instrumentalisé, favoriseraient les pratiques valorisant la puissance corporelle. Les classes moyennes,qui ont un rapport au corps hygiéniste, ne privilégieraient pas de pratiques particulières, le sport étant associé à l’hygiène, la santé. Les classes bourgeoises : le sport a ici un lien avec la tradition familiale, le prestige social. La pratique sportive peut prendre des formes différentes, les notions de temps, de lieu de pratique rentrent aussi en compte. L’approche « relativiste » définit quant à elle la pratique sportive et sa culture comme pouvant être constitutives de l’identité collective, les classes sociales se retrouvant ou non dans les valeurs et la pratique d’un sport en particulier.

Les approches sociologique et anthropologique du sport ont permis l’émergence de problématiques spécifiques et la considération du sport comme un fait social. Comme l’écrivent Eliaset Dunning (1994) : « Nous avions conscience que la connaissance du sport était la clef de la connaissance de la société ».

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On retrouve dans l’étude des pratiques footballistiques une diversité des approches témoignant à la fois du dynamisme impulsé par cette thématique et de son caractère international.

Le football et ses pratiques : illustrations dans le monde

Le football, avec ses règles, fait son apparition en Angleterre au XIXe dans les « Public Schools » où l’on formait les futures élites (Darbon, 2008 ; Dietschy, 2010). La Fédération anglaise de Football (Football Association, FA) fut créée en 1863 à Londres. Au XIXe siècle, les « clubs » du sud de l’Angleterre étaient opposés au professionnalisme, contrairement à l’Angle-terre du nord, dominée par l’industrie (Mason, 1980). Il faudra attendre le XXe siècle pour que les différences sociales s’estompent.

La pratique du football va se répandre grâce aux voyages des Anglais sur les autres continents et connaitre une évolution planétaire. Aujourd’hui, certains continents comme l’Afrique, l’Europe ou l’Amérique du Sud sont davantage dominés par cette discipline.

L’évolution du football à travers le monde a été telle que l’on trouve de nombreux articles faisant référence à des aspects divers en rapport avec les pratiques footballistiques. Ainsi, le football étant devenu une des industries les plus mondialisées (Foer, 2004a, 2004b), plusieurs articles font référence au phénomène de « globalisation » (Ben-Porat et Ben-Porat, 2004 ; Croci et Ammirante, 1999 ; Milanovic, 2005) ou à sa résistance (Lindner et Hawkins, 2012). On trouve également un certain nombre de recherches liées au pro-blème du hooliganisme qui s’est développé dans les années 1960 parmi les supporteurs anglais ; la violence des « fans » apparaît comme une thématique récurrente (Armstrong et Harris, 1991 ; Duke et Crolley,2006 ; Dunning, Maguire, Murphy et Williams, 1982 ; Giulianotti, Bonney et Hepworth, 1994 ; Johnes, 2000 ; King, 2001 ; Roadburg, 1980). Le football féminin est une autre pratique qui s’est développée plus récemment et qui est plus particulière-ment identifiée dans certains pays (Brown, 2006 ; Hong, 2003 ; Knoppers et Anthonissen,2003) ; les États-Unis sont considérés comme l’une des nations les plus importantes en ce qui concerne le football féminin.

À côté de problématiques liées au professionnalisme et à des aspects économiques ou financiers (Hoehn et Szymanski, 1999), on trouve aussi des recherches plus sociologiques ou anthropologiques. Par exemple, Müller, Van Zooten et Laurens de Roode (2008) ont étudié, à travers l’analyse des discours, la valeur d’intégration sociale de la participation à un tournoi de foot. Taylor (1984) évoque divers aspects économiques et sociaux du football d’après-guerre en Angleterre et au Pays de Galle et présente les limites d’une approche économique ignorant la culture locale et les traditions de classes.

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Le football a la particularité de conjuguer des paradoxes comme « la tentation individualiste et l’esprit d’équipe », « la fraternité sportive et les déchirements nationalistes » (Dietschy, 2010). Il est d’ailleurs fait référence dans l’histoire du football au passage d’une pratique très individualiste, « le dribbling game », au « passing game » qui aurait été introduit dans les années 1860 (Green, 1960).

Defrance (1995) compare également le football au fonctionnement de la société industrielle. Le stade pourrait en effet être défini comme un espace social où se rejoue ce qui se joue dans la société. Le football rassemble les classes sociales, il atteste d’une « diversification sociale », et chacun peut s’affirmer à travers ce sport malgré les réalités sociales. Le football reste en effet un sport très populaire, notamment car il a l’avantage de ne pas être réservé à un type de « physique » en particulier.

La plupart des auteurs distinguent deux pratiques de football : la pra-tique « institutionnelle » assimilée à celle du stade et celle de « pied d’im-meuble » pratiquée dans les quartiers et dans un milieu social défavorisé (Duret et Augustini, 1993 ; Travert, 2003 ; Travert, Griffet et Therme, 1998).

Travert (2003) compare ces deux pratiques sur plusieurs dimensions. Dans le football institutionnel, l’origine des règles est prescrite, le contrôle de celles-ci passe par l’arbitrage et elles sont engagées « entre eux et nous ». Dans le football de « pied d’immeuble », l’origine des règles est négociée, leur contrôle est animé et la règle se déroule « entre nous ». Le football institutionnel a des droits et des devoirs ainsi que des contraintes motrices.Dans le cas du football de « pied d’immeuble », ils sont remplacés par une manière d’être et des circonstances : « ce ne sont pas des contraintes institu-tionnelles et réglementaires qui définissent ses contours. C’est l’adaptation aux circonstances qui lui donne forme. » (Travert, 2003, p. 82). Ce qui est important dans cette pratique, c’est la prouesse technique des joueurs qui leur donne le sentiment d’exister. Il y a avant tout de la solidarité et une émotion partagée. Les joueurs occupent un bout de trottoir ou un coin de rue de leur cité, il n’y a pas besoin de pistes ni de matériel, juste d’un ballon et d’un terrain, ce qui représente une extrême simplicité dans la mise en œuvre. Cette pratique particulière du football est vue par certains auteurs (Crosset et Beal, cités par Travert, 2003) comme une pratique à logique oppositionnelle ; son objectif serait de résister à la culture dominante, ici du football institutionnel, avec une opposition entre « eux » et « nous ».

Hélal et Mignon (1999) parlent du football comme étant un vecteur de socialisation pour les jeunes, et notamment pour les jeunes des banlieues, leur permettant de retrouver leur dignité. Le football permet au quartier de vivre et cela aide les jeunes à s’évader, à sortir du quotidien. Ce jeu, comme tout sport, est porteur de valeurs et d’apprentissages ; il permet effectivement

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l’assimilation des notions de bien et de mal par des règles simples et modu-lables très peu contraignantes. Le jeu apprend aux jeunes que dans bien des situations, rien n’est définitif et tout peut changer. La notion de temporalité leur permet aussi de faire un apprentissage : il faut savoir gérer le temps et l’utiliser à son avantage.

