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La moyenne arithmético-géométrique : applications et généralisations. John Boxall [email protected] Laboratoire de Mathématiques Nicolas Oresme, UFR Sciences, Université de Caen Basse-Normandie, France. le 2 avril 2008 John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 1 / 320

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La moyenne arithmético-géométrique : applications etgénéralisations.

John [email protected]

Laboratoire de Mathématiques Nicolas Oresme, UFR Sciences,Université de Caen Basse-Normandie, France.

le 2 avril 2008

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Résumé.

Résumé.

Cette version est la dernière qui sera affichée avant l’examen. Je feraiquelques autres modifications et corrections après l’examen avant que letexte devient complètement définitif.

Voir aussi à http ://math.unicaen.fr/master/Prog0708.htmlRappel : Examen le mercredi 9 avril de 14h à 17h en salle S3 122.

Oraux le jeudi 10 avril à partir de 10h30.

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La moyenne arithmético-géométrique réelle.

La moyenne arithmético-géométrique réelle.

On note a, b deux réels strictement positifs.Leur moyenne arithmético-géométrique (abrégée AGM pour arithmetic-

geometric mean en anglais), notée M(a, b) est, par définition, la limitecommune des deux suites (an) et (bn) définies par

an+1 =an + bn

2 , bn+1 =√

anbn,

avec les valeurs initiales a0 = a, b0 = b.

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. Propriétés de base.

Propriétés de base.

Vérifions d’abord l’existence de M(a, b). Par symétrie, on peut supposerque 0 < b ≤ a. Alors

0 < b ≤ bn ≤ bn+1 ≤ an+1 ≤ an ≤ a

pour tout n et donc (an)n∈N et (bn)n∈N convergent vers des limites ` etm vérifiant m ≤ `. Enfin (an + bn)/2 → (` + m)/2 d’où ` = lim(an+1) =(`+ m)/2 et ` = m.

On a (toujours sous la condition 0 < b ≤ a) :

0 ≤ an+1 − bn+1 =12

(an − bn)2

(√

an +√

bn)2 ≤1

8b (an − bn)2,

d’où la convergence quadratique vers M(a, b) (voir la fiche 20).

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. Propriétés de base.

Pour tout (a, b) ∈ (R×+)2, on a :

M(a, a) = a,M(a, b) = M(b, a),

M(ac, bc) = cM(a, b), c > 0,

M(a, b) = M(a + b

2 ,√

ab).

On pose M(x) = M(1, x) pour tout x > 0. On a alors M(1/x) =M(x)/x .

Proposition. La fonction x 7→ M(x) est de classe C(∞) et strictementcroissante sur R×+. Elle tend vers +∞ lorsque x → +∞ et vers 0 lorsquex → 0+.

Pour la démonstration, voir l’exercice de la fiche 8.

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

La formule de Gauss.

Théorème. Pour tout a > 0, b > 0, on a :

1M(a, b)

=2π

∫ π/2

0

dθ√a2 cos2 θ + b2 sin2 θ

=1π

∫ +∞

−∞

dt√(a2 + t2)(b2 + t2)

.

Démonstration. L’égalité des deux intégrales se démontre par le chan-gement de variable t = b tan θ. Désignons la seconde intégrale par T (a, b)et notons A = (a + b)/2, B =

√ab les deux itérés AGM de a, b.

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

Dans l’intégrale

Tr1,r2(A,B) =

∫ r2

−r1

du√(A2 + u2)(B2 + u2)

on effectue le changement de variable u = 12(t − ab/t), où t > 0. Alors u

est une fonction strictement croissante de t, de dérivée t 7→ 1 + ab/t2. Ontrouve que

Tr1,r2(A,B) = 2∫ R

ε

dt√(a2 + t2)(b2 + t2)

,

où ε, R > 0 et r1 = 12(ε − ab/ε), r2 = 1

2(R − ab/R). En faisant tendreε→ 0+ et R → +∞, on conclut que

T (A,B) = T (a, b).

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

Par conséquent, T (an, bn) est indépendant de n. En posant m =M(a, b), on trouve ainsi par un argument de continuité que :

T (a, b) = T (m,m) =

∫ +∞

−∞

dtm2 + t2 =

[ 1marctan t

m

]+∞

−∞=π

m .

Exercice. Vérifier en détail l’ensemble des propriétés de M(a, b) men-tionnées dans les fiches 4 à 8. (Le fait que M(x) soit de classe C(∞) sedémontre en dérivant sous le signe somme dans la formule de Gauss. Demême, on voit que −M ′(x)/M(x)2 < 0 pour tout x > 0 d’où M ′(x) > 0 etla croissance stricte de M.)

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

Exercice. Montrer que M(√

1− x2) = M(1 + x , 1− x) pour tout x ∈]0, 1[ et que

M(x) =1 + x

2 M( 2√

x1 + x

)pour tout x > 0.

Exercice. Montrer que les fonctions x 7→ 1/M(x) (x > 0) et x 7→1/M(

√1− x2) (x ∈]0, 1[) sont solutions de l’équation différentielle linéaire

(x3 − x)f ′′(x) + (3x2 − 1)f ′(x) + xf (x) = 0.

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

Exercice. Soient a, b, c trois réels vérifiant 0 < c ≤ b ≤ a.(i) On pose A = (a+b+c)/3, B = (

√ab+

√ac+

√bc)/3, C = 3√abc.

Montrer que 0 < C ≤ B ≤ A.(ii) On définit trois suites (an), (bn), (cn) par a0 = a, b0 = b, c0 = c

et par

an+1 =an + bn + cn

3 , bn+1 =

√anbn +

√ancn +

√bncn

3 , cn+1 = 3√

anbncn

pour tout n ≥ 0. Montrer que (an) est décroissante et que (cn) est crois-sante, puis que les suites (an), (bn) et (cn) convergent vers une limitecommune.

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

Intégrales elliptiques.

L’intégrale T (a, b) est un exemple d’une intégrale elliptique, c’est-à-dire d’une intégrale qui fait intervenir les primitives de fonctions rationnellesen

√P(x), P étant un polynôme de degré trois ou quatre sans racine double.

Puisque la suite AGM converge quadratiquement, elle fournit un moyen decalcul numérique rapide de certaines intégrales elliptiques.

En réalité,∫ +∞−∞

dt√(a2+t2)(b2+t2)

est une période de la courbe de genre

un y2 = x4 + (a2 + b2)x2 + a2b2 qui est isomorphe à la courbe elliptiquey2 = x(x−(a+b)2)(x−(a−b)2). Des explications détaillées seront donnéesplus tard.

La convergence quadratique a l’avantage de permettre le calcul deleurs valeurs numériques très rapidement lorsque une très haute précisionest demandée, ce qui a des applications, par exemple, en cryptographie.

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

Voici un très joli résultat qui est une application de la théorie desintégrales elliptiques et qui date des années 1970.

Théorème (Brent, Salamin).Soit (an, bn) la suite AGM avec termes initiaux a0 = 1, b0 = 1/

√2.

Pour tout n ≥ 0, on pose cn =√

a2n − b2

n. Alors :

π = limn→+∞

2a2n+1

1−∑n

k=0 2kc2k,

la convergence étant quadratique.

La démonstration fera intervenir d’autres intégrales elliptiques, quenous allons maintenant brièvement mentionner. Mais elle sera achevée plustard, à l’issue d’une étude plus générale des intégrales et fonctions elliptiques(voir à partir de la fiche 222).

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

On suppose toujours que a > 0 et que b > 0. On pose

S(a, b) = 2∫ π/2

0

√a2 cos2 θ + b2 sin2 θ dθ

= b2∫ +∞

−∞

√a2 + t2

(b2 + t2)3 dt,

où l’égalité des deux intégrales se démontre encore par le changement devariable t = b tan θ.

La première formule montre que S(a, b) = S(b, a).On a S(a, a) = πa, et S(ac, bc) = cS(a, b) lorsque c > 0.

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

Proposition. Soit A = (a + b)/2, B =√

ab les itérés AGM de a et deb. Alors

(i) T (A,B) = T (a, b),(ii) 2S(A,B) = S(a, b) + abT (a, b).

Démonstration. Comme déjà indiqué, le (i) peut être démontré à l’aidede la substitution u = 1

2(t − ab/t). Un argument semblable utilisant l’inté-grale

S(A,B) = B2∫ +∞

−∞

√A2 + u2

(B2 + u2)3 du

donneS(A,B) = 2ab

∫ +∞

0

√(a2 + t2)(b2 + t2)

(ab + t2)2 dt.

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

Posons f (t) = (a2 + t2)(b2 + t2) afin d’alléger la notation. Alors

2S(A,B)− S(a, b)− abT (a, b)

=

∫ +∞

−∞

(2ab√

f (t)(ab + t2)2 − b2

√a2 + t2

(b2 + t2)3 −ab√f (t)

)dt

=

∫ +∞

−∞

( 2ab f (t)(ab + t2)2 − b2 a2 + t2

b2 + t2 − ab) dt√

f (t),

et il s’agit de montrer que cette intégrale s’annule.

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

Or, si on pose

φ(t) =( t

ab + t2 −t

b2 + t2

)√f (t),

alors limt→±∞ φ(t) = 0 et un calcul montre que

φ′(t) =( 2ab f (t)

(ab + t2)2 − b2 a2 + t2

b2 + t2 − ab) 1√

f (t)

Par conséquent,∫ +∞

−∞

( 2ab f (t)(ab + t2)2 − b2 a2 + t2

b2 + t2 − ab) dt√

f (t)=

[φ(t)

]t=+∞

t=−∞= 0.

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

Corollaire. Pour tout a, b tels que 0 < b ≤ a, on a :

S(a, b) =(a2 −

∞∑k=0

2k−1c2k)T (a, b),

où c2n = a2

n − b2n, n = 0, 1, 2, . . .

Démonstration. On sait que

2S(ak+1, bk+1) = S(ak , bk) + akbkT (ak , bk) = S(ak , bk) + akbkT (a, b),

et donc, si on pose ∆k = 2k(a2

kT (a, b)− S(ak , bk)), alors

∆k+1−∆k =(2k+1a2

k+1 − 2ka2k − 2kakbk

)T (a, b)

= 2k(

2(ak + bk

2

)2− a2

k − akbk)

T (a, b) = −2k−1c2k T (a, b).

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La moyenne arithmético-géométrique réelle. La formule de Gauss.

En prenant la somme de k = 0 jusqu’à n :

∆n+1 = ∆0 −( n∑

k=02k−1c2

k

)T (a, b)

= −S(a, b) +(

a2 −n∑

k=02k−1c2

k

)T (a, b).

Enfin, puisque T (a, b) = T (an, bn), on a :

∆n+1 = 2n+2∫ π/2

0

(a2n+1 − b2

n+1) sin2 θ√an+1 cos2 θ + bn+1 sin2 θ

= 2n+2c2n+1

∫ π/2

0

sin2 θ dθ√an+1 cos2 θ + bn+1 sin2 θ

.

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Ici, comme sin2 θ ∈ [0, 1], l’intégrale est majorée par 12T (an+1, bn+1) =

12T (a, b).

En outre, cn+1 =√

a2n+1 − b2

n+1 = 12(an − bn) : on en tire que c2

n

converge quadratiquement vers 0 et donc que 2nc2n → 0.

Par conséquent, ∆n → 0, ce qui démontre le corollaire.Remarque. La démonstration montre que ∆n → 0 quadratiquement,

et donc que(a2 −

∑nk=0 2k−1c2

k)T (a, b) converge quadratiquement vers

S(a, b). Puisque l’AGM converge quadratiquement, le théorème de Gaussimplique qu’on peut calculer T (a, b) et S(a, b) à l’aide de suites convergeantquadratiquement.

Exercice. Montrer que le théorème de Brent-Salamin est équivalent àla formule

T (a, b)(2S(a, b)− T (a, b)

)= 4π,

où a = 1+ 12√

2, b = 1− 12√

2. Cet exercice sera utilisé dans la démonstrationdu théorème de Brent-Salamin. On remarquera que a1 = 1 et b1 = 1/

√2.

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Convergence quadratique.

Convergence quadratique.

Soit (xn)n∈N une suite à valeurs dans un espace vectoriel normé E etsoit x ∈ E . On dit que (xn)n∈N converge (au moins) quadratiquement versx s’il existe α ∈]0, 1[ et M > 0 telles que ||x − xn|| ≤ Mα2n pour tout nassez grand.

Cette terminologie est entrée dans les habitudes, mais elle me semblemal choisie. Il me paraît plus normal de parler de convergence exponentielle(en base 2) et d’utiliser le terme convergence quadratique pour les suites(xn) vérifiant ||x − xn|| ≤ Mαn2 pour tout n assez grand.

Il est clair que toute suite convergente possède une suite extraite quiconverge quadratiquement. La notion n’est donc intéressante que pour cer-taines suites particulières, par exemple celles qui sont définies par récurrence.

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Convergence quadratique.

Proposition. Si la suite (xn)n∈N converge vers x et s’il existe C > 0 telque ||x − xn+1|| ≤ C ||x − xn||2 pour tout n assez grand, alors (xn) convergequadratiquement vers x .

En effet, on voit par récurrence sur n que si m ∈ N, alors ||x−xn+m|| ≤1C

(C ||x − xm||

)2npour tout n ≥ 1. Puisque (xn) converge vers x , on peut

choisir m de telle façon que ||x − xm|| < 1/C , d’où la proposition.

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Convergence quadratique.

Si les hypothèses de la proposition sont vérifiées, alors log2(||x −xn+1||) ≤ 2 log2(||x−xn||)+log2 C . Puisque xn → x , log2(||x−xn||) → −∞lorsque n → +∞. On en tire que, à partir d’un certain rang, à chaque ité-ration le nombre de bits de xn qui coïncident avec ceux de x est, au pire, àpeu près doublé.

De même, le nombre de chiffres de décimaux de xn qui coïncident avecceux de x est, au pire, à peu près doublé à chaque itération.

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Convergence quadratique.

Exercice. (i) Montrer que la notion de convergence quadratique est in-changée si l’on remplace une norme par une norme équivalente. Montrer quesi (xn) et (yn) convergent quadratiquement (dans le même espace vectorielnormé), alors (λxn) (où λ ∈ R) et (xn + yn) convergent quadratiquement.

(ii) Montrer que, si E et F sont deux espace vectoriels normés, si (xn)est une suite dans E et si (yn) est une suite dans F , alors (xn, yn) convergequadratiquement (dans E × F ) si et seulement si (xn) et (yn) convergentquadratiquement.

Rappelons que la convergence de la suite (xn) vers x est dite (au moins)linéaire s’il existe α ∈]0, 1[ et M > 0 tels que ||x − xn|| ≤ Mαn pour toutn assez grand.

(iii) Montrer que si (xn) est une suite et s’il existe α ∈]0, 1[ tel que||x − xn+1|| ≤ α||x − xn|| pour tout n assez grand, alors (xn) convergelinéairement vers x . Au cas où la suite (xn) est définie par récurrence,donner une interprétation de ce résultat en termes du nombre de bits gagnéen passant de xn à xn+1 comme valeur approchée de x .

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Convergence quadratique.

Exercice. Soient a, b deux réels tels que 0 < b ≤ a. On définit deuxsuites (an), (bn) par a0 = a et b0 = b puis par an+1 = (an + bn)/2 etbn+1 =

√an+1bn pour tout n ≥ 0. Montrer que (an) et (bn) convergent

vers une limite commune mais que la convergence n’est pas quadratique engénéral.

Exercice. On reprend l’exercice de la fiche 10. Montrer que la conver-gence de (an), (bn) et de (cn) vers leur limite commune est quadratique.(Utiliser l’identité x3 + y3 + z3−3xyz = 1

2(x + y + z)((x − y)2 +(x − z)2 +(y − z)2).)

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Convergence quadratique.

On constate aussitôt que la convergence des séries log(1 + x) = x −x2/2 + x3/3−+ · · · et arctan x = x − x3/3 + x5/5−+ · · · est linéaire etil en est de même pour la série pour (1 + x)α lorsque α ∈ R, α /∈ N.

Ainsi, le calcul de π à l’aide de la formule de Machin

π = 16 arctan 15 − 4 arctan 1

239

(ou des formules semblables) n’est que linéaire.La convergence de la série exponentielle ex = 1+x+x2/2!+x3/3!+· · ·

et les séries pour sin x et cos x est un peu plus rapide que linéaire, en raisonde la factorielle dans les dénominateurs, mais elle est toujours loin d’êtrequadratique.

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La méthode de Newton.

La méthode de Newton.

Un procédé familier qui conduit à une suite qui converge quadratique-ment est la méthode de Newton pour obtenir une valeur approchée d’uneracine α d’une équation f (α) = 0. En gros, l’idée est que si x est une ap-proximation de α, alors x− f (x)

f ′(x) devrait être une meilleure approximation deα. Si donc x0 est une première approximation, la suite (xn)n∈N définie parxn+1 = xn − f (xn)

f ′(xn)devrait converger vers α. Si cette suite est bien définie,

on appelera ses termes les itérés de Newton de f issus de x0.

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La méthode de Newton.

Sous des hypothèses convenables, l’idée marche pour les fonctions d’unevariable réelle ou d’une variable complexe. Quitte à translater par α, on peutsupposer que α = 0. Définissons d’abord les fonctions b(x), c(x) sur unvoisinage V de 0 par

f (x) = ax +12b(x)x2, f ′(x) = a + c(x)x , b(0) = c(0) = f ′′(0),

où a = f ′(0) est supposé non-nul.Alors après un calcul :

x − f (x)

f ′(x)=

(2c(x)− b(x)

2a

)x2 + u(x)x3,

oùu(x) =

b(x)c(x)

2a2 − c(x)2

a(a + c(x)x)

(1 +

b(x)x2a

).

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 27 / 320

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La méthode de Newton.

On peut utiliser cette formule pour obtenir des conditions explicitessuffisantes pour garantir la convergence des itérés de Newton vers α.

