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-1- Christine Leroy I.N.A. P.-G. LA PISCICULTURE PERIURBAINE A HO CHI MINH-VILLE AU VIET NAM Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) Groupe d’Aquaculture Continentale Méditerranéenne et Tropicale (GAMET – Montpellier) Université Agronomique et Forestière de Thu Duc (UAF - Hô Chi Minh-Ville, Viêt Nam) Mars – Septembre 2001

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Christine Leroy I.N.A. P.-G.

LA PISCICULTURE PERIURBAINE A HO CHI MINH-VILLE AU VIET NAM

Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) Groupe d’Aquaculture Continentale Méditerranéenne et Tropicale (GAMET – Montpellier) Université Agronomique et Forestière de Thu Duc (UAF - Hô Chi Minh-Ville, Viêt Nam)

Mars – Septembre 2001

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TABLE DES MATIERES INTRODUCTION 5 GLOSSAIRE 6 ACRONYMES 8 1 RAPPELS SUR LE FONCTIONNEMENT D’UN ETANG PISCICOLE 11

1.1 L’écosystème étang 11 1.1.1 Composantes 11 1.1.2 Fonctionnement 15

1.2 La pisciculture en étang 19 1.2.1 Des origines asiatiques vieilles de 4000 ans 19 1.2.2 Particularités des étangs à vocation piscicole 21 1.2.3 Le choix des espèces et la qualité de l’eau : deux paramètres importants 23

1.3 Lorsque pisciculture rime avec recyclage… 27 1.3.1 La notion d’ « eaux usées » 27 1.3.2 Les différents systèmes de recyclage des déchets humains par l’aquaculture 29 1.3.3 Un intérêt croissant pour l’étude de ces systèmes 33

2 PRESENTATION GENERALE DU VIET NAM ET PLACE DU SECTEUR AQUACOLE 36

2.1 Le Viêt Nam, du communisme au libéralisme… 36 2.1.1 Géographie et climat 36 2.1.2 Une population grandissante 38 2.1.3 La situation économique actuelle, résultat d’une politique d’ouverture 38

2.2 Place des secteurs halieutiques et aquacoles dans l'agriculture vietnamienne 40 2.2.1 Le secteur agricole emploie deux tiers de la population active et contribue à un tiers des exportations 40 2.2.2 Les secteurs de la pêche et de l’aquaculture possèdent un fort potentiel de croissance 40 2.2.3 Marché des produits de la pêche et de l’aquaculture 42

2.3 L’aquaculture, une activité traditionnelle en tête des priorités dans les programmes de développement 42

2.3.1 Organisation du secteur et principales formes de pisciculture au Viêt Nam 42 2.3.2 En ligne de mire des programmes de développement : l’amélioration de l’aquaculture 44

3 CONTEXTE DE L'ETUDE REALISEE ET RESULTATS 51 3.1 Objectifs et méthodologie de l'étude 51

3.1.1 Une phase préliminaire au projet périurbain 51 3.1.2 Méthodologie 53 3.1.3 Difficultés rencontrées, limites et contraintes du stage 55

3.2 Zone d’étude : Binh Chanh, au sud de HCMV 57 3.2.1 Hô Chi Minh-Ville, capitale économique du Viêt Nam 57 3.2.2 Caractéristiques de l’aquaculture à HCMV 59 3.2.3 Un réseau hydrographique très complexe quadrille la ville 65 3.2.4 Le district de Binh Chanh, au Sud de la ville 69

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3.3 Caractéristiques générales des systèmes piscicoles à HCMV 75

3.3.1 Diversité des activités 75 3.3.2 Quelles espèces piscicoles, pour quelles quantités ? 77 3.3.3 Type de nourriture utilisée 83 3.3.4 Une gestion simple de l’eau 83 3.3.5 La récolte des poissons requiert des moyens humains importants 87 3.3.6 Détails de quelques prix 89

3.4 Typologie des exploitations et des étangs de production, fonctionnement des activités 91

3.4.1 Fonctionnement des activités intrégrées à la pisciculture 95 3.4.2 Etangs de monoculture 101 3.4.3 Etangs de polyculture 107 3.4.4 Etangs de reproduction du tilapia 110 3.4.5 Etangs de grossissement et de reproduction de poissons d’ornement 117

3.5 Aperçu de la filière des produits aquacoles 120 3.5.1 Approvisionnement des pisciculteurs en juvéniles 120 3.5.2 Réseau de distribution des poissons d’étangs 122

DISCUSSION 125

La mauvaise image des poissons élevés en étangs est-elle justifiée ? 126 Sur qui pèsent les risques sanitaires ? 126 Types de contaminations concernées 126 Diminution et prévention des risques 128

Une forte dépendance des activités piscicoles vis-à-vis du milieu 129 Intérêts des étangs de pisciculture en zone périurbaine à HCMV 129 Fragilité face au développement de la ville 132

Propositions d’action 133 L’amélioration des systèmes de production doit passer par une meilleure intégration des données sur l’environnement 133 Les difficultés économiques amoindries par une collectivisation des moyens de production et une amélioration de la filière commerciale 133

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 156

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Je tiens à exprimer ici mes remerciements les plus sincères envers les personnes qui ont su m’aider et me soutenir tout au long de mon travail : Philippe Cacot et le Professeur LeThanh Ung, sans l’insistance desquels je n’aurais peut-être jamais eu la chance de découvrir le Viêt Nam, pour l’encadrement de mon stage et pour leurs nombreux conseils. Catherine Mariojouls pour son aide durant la préparation, pour son infinie patience et son appréciable soutien lors de la conclusion du stage. Jérôme Lazard pour ses précieux conseils et son soutien lors de son passage au Viêt Nam. Monsieur Luu Trong Hieu pour sa gentillesse et son accueil à l’UAF, Miss Hoa pour sa gentillesse et son aide, Quoc de l’UAF pour l’intérêt et l’aide apportée à mon travail, M. Minh, l’ensemble du personnel de l’UAF, Ngoc et Son pour leur chaleureux accueil au sein de leur famille, Christopher et Céline pour leur soutien et Marc Campet ainsi que toute son équipe pour leur accueil sur les cages lors de mes séjours à Chau Doc. J’envoie mes meilleures pensées à Miss Thao Bui Thi Phuong, dont l’aide, le dévouement et l’entière disponibilité pendant mon séjour au Viêt Nam témoignent de la grande amitié qui nous lie désormais…

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INTRODUCTION

A la différence des campagnes, les centres urbains sont souvent caractérisés par l’absence d’espaces dédiés aux activités agricoles. A la place, tout n’est que bitume et béton… Pourtant, les besoins alimentaires des habitants ne changent pas, et la ville doit pouvoir s’approvisionner facilement et rapidement en produits frais. D’où la situation privilégiée de toutes ces exploitations en zone périphérique des grandes agglomérations urbaines. Parmi les activités agricoles que l’on peut ainsi trouver en zone « périurbaine », l’aquaculture a suscité un vif intérêt dans de nombreux pays. En effet, le poisson représente 17% des apports en protéines dans le monde et, dans certains pays, ce taux peut atteindre 50%. En Asie, des millions de personnes tirent la majorité de leurs protéines alimentaires des ressources aquatiques. Les pêcheries marines et de l’intérieur fournissent près de 30% des protéines animales de la région, contre 21% en Afrique et 8% en Amérique latine (données FAO, 1995).

Parmi ces pays, le Viêt Nam a connu, au cours des vingt dernières années, un développement économique remarquable. Mais à l’instar de tout pays qui se développe, ces avancées économiques et technologiques s’accompagnent inévitablement d’un accroissement des risques dus à des concentrations démographiques importantes. Tout d’abord les besoins alimentaires se concentrent, tandis que les productions restent souvent localisées. Il s’agit donc d’accroître et d’améliorer les &systèmes de production. En outre, tous les pays possédant une ou plusieurs grandes agglomérations doivent également faire face aux problèmes environnementaux et sanitaires engendrés par une trop forte concentration des activités humaines. Hô Chi Minh-Ville (HCMV) en particulier, agglomération urbaine de plus de cinq millions d’habitants, échappe-t-elle à la règle ? Comment les activités agricoles situées en périphérie de HCMV réagissent-elles face à la progression de plus en plus rapide de la ville ? Sont-elles destinées à disparaître, ou alors peuvent-elles réussir à s’adapter aux nouvelles conditions de milieu imposées par ce développement urbain ?

Toutes ces préoccupations ne peuvent être éclairées que par une connaissance pointue des caractéristiques de la ville et de toutes ses activités. Ainsi, une grande partie de ce document sera consacrée à la description de cette ville tout à fait particulière au Viêt Nam, dont elle est souvent considérée comme étant la « capitale économique ». Auparavant, un rappel du fonctionnement des étangs piscicoles ainsi qu’un aperçu de l’utilisation des eaux usées en pisciculture s’avèrera indispensable pour resituer les systèmes étudiés dans un contexte plus technique. Enfin, les résultats obtenus au cours d’enquêtes effectuées notamment chez les pisciculteurs seront présentés, toujours dans un souci de caractérisation des systèmes de production, mais aussi afin de donner un aperçu de la filière des produits qui en sont issus. Nous conclurons en essayant d’envisager les possibilités d’évolution dans un contexte qui peut paraître a priori défavorable... Un glossaire expliquant les notions essentielles envisagées dans ce document est présenté ci-après, de même que l’explication des différents sigles et abréviations employées.

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GLOSSAIRE Arroyo Chenal ou canal entre deux cours d’eau. Déchets Ensemble des matières éliminées (excepté les liquides et les gaz) par l’industrie, l’agriculture et la vie quotidienne des habitants. On distingue les types suivants : déchets pouvant être décomposés, provenant des usines agroalimentaires, abattoirs, cuisines, restaurants ; cadavres d’animaux domestiques ; cendres et scories provenant des foyers à combustible solide et des fours industriels à charbon ; déchets de grandes dimensions : brique, verre, bois, blocs de béton provenant des maisons détruites, voitures et motocycles hors d’usage, instruments et ustensiles de ménage détériorés ; boue provenant des égouts et canaux ; déchets solides éliminés par l’industrie, dont certains renferment des matières toxiques ; déchets éliminés par l’agriculture, y compris les engrais provenant des ordures. Tous les déchets que l’on trouve dans les rues peuvent être entraînés par les eaux pluviales dans les égouts ou les canalisations, présentant un risque de colmatage dans les systèmes. Demande Biochimique en Oxygène (DBO) Elle représente la quantité de pollution biodégradable. La détermination de la demande biochimique en oxygène vise à reconstituer en laboratoire les phénomènes de dégradation qui ont lieu dans le milieu naturel. Le résultat obtenu est appelé DBO5 et correspond à la quantité d’oxygène nécessaire, pendant cinq jours, aux microorganismes contenus dans l’eau pour oxyder une partie des matières carbonées, dans les conditions de l’essai (incubation durant cinq jours, à 20°C et à l’obscurité). Ce résultat est la résultante d’un ensemble d’actions biologiques et chimiques et n’a pas le caractère rigoureux et sans ambiguïté de ceux qui découlent, par exemple, de la mise en œuvre d’un processus chimique unique et bien déterminé. Il fournit néanmoins l’une des indications importantes dont l’ensemble permet de juger de la qualité d’une eau et de son degré de pollution. La DBO5 s’exprime en milligrammes par litre. Demande Chimique en Oxygène (DCO) Elle représente la quantité totale de pollution oxydable et correspond à la quantité d’oxygène qu’il faut fournir grâce à des réactifs chimiques puissants, pour oxyder les matières contenues dans l’effluent. En d’autres termes, c’est la quantité d’oxygène consommée par voie chimique dans les conditions de l’essai pour assurer la dégradation des matières réductrices. Par simplification, on admettra que la DCO est une mesure représentative de la charge organique d’une eau. Eaux d’égouts Eaux usagées d'une communauté, qui sont, seront ou ont été transportées dans les égouts. Les eaux d’égouts désignent notamment les eaux pluviales, les eaux des services publics, les eaux sales, les eaux-vannes ou eaux de vidange, les boues des rues et les ordures ménagères. Eaux usées domestiques Toute eau sortant d’une maison : eaux ménagères, résiduelles, excrémentielles (évacuées par la chasse d’eau, la douche, les lavabos, les cuisines et les blanchisseries.)

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Eaux usées municipales Mélange des eaux usées domestiques, des effluents industriels et des eaux d’écoulement de la ville. On peut les assimiler aux eaux d’égouts si la ville possède ce système d’évacuation. Egouts Ensemble d’ouvrages la plupart du temps souterrains (canalisations, galeries, conduits, canaux, etc.) destinés à collecter les eaux usées (domestiques, industrielles, publiques) en vue de les évacuer, généralement par gravité, hors des agglomérations ou vers une station d’épuration. Etang : n. m. - de estanchier : « arrêter l’eau » *étendue d’eau reposant dans une cuvette à fond imperméable et généralement moins vaste, moins profonde que le lac.1 *en limnologie (science des plans d’eau), l’étang est défini comme une retenue d’eau artificielle2 régulée par l’activité humaine. Contrairement au lac, cuvette naturelle beaucoup plus étendue, la profondeur d’un étang ne dépasse pas 6 mètres. 3 Excréments Fèces et urine. Lagunage Procédé d’épuration des eaux, consistant à les faire séjourner dans des bassins où elles subissent une oxygénation naturelle ou renforcée par un système d’aération. Latrines Lieux d’aisances sommaires, sans installation sanitaire. L’expression latrines sèches est utilisée pour désigner : - les systèmes bruts dans lesquels les fèces sont excrétés sur une plaque ou dans un récipient amélioré desquels ils sont manuellement retirés, - les latrines dans lesquelles l’eau et l’urine sont exclues pour augmenter la vitesse de décomposition des excréments. Matières En Suspension (MES) Elles caractérisent la fraction de la pollution non dissoute. Elles sont mesurées par pesée, après décantation, filtration ou centrifugation. Pathogènes Microorganismes, tels bactéries, virus et protozoaires, causant des maladies.

1 Grand Robert de la langue française (deuxième édition). Vol. 4, p.170. 2 La grande majorité des étangs sont d’origine artificielle 3 Encyclopédie Larousse de la nature, 1994, p.74.

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ACRONYMES ANSEA Association des Nations du Sud-Est Asiatique regroupant le Vietnam, la

Thaïlande, le Cambodge, le Laos, Singapour, les Philippines, la Malaisie, l'Indonésie, la Birmanie et Brunei

APEC Asia-Pacific Economic Cooperation CIRAD Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le

développement EMVT département Elevage et Médecine Vétérinaire Tropicale du CIRAD GAMET Groupe d’Aquaculture Continentale Méditerranéenne et Tropicale HCMV Hô Chi Minh - Ville IRA Institut de Recherche en Aquaculture OMC Organisation Mondiale du Commerce PIB Produit Intérieur Brut UAF Université Agronomique et Forestière VND Dong vietnamien

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Première partie : Rappels sur le fonctionnement d’un étang piscicole

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Figure 1 : Schématisation des différentes influences appliquées sur un étang de production (G. Balvay, 1980)

Figure 2 : Principales interactions entre les éléments constitutifs de l’étang (B. Bachasson, 1992)

Figure 3 : Stratification en étang de production (B. Bachasson, 1992)

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1 RAPPELS SUR LE FONCTIONNEMENT D’UN ETANG PISCICOLE

1.1 L’écosystème étang

Tout étang entretient des rapports très étroits avec l’environnement dans lequel il s’inscrit et les étangs se définissent souvent en association avec le milieu environnant. Ainsi, un étang subit l’influence directe de facteurs extérieurs qui conditionnent ses caractéristiques physico-chimiques et biologiques. Comme l’indique la Figure 1, ces facteurs sont d’origine climatique (liés à l’altitude et à la latitude), l’énergie solaire (lumineuse et calorifique), la température de l’air, la pluviosité et l’humidité de l’air, d’origine édaphique (liés au terrain : nature, structure et texture du sol, activités agricoles, couverture végétale), et parfois liés aux activités humaines. De ces facteurs externes résulte un microclimat propre à l’étang (Figure 2). La lumière, la température, le vent et la pluviosité vont avoir une forte influence sur les variations de ce microclimat :

- La lumière vient réchauffer l’eau de l’étang, mais, divers éléments bloquant sa pénétration, une stratification de la température apparaît (Figure 3) et l’eau apparaît plus chaude en surface. Le phytoplancton est très sensible à la température, il se développe plus rapidement dans les strates supérieures de la colonne d’eau, formant une sorte de bouclier contre la lumière qui n’atteint plus les zones profondes, renforçant alors ce phénomène de stratification de la température. - La température ambiante, et surtout les amplitudes de température, ont également des répercussions sur la température de l’eau, mais avec un certain décalage dans le temps. - Le vent agit sur le niveau de l’eau en accentuant l’évaporation, et sur l’envasement en entraînant les matières en suspension et débris végétaux en un point bien précis de l’étang où ils s’accumulent. - Les pluies, en saison chaude, compensent les pertes dues à l’évaporation mais refroidissent le milieu. En dehors de la période chaude, l’importance et la répartition des précipitations vont conditionner le remplissage des étangs. Concernant les autres facteurs extérieurs (bassin-versant, air et sédiment), leurs relations avec l’étang se traduisent par des échanges de gaz, d’eau et de divers éléments comme les sels minéraux. A l’instar des écosystèmes aquatiques, un étang est donc un système unitaire et fonctionnel incluant une communauté d'organismes vivants (la biocénose) et leur environnement (le biotope) qui interagissent selon des règles précises. 1.1.1 Composantes L’ensemble des composantes de l’écosystème étang sont présentées sur la Figure 6. Parmi ces composantes, l'eau et le substrat constituent le biotope : L’eau Un étang peut être alimenté en eau de manières diverses : soit par une source, située au fond de l’étang ou à l’extérieur, soit par ruissellement sur le bassin-versant, ou bien par un ruisseau qui traverse l’étang, ou encore par un canal d’amenée fonctionnant à la demande (Figure 4). L’écoulement d’eau y est très faible, le renouvellement de cette eau est donc très lent. Ainsi les étangs subissent largement les contraintes du milieu terrestre dans lequel ils s’inscrivent.

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Figure 4 : Origines de l’eau d’un étang (B. Bachasson, 1992)

Figure 5 : Les « plantes » aquatiques et leur intérêt en étang (B. Bachasson, 1992)

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Le substrat Il s’agit du sédiment ou de la vase sur lesquels est situé l’étang. Ce substrat est constitué à partir de la roche-mère sous-jacente, ou du sol préexistant et des dépôts aquatiques : argiles, limons, cadavres débris végétaux et animaux… Les sols les plus favorables pour la construction d’un étang sont ceux qui infiltrent le moins d’eau, donc les plus étanches, comme les terrains argileux et limoneux. En revanche, les terrains tourbeux, sableux et calcaire sont peu adaptés pour l’installation d’un étang. Les biocénoses sont très diverses et, à quelques rares exceptions, l'ensemble des grands groupes végétaux et animaux est susceptible d'être rencontré dans les étangs (virus, bactéries, algues, végétaux supérieurs, protozoaires, invertébrés et vertébrés). Ces organismes peuvent être regroupés en grandes communautés (planctonique, périphytique, benthique, etc.) et ont, entre eux, des relations intra ou interspécifiques, soit de nature trophique (relation proie/prédateur), soit parasitaire (relation hôte/parasite) : Les macrophytes (Figure 5) Ce sont des végétaux aquatiques de grande taille situés le plus souvent près de la rive. Ils peuvent être émergés (roseaux), flottants (nénuphars) ou submergés (élodées, mousses…). Lorsqu’ils sont submergés, ils servent fréquemment de support à une multitude d’organismes de petite dimension, animaux (Ciliés, Bryozoaires…) et végétaux (Algues), qui se développent en contact avec un substrat quelconque, végétal, minéral ou animal. Cet ensemble de microorganismes est appelé périphyton. D’autre part, les macrophytes revêtent, selon les espèces, un intérêt certain, par exemple en fournissant de la nourriture, des zones de frayère ou de refuge pour les animaux, ou au contraire des désagréments, comme lorsqu’ils bloquent la pénétration de la lumière dans l’eau, réduisant ainsi la prolifération des organismes autotrophes. Le plancton C'est l’ensemble des organismes vivants flottant dans la masse d’eau et dont les capacités de mouvements sont limitées. Il regroupe le phytoplancton, le zooplancton et le bactérioplancton . * Les constituants du phytoplancton flottent au sein des eaux et ont des mouvements propres limités ; ils sont généralement entraînés par les courants pouvant apparaître dans le milieu aquatique. Ils ne sont pas visibles à l’œil nu mais à forte densité, ils sont responsables de la coloration brun-vert de l’étang. Il s’agit principalement d’algues uni- ou pluricellulaires, isolées ou coloniales, parfois de grande taille, parfois à structure filamenteuse. Les principaux groupes de phytoplancton sont les diatomées, les chlorophycées (ou algues vertes), les cyanophycées (ou algues bleues), les chrysophycées et les dinophycées. Tous ces organismes, de par leur nature chlorophyllienne, produisent de l’oxygène dans l’eau sous l’effet du rayonnement solaire (photosynthèse) ainsi que de la matière nutritive consommée par le plancton animal, lui-même capturé par les poissons. L’abondance de ces organismes autotrophes, premiers éléments de la chaîne trophique dans l’écosystème étang, est donc déterminante pour la survie de l’étang. * Le zooplancton, également en suspension dans l’eau au gré des courants, est principalement constitué de Rotifères et de crustacés inférieurs, ou entomostracés, appartenant aux cladocères (Daphnia, Bosmina) et aux copépodes (Cyclops, Diaptomus). La larve de Chaoborus, diptère proche des moustiques, est la seule larve d’insecte appartenant au zooplancton. * Le bactérioplancton est constitué de bactéries hétérotrophes effectuant la décomposition de la matière organique. Son rôle réside aussi dans le recyclage de matériaux inorganiques (bactéries lithotrophes présentes sur les particules en suspension).

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Figure 6 : Les principaux groupements fonctionnels de l’écosystème étang (G. Balvay, 1980)

Figure 7 : Cycle de la matière nutritive dans un étang (B. Bachasson, 1992)

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Le benthos C'est l’ensemble des organismes vivant au fond de l’étang, dans ou à la surface du sédiment. Les représentants les plus connus de cet ensemble sont les larves de chironomes, les vers, les mollusques, les entomostracés (ostracodes, copépodes, harpacticides) et malacostracés (gammares, aselles). Il ne faut pas oublier les bactéries lithotrophes qui, dans le sédiment, sont responsables de diverses réactions d’oxydation : NH4 (ammonium) NO2 (nitrites) NO3 (nitrates) ; H2S (hydrogène sulfuré) SO4 (sulfates); Fe2+ (ions ferriques) Fe3+ (ions ferreux); etc. Le necton Il regroupe les organismes qui vivent et nagent en pleine eau (larves aquatiques, alevins). Ces organismes sont capables de surmonter, jusqu’à une certaine limite, le mouvement général des eaux. Ce sont principalement les poissons. Le neuston (ou pleuston) Ce groupe, qui peut être divisé en hyponeuston et épineuston, rassemble les organismes vivant en contact étroit avec l’interface air-eau. Il s’agit essentiellement des Insectes (Gyrinidés). Il est possible de trouver dans la littérature une dernière classe de biocénose dans un étang. Il s’agit du tripton, constitué des nombreuses particules en suspension, organiques ou minérales, présentes dans l’eau de l’étang. L’ensemble du plancton et du tripton forme le seston. Il convient également de préciser qu’en général, les frontières entre les nombreuses catégories énumérées précédemment ne sont pas nettement déterminées. Par exemple, le comportement de la larve de Chaoborus est tel que cet organisme appartient au plancton durant la nuit et au benthos le jour ; de même, selon l’âge des mollusques, les larves véligères1 sont planctoniques, alors que les adultes font partie du benthos. Enfin, les champignons viennent compléter cette liste. Comme les bactéries, ils participent à la décomposition et au recyclage des débris végétaux et animaux dans l’étang. De nature saprophyte ou parasitaire, ils n’ont pas d’emplacement déterminé dans la colonne d’eau. 1.1.2 Fonctionnement Chaque étang constitue donc un écosystème de taille réduite comprenant, dans le cas des étangs piscicoles, trois principaux niveaux trophiques : producteurs – consommateur – décomposeur. Schéma général (Figure 7) L’étendue d’eau se comporte comme un capteur solaire. L’énergie lumineuse reçue par le système sert au réchauffement des eaux ainsi qu’au maintien et à la prolifération des végétaux dans l’étang (P). C’est le premier maillon d’une chaîne trophique composée d’organismes planctoniques et de toute une série d’être vivants comprenant notamment les poissons (C). Le cycle de la matière nutritive est bouclé lorsque ces organismes meurent et sont décomposés par les champignons et les bactéries (D). Les éléments minéraux résultants de cette décomposition se solubilisent dans l’eau de l’étang et sont à nouveau disponibles pour les végétaux autotrophes.

1 Larves des mollusques (Gastéropodes ou Lamellibranches)

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Figure 8 : Représentation schématique des principales étapes du cycle alimentaire dans un écosystème

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Les différents niveaux trophiques détaillés (Figure 8) Production primaire Le premier maillon de la chaîne est constitué par les organismes autotrophes. Le phytoplancton et, dans une moindre mesure, les macrophytes et le périphyton, assurent la production primaire. Ils sont capables de photosynthétiser leur propre matière organique, à partir notamment du gaz carbonique et des éléments minéraux de l’eau sous l’influence de l’énergie solaire, en rejetant de l’oxygène durant leur phase d’activité photosynthétique. L’étape essentielle est donc la photosynthèse qui va permettre la fixation par le phytoplancton du carbone minéral dissous disponible dans le milieu. Le carbone assimilable par la photosynthèse se présente dans le milieu sous les formes CO2, HCO3-, CO3

2-, qui s’équilibrent en fonction du pH du milieu. Une autre source de carbone est le carbone atmosphérique qui pénètre l’eau de l’étang par diffusion, mais en quantité très faible. La quantité de phytoplancton dans l’étang est une fonction croissante de la quantité d’éléments nutritifs disponibles. Ceux-ci sont d’autant plus nombreux que les apports extérieurs sont grands, mais il ne faut pas négliger le facteur qualité de l’eau qui, avec le climat, va conditionner le bon développement de ce phytoplancton en contrôlant l’activité métabolique des différents organismes qui le composent. Zooplancton herbivore ou carnivore, filtreur ou prédateur Les végétaux servent directement de nourriture à des organismes hétérotrophes et herbivores, qui transforment la matière organique végétale en substances animales plus élaborées. C’est le cas du zooplancton. Beaucoup d’organismes du zooplancton, comme les daphnies et les rotifères par exemple, s’alimentent par filtration grâce à un appareil ciliaire (rotifères et ciliés) ou à des appendices munis de soies (cladocères, calanidés) permettant un mouvement continuel de l’eau devant la bouche ; les autres organismes du zooplancton ont un comportement prédateur à l’égard des animaux (cyclopidés, zooplancton carnivore) ou même de cellules et de colonies végétales. Poissons planctophages Les poissons appartenant à ce groupe se nourrissent aussi bien du plancton végétal qu’animal, avec toutefois une préférence pour le zooplancton. Ils ont recours à deux types de techniques de capture de leurs proies : la chasse à vue et la filtration par l’appareil branchiospinal. Les grandes espèces planctophages (comme les carpes argentées et les carpes marbrées), pour lesquelles la chasse à vue ne serait pas rentable en terme d’énergie, récoltent le poisson par filtration de l’eau à travers le système branchiospinal. Poissons carnivores Ils dominent la pyramide trophique de l’étang et constituent le dernier niveau de consommation, avant l’homme dans le cas des étangs piscicoles…

En général, les poissons sont les plus gros organismes influençant la structure de l’écosystème par la prédation. Leur mode d’alimentation varie selon les espèces et le stade de développement : les formes juvéniles sont carnivores, mais, à l’âge adulte, leur régime alimentaire varie énormément. On compte, en plus des deux types cités précédemment (planctophages et carnivores), les poissons détritivores, macrophytophages, insectivores, malacophages et omnivores. A côté de ces consommateurs assimilant la matière organique vivante produite à des niveaux inférieurs, d’autres organismes (bactéries, champignons) n’utilisent que la matière organique morte. Cette matière organique morte représenterait une perte d’énergie pour l’écosystème si elle n’était reprise, à ses différents états de décomposition, par les organismes détritivores et les décomposeurs. Ils l’utilisent ou la détruisent pour la recycler sous forme de matière organique vivante, ou pour la dissocier totalement afin de restituer au milieu les éléments minéraux indispensables à l’élaboration de la matière organique végétale.

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Figure 9 : Gravure du fond de la tombe de Thébaine datant de 2000 av. J.C. (Chimists, 1957)

Figure 10 : Gravure trouvée dans la tombe de Nebunenef à Thèbes, env. 1240 av. J.C. (Brewer et Friedman, 1989)

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1.2 La pisciculture en étang 1.2.1 Des origines asiatiques vieilles de 4000 ans

La pisciculture en étangs est une pratique très ancienne. Les plus vieilles traces proviennent de la civilisation Egyptienne avec des représentations d’étangs de pisciculture sur des tombes datant d’environ 2.000 ans avant J. C (Figure 9 et Figure 10). Néanmoins, avant la récente construction du barrage d’Assouan, le Nil était une vaste plaine inondable riche en poissons et il est donc peu probable que la pisciculture a occupé une place très importante en Egypte ancienne. Deux activités de l’époque peuvent s’y apparenter en ce sens où elles modifiaient le cycle de vie naturel des poissons :

- le piégeage des poissons du fleuve, dans des trous creusés par l’homme, lors du retrait des

eaux, sur le modèle des flaques d’eau regorgeant de poissons observées dans les dépressions de la plaine en période de décrue.

- le parcage, voire la culture, de poissons en étangs, activité revêtant essentiellement un aspect récréatif lorsque la construction d’étangs dans la cour des grandes villas permettait aux nobles de pratiquer la pêche.

C’est en Chine, il y a 4.000 ans, et en Mésopotamie, il y a 3.500 ans, que l’on a retrouvé les premières références à l’élevage effectif de poissons en étangs. On pense que la pisciculture a été mise au point par les premiers agriculteurs pour devenir l’un des nombreux systèmes de production primaires servant à stabiliser les denrées agricoles. C'est également en Chine, où la première espèce piscicole connue est probablement la carpe commune (Cyprinus carpio), que la pisciculture s’est développée de manière plus importante qu’ailleurs, du fait de la meilleure maîtrise des eaux, et, peut-être, de la raréfaction du poisson dans le milieu naturel.