Une autre pratique footballistique a été récemment identifiée par Mauny et Gibout (2008). Ces auteurs, par l’entremise d’un projet socio-anthropologique, évoquent une pratique qu’ils appellent le football « sau-vage ». S’appuyant sur les travaux de Levi-Strauss et de Halbawchs, ils définissent cette pratique comme étant différente des pratiques référencées : « Ainsi, entre homologie et divergence, le football « sauvage », en tant que pratique distanciée et localisée, se forge une reconnaissance culturelle alter-nant sans cesse et systématiquement entre un pôle l’identifiant comme un autre football et un pôle l’identifiant comme un football autrement. » (p. 61).

Parmi ces différentes recherches portant sur la pratique footballis-tique, aucune n’a été répertoriée dans le champ de la psychologie sociale. Le concept de représentation sociale que nous présentons ci-dessous nous permettra d’introduire et de définir ce concept sur lequel repose cette étude.

Le concept de représentation sociale

En étudiant l’introduction de la psychanalyse dans la société française, Moscovici (1961/76) a établi le concept de représentation sociale, dont les origines se retrouvent dans la notion de représentation collective de Durkheim (1898).

La représentation sociale est définie comme « une modalité de connaissance particulière ayant pour fonction l’élaboration des compor-tements et la communication entre individus » (Moscovici, 1976, p. 26). Depuis son travail princeps, Moscovici a montré qu’il n’y avait pas de coupure entre l’univers extérieur et l’univers intérieur de l’individu ou du groupe. L’objet se trouve dans un contexte qui n’est pas figé, puisqu’il est en partie élaboré par l’individu et le groupe, et ne constitue en aucun cas une « copie » de la réalité. Ainsi, la définition de la psychanalyse dépend « de l’attitude vis-à-vis de la psychanalyse ou du psychanalyste et de l’expérience propre de l’auteur de la définition. » (p. 46). Dans son étude, Moscovici a mis à jour les processus d’objectivation et d’ancrage. Ces mécanismes montrent comment la représentation est matérialisée en un objet concret et comment elle se « raccroche » à un schéma de pensée préexistant.

Les recherches de Moscovici ont donné naissance à plusieurs courants de recherche, dont celui de l’approche structurale développée par l’école d’Aix-en-Provence en France (Abric, 1976, 1984, 1994 ; Flament, 1987, 1989,

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1994). Selon cette approche, la représentation sociale est définie comme un système sociocognitif. Elle est organisée autour d’un noyau central et d’une périphérie. Le noyau central est consensuel et absolu, il a une fonction organisatrice et génératrice de sens. La périphérie est liée aux pratiques individuelles, elle est conditionnelle et constitue la partie opératoire de la représentation (Gaymard, 2000). Dans une perspective de comparaison entre deux groupes, c’est la constitution similaire du noyau de la représentation qui permet de conclure à l’existence d’une représentation unique pour les deux groupes. La présence d’un ou de plusieurs éléments différents dans le noyau conduit au constat qu’il s’agit de deux représentations différentes (Flament, 1996). On dénote depuis quelques années des recherches plus spécifiques portant sur les aspects normatifs des représentations sociales. Flament (1999) a ainsi montré qu’il existait dans la représentation différents modèles normatifs pouvant influencer les réponses des sujets en condition normale. Étudiant la représentation sociale des études supérieures, il a demandé à des étudiants de répondre à un questionnaire en leur nom propre (condition normale), puis a utilisé d’autres consignes en condition pro-normative et contre-normative (par exemple « répondez comme le ferait un étudiant bien vu vs mal vu par les enseignants »). Ces consignes ont été ultérieurement appelées consignes de substitution (Guimelli et Deschamps, 2000). Les études qui ont suivi montrent une grande variété dans l’utilisation de ce type de consigne (Flament et Milland, 2010). En effet, les consignes de substitu-tion illustrent plusieurs mécanismes qui ne s’excluent pas nécessairement les uns des autres. Ainsi, ces consignes permettent de faire référence à un objet sensible de représentation sociale (Deschamps et Guimelli, 2004 ; Guimelli et Deschamps, 2000). Dans d’autres études, elles illustrent l’existence de modèles normatifs dans la représentation (Flament, 1999 ; Flament, Guimelli et Abric, 2006 ; Gaymard, 2003b, 2009 ; Gaymard et Andrés, 2009). Enfin, elles peuvent attester de la capacité des sujets à se substituer aux autres en produisant d’autres représentations que les leurs (Campbell, Muncer, Guy et Banim, 1996 ; Gaymard, 2003b). Ainsi, Guimelli et Deschamps (2000), étu-diant les représentations sociales des gitans, constatent les résultats suivants. En condition normale, c’est-à-dire lorsque les sujets donnent des réponses personnelles, les associations produites sont globalement positives (par exemple, « musique » ou « famille »). Par contre, en condition de substitution, c’est-à-dire lorsqu’on demande aux sujets de répondre « comme le feraient les Français en général », les associations sont négatives (par exemple, « vols » ou « sales »). Les auteurs évoquent le cas d’un objet sensible de représentation sociale qui ferait l’objet d’une pression normative (désirabilité sociale) en condition normale. À l’époque, Guimelli et Deschamps faisaient référence à la notion de « zone muette », à laquelle sera finalement préférée celle de « zone masquée » (Flament, Guimelli et Abric, 2006 ; Gaymard et Andrés, 2009).

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Gaymard (2009) demande à un groupe de jeunes conducteurs de compléter un questionnaire sur la conduite de deux façons. Tout d’abord en condition normale (en leur nom propre), puis de façon à se faire bien voir vs mal voir par leur groupe d’amis ; cette dernière consigne est plus proche du paradigme de l’auto-présentation (Jellison et Green, 1981)3. L’auteur constate que le modèle « bien vu par les amis » est un bon indicateur des réponses en condition standard ; celles-ci étant fortement conditionnelles, on considère que les transgressions légitimes (Gaymard, 2007) sont « bien vues » par le groupe de pairs. L’approche de la substitution permet ici de mettre à jour l’importance des modèles de référence dans la représentation.

