La Pression numéro n°8

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de mars Le Quotidien des Municipales 2008 réalisé par les étudiants de l’École supérieure de journalisme de Lille Numéro 8 Samedi 15 mars 2008 Motivés À Roubaix, les militants PS collent les dernières affiches sous la pluie. Contre-courant Delannoy élu facilement à Tourcoing ne cède pas aux sirènes de la communication. page 4 page 15 page 9 Lens : avant le Louvre, l’art de la division A payé ! Photo ESJ Photo KL Photo JD Les candidats règlent leurs comptes : locaux, tracts, affiches... Une campagne électorale a un coût. Entre prêts, dons et système D, relevé des milles et unes manières d’exister aux yeux des électeurs.

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MotivésÀ Roubaix, les militantsPS collent les dernièresaffiches sous la pluie.

Contre-courantDelannoy élu facilement à Tourcoing ne cède pas auxsirènes de la communication.

page 4 page 15

page 9

Lens : avant le Louvre,l’art de la division

A payé!

Photo ESJ

Photo KL

Photo JD

Les candidats règlent leurs comptes : locaux, tracts, affiches... Une campagne électorale a un coût. Entre prêts, dons et système D,relevé des milles et unes manières d’exister aux yeux des électeurs.

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L’ É V É N E M E N T

2La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

Fauchés !

FFaauuttee ddee ggrr iivveess,, oonn mmaannggeeddeess mmeerrlleess.. OOuu pplluuttôôtt ,,ffaauuttee ddee mmooyyeennss,, oonn iimmpprroo--vviissee.. LL’’aarrggeenntt ddeemmeeuurree lleenneerr ff ddee llaa gguueerr rree eenn ppéé--rriiooddee éélleeccttoorraallee.. EEnn ppooll ii --tt iiqquuee,, llee ffrriicc nnee ffaaiitt ppaass lleebboonnhheeuurr,, mmaaiiss iill yy ccoonnttrr ii--bbuuee ggrraannddeemmeenntt ssaannss ppoouurraauuttaanntt ggaarraanntt ii rr llaa vviiccttooiirreeddaannss lleess uurrnneess.. AAuuttrreeffooiissll ’’uunn ddeess ppaarr tt iiss ff rraannççaaiiss lleesspplluuss rriicchheess,, llee FFrroonntt NNaattiioo --nnaall pprreenndd aauujjoouurrdd’’hhuuiill ’’eeaauu.. ÀÀ tteell ppooiinntt qquu’’ iill aa ééttééoobblliiggéé ddee vveennddrree ssoonn ssiièèggeehhiissttoorriiqquuee,, llee PPaaqquueebboott,,ppoouurr ttrroouuvveerr ddeess ffoonnddss..DDaannss ddee nnoommbbrreeuusseess ccoomm--mmuunneess,, llee FFNN aa ddûû rreennoonn--cceerr àà pprréésseenntteerr ddeess ccaannddii --ddaattss,, ccee qquuii nn’’aa ppaasseemmppêêcchhéé SStteeeevvee BBrriiooiiss eettMMaarriinnee LLee PPeenn ddee ss’’ooff ffrrii rruunn ccll iipp ddee ccaammppaaggnnee àà1100 000000 eeuurrooss ppoouurr ccoonnqquuéé--rrii rr llaa mmaaiirriiee dd’’HHéénniinn--BBeeaauu--mmoonntt.. QQuueennttiinn SSéénnéécchhaall ,,ccaannddiiddaatt àà CChhââtteeaauu--ll ’’AAbb--bbaayyee,, vviill llaaggee ddee 880000 hhaabbii --ttaannttss pprrèèss ddee SSaaiinntt--AAmmaanndd--lleess--EEaauuxx,, aa iinnvveesstt ii ::aafffificchheess AA33 eenn ppaappiieerr ggllaaccééeett ccoouulleeuurrss.. MMaaiiss rréésseeaauuoobblliiggee,, ii ll aa rrééuussssii àà lliimmiitteerrsseess ffrraaiiss ddee ccaammppaaggnnee àà339966 eeuurrooss.. EEtt,, ii ll nn’’yy aa ppaassqquuee ddaannss lleess ppeettii ttss vvii llllaaggeessqquuee ll ’’oonn ss’’aarr rraannggee ccoommmmeeoonn ppeeuutt.. DDaannss llee VVII ee aarr rroonn--ddiisssseemmeenntt ddee PPaarriiss,, JJeeaann--MMaarrcc RReessttoouuxx eesstt ddeevveennuuccééllèèbbrree ggrrââccee àà ttrrooiiss bboouuttssddee fificceell lleess.. CCee «« ccoonncciieerrggeeddee ttrroottttooiirr »» ccoommmmee iill aaiimmeeàà ssee ffaaiirree nnoommmmeerr,, eesstt uunnSSDDFF qquuii ssuurrvvii tt aavveecc338800 eeuurrooss ddee RRMMII ppaarrmmooiiss !! UUnnee bboonnnnee ttêêttee,, uunnvveerrbbee flfleeuurrii eett ddeess rreevveennddii--ccaatt iioonnss ddaannss lleess ppoocchheessppeeuuvveenntt eennccoorree ssuufffifirree aauu--jjoouurrdd’’hhuuii ppoouurr ccoonnvvaaiinnccrree..LLooiinn ddee llaa ppoollii tt iiqquuee ssppeeccttaa--ccllee eett ddeess ppaaii lllleett tteess nnaatt iioo--nnaalleess,, lleess éélleecctt iioonnss mmuunniiccii--ppaalleess ssoonntt ll ’’ooccccaassiioonn ppoouurrbbeeaauuccoouupp ddee ffaaiirree eenntteenn--ddrree lleeuurrss vvooiixx.. MMêêmmee ss’’ii llnn’’aa ppaass ddééppaasssséé lleess 44 %%,,JJeeaann--MMaarrcc RReessttoouuxx aa rrééuussssiissoonn ccoouupp mmééddiiaatt iiqquuee……

Clémence Lambard

É D I TO

LA PRESSION de marsQuotidien réalisé par les étudiants de l’ESJ, de2e année (presse écrite et agence) et de PHR.Refermentation et maturation - Directeurde la publication :Pierre SavaryFermentation - Directeurs adjoints de la publication :Sylvie Larrière, Cyril Petit, Yves Sécher, Jacky DurandHoublonnage - Rédacteurs en chef :Marc-Antoine Barreau, Flore ThomassetNicolas Kienast, Clémence LambardEmbouteillage - Rédacteurs en chef techniques :Caroline Bozec, Florian Hervieux,Séverine Rouby, Guillaume WillecoqSur le blog des municipales de l’ESJ, lire, écouter et regarder les reportages des deuxièmes années :http://chroniquesdemars.blogspot.com

École supérieure de journalisme de Lille,50 rue Gauthier-de-Châtillon, 59046 Lille Cedex.Tel : 03.20.30.44.00. www.esj-lille.fr

uc Doubletgagne toujoursun scrutin. « Uneélection, c’est unbusiness », dit-il.Cette année, son

entreprise a fourni 3000 communesfrançaises en panneaux, isoloirs, urnesou écharpes de maires, la combinaisonmunicipales - cantonales faisant del’année 2008 un très bon crû. Si cetteentreprise du Nord qui a perdu le mar-ché de Lille ne communique pas sur leschiffres, un petit calcul permet de sefaire une idée de l’argent généré rienqu’avec les isoloirs (entre 220 et600 euros l’unité pour un isoloirsadapté aux handicapés) et les urnes(environ 250 euros). En général, les mairies renouvellent unpeu moins de la moitié du matériel parélection. En sachant que le nombremoyen d’électeurs d’une commune estde 1 300, qu’il faut environ un isoloirpour 1 000 personnes et qu’une urnepeut contenir jusqu’à 2 000 bulletins,le chiffre d’affaire de Doublet pour cesdeux produits devrait se situer entre700 000 et un million d’euros pour les3 000 communes. Sans compter lespanneaux publicitaires (100 euros), ta-bles (70 euros) et bustes de Marianne(740 euros mais 850 euros pour unbuste Deneuve ou Bardot). Il est clairque Doublet aimerait pouvoir voterplus souvent. D’autant plus que lesmaires ont l’orgueilleuse mais fruc-tueuse habitude de quitter l’hôtel deville avec leur écharpe ! Pression. Entre les isoloirs et lesurnes, le marché est pour les impri-meurs. Henri Roué, à la tête d’une im-primerie de 16 salariés à Jeumont(Nord), produit les bulletins mais aussiles professions de foi et les dépliantsd’une cinquantaine de candidats de sarégion. Il dope ainsi son chiffre d’af-faire de 30 % sur la période. « C’est pra-tiquement les seules fois où l’on travailleréellement à plein temps. Pendant les élec-tions, c’est le travailler plus pour gagner

plus », explique-t-il. Il déplore cepen-dant qu’internet fasse perdre de sonimportance au papier. Pouvoir d’achat. Un tract, c’est effi-cace, mais il le dit lui-même : « Rien nevaut le contact humain ». Ce qui profiteà la restauration puisque, surtout pourles municipales, les candidats vont deréunions publiques en petits déjeuners,de bars en restaurants. Mais les trai-teurs comme le lillois Lecocq préfèrentles plus grosses élections. « Les munici-pales n’augmenent que légèrement notre ac-tivité, ça n’a pas énormément d’incidencesur notre chiffre d’affaires », explique Jé-rôme Platteau, du service commercial.« Pour la présidentielle, nous avions beau-coup plus travaillé, il y avait plus de récep-tions et plus de moyens ». Quant auxgrands traiteurs parisiens, ils refusentde communiquer sur le sujet. Allô. La communication, justement,est la clé d’une campagne réussie et,pendant les élections, les ondes des té-léphones portables fusent. Sur ce sujet,les opérateurs de téléphonie mobilesont catégoriquement muets et ne com-muniquent des noms « que sur commis-sion rogatoire ». Mais chez Bouygues Té-lécom on reconnaît que « le trafic réseaudu week-end dernier a été un peu plus im-portant que d’habitude ».Conte de campagne. Autre moyende communication efficace : le livre.Après une présidentielle déjà riche enpublications, plus de vingt ouvrages surles municipales sont parus entre janvieret février 2008. Ils traitent des villes (Labataille de Paris (L’Archipel), des candi-dats (Jean-Claude Gaudin : Une vie pourMarseille (Rocher) ou sont écrits par lesprétendants eux-mêmes (Féminin sin-gulier : journal par Marielle de Sarnez(Plon). Les éditeurs refusent souventde donner les chiffres de vente de ceslivres toujours sur le marché mais pourÉlections municipales 2008 : mode d’em-ploi, Sara Korenbajzer, des éditionsNathan, concède qu’« il y a eu un grospic des ventes deux semaines avant le pre-mier tour jusqu’à maintenant ».

120 %. Au final, la plus belle histoired’amour des élections reste la presse.En 2007, année déjà dopée par la Pré-sidentielle, le tirage moyen du quoti-dien national Libération a été d’un peuplus de 140 000 exemplaires par jour.Le lendemain du premier tour des élections municipales, ce sont308 492 exemplaires qui se sont vusdiffusés, soit une augmentation de prèsde 120 % des ventes. Idem pour Au-jourd’hui en France, avec 82 % de bonus.Le quotidien régional La Voix du Nord,qui devrait logiquement profiter da-vantage de ces élections locales, a éga-lement augmenté son tirage, quoiquedans des proportions moindres, avecun “petit” bond de 34 %. Qui a dit queces élections ne se jouaient pas àl’échelle nationale ?

H.B.

Par Hélène Bekmezian, Méla-nie Carnot, Jean Décotte et Be-noist Pasteau L

La course aux voix touche à sa fin. Si pour lesimprimeurs ou les traiteurs c’est un moteur

économique qui s’arrête, les candidats, surtout lespetits, doivent payer l’addition.

Le blé de la campagne

L’addition s’il vous plaît

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Àla veille du second tour, les candidats commen-çent à faire leurs comptes, avant de les déposerd’ici deux mois, leurs budgets à la commission

des comptes. Le code électoral prévoit un rembourse-ment partiel de la campagne pour les candidats ayantobtenu plus de 5 %.Dominique Slabolepszy, candidat sans étiquette à Va-lenciennes, n’a pas dépassé ce seuil. « J’assume seul les6 000 euros dépensés ». 593 euros de tracts plus 5000 d’im-pression de professions de foi et bulletins de vote qui sontà sa charge. « Je m’engage par conviction politique et non paspar calcul financier ». Sans compter les dépenses person-nelles, comme le téléphone et les enveloppes timbrées.Heureusement que le candidat compte sur sa liste un res-

taurateur qui lui a fait don de repas entre colistiers aprèsles réunions. Un plafond de 50 % (par rapport au budgetglobal) est prévu pour ce type de dépenses.Pour Les Gens d’Hellemmes, la note est salée. Même sielle a obtenu plus de 24 % au premier tour, la liste pour-rait ne pas se faire rembourser les 6 000 euros de fraispersonnels. Raison : une association n’a pas la recon-naissance politique dans une élection.D’autres ont recours au prêt bancaire pour se lancerdans la course à la mairie. Bagdad Ghézal, le tête deliste et trublion de la gauche à Etaples, a emprunté5 000 euros. Il garde soigneusement les factures pourbénéficier des remboursements puisqu’il a récolté9,97 % des suffrages. Le candidat connaît les montantspar cœur. « Ce qui m’a coûté le plus cher c’est l’impressiondes tracts, des affiches officielles et des professions de foi. Entout, 1 682,26 euros qui seront remboursés par la Commissiondes comptes de campagne ». Mener une campagne, c’est

aussi compter sur les dons des sympathisants et mili-tants. De l’argent gratuit qui met du beurre dans les épi-nards. Parfois même des mécènes de la politique,comme pour Bagdad Ghézal qui a reçu ainsi 950 eurosdont « 300 venaient d’un sympathisant dunkerquois du MRC(Mouvement Républicain et Citoyen) ».Pour rentrer dans ses frais, le candidat a donc tout inté-rêt à jouer de ses relations. Un “ami” imprimeur est in-dispensable. À Château-l’Abbaye, Quentin Sénéchal aprofité d’une remise grâce à ses connaissances. Au total,sa campagne aura coûté 33 euros par colistier au lieude 100 euros pour faire imprimer 10 affiches, 350 dé-pliants, 350 professions de foi, et 1500 bulletins de vote.Quoi qu’il en soit, une gestion stricte du budget est né-cessaire, ce qui n’empêche pas quelques écarts de bud-get. Pour 200 euros, Les Gens d’Hellemmes se sontpayés une caravane équipée d’un mégaphone pour rou-ler en campagne … électorale bien sûr.

