La physique pour mieux comprendre le...

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I La physique pour mieux comprendre le monde

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L a p h y s i q u e p o u r m i e u x c o m p r e n d r e l e m o n d e

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Depuis la torche de

l’époque des cavernes

jusqu’au laser en passant

par la lampe à incandescence, la maîtrise

de la lumière a été constamment une source de

progrès pour l’humanité. Pourtant, il a fallu des

siècles aux plus grands esprits comme Newton,

Fresnel ou Einstein pour bien comprendre la

nature réelle, étonnamment complexe, de la

lumière. Les physiciens savent aujourd’hui

utiliser ses multiples propriétés pour modeler

la matière et l’adapter à leurs besoins. De

minuscules diodes lasers lisent nos disques

compacts, des fibres optiques transmettent

des informations à des kilomètres de

distance, des lasers mesurent la pollution

dans l’atmosphère, la lumière du Soleil nous

sert à chauffer nos habitations…

Nos progrès dans la compréhension de la

matière et de ses multiples états n’ont pas

été moins impressionnants, depuis l’époque

des forgerons de Tolède ou de Bernard

Palissy et ses émaux. On découvre sans

cesse de nouveaux matériaux aux propriétés

extraordinaires, comme des cristaux liquides

pour nos écrans de télévision ou des films

minces magnétiques pour les mémoires des

ordinateurs. Les jeux de la lumière avec la

matière nous introduisent aujourd’hui dans

le monde fascinant des nanotechnologies où

l’on crée des systèmes à de très petites

Introductionéchelles, voisines de la taille des atomes,

susceptibles de bouleverser une nouvelle fois

notre vie quotidienne dans un futur proche.

Sa nature est restée longtemps contro-versée. Elle fut considérée comme uneonde à la fin du XVIIIe siècle par AugustinFresnel (1788-1827) (image 1), qui putainsi interpréter les expériencesd’interférences et de diffraction.

Albert Einstein (image 2) montra en 1905que certaines observations encore inex-pliquées, tel l’effet photoélectrique,trouvaient une interprétation simple sil’on considérait que la lumière étaitconstituée de corpuscules « quantad’énergie », les photons. Ce double aspect de la lumière s’intégraalors parfaitement avec la mécanique

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La Lumière

1/ Augustin Fresnel.2/ Albert Einstein.

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quantique. Dans cette théorie, mise aupoint au début du XXe siècle, les notionsd'onde et de particule, qui sont séparéesen mécanique classique, deviennentdeux facettes d'un même phénomène.Selon le contexte expérimental, lalumière peut ainsi se comporter commedes particules ou comme une onde enproduisant notamment des interférences(image 3).

LE L.A.S.E.R. (LIGHT AMPLIFICATION BYSTIMULATED EMISSION OF RADIATION)Les atomes ou molécules sont excités parun apport d’énergie extérieure (électrique,lumineuse…) (image 4). L’énergie stockéedans les centres luminescents est émisepar stimulation par un photon de mêmeénergie (transistor optique). Il en résulteune amplification du nombre de photonsproduits par le milieu. L’effet laser estalors créé par des allers et retours de lalumière émise dans la cavité (fermée pardes miroirs). Au-delà d’une certainepuissance accumulée dans la cavité, lefaisceau laser s’échappe du côté dumiroir le moins réfléchissant (image 5).

3/ Expérience réalisée à l’École Normale Supérieure de Cachan en 2005 montrant la construction d’une figure d’inter-férences photon par photon (franges en fausse couleur). En effet, la source de lumière utilisée est spécialement conçue pourproduire les photons un par un à la demande. Le « biprisme de Fresnel » sépare le faisceau lumineux incident en deux parties,l’une est déviée vers le haut tandis que l’autre l’est vers le bas. Là où les deux parties se recouvrent, il apparaît des frangesclaires et sombres.

