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2 Conjoncture Novembre 2004 (1)1996 semble être l'année de l'émergence de la question, avec d'une part les minutes de la réunion du FOMC du mois de septembre (http://www.federalreserve.gov/ fomc/minutes/19960924.htm), et le discours d'Alan Greenspan au Conference Board en octobre (http://www.federalreserve.gov/ boarddocs/speeches/1996/ 19961016.htm). L a productivité américaine est au centre des débats depuis qu'Alan Greenspan en a fait l'un des thèmes récurrents (1) de ses discours. Bien que les chiffres confirment à chaque trimestre la solidité des gains de productivité aux Etats-Unis, les économistes ne parviennent toujours pas à aboutir à un consensus. S'ils arrivent à s'accorder sur l'importance de ce concept, pour la croissance à long terme, aussi bien que pour la politique monétaire à court terme, ils discutent toujours de la mesure la plus pertinente. L'horizon d'analyse fait également débat : doit-on se placer dans une perspective de très long terme ou de moyen terme ? Avec une telle absence de consensus sur les méthodes d'analyse, il n'est pas étonnant qu'aucune conclusion quant à l'actuelle tendance de la productivité américaine n'ait été trouvée. Après avoir présenté le concept de produc- tivité et son importance (partie que vous pouvez omettre si vous connaissez déjà le sujet), nous étudierons les dernières données et passerons en revue les dernières analyses. Productivité, mode d'emploi Avant d’examiner les chiffres afin de conclure quant à l'accélération struc- turelle de la productivité aux Etats- Unis (ou à son absence), il s'agit de savoir ce que l'on entend exactement par productivité et comment on la mesure. De façon plus centrale peut- être, il s'agit de savoir pourquoi ce concept semble si important aux yeux des économistes. C'est quoi ? Comment cela se mesure-t-il ? Le Petit Larousse définit la productivité comme “le rapport mesu- rable entre une quantité produite et les moyens mis en œuvre pour y parvenir”. En d'autres termes, la productivité est la quantité de biens (ou de services) produits par unité de facteur de production. Les facteurs de production sont multiples. De façon classique et générale, on retient le travail et le capital, mais on peut tout aussi bien imaginer mesurer la productivité d'au- tres facteurs, comme une matière première par exemple. Ainsi une amélioration des techniques de raffinage peut permettre d'extraire davantage de matière pure, et ainsi ce progrès permettra de produire davan- tage de produits finis à partir d'une même quantité de matériau brut. La mesure la plus pertinente de la productivité d'une économie est la productivité totale des facteurs. En effet, une forte croissance de la productivité du travail peut se faire au détriment de la productivité du capital La productivité américaine, de Henry Ford à Bill Gates

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2 Conjoncture Novembre 2004

(1)1996 semble être l'année del'émergence de la question, avecd'une part les minutes de laréunion du FOMC du mois deseptembre(http://www.federalreserve.gov/fomc/minutes/19960924.htm), etle discours d'Alan Greenspan auConference Board en octobre(http://www.federalreserve.gov/boarddocs/speeches/1996/19961016.htm).

La productivité américaine est aucentre des débats depuis qu'AlanGreenspan en a fait l'un des thèmes

récurrents(1) de ses discours. Bien que leschiffres confirment à chaque trimestre lasolidité des gains de productivité auxEtats-Unis, les économistes ne parviennenttoujours pas à aboutir à un consensus. S'ilsarrivent à s'accorder sur l'importance dece concept, pour la croissance à longterme, aussi bien que pour la politiquemonétaire à court terme, ils discutenttoujours de la mesure la plus pertinente.L'horizon d'analyse fait également débat :doit-on se placer dans une perspective detrès long terme ou de moyen terme ?

Avec une telle absence de consensussur les méthodes d'analyse, il n'est pasétonnant qu'aucune conclusion quantà l'actuelle tendance de la productivitéaméricaine n'ait été trouvée. Aprèsavoir présenté le concept de produc-tivité et son importance (partie quevous pouvez omettre si vous connaissezdéjà le sujet), nous étudierons lesdernières données et passerons enrevue les dernières analyses.

Productivité, moded'emploi

Avant d’examiner les chiffres afin deconclure quant à l'accélération struc-turelle de la productivité aux Etats-Unis (ou à son absence), il s'agit desavoir ce que l'on entend exactement

par productivité et comment on lamesure. De façon plus centrale peut-être, il s'agit de savoir pourquoi ceconcept semble si important aux yeuxdes économistes.

C'est quoi ? Comment cela semesure-t-il ?

Le Petit Larousse définit laproductivité comme “le rapport mesu-rable entre une quantité produite et lesmoyens mis en œuvre pour y parvenir”.En d'autres termes, la productivité estla quantité de biens (ou de services)produits par unité de facteur deproduction.

Les facteurs de production sontmultiples. De façon classique etgénérale, on retient le travail et lecapital, mais on peut tout aussi bienimaginer mesurer la productivité d'au-tres facteurs, comme une matièrepremière par exemple. Ainsi uneamélioration des techniques deraffinage peut permettre d'extrairedavantage de matière pure, et ainsi ceprogrès permettra de produire davan-tage de produits finis à partir d'unemême quantité de matériau brut.

La mesure la plus pertinente de laproductivité d'une économie est laproductivité totale des facteurs. Eneffet, une forte croissance de laproductivité du travail peut se faire audétriment de la productivité du capital

La productivité américaine, deHenry Ford à Bill Gates

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et inversement, via la quantité relatived'un facteur de production à l'autre.Ainsi à production et total des facteursde production, donc à productivitétotale des facteurs inchangée, uneaugmentation relative du capital parrapport au travail entraînera une baissede la productivité du capital (plus decapital utilisé par unité de production)et une hausse de la productivité dutravail (moins de capital utilisé parunité de production).

Il existe donc plusieurs productivités,et le Bureau of Labor Statistics (BLS,l'agence statistique du ministèreaméricain du Travail) en publie plusieursmesures. La plus commentée est laproductivité du travail (dans le secteurproductif, “business sector”), mais desstatistiques de productivité multi-facteurs existent également(2). A cetteliste, il convient d'ajouter les différentsrapports que publie le BLS dans le cadredes comparaisons internationales, avecle PIB par tête et par employé, ainsiqu'un rapport sur le seul secteurmanufacturier qui, outre la productionpar unité de travail, fournit des chiffresde coûts unitaires de production, et cepour une quinzaine de pays.

Si la mesure la plus suivie est laproductivité du travail dans le secteurproductif, ce n'est pas seulement parceles données paraissent régulièrement etrapidement (les chiffres, trimestriels,sont publiés quelques jours après ceuxdu PIB, alors que les autres donnéessont annuelles et disponibles avecretard). Le facteur capital est, en fait,particulièrement difficile à mesurer. Onne peut en effet se contenter decompter le nombre de machines-outilset de tracteurs dont dispose le secteurproductif. Il faut savoir mesurer leurpotentiel : un tracteur ne peut être

comparé à une charrette à bras. Il estalors plus aisé de se contenter du seulfacteur travail, en supposant que laquantité et la qualité du facteur capitalsont l'une des sources possiblesd'amélioration de la productivité dutravail. Par exemple, l'achat d'unordinateur sera l'une des explicationsde l'augmentation de la productivitédes employés d'une entreprise.

Se contenter du seul facteur travailpermet par ailleurs de dépasser unedifficulté non négligeable. Reprenonsnotre précédent exemple. Si l'existencede l'ordinateur rend possible uneautomatisation de certaines tâches,c'est le savoir-faire de l'employé qui leprogramme qui permettra de réalisercette amélioration. On peut alors sedemander si l'augmentation de laproductivité générale des facteurs s'estfaite grâce au travail (les heures deprogrammation) ou au capital (l'achatd'un ordinateur). La réponse est quetravail et capital sont conjointement lasource de la rationalisation de laproduction, et il est alors quasiimpossible de la ventiler avec exactitude.