Dans le modèle traditionnel chinois, l’étang est triplement fonctionnel : il est l’habitat du poisson, le milieu de culture de la nourriture destinée au poisson et un lieu de décomposition de la matière organique. En outre, on sait que la pisciculture et la conchyliculture étaient pratiquées en Méditerranée au temps de l’Empire romain. Elle devint par la suite partie intégrante du système de production des monastères chrétiens en Europe centrale : les moines élevaient dans des mares fertilisées à l’engrais humain des poissons nourris de déchets de table. La pisciculture de carpes en étang commence en Europe centrale aux environs du XIe siècle pour atteindre son apogée au XVIe siècle avec des étangs divisés en trois catégories : pour le frai, pour les sujets de deux ans et pour l’engraissement jusqu’à quatre ou six ans. L’élevage de la truite y est pratiqué depuis un siècle environ.

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Figure 11 : Les différentes phases de la succession des organismes

lors de l’installation d’une biocénose d’étang (d’après Grygierek et Wasilewska, 1979)

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1.2.2 Particularités des étangs à vocation piscicole

Un étang piscicole est une masse d’eau plus ou moins stagnante, créée artificiellement et totalement vidangeable dans la plupart des cas. Les étangs piscicoles ont pour fonction la production de poissons et sont donc gérés en conséquence. Ainsi, les caractéristiques propres à un étang de production sont principalement dues aux activités humaines qui influent à la fois sur le milieu (qualité de l’eau et du sédiment) et sur les êtres vivants présents dans l’étang. C’est sur la variation de ces différents facteurs que le pisciculteur va pouvoir jouer pour améliorer sa production. On peut citer, entre autres :

- le cycle hydrologique (fréquence des vidanges, fréquence et durée des assecs), - le peuplement piscicole (espèces introduites et proportions relatives, densité), - la composition du milieu (réglée par les interventions extérieures telles les apports d’amendements, d’engrais, d’aliments pour poissons, d’oxygène dans le cas d’oxygénation artificielle de l’étang).

Les différentes phases de la « vie » de l’étang sont liées au cycle d’élevage des poissons. En

tout premier lieu, l’étang est soit préexistant, dans une dépression naturelle par exemple, soit creusé. Dans tous les cas, le sédiment sur lequel il repose doit être adapté (voir § 1.1.1). Le pisciculteur passe alors à la phase de remplissage de l’étang, dont la durée varie en fonction du débit de l’alimentation et des conditions climatiques. L'ensoleillement et le vent entraînent en effet des pertes d’eau par évaporation. Une fois « en eau », l’étang devient le siège d’une activité biologique intense caractérisée par une évolution bien différenciée des nombreux organismes de la biocénose. La colonisation du milieu par les organismes de différents niveaux trophiques s’effectue toujours selon un même schéma général dans lequel les différents groupes de la biocénose apparaissent et se développent successivement, les premiers servant de nourriture pour les autres. On distingue deux étapes successives : une phase de biocénose ouverte, durant laquelle les différents organismes apparaissent graduellement, et une phase de biocénose fermée, pendant laquelle les interactions entre les organismes vont conditionner la structure et le fonctionnement du réseau trophique. La phase de biocénose ouverte peut être divisée en 3 stades (Figure 11) :

- durant le stade I, les microorganismes hétérotrophes sont dominants et se développent grâce à la flore bactérienne qui a colonisé les détritus,

- le stade Il est marqué par l’apparition des algues phytoplanctoniques autotrophes, bénéficiant du CO2 et de minéraux libérés par les bactéries,

- au cours du stade III, les populations zooplanctoniques et piscicoles se développent aux dépends du phytoplancton, des bactéries et des autres microorganismes. La phase de biocénose fermée représente une quatrième étape au cours de laquelle la matière organique circule et s’accumule dans les différents niveaux trophiques pour finalement contribuer à la croissance de la biomasse piscicole. La vitesse de cette « mise en place », ainsi que la biomasse produite, vont dépendre de nombreux facteurs tels le climat et la quantité de matière organique et minérale initialement présente. Le pisciculteur estime alors le moment venu d’empoissonner l’étang. Au terme du cycle d’élevage, il effectue la récolte et décide ou non de vidanger l’étang. La période d’assec lui donne alors l'occasion de colmater les failles éventuelles avec de l’argile, de nettoyer le fond par curage ou par désinfection chimique afin d’éliminer les parasites potentiels nichés dans le sédiment, et de maintenir ainsi l’étang en bon état. A l’issue de cette période, dont la durée est là encore décidée par le pisciculteur en fonction notamment du climat, l’étang est de nouveau rempli, prêt pour un nouveau cycle d’élevage, ou bien mis en culture dans le cas des systèmes alternant pisciculture et cultures végétales.

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Figure 12 : Habitat et niche trophique des principales espèces élevées en étang (Bardach, Ryter et McLarney, 1972)

(1) : carpe herbivore ou carpe argentée, se nourrissant de macrophytes ; (2) : carpe marbrée mangeant du zooplancton dans la colonne d’eau ; (3) : carpe argentée consommatrice de phytoplancton dans la colonne d’eau ; (4, 5, 6) : poissons-chat et carpe commune se nourrissant d’organismes benthiques, de détritus et de fécès d’autres poissons Tableau 1 : Qualité d’une eau d’étang assurant une forte productivité piscicole en zone tempérée

(d’après B. Bachasson, 1992)

Paramètres principaux pH 6,5-8,5 Oxygène dissous 5 à 12 mg/L Température 2 à 4°C en hiver au fond

20 à 25°C en été Nitrates NO3

- 5-15 mg/L

Orthophosphates solubles PO4

3- 0,3-0,5 mg/L

Paramètres secondaires Calcium Ca++ 50-120 mg/L Alcalinité totale HCO3

- 100-250 mg/L Dureté totale Ca++/Mg++ 80-110 mg/L Conductivité >150µS/cm Petit zooplancton zp abondant d’avril à juin Gros zooplancton Zp abondant de mai à octobre

Autres paramètresMatières en suspension MES

<30 mg/L

Demande chimique en Oxygène DCO

<30 mg/L

Demande biochimique en Oxygène DBO5

<6 mg/L

Ammonium NH4+ < 1,0 mg/L

Ions Nitrites NO2- < 0,05 mg/L

Hydrogène sulfuré H2S < 0,05 mg/L

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1.2.3 Le choix des espèces et la qualité de l’eau : deux paramètres importants Monoculture ou polyculture ? Si des espèces piscicoles montrent des préférences alimentaires complémentaires, il est opportun de les élever ensemble pour bénéficier d’une exploitation optimum des richesses trophiques de l’étang. Par exemple, la carpe marbrée, capable de filtrer le gros zooplancton de pleine eau, sera associée à la tanche benthophage, et le gardon, très prolifique, servira de poisson-fourrage au brochet, consommateur de poissons vivants. L’éleveur est amené à mettre en place des polycultures qui, outre leur productivité élevée, ont l’avantage de limiter les risques de maladies propres aux monocultures. La Figure 12 nous montre un exemple courant d’association en polyculture. Les paramètres de la qualité des eaux piscicoles La qualité de l’eau est le paramètre qui va demander le plus de vigilance de la part du pisciculteur car d'elle va dépendre la vie dans l’étang. Le Tableau 1 présente les valeurs des différents paramètres de la qualité des eaux qui vont permettre une forte productivité piscicole. Cependant, il convient de préciser que ces valeurs sont spécifiques des étangs situés en zone tempérée, et qu’elles peuvent varier sous des conditions propres aux tropiques (températures plus élevées et amplitudes saisonnières plus faibles). *La mesure du pH renseigne sur la qualité de l’eau : dans les eaux naturelles non soumises aux rejets d’eaux usées, le pH dépend de l’origine de ces eaux et de la nature géologique du terrain. C’est un des facteurs influençant l’aptitude piscicole d’un étang, comme le montre la Figure 13. *L’oxygène dissous dans les eaux est primordial pour la vie aquatique. Une forte teneur favorise le processus d’auto-épuration1 des rivières avec le concours de micro-organismes (bactéries notamment). L’oxygène dissous est un facteur limitant, et une chute de sa teneur dans le milieu va accroître la vulnérabilité des organismes aquatiques vis-à-vis des parasites et toxiques du milieu. Lorsque le milieu est pauvre en oxygène, le poisson refuse toute nourriture, d’où une réduction de sa croissance. Or, les aliments non consommés sédimentent et leur décomposition nécessite de l’oxygène…Des valeurs extrêmes de 0,1-0,3 mg.L-1 sont supportées tant que l’exposition est brève (Figure 14 et Figure 15), d’autant mieux si le poisson a une respiration aérienne, comme c’est le cas chez certains poissons-chats par exemple (Clariidae et Pangasiidae). L’oxygène dissous est un paramètre d’une extrême importance pour apprécier l’impact d’une pollution organique. En effet, les bactéries dites aérobies consomment l’oxygène de l’eau pour dégrader la matière organique. Il faut noter qu’une valeur normale d’oxygène dissous n’exclut pas la présence de substances toxiques. *Une forte concentration en nitrates NO3

-, forme la plus oxygénée de l’azote, dans des eaux indique une pollution d’origine industrielle ou due à un lessivage des engrais sur les terrains de culture. Un excès de nitrates peut entraîner une prolifération anormale d’algues. *L’ion orthophosphate PO4

3- représente la forme minérale prépondérante du phosphore dans l’eau. Il peut provenir de la dégradation de la matière organique ou des polyphosphates2. Sa présence dans l’eau est également liée à l’utilisation des engrais.

1L’auto-épuration correspond au processus biologique ou physico-chimique par lequel un milieu détruit lui-même les déchets organiques. 2 Les polyphosphates sont utilisés pour le traitement des eaux ou comme adjuvants actifs dans les détergents.

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Figure 13 : Relation entre le pH des eaux d’étang et leur aptitude à la pisciculture (R. Billard et D. Marie, 1980)

Figure 14 : Quelques effets des basses teneurs en oxygène dissous sur les poissons d’étang (R. Billard et D. Marie, 1980)

Figure 15 : Teneurs létales en oxygène dissous pour quelques espèces de poissons d’étang

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*Le calcium joue un rôle-clé dans le fonctionnement de l’étang car sa présence assure la neutralisation de l’acidité des matières organiques et donc la stabilisation du pH de l’eau. Il permet également l’augmentation de la productivité en algues et plantes aquatiques et il améliore le développement et la croissance des invertébrés aquatiques et des poissons. *La conductivité d’une eau indique son aptitude à conduire le courant électrique, aptitude qui dépend de la teneur en sels dissous de l’eau. Ainsi, la conductivité permet une bonne appréciation des matières dissoutes. *Bien qu’une DBO élevée puisse être indicatrice d’une pollution organique, il ne faut pas oublier que dans un milieu nettement pollué, de faibles valeurs de DBO5 peuvent être liées à la présence d’éléments toxiques inhibiteurs, d’où l’intérêt de ne pas considérer la DBO5 comme unique critère d’estimation de la qualité d’une eau. Néanmoins, le rapport entre la DCO et la DBO permet d’apprécier la capacité de dégradation de la matière organique. Ce rapport vaut environ 1,5 pour les eaux-vannes (eaux de vidange assimilées aux eaux d’égouts), 2 pour les eaux usées urbaines et entre 3 et 5 pour les effluents de stations d’épuration. Si le rapport est grand, cela indique que la quantité de matière organique non biodégradable est importante. *L’azote ammoniacal (sels ammoniacaux) constitue un des maillons du cycle complexe de l’azote. Dans l’eau, il se trouve sous deux formes en équilibre : une forme non dissociée (NH3) toxique pour le poisson, et une forme dissociée (NH4

+) peu toxique pour le poisson. L’équilibre se déplace vers la forme non dissociée si la température augmente ou si le pH augmente. L’azote ammoniacal existe dans les eaux riches en matières organiques en décomposition lorsque la teneur en oxygène dissous est insuffisante pour assurer sa transformation, c’est-à-dire en principe à l’aval immédiat des foyers de pollution. Sa provenance peut être aussi d’origine industrielle (unité de fabrication ammoniacale, usines d’engrais, textiles, teintureries, etc.). *L’ion nitrite NO2

- est une forme oxygénée peu stable de l’azote. Il s’insère dans le cycle de l’azote entre l’azote ammoniacal et l’azote nitrique (NO3

-). On peut trouver des nitrites par défaut d’oxygène dissous dans le milieu. La présence de nitrites d’origine naturelle est rare. Une eau renfermant des nitrites peut être considérée comme suspecte voire toxique pour les poissons. *Les sulfures S2- sont susceptibles d’être rencontrés dans les eaux usées industrielles (usines chimiques, papeteries, raffineries…) ou urbaines (issus par exemple de la décomposition de la matière organique). Dans l’eau, les sulfures peuvent se présenter, en milieu acide, sous la forme de gaz (gaz incolore, d’odeur très caractéristique d’œuf pourri : hydrogène sulfuré) ou en milieu alcalin sous la forme de sel de l’hydrogène sulfuré. La présence d’hydrogène sulfuré indique un milieu dépourvu d’oxygène dissous. *Les eaux naturelles sont exemptes de chlore. Il provient principalement de la stérilisation de l’eau par le chlore qui est un produit bactéricide. On peut également le trouver dans les rejets de traitement de surface car il est souvent utilisé dans la neutralisation d’effluent cyanuré. Enfin, il peut être présent dans les eaux à forte salinité (NaCl), et également dans les eaux-vannes car le chlore est un composant des excréments humains. Le chlore dans l’eau peut être présent sous forme de chlore libre (chlore dissous, acide hypochloreux, ion hypochlorite) ou sous forme combinée (chloramines). Le chlore total comprend le chlore présent sous les deux formes. L’élément non métallique Cl2 est très toxique.

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Figure 16 : Schéma synthétique des activités humaines sur un écosystème d’eau courante

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1.3 Lorsque pisciculture rime avec recyclage…

Comme nous l’avons vu, la qualité de l’eau est un critère très important en pisciculture. Cela ne signifie pas pour autant qu’une eau a priori « sale » n’est jamais favorable au développement des poissons…bien au contraire ! Une eau considérée comme sale ne l’est peut-être pas, et vice-versa. Ainsi, l’utilisation d’eaux usées en pisciculture est très courante. Son intérêt, double, réside dans le fait que cette activité permet de recycler la matière contenue dans ces eaux au travers de la production d’aliments tels les poissons ou les végétaux aquatiques. 1.3.1 La notion d’ « eaux usées »

Les milieux aquatiques que l’on pourrait qualifier d’« enrichis » par les activités humaines sont de diverses natures. On compte parmi eux les eaux usées domestiques, industrielles et agricoles, mais également les eaux de ruissellement entrées en contact avec des milieux aménagés par l’homme (champs fertilisés, toitures, routes,…), etc. Dans tous les cas, ces eaux se retrouvent, de par leur usage, chargées en divers éléments (matière organique et inorganique, bactéries, etc.). A plus ou moins long terme, ces eaux usées sont déversées dans un milieu récepteur (cours d’eau) dont elles vont déterminer l’évolution. Ces rejets vont occasionner des changements plus ou moins rapides, qualitatifs et quantitatifs de la structure de l’édifice biologique en place dans le milieu récepteur afin d’utiliser au mieux les conditions nouvelles. Un certain nombre de phénomènes vont se dérouler en fonction de la nature et de la qualité des apports. Lorsque les rejets sont peu importants ou peu chargés, le pouvoir auto-épurateur de l’écosystème formé par le milieu récepteur suffit pour retrouver un bon équilibre. En revanche, une charge trop élevée des rejets peut entraîner une pollution du milieu récepteur. Ces rejets sont alors susceptibles de déséquilibrer les systèmes biologiques du milieu récepteur qui devient inhospitalier à un nombre de plus en plus grand d’espèces qui disparaissent peu à peu, cédant la place à un nombre limité d’espèces particulièrement adaptées aux nouvelles conditions de milieu et qui prolifèrent. Globalement, l’édifice trophique apparaît de plus en plus simplifié entraînant en retour une chute du pouvoir auto-épurateur de l’écosystème. Le processus évolue alors de façon accélérée (Figure 16). Outre la mise en péril de plusieurs organismes contenus dans le milieu et, à terme, la vie même du milieu, les pollutions par certains composants (germes pathogènes, métaux lourds) menacent également les futurs consommateurs directs ou indirects de ces eaux recyclées. Dans ce cas, seule l’application de traitements spécifiques permet d’assainir l’eau. C’est le rôle par exemple des stations d’épuration qui permettent au travers de processus physiques, biologiques et chimiques, de débarrasser au maximum les eaux usées de ces éléments potentiellement nuisibles.

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Figure 17 : Pourcentages moyens de l’utilisation des différents systèmes d’évacuation dans les grandes villes du monde par région (FAO, 2000)

Photo 1 : Latrines suspendues au-dessus d’un étang piscicole au Viêt Nam

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1.3.2 Les différents systèmes de recyclage des déchets humains par l’aquaculture (d’après « Reuse of human wastes in aquaculture – A technical review » de P. Edwards, 1992.)

Les systèmes de recyclage des déchets humains au travers de l’aquaculture peuvent être de deux types. Soit leur utilisation est intentionnelle, soit ils contribuent de manière inintentionnelle à la production aquacole. Dans tous les cas, ces systèmes de recyclage, à l’instar de la pisciculture en étang à laquelle ils sont souvent liés, trouvent leur origine en Asie, et se sont développés par la suite dans de nombreux points du globe. L’utilisation inintentionnelle de déchets humains est certainement à la base de leur utilisation intentionnelle, tout comme l’on peut considérer que la pisciculture trouve ses origines dans des observations de la nature (voir § 1.2.1). Le seul cas d’utilisation inintentionnelle de déchets humains en aquaculture est l’utilisation des eaux de surface contenant de la matière fécale, d’origine humaine et animale, dans des étangs piscicoles : en Inde, notamment, dans les zones rurales où des dépressions naturelles remplies d’eau agissent comme des étangs de stabilisation, ou bien en zone urbaine avec la présence de « douves » qui reçoivent les eaux usées de la ville. De tels systèmes ont donné des rendements annuels compris entre 1,3 et 1,6 tonnes par hectare. Un autre exemple vient du Bangladesh où les étangs ne sont pas utilisés à des fins piscicoles en saison sèche. Les latrines sont alors sèches. En revanche, en saison humide et avec les inondations, les poissons rentrent dans l’étang où ils se nourrissent des excréments. Lorsque à la saison sèche suivante, le niveau d’eau dans l’étang diminue, les poissons sont récoltés et revendus au marché, souvent sans mention de leur origine… Un dernier exemple vient du sud-Viêt Nam où l’on trouve aussi des latrines sur les étangs dans le but de nourrir des poissons (Photo 1). Ces systèmes observés dans la nature ont dû fortement influencer les systèmes actuels d’utilisation des déchets, dans le but de les recycler à travers la production de poissons, qui ne sont souvent que des systèmes naturels améliorés. En général, trois grands groupes de systèmes sont distingués, selon la manière dont sont traités les déchets avant utilisation. Ainsi, les déjections humaines peuvent être utilisées directement dans le cas des latrines suspendues au-dessus de l’étang, soit indirectement dans le cas du camionnage qui consiste à transporter les déchets récupérés en ville vers les étangs piscicoles périurbains. Les étangs piscicoles à latrines suspendues A la différence des latrines situées au-dessus d’un simple trou, qu’il est nécessaire de vider régulièrement, les latrines sont suspendues au-dessus de l’étang contenant les poissons. Les déjections tombent directement dans l’eau. L’eau des étangs piscicoles n’est normalement jamais utilisée pour les activités culinaires, le bain ou les lessives. En revanche, les eaux originaires de puits, de sources, de canaux ou de rivières, employées pour ces activités, peuvent être, après usage, déversées dans les étangs piscicoles, représentant un apport fertilisant supplémentaire. Parfois, plusieurs latrines sont disposées au-dessus d’un même étang, surtout lorsque l’étang est situé en bord de route, afin de profiter des contributions de passage… *Le système de latrines suspendues est originaire de Chine où il s’est développé en même temps que la pisciculture en étang. L’observation de poissons-chats se nourrissant directement des excréments humains serait à la base de ce système, qui fut également courant au Moyen-Age en Europe dans les piscicultures de Cyprinidés1. Des observations en Chine tendent à prouver que plusieurs espèces de carpes se nourrissent directement des excréments (carpe commune, carpe marbrée et carpe argentée), mais d’après d’autres observations faites à ce sujet, seules les carpes communes répondraient à cette caractéristique. Par la suite, cette pratique s’est retrouvée dans plusieurs pays asiatiques où ont émigré, au fil des siècles, les Chinois. *Au Viêt Nam, cette pratique est très courante dans la zone du delta du Mékong et plus généralement dans le sud-Viêt Nam. Traditionnellement, les latrines sont suspendues au-dessus d’étangs où sont élevés des poissons-chats2. Ces étangs sont reliés à la rivière par un petit canal et un

1 § 1.2.1 2 Pangasius hypophthalmus surtout.

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filet tendu en son travers empêche les poissons de s’échapper. Néanmoins, cette pratique a entraîné une pollution dans les rivières dont l’eau est employée pour des usages domestiques. Depuis, les systèmes ont parfois été améliorés avec l’installation d’un petit étang de sédimentation relié à l’étang piscicole. *En Malaisie, la pratique est beaucoup moins courante, et réduite aux ethnies d’origine chinoise. Les Malais et les Indiens fertilisent en effet très rarement leurs étangs avec des déchets organiques d’origine humaine. En revanche, l’emploi de fertilisants d’origine animale, cochons et de volailles principalement, est très répandu. Le niveau de vie en Malaisie est en effet assez élevé et les pisciculteurs malais, peut-être davantage conscients des risques sanitaires liés aux latrines suspendues, ont ainsi plus d’argent pour acheter de l’aliment destiné aux poissons. *L’utilisation des latrines suspendues est peu commune en Thaïlande car les fermiers thaïlandais sont fortement opposés à cette pratique. Cependant, lorsque la famille est originaire de Chine, il arrive que du poisson soit issu de cette pratique, mais il ne sera jamais auto consommé par le fermier et toujours revendu sur un marché, encore une fois sans mention de ses origines. *En Indonésie, les fermiers musulmans, pour qui la vue ainsi que la proximité de déjections humaines est offensante, ont trouvé dans les latrines suspendues au-dessus des étangs piscicoles un bon moyen d’évacuer rapidement et discrètement leurs déchets, sans toutefois en gâcher le pouvoir fertilisant autrefois utilisé pour l’agriculture. Bien que les données nécessaires pour savoir si les latrines sont des vecteurs de maladies manquent, des spécialistes ont annoncé que les systèmes d’étangs fertilisés par les déjections humaines affaiblissaient les risques de contamination par les matières fécales, importants dans les villages où les conditions sanitaires sont réduites. De plus, les poissons issus de ce type de production sont normalement « purifiés » pendant environ deux jours dans des eaux fraîches courantes. L’utilisation de latrines pour fertiliser les étangs piscicoles représente donc pour certains un moyen relativement sûr pour éliminer les déchets humains, en plus d’un moyen économique d’augmenter les rendements. Un sondage a mis en évidence la prise de conscience de la part des fermiers des avantages sanitaires liés à ce système. Malgré cela, de plus en plus de pays tentent de trouver d’autres moyens pour éliminer les déjections humaines. En 1995, l’usage des latrines suspendues au-dessus des étangs piscicoles a été interdit au Viêt Nam. La pratique perdure pourtant, et l’on peut penser que l’absence de contrôles rigoureux en est la cause. En réalité, l’image donnée par ce type de production n’est pas très « vendeuse » pour un pays qui exporte une grande partie de sa production aquacole… Le camionnage1 L’utilisation de déjections humaines est indirecte, et les quantités utilisées sont beaucoup plus importantes que dans le cas des latrines suspendues. Le système repose sur le stockage des déjections humaines de la ville et sur leur redistribution dans les étangs piscicoles en zones rurales ou périurbaines. Les latrines individuelles consistent en un trou ou un seau dont le contenu est stocké en attendant d’être redistribué par des camions ou des bateaux. Ce stockage, comparable à du compostage, permet la décomposition des déchets à des états réduits et plus stables. Des méthodes plus complexes, impliquant la fermentation ou la décomposition, peuvent être utilisées afin d’améliorer la valeur ou l'utilité des déchets. Dans d’autres cas, les déchets sont utilisés comme substrats pour le développement d’organismes intermédiaires dont se nourrissent ensuite les poissons : c’est le cas des vers et des insectes dont se nourrissent les poissons carnivores par exemple. La sécurité sanitaire représentée par le dispositif de stockage est assurée grâce à une période minimum de stockage fixée, en Chine, à quatre semaines. Ce système a connu un large succès en Chine, à Hong Kong, et à Taiwan, jusqu’aux années 70, et les déjections humaines étaient alors tellement prisées par les pisciculteurs qu’elles alimentaient un marché noir et les vols nocturnes dans les tanks de stockage étaient courants! A Taiwan, les trois quarts des excréments récoltés étaient, avant 1980, employés pour fertiliser les étangs. En Chine, les rendements étaient de 1 Traduction de l’anglais “cartage”

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l’ordre de 6,5 T/ha/an dans les années 70. Cependant, avec l’intensification des moyens de production, les déjections humaines sont peu à peu, à partir des années 80, remplacées par des fertilisants inorganiques, peu chers et abondants. Les apports en nourriture pour poissons sont accrus, notamment sous forme de granulés, et l’utilisation d’espèces filtreuses comme la carpe herbivore et la carpe argentée est en baisse. L’intensification des productions animales terrestres entraîne une augmentation de la disponibilité en sous-produits, comme le lisier, qu’il est aisé de recycler en aquaculture. Ainsi, les systèmes intégrés1 permettent de diminuer, voire d’éliminer les prix de transport, d’achat et de distribution de déchets organiques humains, d’autant plus que le coût de la main d’œuvre est augmenté du fait de la concurrence engendrée par les activités de la ville. D’autres pays comme la Malaisie et le Japon ont eu aussi connu cette pratique, mais l’ont peu à peu abandonnée. En Malaisie, les égouts remplacent le traditionnel seau, et les municipalités ne délivrent plus désormais de permis autorisant la livraison de déjections humaines, invoquant les problèmes de santé publique inhérents à cette pratique. Enfin, au Japon, où l’utilisation des déchets humains en aquaculture, pratique et traditionnelle, était bien acceptée par la population, l’industrialisation et l’augmentation des coûts de main d’œuvre postérieures à la Seconde Guerre Mondiale ont entraîné l’arrêt définitif de cette pratique en 1967. Les effluents d’égouts Dans les systèmes d’égouts conventionnels, les excréments sont mélangés à de grands volumes d’eau et sont entraînés hors de la maison grâce à un courant circulant dans des tuyaux. Outre la facilité d’utilisation et d’évacuation des déchets, le système égouts est aussi garant d’une bonne hygiène au sein de la maison. Cependant, des contraintes techniques et économiques rendent ce système inadapté aux pays en voie de développement. Ainsi trouve-t-on dans ces pays peu de systèmes d’égouts. Pourtant, il existe plusieurs systèmes d’élevage de poissons en eaux d’égouts qui sont économiquement viables. C’est en Inde qu’est situé le plus important complexe piscicole en eaux d’égouts au monde. La Chine et l’Indonésie ont un système comparable mais beaucoup moins étendu. Dans d’autres parties du monde, on peut également trouver des systèmes où les eaux d’égouts sont utilisées à des fins piscicoles, comme en Israël et surtout comme en Allemagne, à Munich. Peu sont recensés en Afrique et en Amérique. Les effluents d’égouts sont utilisés bruts ou dilués, après une première sédimentation éventuelle. Les rejets d’égouts, dans la mesure où ils ne sont pas pollués chimiquement, améliorent la productivité naturelle de l’étang, mais les déversements doivent être faits avec prudence en contrôlant les modifications provoquées sur le milieu. En retour, l’eau est en quelque sorte « nettoyée » par les poissons (Tableau 2). Tableau 2 : Caractéristiques de l’eau des étangs avec et sans poissons, recevant des effluents

d’égouts

Elément Etang piscicole Etang non piscicole DBO5 (mg.L-1) 6 21 Matière en suspension (mg.L-1) 12 37 Azote total (mg.L-1) 3 10 Phosphore total (mg.L-1) 2 8 pH 8,3 7,9

Source : Allen et Carpenter, 1977.

