La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf ·...

59
UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information La remise en cause du monopole des producteurs de phonogrammes à l’ère numérique Mémoire présenté par Maxence Dutat Sous la direction de Monsieur Pascal Reynaud, ATER à la faculté de droit de Strasbourg, Docteur en droit et Chargé d'enseignement au DESS MSI - 2003 -

Transcript of La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf ·...

Page 1: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

La remise en cause du monopole

des producteurs de

phonogrammes à l’ère numérique

Mémoire présenté par Maxence Dutat

Sous la direction de Monsieur Pascal Reynaud, ATER à la faculté de droit de Strasbourg,

Docteur en droit et Chargé d'enseignement au DESS MSI

- 2003 -

Page 2: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

2

Remerciements

Je remercie, pour les idées et le soutien qu'ils m'ont apportés dans l’élaboration de ce

mémoire, Monsieur Bruno Lion, Directeur Général de la société d’édition musicale

Peermusic France, les auteurs auxquels je me suis adressé ainsi que mes amis et mes

camarades de DESS.

Je remercie enfin, et tout particulièrement, Monsieur le Professeur Pascal Reynaud, dont la

collaboration m'a été fort précieuse.

Page 3: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

3

Sommaire

LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS................................................................................. 4

INTRODUCTION................................................................................................................................. 5

PREMIERE PARTIE - UN CADRE JURIDIQUE INADAPTE A L’ENVIRONNEMENT

NUMERIQUE........................................................................................................................................ 8

CHAPITRE I - LES DROITS VOISINS DES PRODUCTEURS, DE LA THEORIE A LA PRATIQUE ........ 8

A. Le producteur, un ayant droit dans l’économie numérique ................................................ 8

B. Le droit exclusif du producteur face aux nouvelles formes d’exploitation....................... 11

C. La protection du producteur face à la piraterie à l’ère numérique................................... 13

CHAPITRE II - UN DISPOSITIF D’EXCEPTIONS OBSOLETE FACE AU NUMERIQUE..................... 17

A. Le régime de la licence légale ............................................................................................. 17

B. L’exception pour copie privée et la copie numérique ........................................................ 18

C. Une rémunération équitable qui n’est pas remise en cause .............................................. 20

DEUXIEME PARTIE – L’ADAPTATION DU DROIT DANS L’ENVIRONNEMENT

NUMERIQUE : UN CONTROLE PLUS OU MOINS EXCLUSIF ACCORDE AUX

PRODUCTEURS................................................................................................................................. 25

CHAPITRE III - VERS UN RENFORCEMENT DU MONOPOLE DES PRODUCTEURS ...................... 25

A. L’avènement des mesures techniques de protection contre la piraterie numérique......... 26

B. Le développement des moyens de lutte contre l’échange de fichiers sur les réseaux ....... 29

C. Le renforcement des moyens d’investigation de la contrefaçon sur les réseaux .............. 33

CHAPITRE IV - VERS UNE LIMITATION DU MONOPOLE DES PRODUCTEURS............................ 37

A. L’adaptation de la gestion collective des droits dans l’environnement numérique .......... 37

B. L’adaptation du régime des exceptions au numérique ...................................................... 41

CONCLUSION.................................................................................................................................... 45

ANNEXE .............................................................................................................................................. 46

BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................................. 57

Page 4: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

4

Liste des principales abréviations

AFNOR : Association Française de Normalisation

APG : Anti Pirat Gruppen

CD : Compact Disc

CDR : Compact Disc Recordable

CDR-RW et CDR-RW audio : Compact Disc Recordable Rewritable

CNIL : Commission Nationale Informatique et Libertés

CPI : Code de la Propriété Intellectuelle

CSPLA : Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire et Artistique

DMCA : Digital Millenium Copyright Act

IFPI : International Federation of the Phonographic Industry

IP : Internet Protocol

ISWC : International Standard Music Works Code

MP3: Mpeg Layer 3

OMPI : Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle

PLA : Propriété Littéraire et Artistique

RIAA : Recording Industry Association of America

SACEM : Société des Auteurs Compositeurs et Editeurs de Musique

SCPP : Société Civile des Producteurs Phonographiques

SDRM : Société pour l'administration du Droit de Reproduction Mécanique des auteurs

compositeurs et interprètes

SORECOP : Société de perception de la rémunération pour la copie privée sonore

SPPF : Société Civile des Producteurs de Phonogrammes en France

SPRD : Sociétés de Perception et de Répartition des Droits

SPRE : Société pour la Perception de la Rémunération Equitable

TGI : Tribunal de Grande Instance

Page 5: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

5

Introduction

Les débats qui ont eu lieu autour du dernier MIDEM1 sur le piratage de la musique et sur

l’apparition des systèmes anti-copies sur les disques ne sont pas sans rappeler les craintes des

ayants droits de l’Industrie du disque dans les années 60 lors de l’apparition de la cassette

enregistrable. Pour faire face à la menace du piratage, l’appareil judiciaire s’était adapté

progressivement à l’ère analogique et les producteurs de disques avaient trouvé les moyens

de rendre leur offre plus compétitive que la copie. Puis, les maisons de disques ont choisi dès

1981 de remplacer la cassette par le compact disc (CD). Or, avec l'abaissement du prix du

matériel informatique d'enregistrement et des supports vierges, comme le Compact Disc

Recordable (CDR), ainsi qu’à une grande simplicité d’utilisation, la technologie de

reproduction numérique est très vite devenue accessible au grand public et nous sommes

entrés dans l’ère numérique.

La technologie numérique a deux caractéristiques essentielles : tout d’abord elle permet une

reproduction conforme d’un phonogramme sans perte de qualité par rapport à l’original.

D’autre part, cette technologie permet de dématérialiser le phonogramme de son support en

le réduisant et en le reconstituant à volonté sans perte de qualité, ou à qualité auditive

satisfaisante comme au format Mpeg Layer 3 (MP3). Parallèlement, la technologie

numérique a permis le développement de nouveaux moyens de diffusion et d’échange par les

réseaux. Ainsi, le réseau Internet permet à quiconque d’échanger des fichiers musicaux en

toute simplicité et en temps réel et à travers le monde. L'évolution du marché de la musique

vers ces deux nouvelles formes d'exploitation illicite constitue une grave menace pour la

protection des investissements des producteurs qui y voient un frein au financement durable

de la création musicale. Selon l’International Federation of the Phonographic Industry

(IFPI), 51 % de la piraterie audio serait réalisée sous forme numérique à travers les CDR et la

contrefaçon par le biais d’Internet correspondrait à 700 millions de fichiers sans droit

d’exploitation2.

Un constat : le piratage des phonogrammes est prohibé dans le cyberespace mais il est

pourtant très difficile pour les producteurs de faire appliquer leurs droits. Le poids des cinq

plus grands producteurs de disques mondiaux, que l’on nomme « majors » (BMG, EMI,

1 MIDEM, le salon qui a réuni l'industrie musicale à Cannes du 19 au 23 janvier 2003. 2 Chiffres disponibles sur le site de l’IFPI : http://www.ifpi.org

Page 6: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

6

Sony, Universal, Warner), et qui contrôlent plus de 80% du marché mondial, représente un

monopole puissant et s’efforce de faire pression sur les instances juridiques internationales et

nationales afin d’inciter le législateur à prendre des mesures juridiques en leur faveur.

La Convention de Rome sur « la protection des artistes interprètes, des producteurs de

phonogrammes et des organismes de radiodiffusion », adoptée en 1961 dans le cadre de

l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI), est à l’origine de la protection

des producteurs de phonogrammes au niveau international3. Avant même de ratifier la

convention, les droits voisins avaient été consacrés en France par la loi du 3 juillet 1985. Loi

codifiée en 1992 dans le Code de la Propriété Intellectuelle (CPI). Depuis, l’OMPI a élaboré

un nouveau Traité en décembre 1996 pour tenir compte de l’évolution du numérique mais il

n’a pas encore été ratifié par la France. De même, sept directives4 relatives aux droits voisins

ont étés adoptées au niveau européen. La dernière en date est la directive « Société de

l’Information » 2001/29 du 22 mai 2001. Elle porte sur « l’harmonisation du droit d’auteur et

des droits voisins dans la société de l’information ». Cette directive a été élaborée dans le but

d’adapter la législation aux nouvelles réalités économiques comme l’apparition de nouvelles

formes d’exploitation des œuvres.

La société de l’information a favorisé l’émergence de nouvelles formes d’exploitation des

droits de propriété intellectuelle rendant ainsi indispensable l’adaptation du droit en la

matière. C’est dans ce contexte qu’en France, le Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire

et Artistique (CSPLA) a été initié dans le but de transposer la directive « Société de

l’Information ». Le 5 décembre 2002, le CSPA a présenté un avant-projet de loi relatif au

droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information qui vise à la révision du

CPI. L’avant-projet de loi est supposé adapter la loi de 1985 au nouveau contexte numérique

et la mettre en conformité avec les normes européennes et internationales. Cet avant-projet

qui aurait désormais été transformé en projet de loi par le ministère de la Culture le 4 avril

20035, consacre de nouvelles dispositions renforçant le « droit exclusif » des producteurs de

phonogrammes, ce qui ne manque pas de générer des craintes et des contestations.

3 Au 15 avril 2003, 75 Etats ont ratifié la convention de Rome. 4 la directive « Satellite et câble » 93/83 du 27 septembre 1993 ; la directive « durée » 93/98 du 29 octobre 1993 ; la directive 95/46 du 24 octobre 1995 ; la directive du 11 mars 1996 ; la directive « commerce électronique » 2000/31 du 8 juin 2000 et la directive « société de l’information » 2001/29 du 22 mai 2001. 5 Selon le document qu'est parvenu à se procurer le collectif EUCD.info le 12 mai 2003 (voir l’avant-projet de loi en annexe).

Page 7: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

7

De même, le Sénat vient tout juste d’adopter, le 1er avril 2003, un projet de loi relatif à la

protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à caractère

personnel, réformant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers

et aux libertés. Ce projet pourrait renforcer les moyens de lutte des producteurs contre

l’échange de fichiers sur les réseaux.

La numérisation représente aujourd’hui un enjeu juridique important. La question qui se pose

est de savoir quelle est l’approche que le législateur va privilégier pour rétablir l’application

des droits des producteurs de phonogrammes dans l’environnement numérique ?

Un renforcement du monopole des producteurs permet de prendre des mesures efficaces et

légitimes pour faire respecter et négocier leurs droits mais est difficilement mis en

application dans l’environnement numérique. Par opposition, une limitation du monopole des

producteurs par une gestion collective de leurs droits et un renforcement du régime des

exceptions, affaiblit leur contrôle dans le cyberespace mais rend indirectement plus efficace

l’application de leurs droits. De plus, les producteurs peuvent bénéficier d’une rémunération

« équitable » intéressante.

L’objectif de ce mémoire est de révéler l’importance de la remise en cause du monopole des

producteurs de phonogrammes à l’ère numérique au moment où s'engage un processus de

révision des droits voisins. Après avoir vu en quoi les droits voisins des producteurs de

phonogrammes sont inadaptés dans l’environnement numérique (première partie), nous

analyserons l’adaptation de leurs droits vers un renforcement ou une limitation de leur

monopole (deuxième partie).

Page 8: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

8

PREMIERE PARTIE - Un cadre juridique inadapté à l’environnement numérique

Indépendamment de la protection conférée aux auteurs par le droit d’auteur, le CPI confère

une protection légale appelée droits voisins à certains auxiliaires de la création. Il s’agit des

artistes interprètes, des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes et des entreprises

de communication audiovisuelle. Le concept de droit voisin des producteurs de

phonogrammes, tel qu'il est consacré par le droit positif, tient à un équilibre entre droit

exclusif et exceptions. Nous ne nous pencherons dans cette étude que sur les droits des

producteurs de phonogrammes.

Nous retracerons dans cette première partie les fondements du droit des producteurs de

phonogrammes et leur application particulière dans l’environnement numérique (Chapitre I).

Puis, nous verrons en quoi le dispositif d’exceptions au droit exclusif des producteurs est

obsolète (Chapitre II).

CHAPITRE I - Les droits voisins des producteurs, de la théorie à la pratique

Le monopole accordé au producteur sur l’exploitation des phonogrammes se justifie par la

protection des investissements engagés dans la production de l’œuvre. Il s’agit plus d’un

droit objectif qui se rapproche du Copyright anglo-saxon que du droit d’auteur. Si ce droit

exclusif se transpose sans s’adapter dans l’environnement numérique son respect peut poser

quelques problèmes dans la pratique.

Nous analyserons successivement la place du producteur de phonogrammes dans

l’environnement numérique (A), le droit exclusif du producteur face aux nouvelles formes

d’exploitation des phonogrammes (B) puis la protection du producteur face à la piraterie (C).

A. Le producteur, un ayant droit dans l’économie numérique

La fonction de producteur de phonogrammes est une activité essentiellement économique (1)

qui est reconnue en droit français comme une activité de soutien à la création intellectuelle

(2) et qui est protégée comme telle par le CPI. Cette activité est remise en cause dans

l’environnement numérique (3).

Page 9: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

9

1. Le caractère de producteur de phonogrammes

Les droits voisins regroupent dans une même catégorie les artistes interprètes qui

interviennent dans la création de l’œuvre, les producteurs de phonogrammes et de

vidéogrammes et les entreprises de communication audiovisuelle. La loi du 3 juillet 1985

devenue l’article L.213-1 du CPI définit le producteur de phonogrammes comme la personne

physique ou morale qui a l’initiative et la responsabilité de la première fixation d’une

séquence de sons. Le producteur est la personne responsable de la première intégration de

l'oeuvre sonore sur son support matériel.

Le CPI définit le phonogramme comme la fixation d’une séquence de sons (article L.213-1

du CPI). Le phonogramme est donc indépendant de son support (CD, cassette, MiniDisc…)

car l’œuvre est, au sens de la propriété intellectuelle, indépendante de la qualité, de la nature

ou même de la matérialité du support. Pour définir la notion de fixation, il faut se référer au

Traité OMPI de 1996 qui la définit comme « l’incorporation de sons, ou des représentations

de ceux-ci, dans un support qui permette de les percevoir, de les reproduire ou de les

communiquer à l’aide d’un dispositif… » (Article 2 c). La « première fixation » est donc une

compétence exclusive du producteur. Enfin, la numérisation ne concerne que la notion de

reproduction des phonogrammes.

Le producteur se distingue donc de l’auteur et du fabricant du support. Il est en fait un

intermédiaire qui produit des chansons et de la musique écrites par des auteurs et des

compositeurs, jouées par des musiciens et chantées par des artistes. Il est défini sur un critère

matériel et économique.

