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Michèle Prince 2012 - Abrégé de Thèse 1 La réécriture accompagnée : une démarche didactique complexe pour améliorer la compétence scripturale Résumé : Résolument socioconstructiviste, la démarche didactique de « réécriture accompagnée », fondée sur un cadre conceptuel multiréférentiel précis, a été élaborée selon une pratique réflexive. La recherche exploratoire effectuée à son propos décrit et modélise la démarche, puis présente son adaptation à un cours crédité d’écriture de textes en formation d’enseignants de français langue première. L’analyse qualitative détaillée de l’évolution de deux étudiantes au long de la session de cours met en évidence le parcours différencié de chacune. Elle révèle aussi une forte progression de la compétence scripturale de ces sujets, la modification de leurs procédures pour écrire un texte, notamment en matière d’anticipation et de retour réflexif sur l’écrit, considérés comme une manifestation d’expertise, stabilisés un an plus tard. Parallèlement se font jour des modifications de leur représentation de l’écrit. L’analyse statistique ultérieure de quatre corpus de copies et l’analyse de contenus de tous les questionnaires renseignés par les étudiants confirment ces résultats pour l’ensemble du groupe, la progression étant parfois plus forte chez les étudiants initialement en difficulté. Par ailleurs, l’étude révèle l’impact de trois éléments- clefs dans la qualité des apprentissages : le temps, l’expérience et le sens. Mots-clefs : didactique écriture de textes enseignement supérieur - formation d’enseignants compétence scripturale. Le travail de recherche exposé ci-après répond à des préoccupations de praticienne et s’origine dans un double constat. Les difficultés d’apprentissage de l’écrit, plus précisément d’organisation textuelle, soulignées dès les années 70 par des études internationales, apparaissent tôt dans la scolarité et perdurent jusqu’à l’Université (OCDE 1 , 2006). Une récente enquête longitudinale montre qu’au Canada, en neuf ans, on n’enregistre aucune variation significative des résultats (OCDE & Statistique-Canada, 2005). De même, les différentes enquêtes sur les pratiques des enseignants menées tant au Québec que dans les autres pays développés (Blaser, 2007; OCDE, 2009) montrent qu’on intervient très rarement sur l’organisation textuelle. L’école axe prioritairement l’enseignement du français sur l’orthographe et la grammaire mais les élèves y écrivent très peu de textes. 1 Organisation de coopération et de développement économiques.

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La réécriture accompagnée : une démarche didactique complexe

pour améliorer la compétence scripturale

Résumé : Résolument socioconstructiviste, la démarche didactique de « réécriture accompagnée », fondée sur un cadre conceptuel multiréférentiel précis, a été élaborée selon une pratique réflexive. La recherche exploratoire effectuée à son propos décrit et modélise la démarche, puis présente son adaptation à un cours crédité d’écriture de textes en formation d’enseignants de français langue première. L’analyse qualitative détaillée de l’évolution de deux étudiantes au long de la session de cours met en évidence le parcours différencié de chacune. Elle révèle aussi une forte progression de la compétence scripturale de ces sujets, la modification de leurs procédures pour écrire un texte, notamment en matière d’anticipation et de retour réflexif sur l’écrit, considérés comme une manifestation d’expertise, stabilisés un an plus tard. Parallèlement se font jour des modifications de leur représentation de l’écrit. L’analyse statistique ultérieure de quatre corpus de copies et l’analyse de contenus de tous les questionnaires renseignés par les étudiants confirment ces résultats pour l’ensemble du groupe, la progression étant parfois plus forte chez les étudiants initialement en difficulté. Par ailleurs, l’étude révèle l’impact de trois éléments-clefs dans la qualité des apprentissages : le temps, l’expérience et le sens.

Mots-clefs : didactique – écriture de textes – enseignement supérieur - formation d’enseignants – compétence scripturale.

Le travail de recherche exposé ci-après répond à des préoccupations de praticienne et

s’origine dans un double constat.

Les difficultés d’apprentissage de l’écrit, plus précisément d’organisation textuelle,

soulignées dès les années 70 par des études internationales, apparaissent tôt dans la

scolarité et perdurent jusqu’à l’Université (OCDE1, 2006). Une récente enquête longitudinale

montre qu’au Canada, en neuf ans, on n’enregistre aucune variation significative des

résultats (OCDE & Statistique-Canada, 2005). De même, les différentes enquêtes sur les

pratiques des enseignants menées tant au Québec que dans les autres pays développés

(Blaser, 2007; OCDE, 2009) montrent qu’on intervient très rarement sur l’organisation

textuelle. L’école axe prioritairement l’enseignement du français sur l’orthographe et la

grammaire mais les élèves y écrivent très peu de textes.

1 Organisation de coopération et de développement économiques.

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Or, tant sur le plan individuel que collectif, la maitrise de l’écrit est devenue essentielle

dans la vie sociale. Ainsi les études comparatives internationales (OCDE, 2010) font

apparaitre2 les couts sociaux et économiques importants liés à un déficit d’éducation,

notamment en matière de textes suivis. D’autre part les recherches en sociologie montrent

que la maitrise de la langue, particulièrement écrite, est capitale pour la réussite scolaire,

puis sociale (Bourdieu, 2003; Lahire, 1993).

Ceci confère à l’enseignant de langue première une responsabilité majeure. Car la

maitrise de l’écrit ne repose pas sur l’orthographe et la syntaxe. L’écrit est avant tout une

organisation discursive décontextualisée qui, malgré la linéarité figurale qu’elle suppose,

implique une hiérarchisation, des explications, un raisonnement causal, etc. Un texte en

effet doit progresser régulièrement, présenter une grande cohérence et rendre compte le

plus explicitement possible des intentions illocutoires de son auteur (Olson, 1998). Il est issu

d’un processus de production lui-même complexe. Enfin, l’incursion dans les théories de

l’apprentissage nous introduit aussi dans un monde incroyablement complexe, combinant

des éléments physiologiques, psychologiques (cognitifs et affectifs) et sociaux.

Changer sa manière de penser devient alors indispensable, car c’est sur l’ensemble des

paramètres de l’acte d’écrire qu’il faut agir. Comme le montre Morin (1992/2003), le

domaine de l’action est très aléatoire, très incertain et implique une conscience aigüe des

aléas, des dérives, des bifurcations... L’action suppose la complexité.

Ainsi quand on veut, comme enseignant ou formateur, agir sur tous les éléments

complexes qui interagissent dans l’acte d’écrire : l’apprenant, son histoire, sa culture et son

expérience, et la nécessité de favoriser son action concrète ou mentale; le texte, lui-même

système ouvert dès qu’intervient le projet d’un scripteur (ou d’un lecteur); et la production

de texte qui est elle-même une histoire singulière faisant intervenir un grand nombre de

facteurs combinables de multiples façons, on ne peut plus construire ses interventions

didactiques à priori. Il faut, semble-t-il, abandonner l’idée rigide de programme au profit

d’une démarche souple et modulable, qui soit elle-même un « système ouvert ».