Une autre dimension fondamentale doit être intégrée dans ce modèle : la question des pratiques indissociables des représentations (Abric, 1994 ; Moliner, Rateau et Cohen-Scali, 2002). De nombreuses études ont ainsi comparé les objets en fonction des pratiques pouvant être sociales ou pro-fessionnelles (Bertrand et Roussiau, 2001 ; Gaymard, 2006 ; Reynier, 2001). Dans le domaine qui nous intéresse plus directement, Pétrova et Truchot (2001) ont comparé la représentation sociale du sport chez des filles et des garçons âgés de 12 à 17 ans. La majeure partie des réponses données par les jeunes qui font du sport prend appui sur les notions de défoulement, d’amusement, d’esprit d’équipe et de maîtrise de la technique. On relève également des termes faisant référence à la problématique adolescente et plus particulièrement à la crise adolescente : « oublier ses problèmes, le courage, avoir un beau corps, l’équilibre dans la vie » (Pétrova et Truchot, 2001, p. 74). Les thèmes qui différencient le plus les garçons des filles sont la compétition, la recherche de célébrité, l’espoir ; ces différences sont plus marquées chez les plus jeunes. L’âge et la pratique apparaissent comme des variables qui différencient les réponses chez les jeunes en fonction de leurs préoccupations (sorties, célébrité, entretien du corps…). Mais il y a aussi des différences en fonction du milieu social. Ainsi, pour les populations les plus modestes, le sport représente une échappatoire qui permet d’oublier les problèmes et d’avoir des rêves de célébrité. Pour les populations d’adolescents issus des milieux les plus favorisés, le sport permet de se dépenser, de se surpasser, et de développer le goût pour l’effort. Pour les adolescents dont les parents sont les plus diplômés, le sport est plus en lien avec l’esthétisme, la beauté du corps. L’étude de Pétrova et Truchot (2001) montre ainsi qu’il existe des différences dans le contenu des représentations sociales selon le sexe, l’âge, mais également selon la classe sociale.

Lacassagne, Pizzio et Jebrane (2006) ont étudié la représentation sociale du sport en comparant des étudiants de la filière STAPS (Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives) avec des étudiants d’un département de Gestion des Entreprises et des Administrations d’un Institut Universitaire Technologique (IUT). Les auteurs observent que les arbres de

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similitude se structurent autour d’un même noyau, qui est la compétition, mais que pour les étudiants de la filière STAPS, le sport de haut niveau est associé à la notion de plaisir. Ajcardi et Therme (2007) ont étudié la représentation sociale du ski extrême dans trois groupes. Le premier est constitué de personnes qui n’ont jamais pratiqué de ski, le second regroupe des personnes qui pratiquent le ski, mais uniquement sur piste et le dernier regroupe des personnes qui pratiquent le ski en hors-piste. Les résultats montrent que les non pratiquants et les pratiquants sur piste font référence à des termes comme « danger » et « risque ». Par contre, les pratiquants du hors-piste font quant à eux référence à des termes comme « sensation », « poudreuse » et « liberté ».

Ces travaux montrent que différentes pratiques sportives ont été étu-diées comme objet de représentation sociale et que la représentation sociale diffère en fonction de la pratique, de l’âge, du sexe, de la culture et de l’appartenance sociale.

Dans cette étude, nous souhaitons analyser la représentation sociale du football auprès de jeunes adultes issus d’un milieu social défavorisé et de leurs parents par le biais de la méthode de substitution. La population approchée dans cette étude est plus rarement étudiée, car il s’agit de jeunes adultes pratiquants.Les travaux antérieurs auxquels nous avons fait référence n’ont jamais étudié le football en tant qu’objet de représentation sociale selon l’approche proposée ici. De plus, on peut se demander si la dernière Coupe du Monde a eu un impact négatif en termes de représentation (Duluc, 2010). En nous appuyant sur les recherches précédentes, nous poserons les hypothèses suivantes :

– La représentation sociale du football chez les jeunes sera constituée d’items en lien avec les notions d’esprit d’équipe, de combativité, de divertissement et d’habiletés techniques. Cette représentation est directement liée à leurs pratiques d’amateurs.

– En condition de substitution (« répondez comme le feraient vos parents »), nous faisons l’hypothèse d’une représentation du foot-ball plus ancrée dans le milieu professionnel, car c’est une pratique fortement médiatisée.

Méthode

L’étude des représentations sociales est liée à une diversité méthodologique : « C’est une tradition de recherche hautement hétérogène. Elle n’est pas pres-criptive pour ce qui est de la méthodologie » (Farr, 1992, p. 185). Nous avons fait appel à deux outils fréquemment utilisés dans l’approche structurale

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des représentations sociales : les associations libres et le questionnaire de caractérisation (Abric, 2003 ; Gaymard, 2003a, 2006 ; Gaymard, Andrés et Nzobounsana, 2011).

Les associations libres

Cette méthode consiste, à partir d’un mot inducteur, à demander au sujet de produire tous les mots ou expressions lui venant à l’esprit. On demande en général cinq mots que l’on note les uns à la suite des autres. À l’origine, on fai-sait référence à l’analyse prototypique (Abric et Vergès, 1994 ; Vergès, 1992). Ainsi, Vergès (1992) a étudié la représentation sociale de l’argent en tenant compte de deux critères : la fréquence et le rang d’apparition des termes. Selon cette approche, un terme fréquemment cité et dans les premiers rangs a toutes les chances de faire partie du noyau central de la représentation. Un terme fréquemment cité et dans les derniers rangs ainsi qu’un terme peu cité et dans les premiers rangs font partie de la première périphérie. Enfin, un terme peu cité et dans les derniers rangs fait partie de la seconde périphérie, qui n’entre pas dans l’analyse de la représentation sociale. Remettant en ques-tion ces critères, Abric (2003) a proposé de substituer au rang d’apparition le rang d’importance, l’idée étant que les termes apparaissant en premier n’étaient pas nécessairement les plus importants. Il propose alors de prendre en compte un nouveau découpage. Les termes avec une fréquence élevée et très importants entrent dans la case du noyau central. Les termes avec une fréquence élevée mais peu importants sont considérés comme faisant partie de la première périphérie. Les éléments peu fréquents et importants entrent dans la « zone des éléments contrastés » ; cette zone peut abriter « un sous-groupe minoritaire porteur d’une représentation différente […] mais on peut trouver ici, bien entendu, un complément de la première périphérie » (Abric, 2003, p. 64). Enfin, la deuxième périphérie contient les éléments peu fréquents et peu importants dans la représentation. Les recherches ont donc intégré ce nouveau critère en demandant par exemple aux sujets de souligner les deux réponses les plus importantes (Gaymard, 2006).

Nous avons néanmoins conservé dans cette étude l’approche initiale de Vergès (1992), c’est-à-dire le croisement de la fréquence et du rang d’apparition (tableau 1). Nous voulions comparer en effet deux consignes (condition normale et de substitution) auprès de populations peu expertes dans le maniement de celles-ci (jeunes issus d’un milieu défavorisé et ne faisant pas d’études supérieures). De plus, les passations exploratoires se sont révélées réalisables avec la première méthode. Enfin, les recherches ont montré que l’intégration du critère d’importance nécessitait un nombre de sujets plus important (Gaymard, 2006).

