La parole aux sans-voix

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parole sans-voix E NQUÊTE AUPRÈS DES ENFANTS , DES PARENTS ET DES ENSEIGNANTS SUR LA SITUATION DE L ' ÉDUCATION DANS NEUF PAYS La aux

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  • parole sans-voixENQUTE AUPRS DES ENFANTS, DES PARENTS ET DES ENSEIGNANTS

    SUR LA SITUATION DE L'DUCATION DANS NEUF PAYS

    La aux

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    AIDE ET ACTION INTERNATIONAL

    Cre en 1981, Aide et Action est une organisa-tion internationale de dveloppement par l?du-cation, sans affiliat ion polit ique ou religieuse. Pr-sente dans 24 pays ? en Afrique, en Asie, en Am-rique lat ine-Carabes et en Europe ? elle est soute-nue par prs de 48 000 parrains et donateurs. Au travers de 98 projets, Aide et Act ion Internat ional, avec ses partenaires, contribue l?amliorat ion de l?accs et de la qualit de l?ducat ion de plus de 3 millions d?enfants et d?adultes. L'organisat ion ap-puie les acteurs locaux sur la mise en ? uvre de leurs projets ducat ifs sur des thmatiques di-verses : scolarisat ion de la pet ite enfance, centres de formation des jeunes en situat ion de pauvret et d'exclusion, sant, environnement, cohsion so-ciale, inclusion des filles... 615 salaris et 12 900 bnvoles dans le monde part icipent la ralisa-t ion de sa mission ducat ive.

    http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/http://www.freepik.com/http://www.flaticon.com/http://creativecommons.org/licenses/by/3.0/http://creativecommons.org/licenses/by/3.0/http://creativecommons.org/licenses/by/3.0/http://creativecommons.org/licenses/by/3.0/https://www.facebook.com/AideEtActionInternationalhttps://twitter.com/aeainthttps://www.youtube.com/user/intaideetactionhttp://pinterest.com/aideetactionhttp://www.aide-et-action.orgmailto:[email protected]

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    REMERCIEMENTS

    Ce rapport a t ralis par Audrey Martinenq, Mariana Kitsiona, lise Ritz et Mehdi Zainoune. Nous aimerions remercier les Directeurs de rgion ainsi que toutes les quipes de terrain d'Aide et Action International pour leur contribut ion (bnvole pour certain-e-s) et sans lesquelles ce travail n'aurait jamais vu le jour :

    BNIN

    A. Berthe Tehou (rfrent), tienne Bio, Herv Kinha, Justin Akpo (collecte donnes) et leurs enquteurs-rices : Khaled, Viviane?, Xavier, Faustin, Azif, Issaka, Ismal, Franoise, Calixte, Nata, lonore, Jocelyne et Brigitte.

    CAMBODGE

    Savy Lach et ses enquteurs-rices.

    RPUBLIQUE DOMINICAINE

    Amaury Perez (rfrent) et ses enquteurs-rices.

    INDE, NPAL & VIETNAM

    Sreedhar Mether et Shekhar Ambati (rfrents)ainsi que leurs enquteurs-rices.

    NIGER

    Aboubacar Maman (rfrent), Almou Yahaya (collecte donnes) et Moussa Daouda.

    MADAGASCAR

    Jocelyne Rakotondrazafy (rfrent), Tiana Ratsimbazafy (collecte donnes), Grard Ranjatoet Harinony Arlette Razanatsoa (superviseurs)et leurs enquteurs-rices : Olga, Gertrude, Claire, Hlne, Harisoa, Perline, Julienne, Jeannie, Parfait, Thierry, Thomas, Rindraharinaivo, Naritiana, Julis, Rovatiana et Heninjara.

    SNGAL

    Ousmane Diallo (rfrent), Abdoulaye Sambe (collecte donnes) et leurs enquteurs-rices : Mamadou, Mamadou, Thierno, Sonhibou, Cheikh, Mbaye, Babacar, Ibrahima, Massamba, Ousseynou, Cheikh, Abdoulayeet Madiop.

    Nos remerciements vont galement aux personnes suivantes pour leurs prcieux conseils, leur disponibilit et la bienveillance de leur relecture rigoureuse : Koffi Adjimon, Jalil Akkari, Sandrine Assouline, Acha Bah Diallo, Teeka Bhattarai, Gunilla Bjrner, Claire Calosci, Xavier du Crest, Vanessa Martin et Hlne Nieul.

    Enfin et surtout, nous remercions les milliers d?enfants, de parents et d?enseignants qui en Afrique, en Asie et dans les Carabes ont accept de nous accorder un peu de leur temps prcieux pour tenter de mieux comprendre leurs attentes vis--vis de l?cole. Nous leur ddions ce travail et esprons faire honneur la confiance qu?ils nous ont accorde afin de porter leurs voix.

    Crdits photographiques : nous remercions Sandrine Assouline, Pierre-Yves Babelon, Anne Cassiot, Estelle Fenech, Olivier Harrassowski, liane Leoni, Julie Pudlowski et Pascale Thophile pour leur aimable autorisat ion d'ut ilisat ion de leurs photos.

    Traduction : Freelance Interpreters and Translators India Pvt Ltd.

    Date de rdaction : juillet 2014.

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    AVANT-PROPOS

    ACHA BAH DIALLO

    MEMBRE DU CONSEIL INTERNATIONALD'AIDE ET ACTION INTERNATIONAL

    ans la course aux dbats, discussions, forums, confrences et autres runions prparatoires l?agenda post-2015, on prte beaucoup

    d?importance, juste t it re, l?accs et la qualit de l?ducat ion. Cependant, dans cette effervescence de dbats d?ides, on laisse rarement la place aux tmoignages sur les situat ions vcues par les enfants, les parents et les enseignants. Pourtant, en termes d?galit et d?quit, ce sont eux les cibles des grandes orientat ions des polit iques ducat ives visant fournir une ducat ion de qualit pour tous et pour toutes.

    Ne faut-il pas prendre davantage le temps d?couter les populat ions auxquelles on ne donne que trop rarement la parole ? C?est ce qu?Aide et Act ion Internat ional a dcid d?apporter comme contribut ion aux dbats de l?agenda post-2015 pour le dveloppement par l?ducat ion.

    Pour ce faire, Aide et Act ion Internat ional a men une vaste tude ciblant neuf pays situs sur trois cont inents. Une vritable enqute d?opinion de prs de 5 000 interviews individuelles const itues de 50 quest ions, qui ont t menes auprs des enfants, des parents et des enseignants. Cette contribut ion spcifique fait donc part de ce que les populat ions vivent au quot idien : les obstacles qu?elles rencontrent pour l?accs une ducat ion de qualit, mais aussi ce qu?elles souhaitent et envisagent comme solut ions. Dans des contextes extrmement diffrents, Aide et Act ion Internat ional pointe ainsi les problmatiques locales d?un ct, mais aussi, de l?autre, les invariants qui se retrouvent l?chelle internat ionale.

    Preuves l?appui, cette photographie rigoureuse et fi-dle de situat ions vcues partout dans le monde propose un nouveau regard sur l?agenda post- 2015 de l?duca-t ion. L?object if est galement de faire valoir l?ducat ion comme levier central du dveloppement humain .

    L?ducat ion est un out il indispensable, capable de contribuer la russite de chacun des Object ifs de Dve-loppement Durable (ODD) actuellement dbattus. Cette tude retranscrit le c? ur de mission d?Aide et Act ion Internat ional, autrement dit les fondamentaux de l?du-cat ion ? le cycle primaire, l?implicat ion des parents et le rle des enseignants. ces lments essent iels s?ajoutent d?autres quest ions l?importance grandissante et que nous cont inuons intgrer dans nos programmes, sur l?enseignement technique et professionnel, la place des jeunes, la pet ite enfance, le financement de l?cole ou encore l?ducat ion la citoyennet.

    travers tous ces aspects, pour Aide et Act ion Interna-t ional, c?est bien l?ducat ion qui permet aux individus, hommes et femmes, garons comme filles, de s?manci-per et de construire leur propre avenir.

    Cette enqute qualitat ive internat ionale, qui reflte notre mode opratoire bas sur la recherche-act ion sur le terrain, sert mieux faire comprendre les attentes et les problmes locaux tout en proposant des pistes concrtes d?exprimentat ion. la cl : une meilleure coute des populat ions pour une meilleure cooprat ion entre tous les acteurs afin de dvelopper de meilleurs projets de dveloppement par l?ducat ion.

    ?D

  • onner la parole celles et ceux que l?on n'en-tend jamais : voil l?object if simple mais ambi-t ieux qu?Aide et Act ion Internat ional s?est

    pos travers cette tude. Pourquoi un tel object if et pourquoi un tel moment ?

    l?heure o les contextes d?intervent ion se complexi-fient et o les transformations socio- polit iques s?acc-lrent, les problmatiques locales sont difficiles appr-hender pour les tats. Si l?on souhaite concevoir des po-litiques ducatives efficaces et des projets pertinents, il est donc crucial de disposer d?informations fiables et prcises concernant l?accs des enfants l?cole, la qua-lit de l?ducat ion et les attentes des familles. Certes, les stat ist iques officielles fournissent des informations sur les taux de scolarisat ion, d?achvement ou de rus-site aux examens de fin d?anne. Mais elles peinent tou-tefois rendre compte de la situation quotidienne sur le terrain et prendre en compte d?autres indicateurs comme le temps que mettent les enfants pour aller l?cole, ou encore le fait que les enseignants occupent un 2me emploi pour joindre les deux bouts.

    Ces informations sont prcieuses : elles refltent le souci de penser et de mettre en place des politiques ducatives par et pour les premiers concerns, savoir les enfants, les parents et les enseignants. Cette dmarche part icipe du mode de fonct ionnement intrinsque d?Aide et Act ion Internat ional pour laquelle tout part du terrain. Notre tude intgre cependant d?autres sources acadmiques et inst itut ionnelles dans la rflexion sur l?agenda post-2015.

    Deux dates-cls just ifient de saisir une telle opportu-nit d?enquter auprs des populat ions : mai 2015 et septembre 2015. Ces deux chances marquent res-pect ivement la fin du cycle des objectifs de l?ducation pour Tous (EPT) adopts Dakar en avril 2000, et celle du cycle des Objectifs du Millnaire pour le Dveloppe-ment (OMD) dcids New York la mme anne. C?est donc l?occasion de t irer un bilan global des russites et des checs apports par ces deux moteurs, afin de lan-cer des act ions concrtes au plus vite.

    En compltant l?analyse de la lit trature d?experts sur les nouvelles tendances de l?ducat ion par la descript ion d?une situation relle, part ir de la socit civile et de donnes rcoltes sur le terrain, cette tude entend donc fournir un nouveau regard sur la porte de l?du-cat ion comme un levier du dveloppement.

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    RSUM EXCUTIF

    D

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    RSUM EXCUTIF

    Les priorits d?act ions ident ifies par Aide et Act ion Internat ional combinent la fois les proccupations quotidiennes des enfants, parents et enseignants, mais aussi les grands dfis que les dbats sur l?agenda post-2015 ont mis en lumire. Les pistes de rflexion proposes dcoulent donc de cette double perspect ive :

    Amliorer sur tous les plans l?environnement

    scolaire des enfants

    Dfinir des politiques linguistiques claireset pert inentes

    Revaloriser le mtier d?enseignant

    Impliquer les parents dans la scolaritde leurs enfants

    Diminuer les cots directs et indirects de l?ducat ion pour

    encourager l?accs et le maint ien l?cole des enfants les plus

    dfavoriss

    Lut ter contre le retard accumul par les enfants

    l?cole

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    PRINCIPAUX RSULTATS

    Accs1. Scolarisation, entre tardive, redoublement

    et abandon scolaire

    Malgr les taux de scolarisation en net progrs dans la plupart des pays depuis quinze ans, les dfis en termes d?inscription tardive et de redou-blement rcurrent perdurent. Relever ces deux dfis augmenterait la possibilit pour un enfant d?achever un cycle complet d?ducat ion primaire. Au Bnin, 80% des lves interrogs rpondent qu?un bon nombre de leurs camarades de classe ont abandonn depuis le dbut de l?anne sco-laire. Ce phnomne est part iculirement inqui-tant dans la mesure o l?abandon scolaire est sou-vent li aux frais directs et indirects de l?duca-t ion, que les familles ne peuvent supporter.