M.C. et B.P.

L’écharpe en bouts de ficelle

Les deux sousdes candidats

la campagneL’ É V É N E M E N T

3La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

Il faut une légende

Faire campagne sans un sou ? Pas siinsensé : SDF pendant trente ans,Jean-Marc Restoux briguait di-

manche dernier la mairie du VIe arron-dissement de Paris. Aucune fortune per-sonnelle, relogé depuis un an grâce àEmmaüs, ce barbu débonnaire est par-venu sans gros moyens à tutoyer 4 % dessuffrages. « Quand tu fais campagne, tu esforcé de payer les affiches, les bulletins, les pro-fessions de foi, détaille-t-il. Ça coûte1 800 euros en tout. Une colistière m’a avancél’argent, et je vais lui rembourser petit à petit.C’est un prêt énorme pour moi ! », lance lequinquagénaire, évoquant ses 380 eurosde RMI. Ni QG, ni meeting : à la tête desa liste Un autre son de cloche, Jean-Marc a fait campagne avec sa gouaille,le soutien de bénévoles et de célébritéscomme Frédéric Beigbeder, et un jolisens de la provocation. En proposant àDavidMartinon, débouté de Neuilly, derejoindre sa liste, l’ex-SDF a faitmouche. France 2, LCI, M6… Son his-toire séduit les journalistes. Un bel es-pace médiatique pour pas un rond.Certains petits candidats rivalisent d’in-géniosité pour exister face à l’armadades partis nationaux. Tel Hamza ElKostiti, candidat de Génération écolo-gique à Halluin, qui a parcouru à pied117 km entre sa ville frontalière etBruxelles à trois jours du premier tour.Résultat : 7,27 % et fusion avec la listedu maire sortant Jean-Luc Deroo (PS).Djemi Drici, lui, a enregistré 3,57 % des

voix : il avait créé la polémique avec saproposition d’offrir 300 euros de “pou-voir d’achat” à tous les électeurs, soitune aide totale de 3,3 M d’euros surfonds municipaux. « Je n’ai jamais voulufaire parler de moi, se défend-il. On m’aclassé parmi les dirigeants de républiques ba-nanières, mais mon idée avait été mal for-mulée. Il y a eu une incompréhension. »ÀLille, l’inventivité d’Etienne Forest nelui a valu que 642 voix, soit 1,09 % dessuffrages. Speed-dating politique, webTV, apéro-rap, soirée slam, et mêmel’organisation d’une grande “chenilledémocratique” orange et verte sur uneplace lilloise… Le parfait arsenal pourattirer les médias. Sauf que les25 000 euros investis dans sa campagnene lui seront pas remboursés. « Je suis unpeu plus léger sur mon portefeuille d’ac-tions », confie le candidat, philosophe.Même les grands partis la jouent éco-nome. Les réunions d’appartement, parexemple, coûtent peu et convainquentbeaucoup, comme l’explique StéphaneBaly, 15e sur la liste des Verts à Lille :« Ça se passe chez un sympathisant ou un mi-litant, sur le principe d’une auberge espagnole: chacun amène ce qu’il veut. Financièrement,c’est neutre. » Pas de location de salle, pasde frais de bouche. Et une efficacitémaximum : « À la fin d’une réunion, cer-tains invités étaient convaincus au point devouloir tracter dans leur voisinage. » Preuvequ’à l’heure du dépouillement, une cam-pagne dépouillée peut aussi payer.

J.D.

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E N R É G I O N

4La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

RROOUUBBAAIIXX. Maurice, Moussa et Brédé sillonent les ruesde la ville. Les partisans de René Vandierendonck ont pourmission de coller les cinquantes affiches de leur candidat.

eudi 13 mars. 21 h 30. Il pleut des cordes sur Roubaix. Dans laGrand Rue, au siège local du PS, des militants socialistes s’acti-vent. Ce soir, c’est collage ! Pinceaux, affiches, colle, ils embar-quent tout le matériel nécessaire. Quatre équipes sillonneront laville. « On se sépare, une équipe à l’Est, une àl’Ouest, une au Nord et l’autre au Sud de la

ville, explique Maurice, d’origine camerounaise etchef de file de cette joyeuse bande. Tout est prévu.On est une vraie armée déployée sur le terrain », plai-sante le membre du bureau de section.Première étape : le centre hospitalier de Roubaix. Tous descendent rapi-dement de voiture. Pas question de perdre une seconde pour les partisansde René Vandierendonck (PS), maire sortant et candidat à sa propre suc-cession. Ouverture du coffre. Sortie de l’équipement. Le moteur de l’au-tomobile continue de tourner. Ça va très vite. Maurice distille ses ordres.

Moussa s’occupe de décoller les affiches des « adversaires » tandis queBrédé passe la première couche de glu. Le tout dans la bonne humeur.Maurice l’avoue de lui-même : « Parfois, il nous arrive de pousser la chanson-nette. »Une fois le collage effectué, les militants repartent. Mais avant, pe-tite séance de nettoyage. Munis de sacs en plastique, ils ramassent tous lesdébris des affiches. « Bon les gars, on file vers l’école de police », lâche Maurice.La ville est soigneusement quadrillée. Ils en connaissent tous les panneauxd’affichage. Plan sur le tableau de bord, le copilote indique la route auchauffeur. « Mais bon, maintenant on connaît les moindres recoins de Roubaix »,raconte Brédé.22 h 15. Ça colle encore ! Cette fois-ci, en lisière d’un quartier populairede la ville. Des jeunes déboulent : « Ouais René, c’est trop bien », s’excla-ment-ils. Maurice interpelle l’un d’entre eux : « Avant de crier comme ça, ilfaut que tu ailles poser ton bulletin dans l’urne. Tu vas voter, au moins ? » Si-lence. L’adolescent ne répond pas. Et Maurice lui explique l’importancedu vote. Les soirées de vadrouille ne se résument pas à la simple pose d’af-fiche. Les militants socialistes en profitent également pour sensibiliser lapopulation roubaisienne.Des trombes d’eau continuent de s’abattre sur la ville. La tournée des pan-neaux s’achève. Avant de rentrer au bercail, petit tour rapide pour voir si

les affiches de Vandierendonck n’ont pas été recou-vertes. « On a gagné la bataille de la soirée, raconte Mau-rice, tout sourire. C’est un jeu énervant par moment. Avecnos adversaires, c’est la guerre des nerfs. Une guerre psy-chologique. Le but, c’est que nos affiches restent jusqu’au

petit matin pour que les gens les voient. » Ce soir, c’est le cas. Les militants so-cialistes n’auront croisé aucun « adversaire ». Retour au siège du PS. Petit café entre amis militants. Maurice ne paraîtpas épuisé. Les collages, il en a l’habitude : « Aux élections présidentielles, onfinissait à 4 heures du matin. Là, c’est un peu plus tranquille. On peut nous pren-dre pour des dingues mais, c’est comme ça… la passion. »

Lille, dans les locaux de France 3 Nord-Pasde Calais. Sur le plateau, on attend lesdeux candidats à la lutte pour la mairie de

Calais. Il est 20 h 30. À l’écart de l’agitation, Vé-ronique Marchand, la présentatrice, est au ma-quillage. Les techniciens, eux, sont sur le qui-vive. On règle les caméras, les lumières, leplateau « spécial second tour » est bientôt prêt. Ony est presque. Juste le temps pour Anne Brucy, ladirectrice de France 3 Lille, de serrer la main despersonnes déjà présentes : le directeur de cabinetet l’attaché de presse de Jacky Hénin, le mairesortant (PC), les deux politologues qui clôture-ront la soirée… Pendant ce temps, Natacha Bouchart, candidateUMP s’installe sur le plateau et profite du peu detemps qui lui reste pour relire ses notes. De soncôté, Jacky Hénin essaie de se détendre en faisantles cent pas dans l’Atrium, l’espace de décom-pression. 20h50, il est temps pour lui, le mairesortant, de rejoindre son adversaire. Du bleu, dublanc, du rouge, la Marianne qui observe tout sonpetit monde, le ton est donné. « Tout va bien se pas-ser, c’est parfait », Véronique Marchand rassure lesdeux candidats, surtout Natacha Bouchart,

moins habituée à l’œil des caméras que son rival.5, 4, 3, 2, 1, ça tourne. Le débat commence. En-registré dans la journée, un magnéto lance leshostilités : Mathieu Pagura, journaliste au quoti-dien Métro a une question à leur poser. Les can-didats y répondent chacun leur tour calmement.Jusqu’à ce que les choses prennent une autretournure. Il suffit d’évoquer le FN pour que lesesprits s’échauffent. Jacky Hénin digère mal lefait que le parti frontiste se soit retiré et va jusqu’àparler de « magouille » orchestrée par l’UMP etl’extrême droite. Véronique Marchand calme le jeu et passe à uneautre question. Différents thèmes sont abordés :emplois, immigrés… Par moments, le ton monteà nouveau. « Vous n’êtes pas le seul à faire la pluie etle beau temps à Calais M. Hénin. Les Calaisiens en ontmarre ! », déclare la candidate UMP. « Mme Bou-chart représente M. Sarkozy. Ce que vous voulez c’estdes places pour vous enrichir ! », fustige le maire sor-tant. Porté par deux personnalités qui visiblementen ont à découdre, le débat s’éloigne quelque peudu sujet. Allant même jusqu’à leurs propres dé-clarations d’impôts. Sauf que Véronique Mar-chand veille et met un terme à la discussion, non

sans ironie : « Vous n’aurez qu’à présenter vos décla-rations à la presse écrite. »21 h 30, le débat est clos. Sans un regard, les deuxprotagonistes quittent le plateau, direction lesloges pour le démaquillage. Suivront ensuitequelques réactions. « Un débat intéressant » pour lesdeux partis. Natacha Bouchart est « très sereinepour dimanche ». Jacky Hénin est « sûr que les Ca-laisiens ne pas sont dupes et maintiendront leur vote àgauche ». Retour à l’Atrium, place à la détente etau cocktail gracieusement offert par la chaînetélé. Un peu de répit avant dimanche où tout sejouera à Calais.

Dans les coulisses d’un débat télévisé

Par Gaël Arcuset

Par Camille Janik

22 H 15 : ÇA COLLEENCORE !

Véronique Marchand a accueilli les deux candidats de Calais sur son plateau.

Brédé est un ancien Roubaisien. Aujourd’hui, il vità Lille mais milite toujours dans sa ville d’origine.

DDUUEELL.. Avant le second tour, les prétendants à la mairie de Calais Jacky Hénin et Natacha Bouchart débattent dans les locaux de France 3.

Photo : G.A JPhoto : G.A

La nuit des afficheurs

Photo : C

.J

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L’ E S S E N T I E L

5 Samedi 15 mars 2008

Jeune loup contrevieux briscardurprise à Douai. La supré-

matie de Jacques Vernier(UMP), maire sortant, aété remise en cause au pre-mier tour des élections mu-

nicipales. Certes, cette année, il a ré-colté 49,75 % des suffrages et seules33 voix lui ont manqué pour être éludirectement. Une première depuis sonpremier mandat en 1983, puisquejusque là, il était systématiquementexempté de second tour. Faut-il voir làun simple accident ou un vote sanc-tion révélateur ? Pour lui, l’explicationse trouve dans le fort taux d’abstention(près de 50 %).Dimanche, il sera opposé à FrédéricChéreau (PS), à la tête d’une listed’union de la gauche. À 33 ans, il suc-cède à Marc Dolez, candidat en 2001et aujourd’hui député de la 17e cir-conscription du Nord. C’est le parle-mentaire lui-même qui l’a fait venir àDouai. Arrivé dans la cité de Gayantvoilà quatre ans, celui qui se définitcomme un « enfant du 21 avril 2002 » aobtenu 33,40 % des voix au premiertour des élections municipales.Recalés à l’issue du premier tour, FranzQuatrebœufs (MoDem), avec 8,80 %,et Léopold Pons (SE), avec 8,04 %,n’ont souhaité s’allier à aucun des deuxcandidats. Le report des votes de leursélecteurs pourrait s’avérer déterminantdans la journée de dimanche [voir ci-dessous]. Jacques Vernier possède tou-tefois de l’avance. Car, en plus des49,75 % de voix acquis au premiertour, il devrait bénéficier de l’appui desmilitants centristes, peu enclins à voterpour un candidat socialiste. Reste à sa-voir si les théories électorales devien-nent les vérités des urnes.