Supposons d’abord que f soit une fonction deux-fois dérivable d’unevariable réelle. D’après la formule de Taylor, b(x) et c(x) sont alors de leforme f ′′(θx) avec θ ∈]0, 1[.

Supposons en plus que f ′′ soit bornée : |f ′′(x)| ≤ M2 pour tout x ∈ V .Soit m1 > 0 une minoration de |a| = |f ′(0)|. Si en plus x est très petit, parexemple |x | ≤ m1

2M2, alors |u(x)| ≤ 3M2

2m2

1, d’où :

∣∣x − f (x)

f ′(x)

∣∣ ≤ 3M22m1

x2 +3M2

2m2

1|x |3 ≤ 3M2

m1x2.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 28 / 320

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La méthode de Newton.

On obtient une estimation semblable lorsque f est une fonction analy-tique sur le voisinage complexe V de α et les fonctions analytiques b et cvérifient |b(x)| ≤ M2 et |c(x)| ≤ M2 pour tout x ∈ V .

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La méthode de Newton.

Théorème. On se place dans l’un des deux cadres suivants :—(i) On a α ∈ R et f est une fonction deux-fois dérivable sur un voisinage

réel V de α. On suppose alors que f (α) = 0, que |f ′(α)| ≥ m1 > 0 et que|f ′′(x)| ≤ M2 pour tout x ∈ V .

(ii) On a α ∈ C et f est une fonction analytique sur un voisinagecomplexe V de α. On suppose alors que f (α) = 0, que |f ′(α)| ≥ m1 > 0et que les valeurs absolues des fonctions 2(f (x) − f ′(α)(x − α))/(x − α)2

et (f ′(x)− f ′(α))/(x − α) sont majorées par M2.Si x0 ∈ V vérifie |x0 − α| < m1

3M2, alors les itérés de Newton de f issus

de x0 satisfont l’inégalité

|xn+1 − α| ≤ 3M2m1

|xn − α|2

pour tout n. En outre, ils convergent quadratiquement vers α.

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La méthode de Newton.

Un exemple familier de la méthode de Newton est le calcul d’une racinecarrée. Soit A ∈ R×+. On utilise la fonction f (u) = u2 − A. La méthodeprévoit que si x est une approximation de

√A, alors

x − f (x)

f ′(x)=

12

(x +

Ax

)en devrait être une meilleure. Par conséquent, si u0 est suffisamment procheà√

A, alors la suite définie par un+1 = 12(un + A/un

)converge quadrati-

quement vers√

A.En raison de la formule bn+1 =

√anbn, le calcul des itérés d’une suite

AGM fait intervenir le calcul de racines carrées. D’après ce qui précède, laméthode de Newton peut donc intervenir dans le calcul de M(a, b).

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La méthode de Newton.

Exercice. Généraliser au calcul de la racine n-ième de A. Combien d’ité-rations sont nécessaires (en prenant 1 comme première approximation) pourcalculer 3√2 à 1000 chiffres décimaux ?

Exercice. Soit m ≥ 2 un entier. Détailler une méthode de calculercos (2π/m) et sin (2π/m) en utilisant la méthode de Newton.

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La méthode de Newton.

Localisation des solutions

La méthode de Newton suppose que nous connaissions déjà une pre-mière approximation de la solution α de f (α) = 0. Afin de l’appliquer, ilfaut donc d’abord trouver cette première approximation.

En pratique, dans le cas de fonctions f d’une variable réelle, supposéesde classe C(2) comme auparavant, une étude des variations de f permetd’encadrer les zéros de f dans des intervalles sur lesquels f est monotoneet change de signe. Si, par exemple, f est strictement croissante sur [a, b]et si f (a) < 0 et si f (b) > 0, alors on sait qu’il existe une unique solutionα ∈ [a, b] de f (α) = 0.

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La méthode de Newton.

Si la méthode de Newton appliquée avec a ou b comme premièreapproximation échoue, on détermine le signe de f

(a+b2

): s’il est positif,

on sait que α ∈ [a, a+b2 ] alors que s’il est négatif, alors α ∈ [a+b

2 , b]. Enrépétant, on obtient une suite d’intervalles contenant α dont chacun est delongueur la moitié du précédent. Alors les suites des deux extrémités de cesintervalles convergent vers α (mais pas quadratiquement), et, à partir d’uncertain rang, fourniront des approximations initiales à laquelle la méthodede Newton est applicable.

Des méthodes plus précises existent pour des familles particulières defonctions, et notamment pour les polynômes.

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La méthode de Newton.

Le problème est beaucoup plus compliqué pour les fonctions complexes.En théorie, si f est analytique, on peut par exemple calculer numéri-

quement 12πi

∫γ

f ′(z)f (z) dz , où γ est un lacet. On sait qu’il s’agit d’un entier,

égal au nombre de zéros de f à l’intérieur de γ ; il suffit alors de le calculernumériquement à un demi près.

En prenant les lacets bordant des zones de plus en plus petites, onarrive en principe à localiser les zéros. Mais le calcul numérique (même àpetite précision) d’une intégrale est beaucoup plus coûteux que celui de lavaleur d’une fonction.

En cas désespéré, on peut appliquer Newton avec des valeurs initialeschoisies au hasard. Mais même si on obtient ainsi un ensemble de zéros def , il reste à prouver qu’on a obtenu tous les zéros.

Je ne parlerai pas du cas où f ′(α) = 0.

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La méthode de Newton.

Exercice. Si f est un polynôme, montrer que le polynôme f / pgcd (f , f ′)a les mêmes racines que f , mais avec multiplicité un. Cela permet de ramenerle calcul des racines d’un polynôme quelconque à celles d’un polynôme àracines simples.

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Calcul du logarithme à l’aide de l’AGM réelle.

Calcul du logarithme à l’aide de l’AGM réelle.

Notre première application de l’AGM est de montrer comment calculerle logarithme d’un nombre réel à l’aide de suites à convergence quadratique.

Théorème. Il existe des constantes A > 0, B > 0 telles que, pour toutx ∈]0, 1], on ait :∣∣∣ π

2M(x)+ log(x)− 2 log(2)

∣∣∣ ≤ x2(A + B| log(x)|).

La démonstration montrera que l’on peut prendre A = 512+ 3

4(1− 1√

2

)≤

0, 64 et B = 12(1 − 1√

2

)≤ 0, 15, mais ces valeurs peuvent être diminuées

en faisant plus attention aux détails.

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Calcul du logarithme à l’aide de l’AGM réelle.

En prenant x = 1/2n, n > 0 un entier, on trouve après division parn + 2 que∣∣∣ log(2)− π

2(n + 2)M(1/2n)

∣∣∣ ≤ 1(n + 2)22n

(A + Bn log(2)

)En admettant pour l’instant le théorème de Brent et de Salamin, ce

résultat permet donc le calcul de log(2).Il y alors plusieurs méthodes d’utiliser le théorème pour calculer log(x),

x ∈ R×+. Par exemple, si n ≥ 0 est un entier tel que x/2n < 1 on peutremplacer x par x/2n dans l’inégalité du théorème, ce qui donne :

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Calcul du logarithme à l’aide de l’AGM réelle.

∣∣∣ log(x) +π

2M( x2n )

− (n + 2) log(2)∣∣∣ ≤ x2

22n(A + B

∣∣ log( x

2n)∣∣).

La fonction exponentielle peut alors être calculée à l’aide de la méthodede Newton : on interprète ex comme solution de l’équation log(y)− x = 0.

La puissance xα de x > 0 peut alors être calculée comme eα log(x) : oncalcule d’abord log(x), puis α log(x) et enfin on résoud l’équation log(y)−α log(x) = 0.

En ce qui concerne les fonctions circulaires et circulaires réciproques,un point de départ sera d’interpréter la fonction arctangente comme l’argu-ment d’un nombre complexe, c’est-à dire commme la partie imaginaire dulogarithme d’un nombre complexe.

Cela nous conduira à étendre l’AGM aux nombres complexes, ce quisera de toute façon nécessaire pour la suite du cours.

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Calcul du logarithme à l’aide de l’AGM réelle.

Démonstration du théorème de la fiche 37Elle est élémentaire, et il suffit donc d’en donner les grandes lignes.On divise l’intégrale

π

2M(x)=

∫ ∞

0

dt√(1 + t2)(x2 + t2)

en deux morceaux, l’intégrale sur [0, 1] et l’intégrale sur [1,+∞[.Sur [1,+∞[, on écrit∫ +∞

1

dt√(1 + t2)(x2 + t2)

= I1 + I2,

I1 =

∫ +∞

1

dtt√

(1 + t2)et I2 = −

∫ +∞

1

dt√(1 + t2)

(1t −

1√x2 + t2

)John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 40 / 320

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Calcul du logarithme à l’aide de l’AGM réelle.

Sur [0, 1], on utilise la décomposition∫ 1

0

dt√(1 + t2)(x2 + t2)

=

∫ 1

0

dt√x2 + t2

+ I3 + I4,

I3 = −∫ 1

0

(1− 1√

1 + t2

)dtt , I4 =

∫ 1

0

(1− 1√

1 + t2

)(1t −

1√x2 + t2

)dt.

La convergence en 0 des intégrales I3 et I4 est garantie par la remarquesuivante, qui servira également dans le calcul des constantes A et B : on a

0 ≤ 1− 1√1 + t2

≤(

1− 1√2

)t2 pour tout t ∈ [0, 1].

Cela se démontre, par exemple, en remarquant que la fonction u 7→ 1/√

1 + uest concave sur [0, 1] et prend les valeurs 1 et 1/

√2 en 0 et en 1 ; son

graphe est donc situé au dessous du segment droit joignant les points d’af-fixe (0, 1) et (1, 1/

√2). En posant u = t2, on en tire l’inégalité 1/

√1 + t2 ≤

1−(1− 1√

2

)t2 pour tout t ∈ [0, 1] et la remarque en découle.

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Calcul du logarithme à l’aide de l’AGM réelle.

Rappelons qu’une primitive de t 7→ 1/√

x2 + t2 (x fixée) est donnéepar t 7→ log(t +

√x2 + t2). On en tire que∫ 1

0

dt√x2 + t2

= log(1 +√

x2 + 1)− log(x).

En outre, le calcul de I1 et de I3 peut se faire à l’aide du changement devariable t = 1/u. On trouve après calcul, que∫ 1

0

dt√x2 + t2

+ I1 + I3 = log(1 +√

x2 + 1)− log(x) + log(2).

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 42 / 320

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Calcul du logarithme à l’aide de l’AGM réelle.

L’étude de I2 et de I4 consiste en la majoration de leurs modules ; onnote que x2 + t2 ≥ t2 et donc que 1√

x2+t2≤ 1

t car t > 0.

Considérons le cas de I2. On a

0 ≤ 1t −

1√x2 + t2

=

√x2 + t2 − tt√

x2 + t2

=x2

t√

x2 + t2(√

x2 + t2 + t)

≤ x2

2t3 .

Puisque 0 ≤ 1/√

1 + t2 ≤ 1/t, on trouve :

|I2| ≤∫ +∞

1

x2

2t4 dt =x2

6 .

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 43 / 320

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Calcul du logarithme à l’aide de l’AGM réelle.

D’autre part, en utilisant l’inégalité déjà établie 0 ≤ 1− 1/√

1 + t2 ≤(1− 1√

2

)t2 lorsque t ∈ [0, 1], on trouve :

|I4| ≤(1− 1√

2) ∫ 1

0t2

(1t −

1√x2 + t2

)dt

=(1− 1√

2) ∫ 1

0

t2(√x2 + t2 − t)

t√

x2 + t2dt

≤(1− 1√

2) ∫ 1

0

(√x2 + t2 − t

)dt

=12(1− 1√

2)(√

1 + x2 − 1 + x2(log(1 +√

x2 + 1)− log(x))).

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 44 / 320

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Calcul du logarithme à l’aide de l’AGM réelle.

On déduit de ce qui précède que :∫ +∞

0

dt√(1 + t2)(x2 + t2)

= log(1 +√

x2 + 1)− log(x) + log(2) + ε(x),

|ε(x)| ≤ |I2|+ |I4|

≤ x2

6 +12(1− 1√

2)(√

1 + x2 − 1 + x2(log(1 +√

x2 + 1)− log(x))).

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 45 / 320

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Calcul du logarithme à l’aide de l’AGM réelle.

Afin de conclure, on rappelle que, si y ∈ [0, 1], alors 0 ≤ log(1+y) ≤ yet 1 ≤

√1 + y ≤ 1 + 1

2y .Rappelons que x ≤ 1. (Cette hypothèse n’a pas encore été utilisée.)En prenant d’abord y = y1 = 1

2(√

1 + x2 − 1)

puis y = x2, on voitque

0 ≤ log(1 +√

x2 + 1)− log(2) = log(1 + y1) ≤ y1

=12(√

1 + x2 − 1)≤ 1

4x2.

En outre, dans l’estimation de ε(x), on voit que√

1 + x2 ≤ 12x2 et

on majore log(1 +√

x2 + 1) par log(1 +√

2) puis par 1 car x ≤ 1 et1 +

√2 = 2, 414 · · · < 2, 718 · · · = e.

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Calcul du logarithme à l’aide de l’AGM réelle.

Enfin, donc∫ +∞

0

dt√(1 + t2)(x2 + t2)

= − log(x) + 2 log(2) + ε1(x),

ε1(x) ≤ x2

4 + ε(x)

≤ x2

4 +x2

6 +12(1− 1√

2)(x2

2 + x2(1 + | log(x)|))

=( 5

12 +34(1− 1√

2))

x2 +12(1− 1√

2)x2| log(x)|.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe.

La moyenne arithmético-géométrique complexe.

Nous aurons besoin d’étendre l’AGM aux nombres complexes, ce quinécessite un peu de soin en raison des choix de racines carrées.

Définition. Soient (a, b), (A,B) deux couples de nombres complexes.On dit que (A,B) est un itéré AGM de (a, b) si A = (a + b)/2 et B2 = ab.

On dit que (A,B) est le bon itéré de (a, b) si |A−B| < |A + B|. Dansle cas contraire, on dit que (A,B) est un mauvais itéré de (a, b).

Il est clair que (a, b) a au plus deux itérés : si (A,B) est l’un deux,l’autre sera (A,−B).

L’unicité du bon itéré en découle immédiatement.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Propriétés de base.

Si ab 6= 0, alors (a, b) a deux itérés distincts, correspondant aux choixde racine carrée de ab.

Si (A,B) est un itéré AGM de (a, b), il est également un itéré AGM de(b, a). En plus, (A,B) est un bon itéré de (a, b) si et seulement s’il est lebon itéré de (b, a).

Si (A,B) ∈ C2, alors (A,B) est un itéré de (a, b) si et seulement si aet b sont les racines de x2 − 2Ax + B2.

Soit c ∈ C× et soit (A,B) un itéré de (a, b). Alors (cA, cB) est un itéréAGM de (ca, cb). C’est le bon itéré de (cA, cB) si et seulement si (A,B) estle bon itéré de (a, b).

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Soit (a, b) ∈ C2 et soit (A,B) un itéré AGM de (a, b).Supposons que d’abord que a est réel et que a > 0.Si b ∈ R et si b ≤ 0, alors |A− B| = |A + B| et (a, b) ne possède pas

de bon itéré.Si b ∈ R et si b > 0, alors le bon itéré est celui où B =

√ab.

Si b /∈ R, le bon itéré est celui où B est le même côté de l’axe réel queb (faire un croquis).

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Lorsque a 6= 0, on réduit au cas a = 1 grâce aux propriétés mentionnéesdans la fiche 49. On trouve :

Ou bien a, 0, et b sont colinéaires avec 0 situé entre a et b. Il n’y aalors pas de bon itéré.

Ou bien a et b sont situés dans un même demi-plan ouvert H limitépar une droite passant par 0. Alors le bon itéré (A,B) est celui avec B ∈ H.Il est clair que A ∈ H (voir la figure de la fiche 52).

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

H0

a

b

AB

−B

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Définition. Soit (a, b) ∈ C2. On dit que la suite (an, bn)n∈N est unesuite AGM associée à (a, b) si (a0, b0) = (a, b) et si, pour tout n ∈ N,(an+1, bn+1) est un itéré AGM de (an, bn).

On dit que la suite (an, bn)n∈N est une bonne suite AGM associée à(a, b) si (an+1, bn+1) est le bon itéré de (an, bn) pour tout n à un nombrefini d’exceptions près. Dans le cas contraire, on dit que (an, bn)n∈N est unemauvaise suite AGM.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Si a et b sont situés dans un même demi-plan ouvert H limité par unedroite passant par 0, et si (a1, b1) est le bon itéré de (a, b), alors a1 ∈ Het b1 ∈ H (voir la fiche 51). En répétant, on obtient ainsi une bonne suiteAGM (an, bn) associée à (a, b). En outre, an, bn ∈ H pour tout n.

Si a, 0 et b sont colinéaires avec 0 situé entre a et b et si b 6= 0, −a,les deux itérés (a1,±b1) sont situés dans les deux demi-plans ouverts limitéspar la droite a0b. Alors il existe une bonne suite AGM associée à (a1, b1) etdonc à (a, b).

Enfin si b = −a, alors a1 = 0 et donc bn = 0 pour tout n ≥ 2 ce quiest une mauvaise suite AGM.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Théorème. Soit (an, bn)n∈N une suite AGM complexe.(i) Les suites (an)n∈N et (bn)n∈N convergent vers une limite commune

`.(ii) La limite ` est invariante par permutation de a et de b.(iii) Pour que ` 6= 0, il faut et il suffit que (an, bn)n∈N soit une bonne

suite AGM.

Démonstration. Il suffit de traiter le cas où ab 6= 0. En outre, une foisl’existence de ` est acquise, le point (ii) est une conséquence du fait qu’unitéré de (a, b) est également un itéré de (b, a). Il suffit donc de traiter lespoints (i) et (iii).