    2. Politique de gratuit et frais de scolarit

    En thorie comme en pratique, l?accs l?cole dpend encore trop souvent de son cot finan-cier. La majorit des parents interrogs (96%) es-t iment que la scolarisat ion de leurs enfants est onreuse. Plus de la moit i des parents affirment que le cot lev de l?ducat ion est l?une des rai-sons expliquant l?abandon scolaire au Cambodge. Les parents doivent souvent prendre en charge des frais indirects, comme l?achat d?uniformes et de fournitures scolaires, ou encore des frais invi-sibles , comme un complment de salaire verser aux enseignants.

    3. Situation et distance de l?cole

    La majorit des coliers doivent entreprendre le trajet pied, faute de bus ou de transport sco-laire disponible. Nanmoins, la distance par rap-port au domicile n?est un obstacle majeur la pr-sence et la part icipat ion l?cole que dans cer-tains pays : en Rpublique dominicaine, 24% des enfants doivent faire un trajet de 30 60 minutes pour arriver l?cole. Une proport ion significat ive d?enfants allant l?cole pied avoue avoir peur ou se sent ir en inscurit sur le chemin, surtout parce qu?ils craignent les accidents de la route, les enlvements ou les agressions.

    4. Niveau d?ducation des parents et implication parentale

    D?un point de vue global, 14 % des parents d-clarent ne pas savoir ce que leurs enfants ap-prennent l?cole et 15 % n?ont pas ide du nombre moyen d?enfants par classe au primaire. Mme si une majorit crasante de parents d-clare s?invest ir beaucoup dans l?ducat ion de leurs enfants, leur implicat ion se limite pour la plupart assister aux runions de l?associat ion de parents d?lves ; t rs peu affirment surveiller les devoirs des enfants.

  • Qualit

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    PRINCIPAUX RSULTATS

    1. Le rle des enseignants

    Dans les pays qui accusent un retard dans la ralisa-tion de l?objectif d?ducation primaire pour tous, il y a une pnurie chronique d?enseignants qualifis. Les tats, part iculirement en Afrique subsaharienne, ont du mal att irer les meilleurs candidats au poste d?en-seignant, ce qui conduit soit une pnurie chronique, soit au recrutement de candidats peu qualifis, sans vritable formation et peu motivs. C?est la progres-sion des lves et leur frquentat ion qui sont alors mises mal. Moins de 50% des enseignants ont suivi une formation conforme aux standards nat ionaux dans 11 des 60 pays pour lesquels on dispose de donnes.

    D?aprs les donnes recueillies lors de notre enqute, la plupart des enseignants reoivent une formation continue et peuvent participer plusieurs fois par an des ateliers de formation. Nanmoins, les enseignants de pays comme Madagascar, l?Inde et le Niger d-clarent que cette formation cont inue peut s?avrer sans rapport avec ce qu?ils font, qu?elle peut tre dis-pense de faon irrgulire ou ne pas tre accessible dans les rgions o ils enseignent.

    Le statut des enseignants a galement un impact sur la dure et le contenu de la formation initiale et conti-nue, sur leur motivation, sur le salaire reu ou encore sur la progression au sein de la fonction enseignante.

    2. L'environnement scolaire

    Sur les 162 pays pour lesquels les donnes taient disponibles en 2011, 26 ? dont 23 situs en Afrique subsaharienne ? affichent des taux d?encadrement suprieurs 40 lves par enseignant. Les tmoi-gnages des enseignants provenant des diffrents pays rvlent que les salles de classe sont partout surchar-ges, part iculirement au Bnin, avec 55 lves par classe en moyenne.

    Dans les contextes o les classes mult i-niveaux const i-tuent la seule opt ion d?accs l?ducat ion offerte aux enfants, une formation init iale et cont inue offrant des mthodologies d?enseignement spcifiques s?avre part iculirement ut ile. L?Inde et le Npal const ituent les deux pays o la plupart des enseignants interrogs confirment avoir enseigner aux lves de deux ni-veaux dans la mme salle de classe.

    L?quipement de base dans les coles constitue un autre lment dcisif de l?accs et de la qualit de l?ducation, en amliorant le bien- tre des lves et en renforant les rsultats scolaires. Nous avons glo-balement constat que l?accs l?eau potable est trs variable selon les pays : au Cambodge, seulement 42% des enfants et enseignants interviews dclarent avoir accs l?eau potable. Seuls 25% des enfants interrogs en Inde dclarent avoir accs des toilet tes en tat de marche l?cole.

    Un matriel et des outils d?apprentissage de qualit sont tout aussi importants. Les tmoignages des en-fants rvlent une insuffisance significat ive de ma-nuels scolaires, en part iculier au Niger : 40% des en-fants confirment qu?ils sont obligs de partager un ma-nuel entre deux lves et 37% entre trois lves.

    La langue est essentielle dans le processus d?appren-tissage comme pour le dveloppement cognitif de l?enfant. Notre enqute a explor la quest ion des langues et les rsultats sont les suivants : au Niger, au Bnin, Madagascar et au Sngal, plus de 90% des enfants interrogs rapportent que la langue d?ensei-gnement n?est ni leur langue maternelle, ni la langue parle chez eux. Les polit iques ducat ives soutenant la diversit linguist ique ne sont pas faciles appliquer, car elles reposent sur des disposit ifs impliquant des cots financiers importants en matire de recrutement, de formation d?enseignants et d?adaptat ion des pro-grammes d?tudes.

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    PRINCIPAUX RSULTATS

    AttentesParmi tous les pays touchs par l?enqute, les

    parents comme les enfants semblent pleinement conscients des nombreux freins empchant la scolarisat ion universelle. Ils comprennent tout aussi clairement les goulots d?tranglement qui font obstacle la qualit de l?ducat ion et qui af-fectent ngat ivement les progrs des enfants.

    1. Lorsqu?on interroge les enfants sur la percep-t ion et les attentes que leurs parents ont vis--vis de l?cole, la plupart d?entre eux est iment que l?ducat ion est importante pour leurs parents car elle permettra aux enfants de trouver un bon em-ploi plus tard, scurisant leur avenir. La majorit des enfants considrent galement qu?aux yeux de leurs parents, le fait de savoir lire et crire est un avantage dans la vie qui permet d?amliorer les condit ions de vie.

    2. La quasi-totalit des parents est iment que l?ducat ion sera bnfique leurs enfants en leur offrant la possibilit d?obtenir un meilleur emploi et un meilleur niveau de vie. Ils est iment aussi que les enfants ayant atteint un certain niveau d?ducat ion auront plus de moyens pour s?occuper de leur famille.

    3. Du point de vue des enseignants, la plupart considrent que les parents placent beaucoup d?espoir dans l?ducation et l?apprcient sa juste valeur. Mais comme les parents ne sont pas instruits ou n?ont reu qu?un enseignement de qualit mdiocre, ils ne savent pas de quelle ma-nire soutenir leurs enfants dans ce processus d?apprent issage.

    Olivier Harrassowski

    Olivier Harrassowski Julie Pudlowski

  • es enqutes auprs des populat ions permettent de collecter ces prcieuses informations grce des techniques stat ist iques, en slect ionnant

    dans les diffrentes ent its d?enqute un chantillon re-prsentat if. travers 9 pays d?enqute, prs de 5 000 questionnaires ont t distribus autant d?enfants, de parents et d?enseignants.

    Chaque formulaire cont ient une quarantaine de ques-t ions pour les parents et les enfants ainsi qu'une soixan-taine pour les enseignants. Les quest ions, essent ielle-ment fermes, portent sur l?accs et la qualit de l?du-cat ion ainsi que sur les attentes des acteurs avec des quest ions plus ouvertes laissant les diffrentes per-sonnes s?exprimer spontanment. Les enseignants ont t pr-ident ifis puis interviews dans leurs coles, les parents ont t interrogs leur domicile, tandis que les enfants ont t interrogs dans la rue, au march, sur la route ou devant chez eux.

    Dans un souci de reprsentativit, les zones d?enqutes, autant en milieu urbain, priurbain que rural, ont t ident ifies par les quipes de coordinat ion pays d?Aide et Act ion Internat ional selon le dcoupage administrat if du pays (dpartements, rgions, provinces, districts, villages/villes, quart iers, etc.), le milieu gographique (urbain, priurbain et rural), la prsence ou l?absence d?Aide et Act ion et enfin sur la base des part icularits socio-conomiques de chaque rgion, avant d?tre rpart ies alatoirement.

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    MTHODOLOGIE

    L

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    MTHODOLOGIE

    Notre but a t de comprendre ce que vivent ceux qui sont au plus prs de la ralit quotidienne et que l?on n?interroge trop peu ?

    donner la parole aux sans-voix.

    Les enfants en premier lieu, pour-voyeurs d?informations fondamen-tales et irremplaables. Pourtant, trs peu d'tudes d?ampleur ne s?in-tressent ce qu?ils vivent au quoti-dien. Vivent- ils loin de l?cole ? Ont-ils des manuels, des cahiers, des sty-los pour travailler ? Comprennent- ils la langue du professeur ? Sont-ils par-fois obligs de rebrousser chemin car l?enseignant n?est pas l ?

    Les familles sont, elles aussi, peu interroges sur ces questions. C?est pourtant d?elles qu?mane le plus souvent la dcision d?envoyer ou non un enfant l?cole. Que reprsente le cot de l?ducat ion par rapport leur revenu ? Sont-elles inquites quand les enfants vont l?cole ? Comment s?impliquent-elles dans l?ducat ion des enfants ? Savent-elles d?ailleurs ce que font les enfants en classe ? Qu?attendent-elles de l?ducat ion pour leurs enfants ?

    Dernier acteur fondamental que nous avons tenu interroger : les enseignants. Chaque jour, ils se dbattent et font face des conditions difficiles pour faire progresser leurs lves. Mais qui sont-ils ? Plus souvent des hommes ou des femmes ? Quel ge ont-ils ? Quelle formation ont-ils suivie ? Sont-ils obligs de complter leur salaire en prenant un deuxime emploi ? Quelles sont leurs relat ions avec les familles de leurs lves ? Quelle vision de l?ducat ion ont-ils, qu?en attendent-ils ? Se sentent-ils reconnus et valoriss ? Quels sont leurs espoirs, leurs craintes ?

    Toutes ces quest ions, nous les avons poses prs de 5 000 enfants, parents et enseignants dans 9 pays du monde. Au Bnin, au Cambodge, en Inde, Madagascar, au Npal, au Niger, en Rpublique Dominicaine, au Sngal et au Vietnam, les interviews conduites nous apportent de prcieuses informations pour tenter de mieux cerner les problmatiques sur le terrain. Dans l?espoir qu?elles clairent diffremment les dbats actuels sur le futur cadre d?action mondial en faveur de l?ducation.

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    SOMMAIRE

    CHAPITRE 1. 15 ANS DE MOBILISATION INTERNATIONALE. POUR QUELS RSULTATS ? I. O en sommes-nous des object ifs internat ionaux en faveur de l?ducat ion ?

    I.1. ducation primaire : des bonnes et des mauvaises nouvellesI.2. L'ge et la dure comptentI.3. Peu de perspectives aprs l'ducation primaire

    II. Qu'apprennent vraiment les enfants l'cole ?II.1. Une crise universelle des apprentissagesII.2. Les enseignants sont les pivots de la qualit de l?ducation

    III. Vers un engagement renouvel ?III.1. OMD et objectifs EPT : une articulation difficileIII.2. Le dficit de financement de l?ducationIII.3. Sur quelles bases orienter les futurs objectifs d?ducation ?

