La relève apprivoisée

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Manning, ce Le Pen de l'ouest. Toutes proportions gardees. Le verbe du Canadien, piu tot anodin, n'a bien sur rien de la verve du demagogue francais. C'est au contra ire par sa modes tie ostentatoire et bien protest ante que Preston Manning charme ses auditeurs. Devant le micro il hesite, sciemment. Sa voix tremble d'une sincerite qu'il pratique sans doute devant son miroir. Masque ou pas, une telle reserve n'en rend pas moins l'attaque fort difficile, Des amis a moi, autrement raisonneurs, m'assurent que "Preston" est "sympa'', comme s'ils le connaissaient personnellement. Ce doux enfant de choeur table sur la xenophobic qui couve au sein de la population canadienne. Et il compte bien l'attiser. La vision politique qu'il propose a ses concitoyens dechaine l'enthousiasme de certains d'entre eux. Aaah! voir surgir un Canada uni, unilingue, u-n-i-f-o-r-m-et Un Canada sans le Quebec, bien entendu. Ce qui est moins evident toutefois c'est que ce soi-disant New Canada, ampute de son coeur, sera amoindri sinon mourant. Manning a tout de merne du montrer patte blanche. 11a chas e les extremistes de son temple. On n'a pourtant qu'a lire son programme pour en constater la teneur raciste. Le rejet du multiculturalisme de bon aloi s'accompagne d'une critique severe de la politique d'immigration actuelle, qui deja, n'est pas sans faute. Par un tour de passe-passe typique, Manning tout en accusant le Quebec d'avoir fausse le jeu de l'immigration avec des cri teres racistes (entendons les lois linguistiques), rassure par ailleurs sa clientele a lui: seuls seront admis au royaume de l'avenir ceux que le sacro-saint marche aura trie. ]'avoue, tout comme de nombreux Albertains, regretter vivementles sommes que le gouvemement federal depense en folklore pour acheter des votes. Les immigrants doivent s'assimiler a la culture hate, a Edmonton comme a Montreal. C'est un truisme de la sorte justement, que Preston Manning sait superbement manier. , Mais cette manipulation politique ne prendra pas. "Rouge" selon la presse de Calgary, Edmonton est au moins legerem ent rose. Les sondages l'affirment : les n eo- dernocrates formeront les prochains gouvernements de la Saskatchewan et de l'Alberta d'ici la fin de l'annee. C'est que le Canadien d'aspiration britannique qui constitue le gros des troupes du Reform Party est minorttaire depuis longtemps dans ces deux provinces. En outre, nombreux sont les parents anglophones de routes origines qui ont immerge leurs enfants dans des bains de francais, avec un succes mitige peut-etre, mais qui n'en demeure pas moins l'expression on ne peut plus convaincante de leurs reves et de leurs aspirations. Quant a la population autochtone, dont les revendications sont souvent legitimes, ce n'est pas la voix angelique de Manning qu'elle ecoute, Tout cela pour dire qu'il est sans doute possible qu'une majorite de Canadensis occidentalis ne se reconnaissent pas dans l'image que Preston Manning lui tend. . Une telle'eventualite risque de decevoir ceux au Quebec -qui, eux, s'y reconnaissent. Ceux qui bloquent la reforme. t@' NOTES 1 ."bull pen": l'enclos des boeufs, ou des joueurs de baseball La releve . .", a.p'pr i VOlsee JEAN-PAUL MURRAY «] e ne puis louer une vertu fuyarde et cloftree, sans entrafnement ni souffle, qui jamais ne sort affronter l'adversaire, mais s' esquive loin de cette course OU l' enjeu, Cl travers la poussiete et la sueur, est la Couronne de l'immortalite. Nous n' apportons certes pas l'innocence dans le monde, mais bien plutot l' impurete: c' est l' epreuve qui nous purifie, or qui dit epreuve dit opposition» 1 Ne a Schefferville, eleve a Trois-Rivieres, Jean-Paul Murray, qui est iige cle 31 ans, reside a Hull. Titulaire d'une maftrise en etucles canadiennes et joumalisrne cle l'Universire Carleton, il est recherchiste parlementaire a la Chambre cles Communes. T ou~e s~ciete desireuse d'evoluer et de se renouveler dolt necessairement se remettre en question; elle s'expose sinon a l'inertie, a la sclerose, et sombre finalement dans une decrepitude lamentable. Le role principal, dans ce processus, revient a la jeunesse, dont les prises de position vigoureuses et enthousiastes, sur des questions qui touchent l'ensemble de l'humanite, doivent influer sur les decisions politiques, et notamment revendiquer et instaurer un niveau superieur de justice sociale. Le choc des generations est salutaire, car il interdit a la societe toute velleite de complaisance, et lui impose un perpetuel questionnement de ses fondements, afin que ceux- ci reverent un caractere autre que celui de simple prejuge, . Que la jeunesse s'avere soit outrancierernent obnubilee par la tentation materialiste, soit convaincue qu'esperer exercer un impact sur le processus politique est une utopie, un leurre, et la societe perd, de facon redhibitoire, un important agent de renouveau. Dans les annees soixante, les jeunes ruaient dans les brancards et revaient de changer le monde: "A bas l'injustice, la tyr an n ie , l'hypocrisie, haro sur l'oppression et la manipulation", scandait-on a grands cris. Or, force est de constater que cette generation s'est essoufflee, et que les contestataires d'autrefois, fatigues sans doute, se sont derobes, de guerre lasse, face a des objectifs qu'ils s'etaient eux-rnemes fixes, renoncant de la sorte prernaturement a accomplir la tache, certes enorme, qui les attendait. Plus grave: cette tonitruante cohue de revolut ionnaires est devenue l'establishment d'aujourd'hui, et ne semble plus se CITE lIBRE:juillet-ooOt 1991 19

