La prévention des difficultés des entreprises : étude comparative ...

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Toulon, le 4 juin 2013 La prévention des difficultés des entreprises Étude comparative entre le droit français et le droit marocain Thèse pour le doctorat en droit privé Présentée et soutenue par Nahid LYAZAMI Directeur de recherche : Madame Anne-Marie ROMANI, Maitre de conférences à l’Université du Sud Toulon-Var Jury Madame Marie LAMOUREUX, Professeur à l’Université de Haute-Alsace Madame Eva MOUIAL BASSILANA, Professeur à l’Université du sud Toulon-Var Monsieur Moulay Mohamed RHALIB, Professeur à l’Université de Tanger - Maroc Madame Anne-Marie ROMANI, Maitre de conférences à l’Université du sud Toulon-Var Monsieur Abdelaziz SQUALLI, Professeur à l’Université de Fès - Maroc Université du Sud Toulon – Var Faculté de Droit École doctorale « Civilisations et Sociétés euro-méditerranéennes et comparées » Centre de Droit et de Politique Comparés Jean-Claude Escarras (C.N.R.S.-U.M.R.7318)

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  • Toulon, le 4 juin 2013

    La prvention des difficults des entreprises

    tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Thse pour le doctorat en droit priv Prsente et soutenue par

    Nahid LYAZAMI

    Directeur de recherche : Madame Anne-Marie ROMANI, Maitre de confrences lUniversit du Sud Toulon-Var

    Jury

    Madame Marie LAMOUREUX, Professeur lUniversit de Haute-Alsace

    Madame Eva MOUIAL BASSILANA, Professeur lUniversit du sud Toulon-Var

    Monsieur Moulay Mohamed RHALIB, Professeur lUniversit de Tanger - Maroc

    Madame Anne-Marie ROMANI, Maitre de confrences lUniversit du sud Toulon-Var

    Monsieur Abdelaziz SQUALLI, Professeur lUniversit de Fs - Maroc

    Universit du Sud Toulon Var

    Facult de Droit

    cole doctorale Civilisations et Socits euro-mditerranennes et compares

    Centre de Droit et de Politique Compars Jean-Claude Escarras (C.N.R.S.-U.M.R.7318)

  • Ddicace

    mes parents, mon mari, ma fille bien aime Lina,

    mes frres et toute ma famille, je consacre cet humble

    travail.

  • Remerciements

    Je voudrais exprimer mes vifs remerciements et ma profonde gratitude

    aux personnes qui mont paul et mont ctoy tout au long de ce

    devoir, et qui ont le mrite tous les loges.

    Je madresse en particulier Madame Anne-Marie Romani pour avoir

    accept tre mon professeur rfrant, merci de vous tre autant

    investie, de mavoir fait bnficier de vos orientations les plus

    prcieuses.

    Je vous prie de trouver ici, lexpression de ma grande admiration. Votre

    prsence, Madame, est un gage de qualit donn cette thse.

    Ma reconnaissance va galement Monsieur Moulay Mohamed Rhalib

    professeur lUniversit Abdelmalek Assaidi, Tanger-Maroc, dont les

    remarques et orientations mont apport assurance et motivation dans

    les voies suivre dans la mise en uvre de cette recherche.

    Je souhaite aussi manifester ma profonde reconnaissance ceux qui

    mont permis de prendre connaissance avec la ralit et le climat des

    affaires aux Maroc, il sagit de Monsieur Khalid Benkirane, Prsident du

    tribunal de commerce de Tanger.

    - Monsieur Mohamed El Bakkali, Prsident du centre international de

    mdiation et darbitrage Tanger.

    - Monsieur Abdalilah Boulaich, Professeur lUniversit Abdelmalek

    Assaidi. Tanger.

    - Monsieur Achraf Lyazami, Directeur de la banque Attijari Wafabank.

    - Monsieur Essaghouani Noureddine, Responsable dans le centre des

    affaires au groupe Attijari Wafabank.

    Qui nont pas hsit me fournir des conseils utiles et pratiques.

    Merci pour votre estimable collaboration.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

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    Principaux sigles et

    abrviations

    ACAM Amlioration du climat des affaires au Maroc

    ADR Alternative dispute rsolution

    AGS Association pour la gestion du rgime des garanties des crances des salaris

    Al Alina

    AMF Autorit des marchs financiers

    AMI Agence Marocaine de lInvestissement

    AMSED Association Marocaine de Soutien lEntreprise en Difficult

    BAM Banque Al Maghreb

    BCP Banque Centrale Populaire

    BODACC Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales

    BRDA Bulletin rapide de droit des affaires

    BULL.CIV Bulletin civil

    C.A cour dappel

    C.COM Code de commerce

    CAC Commissaire aux comptes

    CASS Cassation

    CASS.COM Cassation, chambre commerciale

    CCG Caisse centrale de garantie

    CCIP Chambre de Commerce et dIndustrie de Paris

    CCSF Commission des chefs de services financiers

    CDVM Conseil dontologique des valeurs mobilires

    CEDH Cour Europenne des Droits de lHomme

    CEMA Centre Euro-mditerranen de Mdiation et dArbitrage

    CGEM Confdration Gnrale des Entreprises au Maroc

    CGI Code gnral des impts

    CGNC Code gnral de normalisation comptable

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    CGPME Confdration Gnrale des Petites et Moyennes Entreprises

    CGT Confdration Gnrale du Travail

    CH.CIV Chambre civile

    CH.COM Chambre commerciale

    CH.CRIM Chambre criminelle

    CH.SOC Chambre sociale

    CIMAR Centre International de Mdiation et dArbitrage de Rabat.

    CIMAT Centre International de Mdiation et dArbitrage de Tanger

    CIMR Caisse Interprofessionnelle Marocaine de Retraite

    CIRI Comit Interministriel de Restructuration Industrielle

    CJD Centre des jeunes dirigeants

    CJUE Cour de justice de lunion europenne

    CMEJ Centre marocain des tudes juridiques

    CNEA Comit national de lenvironnement des affaires

    CNG Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce

    CNSS Caisse Nationale de Scurit Sociale

    COCHEVE Commission des chefs des services financiers et des

    reprsentants des organismes de scurit sociale

    CODEFI Comit dpartemental dexamen des problmes de financement des entreprises

    COJ Code de lorganisation judiciaire

    COMI Center of mains intrts (centre des intrts principaux du dbiteur)

    CORRI Comit rgional de restructuration industrielle

    CPC Compte produit et charges

    CRI Centre Rgional dInvestissement

    DCC Dahir du code de commerce

    DECM Directeur des tudes de la coopration et de la modernisation

    DOC Dahir des obligations et des contrats

    EIRL Entrepreneur individuel responsabilit limite

    ENM cole nationale de la magistrature

    EURL Entrepreneur unipersonnel responsabilit limite

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    FBF La fdration bancaire franaise

    FCGD Fonds collectif de garantie des dpts

    FDES Fonds pour le dveloppement conomique et social

    HCP Haut Commissariat au Plan

    ISCAE Institut Suprieur de Commerce et dAdministration des Entreprises

    JCP Jurisclasseur priodique

    JO Journal officiel

    JORF Journal officiel de la rpublique franaise

    LBO Leveraged Buy-Out

    MARC Modes alternatifs de rglement des conflits

    MARLC Modes alternatifs de rglement des litiges commerciaux

    MENA Moyen Orient et Afrique du Nord

    MRE Marocains Rsidents lEtranger.

    NCPC Nouveau code de procdure civile

    NSC Nouveau systme comptable

    OCP Office Chrifienne du Phosphate

    OHADA Organisation pour lHarmonisation en Afrique du Droit des Affaires.

    OP. Cite Option cite

    PRO.COLL Procdures collectives

    RA Rglement amiable

    RC Rglement communautaire

    RD Banc. Fin Revue de droit bancaire et financier

    RJDA Revue juridique du droit des affaires

    RONC Rapport sur lobservation des normes et des codes

    RTD Revue trimestrielle du droit commerciale et droit conomique

    SCA Socit en commandite par action

    SCS Socit en commandite simple

    SECT Section

    SFA Sauvegarde financire acclre

    SFI Socit financire internationale

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    SNC Socit en Nom Collectif

    SPP Suspension provisoire des poursuites

    SUIV Suivant

    TCM Tires de confiance de la mdiation

    TFUE Trait sur le fonctionnement de lunion europenne

    TGI Tribunal de grande instance

    TPI Tribunal de premire instance

    Tr.Com Tribunal de commerce

    URSSAF Unions de Recouvrement des cotisations de Scurit Sociale et dAllocations Familiales

    USAID United States Agency for International Development (Agence Amricaine pour le Dveloppement International)

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    Page 8

    Sommaire

    Principaux sigles et abrviations ........................................................................................................................ 4

    Sommaire ........................................................................................................................................................... 8

    Introduction ..................................................................................................................................................... 9

    Premire partie : Des cadres normatifs divergents ..................................................................................... 37

    Titre1 : Lart de prvenir : une mthode dinspiration franaise ......................................................................... 44 Chapitre1 : Aperu sur la stratgie danticipation .......................................................................................... 50 Chapitre2 : Lattractivit de la procdure de sauvegarde : un mcanisme mconnu par le droit marocain ...................................................................................................................................................................... 153 Conclusion titre premier ............................................................................................................................... 184

    Titre 2 : Le modle franais : inadquation aux ralits marocaines ................................................................ 186 Chapitre1 : La mconnaissance du contexte socio-conomique marocain ................................................. 188 Chapitre2 : Les failles constates dans les textes de loi marocains ............................................................. 221 Chapitre 3 : Absence des mesures daccompagnement du texte de loi ....................................................... 237 Conclusion deuxime titre ............................................................................................................................ 254

    Conclusion premire partie ............................................................................................................................... 256

    Seconde partie : La ncessit dune rforme .................................................................................................. 259