Il faut également noter que le degréde qualification de la main-d'œuvre aun effet direct sur la productivité dutravail. Ceci ressemble à une lapalissademais n'en est pas une. Imaginons uneentreprise dont les effectifs serésument à un ouvrier non qualifié etun ouvrier qualifié. La productivité dupremier est de 1, et celle du second de2. La productivité du travail de cetteentreprise est de (1+2) / 2, soit 1,5.Imaginons que l'entreprise décided'embaucher. Si elle embauche unouvrier non qualifié, la productivité dutravail sera alors de (1+2+1) / 3, soit11/3, alors que si elle embauche unouvrier qualifié la productivité du

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(2) Le BLS calcule deux mesuresdifférentes, l'une ne comporte queles deux facteurs habituels(travail et capital), l'autre intègreégalement l'énergie, les matériauxainsi que les services achetés àd'autres entreprises. La premièreest appelée multifactorproductivity et la seconde KLEMSmultifactor productivity, pourcapital (K, capital), travail (L, labor), énergie (E, energy),matériaux (M, materials) etservices achetés à d'autresentreprises (S, purchased businessservices inputs). Pour plus dedétails, voir le Handbook ofMethods du BLS, disponible surhttp://www.bls.gov/opub/hom/homtoc.htm.

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travail sera de (1+2+2) / 3, soit 12/3.Ainsi plus le travail qualifié a unegrande part dans l'emploi, plus laproductivité du travail de l'économiesera importante.

Mesurer la productivité peutsembler simple au premier abord,même si elle ne peut être observée. Ilfaut compter, d'une part, le nombre debiens et services produits et, d'autrepart, le nombre d'heures de travailayant permis cette production.

Le nombre d'heures travaillées dansune économie n'est pas si difficile àobtenir, même si de nombreusesquestions peuvent être soulevées. Parexemple, le temps de travail ducomptable d'une usine entre-t-il dansle processus de production, ou encorecomment traiter les horaires descadres(3) ? Au-delà de ces limites, ilsuffit alors de comptabiliser le nombred'employés, ainsi que l'horaire moyende chacun, pour déterminer les heurestravaillées dans l'ensemble d'uneéconomie.

La quantité de biens et de servicesproduits par une économie estbeaucoup plus difficile à estimer. Cesujet est d'ailleurs celui qui fait l'objetdu plus grand nombre d'articles du BLS,quand celui-ci tente de mesurer laqualité des chiffres de productivitéqu'il publie. Le produit intérieur brut,plus connu sous l'acronyme PIB, estl’évaluation de ce qui est produit parune économie sur le territoirenational(4). Calculer en termes nomi-naux cet agrégat est relativement aisé.Ainsi, tout ce qui est produit seravendu, et la production totale d'uneéconomie sera la somme du produit deces ventes (consommation etinvestissement logement des ménages,investissement et variation des stocks

des entreprises, consommation etinvestissement du secteur public etsolde des échanges extérieurs).

Certaines difficultés d'estimationqui émergent au niveau micro-économique sont dépassées au niveaumacroéconomique grâce à l'identitécomptable entre emplois etressources(5). Reste qu'en mesurant laproduction nominale, seule la moitiédu chemin a été parcourue, puisquec'est la quantité de biens et services quientre dans le calcul de la productivitéen volume, et non pas leur valeur. Ils'agit alors d'estimer des donnéesréelles à partir des données nominales.Il faut ventiler l'augmentation de lavaleur ajoutée avec, d'une part, lapartie due à une hausse du nombre debiens et services produits et, d'autrepart, la partie liée à la progressiongénérale des prix.

De très nombreuses questions seposent alors, la plupart ayant étésoulignées par la Commission Boskin(6).Celle-ci a conclu à une surestimationmoyenne de l'inflation de 1,1% par an(avec un intervalle de 0,8% à 1,6%),identifiant trois sources d'erreur : lesbiais de substitution (0,4%), de modede commercialisation (0,1%) ainsi queceux liés à l'introduction de nouveauxproduits (0,6%)(7). Le BLS s'est penchésur ces questions et, même si lesconclusions de la commission Boskin nesont pas totalement partagées, ilidentifie des sources plausiblesd'erreurs de surestimation de l'inflationayant un impact direct sur la mesure de la productivité(8). En effet, sousl'hypothèse que le PIB nominal estcorrectement mesuré, toute sures-timation de l'inflation conduira à unesous-estimation du PIB réel, et donc dela productivité.

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(3) Les données utilisées par leBLS concernent le personnel horsencadrement. Ainsi le nombred'heures travaillées pourrait-ilêtre sous-estimé par cettelimitation de champ. Une étudemenée par le BLS montre que sil'horaire hebdomadaire est trèsdifférent dans l'encadrement,intégrer ces nouvelles donnéesdans le calcul de la productiviténe change pas la tendance decette dernière. Voir "Alternativemeasures of supervisory employeehours and productivity growth",Lucy P. Eldridge, MarilynE. Manser and Phyllis Flohr Otto,BLS, Monthly Labor Review,April 2004.(4) On comptabilise alors laproduction de l'ensemble desentreprises présentes sur leterritoire national, et ce quelleque soit leur nationalité. Le PNB(Produit National Brut) mesure,au contraire, la production del'ensemble des entreprises"nationales", et ce quelle que soitleur localisation dans le monde.(5) On pense ici à la productionde certains services, sujet quenous détaillons par la suite.(6) "Toward A More AccurateMeasure Of The Cost Of Living",Final Report to the Senate FinanceCommittee from the AdvisoryCommission To Study TheConsumer Price Index (President,Michael J. Boskin),Décembre 1996.(7) Pour une analyse détaillée desconclusions de la CommissionBoskin, voir "Quelles perspectivespour l'inflation aux Etats-Unis?",Nathalie Benatia, Lettre deConjoncture, BNP, août 1998.(8) Voir notamment "How priceindexes affect BLS productivitymeasures", Lucy P. Eldridge, BLS,Monthly Labor ReviewFévrier 1999.

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De cet exposé ressort que mesurer laproductivité n'est pas simple, mais pasimpossible pour autant. La batterieaméricaine de statistiques est l'une desplus riches au monde, et il existeratoujours un débat sur le champ àretenir, et les données à utiliser. Laquestion se pose encore davantagelorsqu'il s'agit de comparaisons inter-nationales. Ainsi, il n'existe souvent pasde mesure comparable à la productivitédu secteur productif américain dans lesautres pays du monde. Mais il restetoujours la possibilité d'utiliser lamesure la plus simple à calculer, àsavoir la production par employé(9).Mais, au-delà du niveau de la pro-ductivité du travail, c'est sa croissancequi importe, et même l'accélération oula décélération de celle-ci. Il suffit alorsde ne retenir qu'une seule mesure etd'étudier son évolution dans le temps.

Sur quoi cela joue-t-il ?

Le fait que le "dada" d'AlanGreenspan soit la productivité n'en faitpas en soi une question essentielle.C'est plus son caractère central qui en afait la préoccupation constante duPrésident de la Réserve fédérale.L'évolution de la productivité va, eneffet, avoir un effet direct sur lepotentiel de production d'uneéconomie. Elle aura également uneincidence sur les prix, via, d'une part, larelation qui existe entre productivité etcoûts unitaires de production et,d'autre part, la relation qui existe entrel'écart à la production potentielle(output gap) et l'inflation. Ayant uneffet sur les prix, les gains deproductivité influeront également surle pouvoir d'achat des ménages, alors

qu'on peut envisager une relationindirecte avec le taux de chômaged'équilibre. Via l'effet sur les prix, laproductivité aura également desconséquences sur la politique moné-taire et donc sur le niveau des tauxd'intérêt, qui viendra à son tourinfluencer les décisions d'endettementdes ménages et des entreprises, sansparler des charges d'intérêt de l'Etat, etdonc des impôts… On comprend ainsimieux l'intérêt d'Alan Greenspan pourla question.