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Un article de la revue Cité libre portant sur la jeunesse et la constestation. Juillet-août 1991...

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Manning, ce Le Pen de l'ouest. Toutes proportions gardees.Le verbe du Canadien, piu tot anodin, n'a bien sur rien de laverve du demagogue francais. C'est au contra ire par samodes tie ostentatoire et bien protest ante que PrestonManning charme ses auditeurs. Devant le micro il hesite,sciemment. Sa voix tremble d'une sincerite qu'il pratiquesans doute devant son miroir. Masque ou pas, une tellereserve n'en rend pas moins l'attaque fort difficile, Des amis amoi, autrement raisonneurs, m'assurent que "Preston" est"sympa'', comme s'ils le connaissaient personnellement.

Ce doux enfant de choeur table sur la xenophobic quicouve au sein de la population canadienne. Et il compte bienl'attiser. La vision politique qu'il propose a ses concitoyensdechaine l'enthousiasme de certains d'entre eux. Aaah! voirsurgir un Canada uni, unilingue, u-n-i-f-o-r-m-et Un Canadasans le Quebec, bien entendu. Ce qui est moins evidenttoutefois c'est que ce soi-disant New Canada, ampute de soncoeur, sera amoindri sinon mourant.

Manning a tout de merne du montrer patte blanche. 11achas e les extremistes de son temple. On n'a pourtant qu'alire son programme pour en constater la teneur raciste. Lerejet du multiculturalisme de bon aloi s'accompagne d'unecritique severe de la politique d'immigration actuelle, quideja, n'est pas sans faute. Par un tour de passe-passe typique,Manning tout en accusant le Quebec d'avoir fausse le jeu del'immigration avec des cri teres racistes (entendons les loislinguistiques), rassure par ailleurs sa clientele a lui: seulsseront admis au royaume de l'avenir ceux que le sacro-saintmarche aura trie. •

]'avoue, tout comme de nombreux Albertains,regretter vivementles sommes que le gouvemement federaldepense en folklore pour acheter des votes. Les immigrantsdoivent s'assimiler a la culture hate, a Edmonton comme aMontreal. C'est un truisme de la sorte justement, que PrestonManning sait superbement manier.