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273La représentation sociale du football chez des jeunes adultes d’un milieu défavorisé

tableau 1

Tableau à 4 cases permettant de présenter le noyau central et la périphérie de la représentation

Premiers rangs Derniers rangs

Fréquence élevée Noyau central 1re périphérie

Fréquence faible 1re périphérie 2e périphérie

Nous avons soumis aux sujets les deux consignes suivantes (toujours dans le même ordre) :

1. « Quand on vous dit football, quels sont les mots ou expressions qui vous viennent spontanément à l’esprit » ?

2. Maintenant, répondez à cette consigne comme le feraient vos parents.

Le questionnaire de caractérisation

Flament a introduit dans l’étude des représentations sociales le question-naire de caractérisation (Abric, 2003). Ce type de questionnaire est consti-tué d’une liste d’items en rapport avec l’objet, et dont le nombre permet un classement « par blocs » (Abric, 1994). À partir de cette liste, on demande au sujet de choisir tout d’abord les 4 items les plus caractéristiques de l’objet que l’on note « + 2 », puis les 4 items les moins caractéristiques que l’on note « – 2 ». On fait de nouveau un classement avec les items restants, le sujet choisissant les 4 un peu caractéristiques (« + 1 ») et les 4 un peu moins caractéristiques (« – 1 »). Les 4 derniers items sont notés « 0 » (Gaymard, 2003a). À partir du moment où le noyau central donne la signification, on peut considérer que la propriété d’un élément central est d’être plus caractéristique de l’objet (Abric, 2003).

C’est par le biais d’une enquête exploratoire que l’on peut isoler les grandes thématiques pouvant être liées à l’objet. Nous avons réalisé huit entretiens exploratoires à partir desquels, en complément de nos recherches bibliographiques, nous avons isolé 20 items constitutifs du questionnaire de caractérisation (annexe 1).

À la différence de la méthode des associations libres à partir de laquelle les jeunes répondaient pour eux-mêmes (condition normale) et pour leurs parents (condition de substitution), le questionnaire de caractérisation n’était rempli qu’en condition normale, la méthodologie du classement par blocs s’avérant compliquée en condition de substitution.

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Population

Nous nous sommes intéressés aux jeunes adultes masculins, notre objet d’étude étant les représentations en lien avec les pratiques du football. Il existe également des « footballeuses des cités » (Robin, 2007) mais la problé-matique étudiée est différente puisqu’elle intègre d’emblée la question de la place de la femme dans un contexte culturel (Gaymard, 2003a).

L’échantillon interviewé comprend 26 jeunes hommes âgés de 18 à 25 ans. Ils ont en moyenne 20,46 ans (écart-type : 2, 12), 9 années de pratique au niveau régional (en club et avec leurs amis), s’entraînent plusieurs fois par semaine et ne pratiquent pas d’autre sport.

Lieux de passation

La difficulté d’accès à la population nous a contraints à multiplier les lieux de passation. Nous avons rencontré 10 jeunes dans une structure d’insertion angevine qui accueille des jeunes de 16 à 25 ans résidant dans des quartiers prioritaires d’Angers, en ZUS (Zone Urbaine Sensible : zones présentant un taux de chômage particulièrement élevé). L’objectif est de ramener ces jeunes vers l’emploi grâce à un accompagnement individualisé. Nous avons rencontré les autres jeunes (16) en nous rendant directement dans des quar-tiers sensibles de la ville d’Angers.

Stratégies d’analyse

Concernant les associations libres, les items ont été classés selon deux indicateurs, la fréquence d’apparition et le rang moyen d’apparition. En croisant ces deux critères selon des seuils déterminés par le chercheur, nous pouvons dégager les quatre zones dans la représentation (Vergès, 1992). La zone centrale, qui comprend les termes plus fréquents et cités dans les premiers rangs, la première périphérie, qui comprend les éléments cités fréquemment et dans les derniers rangs ou peu cités et dans les premiers rangs. La seconde périphérie comprend les termes peu fréquents et cités dans les derniers rangs.

Pour le questionnaire de caractérisation, nous avons effectué un trans-codage (Gaymard, 2003a) afin de dégager les moyennes et de hiérarchiser les items du plus au moins caractéristique de l’objet « football ».

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Résultats

Les associations libres

Pour traiter les données, nous avons utilisé le programme « Evoc » (Vergès, 2005)4.

Nous avons recueilli au total en condition normale 131 mots et 43 mots différents. En condition de substitution, nous avons recueilli au total 93 mots et 30 mots différents. La fréquence minimale considérée est de 3 mots (11,5 % des évocations). En condition normale (tableau 2), nous avons isolé 4 mots pouvant faire partie du noyau central. Il s’agit des termes sui-vants : ballon, esprit d’équipe, équipe et sport. Dans la première périphérie, les termes identifiés sont les suivants : gagner, but, dribble, plaisir et Coupe du Monde 1998.

tableau 2

Fréquence et rang moyen d’apparition des éléments en condition standard (« Quand on vous dit football, quels sont les mots

ou expressions qui vous viennent spontanément à l’esprit » ?

Premiers rangs Derniers rangs

Fréquence ≥ 7 Ballon

Esprit d’équipe

Équipe

Sport

11* (2,0)**

10 (2,7)

10 (2,4)

7 (2,4)

Gagner

But

Dribble

10 (3,5)

10 (4,2)

7 (3,2)

Fréquence < 7 Plaisir

Coupe du Monde 1998

6 (3,0)

3 (2,0)

Terrain

Spectacle

Passion

Respect

Stade

Compétition

5 (3,2)

4 (2,8)

4 (3,2)

4 (4,8)

3 (4,3)

3 (5,0)

* Fréquence ** Rang moyen

Concernant les associations libres en condition de substitution (« comme le feraient les parents ») (tableau 3), nous constatons que le terme « ballon » est le seul que nous retrouvons dans le noyau central. Les termes « équipe » et « sport » deviennent périphériques et « Zinédine Zidane », qui n’apparaissait pas dans la représentation des jeunes, devient un élément central avec l’item « terrain ». Un autre élément nouveau apparaît dans la zone périphérique de la représentation, c’est le terme « argent ».