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Remarquons d’abord que si (A,B) est un itéré de (a, b) et si R =max(|a|, |b|), alors |A| ≤ 1

2(|a| + |b|) ≤ R et |B| ≤ R. Par conséquent, lasuite (Rn) définie par Rn = max(|an|, |bn|) est décroissante.

Montrons ensuite que si l’on fait une infinité de mauvais choix d’itérés,alors la limite ` existe et vaut 0.

Pour cela, il suffit de montrer que si (an+1, bn+1) est un mauvais itéréde (an, bn), alors Rn+3 ≤ 3

4Rn.Ce sera une conséquence immédiate du lemme suivant.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Lemme. Soit (a, b) ∈ C2, ab 6= 0. Soit (A,B) un mauvais itéré de(a, b), soit (A′,B′) un itéré quelconque de (A,B) et soit (A′′,B′′) un itéréquelconque de (A′,B′). Soit R = max(|a|, |b|). Alors |A′′| ≤ 3

4R et |B′′| ≤34R.

Démonstration. On peut supposer que |b| ≥ |a|, puis que a = 1 etdonc que b = Reiθ avec R ≥ 1 et |θ| ≤ π. Alors B = −

√Re iθ/2. Par

conséquent :

A′ = A + B2 =

Reiθ + 1− 2√

Re iθ/2

4 =(√

Re iθ/2 − 1)2

4 .

Puisque | θ2 | ≤π2 ,√

Reiθ/2 appartient au demi-plan <(z) ≥ 0. Donc|√

Reiθ/2 − 1| ≤√

R + 1 puis |A′| ≤ R+14 . On a alors |A′| ≤ R

2 lorsqueR ≥ 1.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Puisque (A′,B′) est un itéré (double) de (a, b), on a |B′| ≤ R. Parconséquent,

|A′′| ≤ |A′|+ |B′|2 ≤ 3R

4et

|B′′| =√|A′| |B′| ≤ R√

2≤ 3R

4 ,

ce qui achève la démonstration du lemme.Pour conclure la démonstration du théorème, il suffit de montrer que si

(an, bn)n∈N est une bonne suite AGM, alors la limite ` existe et est non-nulle.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Quitte à supprimer un nombre fini de termes, il suffit de traiter le casoù tous les itérés sont bons.

Lemme. Soit (a, b) ∈ C2 et soit (A,B) le bon itéré de (a, b). Alors|A− B| < 1

2 |a − b|.

Afin de démontrer le lemme, on choisit α, β tels que α2 = a, β2 = bet αβ = B. Puisque A ± B = 1

2(α ± β)2 et (A,B) est le bon itéré, on a|α− β| < |α+ β|, d’où

|A− B| = |α− β|2

2 <|α− β||α+ β|

2 =|a − b|

2 .

En revenant au théorème, le lemme implique que |an − bn| < 12n |a− b|

pour tout n et donc que an − bn → 0.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Plus généralement, le lemme implique que

|ar+n+1 − ar+n| =|ar+n − br+n|

2 ≤ 12n+1 |ar − br |

pour tous r , n ≥ 0 puis que

|ar+k+1 − ar+1| ≤k∑

n=1|ar+n+1 − ar+n| ≤

k∑n=1

12n+1 |ar − br | ≤ |ar − br |

pour tous r ≥ 0, k ≥ 0. Il s’ensuit que (an) est de Cauchy, donc convergente.Enfin bn = an − (an − bn) converge vers la même limite, que l’on note `.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Il reste à voir que ` 6= 0. On suppose que a et b appartiennent audemi-plan H = <(z) > 0, de sorte que an, bn ∈ H pour tout n (voir lafiche 54).

Lemme. Soit (a, b) ∈ H2. Si (A,B) est le bon itéré de (a, b), alorsmin(<(A),<(B)) ≥ min(<(a),<(b)).

Ce lemme se démontre par un calcul facile. Elle implique que la suitemin(<(an),<(bn))n∈N est croissante. Par conséquent,

<(`) ≥ min(<(a),<(b)) > 0.

Il s’ensuit que ` 6= 0 et le théorème est démontré.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Propriétés de base.

Exercice. Démontrer le lemme de la fiche 61. (En ce qui concernel’étude de <(B), on pourra supposer <(b) ≥ <(a) puis écrire a = Raeiθ,b = Rbeiφ. Alors <(B) =

√RaRb cos θ+φ

2 et il s’agit de montrer que si<(b)<(a) ≥ 1, alors <(B)

<(a) ≥ 1.)Exercice. Déduire de l’exercice précédent que si a et b sont situés le

même côté d’une droite D passant par 0, et si (A,B) est le bon itéré AGMde (a, b), alors A et B sont plus éloignés de D qu’au moins un parmi a etb (dans le sens que leur distance perpendiculaire à D est plus grande). Parconséquent, la bonne suite AGM associée à (a, b) s’éloigne de D.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Convergence quadratique.

Convergence quadratique des bonnes suites AGM.

Théorème. Toute bonne suite AGM converge quadratiquement.

On note comme précédemment (an, bn) le n-ième itéré d’une suite AGMassociée à (a, b) ∈ C2.

La condition que la suite soit bonne est nécessaire. Par exemple, sib = 0, alors (an, bn) = ( a

2n , 0) quelque soit n et la convergence n’est quelinéaire lorsque a 6= 0.

En ce qui concerne la démonstration du théorème, il suffit de considérerle cas où <(a) > 0 et <(b) > 0.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Convergence quadratique.

Dans ce cas, on a :

|an+1 − bn+1| =|an − bn|2

4|an+1 + bn+1|≤ |an − bn|2

4<(an+1 + bn+1)

et, en appliquant le lemme de la fiche 61 :

<(an+1 + bn+1) ≥ 2 min(<(an+1),<(bn+1)) ≥ 2 min(<(a),<(b)).

Par conséquent, on trouve

|an+1 − bn+1| ≤|an − bn|2

8 min(<(a),<(b)).

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Convergence quadratique.

Il s’ensuit que

|an+2 − an+1| =|an+1 − bn+1|

2 ≤ C0|an − bn|2,

où 1/C0 = 16 min(<(a),<(b)). Ensuite,

|an+3 − an+2| ≤|an+2 − bn+2|

2 ≤ 4C30 |an − bn|4

et, en général, |an+k+1 − an+k | ≤ 14C0

(2C0|an − bn|)2k pour tout k ≥ 2.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Convergence quadratique.

En écrivant |an+k+1 − an+1| ≤∑k

r=1 |an+r+1 − an+r | on voit que si nest suffisamment grand, il existe C > 0 tel que |an+k+1−an+1| ≤ C |an−bn|2pour tout k ≥ 1, puis que

|`− an+1| ≤ C |an − bn|2 ≤ C(|`− an|+ |`− bn|)2.

D’autre part, |`−bn+1| ≤ |`− an+1|+ |an+1−bn+1| d’où, quitte à modifierC , on trouve également une majoration de la forme :

|`− bn+1| ≤ C(|`− an|+ |`− bn|)2.

Par conséquent, (an, bn) converge quadratiquement vers (`, `), d’où le ré-sultat.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. La meilleure suite AGM.

La meilleure suite AGM.

Soit (a, b) ∈ C2. On appelera l’unique suite AGM avec terme initial(a, b) dont tous les itérés sont bons la meilleure suite AGM de terme initial(a, b) lorsque celle-ci existe. Rappelons qu’elle existe sauf lorsque a, 0 et bsont colinéaires et 0 est situé entre a et b. On note alors M(a, b) la limite.

On a alors M(ca, cb) = cM(a, b) lorsque c ∈ C×. En particulier,M(a, b) = aM(1, b/a) et b/a n’est pas réel et négatif. Ce sont des consé-quences des propriétés de la fiche 49.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. La meilleure suite AGM.

Soit H un demi-plan ouvert borné par une droite passant par l’origine,soit (a, b) ∈ H2 et soit (A,B) le bon itéré de (a, b). Il est clair que A estune fonction continue de (a, b). Il en est le même pour B, comme on le voiten remarquant que la condition que B ∈ H entraîne que arg(B)− 1

2 arg(ab)est une fonction continue de (a, b). Par conséquent, elle est constante surH × H et, comme |B| est clairement une fonction continue de (a, b), il enest le même pour B = |B|ei arg(B).

On en tire par récurrence sur n que tous les bons itérés (an, bn) de(a, b) sont des fonctions continues de (a, b).

Par ailleurs il est facile d’adapter la démonstration du théorème pourmontrer que la convergence de (an, bn) vers M(a, b) est localement uni-forme.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. La meilleure suite AGM.

Soit par exemple D un disque fermé de rayon R > 0 contenu dans H.Si a ∈ D, b ∈ D, alors |a−b| ≤ 2R et on en tire que |an−bn| ≤ 2R/4n pourtout n. Par conséquent, an−bn tend vers 0 uniformément sur D. En outre, ona |ak+r+1−ar | ≤ |ar −br | ≤ 2R/4r pour tout k ≥ 0, r ≥ 0, ce qui entraîneque (an) est uniformément de Cauchy sur D. Puisque bn = an − (an − bn),l’affirmation en découle aussitôt.

D’où le résultat suivant.

Proposition.Soit H un demi-plan ouvert de C bordé par une droite passant par

l’origine et soit (an, bn)n≥0 la meilleure suite AGM de terme initial (a, b) ∈H × H.

Alors, pour tout n ∈ N, an et bn sont des fonctions continues de (a, b)et la convergence de (an, bn)n≥0 vers M(a, b) est localement uniforme. Parconséquent, M(a, b) est une fonction continue de (a, b).

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. La fonction M(z).

La fonction M(z).

Comme dans le cas où z est réel et positif, on pose M(z) = M(1, z). Ilexiste un hyperplan H bordé par une droite passant par l’origine et contenant1 et z si et seulement si z n’est pas réel et négatif. Le domaine de définitionde M est donc égal à C dépourvu des réels négatifs : on notera ce domainepar D. Il est clair que D est simplement connexe.

Théorème.(i) La fonction M est holomorphe sur D et ne s’y annule pas.(ii) Pour tout z ∈ C avec <(z) > 0, on a

1M(z)

=1π

∫ +∞

−∞

dt√(1 + t2)(z2 + t2)

.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 70 / 320

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. La fonction M(z).

Avant de donner la démonstration, voici quelques rappels sur les fonc-tions d’une variable complexe.

Si z ∈ D, on notelog(z) =

∫ z

1

dww

le logarithme principal de z , où le chemin d’intégration de 1 vers z estarbitraire. Alors z 7→ log(z) est une fonction holomorphe sur D.

Si α ∈ R, on pose zα = eα log(z) et on note souvent z1/2 par√

z . Alors(√

z)2 = z et, lorsque z est réel et positif,√

z est la racine carrée (positive)de z .

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. La fonction M(z).

Soit Ω ⊆ C un domaine simplement connexe et soit f : Ω → D unefonction holomorphe. Alors f ne s’annule pas sur Ω et l’on a, pour tout z ,z0 ∈ Ω

log(f (z)) = log(f (z0)) +

∫ z

z0

f ′(w)

f (w)dw .

En fixant z0 ∈ Ω, on en tire que la fonction z 7→ log(f (z)) est holo-morphe sur Ω. En outre, on a elog(f (z)) = f (z) pour tout z ∈ Ω.

Si α ∈ R, on voit alors que les fonctions

z 7→ f (z)α = eα log(f (z)), z 7→√

f (z) = f (z)1/2.

sont holomorphes sur Ω.Lorsque <(z) > 0, z2 n’est pas réel et négatif et donc (1+t2)(z2+t2) ∈

D pour tout t ∈ R. Ainsi,√

(1 + t2)(z2 + t2) s’entend selon les définitionsqui viennent d’être données.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 72 / 320

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. La fonction M(z).

Démonstration du théorème.(i) Nous savons déjà que M ne s’annule pas. Notons (an(z), bn(z)) la

meilleure suite AGM de terme initial (1, z). Vérifions par récurrence sur nque les fonctions an(z) et bn(z) sont holomorphes, le cas n = 0 étant clair.

Si an(z) et bn(z) sont holomorphes, il est clair que an+1(z) l’est aussi.Le problème concerne bn+1(z) et le choix de racine carrée. Mais nous savonsdéjà que bn+1(z) est une fonction continue, et un choix continu de racinecarrée est holomorphe.

Enfin, la convergence de (an(z), bn(z)) vers M(z) est localement uni-forme, ce qui suffit pour établir la holomorphie de M(z).

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 73 / 320

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. La fonction M(z).

(ii) Nous avons déjà remarqué que√

(1 + t2)(z2 + t2) 6= 0 lorsquet ∈ R, et cette fonction est équivalente à t2 lorsque t → ±∞, l’équivalenceétant localement uniforme en z . Cela suffit pour assurer la convergence del’intégrale ; le fait qu’elle représente une fonction holomorphe de z est alorsconséquence d’un argument standard de dérivation sous le signe

∫.

Enfin, la formule annoncée est déjà établie lorsque z est réel et stricte-ment positif.

Les deux côtés de la formule étant des fonctions holomorphes, on entire leur égalité pour tout z avec <(z) > 0 par le principe de continuationanalytique.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Calcul des fonctions trigonométriques.

Calcul des fonctions trigonométriques.

Revenons au calcul des fonctions élémentaires par des méthodes àconvergence quadratique.

L’idée est de généraliser le théorème de la fiche 37 aux valeurs com-plexes.

Théorème.Il existe des constantes A > 0, et B > 0 telles que, pour tout z ∈ C×

vérifiant |z | ≤ 1 et | arg(z)| ≤ π/4, on ait∣∣∣ π

2M(z)+ log(z)− 2 log(2)

∣∣∣ ≤ |z |2(A + B∣∣ log(|z |)

∣∣)

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Calcul des fonctions trigonométriques.

Le théorème permet de calculer arctan t lorsque t ∈ R. En effet, grâceà la relation arctan(t) + arctan(1/t) = ±π/2, il suffit de traiter le cas où|t| ≤ 1. On choisit alors un nombre complexe z = x + iy avec x > 0 ety/x = t. Soit n ≥ 0 un entier tel que |z/2n| ≤ 1. Alors en remplaçant zpar z/2n dans la formule du théorème, on trouve∣∣∣ log(z) +

π

2M( z2n )

− (n + 2) log(2)∣∣∣ ≤ |z |2

22n(A + B

∣∣ log(|z |/2n)∣∣).

En prenant n assez grand, on obtient une approximation de log(z).Nous savons déjà calculer log(|z |), ce qui permet de retrouver arctan(t)

à l’aide de la formule log(z) = log(|z |) + i arctan(y/x).La fonction tangente peut alors être calculée à l’aide de la méthode

de Newton : si θ ∈ [0, π/2[, on calcule tan θ comme solution de l’équationarctan(t) = θ. Les fonctions sin, cos, . . ., se calculent alors à l’aide desformules usuelles les liant à la fonction tangente.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Calcul des fonctions trigonométriques.

La démonstration du théorème suit essentiellement la même démarcheque dans le cas réel, mais certains détails doivent être revus.

Par la suite, I1, I2, I3, I4 ont les mêmes sens que dans la démonstrationdu théorème de la fiche 37, sauf que x est remplacé par z .

Les intégrales I1 et I3 ne font pas intervenir z , et leur étude est inchan-gée.

En outre, pour les valeurs de z considérées, t 7→ log(t +√

z2 + t2) estune primitive de t 7→ 1/

√z2 + t2. Par conséquent,∫ 1

0

dt√z2 + t2

= log(1 +√

z2 + 1)− log(z),

d’où ∫ 1

0

dt√z2 + t2

+ I1 + I3 = log(1 +√

z2 + 1)− log(z) + log(2).

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Calcul des fonctions trigonométriques.

Par contre, il faudrait revoir les études de I2 et de I4.Pour cela, on pose z = x + iy , où x , y ∈ R. L’hypothèse que | arg(z)| ≤

π/4 équivaut alors à 0 ≤ |y | ≤ x . En plus, on a x > 0.Par conséquent, on a z2 + t2 = (x2 − y2 + t2) + 2xyi d’où

|z2 + t2|2 = (x2 − y2 + t2)2 + 4x2y2 = (x2 + y2)2 + t4 + 2(x2 − y2)t2

≥ (x2 + y2)2 + t4 = |z |4 + t4 > t4.

Il s’ensuit que |z2 + t2| > t pour tout t ≥ 0. En utilisant la majoration0 ≤ 1/

√1 + t2 ≤ 1/t, on trouve :

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Calcul des fonctions trigonométriques.

|I2| ≤∫ +∞

1

dt√1 + t2

∣∣∣1t −

1√z2 + t2

∣∣∣≤

∫ +∞

1

∣∣∣ 1t2 −

1t√

z2 + t2

∣∣∣dt

=

∫ +∞

1

∣∣∣√z2 + t2 − tt2√

z2 + t2

∣∣∣dt

=

∫ +∞

1

∣∣∣ z2

t2√

z2 + t2(t +√

z2 + t2)

∣∣∣dt

≤ |z |2∫ +∞

1

dt2t4 ,

d’où l’estimation |I2| ≤ |z |2/6 comme dans le cas réel.

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Calcul des fonctions trigonométriques.

En ce qui concerne I4, on trouve, par le même genre de raisonnement :

|I4| ≤(1− 1√

2) ∫ 1

0

∣∣√z2 + t2 − t∣∣dt.

Afin de traiter cette intégrale, on remarque que les conditions t > 0 et0 ≤ |y | ≤ x entraînent que |

√z2 + t2 + t| ≥ |

√z2 + t2|, d’où :

(1− 1/

√2)−1|I4| ≤

∫ 1

0

∣∣∣ z2√

z2 + t2 + t

∣∣∣dt

≤∫ 1

0

∣∣∣ z2√

z2 + t2

∣∣∣ = |z |2∫ 1

0

dt|√

z2 + t2|

Il a déjà été établi que |z2 + t2|2 ≥ |z |4 + t4 et il s’ensuit que :

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Calcul des fonctions trigonométriques.