Ingénieur, spécialiste des questions environnementales,JacquesVernier devient directeur de l'Agence de l'eau Artois-Picardie en 1974, année qui coïncide avec son arrivée à Douai.En 1976, il adhère à l’UDR (ex-RPR) du Nord. « L'adhésion aumouvement gaulliste collait bien avec ce que je ressentais àl'époque, ce mélange de libéralisme et d'engagement social meconvenait bien et me convient toujours », explique-t-il sur le siteinternet de L’Observateur du Douaisis. Conseiller régional de-puis 1988, député européen de 1984 à 1993, député du Nordde 1993 à 1997, JacquesVernier s’impose aujourd’hui commela figure incontournable de la cité de Gayant. Il s’engage surtous les fronts (Imprimerie nationale, tramway). Il a même reçula médaille de la Légion d’Honneur en 2002 et l’ordre de com-mandeur dans l'Ordre national du mérite en 2005. Pour autant,« il sait rester humble », au dire de Marie-Hélène Quatrebœufs,colistière. « C’est un homme abordable,quelqu’un de chaleu-reux et amusant », raconte-t-elle.L’année dernière, il a annoncé vouloir passer la main, en casde réélection, à l’une de ses adjointes. Il s’est finalement raviséquelques mois plus tard.Goût du pouvoir ou amourde la ville ?

Ce diplômé de Sciences Po Paris est un véritable globe-trot-ter. Avant de poser ses valises dans le Nord sur sollicitationde Marc Dolez, il est passé par la Tunisie, la Lorraine, l’Aqui-taine et Paris. Au premier tour, il a récolté 33,40 % des suf-frages, loin derrière JacquesVernier.Mais il garde confiancepour le scrutin de dimanche.Militant socialiste depuis avril2002 – date de l’accession de Jean-Marie Le Pen au secondtour de l’élection présidentielle – Frédéric Chéreau, accom-pagné de sa liste d’union de la gauche (Verts, Parti commu-niste et Radicaux de gauche) affiche, aujourd’hui, clairementun optimisme à toute épreuve : « Tout est possible.Nous pro-posons un programme construit avec une équipe solide, com-pétente et prête dès le 17 mars », s’efforce-t-il à clamer.Confiance en soi ou volonté de ne pas avouer sa faiblesse ?Une chose est sûre, son programme est riche : logement, dé-veloppement économique et social, démocratie participative,transports, culture, sport… Il ne veut rien négliger. « Nous de-vons faire changer l’image de Douai avec un grand événementet qu’elle soit connue autrement que par les fermeturesd’usines. » Objectif : redorer le blason de la cité de Gayant.

Douai

Les arbitresÀ eux deux, Franz Quatrebœufs(MoDem) et Léopold Pons (SE) ont ré-colté 16,84 % des suffrages. Pour le se-cond tour des élections municipales,ils auront donc un rôle important àjouer. Pons a clairement appelé sesélecteurs à opter pour l’abstention.« Ni pourVernier, ni pour Chéreau, dé-clare-t-il. Il faut queVernier sache qu’iln’est pas le maire de tous les Douai-siens », explique le candidat sans éti-quette. Conscient des menaces qui pè-sent sur son siège de maire, JacquesVernier a très vite anticipé. À peine lesrésultats du premier tour annoncés, Il aaffiché son objectif : récupérer les voixcentristes du premier tour.Mais Qua-trebœufs ne l’entend pas de cetteoreille : il n’a donné aucune consignede vote.

Leduel

34C’est le nombre de villes que l’UMPpourrait perdre dimanche, selon une noteinterne du parti, révélée hier par Le Figaro.

JACQUESVERNIERUMP,64 ans.Maire sortant (depuis 1983).

FRÉDÉRIC CHÉREAUParti socialiste,

33 ans.Fonctionnaire territorial.

« Il y a un malaise au sein du conseilgénéral, un malaise lié à de vraisproblèmes de choix politiques. »

Isabelle Balkany, épouse du député-maire de Levallois, Patrick Balkany,au sujet du conseil général des Hauts-de-Seine, dirigé par Patrick Devedjian.

La phrasedu jourLe chiffredu jour

Par Gaël Arcuset

Photos

DR

La Pression de mars

S

Page 6: La Pression numéro n°8

Le taux d'abstention (60,48 %) a volé la ve-dette aux candidats roubaisiens. On estmalheureusement habitué à une faible

participation dans la deuxième commune duNord. Mais cette fois, alors que la participationaugmente au niveau national par rapport à 2001,elle baisse encore à Roubaix, passant de 45 % à39,52 %.Malgré ce faible taux de participation, le maire PSsortant, René Vandierendonck, était à deux doigts,ou plutôt à deux pour cent d’être réélu dès le pre-mier tour. Avec 48,06 % des suffrages obtenus, il

devance le candidat UMPMax-André Pick, qui arecueilli 19,01% des voix et Slimane Tir, crédité de13,67 % pour les Verts. On pourrait facilementconclure que les électeurs socialistes se sont dé-placés en masse, pendant que les autres regar-daient Téléfoot. Une opinion partagée par le chefde file UMP Max-André Pick : « Je pense que nousavons subi de manière forte la gigantesque abstentionroubaisienne. Notre électorat ne s’est pas mobilisé pour serendre jusqu’aux urnes et on le voit dans les bureaux devote qui nous sont habituellement acquis. »Une démobilisation générale qui ne démoralisepas pour autant Rémy, le plus jeune militantUMP : « Il faut continuer la campagne de terrain et sen-sibiliser encore les Roubaisiens. J’ai pris une journée decongé pour venir distribuer ces tracts. »Quoi qu’il en soit, tous les militants des trois der-niers candidats présents au second tour à Roubaixrestent sur le qui-vive et espèrent conquérir de nou-velles voix. Mais la tâche s’avère délicate, surtoutchez les jeunes, qui pour la plupart, n’iront pasvoter dimanche.Malik, qui avait soutenu SégolèneRoyal pendant la Présidentielle commente : « Le9 mars, je ne suis pas allé voter et je n’irai pas non plusdimanche [demain, ndlr]. Ici, les candidats se foutentde certains quartiers. Y en a que pour le centre-ville. De

toute façon, on ne nous écoute pas, on n’en a rien à fou-tre de nous. »Un second tour à l’image du premier ? Il faudraattendre dimanche pour le savoir, mais celui-ci nedevrait pas échapper à la mode roubaisienne. Mi-chelle, une commerçante d’une galerie mar-chande, confie qu’elle n’ira « pas voter dimanche. Lesélections étaient déjà jouées avant le premier tour. À quoiça sert d’aller voter quand on sait que le maire va êtreréélu ? Il n’y avait pas d’enjeux ici. » Pour Bertrand,c’est « l’abus de pouvoir » qui le fera rester chez luidemain. « Les candidats nous font croire qu’ils sontproches de nous pendant la campagne et puis lorsqu’ilssont élus, ils prennent leurs décisions sans nous consulter.Ils usent et abusent du pouvoir, ça me dégoûte ! »Chez d’autres, c’est le manque d’implication quiprévaut. Xavier n’a de roubaisien que son domi-cile. « J’habite à Roubaix, mais je travaille à Lille. Jeme sens davantage concerné par les élections lilloises. Jene suis à Roubaix que pour dormir et courir le di-manche. » Ce sera donc footing pour monsieur.Entre fatalisme, répulsion et manque d’implica-tion, certains habitants roubaisiens ne sont pas àcourt d’arguments pour rester bien au chaud chezeux dimanche. ÀRoubaix comme ailleurs, le fosséentre politiques et citoyens se creuse.

E N R É G I O N

6La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

Coup de com’du PSÀ vouloir fédérer les jeunes (plus de80 % d’abstention au premier tour à Lillechez les 18-25 ans), le PS s’est pris lespieds dans le tapis, jeudi, lors d’un pointpresse suivie d’une opération de trac-tage. De nombreux artistes et sportifs lo-caux, parmi lesquels Axiom (chanteur derap),Alexandre Lenoir (chanteur desBlaireaux) ou encore Saïd Rachidi(5e mondial de boxe amateur et qualifiépour les JO) s’étaient donné rendez-vouspour évoquer l’abstention des jeunes de-vant un parterre de journalistes !Après une demi-heure de banalités– « les jeunes doivent faire entendre leurvoix » – les militants socialistes se sontrendus devant le lycée Faidherbe,dansle quartier de Moulins. Seules quatre“stars”sur la dizaine présente ont dai-gné venir. Les militants se sont jetés surles lycéens,disant simplement : « VotezMartine dimanche. » Le tract choisi pourles démarcher était plutôt tendance.Descouleurs attirantes, type flyers qui annon-cent une soirée étudiante,des mots ac-crocheurs : « Ensemble à Lille,envoyonsun carton jaune à Sarkozy »…Mais les ly-céens – encore fallait-il qu’ils soient enâge de voter – ne sont pas dupes. « Cen’est pas une opération médiatique parhasard », se demandeYann,18 ans,de-vant les quatre caméras et la demi-dou-zaine d’appareils photos… Une opéra-tion de com’sarkozienne à la saucesocialiste en somme.

Benoist Pasteau

RROOUUBBAAIIXX..Dimanche dernier, la gagnante des élections a sans nul doute été l’abstention.Et le second tour a toutes les chancesd’être à l’image du premier...

Pierre Mathiot est directeur de l’Institutd’études politiques (IEP) de Lille. Pourquoi une telle abstention ?L’abstention est croissante, surtout dans les zonesurbaines et dans les zones populaires. Cela illustrel’éloignement traditionnel de la politique d’unepartie de la population, notamment des classespopulaires. Cela est d’autant plus vrai que lesélections, comme les figures publiques, sont deplus en plus complexes. Les alliances et la poli-tique d’ouverture compliquent la donne, les gensn’y comprennent plus rien. C’est un jeu d’échecsqui n’amuse que les journalistes et les polito-logues.

Les électeurs se désintéressent-ils des en-jeux locaux ?C’est dû au profil socioculturel, ça vaut pour Lille,pour la région et la France. Il y a toujours eu, partradition, une part de la population qui ne vote pas,notamment dans les couches les moins aisées. On al’impression qu’il y a eu plus de participation pourla présidentielle mais c’est que les courbes se sontcroisées. Avant on votait plus pour les municipaleset moins pour la présidentielle.

La participation au second tour sera-t-elleplus forte ?Il y a un risque que l’abstention soit encore plusélevée au second tour, surtout à Lille où les élec-teurs se disent que tout est joué d’avance. Mais celadépend des enjeux, les gens iront moins voter àRoubaix ou à Lille qu’à Villeneuve-d’Ascq ou à Ca-lais.

Roubaix a battu des records d’abstention…D’autant plus qu’il y a toute une partie de popula-tion d’origine étrangère qui se désintéresse de lavie politique. L’abstention est importante dans lescouches aisées (environ 40 %) mais encore plus(70-75 %) dans les couches populaires.

Une particularité dans l’abstention lilloise ?L’importante abstention à Lille est à mettre en par-tie sur le compte de l’important turn-over dans laville et de tous les étudiants qui ne viennent passerque deux ou trois ans dans la ville.

Et les abstentionnistes chroniques ?Il est difficile de mesurer cette abstention-là. Ce quiest sûr c’est qu’il y a de moins en moins d’absten-tion idéologique, de gens qui ne votent jamais.

« C’est un jeu d’échecs »

Par Jeffrey Martin

Voter n’est pasau programme

Propos recueillis par Hélène Bekmezian

Photo JM

Page 7: La Pression numéro n°8

E N R É G I O N

7La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

Duée prisen tenaille

«C’est une grande surprise. En nous plaçant entête avec 44 % des suffrages exprimés, les Mar-lysiens ont manifesté une volonté claire de

changement. C’est la conclusion d’un travail de terrain dedix-neuf années », se réjouit Fabien Thiémé. La vic-toire est encore loin d’être acquise mais le candidatcommuniste est bien parti pour accéder à la mairiede Marly, ville limitrophe de Valenciennes.Une consécration qu’il recherche pour la troisièmefois face à son « véritable adversaire », Philippe Duée.Ce dernier, maire sortant en poste depuis 1989, estpour le moment distancé puisqu’il n’a obtenu que30,11 % au premier tour. « Nous considérons que la par-tie n’est pas perdue. Nous avons la confiance de 30 % d’élec-teurs et il y a eu un bon nombre d’abstentionnistes », as-surait-il hier dans les colonnes de l’Observateur duValenciennois. La perte de son électorat peut s’expli-quer par le bon score réalisé par Jérôme Léman avec19,02 %. Adjoint de 2001 à 2003, ce centriste avait

démissionné au cours du mandat, en désaccord avecla politique menée par Philippe Duée, notammentdans les quartiers. « Il met de côté cette partie de la po-pulation. Sur les 400 millions d’euros consacrés à la réno-vation urbaine, Marly n’a rien eu. On est passé à côté del’ANRU [Agence nationale pour la rénovation ur-baine] », s’énerve Jérôme Léman avant de pointer dudoigt l’endettement important de la ville à hauteurde 12,5 millions d’euros.« Quand on regarde autour de soi, on s’aperçoit que Marlyse dégrade au fil des ans. Mais on n’a pas les moyens d’in-vestir. » En début de semaine, il a refusé les appels dupied de son ancien chef de file. Malgré sa place detroisième homme, il ne veut pas se sentir dans lapeau d’un « arbitre ». Reste à savoir à qui profiteracette triangulaire. « Ça va se jouer dans un mouchoir depoche », pronostique Fabien Thiémé.Autre enjeu de ce scrutin, Valenciennes Métropole.En cas de victoire de Fabien Thiémé, le basculement

deMarly à gauche redistribuerait-il les cartes au seinde la communauté de communes du Valenciennois,majoritairement à droite ? « Non, ça ne changera rien.La majorité est bien implantée dans le Valenciennois »,rétorque l’élu communiste.Une présence toutefois non négligeable, d’autantplus qu’Anzin pourrait subir le même sort. GéryDuval, le maire sortant (DVD), est en ballottage dé-favorable face à Pierre-Michel Bernard, candidat ra-dical de gauche. D’où la perte pour la majorité pré-sidentielle de deux des plus grosses communes deValenciennes Métropole (11 800 habitants pourMarly et 14 100 pour Anzin). Pour Jérôme Léman,la non-réélection de Philippe Duée permettrait àMarly de regagner une place digne à ValenciennesMétropole. « Il est clair que l’Agglo préférera travailleravec Fabien ou moi », conclut le challenger avouant aupassage avoir du respect pour son concurrent degauche mais pas pour son ancien leader.