�� La croissance potentielle etl'oouuttppuutt ggaapp

L’output gap peut être ainsi défini :l’écart entre la production d’uneéconomie et ce qu'elle serait à pleinecapacité. Il s’agit donc de l’écart entrele PIB effectif et le PIB potentiel –l’écart entre ce qui est effectivementproduit et ce qui pourrait être produitsi les intrants étaient utilisés à pleinecapacité(10). La croissance potentielleest le taux de croissance du PIBpotentiel.

Il est important de bien comprendrela différence entre le PIB potentiel et lacroissance potentielle. Que le PIBeffectif croisse au même rythme queson potentiel n’implique pas quel'activité a atteint son niveau potentiel.Les périodes de croissance inférieure aurythme potentiel amènent le PIBeffectif en deçà du PIB potentiel.Autrement dit, un output gap négatifse creuse.

A titre d’exemple, entre 2001 et2003, l’économie américaine a affichéune croissance moyenne de 1,9%,chiffre incontestablement inférieur aupotentiel de croissance. Pour 2003, lacroissance annuelle a été de 3,0%, ce

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(9) Bien sûr à chaque problèmerésolu, un nouveau émerge. Ici laquestion sera celle du taux dechange à utiliser.(10) Il ne faut pas ici assimilerpleine capacité et utilisation descapacités de production à 100%.Un taux d'utilisation des capacitésde production de 100%correspondrait à une économie ensurchauffe, sans aucun doutecaractérisée par une forteinflation. De plus, les industrielsn'auraient d'autres choix qued’accroître leurs capacités deproduction, ce qui augmenteraitplus encore la demande à courtterme (avec effet modérateur desimportations).

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qui la situe dans le bas de la fourchetted’estimation du potentiel de croissance.Ce rythme de croissance n’a donc passuffi à combler l’output gap.

Il existe trois méthodes distinctesd'estimation du PIB potentiel. Lapremière est fondée sur la fonction deproduction : la main-d’œuvre et lecapital disponible déterminent le PIBpotentiel. On utilise généralement unefonction de production, de type Cobb-Douglas, par exemple :

où Yt est le PIB potentiel, At lacomposante tendancielle de laproductivité totale des facteurs, Kt lestock de capital et Nt la composantetendancielle de l’offre effective demain-d’oeuvre (la population activecorrigée du niveau de chômage d’équilibre). Le paramètre α estl’élasticité de la production au facteurtravail. Cette approche est largementutilisée – par l’OCDE et le FMInotamment – et son principal avantageest de proposer un cadre économiquegénéral. Ses principales limites portentsur la disponibilité des données, enparticulier la mesure du stock decapital. En outre, il est nécessaire dedémêler les tendances de laproductivité totale des facteurs et de ladémographie(11).

Les deuxième et troisième approchessont d’ordre statistique et consistent àextraire la tendance à partir deschiffres du PIB par le biais de méthodesstatistiques. La première série deméthodes est une approche univariéeet la seconde une approche multivariée.En bref, la première approche estime lePIB potentiel en calculant unetendance, tandis que la seconde utilise

les données de plusieurs séries et peutse fonder sur des relations écono-miques, comme la courbe de Phillips,par exemple.

En bref, il n’est pas aisé d’évaluer,même grossièrement, le PIB potentiel.En fait, il est bien plus facile de calculerla croissance potentielle puisqu’il suffitpour cela d’estimer l’évolution struc-turelle de la population active et de laproductivité du travail. La productivitédu travail permet ainsi de déterminerles perspectives de croissance d'uneéconomie. Les prévisions de long termese basent ainsi sur des projectionsdémographiques et des hypothèses detendance de la productivité du travail.Ainsi, si est la croissance potentielle,

la croissance de la productivité du travail et la croissance de lapopulation active, on écrit :

soit

����L'inflation

La productivité du travail permetdonc une estimation du PIB potentielet ainsi de l'output gap. Mais à quoidonc sert l'output gap ? L'output gapest une mesure de surchauffe. S'il esttrès largement positif – l'activité estbien supérieure à celle permise par lescapacités de l'économie – des tensionsvont apparaître sur les prix. Ainsi, et defaçon intuitive, l’inflation accélèrelorsque la croissance du PIB estsupérieure au potentiel, et refluelorsque l'activité est inférieure à sonpotentiel. A court terme cependant, lacorrélation entre l’inflation et l’outputgap peut dévier de son niveau de longterme. Malheureusement, pour lesdécideurs économiques – comme

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P•

Y•

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(11) Les changementsdémographiques sont lents, et lesprojections de long terme fiables.Mais les prévisions quant àl'évolution de la population activesont délicates. Il s'agit de tenircompte, non seulement de ladémographie, mais aussi du tauxde participation (ratio de lapopulation active à la populationen âge de travailler). Ainsi, lacroissance potentielle del'économie peut être amélioréepar une participation accrued'une certaine population àl'emploi (par exemple, l'entréemassive des femmes dans la vieactive après la Seconde Guerremondiale), alors même quedémographie et gains deproductivité conservent la mêmetendance.

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personne ne sait précisément chiffrer leniveau du PIB potentiel d’uneéconomie – il est facile de se trompersur l’ampleur voire la direction del’output gap…, ce qui peut conduire àde graves erreurs en matière depolitique macroéconomique(12).

Imaginons deux coureurs demarathon qui se ressemblent en touspoints. L’un d'eux court invariablementà la vitesse précise autorisée par sastructure musculaire et par saconsommation journalière d’alimentset d’eau. Il représente l'évolution du PIBpotentiel. L’autre coureur, représentantl'évolution du PIB effectif, est moinsrégulier. La pluie, la chaleur ou toutautre "choc externe" affectent savitesse. Par exemple, en rendant le solplus glissant, la pluie le freinera. Saconsommation journalière d’alimentssera alors trop élevée. S’il ne l’ajuste pasimmédiatement à sa nouvelle vitesse, ilprendra du poids et accumulera des"capacités excédentaires".

Que ce soit immédiatement outardivement (les capacités excéden-taires ralentissant sa course), lemarathonien, courant moins rapide-ment que sa vitesse potentielle, réduirasa consommation de calories. Lademande de produits alimentairesdiminuera donc, ce qui entraînera despressions à la baisse sur leurs prix. Unecroissance sous-optimale a donc deseffets désinflationnistes. Inversement,si le marathonien adopte une cadenceplus élevée que son rythme naturel, ildevra absorber davantage de nourriturepour maintenir sa vitesse. La demandede produits alimentaires augmenteradonc, ce qui entraînera des pressions à la hausse sur leurs prix. Unecroissance trop forte a donc des effetsinflationnistes.

Il existe également une relation plusdirecte, moins abstraite, entre laproductivité du travail et l'inflation.Alors que ce que nous venons d'exposertient à la capacité pour les entreprisesd’accroître leurs prix – la demande estplus forte que l'offre, et une aug-mentation des prix permet de revenir àl'équilibre – la relation "directe" entreproductivité et inflation tient à laformation des coûts.

En deux mots, une croissancesoutenue de la productivité permet unemeilleure maîtrise des coûts unitairesdu travail. Passons à une formalisation(légère) pour illustrer notre propos. Ytest la production réalisée durant lapériode t, Et le nombre d'heurestravaillées durant la période t. Laproductivité horaire du travail Pt, s'écritdonc :

Soit St le coût d'une heure de travail(salaire et ensemble des chargessalariales et non salariales). Le coût dela main-d'œuvre par unité produite,ULCt, s'écrit ainsi :

Il existe donc bien une relation inverseentre productivité et coût unitaire dutravail. En effet, à coût horaire de lamain-d'œuvre inchangée, uneaugmentation de la productivité dutravail conduit à diminuer l'horairenécessaire pour produire une unité debien, diminuant dans les mêmesproportions le coût du travail par unitéproduite.