(1− 1/

√2)−1|I4| ≤ |z |2

∫ 1

0

dt|√

z2 + t2|

≤ |z |2∫ 1

0

dt4√|z4|+ t4

= |z |2∫ 1/|z|

0

du4√1 + u4

,

où on a effectué le changement de variable t = |z |u.En écrivant, par exemple∫ 1/|z|

0

du4√1 + u4

=

∫ 1

0

du4√1 + u4

+

∫ 1/|z|

1

duu +

∫ 1/|z|

1

( 14√1 + u4

− 1u

)du,

on obtient aussitôt une estimation de I4 de la forme |I4| ≤ |z |2(C +

D| log(|z |)|), avec des constantes C > 0, D > 0 qui peuvent être calculées

explicitement.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 81 / 320

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Calcul des fonctions trigonométriques.

On obtient à nouveau donc une relation de la forme∫ +∞

0

dt√(1 + t2)(z2 + t2)

= log(1 +√

z2 + 1)− log(z) + log(2) + ε(z),

où |ε(z)| ≤ |z |2(C1 +D1| log(|z |)|

), où C1 > 0, D1 > 0 sont des constantes.

Pour conclure, il reste à voir qu’il existe des constantes C2 > 0 etD2 > 0 telles que | log(1 +

√z2 + 1) − log(2)| ≤ |z |2

(C2 + D2| log(|z |)|

)pour tout z avec |z | ≤ 1.

En fait, il suffit d’établir une telle borne pour tout z avec |z | ≤ 1/2,car la fonction log(1 +

√z2 + 1) − log(2) est bornée dans la couronne

z ∈ C | 1/2 ≤ |z | ≤ 1

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 82 / 320

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Calcul des fonctions trigonométriques.

Soit ρ ∈]0, 1] qui sera choisi convenablement plus tard. Si |z | ≤ ρ, alors|1/(1 + z)| ≥ 1/(1− ρ) et donc

| log(1 + z)| =∣∣ ∫ z

0

ds1 + s

∣∣ ≤ |z |1− ρ

.

En remplaçant z par 12√

1 + z2 − 12 , on trouve

| log(1 +√

z2 + 1)− log(2)| = | log(1 + (

12√

1 + z2 − 12)

)|

≤∣∣√1 + z2 − 1

∣∣2(1− ρ)

lorsque |√

1 + z2 − 1| ≤ 2ρ.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 83 / 320

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La moyenne arithmético-géométrique complexe. Calcul des fonctions trigonométriques.

En utilisant le développement de Taylor au voisinage de 0 et le fait queles coefficients binomiaux

(1/2r

)sont majorés en module par 1/2, on voit

que

|√

1 + z2 − 1| ≤ 12

|z |2

1− |z |2

lorsque |z | < 1.Si donc |z | ≤ 1/2, alors |

√1 + z2 − 1| ≤ 2|z |2/3 ≤ 1/6 et on peut

prendre ρ = 1/12.Au total, donc

| log(1 +√

z2 + 1)− log(2)| ≤ |√

1 + z2 − 1|2(1− ρ)

≤ 2|z |2/32(1− ρ)

=411 |z |

2

lorsque |z | ≤ 1/2.

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Polynômes de degré 3 et 4.

Polynômes de degré 3 ou 4 à racines simples.Soient α, β, γ trois réels deux-à-deux distincts et non nuls. Si b > a >

max(0, α, β, γ), alors le changement de variable t = 1/u montre que∫ b

a

dt√(t − α)(t − β)(t − γ)

=

∫ 1/a

1/b

du√u(1− αu)(1− βu)(1− γu)

.

Notre étude d’intégrales elliptiques sera basée sur leur comportementpar rapport aux changements de variable de la forme t = 1/u et, plusgénéralement, de la forme t = (au + b)/(cu + d).

Ces remarques suggèrent que l’étude va faire intervenir des polynômesde degré 3, et qu’il pourrait être utile d’imaginer ceux-ci comme des poly-nômes de degré 4 à coefficient directeur 0, et dont la quatrième racine est« passée à l’infini ».

Les fiches qui suivent ont pour but de donner un sens précis à toutcela.

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Polynômes de degré 3 et 4. La droite projective.

La droite projective.

Soit k un corps commutatif. On note Pk la droite projective de k,c’est-à-dire l’ensemble des droites vectorielles du k-espace vectoriel k2.

Une droite de Pk est engendrée par un élément (u, v) 6= (0, 0) de k2.Si v 6= 0, alors elle est encore engendrée par (u/v , 1) et, si v = 0, (1, 0) estencore un générateur. Ainsi, on obtient une bijection entre les droites de Pket l’ensemble k ∪ ∞ en envoyant la droite engendrée par (u, v) sur u/vlorsque v 6= 0 et sur ∞ lorsque v = 0. La droite engendrée par (1, 0) seraappelée la droite à l’infini.

Le groupe GL2(k) des matrices inversibles d’ordre deux à coefficientsdans k agit sur k2 par(

a bc d

)(u, v) = (au + bv , cu + dv).

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Polynômes de degré 3 et 4. La droite projective.

L’action transforme les droites vectorielles dans k2 en des droites vec-torielles de k2. Elle induit donc une action de GL2(k) sur Pk .

Cette action induit une action de GL2(k) sur k ∪ ∞. Explicitement,

si α ∈ k ∪ ∞ et si(

a bc d

)∈ GL2(k), alors

(a bc d

)(α) =

aα+ bcα+ d .

Ici, le membre droit a son sens usuel lorsque α 6= ∞ et lorsque cα+d 6=0. Lorsque α = ∞, α correspond à la droite engendrée par (1, 0), qui esttransformée en celle engendrée par (a, c).

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Polynômes de degré 3 et 4. La droite projective.

Par conséquent,(

a bc d

)(∞) — et donc également a∞+ b

c∞+ d —

signifient ac lorsque c 6= 0 et ∞ lorsque c = 0 (auquel cas ad 6= 0 car la

matrice est supposée inversible).De même, la matrice transforme la droite engendrée par (−d , c) en la

droite à l’infini. Par conséquent, lorsque α = −d/c,(

a bc d

)(α) et aα+ b

cα+ dsignifient ∞ dans ce cas.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 88 / 320

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Polynômes de degré 3 et 4. La droite projective.

Lemme.

(i) La matrice(

a bc d

)∈ GL2(k) fixe la droite à l’infini si et seulement

si c = 0.(ii) Les seules matrices de GL2(k) fixant toutes les droites de Pk sont

les matrices scalaires.

Démonstration. (i) C’est clair, car(

a bc d

)(1, 0) = (a, c) et (a, c)

engendre la droite à l’infini si et seulement si c = 0.

(ii) Les matrices scalaires fixent toutes les droites, car(

a 00 a

)(u, v) =

(au, av) et (u, v) et (au, av) engendrent la même droite lorsque a 6= 0.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 89 / 320

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Polynômes de degré 3 et 4. La droite projective.

Réciproquement, si(

a bc d

)fixe toutes les droites, alors elle fixe en

particulier la droite à l’infini, et donc c = 0 d’après le (i). En outre, enutilisant le fait que la matrice fixe la droite engendrée par (0, 1), on voit queb = 0.

Enfin, la matrice diagonale(

a 00 d

)transforme la droite engendrée

par (1, 1) en celle engendrée par (a, d), et ces deux droites coïncident si etseulement si a = d .

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Polynômes de degré 3 et 4. La droite projective.

Remarque. La démonstration de (ii) montre que, en fait, seules lesmatrices scalaires fixent les trois droites engendrées par (0, 1), par (1, 1) etla droite à l’infini.

Les matrices scalaires forment un sous-groupe distingué S de GL2(K ),et le groupe quotient GL2(k)/S est appelé le groupe projectif linéaire(d’ordre deux) de k et noté PGL2(k).

La partie (ii) de la proposition entraîne que les actions de GL2(k) surPk et sur k∪∞ induisent des actions de PGL2(k) sur ces deux ensembles.En outre, le seul élément de PGL2(k) qui fixe tous les éléments de Pk (oude k ∪ ∞) est l’élément neutre.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 91 / 320

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Polynômes de degré 3 et 4. La droite projective.

Théorème.(i) L’action de PGL2(k) sur Pk est triplement transitive.(ii) Le seul élément de PGL2(k) qui fixe trois éléments distincts de Pk

est l’élément neutre.

Rappelons d’abord ce que cela signifie. En général, si Γ est un groupeagissant sur un ensemble X , l’action est dite transitive si, étant donnés x ,y ∈ X , il existe γ ∈ Γ tel que γ(x) = y . Si n ≥ 1 est un entier, l’actionest dite n-fois transitive si l’action induite sur l’ensemble X n des n-tuplesd’éléments de X deux-à-deux distincts est transitive.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 92 / 320

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Polynômes de degré 3 et 4. La droite projective.

Démonstration. (i) On suppose que (u1, v1), (u2, v2), (u3, v3) engendr-ent trois droites deux-à-deux distinctes D1, D2, D3. Il suffit de trouverM ∈ GL2(k) telle que M(0, 1) engendre D1, M(1, 1) engendre D2 et M(1, 0)

engendre D3. Écrivons M =

(a bc d

)et cherchons des conditions sur les

coefficients a, b, c, d .Puisque M(0, 1) engendre D1, il existe p ∈ k× tel que (b, d) =

p(u1, v1) ; puisque M(1, 0) engendre D3, il existe r ∈ k× tel que (a, c) =

r(u3, v3). Par conséquent, M =

(ru3 pu1rv3 pv1

)et donc M(1, 1) = (ru3 +

pu1, rv3 + pv1) doit être un multiple scalaire de (u2, v2). Les droites engen-drées par (u1, v1) et par (u3, v3) étant supposées distinctes, le déterminantu3v1 − u1v3 est non-nul et, par conséquent, il existe une unique solution(p, r) du système ru3 + pu1 = u2, rv3 + pv1 = v2.

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Polynômes de degré 3 et 4. La droite projective.

(ii) Si N est une seconde matrice telle que N(0, 1) engendre D1, N(1, 1)engendre D2 et N(1, 0) engendre D3 on voit en suivant le même raisonne-

ment que dans la partie (i) qu’il existe q, s ∈ k× tels que N =

(su3 qu1sv3 qv1

)et N(1, 1) = (su3 + qu1, sv3 + qv1) soit un multiple scalaire de (u2, v2), parexemple égal à (tu2, tv2).

On en tire que (q, s) = t(p, r) puis que N = tM est un multiple scalairede M.

Une autre démonstration serait d’appliquer la remarque de la fiche 91à la matrice MN−1. En effet, cette matrice fixe les droites engendrées par(0, 1), par (1, 1) et par (1, 0) et donc, d’après la remarque en question, ils’agit d’une matrice scalaire.

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Polynômes de degré 3 et 4. La droite projective.

Rappelons pour mémoire le résultat suivant, qui sera utilisé plus loin.

Théorème.Soit k un corps commutatif.(i) Le groupe linéaire spécial SL2(k) des matrices carrées d’ordre 2 et

de déterminant 1 est engendré par les matrices(0 −11 0

),

(1 b0 1

)b ∈ k, et

(a 00 1/a

), a ∈ k×.

(ii) Le groupe linéaire GL2(k) est engendré par les matrices(0 −11 0

),

(1 b0 1

)b ∈ k, et

(a 00 1

), a ∈ k×.

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Polynômes de degré 3 et 4. Le birapport.

Le birapport.

Rappelons que k désigne un corps commutatif ; nous supposerons dé-sormais qu’il posséde au moins 3 éléments.

On note Rk l’ensemble des quadruplets (α, β, γ, δ) d’éléments de k ∪∞ deux-à-deux distincts.

Par définition, le birapport de (α, β, γ, δ) ∈ Rk est donnée par

B(α, β, γ, δ) =(α− γ)(β − δ)

(α− δ)(β − γ).

Lorsque α, β, γ et δ appartiennent à k, B est un élément non nul dek bien définie car α, β, γ et δ sont supposés deux-à-deux distincts.

En outre, B(α, β, γ, δ) 6= 1, car dans le cas contraire, (α−γ)(β− δ) =(α−δ)(β−γ) ce qui impliquerait après simplificaiton que (α−β)(γ−δ) = 0.

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Polynômes de degré 3 et 4. Le birapport.

Pour comprendre ce que B(α, β, γ, δ) devrait signifier lorsque ∞ ∈α, β, γ, δ, on suit la même démarche que dans les explications concernant

le sens de(

a bc d

)(∞) : si α, β, γ et δ correspondent aux droites vectorielles

engendrées respectivement par (u1, v1), (u2, v2), (u3, v3) et (u4, v4), alors

B(α, β, γ, δ) =(u1v3 − u3v1)(u2v4 − u4v2)

(u1v4 − u4v1)(u2v3 − u3v2).

Par exemple, afin de déterminer B(α, β, γ,∞), on pose (u1, v1) =(α, 1), (u2, v2) = (β, 1), (u3, v3) = (γ, 1) et (u4, v4) = (1, 0) et on trouve

B(α, β, γ,∞) =α− γ

β − γ.

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Polynômes de degré 3 et 4. Le birapport.

Après calcul, on trouve dans tous les cas que B(α, β, γ, δ) ∈ k−0, 1.En particulier,

B(λ, 1, 0,∞) = λ, λ 6∈ 0, 1,∞,

ce qui montre la première partie du résultat suivant.

Théorème.(i) Le birapport est une application surjective de Rk vers k − 0, 1.(ii) Pour que deux éléments (α, β, γ, δ) et (α′, β′, γ′, δ′) aient le même

birapport, il faut et il suffit qu’il existe M ∈ GL2(k) tel que M(α) = α′,M(β) = β′, M(γ) = γ′ et M(δ) = δ′.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 98 / 320

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Polynômes de degré 3 et 4. Le birapport.

La démonstration de la partie (ii) commence avec la vérification queB(M(α, β, γ, δ)) = B(α, β, γ, δ). Il suffit de le faire lorsque M fait partiedes matrices génératrices de GL2(k) indiquées dans le théorème de la fiche95. Dans chaque cas, le calcul est aisé (mais un peu répétitif).

Pour montrer la réciproque, on utilise le théorème de la fiche 92. Celui-ci implique qu’il existe N, N ′ ∈ GL2(k) tels que N(β) = N ′(β′) = 1,N(γ) = N ′(γ′) = 0 et N(δ) = N ′(δ′) = ∞. Ces matrices sont uniques àmultiplication par un scalaire près.

Posons M = N ′N−1. Alors M(β) = β′, M(γ) = γ′ et M(δ) = δ′ : ilreste à voir que M(α) = α′.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 99 / 320

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Polynômes de degré 3 et 4. Le birapport.

On a B(α, β, γ, δ) = B(N(α),N(β),N(γ),N(δ)) = B(N(α), 1, 0,∞) =N(α) et, de la même manière, B(α′, β′, γ′, δ′) = N ′(α).

Par hypothèse, B(α, β, γ, δ) = B(α′, β′, γ′, δ′).On a donc N(α) = N ′(α′), d’où M(α) = α′.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 100 / 320

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Polynômes de degré 3 et 4. Le birapport.

Le birapport B(α, β, γ, δ) n’est pas invariant par permutation des co-ordonnées α, β, γ et δ. On voit toutefois que

B(α, β, γ, δ) = B(β, α, δ, γ) = B(γ, δ, α, β) = B(δ, γ, β, α),

autrement dit, que B est stable par le sous-groupe distingué

V = e, (12)(34), (13)(24), (14)(23)

du groupe symétrique S4. (Ici, e désigne l’élément neutre de S4 et (i j), 1 ≤i < j ≤ 4 la transposition qui interchange la i-ème et la j-ème coordonnée.)

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 101 / 320

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Polynômes de degré 3 et 4. Le birapport.

En prenant un système de représentants de S4 suivant V (par exempleles éléments du sous-groupe de S4 qui fixent la quatrième coordonnée), onconstate que si B(α, β, γ, δ) = λ, alors les valeurs prises par B lorsque α,β, γ et δ sont permutés sont :

λ, 1/λ, 1− λ, 1/(1− λ), λ/(λ− 1) et (λ− 1)/λ.

(Il suffit de faire le calcul lorsque (α, β, γ, δ) = (λ, 1, 0,∞) — pourquoi ?)

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 102 / 320

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Polynômes de degré 3 et 4. Invariants.

Invariants.

On note Pk l’ensemble des polynômes de degré 3 où 4 et à coefficientsdans k, et dont toutes les racines sont simples. (On n’exige pas que lesracines appartiennent à k.)

Un élément de Pk s’écrit alors at4+bt3+ct2+dt+e, avec (a, b, c, d , e) ∈k5 et, si a = 0, alors b 6= 0.

Soit P ∈ Pk et soit α, β, γ, δ ⊆ k ∪ ∞ l’ensemble de ses racines,∞ étant considéré comme racine si et seulement si P est de degré 3. Enprenant les racines dans des ordres différents, on obtient 24 éléments de Rkpuis, comme nous venons de le voir, 6 valeurs (généralement distinctes) deleurs birapports.

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Polynômes de degré 3 et 4. Invariants.

Si λ est l’une de ces valeurs, les autres étant 1/λ, 1 − λ, 1/(1 − λ),(λ− 1)/λ et λ/(λ− 1), on trouve que les coefficients du polynôme f (x) =

(x −λ)(x −1/λ)(x − (1−λ))(x −1/(1−λ))(x − (λ−1)/λ)(x −λ/(λ−1))

ne dépendent que de P et non de l’ordre dans lequel on prend les racines.En fait, si l’on pose

µ = µ(P) = µ(λ) =(λ2 − λ+ 1)3

(λ(λ− 1))2 ,

on trouve après calcul que

f (x) = x6 − 3x5 − (µ− 6)x4 + (2µ− 7)x3 − (µ− 6)x2 − 3x + 1

et que µ(λ) = µ(1/λ) = µ(1 − λ) = µ(1 − 1/λ) = µ((λ − 1)/λ) =µ(λ/(λ− 1)).