La démarche de réécriture accompagnée a été testée dans un groupe d’étudiants de

deuxième année d’Université. Les études qui portent sur leurs représentations de l’écrit

montrent que bien des points rapprochent ces jeunes adultes des adolescents des dernières

années du secondaire : des difficultés se sont cristallisées, ils conservent souvent un double 2 Ce texte adopte l’orthographe rectifiée.

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système de représentation de l’écrit et des connaissances non ou mal construites ne sont

pas mobilisées dans l’écriture de textes (Boudreau, 1992; Lefrançois, 2005). Toutefois ils ont

atteint le stade de la pensée formelle, ce qui évite au chercheur de discriminer dans ses

résultats ce qui provient du passage à cette forme de pensée de ce qui est attribuable à

l’action didactique. D’autre part, s’il n’élimine pas les aspects affectifs liés à la relation

enseignant/apprenant, le travail avec un public d’adultes, même jeunes, en diminue

fortement les effets.

Le choix de futurs enseignants s’est imposé de lui-même. Il s’agit en effet à la fois de les

aider à combler leurs propres lacunes et de les amener à réfléchir aux démarches

d’enseignement de l’écriture de texte, enseignement qui sera au cœur de leur activité

professionnelle. En outre, réfléchissant sur l’enseignement du français langue première, ces

jeunes futurs collègues sont plus aptes à en analyser les différents aspects et à rétroagir en

verbalisant les effets qu’ils pourraient constater sur leur propre apprentissage.

Ainsi, la question qui fonde à la fois l’intervention et la recherche est la suivante :

Est-il possible de concevoir une démarche didactique complexe, modélisable

théoriquement, et adaptable à un cours crédité de l’Université québécoise, qui permettrait

l’amélioration des textes écrits par tous les étudiants-futurs enseignants, modifierait

sensiblement leurs manières d’écrire, et altèrerait leurs conceptions de l’écriture?

L’exposé du travail réalisé sera structuré en trois points :

1- La démarche conceptualisée et les éléments essentiels du cadre théorique qui la

fonde et fonde aussi la recherche;

2- Les objectifs et la méthodologie de la recherche;

3- L’essentiel des résultats obtenus.

Enfin, une rapide conclusion discutera ces résultats et brossera des perspectives de

recherche ultérieure.

1- La démarche de réécriture accompagnée

Une revue de la littérature permet de constater l’émiettement des pratiques innovantes.

Or il n’existe pas de solution simple à un problème complexe.

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Les principes généraux

Une démarche complexe d’écriture de textes, globale, souple, adaptable, intégrant les

sous-disciplines du français et plaçant l’écriture de textes au cœur des apprentissages, a été

élaborée selon un processus de pratique réflexive en appui sur de nombreuses lectures,

formations et recherches-actions. Elle repose sur trois fondements théoriques complexes et

interactifs :

Une théorie du texte, objet langagier complexe, conçu comme système ouvert : à

la fois objet linguistique (Adam, 1999), ensemble organisé et finalisé, congruent

aux théories du langage (Bronckart, 1977; Vygotski, 1934/1985); objet

communicationnel investi par un scripteur et des lecteurs (Oriol-Boyer, 1989;

Olson, 1998); objet social (Bernstein, 1975; Bourdieu, 2003; Lahire 1993); et, dans

la classe de français, objet d’apprentissage (Dabène et Reuter, 1998).

Une théorie de l’apprentissage par l’action, facteur de développement personnel

(Piaget, 1975), médiatisé par le langage (Vygotski, 1934/1985) et l’expert

(Galpérine, 1980), construit dans l’interaction sociale (Perret-Clermont & Nicolet,

1988), dans des situations coopératives rigoureusement élaborées (Doise et

Mugny, 1997).

Une théorie de l’évaluation, action qualitative et coopérative (Ardoino et Berger,

1989) menant à l’appropriation par les novices des critères de l’expert au moyen

de la prise de conscience (Piaget, 1974), l’explicitation et la verbalisation (Barbier,

1985; Vermersch, 1996).

La démarche de réécriture accompagnée s’actualise dans une séquence finalisée par un

modèle didactique de genre (De Pietro & Schneuwly, 2003), porteur de sens (Rochex, 1992)

et de motivation (Berbaum, 1992), et support des objectifs didactiques (De Ketele, 1984).

Cette séquence s’articule autour d’un outil référentiel et décontextualisant, centré sur la

réalisation du texte, permettant l’anticipation et la réflexivité : la fiche critériée.

L’intervention didactique postule que l’apprenant est l’acteur principal de son

apprentissage, ce qui induit une posture épistémologique particulière d’enseignant, non plus

dispensateur de savoir mais accompagnateur d’apprentissage, et confère à la démarche un

double objectif : au plan de l’apprentissage, améliorer la compétence scripturale; et au plan

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du développement, contribuer à l’évolution des capacités cognitives de l’apprenant,

notamment par la conceptualisation.

Quatre étapes et des ateliers

La séquence se développe d’une production initiale à sa réécriture. Malgré sa souplesse

et son adaptabilité, elle comporte quatre étapes incontournables : la mise en situation, la

production initiale, le processus d’évaluation et la réécriture.

La mise en situation comporte deux temps distincts:

La lecture et l’analyse critique de textes variés du genre mis à l’étude, qui

permettent la contextualisation (Brossard, 1994) du modèle didactique du genre;

L’élaboration, à partir des différentes remarques effectuées précédemment,

d’une fiche critériée.

La construction collective de cet outil référentiel, inspiré de l’évaluation formatrice,

permet la décontextualisation des éléments repérés dans la lecture critique et l’anticipation

de l’écrit. La fiche critériée distingue deux sortes de critères: des critères de réalisation et des

critères de réussite. Les « critères de réalisation », justifiés théoriquement par Bonniol et

Genthon (1989), énumèrent les « procédures invariantes », c’est-à-dire les éléments

incontournables du processus d’écriture pour un genre donné, permettant d’écrire un texte

conforme à la fois aux contraintes génériques et aux exigences de la grammaire textuelle.

Les « critères de réussite » sont plutôt des « signes ou indices de réussite ». On peut les

trouver dans un texte du genre considéré, mais ils ne sont pas tous obligatoires. Le scripteur

conserve ainsi le choix entre des procédés d’écriture « possibles » qui répondent tous aux

exigences du genre mais se combinent ou s’excluent. Ces indices sont également nécessaires

quand il s’agit d’évaluer le produit. En effet, les critères de réalisation sont difficiles à manier

pour apprécier le produit fini. Les indices de réussite permettent de s’appuyer sur un

contenu concret un peu plus proche de la mesure. Mais la nécessité d’opérer des choix

parmi les indices évite d’obtenir des productions canoniques uniformisées.