1 voir § 2.3.2

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*A Calcutta, le plus grand complexe du monde est exploité depuis plus de 50 ans. Le rendement moyen était de l’ordre de 5 T/ha/an dans les années 80, variant entre 3 et 13 T/ha/an selon la localisation de l’étang. Les principales espèces élevées sont des carpes indiennes (mrigal, rohu et catla), capables de se nourrir directement de détritus organiques. Depuis la fin des années 80, la pisciculture en égouts de Calcutta s’est trouvée menacée par différents conflits liés au développement urbain. La pression foncière ainsi que la pollution due aux activités industrielles en sont les principaux exemples. *En Chine, les effluents d’égouts sont utilisés en aquaculture depuis 1957. Dans certaines régions, la création de piscicultures a été salutaire pour le maintien de la qualité des eaux de rivière. Cette utilisation va croissante, mais des traitements préliminaires sont nécessaires afin d’éviter les risques de contamination par des pathogènes ou par des substances toxiques. A Changsha, des expériences ont été menées concernant le pré-traitement des eaux usées municipales en combinaison avec l’élevage de poissons. En 1987, plus de 300.000 m3 d’eau usée étaient ainsi traités dans des étangs piscicoles et les rendements correspondants s’élevaient à 6 T/ha/an. Ces mêmes études ont démontré l’existence d’une influence de la taille des juvéniles stockés et de la densité de stockage sur le rendement. En Indonésie, les égouts de la vieille ville de Bandung étaient autrefois dirigés vers des tanks de sédimentation avant d’alimenter les étangs piscicoles. Malheureusement, le volume de ces tanks est devenu insuffisant et une partie des eaux utilisées pour l’aquaculture sont donc des effluents d’égouts bruts. Les étangs de pisciculture ont une faible profondeur (40 à 60 cm), et sont utilisés majoritairement pour la production de juvéniles de carpe commune et de tilapias qui sont stockés plus tard dans d’autres systèmes aquacoles. Les rendements sont compris entre 2 et 5 T/h/an dans ce type de système. *En Israël, pays au climat semi-aride et aride, l’eau est une denrée précieuse qu’il est important d’exploiter au maximum. Ainsi l’intégration du traitement des eaux aux activités agricoles et aquacoles est-elle favorisée. Traditionnellement, durant la saison sèche, les eaux usées sont utilisées pour l’irrigation. Cependant, elles exigent un traitement minimal… D’où l’idée de stocker les eaux usées dans de grands réservoirs profonds de 4 à 8 m contenant des poissons : on récupère ainsi de l’eau utilisable en irrigation, et des poissons comestibles ! *En Europe, les premières piscicultures en eaux d’égouts sont apparues au tout début du XXe siècle, en Allemagne, et sont largement inspirée des étangs à latrines de Chine et de Java. La première tentative de traitement d’eaux d’égouts prétraitées et diluées, simultanément à l’élevage de poissons a eu lieu en 1903. Puis à Strasbourg fut construit un complexe pouvant purifier les eaux usées de 2.000 habitants dans un étang de 1 ha en 20 à 30 jours. Le seul problème rencontré était celui de l’accumulation de vase au fond des étangs. C’est à Munich que le plus grand complexe fut construit, en 1929. D’autres pays européens suivirent, mais à échelle moindre : la Pologne, l’ex-Tchécoslovaquie et l’ex-Union Soviétique. En Pologne, les effluents bruts étaient épandus sur des prairies puis drainés dans des étangs pour produire 0,5 à 0,7 T/ha/an de poissons sans aucune autre source d’alimentation. A Munich, l’effluent brut est dilué dans l’eau de la rivière. Il est d’abord pompé à une altitude de 10 m et se déplace ensuite par gravité. Les deux principales espèces, la carpe commune et la tanche, ne sont élevées qu’une partie de l’année à cause de la rigueur de l’hiver. Les rendements obtenus sont de 0,5 T/ha/an. Deux semaines avant la récolte, de l’eau claire est ajoutée pour purifier le poisson. En terme d’efficacité de traitement des eaux, la réduction de la DBO5 est comprise entre 70 et 75%, la réduction des teneurs en azote et en phosphore est encore plus élevée. Ces deux éléments sont même parfois totalement éliminés. Le nombre total de bactéries est réduit de 99,6%. De plus, la vente des poissons réduit les coûts de traitement des eaux. Le seul problème est que la pisciculture ne fonctionne pas l’hiver, et que les eaux usées sont directement rejetées dans le lac réservoir alimentant la centrale électrique, puis dans la rivière.

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La quantité d’eaux usées transitant dans les étangs ne peut pas être augmentée sans que cela entraîne une réduction de la croissance des poissons. Ainsi, il est impossible d’optimiser à la fois la production de poissons et l’élimination des déchets… *En Afrique, des opérations similaires à petite échelle ont été rapportées au Kenya, Malawi, Afrique du Sud et Zimbabwe. Les principales espèces cultivées sont les tilapias. 1.3.3 Un intérêt croissant pour l’étude de ces systèmes

Si l’on sait que l'idée d’utiliser les eaux usées pour l’aquaculture n'est pas nouvelle et qu’elle existe même depuis de nombreux siècles dans divers pays du Monde, les tentatives de mise en valeur des techniques qui lui sont liées sont en revanche plus récentes. A partir des années 70, les pays industrialisés sont de plus en plus sensibles aux problèmes de dégradation de l’environnement. L’Homme prend conscience que l’accroissement de la population et de ses activités entraîne une augmentation de la consommation en eau ainsi qu’une dégradation de la qualité des eaux naturelles. Ces eaux qui pouvaient autrefois être considérées comme une ressource naturelle inépuisable, sont désormais devenues un élément à préserver. L’eau prélevée dans le milieu naturel ne peut plus être considérée comme pure et directement consommable car toutes les eaux dont nous dépendons aujourd’hui sont potentiellement des eaux en partie usées.

Les Nations Unies, sensibles aux problèmes d'approvisionnement en eau dans les pays en

voie de développement, déclarèrent donc la période 1981-1990 "Décennie Internationale de l'Hygiène et de l'Approvisionnement en Eau Potable "1. Dès lors, de nombreux travaux ont été consacrés à l'étude et à l'optimisation des systèmes visant à assainir les eaux usées dans des pays où la construction de dispositifs de traitement des eaux reste financièrement impossible2 et où l'augmentation croissante de la population, notamment dans les grandes villes, menace de plus en plus sérieusement la qualité des eaux en dégradant l'environnement.

1 "International Drinking Water Supply and Sanitation Decade" 2 voir Figure 17 : Pourcentages moyens de l’utilisation des différents systèmes d’évacuation dans les grandes villes du monde par région (FAO, 2000)

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Deuxième partie : Présentation générale du Viêt Nam et place du secteur aquacole

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Drapeau de la République socialiste du Vietnam

Capitale : Hanoi Monnaie : le Dong1 Devise : Indépendance Liberté Bonheur Régime : République, Parti communiste unique Langue principale : Vietnamien Religions : bouddhisme, christianisme

Cartes 1 : Localisation du Viêt Nam en Asie

Cartes 2 : Géographie et administration du Viêt Nam

1 2000 VND = 1 franc français en 2001, soit 0,15 €.

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2 PRESENTATION GENERALE DU VIET NAM ET PLACE DU SECTEUR

AQUACOLE

2.1 Le Viêt Nam, du communisme au libéralisme… 2.1.1 Géographie et climat Localisation et particularités géographiques du Viêt Nam Situé à la lisière orientale de la péninsule indochinoise (Cartes 1), le Viêt Nam, pays en forme de S, est une sorte de balcon ouvert sur la Mer de Chine. Avec une superficie de 331.690 km², le pays s’étend sur 1.650 km du nord au sud (entre 8°30 et 23°22 de latitude nord) et possède une côte littorale longue de 3.260 km. Il est bordé au Nord par la Chine et à l’Ouest par le Laos et le Cambodge. Les fleuves et les rivières sont nombreux, et les embouchures denses. Les plaines (deux deltas du Mékong au Sud et du Fleuve Rouge au Nord, et la plaine littorale) occupent un quart du pays, les montagnes et les hauts plateaux formant le reste. Le Viêt Nam est divisé en 8 régions, elles-mêmes divisées en plusieurs provinces (Cartes 2). Un climat caractérisé par deux saisons (Figure 18) Du fait de son étirement nord-sud très prononcé et de la variété de son relief, le Viêt Nam présente une remarquable diversité de climats entre les régions les plus septentrionales et méridionales. Le Viêt Nam se trouve dans une région de climat tropical et subtropical, avec des moussons, beaucoup d'ensoleillement, un abondant volume pluviométrique et une grande humidité. Certains endroits proches du tropique du Cancer et les régions d'altitude ont un climat tempéré. Le Sud du pays est soumis à un climat tropical, chaud et humide, à fortes précipitations annuelles : 1.500 mm dans les plaines et 2.000-3.000 mm dans les régions montagneuses en moyenne. Le climat se divise en deux saisons : la saison des pluies, de mai à novembre, apportée par la mousson du sud-ouest et la saison sèche, de décembre à avril. La température se caractérise par sa constance, avoisinant les 27°C tout au long de l'année, avec des maxima pouvant atteindre 35°C aux mois les plus chauds (mars-avril). Le Nord est, quant à lui, soumis à un climat subtropical, plus tempéré que dans le Sud. Il comporte également deux saisons distinctes, marquées par une amplitude thermique relativement importante pour la région : l'hiver, souvent frais, voire froid (de novembre à avril, 17°C en moyenne, avec des chutes de température à 10°C), et l'été, souvent ponctué de typhons. La saison des pluies, de mai à octobre, se décline en averses brèves mais souvent torrentielles, principalement en fin de journée.

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Source Internet

Figure 18. Températures et précipitations à Hô Chi Minh-Ville (Sud du pays) et à Hanoi (Nord du pays)

Carte 3 : Répartition de la population au Viêt Nam (B. Jan et C. Petit, 1997)

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2.1.2 Une population grandissante

Le Viêt Nam est un des pays les plus peuplés d’Asie. L’essentiel des 78,7 millions d’habitants (FAO, 1999) constituant la population vietnamienne se concentre dans deux grandes zones cultivées : le delta du Fleuve Rouge (“Sông Kôi” en vietnamien ) au Nord (15.000 km² ; 13,3 millions d’habitants), et celui du Mékong au sud (40.000 km² ; 23,1 millions d’habitants) (Carte 3). La densité de population moyenne du pays avoisine 237 hab./ km². Grâce aux efforts entrepris par le gouvernement afin de limiter la croissance démographique, le pays a réussi à ramener le nombre d'enfants par mère de 3,8 en 1989 à 3,1 en 1995, mais le taux d'interruptions volontaires de grossesse officiellement recensé par les autorités médicales locales représente déjà 40% des femmes enceintes. Depuis, le taux d’accroissement naturel en 2000 s’est stabilisé à 1,53% et le taux de natalité s’est réduit de 0,06% par rapport à 1999 1. L’espérance de vie est de 65 ans pour les hommes et 69 ans pour les femmes. Le niveau d’éducation de la population est remarquablement haut, caractérisé par un taux d’alphabétisation de 93,7 %. 2.1.3 La situation économique actuelle, résultat d’une politique d’ouverture

Le Vietnam connaît actuellement un taux moyen de croissance économique annuelle de 8,3% environ, ce qui classe le pays parmi les 15 pays ayant la croissance la plus élevée. A partir de 1976 (date de la réunification du pays), le Viêt Nam tenta d’appliquer une politique économique centralisée reposant sur des plans quinquennaux. Mais durant les deux premières périodes (1976-1980 puis 1981-1985), l’économie de la nation reste stagnante, connaissant une rapide inflation et un manque de biens et de services. Les raisons de cet «échec» : structures économiques inexistantes, poids de la bureaucratie dans de nombreux secteurs, domination de la production à grande échelle au détriment d’autres types de production, et refus de la loi de marché. A l’issue de ces dix années, en 1986, le Parti Communiste Vietnamien prend conscience de l’absolue nécessité pour le Viêt Nam de s’ouvrir aux échanges économiques internationaux. Il introduit alors le « Doi Moi » (politique du renouveau), expérience unique de libéralisation économique, dans le Sud du pays. C’est ainsi que depuis 1991, année du retrait brutal de l’aide soviétique, le Viêt Nam a réussi un formidable revirement structurel qui, en s’appuyant sur les seules ressources propres du pays, lui a permis d’améliorer tous ses indicateurs économiques. Le gouvernement autorise dès lors le développement du secteur privé mais également l’armée, les ministères civils et le parti à créer des entreprises, ce qui reste une forme de nationalisation. La politique du Doi Moi est basée sur une plus grande liberté dans les activités économiques, sur la transformation d’une gestion centralisée en un mécanisme d’orientation de marché et sur la transformation des productions étatiques et collectives en des productions multi-secteur. Le capital total investi par l’Etat en 2000 dans le développement socio-économique représente 27,9% du PIB en augmentation de plus de 20% par rapport à son niveau de 1999. De plus, l’Etat tend à favoriser désormais les relations économiques multinationales. Ainsi, l’embargo américain, maintenu depuis 1975, est levé en 1994 et, en 1995, le Viêt Nam rejoint la Thaïlande, les Philippines, la Malaisie, Singapour, l’Indonésie et Brunei au sein de l’ANSEA (ou ASEAN). Cela traduit nettement la volonté du Viêt Nam de revenir sur la scène politique et économique du Sud-Est asiatique. Les autres pays membres deviennent d’ailleurs d’importants investisseurs au Viêt Nam, ce dernier constituant encore un «réservoir» de main d’œuvre abondante et bon marché. Le Viêt Nam fait également partie de l’APEC et a demandé d'adhérer à l'OMC.

1 Données issues de “Viêt Nam, 2000-2001”

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Tableau 3 : Evolution de la structure du PIB vietnamien entre 1985 et 2000 1985 1990 1995 2000 PIB-milliards de VND, prix constants base 1994

106.176 131.968 195.567 273.422*

Taux d’inflation -% 774,7 67,5 12,7 9 Industrie et construction (% PIB total)

27.4 22.7 28.8 36.9

Agriculture, sylviculture et pêche (% PIB total)

40 .2 38.7 27.2 24.2

Services (% PIB total) 32.4 38.6 44 38.9 * soient 446.194 milliards de VND à prix courants

Source: Statistical yearbook Ho Chi Minh City - 2000

Pêche et aquaculture14%

Forêt4%

Agriculture82%

Source: Statistical yearbook Ho Chi Minh City - 2000

Figure 19 : Décomposition du revenu brut du secteur de l’agriculture / forêt / pêche

(125.773 milliards de VND)

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D’une situation où la production nationale ne parvenait pas à couvrir l’ensemble de la demande, le Viêt Nam est arrivé à un point où, non seulement la demande est satisfaite, mais il y a des excédents destinés à l’exportation. C’est ainsi que le montant total des exportations a atteint 9,36 milliards de $ US en 1999. Avec une augmentation de 6,7% entre 1999 et 2000, le PIB du pays a, quant à lui, atteint l’an dernier 446.194 milliards de VND (prix courants), soit 34 milliards € et presque 30 milliards de $ US. Néanmoins, le PIB/hab./an n’est que de 378 $ US, soit un peu moins de 435 €. Malgré ces progrès remarquables, l’économie vietnamienne est encore confrontée à des contraintes majeures. En effet, même si le potentiel économique en termes d’infrastructures et d’investissement dans le secteur industriel, de même que l’efficacité économique des systèmes de production, s’améliorent considérablement, le manque d’expérience (manque d’informations sur le marché local, difficultés à établir de bonnes prédictions, service commercial inadapté, fraude…) constitue un obstacle à sa progression.

2.2 Place des secteurs halieutiques et aquacoles dans l'agriculture vietnamienne 2.2.1 Le secteur agricole emploie deux tiers de la population active et contribue à un tiers des

exportations

La surface agricole, essentiellement représentée par les deux deltas, occupe un quart de la surface totale du pays et est exploitée par 68 % de la population active. En tout, 79,2 % de la population du pays vit en zone rurale (la population urbaine représente 20,8 % de la population totale). Les produits de l’agriculture vietnamienne sont aussi variés que le riz, le maïs, la pomme de terre, le caoutchouc, le soja, le café, le thé et la banane pour les productions végétales, et les volailles, les porcs et les poissons pour les productions animales, destinées ou non à l’exportation. L’agriculture joue un rôle majeur dans l’économie du pays car, même si la part des secteurs agriculture, forêt et pêche dans le PIB total est en diminution depuis 1985 (40,2% à 24,2% en 15 ans), ce secteur a participé pour 35,5% du montant total des exportations en 1999. Parallèlement, les secteurs de l’industrie et des services sont de plus en plus importants. Les principaux produits agricoles exportés sont le riz (4,5 millions de tonnes exportées en 1999), le café (482.000 tonnes) et le caoutchouc (265.000 tonnes). Le revenu brut du secteur de l’agriculture/forêt/pêche était estimé à 125.773 milliards de VND (prix constants 1994) en 1999, soient 8,4 milliards de $ US ou 9,6 milliards €, l’apport principal venant de l’agriculture (Figure 19). 2.2.2 Les secteurs de la pêche et de l’aquaculture possèdent un fort potentiel de croissance

Dans un pays comprenant 3.300 km de côtes et de grandes surfaces en eau (étangs, fleuves), le secteur de la pêche et de l’aquaculture dispose d’un potentiel considérable, aujourd’hui largement exploité mais qu’il reste à optimiser. En raison d’un réseau dense de rivières, canaux, lacs et lagunes, l’aquaculture vietnamienne fut longtemps axée sur les poissons d'eau douce, d’abord dans le Nord du pays avec l’élevage de carpes, puis dans le delta du Mékong avec les poissons-chats. Vers la fin des années 80, l’élevage de crevettes Pénéides s’est développé, et toujours dans le souci d’une diversification des productions, les activités aquacoles d’aujourd’hui comprennent la culture d’algues, de coquillages, l'élevage de crevettes et de crabes de mer.

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pisciculture en cages15%

rizipisciculture21%

pisciculture en étangs64%

d’après A. Pleignen

Figure 20 : Part des différents systèmes piscicoles

dans la production de poissons d’eau douce en 1990 (115.000 tonnes)

A. B.

C. Photos 2 : Les trois formes de pisciculture au Viêt Nam : A-cages, B-étang, C-rizipisciculture

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La production totale des secteurs pêche et aquaculture en 2000 était estimée à près de 1,94 millions de tonnes. Les captures marines constituent l’essentiel de la production (1,22 millions de tonnes, soit 63%) mais l’aquaculture, pratique traditionnelle, est un secteur de plus en plus important (720.000 tonnes, soit 37 % de la production en 2000, contre 15% avec 155.000 tonnes en 1990). Le produit brut annuel du secteur halieutique en 1999 était de 20.742 milliards de VND (1,6 milliards €), soit 5,2% du PIB vietnamien. La part de l’aquaculture dans ce produit est de 33%. Ce produit annuel est en croissance régulière depuis 1986. 2.2.3 Marché des produits de la pêche et de l’aquaculture

Une grande partie de la production halieutique et aquacole vietnamienne est exportée, notamment dans d’autres pays d’Asie comme le Japon. Les exportations représentent en effet des sources importantes de devises dont le Viêt Nam a besoin pour ses importations. Les exportations de produits aquatiques vietnamiens en 2000 s’élevaient à 1,1 milliards de $ US, soit 9,1% de la valeur totale des exportations. En 20 ans, la production halieutique Vietnamienne a triplé et le montant des exportations a été multiplié par 87 ! L’augmentation des exportations fait partie des trois grands axes de développement visés par le ministère de la pêche, les deux autres concernent le développement de l’aquaculture et de la pêche en haute mer.

2.3 L’aquaculture, une activité traditionnelle en tête des priorités dans les programmes de développement

2.3.1 Organisation du secteur et principales formes de pisciculture au Viêt Nam

Le secteur aquacole est sous la tutelle du Ministère de la Pêche et de l’Aquaculture1. Localement, il est représenté, au niveau des chambres d’agriculture de chaque province, par un service spécialisé. Ce service assure le suivi statistique de la production et du secteur aval, jouant un rôle proche d’un organisme interprofessionnel. Il s’implique également dans des travaux de recherche, valorisés par une démarche de vulgarisation auprès des producteurs. Les recherches sont menées par des organismes de recherche et des universités. Parmi eux, il y a trois Instituts de Recherche en Aquaculture (dont l’IRA n°2 à HCMV), l’Université Agronomique et Forestière de Thu Duc, l’Université de Can Tho et l’Université de Nha Trang. Outre des installations spécialisées, ces organismes possèdent un réseau développé de pisciculteurs permettant la réalisation d’essais et la mise en application des résultats. Les centres de recherche sont les partenaires privilégiés des organismes de coopération et des bailleurs de fonds étrangers. Les trois principaux systèmes de pisciculture continentale employés par les Vietnamiens sont la rizipisciculture, la pisciculture en cages sur les fleuves, les lacs et les rivières, et la pisciculture en étangs. Bien qu’il semble que la pisciculture au Viêt Nam remonte à plusieurs centaines d’années avec l’apparition des systèmes de production en étangs agropiscicole, la rizipisciculture est traditionnellement pratiquée depuis que des riziculteurs ont su profiter de la migration saisonnière des poissons dans leurs rizières. Concernant la répartition de la production entre ces trois systèmes, seuls des chiffres datant d'une dizaine d'années ont pu être trouvés. Il est fort probable que la pisciculture en cage, qui a connu un développement assez important, tienne désormais une place plus grande.

1 également appelé “Ministère des Produits aquatiques”

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Figure 21 : Les systèmes piscicoles intégrés à la ferme au Viêt Nam (KS. Ng. Duy Khoat, 2000)

Tableau 4 : Valeur fertilisante de différents déchets

Nature Kg produits / jour / animal

% MS Teneur des éléments en % de la MS N P2O5 K2O CaO

Fumier bovin (70% des excrétions)

30 20 à 25 2,4 1,1 à 1,5 3 à 3,3 4

Lisier de bovins (30% des excrétions) 15 3,6 1,25 4,6 ?

Lisier de porcs 4 10 à 15 5,2 4 3,4 à 4 4 Fiente de volaille* 0.8 25 à 50 3 à 6 3 à 6,4 2,6 à 3 8 à 12 Composts urbains - 60 1,1 0,5 0,8 11,7 Boues de stations d’épuration des eaux

- 65 1,5 3,8 0,2 15,4

* Les fientes de volaille sont d’excellents fertilisants pour les eaux de pisciculture. d’après Chassignet, 1985

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2.3.2 En ligne de mire des programmes de développement : l’amélioration de l’aquaculture

« Le Ministère des Produits aquatiques envisage une production de 2,45 millions de tonnes et un chiffre d’affaire à l’exportation de 2,5 milliards à 2,7 milliards de dollars en 2005, ce qui exige un gros investissement», titrait un des articles du Courrier du Vietnam le 8 juin 2001. En effet, il existe une réelle volonté de développer le secteur de la pêche et de l’aquaculture, avec notamment la mise en route simultanée de trois programmes importants qui sont l’accélération de l’élevage de produits aquatiques, la pêche hauturière et la transformation pour l’exportation. Le programme portant sur l’élevage de produits aquatiques recevra l’investissement le plus lourd avec 16.189 milliards de VND. Le but de ces programmes est de « créer des ressources de matières premières stables au service de l’exportation et du refus de la misère ». Ainsi, les travaux en cours en aquaculture se concentrent de plus en plus sur l’amélioration des productions intensives, comme celles des Pangasius et surtout de crevettes. Mais ils tendent également à privilégier les formes d’aquaculture intégrées dans les systèmes agraires, incluant les productions végétales et animales terrestres (Figure 21). Pour le sujet nous concernant, il peut être intéressant de présenter ici brièvement mais de manière assez précise d’où vient et en quoi consiste exactement ce type de pisciculture. La base de ce que l’on nomme la « pisciculture intégrée », ou agropisciculture, est le recyclage des déchets d’origine humaine ou animale grâce à l’activité piscicole au sein d’une exploitation. Les latrines suspendues en sont un exemple, mais il existe d’autres formes d’intégration que nous allons détailler. Origines de la pisciculture intégrée Parfois, la pisciculture s'est développée de manière totalement indépendante par rapport à l’agriculture traditionnelle. La culture de divers poissons carnivores par exemple, est établie depuis longtemps dans divers endroits du monde, et s'est développée en industrie spécialisée, tout à fait séparée des autres activités. Les origines de ce type de pisciculture doivent souvent être trouvées dans les intérêts sportifs. En revanche, elle s’est souvent intégrée, dans une certaine mesure, avec la production du bétail et les cultures. On la nomme alors pisciculture intégrée. L’élevage « intégré » des poissons s’est probablement d'abord développé dans les parties densément peuplées de l'Asie et de l'Europe centrale, régions basées essentiellement sur l’agriculture et qui avaient un accès limité aux stocks de poissons sauvages. Bien que ces zones puissent avoir été ouvertes aux importations d'alimentation et d'engrais, il devait certainement y avoir des limites pratiques à une utilisation plus large ou plus intensive. Le développement des moyens pour produire du poisson a donc été inévitablement orienté sur l’utilisation des ressources au sein-même de la ferme ou dans l’environnement immédiat. Les conditions sociales et économiques qui ont encouragé l’évolution dans le passé de la culture intégrée de poissons se produisent aujourd’hui dans beaucoup d'autres régions du monde, d’où un large développement dans les pays en voie de développement, que ce soit en Asie, en Afrique ou en Amérique du Sud. La pisciculture intégrée peut en effet améliorer l'efficacité globale de beaucoup de types de fermes avec une utilisation plus efficace de l'eau et le recyclage des déchets par les poissons. La famille, les élevages et les cultures représentent les seules sources d’alimentation et d’engrais disponibles, à des prix assez bas pour rendre la culture de poissons possible.

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Figure 22 : Principe du système VAC (étang- verger- élevage) avec latrines (J. Lazard, Ph. Cacot, 1997)

Figure 23 : Schéma d’un étang de rizipisciculture (KS. Ng. Duy Khoat, 2000)

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Les différents types d’intégration On distingue différents types d’intégration, le plus ancien restant vraisemblablement les étangs à latrines, système originaire de Chine, mais que l’on retrouve également au Moyen Age en Europe dans l’élevage de carpes1. Les formes les plus communes de l'intégration sont celles où il y a un lien direct et simple entre les activités, par exemple l’utilisation des rejets animaux et déchets végétaux comme aliments et engrais pour poissons. L'utilisation des structures d'irrigation et d’approvisionnement en eau pour élever des poissons, ou la production de poissons en rizicultures en sont deux autres exemples. Moins couramment, on trouve des systèmes où des traitements sont appliqués aux déchets et aux sous-produits de l’exploitation afin que ceux-ci puissent être utilisés en pisciculture, par exemple le compostage. Dans ce cas, les liens entre les composants du système deviennent moins directs, mais souvent plus faciles à contrôler. Les modalités d’action des déchets dans l’étang sont variées : soit ils sont directement consommés par le poisson, soit ils alimentent le maillon primaire de la chaîne trophique de l’étang, à savoir les organismes autotrophes, ou encore ils servent de substrat à la communauté planctonique hétérotrophe. On peut distinguer différents types d’élevages intégrés selon la nature des activités de l’exploitation : élevage/culture/pisciculture : les composantes du système VAC (Figure 22) On appelle système VAC l’intégration de la ferme, du jardin (potager, verger ou autres cultures), du bétail et de l’étang. Son nom est issu des mots vietnamiens «vuon» (potager/verger), « ao » (étang) et « chuong » (porcherie). Dans un système VAC typique, l’étang, l’étable, le jardin et la ferme sont situés au même endroit pour faciliter le recyclage des ordures. Ce système bénéficie aujourd’hui d’une attention toute particulière dans les pays en voie de développement car, comme tous les systèmes intégrés, il permet non seulement de recycler les déchets de l’exploitation (cuisine, fumier du bétail et déjections de la famille, engrais verts) mais aussi d’apporter une source de revenu complémentaire assez importante, au point que bien des fermiers s’estiment pisciculteurs avant même d’être éleveur ou cultivateur. intégration sériciculture et pisciculture Dans certaines régions, notamment en Asie, on cultive des mûriers, sur lesquels vivent les vers à soie, directement au bord de l’étang, et l’on nourrit les poissons soit avec les chrysalides, soit avec les vers préalablement bouillis pour retirer les fils de soie. D’autres systèmes permettent de produire des invertébrés pour l’alimentation des poissons (larves d’insectes, vers de terre…). rizipisciculture Il s’agit de l’intégration de la culture du riz et de l’élevage du poisson. Les rizipisciculteurs ont traditionnellement profité de la migration saisonnière des poissons dans leurs rizières. Durant la mousson, lorsque les eaux submergent les champs de paddy, les poissons sauvages entrent dans les rizières et profitent des aliments naturels qui s’y trouvent et de la protection que leur offrent les tiges de riz. Lorsque les eaux refluent, les poissons sont pris au piège et sont récoltés en même temps que le riz. Une nouvelle approche dans le domaine de la rizipisciculture consiste à stocker une plus grande quantité de poissons dans les champs de paddy pendant la saison des pluies et celle de riz irrigué, et à améliorer les pratiques agricoles.

1 voir § 1.2.1

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Photos 3 : Etangs de rizipisciculture

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Les agriculteurs ne sont pas les seuls bénéficiaires de l’intégration du riz à la pisciculture (revenus augmentés, aliments « gratuits », réduction de main-d’œuvre). Cette intégration est en effet également profitable pour l’environnement car l’énergie et les substances nutritives sont recyclées plus efficacement par le biais de la chaîne alimentaire, créant ainsi un système stable et hautement productif. L’alimentation et le mouvement des poissons dans l’eau améliorent en général la fertilité du sol. De plus, la présence de poissons macrophytophages tels la carpe herbivore permet de lutter de façon biologique contre les mauvaises herbes envahissant les rizières. Enfin, les bienfaits du poisson peuvent souvent compenser, en termes économiques, les dommages causés au riz par les parasites, et ainsi l’agriculteur n’est pas obligé d’employer de pesticides. Néanmoins, dans le delta du Mékong, la production de poissons en condition extensive (pas ou peu de nourriture distribuée aux poissons) en rizipisciculture ne compense pas le manque à gagner de la production de riz (réduite à cause du fossé périphérique dans la rizière aménagé pour les poissons). La rentabilité de ce système dépend donc du prix des pesticides, non employés en présence de poissons : si ce prix est élevé, il s’avère alors rentable de faire du poisson. Néanmoins, quelques inconvénients subsistent car d’une part, les poissons herbivores aiment le riz, et d’autre part, la demande en fertilisants est augmentée par la présence de poissons qui nécessite un bon niveau de phytoplancton dans le milieu. De plus, le travail de l’exploitant est plus important, surtout lorsqu’il utilise pour sa récolte des machines. Enfin, si malgré tout le fermier persiste à utiliser des pesticides, cela peut dégrader la qualité des poissons, voire nuire à leur survie.