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tableau 3

Fréquence et rang moyen d’apparition des éléments en condition de substitution (« Répondez comme le feraient vos parents »)

Premiers rangs Derniers rangs

Fréquence ≥ 7 Ballon

Zidane

Terrain

15* (1,6)**

15 (1,8)

7 (2,5)

Équipe 7 (3,3)

Fréquence < 7 Argentr

Sport

Compétition

5 (1,8)

5 (2,2)

4 (2,2)

Coupe du Monde 1998

Médiatisation

Jeu

5 (3,2)

5 (3,2)

3 (3,3)

* Fréquence ** Rang moyen

tableau 4

Calcul des moyennes à partir du transcodage et classement du plus au moins caractéristique de l’objet « football »

Items 1 2 3 4 5 Total MoyenneMarquer des buts 0 0 6 44 65 115 4,42Zinédine Zidane 0 0 9 36 70 115 4,42Esprit d’équipe 2 0 9 20 80 111 4,27Gagner 1 2 9 32 65 109 4,19Plaisir 0 2 6 60 40 108 4,15Respect 1 2 6 44 55 108 4,15Passion 1 2 18 40 40 101 3,88Compétition 0 4 18 48 30 100 3,85Être célèbre 4 12 21 12 30 79 3,04Prouesse technique 0 12 42 20 5 79 3,04Complémentarité des joueurs

3 16 39 4 5 67 2,58

Espoir 3 20 27 12 5 67 2,58Argent 11 10 3 12 30 66 2,54Oublier ses problèmes 8 16 24 8 0 56 2,15Médiatisation 11 12 21 4 5 53 2,04Environnement défini 7 24 18 4 0 53 2,04Se faire remarquer 9 20 15 4 5 53 2,04Habitude 11 14 15 12 0 52 2,00Sanctions 12 16 15 4 0 47 1,81Polémiques 19 10 3 0 5 37 1,42

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Le questionnaire de caractérisation

Pour analyser les résultats obtenus au questionnaire de caractérisation (annexes 1 et 2), nous avons adopté la méthode de transcodage utilisée par Gaymard (2003a). Cette méthode consiste à recodifier l’échelle en 1 (– 2), 2 (– 1), 3 (0), 4 (+ 1) et 5 (+ 2). Cette recodification multipliée avec les effectifs de réponses nous permet d’obtenir le tableau des moyennes avec les items qui seront classés du plus au moins caractéristique (Tableau 4). Flament avait constaté que ce type de questionnaire dégageait fréquemment des corréla-tions négatives et proches de « 0 ». Dans ce cas, les analyses factorielles ou les analyses de similitude issues de la théorie des graphes (Flament, 1962) n’ont pas d’intérêt.

Avec cette méthode, on peut considérer que les éléments centraux sont les plus caractéristiques. Nos résultats tendent à montrer que les items concernés sont : « marquer des buts », « Zinédine Zidane », « esprit d’équipe », « gagner », « plaisir » et « respect ». Une autre approche peut aider le cher-cheur, c’est la distribution des items (Abric, 2003 ; Gaymard, 2003a ; Vergès, 2001). En effet, on considère que les items centraux ont comme profil « une courbe en J », qui atteste que les items sont massivement choisis comme étant les plus caractéristiques de l’objet. Les items qui présentent cette dis-tribution sont les suivants : « marquer des buts », « Zinédine Zidane », « esprit d’équipe », « gagner » (Figure 1a), « respect », « plaisir » et « passion ». Les items qui ont « une courbe en cloche » correspondent habituellement aux éléments périphériques de la représentation. Il s’agirait dans notre étude des items « compétition », « prouesse technique », « complémentarité des joueurs », « espoir » (Figure 1b), « oublier ses problèmes », « médiatisation », « environnement défini », et « habitude ». Les éléments qui ont une distribu-tion en « U » attestent de l’existence de sous-groupes, « [e]lle témoigne que

fIgure 1

Exemple de la distribution d’un item central (Gagner) et exemple de la distribution d’un item périphérique (Espoir)

a) b)

Gagner35

30

25

20

15

10

5

0

Espoir35

30

25

20

15

10

5

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l’élément considéré donne lieu à des jugements très contrastés de la part de la population » (Abric, 2003, p. 66) ; cela concerne l’item « argent ». Enfin la courbe en « J inversé » fait référence aux éléments rejetés, très peu choisis et donc très peu caractéristiques de l’objet d’étude. Il s’agit surtout pour notre étude de l’item « polémiques. »

Discussion

L’objet de cette étude portait sur la représentation sociale du football chez des jeunes adultes issus d’un milieu social défavorisé. Nos résultats montrent tout d’abord que le football constitue bien un objet de représentation sociale selon l’approche structurale de l’école d’Aix-en-Provence (Abric, 1976 ; Flament, 1989). Cette représentation est structurée et organisée autour d’un noyau central et d’une périphérie. Les éléments centraux ont une fonction organisatrice et génératrice de sens et la périphérie est la partie « concrète » de la représentation. Liés aux pratiques individuelles, les éléments péri-phériques assurent trois fonctions selon Flament (1987, 1989). Ils sont tout d’abord prescripteurs des comportements, en indiquant ce qu’il est normal de faire ou de dire dans une situation. Ils autorisent ensuite une modulation personnalisée des représentations et des conduites et protègent le noyau central en cas de nécessité.

Nous avions posé deux hypothèses, l’une portant sur la représentation sociale des jeunes qui serait organisée autour de leur pratique d’amateurs et l’autre concernant la représentation attribuée aux parents qui serait davantage articulée autour du football professionnel. Nos résultats tendent à confirmer ces hypothèses.

Avec le test d’associations libres, nous constatons en condition normale que le noyau central comprend des termes en rapport avec les « valeurs » du sport collectif et la notion d’égalité des chances. Les notions d’équipe et d’esprit d’équipe symbolisent en effet l’idée de rassemblement, de partage et de respect de l’autre. Le terme le plus cité est « ballon », et bien que pouvant apparaître triviale, cette association rappelle sa fonction indispensable à la pratique du football. Les résultats que nous observons montrent l’importance dans le noyau central des valeurs collectives chez les jeunes. Ces sont les éléments consensuels et non négociables de la représentation, c’est-à-dire qu’ils sont « nécessaires » pour définir l’objet « football ».

Le contenu de la périphérie de la représentation fait ressortir une cer-taine ambivalence entre amateurisme et professionnalisme. Tout d’abord, l’esprit de compétition et de combativité des jeunes apparaît à travers les items « gagner », « marquer des buts » et « Coupe du Monde 1998 ». Cependant les mots « compétition », « stade » et « spectacle » sont relégués en deuxième

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périphérie. Nous pensons qu’à travers leurs pratiques (et leurs représen-tations), les jeunes cherchent à se différencier de la pratique du football institutionnel dans une logique « oppositionnelle » ; de cette manière, ils résisteraient à la culture dominante du football institutionnel (Crosset et Beal, cités par Travert, 2003). Ce clivage que nous observons dans la pensée sociale rappelle un autre clivage dans l’histoire du football : l’opposition au xixe siècle entre le sud de l’Angleterre, qui revendiquait une pratique élitiste du football, et le nord de l’Angleterre industrialisé, qui était pour la professionnalisation du football (Mason, 1980).