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 104 / 320

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Polynômes de degré 3 et 4. Invariants.

On définit une action à droite de GL2(k) sur Pk par

(P,M) 7→ (P ·M)(t) = (ct + d)4P(at + b

ct + d),

où M =( a b

c d).

Lemme.Si α, β, γ, δ est l’ensemble des racines de P, alors

M−1(α),M−1(β),M−1(γ),M−1(δ)est l’ensemble des racines de P ·M.

Le résultat suivant découle alors des considérations précédentes :

Théorème.On suppose que le corps k soit algébriquement clos (par exemple que

k = C). Soient P, Q ∈ Pk . Pour que µ(P) = µ(Q), il faut et il suffit qu’ilexiste M ∈ GL2(k) et c ∈ k× tels que Q = c(P ·M).

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Polynômes de degré 3 et 4. Invariants.

La constante c est nécessaire car un polynôme n’est déterminé parses racines qu’à une constante multiplicative près. Étant donné µ ∈ k, lesvaleurs correspondantes de λ sont les racines du polynôme (x2 − x + 1)3 −µ(x(x − 1))2.

Notons que si k n’est pas algébriquement clos, il n’est pas forcémentpossible de prendre pour M une matrice à coefficients dans k. En effet, lesbirapports formés avec les racines d’un polynôme P à coefficients dans kn’appartiennent pas, en général, à k.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 106 / 320

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Polynômes de degré 3 et 4. Invariants.

Rappelons que, selon le théorème des fonctions symétriques, toute fonc-tion polynôme des racines d’un polynôme qui est symétrique par permutationdes racines est une fonction des coefficients du polynôme.

Si P est un polynôme de degré 4, P(t) = at4 + bt3 + ct2 + dt + e, etsi α, β, γ et δ sont les racines de P, alors

α+ β + γ + δ = −b/a,αβ + αγ + αδ + βγ + βδ + γδ = c/a,αβγ + αβδ + αγδ + βγδ = −d/a,

αβγδ = e/a,

comme on le voit en comparant les coefficients après avoir développé P(t) =a(t − α)(t − β)(t − γ)(t − δ).

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Polynômes de degré 3 et 4. Invariants.

Si en plus, P ∈ Pk , on voit que µ vaut((α− γ)2(β − δ)2 − (α− γ)(β − δ)(α− δ)(β − γ) + (α− δ)2(β − γ)2)3

(α− β)2(α− γ)2(α− δ)2(β − γ)2(β − δ)2(γ − δ)2

Ici, le dénominateur est le discriminant de P, divisé par a6. Il est in-variant par permutation des racines et s’exprime donc en fonction des co-efficients a, b, c, d et e. La formule précise n’est pas très éclairante : ilsuffit de dire qu’il s’agit d’un polynôme homogène de degré six. Notons lediscriminant ∆(P).

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Polynômes de degré 3 et 4. Invariants.

Le numérateur est le cube d’un polynôme

(α− γ)2(β − δ)2 − (α− γ)(β − δ)(α− δ)(β − γ) + (α− δ)2(β − γ)2

qui est, lui aussi, invariant par permutation des racines α, β, γ, δ. Aprèscalcul, on trouve qu’il est égal à

c2 − 3bd + 12aea2 .

Par conséquent, en multipliant numérateur et dénominateur par a6, ontrouve :

µ(P) =(c2 − 3bd + 12ae)3

∆(P).

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Polynômes de degré 3 et 4. Invariants.

Cette formule reste valable lorsque P ∈ Pk est de degré trois, mais ilfaut faire attention au sens de ∆(P), qui est alors obtenu en substituanta = 0 dans la formule pour le discriminant d’un polynôme de degré 4. Mais,si P(t) = bt3 + ct2 + dt + e, b 6= 0 le discriminant ∆3(P) vaut

−27b2e2 + 18bcde − 4bd3 + c2d2 − 4c3e

alors que ∆(P) = b2∆3(P).Par conséquent, lorsque P ∈ Pk est de degré 3, on a :

µ(P) =(c2 − 3bd)3

b2∆3(P).

Exercice. Vérifier cette formule directement par un calcul avec les fonc-tions des racines d’un polynôme de degré 3.

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Polynômes de degré 3 et 4. Invariants.

On a coutume de poser

j(P) = j = 256µ = 256(λ2 − λ+ 1)3

(λ(λ− 1))2 ;

j s’appelle alors l’invariant modulaire du polynôme P, et nous utiliseronsdésormais la fonction j plutôt que la fonction µ.

Le facteur 256 = 28 conduit à une perte d’information en caractéris-tique deux mais, dans le contexte des courbes elliptiques sur un corps decaractéristique différente de deux, notre formule coïncide bien avec l’inva-riant j de la courbe elliptique d’équation y2 = P(x) lorsque P ∈ Pk est dedegré 3.

Par contre, en caractéristique deux, une équation de cette forme nedéfinit plus une courbe elliptique : de telles courbes et leur invariant j sontalors définis d’une manière différente.

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Polynômes de degré 3 et 4. Invariants.

Exercice. (i) Vérifier que si P(t) = (a2 + t2)(b2 + t2), alors

j(P) = 16(a4 + 14a2b2 + b4)3

a2b2(a2 − b2)4 .

(ii) Lorsque k est algébriquement clos (et de caractéristique différentede deux), montrer que si j ∈ k, alors il existe a, b ∈ k tels que j = j(P).

Exercice. Soit j ∈ k, k un corps de caractéristique différente de deux.(i) Vérifier que si j ∈ k, j 6= 0, 1728, et si

P(t) = t3 +t2

4 − 36tj − 1728 −

1j − 1728 ,

alors j(P) = j .(ii) Construire des polynômes unitaires P de degré trois à coefficients

dans k vérifiant j(P) = 0, j(P) = 1728.

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Des intégrales elliptiques aux fonctions elliptiques

Des intégrales elliptiques aux fonctions elliptiques

En toute généralité, une intégrale elliptique est une intégrale de la forme∫ z

z0

R(w ,√

f (w)), dw

où R est une fonction rationnelle et f un polynôme de degré 3 ou 4 sansracine multiple.

Si f était de degré un ou deux, une telle intégrale s’exprimerait entermes des fonctions rationnelles, de logarithmes et de fonctions trigonomé-triques réciproques (arcsin, arccos et arctan).

Ces fonctions réciproques sont bien moins agréables que les fonctionsdirectes (exponentielle, fonctions sinus et cosinus, . . .). Les fonctions trigo-nométriques s’expriment en fonction de la fonction exponentielle grâce auxformules cos z = (eiz + e−iz)/2, sin z = (eiz − e−iz)/2i .

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Des intégrales elliptiques aux fonctions elliptiques

Une propriété remarquable de la fonction exponentielle est sa périodi-cité : ez+2πi = ez pour tout z ∈ C.

Les travaux des mathématiciens des dix-huitième et dix-neuvième sièclescherchant à comprendre les intégrales elliptiques ont revélés que ces inté-grales s’expriment en termes de fonctions réciproques de fonctions à deuxpériodes indépendantes, appelées aujourd’hui fonctions elliptiques.

Ce sont ces fonctions que nous allons maintenant étudier.

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Fonctions elliptiques

Fonctions elliptiques

Par définition, une fonction elliptique est une fonction méromorphe (surC) possédant deux périodes complexes R-linéairement indépendantes.

Si f est une fonction elliptique on note Per(f ) l’ensemble de ses pé-riodes ; il s’agit d’un sous-groupe fermé du groupe additif des nombrescomplexes.

Proposition. Soit f une fonction elliptique. Alors(i) ou bien Per(f ) = C et f est constante ;(ii) ou bien il existe une base (ω1, ω2) du R-espace vectoriel C telle

que Per(f ) = mω1 + nω2 | (m, n) ∈ Z2.

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Fonctions elliptiques

En général, on appelle réseau d’un R-espace vectoriel de dimensionfinie E tout sous-groupe du groupe additif de E engendré par une base deE .

Dans ce langage, la proposition dit que si f est une fonction elliptiquenon constante, alors Per(f ) est un réseau de C.

On montre plus généralement que si Ω est un réseau de E et si Ω′ estun sous-groupe fermé du groupe additif E contenant Ω, alors :

— ou bien Ω est d’indice fini dans Ω′, et alors Ω′ est un réseau ;— ou bien Ω′/Ω est infini, et alors Ω′ contient une droite vectorielle.

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Fonctions elliptiques

Soit donc f une fonction elliptique. Par hypothèse, Per(f ) contient unréseau Ω de C.

Dire que Per(f ) contient une droite vectorielle signifie qu’il existe ω ∈C× tel que Rω ⊆ Per(f ).

On voit aussitôt que f est alors constante sur Rω puis constante d’aprèsle principe de prolongement analytique.

Dans le cas contraire, Per(f ) contient Ω comme sous-groupe d’indicefini. Alors Per(f ) est un réseau.

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Fonctions elliptiques Propriétés de base.

Les propriétés de base des fonctions elliptiques.

On fixe un réseau Ω de C et on note C(Ω) l’ensemble des fonctionselliptiques f telles que Per(f ) ⊇ Ω. Il est clair que C(Ω) est un sous-corpsdu corps des fonctions méromorphes sur C.

Il est clair que les fonctions constantes appartiennent à C(Ω) et queC(Ω) est stable par dérivation.

On appelle diviseur (associé à Ω) un élément du groupe abélien libre surl’ensemble C/Ω. Ainsi, tout diviseur s’écrit de façon unique sous la forme∑

x∈C/Ω nx [x ], où nx est un entier qui est nul pour tout x à un nombre finid’exceptions près.

Le groupe des diviseurs associés à Ω sera noté Div(C/Ω).

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Fonctions elliptiques Propriétés de base.

On ne confondra pas le diviseur∑

x∈C/Ω nx [x ] avec l’élément∑x∈C/Ω

nx x

du groupe C/Ω. En fait, on a un homomorphisme (appelé évaluation etnoté s) de Div(C/Ω) vers C/Ω qui est défini par suppression des crochetsdans l’expression

∑x∈C/Ω nx [x ].

Si D =∑

x∈C/Ω nx [x ] est un diviseur, l’entier nx s’appelle la multiplicitéde x dans D. Le support de D est l’ensemble des x ∈ C/Ω de multipliciténon-nulle. On note supp(D) le support du diviseur D.

Le diviseur D est dit positif si toutes ses multiplicités sont positives.

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Fonctions elliptiques Propriétés de base.

Par définition, le degré du diviseur D =∑

x∈C/Ω nx [x ] est l’entier∑x∈C/Ω nx , que l’on note deg(D). Alors deg est un homomorphisme de

Div(C/Ω) vers le groupe additif Z.On note Div0(C/Ω) le sous-groupe des diviseurs de degré zéro de

Div(C/Ω).Si D =

∑x∈C/Ω nx [x ] est de degré zéro, on appelle ordre de D l’entier

positif∑

nx≥0 nx = −∑

nx≤0 nx .

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Fonctions elliptiques Propriétés de base.

Si f 6= 0 est une fonction méromorphe et si z ∈ C, on note ordz(f )l’ordre du zéro ou du pôle (compté comme un zéro d’ordre négatif) en z .Par exemple, si f (z) = (z − 1)/z2, alors ord0(f ) = −2, ord1(f ) = 1 etordz(f ) = 0 lorsque z 6= 0, 1.

On remarque que ordz(1/f ) = − ordz(f ) et que, si g 6= 0 est une se-conde fonction méromorphe, alors ordz(fg) = ordz(f )+ordz(g) et ordz(f +g) ≥ min(ordz(f ), ordz(g)) lorsque g 6= −f .

En particulier, ordz est un homomorphisme du groupe multiplicatif desfonctions méromorphes vers Z.

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Fonctions elliptiques Propriétés de base.

Supposons désormais que f ∈ C(Ω), f 6= 0.La périodicité de f implique que ordz+ω(f ) = ordz(f ) pour tout ω ∈ Ω.

Ainsi, si x ∈ C/Ω et on pose ordx (f ) = ordz(f ), alors ordx (f ) ne dépend pasdu choix du représentant z ∈ C de x et, d’après ce qui précède, f 7→ ordx (f )est un homomorphisme du groupe multiplicatif C(Ω)× vers Z.

Puisqu’une fonction méromorphe non nulle n’a qu’un nombre fini dezéros et de pôles dans un ensemble borné, on voit aussitôt que ordx (f ) = 0pour tout x ∈ C/Ω à un nombre fini d’exceptions près.

Par exemple, si (ω1, ω2) est une base de Ω, alors l’homomorphismecanonique C → C/Ω envoie le parallélogramme λ1ω1+λ2ω2 | 0 ≤ λ1, λ2 ≤1 sur C/Ω. Ce parallélogramme est borné est contient (au moins) unreprésentant de chaque zéro et pôle de f à addition d’un élément de Ω près.

On peut ainsi associer à toute fonction f ∈ C(Ω)× son diviseur div(f ) =∑x∈C/Ω ordx (f )[x ]. Il est clair que f 7→ div(f ) est un homomorphisme de

groupes.

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Fonctions elliptiques Propriétés de base.

Enfin, si z est un pôle de f et si resz(f ) désigne le résidu de f en z ,alors resz+ω(f ) = resz(f ) pour tout ω ∈ Ω et, si x ∈ C/Ω, on définit lerésidu en x de f , noté resx (f ), comme étant le résidu de f en n’importequel représentant de x dans C.

Théorème. Soit Ω un réseau de C.(i) Soit f ∈ C(Ω)×. Alors div(f ) = 0 si et seulement si f est constante.(ii) Si f ∈ C(Ω)×, alors div(f ) ∈ Div0(C/Ω).(iii) Si f ∈ C(Ω)×, alors

∑x∈C/Ω resx (f ) = 0.

(iv) Soit D ∈ Div0(C/Ω). Pour qu’il existe f ∈ C(Ω)× telle quediv(f ) = D, il faut et il suffit que s(D) = 0.

Dans l’énoncé (iv), s désigne l’homomorphisme évaluation (voir la fiche119). Vu l’énoncé (ii), il est légitime de définir l’ordre d’un élément de C(Ω)×

comme étant l’ordre de son diviseur.

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Fonctions elliptiques Propriétés de base.

Avant de commencer la démonstration, voici quelques conséquences.Corollaire. Soit Ω un réseau de C.(i) Toute fonction elliptique analytique est constante.(ii) Soient f , g ∈ C(Ω)×. Alors div(f ) = div(g) si et seulement si g

est un multiple constant de f .(iii) Il n’existe pas de fonction elliptique d’ordre un.Démonstration du corollaire.(i) Une fonction analytique f n’a pas de pôle. Son diviseur étant de

degré zéro, elle n’a pas de zéro non plus. Il s’ensuit que div(f ) = 0 puis quef est constante. (On pourrait également appliquer directement le théorèmede Liouville.)

(ii) C’est clair car div(f /g) = div(f )− div(g).(iii) Une fonction elliptique d’ordre un aurait un unique pôle d’ordre

un, dont le résidu serait forcément non-nul. Contradiction avec le (iii) duthéorème.

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Fonctions elliptiques Propriétés de base.

Commençons la démonstration du théorème.Fixons une base (ω1, ω2) de Ω avec =(ω2/ω1) > 0. Si α ∈ C, on note

Πα le parallélogramme α+λ1ω1+λ2ω2 | 0 ≤ λ1, λ2 ≤ 1. C’est clairementun compact de C.

(i) Il est clair que si f est constante, alors div(f ) = 0. Réciproquement,si div(f ) = 0, alors f n’a pas de pôles et, Π0 étant compact, elle est bornéesur Π0. Par périodicité f est bornée sur C et le théorème de Liouville entraînealors que f est constante.

(ii) On peut choisir α de telle façon que le bord de Πα ne rencontreaucun zéro ni pôle de f . Alors le degré de f se calcule en divisant par 2πil’intégrale de f ′/f sur le bord de Πα (pris avec l’orientation usuelle).

Explicitement, si div(f ) =∑

x∈C/Ω nx [x ], alors :

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Fonctions elliptiques Propriétés de base.

2πi∑

x∈C/Ω

nx =

∫ α+ω1

α

f ′(z)

f (z)dz +

∫ α+ω1+ω2

α+ω1

f ′(z)

f (z)dz+

+

∫ α+ω2

α+ω1+ω2

f ′(z)

f (z)dz +

∫ α

α+ω2

f ′(z)

f (z)dz ,

(∗)

les chemins d’intégration étant les segments droits.Ici, la périodicité entraîne que∫ α+ω2

α+ω1+ω2

f ′(z)

f (z)dz = −

∫ α+ω1+ω2

α+ω2

f ′(z)

f (z)dz = −

∫ α+ω1

α

f ′(z)

f (z)dz .

Il s’ensuit que la première et la troisième intégrale du membre de droite de(∗) se simplifient. On voit de la même manière que les deux autres intégralesse simplifient. On conclut que 2πi

∑x∈C/Ω nx = 0.

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Fonctions elliptiques Propriétés de base.

(iii) On utilise le même argument que le (ii) en considérant l’intégralede f sur le bord de Πα.

(iv) Si D = div(f ), on montre que s(D) = 0 applique un argumentsemblable à celui donné dans le (ii) à l’intégrale de la fonction z 7→ z f ′(z)

f (z)

sur les bords de Πα. Soit x ∈ C/Ω un zéro ou un pôle de f et soit z(x)l’unique représentant de x dans l’intérieur de Πα. Alors :

2πi∑

x∈C/Ω

nx z(x) =

∫ α+ω1

αz f ′(z)

f (z)dz +

∫ α+ω1+ω2

α+ω1

z f ′(z)

f (z)dz+

+

∫ α+ω2

α+ω1+ω2

z f ′(z)

f (z)dz +

∫ α

α+ω2

z f ′(z)

f (z)dz .

(∗∗)

En faisant le changement de variable z = z + ω2 dans la troisièmeintégrale, on trouve :

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Fonctions elliptiques Propriétés de base.