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4/ L’apport d’énergie extérieure crée une plus grande population dans le niveau supérieur que dans le niveau inférieur(condition d’inversion de population). Un photon d’énergie et de direction données stimule la retombée de la populationvers le niveau inférieur en émettant un photon identique au premier (amplification).5/ Le milieu est constitué d’atomes ou de molécules dans un gaz, un liquide ou un solide. À chaque passage dufaisceau dans le milieu, il est amplifié par émission stimulée.6/ Caractéristiques comparées montrant l’évolution des différentes générations de systèmes de stockage optique (à partirde données Philips Research). l est la longueur d’onde d’émission de la diode laser et O.N. est l’ouverture numérique del’optique de focalisation.7/ Illustration des effets de nettoyage de statuaires par ablation laser (THALES Laser).

LLeess aapppplliiccaattiioonnss mmuullttiipplleess ddaannss llee qquuoottiiddiieennLe lecteur de disque numérique : CD, DVD,HDVD. La surface métallique des disquesest gravée de très petites dépressions.La variation de l’intensité de réflexionentre les trous et la surface suffit pourlire l’information contenue. Plus le trouest petit, plus la capacité de stockageest grande. C’est pourquoi il fautconcentrer très fortement la lumièreet aussi utiliser des lasers de courtelongueur d’onde, dans le bleu plutôtque dans le rouge (image 6).Le faisceau laser est très puissant. Il estutilisé dans l’industrie pour la découpe etle soudage et aussi pour le nettoyage desœuvres d’art. I l a alors l ’avantaged’éliminer uniquement le dépôt dû à l’âgeet à la pollution (image 7).

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Miroir semi-transparentMiroir

Source d’énergie

Faisceau laser

Milieu laser

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Une autre application possible estl’holographie ou la photo en 3 dimensions(images 8 et 9).

Détection de la pollution de l’air : le LidarLe Lidar est un radar utilisant desondes optiques (laser) qui permetd’obtenir des cartographies de polluantsatmosphériques à haute sensibilité et surdes distances de plusieurs kilomètres(image 10). Il exploite le principe de la

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rétrodiffusion inélastique de la lumièrelaser, caractéristique des espèces chimiquesrencontrées dans l’atmosphère. L’analyse del’ozone et de ses précurseurs a permisrécemment des avancées de premier plandans la compréhension des phénomènesd’épisodes de pollution d’été. Pour étendreles possibilités des Lidars et détecter àdistance tous les polluants simultanément,un programme franco-a l lemand,Téramobile, développe de nouvellesméthodes de mesure. Elles sont baséessur l’utilisation d’impulsions laserultra-brèves (100 fs = 10-13 s) et ultra-intenses (de l'ordre du terawatt, 1012 W).Ce type de laser pourrait égalementguider la foudre et servir de paratonnerrelaser.

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8/ Hologramme : La Cité des Sciences de La Villette. Crédit : Laserscene9/ Schéma de principe d’un enregistrement d’hologramme : les deux faisceaux qui éclairent l’objet interfèrent,l’image est enregistrée sur la plaque photo. Crédit : Laserscene.10/ Le L.I.D.A.R. LIght Detection And Ranging.

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11/ Photographie du site de l’Observatoire de Côte d’Azur et du dôme accueillant le télémètre laser mesurant ladistance Terre-Lune (laser Nd:YAG doublé en fréquence).12/ Radar optique. Crédit : SFIM.13/ Propagation monomode (rouge) et multimode (vert) dans une fibre optique. Crédit : CNRS-LPCML.

Le laser comme puissant télémètreLe laser peut être utilisé également pourmesurer la distance Terre-Lune avec unetrès grande précision (image 11) maisaussi pour contrôler votre vitesse à l’aided’un radar optique (image 12).

LA FIBRE OPTIQUE : GUIDE DE LUMIÈREPourquoi un fil aussi fin qu’un cheveupeut-il transporter de la lumière ? Dans unmilieu transparent, comme le verre parexemple, la lumière se propage moins viteque dans l’air parce que son indice deréfraction est supérieur à celui de l’air.Sous incidence oblique, un rayonlumineux pénétrant dans un milieu plusréfringent que l’air est dévié de satrajectoire initiale et, pour un angled’incidence maximum, il sera réfléchià l’interface air/verre. Des réflexionssuccessives expliquent la propagationde la lumière dans une fibre optiquede verre (image 13).