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Troisième partie : Contexte de l’étude réalisée et résultats

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Carte 4 : Régions de Hanoi et de Hô Chi Minh-Ville, ou les deux zones concernées par le projet périurbain au Viêt Nam

Photo 4 : Etang piscicole en zone périurbaine à HCMV (Ca = poisson, nuoi=élevage)

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3 CONTEXTE DE L'ETUDE REALISEE ET RESULTATS

3.1 Objectifs et méthodologie de l'étude 3.1.1 Une phase préliminaire au projet périurbain Le Projet Périurbain Ce stage s’inscrit dans la préparation d’un projet de développement au Viêt Nam initié par le CIRAD en collaboration avec l’UAF de Thu Duc à HCMV. Ce projet, intitulé « projet de développement de l’agriculture périurbaine », devrait débuter fin 2001 et s’étendre sur trois années. Il a pour objet l’optimisation des systèmes de production agricole, principalement maraîchage et élevage, en zone périurbaine à Hanoi et à HCMV, respectivement capitale administrative et pôle économique du Viêt Nam. Il comporte entre autres un volet aquaculture pris en charge à Hô Chi Minh-Ville par le Département d’aquaculture en eau douce de la faculté des pêches et de pisciculture de l’UAF. Ce volet aquaculture sera encadré par M. Le Thanh Hung, directeur du Département d’aquaculture en eau douce et vice-doyen de la Faculté des pêches et de pisciculture. L’étude réalisée au cours du stage a donc porté sur l’étude des systèmes piscicoles dans une zone située en périphérie du centre de Hô Chi Minh-Ville. L’enjeu était de comprendre le fonctionnement des exploitations, et de cerner le mieux possible les avantages et les inconvénients inhérents à la proximité de la ville. L’objectif du volet aquaculture du projet périurbain à HCMV revêt différents aspects : socio-économiques, techniques, mais aussi environnementaux… A priori, l’objectif du projet périurbain concerne d’avantage l’optimisation des systèmes de production, mais il est apparu que les préoccupations sociales, sanitaires et écologiques liées à ce type de production ne pouvaient être omises. Nous avons vu que l’utilisation des eaux usées en aquaculture possédait le double intérêt de traiter ces eaux de façon naturelle, écologique et avec de faibles moyens, tout en produisant des protéines destinées à l'homme1. En d’autres termes, ce type de système contribue non seulement à l’amélioration de l’alimentation des habitants, mais également à celle de leur environnement. Plusieurs objectifs semblent donc se profiler pour le volet aquaculture du projet périurbain à HCMV : d’une part, il faut pouvoir assurer la production en termes quantitatifs pour répondre aux besoins de la ville, mais également qualitatifs, c’est-à-dire que la qualité des poissons issus de ces systèmes doit être démontrée, améliorée et son maintien devra faire l’objet de contrôles permanents, pour éviter tout risque de contamination lié à l’utilisation d’eaux usées potentiellement infestées (voir § Propositions d’action dans la partie discussion). D’autre part, l’intérêt « économico-écologique » de ce type de production, dans une ville où, faute d’investissements, aucune station de traitement des eaux n’a pu être construite, reste à démontrer pour pouvoir être mis en valeur.

1 Protéines animales, dans le cas de la production de poissons, ou végétales, dans le cas des végétaux aquatiques.

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Carte 5 : les districts de Binh Chanh et de Thu Duc à Hô Chi Minh-Ville

Photo 5 : Thao, en ao dai1 bleu, pose devant l’UAF le jour de la remise des diplômes

1 Ao dai : robe traditionnelle vietnamienne

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Objectifs du stage (phase préliminaire du projet périurbain) Le stage que j’ai effectué, antérieur au commencement du projet véritable, a eu, entre autres objectifs, celui de donner une base de travail aux futurs responsables du volet aquaculture de HCMV inclus dans le projet périurbain. Cette phase préparatoire de quatre mois et demi a consisté en la réalisation d’enquêtes de terrain dans les secteurs de la production et de la commercialisation de poissons afin de préciser les objectifs du projet. Ces enquêtes devaient permettre également d’identifier les acteurs dynamiques intéressés avec lesquels des actions pourraient être envisagées, notamment pour des essais d’élevage et d’épuration post-récolte. 3.1.2 Méthodologie Prise de contact avec le sujet en France Le premier mois de stage fut consacré à des recherches bibliographiques sur les thèmes de la pisciculture en étang et l’utilisation des eaux usées en pisciculture. C’est à Paris et lors d’un séjour d’une semaine à Montpellier que j’ai ainsi pu accumuler de nombreuses références bibliographiques. Les documents consultés sont ceux de la bibliothèque du département des sciences animales à l’INA P-G et de la bibliothèque personnelle de Mlle Catherine Mariojouls, ainsi que des rapports gracieusement mis à ma disposition par M. Jérôme Lazard du CIRAD-EMVT de Montpellier. Ils m’ont permis de me familiariser avec le sujet du stage. Séjour au Viêt Nam Préparatifs à l’UAF Je fus accueillie le premier mois par la maison d’hôtes de l’université, située à cinq minutes à pieds de l’UAF. L’UAF se trouve dans le district de Thu Duc, à une vingtaine de kilomètres au nord-est du centre-ville. Cette période fut consacrée à la recherche d’informations, concernant cette fois-ci la pisciculture au Viêt Nam, et l’utilisation des eaux usées en pisciculture dans plusieurs pays d’Asie. Avec l’aide de M. Hung, j’ai rédigé une «proposition de thèse » (thesis proposal) pour l’administration de l’UAF, où étaient définis mes objectifs et mon calendrier d’actions. J’ai ensuite élaboré un questionnaire destiné aux fermiers, portant principalement sur les techniques piscicoles et sur le fonctionnement global de l’exploitation ainsi que sur les résultats technico-économiques de la pisciculture. Le nombre de villages à visiter fut fixé en accord avec M. Hung, compte tenu de la période relativement courte passée sur place, et établi à 7 villages dans le district de Binh Chanh situé au sud-ouest de la ville : An Lac, Binh Hung, Da Phuoc, Hung Long, Phong Phu, Tan Kien et Tan Nhut (Carte 9 et Carte 10). J’ai traduit le questionnaire en anglais puis en vietnamien, avec l’aide de mon interprète Thao, étudiante de M. Hung, afin d’en proposer un exemplaire aux autorités locales, à savoir le responsable des activités agricoles du comité populaire du district de Binh Chanh. Ce dernier m’a délivré, au bout d’un mois d’attente, une autorisation pour effectuer mes enquêtes. Au terme de ce premier mois, j’ai décidé de m’installer dans le centre-ville pour des raisons de commodité. En effet, le moyen de transport mis à ma disposition pour les enquêtes de terrain était une moto, dont la vitesse moyenne, inférieure à 40 km/h, imposait plus de trois heures de déplacement quotidien, les districts de Binh Chanh et de Thu Duc étant diamétralement opposés par rapport au centre-ville et distants d’environ 35 km. C’est donc dans le premier district du centre-ville que j’ai passé les trois mois et demi suivants. Néanmoins, les déplacements étaient encore importants et j’ai du parcourir plus de 3000 km au total!

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Photo 6 : Thao sur sa moto me conduit « à travers champs »

Photo 7 : L’accueil très convivial des pisciculteurs

Photo 8 : Visite d’un marché de la ville avec Ph. Cacot

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Visites de terrain Au départ, j’avais prévu la visite de 60 exploitations choisies aléatoirement dans les sept villages de Binh Chanh, au gré des rencontres. Au total, 52 exploitations ont été finalement visitées. Les visites d’exploitations se déroulèrent sans problèmes, c’est-à-dire sans aucun refus de la part des fermiers, qui m’ont ouvert leurs portes sans difficultés. Les entretiens face-à-face avaient lieu le matin, de sept heures jusqu’à l’heure du déjeuner (généralement onze heures). Un entretien durait en moyenne une demi-heure et consistait au remplissage du questionnaire. Les questions de type ouvertes, en anglais dans le questionnaire, étaient traduites par Thao au fermier. Leur réponse était notée sur le questionnaire dans l’espace réservé. Ce questionnaire a subi au départ de nombreux remaniements afin d’en faciliter l’usage par Thao. La version définitive du questionnaire est présentée en Annexe 1. Les autres visites de terrain ont concerné les marchés de la ville. La plupart de ces visites ont été effectuées en présence de Philippe Cacot. Les questions posées aux vendeurs étaient d’ordre général et portaient sur le type, l’origine et le prix des poissons vendus, la quantité vendue en une journée, le nombre de vendeurs sur le marché et le circuit des produits avant commercialisation. Concernant les consommateurs, un questionnaire simple, composé d’une dizaine de questions ouvertes portant sur leurs préférences, a été rédigé. Une dizaine de marché ont été visités à HCMV, dans les districts du centre-ville, et deux marchés dans une province du delta du Mékong où transitent un grand nombre de poissons d’eau douce. J’ai également visité des élevages de poissons en cages flottantes, sur le Mékong à Chau Doc et sur le lac de La Nga au nord-est de HCMV pour me familiariser avec ce type de production. J’ai rendu visite à trois grossistes de juvéniles de poissons d’eau douce à Binh Chanh et un dans une province du delta. Enfin, j’ai visité une importante écloserie-nurserie de tilapias dans le district de Thu Duc, près de l’UAF. Traitement des données Les réponses obtenues lors des entretiens ont été rentrées dans un fichier Excel en vue de leur exploitation ultérieure. Cependant, la plupart des données qualitatives n’ayant pas un format adéquat, nous avons choisi de coder certaines réponses, par exemple l’alimentation en eau dans une exploitation donnée. Le traitement simple des données sous Excel nous a permis de calculer entre autres les différents rendements, mais les liens entre les différentes variables n’ont pu être démontrés au travers des graphiques. 3.1.3 Difficultés rencontrées, limites et contraintes du stage

Outre la longue attente de l’autorisation pour pouvoir commencer mes enquêtes, j’ai dû faire face à un manque de coopération de la part des autorités qui ne m’ont pas toujours fourni les documents que j’estimais nécessaires au bon développement de mon travail, en l’occurrence les cartes du district de Binh Chanh ainsi que quelques données statistiques de base sur l’agriculture dans ce district. Malgré tout, l’insistance a porté ses fruits et grâce à l’aide de M. Hung, j’ai finalement réussi à me procurer les cartes dont j’avais besoin au prix d’une attente de plus de deux mois, c’est-à-dire après déjà un mois d’enquêtes sur le terrain où mon seul repère était une carte touristique très peu détaillée, notamment en ce qui concerne le réseau hydrologique. Concernant les visites, même si Thao s’est révélée être savante sur le sujet de mon stage, ayant elle-même réalisé le même genre d’enquêtes, il ne lui manquait que les mots pour me faire profiter de sa science. S’ensuivit un échange de bons procédés : j’en appris plus sur les poissons, et elle sur la langue anglaise. Bien que totalement reconnaissante vis-à-vis de sa gentillesse et de son dévouement sans limites, je dois néanmoins admettre que les entretiens avec les fermiers ne se sont pas avérés être très agréables, mais plutôt frustrants car j’ai souvent eu l’impression de manquer les informations les plus intéressantes, et aussi par le manque d’interactivité avec les fermiers lié à l’incompréhension avec mon interprète.

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Carte 6 : Hô Chi Minh-Ville au sud du Viêt Nam

Carte 7 : La ville et ses nombreux districts

0

1

2

3

4

5

6

1954 1975 1995 2000

Mill

ions

d'h

abita

nts Population totale

Population rurale

Population urbaine

Sources Internet (1954, 1975, 1995)

Statistical yearbook of HCM city 2000 (2000)

Figure 24 : Evolution de la population à Hô Chi Minh-Ville depuis 1954

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Une grande partie du stage, en terme de temps, a été consacrée à des recherches d’informations sur la zone étudiée et sur le contexte dans lequel s’inscrit l’activité qui nous intéresse, à savoir la pisciculture en étangs en zone périurbaine à HCMV. Même si ces renseignements n’ont pas a priori l’aspect de résultats, ils sont pourtant le fruit d’une quête qui s’est parfois avérée difficile… Avant de présenter les résultats des enquêtes, il convient donc de faire un point sur ces informations sans lesquelles une bonne compréhension des problèmes rencontrés est impossible. Nous insisterons donc, pour commencer cette troisième partie traitant de l’étude réalisée, sur la présentation géographique physique mais également humaine de HCMV. Aux données bibliographiques s’ajouteront parfois quelques observations personnelles, notamment sur les problèmes de qualité des eaux.

3.2 Zone d’étude : Binh Chanh, au sud de HCMV 3.2.1 Hô Chi Minh-Ville, capitale économique du Viêt Nam Géographie de la ville Hô Chi Minh-Ville (HCMV), à l’origine une forteresse fondée en 1698 par les Annamites (Vietnamiens) sur l'emplacement de l'ancienne ville cambodgienne de Prey Nokor, est située au sud du Viêt Nam, à l’Est du delta du Mékong. Elle fait partie de la province Dong Nam Bo. Traversée par la rivière de Saigon (« Sông Saigon » en vietnamien), elle en porta d’ailleurs le nom jusqu’en 1976, date de la réunification du pays. Contrairement à beaucoup d’idées reçues, notamment dues à la proximité entre HCMV et le delta du Mékong, la rivière Saigon n’a aucun lien naturel avec le Mékong1. Il s’agit en réalité d’un affluent du Dong Nai, avec lequel elle forme la rivière Nha Be avant de se jeter, 80 km plus au Sud, dans la Mer de Chine, appelée « Mer de l’Est » (Biên Dông) au Viêt Nam. HCMV s’étend entre les degrés 106°20’ et 107°00’ de longitude est et les degrés 10°20’ et 11°20’ de latitude nord, couvrant ainsi plus de 2.095 km², soient 209.500 ha2. La région Nord de la ville est principalement constituée de collines et de plaines, tandis que dans le sud s’entrecroisent plusieurs centaines de rivières et de canaux. La ville est constituée de 17 districts urbains occupant 442,13 km² (les quartiers 1 à 12 du centre ville et les districts de Go Vap, Tan Binh, Binh Than, Phu Nhuan et Thu Duc ) et de 5 districts « périurbains » occupant les 1652,88 km² restants (Cu Chi, Hoc Mon, Binh Chanh, Nha Be et Can Gio), soient au total de 22 districts (Carte 7). La population qui ne cesse de s’agrandir était estimée à 5,17 millions d’habitants en 2000. Elle est inégalement répartie et la densité de population peut atteindre 49.440 hab./km² en milieu urbain3 (à Cholon, quartier chinois et le plus ancien de HCMV), alors que le maximum observé est de 1.901 hab./km² en zone périurbaine (district de Hoc Mon, Ouest de la ville)…

1 Il existe néanmoins un lien artificiel : l'«arroyo chinois» au sud, qui permet de communiquer par voie d'eau avec le Vaico oriental et ensuite avec le Mékong 2 A titre de comparaison, la superficie de Paris intra-muros n’est que de 105 km² ! 3 Encore à titre de comparaison, la densité moyenne à Paris est de 20.240 habitants/km², variant selon les arrondissements entre 8.000 et 40.000 habitants/km².

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Précipitations en mm Température en °C

Hô Chi Minh-Ville Mois [mm] [° C] Janvier 12 25.6 Février 2 26.5 Mars 9 27.8 Avril 36 28.9 Mai 225 28.7 Juin 295 27.7 Juillet 327 27.4 Août 269 27.3 Septembre 310 27.2 Octobre 267 26.9 Novembre 113 26.7 Décembre 39 26.1 Année 1904 27.2

Source : internet. Figure 25 : Précipitations et températures à HCMV

Photo 9 : Une usine au bord de la route nationale dans le district de Binh Chanh

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Précisions sur les données climatiques à Hô Chi Minh-Ville (Figure 25) La ville est soumise au climat tropical caractéristique du sud du pays. La température à HCMV est relativement constante tout au long de l’année, variant entre 25,5 et 29°C. Les précipitations sont quant à elles concentrées pendant la saison des pluies, entre mai et octobre. Nous verrons par la suite comment cette alternance de deux saisons, sèche et humide, va conditionner les activités piscicoles de la région. La quantité d’eau évaporée par an est de l’ordre de 1.700 mm par an, soit presque autant que les précipitations globales qui sont de l’ordre de 1.900 mm par an. L’économie de HCMV se base sur les activités industrielles de la ville La région de HCMV compte plusieurs centaines d’entreprises industrielles. Centre de toute la région méridionale, la ville se développe et s’élargit rapidement, surtout en ce qui concerne la densité démographique, l’industrie, la petite industrie et l’artisanat. La valeur de la production industrielle de HCMV représente plus de 50% de la production industrielle globale du pays. HCMV est ainsi devenue en quelques décennies une grande métropole économique, la première ville du pays et un important port maritime, équipé d’une infrastructure moderne. Si l’on inclut la zone industrielle de Saigon-Bien Hoa (Nord-Est de la ville), tous les secteurs sont représentés : artisanat, industrie (papier, plastique, textile, verre, machines-outils, chimie, matériaux de construction) et services. HCMV est desservie par d’importantes voies routières, ferroviaires et aériennes qui contribue à entretenir son rôle de pôle économique. Pour ces raisons, HCMV est souvent considérée comme la capitale «économique » du Viêt Nam, dont Hanoi reste néanmoins la capitale administrative. Le PIB de HCMV, de plus de 5 milliards de US$, représente 1/6e du PIB du pays. Le secteur de l’industrie et de la construction emploie 35% de la population active et participe pour 45% au PIB annuel de la ville. Les principales activités sont les industries agroalimentaires et de confection, les industries du caoutchouc, des produits chimiques, de la métallurgie et du tabac. L’activité minière contribue très faiblement, et de moins en moins, au revenu brut rapporté par ce secteur. Le secteur agricole dégage 2% du PIB annuel de la ville. Il ne concerne pas le centre ville, à savoir les districts 1, 3, 4, 5, 6, 10 et 11 (superficie totale de ces 7 districts : 34 km²). Dans tous les autres districts (2061 km²), le secteur agricole emploie 6,3% de la population active. Il fait vivre 90.259 familles, soit 429.743 personnes et l’on peut noter que cela représente 9% de moins qu’en 1997. Le revenu brut apporté par ce secteur à la ville s’élève à 141,7 millions de $ US, décomposables comme suit : 84% par l’agriculture, 4% par la foresterie et 12% par la pêche et l’aquaculture. Les principaux produits de l’agriculture dans la zone périurbaine de HCMV sont le riz, les céréales de toute sorte, le maïs, le manioc, la patate douce, divers légumes, les arachides, le tabac et la canne à sucre. On y élève principalement des poulets, des canards et des cochons. Le secteur des services participe pour 53% au PIB. C’est donc le secteur économique le plus important, qui emploie 58,7% de la population active. Il regroupe essentiellement les activités commerciales, les domaines du transport, de l’hôtellerie et de la finance. 3.2.2 Caractéristiques de l’aquaculture à HCMV

Le revenu brut produit par l’aquaculture s’élève à 5,8 millions de $ US. L’aquaculture

contribue ainsi pour 3,4% du revenu brut engendré par l’agriculture, la foresterie, la pêche et l’aquaculture à HCMV.

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Tableau 5 : Variations de la surface et de la production aquacoles en zone périurbaine à HCMV au cours des 10 dernières années

Année Surface aquacole (ha) Production (tonnes) Productivité (tonnes /ha/an) 1990 1.300 4.339 3,34 1991 1.227 4.979 4,05 1992 1.240 5.200 4,2 1993 1.080 4.800 4,44 1994 1.100 4.050 3,68 1995 1.010 3.678 3,64 1996* 1.000 4.000 4 1997 923 2.800 3,03 1998 624. 2.765 4,43 1999 840 2.878 3,43 2000 820 3.363 4,1

Sources : Department of Agriculture and Rural Development of Ho Chi Minh City – 1996,

Statistical yearbook of Ho Chi Minh city, 2000 * les valeurs pour 1996 étaient des prédictions

Photo 10 : Construction d’une usine au bord d’une route du district de Binh Chanh

Photo 11 : Fréquents sont les panneaux annonçant des projets d’aménagement dans le district de Binh Chanh

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Des surfaces piscicoles convoitées par les entrepreneurs Comme indiqué dans le Tableau 5, la tendance concernant le développement de la pisciculture en zone périurbaine au cours de ces dernières années est une légère diminution de la surface piscicole parallèlement à une augmentation de la productivité. En 2000, la surface totale dédiée à l’élevage des poissons était de 820 ha, soit 0,4% de la superficie de la ville. Cette surface a diminué de 11% entre 1997 et 2000. La quantité de poissons d’eau douce produite a atteint 3.363 tonnes en 2000, après une augmentation de 20% en 3 ans. Cette réduction des surfaces piscicoles est due principalement à l’extension de la ville. Les fermiers, propriétaires de leurs terres1, se voient offrir d’importantes compensations par les entrepreneurs qui souhaitent les leur acheter. Ces entrepreneurs sont largement favorisés par les autorités locales qui espèrent développer encore plus les activités industrielles au sud de HCMV. Une enquête commandée par les autorités de HCMV a même été menée afin d’estimer au mieux le montant des compensations pour les fermiers cessant leur activité. D’un autre côté, les activités aquacoles sont favorisées dans des régions comme Tan Nhut, Da Phuoc et Hung Long2 où il semblerait que les eaux usées soient devenues plus propices à la pisciculture qu’à la riziculture (Bui Thi Phuong Thao, 1995-2000). Le niveau des eaux aurait effectivement tendance à monter et, dans certaines régions, à noyer le riz. Des cours de formation aux techniques aquacoles, par exemple la mise en place de systèmes VAC, sont dispensés aux pisciculteurs qui, pour la plupart, manquent d’expérience. En effet, la reconversion des rizicultures en piscicultures est très fréquente et 60% des fermiers rencontrés cultivaient du riz avant de commencer l’élevage du poisson il y a moins de dix ans. Ainsi, la politique actuelle en matière d’aménagement et de développement agricole consiste à déplacer les limites de la ville en repoussant progressivement les activités piscicoles vers le sud et vers l’ouest. Mais c’est justement au Sud que s’accumulent les eaux usées (les villages de Phong Phu et Binh Hung se situent à faible altitude) et que remontent les eaux salées… Perception des poissons d’étangs par les consommateurs Les poissons destinés à la consommation et issus de l’aquaculture en zone périurbaine alimentent essentiellement le marché local qui constitue une forte demande. En effet, un habitant de HCMV consomme en moyenne 31,2 kg de poissons par an, toutes espèces confondues, soit un peu plus que la viande. Les consommations annuelles de poissons et de viande ont connu une évolution identique depuis 1997, avec une augmentation de 2,4 kg/personne pour les deux produits. Mais cela ne veut pas dire que le poisson n’a pas à se méfier de la concurrence que représente la viande, car le prix de celle-ci est parfois moins élevé3. Compte-tenu de la population, supérieure à 5 millions d’habitants, cela représente une demande totale en poissons d’un peu moins de 162 milliers de tonnes. Cette quantité peut paraître énorme en comparaison des 3,4 milliers de tonnes produites par la pisciculture périurbaine, qui ne représente donc que 2 % du marché des poissons à HCMV.

1 ils payent cependant des taxes foncières à l’Etat 2 voir Carte 10 3 voir Annexe 3 : Prix observés sur les marchés et chez les grossistes

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Tableau 6 : Consommation mensuelle par habitant des principales denrées alimentaires à HCMV en 2000

Riz (kg) 8,1 Viande, principalement porc et bœuf (kg) 2,0 Poissons marins et d’eau douce (kg) 2,6 Œufs de poules et de cannes (nombre) 4,6 Sauce (litre) 0,7 Sucre (kg) 0,6

Source : Statistical Yearbook of HCM City, 2000

Tableau 7 : La production piscicole en zone périurbaine à HCMV face à la demande en poissons

des habitants. Année Demande en poissons marins et

d’eau douce (milliers de tonnes) Production de poissons d’eau douce (milliers de tonnes)

Contribution de la pisciculture périurbaine à la demande

1997 138,2 2,8 2% 1998 141,3 2,765 1,9% 1999 150,3 2,878 1,9% 2000 161,3 3,363 2%

Source : Statistical yearbook of HCMC, 2000.

Photos 12 : Parmi les produits vendus sur les marchés vietnamiens : poissons, fruits et légumes, riz et viande.

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En parallèle de cette demande, dont l’augmentation semble liée à l’accroissement de la population plus qu’au développement des consommations personnelles, s’ajoute une exigence, de la part des consommateurs, vis-à-vis de la nature et de la qualité des produits. Une enquête de consommation, réalisée sur un marché du centre-ville, révèle que le poisson est autant apprécié que la viande, et, que le choix du consommateur se base non sur le prix mais sur ses goûts. Bien souvent, la préférence est exclusive et lorsque les consommateurs préfèrent la viande, ils ne consomment alors jamais de poisson. Un résultat important est aussi que peu de consommateurs, surtout les plus jeunes, semblent connaître l’existence de systèmes piscicoles en étangs autour de HCMV. En revanche, les plus âgés s’estiment souvent capables de faire la distinction, juste en les regardant, entre des poissons d’étangs et d’autres poissons. Les résultats détaillés de ces enquêtes ainsi que le questionnaire proposé figurent en Annexe 5. La demande en poissons marins des habitants de HCMV apparaît plus importante que pour les poissons d’eau douce (75% de la demande totale en poissons contre 25%), et diverses raisons ont été évoquées par les clients interrogés durant les enquêtes sur les marchés, par exemple, le fait que les poissons marins représentent une source d’iode qui permet de lutter contre le goitre. Une autre raison est le prix légèrement moins élevé des poissons marins, en comparaison avec les poissons d’eau douce1. On peut expliquer cette différence par le fait que les poissons d’eau douce, vendus vivants sur les marchés, sont ainsi plus frais que les poissons marins, transportés et vendus morts. Pour les autres , cela reste une histoire de goût. Une distinction est également faite par les consommateurs entre les poissons élevés en cages, sous-entendu en eau courante, et ceux élevés en étangs, donc en eau stagnante : concernant les poissons-chats par exemple, les poissons élevés en étangs ont une chair plus jaune et ils sont plus petits, et concernant les carpes, elles ont un goût de vase plus prononcé ; beaucoup de consommateurs préférent donc les poissons élevés en cages. Cependant, aucun élevage en cage n’a été personnellement observé dans les proches environs de HCMV. Les élevages les moins éloignés semblent donc être ceux situés sur le lac de La Nga, à une centaine de kilomètres à l’est de la ville. On trouve parmi les espèces élevées le Ca Loc (Photo 13) ainsi que des carpes communes d’ornement. En revanche, le delta du Mékong est spécialisé dans l’élevage en cage des espèces comme le poisson-chat Pangasius. Enfin, une réticence a clairement été perçue lors de ces enquêtes envers les poissons élevés en étangs à HCMV, car souvent ces élevages sont associés à l’idée d’étangs à latrines. C’est pourquoi, de façon assez surprenante mais pourtant fréquente, beaucoup de vendeurs de poissons d’étangs préfèrent cacher l’origine de leurs poissons !

Photo 13 : Le ca loc (Channa striata)

(photo provenant d’une publicité distribuée par le supermarché CORA de HCMV)

1 voir encore Annexe 3 : Prix observés sur les marchés et chez les grossistes

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Cartes 8 : Un réseau complexe de rivières et de canaux traverse les districts de HCMV Tableau 8 : Résultats d’analyses d’eau en différents points du canal de Thi Nghe

Point de prélèvement

Pont Truong Minh Giang

Pont Cong Ly

Pont Kieu Pont Dien Bien Phu

Pont de Thi Nghe

NORMES* VN

NORMES* OMS

PH 6,9 6,4 6,7 6,6 6,0 6,5-8,5 6,5-8,5 Oxygène dissous 0,0 0,0 0,0 0,0 0,4 >4 DBO5 86 164 180 87 94 <10 DCO 112 217 287 147 214 N-NH3 29 22 21 35 27 SO4

- 88 60 62 34 18 - 400 Cl- 440 300 546 476 360 - 250 Microbes au mL 51. 1010 212. 1010 240. 109 298. 1010 242.1010 Distance approximative au pont suivant en mètres

1000 500 2000 600 1000**

Remarque : outre les valeurs de pH et le nombre total de microbes au mL, les autres valeurs sont chiffrées en mg/L. *normes de qualité des eaux pour la vie quotidienne

**distance entre le pont de Thi Nghe et la rivière de Saigon Source : Ressources biologiques et environnement au Viêt Nam, 1995.

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3.2.3 Un réseau hydrographique très complexe quadrille la ville

L’eau alimentant les exploitations aquacoles rencontrées au sud de HCMV provient de plusieurs réseaux de canaux connectés à la rivière de Saigon. Cette rivière, qui traverse la ville sur 23 km, joue un rôle très important pour toutes les activités de la ville. Elle procure l’eau nécessaire à la vie quotidienne, l’industrie et l’agriculture... C’est aussi un moyen de communication efficace et un lieu touristique et attractif (Saigon Water World est situé sur ses bords). Un autre de ses rôles fait ici l’objet de notre intérêt. Les égouts de toute une ville…1 Le réseau d’évacuation de la ville a été construit il y a longtemps, probablement pendant l'époque française, entre 1890 et 19302. Plusieurs canaux et rivière traversent le territoire; la plus grande rivière est la rivière de Saigon. Le port de Saigon, qui date de 1862, est accessible aux bateaux pesant jusqu'à 30.000 tonnes, ce qui constitue un avantage peu commun pour un port qui se trouve à l'intérieur des terres. Le réseau des cours d’eau est assez dense et a une longueur totale de 53 km. Il comporte des égouts et des canaux ouverts et sa faible pente liée au relief relativement plat de la ville ne favorise pas l’auto écoulement. Il n’existe qu’un seul réseau d’évacuation pour les eaux usées domestiques, industrielles, et pluviales. Il n'y a pas de traitement des eaux usées ni de station d'épuration. Ainsi, la rivière Saigon reçoit toutes les eaux usées de la ville via les canaux avant de se jeter dans la rivière Nha Be. Des études3 ont montré que les fleuves de Nha Be et de Dong Nai, étroitement liés à la rivière de Saigon, sont fortement pollués par les matières organiques. D’une manière générale, l’eau des canaux du centre-ville est noire et sent mauvais, ceci est caractéristique de la décomposition anaérobie en l’absence d’oxygène dans le milieu (dégagement d’hydrogène sulfuré à l’odeur caractéristique d’œuf pourri). La teneur en oxygène est effectivement très basse, proche de 0 mg.L-1, et nulle dans certains canaux. Quant à la teneur en BOD, elle est importante et la moyenne oscille autour de 120-150 mg.L-1. Tous les autres indices dépassent les normes prescrites, comme l’indiquent la série de mesures réalisées sur le canal de Thi Nghe (également appelé canal Nhieu Loc sur toute sa partie amont) en avril 1989 par le Centre de l’environnement de l’Ecole polytechnique de HCMV. Il est peu probable que la situation se soit améliorée depuis, étant donné la croissance de la population et l’inexistence de traitement des eaux usées. Le canal de Thi Nghe est situé en plein centre-ville, il représente une frontière naturelle entre les quartiers de Phu Nhuan et de Binh Thanh avec le premier arrondissement. Il traverse également de petites parties du quartier de Tan Binh et du troisième arrondissement. Les ponts du tableau sont cités dans l’ordre de l’amont vers l’aval du canal de Thi Nghe qui rejoint la rivière de Saigon. Aujourd’hui, comme en 1989, il n’y a presque plus d’eau dans ce canal (Photo 15). Avec le régime semi-diurne, les marées n’ont pas encore fini de descendre lorsque les autres commencent à monter. Par voie de conséquence, les ordures ne peuvent être évacuées au large. Elles s’accumulent peu à peu. Il y a dix ans, la DBO pouvait atteindre 1.196 mg.L-1 en amont du pont Truong Minh Giang tandis qu’elle était de 132 mg.L-1 en aval, au point de jonction avec la rivière de Saigon. Ces valeurs différaient de 9 à 10 fois sur une distance de 3 km.