Dans ce contexte, la fiche critériée est et reste un outil pour les apprenants. Elle ne

contient donc pas de mots savants si ceux-ci ne sont pas maitrisés et signifiants

immédiatement pour eux : elle est le reflet de leur niveau de conceptualisation.

L’étape de « production initiale » comporte également deux temps :

Une recontextualisation par l’analyse collective de la consigne d’écriture

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L’écriture individuelle d’une première version du texte demandé, en appui sur la

fiche critériée.

Le dispositif d’évaluation combine trois situations, de façon variable en fonction du

contexte, dont le support est toujours la fiche critériée :

Une coévaluation en dyades, construites par l’enseignante de façon déséquilibrée

pour favoriser le conflit cognitif et la médiation (Doise & Mugny, 1997; Piaget,

1975; Vygotski (1934/1985), où chacun lit et commente le texte de l’autre.

L’analyse collective, inspirée des ateliers d’écriture, de quelques productions

représentatives; le groupe-classe agit alors comme une communauté de lecteurs

(Brossard, 1994; Olson, 1998) et l’animation de cette séance nécessite de

nombreuses précautions méthodologiques (Lafont-Terranova, 2009);

Une séance instituée d’autoévaluation critère par critère, qui provoque une prise

de distance réflexive par rapport à son écrit; ce travail s’appuie sur la théorie de

la prise de conscience (Piaget, 1974) et celle du langage comme outil de

conceptualisation (Astolfi, 1986; Vygotski, 1934/1985). Cette autoévaluation est

écrite par chaque scripteur sur une fiche spécialement conçue à cet effet

L’étape de réécriture enfin débute par la discussion, dans les dyades de coévaluation,

des commentaires de l’enseignante portés par écrit sur la fiche d’autoévaluation de chaque

scripteur. Puis elle se poursuit par la réécriture individuelle de chaque texte, nourrie par

toutes les remarques et les notes prises au cours des différentes phases de l’évaluation.

Cette dernière étape se fonde sur une conception de la réécriture comme renforcement des

capacités métalinguistiques, notamment par le retour réflexif sur son texte (Gombert, 1990).

Intercalés entre les grandes étapes, permettant notamment de prendre le temps de la

distance réflexive, les ateliers sont la partie variable et la plus adaptable de la séquence. Ils

sont déterminés, soit à priori en fonction des apports de connaissances indispensables à

l’écriture du texte projeté, soit à partir des productions initiales pour consolider ou

reprendre des connaissances mal construites ou ignorées. Mais ces apports sont réalisés en

situation, dans un projet de production particulier, et de ce fait chargés de sens (Rochex,

1992). Les modes de groupements y sont modulés en fonction des objectifs didactiques

poursuivis et font l’objet d’une régulation épistémique et coopérative (Doise &Mugny, 1007;

Dweck, 1986).

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L’adaptation au contexte de l’intervention

L’adaptation de la démarche de réécriture accompagnée au contexte de l’intervention

didactique de la recherche s’est heurtée à une difficulté importante : le ratio

temps/contenu. La demande institutionnelle portait sur la maitrise de six genres de textes,

argumentatifs ou scientifiques, dont deux particulièrement difficiles, pour un temps imparti

de 45 heures de cours. Des choix se sont donc avérés nécessaires. Seuls trois genres ont fait

l’objet d’une séquence complète : les quatre3 séquences majeures sur lesquelles portent le

recueil et l’analyse de données. Les trois autres séquences, incomplètes, avaient un rôle

contributoire. Ce déséquilibre a entrainé d’autres conséquences : il n’a pas été possible de

prendre un temps suffisant pour la prise de distance critique, ni de constituer des dyades

déséquilibrées. L’ordre des situations d’évaluation a été lié à la place restante dans l’horaire

des cours et non au besoin des étudiants. Enfin le nombre des ateliers a été drastiquement

réduit. Des dispositifs de compensation ont donc parfois été nécessaires, notamment des

entretiens d’aide et de nombreux échanges par courriel.

2- Les objectifs et la méthodologie

Outre la description et la modélisation de la démarche didactique, précédemment

exposées, l’objectif général de cette recherche est de tester la démarche de réécriture

accompagnée en situation réelle afin d’en étudier l’efficacité pour augmenter l’expertise des

apprenants dans l’écriture de textes.

Une recherche-action

Plusieurs dispositifs de recherche ont été envisagés mais il a semblé plus pertinent, dans

une perspective exploratoire, d’élaborer un dispositif de recherche-action, recherche qui

poursuit le double objectif de transformer la réalité et de produire des connaissances sur

cette transformation. Par ailleurs, un dispositif de recherche-action est un modèle congruent

avec la démarche didactique élaborée : constructiviste, coopératif et interactionniste, il est

centré sur l’action et intègre sa complexité. La recherche-action permet en outre d’élaborer

des connaissances praxéologiques, savoirs pour et sur l’action. Enfin, le problème maintes

fois soulevé de la transférabilité des savoirs produits, lié à la dépendance de ces dispositifs à

3 La synthèse d’articles scientifiques a fait l’objet de deux séquences.

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des contextes particuliers, implique d’élaborer des dispositifs didactiques souples et

adaptables, qualités visées par la démarche de réécriture accompagnée.

Toutefois, la recherche-action est souvent décriée parce qu’elle conduit à une plus

grande implication du chercheur. Elle se distingue en effet très fortement de la recherche

appliquée, qui utilise des savoirs construits préalablement à la rencontre avec les acteurs.

C’est une forme d’ingénierie sociale où l’implication parait indispensable pour appréhender

la complexité. C’est d’autant plus vrai lorsque, comme dans le cas présent, la chercheure et

l’intervenante sont une seule et même personne. Cela nécessite donc des précautions

méthodologiques.

Elles ont été de trois sortes :

La mise à distance de l’action : avant l’intervention, en séparant soigneusement

l’élaboration du projet de recherche de celle de l’intervention; pendant

l’intervention, en préparant soigneusement les moments de recueil de données

et en les séparant à la fois temporellement et symboliquement de l’action; après

l’intervention, en séparant par plus d’une année le recueil des données effectué

pendant l’intervention de l’analyse de ces données.

L’analyse de l’implication : réalisée par écrit à partir de notes prises

régulièrement, en suivant le modèle proposé par Barbier (1977).

L’intervention de doubles juges : pour retrouver, dans l’analyse de données plus

délicates, la coanimation souvent conseillée dans ce type de recherche.

Les objectifs opérationnels et la démarche méthodologique

Les sujets de cette recherche sont un groupe de 31 étudiants du BES-Français, en

deuxième année d’université à l’Université Laval de Québec, participant au cours DID-23054

« Rédaction de textes courants » à la session d’hiver 2008.

Pour atteindre les objectifs fixés, la démarche méthodologique générale a été la

suivante :

Étude de deux cas spécifiques permettant de repérer et de comprendre

les évolutions grâce à l’analyse de tous leurs écrits individuels réalisés au

cours de la session et des réponses à quatre questionnaires.