2. Les rôles du producteur de phonogrammes

La place des producteurs de phonogrammes dans la propriété littéraire et artistique (PLA) se

justifie avant tout par la protection de ses investissements et s’apparente plus à un droit de

propriété issu du Copyright anglo-saxon qu’à un droit « voisin » du droit d’auteur. Le

concept du Copyright repose en effet essentiellement sur une logique économique soumise à

l'utilité publique de l'œuvre alors qu’en France, pays de « droits d’auteur », le principe

fondamental réside dans le soutien à la création par l’encouragement des investissements.

Le producteur de phonogrammes a donc pour rôle principal de prendre l’initiative et la

responsabilité de la mise en œuvre des moyens nécessaires à la réalisation d’un

Page 10: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

10

enregistrement. Il s’agit de moyens financiers qui font avant tout du producteur un

investisseur dont l’objectif est le profit pécuniaire. Le producteur décide notamment du

nombre d'exemplaires à fabriquer ainsi que de leur destination. Il est lié aux distributeurs par

des contrats purement commerciaux.

Mais le producteur a aussi un rôle d’impulsion et de soutien à la création car il s'occupe de la

réalisation, de la fabrication, de la commercialisation et de la promotion des phonogrammes

auprès du public. Sa protection dans la PLA peut aussi se justifier par sa contribution à

l’impulsion créative car, dans la pratique, les producteurs peuvent aussi se révéler des

découvreurs de nouveaux talents. De sorte que le piratage des phonogrammes peut être un

facteur qui vienne freiner le lancement de nouveaux auteurs ou, par conséquent, la créativité

des auteurs dans les nouvelles possibilités offertes par exemple par les techniques

numériques.

3. La place du producteur de phonogrammes dans l’économie numérique

Souvent considérés comme les intermédiaires dans le processus de création intellectuelle par

le fait qu’ils prêtent leur assistance aux auteurs et qu’ils mettent les phonogrammes à

disposition des distributeurs, le rôle des producteurs est parfois remis en cause dans

l’économie numérique.

Tout d’abord, l’investissement lié à la diffusion des phonogrammes sur Internet est devenu

moindre avec la dématérialisation des supports et l’avènement de nouveaux formats comme

le MP3. De ce fait, les initiatives de production indépendantes se multiplient et les majors se

trouvent facilement concurrencés en toute légalité.

De même, les distributeurs comme Amazon.com, leader de la vente de CD sur Internet, ont

tendance à jouer le rôle des producteurs en intégrant le travail de commercialisation et de

promotion des oeuvres. Internet permet une nouvelle manière de la promouvoir directement

vers l’internaute grâce à des outils comme le courrier électronique, les forums de discussion

ou les communautés virtuelles. La baisse du coût de production des phonogrammes

amoindrit le risque financier lié à la mise en œuvre des moyens nécessaires à la réalisation

d’un enregistrement.

Page 11: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

11

B. Le droit exclusif du producteur face aux nouvelles formes d’exploitation

Les producteurs de phonogrammes sont reconnus comme des ayants droits car ils participent

au financement de la réalisation et de la diffusion de l’œuvre. Ils ne se voient donc pas

reconnaître de droit moral mais un droit exclusif d’exploitation de l’œuvre (1). Or, dans

l’environnement numérique, l’exploitation des phonogrammes a tendance à changer (2).

1. Les droits accordés aux producteurs de phonogrammes

La loi de 1985 reconnaît aux producteurs de phonogrammes d'être titulaires de droits de

propriété intellectuelle. Ils bénéficient, à ce titre, des droits exclusifs d'autoriser ou d'interdire

l'exploitation de leurs productions. Le droit exclusif du producteur de phonogrammes est

énoncé à l'article L 213-1 du CPI, qui dispose que son autorisation « est requise avant toute

reproduction, mise à la disposition du public par la vente, l'échange, ou le louage, ou

communication au public de son phonogramme ».

Le droit de reproduction dont dispose le producteur lui permet d'autoriser, ou d'interdire,

toute reproduction, intégrale ou sous forme d'extraits, de son phonogramme sur tout support,

quelle qu'en soit la nature : analogique ou numérique. La numérisation a été définie par la

jurisprudence en France comme la « technique consistant à traduire le signal analogique

qu’elle constitue en un mode numérique ou binaire qui représentera l’information dans un

symbole à deux valeurs 0 et 1… »6. La numérisation consiste donc à transposer un

phonogramme d’un support analogique existant à un support numérique. Ainsi, la simple

numérisation d'un phonogramme sur un CDR ou sur un disque dur, tout comme sa

compression ou sa décompression, constituent une reproduction soumise à autorisation du

producteur.

Indépendamment du droit de reproduction, l'article L.213-1 attribue au producteur un droit de

mise à disposition du public par la vente, l'échange ou le louage. Il s'agit là d'une prérogative

essentielle accordée au producteur, qui lui permet de maîtriser l'exploitation de son

phonogramme sur les marchés les plus divers suivant les modes d'utilisation qu'il aura

choisis. Les nouveaux moyens d'exploitation que constituent le téléchargement et la mise sur

les réseaux constituent également des formes de « mise à disposition » des phonogrammes.

6 TGI Paris, ord. Réf., 5 mai 1997.

Page 12: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

12

Dans le droit positif français, la diffusion de phonogrammes sur Internet en totalité ou en

extraits7 est donc soumise au droit exclusif des producteurs de phonogrammes en dehors des

dispositions relatives à la licence légale prévues par l’article L 214-1 du CPI (voir chapitre

II).

Enfin, le producteur bénéficie aussi du droit de communication du phonogramme au public.

La notion de communication au public est une notion bien cernée par la jurisprudence et

recouvre de nombreux procédés de diffusion comme notamment Internet et les réseaux de

communication numériques. Certains procédés font même l'objet d'un régime spécifique

comme la distribution par câble, la radiodiffusion ou le spectacle (article L.214-1 du CPI).

Pour définir cette notion, on peut se référer à la représentation de l’œuvre au public en droit

d’auteur (article L 122-1 du CPI) ou au Traité OMPI de 1996 qui prévoit que « toute

transmission au public hors la radiodiffusion est une communication au public » (article 2 g).

2. La notion « mise à disposition du public » et les nouvelles formes d’exploitation

des phonogrammes

Les technologies numériques font naître des changements de comportements d’utilisation,

comme l’écoute interactive de la musique en ligne grâce à des services dits « à la demande »,

et favorisent l’émergence de nouvelles formes d’exploitation. Ces nouvelles formes

d’exploitation des phonogrammes rendent la définition du droit de communication au public

inadaptée à l’environnement numérique.

Le traité international adopté en décembre 1996 sous l'égide de l'OMPI prévoit cependant de

nouvelles dispositions rendues nécessaires par l'évolution des nouvelles technologies. Le

traité portant sur les droits voisins crée notamment un droit exclusif de « mise à disposition

du public » qui permet aux producteurs d'autoriser ou d'interdire la communication au public

par voie interactive de leurs phonogrammes.

De même, au niveau européen, la Directive « société de l'information » du 22 mai 2001

prévoit aussi la création d’un droit exclusif de « mise à disposition du public », qui permet

aux producteurs « d'autoriser ou d'interdire la mise à la disposition du public, par fil ou sans

fil, de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit

7 Voir l’exception pour courte citation au chapitre II

Page 13: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

13

individuellement » (article 3.2). Des personnes accédant séparément à l'œuvre constituent

donc un public au sens de cette disposition.

La notion de « mise à disposition du public » représente donc un type de communication au

public particulier dont le projet de loi français du ministère de la Culture du 4 avril 2003 ne

tient cependant pas compte.

C. La protection du producteur face à la piraterie à l’ère numérique

La protection conférée par les droits voisins est différente de celle conférée par les droits

d’auteurs et s’exerce indépendamment et sans préjudice des droits reconnus aux auteurs

(CPI, article L.211-1). Les producteurs de phonogrammes bénéficient des prérogatives de

l’action en contrefaçon (1), ce qui implique des sanctions pénales dissuasives (2). Toutefois,

les moyens de la mettre en œuvre sont limités à l’époque du numérique (3).

1. La protection contre la contrefaçon

Historiquement, le lobby des producteurs de phonogrammes a fait pression sur le législateur

pour qu’il lui accorde les prérogatives des droits voisins afin de bénéficier des possibilités de

saisie qu’offre la contrefaçon8. En effet, comme ils ne sont pas titulaires des droits

d’exploitation des œuvres, versés directement aux sociétés de gestion collective, ils ne

pouvaient, sans cette reconnaissance, agir en contrefaçon.

L’article L. 335-2 du code de la propriété intellectuelle définit le délit de contrefaçon comme

l’« édition d’écrits, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre

production, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements

relatifs à la propriété des auteurs ». L’article L. 335-3 du même code précise qu’ « est

également contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen

que ce soit, d’une œuvre de l’esprit en violation des droits de l’auteur, tels qu’ils sont définis

et réglementés par la loi. ».

Dans l’environnement numérique comme ailleurs, la constitution du délit de contrefaçon

suppose donc un élément matériel (la reproduction non autorisée de l’auteur) et un élément

8 Référence au cours de Monsieur Hassler sur les droits voisins des droits d’auteur (DESS MSI)

Page 14: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

14

moral (l’intention présumée coupable du contrefacteur). Outre la capacité ouverte par le

numérique de reproduire à l’infini l’œuvre, la particularité de la contrefaçon sur le réseau

Internet ne doit pas être ignorée : le caractère international du réseau rend difficile

l’exécution à l’étranger des jugements rendus en la matière9, la facilité de transfert de

l’œuvre contrefaite et la vitesse de circulation des informations sont susceptibles de

provoquer, en quelques heures, un important préjudice.

Le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Paris a eu l’occasion de juger que l’opération de

numérisation constituait une reproduction au sens de l’article L 122-3 du CPI. Dans les

affaires Brel et Sardou10, des étudiants de grandes écoles ont mis en ligne des textes des

extraits musicaux de chansons sans l’accord de leur auteur ni de leur producteur. Il a donc été

jugé que « toute reproduction par numérisation d’œuvres musicales protégées par le droit

d’auteur et susceptibles d’être mises à la disposition de personnes connectées au réseau

d’Internet, doit être expressément autorisée par le titulaire ou le cessionnaire des droits ». De

même, dans l’affaire Queneau, le TGI de Paris a jugé que la numérisation d'une oeuvre

littéraire et sa mise en ligne « constitue une reproduction de l’œuvre qui requiert en tant que

telle lorsqu’il s’agit d’une œuvre originale, l’autorisation préalable de l’auteur ou de ses

ayants droits » 11. Dans les deux cas, le juge a retenu l’appréciation du droit exclusif de

reproduction et non celui de la communication au public.

2. Des sanctions pénales dissuasives

La violation des droits des producteurs de phonogrammes fait l’objet de sanctions civiles et

pénales. La victime de la contrefaçon peut obtenir réparation en saisissant soit le juge civil,

soit le juge pénal (CPI, article L 331-1). Le dispositif de protection prévu par le législateur

français, renforcé par la loi sur la répression de la contrefaçon du 5 février 1994, est

extrêmement dissuasif.

La responsabilité pénale des personnes morales peut être engagée dans les conditions prévues

par l'article 121-2 du Code Pénal, ce qui n'exclut pas la responsabilité des personnes

physiques. En effet, la violation de l'un des droits des producteurs est pénalement sanctionnée

par l'article L 335-4 du CPI, lequel dispose qu’« Est punie de deux ans d'emprisonnement et

9 Il s’agit de la territorialité des droits pénaux : une infraction constatée et poursuivie à l’étranger ne sera pas poursuivie en France, sauf dans la zone de Shengen. 10 TGI Paris, ord. réf., 14 août 1996. 11 TGI Paris, ord. Réf., 5 mai 1997.

Page 15: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

15

de 150 000 Euros d'amende toute fixation, reproduction, communication ou mise à

disposition du public, à titre onéreux ou gratuit d'un phonogramme (...), réalisée sans

l'autorisation lorsqu'elle est exigée ». Sur ce fondement, le juge français s’est déjà prononcé

pour les condamnations portant sur la commercialisation de reproductions illicites de CD

audio et de CDR12, la copie illicite sur CDR à usage domestique d’enregistrements de

musique13, la commercialisation de reproductions de phonogrammes sur CDR à la demande

dans des magasins de graveurs14 et le téléchargement de fichiers MP3 illicites sur Internet15.

L’importation ou l’exportation de phonogrammes ou de vidéogrammes réalisées sans

l’autorisation du titulaire des droits est puni des mêmes peines (CPI, art, L.335-4). En cas de

récidive, les peines encourues sont portées au double. Le tribunal peut prononcer des peines

complémentaires telles que la confiscation de tout ou partie des recettes procurées par

l'infraction et de l'ensemble du matériel contrefaisant, ou encore l'affichage, aux frais du

condamné, du jugement de condamnation ainsi que sa publication dans la presse. Aux termes

de la loi du 5 février 1994, il est également possible pour le tribunal, dès la première

infraction, d'ordonner la fermeture (totale ou partielle), à titre temporaire ou définitif, de

l'établissement du contrefacteur pour une durée n'excédant pas cinq ans.

La protection légale prévue par le CPI aux droits voisins du producteur de phonogramme a

un caractère temporaire (art L.211-4)16. La durée de protection des droits voisins est de 50

ans à compter du 1er janvier de l’année civile à partir de la première fixation du

phonogramme. Toutefois, si la fixation du phonogramme fait l’objet d’une communication

au public pendant la période précitée, la durée de 50 ans sera décomptée à partir de la date de

cette communication.

3. Des moyens d’investigation limités

Les producteurs de phonogrammes comme les autres titulaires de droits voisins disposent de

moyens d’investigation pour lutter contre le non respect de leurs droits. Les officiers de

police judiciaire et les agents assermentés désignés par les organismes professionnels comme

la Société Civile des Producteurs Phonographiques (SCPP) sont habilités à constater la

12 Tribunal correctionnel de Clermont-ferrand, 27 octobre 1999. 13 Tribunal correctionnel de Lisieux, 15 décembre 1999. 14 CA Grenoble, 18 janvier 2001. 15 Tribunal correctionnel de St Etienne, 6 décembre 1999. 16 Article modifié par la loi du 27 mars 1997.

Page 16: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

16

matérialité des infractions (article L 331-2 CPI). Ces personnes peuvent procéder dès la

constatation des infractions à la saisie des phonogrammes reproduits illicitement, des

exemplaires et objets fabriqués ou importés illicitement et des matériels spécialement

installés en vue de tels agissements (article L335- 1 CPI). L'article L.321-1 alinéa 2 du CPI

prévoit que les sociétés de gestion collective « ont qualité pour ester en justice pour la

défense des droits dont elles ont statutairement la charge » (voir chapitre IV). Pour les

phonogrammes, la SCPP est dûment mandatée par ses membres producteurs pour constater

ou faire constater les infractions à leurs droits, et agir en justice pour faire cesser toute

infraction visée à l'article 426-1 du Code Pénal.