    Titre1 : Amlioration de lefficacit du dispositif lgal en vigueur .................................................................... 265 Chapitre1 : Solutions novatrices issues de lexprience marocaine ............................................................. 267 Chapitre2 : De fortes incitations issues de lexprience franaise ............................................................... 331 Conclusion premier titre ............................................................................................................................... 357

    Titre 2 : Des ajustements favorisant la bonne application de la procdure prventive .................................... 359 Chapitre1 : Questions spcifiques aborder en droit marocain .................................................................. 361 Chapitre2 : Diligences mettre en uvre par le droit franais ................................................................... 382 Conclusion deuxime titre ............................................................................................................................ 405

    Conclusion deuxime partie .............................................................................................................................. 407

    Conclusion gnrale ....................................................................................................................................... 410

    Table des matires ......................................................................................................................................... 415

    Bibliographie .................................................................................................................................................. 420

    Table chronologique des arrts cits .............................................................................................................. 446

    Liste des tableaux........................................................................................................................................... 451

    Liste des illustrations...................................................................................................................................... 452

    Liste des interviews ........................................................................................................................................ 453

    Liste des lettres types ..................................................................................................................................... 467

    Annexes ......................................................................................................................................................... 470

    Index .............................................................................................................................................................. 554

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 9

    Introduction

    1/ La dgradation de la situation de lentreprise saccrot le plus souvent de faon exponentielle. Si lon ne ragit pas assez vite, les mesures prises auront

    toujours un temps de retard par rapport aux besoins. En outre, lentreprise se privera

    des outils de sauvetages amiables dont le succs repose souvent sur la clrit, le

    caractre prcoce du feed back . Il faut privilgier une intervention aussi prompte

    que possible.

    2/ La ncessit de trouver un quilibre subtil et simultan de toutes les impratifs en loccurrence, la sauvegarde des entreprises viables, le maintien de

    lemploi et lapurement du passif constitue un lourd fardeau pour le lgislateur. La

    conjugaison parfaite de ces trois objectifs a t toujours prconise par les praticiens

    et particulirement par les auteurs du droit des affaires.

    3/ Plusieurs praticiens dploraient le droit de la faillite. Ils nhsitaient pas parler de la faillite du droit de la faillite 1. Ils avanaient des propositions pour

    adopter une vision plus indulgente et moins coercitive. Cela travers la mise en place

    dun dispositif prventif qui vise anticiper les difficults des entreprises une fois les

    signes avant-coureurs apparus et dbusqus.

    Axe principalement sur le rglement des cranciers, la faillite apparaissait

    comme une procdure essentiellement rpressive destine punir le commerant

    malhonnte, danger public pour sa communaut, compromettant dangereusement le

    crdit, mais aussi accessoirement, une procdure prventive par la purge

    systmatiquement organise des mauvais commerants afin dviter le gaspillage des

    richesses et les dfaillances en chaine 2.

    4/ Si dans lhistoire du droit des affaires, la notion de faillite3 a su simposer avec force. Aujourdhui, la tendance part vers la dissipation de tout acte pouvant

    entrainer une volatilisation des entreprises qui ont une chance de pouvoir se 1 F. TERRE Droit de la faillite ou faillite du droit . Revue juridique et commerciale.1991, page 1 et suiv. 2 Prface. Yves CHAPUT Droit des affaires , historique des procdures collectives. 2 me dition Dalloz 2004.page 551. 3 Dfinition Un mot qui trouve ses racines en droit Romain, le mot vient du verbe faillir_ cest--dire manquer-ou tromper, elle entrainait la vente en bloc des biens du failli, car il a manqu aux obligations caractrisant une tromperie au dtriment de ses cranciers . Un autre terme qui trouve ses racines en droit Amricain, cest le mot banqueroute- : o le comptoir des commerants le banc- tait bris-rotta-, la banqueroute condamnait le banqueroutier aux galres . Lessentiel pour comprendre le droit, droit de lentreprise, dition Lamy 2011-2012, page 1885-3327.origine de la faillite.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

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    redresser, mais galement dviter une perte demploi avec toutes ses consquences

    calamiteuses, ainsi quune stigmatisation du dirigeant qui sera dsign toujours du

    doigt4, alors quil pouvait tre seulement victime dune conjoncture conomique ou

    financire phmre.

    5/ Il ne faut pas oublier que tant en droit franais quen droit marocain, la culpabilit du commerant tait omniprsente. La faillite dorigine italienne avait pour

    fonction de sanctionner un dbiteur dfaillant ayant manqu sa parole5.

    Le lgislateur marocain, pour sa part, a pu constater le besoin dabandonner

    sans tergiversation la procdure de dconfiture conscutive linsolvabilit que lon

    connat galement aussi dans le droit musulman classique. Il tait fort indispensable

    de rompre avec les pratiques dantan tendant renforcer la protection des cranciers

    et rprimer, dune manire avilissante, les commerants dfaillants.

    Lorganisation de la faillite et la sanction de la banqueroute visaient purifier le

    march via une liquidation des biens et une viction des dfaillants6.

    I) Evolution smantique : 6/ A- Le cadre normatif marocain plus clment- a pour objectif un monde

    sans faillite. Il a fait son tour preuve dune grande innovation. La notion de la faillite

    est ds lors devenue obsolte avec la promulgation de la loi n 15-95 promulgue le

    premier aot 1996 et entre en vigueur un an aprs.

    Aujourdhui nous sommes devant un dfi de grande taille : la prvention des

    entreprises en difficult en leur vitant le risque de liquidation et laggravation de leurs

    difficults.

    La notion de prvention vient du mot prvenir qui signifie toute mesure

    destine prvenir le risque et donc la meilleure prvention contre la maladie cest

    de ne pas lattraper.

    Comme son homologue franais, le lgislateur marocain a fait usage de la

    devise qui dit : Il vaut mieux prvenir que gurir . Un adage qui constitue la rgle

    4 Il ne faut pas laisser au dbiteur les moyens dafficher un luxe insultant .L.SEGUR. Expos des motifs du projet de loi contenant le Livre III sur les Faillites et les banqueroutes, Code de commerce, Paris 1810, page 57. 5YVES CHAPUT. Du code de commerce un code sauvegarde des entreprises. In. Quel code de commerce pour demain ? Pascal BLOCHE et Sophie SCHILLER. Edition litec.2007.page 219. 6Abdelaziz SQUALLI, Droit et pratique en matire de faillite et de liquidation des entreprises , dition Sofapress.1995. tude critique de la notion de cessation de paiement en matire de faillite et de liquidation judiciaire. Revue du droit des entreprises.n11,1995. Page 53.

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    dor en matire dhygine sanitaire et qui a aussi ses lettres de noblesse dans tous les

    autres domaines de la vie. Dans lenvironnement conomique, les difficults sur

    lesquelles peuvent buter les entreprises sont lourdes de consquences sur le plan

    conomique et social.

    7/ Il faut donc faire en sorte de les prvenir avant quil ne soit tard. On ne peut que saluer leffort considrable et mritoire du lgislateur marocain dont le souci

    majeur est la sauvegarde des quilibres financiers de lentreprise pour quelle ne

    bascule pas dans la cessation des paiements.

    Tout en privilgiant le redressement des entreprises toujours viables et saines,

    le lgislateur marocain a mis en place une composante essentielle du systme de

    prvention des difficults des entreprises ; savoir, le rglement amiable tout en

    favorisant la ngociation et les pourparlers entre les parties antagonistes et en

    encourageant le recours aux remises des dettes et leur rchelonnement afin

    daccorder au dbiteur un moment de rpit pour pouvoir se remettre sur les rails. Il

    sagit de le faire bnficier de la rgle de seconde chance .

    La promulgation du nouveau code de commerce en aot 1996 a marqu le

    passage dun droit de la faillite sanctionnateur vers un droit qui favorise le sauvetage

    et la restructuration de lentreprise.

    Comme cest le cas en droit franais, la notion de faillite qui vient du mot

    fallere, signifie (tomber) ou (tromper). Il faut donc liminer le mauvais commerant

    pour dsintresser ses cranciers, tout en procdant la vente de ses biens ou en le

    soumettant des sanctions civiles et pnales.

    Mais le droit marocain va se moderniser en abandonnant ses traits de

    caractres dorigine, afin de sintresser lvolution du monde des affaires et

    rpondre aux exigences conomiques et sociales actuelles.

    8/ Lexercice du commerce reste toujours tributaire des conjonctures et des alas. La perturbation de lactivit commerciale demeure toujours possible, puisque

    un seul cas fortuit peut tout basculer sans que lon soit pralablement avis.

    Auparavant, la dfaillance dun commerant marquait la rupture avec son

    activit commerciale, puisquil tait ject du monde des affaires, car considr

    incapable dhonorer ses engagements et, par consquence, vinc. Peu importait quil

    soit victime dune difficult passagre ou dclar en tat de cessation de paiement.

    9/ Le droit de la faillite au Maroc tendait vers un assainissement de la profession commerciale. Cela peut paratre de premire augure comme logique, mais

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

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    la ralit des choses nous laisse dcouvrir que le lgislateur est tenu de marquer sa

    prsence effective non pas lorsque lentreprise et son dirigeant souffrent lagonie,

    mais plutt quand la situation de lentreprise nest pas encore compromise.

    La prsence au moment adquat de la protection judiciaire est providentielle

    pour le dbiteur qui ne doit que sestimer heureux davoir trouv une boue de

    sauvetage qui lui vitera de frler la mort de son entreprise.

    10/ La refonte des orientations des procdures collectives au Maroc demeurait dun grand intrt. Il tait indispensable de revoir les choses sous un autre angle. Il

    faut empcher de dclarer la faillite ou la liquidation judiciaire de tout dbiteur qui a

    dpos son bilan ou qui est assign par ses cranciers.

    Les textes rglementant le droit des procdures collectives sont trs anciens.