    CHAPITRE 2. LA PAROLE AUX SANS-VOIXI. Aperu des condit ions d?accs une ducat ion de qualit

    I.1. Scolarisation, entre tardive, redoublement et abandon scolaireI.2. Polit ique de gratuit et frais de scolaritI.3. Situation et distance de l?coleI.4. Niveau d?ducation des parents et implication parentale dans l?ducation

    II. Percept ions des acteurs sur la qualit de l?enseignement et des apprent issagesII.1. Le rle des enseignants dans l?amlioration de la qualit de l?ducationII.2. L?environnement d?apprentissage et d?enseignement

    III. Mesures pour amliorer l?accs et la qualit de l?ducat ion proposes par les enfants, les parents et les enseignants

    CHAPITRE 3. QUELLES PISTES D'ACTION POSSIBLES POUR L'DUCATION POST-2015 ?I. Diminuer les cots directs et indirects de l?ducat ion pour encourager l?accs et le maint ien l?cole des enfants les plus dfavorissII. Lutter contre le retard accumul par les enfants l?coleIII. Amliorer sur tous les plans l?environnement scolaire des enfantsIV. Implicat ion des parents : amliorer l?environnement familial des enfantsV. Revaloriser le mtier d?enseignantVI. L?importance de la langue : des polit iques linguist iques claires et pert inentes

  • n avril 2000, les chefs d?tat et de gouvernement ont renouvel leur engagement en faveur de l?ducation pour Tous en adoptant, Dakar, six objectifs

    en faveur de l?ducation. Quelques mois plus tard, prs de 200 chefs d?tat et de gouvernement taient runis New York et signaient la Dclaration du Millnaire pour le dve-loppement, identifiant huit objectifs de dveloppement at-teindre d?ici 2015, dont deux concernaient l?ducation.

    quelques mois de l?chance, le bilan de l?ducation est cependant mitig. Certes, de plus en plus d?enfants accdent l?ducation, terminent un cycle complet d?ducation pri-maire et accdent l?enseignement secondaire. Ainsi, depuis 1999, 50 millions d?enfants supplmentaires ont t scolari-ss1. La suppression des frais d?inscription, la construction d?coles, le recrutement d?enseignants ont jou un rle mo-teur dans l?accs des enfants l?cole. Pourtant, 57 millions d?enfants d?ge primaire et 63 millions d?adolescents d?ge secondaire restent privs d?ducation.

    CHAPITRE 115 ANS DE MOBILISATION INTERNATIONALE ?

    POUR QUELS RSULTATS ?Constat global et grandes tendances

    DEPUIS 1999, 50 MILLIONS D'ENFANTS SUPPLMENTAIRES SONT ENTRS L'COLE.

    13

    E

    [1] Rapport mondial de suivi sur l?EPT 2012 ? Jeunes et comptences : l?ducation au travail, UNESCO 2012.

    Olivier Harrassowski Pascale Thophile

  • epuis 2000, les six object ifs de Dakar et les deux object ifs du Millnaire relat ifs l?duca-t ion ? les object ifs numro 2 et numro 3 ? ont

    const itu le cadre d?act ion et d?analyse des progrs ac-complis et des efforts produire. De fait , les efforts ont surtout concern l?ducat ion primaire, limitant quelque peu l?amplitude du mouvement de l?ducation pour Tous.

    Mais depuis 2010, le nombre d?enfants non scolariss n?a diminu que de 3,8 millions, soit 6,6%, ce qui montre que les efforts ont clairement ralenti. Par ailleurs, 250 millions d?enfants et d?adolescents ne savent ni lire, ni crire, ni compter, mme lorsqu?ils sont alls 4 ans l?cole2. Pour les acteurs de l?ducat ion, le dfi est double. Les object ifs ne seront pas atteints sans act ion concrte en faveur de l?accs l?ducat ion, ds le plus jeune ge, des enfants issus des familles les plus margi-nalises. Dans le mme temps, il est vital de dvelopper une ducat ion de qualit, permettant aux enfants et aux jeunes d?acqurir les connaissances et comptences n-cessaires leur insert ion conomique et sociale, et au dveloppement durable.

    I. O en sommes-nous des objectifs internationaux en faveur de l'ducation ?

    250 MILLIONS D'ENFANTS ET D'ADOLESCENTSNE SAVENT NI LIRE, NI CRIRE, NI COMPTER MME LORSQU'ILS SONT ALLS4 ANS L'COLE.

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    Julie Pudlowski

    Objectifs de l'Education pour Tous (EPT)

    Objectifs du Millnaire pour le dveloppement

    Object if 1 Protection et duca-tion de la petite enfance

    Object if 2 Donner tous les enfants, gar-ons et filles, partout dans le monde, les moyens d?achever un cycle complet d?tudes primaires

    Object if 2 cole primaire gratuite et obligatoire pour tous

    Object if 3 Accs des connais-sances pour la vie courante

    Object if 4 Amliorer l?alphabti-sation des adultes de 50% Object if 3 liminer les

    disparits entre les sexes dans l?enseigne-ment primaire et secondaire

    Object if 5 galit entre les sexes dans le primaire et le secondaire

    Object if 6 Amliorer la qualit de l?ducation sous tous ses aspects

    D

    [2] Rapport mondial de suivi sur l?EPT 2013/4 ? Enseigner et apprendre : Atteindre la qualit pour tous, UNESCO 2014.

    [Tableau 1] Objectifs de l'EPT et deux OMD sur l'ducation

  • ntre 1999 et 2011, le nombre d?enfants d?ge primaire non scolariss a t quasiment divis par deux3, tombant de 107 millions 57 mil-

    lions. On observe toutefois un net ralentissement des progrs. Alors qu?entre 1999 et 2004, le nombre d?en-fants non scolariss a diminu de 6,8 millions par an, il n?a baiss que de 3,4 millions par an entre 2004 et 2008, et de seulement 1,9 million par an pour les annes 2010 et 2011. Autrement dit , si le nombre d?enfants non sco-lariss cont inue de dcrotre, il diminue cependant de plus en plus lentement, jusqu? presque stagner. Ainsi, selon l?UNESCO, si le rythme auquel le nombre d?en-fants non scolariss demeure ident ique celui des deux dernires annes, ce sont 53 millions d?enfants qui de-vraient encore tre exclus de l?ducat ion primaire cette anne, bien loin des object ifs fixs.

    Certains pays ont cependant enregistr des progrs considrables. Ainsi, au Laos, au Rwanda et au Vietnam, le nombre d?enfants non scolariss a recul de 85%4. Au Laos, ce chiffre est ainsi pass de 123 000 en 2006 19 000 en 2011. Le Rwanda a connu une baisse de 93%, le nombre d?enfants privs d?ducat ion primaire passant de 273 000 en 2006 20 000 en 2011, tandis qu?au Vietnam on compte dsormais 39 000 enfants privs d?ducat ion contre 439 000 en 2006. En termes absolus, la palme revient l?Inde o le nombre d?enfants non sco-lariss est pass de prs de 6,2 millions en 2006 1,7 million en 2011, 96% des enfants d?ge primaire ayant dsormais accs l?ducat ion5.

    Ces progrs tmoignent de la capacit des pays mettre en place des politiques permettant un accs l?ducation primaire pour tous les enfants. L?inscript ion dans la loi du droit l?ducat ion, voire dans la Const itu-t ion comme cela a t le cas Madagascar, la suppres-sion des frais de scolarit, l?invest issement dans les in-frastructures, l?largissement de l?ge de la scolarit obligatoire et l?acclrat ion du recrutement des ensei-gnants sont autant de mesures ayant permis plus d?en-fants de bnficier d?une ducat ion primaire, d?y ache-ver un cycle complet d?tudes et d?accder l?enseigne-ment secondaire.

    EN INDE, LE NOMBRE D?ENFANTS NON SCOLARISS EST PASS DE PRS DE 6,2 MILLIONS EN 2006 1,7 MILLION EN 2011, 96% DES ENFANTS D?GE PRIMAIRE AYANT DSORMAIS ACCS L?DUCATION.

    ducation primaire : des bonnes nouvelles...

    [3] Op. cit., UNESCO 2014.

    [4] Ibid.

    [5] Annual Status Education Report 2013, Aser Centre 2014.

    15

    1. 1.

    Vianco Martinez

    E

  • alheureusement, il n?y a pas que des bonnes nouvelles. Tout d?abord, dans certains pays, le nombre d?enfants non scolariss non

    seulement ne diminue plus, mais augmente. C?est le cas en Thalande, au Nigeria, en Afrique du Sud ou encore au Paraguay (voir Tableau 2). Certains de ces pays connaissent un conflit ou une inscurit latente pouvant expliquer ce recul de l?accs l?ducation. En effet, en 2013, prs de la moit i des enfants privs d?ducat ion primaire vivait dans un pays touch par un conflit ou une instabilit chronique, contre 42% en 2012.

    Le rapport Education under attack6 prcise galement qu?entre 2009 et 2013, prs de 10 000 attaques ont t enregistres contre l?ducation ? qu?il s?agisse d?coles ayant t prises pour cibles, de lieux d?ducation transforms en bases-arrire des groupes arms ou encore d?attaques cibles contre les lves, les enseignants ou les autres personnels d?ducat ion. Ces attaques peuvent avoir des consquences long terme, bien aprs la rsolut ion des situat ions de conflit ou d?inscurit. Le manque de moyens, et parfois de volont polit ique pour reconstruire des coles, recruter de nouveaux enseignants, promouvoir un curriculum adapt, peut ainsi empcher une gnrat ion ent ire d?enfants d?accder l?ducat ion.

    Par ailleurs, sur les 57 millions d?enfants d?ge pri-maire privs d?ducat ion, 23% ont abandonn l?cole avant la fin du cycle primaire et 28% y accderont avec plusieurs annes de retard. Mais prs de la moit i d?entre eux n?iront jamais l?cole8. Ce sont ainsi prs de 27 millions d?enfants qui ne pourront jamais acc-der aux comptences de base, notamment la lecture et l?criture. Ce chiffre tmoigne de la difficult constante d?amener certains enfants accder l?du-cat ion. Par exemple, en Afrique subsaharienne, 42% des lves quittent l?cole prcocement, un lve sur six quittant l?cole avant la deuxime anne de scolarisation9.

    SUR LES 57 MILLIONS D?ENFANTS D?GE PRIMAIRE PRIVS D?DUCATION, 23% ONT ABANDONN L?COLE AVANT LA FIN DU CYCLE PRIMAIRE ET 28% Y ACCDERONT AVEC PLUSIEURS ANNES DE RETARD.

    ... et des mauvaises nouvelles

    EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE, 42% DES LVES QUITTENT L'COLE PRCOCMENT,

    UN LVE SUR SIX ABANDONNANT

    AVANT LA DEUXIME ANNE.

    16

    M

    [8] Recueil des donnes mondiales sur l?ducation 2012, Opportunits per-dues : Impact du redoublement et du dpart prmatur de l?cole. Institut de statistique de l?UNESCO 2012.

    [9] Ibid.

    [6] Education under Attack Report, Global Coalit ion to Protect

    Education from Attack (GCPEA) 2014.

    [7] Op. cit., UNESCO 2014.

    [Tableau 2] Les dix pays affichant l?augmentation la plus impor-tante en termes relatifs du nombre d?enfants non scolariss7

    2006 2011 Variation (%)

    Paraguay 57 000 136 000 139

    Colombie 206 000 435 000 112

    Thalande 387 000 611 000 58

    Nigeria 7 150 000 10 542 000 47

    rythre 295 000 422 000 43

    Gambie 65 000 86 000 33

    Afrique du sud 519 000 679 000 31

    Libria 325 000 386 000 19

    Mauritanie 113 000 131 000 16

    Ymen 853 000 949 000 11

    1. 1.

  • DANS LE MONDE, 93 MILLIONS D'ENFANTSDE MOINS DE 14 ANS VIVENT AVECUN HANDICAP MODR OU SVRE.

