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ROBINDES GRAFFS

La nuit, Sam graffe les animaux d’un vieil imagier

sur les murs de Paris. Le jour, il joue aux échecs

avec madame Decastel et chante à l’enterrement

des SDF morts à la rue. Une vie bien réglée que Bonny

va torpiller. Elle a cinq ans, a fugué de son foyer et décide

que Sam sera sa nouvelle famille : elle ne le lâche plus.

Le capitaine de police Nora Laval est sur les dents :

comment capturer le graffeur adoré des réseaux sociaux

et retrouver la petite fille et son kidnappeur quand

sa propre vie prend l’eau ? Nora va perdre le contrôle,

c’est sûr…

Fourmillant de scènes cocasses, drôles et émouvantes,

foisonnant de personnages, le roman de Muriel Zürcher

nous invite dans un monde chaleureux et positif.

Collection animée par Soazig Le Bail, assistée de Charline Vanderpoorte.

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ROBINDES GRAFFSROMAN

MURIEL ZÜRCHER

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Née en 1971, Muriel Zürcher est un homo sapiens du

XXe siècle encore non fossilisé. Elle a suivi de très sérieuses

études puis a exercé un très sérieux métier. Un jour, elle a

écrit un petit truc de rien du tout. Et hop, les mots, les

phrases les livres… tout s’est enchaîné ! Depuis, à Aix-

les-Bains où elle habite, elle continue d’inventer des his-

toires. Elle concocte aussi des documentaires et des livres

d’activités. Ça lui plaît.

Du même auteur aux éditions Thierry Magnier :

Ça déménage au 6B, coll. Roman Ado, 2014.

La Forêt des totems, coll. En voiture Simone !, 2014.

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« Tout le monde en a peur. Toi, comme les autres.

– Faux. Moi, j’ai peur de mourir

avant d’avoir fini de vivre. »

Échange anonyme, gare de Lyon Part-Dieu

« Autour de nous, les étoiles continuaient leur marche

silencieuse, dociles comme un grand troupeau ;

et par moments je me figurais qu’une de ces étoiles,

la plus fine, la plus brillante, ayant perdu sa route,

était venue se poser sur mon épaule pour dormir… »

Lettres de mon moulin – Alphonse Daudet

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Pour Karin.

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Sam glissa la bombe de peinture dans la besace sanglée

contre sa hanche et inspira à pleins poumons. Les effluves

de diluant s’étaient évaporés dans l’air frais de la nuit. Le

graff était terminé.

Agrippé à dix mètres de hauteur sur la façade de

l’immeuble parisien qu’il avait choisie en guise de toile,

le jeune homme était trop proche pour juger du résultat,

mais les signes qu’il ressentait ne le trompaient pas. La

respiration qui s’accélère, cette fébrilité qui télégraphe en

morse dans sa poitrine, le mélange d’envie de rire et de

pleurer, autant de sensations qui accompagnaient l’excita-

tion d’un graff réussi.

Il leva les yeux en l’air, suivant mentalement le chemin à

parcourir avant d’atteindre le toit : longer la corniche, grim-

per le long de la gouttière, franchir le chéneau en surplomb.

Sam devait se calmer avant de reprendre l’ascension. Sans

baudrier ni corde, sa concentration et sa dextérité consti-

tuaient ses seules alliées pour éviter la chute.

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Plus haut, le ciel était grisâtre, de cette couleur de nuit

salie par le halo lumineux de la ville. Seules les étoiles les

plus brillantes s’y détachaient tandis que les autres, plus

lointaines, plus anciennes, mortes déjà peut-être, étaient

éclipsées par l’armée de néons et de leds nichés dans les

lampadaires.

Les doigts de Sam se glissèrent dans une jointure entre

deux pierres de taille. En moins de deux minutes, le garçon

avait escaladé le dernier étage du bâtiment, là où s’ali-

gnaient les fenêtres des chambres de bonne qui héber-

geaient désormais des étudiants.