«Je n’en peux plus, si vous saviez, jesuis vidée… »La gorge nouée, lavoix un peu tremblante, encore

choquée, Martine Roux témoigne deson « expérience » à la mairie de Four-mies. Une commune de 16 000 âmes,au fin fond de l’Avesnois. Un cal-vaire. Durant les sept (très) longuesannées qui ont constitué sonmandat,elle a porté l’écharpe bleu blanc rougecomme un fardeau. La mairie, c’estson chemin de croix à elle.Un adjoint écroué pour pédophilie, saresponsabilité engagée dans unenoyade, une guerre de pouvoir ausein même de son équipe… Elle atout vu, tout enduré. « J’en ai tellementbavé, je pourrais écrire un livre », lance-t-elle. Elle a tout entendu aussi. « J’aireçu des insultes de la part de mes adjoints,des choses ignobles. »Alors aujourd’hui, elle jette l’éponge.Deux mois avant les municipales2008, elle décidait de ne pas se pré-senter à sa propre succession. « Je n’aimême pas suivi la campagne électorale. »

Pourtant tout avait bien com-mencé. En 2001, à la tête d’uneliste de droite, elle est élue à la mai-rie de Fourmies, fief de gauche. Unpetit exploit pour cette novice enpolitique. « On appelait la ville la"fourmi rouge" à l’époque. Mon élec-tion était inespérée. J’avais vraimentenvie de faire quelque chose à mon arri-vée. »Et puis très vite, tout se dégrade.« Ça a commencé au sein même demon équipe. Quelques semaines aprèsl’élection, un petit groupe de six ad-joints s’est ligué contre moi. J’avais étéparachutée, personne ne croyait enmoi. Alors ils ont voulu prendre le pou-voir. » S’ensuit un véritable harcèle-ment psychologique. Lettres d’in-sultes, menaces… « J’ai porté plainte,l’affaire suit son cours. » Aujourd’hui,ses anciens adjoints sont conseillersmunicipaux d’opposition.Deux ans plus tard, en 2003, une fa-mille fourmisienne porte plaintecontre la maire. Leur fils est dans le

coma. Un soir de canicule le jeunehomme, éméché, plonge dans l’étangde la ville et heurte de la tête un petitmuret. Il n’y avait pas de ligne d’eauà cet endroit. La responsabilité del’élue est engagée. En 2005, le tribu-nal de grande instance d’Avesnes-sur-Helpe la condamne à verser5 000 euros d’amende. « J’y ai passétrois heures, comme une criminelle. » Lesélus de la région se mobilisent alorspour la soutenir : 601 d’entre eux luienvoient, symboliquement, un

chèque de cinq euros. Enfin, commesi tout ça ne suffisait pas, en 2006,elle croise un de ses adjoints et amià la sortie de la mairie… les mainsdans le dos, accompagnés de la po-lice. L’homme est suspecté de violsur sa nièce, mineure. « La goutted’eau », soupire Martine Roux. Jugémardi dernier, il a été reconnu cou-pable des faits. Alors non, MartineRoux ne brigue pas de second man-dat. « Je ne veux même plus entendreparler de politique ! »

Par Florian Pottiez

Martine Roux, 54 ans, garde un très mauvaissouvenir de son mandat à la mairie de Fourmies.

Pour le second tour, Philippe Duée (au centre) devra batailler ferme pour conserver son fauteuil de maireface à Fabien Thiémé (à gauche) et Jérôme Léman (à droite).

MARLY. Alors que le sort de sa voisinevalenciennoise est scellé depuis une semaine,celui de Marly est loin d’être réglé.Engagé dans une triangulaire,Philippe Duée, le maire sortant, est en difficulté.

Photo:Courrierde

Fourmies

FOURMIES. Élue en 2001 à la mairie de Fourmies,Martine Roux a enchaîné durant sept ans lescoups les plus durs. Une mauvaise expériencequ’elle n’a pas l’intention de renouveler de sitôt.

Par Julien Damien

Photos: Voix du Nord

Être maire ? Un calvaire !

Page 8: La Pression numéro n°8

Hallennes-lez-Haubourdin,3 810 habitants, se joue unetragi-comédie en deux

actes, deux tours et quatre personnages princi-paux. À droite : André Pau (le maire actuel) etVéronique Genelle (avec son ex-maire de mari,aujourd’hui inéligible). À gauche : Monique Her-duin (liste PS-PCF-Verts) et Suzanne Heusdens(divers gauche). Les figurants : une populationqui se demande s’il faut rire ou pleurer desfrasques de leurs élus. Rien ne change entre lepremier et le second tour (les quatre listes restentdans la course), personne ne meurt à la fin (pour-tant les échanges sont parfois verts), mais on nes’ennuie pas.Ce qui manque à la pièce, peut-être, c’est un élé-ment perturbateur. Mais des éléments perturba-teurs, il n’y en a pas beaucoup à Hallennes, à partles dealers qui boivent des bières dans leurs voi-tures allemandes au bout du quartier du Fort.« Les gens ont peur », estime Jean-Pierre Baert, ha-bitant du quartier du Fort et membre de l’oppo-sition (communiste). Vingt-cinq pour cent de voteFront national dans ledit quartier. Pourtant, lesimmigrés – cible habituelle de l’extrême-droite –ne courent pas les rues dans ce village cossudénué de logements sociaux. La grosse gendar-merie qui pousse sur une friche à quelques cen-taines de mètres de la mairie devrait calmer lesardeurs des bandes de jeunes.Derrière les murs antibruit de la RN41 qui coupele village en deux, rien ne bouge. Pas de marché,presque aucune activité sportive, un supermarchéglacial et un bistrot pour tout commerce. « Pff, ici,il n’y a rien, soupire un Hallennois, ex-entraîneurde basket.Même le club de foot est nul. » Beaucoupd’Hallennois n’ont pas vu la tête de leurs candi-dats durant la campagne, à part sur les affiches.D’ailleurs, les ha-bitants ne se fré-quenteraient pas.« Je suis ici depuis 30ans et je ne connais pas mon voisin », avoue l’ex-en-traîneur. Le bruit des voitures qui foncent versLille n’atteint pas les maisons bourgeoises de larue Cousteau. Tout est calme, luxe et ciel gris.Heureusement qu’il y a les municipales pour met-tre de l’animation. André Pau, l’actuel maire atrahi Patrick Genelle, son prédécesseur. Véro-nique, son épouse, se présente face au félon. Pau,le placide directeur de maison de retraite, l’ami

qui venait manger chez les Genelle, n’a plus demots assez durs pour qualifier Patrick Genelle,son ancien chef. « Une vraie disgrâce », pour Véro-nique Genelle.André Pau n’est pas le seul dans le village à re-garder de travers Patrick Genelle. Il avait la fâ-cheuse habitude de traiter ses colistiers « commede la merde », sourit Jean-Pierre Baert. Un peu ner-veux, Genelle aurait tendance à prendre les sensinterdits, à dépasser les limitations de vitesse et àse garer sur les trottoirs pourtant interdits de sta-

tionnement parlui-même.Mais il y a plusgênant que la dés-

involture et la conduite sportive de l’ancienmaire. En 2006, Patrick Genelle a été condamnépour prise illégale d’intérêts. L’école de musiqueavait brûlé. L’entreprise de menuiserie de sonbeau-père qui venait de lui échoir prenait l’eau.Il a fait réparer l’école vite fait bien fait par l’en-treprise : « Pour les enfants. Nous avions quatre ou-vriers sans travail. Ça a été fait en trois semaines », selamente Véronique Genelle.

Jean-Pierre Baert ironise : « Il a pris la décision toutseul. N’importe quel maire sait qu’on ne peut pas faireça. » Patrick ayant démissionné, Véronique se pré-sente pour son mari à l’élection du maire intéri-maire. Ô désespoir, elle n’obtient que deux siègeset démissionne le lendemain en jurant qu’on nel’y reprendra plus. Les Genelle en auraient-il finiavec la politique ? Non. « On est venu me chercher enjanvier », assure Véronique Genelle, arrivée troi-sième avec 14 % des voix. Elle esquisse un sou-rire. « Il a manqué six voix à André Pau pour être éluau premier tour. Elles sont chez moi. »La gauche aurait pu espérer en profiter. Mais Su-zanne Heusdens candidate de gauche depuis deslustres se serait rapprochée du MoDem et n’a ja-mais pu sentir les communistes. Ils sont bien im-plantés à Hallennes, du coup, une liste d’unionde la gauche se présente, face à la dissidente. Etles vieilles inimitiés empêchent les listes de fu-sionner.Un vieil Halennois s’amuse : « Il y a déjà eu desbras cassés, lors de campagnes municipales. » Joëlle,une native d’Hallennes analyse avec perspica-cité : « C’est vraiment clochemerle, ici. »

8La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

C’EST CLOCHEMERLE ICI.”

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E N R É G I O N

On nebadinepas avecla mairieHALLENNES-LEZ-HAUBOURDIN. Quatrelistes au premier tour. Quatre au second.Dans ce village à 10 km de Lille, lesMunicipales sont mouvementées...

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Par Gaël Cogné

L’ancien maire, Patrick Genelle,a réussi à lever contre lui les inimitiés

de tout le village. En 2001,l’un de ses anciens colistiers, blessé

dans son orgueil taguait sur son mur :« Ne votez pas pour le maire ».

Page 9: La Pression numéro n°8

∆ Habitants : 36 206∆ Taux de chômage : 16,2 %∆ Maire sortant : Guy Delcourt (PS)∆ Nombre de listes : 5

Dossier réalisé par :Delphine Lacroix,Julien Damien etMélanie Carnot.

«On a peur que les Len-sois aient un musée etn’en profitent pas. On

essaie de leur montrer que c’est unechance », revendique Grégory Galvaire.Plus facile à dire qu’à faire pour cechargé de communication à la com-munauté d’agglomérations Lens-Lié-vin. En 2004, la ville de Lens a étéchoisie pour l’implantation du Louvre2, destiné à exposer les collections dumusée parisien qui dorment dans lessous-sols. Ouverture prévue : prin-temps 2010. Mais déjà, le projet sèmela discorde du côté de la population etdes politiques. Jusqu’à devenir unthème de campagne. À la mairie, GuyDelcourt, candidat socialiste à sa pro-pre succession, accuse ses adversairesde ne pas soutenir le projet. Alors quedeux rues plus loin, au siège du Particommuniste (PCF), Jean-MichelHumez, tête de liste, se défend : « Nous

ne sommes pas anti-Louvre, mais il faut desprojets d’accompagnement. » Et les cri-tiques fusent.Déconnecté de leurs préoccupationsquotidiennes, le Louvre 2 apparaîtcomme trop ambitieux. « C’est trop bienpour nous », c’est ce qu’a entendu AnnieSt Arnoult, la candidate Pôle de re-naissance communiste enFrance (PCRF)-écologiste,lors de sa campagne. Sil’événement est sans aucundoute majeur dans lemonde culturel, les Lensoissemblent dans l’immédiatdépassés et peu concernés.Pourtant, la ville se préparedoucement. Les rénova-tions en centre-ville ont débuté, maisles cités minières en périphérie restentdélaissées. Chez les Verts, Naceira Vin-cent est catégorique : « Les grands oubliésdu Louvre, ce sont les Lensois. » Jean-Mi-chel Humez va plus loin : « Le parcourstouristique prévu dans la ville évitera forcé-

ment ces quartiers, délaissés par la mairie. »D’un côté, un musée qui n’intéressepas les habitants. De l’autre, un parchôtelier incapable d’accueillir le sur-plus de visiteurs, du personnel nonqualifié.« C’est un projet qu’il faut préparer enamont, constate Naceira Vincent. Or,

aucune formation pour l’apprentissage del’anglais n’est mise en place. » Le projet estacté, mais les créations d’emplois sontencore au point mort. Cent cinquanteemplois directs sont prévus, mais prin-cipalement des spécialistes de l’art, desconférenciers. Dans tous les cas, ils ne

seront sûrement pas Lensois, alorsmême que ces offres d’emploi étaientun argument de la région en faveur dela venue du musée dans le bassin mi-nier. Naceira Vincent renchérit : « Leparcours touristique passera par Béthune,Lille ou Arras. Des villes qui ont la possibi-lité d’héberger les visiteurs. Lens n’en profi-

tera pas ». Pourtant, les touristesdorment, mangent, consom-ment… de quoi donner confianceà certains. Béatrice Permuy, têtede liste UMP, est de ceux-là : « LesLensois s’adapteront, j’ai confiance eneux. La ville bénéficiera de l’aura duLouvre 2 ». Et pour ne pas mettrela périphérie de la ville de côté,« les parcs de stationnement pourront

être aménagés là-bas ».Lens s’est battu pour remporter l’appeld’offres. Pourtant, la ville peine à se dy-namiser. Un retard que le futur mairedevra combler d’ici 2010, sous peine devoir “l’effet Louvre” bien plus faiblequ’escompté.

9La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

F O C U S

Lens

« LES GRANDS OUBLIÉSDU LOUVRE, CE SONT

LES LENSOIS »

REPÈRES

Photo : Julien Damien

Le Louvre 2divise

les candidats

Photo DR

Page 10: La Pression numéro n°8

Nom :DelcourtPrénom :GuyÂge : 60 ansParti :PS

Nom :VincentPrénom :NaceiraÂge : 42 ansParti :Verts-MoDem

Nom :PermuyPrénom :BéatriceÂge : 54 ansParti :UMP

� S’appuyer davantage sur la cellulemédiation de rue pour mieux luttercontre la délinquance.

� Bien que la loi ne l’oblige pas pourles communes de moins de80 000 habitants, renforcer la poli-tique des comités de quartiers.