    SELON UNE TUDE MENE DANS HUIT PAYSEN DVELOPPEMENT, LES DPENSES EXTRASCOLAIRES REPRSENTENT PRSDE 15% DES DPENSES DES MNAGES.

    17

    ... et des mauvaises nouvelles

    1. 1.

    [Illustrat ion 1] Pourcentage de garons dscolariss dans le monde

    Malgr les polit iques de gratuit mises en place et les amliorat ions videntes concernant l?accessibilit des infrastructures scolaires ? les enqutes menes par Aide et Act ion Internat ional montrent que les coles se situent en gnral moins de 20 minutes pied du do-micile des enfants ?, une proport ion importante d?en-fants d?ge primaire ne parvient toujours pas bnfi-cier d?une ducat ion de qualit, ce qui dmontre la per-sistance de formes durables d?exclusion de l?ducation.

    En d?autres termes, les polit iques publiques d?duca-t ion mises en place depuis 2000 ont certes permis d?ac-crotre l?accs l?ducat ion pour une majorit d?enfants, et il faudrait certainement s?en fliciter si elles n?avaient pas chou faire progresser la situation des groupes exclus ou marginaliss, faute de politiques adaptes et d?indicateurs cibls sur la mesure des progrs les concernant. De fait , les ingalits d?accs une duca-t ion de qualit demeurent trs fortes.

    Au niveau global, les principaux facteurs susceptibles d?influencer l?accs l?ducation sont le lieu de rsi-dence des enfants et le niveau de revenu des familles. l?chelle mondiale, 20% des garons d?ge primaire et 21% des filles sont exclus de l?ducat ion, mais c?est le cas de 23% des garons vivant en zone rurale (contre 12% de ceux vivant en zone urbaine) et de 31% des enfants issus de familles vivant sous le seuil de pauvret (contre 9% de ceux issus de familles avec un niveau de revenus confortable)10.

    En effet, mme si bon nombre de pays ont supprim les frais de scolarit, de nombreux frais indirects sub-sistent, comme l?achat d?uniformes et de fournitures, voire des frais invisibles , comme le complment de salaire vers l?enseignant, la cot isat ion l?associat ion de parents d?lves et/ou au comit de gest ion, les frais de recrat ion, etc. Ds lors, ils contribuent peser un peu plus sur le cot de l?ducation et en hypothquer l?accs pour les enfants des familles les plus pauvres. Ainsi, selon une tude de l?UNESCO mene dans huit pays en dveloppement, les dpenses extrascolaires re-prsentent prs de 15% des dpenses des mnages11.

    [10] K. Watkins, Too Little Access, Not Enough Learning: Africa?s Twin Defi-

    cit in Education, Janvier 2013, Brookings. Consult le 06/03/2014.

    [11] Op. cit., UNESCO 2012.

  • Si la parit dans l?enseignement s?est galement am-liore, elle est l encore susceptible de cacher une ra-lit plus complexe. En 2011, 54% des enfants non scola-riss taient des filles. Le nombre de filles non scolari-ses dans l?enseignement primaire est pass de 58,9 mil-lions en 2000 30,7 millions en 2012. Et sur les 161 pays pour lesquels les donnes sont disponibles, 63% ont atteint la parit entre les sexes dans l?enseignement primaire en 2012, contre 57% en 1999.

    Cependant, certains pays ont vu s?accrotre le nombre de filles non scolarises, de 100 000 au Pakis-tan et de 30 000 au Ymen. Par ailleurs, 25% des jeunes femmes n?ont toujours pas achev un cycle complet d?ducat ion primaire12. L?accs l?ducat ion des filles ne permet donc pas lui seul d?valuer une ventuelle am-liorat ion de leur situat ion. Dans le nord du Nigeria, les filles de l?ethnie Hausa restent en moyenne moins d?un an l?cole13. Et dans de nombreux pays, les filles sont toujours l?objet de discriminat ions, y compris dans les salles de classe14. Les violences de genre const ituent l?un des freins essent iels, bien que mconnu, l?duca-t ion des filles15.

    Les enfants vivant avec un handicap font eux aussi face des ingalits et aux discriminat ions, d?autant que peu de pays disposent de polit iques spcifiques concer-nant leur accs l?ducat ion. Selon l?Unicef, 93 millions d?enfants de moins de 14 ans dans le monde vivent avec un handicap modr ou svre16. Le manque d?accs aux installations, l?insuffisance des fournitures et de services adquats et ncessaires leurs apprentis-sages, l?absence de formation spcifique pour les ensei-gnants ainsi que les croyances et les perceptions lies au handicap constituent autant de freins l?ducation pour ces enfants.

    Selon une revue de la lit trature ralise par l?Organi-sat ion mondiale de la Sant dans 51 pays17, seuls 51% des garons et 42% des filles en situation de handicap terminent un cycle complet d?tudes primaires. Au Burkina Faso par exemple, les enfants en situat ion de handicap prsentent 2,5 fois plus de risques que les autres de ne pas aller l?cole : 40% des enfants de 7 12 ans prsentant un handicap physique y vont contre seulement 10% de ceux prsentant un trouble audit if ou de la parole18. En Irak, 10% des enfants gs de 6 9 ans, ne prsentant pas de risque de handicap, n?avaient jamais t scolariss en 2006, contre 19% des enfants prsentant un risque de troubles de l?audit ion et 51% de ceux prsentant un risque plus lev de handicap mental19.

    DANS LE MONDE, 100 MILLIONSDE JEUNES FEMMES SONT INCAPABLESDE LIRE UNE SIMPLE PHRASE EN LIENAVEC LA VIE COURANTE.

    [17] Rapport mondial sur le handicap 2011, OMS et Banque mondiale, p.206.

    [18] Rapport mondial de suivi de l?ducation pour tous 2010 ? Atteindre les marginaliss, UNESCO 2010.

    [19] Op. cit., UNESCO 2014.

    18

    [12] Op. cit., UNESCO 2014.

    [13] Op. cit., K. Watkins.

    [14] Because I?m a girl, Plan international 2012.

    [15] Voir C. Sedel, Les freins institutionnels, budgtaires et polit iques la scolarisation des filles , Rapport de synthse sur quatre pays (Brukina Faso, Cte d?Ivoire, Mauritanie, Niger), Unicef BRAOC, dcembre 2013 et M. Devers, P. . Henry, . Hofmann et H. Benabdallah, Les violences de genre en milieu scolaire en Afrique subsaharienne francophone, Direction gnrale de la mondialisation, du dveloppement et des partenariats, 2012.

    [16] La Situation des enfants dans le monde 2013 : Les enfants handicaps, Unicef 2013.

    ... et des mauvaises nouvelles

    1. 1.

  • 19

    ... et des mauvaises nouvelles

    1. 1.

    Ces ingalits d?accs des opportunits ducat ives de qualit empchent l?exercice du droit fondamental l?ducat ion et menacent le dveloppement conomique de nombreux pays en dveloppement. Si tous les en-fants bnficiaient d?un accs l?ducat ion sur un pied d?galit, c?est--dire sans que leur lieu de vie, le niveau de revenu de leur famille, la langue qu?ils parlent ou en-core le fait d?tre une fille ou un garon n?aient d?impact sur leurs possibilits d?accder une ducat ion de qua-lit, le niveau de revenu par habitant par an pourrait augmenter de 23% au cours des 40 prochaines an-nes20. Selon l?tude mene par l?inst itut Results for De-velopment dans six pays en dveloppement ? Mali, Y-men, Bangladesh, Inde, Rpublique dmocrat ique du Congo et Cte d?Ivoire ? le Produit Intrieur Brut pour-rait augmenter de 7% si tous les enfants non scolariss accdaient l?ducation primaire21.

    [20] Op. cit., UNESCO 2014.

    [21] N. Burnett, A. Guison-Dowdy et M. Thomas. Exclusion from Educa-tion: the economic cost of out- of- school children. Results for Develop-ment/Educate a Child, 2013.

    AU BURKINA FASO, LES ENFANTS

    EN SITUATION DE HANDICAP PRSENTENT

    2,5 FOIS PLUS DE RISQUES QUE LES AUTRES

    DE NE PAS ALLER L?COLE.

    Sandrine Assouline

    [Illustrat ion 2] Rsultats du Annual Status Education Report 2013 - Inde

  • our tous ces enfants exclus comme pour tous les autres, l?accs une ducat ion de qualit ds leur plus jeune ge est une condit ion essent ielle

    du futur dveloppement des individus. Certes, depuis 1999, le nombre d?enfants bnficiant de programmes de soin et d?ducation de la petite enfance a augment de moiti. Plus de la moit i des enfants d?ge prsco-laire dans le monde n?en bnficient pas. Le statut co-nomique des familles, l encore, en dtermine forte-ment l?accs. Au Nigeria par exemple, deux t iers des en-fants issus des familles appartenant au quint ile sup-rieur de la populat ion (c?est- - dire les 20% les plus riches) bnficient de ces programmes, alors que c?est le cas de seulement 10% des enfants issus des familles ap-partenant au quint ile infrieur (c?est--dire les 20% les plus pauvres).

    Le sous- invest issement est l?une des raisons princi-pales de ce faible accs aux programmes d?ducat ion de la pet ite enfance puisque moins de 10% du budget na-tional allou l?ducation leur est consacr. Par exemple, le Niger et le Npal consacrent peu prs 0,1% de leur PNB22 l?ducat ion de la pet ite enfance, tandis que Madagascar et le Sngal y consacrent 0,02% de leur PNB.

    Les enfants bnficiant de ces act ions prsentent un meilleur statut nutritionnel, sont davantage vaccins et , en moyenne, accdent plus facilement l?ducat ion primaire. Le fait d?entrer l?cole l?ge requis ? en fonct ion des obligat ions ou normes mises en place au ni-veau nat ional ? a un impact positif sur la probabilit d?achever un cycle complet d?tudes primaires23. On constate pourtant que de 1999 2011, le taux net d?ad-mission24 dans le primaire n?a que lgrement aug-ment, passant de 81% 86%, bien que certains pays soient parvenus obtenir des rsultats bien meilleurs, comme l?thiopie par exemple, o le taux net d?admis-sion primaire est pass de 23% en 1999 94% en 201125.

    Le fait d?entrer l?cole l?ge requis a une impor-tance toute particulire pour les filles. Compte tenu du rle domestique et reproduct if qui leur est encore attri-bu, les filles sont souvent retires de l?cole l?ge de la pubert. Si elles entrent l?cole avec un, deux ou trois ans de retard, elles sont alors plus suscept ibles d?tre ret ires de l?cole au bout de deux ou trois ans, c?est--dire avant d?avoir achev un cycle complet d?du-cat ion primaire et d?avoir acquis les connaissances et comptences de base dont elles auront besoin pour leur vie future26.

    L'ge et la dure comptent

    [22] PNB : Produit National Brut.

    [Illustrat ion 3] Bnficiaires de programmes pour la petite enfance - Nigeria

    [23] Recueil des donnes mondiales sur l?ducation 2010, dition spciale sur l?galit entre les sexes, Institut de statistique de l?UNESCO 2010.

    [24] Le taux net d?admission tablit le rapport entre les lves inscrits ayant l?ge officiel d?entrer l?cole et l?ensemble de la population du mme ge pour une anne scolaire donne. Le taux net d?admission dans le primaire permet ainsi d?valuer la capacit d?un pays scolariser les enfants d?ge primaire.

    [25] Op. cit., UNESCO 2014.

    [26] Because I'm a girl. Plan international 2012.

    PLUS DE LA MOITI DES ENFANTS D?GE PRSCOLAIRE DANS LE MONDENE BNFICIENT PAS DES PROGRAMMESPOUR LA PETITE ENFANCE.

    20

    1. 2.

    P

  • Le taux de redoublement a galement un impact sur le fait que les enfants aillent au bout du cycle primaire. De nombreuses tudes qualitatives confirment ainsi une intuition empirique : quel intrt les familles peuvent-elles avoir envoyer les enfants l?cole lorsque ces derniers redoublent une, voire plusieurs classes, et que le redoublement est peru comme d un mauvais niveau scolaire ou un manque d?aptitudes de l?enfant ?