1 voir Annexe 7 : Les déchets urbains au Viêt Nam 2 Les Français, à partir de 1852, ont entrepris une série de grands travaux d’aménagement des terres : assèchement des marécages, applanissement du sol, creusement de canaux, etc. 3 Toutes les données chiffrées sur la pollution des eaux à Ho Chi Minh sont issues de « Ressources biologiques et environnement au Viêt-Nam, réalités et perspectives » dont l’article consacré à la qualité des eaux à Hô Chi Minh-Ville s’appuie largement sur les résultats des enquêtes sur la pollution de l’eau des canaux de Ho Chi Minh menées à la fin des années 1980 par le Centre de l’Environnement de l’Ecole Polytechnique de HCMV et le Centre des Etudes Tropicales et de la Protection de l’Environnement.

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Photo 14 : La rivière de Saigon traverse la ville (source Internet)

Photo 15 (gauche) : Canal Thi Nghe, nord de HCMV Photo 16 (droite) : Canal Kinh Doi, sud de HCMV

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Un réseau soumis au même régime de marées que la mer de Chine… Bien que HCMV soit située à plus de 80 km de la mer de Chine, cette dernière, en association avec les variations climatiques saisonnières, affecte très fortement le réseau hydrologique de la ville. L’amplitude des marées est assez grande, aux alentours de 3 m tout au long de l’année1, et elles empiètent largement sur le littoral, surtout dans les plaines. En saison sèche, pendant les grandes marées, la limite de salinité (1‰) s’infiltre jusqu’à plus de 60 km de l’embouchure et gagne le réseau des canaux même loin du littoral (voir l’Annexe 2 : La limite de salinité à HCMV). La partie sud de HCMV n’échappe pas à cette règle. Les études menées en 1989 ont montré que la teneur en ions chlore 2 dans les rivières Nha Be et Dong Nai pouvait atteindre 4.000 à 6.000 mg.L-1. Puis, vers la fin de la saison sèche, les premières pluies entraînent les sels à la surface du sol aluné (imprégné de sulfate double de potassium et d’aluminium hydraté) vers les canaux, polluant ainsi l’eau et la rendant acide. Au début de la saison des pluies, le pH de l’eau des cours d’eau à HCMV est égal à 5,3. La teneur en fer total est alors de 1 à 2 mg.L-1, soit pratiquement 5 fois plus que la norme autorisée qui est de 0,3 mg.L-1. La plupart des sols à HCMV contiennent en effet des pyrites (Fe S2) ou sulfures de fer, formées à partir de sulfates SO4

2- et de fer sous la forme Fe2+. Ces pyrites, au contact de l’oxygène de l’air, subissent une oxydation. Se forme alors de l’acide sulfurique H2SO4 responsable de l’acidité de l’eau. La pisciculture en étangs sur ce type de sols est cependant envisageable car, durant les premières années d’exploitation de l’étang, les charges organiques de l’étang, que ce soit les aliments ou les détritus, se décomposent au fond de l’étang pour former une couche boueuse. Cet humus, avec son pouvoir tampon, permet de neutraliser l’acidité sous-jacente et de maintenir ainsi le pH de l’eau à la neutralité. Le pH de l’eau met ainsi 2 ou 3 ans pour se stabiliser. Une qualité des eaux à surveiller… L’élimination de toutes sortes de déchets et les dépôts par sédimentation des eaux usées dans les canaux élèvent peu à peu le niveau du fond. Le niveau d’eau des fleuves est alors bas et le régime des marées diurnes et semi-diurnes agît fortement sur l’accumulation des polluants dans les canaux de la ville : les déchets qui n’ont pas été entraînés assez loin, lors des marées descendantes, reviennent avec les marées montantes. La pollution des canaux rend le panorama de la ville moins attrayant et cause des effets négatifs sur la santé publique et l’économie. La quantité d’eaux usées produites chaque jour par les habitants de la ville était estimée en 1995 à 530.000 m3, tandis que le débit maximum de la rivière de Saigon est de 40 à 60 m3/s en saison humide (soit environ 4,3.106 m3 par jour) et seulement 10 m3/s en saison sèche ( soit environ 0,9.106 m3 par jour). Cela signifie que théoriquement, en saison sèche, les eaux usées constituent la moitié du débit de la rivière…

1 marnage moyen en 2000: 3 m [ min (février) : 2,78 m ; max (juillet) : 3,26 m ] 2 remarquons cependant que l’eau de mer n’est pas la seule origine possible du chlore présent dans les canaux

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Carte 9 : La zone d’étude choisie

Carte 10 : Localisation des sept villages visités dans le district de Binh Chanh

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L’eau rejetée par les industries représente environ 20 à 30% des rejets. Ce sont les usines chimiques, alimentaires, usines textiles et raffineries de pétrole qui sont les sources de pollution les plus importantes. Selon le Centre de l’environnement de l’Ecole Polytechnique de HCMV, en amont de la ville, au pont de Binh Phuoc, la teneur en oxygène dissous est de 2,1 à 4,5 mg.L-1 tandis qu’elle descend de 1,3 à 4,2 mg.L-1 en aval, à Tan Thuan. D’après le Centre de Protection de l’Environnement de Ho Chi Minh-ville, les teneurs en métaux lourds dans les eaux des canaux dépassent largement les normes permises pour les eaux de surface : la teneur en mercure est par endroit de 0,01 mg.L-1, la teneur en plomb atteint 0,2 mg.L-1 soit dix et quatre fois supérieures aux normes internationales, de 0,001 mg.L-1 et 0,05 mg.L-1 respectivement. Dans la zone industrielle de Bien Hoa, le Dong Nai reçoit les eaux rejetées des usines chimiques, des usines de matériaux de construction, des centrales thermoélectriques, des usines de détergents, de papier, des usines alimentaires, textiles, de l’usine d’allumettes, etc. Il en résulte une eau gravement polluée par les produits pétroliers, les matières organiques et les métaux lourds. Dans les eaux rejetées, la teneur en phénol est de 7 mg.L-1 (norme : 0 mg.L-1), en détergeant de 250 mg.L-1 (norme : 0,2 à 1 mg.L-1) en plomb de 40 mg.L-1 (norme : 0,05 à 0,1 mg.L-1) et en chrome de 0,7 mg.L-1 (norme 0,005 mg.L-1) normes de qualité des eaux pour la vie quotidienne. 3.2.4 Le district de Binh Chanh, au Sud de la ville

Ce district suburbain s’étend sur 304,57 km², soient 30.457 ha (14,5% de la surface de la ville), entre les degrés 106°29’ et 106°42’ de longitude est et 10°36’ et 14°49’ de latitude nord. Il est composé de 20 villages (appellés « Xa » en Vietnamien) et compte 332.589 habitants, ce qui lui confère une des plus faibles densités de la ville : 1.092 hab./km². Durant les enquêtes, ce sont 7 villages parmi les 20 composant Binh Chanh qui ont été visités. Il s’agit de Tan Nhut, An Lac et Tan Kien à l’Ouest, Binh Hung, Da Phuoc, Phong Phu et Hung Long au sud (Carte 10). Des industries de plus en plus envahissantes… L’agriculture à Binh Chanh est très importante puisqu’elle fait vivre un tiers de la population. Les principales productions répertoriées à Binh Chanh sont le riz (180 km², 25% de la production totale de la ville avec 60.000 tonnes par an), la canne à sucre (30 km², 2/3 de la production de HCMV), les légumes et graines diverses (20km², 23% de la production totale avec plus de 38.000 tonnes) et les arachides. On peut dire que Binh Chanh est un district dépendant de l’agriculture, activité favorisée par le vaste réseau hydrologique au sud de HCMV, mais parallèlement à cela, Binh Chanh voit se développer une activité industrielle intense liée à sa situation stratégique quant au transport de marchandises. En effet, le district est traversé par d’importants axes routiers, notamment la nationale 1A qui part en direction du delta du Mékong et qui est de ce fait très empruntée par les poids lourds et autres convois de marchandises. De plus en plus d’industries s’installent sur le bord de ces axes majeurs, ce qui n’est pas sans créer des problèmes d’environnement. Cela entraîne également une compétition pour l’espace et bien des fermiers abandonnent souvent leurs terres en échange d’une compensation pécuniaire. La construction de bâtiments là où, auparavant, il y avait des étangs implique un assèchement des terres, parfois même le comblement de canaux ou rivières, et cela n’est pas sans conséquences sur le bon fonctionnement du réseau hydrographique.

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Carte 11 : Plan du réseau hydrographique de HCMV

Carte 12 : Réseaux d’alimentation en eau des piscicultures du district de Binh Chanh

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Principaux réseaux d’alimentation dans les villages visités (Carte 12) Bordant l’Ouest et le Sud du centre ville, le district de Binh Chanh est traversé par une multitude de canaux et de rivières qui peuvent atteindre une dizaine de kilomètres de longueur et 100 mètres de large. Le principal cours d’eau traversant le sud de Binh Chanh est la rivière Ben Luc (ou arroyo Cho Dem selon les références), qui s’étend d’ouest en est et qui rejoint la rivière Can Giuoc pour former les canaux Tau Hu et Doi1. A l’Est, ces canaux se rejoignent pour former le canal de Ben Nghe qui coule parallèlement au canal de Te et se jette ensuite dans la rivière de Saigon. Sur les 11 km du canal de Ben Nghe, les rives ont une très forte densité de population. C’est une zone peuplée, industrielle et commerciale. Les maisons sont côte à côte sur les rives et rétrécissent la largeur du canal dont le fond est visible à plusieurs endroits. Toutes les ordures sont jetées dans le canal et doivent être éliminées par le courant. Les eaux de tous ces canaux sont noires à cause des dépôts organiques et malodorantes à cause de l’hydrogène sulfuré dégagé (Photo 16 (droite) : Canal Kinh Doi, sud de HCMV). Le nombre de microbes dépasse 107/ml. L’eau a une salinité comprise entre 1 et 5 ‰. Chaque portion d’un cours d’eau a ses propres caractéristiques physico-chimiques selon son éloignement plus ou moins grand du centre ville. Les étangs de Tan Nhut, Tan Kien et An Lac sont alimentés par des «affluents » de la rivière Ben Luc, tout à l’Ouest de la ville : les canaux Cai Trung et Nuoc Len. Les villages de Binh Hung, Da Phuoc, Phong Phu et Hung Long, au sud de la ville, sont principalement alimentés par la rivière Can Giuoc, mais aussi pour certaines exploitations, par le canal Doi. Or, le système de canaux reliés au canal Doi traverse les districts 11, 6, 8, 4, Tan Binh, et Nha Be du Nord, récoltant au passage les eaux usées de plus de 1,7 millions d’habitants. Les eaux de ces quatre villages subissent une double influence : d’une part des eaux usées de la ville qui sont très chargées en matière organique (déchets urbains et industriels), d’autre part des eaux remontant par le sud, plus salées car non loin de l’embouchure sur la mer de Chine. Il est très difficile de savoir exactement quelle est l’influence la plus grande et nous n’avons pas obtenu assez d’éléments pour comprendre le véritable fonctionnement de ce réseau qui évolue constamment avec le rythme des marées. Qualité des eaux d’alimentation Des mesures de la qualité des eaux dans ces trois cours d’eau ont été réalisées au cours du stage. Le prix des analyses, même s’il n’était pas prohibitif2 à la base, n’a cependant pas permis d’effectuer un grand nombre d’analyses car il était intéressant de mesurer plusieurs paramètres dans un échantillon, et ces mesures devaient être répétées pour être valides. C’est pourquoi des kits de mesure rapide ont été achetés, afin d’avoir une idée, bien que de nature instantanée, de la qualité des eaux utilisées en pisciculture. Les paramètres qui ont pu être mesurés dans quelques exploitations sont le pH, la température, les ions nitrates, nitrites et ammonium, mais les résultats ne peuvent être utilisés de manière fiable car la comparaison avec les résultats du laboratoires montrent une grande divergence... Grâce à un oxymètre et un réfractomètre prêtés par l’UAF, le taux d’oxygène dissous et la salinité3 ont également pu être mesurés dans les étangs piscicoles et dans les canaux. Les paramètres supplémentaires mesurés en laboratoire4 sont la DBO, la DCO et la teneur en phosphates. Dans les étangs, le pH est toujours de bonne qualité piscicole et le taux d’oxygène dissous augmente au cours de la journée.

1 Kinh ou Kenh Doi (kenh = canal) 2 En moyenne, la mesure d’un paramètre dans un échantillon coûte moins de 50 000 VND, soit moins de 4 € . 3 Cependant, la salinité rencontrée dans la zone variant entre 0 et 5 ‰ seulement, le réfractomètre utilisé, dont l’échelle s’étendait de 0 à 35 ‰, s’est révélé très peu précis. 4 Analyses effectuées par le laboratoire du Département « Environnement » de l’UAF

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Tableau 9 : Résultats des analyses sur la qualité des eaux dans trois cours d’eau Paramètre

unité Normes* Can Giuoc Ben Luc Kinh Doi 13/07 5h55

16/07 8h00

13/07 6h35

16/07 8h40

13/07 7h30

16/07 9h20

pH** 6 à 8.5 7 7 6.5 6.5 7 7 température** °C 28 27.7 27.7 27.7 27.9 27.8 NH4 mg/L <0.3 1.407 2.261 3.129 4.165 7.287 6.861 NO3 mg/L <20 0.123 0.046 0.091 0.010 0.062 0.015 NO2 mg/L <0.2 0.0866 0.0464 0.0243 0.0012 0.0059 0.0013 PO4 mg/L <0.3 0.092 0.046 0.052 0.182 0.077 0.952 DCO mg/L <30 - 16 - 60 - 78 DBO mg/L <4 - 6 - 17 - 18 DCO/DBO - 2.66 - 3.53 - 4.33 Oxygène dissous** mg/L >6 0.08 3.5 0.85 5.3 0.3 1.5 Oxygène dissous % de

saturation 0 44 11 67 4 17

Salinité** 1 1.5 1 *concentrations satisfaisantes pour la vie piscicole dans les eaux douces,

d’après les directives piscicoles de Bruxelles ; **paramètres mesurés sur place

A. B.

C.

Carte 13 et Photos 17 : Les trois points de prélèvements des eaux analysées A-Kinh Doi, B-Ben Luc, C-Can Giuoc

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Deux mesures ont été effectuées dans chacun des trois cours d’eau, le matin à trois jours d’intervalle. Les conditions du deuxième échantillonnage (entre autres le transport des échantillons dans de la glace, ce qui n’avait pas été réalisé la première fois) sont supérieures à celles du premier, les résultats sont donc plus fiables pour les prélèvements effectués le 16 juillet. En revanche, ils ont été effectués plus tard dans la matinée, donc le taux d’oxygène dissous a pu remonter un peu en comparaison avec sa valeur avant le lever du soleil, en toute fin de nuit, qui est souvent proche de 0 mg.L-1. La comparaison des valeurs avec les normes de bonne qualité piscicole montre qu’a priori, les eaux de ces trois rivières ne sont pas toujours favorables à la vie piscicole. Les teneurs en ammoniac sont en effet ici 5 à 23 fois supérieures au seuil maximal recommandé pour la pisciculture. Elles sont pourtant utilisées comme eau d’alimentation dans les étangs, car, grâce au pouvoir d’auto épuration de l’eau, les eaux de ces trois rivières, notamment Kinh Doi la plus polluée, sont partiellement épurées lors de leur cheminement vers les étangs de production. Il y a d’une part une sédimentation des matières solides, et, d’autre part, les rayons ultraviolets du soleil entraînent la disparition de certains parasites et bactéries. Ainsi, les eaux qui entrent dans les étangs ne peuvent pas automatiquement être comparées à des effluents d’égout. Ce n’est que dans la région d’An Lac, située à la frontière entre le centre ville et le district de Binh Chanh, que les eaux d’alimentation sont assimilables à de tels effluents (Photos 18). Dans les autres régions, les eaux sont moins polluées. Néanmoins, il ne faut pas perdre de vue le fait que la qualité de l’eau varie, de façon journalière (les marées), mensuelle (influence de la lune sur l’amplitude des marées) et saisonnière (entre saison des pluies et saison sèche) ; et surtout, que les pisciculteurs en tiennent compte pour remplir, avec le moins de risque possible, leurs étangs.

Photos 18 : Etat des canaux à An Lac

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Carte 14 : Localisation des 52 exploitations visitées

Carte 15 : Systèmes d’alimentation en eau utilisés dans les exploitations visitées

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3.3 Caractéristiques générales des systèmes piscicoles à HCMV

Le dépouillement des questionnaires a permis dans un premier temps de détecter les similarités entre les activités piscicoles des 52 exploitations visitées. Ainsi, les espèces cultivées ne sont pas très variables et les techniques de base employées en pisciculture d’étang sont communes à toutes les exploitations. Certaines caractéristiques semblent rendre compte ainsi des capacités d’adaptation des pisciculteurs vietnamiens aux conditions du milieu. Les autres activités agricoles pratiquées dans les exploitations, principales ou secondaires par rapport à l’activité piscicole, sont la culture de végétaux ou l’élevage d’au plus quatre espèces animales terrestres (cochon, poulet, caille ou canard). En outre, il est fréquent que l’exploitant, ainsi qu’un ou plusieurs membres de sa famille, pratiquent une activité supplémentaire à l’extérieur de l’exploitation, soit dans une usine, soit dans un commerce de la ville. Ce travail peut être permanent ou temporaire, et conditionner le mode d’exploitation des étangs (production nécessitant peu de main d’œuvre par exemple, pour libérer l’exploitant). 3.3.1 Diversité des activités Activités à caractère piscicole - la monoculture, consistant en l’élevage plus ou moins intensif d’une seule espèce de poisson, a été rencontrée dans 13 fermes, soit 25% des exploitations. - la polyculture est l’activité la plus répandue : elle est pratiquée dans 33 exploitations, dont 7 ont également une autre activité piscicole (monoculture ou nurserie) - la nurserie, c’est-à-dire la production de juvéniles destinés à la vente à partir d’un stock de géniteurs, activité pratiquée dans 10 exploitations, soit 19% du nombre total. - la nurserie et l’élevage de poissons d’ornement qui semblent se développer à HCMV, bien que seulement 3 exploitations de ce type aient été visitées Y a-t-il une régionalisation des activités piscicoles?(Carte 14 et Carte 15) L’observation des cartes nous a permis de définir 5 grands systèmes d’alimentation en eau dans les étangs. Les systèmes concernés sont les suivants : 1- Nuoc Len, 2-Cai Trung, 3-Kenh C, 4-Can Giuoc et 5-Ba Lao. Il ressort des observations que 80 % des activités de nurserie visitées se concentrent à Phong Phu, les exploitations étant alimentées par le système 5-Ba Lao. En revanche, les autres activités piscicoles ne semblent pas être spécialement localisées. Les cultures et les élevages terrestres - Les plantes aquatiques cultivées en étangs sont principalement le lotus, l’ipomée, le mimosa d’eau et les lentilles d’eau (Tableau 10). Ces végétaux sont destinés à la consommation humaine (lotus, ipomée, mimosa d’eau) et/ou à l’alimentation animale (ipomée, lentilles d’eau). Ils offrent aux poissons une source d’alimentation à la fois directe et indirecte en favorisant le développement du périphyton. Plusieurs espèces végétales peuvent être cultivées dans un même étang.

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Tableau 10 : Correspondance entre les noms des différentes espèces végétales cultivées dans les exploitations visitées

Nom vietnamien Nom latin Nom français Nom anglais 1 Sen Nelumbo nucifera Lotus Lotus 2 Rau muong Ipomoea aquatica Ipomée Water spinach 3 Rau nhut Neptunia oleracea Water mimosa 4 Rau beo Wolffia arrhiza Lentilles d’eau Duckweeds 5 Mang cau sinh Annona muricata L. Corossol Soursop 6 Dau bap Hibiscus esculentus Haricot Gombo Gombo

Sources diverses

1 2 3

4 5 6

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Certaines exploitations produisent des végétaux aquatiques dans des étangs à part et il n’y a alors aucun rapport avec la pisciculture, sauf si ces végétaux sont destinés à l’alimentation des poissons. Les lentilles d’eau sont par exemple souvent utilisées pour nourrir la carpe herbivore. Parfois même, la pisciculture est une activité secondaire par rapport à la culture de ces végétaux, qui peut, à grande échelle, être une source de revenus plus importants. - Le corossol est la principale culture fruitière pérenne installée sur les bords de l’étang. On trouve, dans une moindre proportion, des manguiers ou des cocotiers. Les autres cultures concernent le riz, le gombo, le manioc et la canne à sucre. - Les quatre espèces animales élevées dans les exploitations sont les cochons, les poulets, les canards et les cailles. Les poulets, les canards et les cailles sont élevés soit pour leurs œufs soit pour leur chair, rarement pour les deux dans une même exploitation. 3.3.2 Quelles espèces piscicoles, pour quelles quantités ?

Les visites ont permis de recenser 12 espèces de poissons élevés en étangs dans le sud de HCMV. Ces espèces sont répertoriées dans le Tableau 11. Les particularités biologiques de ces espèces sont décrites en Annexe 6. Les espèces les plus fréquemment rencontrées dans les exploitations visitées sont les tilapias hybrides et les carpes communes et herbivores.

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100

tilapia

carpe commune

carpe herbivore

gourami lippu

carpe argentée

poisson-chat clarias

poisson-chat pangasidés

gourami géant

carpe de vase

silver barb

carpe marbrée

snakehead fish

% des exploitations

Figure 26 : Importance des différentes espèces observées dans les piscicultures du district de Binh Chanh, exprimée en pourcentage du nombre total d’exploitations visitées (n=52)

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Figure 27 : Principaux poissons d’étang au Viêt Nam

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Tableau 11 : Correspondance entre les noms des différentes espèces de poissons rencontrées dans les piscicultures au cours des enquêtes de terrain Nom vietnamien Nom latin Nom français Nom anglais ca ro phi Oreochromis niloticus pur ou plus

probablement hybridé avec Oreochromis mossambicus

Tilapia hybride Hybrid tilapia

ca chep Cyprinus carpio Carpe commune Common carp ca tram co Ctenopharyngodon idellus Carpe herbivore Grass carp ca mui Helostoma temmincki Gourami lippu Kissing gouramy ca me trang Hypophthalmichtys molitrix Carpe argentée Silver carp ca tre lai Hybride entre mâle Clarias gariepinus

et Clarias macrocephalus Poisson-chat hybride Hybrid catfish

ca tra Pangasius hypophthalmus Poisson-chat Mekong catfish ca tai tuong Osphronemus gourami Gourami géant Giant gouramy ca mrigan Cirrhinus molitorella Carpe de vase Mud carp ca me hoa Aristichtys nobilis Carpe marbrée Bighead carp ca me vinh Puntius gonionotus Silver barb ca loc den ca loc bong

Channa striata Channa micropeltes

Snakehead fish

Sources diverses

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0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100

tilapia

poisson-chat clarias

poisson-chat pangasidés

carpe herbivore

carpe argentée

gourami lippu

carpe commune

carpe de vase

tonnes

monoculture

polyculture

nurserie

Figure 28 : Estimations, pour les principales espèces, des quantités annuelles totales produites

par l’ensemble des exploitations visitées

monoculture37%

5%, soit 3 millions de juvéniles

tilapias adultes produits en

nurserie3%

polyculture55%

Figure 29 : Répartition de la production piscicole totale (300 tonnes) dans les exploitations

visitées entre les trois activités

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D’après les renseignements fournis par les pisciculteurs sur leurs productions, l’ensemble des 49 piscicultures1 fournirait au total un peu plus de 300 tonnes de poissons par an2 sur les 30 ha concernés. Les principales espèces produites, en quantité, sont le tilapia et les poissons-chats, suivis par les carpes herbivores et argentées. Une extrapolation à l’échelle de la ville entière, qui compte 820 ha de surfaces piscicoles, fournit comme résultat 8.200 tonnes. Ce chiffre représente plus du double du résultat annoncé par les statistiques, qui est d’environ 3.400 tonnes (voir § 3.2.2.). Cette grande différence peut éventuellement être expliquée par le fait que les rendements piscicoles observés dans les villages visités sont supérieurs à ceux obtenus dans d’autres régions de HCMV, et que la moyenne utilisée pour l’extrapolation a donc été surestimée. En effet, le rendement moyen à l’échelle de toute la ville est de 4,1 tonnes/ha/an, soit moins de la moitié du rendement moyen de toutes les exploitations visitées qui est de 10 tonnes/ha/an. On peut également essayer d’extrapoler au seul district de Binh Chanh, sachant que la surface piscicole dans ce district est très probablement sous-estimée3 . Binh Chanh comprendrait aux environs de 122 ha de surface aquacole et fournirait à la ville 1.220 tonnes de poissons par an, soit un tiers de la production totale de la ville, répondant ainsi à 0,75 % de la demande. Même si ces résultats ne sont pas tout à fait exacts, ils nous donnent en revanche un aperçu de la contribution de la région de Binh Chanh en ce qui concerne la production piscicole à HCMV.

1 52-3 piscicultures de poissons d’ornement 2 304.305 tonnes 3 on utilise en effet les données statistiques sur la ville : 0,4% de la surface totale de HCMV sont destinés aux activités piscicoles (820 ha sur 209.500 ha)

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Photo 19 : Les aliments utilisés en pisciculture

Légumes du marché Son de riz Trashfish

La distribution du son de riz est manuelle

Song = rivière, Ao nuoi ca = étang piscicole

Figure 30 : Schéma du système d’alimentation en eau des étangs

(KS. Ng. Duy Khoat, 2000)

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3.3.3 Type de nourriture utilisée (ou la différence entre alimentation « naturelle » et alimentation « artificielle »)

Un étang possède une capacité à produire de la matière organique, via les microorganismes qui composent une grande partie de la biomasse de l’étang. Cette capacité de production est appelée productivité naturelle de l’étang. La matière organique ainsi produite est consommée par les poissons. Cependant, des variantes peuvent être notées en fonction des comportements alimentaires des différentes espèces piscicoles. De plus, selon la fréquence de remplissage d’un étang et la qualité de l’eau d’alimentation, la productivité naturelle de l’étang peut se trouver réduite ou au contraire accrue. Ainsi, dans certains élevages, le pisciculteur va distribuer de l’aliment que l’on peut qualifier d’artificiel1, en ce sens où son origine n’est pas liée à la productivité naturelle de l’étang (Photo 19). Plusieurs raisons sont évoquées par les pisciculteurs à ce sujet : soit l’eau qu’ils utilisent n’est pas assez chargée en matière organique, d’où une productivité naturelle de l’étang moindre, soit un apport supplémentaire d’aliment va leur permettre d’intensifier leur production. Dans les élevages de poisson-chats, par exemple, le caractère non filtreur des deux espèces élevées justifie l’apport d’aliments d’assez grosse taille, distribué sous forme de boulettes par exemple. Lorsque de l’aliment artificiel est employé, celui-ci consiste le plus souvent en du son de riz et des légumes abîmés et achetés sur les marchés à bas prix. L’utilisation de trashfish marin et de tripes de volaille achetés sur les marchés est également fréquente dans les élevages de poissons-chats. 3.3.4 Une gestion simple de l’eau Remplissage des étangs et renouvellement de l’eau L’eau d’alimentation des étangs est prélevée soit dans un canal, soit directement dans une rivière, grâce à un simple tuyau placé à une hauteur adéquate (Figure 30, Photo 20). En règle générale, les étangs ne comportent qu’un seul tuyau pour les entrées et les sorties d’eau. Un système de clapet permet à l’eau de rentrer dans l’étang lors de la marée montante, et l’empêche de sortir à marée basse (Photo 21). En saison sèche, l’évaporation due au soleil compense cette entrée d’eau. En saison des pluies, le clapet est relevé à marée basse afin de laisser s’échapper le surplus d’eau. Ainsi, avec très peu de moyens et aucun mécanisme compliqué, le fermier maîtrise parfaitement le renouvellement de l’eau dans son étang.

Photo 20 : Un tuyau permet à l’eau d’entrer et de sortir au gré des marées

1 Expression employée entre autres par M. Le Thanh Hung, en opposition à l’alimentation naturelle issue de la productivité naturelle de l’étang.