Nul ne remarqua le grimpeur clandestin qui prit pied

sur le toit de zinc. Le garçon à la peau noire s’était vêtu

d’un jogging anthracite pour ne pas se faire repérer.

La démarche fluide, il avança jusqu’à la lucarne d’un

couloir qui desservait les clapiers de neuf mètres carrés

avec WC sur le palier. Elle n’était pas verrouillée.

Il dévala les sept étages par l’escalier de service, tra-

versa une cour pavée et sortit par une imposante porte

cochère. Pauvres habitants qui pensaient se tenir à l’abri

des intrusions en barricadant l’entrée de leur immeuble !

Sam s’éloigna d’une centaine de mètres sur le trottoir.

Le moment était venu de regarder. Les deux tigres lui sau-

tèrent au visage.

Lorsqu’un dessin prend vie au premier regard jeté, alors

l’artiste a réussi son pari : concentrer en quelques traits

assez d’énergie et d’émotion pour en faire un miroir tendu

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aux vivants. Depuis leur grand pan de mur, le couple de

tigres, muscles ramassés, semblait prêt à sauter au-dessus

de la rue pour se mettre en chasse sur les toits de Paris.

Sam chuchota avec un sourire :

– Il est pour toi, Gabrielle.

Sa montre indiquait 4 heures. Il se mit en route. Le

temps de regagner son clapier, il lui resterait six heures de

sommeil avant de pousser la porte du commissariat.

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Assise sur l’une des chaises à coque de l’espace

attente du commissariat, une femme au visage trop

plastiqué pour qu’on puisse lui donner un âge grom-

mela son agacement au travers de son étole de soie. Un

grand dadais noir venait de pousser la porte, et l’agent

d’accueil, tout en parlant dans le combiné de téléphone

coincé entre son épaule et sa tête, lui avait fait signe

d’approcher.

Le goujat, il ne pouvait pas faire la queue comme

tout le monde ? Elle patientait depuis plus d’un quart

d’heure, dix-sept minutes pour être précis. Avec les

appels que l’auxiliaire d’accueil avait enchaînés, elle

n’avait même pas encore eu l’opportunité d’expliquer

la raison de sa présence ici. Et lui, ce gamin à peine

dégrossi… il se pointait et hop, il lui passait sous le

nez ! Le gars pouvait bien lui adresser un sourire gêné,

il n’était qu’un sale petit jeune mal élevé, infoutu de

respecter ses aînés.

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Sam s’excusa d’un sourire en passant devant la femme

qui patientait et s’accouda au guichet d’accueil. La rou-

tine. Depuis le début de l’hiver, il passait au commissariat

quasi quotidiennement. Son visage était devenu familier

aux quatre agents qui se relayaient pour assurer la perma-

nence du matin. Il n’avait même plus besoin de préciser

quelle information il venait chercher.

Toujours en ligne, l’homme en uniforme plongea vers

le tiroir le plus bas du bureau et en extirpa un registre noir.

Derrière la couverture en similicuir, les pages quadrillées

étaient remplies de lignes manuscrites, affublées chacune

d’un tampon officiel : « hôtel de police ».

– On n’en a ramassé qu’un, cette nuit, chuchota le flic,

sa main posée sur le micro du combiné. Joachim Rala-

gueux dit « le Galeux », ça vous dit quelque chose ?

Sam secoua la tête. Non, ça ne lui disait rien.

En un étrange ballet mêlant gestes et paroles, sans quit-

ter son téléphone, l’agent d’accueil conclut leur rencontre.

Il claqua la couverture sur le registre.

– Funérarium du centre.

Il le jeta au fond du tiroir.

– Faudra pas traîner, il est bon pour le carré des indigents.

Sam le remercia, sans préciser qu’il n’y avait pas d’ur-

gence. Voilà plusieurs semaines que ses interlocuteurs le

voyaient passer au commissariat, mais aucun d’entre eux

n’avait eu la curiosité de demander comment se déroulait

la cérémonie d’hommage aux disparus.