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Mais cette manipulation politiquene prendra pas."Rouge" selon la presse de Calgary, Edmonton est au moinslegerem ent rose. Les sondages l'affirment : les n eo-dernocrates formeront les prochains gouvernements de laSaskatchewan et de l'Alberta d'ici la fin de l'annee. C'estque le Canadien d'aspiration britannique qui constitue legros des troupes du Reform Party est minorttaire depuislongtemps dans ces deux provinces. En outre, nombreuxsont les parents anglophones de routes origines qui ontimmerge leurs enfants dans des bains de francais, avec unsucces mitige peut-etre, mais qui n'en demeure pas moinsl'expression on ne peut plus convaincante de leurs reves et deleurs aspirations. Quant a la population autochtone, dont lesrevendications sont souvent legitimes, ce n'est pas la voixangelique de Manning qu'elle ecoute,

Tout cela pour dire qu'il est sans doute possible qu'unemajorite de Canadensis occidentalis ne se reconnaissent pasdans l'image que Preston Manning lui tend.

. Une telle'eventualite risque de decevoir ceux au Quebec-qui, eux, s'y reconnaissent. Ceux qui bloquent la reforme. t@'

NOTES1 ."bull pen": l'enclos des boeufs, ou des joueurs de baseball

La releve. .",a.p'pr iVOlseeJEAN-PAUL MURRAY

«]e ne puis louer une vertu fuyarde et cloftree,sans entrafnement ni souffle, qui jamais ne sort

affronter l'adversaire, mais s' esquive loin decette course OU l'enjeu, Cl travers la poussiete et

la sueur, est la Couronne de l'immortalite.Nous n'apportons certes pas l'innocence dans

le monde, mais bien plutot l' impurete: c'estl'epreuve qui nous purifie, or qui dit epreuve

dit opposition» 1

Ne a Schefferville, eleve a Trois-Rivieres, Jean-Paul Murray, qui est iige cle 31 ans, reside aHull. Titulaire d'une maftrise en etucles canadiennes et joumalisrne cle l'Universire Carleton, ilest recherchiste parlementaire a la Chambre cles Communes.

T ou~e s~ciete desireuse d'evoluer et de se renouvelerdolt necessairement se remettre en question; elles'expose sinon a l'inertie, a la sclerose, et sombre

finalement dans une decrepitude lamentable.Le role principal, dans ce processus, revient a la jeunesse,

dont les prises de position vigoureuses et enthousiastes, surdes questions qui touchent l'ensemble de l'humanite, doiventinfluer sur les decisions politiques, et notammentrevendiquer et instaurer un niveau superieur de justicesociale.

Le choc des generations est salutaire, car il interdit a lasociete toute velleite de complaisance, et lui impose unperpetuel questionnement de ses fondements, afin que ceux-ci reverent un caractere autre que celui de simple prejuge,

. Que la jeunesse s'avere soit outrancierernent obnubileepar la tentation materialiste, soit convaincue qu'espererexercer un impact sur le processus politique est une utopie,un leurre, et la societe perd, de facon redhibitoire, unimportant agent de renouveau.

Dans les annees soixante, les jeunes ruaient dans lesbrancards et revaient de changer le monde: "A bas l'injustice,la tyr an n ie , l'hypocrisie, haro sur l'oppression et lamanipulation", scandait-on a grands cris. Or, force est deconstater que cette generation s'est essoufflee, et que lescontestataires d'autrefois, fatigues sans doute, se sont derobes,de guerre lasse, face a des objectifs qu'ils s'etaient eux-rnemesfixes, renoncant de la sorte prernaturement a accomplir latache, certes enorme, qui les attendait. Plus grave: cettetonitruante cohue de revolut ionnaires est devenuel'establishment d'aujourd'hui, et ne semble plus se

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preoccuper que de sa propre reussite, La nouvelle generation,quant a elle, demeure camouflee, sans hardiesse mais avec uncertain talent de carneleon, dans le decor, et ne se manifesteguere. La releve est done vacante: nul n'est desorrnais enmesure d'assumer ce role d'aiguillon susceptible de remettreen question les valeurs que nous transmet la societe, et desoumettre a la rigueur de l'analyse et du doute methodiqueles manoeuvres opportunistes des politiciens. Bref,l'activisme semble dernode, et la soif de justice tombe endesuetude.