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(12) L'exemple le plus édifiant estcertainement celui des années1970, même si les économistes nes'accordent pas sur ce point. Pourcertains, les autorités monétairesont fait le mauvais choix suite auchoc pétrolier, décidant decombattre les effetsrécessionnistes de la flambée desprix énergétiques, plutôt que seseffets inflationnistes. C'est oublierque les années 1970 ont connu unfort ralentissement de lacroissance de la productivité dutravail, mal estimée à l'époque.La Fed a ainsi réagi à un niveaud'output gap surestimé. Si lapolitique monétaire a bien ététrop accommodante, ce qui estl'une des causes de la poussée del'inflation, ce n'est ainsi pas parcequ'elle a combattu le mauvaisennemi, mais parce qu'elle neconnaissait pas l'état réel de sesforces.

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En revanche, il n'existe pas derelation entre la productivité du travailet les autres coûts unitaires. Au niveaumacroéconomique, ces deniers sont, eneffet, réduits à leur plus simpleexpression : intérêts payés, dépréciationdu capital, loyers et impôts indirects.Mais le coût du travail est de loin lapremière charge des entreprises. Ainsi,les comptes des entreprises américainesmontrent, que en 2003, le coût dutravail représentait 65% de la valeurajoutée brute, contre 28% pour lesautres coûts(13).

Finalement, une croissance forte dela productivité va souvent de pair avecune solide activité économique et unmarché du travail dynamique. Et, quandtout va bien du côté de l'économieréelle, la lutte contre l'inflation estd'autant plus facile pour une banquecentrale que les gains de productivitésont importants.

����La politique monétaire

Comme nous l'avons évoquéprécédemment, le PIB potentiel,surtout l'output gap, participe desdécisions de politique monétaire. Larègle de Taylor(14) formalise la fonctionde réaction de la Fed face aux chocs surl'inflation et la croissance. Le tauxobjectif des fonds fédéraux est alors lasomme pondérée de son niveau réelneutre, de la différence entre inflationobservée et objectif d'inflation, et del'output gap. On peut l'écrire ainsi :

où it* est le taux objectif des fondsfédéraux, r son niveau réel neutre, π letaux d'inflation anticipé, πt l'inflationobservée, π* l'objectif d'inflation, yt

l'output gap, et α et β des coefficientsque Taylor propose de fixer à 0,5. Cettevaleur est en fait une moyenne surlongue période. Sur le long terme, laFed a un double objectif de croissanceet de stabilité des prix. Mais selon lespériodes, le risque pesant sur l'inflationsera plus important que celui pesantsur la croissance. Ainsi, en période detrès forte inflation, le coefficient α serabien supérieur à 0,5, les taux réels, etnon pas seulement nominaux, devantêtre augmentés. Inversement, lorsqu'ils'agira de lutter contre un risquedéflationniste, la coefficient β serabien supérieur au coefficient α.

En résumé, lorsque l'inflation estsupérieure à l'objectif, le taux des fondsfédéraux devrait être supérieur à sonniveau neutre, toutes choses égales parailleurs, et lorsque l'activité estinférieure à son potentiel, le taux desfonds fédéraux devrait être inférieur àson niveau neutre, toutes choses égalespar ailleurs. Cette règle constitue ainsiune bonne formalisation des objectifsde la Fed(15).

On voit bien le double impact que laproductivité du travail peut avoir sur lesdécisions de politique monétaire,puisque son rythme de progression aun effet direct sur le potentiel decroissance de l'économie, et donc surl'output gap, qui lui-même a uneinfluence sur l'inflation.

Si, par exemple, les gains structurelsde productivité du travail sont de 2%,alors qu'ils n'étaient auparavant que de1,5% par an, la croissance potentielleen est augmentée d'autant. Sousl'hypothèse d'une population activeprogressant de 1% par an, le taux decroissance potentiel n'est plus de 2,5%par an mais de 3% par an. Ainsi, sil'économie décélère sous ce rythme

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(13) Le solde, soit 7%, représenteles profits après impôts. Le coûtdu travail représente ainsienviron 70% des coût totaux deproduction.(14) Voir “Discretion Versus PolicyRules in Practice” John B. Taylor,Carnegie-Rochester, ConferenceSeries on Public Policy 39, 1993,pp. 195-214.(15) Le Federal Reserve Act de1913 définit ainsi l'objectif de labanque centrale américaine :maintenir la croissance de longterme de la monnaie et du créditen proportion de la croissancepotentielle de la production, afinde promouvoir les objectifs deplein emploi, de stabilité des prix,et modération des taux d'intérêt àlong terme. La Fed a donc bien undouble objectif de croissancemaximale et de faible inflation.

tttt yri βα +Π−Π+Π+= )( **

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(après une période où activité observéeet activité potentielle correspondaient),un output gap va se creuser. Selon larelation de Taylor, la Fed doit alorsassouplir sa politique monétaire, et ced'autant plus que l'existence d'unoutput gap ralentit l'inflation etaccentue son écart à l'objectif.

Le niveau des taux d'intérêt décidépar la Fed est crucial pour l'économie,puisque le coût de l'endettement endépend. Ainsi les taux longs (rendementdes titres d'Etat, rendement desobligations privées, taux hypothécaires)dépendent des taux courts, et leurniveau peut constituer une contraintede financement de l'investissement (enlogement pour les ménages, en capitalet en stocks pour les entreprises). Lescharges d'intérêt auront ainsi un impactsur le revenu disponible des ménages,les marges bénéficiaires des entreprises,et les dépenses publiques(16).

����Le NAIRU

Le NAIRU (Non-AcceleratingInflation Rate of Unemployment) est letaux de chômage qui n'accélère pasl'inflation. Il est habituellement consi-déré comme le taux de chômaged'équilibre d'une économie. Plusieurséconomistes de la Fed(17) se sontpenchés sur le sujet, et leur conclusionest qu'aucune relation n'existe entre,d'une part, un choc de productivité et,d'autre part, le taux de chômaged'équilibre.

En effet, dans le cadre strict du jobsearch(18), les seuls effets d'uneaccélération de la productivité sur letaux de chômage sont transitoires. Altiget Gomme (1998) exposent le raison-nement de façon particulièrementsimple (et amusante). En deux mots, le

choc de productivité est connu par lesentreprises qui proposent alors dessalaires supérieurs à leur niveau initial.Les individus à la recherche d'emploin'ont pas connaissance de l'améliorationde leur productivité et leur salaire deréserve est inchangé. Ainsi, nombred'entre eux acceptent des emplois, et letaux de chômage baisse. Mais dès queles employés reconnaissent leur erreur,ils adoptent un nouveau salaire deréserve, et quittent donc l'entreprise quin'a aucune raison d'augmenter lesalaire, ce dernier incorporant le niveauactuel de la productivité. Le taux dechômage revient alors à son niveauinitial.

Trehan (2003) explore quelquespistes possibles. Par exemple,l'apparition d'internet pourrait avoirfacilité la rencontre des entreprises etdes demandeurs d'emploi. Ainsi, uneprogression de la productivité n'ad'effet ni sur les salaires proposés parles entreprises, ni sur le salaire deréserve des chercheurs d'emploi, maisfacilite simplement leur rencontre.

Il est pourtant possible d'imaginerune relation entre les deux conceptsqui nous intéressent. Envisageons uncadre d'analyse où l'entreprise, dans sadécision d'embaucher, compare le coûtde l'embauche au profit potentiel d'unetelle embauche. Si le coût de l'em-bauche ne se limite pas au salaire qu'ilfaudra verser tous les mois maisincorpore d'autres coûts fixes (commecelui de la formation ou du recru-tement), la progression de la produc-tivité aura bien un effet sur le taux dechômage d'équilibre. En effet, l'accé-lération de la productivité n'aura pasd’impact sur ces coûts fixes, et le coûttotal baissera proportionnellement auprofit total(19).