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La chorale « Les copains d’abord » regroupait des sans-

toit qui chantaient pour l’enterrement de leurs condis-

ciples. Ses membres avaient depuis longtemps renoncé à

aller dans l’Essonne, au cimetière de Thiais, là où la muni-

cipalité parisienne envoyait les corps des clochards que

personne ne réclamait jamais.

Trop loin, trop de morts, trop paumé, trop d’emmerdes

dans le RER.

Désormais, « Les copains d’abord » chantaient au Père-

Lachaise, le jour de l’enterrement, à l’heure dite… ou à

peu près. Un hymne à la vie en guise de salut à un mort.

Les chanteurs à la voix cassée par la rue savaient bien que

les crevés ne leur en voudraient pas de rester dans Paris

centre et d’y faire la manche auprès des touristes attendris

par leurs chants. Même les guides y trouvaient leur intérêt

en y puisant une nouvelle anecdote à raconter à leur trou-

peau d’étrangers.

Sam salua l’agent. C’était toujours lui que ceux de la cho-

rale envoyaient au commissariat. Un jeune, propre, à peu

près poli, un gars qui n’aurait pas de mal à avoir la liste des

morts. Alors qu’il repartait, Sam ralentit devant les doubles

portes ouvertes sur les marches qui menaient à l’étage.

Là-haut, dans un couloir baptisé « brigade de sécurité

urbaine », une haut gradée travaillait sur les graffs d’ani-

maux que Sam semait sur les bâtiments parisiens depuis

deux mois. Par quel hasard le commissariat qui recensait

les décès des hommes sans toit était-il le même que celui

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où on s’occupait de son affaire ? Pour Sam, la réponse

tenait en une phrase : il n’y avait pas de hasard. Ange

gardien et démon tentateur avaient probablement joué son

avenir au dé. La tentation était grande de monter se rensei-

gner… au risque de se faire remarquer et arrêter. Le démon

tentateur avait emporté la partie.

La première fois, Sam avait découvert ce qui se tramait

à l’étage grâce à une conversation entre l’auxiliaire posté à

l’accueil et la femme chargée de l’enquête.

Depuis ce jour, Sam était monté deux fois, à un mois

d’intervalle, pour suivre l’avancée des investigations. La

dernière remontait à plus de dix jours. Le doute l’habitait.

Et s’il avait fait une erreur ? Et s’il avait laissé un moyen de

remonter jusqu’à lui ?

Une volée de marches et un coup d’œil lui permet-

traient d’être fixé… Il était encore trop tôt pour qu’il soit

arrêté ! En ce matin d’hiver, à quelques jours de la fin de

son projet, il mourait d’envie d’y retourner. Après tout, si

quelqu’un le surprenait à traîner là-haut, il pourrait tou-

jours inventer un prétexte pour justifier sa présence.

Le jeune homme sentit son cœur s’emballer tant le

besoin de savoir le démangeait.

La femme sans ride le suivit d’un regard kalachnikov

tandis qu’il obliquait vers les escaliers.

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À l’étage, le couloir était vide. Aux aguets, Sam avança

jusqu’à la quatrième porte à gauche, coincée entre les

toilettes et le local à photocopies. Par chance, elle était

ouverte et le bureau vide. Il s’y engouffra. Plus loin, des

voix s’échappaient d’autres locaux par les portes béantes.

C’était facile. La personne qui travaillait sur l’affaire

affichait ses infos sur un mur du bureau couvert de vieux

bouts de scotch. La méthode ressemblait à celle utilisée

dans les séries américaines, le tableau numérique en

moins. Sam observa l’ensemble avec attention.

Si la peur de se faire repérer n’avait pas pris le contrôle de

sa respiration, il aurait soupiré de soulagement, car aucun

nouvel élément n’y avait été ajouté, à l’exception d’une poi-

gnée de punaises de couleur sur le plan de Paris. Chaque

punaise identifiait le lieu d’un graff. Plus que quatre, et Sam

aurait achevé son projet. Alors, il pourrait soupirer.

Sam regagna le couloir.

– Vous cherchez quelque chose ?