Un verre de vitre ordinaire chauffé àhaute température permet de « couler »une fibre. La lumière sera bien guidéemais aucune lumière ne sortira du boutde la fibre. Ce sont les techniques dedépôt de matière très pure qui ont permisde fabriquer des millions de kilomètres

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de fibres optiques en verre de silice detrès grande qualité. Aujourd’hui, 1 %environ de la lumière injectée dans unefibre est facilement détectable au boutde 100 km !

LLaa ffiibbrree ooppttiiqquuee :: uunn ttuuyyaauu mmiinniiaattuurree ppoouurr11 mmiilllliioonn ddee ccoommmmuunniiccaattiioonnss ssiimmuullttaannééeessAllo Bob, Marie speaking … un temps mort= une liaison par satellite ; une réponseinstantanée de Bob = une liaison sous-marine par fibre optique ! Lorsque la voixou le signal électrique de l’ordinateur estcodé, ce signal modulé (émetteur)alimente une source de lumière : unediode laser qui permet de coupler lalumière dans la fibre optique. Suivant ladistance à parcourir, le signal optiquepeut être soit détecté directement soitamplifié une ou plusieurs fois. Arrivé àdestination, le signal optique est détectépar le module inverse de l’émetteur.

Pour traverser les océans (« back bone »),le signal optique a besoin d’être amplifié(par des répéteurs) car son intensitédevient trop faible pour être exploitée.Depuis 1995, une nouvelle génération derépéteur tout optique est entrée enfonctionnement. Son principe est basésur le concept de l’émission stimuléeintroduite par Einstein. Cet amplificateurest constitué d’une fibre optique dopée(contenant une impureté spécifique :l’ion erbium). Un fort apport d’énergie àla fibre dopée (pompage optique parune diode laser) crée la condition destimulation de l’émission de l’impuretépar le signal optique. Il en résulte laproduction d’une augmentation impres-sionnante de l’intensité du signaloptique d’un facteur de 1000 à 10 000.Une augmentation considérable de lacapacité des transmissions est réaliséeen couplant plusieurs longueurs d’onde

voisines dans la fibre : il s’agit dumultiplexage en longueur d’onde(4, 8, ..., 32). Plus extraordinaire, lesamplificateurs à fibres optiquespeuvent amplifier également toutesces longueurs d’onde… d’oùl’explosion d’Internet (image 14) !

14 14/ Câbles optiques sous-marins. Crédit : Alcatel.

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L’âge de pierre, l’âge dubronze, l’âge du fer, … cesnoms consacrent le rôle

crucial joué par les matériaux dansl’histoire de l’Humanité. La compréhensionscientifique de la matière qui nousentoure* est pourtant assez récente.Pendant très longtemps, les artisans sesont fondés sur des savoir-faire empiriqueset procédaient par essais et erreurs –Bernard Palissy a consacré 20 ans de sa vieet risqué la misère pour découvrir le secretdes émaux ! Cette situation a totalement changé, etles sciences de la Matière sont maintenantau cœur de notre vie courante, des télé-phones portables aux colles à hautesperformances. L’augmentation constantede la puissance des ordinateurs et labaisse de leur prix ont ainsi été renduespossibles par les progrès en physique eten chimie du silicium, le matériau desmicro-processeurs et des mémoiresvives. Les historiens futurs pourraientbien baptiser notre époque « l’âge dusilicium » ! Et bientôt de nouveauxcomposants encore plus minuscules,

tels les nanotubes de carbone, formésd’un ou quelques feuillets atomiques,risquent fort de révolutionner ce domaine(images 15 et 16).

15/ Contact entre deux nanotubes de carbone et des électrodes d’or. Ces nanotubes peuvent contribuer à miniaturiser lescomposants électroniques du futur. Crédit : Groupe de physique mésoscopique, L. Pierre-Aigrain (CNRS-ENS).16/ Croissance de nanotubes par déposition de vapeur sur un filament chaud. Crédit : A-M. Bonnot (CNRS-LEPES).