    Le dahir du code de commerce DCC qui date de 1913 sest rserv les mmes

    dispositions du code de commerce franais de 1807, tel quil avait t modifi par les

    lois de 1838 et 1889.7

    Selon larticle 197 modifi par le dahir du 10-2-1951 tout commerant qui

    cesse ses paiements est en tat de faillite . De mme larticle 332 de lancien code

    de commerce stipulait tout commerant qui cesse ses paiements peut obtenir le

    bnfice de la liquidation judiciaire . On peut en dduire que les deux textes

    principaux noffrent les procdures de faillite et de liquidation judiciaire que pour les

    commerants en tat de cessation de paiement.

    Si le lgislateur marocain avait soumis le bnfice de la procdure de faillite et

    de liquidation aux seuls commerants sombrant dans ltat de cessation de paiement,

    en France, la loi n85-98 du 25 janvier 1985 exigeait ltat de cessation de paiement

    et tendait ce bnfice tout commerant, artisans, agriculteur et toutes les

    personnes morales de droit priv8.

    En droit marocain, il nexistait pas que la procdure de faillite et de liquidation

    judiciaire. Le concordat rglement par les articles 256 278 du dahir du code de

    commerce est toujours prvu sil arrivait que les parties en conflit parviennent

    trouver un terrain dentente ou, en dautres termes, selon A. Martin SERF, le concordat est une convention collective passe entre le dbiteur et ses cranciers

    7 G RIPERT et R.ROBLOT Trait de droit commercial , Tome II dition LGDJ 1992.n2792. 8 Article 2 de la loi 25 janvier 1985relative au redressement et la liquidation judiciaire des entreprises.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

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    avec lhomologation de la justice et par laquelle le dbiteur sengage rembourser

    ses cranciers en tout ou en partie, immdiatement ou terme 9.

    11/ On dplore vivement que le droit marocain ne sintresse lentreprise que lorsquelle est tombe dans le trou noir de la cessation de paiement.

    Les voix nont pas cess de se lever plus haut10 pour exprimer une forte

    indignation vis--vis de ce mode dintervention du lgislateur jug trop tardif. Une

    intervention ou plutt une dtection prcoce est envisager avant que le navire ne

    soit au gite et que le pire se produisait.

    12/ Si la loi franaise du 3 juillet 1967 dans son article L67 ne permet pas au dbiteur de pouvoir bnficier du concordat lorsquil est dclar en liquidation des

    biens, le droit marocain renverse la rgle. En effet, le dbiteur aura cette possibilit

    quelque soit la nature de la procdure ; savoir la faillite ou la liquidation. Cest ce qui

    ressort des dispositions de larticle 333 du DCC11.

    En 1988 un projet de rforme du code de commerce a pu voir le jour. Certes, il

    napporte que des modifications sommaires, ponctuelles et superficielles, mais en

    mme temps il fait rfrence quelques nouvelles notions qui faisaient dfaut dans

    lancien dahir du code de commerce.

    Le projet de 1988, tente de privilgier le redressement des entreprises en leur

    fournissant des pistes pour favoriser leur relance. Le droit marocain a prvu donc un

    sursis la dclaration de la faillite prvue par larticle 507 du projet de rforme du

    code de commerce. Selon cet article : Lorsque le tribunal estime que la situation financire dun commerant peut tre

    redresse, il peut soit doffice, soit la demande du commerant ou du ministre public,

    surseoir dclarer la faillite pour une priode nexcdant pas trois mois. Dans ce cas l, le

    tribunal ordonne toutes mesures ncessaires la conservation des biens du commerant .

    Le projet avait prvu en outre, ce quon appelait les faillites sommaires, prvues

    par larticle 616 du projet de rforme du code de commerce :

    9A.MARTIN-SERF Rflexions sur la nature contractuelle du concordat .Revue juridique et commerciale, n9et 10, 1980, page 293. 10 SQUALLI Abdelaziz, op cite, page 181. Le droit marocain en matire des procdures collectives est un droit vtuste et dpass qui ncessite des rformes profondes, ces dernires doivent tre orientes vers le sauvetage des entreprises en difficult qui devient aujourdhui une ncessit incontestable . 11La liquidation judiciaire ne peut tre ordonne que sur requte prsente par le dbiteur au tribunal de premire instance de son domicile, dans les 15 jours de la cessation de paiement. Le droit de demander cette liquidation appartient au dbiteur assign en dclaration de faillite pendant cette priode.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 14

    Si le tribunal estime lors du prononc du jugement dclaratif que ltat de la faillite ne

    justifie pas lapplication de la procdure de la faillite, et notamment si la valeur des biens la

    composant ne dpasse pas 200.000 dhs, il peut sil le juge utile, ordonner, soit doffice, soit

    la requte dun ou plusieurs cranciers lapplication des dispositions suivantes :

    - Rduction des dlais de procdure moiti ;

    - La non dsignation des contrleurs ;

    - Le concordat conclu double majorit est excutoire ds son homologation .

    13/ Afin de prvenir la faillite, le lgislateur a parfaitement su mettre en place ce dispositif permettant de se prmunir contre la cessation dfinitive de lactivit

    commerciale et labandon ultime du monde des affaires.

    Le lgislateur marocain conscient de limprieuse ncessit de faire dissiper

    linertie lgislative dont souffre le cadre normatif marocain, a dcid de se lancer dans

    un large processus de rformes. Si on fait rfrence lvolution historique de la

    lgislation franaise en matire des procdures collectives, on sapercevra que le bout

    du tunnel peut paratre trop loin. Mais pour vaincre tout pessimisme, il faut au moins

    enfoncer le clou progressivement pour pouvoir rajouter de grandes modifications la

    lgislation en vigueur.

    Linsatisfaction qui rgne aujourdhui est une preuve irrfutable de lexistence

    de lacunes et de failles auxquelles il faut remdier.

    Il est unanimement admis que, le code de commerce de 1997 est archaque.

    Nous allons procder lanalyse de ses dfaillances et ce propos nous souhaitons

    que le projet actuel de rforme du DCC soit fructueux.

    Pour ne pas donner de prjugs, laissons au temps le soin dvaluer

    limportance de cette rforme. Trouvera-t- elle lengouement espr ? Arrivera- t- elle

    rpondre plusieurs questions restes en suspens depuis plusieurs annes ?

    Lavenir nous le dira.

    Nonobstant la raret des jugements ayant abouti un concordat srieux, nous

    avons pu dnicher quelques-uns afin de mettre en relief la gense du traitement

    amiable dans le droit marocain12.

    12 1er cas de figure : Jugement dclarant la faillite dans laffaire SOLARNO sur assignation dun crancier suite au non paiement dune traite chue au 30-juin 1970. Le dirigeant dclar en faillite a pu prsenter des offres concordataires ( savoir : remboursement de la totalit des crances privilgies CNSS et FISC et paiement de 20% des crances chirographaires immdiatement aprs lhomologation de laccord), ses cranciers chirographaires qui ont fini par tout accepter. Le concordat fut homologu par le tribunal par un jugement rendu 3 dcembre 1982.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 15

    B- Le droit franais, un droit dynamique, rnovateur- 14/-le droit franais a connu un essor remarquable et une volution notable en

    matire de difficult des entreprises. Il suffit de remonter un peu en arrire pour

    dcouvrir la pertinence des textes qui ne cessent dapporter des dispositions fort

    intressantes, rpondant au maximum aux questions ou situations floues.

    Un droit en perptuelle rnovation, qui attire toujours lattention des praticiens

    et des hommes daffaires et qui fait objet de plusieurs querelles doctrinales. Ces

    dernires constituent une aubaine en or pour le droit des entreprises en difficult, car

    elles lui permettent dtre sous la loupe et, par consquence, de subir des

    amnagements trs intressants pour le monde du droit des affaires. Selon certains

    auteurs les scandales sont des sources de progrs de la science juridique 13.

    a- Survol historique sur les procdures prventives

    15/Cette volution du droit des entreprises en difficult14 dite discontinue, en

    quelque sorte, peut tre rsume en quelques dates caractristiques.

    Dans lantiquit, le dbiteur tait rduit un tat desclavage, il tait soumis

    corps et bien ses cranciers.

    Au moyen ge, le dbiteur toujours dans une situation infamante tait

    condamn des peines afflictives.

    Le XIX sicle tait marqu par une tendance dans laquelle prvalait une

    volont dindulgence lgard des faillis. La loi de 28 mai 1838 sur les faillites et

    Second cas de figure : Intervention dun concordat entre un commerant dclar en faillite M.ben Brahim Ait Massoud, et ses cranciers, et homologu par un jugement rendu le 14 dcembre 1977 par le tribunal de 1re instance Casablanca. Parmi les propositions concordataires (paiement de 30% des chirographaires durant 3 ans et que le premier dsintressement aura lieu aprs lcoulement dune anne qui suit lhomologation du concordat). Troisime cas de figure : Aprs le jugement de liquidation judiciaire dclar lencontre de ltablissement Elie BENSSOUSSAN le 13 novembre 1975, un concordat amiable a pu voir le jour homologu le 27 dcembre 1976. Par le tribunal de 1re instance de Casablanca. Qui revoit lui aussi paiement de 40% des dettes sur une priode 4 ans. Quatrime cas de figure : Dclaration de la faillite par le tribunal de 1re instance de Casablanca, lencontre de la socit TISSADAFI le 18 octobre 1983. Ladministrateur de la socit a pu proposer des offres concordataires qui stimulaient lengouement des cranciers. Le concordat a t donc homologu le 26 septembre 1984 par le mme tribunal. V. SQUALLI Abdelaziz Droit et pratique en matire de faillite et de liquidation judiciaire des entreprises .1re dition 1995, page 163 et suiv. 13Yves CHAPUT Quel code de commerce pour demain ? Du code de commerce un code de la sauvegarde des entreprises . Edition litec. 2007. Page 220. 14Les procdures applicables au droit des entreprises en difficult sont des procdures collectives, car elles impliquent de nombreux acteurs conomiques et sociaux soumis une rglementation commune : les actionnaires et les associs de la socit en difficult ; les cranciers de lentreprise, comme banquiers et fournisseurs, lEtat en tant que crancier public, et les salaris de lentreprise au titre de leur contrat de travail.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 16

    banqueroutes a rform lensemble du livre sur les faillites. Elle a fait une distinction

    entre le dbiteur malchanceux de bonne foi qui bnficiait de la liquidation judiciaire et

    le dbiteur malhonnte qui tait soumis la faillite.