Les procès-verbaux de constat constituent l'un des moyens d'action privilégié dont les agents

disposent pour lutter contre la piraterie. Ils sont dressés par des agents assermentés et

permettent d'apporter la preuve des infractions commises, y compris pour établir la preuve

numérique. En 2001 et 2002, selon la SCPP, 40 procès-verbaux de constat ont été dressés par

des agents assermentés.

Les moyens de lutter contre le piratage numérique semblent pour le moment insuffisants et

hors de portée des missions de police. De ce fait, il règne une certaine « impunité » dans le

cyberespace, sauf lorsqu’elle présente un caractère industriel. Toutefois, pour veiller au

respect des droits des producteurs, se développent des traités internationaux, des directives et

des actions douanières au sein de l’Union européenne. Une directive européenne contre la

contrefaçon est actuellement en préparation pour répondre aux demandes exprimées par les

représentants des industries de phonogrammes17.

17 Prochaine directive sur le respect des droits appelée aussi directive relative à la lutte contre la contrefaçon et la piraterie

Page 17: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

17

CHAPITRE II - Un dispositif d’exceptions obsolète face au numérique

Le droit a pour finalité de respecter l’intérêt public et l’intérêt privé en adoptant un

compromis équitable, c’est le cas des dispositions du CPI qui, en accordant un droit exclusif

aux producteurs de phonogrammes, prévoit deux catégories d'exceptions, pour lesquelles la

gestion collective est par ailleurs obligatoire. Ces exceptions sont aujourd’hui en partie

remises en cause par le numérique.

Notons que les droits voisins ne peuvent par ailleurs faire échec aux actes nécessaires à

l’accomplissement d’une procédure juridictionnelle ou administrative prévue par la loi ou

entrepris à des fins de sécurité publique (art. L 331-4 CPI).

Nous nous arrêterons dans ce chapitre, dans un premier temps, sur le régime de la licence

légale (A), puis nous analyserons les fondements de l’exception pour copie privée et la

notion de « copie numérique » (B), et enfin, nous verrons qu’en contrepartie de ces

exceptions, les producteurs disposent d’un droit de rémunération équitable qui n’est pas

remis en cause (C).

A. Le régime de la licence légale

La licence légale est l’exception qui permet à certaines personnes, selon certaines conditions,

d’exploiter des phonogrammes sans l’autorisation de leurs producteurs (1). Les principes qui

avaient été énoncés lors de son instauration (2) ne semblent pas devoir s’appliquer aux

nouvelles technologies (3).

1. Fondement et définition de la licence légale

L'article L 214-1 du CPI, instauré par la loi du 3 juillet 1985, fonde le régime de la licence

légale. La licence légale signifie que l'autorisation est donnée par la loi et que le producteur

ne peut s'opposer aux utilisations de ses phonogrammes, soumises à ce régime. Dès lors,

lorsque le phonogramme a été publié à des fins de commerce, son producteur ne peut

s’opposer à sa communication directe dans un lieu public, à condition que ce ne soit pas dans

un spectacle. Le producteur ne peut non plus s’opposer à la radiodiffusion du phonogramme,

ni à la distribution par câble simultanée et intégrale de cette radiodiffusion.

Page 18: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

18

2. L’origine de son instauration

Dans le domaine de la radiodiffusion de disques du commerce (phonogrammes du

commerce), si on appliquait le droit exclusif du producteur à chaque fois qu’un

phonogramme est radiodiffusé, le responsable de la diffusion devrait systématiquement se

soumettre à l’autorisation. Or, dans la pratique, Il aurait en effet été matériellement

impossible que, pour chaque diffusion d'un enregistrement par des radiodiffuseurs ou dans

des discothèques l'autorisation des producteurs soit sollicitée.

C’est pourquoi une solution relativement simple a été trouvée dans la licence légale de

radiodiffusion, prévue tout d’abord par l’article 12 de la convention de Rome de 1961, et

reprise, avec quelques nuances, par l’article L. 214-1 du CPI.

3. L’inégalité juridique pour les nouvelles technologies

La loi française ne prévoit pas de disposition légale en ce qui concerne la câblodistribution

non simultanée à une radiodiffusion hertzienne et les actes de transmission numérique

sonores sur Internet que sont le simulcasting (retransmission de manière simultanée de

programmes radiodiffusés sur Internet) et le webcasting (programme propre de diffusion en

continu d'un programme radio sur Internet).

En effet, Internet et le numérique ont permis l’émergence d’une génération de « Webradios »

qui diffusent sur Internet en dehors des ondes hertziennes. Ces dernières devraient pouvoir

bénéficier des mêmes prérogatives que les radios hertziennes traditionnelles et réclament une

mise en conformité du champ d'application de la licence légale avec les normes européennes

et internationales.

B. L’exception pour copie privée et la copie numérique

La copie privée est une seconde exception au droit exclusif des producteurs de phonogramme

(1). Cette prérogative qui fut instaurée à l’époque de la musique analogique (2) semble

aujourd’hui obsolète (3).

1. Fondement et définition de l’exception pour copie privée

L'article L 211-3 du CPI prévoit une exception au monopole des producteurs de

phonogrammes pour les copies effectuées par un particulier à des fins strictement privées. La

Page 19: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

19

copie privée est définie en droit français comme la réalisation d’une copie ou reproduction

d’une oeuvre strictement réservée à l’usage privé du copiste et non destinée à un usage

collectif. Les producteurs ne peuvent donc pas interdire les représentations privées et

gratuites de ces phonogrammes « effectuées exclusivement dans un cercle de famille ».

La notion de « cercle de famille » est restrictive et la jurisprudence la reconnaît comme les

personnes qui sont familières entre elles comme les parents ou les amis très proches, qui

sont unis de façon habituelle par des liens familiaux ou d’intimité. Pour Internet, il a été jugé

que la présentation, sur un site Internet privé, d’œuvres sans l’autorisation des titulaires des

droits ne pouvait être considérée comme entrant dans le champ de l’exception de copie privée

car cela permettait « à des tiers connectés au réseau Internet de visiter leurs pages privées et

d'en prendre éventuellement copie »18. L'utilisation même d'une oeuvre au sein d'un intranet

ne reliant que des élèves et des enseignants entre eux, dépasse largement celui du cercle de

famille. Ainsi, un phonogramme publié sur Internet est clairement destiné à une utilisation

collective19.

La directive européenne de 2001 sur le droit d’auteur et la société de l’information valide, à

titre d’exception facultative pour les Etats, la copie numérique pour un usage personnel sans

but commercial, ce qui exclut du bénéfice de l’exception les intranets qui ont un but

commercial, ainsi que les communications au sein d’une entreprise. La directive fait du

téléchargement une exception de copie privée mais laisse la possibilité aux Etats de prévoir

une compensation équitable.

2. L’origine de son instauration

Cette exception au droit exclusif du producteur de phonogrammes trouve sa justification, tout

d’abord, par le fait qu’il n'est pas matériellement possible de contrôler l'usage d'une œuvre et

des copies qui en sont faites dès lors qu'une personne jouit de cette œuvre dans sa sphère

privée.

De plus, en 1957, date à laquelle elle fut introduite dans le système législatif français, elle ne

portait nullement atteinte à l'exploitation de l'œuvre car le préjudice résultant de la copie du

18 Ordonnance de référé du 14 août 1996 du TGI de Paris 19 Par ordonnance en date du 14 août 1996, le tribunal de grande instance de Paris, statuant en référés, a reconnu qu'il y avait contrefaçon d'oeuvres protégées par le droit d'auteur dès lors que celles-ci étaient, sans autorisation des titulaires des droits, mises à disposition des utilisateurs de l'Internet

Page 20: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

20

phonogramme était limité par la qualité de la copie elle-même. En effet, la copie analogique

ne permet pas de reproduire avec une qualité identique à l'original. De sorte que la

convention de Berne prévoyait que : « est réservée aux législations des pays de l'union la

faculté de permettre la reproduction des dites oeuvres dans certains cas spéciaux, pourvu

qu'une telle reproduction ne porte pas atteinte à l'exploitation normale de l'œuvre ni ne cause

de préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur. » (Article 9-2).

3. De la copie analogique au « clonage » numérique

Une des raisons d’être de l’exception pour copie privée était liée au support du

phonogramme. Or, le passage de l’utilisation de supports analogiques aux supports

numériques remet en cause son fondement.

La « copie numérique » a en effet la particularité de permettre une reproduction de qualité

identique à l’original et c’est pour cette raison qu’elle fut interdite en 1985 pour les logiciels,

et également pour les bases de données sous format numérique. L’apparition du CD en 1981,

et plus tard de la mémoire amovible (voir infra C.), a mis un terme aux copies analogiques

sur cassette audio en permettant à n’importe quel utilisateur de réaliser de véritables

« clones » des phonogrammes. Ces clones étants à leur tour dotés des mêmes facultés de

duplication.

Ces technologies numériques rendent l’exception pour copie privée obsolète et tendent à la

remplacer par ce que certains appellent un « droit de copie ». Car, même dans l’hypothèse où

le copiste effectue un « clonage » de phonogramme pour son usage privé, l’atteinte à

l’exploitation de l’œuvre n’est pas de même nature et de même importance que lorsqu’il

s’agit de copie privée analogique.

C. Une rémunération équitable qui n’est pas remise en cause

L’utilisation des phonogrammes soumise aux exceptions du droit exclusif est compensée par

une rémunération dite « équitable » au profit des producteurs (1). L’assiette de cette

rémunération (2) à tendance à s’élargir avec l’apparition des nouveaux supports numériques

(3).

Page 21: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

21

1. Le principe de la rémunération équitable

L'article L 214-1 du CPI prévoit que les deux types d’utilisation de phonogrammes vues

précédemment (licence légale et copie privée) ouvrent droit à rémunération au profit des

artistes interprètes et des producteurs, quel que soit le lieu de fixation de ces phonogrammes.

La copie privée et la licence légale ne permettant pas au producteur de gérer sa rémunération,

la « loi Lang » de 1985 a donc, parallèlement aux deux exceptions, institué une compensation

financière envers les producteurs. Cette loi prévoit un droit à rémunération au profit des

producteurs de phonogrammes au titre de la reproduction à des fins privées et pour la

retransmission auprès des radios, des télévisions, des discothèques et des lieux sonorisés qui

diffusent des phonogrammes.

L’article L 214-2 du CPI précise que, sous réserve des conventions internationales, les droits

à rémunération reconnus par les dispositions de l’article L 214-1 sont répartis entre les

artistes interprètes et les producteurs de phonogrammes fixés pour la première fois en France.

La loi restreint ainsi le droit à rémunération pour certains phonogrammes distribués en

France.

Cette rémunération « équitable » est donc alimentée par une redevance versée, d’une part, par

les diffuseurs de phonogrammes du commerce (licence légale) et, d’autre part, par les

fabricants, importateurs de supports utilisables pour la copie privée. La redevance se

répercute ensuite sur le prix que paye le consommateur final. Ainsi, en 2002, un peu plus de

130 millions d’euros ont été collectés à titre de compensation pour la copie privée, dont 70

millions pour la copie privée sonore (+ 94% par rapport à 2001)20. Sur chaque CD vierge

vendu, un peu plus de 50 centimes sont ainsi reversés aux ayants droits.

2. L’assiette de la rémunération

Selon l’article L. 214-1 du CPI, la rémunération équitable est assise sur les recettes de

l'exploitation ou, à défaut, évaluée forfaitairement dans les cas prévus à l'article L.131-4.

La perception de la rémunération se fait, pour la licence légale, auprès des radios, des

télévisions, des discothèques et des lieux sonorisés qui diffusent des phonogrammes sur la

base de relevés de diffusions qu’ils doivent fournir. La Société pour la Perception de la

20 Article paru dans Libération le 5/04/2003 par Florent Latrive.

Page 22: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

22

Rémunération Equitable (SPRE) perçoit directement les rémunérations dues par les

radiodiffuseurs et les discothèques, la Société des Auteurs Compositeurs et Editeurs de

Musique (SACEM) ayant reçu d'elle mandat de percevoir les droits dus par les

établissements et lieux sonorisés. Leur répartition finale entre les bénéficiaires est assurée par

les sociétés de perception et de répartition des droits (SPRD) associées au sein de la SPRE.

La SPRE reverse les sommes perçues par moitié entre les sociétés d'artistes et les sociétés de

producteurs.

Pour la copie privée, elle est forfaitaire et assise sur les supports vierges d’enregistrement

sonores, le montant de la rémunération est fonction du type de support et de sa durée

d’enregistrement, son taux et ses modalités sont déterminés par une commission

administrative (le barème actuel est fixé à 0,23 euro par heure pour les supports

d’enregistrement de phonogrammes. la rémunération pour copie privée de phonogrammes est

perçue par la Société de perception de la rémunération pour la copie privée sonore

(SORECOP) et est répartie à raison de 50% pour les auteurs, 25% pour les producteurs de

phonogrammes et 25% pour les producteurs de vidéogrammes. Cette rémunération est

aujourd'hui de :

- 28,51 € pour 100 heures de cassette audio vierge.

- 45,73 € pour 100 heures de Minidisc, de CDR et de CDR audio réinscriptibles (CDR-RW).

Les barèmes et modalités de versement de la rémunération équitable sont fixés par une

commission présidée par des hauts magistrats, des représentants des titulaires de droits et des

utilisateurs. Cette commission a pour mission de déterminer les types de support, les taux de

rémunération et les modalités de son versement.

Page 23: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

23

Répartition et gestion de la rémunération au titre de la copie privée sonore

Source : graphique issu d’une étude réalisée par la Société des

Auteurs et Compositeurs Dramatiques parue en novembre 2002

3. L’extension de la rémunération pour copie privée aux supports numériques

En 1986, la commission avait défini comme suit les taux de rémunération pour les seuls

supports existants :

- cassette sonore : 1,50 F/heure

- cassette VHS : 2,25 F/heure.

Depuis, la commission, qui porte le nom de son président Francis Brun-Buisson, a travaillé

sur l’extension de l’assiette de perception de la copie privée au numérique et rendu une

décision ayant abouti à la loi du 17 juillet 2001. Cette loi a étendu le mécanisme de

rémunération à l'ensemble des supports numériques, c'est-à-dire aux supports inscriptibles

une fois (CDR) ou réinscriptibles (CDR-RW audio), aux supports amovibles ou intégrés à un

autre matériel ainsi qu’aux supports « hybrides », sur lesquels il est possible de reproduire

des sons, des images et d’autres types de données.