9 Conjoncture Novembre 2004

(16) Les effets directs et indirectsde la productivité du travail surles finances publiques sontnombreux. Elle a ainsi un effetsur les recettes fiscales vial'augmentation de revenu qui endécoule. Via la relation avecl'inflation, elle a également uneffet, une accélération (ou unedécélération) des prix ayant uneffet différent sur les dépenses etsur les recettes.(17) Voir par exemple “In Searchof the NAIRU”, David Altig andPaul Gomme, EconomicCommentary, Federal ReserveBank of Cleveland, May 1998,and “Productivity Shocks and theUnemployment Rate”, BharatTrehan, Federal Reserve Bank ofSan Francisco Economic Review,2003, pp. 13-27.(18) En deux mots, les individusen chômage ont un salaire deréserve. Sous ce niveau de salaire,ils n'acceptent aucun poste, maisacceptent tout poste avec unsalaire supérieur ou égal à cesalaire de réserve.(19) En effet, si l'ensemble desgains de productivité sontredistribués, une accélération dela productivité devrait se traduirepar une croissance des profits etdes salaires équivalente. C'estainsi bien l'existence de coûtsfixes qui permet de baisser lescoûts totaux proportionnellementaux profits totaux.

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Mais le NAIRU n'est que le résultatde calculs fondés sur des observationsempiriques. Comme nous l'avons vuprécédemment, les gains de produc-tivité contraignent la croissance descoûts unitaires du travail. De ce seul fait,on peut en conclure qu'une accélé-ration de la productivité abaisse leniveau observé du NAIRU…, même si cen'est pas le fait d'une relation directe. Legraphique 1 met parfaitement enlumière cette relation. Il représente letaux de l'inflation (mesuré par leglissement annuel des prix à la consom-mation) en fonction de la différence dutaux de chômage observé à sonéquilibre (mesuré par le NAIRU estimépar l'OCDE). Ainsi le graphique montrequ'un taux de chômage supérieur de 2points de pourcentage à son équilibreétait compatible avec une inflation de5% dans la première période (1964-1983), alors que ce taux n'était que de2,7% sur la seconde période (1983-2003). La droite de régression s'est à lafois déplacée vers le bas et aplatie : larelation entre taux de chômage etinflation n'est plus la même.

Productivité du travailaméricaine : mirage oumiracle ?

A la fin de 1996, les membres de laFed, Alan Greenspan en tête, ontcommencé à évoquer la possibilitéd'une accélération de la productivité.Une controverse a alors commencé.Certains n'y voyaient qu'un effet ducycle, alors que d'autres concluaient àl'émergence d'une "nouvelle écono-mie". Le temps passant, l'accélérationde la productivité s'est matérialiséedans les chiffres, mais le doute quantà sa pérennité n'avait pas disparu.Alors que le rythme annuel decroissance de la productivité du travail(dans le secteur productif) a été de1,6% par an en moyenne entre 1990 et1996, celle-ci a gagné 2,6% par anentre 1996 et 2000. C'est alors que les Cassandres ont prédit que laproductivité chuterait de façonmarquée lorsque l'économie ralen-tirait. L'économie ralentit, traversantmême une récession en 2001, mais la productivité ne décéléra pas,progressant de 2,6% sur l'année. LesCassandres nous prédirent alors quenous assisterions à la chute de laproductivité avec le retour de la crois-sance. Et, en 2002, lorsque lacroissance revint, la productivité dutravail dans le secteur non agricoleaugmenta de 4,3% pour accélérer à4,5% en 2003 ! En deux ans, laproductivité a ainsi fait un bond de9%. Même avant le ralentissement des années 1970, jamais une telleperformance n'avait été enregistrée.Aujourd'hui, les Cassandres nousannoncent que l'inévitable ralen-tissement est pour bientôt, la"maturation" de la reprise entraînant

10 Conjoncture Novembre 2004

(20) Au début des années 1960,même si les performances suiventles même tendances, le secteurnon agricole est un peu moinsdynamique que le secteurproductif dans son ensemble.L'écart s'est estompé au cours desannées pour être quasi nulaujourd'hui. Ceci illustre la chutedes effectifs agricoles, quireprésentaient un peu plus de 8%de l'emploi total (données del'enquête menée par le BLS auprèsdes ménages) en 1960 contremoins de 2% en 2003.

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un rythme moins soutenu de l'activité,alors même que les embauchesaccéléreraient. Effectivement, lesdonnées trimestrielles illustrent unedécélération. Ainsi, alors que laproductivité du travail, dans le secteurproductif, a crû de 6% par trimestreen moyenne au deuxième semestre2003 (données annualisées), ce rythmeest retombé à 3,8% au premiersemestre 2004 et à 1,9% au troisièmetrimestre 2004. Sous l'hypothèse d'unrythme de croissance identique à celui du deuxième semestre, la haussepour 2004 resterait solide, à 4% enmoyenne annuelle et assurerait d'oreset déjà 0,8 point de croissance pour2005.

Les années 1970 : la fin de laproductivité ?

L'ensemble des rapports statistiquesmet en valeur le même profil : les gainsde productivité, qui étaient solidesdans les années 1960, ont ralenti dansla deuxième moitié des années 1970,pour réaccélérer dans la deuxièmemoitié des années 1990 (cf. graphique2). Les performances du secteur nonagricole ont suivi les même évolutionsque celles du secteur productif dansson ensemble(20). Le détail des chiffres(cf. graphique 3) semble montrer que lesecteur manufacturier a nettementmoins souffert que le reste de l'éco-nomie au cours des années 1970,retrouvant très rapidement un rythmesensiblement équivalant à celui desannées 1960. De plus, le secteurmanufacturier semble être à la sourcede l'accélération de la productivité dutravail à la fin des années 1990 auxEtats-Unis.

����Les services à la source duproblème ?

Le ralentissement structurel desgains de productivité dans les années1970 serait ainsi le fait du secteur nonmanufacturier, ce qui tendrait à validerl'hypothèse de William J. Baumol, selonqui les gains de productivité du travail

11 Conjoncture Novembre 2004

(20) Voir page 10.

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seraient moins probables dans lesservices que dans les industriesproduisant des biens, pour des raisonsinhérentes à la nature des services(21). Ilest difficile d'apporter une conclusiondéfinitive puisqu'il n'existe pas dedonnées couvrant le secteur desservices, ou plus généralement lesecteur non manufacturier.

Néanmoins, les données américainesétant très riches, il est possible dereconstruire des séries. Une premièreméthode consiste à se servir desdonnées trimestrielles pour le secteurproductif et le secteur manufacturier.En pondérant les données de ce dernierpar son poids dans le PIB, on peut ainsi calculer la contribution de laproductivité manufacturière aux per-formances du secteur productif. Ilsuffit alors de reconstituer une sériepour le secteur non manufacturiergrâce à son poids dans le secteurproductif.

Une seconde méthode est d'utiliserles données fournies par le Bureau ofEconomic Analysis (BEA, l'agence

statistique du ministère américain duCommerce) pour la valeur ajoutée parsecteur, son déflateur, et l'évolution deseffectifs engagés dans la production enéquivalent temps plein(22). Le graphique4 présente les résultats de ces deuxcalculs.

Il saute aux yeux que lesestimations diffèrent énormémentd'une méthode à l'autre. L'explicationest également l'une des clés duproblème du "mal de Baumol". Prenonsl'exemple d'une usine produisant desvoitures. Au début de la période, cetteusine externalise une très faible partde ses activités : elle emploie descomptables et des chefs cuisiniers pourla cantine. Puis elle décide derationaliser sa production, de se"recentrer sur son métier de base". Lacomptabilité est alors confiée à uncabinet extérieur, et le réfectoire gérépar un groupe de restaurationd'entreprise. Ainsi, alors que l'usinefournit le même nombre de véhicules,ses effectifs ont été réduits signi-ficativement : sa productivité a bondi.En revanche, au niveau macro-économique, il ne peut y avoir de gainsde productivité (sous l'hypothèse quele nombre de comptables est le mêmeavant et après externalisation), puisquele nombre de véhicules produits est lemême et que celui des personnesemployées est également inchangé. Laproductivité du cabinet comptable etdu groupe de restauration d'entreprisedoit donc avoir baissé. Ainsi, alors quela productivité du travail connaîtapparemment une hausse brutale, celle du reste de l'économie enregistre une baisse marquée. Lesgains de productivité sont ainsi"artificiellement" imputés au secteurmanufacturier.