Mais le football est un objet de paradoxes, entre les rassemblements identitaires et les déchaînements de violence, et on retrouve ces controverses dans les effets de la mondialisation. Certains se sont intéressés aux liens entre les attitudes à l’égard de la mondialisation et les attitudes à l’égard du football. Par exemple, aux États-Unis, Lindner et Hawkins (2012) ont montré que les attitudes à l’égard du football devaient être comprises comme une réaction à de profondes transformations culturelles apportées par la mondialisation. Dans leur étude, les attitudes à l’égard de la mondialisation culturelle consti-tuent le meilleur indicateur des sentiments pro ou anti-football.

Dans la périphérie, il y a aussi des termes liés aux prouesses techniques, comme « dribble ». Selon Travert (2003), l’objet de convoitise du football de « pied d’immeuble » est le duel, et l’argument majeur, le dribble, alors que pour le football institutionnel, l’objet est la cible et l’argument majeur, la passe. Mais la subtilité réside aussi dans le type de dribble : « Dans le cadre du football de “pied d’immeuble”, le dribble se centre prioritairement sur l’élimination de l’autre. C’est un dribble de roublardise » (p. 89).

L’approche théorique du noyau central permet d’apporter une autre interprétation. La situation du « dribble » en périphérie rappelle que cette pratique était considérée comme « individualiste », à la différence du « pas-sing game » qui constitue une évolution dans le jeu (Green, 1960). Ainsi, dans la représentation, la technique du dribble apparaît bien comme liée aux pratiques individuelles et non comme un élément central et consensuel de la représentation. Comme l’écrit Dietschy (2010), le football a la parti-cularité de conjuguer des paradoxes entre « la tentation individualiste et l’esprit d’équipe ».

La notion de plaisir en périphérie peut également être interprétée comme étant davantage caractéristique d’une pratique d’amateur, d’un divertissement. Selon Obadia (2003) : « Le ludisme peut apparaître également comme relevant d’une vulgarité exprimant socialement et culturellement l’enracinement récent du sport, et notamment du football, dans les couches populaires alors qu’il était auparavant réservé à une élite. » Le caractère ludique différencie les milieux institutionnalisés des non-institutionnalisés.

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Ainsi, une des principales caractéristiques du « football de rue » serait « le ludisme comme facteur d’innovation ». Ce type de football plus inventif que le football professionnel se présenterait comme « un mode de régénération d’un football professionnel incarnant en quelque sorte une forme de pratique pétrifiée » (Obadia, 2003). Mais l’auteur explique un peu plus loin qu’il pour-rait s’agir de « représentations idéalisées d’une spontanéité et d’une créativité technico-tactique issues d’un football “de rue” ou “exotique” ». Les termes de la périphérie qui « concrétisent » la représentation sont conditionnels et dépendent donc des circonstances, à la différence des éléments centraux.

Nous constatons qu’il n’y a aucun terme négatif associé au football ; nous nous demandions notamment si l’échec de l’équipe de France à la der-nière Coupe du Monde avait pu toucher négativement cette représentation. Malgré cet événement très négatif et largement médiatisé (Duluc, 2010), la représentation du football chez les jeunes adultes amateurs n’apparaît pas entachée de cet échec des « bleus » et semble se raccrocher plutôt aux moments de gloire de l’équipe de France avec l’item « Coupe du Monde 1998 ».

En condition de substitution, c’est-à-dire lorsque les jeunes répondent à la place de leurs parents, nous constatons tout d’abord qu’ils sont capables de produire une représentation différente de la leur, confortant l’idée d’une représentation « multi-facettes ». Ainsi, Milland et Flament (2010) ont étudié la représentation sociale du chômeur et montré qu’il existait une facette du « chômeur-victime » en condition normale et une facette du « chômeur-profiteur » en condition de subs-titution. Gaymard et Andrés (2009) ont démontré la complexité des modèles lorsque des jeunes lycéens espagnols devaient répondre à un questionnaire d’habiletés sociales comme l’aurait fait un jeune bien vu vs mal vu par différentes instances de références (parents et tuteur). Dans notre étude, en condition de substitution, le noyau central est modifié en grande partie par la référence à Zinédine Zidane, dont le taux de citation est de 60 %5. « Zizou » est une véritable légende du football français, comme en témoignent les ouvrages qui lui sont consacrés et qui font référence à « un footballeur de génie », « une idole », « un héros moderne » (Fort et Philippe, 2006 ; Philippe, 2002). La proéminence de cette figure héroïque (Defrance, 1995) dans la représentation attribuée aux parents peut être interprétée de plusieurs manières. On peut penser que les jeunes préfèrent faire passer cette « admiration » pour Zidane par la « pensée » de leurs parents, car elle n’est plus vraiment d’actua-lité ou est maintenant controversée (la fameuse histoire du « coup de boule » sur le terrain lors de la finale de la Coupe du Monde en 2006), ou encore parce que cette figure héroïque appartient définitivement à l’ancienne génération, ou qu’elle est trop liée au professionnalisme.

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Au niveau de la périphérie, nous relevons un terme qui n’apparaissait pas dans les associations en condition normale, c’est le terme « argent ». La question de l’argent, des salaires des footballeurs ou du coût des trans-ferts6, est largement relayée par les médias et s’inscrit dans le processus de mondialisation du football (Croci et Ammirante, 1999 ; Hoehn et Szymanski, 1999 ; Milanovic, 2005). Dans ce cas, nous ne pouvons pas savoir si, pour les jeunes, ce terme est considéré comme positif ou négatif. Le fait que ce terme soit attribué à la représentation des parents atteste de la distance entre le football institutionnel et le football de « pied d’immeuble », distance que les jeunes souhaitent marquer entre ces deux pratiques. Par ailleurs, les parents n’étant pas pratiquants, ils ne peuvent qu’avoir une représentation ancrée dans le monde professionnel largement diffusé dans les médias. Cette interprétation du monde du football par les spectateurs est bien perçue par les jeunes adultes qui font preuve ici d’un certain réalisme.

Selon Bourdieu (1984), l’élaboration d’un champ des pratiques sportives est liée à une certaine philosophie du sport : « la théorie de l’amateurisme fait du sport une pratique désintéressée, à la manière de l’activité artistique, mais qui convient mieux que l’art à l’affirmation des vertus viriles des futurs chefs » (p. 178-179). Le champ des pratiques sportives est un lieu de luttes entre les classes sociales(amateurisme contre professionnalisme, sport pra-tique contre sport spectacle, etc,) qui, selon Bourdieu, « est inséré dans le champ des luttes pour la définition du corps légitime et de l’usage légitime du corps » (p. 181).