    Le taux d?abandon scolaire justement n?a que peu volu depuis 1999. En 2011, plus d?un enfant sur quatre n?atteignait pas la dernire anne du primaire29. Certaines rgions du monde enregistrent mme une baisse du taux d?achvement en primaire, comme en Afrique subsaharienne o la proport ion d?enfants scola-riss atteignant la dernire anne du primaire est pas-se de 58% en 1999 56% en 2010, tandis qu'en Asie du Sud et de l?Ouest, moins des deux tiers des enfants scolariss atteignent la dernire anne. Selon le Parte-nariat Mondial pour l?ducat ion, si l?on s?intresse uni-quement aux pays en dveloppement partenaires de l?init iat ive30, le taux moyen d?achvement dans le pri-maire est pass de 58% en 2000 75% en 2011, ce qui tmoigne d?une relle volont polit ique de ces pays d?amliorer les capacits et opportunits des enfants de terminer un cycle complet d?tudes primaires31.

    [27] Op. cit., Recueil des donnes mondiales 2010.

    [28] Ibid.

    [Illustrat ion 5] L'importance de l'achvement scolaire

    [Illustrat ion 4] Taux d'achvement dans le primaire - monde

    Entre 2000 et 2010, en moyenne, le taux de redouble-ment a diminu de 7%27. Mais dans de nombreux pays, il reste une pratique courante, quasiment un passage oblig et banal pour de nombreux enfants. Au Burundi et au Togo par exemple, les enfants entrant en premire anne du primaire sont, en moyenne, amens redou-bler au moins une classe au cours de leur scolarit, et restent en moyenne deux trois ans l?cole28.

    32,2 MILLIONS D'ENFANTS DU PRIMAIREONT REDOUBL EN 2010.

    21

    L'ge et la dure comptent

    1. 2.

    [29] Results for Learning Report 2013 ? Facing the challenges of data, fi-nancing and fragility. Partenariat Mondial pour l'Education, Novembre 2013, p.79. Consult le 24/04/2014.

    [30] 59 pays en dveloppement sont partenaires de l?initiative : Afgha-nistan, Albanie, Bnin, Bhoutan, Burkina Faso, Burundi, Cambodge, Cameroun, Rpublique centrafricaine, Tchad, Comores, Rpublique dmocratique du Congo, Ct d?Ivoire, Djibouti, Erythre, thiopie, Gambie, Gorgie, Ghana, Guine, Guine-Bissau, Guyane, Hati, Hon-duras, Kenya, Laos, Lesotho, Libria, Madagascar, Malawi, Mali, Mauri-tanie, Moldavie, Mongolie, Mozambique, Npal, Nicaragua, Niger, Ni-geria, Ouganda, Ouzbkistan, Pakistan, Papouasie- Nouvelle Guine, Rpublique kirghize, Rwanda, Sao Tom et Principe, Sngal, Sierra Leone, Somalie, Soudan du Sud, Soudan, Tadjikistan, Tanzanie, Timor-Leste, Togo, Vietnam, Ymen, Zambie, Zimbabwe.

    [31] Op. cit., Results for Learning Report 2013.

  • 22

    L'ge et la dure comptent

    1. 2.

  • 23

    ien sr, il faut se rjouir et saluer les efforts raliss pour permettre un plus grand nombre d?enfants d?accder la premire ainsi

    qu? la dernire anne de l?enseignement primaire. Mais reste savoir ce que les enfants feront aprs avoir ter-min un cycle complet d?tudes primaires. Cette ques-t ion est part iculirement importante pour les familles et les enfants. En effet, quoi bon faire des sacrifices pour supporter les frais lis l?ducat ion primaire si les en-fants doivent arrter leurs tudes aprs la dernire an-ne ? Les familles comprennent parfaitement qu?ache-ver un cycle complet d?tudes primaires n?est nulle-ment suffisant pour permettre leurs enfants d?acc-der l?avenir qu?elles esprent pour eux ? un bon em-ploi (de prfrence dans une administrat ion), la russite, une meilleure vie. Si les enfants ne peuvent accder l?enseignement secondaire, les familles font souvent le choix de les ret irer de l?cole plus tt que prvu, malgr les bienfaits de l?ducat ion primaire.

    l?heure actuelle, 63 millions d?adolescents de 12 15 ans ne sont pas scolariss ? que ce soit dans l?enseigne-ment primaire ou secondaire. Selon le Partenariat Mon-dial pour l?ducat ion, les enfants ont aujourd?hui plus de chances de pouvoir accder au premier cycle de l?enseignement secondaire32. Ces progrs dmontrent la prise de conscience effectue par de nombreux pays : la transit ion d?un niveau un autre du systme ducat if est un signe important envoy aux populat ions en mme temps qu?un besoin essent iel pour le dveloppement conomique.

    1. 3.

    [32] Op.cit., Partenariat Mondial pour l'Education, Novembre 2013.

    [33] Le taux de transition du primaire au secondaire mesure le pour-centage d?enfants en dernire anne du primaire qui accdent effecti-vement au secondaire.

    [34] Op. cit., UNESCO 2014.

    Peu de perspectives aprs l'cole primaire

    L?enseignement secondaire n?est bien sr pas le seul pouvoir doter les jeunes des connaissances et comp-tences dont ils auront besoin pour leur insert ion cono-mique et sociale. Toutefois, les diffrents acteurs de l?ducat ion cont inuent d?y accorder une importance pr-pondrante. Or, les taux de transition du primaire au secondaire33 demeurent faibles (voir Tableau 3). En Afrique subsaharienne, sur 33 pays pour lesquels les donnes sont disponibles, 14 affichent un taux de tran-sition du primaire au secondaire infrieur 70%.

    Les ensembles rgionaux laissent par ailleurs appa-ratre de grandes disparits. En Asie du Sud et de l?Ouest par exemple, le taux de transit ion du primaire au secondaire atteint en moyenne 93%, mais il est de 98% au Sri Lanka contre seulement 73% au Pakistan34. Le taux de transit ion du primaire au secondaire ne permet d?valuer que la proport ion d?lves en dernire anne du primaire rejoignant effect ivement l?enseignement se-condaire ; il ne tient donc pas compte des enfants qui n?ont jamais bnfici d?une ducation primaire, de ceux qui sont rentrs en retard ou qui ont abandonn l?cole avant d?avoir atteint la dernire anne du primaire.

    63 MILLIONS D'ADOLESCENTS NE SONT PAS SCOLARISS, QUE CE SOIT DANS LE PRIMAIREOU LE SECONDAIRE.

    Total Filles Garons

    Afrique subsaharienne 71 ? ?

    Am. du Nord et Europe 99 99 99

    Am. lat ine et Carabes 94 93 95

    %

    7,9

    13,6

    9,6

    Asie centrale 99 98 99 13

    Asie du sud et de l'ouest 93 96 89 1,8

    Asie du l'est et du Pacif ique 93 94 92 17,3

    tats arabes 94 96 92 9,5

    Europe centrale et de l'est 98 97 99 21,1

    [Tableau 3] Taux de transition du primaire vers le secondaire (%) et proportion des effectifs du secondaire dans l?enseignement technique et professionnel (%)35

    [35] Op. cit., UNESCO 2014.

    B

  • Si l?on considre globalement la situat ion de l?ensei-gnement dans le monde, le nombre d?enfants scolariss a augment d?un t iers, passant de prs de 320 millions d?lves en 1999 prs de 440 millions en 201136. Si les deux t iers des jeunes dans le monde accdent dsor-mais l?enseignement secondaire, ils ne sont que 41% en Afrique subsaharienne et 59,6% en Asie du Sud et de l?Ouest.

    Au Sngal par exemple, 78,5% des jeunes de 15 19 ans ont quitt l?cole avant d?avoir termin le premier niveau de l?enseignement secondaire. Par ailleurs, une trs faible proport ion de ces jeunes bnficie d?un ensei-gnement technique et professionnel : ils reprsentent 1,8% des effect ifs de l?enseignement secondaire en Asie du Sud et de l?Ouest et 7,9% en Afrique subsaharienne.

    Au cours des 15 dernires annes, peu d?opportunits de formation professionnelle ont t offertes aux jeunes, alors qu?ils incarnent un rel potent iel de chan-gement en terme de dveloppement. Et pour preuve : actuellement, 621 millions de jeunes de 15 24 ans ne suivent pas d?tudes ni de formation, n?ont pas d?emploi et, signe d?une dsesprance qui devrait appeler une prise de conscience rapide, n?en cherchent pas37. Pour tous ces jeunes, et pour tous ceux encore scolariss mais qui ne font pas les apprent issages qui leur permet-traient de s?insrer conomiquement et socialement, quelles sont les voies alternat ives proposes ?

    [36] Op. cit., UNESCO 2014.

    621 MILLIONS DE JEUNES DE 15 24 ANS NE SUIVENT PAS D'TUDES NI DE FORMATION,N'ONT PAS D'EMPLOIET N'EN CHERCHENT PAS.

    330 MILLIONS DE JEUNES ENTRERONTSUR LE MARCH DU TRAVAIL DANS 15 ANS.

    vrai dire, elles sont (trop) peu nombreuses : les sys-tmes d?enseignement suprieur des pays en dvelop-pement s?avrent inefficaces, tandis que les structures de formation professionnelle affrontent au moins deux dfis : d'une part , le manque de financement et d'autre part , le manque d?adquation entre l?offre de formation et la demande conomique de main-d?? uvre. La ques-t ion est d?autant plus cruciale quand on sait que parmi les 197 millions de chmeurs en 2013, 40% taient des jeunes de 15- 24 ans38. La croissance dmographique, en part iculier en Afrique, exerce une pression de plus en plus forte sur les secteurs sociaux et les biens publics (notamment l?ducat ion et la sant), non seulement en termes de capacits faire face la demande (salles de classes, enseignants, etc.), mais aussi en termes d?offres d?emploi.

    197 MILLIONS DE PERSONNES TAIENTAU CHMAGE EN 2013 - PARMI ELLES, 40% TAIENT DES JEUNES DE 15 24 ANS.

    [37] Rapport sur le dveloppement dans le monde 2013. Emplois, Banque mondiale 2012.[38] Tendances mondiales de l'emploi 2013 : Surmonter une nouvelle crise de l'emploi (Rsum). Organisation Internationale du Travail (OIT) 2013.

    24

    1. 3.Peu de perspectives aprs l'cole primaire

  • II. Qu'apprennent vraiment les enfants l'cole ?orce est de constater que l?essent iel des efforts et des rflexions concernant l?ducat ion s?est, depuis les annes 2000, concentr sur l?accs

    l?ducat ion primaire. Mais l?attention porte la qualit de l?ducation, et plus encore aux apprentissages que font les enfants, est tout faite rcente. Depuis deux ans, l?chance de 2015 approchant, de nombreuses organisat ions internat ionales et groupes de rflexion s?inquitent donc de savoir si les enfants apprennent quelque chose l?cole, ce qu?ils y apprennent et si ces apprent issages leur seront effect ivement ut iles pour leur vie future.

    Selon l?UNESCO, 650 millions d?enfants d?ge scolaire sont effect ivement scolariss, mais 120 millions d?entre eux n?atteignent pas la 4me anne du primaire et 130 millions restent l?cole sans pouvoir y faire les apprentissages de base. Au total donc, 250 millions d?enfants et de jeunes ne savent ni lire ni crire, mme aprs avoir pass quatre annes l?cole.