12 Conjoncture Novembre 2004

(21) “Macroeconomics ofUnbalanced Growth: The Anatomyof Urban Crises”, William J.Baumol, American EconomicReview 57, no. 3, June 1967,pp. 415-26.(22) Les deux premières sontpubliées par le BEA pour lesecteur privé d'une part, et lesecteur manufacturier d'autrepart. Nous obtenons la valeurajoutée du secteur nonmanufacturier par solde, etutilisons l'indice des prix à laconsommation des servicescomme déflateur. Pour l'emploi, leBEA fournit trois séries pourchaque secteur de l'économie : lenombre total d'employés, lenombre d'employés en équivalenttemps plein et le nombred'employés engagés dans laproduction. Grâce à un calculsimple, nous chiffrons ainsi lenombre d'employés engagés dansla production en équivalent tempsplein.

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Certains s'interrogent alors sur leralentissement de la productivité dutravail du secteur non manufacturierdans les années 1970. En effet, si labaisse de régime résulte du processusde rationalisation de la productionmanufacturière, la faible productivitédes services ne serait qu'apparente(23).Nous n'avons rien à objecter à ce raisonnement. En revanche, l'hypo-thèse qui pourrait suivre, à savoir que sila productivité des services a été sous-estimée c'est la productivité du travailde l'ensemble de l'économie qui l'a été, ne peut être validée. On peutseulement conclure qu'une partie des gains de productivité du travail est attribuée à tort au secteurmanufacturier.

����Un simple problème de mesurestatistique ?

La raison fondamentale de cetteerreur de ventilation est le fait qu'estutilisé le concept de valeur ajoutée etnon pas de production. Reprenonsnotre exemple du cabinet comptable.S'il se contente de gérer la comptabilitédes sociétés, il ne crée aucune valeurajoutée : les livres de compte, bienqu'indispensables, n'augmentent enrien la valeur ou la qualité d'uneautomobile. Ainsi, lorsqu'il s'agit demesurer la productivité d'un sous-secteur de l'économie, il ne faut pasutiliser sa contribution à la valeurajoutée nationale, mais bien saproduction.

Mais la mesure de la production deservices est très difficile. Ainsi, notrecabinet comptable ne produit rien detangible. Comment peut-on chiffrer la"production" d'une telle entreprise ? Onpourrait envisager de compter le

nombre de factures traitées, et utiliserle prix de facturation d'une heure detravail d'un comptable comme défla-teur. D'autres secteurs de l'économiesemblent encore plus délicats à traiter.Voici quelques exemples empruntés àEdwin R. Dean(24) : la “production” d'ungroupe de jazz est-elle la même que lespersonnes présentes dans le publicsoient dix ou cent ? La “production”d'un médecin est-elle la même que lepatient suive ou ne suive pas sesprescriptions ?

Ces exemples illustrent la difficultérencontrée par les comptablesnationaux. Pour la dépasser, ils ontdonc mis en place des méthodes deprévision, qui en viennent, malheu-reusement, à sous-estimer les gains deproductivité du travail. Ainsi, selon Lucy P. Eldridge(25), 14% de laproduction du secteur privé est estiméeà partir des données existantes sur lesfacteurs de production. En résumé,connaissant les horaires des salariés des secteurs, on évalue la productionqui en découle. Ainsi, la productivité du travail de cette partie de l'économieenregistre, systématiquement et pardéfinition, une croissance nulle de laproductivité. Par ailleurs, comme lemontre le BLS(26), les erreurs d'esti-mation de la croissance réelle de laproduction de services peuvent égale-ment venir du déflateur utilisé. Ainsi,pour la construction et le secteur del'assurance vie par exemple, le déflateurde la production est extrapolé à partir de l'évolution du coût desfacteurs. Par construction, il ne peut yavoir de gains de productivité dutravail, et pas plus d'évolution des coûtsunitaires de production, si on utilise,par exemple, les salaires pour déflaterla production.

13 Conjoncture Novembre 2004

(23) Si on considère que non pasune usine mais l'ensemble dusecteur automobile externalise sacomptabilité, il doit exister desgains de productivité pourl'ensemble de l'économie. En effet,le processus correspond à unerecherche de réduction des coûts,qui ne peut exister que si lecabinet comptable réalise untravail de même qualité maismoins onéreux. Le nombre totalde comptables dans l'économiedoit ainsi logiquement reculer.Comme la production de véhiculesreste la même, des gains deproductivité du travail sontenregistrés, mais ils sont imputéspour leur totalité au secteurmanufacturier, alors même queles cabinets comptables sont à lasource de la rationalisation de laproduction.(24) "The accuracy of the BLSproductivity measures", Edwin R.Dean, BLS, Monthly Labor Review,Février 1999.(25) Voir note 8, page 4.(26) "Possible measurement biasin aggregate productivity growth",William Gullickson and Michael J.Harper, BLS, Monthly LaborReview, Février 1999.

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Un article de la Fed(27) montre que,d'après les chiffres officiels, laproductivité du travail aurait éténégative dans la plupart des industriesde services entre 1977 et 1994. Lesauteurs, doutant du bien-fondé de cesrésultats, calculent ainsi que, sousl'hypothèse d'une croissance nulle (etnon pas d'un recul) de la productivitédu travail dans ces secteurs, lacroissance (en moyenne annuelle) desgains de productivité de l'ensemble del'économie aurait été sous-estimée de0,5 point par an. Ces calculs ont étérepris par le BLS(28). Sur la base dedonnées reconstruites à partir desInputs-Outputs Accounts du BEA,notamment, les auteurs concluent que la croissance annuelle de laproductivité du travail pourrait avoir étésous-estimée de 0,41%, si les secteurs àproductivité négative avaient en faitenregistré une stabilité de leur pro-ductivité, et de 0,83%, si les secteurs àproductivité négative avaient en faitenregistré une croissance de 1% par ande leur productivité. Notons que cesconclusions quant à la sous-estimationde la productivité ne découlent pas deleur mauvaise ventilation par secteur,mais bien de la mauvaise estimation dela production réelle de services. Ellessont ainsi plus que crédibles(29).

����Pourquoi un tel ralentissementdans les années 1970 ?

En résumé, il semble bien que leralentissement de la productivité desservices n'a pas été aussi marqué queles chiffres agrégés le suggèrent. Nonseulement leur production réelle acertainement été sous-estimée, maisune partie de leurs gains deproductivité a été "confisquée" par le

secteur manufacturier. Il ne faut doncpas chercher dans ce secteur particulierde l'économie l'explication du ralen-tissement des gains de productivité aucours des années 1970. Quelques pistesde réflexion existent(30) :

- Les prix de l'énergie. Cette piste a étéétudiée dans les années 1970, du faitde la simultanéité du premier chocpétrolier et du ralentissement de laproductivité du travail. La principaleréserve est que la productivité dutravail n'a que marginalement bénéficiéde la chute des prix du pétrole qui estintervenue par la suite. On peut,toutefois, envisager qu'un tel événe-ment peut constituer un catalyseur.