Page 24: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

24

Aujourd’hui, pour les mémoires amovibles dédiées à l'audio et les baladeurs enregistreurs de

MP3, la rémunération est de 1,05 € pour 100 Mo. Pour les CDR et les CDR RW, la

rémunération est de 50,43 € pour 100 Go.

En France, la commission « Brun-Buisson » poursuit ses travaux avec l’appui des ayants

droits. Son travail sur l’extension de la rémunération aux supports numériques a abouti sur

quinze mois21 à un triplement du montant de la copie privée.

Tarifs applicables aux supports numériques pour la rémunération au titre de la copie

privée applicable

Source : étude réalisée par la Société des Auteurs et Compositeurs

Dramatiques parue en novembre 2002

21 Lettre de l’ADAMI n°45. Avril / mai 2002.

Page 25: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

25

DEUXIEME PARTIE – L’adaptation du droit dans l’environnement numérique : un

contrôle plus ou moins exclusif accordé aux producteurs

Les droits voisins des producteurs de phonogrammes doivent s’adapter aux nouvelles

technologies numériques et se mettre en conformité avec les normes européennes et

internationales (Directive 2001/29 sur la société de l'information, traité OMPI de 1996). Pour

atteindre cet objectif, et sous certaines pressions exercées par les ayants droits, le législateur

tente de former un équilibre en s’empressant de mettre en place des mécanismes permettant

aux producteurs de phonogrammes de jouir de leur droit exclusif, tout en renforçant le

dispositif des exceptions existant.

Nous verrons dans un premier chapitre en quoi les règles de droit évoluent vers un

renforcement du monopole des producteurs de phonogrammes (Chapitre I). Puis, nous

constaterons que l’adaptation du droit à l’environnement numérique passe par un

renforcement du dispositif d’exceptions et une gestion collective des droits des producteurs

(Chapitre II).

CHAPITRE III - Vers un renforcement du monopole des producteurs

Le piratage de phonogrammes a connu un important développement ces dernières années et

représente aujourd’hui la préoccupation majeure des producteurs. La croissance mondiale de

l’Industrie du disque diminue progressivement22 et, parallèlement, la musique est devenue le

centre d'intérêt numéro un des internautes. En réponse à un internaute qui se vantait de

pratiquer des actes de piratage en toute impunité, le groupe Bertelsmann Music Group

(BMG), en Allemagne, a répondu que le droit allait changer rapidement en leur faveur et a

conclu en ces termes : « Dans quelques mois, tous les médias du monde entier seront

protégés contre la copie, que cela vous plaise ou non »23. Ce message symbolise bien la

vigueur dont les producteurs de phonogrammes revendiquent l’application de leur droit

exclusif dans l’économie numérique. De même, l'énoncé de la journée d'ouverture du

MIDEM 2002 était clair : « LE DÉFI de l'industrie musicale : transformer les consommateurs

en consommateurs payants ».

22 Le marché français du disque est le seul à avoir poursuivi sa croissance en 2002. Avec une croissance de 4,4 % en valeur (chiffre d'affaires) et de 3,3 % en volume (unités), le marché du disque en France a connu une progression qui le distingue des principaux marchés mondiaux. 23 On peut lire une traduction en anglais de cette lettre sur le site : theregister.co.uk/content/54/28009.html

Page 26: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

26

Nous analyserons tout d’abord les problèmes liés à l’apparition des mesures techniques de

protection contre la piraterie numérique (A), puis nous relèverons l’apparition d’un nouveau

droit pour lutter contre l’échange de fichiers sur les réseaux (B), et enfin nous verrons

comment l’application du droit exclusif des producteurs est renforcé sur Internet (C).

A. L’avènement des mesures techniques de protection contre la piraterie

numérique

Un avant-projet de loi prévoit de protéger les dispositifs anti-copie contre la contrefaçon (1).

Ce renforcement du droit exclusif des producteurs de phonogrammes replace la copie privée

dans un nouveau contexte (2) et semble accorder aux producteurs un nouveau droit

« d’utilisation » (3).

1. Les mesures techniques de protection protégées contre la contrefaçon

En adoptant le 9 avril 2001 la directive 2001/29/CE sur l'harmonisation de certains aspects

du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, le Conseil de l'Union

Européenne a consacré la protection juridique des dispositifs anti-copie et rappelé que les

titulaires des droits doivent bénéficier du total contrôle de la fabrication et de la distribution

des dispositifs conçus pour neutraliser les dispositifs anti-copie. Les Etats membres

disposaient alors d'un délai de 18 mois pour transposer la directive dans le droit national.

Le nouveau texte donne satisfaction aux producteurs de disques, en légitimant les mesures de

protection anticopie sans fixer aucune limite : « Les titulaires de droits ont la faculté de

prendre les mesures adéquates afin de limiter le nombre de copies. »

En France, un avant-projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société

de l'information a été présenté le 5 décembre 2002 au CSPLA. L’article 8 de cet avant-projet

prévoit que « l'auteur d'une oeuvre autre qu'un logiciel, l'artiste interprète, le producteur de

phonogrammes ou de vidéogrammes, l'entreprise de communication audiovisuelle peut

mettre en place des mesures techniques de protection des droits qui leur sont reconnus ».

Dans son article 14, l’avant-projet assimile à un délit de contrefaçon le fait de « porter

atteinte, en connaissance de cause, à toute technologie, produit, appareil, dispositif, moyen,

service ou composant qui, dans le cadre normal de son fonctionnement, est destiné à

permettre le contrôle de l'utilisation de l'œuvre ». Ce même article interdit de fabriquer,

Page 27: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

27

d'importer, de détenir en vue de la vente, ou de faire connaître directement ou indirectement

tout service, information ou moyen en vue de contourner une mesure technique de protection.

L’avant-projet de loi prévoit donc d’autoriser les producteurs à mettre en place des mesures

techniques de protection, visant à empêcher la copie des œuvres dont ils sont titulaires sur

certains supports ou à limiter le nombre de copies possibles. Les producteurs de

phonogrammes ont donc pris l’initiative, depuis le début de l’année, d’appliquer des mesures

de protection sur leurs disques. Ainsi, sur les derniers disques des Maisons de disques Sony et

EMI/Virgin on peut lire l’avertissement suivant : « ce disque contient un dispositif technique

limitant les possibilités de copie …».

Le principal fabricant actuel de systèmes techniques de protection est l’américain

Macrovision avec déjà 100 millions de CD équipés. De même, Microsoft s'est associé

dernièrement au groupe MPO International, leader mondial dans le domaine du pressage de

disques audio, pour développer et intégrer sur les CD musicaux, une technologie de

protection du droit d'auteur, qui autorise la copie numérique à usage privé mais en nombre

limitée et à la discrétion des producteurs. Le Digital Millenium Copyright Act (DMCA),

adopté aux Etats-Unis en 1998, a introduit en effet des dispositions similaires qui visent à

interdire la production ou la diffusion de tout dispositif ou logiciel permettant de contourner

les moyens techniques mis en place pour contrôler le droit de reproduction ou de

représentation des oeuvres numériques. En France, la Fédération Internationale de l'Industrie

Phonographique (IFPI), qui regroupe les syndicats de producteurs de disques, a récemment

lancé un appel d'offre auprès des laboratoires de tests indépendants dont l’objectif est de

tester rapidement la compatibilité des dispositifs de contrôle de la copie avec les matériels

audio et les ordinateurs disponibles sur le marché.

2. La copie privée numérique remise en cause

L’avant-projet de loi relatif aux droits d'auteurs élaboré par le ministère de la Culture

légitime les mesures de protection anticopie sans fixer aucune limite : « Les titulaires de

droits ont la faculté de prendre les mesures adéquates afin de limiter le nombre de copies ».

La directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 prévoit cependant que si les mesures techniques

mises en œuvre par les titulaires de droits ne permettent pas de bénéficier de l’exception de

copie privée, l’Etat n’a que la simple faculté de prendre des mesures assurant le bénéfice de

Page 28: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

28

cette exception. De plus, la directive précise que l’Etat ne peut pas empêcher les titulaires de

droits de limiter techniquement le nombre de copies.

L'avant-projet de loi ne supprime pourtant pas l’exception pour copie privée. L'alinéa 2 de

l'article 8 précise que les mesures de protection « doivent permettre aux bénéficiaires des

exceptions (…) d'en jouir lorsqu'il a un accès licite à l'œuvre ». Cette disposition signifie que

les dispositifs anti-copie ne doivent pas empêcher l'utilisateur légitime d'une œuvre de

réaliser une copie privée dans les conditions prévues par la loi. L'exception de copie privée

n'est donc pas supprimée dans son principe et l'acquéreur d'une œuvre aura toujours la faculté

de reproduire celle-ci par d'autres moyens que ceux qui sont prohibés par le producteur.

Le petit logo « copyright control » qui apparaît sur les CD provoque de vives contestations.

Les producteurs souhaitent, avec cette nouvelle prérogative, empêcher le consommateur de

se livrer au « clonage pirate privé industriel »24. Cependant, certaines associations de

consommateurs comme l’UFC Que Choisir, estiment que l'avant-projet de loi empêche

pratiquement les utilisateurs de procéder à des copies privées et revendique un « droit de

copie privée ». Or, Comme elle est prévue dans l'article L 211-3 du CPI, l’exception pour

copie privée n'est pas un droit du consommateur mais une exception au droit exclusif des

producteurs liée à l'impossibilité pour les producteurs de contrôler la copie réalisée dans un

cadre domestique.

Avec l'avant-projet de loi, qui se serait transformé en projet de loi25, les Majors pourront

donc limiter la copie du phonogramme à un exemplaire, comme le souhaitait le président de

la SCPP, Pascal Nègre. De plus, le texte ne donne également aucune garantie sur la qualité de

la copie autorisée. Autrement dit, les producteurs pourront imposer une dégradation de

qualité de la copie. « Entre copie privée et piraterie privée, il n'y a qu'un pas », a estimé

Pascal Nègre, « Il n'y a aucune raison que le consommateur exige le droit à se livrer au

clonage pirate privé industriel. »

24 Phrase extraite d’un entretien avec Pascal Nègre, directeur d'Universal Music France et représentant des producteurs avec Estelle Dumout pour ZDNet France le 10 janvier 2003 25 document publié par le collectif EUCD.info pour le logiciel libre le 12 mai 2003

Page 29: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

29

3. Vers un droit d’utilisation

La directive du 22 mai 2001 tout comme l’avant-projet de loi français prévoit que ce n’est

pas l’accès à l’œuvre qui est protégé, mais l’utilisation qui doit être fait de l’œuvre. La

directive sanctionne le contournement, effectué sciemment, des mesures interdisant les actes

non autorisés par le titulaire de droits voisins. L’avant-projet assimile à un délit de

contrefaçon le fait de « porter atteinte, en connaissance de cause » aux mesures techniques.

Sont donc interdits tous les actes non autorisés par le titulaire de droits. La directive consacre

donc un droit de contrôler l’utilisation que fait le public d’une œuvre et offre aux producteurs

de phonogrammes le bénéfice d’un nouveau droit « d’utilisation ».

B. Le développement des moyens de lutte contre l’échange de fichiers sur les

réseaux

Grâce au format MP3, l’échange de fichiers musicaux s’est développé sur les réseaux au

point de devenir la première cause du piratage dans le monde. A défaut de ne pouvoir

s’attaquer aux éditeurs de services « peer to peer » (1), les producteurs tentent de poursuivre

ses utilisateurs (2). Pour cela, un nouveau projet de loi prévoit la possibilité aux ayants droit

de collecter les données nominatives des utilisateurs (3), voir de constituer de véritables

fichiers de fraudeurs (4).

1. Le MP3 et les nouveaux modes d’échange sur Internet

Avec l’apparition du format MP3, qui permet de compresser et de décompresser à volonté

des fichiers musicaux de faible volume, les phonogrammes se sont de plus en plus

dématérialisés de leur support et se sont parallèlement multipliés sur Internet. Le MP3 a ainsi

permis la naissance d’une nouvelle forme d’exploitation des phonogrammes. En effet,

l’utilisateur peut désormais convertir ses phonogrammes d’un support CD du commerce en

fichiers MP3, les diffuser sur le réseau et les partager avec d’autres utilisateurs. Ces derniers

auront la possibilité de les retransformer à volonté sur un support numérique tel qu’un CDR

ou une mémoire amovible du type lecteur de MP3.

Avec une telle facilité de dématérialisation, de nouveaux moyens de diffusion et d’échange

sont apparus sur les réseaux. Des systèmes d'échange de fichiers dits peer to peer, ont permis

à n’importe quel utilisateur de procéder à l'échange de fichiers musicaux par téléchargement

sans l’autorisation des ayants droits. Une des principales causes du développement de la

Page 30: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

30

piraterie de phonogrammes réside d’ailleurs aujourd’hui dans l’utilisation des services

décentralisés d’échange de fichiers sur Internet. Selon la SACEM, 99% des fichiers MP3

disponibles en téléchargement sur Internet sont désormais illégaux.

Peu après l’apparition des premiers services d’échange sur Internet, l’affaire Napster26 avait

permis aux producteurs de phonogrammes d’arrêter provisoirement ce procédé technique

gratuit permettant aux internautes de s’échanger des fichiers. Mais plusieurs logiciels

similaires ont rapidement pris sa place et les services décentralisés d’échange de fichiers

comme KazaA ou Morpheus rassemblent encore plus d’utilisateurs. On estime aujourd’hui

que plusieurs millions27 de fichiers MP3 illicites sont quotidiennement mis à la disposition

des internautes en France et dans le monde, principalement par l'intermédiaire de systèmes

Peer to peer dépourvus de serveur central. Selon un sondage Ipsos-Reid (source IPSOS)

mené en début d'année sur douze pays, dont les Etats-Unis et la France, 44 % des internautes

seraient aujourd'hui des téléchargeurs illégaux.

Toutefois, aux Etats-Unis, un juge fédéral vient de prendre une décision28 qui valide le

développement et la mise à disposition de logiciels d’échange de fichiers. Le juge a débouté

l'association de l'industrie musicale américaine qui avait porté plainte contre les services

d'échange gratuit de fichiers sur internet Grokster et Morpheus, demandant leur fermeture

pour atteinte à la législation sur les droits d'auteur. Le juge a rejeté la plainte de la Recording

Industry Association of America (RIAA), estimant que les deux logiciels ne pouvaient pas

contrôler le contenu échangé par leur intermédiaire mais de façon décentralisée, qu'il soit

protégé par des droits d'auteur ou non. Au contraire de Napster, il ne fonctionne pas sur le

principe d'un serveur central. Les systèmes décentralisés d’échange de fichiers présentent

aussi l’avantage d’avoir une fonction d’anonymisation et surtout de conception en réseau.