    La loi du 22 juillet 1867 a supprim la contrainte par corps inflige lencontre de celui

    qui narrive pas honorer ses dettes15.

    Le 4 mars 1889 est une date heureuse pour les dbiteurs malheureux et de

    bonne foi, victimes des alas. Mme sil tait en ralit difficile de faire la distinction

    entre le malchanceux et le coupable.

    Parmi les rformes conscutives, on trouvera le dcret-loi du 8 aot 1935 qui a

    pu apporter un soulagement profond aux salaris qui bnficiaient dun privilge

    considrable. Car il sagit de prendre en compte des drames sociaux et les pertes

    demplois qui peuvent rsulter de la dtrioration de lactivit commerciale dune

    entreprise quelconque. Sous la date de 27 dcembre 1973 un rgime dassurance de

    garantie des salaires fut instaur AGS.

    Le dcret de 20 mai 1955 apporta des innovations rjouissantes. Dsormais la

    diffrence entre commerant de bonne foi mais malchanceux et celui de mauvaise foi

    est tablie. Ce dcret accorda au dbiteur victime dalas la possibilit de bnficier

    dun concordat amiable et de procder des ngociations avec ses cranciers pour

    obtenir des dlais de paiement ou des remises de dettes. Ce concordat amiable est

    appel galement pacte datermoiement ou moratoire gnral 16.

    Tout le mrite revient au doyen Roger HOUIN qui a su apporter une prcision

    fort intressante ; sur la distinction entre lhomme et lentreprise. Elle se fonde sur

    lindpendance de la responsabilit de lhomme dans le droulement de lactivit

    conomique de lentreprise situe dans son contexte gnral. On tend entrevoir

    deux entits juridiques, lhomme et lentreprise.

    Selon certains auteurs le droit franais de la faillite.. peinait sortir du

    dilemme exploitant coupable / entreprise viable 17.

    Par la suite, lordonnance du 23 septembre 1967 a apport une nette

    amlioration qui a instaur la procdure de suspension provisoire des poursuites

    lgard des entreprises dintrt national ou rgional. Une procdure qui a rapidement

    15La contrainte par corps fut abolie deux reprises : 1793 et en 1848, puis supprim en matire civile et commerciale par la loi du 22 juillet 1867. 16M.FERRARI. Le pacte datermoiement, dlit de fuite passible de banqueroute , gazette du palais, 2 mai 1969, 1, doctrine. 17Yves CHAPUT, op cite.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 17

    disparu, car elle na jamais pu simposer comme procdure de prvention. Elle fut

    abroge par la loi n85-99 du 25 janvier 1985 relative au redressement judiciaire et la

    liquidation judiciaire.

    Cette loi du 25 janvier 1985 et son dcret dapplication du 27 dcembre 1985

    taient au chevet des entreprises malades menaces par la disparition.

    Lobjectif du redressement tait de permettre la sauvegarde de lentreprise, le

    maintien de lactivit, de lemploi et lapurement du passif. Le paiement des cranciers

    tait relgu un second plan.

    On peut retenir de cette loi quelques notions marquantes18 :

    - Le pouvoir judiciaire tait considrable. Quant aux cranciers ils taient

    privs de tout pouvoir de dcision.

    - Les cranciers taient temporairement paralyss et largement sacrifis. Ils

    taient soumis la suspension des poursuites, comme ils taient obligs

    daccepter les dlais de paiement fixs par le tribunal.

    - Les surets perdaient une partie de leur efficacit car la suspension des

    poursuites frappe les cranciers privilgis, mais aussi les chirographaires ;

    - Lentreprise en redressement poursuit son activit jusqu lannonce de

    dcision par le tribunal, qui peut choisir soit un redressement soit une

    liquidation.

    - Llargissement de la procdure de redressement aux agriculteurs et

    artisans. Cette dernire loi avait apport de rsolution novatrice, elle faisait

    bnficier tous les commerants, artisans agriculteurs ou personnes

    morales de droit priv du redressement judiciaire et de la liquidation

    judiciaire.

    De plus, volont inbranlable de prserver les entits viables et saines a

    pouss le lgislateur a adopter des mesures pertinentes de dtection prcoce et de

    prvention des difficults financires des entreprises au moyen de documents

    prvisionnels, de procdures dalerte et ses titulaires, la conciliation et le mandat ad

    hoc. On ne peut alors, que saluer le progrs du modle franais.

    La loi n94-475 du 10 juin 1994 relative la prvention et au traitement des

    difficults des entreprises est porteuse de plusieurs lments qui attestent que le

    18Andr JAQUEMONT Droit des entreprises en difficult . Edition 2011.page 12.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 18

    corpus lgislatif mis en place lpoque visait essentiellement une modernisation des

    ides, mais aussi des techniques.

    La rforme de la loi du 10 juin 1994 vise renforcer le dispositif de la

    prvention, travers un accroissement significatif du rle tenu par le prsident du

    tribunal de commerce ou de grande instance, mais aussi en incitant au recours la

    technique du mandat ad hoc. Le prsident devient alors clef de vote de la

    prvention 19.

    Selon certains auteurs le juge fournit les moyens et les donnes objectifs

    pour une ngociation claire avec les principaux cranciers, dont dpendra souvent

    la sauvegarde de lentreprise 20.

    La loi du 10 juillet 1994 avait apport des ajustements considrables au profit

    des cranciers munis de surets.

    Avec la loi n 2005-843 du 26 juillet 2005 dite la loi de sauvegarde des

    entreprises le rglement amiable disparait du code de commerce, il a pris une autre

    appellation la conciliation , dont lobjet est de proposer toute entreprise, qui ne se

    trouve pas en cessation des paiements depuis plus de 45 jours, prouvant des

    difficults, une procdure qui permet, sous les auspices dun conciliateur nomm par

    le prsident du tribunal de rechercher un accord avec les cranciers.

    Cette nouvelle loi a institu un nouveau privilge au profit des cranciers ayant

    offert des apports en trsorerie pour rconforter la situation financire de lentreprise

    en difficult. On parle alors du privilge de largent frais ou du new money.

    Cette troisime grande rforme renforce sensiblement le traitement prventif

    comme elle tentait de rendre efficient le droit franais des procdures collectives, car

    certains estiment que le droit franais fait peur aux investisseurs trangers et aux

    cranciers potentiels 21.

    Le 4 aot 2008, la loi n 2008-776 de modernisation de lconomie et son

    ordonnance du 30 janvier 2009 a renforc la fiducie et a consacr le droit de rtention

    du crancier gagiste sans dpossession.

    Le droit des entreprises en difficult est inclus dans le livre sixime du code de

    commerce. Cette loi de sauvegarde na pas t pargne de quelques modifications

    issues de lordonnance n 2008-1345 du 18 dcembre 2008, avant dtre complte 19A.COURET Le traitement non judiciaire des difficults des entreprises , in Nicolas DEPOIX ROBAIN, Le rglement amiable des difficults des entreprises, dition septentrion. 7 juillet 1997.page 20. 20MM.GAVALDA et MENEZ, Le rglement amiable des difficults des entreprises .JCP 3196.n8, page 26. 21Pierre-Michel-LE CORRE Droit et pratique des procdures collectives dition Dalloz.2006-2007.n051.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 19

    par la loi de rgulation bancaire et financire n 2010-1249 du 22 octobre 2010 qui a

    donn naissance la procdure de sauvegarde financire acclre SFA.

    Les consquences dltres issues de la forme socitaire entreprise

    unipersonnelle responsabilit limite : EURL cre par la loi du 11 juillet 1985

    na pas rencontr le succs escompt 22. Car, la totalit du patrimoine de

    lentrepreneur et de sa famille peut tre mis en pril puisque le patrimoine aussi bien

    professionnel que personnel doit rpondre conjointement aux dettes ou difficults

    rencontres mmes quand elles sont passagres23.

    Le 15 juin 2010 la loi n2010-658 relative lentrepreneur individuel

    responsabilit limite EIRL a cr un dispositif daffectation du patrimoine24. Il sagit de

    faire le choix du patrimoine daffectation 25 et de scinder le patrimoine de

    lentrepreneur individuel pour distinguer le patrimoine personnel du patrimoine

    professionnel qui doit rpondre aux dettes professionnelles26.

    La sparation se fait travers une dclaration daffectation notarie et publie

    qui rend saisissables les biens professionnels et protge le patrimoine personnel de

    lentrepreneur individuel contre les poursuites des cranciers professionnels.

    Par consquence, la notion dinsaisissabilit des immeubles ou de la rsidence

    principale de lentrepreneur individuel institue par la loi du 1 aot 2003 va cder la

    place lapproche de sparation des patrimoines27.