- Sclérose institutionnelle. Plusieursauteurs montrent qu'en cas de chocexterne, comme le premier choc pétro-lier, la réponse institutionnelle peut êtremal adaptée. On peut ainsi imaginerque, craignant que les entreprises neréduisent leurs effectifs afin decompenser la hausse de la factureénergétique, un gouvernement décidede durcir les règles de licenciement. Lesconséquences en cascade peuventconduire à une inflation galopante (lesentreprises devant répercuter la haussede leurs coûts sur leurs prix de vente,puisque aucun gain de productivité nepermet de les contraindre) alors mêmeque le taux de chômage s'envole (lesentreprises, en sureffectif, n'embau-chant pas les nouveaux entrés sur lemarché du travail). On peut égalementimaginer qu'afin de préserver le pouvoird'achat des ménages les plus défavorisés,un gouvernement décide d'augmenterle salaire minimum plus rapidement quene progresse le salaire moyen. Il existealors une incitation à embaucher de la

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(27) "Decomposition ofProductivity and unit costs", LarrySlifman and Carol A. Corrado,Board of Governors of the FederalReserve System, Occasional StaffStudies, Novembre 1996.(28) "National ProductivityStatistics", Roy H. Webb, FederalReserve Bank of Richmond,Economic Quarterly, vol. 84/,1Hiver 1998, pp. 45-64.(29) Le problème lié à la mesurede la production réelle desservices est de plus en plusimportant, à mesure que leur partdans l'économie s'accroît. Ainsi,alors qu'au début des années1960, il est estimé que 43% du PIBétait facilement mesurable, ceratio est tombé à 30% au milieudes années 1990. Faisonsl'hypothèse suivante : le secteur oùla mesure est correcte enregistredes gains de productivité de 2,5%l'an, alors que les autres secteurs,tout en enregistrant les mêmesperformances, voient leurs gainsde productivité sous-estimés parles comptes nationaux. Dans cecas, alors que les gains deproductivité de l'ensemble del'économie sont de 2,5% l'an, ilssont estimés n'avoir augmentéque de 1,08% par an dans lesannées 1960, pour tomber à+0,75% au milieu des années1990 [Voir "Productivity, R&D,and the Data Constraint", ZviGriliches, American EconomicReview, vol. 84, Mars 1994, pp.1-24]. Néanmoins, le BLS amélioresans cesse ces données, et on peutpenser que la sous-estimation dela productivité du travail auxEtats-Unis est de moins en moinsimportante.(30) Voir note 28.

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main-d'œuvre non qualifiée, à faibleproductivité du travail. La part de lamain-d'œuvre non qualifiée dans l'em-ploi total croît, et amène une baisse dela productivité du travail de l'ensemblede l'économie.

- Progrès technique et apprentissage.Plus la nouvelle technique de pro-duction est complexe, plus le tempsnécessaire à la formation de la main-d'œuvre sera longue. Ainsi, un peutenvisager qu'un progrès techniqueconduit d'abord à une chute de laproductivité du travail (une partie deshoraires étant consacrée à la formationet non à la production), pour ensuiteamener des gains de productivité, aufur et à mesure que la maîtrise de latechnique se diffuse.

Nous n'estimons pas détenir laréponse à la question du ralentissementdes gains de productivité dans lesannées 1970. Toutefois, l'inflation noussemble être centrale. Dans la premièrepartie de cet article, nous avons exposéle lien entre productivité et inflation. Lapremière permettant, notamment, uncontrôle des coûts unitaires, l'inflations'en trouve plus faible. Peut-onenvisager une relation inverse, uneinflation galopante conduisant à uneréduction des gains de productivité ?On peut ainsi envisager qu'une inflationtrop importante conduise à une dis-torsion du mécanisme de fixation desprix, induisant une moindre efficacitépour l'ensemble de l'économie. A titred'exemple, l'évolution du salaire horaireréel dans le secteur manufacturier a étéparticulièrement erratique dans lesannées 1970, son écart-type passant de0,7% dans les années 1960 à 2,3%, pourretomber à 1,7% dans les années 1980et à 0,9% entre 1990 et 2003. Il est

difficile de déterminer avec certitudeune causalité simple et constante. Enrevanche, comme le montre le graphi-que 5, il semble bien que la poussée del'inflation ait précédé le ralentissementde la productivité.

De façon plus certaine, on peutavancer que les perspectives n'étaientpas stables dans les années 1970.Comme le montre le graphique 6, les

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anticipations d'inflation des ménagesont connu une évolution très erratiquedurant cette décennie. Une telle ins-tabilité n'a certainement pas manquéd'avoir des conséquences sur les déci-sions d'investissement et de consom-mation, compliquant les décisionsd'investissement des entreprises. Lors-qu'il est difficile de prévoir quelle serala demande réelle des ménages, il estainsi quasi impossible de planifier lesmoyens de production (investissementset effectifs) à mettre en place. Dans ces conditions, on imagine commentl'inflation perturbe l'efficacité d'uneéconomie. Cette intuition semble parailleurs être étayée par le très netredressement de la productivité dutravail dans le secteur manufacturieraprès l'arrivée de Paul A. Volcker à latête de la Fed qui a réussi, encombattant l'inflation, à enclencherune croissance plus stable aux Etats-Unis. Ainsi, alors que les deux cyclesd'expansion ont duré respectivementdix-huit et vingt et un trimestres dansles années 1970, le cycle d'expansiondes années 1980 a duré trente-cinq

trimestres et celui des années 1990trente-sept trimestres, Alan Greenspans'avérant un successeur plus que digne,en matière de maîtrise de l'inflation.

Des années 1970 aux années1990

Tenter de connaître les raisons à lasource du ralentissement de la pro-ductivité du travail dans les années1970 n'est pas inutile. S'il apparaît, parexemple, que les poussées infla-tionnistes en sont la cause, au moinspartiellement, l'hypothèse que lesannées 1990 ont vu une accélérationstructurelle de la productivité pourraitgagner en crédibilité, la politique decombat de l'inflation inaugurée parPaul A. Volcker ayant porté ses fruits.

����Deux décennies identiques ?

Si la cause en est toute autre, lesconclusions pourraient égalementl'être. L'un des grands combattants dela thèse "optimiste" d'une accélérationstructurelle des gains de la productivitédans les années 1990, Robert J. Gordon,a ainsi longtemps soutenu qu'il fallaitprendre davantage de recul dansl'analyse. Selon lui, il ne faut pasopposer la décennie 70 à la décennie90, mais la période 1928-1950 au restede l'histoire(31). Ainsi, après unecroissance faible au cours du XIXe et audébut du XXe siècle, la productivité aconnu une forte accélération entre1928 et 1950, liée à de formidablesprogrès techniques – tels que le moteurà explosion, l'électricité, les techno-logies de la communication et lesdivertissements de masse (radio, ciné-ma, télévision) – pour ensuite retrouver

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(31) “Interpreting the 'One BigWave' in US long-termproductivity growth”, Robert J.Gordon, National Bureau ofEconomic Analysis, Working Papern° w7752, Juin 2000.

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sa tendance initiale. Gordon conclutdonc que le ralentissement des années1970 est durable, puisqu'il traduit unretour à la "normale", et que l'accé-lération des années 1990 n'est queponctuelle, et n'est donc pas appelée àdurer. Gordon(32) analyse ainsi cetteaccélération comme le seul fait dusecteur de la haute technologie, niantla diffusion aux autres secteurs.

Comme nous l'avons vu précédemment,l'accélération de la productivité a d'abordété enregistrée dans le secteur manu-facturier. Si l’on plonge davantage dans ledétail, cette évolution a, en fait, débutédans le sous-secteur des biens durables, et plus précisément dans celui des hautes technologies (cf. graphique 7). Englissement annuel, la croissance de laproductivité du travail de ce secteur estainsi passée d'un peu plus de 2% à la findes années 1980 à plus de 45% en 1996.En 1999, la productivité du travail avait étémultipliée par 15 en dix ans ! Les donnéesde productivité multifacteurs du BLS (cf. tableau 1) montrent ainsi que lacontribution des hautes technologies auxgains de productivité de l'économieproductive (hors agriculture) est passée de0,1 point en moyenne entre 1973 et 1979à 0,7 point entre 1995 et 2001. Laproductivité multifacteurs dans l'industriedes équipements industriels (qui comprendles ordinateurs) a ainsi vu sa croissanceannuelle passer de +1,0% dans les années1970 à +4,5% par an dans les années1990, avec une moyenne de +5,6% en2000-2001. Pour l'industrie des équi-pements électriques (qui comprend lessemi-conducteurs), la croissance annuellemoyenne de la productivité multifacteurs abondi de +1,7% dans les années 1970 à+6,3% dans les années 1990, avec unemoyenne de +7,6% en 2000-2001 (cf.tableau 2).