Élargissement de l’étude à l’ensemble du groupe pour confirmer les

résultats.

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Trois objectifs opérationnels découlent de l’objectif général rappelé ci-dessus

Décrire et analyser l’évolution de deux étudiantes pour repérer dans quels

domaines se manifeste une amélioration des productions écrites et d’éventuelles

modifications de procédures ou de représentations.

Deux séries de données ont été utilisées à cet effet :

Le journal des séances de cours, constitué des fiches de présentation des quinze

séances de trois heures, mises à jour et annotées après chaque séance. Il

permettra une analyse précise et détaillée du contexte de l’intervention,

notamment des quatre séquences majeures, tant dans leur durée respective que

dans leur contenu.

Tous les écrits réalisés par deux étudiantes au cours de la session : première

version et réécriture des quatre textes produits pendant les séquences majeures

ainsi que les fiches d’autoévaluation correspondantes et les traces écrites

additionnelles du travail réflexif de l’étudiante; tous les écrits complémentaires

qu’elles ont réalisé individuellement pendant les séquences mineures; la totalité

de leurs réponses aux questionnaires. L’ensemble de ces données permettra une

étude de cas précise et détaillée et le repérage des éléments significatifs de leur

évolution.

Vérifier que l’amélioration des productions écrites concerne tous les étudiants

Parmi toutes les productions écrites recueillies pendant les quatre séquences majeures,

un choix a été effectué afin de tester les résultats dans deux situations caractéristiques :

d’une première version à sa réécriture, du début à la fin de la session. Dans le premier cas, le

choix s’est porté sur un genre difficile et globalement moins bien réussi : l’article de

vulgarisation ; dans le deuxième cas, sur la première version du premier et du dernier écrit,

malgré la différence colossale entre les deux genres considérés : une lettre d’opinion, genre

argumentatif simple produisant un texte court, déjà vu au secondaire, et une synthèse

d’articles scientifiques, genre académique inconnu, éminemment complexe et produisant un

texte trois fois plus long en moyenne. En effet, la recherche est centrée, non sur le genre,

mais sur la démarche et il fallait savoir ce que l’étudiant était capable de réaliser de façon

autonome en fin de session en abordant un genre nouveau.

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Pour pouvoir effectuer une analyse statistique de ces écrits, il a été nécessaire de

construire une grille d’analyse. Cette grille n’est pas un instrument destiné à la correction

des copies. C’est un instrument visant à apprécier l’évolution d’un même sujet d’un écrit à

un autre. On change ici de paradigme d’évaluation. Il ne s’agit plus d’une évaluation centrée

sur la gestion de l’action (comme l’est l’outil support de la démarche : la fiche critériée) mais

centrée sur la mesure approchée des caractéristiques du produit réalisé. Quatre critères ont

ainsi été sélectionnés. Les trois premiers sont des critères qualitatifs : les caractéristiques

génériques, subdivisées en « organisation spécifique » et « procédés langagiers

spécifiques », et la progression textuelle, critères composés et qui ont nécessité des indices

précis, une définition précise des notions et une explicitation pratique de la cotation. Le

quatrième est quantitatif : un macrocritère recouvrant tous les aspects normés de la langue,

considérés comme équivalents, représentant une « mesure » approximative et soumise à

des effets de seuil. Une cotation chiffrée simple a facilité le traitement informatique des

variables catégoriques.

Bien que la grille de cotation soit très explicitée, des risques de biais inconscients existent

dans l’appréciation des critères, du fait notamment de la double posture de praticien-

chercheur impliqué. Pour renforcer l’objectivité, une collègue compétente a donc été

sollicitée pour effectuer une analyse indépendante de ces données. On ne pourra jamais

atteindre un degré de précision tel qu’on évite complètement les différences d’appréciation.

Il existe en effet, ici comme dans toute science, des éléments complexes qui échappent à

l’analyse descriptive. Il convient en effet de conserver en mémoire que les différents

éléments se combinent, qu’ils donnent lieu à des choix linguistiques plus ou moins heureux,

plus ou moins compatibles et que des différences seront immanquablement liées à la

personnalité et aux représentations du lecteur. Il a donc fallu analyser au préalable la

variabilité inter-juges. Ainsi, une vérification statistique de la corrélation4 et de la

concordance5 a été effectuée, qui a conclu à la fiabilité des cotations. Puis l’ensemble des

résultats a fait l’objet d’un traitement statistique6.

4 Test de Spearman.

5 Graphique de Bland-Altman.

6 ANOVA sur les rangs à deux voies pour mesures répétées avec deux facteurs de répétition.

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Enregistrer l’avis des étudiants sur la démarche, voir s’ils sont conscients d’une

amélioration des produits et à quoi ils l’attribuent

Pour ce troisième objectif, quatre questionnaires ont été utilisés. Les trois premiers sont

issus des questionnaires de rétroaction, renseignés trois fois pendant la session : le

questionnaire préalable (QP) avant le début du cours, l’évaluation intermédiaire (ÉI) au

milieu de la session et l’évaluation finale (ÉF) à la fin. Ils ont été modifiés et complétés pour

les besoin de la recherche. De ce fait, ils contenaient des questions non spécifiques qui n’ont

pas été retenues dans l’analyse. Les questions spécifiques visaient à repérer les domaines

dans lesquels les étudiants déclarent des progrès, les aspects de la démarche auxquels ils

attribuent ces progrès, les modifications de procédures déclarées et de tenter de repérer, à

partir de déclarations spontanées, des modifications de leurs représentations de l’écriture.

Ainsi, deux éléments de la démarche ont été plus finement analysée : la réécriture et le

dispositif d’évaluation, notamment le moment institué de prise de distance que constitue

l’autoévaluation. Puis, afin de vérifier la pérennité des modifications déclarées au bout d’un

an, un questionnaire spécifique a été construit et adressé aux étudiants un an après la fin de

l’intervention. Dans ce dernier questionnaire, il s’agissait de repérer les manières de

travailler associées spontanément à la démarche de réécriture accompagnée, tout en notant

les procédures d’anticipation ou de retour sur le texte que les étudiants déclarent toujours

pratiquer.

Ces quatre questionnaires comportent une alternance de questions fermées et de

questions ouvertes, construite selon la méthodologie recommandée par De Ketele et Rogiers

(1996). Après les avoir testés, un protocole rigoureux de passation a été élaboré et mis en

œuvre. Les questions fermées ont fait l’objet d’un traitement statistique7 et les questions

ouvertes d’une analyse de contenus. Dans ce dernier cas, pour respecter l’approche de la

méthode logico-sémantique généralement adoptée par les chercheurs, opérant un

classement logique des contenus après explicitation, si nécessaire, de leur valeur

sémantique, un double-juge familier de cette technique mais totalement extérieur à la

discipline et à la recherche, a été sollicité. On sait en effet (Mucchielli, 1984) que l’analyse de

contenu nécessite une grande lucidité concernant les biais affectifs, liés à l’émotivité ou à la

sensibilité, et idéologiques, parmi lesquels on compte l’influence de la théorie à priori et

même de l’hypothèse de travail. Ce deuxième juge a effectué une analyse totalement

7 Test de Cochran-Mantel-Haenszel.

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indépendante des questions ouvertes, et notamment le choix des unités de sens et

l’élaboration des catégories. Une réunion de concertation a permis de traduire les résultats

dans une analyse unique. Nous avons travaillé par unités de sens pour effectuer l’analyse

concernant le groupe et ses évolutions. Ces évolutions ont ensuite été traduites en

histogrammes en utilisant des pourcentages.