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Photo 21 : Un simple clapet permet de contrôler les entrées et les sorties d’eau

Photo 22 : Stockage de l’eau de forage

Photo 23 : La couleur de l’eau dans les étangest très variable

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Dans la zone étudiée, l’évaluation de la qualité des eaux dans une exploitation piscicole repose simplement sur son aspect : la couleur de l’eau est en effet un bon indicateur de la fertilité de l’étang. L’eau d’un étang bien géré est rendue verte par la présence de phytoplancton vert ou bleu-vert dans la colonne d’eau. Les couleurs brunes et vertes reflètent la prédominance de phytoplancton, tandis que la couleur noire indique une charge trop élevée en matières organiques, et la quantité d’eau introduite pour le renouvellement doit dans ce cas être réduite (Photo 23). Le développement et le comportement des poissons est également un critère important. Dans les étangs peu fertilisés, les poissons ne nagent jamais près de la surface. En revanche, ils nagent de manière continue et toute la journée près de la surface si l’étang est surchargé car le milieu est appauvri en oxygène. Un bon équilibre entre la biomasse de phytoplancton et la concentration de l’eau en oxygène dissous est sensible lorsque les poissons ont la tête inclinée en direction de la surface pour respirer uniquement dans la matinée, lorsque la teneur en oxygène dissous est la plus basse. Lorsque l’eau d’alimentation ne semble pas de bonne qualité piscicole, le système de clapet mis en place permet au pisciculteur d’attendre parfois plusieurs jours que la qualité de l’eau s’améliore. Dans 92% des cas, le renouvellement de l’eau est quotidien. Lorsque l’eau semble peu «usée», c’est-à-dire pauvre en matière organique, il faut renouveler l’eau fréquemment pour avoir des apports suffisants, car le développement de la chaîne trophique dans l’étang dépend de la charge en matière organique de l’eau qui entre dans l’étang. Lorsque l’eau est très chargée en matière organique et que sa concentration en sel est plus élevée, en saison sèche notamment, les fermiers peuvent ajouter de l’eau claire (captée par forage : Photo 22) afin de la diluer. Vidange des étangs Les pisciculteurs profitent généralement de la marée basse pour vidanger leurs étangs après une récolte. Ils peuvent utiliser une pompe en complément, empruntée ou louée à un voisin (Photo 30). La fréquence des vidanges varie de 12 fois par an dans des nurseries de tilapias à 1 ou 2 fois tous les 3 ans dans des étangs de polyculture. Dans 60% des cas, l’étang est vidangé après chaque récolte. Durant cette mise en assec qui dure de quelques jours à plusieurs mois selon le calendrier d’exploitation, le fermier effectue les activités d’entretien, par exemple le nettoyage du fond de l’étang par curage et/ou par désinfection chimique (avec de la chaux : Photos 31) afin d’éliminer les parasites et prédateurs potentiels nichés dans les sédiments. La chaux permet également d’élever le pH généralement acide de l’eau, et apporte du calcium aux organismes vivant dans l’étang. La pêche manuelle des poissons indésirables enfouis dans la vase et qui se sont introduits dans l’étang, permet de se débarrasser, entre autres, des anabas, poissons carnivores friands de juvéniles, qui peuvent être vendus au marché à un très bon prix (Photos 25). Les rayons UV participent également à l’assainissent du fond de l’étang. Puis celui-ci est lentement remis en eau, la durée de remplissage dépendant de l’intensité d’ensoleillement à cause de l’évaporation de l’eau, et du débit d’alimentation. De plus, à cause de l’effet des marées, ce remplissage n’a lieu que durant des demi-journées.

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Photo 24 : Etang mis en assec

Photos 25 : Dévasage des anabas, électrique (à gauche) ou manuel (à droite)

Photo 26 : Anabas

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3.3.5 La récolte des poissons requiert des moyens humains importants Toutes les récoltes se font manuellement, avec de grands filets en forme de seine larges d’environ 2 m et d’une longueur suffisante, plusieurs centaines de mètres, pour couvrir le périmètre d’un étang (Photo 29). La technique de récolte des poissons en étang se déroule de la façon suivante : elle nécessite tout d’abord plusieurs personnes pour maintenir le filet sur toute sa longueur. Si la profondeur de l’étang l’exige, l’étang est partiellement vidangé. Ce sont en général trois personnes qui descendent alors dans l’étang et encerclent lentement la biomasse «invisible ». Les poissons prisonniers du filet sont rapprochés de la rive et recueillis avec des paniers pour être ensuite acheminés soit dans des happas de stockage (poches en filet rectangulaires maintenues par quatre piquets : Figure 31), dans un étang voisin, soit directement vers les marchés de la ville.

Photos 27 : Récolte des poissons

Figure 31 : Happa de stockage

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Photo 28 : Creusement manuel de l’étang

Photo 29 : Filet utilisé pour la récolte

Photo 30 : Pompe utilisée pour la vidange des étangs

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3.3.6 Détails de quelques prix Le creusement d’un étang coûte aux alentours de 3.000 VND par m². Le prix de la chaux est en moyenne de 2.000 VND le kilo. Les achats de matériels en commun ont rarement été observés. En général, ce sont les exploitants les plus riches qui achètent la pompe et la louent aux autres pisciculteurs. Cette pompe aspire l’eau de l’étang pour l’évacuer dans un canal ou une rivière proche. Cette technique n’est pas largement employée, car elle revient assez cher : la pompe coûte entre 3 et 5 millions de VND (entre 230 et 380 €) et il faut prévoir 300 VND/m3 pour le carburant afin de faire tourner la pompe. Les filets sont, comme les pompes, loués à un fermier ou simplement empruntés lorsque ce dernier est aussi l’intermédiaire qui ira vendre les poissons au marché. Pour indication, un filet de 200 mètres coûte 2 millions de VND, soit 152 € . Le coût de la récolte dépend du nombre de personnes employées. En moyenne, un ouvrier touche entre 40.000 et 50.000 VND pour une journée de travail qui représente en fait quelques heures. Ainsi, les récoltes auxquelles nous avons eu la chance d’assister duraient souvent moins de trois heures. Concernant la préparation du transport d’animaux vivants1, une bonbonne d’oxygène, d’environ 40L coûte 60.000 VND et permet de remplir 200 sacs. Tous les prix n’ont pas pu être obtenus, par exemple le prix du transport des poissons vivants vers les marchés de la ville. Mais d’un autre côté, nous n’avons pas pu déterminer la part payée par le producteur pour ce cheminement et la contribution de l’intermédiaire, car il peut s’agir de la même personne. Néanmoins, il est à peu près sûr que le producteur, lorsqu’il ne vend pas lui-même ses produits sur les marchés, laisse le transport à la charge de l’intermédiaire. Un autre coût dont nous n’avons pu connaître la grandeur est celui de la construction des cabanons pour les cochons et pour la volaille. A priori, il s’agirait du seul coût du bois utilisé, car c’est l’exploitant lui-même qui se charge de la construction.

Photos 31 : Carbonate de Calcium utilisé pour le chaulage des étangs

1 Voir § 3.5.2

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Figure 32 : Combinaison des différentes activités piscicoles dans les 52 exploitations visitées Tableau 12 : Proportion de chaque type de pisciculture pratiquée en intégration avec de l’élevage et/ou des cultures Monoculture Polyculture Nurserie Intégration élevage 7,7 18,2 10 Intégration culture 30,8 30,3 20 Intégration élevage et culture

15,4 30,4 30

Pisciculture seule 46,1 18,2 40 Remarque importante : les données de ce tableau sont exprimées en pourcentage du nombre d’exploitations où est pratiquée l’activité intéressante, et non en proportion de la surface d’étang totale dédiée à cette activité dans les 52 exploitations visitées.

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3.4 Typologie des exploitations et des étangs de production, fonctionnement des activités

La pratique de plusieurs activités au sein d’une même exploitation a été observée dans 60%

des cas. Seules 14 exploitations sont dédiées uniquement à une activité piscicole. Les autres activités pratiquées sont la culture de végétaux et l’élevage d’animaux terrestres. L’élevage de poissons est intégré ou non à ces activités. On trouve ainsi des associations entre poissons et plantes aquatiques et des associations avec des élevages et des cultures terrestres. Dans ce dernier cas, il s’agit de pisciculture intégrée à l’agriculture, ou agro-pisciculture. Structure des exploitations selon les types de pisciculture pratiqués (Figure 32) La nurserie est présente dans 20% des exploitations. Elle peut être une activité indépendante étendue sur toute l’année ou alterner avec une période soit de monoculture de tilapias soit de polyculture. Une autre configuration, plus complexe, est la pratique de plusieurs activités en même temps : la polyculture durant toute l’année dans des étangs principaux, et la nurserie de tilapia durant 6 mois de l’année dans des étangs supplémentaires, utilisés hors saison pour la monoculture de tilapias (production de géniteurs). L’intérêt d’une alternance entre la polyculture et la nurserie de tilapia est que chacune de ces deux activités est saisonnière. En effet, le développement des juvéniles de tilapias s’avère être, contrairement à beaucoup d’espèces, favorisé par une salinité de l’eau élevée. La période de prédilection pour la nurserie de tilapias se situe donc pendant la saison sèche. A l’inverse, les juvéniles des autres espèces recensées ont une croissance ralentie par la salinité. Les périodes d’empoissonnement en monoculture et polyculture tombent donc généralement pendant la période des pluies, et s’il arrive qu’un empoissonnement doive se faire en saison sèche, les éleveurs avouent voir la récolte correspondante moins importante.

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36%

17%17%

9%

13%

4% 4%

Cochon-poisson

Poulet-poisson

Canard-poisson

Caille-poisson

Poulet-canard-poisson

Canard-caille-poisson

Poulet-canard-caille-poisson

Figure 33 : Les différents systèmes de pisciculture intégrée à l’élevage (% des 23 exploitations pratiquant ce type de pisciculture)

Cocotiers5%Lentilles d'eau

7%

Ipomée12%

Mangue5%

Riz7%

"Rau nhut"10%

Corossol28%

Lotus26%

Figure 34 : Importance des cultures associées à la pisciculture en % du nombre d’exploitations

visitées (n=52)

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Les systèmes de pisciculture intégrée à l’élevage sont très fréquents et concernent 44% des exploitations visitées. Les déjections animales constituent en effet une source importante de fertilisation pour l’étang de pisciculture, et augmentent sa productivité naturelle. Les animaux d’élevage sont les poulets (présents dans 44% des systèmes élevage-poissons), les cochons (30%), les canards (30%) et les cailles (17%). On peut retrouver ces élevages indifféremment associés à la polyculture, la monoculture ou la nurserie, et il convient de noter que 90 % des élevages de cochons dans notre étude sont associés à des systèmes de polyculture piscicole. Néanmoins, le montre que parmi les trois formes de pisciculture observées, la polyculture est plus souvent intégrée à une activité d’élevage d’animaux terrestres ou de culture que les deux autres. On peut remarquer que cela concorde bien avec le fait que la distribution de nourriture « artificielle » soit également plus fréquemment observée dans les étangs de monoculture et les nurseries que dans les polycultures. Le se lit de la manière suivante : parmi toutes les exploitations pratiquant des élevages en monoculture, 7,7% pratiquent cette activité en intégration avec l’élevage d’animaux terrestres, soit 1 seule exploitation sur les 13 où l’on peut trouver des monocultures. Les cultures auxquelles la pisciculture est le plus souvent intégrée sont celles du lotus et du corossol. La culture du lotus a souvent été observée en association avec les polycultures intégrées à l’élevage du cochon. Le lotus dans un étang alimenté par des eaux usées a un rôle de purification. En effet, certains macrophytes sont utilisés en phytoremédiation1. Cependant, il entre en compétition avec les poissons pour l’oxygène, d’une part car il en consomme et d’autre part car il crée des zones ombragées qui empêchent le phytoplancton de capter l’énergie lumineuse. Dans de rares cas, la production de lotus est l’activité principale de l’exploitation et la pisciculture n’est que secondaire.

1 utilisation, pour la décontamination du sol ou de l’eau, de plantes reconnues pour leur tolérance et leur capacité d’accumulation des métaux lourds (ex : Phragmites vulgaris, ou roseau commun)

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Photos 32 : Cabanon d’élevage de cochons

Photo 33 : Cailles, poussins et canetons sont friands de lentilles d’eau. Photo 34 : Structure d’un élevage de poulets

Photo 35 : Vendeur d’œufs sur un marché de la ville. Photo 36 : L’abattage des animaux se fait sur le marché même.

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3.4.1 Fonctionnement des activités intrégrées à la pisciculture Fonctionnement et données économiques des élevages - Les cochons sont parqués dans des cabanons en bois ou en briques recouvertes de béton, et dont le toit est fait de feuilles de cocotier d’eau. Ce cabanon est situé soit à proximité de l’étang, soit directement sur une langue de terre avancée sur l’étang. Les déjections tombent ainsi directement dans l’étang. Selon le niveau d’intensification de l’élevage, le nombre de cochons stockés par hectare d’étang varie entre 10 et 250. Les cochons de 10 kg sont achetés sur le marché, entre 300 et 500 milliers de VND pièce. La durée d’élevage est comprise entre 4 et 6 mois. Au terme de cette période, et après avoir été nourris quotidiennement avec 2kg d’un mélange de son de riz et de légumes, un cochon qui pèse alors 100 kg est revendu entre 1 million et 1.300.000 VND. En général, les éleveurs tentent de faire coïncider le début d’un élevage avec la période d’empoissonnement, afin de profiter au mieux de l’effet fertilisants du lisier. - Les poulets peuvent être élevés de manière très extensive, avec 2 ou 3 animaux qui sont en liberté et qui de toute apparence ne servent pas à fertiliser l’étang mais plus à fournir des œufs et de la viande au fermier. Dans les cas les plus intensifs, plus de 10.000 poulets peuvent être élevés pour fertiliser un étang d’un hectare. Là encore les poulets sont élevés à proximité de l’étang, ou sur caillebotis directement sur l’étang. La période d’élevage varie entre 45 jours pour les poulets de chair à plus de 180 jours pour les poules pondeuses. Le prix d’un poussin est de 5.000 VND et les poulets de chair, qui pèsent 1,2 kg à 50 jours, sont vendus à 12.000 VND le kilo. Un poulet consomme pour 50 VND de nourriture journalière. - Les canards sont eux aussi souvent destinés à l’autoconsommation. Cependant, des exemples d’élevage plus importants ont été observés, avec une densité de 250 canards par hectare d’étang. Dans les petits élevages principalement destinés à l’autoconsommation, les canards évoluent librement sur l’étang, se nourrissent de rau beo lorsqu’il y en a, et aucune participation de l’éleveur n’est nécessaire. La durée d’élevage des canards de chair dure 2 mois, les poussins sont achetés 4.000 VND et sont revendus à 2,5 kg à 12.000 VND le kilo. - Les élevages de cailles pour la production d’œufs représentent une source importante de fertilisation organique pour l’étang. Les cailles, installées dans des baraques en bois, sont disposées dans des cages au-dessous desquelles sont récupérées les fientes qui sont ensuite raclées pour être distribuées dans l’étang de pisciculture. Les densités peuvent atteindre 10.000 cailles par hectare d’étang. Les animaux sont renouvelés tous les 6 à 8 mois, chaque animal étant vendu 6.000 VND sur les marchés proches, et sont remplacés par des poussins dont le coût unitaire est de 500 VND. La récolte journalière est en moyenne de 600 œufs pour 1000 cailles. Chaque jour un intermédiaire vient acheter les œufs (entre 100 et 160 dongs par œuf) sur place et les revend sur le marché.

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Photo 37 : La récolte du lotus s’effectue à la main

Photo 38 : Etang destiné à la culture de lentilles d’eau et de water mimosa, dont les berges servent à la culture de corossols.

de gauche à droite : tiges de lotus, corossol et water mimosa

Photo 39 : Les végétaux produits dans les exploitations piscicoles

sont vendus sur les marchés de la ville.

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Fonctionnement et données économiques des cultures de végétaux - La valeur commerciale du lotus réside dans la vente des tiges (le kilo est vendu entre 2.000 et 10.000 VND selon la période de l’année), des racines et des graines. La période favorable à la culture du lotus se situe pendant la saison des pluies car en saison sèche, beaucoup de lotus meurent à cause de la salinité. Pendant la période de culture, les quantités récoltées atteignent en moyenne 100 kg/ha/jour, et demandent beaucoup de travail. Les éleveurs utilisent souvent des engrais de type urée pour fertiliser le lotus, et des pesticides lorsque les bulbes de lotus sont parasités par des vers. Afin d’éviter tout problème avec les poissons, les étangs sont creusés un peu à la manière des rizipiscicultures, avec une fosse centrale permettant, à marée basse, de traiter le lotus presque émergé tandis que les poissons se retrouvent dans la dépression centrale. - Les corossols sont cultivés sur les berges des étangs, et profitent ainsi d’une terre très fertile lorsque les étangs sont curés et que la boue est déposée sur les bords de l’étang. La période de récolte des fruits se situe pendant les mois de juin et juillet. Les mang cau sont vendus entre 2.000 et 3.000 VND le kilo. - Les végétaux aquatiques comme le rau nhut (Neptunia oleracea), l’ipomée et les lentilles d’eau, sont produits et récoltés toute l’année. Ils sont vendus sur les marchés mais peuvent également être utilisés pour nourrir les poissons herbivores en polyculture et les tilapias en monoculture. Les lentilles d’eau sont aussi largement apprécié par les volailles (Photo 33).

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La surface en étangs totale visitée lors des enquêtes représente 30 ha. Cela équivaut à un peu moins de 4 % de la surface aquacole totale à HCMV, estimée d’après les statistiques officielles1 à 820 ha. La structure ainsi que la gestion des étangs diffèrent selon les activités pratiquées. Il devient alors possible de les caractériser. Cette typologie des étangs sera limitée aux aspects structurels et fonctionnels, certaines données économiques n’ayant pu être obtenues. Les principaux aspects zootechniques seront également abordés.

1 « Statistical yearbook of Ho Chi Minh city 2000 ».

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monoculture10%

nurserie de tilapias

19%

poissons d'ornement

6%

polyculture65%

Figure 35 : Proportions en % de la surface totale observée (30 ha) des surfaces dédiées aux quatre activités piscicoles

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<1000 m² 1000 – 2000 m² 2001 – 3000 m² >3000 m² Surface totale observée (m²)

2.100 11.700 10.000 7.200

0

10

20

30

40

%

<1000 m² 1000-2000 m² 2001-3000 m² >3000 m²

superficie

Figure 36 : Proportion du nombre d’étangs de monoculture en fonction de la superficie (n=20)

Photo 40 : Filets placés le long des berges Tableau 13 : Périodes d’empoissonnement des différentes espèces en monoculture Mois de l’année j f m a m j j a s o n d Salinité > 1‰ X X X x x X Clarias : - 6 mois d’élevage - 4 mois d’élevage

o o

o

o

o o

o o

o

o

o o

Pangasius o o o o tilapia o o gourami lippu o

o : stockage ou récolte X : salinité élevée (4 à 5 ‰)

x : salinité faible (1-2 ‰ )

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3.4.2 Etangs de monoculture

Durant les enquêtes, 13 exploitations pratiquant la monoculture ont été visitées, pour une surface totale en étang d’environ 3 ha. espèces Quatre espèces sont élevées en monoculture. Le nombre d’élevages de deux espèces de poissons-chats1 est prédominant (10 exploitations, 13.550 m²) en comparaison de ceux du tilapia (3 exploitations, 13.500 m²) et du gourami lippu (une exploitation, 4.000 m²) qui sont, d’après nos observations, deux espèces récemment introduites en monoculture. structure des étangs Les 13 exploitations comprennent au total 20 étangs, ce qui représente en moyenne 1,5 étang par exploitation. La superficie de ces étangs varie entre 300 et 4.000 m², pour une surface moyenne de 1.550 m² par étang. Le tilapia et le gourami lippu sont élevés de manière extensive en monoculture. Les étangs de monoculture pour ces deux espèces sont généralement grands, 2.500 m² en moyenne, et leur profondeur ne dépasse pas 1,5 m. La surface des étangs de monoculture de poissons-chats est plus réduite, 1.500 m² en moyenne, tandis que leur profondeur est relativement grande et peut atteindre 2 ou 3 mètres. La grande résistance des poissons-chats aux conditions extrêmes dans leur milieu de vie permet un niveau d’élevage très intensif. Afin d’agrandir la capacité de leurs étangs, les éleveurs tendent à les creuser plus profonds. Contrairement aux autres espèces, les poissons-chats Pangasius s’accommodent très bien d’une grande profondeur. Lorsque les pluies sont très abondantes, l’eau de l’étang risque de déborder sur les rives et les Clarias peuvent alors s’échapper. Leur nom anglais signifie d’ailleurs « poisson marcheur » (« walking catfish ») ! Une grande profondeur permet de limiter ces pertes. Les pisciculteurs ont également coutume d’installer des filets tout autour de l’étang. Cette méthode empêche également les poissons de creuser des trous dans la berge, dans lesquels ils pourraient se réfugier au moment de la récolte. fonctionnement Cycle d’élevage Une année permet un élevage de dix mois2 pour le gourami lippu, un ou deux élevages pour le poisson-chat Pangasius et le tilapia, et deux ou trois pour le poisson-chat Clarias. La période de mise en eau a souvent lieu en saison des pluies, qui correspond à une période de faible salinité, car même si les poissons-chats sont tolérants vis-à-vis de cette dernière, l’énergie normalement mise au profit du développement est, dans une eau salée, utilisée pour la régulation osmotique3.

1 Clarias hybrides et Pangasidés 2 de février à décembre dans l’unique exploitation visitée élevant cette espèce 3 la croissance est ralentie en eau saumâtre (constatation) et ceci est probablement lié à une perte d’énergie consacrée à l’osmorégulation

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Photos 41 : Distribution d’aliment dans un étang de poissons-chats pangasius

Préparation et distribution, dans un étang de poissons-chats Pangasius, d’un mélange de son de riz et de déchets animaux récupérés sur les marchés (tripes de volailles, poissons marins déchet). L’emploi du filet évite le gâchis par dislocation et

dépôt sur le fond. Tableau 14 : Tailles et poids des espèces élevées en monoculture Juvéniles * Adultes (taille commerciale) ** Tilapia

5-10 cm 5-10 g

20-25 cm 200-300 g

Gourami lippu

5-10 cm 5-10 g

20-25 cm 200-300 g

Poisson-chat clarias

10 cm 20 g

30-40 cm 200-500 g

Poisson-chat pangasius

12-15 cm 40-50 g

50-60 cm 500-1000 g

* taille et poids à l’empoissonnement dépendent de l’âge des juvéniles

** taille et poids à la récolte dépendent de la durée d’élevage et du type d’alimentation

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Alimentation Les poissons-chats, omnivores, ont des besoins alimentaires particuliers qui ne peuvent être comblés par la seule productivité de l’étang. C’est la raison pour laquelle, dans tous les élevages de poissons-chats, les éleveurs distribuent de la nourriture « artificielle ». Elle est constituée de tripes de canards et de poissons marins (ou déchets de poissons) qui sont achetés sur les marchés à bas prix, et qui sont parfois mélangés à du son de riz1 pour préparer des boulettes jetées ensuite dans les étangs, à raison de une ou deux fois par jour (Photos 41). Cet apport d’aliments peut expliquer l’inexistence d’autres activités dans les exploitations de monoculture de poissons-chats, d’une part car les rendements en poissons sont accrus et suffisants pour faire vivre le fermier, et d’autre part car il y a souvent un manque de main d’œuvre. La quantité d’aliment distribuée est variable. Les taux de conversion calculés à partir des informations obtenues au cours des enquêtes varient de 1 à 11,5, le meilleur taux étant obtenu dans un élevage de poissons-chat Clarias. Cependant, un taux de conversion de 1 est très faible et ne peut être atteint qu’avec un aliment sec dont la teneur en protéines est élevée (environ 40 %). Donc, soit la quantité d’aliment distribuée a été sous-estimée, soit les poissons ont une autre source d’alimentation importante dans l’étang (vers, mollusques, poissons, …). Le taux de conversion moyen pour les élevages observés est de 5,8. Croissance des poissons Les juvéniles sont achetés lorsqu’ils sont âgés d’environ un mois pour la plupart des espèces, exception faite des poissons-chats, qui ont, à l’empoissonnement, une taille de 10 cm et un poids compris entre 40 et 50 g, ce qui correspond à un âge de deux mois minimum. Les autres espèces sont plus petites : les tilapias et les gouramis lippus sont stockés à une taille initiale de 3 à 5 cm correspondant à des poids de 2 à 10 g. La croissance des poissons-chats est très rapide et ils peuvent facilement atteindre 1kg pour les Clarias et 2 kg pour les Pangasius après un an d’élevage. Le poids commercial varie entre 200g et 500 g pour les clarias, selon la durée du cycle d’élevage et le type d’alimentation. Les Pangasius sont commercialisés plus gros, entre 500 g et 1 kg, mais la durée du cycle d’élevage est également plus longue. Tableau 15 : Densité et taille à l’empoissonnement selon les espèces élevées en monoculture en

élevage de grossissement2 Espèce Taille à l’empoissonnement

(grammes) Densité d’empoissonnement

(poissons / m²) moyenne minimum maximum moyenne minimum maximum

Tilapia n=3

9,4

3 20 4 0.8 10

Gourami lippu n=1

10

10 10 14 14 14

Poisson-chat Clarias n=6

18

2 50 22 0.25* 60

Poisson-chat Pangasius n=5

49

40 50 3 0.1* 11

* Ces deux densités (0,25 et 0,1 poissons / m2) sont très faibles pour des élevages en monoculture intensive. L’exploitation concernée, élevant les deux espèces, connaissait en effet de graves problèmes de mortalité liés à une

qualité des eaux douteuse, d’où un revenu moindre et donc un manque d’argent pour acheter les fingerlings et/ou l’aliment.

1 proportion variable et non déterminée dans les enquêtes 2 voir également Tableau 14 : Tailles et poids des espèces élevées en monoculture

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Mortalité Il y aurait, d’après les exploitants, peu de mortalité dans leurs étangs. Mais l’analyse des résultats d’enquête ne permet pas d’être aussi optimiste, et la mortalité semble assez élevée puisqu’elle est en moyenne de 42 %1 en monoculture de poissons-chats… On peut s’interroger sur les facteurs influençant cette mortalité : qualité de l’eau2, pathologies, manque de nourriture, sont autant de raisons évoquées par les pisciculteurs lorsque nous leur avons demandé de lister les différents problèmes qu’ils pouvaient rencontrer. La mortalité est de 50% dans les deux élevages de tilapias qui nous ont fourni suffisamment de données, et de 90% dans l’élevage de gourami lippu, mais il s’agit d’une donnée isolée donc non exploitable. C’est en début d’élevage que la mortalité est la plus importante, car les juvéniles peuvent avoir du mal à s’adapter aux conditions de leur nouveau milieu de vie. Plus les juvéniles sont âgés et gros, mieux ils s’adaptent et moindre est la mortalité. Il peut paraître surprenant que les pisciculteurs n’aient pas conscience de cette mortalité en moyenne si élevée. Nous sommes alors amenés à penser que pour compenser ces pertes, le nombre de juvéniles introduits dans l’étang est augmenté, mais cela n’a pas été clairement mis en évidence par les résultats d’enquête. Les données récoltées étaient les suivantes : - quantité de juvéniles introduits pour chaque espèce en kg : x - nombre moyen, par espèce, de juvéniles introduits dans l’étang, dans 1 kg : n - quantité de poissons récoltés pour chaque espèce en kg : X - nombre moyen, par espèce, de poissons récoltés dans 1 kg de poisson de la même espèce : N A partir d’un calcul simple, on obtient le taux de mortalité théorique car l’on dispose du nombre de juvéniles introduits et du nombre de poissons récoltés : % mortalité = nombre de poissons récoltés / nombre de poissons introduits = [(N / X) / (n / x)]*100

Encadré 1 : Exploitation des résultats pour le calcul des taux de mortalité dans les étangs piscicoles

Photos 42 : Mortalité dans les étangs de production

1 minimum : 0%, maximum : 90% . 2 température, salinité, pollution

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association avec les autres activités Les élevages en monoculture sont rarement intégrés à d’autres élevages terrestres. En effet, l’apport d’aliment artificiel ne requiert pas de fertilisation sous forme de lisier ou de déjections animales et suffit généralement à assurer une bonne productivité piscicole. En revanche, la plupart des étangs de monoculture sont utilisés pour la culture de végétaux aquatiques comme le lotus, l’ipomée et le mimosa d’eau. Cela permet d’optimiser la rentabilité des surfaces exploitées.

6%

52%

42%

poissons + animaux terrestres

poissons + végétaux

poissons seuls

Figure 37 : Proportions de la surface totale en étang de monoculture (3 ha) consacrées aux

différents types d’intégration Rendements Les rendements varient selon les espèces : les rendements en monoculture de tilapias sont de 1 à 3 T/ha/an tandis que l’élevage intensif des poissons-chats permet d’obtenir des rendements de l’ordre de 100 tonnes/ha/an. Tableau 16 : Rendements obtenus pour les espèces de monoculture Espèce Rendement

minimum En tonnes/ha/an

Densité initiale associée Au rdt min En poissons/m²

Rendement maximum En tonnes /ha/an

Densité initiale associée Au rdt max En poissons/m²

Tilapia 1 0.8 2.5 1.6 Gourami lippu 6 14 6 14 Poisson-chat Clarias 8 0.25 117 21 Poisson-chat Pangasius

1.8 0.4 185 11

Rendement moyen Rendement min Rendement max Saisonnier 20,4 1 157,4 Réel 41,7 1 267,6 Théorique 41,9 1 269,9 Les problèmes rencontrés De nombreux fermiers se sont plaints d’un manque de moyens entraînant un manque de nourriture (le prix du « trash fish » augmente) et également un manque de main d’œuvre. La pollution de l’eau est la cause, selon eux, du faible développement des poissons, voire de certaines maladies.