�Création d’une police municipale :sécurisation à la sortie des écoles,lutte contre les incivilités, bruits, sta-tionnements gênants, dépôts sau-vages.

�Création d’un conseil municipal dejeunes ainsi que d’un dispositif demédiation, création d’un groupe d’as-sistance jeunesse. Réunions des co-mités de quartier.

� Sécurité routière d’abord. Aménage-ment de pistes cyclables sécurisées dansles grandes artères et le centre-ville. As-surer la sécurité des enfants à la sortiedes écoles.

� Droit pour les Lensois d’avoir unpouvoir de décision et de propositionpour l’avenir de leur ville, par le biaisdes comités de quartiers. Commissionmixte avec les commerçants.

� Avec le parking de 2 000 places à800 mètres du centre-ville, il ne de-vrait plus y avoir de problèmes, maisnous voulons continuer nos efforts.

� Ne pas démolir le parking de laplace de la République, ni les par-kings du centre. Étudier la possibilitéde parkings “extérieurs” avec des na-vettes aux heures de bureau.

� Stationnement en épi dans lesgrandes artères du centre ville, unpartage de la ville entre automobiles,vélos et piétons, contre le stationne-ment payant.

istorique. À Lens, pourla première fois depuisplus de cinquante ans,un maire socialisten’est pas réélu dès lepremier tour des muni-

cipales. Guy Delcourt, l’édile sortant, ne comp-tait au soir du 9 mars “que” 47,22 % dessuffrages. Soit 12 points de moins qu’en2001. Une invitation à revenir voter le16 mars qui s’explique en partie par la dé-mobilisation des électeurs lensois. L’absten-tion plafonnait en effet à plus de 47 % di-manche. Une situation inédite dans la villeartésienne, à laquelle vient s’ajouter unautre record, régional celui-ci : le nombre delistes présentes au second tour, avec pasmoins de cinq candidats encore en lice. Et parmieux trois listes… de gauche. Car si Guy Delcourtest assuré de l’emporter dimanche soir, il n’aurapas pour autant réussi à unifier son camp. Unedésunion qui lui aura sans doute coûté le premiertour. Un morcellement qui ne profite d’ailleurs à

personne, car du côté des “petites listes”, per-sonne ne s’entend pour tenter un front commun,alors que tous affirment vouloir jouer un rôled’opposition.Jean-Michel Humez (PCF-Lutte ouvrière),Annie Saint-Arnoult (PRCF*-Groupe écolo-giste lensois) et Naceira Vincent (Verts-

MoDem) ne sont pas parvenus à trouver un ac-cord lors de l’entre-deux tours. Pire, seuls lesdeux premiers auront essayé de discuter. AnnieSaint-Arnoult confiait qu’un rapprochementavec les communistes, tenté mardi soir, s’avéraitfinalement « impossible ».

« M. Humez voulait absolument la tête de liste, sansdiscuter. Ce qui n’est pas logique, car nous avions faittout le travail durant le mandat, justifie la conseil-lère municipale. De plus, il ne cache pas l’éventua-lité d’accepter un poste dans l’exécutif si M. Delcourtle lui proposait. Ce que nous refusons. »Au PCF, l’in-téressé se dit ouvert à toute proposition d’al-

liance, mais avoue avoir été refroidi parl’appétit d’Annie Saint-Arnoult, qui elleaussi « réclamait la tête de liste fusionnée ».De son côté, Naceira Vincent n’a rien es-sayé, parce que « c’est à ceux qui ont réalisé leplus gros score de venir l’approcher ». Elle dé-plore toutefois cette absence d’ententeentre les candidats : « Avec une seule listenous aurions pu peser plus lourd durant lesconseils municipaux face à Delcourt. Là on va

se retrouver chacun avec un ou deux représentantsmaximum. Nous ne ferons pas le poids. » Une dés-union à gauche qui pourrait bien faire les affairesde Béatrice Permuy, la prétendante UMP.

*Pole de renaissance communiste en France

10La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

F O C U S

Aucune alliance et cinq listesau second tour, un recorddans le Nord-Pas de Calais.

Ensembledans la désunion

« ONVA SE RETROUVER CHA-CUN AVEC UN OU DEUX ÉLUS

MAXIMUM.NOUS NEFERONS PAS LE POIDS. »

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Sécurité

Circulation

Démocratieparticipative

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Nom :Saint-ArnoultPrénom :AnnieÂge : NCParti :DVG

Nom :HumePrénom :Jean-MichelÂge : 54 ansParti :PCF

11La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

F O C U S Quelle premièremesure doitprendre votre

prochain maire ?

« J’aimerais qu’ilfasse quelque chosepour le stationne-ment des voitures. Je

trouve qu’il y a un réel problème à ce ni-veau-là à Lens. Je suis commerçante, etmes clients doivent faire trois fois le tourdu centre-ville pour trouver à se garer.Même moi j’ai du mal. Je me suis encorepris trois P.V. rien que cette semaine ! »

Prénom :MyriamÂge : 55 ansProfession :Coiffeuse

L’UMP est-il en train defaire son trou à Lens, fiefsocialiste s’il en est ?

C’est en tout cas ce que donne à pen-ser, à la première lecture, le résultatobtenu par Béatrice Permuy, la candi-date de droite, au soir du premier tourdes élections municipales. En attei-gnant 18,41 % des suffrages, la tête deliste de Lens c’est vous a en effet qua-siment doublé le score qu’elle avaitréalisé en 2001*. Et se place désor-mais comme la seconde force du pay-sage politique local. Loin, il est vrai,derrière Guy Delcourt, le maire sor-tant, à plus de 47 %, mais 6 points de-vant son premier poursuivant.« Le travail que nous avons réalisé depuissept ans maintenant a porté ses fruits, etaujourd’hui nous nous implantons toutdoucement à Lens », se réjouit laconseillère municipale d’opposition.« On ne peut que se féliciter du score réalisépar Béatrice Permuy », affirme de soncôté Philippe Rapenau, le secrétairedépartemental de l’UMP dans le Pas-de-Calais, ajoutant que ce résultats’inscrit dans « une dynamique pas simauvaise que ça sur le département,lorsque l’on considère les victoires à Arras,Saint-Pol-sur-Ternoise ou encore Calais ».Alors oui, l’UMP a réalisé un scorehistorique dans la capitale artésienne, mais c’est sanscompter sur l’absence des deux listes de l’extrême-droite, qui avait rassemblé à elles deux 13 % desvotes en 2001. « Les votes extrémistes ne se sont pas re-portés sur notre liste, et c’est tant mieux ! » se défend Béa-trice Permuy. Soit.Mais surtout, comment ne pas mettre ce chiffre en re-lief avec le taux d’abstention (47 %) enregistré àLens ? En y regardant de plus près, on constate qu’en-tre l’élection de 2001 et celle de 2008, si la droite abien doublé son score, elle n’a en revanche gagnéque… 916 électeurs (2 251 dimanche dernier contre

1 335 il y a sept ans). Une progression donc, mais passi spectaculaire que l’on veut bien le croire, ou le fairecroire… « Il est vrai qu’il faudra attendre le deuxième tourpour confirmer une réelle percée de l’UMP à Lens », tem-père tout de même Philippe Rapeneau. Finalement,la vraie question à Lens est de savoir s’il y a bien uneplace pour l’opposition, car comme le constate Na-ceira Vincent, la candidate des Verts alliés auMoDem : « Ici, on vote socialiste, ou on ne vote pas. »

* Béatrice Permuy avait obtenu 9,81 % des suffrages lors des mu-nicipales 2001, au sein d’une liste d’union RPR, UDF et DL.

« J’aimerais bien quele maire fassequelque chose pourles plus démunis. Ici

la précarité est très élevée, plus qu’ail-leurs. Bien sûr il va y avoir le Louvre,c’est une bonne chose,mais ça ne serapas pour nous. »

Prénom :Marie-AnnickÂge : 47 ansProfession :Sans emploi

« J’attends du mairequ’il fasse quelquechose pour le loge-ment. Qu’il les ré-

nove ou en construise d’autres. J’habitedans une ancienne cité minière, et mamaison est complètement insalubre. Jedois être relogé mais je ne sais pas où jevais aller. J’aimerais habiter dans un en-droit plus digne. »

Prénom : AlainÂge : 27 ansProfession :Valet de chambre

« La sécurité est cequi me préoccupe leplus. Plus de pa-trouilles policières,surtout très tôt le

matin et tard le soir. Je le vois le matinquand je me rends au travail. Je travailleà Lille. Il y a aussi des choses à faire pourl’animation culturelle, insuffisante dans laville. Nous manquons également decommerces. »

Prénom : PascalÂge : 48 ansProfession :Agent SNCF

� Le commissariat de quartier doitrester ouvert en permanence. Créerdes postes de médiateurs de rues etrouvrir les CAJ (Commissionsarmée-jeunesse).

� Mise en place de budgets partici-patifs. Redonner le pouvoir aux ci-toyens doit être l’instrument d’unepolitique publique en faveur descouches populaires.

� Démocratie délibérative. Électionau suffrage universel pour les com-munautés d’agglomération, budgetsparticipatifs, référendums locaux etd’initiative populaire.

� Revendiquer des moyens pour lapolice nationale. Mise en place d’unoffice de la tranquillité. Création ducontrat de réussite solidaire pour lesjeunes.

� Relier les quartiers entre eux et aucentre : transports en commun gra-tuits et performants, des parkingsgratuits aux entrées de ville et despistes cyclables sécurisées.

� Développer la mise en réseau desmodes de transport. être attentifs auxhoraires des usagers. Accélérer lestravaux engagés pour un accès plusfacile au centre-ville.

En 2001, la liste PSn’a même pas eu besoindu Parti communistepour emporter la mairie.

Pour la première foisdepuis cinquante ans, lagauche n’est pas passéedès le premier tour.

MUNICIPALES2008 : 1er tour

MUNICIPALES2001 : 1er tour

Photo: G.A.

Liste Delcourt (PS) : 59,35 %

Liste Mismacque (PCF) : 10,82 %

Liste Barbet (MNR) : 10,46 %

Liste Permuy (RPR-UDF) : 9,88 %

Liste Saint-Arnoult (DVG) : 7 %

Liste Fontaine (DVD) : 2,49 %

Liste Delcourt (PS) : 47,22 %

Liste Vincent (Verts-MoDem) : 10,52 %

Liste Permuy (UMP) : 18,41 %

Liste Saint-Arnoult (DVG) : 12,70 %

Liste Humez (PCF) : 11,15 %

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Béatrice Permuy, UMP, a obtenu 18,41 % des voix au premier tour.

Mal à droite

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F O C U S

12La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

Un melting-potpolitiqueNaceira Vincent s’est beaucoup cher-chée. En 2001, elle s’alliait au Parti com-muniste sous l’étiquette “Écolo alterna-tif”. En 2004, elle décide de s’engagerpolitiquement et rejoint les Verts. Au-jourd’hui à la tête de la liste “Atout Len-sois”, elle allieVerts et MoDem… et doitfaire face aux critiques : « On me dit quema liste n’est pas de gauche,mais c’est untrop mauvais argument, explique-t-elle,l’important est de créer un regroupementpolitique local. »

Un tramwaynommé désirUn tramway entre Lens et Hénin-Beau-mont pour remplacer la ligne“buLLe deTadao” ? Il pourrait faire escale au Lou-vre-Lens, au stade Félix Bollaert et re-joindre le centre commercial deNoyelles-Godault. Le projet est en cours,même si la date de fin reste hypothé-tique. En 2015, les Lensois pourront peut-être emprunter ce nouveau moyen detransport, très en vogue dans la région.En effet, un tramway devrait rejoindreBéthune et Bruay-La-Buissière à l’avenir.

Le terril écoloL’ancien site minier “11/19” fait l’objetd’une réhabilitation des anciens bâti-ments dans le respect des normes Hautequalité environnementale. Avec l’im-plantation prévue pour le mois de juind’éco-entreprises et un projet sur le dé-veloppement durable, la communautéd’agglomération Lens-Liévin colore leterril en vert. Au programme pour lestouristes ou les curieux : visites guidéeset explications de l’écologie.

Conseil désertéLes vacheries et pics lancés à l’adver-saire animent toujours le quotidien descandidats. Pour le second tour, les cinqrivaux continuent de semer la zizaniedans la campagne. Béatrice Permuy ac-cuse Annie Saint-Arnoult de ne pas sié-ger au conseil municipal depuis troisans. Cette dernière répond à sa concur-rente : « Mes propositions sont toujoursrefusées.Ça décourage. »

Grosse têteGuy Delcourt n’en finit pas de subir lescritiques de ses adversaires. « Il est hau-tain », lance Jean-Michel Humez. « Lesdécisions du conseil municipal relèventdu monologue, regrette la tête de listeNaceira Vincent, c’est un personnage ».Annie Saint-Arnoult, pour sa part, l’ac-cuse d’être « déconnecté du terrain ».

Échec du Stopbus

Le réseau de bus devant relier les par-kings à la périphérie de Lens jusqu’aucentre-ville ne fait pas l’unanimité dansla course à la mairie. Les adversaires deGuy Delcourt sont d’accord pour direque les horaires sont inadaptés (entre9 h et 17 h).Mais chacun y va de sa petiteidée. Un échec pour le maire sortant quidevra revoir le plan de circulation.

Un camping à LensAnnie Saint-Arnoult prend son expé-rience de touriste en exemple et vajusqu’à en faire une proposition. Elle sesouvient de la tente qu’elle a planté enHollande lors de sa visite des musées.Un camping pour accueillir les touristesserait pour elle « une bonne idée ».