3- Les principaux résultats

Nous examinerons successivement les résultats concernant les productions des

étudiants, leur avis sur la démarche, l’évolution de leurs procédures pour écrire et celle de

leurs représentations.

Les productions

Les deux étudiantes ayant accepté de se prêter à une étude de cas détaillée sont deux

sujets très différents mais qui n’éprouvent globalement pas de difficulté. Toutefois, elles

illustrent toutes deux la surcharge de travail des étudiants de premier cycle, tant dans leur

emploi du temps académique que par le poids de leur emploi salarié. Ce qui frappe dès

l’abord c’est l’inappétence pour l’écriture déclarée par l’une d’elle (813), et visible dans son

comportement de scriptrice : premiers écrits rédigés à la hâte, lassitude évidente dans les

textes longs, tous caractérisés par une fin vite expédiée. C’est pourtant une lectrice motivée,

active et plutôt brillante. Son profil est proche de la majorité de ceux qu’on retrouve dans les

études sur les enseignants, notamment de français : ils lisent beaucoup mais écrivent peu ou

pas du tout.

Les progrès réalisés

Leurs parcours sont également très différenciés : celui du sujet 805, quasi linéaire,

montre des progrès réguliers ; celui du 813 est en dents de scie, marqué de fréquentes

régressions et de réussites parfois surprenantes. Toutefois, toutes deux progressent

fortement. Ainsi leurs progrès sont spectaculaires de la première version d’un texte à sa

réécriture, attestant ainsi de l’efficacité du dispositif complexe d’évaluation, comme en

témoigne par exemple le schéma no 1 ci-dessous présentant la recomposition de la lettre

d’opinion écrite par le sujet 813.

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Schéma 1 :813- LO1-LO2

Cette progression dans la qualité des productions est confirmée dans l’ensemble du

groupe. Tous les étudiants ont progressé dans la maitrise des différents critères retenus pour

l’analyse, que ce soit de la première version à la réécriture de l’article de vulgarisation, écrit

pourtant peu réussi globalement, ou de la première version du premier écrit individuel à la

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première version du dernier, eu égard à l’extrême difficulté de la synthèse et des textes à

synthétiser.

Entre la version 1 et la réécriture, tous les étudiants progressent malgré des différences

sensibles entre les méthodes de cotation des deux juges. On remarque parfois un tassement

vers la médiane au temps 2, ce qui semblerait indiquer que les étudiants rencontrant

initialement le plus de difficultés progressent davantage que les autres, comme en témoigne

la figure 1 ci-dessous concernant le premier critère.

Figure 1: Évolution des productions dans un même genre - Critère 1 : organisation spécifique au genre

Entre la première version de la lettre d’opinion et la première version de la synthèse, les

résultats stagnent pour les trois premiers critères. Il semblerait donc que la difficulté de ce

deuxième genre non connu des étudiants n’ait pas permis un progrès dans la prise en

compte des spécificités génériques et qu’elle ait pesé sur la progression textuelle, qui est

étroitement liée au genre dans l’acte d’écrire et s’actualise toujours de façon particulière en

fonction du genre d’écrit réalisé. Toutefois, on n’observe pas non plus de régression et on

remarque, pour les critères 1 et 3 (et partiellement – codeuse 1 – pour le critère 2), que les

étudiants les plus en difficulté au temps 1 progressent davantage, comme en témoigne la

figure 2 ci-dessous.

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Figure 2: Évolution des productions de la première version du premier écrit à celle du dernier - Critère 1 : organisation spécifique à chaque genre

La maitrise de la langue

L’étude qualitative de l’évolution de deux étudiantes faisait apparaitre un résultat non

recherché : l’amélioration de la maitrise de la langue. En effet, ce n’était pas un objectif du

cours, ce critère était volontairement ignoré dans les commentaires évaluateurs de

l’enseignante, pour éviter la fixation habituelle sur les microstructures. En revanche, dans

l’analyse effectuée pour les besoin de la recherche, l’exigence dans ce domaine était au

contraire très forte. Or, malgré la longueur et la difficulté croissantes des écrits réalisés,

malgré les difficultés rencontrées par les deux sujets dans l’utilisation du lexique, on a pu

constater une diminution sensible du nombre d’erreurs par page, même si cette évolution

n’est pas toujours linéaire.

Ce résultat inattendu est également confirmé pour tous les étudiants. Ainsi, l’examen du

critère 4 pour la synthèse est intéressant. On note en effet un fort impact de la longueur du

texte dans le nombre total d’erreurs de langue relevées. Mais, dès qu’on utilise le ratio du

nombre d’erreurs par page, on retrouve l’évolution très positive relevée dans les copies des

deux sujets de l’étude de cas. Les résultats sont en outre très significatifs comme le montre

la figure 3 ci-dessous.

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Figure 3: Évolution des productions de la première version du premier écrit à celle du dernier - Critère 4b : respect des normes et règles de la langue (ratio par page de texte)

De plus, une rapide analyse qualitative des erreurs montre un poids relatif plus

important des erreurs liées au vocabulaire, qui pèsent également sur la restitution des

contenus, importante dans les contraintes génériques. Pour ce critère on observe aussi un

fort tassement vers la médiane au temps 2 (le 25e percentile est à un niveau supérieur au

75e du temps 1), ce qui permet d’inférer une plus forte progression des étudiants

initialement plus en difficulté.

La démarche semble donc être un outil de différenciation, permettant à tous de

progresser, mais aussi de rattrapage, puisque, sur certains critères, surtout ceux ayant fait

l’objet d’apprentissages antérieurs, les étudiants en difficulté progressent davantage.

La fragilité des acquis

L’analyse qualitative des deux parcours fait apparaitre des éléments que l’analyse

globale du groupe ne peut confirmer. Le premier d’entre eux est une certaine fragilité des

acquis. Ainsi, par exemple, les progrès réalisés dans la maitrise de l’argumentation des

lettres d’opinion écrites en début de session ne se retrouvent pas dans les paragraphes

argumentatifs de la première écriture de la première synthèse de textes, comme le

montrent les deux extraits ci-dessous.