    250 MILLIONS D?ENFANTS ET DE JEUNES NE SAVENT NI LIRE NI CRIRE, MME APRS AVOIR PASS QUATRE ANNES L?COLE.

    [Illustrat ion 6] Inde : pourcentage des enfants en 5me anne du primaire capables de rsoudre une soustraction deux chiffres

    25

    Olivier Harrassowski

    F

  • elon le Baromtre des apprentissages en Afrique39, un t iers des enfants couverts par l?tude ? soit 23 millions d?lves ? obt iennent des scores inf-

    rieurs au niveau minimal requis. De fortes disparits ap-paraissent selon les pays. En thiopie, au Nigeria et en Zambie par exemple, plus de la moit i des enfants en 4me et 5me anne du primaire ont des rsultats inf-rieurs au niveau minimal requis, et pour sept pays ayant part icip l?tude, on observe que 40% des enfants ne matrisent pas ce mme niveau. Mais si l?on ajoute cela les millions d'enfants qui ne sont jamais alls l?cole et les millions d?autres qui ont quit t l?cole avant d?at-teindre la 4me ou 5me anne du primaire, le nombre d?enfants d?ge scolaire matrisant les apprentissages minimaux requis est encore plus faible.

    Au Malawi par exemple, non seulement la moit i des enfants scolariss en 5me anne du primaire ne ma-trisent pas les apprent issages de base en calcul, criture et lecture, mais la moit i des enfants ayant t scolari-ss en 1re anne du primaire ont quit t l?cole avant la 5me anne40. Au total, sur l?ensemble du cont inent afri-cain, ce sont ainsi 61 millions d?enfants ? un sur deux ? qui sont susceptibles d?atteindre l?ge de l?adolescence sans savoir lire, crire ou compter.

    [39] Le Baromtre des apprentissages en Afrique est un outil dvelopp par le Centre pour l?ducation universelle hberg par la Brookings Institution et This is Africa, une revue du Financial Times. Cet outil pro-pose de visualiser la situation de l?ducation en Afrique ? une dclinai-son de l?outil existe galement pour les pays arabes ? sur la base de quatre indicateurs que sont : le taux de participation dans l?enseigne-ment, le taux d?achvement, la qualit de l?ducation et les ingalits ducatives. L?tude couvre 28 pays et 78% de la population d?ge pri-maire sur le continent.

    Une crise universelle des apprentissages

    En Inde, un rapport annuel sur la situat ion de l?duca-t ion montre que si 96% des enfants accdent l?duca-t ion primaire, seuls 47% des lves de 4me anne du primaire sont capables de lire un texte calibr pour des lves de 2me anne41. 52,3% des enfants de 5me an-ne du primaire en Inde parvenaient rsoudre une soustract ion deux chiffres en 2013, contre 70,8% en 2010.

    Le niveau de matrise des apprentissages diminue trs vite (voir Illustrat ion 4). Le rapport d?Aser41 t-moigne en plus d?une acclration des ingalits d?ap-prentissage entre d?une part les enfants scolariss dans l?enseignement public et d?autre part ceux scolariss dans le priv. Les mmes tendances s?observent en Afrique : au Mozambique et en Afrique du Sud par exemple, les enfants issus des familles les plus pauvres sont sept fois plus susceptibles que ceux des mnages les plus riches d?tre parmi les 10% d?lves avec le plus faible niveau de matrise des apprent issages.

    [40] Op. cit., K. Watkins.

    2. 1.

    26

    [41] Annual Status Education Report 2013, ASER Centre 2014.

    AU MOZAMBIQUE ET EN AFRIQUE DU SUD, LES ENFANTS ISSUS DES FAMILLES LES PLUS PAUVRES SONT SEPT FOIS PLUS SUSCEPTIBLES D'TRE PARMI LES 10% D'LVES AVEC LE PLUS FAIBLE NIVEAUQUE CEUX DES MNAGES LES PLUS RICHES.

    EN THIOPIE, AU NIGERIA ET EN ZAMBIE, PLUS DE LA MOITI DES ENFANTSEN 4ME ET 5ME ANNE DU PRIMAIREONT DES RSULTATS INFRIEURSAU NIVEAU MINIMAL REQUIS.

    S

    http://www.brookings.edu/research/interactives/africa-learning-barometerhttp://www.brookings.edu/research/interactives/africa-learning-barometerhttp://www.brookings.edu/research/interactives/africa-learning-barometerhttp://www.brookings.edu/research/interactives/africa-learning-barometerhttp://www.brookings.edu/research/interactives/africa-learning-barometerhttp://www.brookings.edu/research/interactives/africa-learning-barometerhttp://www.brookings.edu/research/interactives/africa-learning-barometerhttp://www.brookings.edu/research/interactives/africa-learning-barometerhttp://www.brookings.edu/research/interactives/africa-learning-barometerhttp://www.brookings.edu/research/interactives/africa-learning-barometer

  • Mais dans un contexte de raret des financements, le fait qu?un certain nombre d?enfants aillent l?cole sans pour autant raliser les apprent issages de base repr-sente une perte d?argent que de nombreux pays en d-veloppement ne peuvent tout simplement pas se per-mettre. 129 milliards de dollars US sont ainsi perdus chaque anne du fait de la non-matrise par les lves des comptences et apprentissages de base, ce qui re-prsente 10% de l?ensemble des dpenses en faveur de l?ducat ion dans le monde42.

    Par ailleurs, s?il est souhaitable ? et c?est manifeste-ment une avance ncessaire ? de mesurer les appren-t issages raliss par les lves, notamment en lecture, calcul et criture, la qualit de l?ducation ne se rsume pas la seule acquisition de ces apprentissages. Elle re-couvre un ensemble plus complexe et comprend des comptences plus transversales comme la citoyennet mondiale, la sant ou la protect ion de l?environnement. Sans parler d?autres types de comptences ? indispen-sables pour la vie ? comme la capacit travailler et r-flchir en groupe, la crat ivit et la capacit d?innova-t ion ainsi que la rsolut ion de problmes complexes.

    AU TOTAL, 37 PAYS PERDENT AU MOINSLA MOITI DE CE QU?ILS ONT INVESTIDANS L?DUCATION PRIMAIRE.

    [42] Op. cit., UNESCO 2014.

    Une crise universelle des apprentissages

    2. 1.

    Pascale Thophile

    27

    DANS 11 PAYS, MOINS DE 50%DES ENSEIGNANTS DISPOSENTD'UNE FORMATION CONFORMEAUX STANDARDS NATIONAUX.

  • Or, le niveau de formation des enseignants a un fort impact sur la qualit de l?ducat ion, surtout si l?on considre le peu de moyens attribus la formation cont inue. Au Kenya par exemple, les enseignants de 6me anne obt iennent aux tests prvus pour leurs lves moins de 60% de bonnes rponses44. Au Lesotho, au Mozambique et en Ouganda, moins de la moiti des enseignants obtiennent des scores se situant dans la partie suprieure des tests d?valuation destins aux enfants de 12 ans45.

    Malheureusement, peu de disposit ifs permettent aux enseignants d?lever leur niveau de comptence en cours d?exercice. Au Niger, les interviews conduites auprs des enseignants par Aide et Act ion Internat ional montrent que 20% des enseignants en poste n?ont eu accs aucune formation au cours des deux dernires annes.

    28

    Et on notera que ces formations ne sont pas toujours en rapport avec les problmatiques auxquelles font face les enseignants : par exemple, il n?est pas rare de constater que malgr l?instaurat ion d?un nouveau programme, les formations cont inuent de porter sur l?ancien.

    En outre, un enseignant en capacit de dispenser une ducat ion de bonne qualit est aussi un enseignant qui se sent reconnu, valoris, soutenu, et qui est correctement pay. Sur ce point, les enqutes menes par Aide et Act ion Internat ional montrent des rsultats difiants. Au Niger, 90% des enseignants estiment que leur salaire ne leur permet pas de vivre correctement : 15% d?entre eux affirment ne pas se sent ir soutenus et 26% disent ne pas se sent ir reconnus, que ce soit par l?tat, les familles ou la communaut.[43] Ibid.

    i l?on souhaite que les enfants puissent raliser les apprent issages de base, cela suppose qu?ils aient accs une ducat ion de bonne qualit. Mais

    qu?est-il enseign aux enfants ? Qui leur enseigne ? Comment apprennent-ils ? Dans quelles condit ions ? Les enseignants jouent un rle majeur dans les acquisit ions que peuvent faire les enfants, mais l?intrt qui leur est consacr est assez rcent. Selon l?UNESCO, 4,2 millions doivent tre recruts d?ici 2020 pour permettre chaque enfant d?ge primaire de bnficier d?une ducat ion de qualit. Les taux d?encadrement ? soit le nombre d?lves par enseignant ? sont rests quasiment inchangs depuis 1999, tant au niveau pr-primaire que primaire et secondaire.

    En Afrique subsaharienne, malgr les efforts consen-t is, le recrutement d?enseignants est plus lent que la progression des effectifs scolaires, ce qui conduit mca-niquement une stagnat ion des taux d?encadrement. Ainsi, sur les 162 pays pour lesquels les donnes taient disponibles en 2011, 26 ? dont 23 sont situs en Afrique subsaharienne ? affichent des taux d?encadrement su-prieurs 40 lves par enseignant43.

    Pour faire face la demande, de nombreux pays ont choisi d?abaisser le niveau de formation requis pour les enseignants recruts ou de diminuer la dure de leur formation. Dans d?autres pays ? comme Madagascar ? les communauts recrutent localement des enseignants avec un niveau de qualificat ion moindre, tandis que l?enseignement priv se dveloppe fortement. Rsultat : dans la moiti des 60 pays pour lesquels on dispose de donnes, 25% des enseignants n?ont pas suivi de formation conforme aux normes nationales. Pour 11 autres pays, c?est le cas de moins de 50% d?entre eux. Au niveau secondaire, si le taux d?encadrement est meilleur, le niveau de formation demeure faible.

    Les enseignants sont les pivots de la qualit de l?ducation

    2. 2.

    AU KENYA, LES ENSEIGNANTS DE 6ME ANNE OBTIENNENT MOINS DE 60%DE BONNES RPONSES AUX TESTSPRVUS POUR LEURS LVES.

    [44] Ibid.

    [45] Op. cit., The Brookings Institution.

    S

  • 29

    Madagascar : le cas des matres FRAM

    Les matres FRAM ( Fikambanan?ny ray aman-drenin?ny mpianatra , associat ion de parents d?lves en malgache) sont le fruit d?un processus qui remonte au milieu des annes 70. cette poque, des coles pri-maires sont construites massivement par les commu-nauts locales. Le ministre de l?ducat ion Nationale (MEN) a rapidement t dpass et n?est plus parvenu rpondre aux besoins en enseignants des coles pu-bliques. Face cette situat ion, les parents d?lves, par le biais de leur associat ion, ont eux- mmes pris en charge le recrutement d?enseignants. Deux problmes majeurs se posent et expliquent en quoi ces derniers ont autant contribu la dtriorat ion de la qualit de l?en-seignement dans la dernire dcennie : leur finance-ment et leur formation.

    Jusqu?en 2003, ces enseignants non- fonct ionnaires sont recruts au niveau local par les associations de pa-rents d?lves. Celles- ci les payent de diffrentes ma-nires (argent liquide et/ou sacs de riz et/ou parcelle de terre cult iver). part ir de 2003, en complment des associat ions FRAM, l?tat entreprend de subventionner les matres par le biais d?une indemnit mensuelle paye pendant 9 mois. En 2013, la Banque mondiale, l?Union europenne et l?Unicef ont dcid de contribuer au fi-nancement de cette indemnit. Il a fallu rgulariser la si-tuat ion, ce qui a entran un retard dans le paiement de ces subventions puis des mouvements massifs de grve.

    Autre problme : les matres FRAM touchent leur subven-tion dans les bureaux de poste, ce qui les oblige se dplacer et donc s?absenter r-gulirement. 56% des enfants interrogs par Aide et Act ion Inter-nat ional Madagascar se disent ainsi rguli-rement obligs de re-tourner chez eux parce que l?enseignant n?est pas prsent l?cole. Cette situat ion a donc un im-pact important sur l?absentisme des enseignants FRAM, qui sont nombreux dclarer ne pas tre tou-jours pays dans les temps. Fin janvier 2014, le service de transfert d'argent et de paiement mobile du groupe Orange (Orange Money) s?est associ l?Unicef afin d?assurer un paiement scuris et rgulier des ensei-gnants communautaires FRAM.