    Le 9 dcembre 2010 une ordonnance n2010-1512 a vu le jour portant

    adaptation du droit des entreprises en difficult lentreprise individuelle

    responsabilit limite EIRL28. 22Rapport du snat n362 mars 1010 mais aussi la loi du 11 fvrier 1994 relative linitiative et lentreprise individuelle qui na pas russi assurer une prservation vraie du patrimoine familial. 23Article 2284 du code civil La totalit du patrimoine de lentrepreneur et de sa famille peut tre mis en pril en cas dchec de lentreprise ou tout simplement de difficults professionnelles passagres . Cette situation peu confortable et qui nassure aucune protection du patrimoine non professionnel doit tre revue, surtout que les banques crancires se montrent trs frileuses quant loctroi dun concours financier. Les banques peuvent aller jusqu demander des garanties sur le patrimoine priv personnel de lassoci unique, faute de quoi le refus doctroyer des lignes de crdit serai la rponse immdiate. 24Article L526-6 al 1er du code de commerce Tout entrepreneur individuel peut affecter son activit professionnelle un patrimoine spar de son patrimoine personnel sans cration dune personne morale . Selon larticle 14 de la loi du 15 juin 2010 Un mme entrepreneur individuel peut constituer plusieurs patrimoines affects . Cette stipulation est valide compter du 1er janvier 2013.V. revue de droit Henri CAPITANT.1er mai 2010.n2 Commentaire sur la loi du 15 juin 2010 relative EIRL .article 19144. Note Frderic VAUVIL. 25S.PIEDELIEVRE Lentrepreneur individuel responsabilit limite .defrenois.2010.article 39134.page 1417 et suiv.n5. 26Voir en dtails le dernier paragraphe dans la deuxime partie. Attnuation des privilges accords au dbiteur : Cas de lentrepreneur individuel responsabilit limite . 27Selon le rapport du snat n362, mars 2010, page 21 il sagit de limiter le risque pesant sur le patrimoine personnel et familial de celui qui entreprend, sans lui imposer les formalits de constitution et de gestion de socit fusse telle unipersonnelle .

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 20

    Quelques jours aprs, soit le 29 dcembre 2010 un dcret a t publi et qui

    dfinissait et organisait lapplication du statut de EIRL.

    Quant a loi n2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et damlioration de

    la qualit du droit elle prvoyait, pour simplifier le droit, damliorer la qualit des

    normes et des relations des citoyens avec les administrations. Dans son

    prolongement une autre loi a pu voir le jour, mais cette fois-ci, elle a pour but de

    faciliter la vie des entreprises. Cette loi contient plusieurs dispositions relatives au

    droit des socits.

    Cette loi de Jean-Luc WARSMANN a beaucoup impact lintervention du

    commissaire aux comptes. Dsormais, ce dernier aura la possibilit de reprendre la

    procdure dalerte dans les six mois de son dclenchement au stade o elle a t

    interrompue, et cela, en cas o la continuit dexploitation demeure compromise ou

    lorsque lurgence commande des mesures immdiates.

    Comme elle a prvu le changement de mthodes comptables signales dans le

    rapport du commissaire aux comptes : suspension du livre dinventaire.

    Qualifie par la doctrine de volumineuse, puisquelle contient 134 articles, la loi

    n2012-387 du 22 mars 2012, relative la simplification du droit et lallgement des

    dmarches administratives avait prvu une obligation pour les socits commerciales

    (SNC,SARL, SA,SCA,SAS) de dposer au greffe du tribunal de commerce les

    comptes sociaux. Le dfaut du dpt du rapport de gestion annuel peut emmener le

    greffe den informer le prsident du tribunal de commerce qui, son tour, va

    dclencher une procdure dinjonction de le faire bref dlai sous astreinte.

    Cette nouvelle contrainte qui pse sur les socits commerciales a pour but de

    dceler les difficults que lentreprise peut rencontrer et dessayer de les radiquer le

    plus en amont possible en vitant leur aggravation et en privilgiant la sauvegarde

    des entreprises viables.

    Quelques mois plus tard, un dcret n2012-1071 pris pour lapplication de la loi

    n2012-387 du 22 mars 2012 a fait apparition. Ses apports ne peuvent qutre

    qualifis de majeurs, il a rapport certaines prcisions sur les seuils dligibilit la

    procdure de sauvegarde financire acclre.

    La loi du 22 mars 2012 a introduit un critre alternatif permettant laccession

    la SFA, en faisant bnficier les socits holdings de cette procdure.

    28 Ordonnance n2010-1512 du 9 dcembre 2010 et son dcret dapplication n2012-122 du 30 janvier 2012.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 21

    Le nouveau dcret est venu donc pour complter certains points rests flous. Il

    a donc fix partir de quel montant du total du bilan le dbiteur est rput remplir les

    conditions de seuil autorisant louverture dune SFA. Article.D628-2-1nouv.

    La loi n2012-346 du 12 mars 2012, publie au J.O le 13 mars de la mme

    anne relative aux mesures conservatoires en matire de procdure de sauvegarde,

    de redressement judiciaire, ou de liquidation judiciaire et aux biens qui en font lobjet

    est rpute tre une loi sur la lutte contre les patrons voyoux et contre linsolvabilit

    organise 29. Elle visait protger les actifs des entreprises dfaillantes, comme elle

    prserve les intrts des cranciers et salaris contre le comportement abusif de

    certaines multinationales qui dtournent les actifs dune succursale dfaillante.

    Cette loi permet que soit ordonnes des mesures conservatoires par le

    prsident du tribunal de commerce ou de grande instance pour protger les biens du

    dfendeur lencontre duquel une procdure de sauvegarde, de redressement ou de

    liquidation judiciaire est ouverte. Elle renforce alors les pouvoirs du juge en matire

    des procdures collectives.

    16/ Le lgislateur franais a estim ncessaire dadapter le droit prexistant aux exigences des professionnels et hommes daffaires. Dune manire gnrale, de

    ladapter lpoque contemporaine.

    Il y a eu un passage important dun droit de la faillite rpressif et liquidateur

    un droit de lentreprise en difficult qui vise sauvegarder lactivit conomique de

    lentreprise et ses emplois.

    Le lgislateur franais tait convaincu de la ncessit dinstituer une hirarchie

    des priorits, savoir : le sauvetage de lentreprise, le maintien de lemploi et le

    paiement des cranciers.

    La procdure de la faillite et ses effets dltres ont conduit le lgislateur

    entamer une rforme denvergure. Il sagit dsormais non pas de traiter les difficults

    du dbiteur, mais de prvenir et de dtecter les dites difficults30.

    17/ Il sagit de faire application de ladage il vaut mieux prvenir que gurir . Une rgle qui a su apporter ses fruits travers plusieurs chelons. Il sagit de

    renforcer et de privilgier la prvention afin doffrir aux entreprises, peu florissantes,

    29Blandine-HERICHER-MAZEL.www.juristravail.com 30La loi sur la faillite sest vite rvle inadquate aux ralits conomiques.car, elle engendrait la privation automatique des pouvoirs du chef dentreprise, mais aussi lintervention tardive des tribunaux et la ngligence par le lgislateur de laspect psychique des chefs dentreprise qui vivent lamertume du dpt de bilan. Yves CHAPUT Droit des affaires , op cite page, 552et 553.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 22

    une seconde chance de rebondissement. Car on avait pu conclure et dire que la

    saisine trop tardive des tribunaux est la principale cause de disparition des

    entreprises.

    Selon certains auteurs la prvention se rsume donc la volont de

    sattaquer aux racines du mal, sans en attendre les manifestations, de sefforcer de

    prvenir plutt que de gurir 31.

    La prvention permet, en effet, de stopper le plus tt possible l'hmorragie de

    l'entreprise qui ne peut survivre et de prserver son environnement en limitant le

    passif, dont on sait qu'il crot de manire considrable dans les mois et les semaines

    prcdant la dclaration de cessation des paiements 32.

    Le dirigeant, parce quil veut croire la russite de lentreprise quil a souvent

    lui-mme cre, hsite dposer le bilan et lorsquil sy rsigne, il est souvent dj

    trop tard 33.

    Le droit contemporain des entreprises en difficult se caractrise par

    limportance grandiose qui a t rserve la conciliation pralable, tout en essayant

    de promouvoir les droits des cranciers gagistes, mais aussi de protger le dbiteur

    contre les agissements intempestifs des cranciers souhaitant obtenir des paiements

    et des dpossessions de leur dbiteur.

    Le droit des entreprises en difficult tait marqu auparavant par le rgne de la

    morale sur lconomie. Il faut condamner le dbiteur et peu importe la disparition de

    lentreprise mme si elle est toujours saine.

    Aujourdhui, les priorits ont pris une autre tournure, il sagit de lemprise de

    lconomie au dtriment du caractre moral. Il faut tout prix assurer un sauvetage et

    une survie de lentreprise. Quant aux cranciers ils seront relgus un second rang.

    b- Le droit communautaire : dans lattente dune harmonisation des droits

    nationaux des Etats membres de lunion europenne U.E

    18/ On ne peut pas parler des progrs raliss par la lgislation franaise au niveau national sans faire allusion au niveau europen au rglement communautaire

    du 29 mai 2000 sur linsolvabilit des entreprises34, ci-aprs R.C 31Corine SAINT-ALARY-HOUIN Droit des entreprises en difficult, 4me dition Paris Monchrtien, 2001. 32La lgislation applicable en matire de prvention et de traitement des difficults des entreprises. Snat, rapport dexpertise, annexe II. Paris, le 8 septembre 1998.www.senat.fr 33Rapport SUDREAU La rforme de lentreprise , coll. 10/ 18.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 23

    Les variations dans les lgislations et la ncessit de rduire les diffrences de

    rgime entre les Etats ont conduit lU.E adopter, travers le R.C relatif aux

    procdures collectives, des principes directeurs en matire dinsolvabilit et de

    difficults dentreprise.

    Les raisons qui sont derrires cette dmarche sont multiples, dabord la

    constatation de ce quon appelle le forum shopping 35.

    Limplantation des grands groupes internationaux dans un Etat est prcde

    dun examen du terrain et des conditions dans lesquelles les difficults rencontres

    par leurs filiales seront traites36.

    Ce rglement sapplique aux procdures collectives fondes sur linsolvabilit

    du dbiteur. Louverture dune procdure principale37 dans un Etat membre ne fait

    donc pas obstacle louverture dune ou plusieurs procdures secondaires par les

    tribunaux des autres Etats membres, dans lesquels le dbiteur possde un

    tablissement.