����La productivité a bien accélérédans les années 1990

Pour certains, cette accélération estpartiellement un trompe-l'œil. L'argu-ment tient à la méthode utilisée pourdéflater la production. En effet, pour lesordinateurs, un indice intégrant la qualité est utilisé. Imaginons unordinateur du milieu des années 1980

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(32) "Has the 'New Economy'Rendered the ProductivitySlowdown Obsolete?", Robert J.Gordon, Northwestern University,Juin 1999.

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et un ordinateur d'aujourd'hui, dont leprix de vente, en dollars constants, est lemême. Si la puissance de calcul dudernier est trois fois supérieure à celledu premier, un indice de prix intégrantla qualité établira le prix de l'ordinateurd'aujourd'hui comme trois fois inférieurà celui de l'ordinateur d'hier, aug-mentant d'autant la production réelled'aujourd'hui. Bien sûr, ces calculs sontune abstraction, et peuvent semblerconduire à une surestimation de lacroissance réelle. Mais, même dans lavie de tous les jours, cette méthodetrouve une justification : les ordinateursprésents aujourd'hui dans les foyers ontune puissance de calcul certainementsupérieure à celle des premiers ordi-nateurs, que seul le Pentagone avait lesmoyens d’acquérir à l'époque.

Au-delà de cette discussion, leschiffres semblent contredire lespremières analyses de Gordon. Ainsi, etsi effectivement l'accélération de laproductivité du travail est avant toutenregistrée dans le secteur des hautestechnologies, les autres secteurs de l'économie ne connaissent pas

aujourd'hui de performances moinsbonnes que celles de l'immédiat après-guerre. Les données du tableau 3résument les performances de laproductivité du travail dans le secteurmanufacturier (calculées à partir desdonnées de la productivité multi-facteurs). Ces chiffres confirment quel'accélération a été très marquée pourl'industrie des hautes technologies.Mais elles indiquent aussi que lamoyenne de croissance pour 1995-2001 est sensiblement équivalente àcelle de la période 1950-73. Parailleurs, il semble bien que les gains deproductivité aient accéléré au cours desdernières années pour les biensdurables hors hautes technologies, etpour les biens non durables dans unemoindre mesure.

Au total, les performances de laproductivité du travail ne sont pasmoins bonnes aujourd'hui qu'elles nel'étaient avant le ralentissement desannées 1970 dans les secteurs autresque celui des nouvelles technologies.Par ailleurs, le comportement desdonnées au cours des années 1990semble bien mettre en valeur unediffusion des gains de productivité deshautes technologies, vers la productiond'autres biens durables, et vers les biensnon durables.

����Diffusion des gains deproductivité

Peu de données sont disponiblespour les services. Néanmoins, le BLS enpublie quelques-unes. Les graphiques 8à 10 présentent les performances de laproductivité par employé en fonctionde la part de chaque secteur dansl'emploi non agricole, avec l'ensembledes données disponibles(33), puis les

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(33) Les données de productivitépar employé fournies par le BLScouvrent 30% de l'emploi nonagricole, avec principalement lessecteurs manufacturier et minier,ainsi que le commerce de gros etde détail, quelques secteurs del'information, la banque de détailet les activités postales.

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secteurs non manufacturier etmanufacturier. Les droites de régressionmontrent que, dans l'ensemble, laproductivité par employé était en1996-2001 plus rapide qu'en 1990-1995 à part inchangée de l'emploi dessecteurs par rapport au total deseffectifs de l'économie. Ainsi, enpondérant les gains de productivité parla part de chaque secteur dans l'emploitotal, les gains annuels de productivitépar employé ont accéléré de +3,3% en1990-95 à +3,8% en 1996-2001.

Dans le secteur non manufacturier,certains sous-secteurs connaissent desperformances particulièrement solides.C'est ainsi le cas des boutiques d'élec-tronique, dont la croissance moyennede la productivité par employé était de+12,3% par an dans la première moitiédes années 1990 et de +14,6% par anpar la suite. Il n'y a rien d'étonnant àcela, avec le développement de l'infor-matique domestique, suite à la baissedes prix et au développement d'appli-cations spécifiques (jeux, multi-média…). Le secteur de la publicationenregistre également des bonnesperformances, avec une accélération de+3,9% à +5,1% par entre les deuxpériodes. Ces derniers chiffres semblentconfirmer la thèse d'une diffusion desgains de productivité des industriesproductrices d'informatique aux sec-teurs utilisateurs. Ainsi, les détaillantsde l'habillement, pour lesquels l'infor-matique a permis une meilleure gestiondes stocks, connaissaient des gainsannuels de productivité par employé de+4,5% au début des années 1990 et de+4,9% entre 1996 et 2001. Cet effet est d'ailleurs illustré par la baisse spec-taculaire des ratios de stocks sur ventesdans le commerce de détail, passés de1,67 en 1992 à 1,56 en 2003.

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Il semble donc bien que, après unfort ralentissement dans les années1970, la productivité américaine aretrouvé un second souffle dans lesannées 1990. Les très rapides progrèstechniques dans le secteur des hautestechnologies ont ainsi succédé auchemin de fer ou à l'électricité commesource d'accélération des gains deproductivité. Actuellement, les Etats-Unis connaissent des gains deproductivité très rapides, mais combiende temps cela peut-il durer ? Ladiffusion des gains de productivité deshautes technologies au reste del'économie n'a pas encore pris fin, alorsque les effets d'apprentissage (del'utilisation des nouveaux équipe-ments) promet de prolonger la période"dorée". D'un point de vue macro-économique, les entreprises améri-caines mettent aujourd'hui les gains deproductivité au centre de leursdécisions. Elles ont inauguré unepolitique de contrôle drastique descoûts au lendemain de l'éclatement dela bulle sur le marché actions, et ellessemblent décidées à ne pas changer destratégie, comme l'indiquent le niveaude l'autofinancement ou encore larelative faiblesse des créations d'emploiau vu de la croissance de la production.Le dynamisme retrouvé des dépensesd'investissement en hautes techno-logies (entre le début de 2003 et lemilieu de 2004, les dépenses entechnologies de l'information ontprogressé à un rythme annualisé moyende 18% par trimestre) est une autresource d'optimisme. Certains analystesdemeurent dubitatifs quant auxperspectives à moyen terme de laproductivité du travail aux Etats-Unis.Nous ne faisons pas partie de ceux-là.Robert J. Gordon(34) n'en fait plus non

plus partie : il a récemment conclu(35)

que les gains de productivité devraientse maintenir aux alentours de 2,5% paran dans les deux prochaines décennies,amenant la croissance potentielleaméricaine à 3,3%.

Alexandra [email protected]

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(34) En effet, Gordon est revenusur sa thèse initiale, suite auxtravaux sur panels de secteursmontrant que l'utilisation deshautes technologies, et passeulement leur production, était àla source de gains de productivité.Voir notamment "The resurgenceof growth in the late 1990's: isinformation technology thestory?", Stephen D. Oliner andDaniel E. Sichel, Board ofGovernors of the Federal System,Finance and EconomicsDiscussion Series 2000-20, Mai2000.(35) "Exploding ProductivityGrowth: Context, Causes, andImplications", Robert J. Gordon,Brookings Paper on EconomicActivity n° 2, Février 2003, pp.207-298.

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