Un brin d'esprit contestataire arnenerait les jeunes, parexemple, a s'elever contre le comportement suspect desgouvemements, au lieu de s'evertuer a de vains partenariats.Ils pourraient ainsi denoncer l'hypocrisie du gouvemementfederal, qui affirme le besoin imperieux de dormer a la

Plus grave: cette tonitruante. cohue de revolutionnaires est

devenue /'establishmentd'aulourcl'hui, et ne semble plus sepreoccuper que de sa proprereussite.jeunesse canadienne une education solide, tout en effectuantdes compressions budgetaires de $486 millions dans lespaiements de transfert aux provinces des tines a l'educationpost-secondaire, ce qui represente une diminution de 21,6%par rapport a l'an dernier'. Ils denonceraienr aussi, parailleurs, l'obscurantisme et le cynisme d'un gouvernementqui, sous pretexte d'incontoumable equilibre budgetaire,sabre sans merci dans les programmes sociaux. Et qui reduitde 15,9% les impots sur le revenu des societes au cours desexercices 1990-1991 et 1991-1992, alors que I'impot sur lesparticuliers croit pour sa part de 22,5%3. Voila bien unexemple flagrant d'injustice sociale.

Les brasseurs de cages, helas, se font plutor rares, et leconservatisme aigu triomphe sur tous-les fronts, comme lemontrait un recent sondage Decima. Cette etude revelait eneffet que les jeunes sont "loin d'etre les creatures en colere,rebelles et tetues qui causerent le grabuge il y a unegeneration, et que la plupart d'entre eux sont etonnammentconservateurs et traditionnels, voire rneme dociles'".

Cette attitude regrettablement conformiste de lageneration des 20-30 ans est en outre decrite, de facon aussisardonique que perspicace, dans un livre int.i tule"Acceptation globale'". En n'hesitant pas a les qualifier delaquais regardant leur televiseur "avec la placidite bonassedes vaches qui admirent le passage des trains", les auteursdressent un portrait peu flatteur des jeunes d'aujourd'hui.Selon eux, seule la volonte de combattre ceux qui sedeclaraient "contre" pousse les jeunes a devenir desproselytes du "pour", et a adopter une attitude resolumentpragmatique qui ignore le discours du "refus globaliste". Lacapacite de survivre, voire de mieux-vivre, voila ce que cesjeunes privilegient avant tout. Lorsque la jeunesse faitpreuve d'un tel opportunisme, d'un tel cynisme, il devient aprop os de se demander jusqu'a quel point la societe va a vau-

l'eau.Exemple eloquent de ce cynisme devastateur: le Forum

jeunesse de la Commission Belanger-Carnpeau, qui fut le.theatre de debordements scandaleux, et proches de l'incestepolitique. Passe encore que, sur la cinquantained'intervenants, on ne compte qu'un carte de federalistes.Mais que les quarante et quelques autres, piu tot qu'a unveritable debar sur une question aussi capitale que celle del'avenir du Quebec, choisissent de se livrer a une orgie deslogans ineptes proriant "la seule option valable:l'independance", voila qui laisse sceptique. Des exemples? Ilssont legion. Participant a titre d'observateur a ce forum, j'eusa subir un chapelet d'absurdites aussi ahurissantes que "...entant que jeunes quebecois, nous ne pouvons etre citoyens apart entiere puisqu'il ne nous est me me pas permis de devenirdes champions sport ifs canadiens, les autres etant toujoursfavorisesf l)", "...le federalisme canadien a dix provinces n'estplus une voie d'avenir pour le Quebec ... "7 ou "de par sanature, le federalisme tend a detruire l'autonomie des Etatsmembres, ce qui ne repond pas aux attentes du Quebec'".Penible litanie. Sacrifier ainsi le Canada sur l'autel del'arrivisme, de la complaisance, et de la sainte nation, nere ve le ni propension a lor ig inal ite, ni capaci te decontestation, ni esprit critique.

Alors qu'autrefois l'activiste [erry Rubin nous conseillaitde ne jamais fa ire confiance aux plus de trente ans,aujourd'hui la devise de la jeunesse semble etre de profiterautant que possible du systeme en place, et de se batir unereputation et une fortune avant meme d'atteindre cette barredes trente ans. Quitte, si besoin est, a renoncer a ses ideaux,

Comment comprendre autrement le refus des jeunes defaire valoir bruyamment leurs revendications et d'exiger desgouvernements une ecoute attentive? Les chiffres lemontrent, les jeunes ont aujourd'hui un po idsdernographique plus important que dans les annees soixante:la part des 20-29 ans dans la population totale atteint 16,1 %en 19909

, contre seulement 13,1% en 196510. Pourquoi cenombre ne deviendrait-il pas une arme destinee a combattreet denoncer avec vigueur toute forme d'injustice? Pourquoipreferer se complaire dans un neo-conservatismereactionnaire?