S’éloignant de la jurisprudence Napster, la décision américaine reprend une partie de

l’argumentaire développée par la Cour d’appel d’Amsterdam dans une affaire en date de

mars 2002 concernant KaZaA. La juridiction néerlandaise avait rejeté le recours de Burna

Stemra, organisme de gestion des droits d’auteur, au motif que la société KaZaA ne pouvait

26 La Cour d'appel de San-Francisco a rendu le 12 février 2001 un arrêt accusant Napster de violer les droits de Propriété Intellectuelle des producteurs en permettant aux utilisateurs de commettre des actes de contrefaçon. Ces derniers ne pouvant en effet commettre de tels actes qu'à l'aide du système centralisé de Napster. 27 25 millions de fichiers musicaux seraient en libre circulation d’après le SCPP. 28 Washington, vendredi 25 avril 2003.

Page 31: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

31

être tenue pour responsable des abus d’utilisation de son programme. Au contraire de

Napster, les sociétés ne fournissent pas les outils permettant d’assurer une telle contrefaçon.

Les modalités de contrefaçon des œuvres sur les réseaux semblent s’être de nouveau

transformées. Cette évolution conduit les titulaires de droit à porter une attention particulière

à de nouvelles stratégies juridiques

2. Les utilisateurs des réseaux P2P poursuivis

La légalité « temporaire » des services peer-to-peer permet actuellement aux utilisateurs de

s’échanger des fichiers de musique presque sans aucun contrôle. Or, en l’espèce, la

contrefaçon est caractérisée, d’une part, par la mise à disposition des phonogrammes au

public par l’échange sans l’autorisation du producteur et, d’autre part, par la reproduction

d’enregistrements par téléchargement. La numérisation d’une œuvre, en elle-même, constitue

une reproduction qui relève du droit exclusif des producteurs selon la jurisprudence qui s’est

prononcée en matière musicale dans des affaires Brel et Sardou29,

Confrontés à ces comportements, les producteurs se tournent de plus en plus contre les

internautes utilisateurs de ces services d’échange. L'objectif n'étant pas, selon les

producteurs, de poursuivre tous les internautes qui mettent des fichiers musicaux en ligne, ou

qui les téléchargent, mais de faire des exemples. Il s'agit de démontrer qu'il existe des limites

et que l'utilisateur final peut très bien se retrouver dans une situation délicate.

Aux Etats-Unis, la RIAA s'attaque à l'utilisateur final. Récemment, un juge de Washington a

ordonné à la première compagnie américaine de téléphone Verizon Communications de

révéler les noms de deux internautes soupçonnés d'avoir diffusé des chansons sur des

services peer to peer, que Verizon transporte via ses réseaux téléphoniques30. S’appuyant sur

les dispositions du DMCA (1998). De même, un groupement danois de lutte contre la

contrefaçon en ligne L’Anti Pirat Gruppen (APG), vient de faire parvenir à 150 utilisateurs

de réseaux d’échange une facture à payer dont le montant correspond aux droits d’auteur dus

sur les fichiers mis en téléchargement. A défaut de paiement, le Anti Pirat Gruppen saisira la

justice. De même, le mois dernier, la RIAA envoyait à des grandes entreprises américaines

29 Ordonnances de référé, Paris, 14 août 1996 30 Verizon refusait cela, estimant qu’une telle pratique portait atteinte au droit constitutionnel à la vie privée de l’internaute, le fournisseur d’accès a souhaité faire appel de cette décision.

Page 32: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

32

une brochure pour les mettre en garde contre les dangers de l'utilisation de logiciels

d'échange de fichiers au bureau et annonçait également qu'elle suivait à la trace les plus

grands consommateurs de musique gratuite en entreprise.

En France, la poursuite en justice des utilisateurs serait possible si les producteurs pouvaient

se procurer leur adresse IP (Internet Protocol), qui est l’identifiant de leur ordinateur. Ils

pourraient ainsi identifier les internautes contrefacteurs.

3. La collecte des données nominatives

La répression passe donc par l’identification des utilisateurs qui repose sur l’obtention des

adresses IP de ces derniers, chaque internaute possédant effectivement une adresse IP. Mais

la Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL) considère que l'adresse IP est une

donnée nominative, et donc strictement personnelle, l’internaute doit donc donner,

conformément à l’article 26 de la Loi Informatiques et Libertés du 6 janvier 1978, son accord

pour que son adresse IP soit collectée et éventuellement transmise à des tiers. Ce texte offre,

dans la pratique, une certaine impunité à l’utilisateur de peer to peer pour échanger des

fichiers illicites.

Mais depuis le 1er avril 2003, le Sénat a adopté, en première lecture, un projet de loi relatif à

la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à caractère

personnel réformant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et

aux libertés. Ce projet pourrait lever l’interdiction faite aux producteurs, à travers la loi

informatique et liberté, de collecter les adresses IP des utilisateurs de logiciels peer to peer.

Le projet de loi comporte en effet un amendement qui accorderait aux « personnes morales

victimes d'infractions » le droit de « procéder au traitement automatisé des informations

nominatives concernant les infractions, condamnations ou mesures de sûreté (…) pour les

stricts besoins de la lutte contre la fraude ». Ce projet de loi modifie la loi Informatique et

Libertés de 1978, dans le cadre de la transposition de la directive européenne de 1995 sur la

protection des données à caractère personnel.

Le projet de loi permettrait donc aux producteurs de phonogrammes de mettre en place des

outils collectant les adresses IP des utilisateurs contrefacteurs des réseaux d’échanges peer to

peer, en vue de l’engagement de poursuites judiciaires. Ces outils existent déjà car la Société

pour l'administration du droit de reproduction mécanique des auteurs compositeurs et

Page 33: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

33

interprètes (SDRM) s’était déjà vu rejeter un projet31 de veille et de lutte contre la

contrefaçon sur Internet en 2001 par la CNIL. Ce projet sera soumis à une deuxième lecture à

l'Assemblée nationale au mois de juin 2003.

4. La mutualisation des fichiers de fraudeurs admise sous condition

Le projet de loi adopté par le Sénat admettrait un autre principe : la mutualisation des fichiers

de fraudeurs, c'est-à-dire la création d'un fichier central, accessible par plusieurs entreprises.

Pourtant, aux termes de l'article 30 de la loi du 6 janvier 1978, seules « les juridictions ainsi

que les autorités publiques agissant dans le cadre de leurs attributions légales ainsi que, sur

avis conforme de la commission nationale, les personnes morales gérant un service public

peuvent seules procéder au traitement automatisé des informations nominatives concernant

les infractions, condamnations ou mesures de sûreté ». Cette disposition empêchait

notamment aux producteurs de constituer des fichiers de fraudeurs.

Le projet de loi comporte un amendement qui autoriserait ce type de traitement sous certaines

conditions : l'autorisation de la Cnil, l'interdiction de faire un fichier tous secteurs confondus

et des limitations de durée de conservation et d’information des personnes concernées32.

Les producteurs de phonogrammes pourraient donc avoir la possibilité de créer une base de

données nominative de contrefacteurs utilisant les réseaux peer to peer et ces fichiers

pourront circuler entre entreprises du même métier. Ce qui représente un nouvel outil qui

permettait de les mettre en garde et de réduire le flux de fichiers musicaux illégaux.

C. Le renforcement des moyens d’investigation de la contrefaçon sur les réseaux

Une seconde cause de la contrefaçon de phonogrammes sur les réseaux tient à la présence de

nombreux fichiers musicaux disponibles gratuitement en ligne. Pour lutter contre cette forme

de piratage, les producteurs effectuent des démarches au cas par cas (1). Mais, un nouveau

projet de loi prévoit de renforcer la responsabilité des intermédiaires sur le réseau, ce qui

serait favorable à l’application du droit exclusif des producteurs (2).

31 Projet baptisé Webcontrol 32 Voir les conditions de recueil et de traitement des données nominatives des personnes physiques dans la loi « Informatique et libertés ».

Page 34: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

34

1. Le développement des investigations sur Internet

Même si l’essentiel de la contrefaçon de phonogrammes se fait par l’échange de fichiers, le

réseau met à disposition une quantité importante de phonogrammes sous formes de fichiers

MP3.

Concernant la piraterie sur Internet, selon la SCPP, 444 sites pirates sur Internet auraient été

fermés depuis un an, suite à l'envoi de courriers d'avertissement et de mise en demeure par la

SCPP, soit 44 452 fichiers MP3 illicites supprimés sur la base des constats faits par les agents

assermentés de la SCPP. Selon les mêmes sources,

15 décisions de justice favorables aux producteurs ont été obtenues, dont quatre concernant le

téléchargement de fichiers MP3 illicites.

Mais les ayants droits ont décidé d’employer une politique répressive envers les éditeurs de

sites. En France, plusieurs dossiers liés à des affaires de piratage sont aujourd'hui en cours

d'instruction. Les actions se multiplient et depuis le mois de février 1999, la cellule de lutte

contre la contrefaçon sur Internet de la SCPP a réussi, par ses mails de rappel à l’ordre, à

faire fermer 400 sites de MP3. Le créateur du site FranceMP3 a dernièrement été condamné

le 26 mars 2003 par le Tribunal correctionnel de Paris car il offrait en téléchargement des

fichiers MP3 contrefaisants. De même, en Australie, la police a récemment annoncé la

fermeture d'un site Internet distribuant de la musique gratuitement et l'arrestation des trois

étudiants soupçonnés d'en être les créateurs. Selon les industriels, la valeur totale de la

musique téléchargée à partir du site serait supérieure à 37 millions de dollars.

Les producteurs cherchent ainsi à se constituer une jurisprudence efficace en la matière. En

France, la mise à disposition sur Internet d’œuvres au format MP3 sans autorisation de la

SDRM est désormais qualifiée de manière constante par la jurisprudence étant une

contrefaçon. Le juge33 la qualifie sans que l’éditeur du site ne puisse invoquer à son profit

l’exception de copie privée, car cette mise à disposition « favorise l’utilisation collective des

reproductions »34.

33 Tribunal correctionnel de Saint Etienne, 6 décembre 1999 34 Décisions Brel et Sardou

Page 35: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

35

Activité du Bureau Anti Piraterie de la SCPP pour la période 1990-2002

Nombre de dossiers de contentieux gérés chaque année

Source : graphique issu d’une étude de la SCPP

2. La responsabilité des intermédiaires

Outre le développement des investigations contre les fraudeurs, les producteurs prévoient

d’entreprendre des procédures contre les intermédiaires de la contrefaçon sur les réseaux,

c'est-à-dire les fournisseurs d'accès et d'hébergement car les sources pour les fichiers MP3

peuvent se délocaliser à l'étranger, et ainsi être facilement hors d'atteinte de la justice

française.

En France, le projet de loi pour la confiance dans l’économie numérique adopté par

l’Assemblée Nationale le 26 février 2003 donne une nouvelle responsabilité aux prestataires

techniques. Selon de projet de loi : « les personnes qui assurent, même à titre gratuit, le

stockage direct et permanent pour mise à disposition du public de signaux, d’écrits, d’images,

de sons ou de messages de toute nature accessibles par des services de communication

publique en ligne » ne peuvent voir leur responsabilité civile engagée du fait de la diffusion

de ces informations ou activités que si, dès le moment où elles ont eu la connaissance

effective de leur caractère illicite, ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère

illicite, elles n’ont pas agi avec promptitude pour retirer ces données ou rendre l’accès à

celles-ci impossible.

Page 36: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

36

Le projet de loi consacre donc le principe selon lequel les fournisseurs d'accès et

d'hébergement « ne sont pas soumis à une obligation générale de surveiller les informations

qu'ils transmettent ou stockent, ni à une obligation générale de rechercher des faits ou des

circonstances révélant des activités illicites ». Par contre, les fournisseurs d'accès et

d'hébergement sont soumis à une obligation d'appréciation a posteriori de la licéité des

contenus qu'ils hébergent. Alors qu’en droit positif, l’actuel article 43-8 de la loi prévoit que

« les personnes physiques ou morales qui assurent, à titre gratuit ou onéreux, le stockage

direct et permanent pour mise à disposition du public de signaux, d’écrits, d’images, de sons

ou de messages de toute nature accessibles par ces services » ne peuvent voir leur

responsabilité pénale ou civile engagée à raison du contenu de ces services que dans le cas où

« ayant été saisies par une autorité judiciaire, elles n’ont pas agi promptement pour empêcher

l’accès à ce contenu ». Il ne s’agit donc plus pour les hébergeurs de se contenter d'appliquer

une injonction ou une décision judiciaire mais de décider de mettre fin ou non à

l'hébergement d'un contenu en raison de son « caractère illicite, ou de faits et circonstances

faisant apparaître ce caractère illicite », ou encore parce qu'ils ne peuvent « ignorer le

caractère illicite » de ce contenu.

Cette disposition pourrait ouvrir la voie à de nombreuses plaintes visant à obtenir que les

fournisseurs d'accès et d'hébergement bloquent l'accès aux sites comportant des MP3 illicites,

renforçant ainsi l’application du droit exclusif des producteurs de phonogrammes.

Page 37: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

37

CHAPITRE IV - Vers une limitation du monopole des producteurs

Nous avons vu qu’à l’ère analogique, pour tenter d’établir un équilibre entre l’application du

droit exclusif des producteurs et les reproductions incontrôlables des utilisateurs, le

législateur avait mis en place un régime d’exceptions (voir chapitre II). Dans

l’environnement numérique, les moyens d’investigation à l’usage des producteurs se

développent mais la répression ne semble pas être le remède le plus efficace pour lutter

contre le piratage sur le long terme. De même, les système de protection comme Key2Audio

de Sony, le premier à avoir exploité massivement un dispositif anticopie, censé interdire la

lecture sur micro-ordinateur des disques protégés, n'a pas résisté longtemps aux pirates. La

loi tente donc de favoriser l’adaptation des exceptions légales au monopole des producteurs

de phonogrammes. Ces exceptions passent obligatoirement par une gestion collective de

leurs droits.

Nous verrons donc tout d’abord en quoi la gestion collective des droits des producteurs est

une solution adaptée à l’environnement numérique (A), puis nous constaterons l’évolution du

régime des exceptions au droit exclusif (B).

A. L’adaptation de la gestion collective des droits dans l’environnement numérique

La gestion collective est une disposition obligatoire mais, avant tout essentielle pour parvenir

à assurer le respect des droits des producteurs de phonogrammes (1). Sur Internet, elle est

apparue avec l’instauration d’un « guichet unique » pour les œuvres musicales (2) et tend à

s’appliquer pour la diffusion de musique en ligne (3). Pour rendre la gestion collective

efficace à l’ère numérique, des techniques d’identification des phonogrammes sont mis en

place (4).