Les résultats au questionnaire de caractérisation montrent que les items les plus caractéristiques de l’objet « football » sont au nombre de sept : « mar-quer des buts », « Zinédine Zidane », « esprit d’équipe », « gagner », « respect », « plaisir » et « passion ». La place de Zinédine Zidane, qui n’apparaissait pas dans les associations libres en condition standard, nous amène à proposer une nouvelle interprétation des résultats. Cette figure héroïque qui fait partie de la représentation attribuée aux parents pourrait constituer un élément central « masqué » (Flament, Guimelli et Abric, 2006) de la représentation des jeunes adultes. En effet, Zidane, modèle pour les jeunes durant plusieurs années, a malgré tout été critiqué quant à son comportement sur le terrain lors de la finale de la Coupe du Monde en 2006. L’idée d’un mauvais exemple pour les jeunes a largement été diffusée dans les médias ainsi que la sortie d’un grand champion par la « petite porte ». Nous pouvons alors parler d’une image « controversée », expliquant que les jeunes n’aient pas évoqué « Zidane » dans les associations spontanées. Cela ne signifie pas qu’ils remettent en question le talent de ce grand champion, mais qu’ils souhaitent se donner toutes les chances d’offrir une bonne image face à l’intervieweur. Sans nul doute, les grands champions sont des modèles sociaux auxquels les jeunes s’identifient

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(Attali, 2004). De fait, Zinédine Zidane a toujours parlé ouvertement de ses origines, de son milieu social d’appartenance, ce qui renforce inévitablement le sentiment d’identification de ces jeunes (Bozonnet, 1996).

Jusqu’à présent, les études ont montré qu’une zone « masquée » pouvait être « démasquée » grâce aux consignes de substitution ; nous montrons ici qu’un élément masqué avec la technique des associations libres peut être démasqué avec le questionnaire de caractérisation. Cet outil, à la différence de la méthode associative, est moins impliquant pour le sujet. Les consignes de choix par blocs ne seprêtent pas à une stratégie de « camouflage », car les termes sont donnés aux sujets et non produits par le sujet lui-même.

Nos résultats montrent que ces jeunes issus d’un milieu social défa-vorisé recherchent dans le sport un moyen de dépasser la réalité du quo-tidien. Le football est vu comme un vecteur d’envie et de divertissement. Quand on observe la pratique hebdomadaire de ces jeunes, le football est plus qu’un moyen d’être en bonne santé, c’est un « ballon », un « terrain » et une envie de « gagner » dans « la passion », le « respect » et le« plaisir ». Ces termes rappellent les valeurs fondamentales du sport (Attali, 2004). Alors que les médias mettent l’accent sur l’argent, les polémiques, ces jeunes, eux, n’oublient pas l’essentiel.

Pour la plupart, ces jeunes sont déscolarisés ou en rupture sociopro-fessionnelle et il est possible de faire un lien entre le football comme sport et lieu d’amusement et le football comme vecteur de socialisation (Duret et Augustini, 1993 ; Hélal et Mignon, 1999). En effet, le football leur permet de s’identifier à des joueurs qui leur ressemblent, mais aussi de s’affirmer par leur prouesse technique, de garder un dialogue avec leur collectif de jeu, de jouer à plusieurs, d’être solidaires. Defrance établit un rapport avec la société industrielle, puisque nous retrouvons dans le football les notions de « division des tâches et travail d’équipe, égalité des chances, compétition, performance, promotion, relégation, statut incertain des individus » (Defrance, 1995, p. 59). Toutes ces notions sont en lien avec le monde du travail. Ainsi, pour ces jeunes qui sont parfois en rupture, le football peut être un moyen de les ramener vers le monde du travail. Peachey, Cohen, Borland et Lyras (2011) ont étudié par exemple l’impact du football de rue aux États-Unis sur les bénévoles. À travers une étude qualitative, ils montrent que celui-ci permet de développer le sens communautaire et donc le capital social.

Nous pouvons rappeler ce qu’Attali (1994) évoque dans son ouvrage ; il parle du sport comme ayant une valeur éducative et socialisante. Ici, il semblerait que le football, par sa transparence et son aspect positif pour ces jeunes, puisse être un moyen d’insérer les jeunes en difficultés. Hélal et

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Mignon (1999) parlent du sport comme permettant aux jeunes de reconqué-rir leur dignité. Le football leur prouve enfin que parfois la classe sociale d’appartenance n’a pas d’importance et n’empêche pas la réussite.

Les limites de ce travail sont d’ordre méthodologique. En premier lieu, la difficulté d’accès à nos populations nous a contraints à multiplier les lieux de passation (Coach pour l’Emploi et quartiers). Selon nous, la pratique du football est plus répandue dans certaines villes comme Marseille, une des capitales européennes du foot avec l’Olympique de Marseille (Zotian, 2010). Du point de vue des associations libres, l’analyse prototypique qui a été largement employée pose le problème de la non-prise en compte du critère d’importance pour le sujet. Ainsi a-t-il été suggéré de remplacer le critère du rang d’apparition par le critère du rang d’importance pour le sujet (Abric, 2003). Néanmoins, en termes de faisabilité en condition de substitution, surtout avec une population non-experte, le problème de la compréhension de l’outil se pose. Ceci explique peut-être pourquoi nous avons recueilli avec les associations libres des termes placés dans la périphérie comme « gagner » et « marquer des buts », qui semblent être centraux avec le questionnaire de caractérisation.

Moliner (1989) a proposé une technique qui permet d’approfondir l’analyse de la structure des représentations sociales, la MEC (Mise En Cause). Cette méthode a pour but de « tester » les éléments afin de confirmer leur attribution au noyau central ou à la périphérie. Quand un élément central est « mis en cause », le sujet ne reconnaît pas l’objet de représentation, alors qu’il peut être reconnu quand un élément périphérique est mis en cause. Par exemple, Mamontoff (1996), qui a travaillé sur la représentation sociale des gitans, a isolé le terme « croyant » comme pouvant faire partie du noyau central de la représentation. Ensuite l’auteur a testé cet élément : « si tu connais un gitan qui n’est pas croyant… Est-ce toujours un gitan pour toi » ; dans le cas où le sujet réfute cette proposition, on conclut que cet élément est central, c’est-à-dire nécessaire à la reconnaissance de l’objet. Mais cette méthode, qui repose sur la double négation, peut également s’avérer difficile à comprendre en fonction du public étudié.

En dépit de ces limites, cette étude permet de mettre à jour les com-posantes et l’organisation de cette représentation qui intègre pour les jeunes amateurs des valeurs de groupe et des aspects identitaires, d’appartenance et de socialisation.