[adis volontiers aux premieres loges, et d'une non-complaisance irreprochable, le milieu etudiant lui-rnernetend aujourd'hui a devenir un salmigondis d'esprits timores.Alors que l'Association nationale des etudiants et etudiantesdu Quebec tergiverse et s'entre-dechire sur l'approche quedevrait privilegier le militantisme etudiant, la Federationetudiante universitaire du Quebec s'apprete a se jeter dans lagueule du loup. Selon ses dirigeants, la FEUQ veut etablirdes partenariats avec les entreprises et le gouvemement afinde resoudre le problerne du sous-financement des institutionsd'education post-secondaire. Cette federation declarait ainsiau terme de son congres du mois d'avril qu'elle ne remettraitpas en question l'augmentation des frais de scolarite, qu'elleproposait une forme d'impot post-universitaire, et qu'ellefavoriserait une nouvelle ligne de conduite, a savoir lanegociation, en vue dr "se dernarquer des revendicationspolitiques et de la confrontattonf l)"." 'Est ainsi eloquemmenrdemon tree la naivete de ces jeunes, tout comme leurincornprehension des rapports de force qui regissent lasociete. Et le mepris avec lequel ils deplorent aujourd'hui etre

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traites n'est sans doute rien en regard de l'eclipse totale del'avant-scene politique que leur promet un tel raisonnement.L'obeissance servile aux piliers de l'ordre etabli ne sera jamaisgarante de justice sociale.

Libre a chacun, certes, de penser que cette flagomerie apour objectif, somme toute respectable, de contribuer asolutionner les problemes du sous-financement chronique desuniversites; cependant, il est crucial que les jeunes sachent aqui, et a quoi, ils se trouveront confrontes. Ce qui ne semblepas etre le cas.

L'examen attentif des depenses consacrees par le secteurprive a l'enseignement et a la formation suffirait en outre adissuader la FEUQ de s'acharner a imaginer d'aleatoirespartenariats avec l'entreprise privee. Ces depenses, selon leConseil economique du Canada, atteignent seulement 0.25%du produit interieur brut, ce qui confere au Canada, tristeprivilege, le demier rang des pays concernes par cette etude,c'est-a-dire la France, l'Allemagne de I'Ouest, le Japon, leRovaume-Uni, et les Etats-Unis".

C'est seulement en denoncant et en contestant les"verites" que prechent a longueur de discours les leadersd'opinions, et non en rampant et en belant, en veritablesmoutons de Panurge, que la jeunesse pourra faire evoluerpositivement notre societe, et aider a preserver les valeurssupremes que sont la justice, la tolerance et la dernocratie,

Ainsi, comme disait Mill: "Merrie dans le cas OUl'opinion recue contiendrait la verite et toute la verite, on laprofessera comme une sorte de prejuge, sans comprendre ousentir ses principes rationnels, si elle ne peut etre contesteevigoureusement ..."13 ••

Le glas a sonne; l'heure est venue pour la jeunesse d'yrepondre, d'assumer la releve et de faire entendre sa voix. tff?

NOTES1. Milton, John, Areopagitica, Aubier, Editions Montaigne, Paris, 1956, pp.

149-151.2. Ministere des Approvisionnements et Services Canada, Budget des depenses

1991-1992: Partie I, Plan des depenses du gouvernement, Ottawa, 1991, p.50

3. Ministere des Finances Canada, Le budget, Ottawa, 1991, p. 100.4. «Today's Teens Are Tame, Poll Says.» Globe and Mail, Toronto, le 5 avril

1991, p. AB.5. Benoit, Francois, et Chauveau, Philippe, Acceptation globale, Boreal,

Montreal, 1986, p. 29.6. Commission jeunesse de la Societe de recherche en orientation hurnaine, Le

devenir du Quebec: une preoccupation de la jeunesse, Memoire presence a laCommission sur l'avenir politique et constitutionnel du Quebec, octobre1990, p. 15.