1. La gestion collective des droits des producteurs, origine et organisation

Les producteurs ne peuvent, dans la pratique, contrôler toutes les utilisations de leurs

phonogrammes ni gérer individuellement leur rémunération. L'impossibilité pratique dans

laquelle se trouvent aussi bien les producteurs que les utilisateurs rend nécessaires les

organisations de gestion collective qui agissent au nom des titulaires de droits.

Page 38: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

38

Les sociétés de perception et de répartition des droits d’auteur et des droits voisins sont

régies par l’article L 321-1 du CPI qui prévoit qu’elles soient constituées sous forme de

sociétés civiles, dont les associés sont obligatoirement des auteurs, des artistes interprètes,

des producteurs de phonogrammes ou de vidéogrammes, des éditeurs, ou leurs ayants droits.

Ces sociétés de gestion collective agissent au nom de leurs membres, négocient les tarifs et

les modalités d'utilisation avec les utilisateurs, délivrent des autorisations d'utilisations,

perçoivent et répartissent les redevances.

Les droits gérés par les organisations de gestion collective comprennent le droit

d'interprétation et d'exécution publiques (la musique jouée ou interprétée dans des

discothèques, des restaurants et autres lieux publics); le droit de radiodiffusion (en direct et

sur la base d'interprétations ou d'exécutions enregistrées à la radio et à la télévision); les

droits de reproduction mécanique d'oeuvres musicales (la reproduction d'oeuvres sur disque

compact, bande, disque vinyle, cassette, minidisque ou autre support d'enregistrement) et les

droits voisins (les droits à rémunération des artistes interprètes ou exécutants et des

producteurs de phonogrammes pour la radiodiffusion ou la communication au public de leurs

phonogrammes).

Les sociétés représentant les droits des producteurs sont la SCPP, qui représente les majors,

et la Société Civile des producteurs de phonogrammes en France (SPPF) qui regroupe les

producteurs indépendants. Ces sociétés sont regroupées au sein de la SPRE dont le rôle est

étudié dans le chapitre II. Les oeuvres déclarées par les membres de l'organisation constituent

ce qui est communément appelé le répertoire "national" ou "local" (par opposition au

répertoire international, qui est constitué des oeuvres étrangères.

2. La gestion collective sur Internet et l’instauration d’un « guichet unique »

Aujourd'hui, les phonogrammes sont numérisés, comprimés, téléchargés, copiés et distribués

par Internet aux quatre coins du monde. Pour palier à ces nouveaux modes de diffusion, la

directive européenne « câble et satellite » 93/83 du 27 septembre 1993 a instauré le principe

de gestion collective obligatoire dans l’environnement numérique mais « sans préjudice de la

réglementation par les Etats membres des activités des sociétés de gestion collective ».

Conformément au principe du traitement national consacré à la fois dans la Convention de

Berne et dans la Convention de Rome, les sociétés de gestion collective européennes ont

Page 39: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

39

signé des accords de représentation réciproques pour s'échanger les répertoires entre pays et

élargir ainsi le système de perception sans se soucier des frontières et en retenant comme

critère principal la résidence économique du fournisseur de contenu en ligne. Car,

auparavant, le système de perception tournait autour du critère de la localisation

géographique de la diffusion. Les sociétés de gestion collective administrent donc les

répertoires étrangers sur leur territoire national, échangent des informations et paient des

redevances aux titulaires de droits étrangers.

Depuis, le CSPLA a travaillé sur l’instauration d’un "guichet unique" sur Internet dans le but

de simplifier l'accès aux informations et aux autorisations, afin de permettre une exploitation

des droits en ligne des producteurs. Depuis juillet 1996, pour diffuser de la musique, il faut

désormais faire une déclaration auprès de SESAM et payer des droits selon le service

proposé. Le "guichet unique" SESAM est une alliance des cinq principales sociétés de

gestion collective françaises qui proposent aux utilisateurs une source centralisée pour se

procurer des autorisations facilement et rapidement. Ce regroupement concerne

principalement l’utilisation d’œuvres musicales et d’images fixes. De plus, un accord a

récemment été signé entre la SACEM, la SDRM et SESAM pour permettre une utilisation

commune de leurs répertoires sur Internet. Vitaminic France règle directement les droits

d’auteur au titre de la diffusion en ligne d’œuvres musicales à la demande, qu’il s’agisse de

Streaming (diffusion en continu) ou de téléchargement.

3. La gestion collective de la diffusion de musique en ligne

Les webradios sont des sites diffusant en continu (en streaming) sur Internet différents types

de contenus musicaux. Ces webradios ne bénéficient pas de l’exception de licence légale

instaurée par la loi du 3 juillet 1985. Selon le Livre Vert de la Commission des

Communautés européennes, « la différence entre les copies d'une radiodiffusion selon que le

signal soit numérique ou analogique justifierait l'instauration d'un autre droit "numérique"

exclusif dit de « radiodiffusion numérique ». Il s'agit dans les deux hypothèses de

circonscrire le risque inhérent à la qualité particulière de la copie numérique, qui s'avère plus

un clonage qu'une simple copie. ».

Pour éviter aux webradios de demander les autorisations aux producteurs de phonogrammes

avant toute diffusion, leur gestion est faite de manière collective par la SACEM qui autorise

la diffusion publique des œuvres protégées des répertoires qu'elle gère au moyen de contrats

Page 40: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

40

passés avec les éditeurs de webradios. La SACEM a mis en place, depuis septembre 2001, un

spécifique de gestion avec la perception d’un montant de redevances basé sur le nombre de

pages vues.

Les tarifs de droit d'auteur applicables aux webradios, à l'exclusion de toute faculté de

téléchargement, sont les suivants:

Webradio à vocation commerciale (exploitée par une société commerciale, même si les

recettes sont inexistantes en phase de démarrage) : 6 % des recettes du site avec un minimum

garanti mensuel égal à 145 € HT, majoré de 5,35 € HT par tranche de 100 000 pages vues par

mois (audience totale du site)

Webradio associative (exploitée par une association, et sans recettes directes ou

indirectes) : Pour prix de l'autorisation qui lui est accordée, l'association verse à la SACEM,

pour son propre compte et pour celui des autres sociétés d'auteurs signataires du présent

contrat, une redevance forfaitaire hors taxes égale à 72,5 € HT par mois, majorée de 2,7 € HT

par mois par tranche de 100 000 pages vues par mois (audience totale du site).

Ce dispositif qui est censé participer à la nécessité d’adapter le système de licence

légale à la diffusion de musique en ligne, peut être interprété comme un affaiblissement du

droit exclusif des producteurs de phonogrammes sur la « radiodiffusion numérique ».

4. La mise en place de procédures techniques d’identification des phonogrammes

La gestion collective des droits des producteurs se dessine donc sur Internet avec un

« guichet unique » mais la gestion des droits des producteurs concerne aussi la défense de

leurs droits. L’article L 321-2 al 2 du CPI prévoit en effet que les sociétés de gestion

collective ont la capacité d’ester en justice pour la défense des droits dont elles ont la charge.

Nous avons vu au chapitre III que les sociétés comme la SCPP prenaient des mesures pour

lutter contre la piraterie sur Internet mais qu’elles ne disposaient pas encore de moyens

efficaces pour contrôler la diffusion des phonogrammes sur le réseau. Un second type de

mesures basées sur des contraintes techniques se dessine actuellement pour permettre

l’identification des œuvres.

L’identification des œuvres numérisées a fait l’objet en France d’une coopération de toutes

les organisations représentatives des titulaires des droits avec le ministère de la culture et

l’association française de normalisation (AFNOR). Des bases de données se constituent sur

Page 41: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

41

les œuvres et sur les ayants droit, outils d’une future gestion en ligne et chaque

phonogramme va pouvoir désormais être identifié par quiconque et partout dans le

monde. Le 22 octobre 2001, l’organisation internationale de normalisation (ISO), a en effet

annoncé, la ratification de l’International Standard Music Works Code (ISWC). Ce standard

est reconnu comme la norme unique pour l’identification mondiale des œuvres musicales (à

ce jour plus de 2 millions de numéros ISWC ont été attribués depuis le premier

ISWC en 1996). Un numéro d’identification internationale est ainsi attribué à chaque œuvre.

Cela concerne aussi bien les nouvelles compositions musicales que le répertoire des

compositions musicales existantes, et ceci indépendamment du support (matériel ou non)

dans lequel elles s’inscrivent.

La mise au point de systèmes de numérotation et de codes uniques, insérés dans des supports

numériques tels que le CD permettent donc l'identification correcte des phonogrammes, des

titulaires de droits, des supports numériques eux-mêmes. Il sera donc plus facile de

reconnaître une œuvre musicale partout dans le monde, et donc de rémunérer le producteur

pour son utilisation.

De plus, le nouveau texte de loi relatif aux droits d'auteurs élaboré par le ministère de la

Culture interdit aux utilisateurs de supprimer les informations incorporées dans les oeuvres

sous la forme de tatouages numériques. Le projet de loi interdit en effet de supprimer toute

information insérée sous forme électronique dans une oeuvre, pour préciser le régime des

droits y afférant. Le projet de loi interdit également la suppression des «informations sous

forme électronique concernant le régime des droits afférents à une oeuvre». En clair, il sera

interdit de supprimer tout élément (code ou numéro), inséré directement dans un fichier audio

ou vidéo, par exemple, et servant à l'identification et aux modalités d'utilisation d'une oeuvre.

B. L’adaptation du régime des exceptions au numérique

Le dispositif d’exceptions au droit exclusif des producteurs de phonogrammes s’adapte dans

l’environnement numérique. Deux nouvelles exceptions sont en passe de voir le jour :

l’exception pour reproduction provisoire (1) et l’exception pour courte citation en matière

musicale (2).

Page 42: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

42

1. L’exception pour reproduction provisoire

Certaines reproductions provisoires répondent essentiellement à des impératifs techniques

comme les techniques du Catching, qui consistent à stocker temporairement des données

dans une zone rapidement accessible, ou du Streaming, qui est un procédé qui permet

d’écouter un fichier simultanément à son téléchargement. Les fournisseurs d’accès au réseau

disposent de disques durs sur les ordinateurs servant d’intermédiaires entre leurs abonnés et

Internet (les proxy) et lorsqu’un abonné télécharge des données, celles-ci sont conservées

plus ou moins temporairement sur ces disques durs.

La directive 2001/29/CE du parlement européen et du conseil du 22 mai 2001 sur

l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de

l’information, a tenu compte du caractère indispensable des reproductions provisoires

propres à l’environnement numérique et a instauré une nouvelle exception obligatoire au

droit exclusif de reproduction, l’exception pour reproduction provisoire (Considérant 33 et

article 5.1).

L’exception est reprise dans l’avant-projet de loi relatif au droit d’auteur et aux droits voisins

dans la société de l’information du 5 décembre 2002. L’avant-projet prévoit de modifier

l’article L.122-5 du CPI avec une nouvelle disposition concernant la reproduction provisoire,

« qui est transitoire ou accessoire, constituant une partie intégrante et essentielle d’un

procédé technique dont l’unique finalité est de permettre une transmission dans un réseau

entre tiers par un intermédiaire ou une utilisation licite d’une œuvre autre qu’un logiciel ou

une base de données, à condition qu’elle n’ait pas, en elle-même, une signification

économique indépendante. ».

Les fournisseurs d’hébergement auront donc le droit de se passer de l’autorisation des

producteurs pour la copie provisoire de phonogramme, comme le Streaming, car ils ne font

que transiter par leurs réseaux. Cette nouvelle disposition tout à fait spécifique comporte des

conditions strictes destinées à ne permettre en aucune manière une dérive vers d’autres

exploitations. Cette exception d’ordre technique viendra s’ajouter au dispositif d’exceptions

au droit exclusif des producteurs.

Page 43: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

43

2. Vers une exception pour courte citation en matière musicale

La diffusion d’extraits musicaux sur Internet est une pratique courante. Il est en effet très

fréquent que les éditeurs de site, comme les distributeurs de disques en ligne, proposent des

extraits de phonogrammes en écoute. Le site Fnac.com propose par exemple d’écouter des

courts extraits d’environ 40 secondes de chaque chanson d’un album proposé à la vente, ceci

afin d’informer l’internaute sur son achat éventuel. La diffusion de ces extraits ne peut

cependant se faire sans l’accord préalable du producteur qui, comme nous l’avons vu (voir

chapitre I), dispose du droit exclusif d'autoriser, ou d'interdire, toute reproduction, intégrale

ou sous forme d'extraits, de son phonogramme.

Pourtant, l’article 122-5 al 3 du CPI prévoit que sous réserve d’indiquer clairement le nom de

l’auteur et la source, il est possible d’utiliser, sans risque de poursuites, et sans accord

préalable de l’auteur, une œuvre littéraire, graphique ou musicale pour une représentation à

usage privé ou pour le recours à l’analyse ou à la courte citation de l’œuvre. L’exception de

citation, mentionné aux articles L 122-5 et L 211-3 du CPI, autorise « les courtes citations

justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information de

l’oeuvre à laquelle elles sont incorporées ». Sous réserve d'éléments suffisants

d'identification de la source.

Mais en matière musicale, le juge a longtemps estimé qu’il n’y avait pas de place pour

l’exception de citation au motif que « l'exception de l'article L122-5 du code de la Propriété

Intellectuelle, ayant trait aux courtes citations en matière littéraire, n'était pas transposable en

matière musicale à cause de l'impossible mention de la source et du nom de l'auteur,

condition sine qua non de la dispense de consentement de l'auteur »35. La SCPP affiche

d’ailleurs publiquement sur son site que 7 actions civiles sont en cours concernant des sites

proposant à l'écoute des extraits musicaux d'artistes de variété nationale et internationale et

plusieurs assignations sont en préparation concernant la diffusion d'extraits musicaux non

autorisée.

Le droit de courte citation a, en effet, été conçu initialement pour les œuvres littéraires mais

depuis l’avènement des technologies numériques, il est désormais possible d'indiquer la

35 Affaire Dutronc

Page 44: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

44

source tout en diffusant un extrait musical sur le réseau. La numérisation permet en effet de

traiter et d’exploiter chacune des composantes d’une œuvre.

Dans deux décisions rendues le 15 mai 2002 par le TGI de Paris, trois sites Internet

appartenant au groupe NRJ et qui diffusaient de la musique en ligne, ont été condamnés pour

n'avoir pas recueilli l'autorisation préalable des producteurs. Or, le juge a estimé que les

extraits litigieux étaient intégrés à une œuvre citante et a exclu la qualification de courte

citation au motif qu'un extrait musical de 30 secondes ne pouvait être considéré comme

« bref ».

Ce qui implique que si l'extrait avait été placé dans un véritable article et était suffisamment

bref, la courte citation en matière musicale aurait pu être acceptée. Cette décision représente

un pas important pour la musique en ligne et ouvre la voie vers une nouvelle exception au

droit exclusif des producteurs de phonogrammes.