La Matière

* Composée d’électrons, de protons et de neutrons, paropposition à la « matière noire » qui intrigue les astro-physiciens, voir la plaquette « L’Univers ».

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LA MATIÈRE DANS TOUS SES ÉTATSLe mot « matière » évoque immédiatementles trois états usuels : solide, liquide et gaz.Qu’est-ce qui les distingue ? La réponseparaît simple : un liquide coule, pas unsolide, et un gaz occupe tout l’espacedisponible. La réalité est plus complexe : lesable sec se met à couler au-dessus d’uncertain angle d’inclinaison, et les propriétésd’un tas de sable sont si différentes decelles d’un solide qu’on parle d’« étatgranulaire ». Il existe aussi des « cristauxliquides », où les molécules ne formentpas un réseau régulier, comme dans uncristal usuel, mais gardent quand mêmeun ordre moyen à longue distance dansleurs orientations. Les cristaux liquidesont des propriétés optiques remarquables,et ils sont utilisés dans les écrans plats LCDpour ordinateurs et téléviseurs (image 17). Il existe en fait de nombreux états de lamatière, caractérisés par des propriétésspécifiques. Le fer, par exemple, estmagnétique à la température ambiante,mais cesse de l’être si on le chauffe au-dessus de 770 °C. L’étude des différentesformes de magnétisme constitue undomaine très actif, et les physicienscréent des composés de plus en plus

élaborés. Albert Fert et son équipe àl’université d’Orsay ont ainsi réussi àfabriquer en 1988 des multi couches(des « millefeuilles ») de fer et dechrome, dont la résistance électriquevarie énormément en présence d’unchamp magnétique. Ce phénomène de« magnéto-résistance géante » estmaintenant exploité dans les mini-disquesdurs de baladeurs comme l’iPod.Certains états de la matière n’apparaissentque dans des conditions très éloignées denotre environnement usuel. La Terrepossède un noyau de fer magnétique,sous haute température et pression,mais est-il liquide ou solide ? * Et commentexpliquer que Jupiter, qui ne contient pasde fer ni d’autres métaux, possède elle

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17/ Défaut d’orientation de type « Conique focale » dans un cristal liquide. Crédit : M. Brunet (LCVN, CNRS-Université Montpellier 2).

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* Voir la plaquette « La Terre et son environnement » pourla réponse.

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même, et aussi les tubes néons, les écransplasma pour téléviseurs haut de gamme.L’application majeure espérée, à longterme, devrait être la production d’énergiepar fusion contrôlée : le réacteur ITER quisera construit à Cadarache (Bouches-du-Rhône) permettra d’étudier commentcontrôler le plasma extrêmement chaud(plus de 100 millions de °C) assezlongtemps pour obtenir la fusion entreles noyaux de deutérium et de tritium.Une application à plus court terme pourraitconcerner l’environnement et le contrôlede la pollution, grâce aux « torches àplasma » qui permettent de décomposerla plupart des déchets à températureélevée (30 000 °C), avec un minimum denuisances (image 18).

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aussi un champ magnétique ? Les plané-tologues pensent que son centre con-tient de l’hydrogène métallique liquide, àune température de 11 000 °C et unepression de 4 millions d’atmosphères.L’existence de cet état avait été préditepar Wigner dès 1935, mais il n’a pasencore été possible de le produire enlaboratoire, c’est le grand défi pour lesspécialistes des très hautes pressions ! L’hydrogène métallique est un exemplede l’état plasma : les électrons n’y sontplus liés aux noyaux, comme dansl’atome H ou dans l’hydrogène liquidemoléculaire (celui qui sert de carburantaux fusées spatiales), mais ils se déplacentà peu près librement. D’autres exemplesde plasmas sont plus familiers – les éclairsd’orage, les aurores boréales, le Soleil lui-

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18/ Plasma-Torch-IPP. Torche à plasma de 150 kW.Crédit : Institut de physique des plasmas (Prague) et Université de Gand.