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05

101520253035

%

2 3 4 5 >5

Nombre d'espèces en polyculture

Figure 38 : Proportion des élevages de polyculture selon le nombre d’espèces élevées (n=33) <1000 m² 1000 – 2000 m² 2001 – 3000 m² >3000 m² Surface totale observée (m²)

8.000 48.000 32.000 106.000

05

1015202530354045

%

<1000 m² 1000-2000 m² 2001-3000 m² >3000 m²

superficie

Figure 39 : Proportion du nombre d’étangs de polyculture en fonction de la superficie (n=84)

05

1015202530354045

%

6 mois 8 mois 12 mois

durée d'élevage

Figure 40 : Durées d’élevage en polyculture et proportions des exploitations pratiquant ces

durées (n=33)

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3.4.3 Etangs de polyculture Sur les 52 exploitations visitées, 33 pratiquaient la polyculture sur un total de 84 étangs occupant 19,4 ha. espèces Les espèces ainsi que le nombre d’espèces cultivées dans un même étang sont variables, avec cependant une constante : le tilapia est élevé dans tous les étangs de polyculture et représente l’espèce majoritaire, à l’empoissonnement, dans 85% des cas. Les autres espèces sont celles définies dans la partie «espèces cultivées ». Le nombre d’espèces différentes élevées en polyculture varie entre 2 et 8, avec une majorité de polycultures à 4 espèces comme le montre le, ces polycultures étant toujours constituées par l’association du tilapia, de la carpe commune et de la carpe herbivore avec soit le gourami lippu, soit la carpe argentée. L’occupation de la colonne d’eau dans les étangs de polyculture est optimisée grâce à ce choix d’espèces à régimes alimentaires différents. structure des étangs Les exploitations pratiquant la polyculture possèdent en moyenne 2,5 étangs pour cette activité. Les étangs de polyculture ont une surface moyenne de 2.300 m², variable de 100 m² à 7.000 m². Leur profondeur, qui ne dépend ni du nombre d’espèces cultivées ni de la nature de ces espèces, varie entre 50 cm et 3 m, bien que dépassant rarement 2 m, pour une valeur moyenne de 1,20 m environ. fonctionnement La durée d’un cycle d’élevage en polyculture varie entre 6 et 12 mois, ce qui correspond à une ou deux saisons par an. Très souvent, les espèces dans les élevages de polyculture sont le tilapia, la carpe commune, la carpe herbivore et le gourami lippu. Dans presque la moitié des cas, l’empoissonnement se fait indifféremment en saison sèche ou en saison des pluies. On peut remarquer que ces espèces, qui peuvent être empoissonnées en saison sèche, ne sont pas choisies au hasard puisque les quatre tolèrent relativement bien une salinité importante. De plus, le risque de stocker les juvéniles dans des eaux où la salinité est trop importante pour garantir un taux de survie élevé sont palliés grâce aux possibilités concernant l’apport d’eau douce1, ce qui permet d’avoir des poissons tout au long de l’année. Nous n’avons malheureusement pas réussi à récolter suffisamment d’informations concernant la fréquence d’utilisation de cette eau et le taux de renouvellement. Tableau 17 : Les cycles d’élevage typiques en polyculture (dans plus de 50 % des élevages

visités) Mois de l’année j f m a m j j a s o n d Salinité > 1‰ X X X x x X Une saison par an (12 mois d’élevage)

r s r

s

Deux saisons par an (6 mois d’élevage)

rs rs

rs rs

s : stockage ; r : récolte X : salinité élevée (4 à 5 ‰)

x : salinité faible (1-2 ‰ )

1 captée par forage afin de diluer l’eau d’alimentation et ainsi d’en réduire la salinité

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Alimentation Les poissons reçoivent de l’aliment artificiel dans plus de 80 % des étangs. Il s’agit principalement de son de riz, seul ou mélangé à des légumes, ou tout simplement des légumes lorsque le son de riz est considéré comme trop cher par le fermier. Pour indication, le prix du son de riz varie entre 1.400 VND et 2.000 VND le kilo d’après les données fournies par les exploitants. Le prix moyen étant de 1.600 VND/kg, on peut penser qu’à partir de cette valeur, il est considéré comme trop cher par le pisciculteur, et supprimé du régime alimentaire. Peu d’aliments d’origine animale sont employés, sauf dans les élevages comportant des poissons-chats (un seul cas d’élevage de poisson-chat clarias en association avec d’autres espèces dans un même étang a été observé). Croissance des poissons Les carpes ont une croissance très rapide et peuvent atteindre en moins d’un an un poids supérieur ou égal à 1 kg. Le détail pour les autres espèces est présenté dans le Tableau 18. Tableau 18 : Croissance des espèces en polyculture

Espèces Nb d’obs.

GMQ en grammes/jour

Durée moyenne d’élevage

Poids à l’empoissonnement (g) Poids à la récolte (g) Moyenne min max Moyenne min max

Tilapia hybride 32 1,2 8,3 5 1 8 300 120 500 Carpe commune 28 1,3 8,8 5,3 1 20 355 170 1000 Carpe herbivore 26 2,0 8,3 5,8 1 25 510 170 1000 Gourami lippu 16 1,5 7,1 8 1 30 335 120 1000 Carpe argentée 12 1,5 8,9 6 1 25 400 250 1350 Gourami géant 3 2,0 12 7,8 3,3 10 733 500 1000 Silver barb 3 1,4 12 4 3,3 5 500 500 500 Carpe marbrée 2 9 3,3 3,3 3,3 Tram toi 4 1,0 10 4,7 4 5 290 250 330 Mortalité D’après l’analyse des données récoltées, la mortalité est très élevée dans les élevages de polyculture et n’est jamais inférieure à 70 %.

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association avec les autres activités Les polycultures sont la plupart du temps intégrées aux autres activités de la ferme. On constate que le système VAC est très courant (40% des exploitations et 32% de la surface totale en étangs de polyculture), ce que peuvent expliquer les nombreux efforts entrepris par le gouvernement pour favoriser ce système, jugé intéressant car rentable et compatible avec le fonctionnement traditionnel des exploitations.

25%

27%

37%

11%

poissons + animaux terrestres

poissons + végétaux

poissons + animaux terrestres + végétaux

poissons seuls

Figure 41 : Proportions de la surface totale des étangs de polyculture ( 194.000 m²) dédiées aux

différents types d’intégration Rendements Bien que certaines exploitations réussissent à obtenir des rendements piscicoles élevés, de plusieurs dizaines de tonnes/ha/an, la majorité des rendements est comprise entre 1 et 10 tonnes/ha/an. Une étude approfondie des résultats offre malheureusement peu de conclusions convaincantes quant à la détermination des facteurs explicatifs de ces rendements. En effet, chaque exploitation est caractérisée par un ensemble de paramètres qui sont très variable d’une pisciculture à une autre. Néanmoins, on peut penser que les éventuels facteurs explicatifs des rendements sont à chercher parmi les suivants : gestion de l’eau, choix des espèces, aliment artificiel, fertilisation, etc. Tableau 19 : Rendements piscicoles obtenus en polyculture

Rendement moyen Rendement min Rendement max Saisonnier 5,3 0,8 29,9 Réel 7,3 1 59,8 Théorique 7,7 1 59,8

Rq. : n=33-2

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3.4.4 Etangs de reproduction du tilapia Les 10 nurseries visitées ne concernaient que la production de juvéniles de tilapias. La surface totale en étangs est relativement élevée puisqu’elle atteint 55.600 m². Outre la production de juvéniles, le fonctionnement de ces piscicultures implique également la production de tilapias adultes et donc de leur vente pour la consommation humaine lors des renouvellements des stocks de géniteurs, au moins une fois par an. structure des étangs En général, les étangs sont assez grands (jusqu’à 5.000 m²) et leur profondeur est de 1m. La reproduction de tilapias nécessite au minimum deux étangs permettant une capacité permanente de production de juvéniles. En effet, la production se fait en général à la demande, c’est-à-dire que les acheteurs appellent le pisciculteur pour lui commander une quantité donnée de juvéniles. 1000 – 2000 m² 2001 – 3000 m² >3000 m² Surface totale (m2) 16.500 22.000 17.100

0

10

20

30

40

50

%

1000-2000 m² 2001-3000 m² >3000 m²

superficie

Figure 42 : Proportion du nombre d’étangs de reproduction de tilapias en fonction de la

superficie (n=22)

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Photos 43 : Fonctionnement des nurseries de tilapias

Récolte des géniteurs dans l’étang 1, partiellement vidé pour faciliter la manœuvre

Des happas dans l’étang 2 sont prêts à recevoir les géniteurs pêchés dans l’étang 1

Les géniteurs de l’étang 1 sont stockés dans les happas de l’étang 2

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Le tri des géniteurs est effectué par une seule personne, à la main

Parmi les critères de sélection : le sexe

Récolte, au bout d’un mois, des juvéniles dans l’étang 2

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Les juvéniles sont mis en attente …

… dans des happas de l’étang 1

Oxygénation manuelle pour faciliter

l’adaptation des juvéniles au nouveau milieu… … en attendant les acheteurs !

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fonctionnement (voir les Photos 43) La reproduction dans une nurserie de tilapia est assurée grâce à un stock de 5.000 à 6.000 géniteurs, renouvelé annuellement, soit par l’achat de nouveaux poissons, soit par le tri de juvéniles qui sont issus de la dernière récolte et qui ont été conservés jusqu’à la maturité (4 à 6 mois chez le tilapia). Pour expliquer en détail l’itinéraire technique de ce type d’élevage, prenons l’exemple d’un fermier dont les activités ont été suivies sur plusieurs mois : L’exploitation comporte deux étangs de 3.000 m² chacun. La profondeur, qui est de 1 m, est identique dans les deux étangs. Un des deux étangs (étang 1) contient les géniteurs. Le deuxième étang (étang 2) est pour l’instant vide. Les géniteurs sont récoltés afin d’être triés manuellement et 1.500 d’entre eux sont placés en happas dans l’étang 2. Les critères de sélection reposent sur le sexe (le sex ratio est de 1 mâle pour 3 à 7 femelles) , l’aspect (« poissons jolis »1, donc qui attirent les clients) et l’âge estimé en fonction de la grosseur du poisson. Ainsi, les poissons sélectionnés mesurent, d’après les observations faites sur le terrain, entre 20 et 25 cm. Un poisson trop vieux, repérable par sa grosseur (estimée aux alentours de 450-500 g) plus importante que celle des tilapias adultes que l’on trouve d’habitude sur les marchés (250-300 g), n’est pas sélectionné car sa capacité de reproduction décroît avec l’âge. Les géniteurs choisis sont alors maintenus 10 jours dans l’étang 2, dans un happas à grosses mailles lui-même placé dans un happas à mailles fines. Cela permet, après la reproduction, de récupérer facilement les géniteurs afin de les relâcher dans l’étang 1 avec le stock de géniteurs. Les œufs, parfois récupérés à même la bouche des géniteurs (les tilapias gardent leurs œufs dans leur bouche les tous premiers jours d’incubation) et les larves se trouvent alors dans les happas à mailles fines dans l’étang 2. Au bout de quelques jours, les juvéniles sont relâchés dans l’étang, puis à 1 mois, ils sont récoltés et placés dans des happas, dans l’étang 1, en attendant d’être vendus. Les géniteurs peuvent alors être de nouveau récoltés et triés pour satisfaire la commande suivante. Les juvéniles sont vendus à un mois. Ils mesurent alors à peu près 5 cm, pour un poids de 5g. Il n’a pas été observé, dans cette exploitation, de distinction du sexe des juvéniles. Cela peut pourtant s’avérer intéressant de ne vendre que des mâles aux élevages de grossissement, sachant que leur croissance est plus rapide que chez les femelles. Dans ce but, l’écloserie-nurserie visitée à Thu Duc pratique d’ailleurs le monosexage de tilapia. Cependant, cela demande certainement beaucoup de moyens, entre autres financiers pour assurer la formation et pour faire face aux coûts requis par cette technique. On peut cependant penser que dans le cas des petits pisciculteurs, le tri manuel des poissons selon le sexe est pratiqué, malgré le surcroît de travail que cela engendre.

1 C’est-à-dire avec un corps exempt de difformités, et des couleurs uniformes et brillantes

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association avec les autres activités Les élevages animaux concernés par la production de juvéniles de tilapias sont ceux de porcs et de poulets. La culture du corossol est présente dans 5 exploitations.

4%

30%

30%

36%

poissons + animaux terrestres

poissons + végétaux

poissons + animaux terrestres +végétaux

poissons seuls

Figure 43 : Proportions de la surface totale des étangs de reproduction du tilapia ( 55.600 m²) dédiées aux différents types d’intégration

Rendements La productivité piscicole de ces étangs est en moyenne de 440 kg de juvéniles par hectare et par mois, et varie entre 125 et 1000 kg selon les exploitations. Dans la moitié des exploitations, un an d’élevage comporte seulement 6 mois de production effective de juvéniles, le reste de l’année étant consacré au grossissement des géniteurs. La production annuelle totale provenant des piscicultures visitées s’élève ainsi à 15,44 tonnes de juvéniles, soient près de 3 millions d’animaux. En plus de ces juvéniles, il ne faut pas oublier la quantité de géniteurs vendus lors du renouvellement du stock, dont le poids total, égal à 10,1 tonnes, est presque aussi important que la quantité de juvéniles produits dans ces exploitations. Le rendement moyen s’élève donc à 4,6 tonnes/ha/an.

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Photo 44 : Etangs de grossissement des poisson d’ornement. On peut remarquer, sur la troisième photo, la présence de filets anti-prédateurs au-dessus des

happas.

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3.4.5 Etangs de grossissement et de reproduction de poissons d’ornement 3 exploitations sur une surface totale de 19.000 m² ont été visitées. Les espèces ornementales produites sont le Ba Duoi, le Hac Kim et le Lau Kiem1. structure des étangs Les grandes surfaces des étangs (2500 à 5000 m²), de même que leur profondeur assez importante (1,5 à 2m), ne correspondent pas au volume occupé car les poissons, de petite taille, sont placés dans des happas afin de faciliter les manipulations. Ces happas ont une profondeur de 1,2 m et couvrent entre 2 et 16 m² (Photo 44). Lorsque les juvéniles sont produits sur place, le fermier aménage des bacs, soit en briques recouvertes de ciments et d’une bâche étanche, soit avec la bâche étanche seule, remplis d’eau et de macrophytes qui offrent un milieux favorable à la reproduction (Photo 45 et Photo 46). Ce type de bacs peut également être utilisé en grossissement. Après 2 ou 3 jours passés dans les bacs pour la reproduction, les géniteurs sont replacés dans les filets. cycle d’élevage Les juvéniles sont soit achetés, soit produits sur place. Durant la saison des pluies, la croissance des poissons d’ornement est meilleure qu’en saison sèche, mais cela n’influe pas sur les techniques de l’éleveur car ces poissons sont vendus à l’unité et non au poids ou à la taille. La durée d’élevage est de 1 mois, pendant lequel les poissons sont nourris quotidiennement avec du son de riz. Une attention particulière est portée sur les pathologies des poissons et sur l’entretien de l’étang. Certains fermiers diluent du vert de malachite, un antifongique, dans l’étang (Photo 48). Néanmoins, ce genre de pratique nuit à l’environnement, en détruisant par exemple le plancton naturel. En outre, le prix élevé de ce produit (1 million de VND le kilo) ne permet pas d’en utiliser beaucoup. De larges filets peuvent être étendus au-dessus de l’étang pour éviter la prédation par les oiseaux (Photo 44). L’éleveur utilise souvent deux étangs en alternance, ce qui lui permet de vidanger et de nettoyer le fond de l’étang une fois par mois tout en assurant la continuité de sa production. association avec les autres activités La production de poissons d’ornement est une activité qui connaît actuellement un essor important du fait des revenus assez élevés qu’elle peut engendrer. La demande semble être importante, étant donné non seulement le nombre de magasins spécialisés en ville2, mais également les nombreuses opportunités d’exportation vers d’autres pays asiatiques. Il s’agit d’une activité qui nécessite beaucoup de travail et de vigilance à cause de la fragilité des espèces concernées. Aussi est-elle rarement3 associée à une autre forme de pisciculture, à une culture ou un élevage.

1 la traduction des noms vietnamiens n’a malheureusement pas été transmise 2 Plusieurs rues sont spécialement dédiées à ces magasins 3 jamais d’après nos observations

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Photo 45 : Bac de reproduction, en ciment

Photo 46 : Macrophyte où se logent les œufs

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Photo 47 : Poissons d’ornement

Photo 48 : Vert de malachite

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3.5 Aperçu de la filière des produits aquacoles 3.5.1 Approvisionnement des pisciculteurs en juvéniles

Il existe plusieurs modalités : soit le pisciculteur produit ses propres juvéniles comme c’est le cas des nurseries de tilapias pratiquant en alternance ou en parallèle le grossissement de tilapias, soit il les achète en dehors de son exploitation lorsqu’il ne pratique que du grossissement. Néanmoins, il est tout à fait possible que, dans les polycultures où des tilapias sont élevés, des reproductions naturelles spontanées aient lieu, mais dans ces cas-là, les alevins sont probablement mangés par les autres poissons. On peut trouver dans le district de Binh Chanh, et plus précisément à Phong Phu et Da Phuoc et Binh Hung, moins de cinq grossistes/détaillants importants1 qui centralisent les juvéniles de plusieurs espèces produits principalement dans la région de Binh Chanh et les revendent aux fermiers. Trois d’entre eux, Thanh Nhàn, Tu Hong et Van Ba2 ont été rencontrés. Les juvéniles transitent une à plusieurs semaines dans ces structures qui sont identiques à des étangs de production. Cependant, toutes les espèces n’étant pas produites à HCMV, les grossistes se fournissent également auprès de leurs homologues dans le delta du Mékong, à Long An et Tien Giang par exemple, deux régions citées par Thanh Nhàn (voir leur localisation sur la Carte 16). La région sud de HCMV est spécialisée en production de juvéniles de tilapias et de poissons-chats hybrides Clarias3 tandis qu’au nord, dans le district de Thu Duc, sont reproduites plusieurs espèces de carpes. La production totale de juvéniles de tilapias dans la région sud de HCMV est estimée à 600 tonnes par an4, ce qui représente environ 180 à 200 millions de juvéniles. Cette production répond à 90% de la demande en juvéniles dans le sud-Viêt Nam qui émane en partie de la région du delta du Mékong. Bien que cette région soit elle-même grande productrice de juvéniles, les élevages de cette zone préfèrent en effet importer de nouvelles souches pour éviter une consanguinité qui semble augmenter actuellement et qui provoque de fortes mortalités dans leurs élevages. De plus, par l’utilisation des eaux usées, il semble plus intéressant de produire ces juvéniles à HCMV et non dans le delta du Mékong où les coûts de production sont supérieurs (apports d’aliments en plus grande quantité).

1 Il en existe au moins quatre, d’après un des grossistes interrogés, dont trois à Phong Phu et un à Binh Hung. 2 Tous les trois localisés à Phong Phu 3 Le Thanh Hung, “The present status of aquaculture in peri-urban of Ho Chi Minh city, Viêt Nam”, 2000. 4 Ibid.

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Photos 49 : Visite chez un grossiste en juvéniles dans la région de Ben Tre

Carte 16 : Les régions du sud Viêt Nam

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3.5.2 Réseau de distribution des poissons d’étangs Les poissons issus des étangs ne subissent aucune transformation, et sont transportés vivants car ils sont pour la plupart très résistants au manque d’oxygène dissous dans les petits volumes d’eau transportés avec les poissons. Transport Les moyens de transport utilisés ne sont jamais de grande taille car les chemins d’accès aux exploitations ne sont pas assez larges. Il peut s’agir de motos (D), de camionnettes dans lesquelles sont placées des caisses en métal (couvercle perforé) contenant les poissons et un fond d’eau (E), ou encore de barques (F). Dans le cas du transport de juvéniles, ou lorsque le transport risque de durer trop longtemps pour garantir la survie des animaux, les fermiers utilisent plusieurs sacs en plastique superposés et glissés dans un sac plus solide (dimensions d’un sac : 50 x 80 cm ). Les sacs sont remplis au tiers d’eau, puis on y place les poissons vivants et enfin un vide est créé, dans lequel est insufflé de l’oxygène (Figures 44). Les sacs, gonflés comme des ballons, sont alors fermés hermétiquement grâce à des élastiques ils sont prêts à être acheminés vers leur destination (A, B). Lorsque la chaleur est trop forte, quelques morceaux de glace peuvent être ajoutés à l’intérieur du sac (C).

Figures 44 : Transport des poissons Vente Il existe à HCMV une cinquantaine de marchés où sont vendus les poissons élevés en étangs, dont trois marchés de gros. Cependant, il est à préciser que les marchés de gros ne s’intéressent que peu à la production en étang de HCMV, jugée trop faible pour être écoulée dans des ventes en gros, et les poissons d’eau douce commercialisés dans ces marchés sont donc souvent originaires de la région du delta. Ce sont donc les pisciculteurs périurbains eux-mêmes, ou bien des intermédiaires achetant les poissons directement dans les fermes, que l’on rencontre sur les marchés de détail de la ville. Dans d’autres cas, le pisciculteur se rend sur les marchés pour vendre sa récolte à un détaillant qui s’occupe de la vente aux particuliers. Les marchés «populaires » comptent généralement entre 20 et 50 vendeurs de poissons (voire 80 dans les plus gros marchés de la ville), dont jamais plus de 30% ne sont spécialisés en poissons d’eau douce. Un vendeur vend entre 20 et 40 kg de poissons par jour.

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Photos 50 : Transport des poissons

A B

C D

E F

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Quatrième partie : Discussion

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DISCUSSION

Bien que peu révélateurs quant aux facteurs impliqués dans l’explication des rendements, les résultats obtenus grâce aux enquêtes nous apportent cependant de nombreux éléments pour mieux comprendre la situation actuelle des systèmes de production piscicole en étang au sud de HCMV. La grande adaptabilité des pisciculteurs leur permet de faire face aux nombreuses variations du milieu, qu’elles soient d’origine naturelle dans le cas de la salinité, ou humaine dans le cas des eaux « polluées ». La diversification des activités, grâce notamment au système VAC, leur garantit des revenus qui sont minimaux à défaut d’être constants. La vente des produits ne semble pas freinée par la mauvaise image des poissons d’étang, et le marché de HCMV ne demande qu’à être comblé, pour peu que l’origine des poissons ne soit pas mentionnée… Mais à côté de ces aspects positifs, nous avons également pu déceler quelques failles à explorer pour tenter de proposer quelques solutions. Parmi elles, nous avons cherché à savoir si l’image négative des poissons élevés en étang était justifiée. D’autre part, nous avons essayé de comprendre dans quelle mesure le développement de la ville était un frein pour ces activités. Nous avons finalement tenté de proposer quelques pistes de réflexion et d’actions adaptées au contexte général.

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La mauvaise image des poissons élevés en étangs est-elle justifiée ?

D’après les enquêtes, les poissons d’étangs ne semblent pas avoir la côte, à cause de la mauvaise image qui leur est spontanément liée (étangs à latrines, eaux usées donc sales, etc.) Pourtant, des tests conduits par l’AIT ont montré que les consommateurs préféraient le goût de tilapias élevés en étang à celui de tilapias élevés en eau claire et alimentés avec des granulés. Dans tous les cas, cette image négative ne gêne pas le commerce de ces poissons, car les vendeurs omettent volontairement de dévoiler l’origine exacte des produits qu’ils vendent. En effet, bien souvent lors des entretiens avec les vendeurs sur les marchés de la ville, nous avons demandé d’où venaient les poissons. Les vendeurs nous ont toujours répondu que toutes les espèces, celles que nous avions l’habitude de rencontrer dans les élevages en étang (notamment les tilapias), provenaient d’une rivière ! Ainsi, les préoccupations purement culturelles, voire psychologiques, qui semblent déranger le consommateur sont-elles réellement fondées, et est-il vraiment « mauvais » de manger des poissons produits dans ces conditions ? En réalité, cette image n’est pas si injustifiée, et l’on peut trouver quelques explications dans l’originalité de ces systèmes qui utilisent des eaux usées, donc des eaux potentiellement vectrices de maladies. Car finalement, un mensonge quant à l’origine des produits n’est rien comparé à l’absence de stabulation des poissons avant leur mise en vente… Selon les données récoltées par D. Dalsgaard, en 1996 dans un rapport relatif à ces problèmes de santé publique liés à l’utilisation des eaux usées en aquaculture au Viêt Nam, il ressort que les risques peuvent être classés en fonction des individus menacés et des types de pathogènes. Sur qui pèsent les risques sanitaires ?

Quatre groupes d’individus peuvent être affectés directement par les pathogènes présents dans les eaux usées. Il s’agit des ouvriers, toujours pieds nus, qui travaillent dans l’étang (entre autres lors de la récolte et du nettoyage), des personnes qui s’occupent du transport et de la vente des produits aquatiques (intermédiaires, vendeurs sur les marchés), des consommateurs bien évidemment, mais également des gens qui habitent près des étangs fertilisés par les eaux usées. En effet, en dehors de l’ingestion, il suffit d’un simple contact avec une plaie ouverte lors d’une baignade ou d’un trempage dans ces étangs pour que la transmission d’un pathogène à l’homme soit possible. Enfin, il est intéressant de noter que les risques de transmission de certains virus responsables de l’hépatite A, de la poliomyélite et de la gastroentérite sont faible par ingestion. Types de contaminations concernées

Les risques sont de quatre ordre, selon l’origine des éléments pathogènes qui leur sont liés. Premièrement, nous pouvons citer les éléments toxiques, tels que les métaux lourds, les PCB (polychlorobiphénils) et les pesticides, présents dans les effluents industriels ou agricoles. Ces éléments, dont la dégradation est souvent lente, s’accumulent dans certains tissus animaux et végétaux. Leur concentration augmente alors, représentant un risque pour les êtres vivants aquatiques et terrestres. Deuxièmement, les parasites, qui sont représentés essentiellement par les helminthes, surtout les trématodes qui ont besoin d’un ou deux hôtes aquatiques intermédiaires (escargot puis poisson ou macrophyte). Néanmoins, la distribution géographique de ces parasites au Viêt Nam est limitée à quelques zones, principalement au nord, et le risque n’est véritable que si les poissons sont mangés crus ou qu’ils sont mal cuits.

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nightsoil : excréments humains

sludge : boue sewage : eaux d’égouts

duckweed : lentilles d’eau Figure 45 : Stratégies de recyclage par l’aquaculture de divers types d’excréments

pour sauvegarder la santé publique (d’après Peter Edwards)

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Les risques ne sont par ailleurs pas très bien connus dans le cas des végétaux aquatiques qui sont souvent consommés crus. En outre, il est souvent difficile de déterminer l’origine de la contamination d’un produit, qui peut très bien être postérieure à la récolte, par exemple lors de la vente sur les marchés, où les vendeurs ont l’habitude de rincer leurs végétaux avec de l’eau courante. Les bactéries, à l’origine de diarrhées et de gastroentérites, sont très présentes dans le sud Viêt Nam, plus précisément dans le delta du Mékong. En effet, une étude en 1986 a montré que les eaux de surfaces y étaient hautement contaminées par les colliformes fécaux. En général, les eaux de pluie sont utilisées pour la boisson et la cuisine, mais en saison sèche, la population est souvent forcée de s’approvisionner dans les eaux de surface polluées. Les cas de contamnation par la salmonelle sont très rares. Enfin, les virus, comme ceux de la malaria et de l’encéphalite japonaise, sont transmis par une espèce de moustique qui n’est pas présente dans les étangs fertilisés par les eaux usées. On connaît plus de 100 virus différents présents dans les fèces humains. Des concentrations de 100.000 particules de virus infectieux par litre ont été détectées dans des effluents d’égouts bruts, et il est probable que ces virus puissent survivre plusieurs mois dans les eaux usées. Diminution et prévention des risques

Un étang de pisciculture, malgré la grande concentration en éléments pathogènes résultant de l’utilisation d’eaux usées, se comporte néanmoins comme un étang de stabilisation, à savoir que les pathogènes sont progressivement éliminés du milieu. La survie des pathogènes dans l’étang pisicole apparaît même moindre que dans un étang de stabilisation. En effet, cette capacité d’épuration est améliorée par plusieurs facteurs propres à l’étang piscicole. D’abord, la concentration en éléments pathogènes est moindre dans les eaux usées utilisées en pisciculture, car il s’agit rarement d’effluents bruts d’égouts. Ces eaux ont transité pendant un certain temps dans des cours d’eau avant d’arriver dans l’étang, et ont donc été le siège d’un processus naturel d’auto-épuration par lagunage. D’autre part ces eaux sont souvent diluées à leur entrée dans l’étang avec de l’eau de forage. La faible profondeur des étangs piscicoles permet un réchauffement plus grand de l’eau et augmente la pénétration des rayons ultraviolets. D’autres facteurs comme le temps de rétention, les effets antibactériens de toxines produites par certaines algues, une faible teneur en CO2, un pH élevé, de fortes concentrations en oxygène dissous et la prédation par des invertébrés microscopiques, influencent significativement la disparition de certaines bactéries. Le risque de contamination se pose donc davantage pour les pathogènes qui se déposent dans le sédiment et qui sont capables d’y survivre pendant de longues périodes.

Du point de vue du consommateur, la seule parade connue pour éviter tout risque de contamination réside dans une attentive préparation du poisson. Ainsi, lors de l’éviscération, il faut éviter de répandre le liquide digestif ou le contenu hépatique sur la chair qui va être consommée, car les pathogènes semblent s’accumuler davantage dans le tube digestif et dans le fluide intrapéritoneal que dans la chair. Il convient également de bien cuire le poisson.

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Une forte dépendance des activités piscicoles vis-à-vis du milieu Si les conditions du milieu changent dans une exploitation, c’est l’activité piscicole qui en subit la première les conséquences. L’importance des systèmes de pisciculture intégrée dans la région de HCMV n’est donc pas étonnante, car la diversification des activités permet d’éviter des catastrophes économiques pour l’exploitation. A priori, il semble que le développement de la ville ne soit pas très positif pour ce qui concerne les activités piscicoles en zone périurbaine. Cependant, les différents types de pollution engendrés par la ville ne sont pas tous néfastes pour ces activités. Il ne faut pas oublier que la pollution par les matières organiques est à la base même de ces systèmes de pisciculture en étangs à HCMV, qui deviennent ainsi indiscutablement tributaires de la ville. En revanche, cette pollution devient dangereuse si elle entraîne une trop forte baisse du taux d’oxygène dissous dans le milieu. Aussi les pollutions les plus menaçantes ne sont-elles pas forcément les plus visibles. Intérêts des étangs de pisciculture en zone périurbaine à HCMV Nous venons de voir que les étangs jouaient un rôle important dans l’épuration des eaux usées. Ils ont un effet préventif sur, par exemple, les phénomènes d’eutrophisation. De plus, étant les principaux milieux récoltant les eaux de pluie et les eaux usées, ils permettent d’éviter les inondations en saison humide. D’un point de vue zootechnique, une des problématiques majeures apparues au cours du stage était de déterminer l’intérêt de l’utilisation d’eaux chargées en matière organique en pisciculture, en comparant les résultats obtenus avec et sans autres apports que cette source de fertilisation pour l’étang. La comparaison entre les rendements obtenus dans ces deux cas, et donc l’analyse de l’influence du facteur qualité de l’eau sur les rendements, s’est néanmoins révélée difficile à entreprendre. D’une part, elle impliquait plusieurs hypothèses qui n’étaient pas vérifiées dans la pratique (caractéristiques des étangs identiques dans toutes les exploitations, une même source d’alimentation en eau, des activités identiques et le même taux d’intégration [nb. d’animaux / m²]). D’autre part les données récoltées n’étaient pas suffisamment précises ni fiables pour être exploitées correctement. Par exemple, le taux de renouvellement en eau dans les étangs est une question qui n’a pas été suffisamment renseignée. De même, nous manquions considérablement de données concernant la qualité de l’eau qui entrait dans l’étang, ainsi que le facteur de dilution avec les eaux de forage. Malgré cela, il est toujours possible de comparer les rendements obtenus avec les rendements trouvés dans la bibliographie. Celle-ci indique que les rendements qu’un agriculteur peut espérer obtenir dans des systèmes intégrés dépendent entre autres des espèces élevées. Ils dépendent également, en plus du pouvoir fertilisant des fumures, de la teneur en oxygène dissous. Il semble raisonnable d’estimer les rendements maximum à 10 T/ha/an (soit 1kg/m2/an). Au delà, il faut soit oxygéner ou aérer l’eau, soit élever des poissons à respiration aérienne complémentaire, ou encore renouveler fréquemment l’eau mais en perdant des élément fertilisants. Ainsi, d’après D. Little, les rendements que l’on peut obtenir dans ces différents systèmes intégrés dépendent essentiellement du niveau d’intensification décidée par l’exploitant, en ce qui concerne les apports en eau, en aliments et en oxygène. On distingue communément différents niveaux d’intensification, selon l’importance et l’origine des apports extérieurs : la pisciculture extensive, dans de grands espaces avec peu d’apports extérieurs et qui requiert beaucoup de travail de la part du pisciculteur, la pisciculture intégrée (considérée comme semi-intensive), dont les faibles apports extérieurs en association avec les apports de l’exploitation, permettent d’obtenir de très bons rendements avec relativement peu de travail, - la pisciculture intensive, dans des espaces plus réduits, avec des apports extérieurs très importants et nécessitant peu de travail.