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Conclusion

Le football, qui a connu une évolution « planétaire », est aujourd’hui consi-déré comme l’une des industries les plus mondialisées (Foer, 2004a, 2004b). À travers des pratiques institutionnalisées et non-institutionnalisées, il est devenu l’un des sports les plus populaires dans le monde. Ainsi n’est-il pas étonnant qu’il fasse l’objet de nombreuses publications dans différents champs d’étude (Sciences et techniques des activités physiques et sportives, sociologie, anthropologie, science économique, politique…).

Tout porte à croire que le football doit être un objet de représentation sociale et pourtant, dans le champ de la psychologie sociale, il n’a jamais été étudié en tant que tel. La théorie du noyau central qui intègre à la fois les éléments collectifs (éléments centraux) et individuels (éléments périphé-riques) de la représentation est particulièrement adaptée pour décrire l’objet « football ». Cette analyse sociocognitive montre que la détermination et la signification de cette représentation reposent sur des valeurs collectives. Ainsi, la pratique du football pour ces jeunes issus de milieux défavorisés possède de réels enjeux d’intégration et de socialisation (Duret et Augustini, 1993 ; Müller, Van Zoonen et De Roode, 2008). La périphérie ancrée dans les pratiques individuelles met à jour une certaine ambivalence entre ama-teurisme et professionnalisme dans la représentation. Les jeunes veulent différencier leurs pratiques de la pratique institutionnelle et la représentation qu’ils attribuent à leurs parents s’inscrit aussi dans cette logique opposition-nelle. La figure de « Zinédine Zidane » qui, pendant la période glorieuse des « bleus » a servi de modèle à toute une génération, apparaît controversée dans cette représentation, mais toujours présente.

L’étude des représentations sociales apporte ainsi un nouvel éclairage sur la signification du football pour un groupe de jeunes adultes amateurs, en distinguant les valeurs qu’ils partagent et les aspects plus individuels de cette représentation.

nOtes

1. Centre National Olympique et Sportif Français 2. L’auteur précise que c’est le nom donné à un footballeur écossais jouant dans

une équipe anglaise. 3. Pour tester l’hypothèse selon laquelle le concept de « Locus of Control » (LOC)

(Rotter, 1966) pouvait être considéré comme « une norme d’internalité », Jellison et Green (1981) ont utilisé plusieurs paradigmes dont celui de l’auto-présentation. Les consignes étaient de répondre au questionnaire « LOC » afin de donner la meilleure image de soi (consigne pro-normative) ou la plus mauvaise image de soi (consigne contre-normative). Ils ont validé leur hypothèse en montrant que la consigne pro-normative produisait des réponses internes.

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4. Le programme « Evoc » pour « Evocations » est un logiciel qui a été élaboré spécialement pour analyser les évocations (Grize, Vergès et Silem, 1987 ; Vergès, 1992) ou associations libres. Il permet notamment une analyse lexicographique avec l’étude des fréquences et des rangs ainsi que l’analyse des mots importants.

5. Ce mot a été cité 15 fois sur 25 jeunes qui ont répondu en condition de substi-tution. Un jeune n’a pas complété en condition de substitution.

6. Comme on l’a vu récemment avec le transfert d’Ibrahimovic au PSG.

bIblIOgraphIe

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annexe 1

Items constitutifs du questionnaire de caractérisation

Plaisir Environnement défini

Habitude Gagner

Espoir Sanctions

Zinedine Zidane Se faire remarquer

Être célèbre Prouesse technique

Marquer des buts Complémentarité des joueurs

Compétition Oublier ses problèmes

Esprit d’équipe Respect

Médiatisation Argent

Polémiques Passion

annexe 2

Réponses aux items à partir de l’échelle initiale

Items –2 –1 0 +1 +2 N

Plaisir 0 1 2 15 8 26

Habitude 11 7 5 3 0 26

Espoir 3 10 9 3 1 26

Zinédine Zidane 0 0 3 9 14 26

Être célèbre 4 6 7 3 6 26

Marquer des buts 0 0 2 11 13 26

Compétition 0 2 6 12 6 26

Esprit d’équipe 2 0 3 5 16 26

Médiatisation 11 6 7 1 1 26

Polémiques 19 5 1 0 1 26

Environnement défini 7 12 6 1 0 26

Gagner 1 1 3 8 13 26

Sanction 12 8 5 1 0 26

Se faire remarquer 9 10 5 1 1 26

Prouesse technique 0 6 14 5 1 26

Complémentarité des joueurs

3 8 13 1 1 26

Oublier ses problèmes 8 8 8 2 0 26

Respect 1 1 2 11 11 26

Argent 11 5 1 3 6 26

Passion 1 1 6 10 8 26

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291La représentation sociale du football chez des jeunes adultes d’un milieu défavorisé

Sandrine gAyMArD et Pauline Joly

La représentation sociale du football chez des jeunes adultes masculins issus d’un milieu social défavorisé : une étude exploratoire

résumé

Le football, qui est un sport d’équipe, se pratique comme une activité phy-sique de loisir par des joueurs amateurs ou dans le cadre d’une activité plus « professionnelle » avec des joueurs d’élite. Ce sport très populaire a plusieurs atouts, comme le fait d’intégrer la diversité des styles ou de faire appel à une simplicité des règles (Defrance, 1995).

Nous adadoptons ici une perspective psychosociologique en explorant le football en tant qu’objet de représentation sociale (Moscovici, 1961/76) auprès de jeunes adultes amateurs issus d’un milieu social défavorisé.

Les résultats observés grâce à la méthode d’associations libres et au questionnaire de caractérisation montrent qu’il existe bien une représentation sociale du football. Si pour les jeunes amateurs cette représentation s’articule autour des valeurs du sport collectif, celle attribuée aux parents est plus ancrée dans le monde professionnel. De plus, cette étude met à jour un phénomène original concernant la zone « masquée » des représentations sociales. Entre amateurisme et professionnalisme, la référence à « Zinédine Zidane » atteste du caractère controversé de cette représentation pour les jeunes.

Sandrine gAyMArD et Pauline Joly

The social representation of soccer by young male adults from an underprivileged social background : an exploratory study

abstract

Soccer is a team sport, practiced as a recreational physical activity by amateurs or professionally with elite players. This popular sport has several advantages such as integration of diverse styles and simple rules (Defrance, 1995).

A psycho-sociological perspective is adopted in this article, exploring soccer as an object of social representation (Moscovici, 1961/76) with young, adult amateurs from a disadvantaged social background.

The results obtained using the free association method and the charac-terization questionnaire show that there is a social representation of soccer. If, for young amateurs, this representation is based on the values of team sport, the one given to parents is rooted in the professional world. In addition,

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292 Sandrine Gaymard et Pauline Joly

this study adds to an original phenomenon of the “hidden” area of social representations. Between amateurism and professionalism, the reference to “Zinédine Zidane” adds to the controversial nature of this representation for young people.

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