∫ α+ω1

αz f ′(z)

f (z)dz +

∫ α+ω2

α+ω1+ω2

z f ′(z)

f (z)dz = −ω2

∫ α+ω1

α

f ′(z)

f (z)dz .

Ici, la fonction f n’a ni zéro ni pôle sur un domaine contenant lesegment droit joignant α à α + ω2 : la fonction f ′/f a donc une primitivelog(f ) sur ce domaine qui vérifie elog(f (z)) = f (z).

Puisque f est périodique, on voit que log(f (α+ω))− log(f (α)) est unmultiple entier de 2πi . Par conséquent,

∫ α+ω1α z f ′(z)

f (z) dz +∫ α+ω2α+ω1+ω2

z f ′(z)f (z) dz

est un multiple entier de 2πiω2.De la même manière, la somme des deux autres intégrales dans la

formule (∗∗) est un multiple entier de 2πiω1.En divisant par 2πi , on conclut que

∑x∈C/Ω nx z(x) est de la forme

mω2 + nω1 avec (m, n) ∈ Z2, soit un élément de Ω.

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Fonctions elliptiques Constructions de fonctions elliptiques.

Constructions de fonctions elliptiques.

Il reste à démontrer que si s(D) = 0, alors il existe f ∈ C(Ω)× avecdiv(f ) = D.

Il s’agit là d’une question de construction de fonctions elliptiques ;pour l’instant, nous n’avons même pas démontré l’existence d’une fonctionelliptique non constante !

Grosso modo, il existe trois grandes théories de fonctions elliptiques.Nous allons les passer en revue avant de terminer la démonstration duthéorème.

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Fonctions elliptiques Constructions de fonctions elliptiques.

La théorie de Weierstrass construit les fonctions elliptiques directement,en partant du principe que si φ est une fonction méromorphe judicieusementchoisie, la série

∑ω∈Ω φ(z − ω) converge uniformément sur tout compact

ne contenant pas ses pôles ; sa somme sera alors un élément de C(Ω).Cette théorie a l’avantage de mettre en évidence presque dès le début

le lien avec les courbes elliptiques dont les points sont paramétrées par lesfonctions de Weierstrass.

La théorie de Jacobi est basée sur les fonctions thêta, qui sont des fonc-tions holomorphes qui, à défaut d’être périodiques, sont « quasi-périodiques »,dans le sens qu’elles vérifient des relations de la forme θ(z+ω) = eφ(z,ω)θ(z),où φ est une fonction holomorphe qui ne s’annule pas sur C.

Les fonctions thêta servent aussi à paramétrer des familles de courbeselliptiques. Elles sont également étroitement liées à l’AGM.

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Fonctions elliptiques Constructions de fonctions elliptiques.

La théorie de Legendre est celle qui est la plus proche des intégraleselliptiques et donc de l’AGM. Mais c’est aussi celle qui utilise les notationsles plus inextricables (au moins à mes yeux). Une partie du problème seraitque la théorie a été développée avant que les notions d’action d’un groupesur un ensemble ne soit bien dégagée, ce qui empêchait à l’époque un trai-tement aussi naturel que ceux disponibles aujourd’hui des transformationsdes intégrales elliptiques.

Enfin, une pléthore de fonctions elliptiques particulières ont été intro-duites en connexion avec différents problèmes spéciaux.

Il existe des livres longs de plusieurs centaines de pages parfois consa-crés essentiellement à des formules liant les fonctions intervenant dans lesdifférentes théories. En tout cas, une bonne maîtrise des propriétés de basedes fonctions elliptiques et une connaissance d’un petit nombre de défini-tions, de constructions et de formules constitueront un acquis suffisant pourla suite.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass

Les fonctions elliptiques de Weierstrass

On note encore Ω un réseau dans C.Lemme. Soit σ ∈ R.(i) La série

∑ω∈Ω, ω 6=0

1|ω|σ converge si et seulement si σ > 2.

(ii) Soit ω0 ∈ Ω. La série∑

ω∈Ω, ω 6=ω01

|z−ω|σ converge normalementsur tout compact de C qui ne rencontre pas Ω− ω0.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass

On en tire que, lorsque k ≥ 3, la série∑

ω∈Ω1

(z−ω)k représente unefonction fk analytique sur C− Ω. En outre, si ω0 ∈ Ω, on voit que

fk(z)− 1(z − ω0)k =

∑ω∈Ω, ω 6=ω0

1(z − ω)k

est holomorphe sur un voisinage de ω0, que fk a un pôle d’ordre k en ω0 etla partie polaire du développement de Laurent de fk est 1/(z − ω0)

k .On remarque que fk est une fonction paire ou impaire selon la parité

de l’entier k, et que f ′k = −kfk+1.En outre, les résidus des pôles de fk sont nuls.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 133 / 320

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction ℘ de Weierstrass

La fonction ℘ de Weierstrass

On définit alors la fonction ℘ de Weierstrass par la formule

℘′(z ,Ω) = ℘′(z) = −2f3(z) = −2∑ω∈Ω

1(z − ω)3 .

Puisque les résidus des pôles de f3 sont nuls, cette formule permet de définirla fonction ℘ à une constante près.

En outre, les seuls pôles de ℘ sont les éléments de Ω, qui sont des pôlesd’ordre deux ; leurs résidus sont encore nuls.

La partie polaire du pôle de ℘ en 0 est 1/z2. En imposant alors la condi-tion supplémentaire limz→0

(℘(z) − 1

z2

)= 0, ℘ est définie sans ambiguité.

Il s’agit d’une fonction paire.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction ℘ de Weierstrass

Lemme.℘ est une fonction elliptique.Démonstration. On sait déjà que ℘ est méromorphe. Soit ω ∈ Ω et soit

f la fonction f (z) = ℘(z +ω)−℘(z). Puisque f3 est une fonction elliptique,f ′(z) = 0 pour tout z ∈ C. Par conséquent, f est constante. Enfin, ℘ estune fonction paire. Soit ω ∈ Ω tel que ω/2 /∈ Ω. Alors f (z) = f (−ω/2) =℘(ω/2)− ℘(−ω/2) = 0.

Puisque fk = (−1)k(k−2)℘(k−2)/2, nous n’utiliserons plus la notationfk .

La fonction ℘ est une fonction elliptique d’ordre deux car, d’après cequi précède, on a ord0(℘) = −2 (dans C/Ω). En outre, ℘ est une fonctionpaire : son diviseur étant de degré 0, on conclut qu’il existe x ∈ C/Ω telque div(℘) = [x ] + [−x ]− 2[0].

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction ℘ de Weierstrass

Nous utiliserons souvent les résultats des exercices suivant.Exercice. (i) Soit a ∈ C, a /∈ Ω. Montrer que ℘(z) = ℘(a) si et

seulement si soit z − a ∈ Ω soit z + a ∈ Ω. En déduire le diviseur de℘− ℘(a) lorsque 2a /∈ Ω.

(ii) Soit a ∈ C tel que a /∈ Ω mais 2a ∈ Ω. Montrer que la fonctionz 7→ ℘(z − a) est paire. En déduire que son diviseur est 2[x ]− 2[0], x étantla classe de a suivant Ω.

(iii) Soit (ω1, ω2) une base de Ω et soient x1, x2, x3 les classes de ω1/2,ω2/2 et de (ω1 + ω2)/2 dans C/Ω. Montrer que div(℘′) = [x1] + [x2] +[x3]− 3[0].

(iv) Déduire des questions (ii) et (iii) que

℘′(z)2 = 4(℘(z)− e1)(℘(z)− e2)(℘(z)− e3),

où ei = ℘(ωi/2) (i ∈ 1, 2, 3) et ω3 = ω1 + ω2.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction ℘ de Weierstrass

Exercice. Soit k ≥ 2 un entier. On note L(k[0]) le C-espace vectorieldes fonctions de C(Ω) holomorphes en dehors de Ω et ayant un pôle d’ordreau plus k aux éléments de Ω. Montrer que (1, ℘, ℘′, ℘′′, . . . ℘(k−2)) est unebase de L(k[0]) (et donc que dimC(L(k[0])) = k.) [Étudier les partiespolaires des développements de Laurent en 0.]

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La structure du corps C(Ω)

La structure du corps C(Ω)

Soit encore Ω ⊆ C un réseau. Rappelons que C(Ω) désigne le corpsdes fonctions elliptiques dont le groupe de périodes contient Ω.

Théorème.Toute fonction elliptique s’écrit de façon unique sous la forme z 7→

f (℘(z)) + ℘′(z)g(℘(z)), où f et g sont des fonctions rationnelles.

Démonstration. Puisque ℘ est paire et ℘′ impaire, il suffit de montrerque toute fonction elliptique paire est une fonction rationnelle de ℘. Soitdonc f ∈ C(Ω) une fonction paire. Si x ∈ C/Ω appartient au support dediv(f ), il en est le même pour −x , et les multiplicités de x et de −x sontles mêmes.

On a x = −x ssi 2x = 0 et, mise à part x = 0, cette équation a 3solutions dans Ω. Il s’agit des classes suivant Ω de ω1/2, de ω2/2 et de(ω1 + ω2)/2, (ω1, ω2) étant une base de Ω.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La structure du corps C(Ω)

Désignons ω1 +ω2 par ω3 afin d’alléger la notation, puis notons x1, x2et x3 les classes correspondantes.

Le diviseur de f est alors de la forme

n0[0] + n1[x1] + n2[x2] + n3[x3] +∑x∈S

nx ([x ] + [−x ]),

où x parcourt un ensemble fini d’éléments de l’ensemble S = C/Ω −0, x1, x2, x3 modulo la relation d’équivalence x ∼ y ssi x = ±y .

Puisque f est paire, le développement de Laurent de f en 0 ne contientque des puissances paires de z . Par conséquent, n0 est pair. Le fait que f estpaire et périodique entraîne que les fonctions z 7→ f (z−ωi/2) (i ∈ 1, 2, 3)sont également paires, puis que n1, n2 et n3 sont pairs.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La structure du corps C(Ω)

En utilisant l’exercice de la fiche 136 et le fait que n0 = −(n1 + n2 +n3 +

∑x∈S 2nx ), on constate que la fonction

z 7→ (℘(z)− e1)n12 (℘(z)− e2)

n22 (℘(z)− e3)

n32

∏x∈S

(℘(z)− ℘(ax ))nx ,

où ax désigne un représentant de x et ei = ℘(ωi/2), a le même diviseur quef .

On en tire que f est un multiple constant de cette fonction, qui estbien une fonction rationnelle de ℘.

La démonstration de l’unicité de f et de g est laissée en exercice.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction ζ de Weierstrass

La fonction ζ de Weierstrass(à ne pas confondre avec la fonction dzêta de Riemann. . .)La fonction ℘ n’a que des pôles d’ordre deux aux points du réseau Ω.

En outre, les résidus de ces pôles sont nuls. Par conséquent, ℘ possède uneprimitive sur C−Ω, uniquement déterminée à une constante additive près.La fonction dzêta de Weierstrass est l’unique fonction ζ vérifiant

ζ ′(z) = −℘(z), limz→0

(ζ(z)− 1

z

)= 0.

Cette fonction a un pôle simple avec résidu 1 en tout point de Ω, etelle est holomorphe ailleurs. Elle est impaire.

Il s’ensuit que ζ n’est pas une fonction elliptique. En effet, si elle étaitelliptique, la discussion qui précède montre qu’elle serait d’ordre un, alorsqu’il n’existe pas de fonctions elliptiques d’ordre un d’après le corollaire dela fiche 124.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction ζ de Weierstrass

Proposition.Soit Ω ⊆ C un réseau et soit ζ la fonction dzêta associée.(i) Si ω ∈ Ω, il existe η(ω) ∈ C tel que ζ(z + ω) = ζ(z) + η(ω) pour

tout z ∈ C.(ii) On a η(ω + ω′) = η(ω) + η(ω′) pour tout ω, ω′ ∈ Ω.

Démonstration. (i) Puisque ζ ′ = −℘, la fonction z 7→ ζ(z + ω)− ζ(z)est à dérivée nulle. Elle est donc constante.

(ii) D’une part, on a

ζ(z + ω + ω′) = ζ(z) + η(ω + ω′)

et de l’autre part on a

ζ(z + ω + ω′) = ζ(z + ω) + η(ω′) = ζ(z) + η(ω) + η(ω′).

On montre l’égalité cherchée en comparant ces deux formules.John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 142 / 320

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction ζ de Weierstrass

Exercice. (i) Soient a, b ∈ C. Montrer que z 7→ ζ(z − a) − ζ(z − b)est une fonction elliptique.

(ii) Montrer plus généralement que si n ≥ 1 est un entier, et si(a1, a2, . . . , an) ∈ Cn et (λ1, λ2, . . . , λn) ∈ Cn, alors

z 7→ λ1ζ(z − a1) + λ2ζ(z − a2) + · · ·+ λnζ(z − an)

est une fonction elliptique si et seulement si∑n

k=1 λk = 0.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La relation de Legendre

La relation de LegendreThéorème.Soit Ω ⊆ C un réseau et soit (ω1, ω2) une base de Ω telle que

=(ω2/ω1) > 0. On pose η1 = η(ω1), η2 = η(ω2), où η est comme dans laproposition de la fiche 142. Alors

η1ω2 − η2ω1 = 2πi .

Démonstration. Posons α = −(ω1 + ω2)/2 et considérons∫γ ζ(z)dz ,

où γ parcourt le bord du parallèlogramme Πα avec l’orientation usuelle (voirla démonstration du théorème de la fiche 123).

La fonction est ζ est holomorphe sur γ et a un unique pôle en z = 0 àl’intérieur du lacet. Il s’agit d’un pôle simple, de résidu 1.

Par conséquent,∫γ ζ(z) dz = 2πi .

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La relation de Legendre

D’autre part,∫ α+ω1

αζ(z) dz +

∫ α+ω2

α+ω1+ω2

ζ(z) dz = −η2ω1,

comme on voit en substituant z = w + ω2 dans le deuxième intégrale et enappliquant la relation ζ(w + ω2) = ζ(w) + η2.

De la même manière, on trouve que∫ α+ω1+ω2

α+ω1

ζ(z) dz +

∫ α

α+ω2

ζ(z) dz = η1ω2,

Au total, donc,∫γ ζ(z) dz = η1ω2 − η2ω1 et le résultat en découle.

Remarque. La relation de Legendre appliquée avec le réseau de base(1, i) est, en fait, la clé de la démonstration du théorème de Brent-Salamin(voir à partir de la fiche 222).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Fonctions elliptiques à diviseur de pôles donné

Fonctions elliptiques à diviseur de pôles donné

Rappelons que le diviseur D =∑

x nx [x ] est dit positif si nx ≥ 0quelque soit x . Le degré de D est alors l’entier

∑x nx .

Si f est une fonction elliptique, son diviseur de pôles est le diviseur

div(f )∞ = −∑

pôles de fordx (f )[x ],

la somme parcourant l’ensemble des pôles de f dans C/Λ. C’est un diviseurpositif.

On définit de la même manière le diviseur de zéros de f par div(f )0 =∑zéros de f ordx (f )[x ], de sorte que div(f ) = div(f )0 − div(f )∞.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Fonctions elliptiques à diviseur de pôles donné

Proposition. Soit D un diviseur positif de Div(C/Ω). Si D est de degréau moins deux, il existe une fonction elliptique dont le diviseur de pôles estD.

La démonstration permet d’exprimer une telle fonction en termes desfonctions ζ et ℘ et ces dérivées, comme nous allons voir.

On écrit D =∑

x nx [x ].(i) Supposons d’abord que nx ≥ 2 pour tout x . Soit ax ∈ C un

représentant de x . Alors la fonction z 7→∑

x ℘(nx−2)(z − ax ) a D pour

diviseur de pôles.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Fonctions elliptiques à diviseur de pôles donné

(ii) Supposons qu’il existe x tel que nx = 1. Puisque D est supposéde degré au moins deux, supp(D) contient au moins deux éléments. SoitS un sous ensemble de supp(D) de cardinal au moins deux et contenanttous x de multiplicité un. Soit T le sous ensemble de supp(D) des pointsde multiplicité au moins deux. On choisit une famille de nombres complexesλx | x ∈ S telle que

∑x∈S λx = 0. Enfin, pour tout x ∈ supp(D), on

choisit un représentant ax ∈ C de x .Alors la fonction

z 7→∑x∈S

λxζ(z − ax ) +∑x∈T

℘(nx−2)(z − ax )

est une fonction elliptique de diviseur de pôles D, comme on le voit enappliquant le (ii) de l’exercice de la fiche 143.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 148 / 320

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Fonctions elliptiques à diviseur de pôles donné

Soit encore D ∈ Div(C/Ω) un diviseur positif. On note L(D) le C-espace vectoriel des fonctions elliptiques dont le diviseur des pôles div(f )∞est majoré par D, c’est-à-dire celles telles que D − div(f )∞ est un diviseurpositif.

Par exemple, l’exercice de la fiche 137 montre que si D = k[0], k ≥ 2,alors L(D) est de dimension k.

Exercice. Vérifier que L(D) est bien un espace vectoriel.Exercice. Montrer que si D = 0 ou si D = [x ], alors L(D) est égal à

l’espace des fonctions constantes.Exercice. On suppose D = k[x ], avec k ≥ 2. Décrire une base de L(D)

et donner sa dimension.Ces exercices sont des cas particuliers du résultat suivant.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Fonctions elliptiques à diviseur de pôles donné

Théorème. Soit D un diviseur positif.(i) Si deg(D) = 0 ou 1, alors L(D) est l’espace des fonctions constantes.(ii) On suppose deg(D) ≥ 2. Alors L(D) est de dimension deg(D).