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Tableau 20 : Rendements piscicoles obtenus dans différents systèmes de pisciculture intégrée à

un élevage Elevage associé à la pisciculture Rendements piscicoles observés (T/ha/an) cochon 4 à 12 poulet jusqu’à plus de 7 canard 2 à 6 oie jusqu’à 3,7 vache plus de 10 buffle 2 chèvre et mouton pas de données lapins pas de données

d’après Little, 1987 Tableau 21 : rendements obtenus dans différents systèmes piscicoles

Système de production

Rendements en T/ha/an

étangs non fertilisés-gestion piscicole faible

0,05-0,2

système alimenté par les déchets, fertilisé, avec gestion des stocks

5-10

fertilisation et alimentation artificielle

5-15

alimentation artificielle plus complète, renouvellement de l’eau plus grand, aération

8-40

élevage en cages, alimentation totalement artificielle et renouvellement complet de l’eau

200 -2000

Remarque : le terme de fertilisation désigne à la fois les eaux usées et les effluents et rejets d’élevages. Source : Little, 1987

Tableau 22 : rendements obtenus en étangs fertilisés avec et sans apport d’aliment artificiel dans

les exploitations visitées Rendements théoriques en tonnes/ha/an des

étangs de monoculture Rendements théoriques en tonnes/ha/an des étangs de polyculture

moyenne minimum maximum moyenne minimum maximum Aucune alimentation artificielle

1,7 n=2

1 2,5 7,7 n=13

2,1 25,1

Alimentation artificielle

50,8 n=9

7,3 116,8 6,2 n=15

1,5 17,3

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Si l’on compare les rendements qui nous ont été directement communiqués par les pisciculteurs avec ceux contenus dans les tableaux ci-dessus, il apparaît que les systèmes observés à Binh Chanh sont tout à fait satisfaisants. En effet, dans la mesure où les rendements obtenus sont proches de ceux caractéristiques des étangs fertilisés où est distribué en plus de l’aliment artificiel, on peut penser que dans les étangs qui nous intéressent, le seul apport d’eaux usées compense toute alimentation artificielle complémentaire. On peut penser que le revenu brut engendré par ces activités aquacoles en eaux usées reste encore supérieur à celui issu d’autres activités agricoles1. Les rendements piscicoles dans les systèmes intégrés de polyculture sont d’environ 10 tonnes/ha, ce qui est en accord avec les résultats observés dans des systèmes analogues à travers le monde. Mais c’est sans compter un taux de mortalité relativement élevé, et les pisciculteurs ne peuvent s’empêcher d’accuser la pollution de l’eau. Ils semblent ainsi être conscients de la menace, induite par le développement de la ville, qui pèse sur eux, et ils ne voient pas d’autre solution que l’arrêt de leur activité lorsque cette pollution les atteindra directement.

Source : Précise de pathologie des poissons.

Figure 46 : Schéma étiologique général montrant les interactions et la mise en jeu des causes de

maladies des poissons

1 résultat des études économiques antérieures à 1996 menées sur ce sujet au Viêt Nam

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Fragilité face au développement de la ville

La plus grande menace exercée par la ville sur les exploitations relève davantage du domaine de l’expansion physique de la ville que de la pollution des eaux. Si actuellement l’aggrandissement de la ville passe par le recul des activités piscicoles, il se peut que progressivement, elle conduise purement et simplement à leur disparition. Car le comblement progressif des canaux entraîne inévitablement un déséquilibre du réseau hydrographique et beaucoup de pisciculteurs sont d’anciens riziculteurs n’ayant pu faire face aux problèmes d’inondations qui ont tendance à se renouveler depuis quelques années. La construction actuellement en cours, au sud de HCMV, d’une « ville dans la ville » (projet Saigon South), risque de ne pas épargner les piscicultures qui perdurent dans cette zone. D’après des témoignages, plus de 60 % des pisciculteurs de la région ont ainsi vendu leurs terres et leurs étangs, pour permettre la construction d’immeubles d’habitation.

Carte 17 : Carte satellite de Hô Chi Minh-Ville. La zone concernée par le projet Saigon South est indiquée par le chiffre 2

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Propositions d’action Dans la plupart des cas, l’apprentissage du métier s’est fait de manière totalement autodidacte, l’apparition des activités piscicoles dans les exploitations étant relativement récente (7 ans en moyenne). Actuellement, le manque d’expérience ainsi généré est réduit par les programmes de développement décidés par le gouvernement, notamment à travers des stages de formation qui favorisent l’initiation aux techniques empruntées au système VAC. Il pourrait s’avérer utile que ces stages se transforment en véritables forums de discussion afin que chaque exploitant puisse faire profiter les autres de son expérience. Mais ces cours s’avérent utiles uniquement dans l’optique d’un développement et d’une amélioration des systèmes piscicoles en zone périurbaine. Et avant de chercher à améliorer les systèmes du point de vue économique, peut-être faudrait-il d’abord penser aux façons de préserver l’environnement immédiat, pour ne pas rendre inutiles toutes les connaissances acquises sur les techniques employées dans ces exploitations. De plus, étant donné le peu de connaissance concernant les risques sanitaires entraînés par la consommation de poissons issus de ces systèmes, même dans d’autres pays que le Viêt Nam, une étude approfondie de ces risques doit impérativement être menée dans la région de HCMV. L’amélioration des systèmes de production doit passer par une meilleure intégration des données sur l’environnement Pour l’instant, les choix concernant la gestion de l’eau ne s’appuient que sur la propre expérience et l’intuition des pisciculteurs, mais comme nous l’avons vu, les pollutions ne sont pas toutes sensibles de manière aussi directe que la vue ou l’odorat. Les pisciculteurs ne sont pas en mesure de connaître l’origine, la nature et l’importance des pollutions pouvant affecter ces eaux, et ils sont incapables de prévoir les variations de la qualité de l’eau qu’ils utilisent. Le développement d’une étude portant sur l’évolution du réseau hydrographique de HCMV et sur la qualité des eaux pourrait être d’une précieuse aide. A défaut de servir directement les éleveurs, les résultats permettraient, entre autres, de mieux comprendre l’influence du développement et de la progression de la ville sur ce réseau et sur la qualité de ses eaux. Par exemple, des relations pourraient être établies entre le comblement des surfaces piscicoles et la montée du niveau de l’eau dans certaines régions de Binh Chanh. De plus, une cartographie complète et remise à jour régulièrement de l’ensemble des industries à HCMV pourrait permettre de définir les zones sensibles à surveiller, où l’utilisation d’eaux usées en aquaculture peut s’avérer risquée à la fois pour le poisson et pour le futur consommateur. Dans ce cadre, et dans un souci de prévention des risques sanitaires, un effort de contrôle de la part des autorités locales quant à l’application et au bon respect des lois environnementales par les industriels de la région de Binh Chanh permettrait de réduire les risques liés aux éléments toxiques comme les métaux lourds. Ces études pourraient par ailleurs avoir comme objectif la détermination de l’importance du traitement des eaux usées de la ville par le biais des activités piscicoles, ainsi que le rôle des étangs dans la prévention des inondations. Les difficultés économiques amoindries par une collectivisation des moyens de production et une amélioration de la filière commerciale Les problèmes de hausse des prix des aliments, par exemple, pourraient être palliés par la diminution parallèle d’autres coûts et par de meilleurs résultats techniques, donc des meilleurs rendements. Bien que la mise en commun de certains moyens de production comme les pompes et les filets existe déjà, l’éventuelle création de groupements de producteurs aurait divers avantages. Tout d’abord, une meilleure utilisation de l’eau devrait passer par une gestion collective, car il est apparu au cours des observations de terrain que, très souvent, des étangs appartenant à différents

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propriétaires étaient connectés entre eux. Actuellement, chaque exploitant gère son étang sans trop se soucier des répercussions possibles dans les étangs avoisinants. Dans une optique de prévention des risques sanitaires, des étangs de stabulation, alimentés en eau de forage a priori exempte de tout pathogène, pourraient être aménagés et profiter à plusieurs piscicultures. Un contrôle régulier de la qualité des productions par un organisme indépendant pourrait alors être fait pour garantir la qualité des productions. En outre, une veille des marchés permettrait de mieux réguler les ventes de poissons. Cela impliquerait, entre autre, une mise en commun de l’information au niveau des intermédiaires. Au terme de l’assurance du bon fonctionnement des exploitations, de la qualité des productions et de la maîtrise des risques environnementaux, la mise en valeur des activités piscicoles en zone périurbaine à HCMV serait alors en droit de faire l’objet de campagnes d’information auprès des consommateurs. Des campagnes de ce type sont déjà en cours, notamment concernant l’intérêt nutritionnel des poissons (voir illustration ci-dessous). Informer les citadins sur les intérêts des étangs, dans les domaines du traitement de l’eau et de la production de protéines de haute valeur, ne pourra que servir la cause de ces systèmes.

« Le poisson et la santé », couverture de Thuoc & Suc Khoe (« Santé magazine») paru le 15 juillet 2001

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Tableau 23 : Bilans des points faibles des systèmes piscicoles en zone périurbaine à HCMV et propositions POINTS FAIBLES

PROPOSITIONS OBJECTIFS

EAU Salinité

Recherche d’espèces résistantes à la salinité comme le tilapia Outil de mesure de la salinité pour évaluer au mieux le taux de dilution avec l’eau de forage

Limiter la mortalité Accélérer la croissance Préserver les ressources en eau

Faible teneur en oxygène dissous

Elevage d’espèces à respiration aérienne comme certains poissons-chats

Pathogènes Augmenter les travaux de recherche pour l’identification des pathogènes Stabulation des poissons Contrôles rigoureux Alimenter partiellement les marchés en eau claire exempte de pathogènes pour le lavage des légumes et des animaux

Assurer la qualité des productions afin d’en améliorer l’image et d’augmenter les prix de vente

DEVELOPPEMENT URBAIN Pression foncière

Rechercher le quota minimum de surface piscicole à préserver Prospection de nouvelles zones d’implantation pour les activités piscicoles à proximité de la ville

Eviter les problèmes causés par la disparition des étangs piscicoles : inondations et absence d’épuration des eaux usées Assurer l’approvisionnement de la ville en poissons d’eau douce

Pollution Intensifier le contrôle des rejets industriels dans le milieu naturel

Limiter la mortalité des poissons et les risques pour les consommateurs

MANQUE DE SAVOIR-FAIRE TECHNIQUE Gestion de l’élevage Rationnaliser les pratiques

(empoissonnement, alimentation) grâce aux cours dispensés Développer les systèmes d’intégration agropiscicole

Optimiser les coûts Améliorer les rendements Améliorer et assurer les revenus

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Dans le cadre d’une gestion rationnelle des ressources renouvelables, l’écosystème aquatique est non seulement intégré

à l’agrosystème, mais il en devient un élément central

Figure 47 : L’agriculture des eaux est inséparable de l’agriculture en général (R. Billard, 1980)

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ANNEXES

Annexe 1 : Questionnaire Annexe 2 : La limite de salinité à HCMV Annexe 3 : Prix observés sur les marchés et chez les grossistes Annexe 4 : Aliments utilisés en pisciculture : prix moyens et espèces concernées Annexe 5 : Résultats des enquêtes sur la consommation Annexe 6 : Cartes d’identité des espèces piscicoles élevées en étang Annexe 7 : Les déchets urbains au Viêt Nam Annexe 8 : Résultats des enquêtes chez les pisciculteurs

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Annexe 1 : Questionnaire

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Annexe 2 : La limite de salinité à HCMV

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Annexe 3 : Prix observés sur les marchés et chez les grossistes

Prix d’achat et de vente des poissons d’étang

Achat de juvéniles*

Vente directe (VND/kg)

Prix au kilo Prix au poisson Ca Tra 800-1.400 10-20.000 Ca Tre 40.000 500-1.000 18-30.000 Ca Tram Co 35.000 Ca Ro Phi 20.000 7-14.000 Ca Loc 800 12-30.000 Ca Mui 20-25.000 Ca Me Trang 30.000 Ca Me Hoa 30.000 Ca Tai Tuong 600 25.000 Ca Chep 30.000 20-25.000 Ca Mrigan 25.000 Ca Me Vinh 35.000 Ca ro dong (anabase)

40-45.000

* d’après Tu Hong et Thanh Nhan

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Prix divers affichés sur un marché de My Tho (delta du Mékong) le 4 juillet 2001

tom : crevettes, ca thu : thon, muc : calmar, ga : poulet, vit : canard

Prix divers affichés sur un marché de HCMV

Heo : porc, Bo : bœuf, ca song : poissons de rivière, ca bien : poissons marins.

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Annexe 4 : Aliments utilisés en pisciculture : prix moyens et espèces concernées1 T : tilapia ; cc : carpe commune ; ch : carpe herbivore ; gl : gourami lippu ; gg : gourami géant ; sb : silver barb ; ca : carpe argentée Type d’aliment Origine et prix espèces Son de riz Marché – 1500 d/kg toutes Légumes Marché – 500 d/kg T, ch, cc, gl, ca tre, ca Lentilles d’eau Marché ou ferme T, ch, cc, ca Hypomée Marché ou ferme T, ch, gl, cc Agara Marché Ca tre Tripes de canardb Marché – entre 1000 et 1500 d/kg Ca tra ca tre Poissons marinsb Marché – entre 400 et 800 d/kg Ca tre ca tra ca loc gg Herbe Coupée par le fermier ch Résidus nouilles instantanées

Usine de nouilles instantanées proche de la ferme

T, ch, cc, gl

Coco Ferme T, ch, cc, gg, sb Riz Marché – 1000 d/kg T, ch, cc, ca a mélange agar + légumes + son de riz bmélangé(e)s à du son de riz pour former des boulettes

1 Résultats des enquêtes sur plusieurs marchés de la ville

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Annexe 5 : Résultats des enquêtes sur la consommation 8 personnes ont été interrogées sur un marché de HCMV, en majorité des femmes car ce sont en général elles qui font les courses. Parmi ces personnes, deux étaient étudiantes, une était aide au marché et les autres étaient vendeurs ou vendeuses de fruits, de riz, de boissons ou de nourriture fraîche prête à consommer. Le questionnaire comportait la série de questions suivantes : 1 Sexe 2 Age 3 Connaissiez-vous l’existence d’étangs piscicoles à HCMV ? 4 Saviez-vous que des poissons élevés dans ces systèmes étaient vendus sur ce marché ? 5 Avez-vous l’habitude de demander l’origine des poissons avant de les acheter ? 6 Si oui, pourquoi ?a Les poissons élevée en eau usées ont mauvais goût b A cause des risques sanitaires c Autres raisons 7 Etes-vous capable de reconnaître des poissons élevés en étangs ? 8 Si oui, comment ? a Couleur b Odeur c Autres raisons 9 Quels sont les facteurs importants motivant l’acte d’achat d’un poisson ?a Prix b Fraîcheur c Espèces d Autres raisons 10 Comment votre famille prépare-t-elle le poisson ?a Frits b A la vapeur c Sautés à la poêle 11 Votre famille prépare-t-elle des plats à base de poissons crus ? 12 Préférez-vous la viande au poisson ? 13 Pourquoi ?a Goût b Odeur c Arêtes d Autres raisons Les résultats obtenus sont détaillés dans le tableau ci-dessous. Tableau 24 : résultats des enquêtes de consommation Question 1 2 3 4 5 6 7 8 1 f f f m f f f m 2 60 37 16 35 16 16 35 48 3 o n n n n n o n 4 o n n n n n o n 5 n - - - o n n - 6 - - - - c - a - 7 o o o o n n o o 8 - - a a - - a - 9 a, c c c c c d c a, c 10 b, c b, c b, c b, c a, b, c c c b, c 11 n n n n n n n n 12 n - n o - o n o 13 a b b, c d a

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Annexe 6 : Cartes d’identité des espèces piscicoles élevées en étang Rq : les poissons sont dits filtreurs (PF) lorsqu’ils sont capables de filtrer des particules fines (détritus chargés de bactéries, phytoplancton, zooplancton, etc.)

CA RO PHI Oreochromis niloticus

* Oreochromis mossambicus Cichlidae

tilapia hybride

hybrid tilapia

Milieu : colonne et fond Régime : omnivore filtreur/brouteur Phytoplancton, détritus (MES), épiphyton, végétaux aquatiques, lisier organique

CA CHEP Cyprinus carpio Cyprinidae

carpe commune common carp

Milieu : fond ( très tolérants vis-à-vis de la turbidité) Régime : omnivore filtreur de zooplancton organismes benthiques, détritus, fèces

CA TRAM CO Cténopharyngodon idellus Cyprinidae

carpe herbivore

grass carp

Milieu : surface et colonne Régime : herbivore Plancton et invertébrés jusqu’à 30 mm, puis devient herbivore à partir de 150 mm Macrophytes et végétaux terrestres (légumes, herbe)

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CA MUI CA HUONG

Helostoma temmincki Helostomatidae

gourami lippu kissing gouramy

Milieu : colonne Régime : détritivore filtreur

CA ME TRANG

Hypophtalmichthys molitrix Cyprinidae

carpe argentée

silver carp

Milieu : surface et colonne Régime : macrophytophage et filtreur de phytoplancton Gros phytoplancton (cyanobactéries) et petit zooplancton, macrophytophage, végétaux terrestres, grande aptitude à éliminer les excès d’algues filamenteuses

CA TRE LAI Clarias gariepinus * Clarias

macrocephalus Clariidae

poisson-chat hybride hybrid catfish Observations : Vendu frais sur les marchés où il peut survivre à l'air libre très longtemps s'il est maintenu humide = potentiel important pour l'aquaculture. C’est d’ailleurs un des poissons d'eau douce les plus commercialisé. Capable de se déplacer sur la terre en se tortillant.

Milieu : Fond Régime : organismes benthiques, détritus, fèces Petits poissons, mollusques, détritus

CA TRA Pangasius hypophthalmus Pangasiidae

poisson-chat catfish Observations : Jusqu'à 120 cm de long. Peut gagner 1,5 kg/an. Aujourd'hui largement introduit en aquaculture

Milieu : Fond Régime : organismes benthiques, détritus, fèces Petits poissons, mollusques, crustacés, débris végétaux, larves d’insectes, détritus

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CA TAI TUONG Osphronemus gourami Osphronemidae

gourami géant

giant gouramy

Milieu : colonne Régime : filtreur détritivore

CA ME HOA

Aristichtys nobilis Cyprinidae

carpe à grosse tête, carpe marbrée

bighead carp

Milieu : colonne Régime : filtreur de zooplancton

CA ME VINH Puntius gonionotus Cyprinidae

silver barb

Milieu : colonne et surface Régime : détritivore

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CA LOC BONG,CA LOC DEN

Channa striata, Channa micropeltes

snakehead fish

CA MRIGAN Cirrhinus molitorella Cyprinidae

Carpe de vase

Milieu : fond Régime : détritivore

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Tableau 25 : Caractéristiques biologiques des poissons d’étang

Nom T° (°C) PH Oxygène dissous (mg/L)

Salinité Taille

Cyprinus carpio Carpe commune Ca chép

20-40 5,5-8,5 0,2-0,8 1 an : 0,5 à 1 kg

Tilapia hybride Ca ro phi

>10 4-11 0,1 32 1 an : 0,6 à 0,8 kg

Helostoma temminckii Gourami lippu Ca mui

Osphronemus gourami Gourami géant Ca Tai Tuong

3 ans : 2,5 kg

Ctenopharyngodon idellus (a) Carpe herbivore Ca tram co

5-9 0,2-0,6 7 à 11 1 an : 1 kg 2 ans : 2 à 9 kg!

Hypophthalmichthys molitrix Carpe argentée Ca me trang

10-30 >5,5 0,3-1,1 1 an : 1,5 kg 2 ans : 1,9 kg

Aristichthys nobilis Carpe marbrée ou à grosse tête Ca me Hoa

1 an : 2,8 kg 2 ans : 5,2 kg

Poisson chat hybride clarias Ca tre lai

7 à 39,5 3,5 à 10,5

15 1 mois : 100 à 150 g

Pangasius hypophthalmus Poisson chat du Mékong Ca tra

>20 6,5-7 8 à 10 1 an : 1 kg 2 ans : 3 à 3,5 kg

Cirrhinus molitorella Carpe de vase Ca troi an do

5,5 à 8,5 5 1 an : 0,5 à 1 kg 2 ans : 1 à 2 kg

Puntius gonionotus Ca Me Vinh

13 à 33 5,5 à 9 2 7

Source : manuel d’élevage des poissons d’eau douce, KS. Ng. Khoat, 2001

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Annexe 7 : Les déchets urbains au Viêt Nam Tableau 26 : Quantité totale de déchets des deux principales villes vietnamiennes en 1991. Villes Population (millions

d’habitants) Quantité de déchets recueillis par jour (m3)

Pourcentage de déchets traités

Hanoi intra-muros 1,1 850 45 Ho Chi Minh-ville 3,3 2600 50

Source : Ressources biologiques et environnement au Viêt Nam, 1995 Les déchets dans les villes des pays étrangers comptent souvent des bouteilles, des boîtes vides en plastique et en métal. En revanche, au Viêt Nam, ces produits occupent un bas pourcentage car ils sont recueillis et utilisés comme matériaux à récupération par les artisans. Le traitement des déchets est encore limité au Viêt Nam. A HCMV, il n’y a qu’une usine de traitement de ce genre montée par le Danemark avant le 30 avril 1975. Sa capacité est de 250 à 300 tonnes par jour, mais ses deux caves de fermentation biochimique sont détériorées. Tableau 27 : Composantes des déchets à Hanoi

Légumes et fruits, aliments détériorés ou éliminés après consommation, cadavres d’animaux

50,27

Parpiers 2,72 Plantes, branches et feuilles, baguettes 6,27 Matières plastiques, produits en cuir ou en caoutchouc 0,71 Coquilles 1,06 Verre 0,31 Morceaux de brique, terre, pierre, gravier 7,43 Métaux 1,02 Débris inférieurs à 10 mm non classifiés 30,21 PH des déchets 6,7-7,0 humidité 67

Source : ibid.

Photo 51 : Décharge sauvage sur le bord d’une route à Tan Nhut

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Annexe 8 : Résultats des enquêtes chez les pisciculteurs n vill age activ nbesp eau nbet surf prof vid tpsvid remp chaux emp taille recolt alim saison saisan culture anim

1 al 8 p 6 nl 3 5000 1,5 1 7 7 2 400 5 1000 0 6 2 o o

2 al 15 p 4 nl 1 1800 1 1 7 7 4,4 100 5 1000 0 12 1 n o

3 al 2 p 4 nl 2 2000 1 1 3 7 130 600 5 1000 23 6 2 o o

3 al 2 m 1 nl 1 1000 2 1 3 7 130 300 5 1700 12 4 3 o o

4 al 6 p 3 nl 1 2000 1 2 3 7 0 25 5 1000 20 6 2 o o

5 pp 10 p 4 oc 1 4000 1 2 3 7 0 30 2 1000 0 6 2 o n

6 pp n 1 oc

7 pp 6 p 4 oc 3 5000 1 2 7 7 0 159 5 1430 6 2 o n

8 pp 16 p 4 oc 4 1200 1 2 7 7 0 30 5 1000 130 6 2 o n

8 pp 16 n 1 oc

9 pp 5 p 4 oc 1 10000 1 2 7 7 0 135 5 1900 0 6 2 o o

10 pp n 1 oc

11 pp n 1 oc

12 tk 10 p 3 ct 2 3100 1,2 1 23 7 0 112 20 3500 0 8 1 n o

13 tk 10 p 5 ct 7 39000 0,8 1 7 1 100 800 5 13000 30 6 2 o o

13 tk 10 n 1 ct

14 tk 10 p 8 ct 8 10000 1 1 7 7 0 343,5 5 8000 0 12 1 n o

15 al 2 m 1 nl 4 10000 1 0 0 0,25 0 40 5 1000 0 12 1 o n

16 al 3 p 2 nl 4 2800 1,5 1 3 7 14,5 80 5 800 2 12 1 o o

17 dp 3 m 1 cg 2 2000 2 3 3 7 0 70 45 2000 100 4 3 n o

18 dp 2 m 1 cg 1 4000 2 1 3 7 0 55 10 2500 10 10 1 o n

19 dp 1 p 2 cg 1 100 2,3 2 3 7 100 10 3,3 140 10 6 2 n n

20 dp 15 p 5 cg 5 2500 1,8 1 3 7 0 80 5 1450 10 12 1 o n

21 tn 2 m 1 Kc 2 1000 1,1 1 7 7 0 20 50 200 2 12 1 n o

24 tn 6 p 5 Kc 5 5000 1 1 1 7 0 34 3,3 1500 0 12 1 o o

25 tn 4 p 5 kc 1 600 0,5 1 1 7 0 38 3,3 900 10 12 1 n n

26 bh 10 m 1 bl 1 1000 1,5 1 2 7 13,5 200 50 4000 100 9 1,3 n n

26 bh 10 m 1 bl 1 3200 1,5 2 2 7 13,5 100 20 500 0 6 2 n n

27 bh 10 m 1 bl 1 300 1,8 2 3 7 170 30 5 1200 70 6 2 n n

28 bh 5 p 3 bl 3 12000 1,2 2 3 7 0 120 2,5 36000 0 6 2 n n

28 bh 5 m 1 bl 2 3000 1,2 3 3 7 70 320 5 12000 500 4 3 n n

29 bh 4 m 2 bl 1 1250 3,5 1,7 3 7 320 320 50 20000 150 7 1,7 n n

30 bh 12 p 6 bl 3 4000 1,8 1 3 7 10 240 15 2550 15 4 3 n n

31 bh 15 p 3 bl 3 5000 1 1 3 7 2 290 4 1200 20 6 2 n o

32 bh 20 p 4 bl 3 9000 2 1 3 7 0 130 4 1500 0,5 12 1 o n

33 bh 3 m 1 bl 1 2000 1,8 1 3 7 0 100 2 7000 150 6 2 n n

34 pp n 1 bl

35 tn 4 p 2 kc 1 1000 1 1 3 1 10 20 5 150 5 12 1 n n

36 tn 10 p 5 kc 1 1500 1,5 1 3 7 0 21 3,3 500 5 12 1 n o

37 hl 11 p 4 cg 4 18000 1,3 2 7 7 0 600 3,3 3500 0 6 2 n o

41 hl 3 p 5 cg 7 20000 1,6 1 60 7 0 140 5 3000 0 8 1 o n

42 hl 7 p 4 cg 1 4000 1 1 120 7 0 40 5 600 6 8 1 n n

42 hl 7 p 4 cg 1 2000 1,5 1 120 7 0 20 5 400 3 8 1 o n

43 al 10 p 4 nl 1 6000 0,8 1 3 7 0 235 5 5000 0 7 1 n o

44 bh 10 p 5 bl 1 6000 0,6 0,7 3 1,5 0 272 5 770 40 6 12 o o

45 bh n 1 bl

46 pp n 1 bl

47 dp 2 m 1 cg 1 1000 1,3 0 0 7 0 10 45 400 25 6 2 n n

48 bh 3 p 2 bl 2 2000 0,5 1 1 7 0 8 3,3 200 0 12 1 n o

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n vill age activ nbesp eau nbet surf prof vid tpsvid remp chaux emp taille recolt alim saison saisan culture anim

49 pp n 1 bl

50 dp 3 p 3 cg 2 300 0,5 1 3 7 70 48 3,3 800 0 12 1 o o

51 pp 4 p 4 bl 1 1500 1,5 1,5 3 7 0 75 10 900 0 8 1,5 o n

51 pp 4 m 1 bl 1 500 2 1,5 3 7 0 125 50 2000 88 8 1,5 o n

52 pp 10 p 3 bl 1 7000 1 1 3 1 0 70 5 700 0,6 6 2 o n Vill = village (Phong Phu : pp, Da Phuoc : dp, Hung Long : hl, Binh Hung : bh, Tan Kien : tk, An Lac : al, Tan Nhut : tn) Age = age de l’activité piscicole Activ = activité piscicole pratiquée dans l’étang considéré (m : monoculture, p : polyculture, n : nurserie de tilapia) Nbesp = nombre d’espèces en polyculture Eau = réseau principal d’alimentation en eau dans l’étang (Ba Lao : bl, Can Guioc : cg, Ong Chon : oc, Kenh C : kc, Nuoc Len : nl, Cai Trung : ct) (remarque : Ba Lao = Ong Chon) Nbet = nombre d’étangs Surf = surface totale en m² Prof = profondeur en m Vid = nombre de vidanges (mise en assec totale) de l’étang par an Tpsvid = nombre de jours d’attente après remplissage et avant le stockage des poissons Remp = fréquence de remplissage de l’étang, en nombre de jours par semaine Chaux = quantité de chaux employée en g/m² Emp = densité d’empoissonnement en poissons/m² Taille = taille des juvéniles à l’empoissonnement en g Recolt = quantité récoltée en kg Alim = quantité d’aliment artificiel distribué pendant une saison d’élevage en kg Saison = durée d’une saison d’élevage en mois Saisan = nombre de saison effective par an Culture = présence de cultures végétales dans ou au bord de l’étang Anim = présence significative d’élevage d’animaux terrestres sur ou au bord de l’étang

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