7. Commission [eunesse, Parti liberal du Quebec, Le nouveau deft national desQuebecois, Memoire depose a la Commission parlementaire sur l'avenirpolitique et constitutionnel du Quebec, octobre 1990, p. 15.

8. Mernoire redige par l'executif du jeune Parti quebecois du College Laflechede Trois-Rivieres. Depose dans le cadre de la Commission sur l'avenirpolitique et constitutionnel du Quebec, decembre, 1990, p. 5.

9. Gouvernement du Canada, Le rapport sur la sante 1990, Vol. 2, no. 4,Statistiques Canada, Ministere des Approvisionnements et services, p. 304.

10. Gouvernement du Canada, Population 1921-1971, Cat. 91-512, StatistiquesCanada, Ministere des Approvisionnements et services, p. 54.

11. «Les etudiants s'unissent pour chercher des partenariats, La Presse, 7 avril,1991, pp. AI-A2.

12. Gouvernement du Canada, Tertiarisation et polarisation de l'emploi, Conseileconornique du Canada, Ministere des approvisionnements et services, p.146.

13. Mill, John Stuart, La liberte, Guillaumin et Cie, Paris, 1864, p. 186.

Le retourd'Antigone

MrCHEL Du r uv

Fils d'ambassadeur, son pere PierreDupuy fut commissairegeneral d'Expo 67, ambassadeur luimeme, ilfut ambassadeur du Canada aux Nations-Unieset en France notamment ainsiquePresidentde l'Agence canadiennededeveloppement interrtational,MichelDupuy est en politiqueactive depuis 1986. 11est conseiller principal du PLC sur lapolitique etrangere et membre de la

commissionpolitique du PLC(Q) .

Tout allait si bien aux Nations-Unies au lendemain dela guerre froide. Saddam Hussein avait a peine fini dedeployer ses troupes pour rayer le Koweit de la carte

du monde que le Conseil de securite, libre de tout veto,condamnait cette agression, ordonnait le retrait des troupesirakiennes et organisait un embargo d'une etonnanteefficacite. Aurait-on enfin tire une lecon des echecs de laSociete des Nations et de ceux des Nations-Unies paralyseespendant quarante ans par l'affrontement des super-puissances? .

Etions-nous a l'aube d'un ordre meilleur du monde?Moins d'un an plus tard, la guerre a de nouveau laisse ses

ravages: des dizaines de milliers de morts - la plupart'd'innocentes victimes - des villes en cendres, des desastresecologiques qui feront histoire, un peuple deracine mourantde faim et de froid dans ses montagnes. Voila un Proche-Orient ou le vent du desert est charge de mefiance, de haineet d'amertume, ou l'espoir se nourrit d'un mirage de paix.Une fois dissipee l'euphorie des victoires, la guerre a bati unnouveau monument a la folie de destruction. Au nom de quiet de quoi?

Au nom d'un peuple arabe qui souffre des injusticescoloniales du passe, qui cherche l'unite et la distributionequitable des richesses. Au nom de la liberte au Koweit et dudroit des Palestiniens. Du moins, Saddam Hussein lepretendait-il.

Mais selonla coalition mobilisee contre l'lrak, au nomde l'integrite des Etats et de l'inviolabilite des frontieres,l'occupation militaire d'un territoire e tranger , lebombardement d'un pays hors du conflit ne sont-ils pasintolerables? Au nom de la securite en approvisionnement depetrole. Au nom des droits de la personne cruellement violesau Koweit par la soldatesque de Saddam Hussein.

Enfin au nom de la responsabilite des Nations-Uniespour la securite de ses membres et pour la paix. Du moins,voulait-on nous en persuader.

Autant de causes justes et de motifs louables quipourtant ont mene a la guerre. Aussi est-on dispose achercher des coupables.

Pourtant il vaut mieuxs ne pas entreprendre de procesd'intention: d'abord contre Saddam Hussein tant il estdifficile de separer le vrai du faux. S'il y a proces - et SaddamHussein sera peut-etre juge de facon expeditive par les siens -

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