Toutes alignées strictement les unes à côté des au-tres, les maisons des cités minières ne ressem-blent en rien au Louvre. Des briques rouges, des

barrières cassées, des écharpes “Sang et or” à l’intérieurdes maisons, on est loin des fastes du plus grand muséedu monde. Tous fiers de leur ville et de leurs racines his-toriques, les habitants de la cité 11 attendent pourtant ungeste de la part de la mairie. Jeannine, 68 ans, connaît bienles lieux. Elle y habite depuis plus de 20 ans. « Les rues de-vraient être plus propres. Je ne me sens pas particulièrement dé-laissée, mais c’est vrai que les projets tardent à être réalisés » re-grette-t-elle. La majorité d’entre eux déplore lesdégradations et le manque de sécurité. Jeannine renché-rit : « J’ai été cambriolée l’année dernière. » Théodore, 36 ans,vit à quelques mètres de chez la vieille dame. « Le soir, lesrues deviennent incertaines. Les jeunes ne se gênent pas pour for-cer les garages et voler à l’intérieur », déplore-t-il.Pour d’autres, c’est plus que calme. Labir, 34 ans, s’est ins-tallé il y a deux ans. « J’ai déjà entendu parler de cambriolagesmais pour moi tout va bien. » De son côté, Isabelle est satis-faite. De nouvelles fenêtres ont été installées. « Je n’ai pasde souci particulier avec mon logement, mais c’est plutôt l’insé-curité routière qui me préoccupe. Les voitures déboulent à toute vi-tesse. Il n’y a pas de ralentisseurs, alors que le centre-ville n’enmanque pas », explique cette mère de famille.

La cité 11 n’est peut-être pas le plus beau quartier de Lens,mais ses habitants y sont attachés. Ils ne sont pas du genreà se lamenter sur leur sort mais « un peu plus de vie dans lequartier ne serait pas de trop », ajoute Isabelle. Les ancienssont la mémoire d’une époque où ces maisonnettes re-couvraient une majeure partie du territoire. « Avant, c’étaitbeau », explique Jeannine. Et maintenant ? « Les commercesont disparu. »Les projets de rénovation s’amoncèlent mais n’aboutissentpas. Du coup, les cités minières deviennent une polémiquede campagne. Les candidats de l’opposition rendent GuyDelcourt responsable des retards annoncés. Jean-MichelHumez, le candidat communiste, dénonce le laxisme de lamairie en place. « On a l’impression que les élus socialistes lais-sent faire, alors qu’ils devraient se battre pour que la rénovations’accélère. » Béatrice Permuy, la figure locale de la droitelensoise, va même jusqu’à accuser la gauche entièred’avoir délaissé les anciens mineurs. « Jamais je n’ai vu lessocialistes aider ces gens-là. »Quoi qu’il en soit, la Communaupole (Communauté d’ag-glomération de Lens-Liévin) se charge d’accompagner lespropriétaires désirant bénéficier du programme d’État“Aide à la pierre”. Une manière de conserver les maisonstout en les mettant aux normes. Certaines sont détruites etremplacées par de nouvelles habitations. Désormais, lespierres des cités minières détruites se vendent cher. Au-ront-elles un jour leur place au Louvre de Lens ?

Le Louvre attirera des mil-liers de visiteurs françaiset étrangers. Mais l’his-

toire des anciennes mines de char-bon aura aussi sa place dans le cir-cuit touristique. Depuis le mois dejanvier, le pays de Lens et Liévin areçu le label “Ville et pays d’art etd’histoire” par le ministère de laCulture et de la communication.Une distinction qui vise à pro-mouvoir le patrimoine et l’archi-tecture. Quelques 95 villes et36 pays ont déjà reçu le label na-tional. La communauté d’agglo-mération attend donc la signaturede la convention avec l’État (liéeau label), qui prévoit la création

d’un office de tourisme, le recru-tement d’un chargé du patrimoineet l’instauration de conférencesthématiques. « Notre objectif est dedévelopper le tourisme de mémoire. Ilfaudra amener des touristes au Louvreet leur proposer une formule théma-tique d’une semaine avec des visites desites liés à l’activité minière », assureGrégory Calvaire, chargé de com-munication à la Call (Commu-nauté d’agglomération Lens-Lié-vin). La sensibilisation du jeunepublic à l’architecture et au patri-moine constitue un enjeu impor-tant de la mise en oeuvre de laconvention. Pour l’heure, un par-cours thématique a été initié.Un nouveau souffle donc pour lebassin minier lensois qui peine de-

puis des années à se valoriser.Pourtant la Call comprend la villede Vimy, où le cimetière de la Pre-mière Guerre mondiale constitueun succès touristique, mais c’est« davantage Arras qui bénéficie decette image de marque », regretteGrégory Calvaire.Le Louvre 2 a sans conteste jouédans l’obtention du label national.Depuis 2004, Lens revoit sonimage et tente de mettre en avantle tourisme minier. Sur les127 millions d’euros d’investisse-ment pour la délocalisation dumusée à Lens, la communaupoleparticipe à hauteur de 10 %. Ellepouvait donc bien consacrer unepart de son budget à la promotiondu patrimoine local.

Le bassin minier labellisé

Les cités des fosses 9 et 9bis ont étédétruites pour faire place au Louvre 2.

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Les habitantsdes cités minièresparlent peu,mais ils votent.Pas de plaintes,juste l’espoir de voirleur cadre de vies’améliorer.

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L’ E N Q U Ê T E

13La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

ouvent, ce chiffre est agité comme un épou-vantail censé effrayer les corbeaux du fémi-nisme et faire taire les chiennes de garde.33 %. Soit la part de femmes présentes dansles conseils municipaux. Un résultat biensupérieur aux 17 % d'élues qui peuplent lesrangs de l’Assemblée nationale. À celas'ajoute la figure de Martine Aubry qui

étend son ombre sur la région, laissant croire à certainsqu'une carrière politique d'envergure nationale est à laportée de toutes. Et pourtant, les chiffres parlent d'eux-même : 11 % des maires sont des femmes, et 85 % destêtes de listes candidates lors de ces élections munici-pales sont conduitespar des hommes. LeNord-Pas de Calais au-rait d'ailleurs tort des'enorgueillir de sa si-tuation puisqu'il pointeà l'avant-dernière placedu classement régional en nombre de femmes maires(8,5 %). « Les zones industrielles sont souvent les mauvaisélèves de la parité car plus qu'ailleurs, l'entrée des femmes enpolitique y est tardive », explique Michèle Mathé, prési-dente de l'Observatoire régional de la parité.Alors, en 2007 est apparue la loi sur la stricte alternance.Elle devait renverser la tendance, mettre un terme à laguerre des sexes, bousculer les mentalités. En fait, elle asurtout représenté un véritable casse-tête pour les can-didats, obligés d'aller convaincre leurs concitoyennes defaire office de colistières. Un exercice compliqué ? « Pasdu tout ! », répondent les partis politiques de la région.Michèle Mesans, n°18 sur la liste de Jacques Richir(MoDem, Lille) l'assure : « Non, nous n'avons eu aucunproblème. Des femmes sont venues nous contacter partout, sur-tout dans les petites villes. » Une assurance de façade quicontraste avec le résultat du sondage réalisé par Ipsosauprès de 405 maires réalisé en janvier 2007 : 29 % d'en-tre eux reconnaissent la difficulté de trouver suffisam-ment de femmes pour figurer sur leurs listes. Sur le ter-

rain, certaines expliquent la méthode. « En fait, on me l'ademandé. C'était pour rendre service car ils n'avaient pas assezde femmes. Au départ, je voulais juste un peu aider pendant lacampagne mais comme ils en avaient besoin, j'ai accepté », ra-conte Elisabeth Prevost, n°52 sur la liste de ChristianVanneste (UMP, Tourcoing).La loi de 2007, qui ne contraint que 7 % des communes(les villes de plus de 3 500 habitants), ne serait doncqu'un caillou dans la chaussure de nos têtes de listesmâles ? « Non, répond Mariette Sineau, chercheuse auCevipof (Centre de recherches politiques de SciencesPo) et spécialiste de la question. Cette loi a une conséquencesociologique : les conseils municipaux rajeunissent. Contraire-

ment aux hommes quis'engagent en politique àleur retraite, beaucoup deces nouvelles venues sontde jeunes femmes sans pro-fession. » Elle ajoute :« Et puis, la loi permet

aux femmes d'investir massivement les assemblées locales. Defaire leur trou, de se faire connaître. C'est le seul moyen d'avan-cer en politique. »Se faire connaître, quitte à partir au casse-pipe pour sespremières batailles électorales. À l'image d'Anne Cour-tillé à Clermont-Ferrand, ville traditionnellement degauche où Brice Hortefeux a refusé de se présenter. Ré-sultat : à peine 20 % des voix. « C'est un grand classique,une double discrimination en quelque sorte. Les villes faciles àgagner sont les plus recherchées et donc trustées par leshommes. »La situation aurait de quoi être inquiétante. Pas pourCaroline Vannier, tête de liste UMP à Hellemmes (etbattue au premier tour) : « Bientôt on ne parlera plus de pa-rité. C'est comme avec la ceinture de sécurité : au début, lesFrançais râlaient et maintenant, c'est rentré dans les moeurs. »Un optimisme béat que les résultats du second tour nerenforceront pas. Le soir de sa probable élection, Mar-tine Aubry n'aura pas beaucoup d'homologues fémi-nines à féliciter.

Acte de présence

Par Imanol Corcostegui

« L’ENTRÉE DES FEMMESEN POLITIQUE ESTTARDIVE »

Au bonheurdes damesd’Houplin-AncoisneC’est le genre de village donton ne parle que pour unehistoire insolite. Un fait diverstragique, un record absurde.Ou une anecdote amusante.Houplin-Ancoisne, une petitebourgade encerclée par lesvilles du Nord. Avec ses3 600 habitants, la commune atout juste la population néces-saire pour être soumise à la loide 2007 sur la parité. Ce qui neconstitue vraiment pas un pro-blème pour la liste divers droitede Jacques Bocquillon.« Lorsqu’on est allé déposer laliste à la préfecture, on neconnaissait pas la loi et il setrouve qu’il y avait beaucoup plusde femmes que d’hommes.On adû en remplacer certaines », ex-plique sa colistière Sylvie Dra-pri.Aujourd’hui, 14 femmes et13 hommes y figurent. Consé-quence de ce nombre impair :même s’il conduit la liste,Jacques Bocquillon est inscrità la deuxième placede la liste à la préfecture.Maggy Salemi, une autre de sescolistières, a une explication àson succès politique auprès desfemmes : « Beaucoup de femmesde la liste sont des mères defamille. Et l’école, c’est le sujetmajeur de la campagne deJacques. » Avec un score de29 % au premier tour, la listedevrait pouvoir placer quelques-uns (et quelques-unes) de sesmembres au conseil municipal.

SPARITÉ. Pour la première fois, les listes candidates

dans les villes de plus de 3 500 habitants doivent présenterautant de femmes que d’hommes. Mais celles-ci

se présentent rarement au poste de première magistrate.

À Tourcoing, les femmes sont 33 % à siégerau Conseil municipal.

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14La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

Combatspermanents

Pas vu, pas entendu, pas dit

Elle est arrivée à Villeneuve-d’Ascqau début des années 1980. Laha-nissa Madi n’a pas choisi cette

destination par hasard. « À l’époque, laville faisait partie des deux communes deFrance où les personnes handicapées pou-vaient faire des études et se loger », se sou-vient-elle. Tétraplégique, elle ne peut sedéplacer qu’à l’aide d’un fauteuil rou-lant. « C’est un combat de tous les jours »,souligne l’élue.Lahanissa Madi a toujours été unefemme épanouie, coquette, souriante.Maman d’une jeune adolescente de15 ans, elle ne se considère pas commeune personne handicapée. « On est handi-capé quand l’ascenseur est en panne oulorsqu’il n’y a pas de rampe à l’escalier. Leproblème, c’est l’aménagement de l’environ-nement ». Lorsqu’en 2001, leMouvementdes citoyens (MDC) la présente à Jean-Michel Stievenard, ce dernier est conquispar sa force de caractère. « On est venue mechercher, indique-t-elle. Le maire voulait unefemme qui soit une personne handicapée et duquartier de l’hôtel de ville. » Elle rejoindrale parti politique l’année suivante. « Jen’ai pas renouvelé ma carte. On peut très biendéfendre les intérêts des personnes handicapéessans être encartée », admet-elle.Clerc de notaire à mi-temps, elle devientconseillère municipale déléguée à l’amé-

lioration des conditions de vie des per-sonnes à mobilité réduite. « Quand jem’investis, c’est pour aller au bout deschoses », affirme la quadragénaire. Per-fectionniste, exigeante « avec moi-mêmemais autant avec les autres », LahanissaMadi vit cette expérience « comme un en-richissement personnel. Ce n’est pas la muni-cipalité qui a fait de moi ce que je suis au-jourd’hui ».« Elle a un caractère très fort et gère ses dos-siers merveilleusement bien », avoue Mar-jolaine Pierrat-Ferraille, collaboratricedu cabinet de Jean-Michel Stievenard.Ses missions, « m’occuper de toutes les per-sonnes souffrant d’un handicap qu’il soit au-ditif, visuel, moteur… » Elle a fait de l’ac-cessibilité aux bâtiments publics soncheval de bataille. « Il faut être autonomequelle que soit la situation de la personne. »Quand elle suit un dossier, c’est toujoursen concertation avec l’élu concerné. Destravaux sont entrepris, Lahanissa de-mande si la question des personnes han-dicapées a été évoquée. « Ce n’est pas for-cément un réflexe pour les valides. » Certes.Fidèle dans ses convictions, elle se ver-rait bien débuter un second mandat,lundi, au lendemain du second tour desmunicipales. « Rien n’est joué. » Et pour-quoi pas viser une place au sein de laCommunauté urbaine de Lille.