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Schéma 2 : 813 - Organisation du commentaire critique de la synthèse no1 : version 1 et réécriture

Les deux étudiantes ont ainsi retrouvé dans cette première écriture les difficultés manifestées dans la première écriture de la lettre d’opinion : Manque total d’organisation du raisonnement pour 813, raisonnement déséquilibré et peu explicite, confusions de termes pour 805. Toutefois, elles le rectifient très bien dans leur réécriture et cette erreur ne persiste pas dans la deuxième synthèse, malgré la difficulté des textes à synthétiser.

Le rôle de l’évaluation

Les premières versions des deux étudiantes portent des traces écrites de la coévaluation,

des notes prises au cours de l’analyse collective de productions ou de leur réflexion

préalable à la réécriture, témoignage de leur activité mentale à tous les instants du

processus.

Elles utilisent également de façon très différente la fiche critériée, ce qu’on peut analyser

à partir de leurs fiches d’autoévaluation. Le sujet 805 connaissait cet outil, déjà utilisé lors

d’une précédente session. Toutefois, elle éprouve davantage le besoin de se raccrocher au

concret et s’appuie longtemps sur les seuls indices de réussite pour s’autoévaluer. Elle a

tendance à s’en servir comme d’une liste de contrôle. Elle s’en détache lentement, mais dès

qu’elle se trouve mise en difficulté par l’écriture de la synthèse, elle revient aux critères les

plus concrets. Le sujet 813, qui ne connaissait pas l’outil avant le début de la session, ne

prend d’abord pas le temps d’autoévaluation au sérieux. Elle manifeste de l’autosatisfaction

et éprouve beaucoup de difficultés à se distancier de son écrit. Il sera nécessaire de

s’entretenir avec elle pour expliciter cette tâche. Dès lors, elle progresse très vite, comprend

très vite la différence entre les deux catégories de critères et leur utilité respective. Elle

n’utilisera toutefois pleinement le dialogue évaluateur que tard dans la session.

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Texte 2 : 813 - Autoévaluation de la synthèse 1

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En effet, comme le montre l’exemple ci-dessus, la fiche d’autoévaluation fonctionne

comme un outil d’accompagnement d’une démarche personnelle d’apprentissage. Chaque

fiche constitue un véritable entretien méta rédactionnel. L’analyse de l’évolution dans

l’utilisation des fiches confirme les données de perception contenues dans les

questionnaires, qui gagnent ainsi en fiabilité.

L’avis des étudiants

Beaucoup d’éléments dans les questionnaires enregistrent le regard porté par les

étudiants sur la démarche stratégique utilisée. Tant dans l’étude de cas que pour l’ensemble

du groupe, leur adhésion est massive. La satisfaction s’avère très forte dès la mi-session,

autant globalement que concernant les deux aspects centraux de la séquence :

l’autoévaluation et la réécriture. La plupart des items obtiennent 100% d’opinions favorables

dès l’évaluation intermédiaire (ÉI). Les autres parviennent à ce total en fin de session

(ÉF),mais la différence est si faible que les résultats de l’évolution ne sont statistiquement

pas significatifs.

Les questions ouvertes de commentaires sont plus intéressantes, mais tous les étudiants

ne les ont pas renseignées. Leur analyse montre, avec le temps, une diminution des

commentaires relatifs à la démarche (de 72,5% à 29,03% puis 4,1% un an plus tard) au profit

de ceux qui soulignent la qualité des apprentissages (17,07%, 24,19% puis 25%) et, en ÉD

principalement, des modifications d’attitude, de procédures ou de représentation (43%). La

formulation des quelques unités de sens concernant l’utilité professionnelle de la démarche

proposée change très fortement entre ÉF (4,88%) et ÉD (11,11%) : ce ne sont plus seulement

des opinions, car les étudiants qui le mentionnent ont expérimenté tout ou partie de la

démarche au cours de leur stage.

L’analyse du contenu de la catégorie « modifications » est également intéressante. Les

modifications, qui se situaient essentiellement au niveau de l’attitude en ÉI, augmentent

fortement et deviennent très majoritairement des modifications de procédure et même de

représentation de l’écriture un an plus tard.

Les commentaires sur l’autoévaluation et la réécriture font en revanche apparaitre

quelques jugements négatifs. On note toutefois que la réécriture qu’on affirme ne « pas

aimer » attire globalement moins de commentaires négatifs que l’autoévaluation qui

apparait plus difficile et plus pénible. On y trouve des réactions affectives à la formulation

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forte (« je me sens rabaissée »), notamment en ÉI. Toutefois tous s’accordent à souligner

leur utilité et leur efficacité. Ainsi ils attribuent l’habitude de la prise de distance et de la

réflexivité à l’autoévaluation, l’amélioration des productions à la réécriture. Ils insistent aussi

dès la mi-session sur les modifications de procédures induites par ce travail. On voit

apparaitre en fin de session, et se renforcer un an plus tard, la modification des conceptions

(« je pense différemment », « je me suis rendue compte que mon texte formait un tout »,

« qu’un texte n’est pas figé et peut s’améliorer », etc.).

On peut dire aussi que les étudiants ont conscience des progrès réalisés. En fin de session

(ÉF), ils estiment à 55% avoir très fortement amélioré leurs productions écrites et à 17%

avoir amélioré leurs façons de travailler. Un an plus tard (ÉD), ils ont modifié leur

formulation : ils soulignent une amélioration de compétence (33%), une modification de

pratiques (16%) et de conception (14%).

Plus intéressante, la deuxième question du questionnaire ÉD vise à repérer quels acquis

les étudiants relient directement à la démarche un an après la session. C’était une question

totalement ouverte, à la formulation volontairement très générale, placée juste après

l’expression de l’indice de satisfaction et de son commentaire, afin d’induire le moins

possible les réponses des étudiants. L’analyse de contenu des 25 réponses, toutes très

riches, permet de repérer quatre grandes catégories, qui se subdivisent elles-mêmes en

deux ou trois sous-catégories. L’histogramme ci-dessous rend compte de la distribution.

Figure 4 : Les acquis du cours

0%

10%

20%

30%

40%

20,78% 18,18%

38,96%

22,08%

Po

urc

en

tage

s d

'un

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s d

e s

en

s

Catégories

Les acquis du cours

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Très majoritairement, les étudiants attribuent à la démarche des habitudes de retour dur

le texte, qui se subdivisent en trois sous-catégories : réécriture (43%), prise de distance

(37%) et réflexivité (20%). Pour ce qui concerne les modifications personnelles, elles

concernent presque exclusivement des modifications d’attitude face à l’écriture (81%).

Les modifications

Les modifications de procédure

L’étude de cas avait mis en évidence, progressivement, des modifications de procédures.

Les étudiants les citent aussi dans leurs commentaires.

Deux séries de questions fermées cherchent en ÉD à vérifier la pérennité des

modifications de procédure aux deux moments du processus d’écriture visés par la

réécriture accompagnée : l’anticipation et le retour sur le texte. Elles offrent, pour chaque

procédure décrite, quatre choix aux étudiants : oui [je le fais] toujours, oui souvent, oui

parfois et non [je ne le fais pas].