    C?est partir de 2003 que la dtrioration de la qua-lit de l?enseignement s?est acclre Madagascar, c?est--dire au moment o l?tat a dcid de subvention-ner ces postes et de procder leur recrutement massif. C?est seulement dix ans plus tard que le MEN a dcid de corriger ce choix de polit ique ducat ive en mettant en ? uvre un Plan Intrimaire de l?ducat ion (PIE). Jusqu?ici, la grande majorit de ces enseignants tait au moins t itulaire d?un BEPC, soit l?quivalent d?un diplme de fin de classe de seconde. Dsormais, le ministre es-t ime qu?il faut tre issu des inst ituts nat ionaux de for-mation et/ou cert ifi dans des coles de formation de l?enseignement . Problme : sur les 60 000 matres FRAM, seuls 20 000 pourront bnficier de cette remise niveau. Les autres enseignants non- fonct ionnaires sont vous disparatre d?ici 2016, hypothquant un peu plus les capacits d?accueil des coles.

    AVANT 2003, IL Y A AVAIT 8 000 MATRES FRAM. ILS SONT PASSS DE

    13 000 EN 2004 35 000 EN 2007, O ILS REPRSENTAIENT PLUS DE LA MOITI DES ENSEIGNANTS DU PRIMAIRE. AUJOURD'HUI, IL Y A PLUS DE 45 000 MATRES FRAM, SOIT 2 ENSEIGNANTS SUR 3 M ADAGASCAR.

    Pierre-Yves Babelon

  • III. Vers un engagement renouvel ?e mouvement en faveur de l?ducat ion pour Tous, init i il y a maintenant 25 ans en Thalande Jomtien46, avait permis de fixer des object ifs

    ambit ieux. Ces object ifs ? il s?agissait d?ailleurs davan-tage de thmatiques ? incluaient galement leur d-clinaison au niveau nat ional travers l?laborat ion de plans de mise en ? uvre censs prendre en compte les situat ions de chaque pays. Mais progressivement, un glissement s?est opr dans le discours. Disons en tout cas que le chevauchement des six objectifs de l?duca-tion pour Tous et des deux objectifs du Millnaire pour le dveloppement concernant l?ducation n?a pas favo-ris la lisibilit des objectifs internationaux en faveur de l?ducation.

    Par exemple, si l?accent est aujourd?hui mis sur la n-cessaire art iculat ion entre accs et qualit de l?duca-t ion, on remarquera que cette dimension a toujours t prsente dans le cadre d?act ion de l?ducat ion pour Tous, et ce depuis la confrence de Jomtien en 1990. Pour le dire autrement, gardons- nous de penser que nous aurions trouv la solut ion miracle pour rpondre aux enjeux ducat ifs que connaissent de nombreux pays dans le monde, car en vrit, l?amlioration de la qua-lit figure depuis 25 ans parmi les objectifs atteindre, mais faute d?une vision concrte et d?indicateurs adap-ts, et aussi sans doute par manque de volont polit ique, elle n?a jamais vraiment t prise en compte en tant qu?object if prioritaire.

    Depuis deux ans, de nombreux groupes de travail ? mis en place notamment par les Nations unies ? et consultat ions thmatiques ont permis de faire merger l?ducat ion comme un object if majeur des futurs Objec-t ifs de dveloppement durable (ODD). L?init iat ive My World, laquelle prs de 1,5 million d?habitants du monde ent ier ont pris part47, a ident ifi l?accs une ducation de qualit comme la priorit n1 des ci-toyens. Le Sustainable Development Solutions Network a mis en place dix groupes d?experts thmatiques dont l?un est consacr au dveloppement de la pet ite en-fance, l?ducat ion et la transit ion vers l?emploi.

    30

    [46] En mars 1990, lors de la Confrence mondiale sur l'ducation pour Tous Jomtien en Thalande, les dlgus de 155 pays ainsi que des reprsentants d'environ 150 organisations se sont mis d'accord pour universaliser l'enseignement primaire et rduire radicalement l'illettrisme avant la fin de la dcennie.

    [47] En date du 13/03/2014.

    Estelle Fenech

    L

    LORS D'UNE ENQUTE MENE DANS DIX PAYS, 57% N'AVAIENT JAMAIS ENTENDU PARLER DES OMD.

  • Le Panel de haut-niveau sur l?agenda post-2015 du d-veloppement a galement contribu dfinir des objec-t ifs d?ducat ion48, sans oublier l?init iat ive Global Educa-tion First lance par le Secrtaire gnral des Nations unies. Les initiatives se sont donc multiplies pour faire merger et documenter les enjeux ducatifs afin de les faire figurer en bonne place dans le futur agenda du dveloppement.

    Toutes ces mobilisat ions ont permis d?accrotre la visi-bilit de l?ducat ion. Mais elles ont aussi, par manque de transversalit et de vision globale, contribu brouiller la lisibilit des objectifs soutenus par la com-munaut internationale. Ainsi, bon nombre de pays en dveloppement peinent percevoir clairement de quelle manire ces init iat ives parallles s?art iculent et la nature de la contribut ion que l?on attend d?eux. Par ailleurs, leur existence pose aussi cruellement la ques-t ion du leadership. Quelle organisation serait en me-sure de tenir, sur la dure et de manire cohrente, le rle de chef de file requis par les enjeux et objectifs in-ternationaux de l?ducation ?

    [48] Le Panel de haut-niveau identifie quatre objectifs : i) Augmenter de x% la proportion d?enfants en situation d?accder et d?achever un cycle d?ducation pr-primaire ; ii) Assurer que tous les enfants, ind-pendamment de leur situation, achvent un cycle d?ducation primaire en matrisant la lecture, l?criture et le calcul de manire satisfaire les standards minimum d?apprentissage iii) Assurer que tous les enfants , indpendamment de leur situation, accdent au premier niveau de l?ducation secondaire et amliorer de x% la proportion d?adolescents qui atteignent un niveau d?apprentissages reconnus et mesurables ; iv) Augmenter de x% le nombre de jeunes et d?adultes ? hommes et femmes ? matrisant les comptences ncessaires l?emploi, y compris les comptences techniques et professionnelles.

    Pour le moment, force est de constater qu?une vision claire et mobilisatrice peine merger49. Les objectifs demeurent flous, beaucoup trop nombreux ? le docu-ment sur lequel les Nations unies travaillaient en juin 2014 contenait 17 objectifs et 212 actions cibles ? et les proposit ions avances peinent parfois s?appuyer sur des cas d?tude concrets et impliquer les popula-t ions. Cette implicat ion est pourtant essent ielle. Ainsi, en 2010, Aide et Act ion Internat ional avait conduit des interviews dans 10 pays (Cambodge, Chine, Hat i, Ma-dagascar, Mali, Rpublique Dominicaine, Sngal, Tanza-nie, Togo et Vietnam) pour mesurer le degr de connais-sance que les populat ions avaient des Object ifs du Mil-lnaire pour le dveloppement (OMD)50. Cette tude rvlait que 57% des personnes interroges n?avaient jamais entendu parler des OMD, ce qui rvle claire-ment une faible implication des acteurs concerns dans la planification, la mise en ? uvre, le suivi et l?va-luation des objectifs.

    31[49] K. King and R. Palmer, Education and skills post- 2015: what evi-dence, whose perspectives?, NORRAG (Working paper #6), 2013.

    [50] OMD 2015 : le mirage !, Aide et Action International, 2010.

    Pascale Thophile

  • es Object ifs du Millnaire pour le dveloppe-ment sont plus vastes que les object ifs de l?du-cat ion pour Tous (EPT) puisqu?ils incluent des

    thmatiques comme la rduct ion de la pauvret ou la sant maternelle et infant ile. Toutefois, des liens peuvent tre crs ? ce qui a d?ailleurs t fait de multiples reprises ? entre d?un ct les OMD n2 et n 3 concernant respectivement la scolarisation primaire universelle et l?autonomisation des femmes, et de l?autre les objectifs de l?EPT. Pourtant ces derniers portent une vision beaucoup plus large, la fois dans leur conception mme de l?ducat ion qui ne se rduit pas aux murs d?une salle de classe, que dans les cibles qu?ils se sont donnes et qui concernent les enfants d?ge primaire mais aussi les jeunes et les adultes.

    Or, au fil du temps, les OMD ont fini par constituer la colonne vertbrale du dveloppement, mais aussi de l?ducation. En Afrique tout part iculirement, ils ont jou un rle moteur pour le dveloppement51. Cepen-dant, alors que la Dclarat ion du Millnaire liait ces dif-frents object ifs en en faisant des thmatiques connexes s?alimentant les unes les autres, leur mise en ? uvre s?est faite de ma-nire troite, sans lien, sans transversalit. Et cela a encore accentu le dca-lage entre d?une part les OMD concernant l?duca-t ion et d?autre part les ob-ject ifs de l?EPT.

    quoi bon chercher promouvoir les comptences des jeunes si le seul object if l?aune duquel les rsultats sont valus concerne l?ducat ion primaire ? Cette focalisat ion sur l?accs l?enseignement primaire a sans conteste port ses fruits. Pour preuve, 90% des pays ont atteint l?object if et seuls 19 pays sur 212 ne l?atteindront vraisemblablement pas52. Mais dans le mme temps, nous avons oubli ? ou feint d?oublier ? que l?amlioration du taux d?inscription et des taux d?achvement dans l?enseignement primaire ne constitue pas une amlioration de la qualit de l?ducation. Et que l?ducat ion primaire, bien que fondamentale, ne suffit pas donner aux enfants, aux jeunes et aux adultes les connaissances, comptences et att itudes ncessaires pour leur inclusion sociale, conomique et polit ique au 21me sicle.

    Autrement dit , l?ducat ion et la formation cont inue des jeunes enfants aux adultes, rpondant aux besoins spcifiques des apprenants en fonct ion des opportunits qui se prsentent eux, s?avrent tre fondamentales pour des pays en dveloppement qui ont bien l?intent ion de part iciper pleinement une conomie mondialise de la connaissance. part ir de l, force est de constater que l?OMD n2 sur la scolarisation primaire universelle s?est rvl obsolte quasiment ds sa mise en ? uvre ? mme s?il aura fallu prs de 15 ans pour l?admettre. l?inverse, les object ifs de l?EPT ont prsent un cadre d?act ion plus holist ique, plus adaptable, plus volut if, suscept ible de rpondre aux nouveaux enjeux mergents, mais aussi moins mobilisateur au niveau internat ional.

    32

    [51] R. Manning, C. Harland Scott et L. Haddad. Whose Goals Count? Lessons from Setting the Next Development Goals. IDS Bulletin, volume 44, n5. 2013. Consult le 10/04/2014.

    [52] Interview de Lant Pritchett, ?From Schooling Goals to Learning Goals?, par L. MacDonald. Center for Global Development, 27 nov. 2012. Consult le 28/03/2014.

    OMD et objectifs EPT : une articulation diffici le

    3. 1.

    [Illustrat ion 7] Objectifs du Millnaire pour le dveloppement (OMD) adopts New York en 2000

    L

  • e financement de l?ducat ion const itue un enjeu majeur, surtout l?heure o il s?agit de savoir comment atteindre les object ifs jusque l non-

    atteints tout en en visant de nouveaux. Selon l?UNESCO, il manque chaque anne 26 milliards de dollars US pour atteindre les object ifs de l?ducat ion primaire, auxquels il faut encore ajouter 12 milliards par an pour atteindre les object ifs du premier niveau de l?enseignement se-condaire, soit au total 38 milliards de dollars US par an.