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CCoommbbiieenn dd’’éélléémmeennttss ??Les penseurs grecs se posaient déjà desquestions sur la nature de la matière.Leucippe et Démocrite soutenaient qu’elleest composée de particules minuscules,les atomes, éternels et se mouvant dans levide, mais différents par la taille et laforme. Pour Empédocle, suivi par Aristote,il existait quatre éléments fondamentaux :la Terre, l’Eau, l’Air et le Feu, dont lesproportions expliquaient les différencesentre les corps (il faisait aussi appel à deux« principes », l’Amour et la Discorde, àl’origine de l’attraction ou de la répulsionentre les quatre éléments ---- l’Amour n’étaitdonc pas le « 5e élément » !). Socrate, lui,avait jugé ces discussions tropspéculatives et s’en était désintéressé. C’est Démocrite qui était le plus près de laréalité, et les atomes existent bien, mêmes’il a fallu attendre 1911 et les expériencesde Jean Perrin sur le mouvement brownien,confirmant les calculs d’Einstein, pour enavoir la preuve indubitable. Plus de110 éléments sont maintenant répertoriés,les derniers découverts n’existent pas àl’état naturel car ils sont radioactifs et sedésintègrent très rapidement. Les quatreéléments d’Empédocle, eux, correspondentplutôt aux états usuels – solide, liquide,gaz – plus l’état plasma pour le feu.

UTILISER LA MATIÈRE : LA SAGADES SUPRACONDUCTEURSRecord du monde battu ! En décembre 2003,le train expérimental japonais MLX01 aatteint 581 km/h. Ce « SuperconductingMaglev Vehicle » « vole » quelquescentimètres au-dessus de sa voie, grâce àl’effet de lévitation créé par des électro-aimants en niobium-titane. Cet alliage estutilisé car sa résistance électriques’annule à très basse température, ce quipermet d’obtenir des champs magnétiquestrès intenses. C ’ e s t u n p h y s i c i e n h o l l a n d a i s ,Kammerlingh Onnes, qui a découvert cephénomène de supraconductivité en 1911,dans le mercure en dessous de 4,2 °K, maisl’explication n’a été donnée qu’en 1957, enfaisant appel à des notions avancées demécanique quantique. Malgré un groseffort de recherche pendant les années1960, les débouchés commerciaux selimitaient à des applications spécialisées,comme les aimants pour les grandsaccélérateurs de particules, ou récemmentl’imagerie médicale (IRM). Et puis, en1986, à la surprise générale, deuxchercheurs de Zürich ont découvert unecéramique, LaBaCuO, supraconductricejusqu’à une température critique de 30 °K.Très vite, d’autres composés similaires

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furent obtenus, et cette découverte a valuà ses auteurs le prix Nobel en 1987(images 19 et 20).

Le succès commercial d’applications àgrande échelle comme les trains dépendrabeaucoup de la capacité de fabriquer cesmatériaux en grande quantité à un coûtacceptable. Il se sera passé près d’unsiècle entre la découverte initiale et lesretombées dans la vie quotidienne ! Cette histoire à rebondissements montreque la maîtrise des matériaux reste unart autant qu’une science, bien que lesphysiciens puissent prédire, danscertaines limites, les propriétés decomposés qui n’ont encore jamais étéfabriqués. Des surprises majeurescomme celle des céramiques supra-conductrices continuent de se produire,c’est ce qui rend la recherche dans cedomaine excitante !

VOIR LES ATOMESLes savants de l’Antiquité n’avaient aucunmoyen d’observer la matière au niveaumicroscopique pour tester leurs hypothèsessur la matière, et du coup leurs discussionsrestaient stériles. C’est l’invention dumicroscope électronique, dans lesannées 1930, qui a permis d’atteindrel’échelle du nanomètre (milliardième demètre), proche des tailles atomiques(voir la plaquette « La Physique et le Vivant »).