Page 45: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

45

Conclusion

Les chiffres démesurés du piratage de phonogrammes font comprendre que la législation

relative au droit des producteurs de phonogrammes se heurte, dans la pratique, à de

nombreuses difficultés. Les composantes traditionnelles des droits voisins sont bouleversées,

ses limitations légales tendent à devenir tout autre chose que des exceptions, et même la

détermination du droit applicable ne va pas sans difficulté.

Les normes internationales et européennes ont d’ores et déjà contribué à apaiser le débat en

confirmant que l’Internet n’était pas un espace de non-droit. Reste au législateur français la

tâche ingrate d’imposer un modèle équilibré entre une application exclusive des droits des

producteurs ou une souplesse et un partage du contrôle des droits dans le cyberespace. Si

cette réflexion a abouti par des normes au niveau international, nous pouvons penser que le

processus sera plus lent en France et prendra plusieurs années. Pascal Nègre, directeur de

Universal Music France est optimiste : « Le jour proche, je l'espère, où les internautes ne

pourront plus accéder aux sites pirates, nous assisterons à l'explosion des sites de musique

payants sur Internet. Je parie, avec vous, qu'il y aura plus de sites de musique que de

disquaires dans les années 70 ».

Objectivement, le problème du piratage des phonogrammes vient plus du comportement

préjudiciable des utilisateurs que de l’inadaptation des règles de droit. Dès lors, les

producteurs commencent parallèlement à lancer des initiatives issues de l’autorégulation qui

permettraient d’améliorer l’accès à la musique dans des conditions spécifiques aux réseaux et

à l’économie numérique : campagnes de sensibilisation des utilisateurs, amélioration de

l'information du public, actions de prévention, etc... Comme nous l’avons vu, la RIAA

envoyait le mois dernier à des grandes entreprises américaines une brochure pour les mettre

en garde contre les dangers de l'utilisation de logiciels d'échange de fichiers au bureau.

Comme le souligne Olivier Gainon, fondateur d’une maison d’édition en ligne36,

« Finalement, tout cela est assez classique : pédagogie d'un côté, réglementation de l'autre. »

36 CyLibris, maison d'édition littéraire en ligne.

Page 46: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

46

Annexe

Avant-projet de loi relatif au droit d’auteur et aux droits voisins dans la Société de

l’information, CSPLA 5-12-02

Page 47: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

47

DOCUMENT DE TRAVAIL CSPLA 5-12-02

Avant-projet de loi relatif au droit d’auteur et aux droits voisins dans la Société de l’information

Sur le rapport du ministre de la culture et de la communication, Vu l’article 39 de la Constitution,

TITRE I

Dispositions portant transposition de la directive n°200/29 du 22 mai 2001 relative à certains aspects du droit d’auteur et droits voisins dans la société de l’information

CHAPITRE I- EXCEPTIONS AU DROIT D'AUTEUR ET AUX

DROITS VOISINS Le code de la propriété intellectuelle est modifié ainsi qu'il suit :

Article 1er Il est ajouté à l’article L.122-5 un 6° ainsi rédigé : “ 6° la reproduction provisoire, qui est transitoire ou accessoire, constituant une partie intégrante et essentielle d’un procédé technique dont l’unique finalité est de permettre une transmission dans un réseau entre tiers par un intermédiaire ou une utilisation licite d’une œuvre autre qu’un logiciel ou une base de données, à condition qu’elle n’ait pas, en elle-même, une signification économique indépendante. ”

Article 2 Il est ajouté à l’article L.211-3 un 5° ainsi rédigé: “ 5° la reproduction provisoire, qui est transitoire ou accessoire, constituant une partie intégrante et essentielle d’un procédé technique dont l’unique finalité est de permettre une transmission dans un réseau entre tiers par un intermédiaire ou une utilisation licite, à condition qu’elle n’ait pas, en elle-même, une signification économique indépendante. ”

Article 3

Il est ajouté à l’article L.122-5 un 7° ainsi rédigé : “ 7° La reproduction et la représentation, à des fins non commerciales et dans la mesure requise par le handicap, par des personnes morales ou organismes, dont la liste est arrêtée par le ministre chargé de la culture, pour la consultation strictement personnelle des personnes physiques atteintes d’une déficience du psychisme, de l'audition ou de la vision d’un taux égal ou supérieur à cinquante pour cent reconnu par la commission départementale de l’éducation spécialisée ou la commission technique d’orientation et de reclassement professionnelle. Les personnes morales ou organismes visés à l’alinéa précédent doivent

Page 48: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

48

apporter la preuve de leur activité professionnelle effective de conception et de réalisation de supports au bénéfice des personnes physiques visées à l’alinéa précédent au regard de leur objet social, de l’importance de leurs membres ou usagers, des moyens matériels et humains dont ils disposent et des services qu’ils rendent. ”

Article 4 Il est ajouté à l’article L.211-3 un 6° ainsi rédigé : “ 6°- la reproduction et la communication au public d’une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme dans les conditions figurant au 7° de l’article L.122-5.”

Article 5 Il est ajouté à l’article L.342-3 un 3° ainsi rédigé : “ 3° L’extraction et la réutilisation d’une base de données dans les conditions figurant au 7° de l’article L.122-5” Exceptions éventuelles en faveur de l’enseignement et de la recherche, en attente des propositions du ministère de l'Education nationale

CHAPITRE II- DUREE DES DROITS VOISINS

Article 7 Le dernier alinéa de l’article L.211-4 est remplacé par les alinéas suivants : “ Toutefois, si une fixation de l’interprétation fait l’objet d’une mise à disposition d’exemplaires matériels ou d’une communication au public pendant la période définie à l’alinéa précédent, les droits patrimoniaux de l’artiste interprète n’expirent que cinquante ans après le 1er janvier de l’année civile suivant le premier de ces faits. Cette disposition n'a pas pour effet de protéger des phonogrammes dont la durée de protection a expiré au 22 décembre 2002. Si un phonogramme a fait l’objet d’une mise à disposition d’exemplaires matériels pendant la période définie à l’alinéa premier, les droits du producteur de phonogramme n’expirent que 50 ans à compter du 1er janvier de l’année civile suivant ce fait. En son absence, ses droits expirent 50 ans à compter du 1er janvier suivant la première communication au public. ”

CHAPITE III- MESURES TECHNIQUES DE PROTECTION ET D'INFORMATION

Article 8

Il est ajouté au chapitre Ier du titre III du livre III un article ainsi rédigé : “ Article L.331-5. L’auteur d’une œuvre autre qu’un logiciel, l’artiste-interprète, le producteur de phonogrammes ou de vidéogrammes, l’entreprise de communication

Page 49: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

49

audiovisuelle peut mettre en place des mesures techniques de protection des droits qui leur sont reconnus par les livres I et II . Ces mesures s’imposent à tous. Elles doivent néanmoins permettre au bénéficiaire des exceptions prévues aux 2°, 7° et 8° de l’article L.122-5, aux 2°, 6° et 7° de l’article L.211-3, et à l’article L.331-4 d'en jouir lorsqu'il a un accès licite à l'œuvre. Le titulaire de droit n’est pas tenu d’ôter les mesures techniques en cas de mise à disposition des membres du public de manière à ce chacun puisse avoir accès à l'œuvre au moment et à l’endroit qu’il choisit, dès lors qu’il y a licitement accès. Le juge peut prescrire à toute personne mentionnée au premier alinéa toute mesure de nature à assurer le bénéfice des exceptions visées au deuxième alinéa."

Article 9

Il est ajouté au chapitre Ier du titre III du Livre III un article ainsi rédigé : " Article L.331-6. Les titulaires de droits, autres que les auteurs de logiciels, peuvent mettre en place des mesures techniques se présentant sous forme électronique permettant l’identification de l’œuvre, de l’interprétation, du phonogramme, du vidéogramme ou du programme, du titulaire de droit ainsi que la délivrance d’informations sur leurs conditions et modalités d’utilisations. Ces mesures s’imposent à tous. ”

Article 10 Il est inséré au premier alinéa de l’article L.332-1 après les mots: “illicite de cette œuvre ” les mots suivants: “ou de tout exemplaire, produit, appareil, dispositif, composant ou moyen portant atteinte aux dispositions de l’article L.331-5”.

Article 11 Il est inséré au 2° de l'article L.332-1 après les mots: “illicite de l’œuvre” les mots suivants: “ou des produits, appareils, dispositifs ou composants, fabriqués ou en cours de fabrication portant atteinte aux dispositions de l’article L.331-5.”

Article 12 Il est inséré au 3° de l’article L.332-1 après les mots: “des droits de l’auteur” les mots suivants: “ou des dispositions de l’article L.331-5”.

Article 13 Il est inséré à l’article L.335-1 après les mots: “ importés illicitement ” les mots suivants: “ ainsi que de tout exemplaire, produit, appareil, dispositif, composant ou moyen portant atteinte aux faits visés à l’article L.335-4 du présent code. ”

Article 14 Il est inséré après le deuxième alinéa de l’article L.335-3 un troisième alinéa ainsi rédigé: “ Est assimilé à un délit de contrefaçon,

Page 50: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

50

1° le fait pour une personne de porter atteinte, en connaissance de cause, à toute technologie, produit, appareil, dispositif, moyen, service ou composant qui, dans le cadre normal de son fonctionnement, est destiné à permettre le contrôle d’une utilisation de l’œuvre, 2° le fait de fabriquer, d’importer, d’offrir à la vente, au prêt ou à la location, de détenir en vue de la vente, du prêt ou de la location ou de mettre à disposition ou de fournir tout service, information ou moyen de vue de commettre, en tout ou en partie, l’atteinte visée à l’alinéa précédent, 3° le fait de commander, concevoir, d’organiser, de reproduire, de distribuer ou de diffuser une publicité, le fait de faire connaître, directement ou indirectement, toute technologie, produit, appareil, dispositif, composant, service ou moyen conçu ou ayant pour effet de faciliter ou permettre une atteinte visée à l’un des deux alinéas précédents . ”

Article 15 Il est inséré après le troisième alinéa de l’article L.335-4 un quatrième alinéa ainsi rédigé : “ Sont punis des mêmes peines les faits prévus à l’article L335-3 troisième alinéa, concernant les droits visés au titre I du livre II. ”

Article 16 Il est inséré après le troisième alinéa de l’article L.335-3 un quatrième alinéa ainsi rédigé: “ Est assimilé à un délit de contrefaçon le fait, sans l’autorisation de l’auteur, 1° pour une personne, en connaissance de cause, de supprimer ou de modifier tout élément d’information, se présentant sous forme électronique, relatif au régime des droits ; 2° de distribuer, importer, introduire ou porter à la connaissance du public, directement ou indirectement, une œuvre dont les informations visées à l’article L.331-5, alinéa 2 ont été supprimées ou modifiées ; 3° le fait d’organiser ou de diffuser une publicité sur les moyens de réaliser les faits prévus ci-dessus. ”

Article 17 Il est inséré après le quatrième alinéa de l’article L.335-4 un cinquième alinéa ainsi rédigé: “ Sont punis des peines prévues à l’alinéa 1 les actes visés à l’article L.335-4 alinéa 4 concernant les droits visés au titre I du livre II. ”

Article 18 Il est inséré à l’article L.343-1 un deuxième alinéa ainsi rédigé : “ Le producteur d’une base de données peut mettre en place des mesures techniques de protection des droits qui lui, sont reconnus sous réserve de l’article L.342-3. Il n’est pas tenu d’ôter la mesure technique en cas de mise à disposition de manière à ce que chacun puisse y avoir accès au moment et à l’endroit qu’il choisit. Il peut mettre en place les mesures techniques visées à l’article L.331-5 alinéa 2. Ces mesures s’imposent à tous. ”

Article 19

Page 51: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

51

Il est inséré à l’article L.343-1 un troisième alinéa ainsi rédigé : “ Sont punis des mêmes peines les faits visés à l’article L.343-1, deuxième alinéa. ”

TITRE II- DEPOT LEGAL La loi n° 92-546 du 20 juin 1992 modifiée relative au dépôt légal est modifiée ainsi qu'il suit:

Article 20 Le deuxième alinéa de l 'article 1er de la loi n° 92-546 du 20 juin 1992 modifiée relative au dépôt légal est modifié ainsi qu'il suit : "Les logiciels et les bases de données sont soumis à l'obligation de dépôt légal dés lors qu'ils sont mis à disposition d'un public par la diffusion d'un support matériel quelque soit la nature de ce support." Il est inséré après le deuxième alinéa de l'article Ier de la même loi un troisième alinéa 3 ainsi rédigé: "Sont également soumis à l'obligation de dépôt légal les signes, signaux, écrits, images, sons ou messages de toute nature faisant l'objet d'une communication publique en ligne."

Article 21 I.- A l'article 4 de la même loi , il est ajouté, après le 8°, un 9° ainsi rédigé: "9° Les personnes qui éditent ou produisent en vue de la communication publique en ligne au sens du troisième alinéa de l'article 2 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, des signes, signaux, écrits, images, sons ou messages de toute nature sont soumis à l'obligation de dépôt légal dans les conditions définies à l'article 4-1." II.- Il est inséré, après l'article 4, un article 4-1 ainsi rédigé: " Art.4-1.- Les organismes dépositaires mentionnés à l'article 5 procèdent, conformément aux objectifs définis à l'article 2, auprès des personnes mentionnées au 9° de l'article 4, à la collecte des signes, signaux, écrits, images, sons ou message de toute nature mis à la disposition du public ou de catégories de publics. " Ces organismes informent les personnes mentionnées au 9° de l'article 4 des procédures de collecte qu'ils mettent en œuvre pour permettre l'accomplissement des obligations relatives au dépôt légal. Ils peuvent procéder eux-mêmes à cette collecte selon des procédures automatiques ou en déterminer les modalités en accord avec ces personnes. " Les conditions de sélection et de consultation des informations collectées sont fixées par décret en Conseil d'Etat pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés." III.- Au deuxième alinéa de l'article 6, il est inséré, après la première phrase, la phrase suivante: " Il veille en particulier à la coordination et à la mise en œuvre des procédures de collecte prévues à l'article 4-1."

Page 52: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

52

IV.- L'article 7 est complété par un alinéa ainsi rédigé: " Les dispositions du présent article ne sont applicables aux personnes mentionnées au 9° de l'article 4 qu'à compter d'un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi."

Article 22 Il est ajouté à l'article 2 de la même loi un alinéa ainsi rédigé : " Les organismes dépositaires doivent se conformer à la législation sur la propriété intellectuelle sous réserve des dispositions spécifiques prévues à la présente loi."