L’orientation politiquedes cafetiers lillois estun mystère. À deux

jours du second tour des électionsmunicipales, ils préfèrent conti-nuer de se tenir à l’écart des dé-bats pour éviter les barrières avecla clientèle. « Dans la profession, laloi des trois singes (pas vu, pas en-tendu, pas dit) est très présente, ex-plique Gérald, responsable desalle du Rihour, même si nos éta-blissements sont très propices aux dis-cussions politiques, et en l’occurrenceaux élections municipales en ce mo-ment, nous préférons ne pas intervenirdans le débat et préserver ainsi unecertaine neutralité. Nous voulons ac-cueillir tout le monde, tout le temps. »En clair, cette absence d’engage-ment pour tel ou tel candidat estuniquement un moyen de ne pas

faire fuir le client. « Déjà que nousavons perdu de la fréquentation avecla loi anti-tabac, ce serait idiot d’enperdre davantage », ajoute Gérald.Parlons-en de la cigarette. « Mêmesi cette loi est une décision d’ordre gé-néral, la gestion sefait essentiellementau niveau munici-pal, assure David,gérant du Legendprès de laGrand’place, jeparle ici de la loca-tion des terrasses quenous devons chaqueannée à la ville etque Martine Aubrya augmenté a l’occasion de son man-dat. Nous aimerions vraiment déve-lopper ces espaces, mais c’est trop dif-ficile car on nous rappelle à l’ordrepour la moindre chaise qui dépasse.C’est vraiment handicapant. »Bien que peu sensibles aux discus-sions politiques, les cafetiers sonten revanche assez attentifs aux dé-cisions concrètes. À savoir, celles

qui influent sur leurs manières detravailler. « Comme la décision de ré-duire la durée de la Braderie annéeaprès année, tempête Gérald, avant,c’était sur trois jours et pas deuxcomme maintenant. C’est un manque

à gagner énorme pourtous les cafetiers du centreville. »D’autre part, dé-ménager le lancementdu Ch’ti de laGrand’place n’a pasvraiment été unebonne idée selon lesdébiteurs de boisson :« Tout ça pour justifier larénovation de la place dela République alors qu’il

n’y a presque aucun café autour ! »Pas plus en faveur d’un candi-dat qu’un autre, les cafetierspensent essentiellement à leurquotidien. « On souhaite seule-ment travailler tranquillement,conclut le gérant du Legend, cardepuis quelque temps, c’est beau-coup de contraintes pour peud’avantages. »

VILLENEUVE-D’ASCQ. Lahanissa Madi arejoint l’équipe de Jean-Michel Stievenarden 2001. Tétraplégique, elle entend prendreen charge l’amélioration des conditionsde vie des personnes à mobilité réduite.

LILLE. Après la loi anti-tabac, parler politique dans les barsdevient un risque, selon les cafetiers.

« IL SERAITIDIOT DEPERDRE

ENCOREDES

CLIENTS »

Par Guillaume Carré

Par JonathanRoux

Discuter politique autourd’une petite mousse,une époque révolue ?

Lahanissa Madiest prête pour

un second mandat.Elle vit cela comme« un enrichissement

personnel ».

Photo : Guillaume Carré

Photo : J.R.

Page 15: La Pression numéro n°8

P O R T R A I T

15La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

Un porteur de flambeaubien discret

TOURCOING. Élu avec 53 % des voix dès le premier tour,le socialiste Michel-François Delannoy est le nouveau mairede Tourcoing. Un sacré coup de projecteur pour un hommequi n’aime pas parler de lui.

est le propre de “l’anticommuni-quant”. Balader les journalistesd’attaché de presse en responsablecom’, annuler les rendez-vous audernier moment. Et tant pis pourles curieux qui souhaiteraient sa-voir comment l’on vit la mort deson père lorsque l’on a sept ans ouqui se délecteraient du récit des

premiers pas d’un militant socialiste dans le Larzac.Être “anticommuniquant”, un mal pour les médiasmais un choix qui n’a jamais empêché de s’imposercomme un homme politique de valeur. Cela permetmême de conserver intacte son image de grand bon-homme souriant et courtois au front dégarni, si dis-cret sur lui-même mais intarissable sur sa ville. Enne s’exposant pas aux projecteurs, on ne risque pasde commettre d’impair. Une position qui satisfaitpleinement cet éternel second, premier adjoint deJean-Pierre Balduyck et vice-président du conseil gé-néral du Nord depuis 2001. Sauf que depuis di-manche, qu’il le veuille ou non, Michel-François De-lannoy attire la lumière. Son élection à la mairie dela troisième ville de la région récompense une stra-tégie politique guère originale mais efficace. Lacontinuité du projet mise en place par l’équipe sor-tante et donc en partie par lui-même. Le nouvel édilede Tourcoing avoue qu’il aurait été « insupportable »de voir quelqu’un d’autre que lui inaugurer le centrenautique ou le futur complexe commercial.De toute façon, avait-il vraiment le choix de sa tac-tique politique ? Ancien assistant parlementaire deBalduyck, Delannoy lui doit beaucoup. Presque tout.Son entrée en politique en 1988 qui le fait arrêter sathèse de sociologie, sa connaissance du milieu et dela manière d’exercer le pouvoir. Presque tout, saufses valeurs que sa famille, des militants chrétiens de

gauche, s’est char-gée de lui incul-quer. Celles d’unegauche qu’il qua-lifie d’« exigeante,curieuse et ouverte ».Celles qui l’ontfait pencher pourSégolène Royall’an dernier aumoment du choix

du candidat PS à la présidentielle. Balduyck, lui,avait choisi DSK. La différence de point de vue n’apas créé de tension entre les deux hommes, ni deconséquence à l’échelle tourquennoise. De toutefaçon, sur sa position au sein du parti, Delannoy adéjà répondu : « Je suis à Tourcoing d’abord ! Car la re-connaissance viendra par les élus locaux. Des personnescommeMartine Aubry ou Bertrand Delanoë nous sont trèsutiles : ils ramènent les sujets aux valeurs. »Balduyck dit de lui qu’il a « le virus et le charisme despolitiques ». Hubert Ledoux, auteur d’un ouvrage surle désormais ancien maire de Tourcoing, explique :« Tous deux viennent des mêmes bases : même origine ru-rale, même culture politique. Ils ont en commun leur dis-crétion et un vrai respect des gens. Si Delannoy n’avait pasété compétent, Balduyck aurait fait un mandat supplé-mentaire. Là, le flambeau est transmis. »Balduyck et Delannoy, le modèle et la copie. Enfin,en plus moderne. Delannoy est à Balduyck ce quel’Iphone® est au téléphone. Une version rafraîchie

et améliorée. « Un saut générationnel qualitatif », souf-fle le Vert Bernard Despierre qui n’a accepté de faireliste commune avec le PS que parce que Delannoy afait de l’écologie une priorité de campagne. « Il n’aque 44 ans et il est particulièrement ouvert aux problèmesmodernes. La lutte contre la pollution est une valeur im-portante pour lui, ce qui était nettement moins le cas pourBalduyck. »À son âge, Delannoy a tout son temps pour mettreen place un projet sur le long terme. De là à lui pré-dire une longévité à la Balduyck et ses 19 années demandat... En tout cas, si Delannoy a cette ambition-là, il ne faudra pas compter sur lui pour qu’il l’an-nonce aux médias.

Par Imanol Corcostegui

BALDUYCK DIT DELUI QU’IL A « LEVIRUSET LE CHARISMEDES POLITIQUES ».

Michel-FrançoisDelannoy en dates1963 : Il naît à Tourcoing (Nord).1988 : Il rencontre le député Balduyck,ami de son père, qui lui propose unposte d’attaché parlementaire.1998 : Il est élu conseiller général ducanton de Tourcoing Nord-Est.2001 : Il devient premier adjoint deBalduyck, alors maire de Tourcoing. Ilest également nommé vice-présidentdu conseil général du Nord.2008 : Il est élu dès le premier tourmaire de Tourcoing avec 53,58 % desvoix. Sa liste comprend des membresdu PS, du PCF et des Verts.

Delannoy a été pendantsept ans l’adjoint de Balduyck.

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16La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

La requête de ChantalSébire est « irrecevable »EUTHANASIE. Le procureur de la Républiquede Dijon a requis, vendredi, « l’irrecevabilitéde la requête » de Chantal Sébire, qui deman-dait à la justice le droit d’être euthanasiée.Etienne Daures, procureur général à le courd’appel de Dijon a expliqué « qu’en l’état ac-tuel de la loi » la demande de Madame Sébirene pouvait être accordée. La loi sur la fin devie datant de 2005 ne permet pas aux méde-cins de pratiquer l’euthanasie active,maistend à instaurer un « droit au laisser mourir ».Chantal Sébire est atteinte d’une tumeur évo-lutive et mortelle des sinus et de la cavité na-sale qui déforme son visage. Le conseillersanté du chef de l’Etat lui a proposé un nouvelavis sur son cas par « un collège de profession-nels de la santé du plus haut niveau ».De soncôté Christine Boutin, la ministre de laVille etdu Logement s’est exprimé sur cette affairesur l’antenne de RMC : « Mais pourquoi nepeut-elle plus vivre ? Parce qu'elle dit qu'ellesouffre mais il y a les médicaments qui peuventempêcher cette souffrance,parce qu'elle estdifforme mais la dignité d'une personne va au-delà de l'esthétique de cette personne. »

Airbus jugénon responsable

MONT SAINTE-ODILE. Contrairement auxdécisions en première instance, la cour d’ap-pel de Colmar a réfuté la responsabilité civiled’Airbus et confirmé vendredi la relaxe dessix personnes prévenues dans le procès ducrash du Mont Sainte-Odile. La cour a en outreconfirmé la responsabilité civile de la sociétéAir France, successeur légal d'Air Inter, en tantque transporteur. Dans l’accident qui a eu lieuen 1992, quatre-vingt-sept personnes avaientpéri et neuf autres avaient survécu.

Non-lieu pour Jean-LouisCourjaultJUSTICE. La juge d’instruction,Marie-Domi-nique Boulard-Paolini, a accordé mercredidernier un non-lieu à Jean-Louis Courjaultdans l’affaire des “ bébés congelés ”.Cettedécision inattendue a été reçu avec beaucoupd’émotion et surtout un grand soulagementpar le mari deVéronique Courjault, qui est,elle,mise en examen pour assassinats depuisle 12 octobre 2006.Véronique Courjault avaitavoué trois infanticides : ceux de deux bébésnés en septembre 2002 et décembre 2003alors que le couple vivait à Séoul, et celui d'unnouveau-né mis au monde clandestinement aucours de l'été 1999 en France. Elle sera jugéepar la cour d’assises de Tours.

Delanoë sans tropdeVertsPARIS. Bertrand Delanoë,maire sortant deParis et quasiment assuré de sa réélection, aannoncé vendredi sur RTL que sa nouvelleéquipe municipale serait « très renouvelée » etcomprendrait « beaucoup de jeunes ». Il a éga-lement prévenu que l’influence desVerts y se-rait « moins grande ». Bertrand Delanoë tra-vaille depuis 2001 avec les écologistes, dontDenis Baupin qu’il a choisi comme premieradjoint. Le sort du candidat desVerts,malheu-reux au premier tour, n’est pas encore fixé.

Sarkotente

le relookingTTRRAANNSSFFOORRMMAATTIIOONN. Après avoirlongtemps songé à tout bouleverseraprès les municipales, Nicolas Sarkozytemporise et annonce que rien n’estencore décidé. Un revirement quipourrait annoncer un changement destyle à la présidence.

LNicolas Sarkozy commencerait-il à écouter Fran-çois Fillon ? Alors que le président de la Répu-blique souhaitait, au lendemain du premier tour,

« tenir compte » du résultat des élections municipales et de ceque « le peuple aura exprimé », il a affirmé hier qu’ « au niveaudu gouvernement, pour l’instant, rien n’[était] encore décidé ».Une réaction aux déclarations du Premier ministre, jeudien fin d’après-midi, à Tarbes, moyennement enthousiaste àl’idée que son gouvernement porte le chapeau. François Fillon y prônait « une stabilité gouvernemen-tale »… tout en assurant qu’il se pliait aux volontés du chef :« Ce n’est pas à moi de prendre cette décision, c’est le président dela République. » L’Elysée songe néanmoins à un ajustementde l’équipe gouvernementale depuis plusieurs semaines. Etça pourrait aller vite. Dès lundi, peut-être. Dans tous les cas« dans les jours qui suivront les élections ». Au programme : unsecrétariat à “l’Economie numérique”, un à “l’aménage-ment du territoire”, un autre au “Grand Paris”. Selon Eu-rope1, un quatrième secrétariat, à l’Industrie, devrait êtrecréé.Nicolas Sarkozy pourrait aussi changer de porte-parole. Ilréfléchirait à un poste de remplacement pour David Marti-non (peut-être consul à New York). Selon Le Parisien, leconseiller du président pour la communication et la presse,Franck Louvrier, devrait voir ses prérogatives étendues ens’occupant du « quotidien ». Jean-David Levitte, conseiller

diplomatique de Nicolas Sarkozy et Claude Guéant, secré-taire général de l’Elysée, s’occuperaient de « tout le reste », lepremier s’attelant plus particulièrement aux questions in-ternationales.Des petits ajustements qui devraient satisfaire le Premierministre. Il rappelait hier que « La France est le seul pays enEurope qui change plusieurs fois de gouvernement entre deux élec-tions législatives. Tous les grands pays modernes choisissent uneéquipe de gouvernement, choisissent un projet politique et le mettenten oeuvre pendant 4 ou 5 ans ».Selon un sondage Opinion Way pour le quotidien Métro réa-lisé le 10 mars, la chute de popularité de Nicolas Sarkozy sestabiliserait à 41 %. Mais dans le même temps, celle deFrançois Fillon continuerait de grimper, passant de 53 à55 % par rapport à février.Nicolas Sarkozy voudrait-il changer d’image ? À défaut dechanger de politique, il a fait disparaître ses énormes mon-tres. Finis aussi les Ray Ban et le jogging. Le Sarkozy nou-veau serait plus lisse, plus discret. Il va devoir écouter pluset notamment ses ministres. Des ministres indéboulonna-bles, trop bien protégés par leurs bons résultats électorauxdeux tiers d’entre eux ont été réélus au premier tour - etl’approche de la présidence européenne, qui reviendra à laFrance le 1er juillet. Nicolas Sarkozy n’est plus le seul maî-tre à bord, il faut qu’il change. Mais en est-il capable ? Selonun proche du Président, « la question est maintenant de savoirsi Sarkozy aura la force de caractère pour persister dans sa méta-morphose. »