Une base de L(D) est donnée par les fonctions

1, ℘(z − ax ), ℘′(z − ax ), · · · , ℘(n−2)(z − ax ),

lorsque D = n[x ] (n = deg(D)) et par les fonctions

1, ζ(z − ax2)− ζ(z − ax1), · · · , ζ(z − axs )− ζ(z − ax1),

ainsi que les fonctions

℘(k)(z − ax ), x ∈ supp(D) tel que nx ≥ 2 et 0 ≤ k ≤ nx − 2

lorsque #(supp(D)) = s ≥ 2. Ici ax désigne un choix de représentant dansC de x ∈ supp(D).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Fonctions elliptiques à diviseur de pôles donné

Démonstration. Le (i) fait partie des exercices de la fiche 149. Pa-reil pour le cas D = n[x ] de (ii). En général, on montre qu’une fonctionf ∈ L(D) appartient à l’espace engendré par les fonctions indiquées parrécurrence sur le degré de D, l’inclusion réciproque étant claire.

Lorsque deg(D) = 2, on a soit D = 2[x ] soit D = [x ]+[y ], avec x 6= y .Le premier cas est déjà fait.

En ce qui concerne le deuxième, on remarque que si λ désigne le résiduen ax d’une fonction f ∈ L(D), alors le résidu de f en ay est −λ (car lasomme des résidus est nulle). Par conséquent, la fonction

z 7→ f (z)− λ(ζ(z − ax )− ζ(z − ay ))

est constante. Donc f appartient à l’espace engendré par 1 et par ζ(z −ax )− ζ(z − ay ).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Fonctions elliptiques à diviseur de pôles donné

En général, si deg(D) > 2, deux cas se présentent.(a) Si nx = 1 pour tout x ∈ supp(D), on raisonne de la même manière

que lorsque D = [x ]+[y ]. Si x 6= y ∈ supp(D) et si λ est le résidu de f en ax ,alors la fonction z 7→ f (z)−λ(ζ(z−axs )−ζ(z−ax1)) a ses pôles concentrésdans D−xs. Par l’hypothèse de récurrence, elle appartient donc à l’espaceengendré par 1 et par ζ(z − axt )− ζ(z − ax1) avec 2 ≤ t ≤ s − 1.

(b) S’il existe x ∈ supp(D) avec nx ≥ 2, et si f ∈ L(D) a un pôled’ordre au plus nx en x , alors il existe λ ∈ C tel que

f (z) =λ

(z − ax )nx+ O

( 1(z − ax )nx−1

), z → ax .

Alors f (z) − (−1)nxλ(nx − 1)!℘(nx−2)(z − ax ) appartient à L(D − [x ]) etdeg(D− [x ]) = deg(D)− 1. On peut donc à nouveau appliquer l’hypothèsede récurrence.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Fonctions elliptiques à diviseur de pôles donné

Enfin, le fait que les familles de fonctions génératrices forment desfamilles libres se voit en comparant les parties polaires en les différentspôles dans une relation de dépendance linéaire éventuelle.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction σ de Weierstrass

La fonction σ de Weierstrass. . . Et pourtant nous n’avons toujours pas terminé la démonstration de

la partie (iv) du théorème de la fiche 123 !Il est facile de déterminer le diviseur des pôles des fonctions elliptiques

que nous venons de construire ; par contre, cette construction donne peud’information concernant leurs zéros.

Dans un monde idyllique, il existerait une fonction elliptique ayant justeun zéro simple au points de Ω et sans pôle ni zéro ailleurs. S’il existait unetelle fonction σ, on pourrait construire une fonction elliptique de diviseurD =

∑x nx [x ] par la formule

(∗)∏

x∈supp(D)

σ(z − ax )nx

par analogie avec la construction d’une fonction rationnelle ayant des zéroset pôles donnés.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction σ de Weierstrass

Malheureusement, une telle fonction n’existe pas (pourquoi pas ?).Toutefois Weierstrass a montré comment construire une fonction ho-

lomorphe σ quasi-périodique (c’est-à dire vérifiant une relation σ(z + ω) =γ(ω, z)σ(z) pour tout z ∈ C et ω ∈ Ω, le facteur γ étant holomorphe et nes’annulant pas sur C).

La fonction (∗) ne sera donc pas en général une fonction elliptique,mais nous verrons qu’il sera possible de choisir les ax pour que cela soit lecas lorsque s(D) = 0, comme prévu par la partie (iv) du théorème de lafiche 123.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 155 / 320

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction σ de Weierstrass

Théorème.(i) Il existe une unique fonction σ holomorphe sur C et vérifiant

σ′(z)

σ(z)= ζ(z), σ(z) = z + O(z2), z → 0.

Elle a un zéro simple en tout point de Ω. On a σ(z) 6= 0 lorsque z /∈ Ω.(ii) La fonction σ est impaire.(iii) Elle vérifie l’équation fonctionnelle

σ(z + ω) = ε(ω)eη(ω)(z + ω2 )σ(z), z ∈ C, ω ∈ Ω,

où η(ω) est définie dans la proposition de la fiche 142 et ε(ω) = 1 ou −1selon que ω/2 ∈ Ω ou non.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction σ de Weierstrass

Exercice. Compléter la démonstration de la partie (iv) du théorèmede la fiche 123 en vérifiant que, lorsque s(D) = 0, on peut choisir lesreprésentants ax de telle manière que

∑x nx ax = 0, puis que si c’est le cas,

la fonction (∗) de la fiche 154 est bien une fonction elliptique.Démonstration du théorème.(i) L’existence de σ est un cas particulier d’une construction standarde

de la théorie des fonctions méromorphes, dont nous rappelons le principe.Le point est que tous les pôles de ζ sont simples et les résidus sont desentiers. Si on fixe un point z0 ∈ C où ζ n’a pas de pôle, l’intégrale∫ z

z0

ζ(w) dw , z un point de holomorphie de ζ,

dépend du choix de chemin d’intégration joignant z0 à z .

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction σ de Weierstrass

Toutefois, puisque tous les résidus de ζ sont des entiers, la valeur del’intégrale est unique à un multiple entier de 2πi près. Par conséquent,l’exponentielle

σ0(z) = e∫ z

z0ζ(w) dw

est bien définie, et holomorphe aux points de holomorphie de ζ. En outre,on a σ′0(z) = ζ(z)σ0(z).

Si ζ a un pôle simple de résidu n ∈ Z en ω, et si limz→ω

(ζ(z)− n

z−ω

)=

γ, alors on voit que limz→ω σ0(z)/(z − ω)n = eγ 6= 0. Par conséquent, σ0se prolonge en une fonction méromorphe en ω, et ordω (σ0) = n.

Dans le cas où ζ est la fonction de Weierstrass, on a toujours n = 1,et σ0 est holomorphe sur C avec des zéros simples aux points de Ω.

En particulier, il existe une constante C 6= 0 telle que σ0(z) = Cz +O(z2) lorsque z → 0. On voit alors que la fonction σ(z) = σ0(z)/C possèdeles propriétés requises.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction σ de Weierstrass

Afin de vérifier l’unicité de σ, on rappelle que la dérivée logarithmiquedlog(f ) de la fonction méromorphe f 6= 0 est définie par dlog(f )(z) = f ′(z)

f (z)

lorsque f (z) 6= 0. Les propriétés de base sont :(a) On a dlog(fg) = dlog(f ) + dlog(g) lorsque f 6= 0 et g 6= 0 sont

méromorphes sur le même domaine. De même dlog(1/f ) = − dlog(f ).(b) On suppose que f soit méromorphe sur un ouvert connexe de C.

Alors dlog(f ) = 0 si et seulement si f est constante.

Nous venons de construire une fonction σ telle que dlog(σ) = ζ.

Si τ est une seconde fonction holomorphe vérifiant τ ′(z)τ(z) = ζ(z) et

τ(z) = z + O(z2) lorsque z → 0, alors dlog(σ) − dlog(τ) = 0 et doncdlog(σ/τ) = 0. Par conséquent, σ/τ est constante et la condition τ(z) =z + O(z2) implique que τ = σ.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction σ de Weierstrass

(ii) D’après le principe de prolongement analytique, il suffit de montrerque σ(−z) = −σ(z) lorsque z appartient à un disque D centré à l’origine.

On prend D suffisamment petit pour que la fonction φ(z) = ζ(z)− 1z

se prolonge en une fonction holomorphe sur D. Alors φ restreinte à D estimpaire. Par conséquent, les fonctions

z 7→∫ z

0φ(w) dw et F (z) = e

∫ z0 φ(w) dw

sont paires. Mais, il existe une constante C1 6= 0 telle que C1σ(z) = zF (z)pour tout z ∈ D. Par conséquent, σ est impaire sur D, donc partout.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction σ de Weierstrass

(iii) Nous allons utiliser à nouveau la dérivée logarithmique.Soit ω ∈ Ω et soit f la fonction

f (z) =σ(z + ω)

σ(z)eη(ω)z .

Alors dlog(f )(z) = ζ(z + ω) − ζ(z) − η(ω) = 0. On en tire que f est uneconstante, dont on note K (ω) la valeur.

On a doncσ(z + ω) = K (ω)σ(z)eη(ω)z

pour tout z ∈ C, ω ∈ Ω.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction σ de Weierstrass

En particulier, en posant z = −ω/2, on trouve, σ étant impaire :

−σ(− ω

2)

= σ(ω

2)

= σ(− ω

2 + ω)

= K (ω)σ(− ω

2)eη(ω)(−ω

2 ).

Lorsque ω2 /∈ Ω, on sait d’après le (i) que σ

(− ω

2)6= 0. On en tire que,

dans ce cas, K (ω) = −eη(ω)ω/2 comme prévu.

Lorsque ω2 ∈ Ω, il existe un entier r ≥ 1 ainsi que ω′ ∈ Ω tels que

ω = 2rω′ et ω′

2 /∈ Ω. Alors :

σ(z + ω) = σ(z)2r−1∏k=0

σ((z + kω′) + ω′)

σ(z + kω′)

= σ(z)2r−1∏k=0

(− eη(ω

′)((z + kω′) + ω′

2)).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction σ de Weierstrass

Puisqu’il y a un nombre pair de termes dans le produit, on voit que

σ(z + ω) = σ(z)eη(ω′)S ,

S =2r−1∑k=0

((z + kω′) +

ω′

2)

= 2r z +2r (2r − 1)

2 ω′ + 2r ω′

2

= 2r z + 2r−1(2rω′).

Enfin, puisque ω = 2rω′, on a η(ω) = 2rη(ω′) : on en tire aussitôt queη(ω′)S = η(ω)(z + ω

2 ) comme prévu.

Exercice. Soit n ≥ 1 un entier. Montrer que z 7→ σ(nz)

σ(z)n2 est une

fonction elliptique. Quel est son ordre ?

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction σ de Weierstrass

Exercice (facultatif).Dans la plupart des cours sur les fonctions elliptiques de Weierstrass,

les fonctions ℘, ζ et σ sont définies par les formules

℘(z) =1z2 +

∑ω 6=0

( 1(z − ω)2 +

1ω2

),

ζ(z) =1z +

∑ω 6=0

( 1z − ω

+1ω

+zω2

), et

σ(z) = z∏ω 6=0

(1− z

ω

)e

zω + z2

2ω2 ,

où les sommes et le produit parcourent les éléments non-nuls ω du réseauΩ.

Démontrer que ces définitions sont équivalentes à celles connées pré-cédemment.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La fonction σ de Weierstrass

(Cela nécessite un peu de soin. Après l’étude des questions de conver-gence, il faut montrer que la fonction notée ℘ dans l’exercice vérifie ℘′(z) =

−2∑

ω∈Ω(z − ω)−3) et limz→0(℘(z)− 1

z2

)= 0. Cela suffit pour la carac-

tériser comme étant égale à notre ℘. Ensuite, il faut effectuer des étudessemblabes de ζ et de σ.)

Remarque. Bien que explicites, ses formules sont inutiles pour les calculscar leur convergence est beaucoup trop lente.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Fonctions quasi-périodiques

Fonctions quasi-périodiquesNous avons déjà fait allusion à la notion de fonction quasi-périodique.

Il s’agit d’une fonction f , méromomorphe sur C, qui vérifie une relationfonctionnelle de la forme

f (z + ω) = f (z)φ(ω, z), z ∈ C, ω ∈ Ω,

les fonctions φ(ω, z) étant holomorphe et ne s’annulant pas sur C. Elless’appellent les facteurs d’automorphie de f .

En général, le facteur d’automorphie φ(ω, z) dépend de l’élément ω deΩ.

Exercice. Soient ω, ω′ ∈ Ω et soit f quasi-périodique par rapportà Ω avec facteur d’automorphie φ(ω, z). Montrer que φ(ω + ω′, z) =φ(ω, z)φ(ω′, z + ω) = φ(ω′, z)φ(ω, z + ω′). En déduire que les facteursφ(ω, z) sont déterminées par les facteurs φ(ω1, z), φ(ω2, z) où (ω1, ω2) estune base de Ω.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Fonctions quasi-périodiques

Il y a trois méthodes (au moins) de construire des fonctions elliptiquesà partir de fonctions quasi-périodiques.

La première est de remarquer que, si f et g sont deux fonctions quasi-périodoques avec le même facteur d’automorphie, alors f /g est une fonctionelliptique.

La deuxième est de considérer le produit F (z) =∏k

i=1 f (z − ai)ni , où(a1, a2, . . . , ak) ∈ Ck et (n1, n2, . . . , nk) ∈ Zk , f étant une fonction quasi-périodique donnée. Sous certaines conditions, lorsqu’on calcule F (z +ω), leproduit des facteurs d’automorphie se simplifie, et on trouve que F (z +ω) =F (z). C’est le cas lorsque f est la fonction σ (voir l’exercice de la fiche 157).

Le dernière est de considérer des dérivées convenables de la dérivéelogarithmique d’une fonction quasi-périodique f . On a alors dlog(f )(z+ω) =dlog(f )(z) + dlog(φ(ω, z)). Si dlog(φ(ω, z)) est un polynôme de degré d ,alors sa d + 1-ième dérivée est nulle, et donc dlog(f )(d+1) est périodique.À nouveau, ça marche lorsque f = σ, et (σ′

σ )′ = −℘ est périodique.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Fonctions quasi-périodiques

Soit f 6= 0 une fonction quasi-périodique, avec facteurs d’automorphieφ(ω, z). Puisque les fonctions φ ne s’annulent pas, la relation f (z + ω) =f (z)φ(ω, z) implique que orda(f (z + ω)) = orda(f (z)) quelque soit a ∈ C.

En outre, f ne peut posséder qu’un nombre fini de zéros et de pôlesdans un parallélogramme Πα = α+ λ1ω1 + λ2ω2 | 0 ≤ λ1, λ2 ≤ 1.

Par conséquent, on peut associer à f son diviseur

div(f ) =∑

x∈C/Ω

ordax (f )[x ],

ax étant un représentant de x dans C.Il est clair que les fonctions quasi-périodiques non-nulles (par rapport

au même réseau) forment un groupe multiplicatif. L’application f 7→ div(f )est alors un homomorphisme de groupe.

Exemple. La fonction σ est quasi-périodique. On sait qu’elle a un zérosimple aux points de Ω, et ne s’annule pas ailleurs. Par conséquent, div(σ) =[0].

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Formules d’addition

Formules d’addition

Théorème.Pour tout z , w ∈ C avec z /∈ Ω, w /∈ Ω, on a

σ(z − w)σ(z + w)

σ(z)2σ(w)2 = −(℘(z)− ℘(w)

).

Démonstration. Les conditions z , w /∈ Ω garantissent que les deuxmembres de l’équation sont bien définis. On considère le fonction

f (z) =σ(z − w)σ(z + w)

σ(z)2σ(w)2 ,

avec w constant. Il s’agit d’une fonction elliptique (c’est un cas particulierde l’exercice de la fiche 157.)

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Formules d’addition

Rappelons que div(σ) = [0]. On en tire que div(σ(z − w)) = [w ]. Parconséquent, div(f ) = [w ] + [−w ]− 2[0].

D’autre part, ℘ est une fonction elliptique d’ordre deux. La fonctionz 7→ ℘(z) − ℘(w) est donc également d’ordre deux. Elle s’annule en w eten −w . Supposons d’abord que 2w /∈ Ω. Alors w et −w ont des imagesdistinctes dans C/Ω, et on a div(℘(z)− ℘(w)) = [w ] + [−w ]− 2[0].

Par conséquent, f et z 7→ ℘(z)− ℘(w) sont deux fonctions elliptiquesavec le même diviseur, et leur quotient est une fonction elliptique sans zérosni pôles. Or, on sait qu’une telle fonction elliptique est constante.

Par conséquent, il existe C telle que

σ(z − w)σ(z + w)

σ(z)2σ(w)2 = C(℘(z)− ℘(w)

).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Formules d’addition

On établit que C = −1 en comparant les termes principaux des déve-loppements de Laurent au voisinage de 0.

D’une part, on a

℘(z)− ℘(w) =1z2 + O

(1z)

et de l’autre part, on a σ(z − w) = σ(−w) + O(z) = −σ(w) + O(z) etσ(z + w) = σ(w) + O(z), d’où σ(z − w)σ(z + w) = −σ(w)2 + O(z).Puisque σ(z)2 = z2 + O(z3), on conclut que

σ(z − w)σ(z + w)

σ(z)2σ(w)2 = − 1z2 + O

(1z),

d’où C = −1.L’argument qui précède suppose que 2w /∈ Ω. On déduit que théorème

reste vrai lorsque 2w ∈ Ω par un argument de continuité.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 171 / 320

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Formules d’addition

Corollaire.Pour tout z , w ∈ C tels que z /∈ Ω, w /∈ Ω, z ± w /∈ Ω, on a :

ζ(z + w) + ζ(z − w)− 2ζ(z) =℘′(z)

℘(z)− ℘(w),

ζ(z + w)− ζ(z − w)− 2ζ(w) = − ℘′(w)

℘(z)− ℘(w), et

ζ(z + w) = ζ(z) + ζ(w) +12℘′(z)− ℘′(w)

℘(z)− ℘(w).