Les premières, au nombre de quatre, testent ce qui reste des procédures d’anticipation

mises en œuvre pendant la session : réflexion sur les contraintes génériques, préalable à

l’écriture; élaboration préalable d’une liste de critères; réflexion sur l’organisation du texte,

préalable à l’écriture; prise en notes écrites de cette esquisse d’organisation. On constate

ainsi que l’habitude d’une réflexion préalable sur le genre semble installée dans les pratiques

de plus des deux tiers des répondants (72%) et celle d’une réflexion préalable sur

l’organisation du texte chez plus de la moitié (52%). Si l’on additionne ceux qui répondent

« toujours » et ceux qui répondent « souvent », on obtient un total de 84% pour le premier

item et de 92% pour le second. Il n’y a par ailleurs aucune réponse négative à ces deux sous-

questions. Les mises à l’écrit (élaboration d’une liste de critères et notes écrites

d’organisation) sont moins bien installées chez les étudiants : seuls respectivement 12% et

28% d’entre eux disent le faire systématiquement. Toutefois le total de ceux qui s’y

astreignent toujours ou souvent se monte à respectivement 56% et 64%. Le nombre de ceux

qui disent ne jamais y penser est résiduel : 12% dans le premier cas et 8% dans le second.

Dans la deuxième partie des questions fermées sont également testées les différentes

procédures de retour sur le texte. Quatre questions tentent ainsi de savoir successivement si

les étudiants se donnent un temps suffisant de relecture critique, sollicitent les remarques

d’un ou plusieurs lecteurs, écrivent une autoévaluation, et pratiquent une vraie réécriture,

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dépassant la révision linguistique. On constate ainsi que l’habitude la réécriture semble

installée pour 84% des étudiants. Mais les différentes techniques de préparation de la

réécriture par la prise de distance et la réflexivité ne semblent pas être pratiquées de façon

aussi systématique. Seule la pratique d’une relecture critique atteint presque le tiers des

répondants (32%). Toutefois, si l’on examine le total de ceux qui déclarent le faire

« toujours » et « souvent » ou de ceux qui sollicitent à la même fréquence le regard critique

d’un lecteur, on atteint respectivement 72% et 56% de réponses. Seule la mise à l’écrit de

l’autoévaluation est très peu pratiquée.

L’évolution des représentations

On ne fait pas bouger de grandes conceptions en l’espace de 45h. Ainsi, malgré quelques

fluctuations, les conceptions concernant la lecture, l’écriture et leur utilité sociale,

enregistrées dans un sondage en début et fin de session, ne changent guère. Toutefois, cette

analyse confirme l’inappétence pour l’écriture d’une bonne moitié (58%) des étudiants.

L’analyse plus fine suggérée par des items à compléter apporte toutefois quelques

indications de ce qui est en voie de modification dans les représentations de ce groupe

d’étudiants. La première phrase à compléter permettant d’approcher les représentations

des étudiants commençait par « bien écrire, c’est… ». L’analyse du contenu des définitions

se distribue en trois grandes catégories. Ainsi, au cours de la session, on voit diminuer

régulièrement la catégorie des qualités personnelles (passant de 34% à 12%) au profit de

celle des compétences acquises (de 64% à 84%), éléments de définitions plus expertes. Les

notations concernant le contexte sont peu nombreuses et liées à des circonstances

particulières d’écriture en cours.

L’étude de cas mettait en évidence l’instabilité de ces représentations, qui faisait écho à

la fragilité des acquis. On la constate également dans le retour partiel de conceptions

initiales un an plus tard, marqué par une légère remontée du pourcentage des qualités

personnelles et la baisse concomitante de celui des compétences acquises. L’analyse des

sous-catégories est également intéressante. On constate ainsi la persistance, en début de

session, chez cinq étudiantes, de la représentation populaire du « don » d’écriture,

popularisée par beaucoup d’écrivains. Ces unités de sens disparaissent en ÉI et ÉF, mais on

en retrouve deux un an plus tard. Les qualités d’ordre affectif, très proches elles aussi de la

même représentation populaire varient fortement : en forte diminution à mi-session (de

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16% à 8%), elles remontent à 25% en fin de session et se renforcent encore un an plus tard

(47%). Ceci confirme qu’on se trouve bien en phase de modification et que les

représentations correspondant au travail d’écriture et à la fabrication d’un texte sont encore

en cours de constitution.

Ainsi, pour l’ensemble du groupe, comme pour les deux sujets de l’étude de cas, des

représentations instables accompagnent des apprentissages indéniables mais sans doute

encore peu assurés.

Discussion et perspectives

On peut affirmer qu’une amélioration des productions est constatée dans l’analyse tant

qualitative que statistique. Il apparait aussi que cette amélioration est sensible dans tous les

domaines considérés : prise en compte des contraintes génériques, progression textuelle,

normes linguistiques.

Les limites de l’étude

En ce qui concerne les spécificités génériques, l’amélioration est nette de la première

version à la réécriture d’un même genre, moins dans le passage d’un genre à un autre.

L’étude de cas montre combien le chemin de ces améliorations est différent selon les sujets

et combien les acquis d’une seule session universitaire sont fragiles. Toutefois, dans les deux

cas, les fiches d’autoévaluation font apparaitre une meilleure appropriation des contraintes

d’un genre à l’autre.

On peut également affirmer que tous les étudiants progressent. Il apparait que les plus

en difficultés progressent plus que les autres dans deux domaines peu ou non liés aux

différents genres, donc à des apports nouveaux : la progression textuelle et le respect des

normes linguistiques.

On a pu constater aussi une adhésion massive des étudiants à la démarche proposée.

Pour illustrer leur satisfaction, les étudiants insistent, dès la mi-session, sur la qualité

générale de la démarche et son adéquation avec l’enseignement théorique dispensé, ainsi

que la qualité des apprentissages. En fin de session, on retrouve ces catégories, mais les

modifications (de pratiques, de conceptions ou d’attitudes) dominent fortement. Cette

tendance se maintient, et même se renforce, un an plus tard. On constate alors des

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procédures nouvelles surtout dans le domaine de l’anticipation. Pour ce qui concerne les

procédures de retour sur le texte, la réécriture semble massivement pratiquée.

On note enfin quelques évolutions positives dans la représentation de l’écrit, passant de

l’écrit inspiré, étroitement lié à des qualités personnelles, à l’écrit fabriqué. Mais cela reste

fragile puisque la tendance à considérer l’écriture comme inhérente à la personne réapparait

un an plus tard, à un degré moindre toutefois.

Tous ces résultats restent toutefois très liés au contexte particulier de cette recherche,

renforçant son caractère exploratoire : une personne, un petit groupe d’étudiants, un cours

crédité de premier cycle universitaire.