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19/ Lévitation d’une statuette du sculpteur Tanguy, au-dessus d’un lit de supraconducteur YbaCuO à la température del’azote liquide (–196 °C). Crédit : photothèque CNRS.20/ Évolution du record de température critique pour les supraconducteurs. Il dépasse maintenant largement latempérature de l’azote liquide.

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Ils ont ensuite développé le microscopeà force atomique (AFM), dont le principeest de mesurer la force que subit unepointe très proche d’une surface. Celapermet d’étudier des surfaces isolantes,mais la cartographie est moins précise.On parvient à mesurer des forcesinférieures au picoNewton (10-12 N, soit lepoids d’une bille d’or d’un micromètrede diamètre, ou encore celui d’une bactériecourante, E. coli ), mais bien entendu, lesvibrations et tous les effets parasitesdoivent être éliminés, ce qui présente degrandes difficultés expérimentales.

MANIPULER LES ATOMES : À LA CONQUÊTE DU NANOMONDEOn parle beaucoup actuellement denanosciences et de nanotechnologies, ycompris dans les journaux économiques.En effet, de gros investissements sontconsentis, en France comme dans laplupart des pays développés, pourmaîtriser la matière à l’échelle dunanomètre, avec l’espoir de retombéesmajeures sur l’industrie, mais aussidans le domaine de la santé. Une fortemotivation vient de l’industrie des semi-conducteurs : pour fabriquer des composantsencore plus rapides, il faut les miniaturiser

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Plus récemment, de nouvelles méthodes,dites de « microscopie en champ proche »,ont été mises au point, qui permettentd’étudier directement comment les atomessont disposés sur des surfaces. La premièrede ces méthodes, la STM inventée en 1981par Binnig et Rohrer à IBM Zürich, consisteà approcher d’une surface métallique unepointe extrêmement fine : si la pointe estsuffisamment près (à moins d’unnanomètre), un courant passe à travers levide, grâce à un effet prévu par lamécanique quantique et appelé de façonimagée « effet tunnel ». La mesure de cecourant permet de cartographier la surfaceatome par atome. Cette invention leur avalu le prix Nobel en 1986 (image 21).

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21/ Atome de xénon (tache bleu clair) sur une surface de nickel, vu par STM. Crédit : D.M. Eigler (IBM-Almaden).

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toujours plus. Intel a annoncé des pucesavec une finesse de trait de 65 nm, soitenviron 300 atomes de silicium, maispour atteindre des tailles très inférieures, ilfaudra exploiter les possibilités de laphysique quantique : on sait déjà fabriqueren laboratoire des transistors à un seulélectron, ainsi que des nanosources delumière, les « points quantiques » (quantumdots), qui produisent un photon à la fois(image 22).

De nombreux chercheurs se sont lancésdans ce domaine, quand ils ont comprisque les pointes des microscopes à

champ proche pouvaient être utiliséespour déplacer les atomes, un par un, etcréer des structures artificielles dequelques dizaines ou centainesd’atomes. D’autres méthodes moinsartisanales permettent maintenant defabriquer des structures ayant des propriétéscontrôlées, et de grands espoirs sont en par-ticulier fondés sur les nanotubes de carboneet sur les « nanoplots » métalliques. Lamaîtrise totale de la matière ne paraît plusun rêve inaccessible, même si les obstaclesrestent nombreux (images 23 et 24). Dansun avenir pas trop lointain peut-êtreverrons-nous se réaliser la prophétie dugrand physicien Richard Feynman en 1959 :faire tenir le contenu d’une encyclopédiesur une tête d’épingle !

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22/ Visualisation de récepteurs membranaires d’un neurone vivant grâce à des points quantiques (rouges). Crédit : C. Bouzigues (LKB-ENS).23/ Microstructures pour les cristaux photoniques. En haut : opales de silice et de diamant ; en bas : piliers dediamant. Crédit : M. Bernard et A. Deneuville (CNRS-LEPES).24 / « Cage à électrons » triangulaire de cuivre (hauteur : un atome), vue par STM.Crédit : P. Mallet et J.-Y. Veuillen (CNRS-LEPES).