    Du ct des pays en dveloppement, on constate que les dpenses publiques d?ducat ion ont augment, en part iculier dans les pays revenu faible et intermdiaire o la croissance conomique s?est acclre et a permis de gnrer des ressources supplmentaires alloues l?ducat ion. En moyenne, les dpenses publiques d?du-cat ion sont ainsi passes de 4,6% du PNB en 1999 5,1% en 201153. On note donc un effort rel, mais tou-jours insuffisant puisqu?il est est im que 6% du PNB de-vrait tre consacr chaque anne l?ducat ion pour at-teindre les object ifs. Or, en 2011, sur les 150 pays dispo-sant de donnes, seuls 41 ont allou l?ducat ion 6% du PNB ou davantage, contre moins de 3% dans 25 pays. Moins un pays pauvre dpense en matire d?ducation, plus il a besoin d?en faire autant. Pour briser ce cercle vicieux, certains proposent de refuser de financer les pays ne respectant pas les minima des indicateurs de dpenses pour l?ducat ion54.

    Par ailleurs, si les ressources disponibles pour l?duca-t ion ont augment, la part du budget allou l?ducat ion n?a pas chang depuis 1999. Sur les 138 pays pour les-quels on dispose de donnes, 25 seulement consacrent plus de 20% de leur budget ? le niveau recommand ? l?ducation. On constate que la part de l?ducat ion dans les dpenses publiques totales a mme baiss dans certains pays.

    L?accroissement des recettes publiques disponibles const itue une priorit pour les pays en dveloppement : actuellement, moins de 0,1% de l?aide est dpense pour le renforcement des systmes d?imposit ion, alors que chaque dollar invest i en rapporte 350. En outre, privil-gier le contrle local et communautaire des budgets augmente la transparence et rend les gouvernements responsables devant les citoyens et non plus devant les bailleurs externes.

    Enfin, pour que l?allocat ion des ressources soit coh-rente et quitable, il ne faut pas trop miser sur l?ensei-gnement suprieur ? qui a tendance profiter une lite ayant eu les moyens d?atteindre un tel niveau d?ducat ion ? mais plutt renforcer la protection so-ciale, mettre en place des programmes de transferts montaires et scolariser les plus marginaliss, notam-ment les enfants handicaps55.

    33[55] Ibid.

    Le dficit de financement de l'ducation

    3. 2.

    [53] Op. cit., UNESCO 2014.

    [54] D. Archer, ?Education aid gets children into school but it 's not the smartest solution?, The Guardian. Consult le : 25/06/2014.

    M OINS DE 0,1% DE L'AIDE EST DPENSE POUR LE RENFORCEMENT DES SYSTMES D'IMPOSITION, ALORS QUE CHAQUE DOLLAR INVESTI EN RAPPORTE 350.

    Pascale Thophile

    L

  • 34

    Si un certain nombre de pays parmi les plus pauvres du monde dcidaient d?largir leur assiette fiscale et de consacrer 20% du budget l?ducat ion sur la base de ces ressources nouvelles, les gouvernements pourraient ainsi mobiliser 153 milliards de dollars US supplmen-taires en faveur de l?ducation56. Si l?on ajoute cela les 129 milliards de dollars US que reprsente l?argent perdu chaque anne en raison des apprent issages de faible qualit raliss par les lves, le dficit de finan-cement de 38 milliards de dollars US par an pourrait ai-sment tre rsorb si les mesures appropries taient mises en place.

    Reste que pour certains pays, l?aide l?ducation continue de constituer une part vitale de leur budget. Or, depuis 2010, l?aide l?ducat ion diminue, tandis que l?aide publique au dveloppement a, elle, augment. Sur la priode allant de 2010 2013, l?aide l?ducat ion a baiss de 10%, tandis que celle ddie l?ducat ion de base a diminu de 20%57, traduisant une rorientation croissante des ressources vers d'autres secteurs, au dtriment de l?enseignement primaire et du premier ni-veau du secondaire. Les pays pour lesquels cette aide est la plus ncessaire sont prcisment ceux qui ont t le plus touchs par la diminut ion de l?aide l?ducat ion qui reste par ailleurs, et contrairement aux engage-ments pris dans la Dclarat ion de Paris58, mal coordon-ne et peu prvisible.

    [58] La Dclaration de Paris Sur l?Efficacit de l?Aide au Dveloppement (DdP) est une charte rdige en 2005 sous l?gide du Comit d?Aide au Dveloppement de l?OCDE. Le but de la DdP est de crer un cadre commun d?action pour les agences nationales d?aide au dveloppement afin d?amliorer l?acheminement et la gestion de l?aide publique, selon cinq principes directeurs (appropriation, alignement, harmonisation, gestion axe sur les rsultats, responsabilit mutuelle).

    [56] Op. cit., UNESCO 2014.

    [57] EFA Global Monitoring Report team analysis based on OECD Creditor Reporting System (2014).

    ENTRE 2010 ET 2013, L'AIDE L'DUCATION A BAISS DE 10%,TANDIS QUE CELLE DDIE L'DUCATIONDE BASE A DIMINU DE 20%.

    Le dficit de financement de l'ducation

    3. 2.

    Pierre-Yves Babelon

  • ?ducation s?avre tre l?une des principales proccupations des citoyens du monde. L'en-qute My World59 lance en 2013 auprs des ci-

    toyens du monde ent ier leur demandait de choisir leurs cinq priorits parmi 16 items comme l?accs l?eau po-table, la bonne gouvernance, l?environnement, etc. Et quasiment partout dans le monde, qu?il s?agisse des pays faible revenu, revenu intermdiaire ou lev, c?est l?ducat ion qui arrive en tte des votes. Et les rares fois o cela n?est pas le cas (notamment pour la catgorie des plus de 55 ans), l?ducat ion est toujours cite dans les trois premires priorits.

    Pourtant, jusqu? rcemment, l?inscription d?un ob-jectif li l?ducation dans le futur agenda du dvelop-pement ne semblait pas aller de soi. Quatre enjeux semblent merger du rapport issu de la consultat ion thmatique mondiale sur l?ducat ion60. Atteindre les ob-ject ifs de 2000 pour les pays qui n?y sont pas parvenus ; largir l?accs l?ducat ion au- del du primaire en in-cluant les niveaux secondaire et suprieur ; amliorer la qualit de l?ducat ion et tablir des liens forts entre l?ducat ion et les object ifs transverses.

    Reste savoir comment traduire ces object ifs en ac-t ions concrtes, comment suivre leur progression et avec quels indicateurs. Les OMD et les objectifs EPT constituaient un but atteindre pour l?ensemble des pays en dveloppement, indpendamment de leur tat, de leur situation de dpart et des moyens dont ils dis-posaient pour cela.

    Et cet tat de fait n?a pas t sans provoquer des situa-t ions quivoques, notamment dans la marge de ma-noeuvre et d'adaptat ion des object ifs aux contextes lo-caux. Par exemple, le cas d?un pays vivant une situat ion de conflit persistante avec une vaste populat ion d?en-fants non scolariss peut- il tre mis sur le mme plan que celui d?un pays avec une situat ion polit ique stable en passe de raliser l?accs universel l?ducat ion pri-maire ? Si les object ifs apparaissent d?emble inattei-gnables, les pays concerns peuvent tre tents de ne pas y consacrer assez d?efforts. l?inverse, si les objec-tifs sont dj atteints ou en passe de l?tre, quel intrt un pays peut-il avoir jouer le jeu ?

    35

    Sur quelles bases orienter les futurs objectifs d'ducation ?

    3. 3.

    PARTOUT DANS LE MONDE, QUE CE SOIT DANS UN PAYS REVENU FAIBLE, INTERMDIAIRE OU LEV, L'DUCATIONEST TOUJOURS CITE DANSLES TROIS PREMIRES PRIORITS.

    [ENQUTE MY WORLD]

    Estelle Fenech

    [59] MyWorld est une initiative mondiale lance par les Nations Unies et d'autres partenaires avec pour objectif de permettre l'expression des opinions, priorits et visions que les citoyens du monde ont au su-jet du dveloppement pour les 15 prochaines annes.

    [60] Global Thematic Consultation on Education in the Post-2015 Deve-lopment Agenda. Making Education a Priority in the Post-2015 Develop-ment Agenda, UNESCO & Unicef 2013.

    L

  • C?est ce quest ionnement qui a entran un dbat sur le niveau auquel les futurs object ifs de dveloppement doivent tre placs, au niveau internat ional (avec les mmes object ifs pour tout le monde) ou au niveau nat io-nal (avec une spcificat ion des object ifs en fonct ion des pays). L?exprience des OMD et des object ifs EPT montre clairement que le fait d?avoir des object ifs uniques permet de mobiliser l?ensemble de la commu-naut internat ionale et d?orienter l?act ion vers un but prcis. condition que ces objectifs et leurs indica-teurs de suivi soient bien construits. Et c?est l le deuxime point d?attent ion soulever. Si l?on se penche sur les object ifs EPT, certains peuvent apparatre flous dans leur formulation et dans l?identification des cibles et indicateurs permettant de mesurer les progrs vers leur ralisat ion. L?object if de l?EPT concernant la qualit de l?ducat ion par exemple s?est avr extrmement large et peu prcis, tant il recouvre des conceptions dif-frentes de la qualit de l?ducat ion.

    Si aujourd?hui le dbat sur les apprent issages est sur le devant de la scne ? et c?est sans doute une bonne chose ? il convient cependant de noter que la qualit de l?du-cation ne peut se limiter aux seuls apprentissages et qu?il reste savoir comment mesurer les apprent issages informels raliss par les enfants, les jeunes et les adultes, notamment ceux n?ayant pas termin un cycle complet d?tudes primaires. Or, les futurs object ifs d?ducat ion tels qu?ils semblent merger dans le dbat internat ional restent encore essentiellement focaliss sur l?ducation scolaire, c?est--dire celle dispense par le systme ducatif formel, sans que d?autres alterna-t ives ducat ives ne soient clairement favorises.

    Plusieurs questions concrtes mergent donc. Com-ment faire en sorte que les futurs object ifs d?ducat ion puissent s?appliquer l?ensemble des pays indpendam-ment de leur situat ion ? Comment rpondre aux besoins ducat ifs des enfants et des jeunes qui en sont toujours exclus en raison de leur lieu de rsidence, de leur statut conomique, de leur sexe, de la langue qu'ils parlent ou de leur appartenance ethnique ? quelle vision de l?du-cat ion, adapte aux dfis du 21me sicle, les futurs ob-ject ifs doivent- ils rpondre ? Comment formuler et suivre les object ifs pour rpondre la fois la quest ion de l?accs l?ducat ion et de la qualit des apprent is-sages ?

    Tous les niveaux de l?ducat ion doivent- ils tre concerns, y compris l?enseignement suprieur, ou devrait- on se concentrer sur les niveaux du pr-primaire, du primaire et du secondaire infrieur ? Com-ment inclure dans ces object ifs d?ducat ion des enjeux transversaux comme le dveloppement durable par exemple ? Toutes ces questions sont vitales pour identi-fier un ensemble cohrent de priorits, laborer des objectifs pertinents et mettre en ? uvre les bons indicateurs.

    36

    Sur quelles bases orienter les futurs objectifs d'ducation ?

    3. 3.

    Sandrine Assouline

  • Cependant, avant cela, un point de mthodologie doit tre lucid. Si les OMD et les object ifs EPT ont bien t appropris par les tats et gouvernements ? notamment des pays en dveloppement ? il n?en a pas t de mme pour les acteurs locaux. Sur le terrain, les populat ions ne connaissent pas les OMD ou les object ifs EPT, et quand tel est le cas, ces objectifs apparaissent clairement comme dconnects du terrain, penss par des gens l-haut mais sans lien avec la ralit quot i-dienne. Comme si, penss pour rpondre aux besoins des populat ions marginalises, les object ifs de dvelop-pement taient prcisment considrs par ces mmes populat ions comme ne les concernant pas elles, mais s?appliquant ceux de l- haut . Intressante contradict ion.

    Cette observat ion devrait nous amener interroger davantage l?implicat ion des citoyens au niveau local dans les futurs object ifs d?ducat ion et l?adquation entre les objectifs prdfinis et leurs aspirations conc