C’est fini. Les recherchesn’ont plus lieu d’être au-tour de l’étang corrézien

où Kevin et Vincent avaient dis-paru depuis mercredi. Un premiercorps est remonté à la surface,hier matin. L’autre a été décou-vert au fond du lac quelquesheures après. C’est l’hélicoptèrequi tournait autour du plan d’eauqui l’a repéré, la vidange partielledu lac des Bariousses ayant per-mis de voir le fond.Le canoë qu’ils avaient dérobédans le jardin d’une voisine avaitété retrouvé plus tôt dans la mati-née. Il flottait près du barrage.Après avoir découvert le corps du

premier jeune, le procureur deTulle, Etienne Manteaux, évo-quait deux hypothèses : « Soit luiaussi s’est noyé sachant que, lui, sa-vait nager, ou alors il est choqué et ilest dans les bois. »Un temps, les enquêteurs ont cruqu’ils retrouveraient en vie le se-cond jeune. Mais l’eau à 6 degrésa eu raison des deux adolescentsâgés de 13 et 15 ans. Leurs vête-ments « relativement amples » lesauraient empêchés de nagerjusqu’à la rive et les auraient faitcouler.Pour les gendarmes « la thèse acci-dentelle est privilégiée ». Un lâchéd’eau pourrait être à l’origine du

renversement de l’embarcation.Pourtant, les adolescents connais-saient bien les dangers du lac. Ilsavaient l’habitude de venir pêcherla carpe dans ce bassin à 200 mè-tres de chez eux. Mais cette fois-ci, ils n’avaient pas pris leur équi-pement.Devant ces nouveaux éléments, lapiste de l’enlèvement ou celle dela fugue semblent écartées. Kévinet Vincent étaient décrits par leursproches comme des jeunes sanshistoires et bien dans leur peau. Une centaine de pompiers, na-geurs, gendarmes et une brigadecynophile étaient mobilisés de-puis mercredi soir.

Deux jeunes corréziens morts

Par Gaël Cogné ( avec agences)

Par Gaël Cogné (avec AFP)

Le Président suit la ligne prônée par François Fillon.

Photo : D.R.

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17La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

Déchets cherchent incinérateurMARSEILLE. L’implantationd’un incinérateur à Fos-sur-Mer,afin de traiter les déchetsde l’agglomération phocéenne,est un enjeu majeur de la campagne.Malgré l’indifférence des Marseillais.

Toutes les Bouches-du-Rhône sont pen-dues aux lèvres des deux candidats à lamairie de Marseille. Et pour cause, des

résultats très incertains de dimanche dépendl’avenir du département. D’abord parce que leprojet d’incinérateur des déchets sur lequel se dé-chirent Jean-Noël Guérini (PS) et Jean-ClaudeGaudin (UMP) se situe à 60 km de la cité pho-céenne. Et également parce que Jean-Noël Gué-rini est le président du riche Conseil général desBouches-du-Rhône, et qu’il compte sur les fondsdu département pour financer son projet munici-pal, « sans augmenter d’uncentime les impôts locaux desMarseillais », a-t-il promislors du débat qui l’opposaitau maire sortant sur Eu-rope 1 mercredi soir. Jean-Claude Gaudin mise de soncôté sur l’argent promis parNicolas Sarkozy, dans une lettre adressée à « moncher Jean-Claude ».Le candidat socialiste, soutenu par les écolo-gistes, veut abandonner ce projet d’incinérateur« parce qu’il est dangereux pour la santé ». Jean-Claude Gaudin, lui, estime qu’il est « obligatoire

puisque personne dans le départementne veut enfouir les déchets ». L’inci-nérateur devrait voir le jour dansla région d’Istres, entre Fos-sur-Mer et Miramas, à quelques kilo-mètres de la plus grande décharged’Europe qu’il est censé rempla-cer, aux portes du village médié-val des Baux-de-Provence.Marseille, 80 000 habitants,croule sous les déchets. Chaqueannée, 450 000 tonnes d’orduressont déversées dans les campagnes alentour.« Depuis 1910, Marseille se débarrasse de sa merde

dans tout le département »,confie une journaliste duquotidien régional La Pro-vence. Cette situation negêne pas vraiment les élec-teurs marseillais. Le projetd’incinérateur, thème essen-tiel de la campagne des mu-

nicipales, ne semble pas les affecter, ni même lesconcerner. Alors pourquoi est-il si importantdans la campagne ? Parce que la Communautéurbaine deMarseille est très endettée (3 milliardsd’euros) et qu’elle a cruellement besoin des fondsdu département, et donc du soutien des maires.

Pas question pour Guérini de se les mettre à dosà cause d’un incinérateur à déchets très impopu-laire dans leur commune. Quitte à ce que les sacsplastiques continuent à s’envoler dans les bour-rasques du mistral.Dans un sondage TNS-Sofres-Logica pour Le Fi-garo, publié vendredi, Jean-Claude Gaudin seraitreconduit avec 51 % des voix. Mais le troisièmesecteur de la ville, s’il votait pour la liste com-mune MoDem-divers Gauche, pourrait fairetomber la mairie marseillaise. Les indécis aussi :à trois jours du second tour, 14 % des électeursde droite disent qu’ils « pourraient changer d’avis »,contre 9 % des électeurs de gauche. Comme di-rait Jean-Claude Gaudin lui-même : « Les jeux nesont pas faits. C’est serré. »

Àmesure que le second tour approche,les langues se délient à Toulouse. Pasun jour sans petites phrases assassines

entre Pierre Cohen, le candidat PS, et Jean-Luc Moudenc, maire sortant UMP. Mercredidernier, lors d’un meeting à Ramonville-Saint-Anne, Pierre Cohen a ainsi pris unmalin plaisir à dénigrer Dominique Baudis,ancien maire de Toulouse et soutien de Jean-Luc Moudenc. « Depuis une semaine, on a res-sorti l’icône usée : Dominique Baudis, qui ne figurepas sur la liste, mène la campagne, accorde des in-terviews, distille des conseils et profère des menaces.Il est parisien, il est en vacances dans notre ville. »Et ses colistiers ne sont pas en reste. MagydCherfi, ancien chanteur du groupe Zebda etnuméro 67 sur la liste de Pierre Cohen, a dé-claré lors d’un meeting public que la premièreadjointe sortante Françoise de Veyrinas « serendait naguère auMirail [NDLR : grand quar-tier sensible de Toulouse] en servant des sand-wichs au jambon. À une population largement mu-sulmane. »La dernière ligne droite de la campagne mu-nicipale déchaîne donc les passions. Et lessondages. Après une première étude Ifop, pu-

bliée le 12 mars dans Paris Match, qui don-nait Pierre Cohen gagnant avec une avanceconfortable (53 % contre 47 % pour le mairesortant), le candidat socialiste n’est plus cré-dité que de 50 % des voix par un sondageTNS-Sofres pour Le Figaro publié ce ven-dredi.Ce léger fléchissement s’explique en partie parla stratégie d’alliances de Pierre Cohen. Aprèsavoir refusé la main tendue du MoDem, lecandidat socialiste a tourné le dos à plusieurslistes alternatives et d’extrême gauche. Non àToulouse debout !, non également à la Liguecommuniste révolutionnaire (LCR). Le PS achoisi la tactique de feu l’union de la gaucheen s’alliant avec les Verts, le Parti radical degauche (PRG), le Parti communiste (PC) et leMouvement républicain et citoyen (MRC).Un choix tactique qu’il payera peut-être di-manche prochain car le candidat centriste,Jean-Luc Forget, a finalement rejoint la listede Jean-Luc Moudenc. Ce dernier a appeléquant à lui ses électeurs à « déposer un bulletinde vote dans l’urne » dimanche prochain, et à nepas adresser un « chèque en blanc » à son adver-saire socialiste Pierre Cohen.

La campagnen’est pas toute rose

Par Sophie Bouillon (avec AFP)

Par AlexandraNawawi (avec AFP)

« MARSEILLESE DÉBARASSE

DE SA MERDE »

Jean-Luc Moudencpourrait perdre

son écharpece dimanche

TOULOUSE. Une lutte féroce metaux prises le sortant Jean-Luc Moudencet son challenger Pierre Cohen.

Les habitants de Fos-sur-Mer s’inquiétent

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18La Pression de mars Samedi 15 mars 2008

Durant la campagne, les slogans des différentspartis se ressemblent tous. Seul change le nom

de la ville. Le marketing électoral a toujoursrecours aux mêmes arguments.

Jeumont, deux listes sonten concurrence. Jeumontambitions affronte Jeu-mont passion. « On est bienavancé avec ça… » Com-mentaire sans appel del’agence publicitaire lilloiseVive la Pub. Les noms deliste électorale aux allures

de slogan publicitaire ont l’imagination qui refuse dedéborder. “Union”, “avenir”, “ensemble”, “demain”…Les mêmes mots reviennent sans cesse autour dephrases qui sonnent creuses.Adressés en particulier aux indécis, les slogans doiventtoucher le public le plus large possible. Il faut rester trèsconsensuel… et doncmou. « Plus il y a de quantité, moinsil y a de qualité. C’est la même chose quand il faut vendre unevoiture qui doit convenir à tout le monde. Il semble impossi-ble d’être original et de gagner. »Le slogan ne fait pas la victoire, mais il peut y contri-buer. 1981 : “La Force tranquille” du candidat Mitter-rand, tiré de l’esprit du publicitaire Jacques Séguéla,marque durablement les mémoires. Mais la force tran-quille de l’un s’est transformée en mollesse faiblardedes autres slogans qui ont voulu s’en inspirer.Pour se vendre, de plus en plus d’hommes politiquess’adressent à des agences publicitaires. Mais leurs exi-gences précises laissent peu de place à l’innovation.« C’est un domaine où il est difficile de sortir des sentiers bat-tus. Les candidats ont peur de dérouter les électeurs », pré-cise-t-on à l’agence publicitaire Le 7 Martien. Pour sacampagne, la tête de liste MoDem de la Madeleines’est adressé à l’agence pour concevoir des dépliants.« On n’avait pas notre mot à dire. Il voulait quelque chose detrès basique. On n’a pas pu mettre notre grain de sel. » Et àl’arrivée : “La Madeleine en mouvement”, du beau,du bon, du banal…Alors, ringards les slogans électoraux desmunicipales ?« Si on veut. Mais ce n’est pas forcément parce que les idéessont dépassées. C’est une question de forme. De manière gé-nérale, on pourrait faire passer le message autrement. » La

frilosité des politiquesface à l’électorat dé-bouche finalement surun discours tiède. Lamodernité y estpresque toujours miseen avant. Mais atten-tion à ne pas effrayer,« il ne faut pas que la nou-veauté soit trop nouvelle »,

rappelle le publicitaire. Et un bilan ne se conçoit qu’enparlant d’avenir. Un exercice d’équilibrisme qui fait lapart belle aux clichés et aux idées reçues. « Celui qui veutgagner, malheureusement, doit être le plus conformiste possi-ble. »Pour la petite histoire, Jeumont ambitions l’a emportédès le premier tour, avec 55 % des voix. Pour les slo-gans remplis de passion, les électeurs devront attendreun prochain scrutin.

Par Joël Bronner

LE PLUSCONFORMISTE,POUR GAGNER ”

Ensemble pour le cœur de l’avenir !Les noms de listes politiques en concurrence rivalisent d’une originalité similaire. Petit tourd’horizon absurde dans le Pas-de-Calais.Un département où il y a parfois de quoi perdre le nord.Dans la commune d’Houdain, lesdeux listes concurrentes semblent faire le plein.Ensemble pour Houdain affronte Union pourHoudain. Deux listes pour une union d’ensemble. À force de conformisme, les slogans per-dent leur sens.Mais puisque le rassemblement est à l’honneur dans une majorité d’entre eux, pourquoi nepas forcer les listes à s’unir réellement ? Prenons la sympathique commune de Beuvry. Auprogramme : Beuvry demain, j’y crois ; De tout cœur pour Beuvry ; Beuvry avenir ; Beuvry en-semble ;Vivre ma ville. On reprend son souffle, on s’unit et on recommence.“Demain, jecrois de tout cœur à l’avenir commun de Beuvry.”Aussitôt dit, aussitôt réunis.Nombreux sont les candidats qui semblent éprouver le même plaisir à envisager l’avenirde demain.Avec vous, d’une part. Pour vous, d’autre part. Aucune liste n’a eu le courage deproposer un audacieux “Divisons nous pour vivre ensemble au cœur du passé”. Heureuse-ment, il y a tout de même les candidats pour qui l’avenir est déjà vieux.Les visionnaires qui s’adressent à ceux qui possédaient déjà une carteVermeil, lors du pas-sage fatidique au nouveau millénaire.Auchel des années 2000, la dynamique nouvelle pourdemain : une liste qui regarde vers l’avenir grâce au rétroviseur.Vivement demain !

J.B.

Photo : DR

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Lamollessetranquille

Si l’originalité conduit rarement à la mairie,ce candidat (coluchiste) de Lodève (Hérault)a tout de même obtenu8 % des voix au premier tour.