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QQUUAANNDD LLAA MMAATTIIÈÈRREE CCOONNTTRRÔÔLLEE LLAA LLUUMMIIÈÈRREE ::DDEESS AAIILLEESS DDEE PPAAPPIILLLLOONN AAUUXX CCRRIISSTTAAUUXXPPHHOOTTOONNIIQQUUEESSSi les ailes de certains papillons sontbleues, cela n’est pas dû à un colorant maisà des structures nanométriques quidiffractent la lumière (image 25). Là encorela nature devance les nanotechnologies !Les physiciens se sont rendu compte del’impact considérable de ce résultat pourl’optique, puisque cela permet le contrôletotal de la lumière. En effet, en fabriquantdes structures périodiques à l’échellenanométrique (un réseau de trousordonnés dans un matériau homogène,

par exemple) on réalise des guidesd’onde « diffractifs » pour les photons.C’est la raison pour laquelle on lesdénomme communément « cristauxphotoniques ». Ces « cristaux » peuvent se comportercomme de véritables « isolants » pour lalumière (par analogie avec les propriétésélectroniques) et empêcher sa propagation.On peut fabriquer ainsi de véritables cagesà photons dont les dimensions sontnanométriques et réaliser les plus petitslasers au monde. Cette structurationpériodique diffractive du matériau peutconduire à la modification et au contrôlede l’émission de lumière par les atomes,et ainsi permettre de réaliser dessources qui émettent la lumière photonpar photon (image 26). Ces nouvelles

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25/ Image d’une aile de papillon prise au microscope électronique.26/ a) Image d’un guide à cristal photonique et b) visualisation à l’aide d’un microscope à champ proche optiquede la lumière qui s’y propage. Collaboration LPM (INSA-CNRS), IMEC et de la plateforme NANOPTEC.

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Les jeux de la Lumière et de la Matière

b)

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sources vont révolutionner les techniquesde codage et de transmission d’informationen garantissant leur parfaite confidentialité :c’est le domaine de la cryptographie quantique.

QQUUAANNDD LLAA LLUUMMIIÈÈRREE CCOONNTTRRÔÔLLEE LLAAMMAATTIIÈÈRREE :: LLEESS AATTOOMMEESS UULLTTRRAA--FFRROOIIDDSSEETT LLEESS CCOONNDDEENNSSAATTSS DDEE BBOOSSEE--EEIINNSSTTEEIINNLa lumière laser permet de manipuler lesatomes d’un gaz par l’intermédiaire de laforce radiative qu’elle exerce lorsqu’elleest absorbée. Le prix Nobel a été décernéen 1997 à Claude Cohen-Tannoudji, StevenChu et Bill Phillips, pour avoir démontré leprincipe du refroidissement des atomespar laser à des températures extrêmementbasses, de l’ordre du millième de degré au-dessus du zéro absolu. Ils ont aussi montréqu’on pouvait piéger un nuage dilué de telsatomes froids dans des faisceaux lasers(image 27). Les atomes froids sont maintenant utilisésdans les horloges atomiques, qui mesurentle temps avec une précision extraordinaire,avoisinant la seconde sur plusieursmillions d’années. La mesure précise dutemps est indispensable pour le guidagedes satellites et le positionnement sur Terrepar le système GPS. À des températures encore beaucoup plusfroides, avoisinant le millionième de degré

au-dessus du zéro absolu, de nouveauxphénomènes se produisent : les atomesd’un gaz dilué peuvent se condenser dansun nouvel état de la matière qu’on appellecondensat de Bose-Einstein. Einsteinl’avait prédit en 1924, l’expérience l’a montréen 1995. Les atomes se regroupent tousdans le même état et adoptent uncomportement collectif où ils secomportent tous ensemble commes’ils étaient un seul atome (image 28). À partir des condensats de Bose-Einstein,on peut extraire des faisceaux d’atomesqui ont tous les mêmes propriétés : onparle de « lasers à atomes » ou lasers àondes de matière, qui sont aux atomes cequ’un laser est aux photons. Leursapplications seront nombreuses ; onpense déjà à la lithographie. Les condensatspiégés sur des puces par des microcircuits

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27/ Un petit nuage de quelques millions d’atomes de sodium piégés au centre d’un réseau lumineux créé par6 faisceaux lasers ; les atomes lévitent dans le vide et sont comme englués dans la lumière ; on dit qu’ils sontpris dans une mélasse optique.