    Larticle 3 du rglement communautaire traite la comptence internationale, il

    stipule cet gard que Les juridictions de ltat membre sur le territoire duquel est

    situ le centre des intrts principaux du dbiteur sont comptentes pour ouvrir la

    procdure dinsolvabilit. Pour les socits et les personnes morales, le centre des

    intrts principaux est prsum, jusqu preuve contraire, tre le lieu du sige

    statutaire.

    Al2 Lorsque le centre des intrts principaux du dbiteur est situ sur le

    territoire dun tat membre, les juridictions dun autre tat membre ne sont

    comptentes pour ouvrir une procdure dinsolvabilit lgard de ce dbiteur que si

    34Le rglement communautaire 1364-2000 est entr en vigueur le 31 mai 2002.V. annexe A modifi suite lentre en vigueur de la loi n2005-845 du 26 juillet 2005. Rglement (CE). N694/ 2006.27 avril 2006.JOUE. 6 mai, n1, 121, page 1.entre en vigueur 7 mai 2006. 35D.FASQUELLE Les faillites de groupes de socit dans U.E : la difficile conciliation entre approche conomique et juridique bull, Joly socits.2006-2, page 151. Le forum shopping signifie que Les entreprises soucieuses de prserver leurs intrts dplacent leurs avoirs dans un Etat de lU.E o la lgislation leur est plus favorable . 36Rapport R.HUYGUES Lattractivit du territoire pour les siges sociaux des grands groupes internationaux ,1er ministre, octobre.2003.page 41. 37Ouverte par le tribunal du ressort dans lequel est situ le centre des intrts principaux du dbiteur, cest le lieu du sige social et statutaire. V. arrt de la cour de justice de la communaut europenne.17 janvier 2006. Affaire C-1/ 04.Staubitz-schreiber. Un tablissement peut tre dfini comme Tout lieu doprations o le dbiteur exerce de faon non transitoire une activit conomique avec des moyens humains et des biens .article 2 du rglement n1346/ 2000. Cependant, Les procdures territoriales puissent tre ouvertes non seulement sur base dun tablissement mais aussi sur celle de la simple prsence de biens du dbiteur affects une activit conomique sans quil y ait ncessairement un tablissement .V. rapport sur la convention relative aux procdures dinsolvabilit. N70.Virgos&scHmidt.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 24

    celui-ci possde un tablissement sur le territoire de cet autre tat membre. Les effets

    de cette procdure sont limits aux biens du dbiteur se trouvant sur ce dernier

    territoire38.

    Selon larticle 29 du Rglement, louverture de cette procdure secondaire peut

    tre demande par le syndic de la procdure principale ou par toute autre personne

    ou autorit habilite demander l'ouverture d'une procdure d'insolvabilit en vertu de

    la loi de l'tat membre sur le territoire duquel l'ouverture de la procdure secondaire

    est demande .

    Ce rglement sapplique en France toutes les personnes lgard desquelles

    une procdure de sauvegarde, de redressement, de liquidation peut tre ouverte.

    En revanche, les procdures de surendettement des particuliers, le mandat ad hoc, ou

    la conciliation nentrent pas dans le champ dapplication du rglement.

    Cest depuis bien longtemps que les praticiens plaident pour une harmonisation des

    variations des lgislations des Etats membres de lunion europenne.

    Ces Etats disposent de rgimes diffrents, il est donc temps de se regrouper et de se

    mettre daccord sur une coordination ainsi quune gnralisation des principes

    rgissant le droit des entreprises en difficult, en tablissant des normes communes.

    En dautres termes, il faut assurer une harmonisation des difficults des entreprises

    situes titre principal dans un Etat membre dU.E, mais dont les activits stendent

    dans lunion au-del des frontires de ce seul Etat dorigine39.

    Malgr cette forte volont de se regrouper, le R.C souffre de quelques griefs et

    contient dj des lacunes.

    Il sest born imposer lchelle europenne une coordination des

    procdures de dfaillance des entreprises ouvertes dans les diffrents Etats membres

    de lunion. Il prvoit des critres de dtermination de la comptence juridictionnelle et

    il tranche sur la reconnaissance des dcisions de justice prises par une juridiction dun

    Etat membre de lunion.

    38V. affaire C-396/ 09.interdil srl en liquidation/ Fallimento interdil srl.20, octobre 2011. 39On peut se rfrer laffaire spectaculaire dEurotunnel du 2 aot 2006 qui a connu une centralisation dans un seul Etat membre des procdures collectives ouvertes lgard de plusieurs filiales trangres dun mme groupe. V. aussi arrt cour de cassation.ch.com.30 juin 2009, n08-11902. Le tribunal de commerce de Paris est dclar comptent pour ouvrir 17 procdures de sauvegarde dont dix socits trangres sont concernes par cette sauvegarde. Cette mthode a conduit des rsultats satisfaisants : la restructuration financire du groupe eurotunnel.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 25

    Cependant, il se concentre sur les procdures dinsolvabilit dclenches non

    pas en amont des difficults des entreprises, mais en aval, soit aprs la dgradation

    de la trsorerie des entreprises qui devient exsangues.

    La rvision du rglement communautaire apparait donc plus que jamais

    salutaire 40, surtout lorsquon constate quil y a une volution commune en Europe et

    une tendance favorisant la survie des entreprises.

    Les lgislations oscillent entre un rglement rapide des cranciers et la sauvegarde

    des entreprises, et ils existaient mme des traits communs entre ces lgislations :

    - Existence des groupements des cranciers nomms la masse ;

    - Les limitations apportes aux droits des cranciers privilgis et

    chirographaires 41.

    Aujourdhui la chambre de commerce et dindustrie de Paris CCIP prconise

    plusieurs pistes dvolution du R.C pour le rendre plus efficace et rduire nant les

    diffrences profondes qui existent entre les lgislations nationales des Etats membres

    dU.E.

    Parmi les prconisations mettre en relief, il sagit plus essentiellement et

    titre limitatif tout en respectant le sens de notre sujet de ce qui suit :

    - Sensibilisation des Etat membres dU.E sur la ncessit imprieuse de

    donner plus dimportance aux procdures prventives et de rgler les

    difficults des entreprises avant la dgradation ventuelle de leur situation.

    - Rsoudre le problme douverture dune procdure collective lencontre

    dun dbiteur bnficiant dune procdure prventive de conciliation par

    exemple.

    Il en est notamment ainsi dans le cas o une entreprise est soumise une procdure

    de conciliation en France, mais dispose dautres tablissements dans dautres Etats

    membres.

    Dans ce cas de contexte transfrontalier, un autre Etat membre peut

    valablement dclencher une procdure de redressement ou liquidation lencontre de

    cette entreprise, ce qui peut tout faire basculer, en faussant et en menaant le jeu de

    lanticipation.

    40V. Rapport dArnould DAUTEFEUILLE. Consultation sur la rvision du rglement europen sur linsolvabilit des entreprises .chambre de commerce et dindustrie de Paris. CCIP.7 juin 2012.page 4 et suive. 41Denis VOINOT Droit conomique des entreprises en difficult .dition LGDJ.2007.Page 15.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 26

    - Faire dissiper le flou qui rgne sur lintgration des procdures dites hybrides

    dans le champ dapplication du rglement, tel que la procdure de

    sauvegarde. Cet obstacle a pu tre dpass afin de garantir une sorte de

    scurit juridique42.

    - Bien cerner la notion du centre des intrts principaux du dbiteur (center of

    mains intrts ou COMI- qui doit correspondre au lieu o le dbiteur gre

    habituellement ses intrts et qui est vrifiable par les tiers43.

    - Rendre plus confortable la situation des cranciers ayant apport des

    concours dans le cadre de la procdure principale.

    Si une procdure secondaire a t dclenche aprs une procdure principale, ils

    doivent tre pays par priorits par rapports aux autres cranciers44.

    Ces cranciers trangers souffrent de quelques contraintes, il sagit pour lessentiel,

    des dlais respecter pour la dclaration de leurs crances, mais aussi lobligation

    de traduction que ceux-ci doivent respecter.

    Un autre problme a pu tre soulev cest celui de la langue utilise pour porter leur

    connaissance louverture dune procdure dinsolvabilit45.

    II) Vers un rapprochement des deux lgislations ?

    19/ Par un ton optimiste, on peut rpondre par laffirmative. Car, Il rsulte de la premire lecture du projet de loi marocain n32-10 portant amendement du livre V du

    code de commerce rgissant lentreprise en difficult, une forte ambition de remodeler

    larsenal lgislatif prexistant, en ladaptant aux ralits socio-conomiques, tout en 42Arrt MG PROBUD rendu par la cour de justice de lunion europenne le 21 janvier 2010. 43R.C 1346-2000, le 13 me considrant. Car il arrive que le dbiteur procde frauduleusement dplacer le centre de ses intrts principaux pour rechercher une lgislation plus clmente qui correspond ses intrts. Affaire PIN GROUPE AG, o le transfert du sige ou le centre des intrts principaux du dbiteur a t effectu de Luxembourg vers lAllemagne. Aussi arrt INTEREDIL rendu par la cour de justice de lunion europenne CJUE le 20 octobre 2011.affaire C-396/ 09.dition 2011.page 2593.note Alain LIENHARD. Arrt EUROFFOD. CJCE 2 mai 2006.affaire C-341/ 04.Revue la semaine juridique entreprises et affaires, tudes socits et procdures collectives.1309.n1920.11 mai 2012.obs Reinhard DAMMAN et Andr ALBERTINI. Page 26. Le COMI correspond au lieu o sont prises les dcisions essentielles de la socit quil correspond ou non au lieu du sige social. V. Affaire belvdre-marie brizard, tribunal de commerce de Beaune.16 juillet 2008 a ouvert 8 procdures principales de sauvegarde lgard des socits du groupe, dont 6 socits polonaises. 44Car un autre Etat membre peut dclencher une procdure secondaire l o le dbiteur possde un tablissement, il sagit de prserver les intrts des cranciers trangers dun dbiteur exerant des activits transfrontalires. Ltablissement cest tout lieu doprations o le dbiteur exerce de faon non transitoire une activit conomique avec des moyens humains et des biens. Ce qui englobe des filiales ou succursales, bureaux de reprsentation ou agences. 45V. Rsolution du parlement europen 15 novembre 2011.contenant des recommandations la commission sur les procdures dinsolvabilit dans le cadre du droit europen des socits. Vers une directive dharmonisation.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 27

    prenant en compte les exigences du monde des affaires et des oprateurs

    conomiques.