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Sam se retourna brusquement, l’expression aussi neutre

que possible.

Et merde. Mais d’où sortait-il celui-là ? Un keuf en

jean le toisait, à peine plus âgé que lui, avec cet air de

beau gosse satisfait de lui-même. Il se tenait bras croisés,

appuyé contre le chambranle de la sixième porte à gauche.

– C’est pour les toilettes, expliqua Sam.

– Bien sûr, approuva le policier d’un ton qui démontrait

clairement qu’il n’en croyait pas un mot, les toilettes…

c’est évident.

– Oui, j’ai un souci, il faut que…

Sam ne termina même pas sa phrase, dévoré d’amer-

tume.

Plus que quatre graffs pour boucler le projet. Quatre,

ce n’était rien du tout, l’affaire d’une semaine, dix jours

au maximum, et voilà qu’à cause de cet abruti de policier

tout risquait de s’arrêter. Inutile d’espérer que le keuf le

lâche avant d’avoir creusé, avec interrogatoire et tout le

bazar. Rien qu’à voir son sourire narquois de petit chef,

Sam savait qu’il jouait dans la catégorie pitbull, ces crocs-

d’acier qui ne lâchent rien jusqu’à la mise à mort.

L’attention du pitbull se détourna un instant de Sam.

Un policier en civil accompagné de la vieille peau rafisto-

lée que Sam avait croisée en bas sortirent de l’ascenseur et

passèrent devant eux.

– Salut Jordan ! s’exclama le nouveau venu en tendant

sa main ouverte.

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Les deux collègues se saluèrent tandis que les narines

de la femme frémissaient de triomphe. Justice était faite.

Le tricheur était épinglé. La femme trottina avec satisfac-

tion derrière le policier et tous deux s’engouffrèrent dans

un bureau.

L’attention du pitbull se porta à nouveau sur Sam :

– Faudrait voir à m’expliquer tout ça en détail, histoire

que je comprenne mieux pourquoi c’est dans nos locaux

que t’as choisi de venir pisser.

– C’est pas sa faute ! lui répondit une petite voix. C’est

moi qu’avais envie de pipi !

L’exclamation fit sursauter Sam autant que le jeune

policier. Une enfant avait jailli par la porte des toilettes qui

les séparait.

Elle s’approcha de Sam et glissa sa main dans la sienne.

Le jeune homme tenta de maîtriser sa surprise en la regar-

dant.

Elle avait quoi ? Difficile à dire, il n’y connaissait pas

grand-chose en gamins. Cinq, ou peut-être six ans. La peau

aussi blanche que la sienne était noire.

Le policier passa du molosse d’attaque au bon gros

chien de famille en s’agenouillant devant la petite.

– Qu’est-ce que tu fais là, petite ? Elle est où ta maman ?

– Elle est morte, cause qu’elle est tombée dans le trou

des cabinets.

À ces mots, Sam retrouva subitement sa voix. L’occasion

inespérée lui était donnée de s’en sortir sans dommage.

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– Lola, arrête de dire des bêtises ! Allez, viens, faut que

je te ramène chez toi, maintenant.

Il esquissa un sourire gêné pour expliquer au policier :

– C’est ma petite cousine. D’habitude, on va dans les

chiottes Decaux, mais là, elle pouvait plus se retenir. Elle

est petite, vous comprenez. Dis au revoir au monsieur,

Lola.

Il se remit en marche, la petite à ses côtés, sans que le

policier l’interpelle. Lorsqu’ils atteignirent le bout du cou-

loir, l’enfant s’exclama :

– Au revoir, monsieur !

Jordan haussa les épaules. Le gars cachait un truc

louche, il en était certain. Il connaissait bien ce genre de

types. Des zéros, des minables, des gars qui ne feraient

jamais rien de leur vie. Pas comme lui.

Lui savait se donner les moyens. Jordan tapota la poche

arrière de son jean. Sous ses doigts, il sentait son porte-

feuille dans lequel il avait rangé sa carte professionnelle.

Lui, il bossait dans la police.