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semblent promis à un bel avenir enmicroélectronique. Les condensats sontaussi des candidats possibles pour le calculquantique du futur. L’ image 29 montre les interférences qui seproduisent lorsque deux condensats deBose-Einstein, initialement contenus dansdeux pièges voisins, entre en expansion etse rejoignent : les franges obtenues parW. Ketterle démontrent la capacité desondes de matière à interférer, tout commeles ondes lumineuses.

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28/ Carte de densité d’un nuage d’atomes de rubidium ultra-froids. Lorsque la température est supérieure à latempérature de transition (à gauche), les atomes forment un nuage très large. Le condensat apparaît lorsque latempérature passe en dessous de la température de transition : un pic de densité se forme, de nombreux atomesde vitesse très faible se rassemblent au centre du nuage. Une fois le nuage assez froid, presque tous les atomes seretrouvent « condensés » dans l’état d’énergie minimum (à droite).29/ Interférences produites à partir de deux condensats de Bose-Einstein.

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IInnttrroodduuccttiioonn ..................................................................... 2LLaa lluummiièèrree ......................................................................... 2Le L.A.S.E.R. (Light Amplification by Stimulated Emission of Radiation) ..................................................................... 3La fibre optique : guide de lumière................................... 6LLaa mmaattiièèrree......................................................................... 8La matière dans tous ses états ........................................ 9Utiliser la matière : la saga des supraconducteurs ..... 11Voir les atomes ............................................................... 12Manipuler les atomes : à la conquête du nanomonde... 13LLeess jjeeuuxx ddee llaa lluummiièèrree eett ddee llaa mmaattiièèrree .............................. 15Quand la matière contrôle la lumière : des ailes de papillon aux cristaux photoniques ................................. 15Quand la lumière contrôle la matière : les atomes ultra-froids et les condensats de Bose-Einstein ............................ 16

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L’année 2005 a été déclarée « Année mondiale de la physique » par l’UNESCOpour célébrer les sciences physiques dans le monde entier, exactement centans après la parution des travaux révolutionnaires d’Albert Einstein qui ont

ouvert la voie à de nombreux développements de la physique du vingtième siècle.Les transistors, les ordinateurs, les lasers ou l’imagerie médicale sont de purs produitsdes dernières décennies de recherche fondamentale dans les laboratoires dephysique, là où s’élaborent aujourd’hui les matériaux et les technologies de demain.Au-delà de la commémoration d’un grand personnage de la physique du vingtièmesiècle, l’objectif de cette action est aussi de faire connaître à un public le pluslarge possible les progrès, l’importance et les enjeux de ce grand domaine de lascience qu’est la physique. Aux physiciens de montrer qu’il est possible de s’instruireet de se faire plaisir en apprenant de la physique.Pour l’occasion, la Société Française de Physique a décidé de publier quatrebrochures dont les thèmes sont l’Univers, la Terre et son environnement, laphysique et le vivant, la lumière. Vous tenez l’une d’entre elle entre vos mains.Bonne lecture !

Cette brochure a été conçue sous la responsabilité de Bernard Jacquier, professeur à l'Université deLyon II et Jean Vannimenus, directeur de recherche à l'École Normale Supérieure de Paris. Elle a étéréalisée et éditée par EDP Sciences avec le soutien de la Société Française de Physique, du ministère del'Éducation Nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, et du Centre National deDocumentation Pédagogique. Elle est aussi disponible au format PDF sur le site de la SFPhttp://sfp.in2p3.fr