Les éléments signifiants

Les analyses précédentes permettent de distinguer trois éléments signifiants, mis en

évidence par l’étude de cas et confirmés par la suite : le temps, l’expérience et le sens. Il

convient de s’arrêter sur chacun d’entre eux.

La question du temps

Compte tenu de l’importance des contenus, le temps a manqué dès l’élaboration de

l’intervention didactique. Ainsi le déroulement en a été assez chaotique. Les choix

didactiques opérés n’ont pas permis de consacrer une durée suffisante aux séquences

majeures et l’étude de genres utiles à l’enseignement dans le secondaire a été

considérablement réduite.

Il n’a pas été possible de tenir compte du nécessaire temps d’appropriation, ce qui se

traduit par la fragilité des acquis. L’étude de cas montre que, bien que les deux étudiantes

correspondent assez bien au niveau initial exigé par ce cours, elles n’ont pas stabilisé leurs

connaissances ni leurs savoirs-faires en fin de session. Et en écho, on peut observer chez les

deux sujets la forte variabilité des représentations.

Enfin, le temps a manqué pour la distanciation, particulièrement en début de session. La

capacité de distanciation par rapport à son écrit se construit lentement et un temps de

détachement affectif est nécessaire. La distanciation et la mise en doute de son écrit

constituent une attitude contrintuitive assez fortement déstabilisante. Cela ne semble pas

avoir d’impact, globalement, sur les résultats en fin de session.

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L’expérience

Les résultats positifs enregistrés en cours et en fin de session laissent à penser que

l’expérience a compensé, au moins en partie, le manque de temps. Une contrainte douce

mais ferme instituant des temps, parfois qualifiés de « pénibles », de co- et d’autoévaluation

d’une part et de réécriture de l’autre a permis de prendre conscience de l’utilité de ces deux

procédures par le constat de leur efficacité dans la qualité des écrits. Fermement guidés et

constamment actifs, les étudiants ont pu expérimenter le lien entre la distanciation, réalisée

dans l’autoévaluation écrite, instrumentée par le dialogue évaluateur préalable, et la

réécriture, conçue comme le moyen d’améliorer et de réussir, au moins dans une forte

proportion, leur écrit. Cela constitue une opérationnalisation de la prise de conscience. Nous

avons vu dans l’étude de cas s’effectuer progressivement l’appropriation de la fiche critériée,

image référente du genre pratiqué, et l’installation progressive de son utilisation adéquate :

différence avec une liste de contrôle, représentation pertinente des critères, etc. Il semble

indubitable que l’expérience de la réécriture a changé le regard des étudiants par rapport à

cette modalité de l’écriture souvent ressentie comme un aveu d’échec. Les étudiants

déclarent l’avoir adoptée un an plus tard.

Ils ont, en tout cas, fait l’expérience de la réussite, puissant moteur de motivation. Ils en

sont conscients et s’en souviennent. Varela (1993) a montré combien l’expérience est

inhérente y compris aux ensembles physiologiques qui permettent l’intelligence et en

particulier aux mécanismes internes d’autocontrôle des systèmes cognitifs. Nous retrouvons

ici le lien entre la compétence et une expérience accumulée au cours d’un nombre

important d’actions concrètes.

La question du sens

Les analyses qualitatives montrent à la fois le refus de l’enseignante de prendre en

compte explicitement les erreurs liées à la langue et parallèlement une progression lente

mais sûre de la maitrise des normes de la langue par les deux étudiantes dont l’évolution est

analysée. On y remarque par ailleurs un lien entre la difficulté éprouvée à mettre en œuvre

le genre et cette progression : un plus grand nombre d’erreurs réapparait quand les

contraintes génériques requièrent plus d’attention. Cette amélioration est confirmée pour

tous les étudiants du groupe. Elle apparait même plus importante pour ceux initialement

plus en difficulté. Par ailleurs, si le nombre d’erreurs a décru, la nature de ces erreurs a

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changé : l’appropriation d’un vocabulaire nouveau, plus abstrait et plus technique, pèse plus

fortement que les erreurs linguistiques traditionnelles à la fin de la session. On peut donc en

conclure que le sens conduit l’apprentissage ou, au moins, la mobilisation opportune des

connaissances. Les étudiants sont conscients de cette amélioration qu’ils attribuent

massivement à la réécriture. En l’occurrence, c’est l’écriture d’un texte et la recherche de sa

qualité, renforcées par le respect du projet d’écriture et des choix du scripteur, qui font sens.

Cette question renvoie au problème posé par l’inappétence pour l’écriture qui affecte

plus de la moitié de ce groupe d’étudiants pourtant amoureux de la langue au point de se

destiner à son enseignement. L’analyse du cas du sujet 813 nous montre que cette étudiante

n’est rétive ni à l’effort ni au raisonnement abstrait. Mais elle semble refuser de corriger

avec soin ses erreurs de langue et choisit comme écriture de loisir un genre conversationnel

moins rigoureux dans ce domaine. L’inappétence concerne-t-elle uniquement les genres

scolaires? Concerne-t-elle des étudiants présentant un profil particulier? Nous savons en

tout cas qu’il n’y a pas de lien entre cette inappétence pour l’écriture et les difficultés

scolaires : le sujet 813 est une scriptrice de talent et a connu un parcours scolaire sans aucun

problème. C’est une piste qu’il serait bon d’explorer.

Les trois questions soulevées ci-dessus sont bien documentées au niveau théorique. En

revanche, il existe peu de recherches qui en montrent l’effet concret sur les apprentissages,

voire pas du tout. Il serait important de construire d’autres dispositifs pour évaluer leur

impact respectif dans diverses situations concrètes d’enseignement.

Bien d’autres pistes de recherche s’ouvrent à l’issue de ce travail : s’assurer de la

reproductibilité des résultats et de l’adaptabilité de la démarche en transposant le dispositif

dans d’autres contextes avec d’autres intervenants ; analyser le rôle respectif des éléments-

clefs de la démarche ; contrôler la pérennité à moyen et long terme des modifications

constatées.

En conclusion, on peut affirmer qu’il n’existe pas de solution simple ni parcellaire à un

problème aussi complexe que l’écriture de texte. Or, c’est une activité essentielle, de

nombreux travaux l’ont confirmé, à la construction de la pensée rationnelle et de l’esprit

critique, comme à l’accession à des capacités psychiques de haut niveau. Seule la

combinaison de différents dispositifs permettant l’autocontrôle de l’action et l’activité

réflexive sur les résultats de cette action peut répondre à l’hétérogénéité des apprenants, à

la diversité de leurs acquis antérieurs et de leur rapport au langage écrit. La réécriture

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accompagnée est une démarche de ce type. Résolument socioconstructiviste, et pariant sur

l’intelligence et la créativité de ceux qui apprennent, elle permet de préserver toute la

complexité du système qu’est la langue, particulièrement écrite, et du processus d’écriture

d’un texte.

Michèle Prince Janvier 2012

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