    Faisant la comparaison avec la lgislation franaise, les avances en France

    sont plus performantes et satisfaisantes par rapport celles constates dans le droit

    marocain. Il faut juste que le cadre normatif marocain soit soumis des rvisions

    supplmentaires pour pouvoir grimper lchelle de la performance.

    Le droit franais de prvention des difficults des entreprises continue sa

    lance dans ladoption des concepts amricains. Le droit marocain, devant une

    situation irritante de perplexit, hsite sinspirer intgralement du droit franais, car

    ce dernier semble tre inadquat aux ralits socio-conomiques marocaines. Do le

    fort besoin de trouver une solution judicieuse ltat actuel des choses.

    20/ Linfluence du droit franais sur le droit marocain ne doit pas tre entame de faon anarchique ni dmesure. Il faut slectionner ce qui conviendra au contexte

    marocain et ensuite rejeter ce qui ne peut quengendrer des situations de confusion et

    de retard dans les procdures de prvention.

    Si le droit marocain saccroche de plus en plus vers une promotion des

    solutions amiables dans le traitement des litiges commerciaux, il doit rendre plus

    effectives et attractives les procdures dalerte et de rglement amiable, mais aussi de

    favoriser le traitement administratif des difficults des entreprises par lEtat lui-mme.

    Par le truchement de lEtat et de ses collectivits locales, des aides financires

    et fiscales doivent tre consenties aux entreprises malheureuses sans dvaloriser le

    rle crucial des initiatives prives qui peuvent apporter leur soutien. On se rfre,

    essentiellement, au rle du banquier qui doit tre revu et la possibilit dinstauration

    au Maroc du mdiateur de crdit limage du modle franais.

    Il est communment admis que la pratique cre le droit. Cest une bonne chose

    sans doute. Toutefois, ce droit constitu de plusieurs lois doit faire preuve dun usage

    bon escient. Car trop de lois tuent la loi. En plus, on risque de tomber dans linflation

    lgislative.

    Certes, une rglementation moderne qui vient corriger un cadre lgal, devenu

    inadapt aux contextes, est souhaitable. Mais pour que la mission du lgislateur soit

    accomplie, des textes daccompagnement des lois doivent tre adopts.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 28

    Il faut reconnaitre le besoin urgent dune intervention muscle du lgislateur

    marocain cet gard. LAttractivit du droit est un slogan lgislatif la mode 46.

    21/ Ltat des lieux tel quil peut tre dress aprs dj 15 ans (de la loi du 15-96 jusquaujourdhui) conduit une srie de constatations :

    Le lgislateur marocain avait apport des solutions plusieurs proccupations,

    mais la ncessit dune adaptation et dune harmonisation de ces rgles simpose

    avec insistance.

    Quoi qu'il en soit, il parat illusoire d'attendre de ces textes de loi marocains la

    ralisation dune satisfaction, tant que les textes rglementaires faisaient dfaut.

    On est ; malheureusement ; surpris par le nombre impressionnant d'obstacles qui

    s'opposent lapplication pertinente des dispositions lgales organisant la procdure

    de prvention au Maroc.

    La ralit de lapplicabilit de la procdure de prvention par les oprateurs

    conomiques laisse beaucoup dsirer. Ils ne sadressent au tribunal de commerce

    que lorsque lentreprise devient exsangue.

    Supposant que le lgislateur fasse preuve de beaucoup de zle et ait

    parfaitement adapt la loi marocaine aux ralits du climat des affaires ; les dirigeants

    dentreprises vont-ils faire preuve daudace et emprunter le chemin qui mne vers le

    bureau du prsident du tribunal de commerce afin de demander un rendez-vous pour

    que soient envisages des mesures de redressement ?

    A supposer toujours que le lgislateur marocain laisse comme tel le dispositif

    prventif, les oprateurs conomiques peuvent-ils opter pour les modes alternatifs de

    rglement des conflits commerciaux autant que voie extrajudiciaire ?

    III) Limpact de la crise financire sur les entreprises franaises et

    marocaines 22/ La crise mondiale actuelle a surpris les gouvernements de la plante par

    son ampleur et sa brutalit, malgr les plans de relance conomiques mis en place et

    linjection massive des capitaux pour renflouer les systmes financiers.

    46Persis Lionel ESSONO ONDO Deuximes journes du droit OHADA au Maroc , 21 au 23 avril 2011 Doctorant, Membre de lInstitut Franois GENY Ecole doctorale Sciences juridiques, politiques, conomiques et de gestion Facult de Droit, Sciences Economiques et Gestion de LUniversit de Nancy2. Page 1. Jean PALLUSSEAU, Le Big bang du droit des affaires , La semaine Juridique. Ed. G, n16 p. 15.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 29

    La crise financire sest double dune crise de confiance envers le systme bancaire,

    entranant un risque de banqueroute mondiale des banques. La sinistralit touche

    lensemble des entreprises en France, sans distinction de taille ou de secteur

    dactivit et stend toutes les rgions 47.

    Des problmes de trsorerie et des difficults financires sajoutent une

    conjoncture conomique qui dgringole au fil des annes, ce qui entraine des

    consquences dsastreuses en cascade48. Plus concrtement, les PME ne peuvent

    plus payer leurs factures temps, on court la catastrophe en chane, les grandes

    enseignes ont plus de difficults rgler leurs fournisseurs, qui ne peuvent plus leur

    tour sapprovisionner et payer les salaires de leurs employs 49, alors la crise

    financire peut causer les faillites dentreprises50.

    23/ Les entreprises risquent alors un dpt de bilan, cause de leur trsorerie obre et en raison, notamment du resserrement du crdit bancaire. Les banques

    sont devenues plus frileuses avec la crise.

    Les jeunes entreprises taient les premires victimes, avant les PME. Elles

    nont pas t pargnes des effets nfastes de la crise.

    Cependant, parmi les manifestations dites heureuses de cette crise on

    trouve, la plus forte croissance des procdures de mandat ad hoc et de conciliation.

    Ces procdures trs efficaces et confidentielles, sont des outils adapts la gestion

    de la crise ; permettant des entreprises, parfois trs importantes, de surmonter les

    difficults ponctuelles, sans perdre la confiance de leurs partenaires et clients. Mais

    galement un recours plus frquent la procdure de sauvegarde, avec deux types

    de pratiques : la sauvegarde oprationnelle et la sauvegarde prepacke . La crise

    a su dmontrer lefficacit accrue de ces procdures51, tant pour les PME que pour

    47Journal, les chos : Le monde de lentreprise a mis genou terre . Du lundi 05-01-2009. 48Difficults commerciales et financires importantes du groupe Legler Maroc suite la crise mondiale de 2007. A cause de la concurrence internationale, le groupe a finalement flanch cause du boom du textile chinois, indien et Bengale. Legler Maroc narrive pas trouver une solution de reprise ou de relance dactivit mettant en pril 5000 employs de lentreprise et ses multiples fournisseurs et sous-traitants, mais aussi des banques qui se trouvent obliger de provisionner des pertes sches.il sagit de la banque marocaine du commerce extrieur BMCE, attijariwafabank, et la banque centrale populaire.BCP.Magazine conomie &entreprise lindustrie aux abois .fvrier 2013.n156.page 18.note Ghassan wail EL KARMOUNI. 49Selon Karine BERGER, directrice des tudes chez Euler herms SFAC. V. article du journal aujourdhui le Maroc, la crise acclre la faillite des entreprises franaises .par Isabelle TOURNE ; n1778,17-10-2008. 50Selon le porte-parole du groupe Cauval industries, premier fabriquant de meubles francais.qui a constat que Les banques procdent galement des coupes de lignes de crdits sans que lon sache pourquoi .idem 51Rapport dactivit 2009 dAGS. Par Maitre Helene BOURBOULOUX, administrateur judiciaire au tribunal de commerce de Nanterre. Les solutions de prvention et les procdures amiables engages le plus tt possible vitent laccroissement fatal des difficults des entreprises en priode de crise , point de vue, entreprises et procdures collectives, page 12.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 30

    dimportants groupes comme Thomson SA et Auto dis. Nous y reviendrons en dtail

    lors des prochains dveloppements.

    24/ Le Maroc na pas t pargn des mfaits de la crise financire, mme si les autorits prtendent quil sagissait plutt des difficults financires et non pas

    dune crise financire 52.

    Cet tat actuel appelle la ncessit imprieuse de mettre en place des

    programmes audacieux pour attnuer limpact du ralentissement conomique sur les

    entreprises et cela sans atermoiement.

    A- Les retombes de la crise conomique mondiale se font dj ressentir sur lconomie relle marocaine

    25/ Limpact de la crise financire internationale sur le Maroc reste relativement limit , a estim Rabat le haut-commissaire au plan, Mr Ahmed

    LAHLIMI. Il a prcis que les donnes du FMI, indiquent que le taux dinflation en

    2008 est rest en de de 4% au Maroc, contre 15,8% en Jordanie,5,1% an

    Tunisie,9,4% dans les pays mergents et en voie de dveloppement.

    Il a galement affirm que la crise a contribu laggravation du dficit

    commercial, en ajoutant que les importations des produits alimentaires ont augment

    de 73%.

    Le Maroc, aprs avoir t pargn dans un premier temps de la crise

    financire, grce la solidit de son systme bancaire et sa faible exposition aux

    marchs financiers internationaux, subit depuis le deuxime semestre 2008 les

    rpercussions de la crise conomique mondiale ; par le biais des secteurs

    exportateurs, de lactivit touristique, des transferts des marocains rsidents

    ltranger MRE et des flux des investissements extrieurs.