Article 23 Après l’article 6 de la même loi, sont insérés les articles 6-1, 6-2 et 6-3 ainsi rédigés : « 6-1 L’auteur ne peut interdire aux organismes dépositaires, pour l’application de la présente loi, 1° la consultation de l’œuvre sur place par des chercheurs dûment accrédités par chaque organisme dépositaire sur des postes individuels de consultation dont l'usage leur est exclusivement réservé ; 2° la reproduction sur tout support et par tout procédé d'une œuvre, nécessaire à la collecte, à la conservation et à la consultation sur place dans les conditions prévues au 1°." "6-2 L’artiste-interprète, le producteur de phonogramme ou de vidéogramme, l’entreprise de communication audiovisuelle ne peuvent interdire la reproduction et la communication au public des documents mentionnées à l’article 1er de la loi susvisée dans les conditions prévues à l’alinéa précédent ." "6-3 Le producteur d’une base de données ne peut interdire l’extraction et la réutilisation par mise à disposition de la totalité ou d’une partie de la base dans les conditions prévues à l’article 6-1. »

Article 24

Le 3° de l'article 4 de la même loi est modifié ainsi qu'il suit: "Celles qui éditent, celles qui produisent et celles qui importent des logiciels ou des bases de données."

Article 25 L'article 8 de la même loi est ainsi rédigé: " L'article 49.IV de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée est rédigé ainsi qu'il suit: En application des articles Ier et 5 de la loi n°92-546 du 20 juin 1992 modifiée relative au dépôt légal et dans les conditions fixées par décrets en Conseil d'Etat, l'institut est responsable du dépôt légal des documents sonores et audiovisuels radiodiffusés ou télédiffusés et contribue au dépôt légal des signes, signaux, écrits, images, sons et ou messages de toute nature faisant l'objet d'une communication publique en ligne. L'institut

Page 53: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

53

gère ce dépôt légal conformément aux objectifs et dans les conditions définis à l'article 2 de la même loi."

Article 26 L'article 2-1 du code de l'industrie cinématographique est ainsi rédigé : " Article 2-1.- Le centre national de la cinématographie exerce les missions relatives au dépôt légal qui lui sont confiées par la loi n° 92-546 du 20 juin 1992 dans des conditions conformes aux dispositions de la loi susvisée."

TITRE III – LUTTE CONTRE LA CONTREFACON

Article 27 I – Le deuxième alinéa de l'article L.331-1 du code de la propriété intellectuelle est modifié ainsi qu'il suit : « Les organismes de défense professionnelle des auteurs régulièrement constitués et agréés par le ministère chargé de la culture et de la communication dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions du présent code portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif que ces organismes ont pour objet de défendre. » II – Il est inséré après le deuxième alinéa du même article un troisième alinéa ainsi rédigé : « L’agrément des organismes de défense professionnelle mentionnés au deuxième alinéa est accordé la première fois pour une durée de deux ans. Il est renouvelable tous les cinq ans. »

Article 28 I - A l’article L 331-2 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « Outre les procès-verbaux des officiers ou agents de police judiciaire, la preuve de la matérialité de toute infraction aux dispositions des » sont remplacés par les mots : « La preuve de toute violation des droits prévus aux ». II - Il est inséré après le premier alinéa de l'article L 331-2 du même code les quatre alinéas suivants : « Les agents ne peuvent procéder à leurs constatations qu’à la demande des sociétés et organismes mentionnés au premier alinéa. Ces agents sont tenus au secret professionnel. Ils ne peuvent percevoir des personnes chez lesquelles ces constatations sont effectuées aucune somme, à quelque titre que ce soit, pour leur compte ou celui de l’une des personnes mentionnées au premier alinéa. « Toute personne agréée doit satisfaire à des conditions de moralité et de qualification professionnelle compatibles à l’exercice de ses activités. L’agrément lui est refusé ou retiré si ces conditions ne sont pas justifiées ou cessent de l’être. « Les sociétés et organismes mentionnés au premier alinéa communiquent au ministre chargé de la culture et de la communication la liste des agents agréés ayant été assermentés ainsi que tout fait de nature à modifier leurs conditions d’agrément. « Le ministre chargé de la culture et de la communication établit et met à jour la liste des agents agréés. »

Page 54: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

54

Article 29

Il est inséré, après l’article 331-2 du code de la propriété intellectuelle, un article L.331-2-1 ainsi rédigé : « Art. L.331-2-1 Les agents agréés mentionnés à l’article L.331-2 ne peuvent accéder aux locaux à usage professionnel, à l’exclusion des domiciles et de la partie des locaux servant de domicile, entre huit heures et vingt heures ou pendant les représentations ou exécutions publiques d’œuvres, qu’avec l’accord et en présence du responsable des locaux visités. Ils peuvent obtenir la communication de factures et autres documents professionnels nécessaires à leurs constatations et en obtenir copie par tous moyens et sur tous supports, sans préjudice des dispositions relatives au secret professionnel des tiers qui leur est opposable. « Avec le consentement et en présence de la personne concernée, ces agents peuvent accéder aux systèmes de traitement informatisé par simple consultation visuelle à l’exclusion de tout autre procédé et dans la mesure strictement nécessaire à leurs investigations. « Ils doivent retranscrire leurs constatations dans un procès-verbal établi au plus tard dans un délai de 15 jours après la visite. Un original du procès-verbal est notifié à la personne responsable des locaux.»

Article 30 Il est inséré après l'article L.331-2-1 du code de la propriété intellectuelle, un article L.331-2-2 ainsi rédigé: " En cas de refus d'accès aux locaux, les agents peuvent demander au président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les locaux à visiter, ou du juge délégué par lui, à y être autorisés selon la procédure prévue aux articles 493 à 498 du nouveau code de procédure civile. « Le juge doit vérifier que la demande d’autorisation qui lui est soumise est fondée. La demande précise les locaux auxquels l'accès est refusé. Elle comporte les éléments de nature à justifier cet accès. « Le président du tribunal de grande instance, ou le juge délégué par lui, statue immédiatement par ordonnance. Celle-ci mentionne les locaux dont l'accès est autorisé, à l'exclusion des domiciles et de la partie des locaux servant de domicile, le nom et la qualité de la personne qui a sollicité et obtenu l’autorisation de faire procéder à la visite ainsi que le nom et la qualité de l'agent habilité à y procéder. « La visite s'effectue sous le contrôle du président du tribunal de grande instance ou du juge qui l'a autorisée. Celui-ci peut se rendre sur place pendant l'intervention et, à tout moment, décider la suspension ou l'arrêt de la visite. « L'ordonnance est notifiée sur place à la personne responsable des locaux, au moment de la visite contre récépissé. L'ordonnance susceptible d'appel est exécutoire à titre provisoire. « La visite, qui ne peut commencer avant huit heures ou après vingt heures, sauf dans le cas de représentations ou d’exécutions publiques d’œuvres, est effectuée en présence du responsable des locaux. « Le déroulement des opérations de visite peut faire l’objet d’un recours auprès du juge qui les a autorisées, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l’ordonnance, par la personne responsable des locaux dans lesquels la visite s’est déroulée. Le juge se prononce sur ce recours par voie d’ordonnance qui n’est susceptible que d’un pourvoi en cassation non suspensif.

Page 55: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

55

« Un original du procès-verbal est transmis au juge qui a ordonné la visite. »

TITRE IV- DES SOCIETES DE PERCEPTION ET DE REPARTITION DES DROITS

Article 31

Après l’article L.321-3 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article L.321-3-1 ainsi rédigé : « Aucune société de perception et de répartition des droits ne peut fonctionner avant que ses statuts adoptés par l’Assemblée constitutive n’aient été approuvés par le ministre chargé de la culture. A défaut de réponse ou de demande d’information complémentaire, dans un délai de deux mois à compter de la réception du dossier, les statuts sont réputés approuvés. La juridiction administrative est compétente pour connaître des contestations relatives à ces décisions. »

Article 32 Les sociétés de perception et de répartition existant à la date de publication de la présente loi présenteront dans un délai d’un an à compter de la publication du décret d’application leurs statuts en vue de leur approbation.

Article 33 I - Au premier alinéa de l’article L.321-12 du code de la propriété intellectuelle les mots: « deux mois » sont remplacés par les mots: « trois mois ». II - Il est inséré entre le premier et le deuxième alinéa de cet article un alinéa ainsi rédigé : « Ne peuvent être soumis au vote de l’assemblée générale que les projets de modifications statutaires ayant été approuvés par le ministre de la culture dans les conditions prévues à l’article L. 321-3 » III - Il est inséré après le troisième alinéa du même article un quatrième alinéa ainsi rédigé : « Les normes comptables communes aux sociétés de perception et de répartition ainsi que les règles de présentation des comptes sont déterminées par décret en Conseil d’Etat »

TITRE V – DROIT D'AUTEUR DES AGENTS PUBLICS

Article 34 Le troisième alinéa de l’article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle est modifié ainsi qu'il suit : « Hors les exceptions prévues par le présent code, ni l’existence ou la conclusion d’un contrat de louage d’ouvrage ou de service par l’auteur d’une œuvre de l’esprit, ni sa qualité d’agent public n’emporte dérogation à la jouissance du droit reconnu par l’alinéa 1er du présent article ».

Page 56: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

56

Article 35 Il est inséré, après l’article L.121-7 du code de la propriété intellectuelle, un article L.121-7-1 ainsi rédigé : "Le droit de divulgation d'une œuvre créée par un agent public dans l'exercice de ses fonctions s'exerce dans le respect des règles édictées par l'autorité investie du pouvoir hiérarchique. L’agent ne peut 1°) s’opposer à la modification de l’œuvre par l’autorité investie du pouvoir hiérarchique dès lors qu’elle est justifiée par la mission de service public 2°) exercer son droit de repentir et de retrait, sauf accord de l'autorité investie du pouvoir hiérarchique".

Article 36 L’article L.131-3 du Code de la propriété intellectuelle est complété par les alinéas suivants : « Le droit d’exploitation d’une œuvre créée par un agent public dans l’exercice de ses fonctions ou d’après les instructions de l’Etat, de la collectivité territoriale ou de l’établissement public à caractère administratif qui l’emploie, est par le seul effet de la création, cédé à l’Etat, la collectivité territoriale ou l’établissement public à caractère administratif, dans la mesure strictement nécessaire à l’accomplissement de leur mission de service public et à la condition que cette œuvre ne fasse pas l’objet d’une exploitation en dehors du service public ou d’une exploitation commerciale. L’Etat, les collectivités territoriales ou les établissements publics à caractère administratif disposent pour exploiter ou faire exploiter en dehors du service public ou commercialement l’œuvre ainsi créée, d’un droit de préférence dont les conditions d’exercice sont fixées par décret en Conseil d’Etat. »

Article 37 (Pour mémoire, sous réserve de consultation du SEOM) Les dispositions de la présente loi sont applicables à Mayotte, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises et en Nouvelle-Calédonie. »

Page 57: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

57

Bibliographie

Ouvrage général :

Isabelle Wekstein, Droits voisins du droit d’auteur et numérique, Litec, 2002

Articles de doctrine :

Guillaume Gomis, Réflexions sur l’impact des mesures techniques de protection des

œuvres, 16 décembre 2002

Pierre Mounier, Droits de la copie numérique : le déséquilibre s'accentue, 5

septembre 2002

Marie-Avril Roux, Analyse juridique et pratique du téléchargement de musique, 12

décembre 2001

Vincent Grynbaum, Le droit de reproduction à l’heure de la société de l’information,

13 décembre 2001

David Forest, La copie numérique et le droit : des solutions encore incertaines, 5

avril 2000

M. Gitton, Nouvelles technologies : un "vide juridique" entre millénarisme et

carences contractuelles, février 1997

Mémoires :

Denis Dhekaier et Thomas Lapergue, Les droits des producteurs, 22 janvier 2001

Pascal Gerinier, La copie privée, 5 novembre 2001

Rapports :

Philippe CHANTEPIE, La lutte contre la contrefaçon des droits de Propriété

Littéraire et Artistique dans l’environnement numérique, 1er octobre 2002

Le Groupe de Liaison pour la Société de l'Information, L’exception pour copie privée

et sa rémunération, 2002

Delphine Pianta et Thomas Courcelle, Les enjeux de la musique sur Internet

Articles de presse :

Caroline Lebrun, Quand la musique s'inspire du logiciel libre, 15 mai 2003

Estelle Dumout, Copie privée: les associations de consommateurs ne désarment pas,

14 mai 2003

Page 58: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

58

Rédaction Legalbiznext, Transposition de la directive droit d'auteur : Un projet de

loi qui autorise le traçage des œuvres, 13 mai 2003

Estelle Dumout, Droits d'auteur, internet et copie privée: un projet de loi plus

restrictif que prévu, 12 mai 2003

Jean-Marc Manach, La loi va placer la copie privée sous le contrôle des éditeurs, 12

mai 2003

Sylvain Pontier, La loi qui va mettre un terme au peer to peer, 12 mai 2003

Estelle Dumout, Le Sénat prépare la chasse aux adeptes des réseaux "peer-to-peer",

25 avril 2003

Rédaction du Forum des Droits sur Internet, Le responsable d’un site de

téléchargement de MP3 condamné, 28 mars 2003

Rédaction, JDNet, L'industrie du disque inocule un mouchard MP3, 11 février 2003

Christophe Guillemin, Copie privée : MPO-Online commente son partenariat avec

Microsoft, 2003

Estelle Dumout, Copie privée: les sociétés d'auteurs sont réservées sur les arguments

des producteurs, 2003

Declan McCullagh, Musique: les sociétés internet s'opposent à dénoncer les

"présumés pirates", 2003

Christophe Lagane, L'industrie musicale marque les MP3 d'un identifiant unique, 11

février 2003

Estelle Dumout, Musique: les producteurs français exigent un filtrage de l'internet,

10 janvier 2003

Rédaction du Forum des Droits sur Internet, Peer-to-Peer : les internautes passent à

la caisse, 27 novembre 2002

Christophe Lagane, Les téléchargements illégaux de musique progressent, 16 avril

2002

Frédéric Vladyslav, L'Europe adopte la directive droits d'auteur Internet, 10 avril

2001

Eric Mugneret, Condamné pour délit d’hypertexte, 2 novembre 2000

Sites Internet spécialisés :

ADAMI : www.adami.org

SCPP : www.scpp.fr

SNEP : www.disqueenfrance.com

Page 59: La remise en cause du monopole des producteurs de ...leclainchentic.free.fr/pdf/monopolprod.pdf · UNIVERSITE ROBERT SCHUMAN STASBOURG DESS droit du multimédia et des systèmes d’information

59

CSPLA : www.culture.fr

OMPI : www.wipo.org/index.html.fr

SESAM : www.sesam.org

IDDN : www.iddn.org

Union des fabricants : www.unifab.com

ZDNET MUSIC : www.zdnet.fr/music