    26/ Les responsables gouvernementaux et les partenaires conomiques Marocains sont unanimes sur la ncessit dtre vigilants et solidaires pour anticiper

    les vritables difficults. Ils sont galement unanimes mettre en place des mesures

    relatives la prservation de la comptitivit et de lemploi53.

    52Selon le ministre de la communication, porte-parole du gouvernement, M. Khalid NACIRI.www.aufaitmaroc.com, 18-08-2011. Le Maroc ne connat pas de crises financire mais des difficults financires . 53 En attendant que la crise passe, il faut faire nimporte quoi pour viter un taux de mortalit lev, il faut viter les grandes thories et tre pragmatique, il ne faut pas que le fisc fasse du zle dans le recouvrement et les redressements. De mme les syndicats doivent tre comprhensifs pour sauver des emplois, les banques doivent

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 31

    LEtat financera une partie des charges sociales qui psent lourdement sur les

    entreprises en cette priode condition de garder leurs salaris. (Prise en charge par

    lEtat de 100% des cotisations patronales la caisse nationale de la scurit sociale

    (CNSS).

    La deuxime intervention aura trait lallgement des difficults de trsorerie

    des entreprises, en mettant en place un plan pour garantir un financement dune

    grande partie des fonds de roulement qui varierait entre 50 et 65%.

    Le troisime volet concerne la promotion des exportations pour que lconomie

    nationale soit active au lieu de subir linfluence extrieure54.

    Aprs la runion de la cellule de veille, largentier du royaume a formul des

    messages rassurants, en estimant que tout porte croire que lconomie marocaine

    est capable de dpasser les effets nfastes de la crise. Selon la confdration

    gnrale des entreprises du Maroc (CGEM), le pays ne sera touch que lgrement,

    car lagriculture, en raison de la pluviomtrie importante, pourra compenser les pertes.

    27/ Les entreprises en difficult ont aujourdhui besoin de financement adapt. Quant aux entreprises encore en bonne sant, elles ncessitent toujours un

    financement leur permettant de se dvelopper. Pour avoir des entreprises solides, il

    faut un bon environnement conomique, car la crise financire a dmontr que les

    tablissements de crdit, les prestataires de services dinvestissement bnficiant des

    contrles internes dvelopps, comme les services dinspection et les commissaires

    aux comptes, ont sombr en quelques heures seulement.

    On peut sinterroger sur cet effondrement soudain qui se traduit par la faillite

    des mcanismes prventifs mis en place. Les entreprises nont pas su traiter en

    temps utile les difficults. On savait que la crise couvait mais personne na lintention

    de bouger 55.

    On est face des dirigeants de PME qui nenvisagent pas de mener une

    vritable stratgie ou politique de prvention ; il faut un effort colossal pour tenter de

    persuader un dirigeant de mettre en uvre une dmarche de traitement des risques,

    aussi renouveler les lignes de crdit aux entreprises en difficult pour ne pas les trangler financirement .estime le prsident dune banque de place. Revue conomie&entreprise. Op, cite. Page 18. 54V. acte de colloque. Le Maroc face la crise et laprs crise , Universit Hassan II, facult de science juridique conomiques et sociales) centre de recherches juridiques conomiques et sociales, Casablanca, 26 novembre 2009. Mr Abdellatif AL JOUHARI, gouverneur de Bank al Maghreb. Page 24 et 25. Les premires rponses la crise . 55V. Magazine conomie-entreprise, fvrier 2010. n123. Analyse de la crise mondiale, ses rpercussions sur lconomie marocaine, et les voies de sortie de crise pour notre pays .janvier 2010.par lconomiste Driss BENALI.012.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 32

    alors que des tablissements financiers mondiaux trs potentiels seffondrent comme

    un chteau de sable.

    28/ En France, hormis lagriculture, lensemble des secteurs est dans le rouge. Limmobilier est totalement sinistr avec une hausse de faillite de 55% en 2008.

    Les dfaillances progressent aussi dans lindustrie, les services, le btiment, le

    commerce et explosent dans le transport.

    Selon la confdration gnrale des petites et moyennes entreprises (CGPME), les

    difficults sont surtout sensibles dans lhtellerie et la restauration.

    Alors que le gouvernement a lanc un plan pour aider les PME pour se financer, il est

    essentiel de faire un bon diagnostic pour faire le tri entre les entreprises qui traversent

    une mauvaise passe, mais qui sont tout fait saines et les autres.

    29/ Au Maroc le secteur le plus touch par la crise financire est le textile, la srie noire commence dans le secteur du textile aprs 3 ans deuphorie. La crise

    internationale et la rcession dans plusieurs pays dvelopps frappent le Maroc.

    Concrtement, cela se traduit aujourdhui par un mouvement de licenciements

    au niveau de plusieurs units de production, pour la plupart, installes dans la rgion

    de Rabat-sal. Elles sont plus dune dizaine avoir mis sur les donneurs dordre

    britanniques qui, sous leffet de la crise, ont rduit leurs commandes auprs des sous-

    traitants marocains.

    Limportante dvaluation de la livre sterling na fait quaggraver la situation. Le

    textile est le secteur qui compte le plus grand nombre demplois au Maroc, plus de

    200.000 salaris, des licenciements massifs feraient monter en flche le taux du

    chmage.

    Le gouvernement marocain na mis aucun commentaire sur cette situation,

    mais une srie de runions ont t tenues entre professionnels afin de traiter les

    problmes du secteur.

    Lassociation marocaine du textile et dhabillement a lanc un cri de dtresse

    demandant au gouvernement des mesures urgentes de sauvetage.

    B- Comme en France, la mise en uvre dune politique daccompagnement des entreprises est primordiale

    30/ Avec la crise financire, les dfaillances des entreprises progressent fortement et avec elles les consquences sur lemploi. Le constat est simple, la

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 33

    conjoncture de la France nest pas florissante. En effet, aprs la dtrioration brutale

    de la conjoncture conomique en 2008, la crise a atteint son paroxysme en France au

    1er semestre 2009.

    Malgr un redmarrage progressif constat partir du 3me trimestre, le

    nombre de dfaillances et, plus particulirement les entreprises de plus de 100

    salaris, est en augmentation significative pour la deuxime anne conscutive.

    Lanne 2009 restera une anne marque par une trs forte rcession

    conomique qui sest propage dans lensemble du pays provoquant une trs forte

    progression des dfaillances dentreprise dans le monde.

    La France a retrouv les niveaux records de dfaillance, mais les diffrentes

    mesures de soutien aux entreprises(30 milliards deuros de moratoires), mises en

    place par les pouvoirs publics, les collectivits rgionales, et les tablissements

    financiers, ds la fin de 2008 et tout au long de 2009, ont permis un trs grand

    nombre dentreprises de poursuivre leurs activits. La prise de conscience est

    gnrale et de multiples mesures ont t prises afin daider ces entits en crise. Le

    but tant de pouvoir traiter le plus en amont possible les problmes rencontrs, afin

    dviter que le dbiteur ne se retrouve dans une situation irrversible.

    31/ En France par exemple et dans le but de venir en aide des entreprises qui souffrent de difficults perceptibles, lassociation pour la gestion du rgime des

    garanties des crances des salaris (LAGS)56 a su marquer sa prsence ; cest un

    organisme patronal cr en 1973 et ayant pour mission de garantir, en cas de

    procdure de sauvegarde, de redressement ou liquidation judiciaire des entreprises,

    le paiement des crances salariales rsultant de lexcution du contrat de travail.

    Face aux incertitudes de la conjoncture conomique et ses rpercussions sur

    la situation des entreprises, ce dispositif trs performant a apport chaque jour la

    preuve de sa ncessit et de son efficacit. Il a permis de limiter les effets

    destructeurs sur le plan social de louverture des procdures collectives, en raison de

    la multiplication des plans de sauvegarde de lemploi et des licenciements.

    56Elle remplit trois missions : -avancer les fonds ncessaires au rglement des crances salariales ; -rcuprer les sommes avances partir du suivi des plans de sauvegarde, les plans de redressement, les plans de cession, et de la ralisation des actifs de lentreprise dans le cadre des oprations de liquidation judiciaire. -assurer la dfense en justice des intrts du rgime de garantie. Voir dtails dans le rapport dactivit de la dlgation UNIDEC AGS. Au cur des enjeux conomiques, intervenir pour prserver lavenir .2009.page 1.

  • La prvention des difficults des entreprises : tude comparative entre le droit franais et le droit marocain

    Page 34

    32/ Il est communment admis que le droit agit au service de la pratique, cest pour cette raison que le lgislateur franais na pas nglig les transitions existantes

    pour leur prparer les lois qui leur conviennent. Cest cet gard qua t adopte la

    loi sur la sauvegarde financire acclre ou expresse(SFA), mise la disposition des

    entreprises confrontes des difficults financires et qui nont pas pu obtenir, dans

    le cadre dune procdure amiable, un accord, un acquiescement de tous les

    cranciers runis autour dune table de ngociation.

    On assiste en France des volutions lgislatives57, des solutions innovantes

    pour favoriser le traitement prventif des difficults des entreprises.

    33/ Au Maroc, les premires rponses la crise consistaient en plusieurs actions du gouvernement pour soutenir les secteurs productifs directement exposs

    leffondrement de la demande trangre. Pour sa part, Bank al Maghreb (BAM) a pris

    les dispositions ncessaires pour valuer et consolider la solidit du secteur bancaire,

    mais galement pour assurer la liquidit du systme bancaire, en vue de dynamiser

    lactivit conomique58.

    Afin dapporter un soutien aux entreprises affectes par la crise, le

    gouvernement a mis en place un dispositif de suivi et dvaluation de limpact de la

    crise.

    Ds lapparition des premiers signes de ralentissement de lactivit

    conomique, un comit de veille stratgique, compos de lensemble des ministres

    concerns de B