Démonstration. La première formule se démontre en appliquant la dé-rivée logarithmique à la formule du théorème. La deuxième s’en déduit eninterchangeant z et w et en rappelant que ζ est une fonction impaire. Enfin,la troisième s’obtient en prenant la somme des deux premières.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Formules d’addition

Si l’on dérive encore la dernière de ces formules, on obtient des relationsexprimant ℘(z + w) en forme de fonction rationnelle en ℘(z) et ℘(w) ainsique ses dérivées :

℘(z + w) = ℘(z)− 12

℘′′(z)

℘(z)− ℘(w)+

12℘′(z)(℘′(z)− ℘(w))

(℘(z)− ℘(w))2

d’où, en interchangeant z et w :

℘(z + w) = ℘(w) +12

℘′′(w)

℘(z)− ℘(w)+

12℘′(w)(℘′(w)− ℘′(z))

(℘(z)− ℘(w))2 .

En prenant la somme des deux équations, on obtient une relation symétriqueen z et w :

℘(z + w) =12(℘(z) + ℘(w)

)− 1

4℘′′(z)− ℘′′(w)

℘(z)− ℘(w)+

14

(℘′(z)− ℘′(w)

℘(z)− ℘(w)

)2.

Cette équation est une première forme de la formule d’addition pour lafonction ℘. Afin de la remettre dans sa forme habituelle, nous avons besoinde l’équation différentielle de ℘.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 173 / 320

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass L’équation différentielle de ℘.

L’équation différentielle de ℘.D’après l’exercice de la fiche 136, on sait que ℘′(z)2 = 4(℘(z) −

e1)(℘(z)−e2)(℘(z)−e3) où, si (ω1, ω2) est une base de Ω et si ω3 = ω1+ω2,ei désigne ℘(ωi/2). En particulier, ℘′2 est un polynôme de degré trois en ℘.

Nous allons maintenant démontrer par une autre méthode, que ℘′2 estun polynôme de degré trois en ℘, et obtenir ainsi une seconde formule pource polynôme.

Pour cela, on pose, k ≥ 3 étant un entier :

Gk(Ω) = Gk =∑

ω∈Ω, ω 6=0

1ωk .

(En fait, la définition n’est intéressante que lorsque k est pair, carGk = 0 lorsque k est impair.) Gk s’appelle alors la série d’Eisenstein depoids k.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass L’équation différentielle de ℘.

On a coutume de poser

g2 = g2(Ω) = 60G4(Ω), g3 = g3(Ω) = 140G6(Ω).

Théorème. Avec ces notations, on a

℘′(z)2 = 4℘(z)3 − g2℘(z)− g3.

Corollaire. On a 4(℘(z)−e1)(℘(z)−e2)(℘(z)−e3) = 4℘(z)3−g2℘(z)−g3.

La démonstration du théorème consiste en une étude du développementde Laurent de la fonction z 7→ ℘′(z)2 − 4℘(z)3 + g2℘(z) + g3 en z = 0.En effet, les seuls pôles possibles de cette fonction sont les points de Ω. Ilsuffit donc de montrer qu’elle tend vers 0 lorsque z → 0 : elle sera alorsune fonction elliptique sans pôles et donc constante, et enfin identiquementnulle.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 175 / 320

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass L’équation différentielle de ℘.

Rappelons que si ω 6= 0, le développement de Taylor en 0 de z 7→1/(z − ω) est :

1z − ω

= − 1ω

∞∑k=0

zk

ωk .

En dérivant deux fois, on trouve :

2(z − ω)3 = − 1

ω

∞∑k=2

k(k − 1)zk−2

ωk .

Par conséquent :

℘′(z) = −2∑ω∈Ω

1(z − ω)3 = − 2

z3 +∞∑

k=2

( ∑ω 6=0

1ωk+1

)k(k − 1)zk−2,

l’inversion des sommes étant possible grâce à la convergence absolue (voirla fiche 132).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass L’équation différentielle de ℘.

Au total, donc,

℘′(z) = − 2z3 +

∞∑k=2

k(k − 1)Gk+1(Ω)zk−2.

En utilisant la notation g2 et g3 et en tenant compte que Gk = 0lorsque k est impair, on en tire que

℘′(z) = − 2z3 +

g210z +

g37 z3 + O(z5)

et donc que℘(z) =

1z2 +

g220z2 +

g328z4 + O(z6)

(rappelons que limz→0(℘(z)− 1

z)

= 0).Afin de conclure la démonstration, il suffit de substituer ces dévelop-

pements dans l’expression ℘′(z)2 − 4℘(z)3 + g2℘(z) + g3 et de constaterque le résultat est O(z2). Les détails sont omis.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass L’équation différentielle de ℘.

Corollaire. La fonction ℘ est également solution des équations différen-tielles

(∗) 2℘′′(z) = 12℘(z)2 − g2

et℘′′′(z) = 12℘(z)℘′(z).

On obtient la première équation en dérivant ℘′(z)2 = 4℘(z)3−g2℘(z)−g3 par rapport à z puis en divisant par ℘′(z). La deuxième en en dérivantla première.

L’intérêt de la deuxième équation est qu’elle est indépendante du réseauΩ.

Mais c’est l’équation (∗) qui servira pour mettre la formule d’additionde ℘ dans se forme habituelle.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Formules d’addition (suite)

Formules d’addition (suite)

Théorème (formule d’addition pour la fonction ℘).Pour tout z , w ∈ C tels que z 6= 0, w 6= 0 et z ± w 6= 0 on a

℘(z + w) + ℘(z) + ℘(w) =14

(℘′(z)− ℘′(w)

℘(z)− ℘(w)

)2.

Démonstration. D’après l’équation (∗) du corollaire de la fiche 178, ona ℘′′(z) − ℘′′(w) = 6(℘(z)2 − ℘(w)2). Le théorème découle donc de laformule

℘(z + w) =12(℘(z) + ℘(w)

)− 1

4℘′′(z)− ℘′′(w)

℘(z)− ℘(w)+

14

(℘′(z)− ℘′(w)

℘(z)− ℘(w)

)2.

de la fiche 173 après simplification.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Formules d’addition (suite)

Le théorème ne s’applique pas lorsque w = z . En écrivant ℘′(z) −℘′(w) = (z − w)℘′′(z) + O(z − w)2 et ℘(z) − ℘(w) = (z − w)℘′(z) +O(z − w)2 puis en faisant tendre w vers z , on trouve :

℘(2z) + 2℘(z) =14

(℘′′(z)

℘′(z)

)2,

puis, en utilisant les équations différentielles ℘′2 = 4℘3 − g2℘ − g3 et℘′′ = 6℘2 − g2

2 , on obtient le résultat suivant.

Corollaire (formule de duplication).Pour tout z ∈ C tel que z , 2z 6= 0, on a :

℘(2z) = −2℘(z) +14

(℘′′(z)

℘′(z)

)2=

(℘(z)2 + 14g2)

2 + 2g3℘(z)

4℘(z)3 − g2℘(z)− g3.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Formules d’addition (suite)

On remarque que la formule de duplication exprime ℘(2z) comme fonc-tion rationnelle de ℘(z). Avec la formule d’addition, elle permet de calculer℘(nz) quelque soit l’entier n 6= 0.

On pourrait déduire les formules d’addition et de duplication de ℘′ endérivant celles de ℘. Mais il y a une manière plus élégante de procéder, quenous allons décrire.

Soient u, v w ∈ C tels que u /∈ Ω, v /∈ Ω et u + v + w ∈ Ω. Siu ± v /∈ Ω, alors ℘(u) 6= ℘(v) et le système linéaire ℘′(u) = A℘(u) + B,℘′(v) = A℘(v) + B a donc une unique solution (A,B).

Considérons donc la fonction f (z) = ℘′(z)−A℘(z)−B. Elle a un pôled’ordre trois en tout point de Ω et est holomorphe ailleurs ; elle est doncd’ordre 3. En outre, elle s’annule en u et en v , puis dans un troisième pointw1. On déduit du (iv) du théorème de la fiche 123 que u + v + w1 ∈ Ω.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Formules d’addition (suite)

Par conséquent, w1 = w (mod Ω) et ℘′(w) = A℘(w) + B. On en tireque les éléments (℘(u), ℘′(u), 1), (℘(v), ℘′(v), 1) et (℘(w), ℘′(w), 1) de C3

sont C-linéairement liés.On a donc démontré la première affirmation du théorème suivant :

Théorème.Soient u, v , w ∈ C tels que u, v , w /∈ Ω et u + v + w ∈ Ω. Alors∣∣∣∣∣∣

℘(u) ℘′(u) 1℘(v) ℘′(v) 1℘(w) ℘′(w) 1

∣∣∣∣∣∣ = 0.

Réciproquement, si u, v , w ∈ C sont deux-à-deux distincts modulo Ωet si ce déterminant s’annule, alors u + v + w ∈ Ω.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Formules d’addition (suite)

Afin de démontrer la réciproque, on remarque d’abord que si le déter-minant s’annule, il existe (A,C ,B) ∈ C3, (A,C ,B) 6= (0, 0, 0) tel que

A℘(u) + C℘′(u) + B = A℘(v) + C℘′(v) + B = A℘(w) + C℘′(w) + B = 0.

Si C = 0, alors A℘(u) + B = A℘(v) + B = A℘(w) + B = 0, ce qui estimpossible car ℘ est d’ordre deux et u, v , w sont supposés deux-à-deuxdistincts (mod Ω). On peut donc supposer que C = −1.

Alors u, v et w sont les trois zéros de f (z) = ℘′(z) − A℘(z) − B, etdonc u + v + w ∈ Ω.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Formules d’addition (suite)

Le résultat ne fournit pas de renseignement lorsque v = u. Afin d’endéduire une formule analogue dans ce cas, on procède comme dans la dé-monstration de la formule pour ℘(2z). On obtient le résultat suivant.

Corollaire.Soient u, w ∈ C tels que u, w /∈ Ω et u + 2w ∈ Ω. Alors∣∣∣∣∣∣

℘′(u) ℘′′(u) 0℘(u) ℘′(u) 1℘(w) ℘′(w) 1

∣∣∣∣∣∣ = 0.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Formules d’addition (suite)

Exercice. Montrer que, pour tout z , w ∈ C tels que z , w , z ± w /∈ Ω,on a

℘(z + w)− ℘(z − w) = − ℘′(z)℘′(w)

(℘(z)− ℘(w))2 .

Exercice. Montrer que ζ(2z) = 2ζ(z) +12℘′′(z)

℘′(z)lorsque z , 2z /∈ Ω.

Exercice. Montrer que σ(2z)

σ(z)4 = −℘′(z) lorsque z /∈ Ω.

Exercice. Soit, (ω1, ω2) une base de Ω, soit ω3 = ω1 + ω2 et soitei = ℘(ωi/2), (i = 1, 2, 3). Montrer que si i ∈ 1, 2, 3, alors

(℘(z +

ωi2

)− ei

)(℘(z)− ei

)=

12e2i − g24 = (ei − ej)(ei − ek),

où g2 est comme dans l’équation différentielle de ℘ et j , k sont les deuxéléments de 1, 2, 3 différents de i .

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La courbe elliptique y2 = 4x3 − g2x − g3

La courbe elliptique y 2 = 4x 3 − g2x − g3

Rappelons que

℘′(z)2 = 4℘(z)3 − g2℘(z)− g3 = 4(℘(z)− e1)(℘(z)− e2)(℘(z)− e3),

où ei = ℘(ωi/2), i ∈ 1, 2, 3, (ω1, ω2) est une base de Ω et ω3 = ω1 +ω2.Les nombres complexes g2 et g3 sont définis par

g2 = 60G4(Ω), g3 = 140G6(Ω), Gk(Ω) =∑

ω∈Ω, ω 6=0

1ωk , k ≥ 3.

On note PΩ le polynôme PΩ(t) = 4t3 − g2t − g3.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La courbe elliptique y2 = 4x3 − g2x − g3

Lemme 1.Les nombres e1, e2, e3 sont tous distincts. Par conséquent, PΩ est à

racines simples.

Démonstration. Soient i , j ∈ 1, 2, 3. On sait (voir l’exercice de lafiche 136) que le diviseur de ℘(z) − ei est 2[xi ] − 2[0], xi étant la classede ei dans C/Ω. On en tire que ℘(z) − ei ne s’annule pas en ωj/2 lorsquej 6= i . Cela veut dire que ej 6= ei .

Lemme 2.Soient u, v ∈ C−Ω. Alors (℘(u), ℘′(u)) = (℘(v), ℘′(v)) si et seulement

si u − v ∈ Ω.Démonstration. Il est clair que si u − v ∈ Ω, alors (℘(u), ℘′(u)) =

(℘(v), ℘′(v)). Réciproquement, si ℘(u) = ℘(v), alors u ± v ∈ Ω d’aprèsl’exercice de la fiche 136. Mais si v ≡ −u (mod Ω), alors ℘′(v) = −℘′(u)et, si on suppose ℘′(u) = ℘′(v), on en tire que ℘′(u) = 0. Il s’ensuit que2u ∈ Ω et donc que u + v ≡ u − v (mod Ω).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La courbe elliptique y2 = 4x3 − g2x − g3

Soit k un corps commutatif et soit E un k-espace vectoriel. L’espaceprojectif associé à E est l’ensemble des droites vectorielles de E .

En particulier, lorsque E = kn+1 (n ≥ 1 un entier), on obtient l’espaceprojectif de dimension n sur k, que l’on note Pn

k .Lorsque n = 1, on retrouve la droite projective déjà utilisée.Une autre manière de décrire Pn

k est comme l’ensemble des classesd’équivalence de l’ensemble kn+1−0 pour la relation x ' y si et seulements’il existe λ ∈ k× tel que y = λx .

La droite vectorielle engendrée par x = (x0, x1, . . . , xn) ∈ kn+1 seranotée [x ] ou [x0, x1, . . . , xn].

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La courbe elliptique y2 = 4x3 − g2x − g3

Soit f ∈ k[X0,X1, . . .Xn] un polynôme homogène de degré d en n + 1indéterminées. Alors f (λx) = λd f (x) pour tout x = (x0, x1, . . . , xn) ∈ kn+1

et pour tout λ ∈ k×.On en peut donc pas parler de la valeur de f sur la droite engendré par

x . Par contre, f s’annule sur cette droite si et seulement s’il s’annule en x .Par conséquent, on peut parler du lieu d’annulation (ou des zéros) dans

Pnk d’un polynôme homogène en n + 1 indéterminées.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La courbe elliptique y2 = 4x3 − g2x − g3

On suppose désormais que k = C. Soit par exemple f un polynôme dela forme

f (X ,Y ,Z ) = Y 2Z − (4X 3 − g2XZ 2 − g3Z 3),

où le polynôme 4t3 − g2t − g3 est supposé sans racine multiple.Le lieu d’annulation de f dans le plan projectif complexe P2

C est l’en-semble des points complexes d’une courbe elliptique, que nous noterons Efou E .

Soit [x , y , z] ∈ P2C un point de E . Si z = 0, on voit que x = 0 et on

peut donc supposer que y = 1. Il y a donc un unique point de E avec z = 0,que l’on appelle le point à l’infini et note O ou OE .

Si [x , y , z] est un point de E avec z 6= 0, on peut supposer que z =1, puis identifier [x , y , 1] avec le point (x , y) ∈ C2 de la courbe affined’équation y2 = 4x3 − g2x − g3.

Par abus de langage, on désigne souvent la courbe elliptique E parl’équation affine y2 = 4x3 − g2x − g3.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La courbe elliptique y2 = 4x3 − g2x − g3

Soit donc Ω un réseau. On définit une application Θ : C → P2C par

Θ(w) = [℘(w), ℘′(w), 1], w /∈ Ω,

et par Θ(w) = O lorsque w ∈ Ω.Il est clair que Θ est périodique par rapport à Ω. Par passage au

quotient, on obtient donc une application C/Ω → P2C, qui sera également

désignée par Θ.

Théorème.L’application Θ : C/Ω → P2

C qui vient d’être décrite est un bijec-tion de C/Ω sur l’ensemble des points complexes de la courbe elliptique Ed’équation y2 = 4x3 − g2x − g3.

Démonstration. Le lemme 1 montre que y2 = 4x3 − g2x − g3 estbien une courbe elliptique. Le lemme 2 implique que Θ est injective, carΘ(w) 6= O lorsque w /∈ Ω.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La courbe elliptique y2 = 4x3 − g2x − g3

Montrons la surjectivité. Soit [x , y , z] un point de E . Si z = 0, alors[x , y , z] = O, le point à l’infini, qui est égal à Θ(0).

Si z 6= 0, on suppose z = 1, et il s’agit de montrer qu’il existe w ∈ Ctel que ℘(w) = x et ℘′(w) = y . Si x ∈ C, la fonction w 7→ ℘(w)− x a unpôle d’ordre deux en 0 ; elle a donc deux zéros, ce qui signifie qu’il existe wtel que ℘(w) = x . On a alors également ℘(−w) = x .

La relation y2 = 4x3 − g2x − g3 ainsi que l’équation différentielle℘′2 = 4℘3− g2℘− g3 impliquent que ℘′2(w) = ℘′2(−w) = y2 et on en tireque soit y = ℘′(w) soit y = ℘′(−w).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass La courbe elliptique y2 = 4x3 − g2x − g3

Le théorème permet d’identifier C/Ω avec l’ensemble E (C) des pointscomplexes de E .

En transportant la loi de groupe de C/Ω vers E (C) à l’aide de Θ, onmunit la courbe elliptique de la structure d’un groupe abélien.

Le théorème de la fiche 182 montre alors que cette loi de groupe surE (C) est la loi habituelle : la somme de trois points est nulle si et seulements’ils sont colinéaires. L’élément neutre est Θ(0), le point à l’infini.

En plus, on a gratuitement l’associativité de la loi sur E (C) ; elle sedéduit par transport de celle du groupe C/Ω.

Par abus de langage, on appelle parfois C/Ω une courbe elliptique.L’invariant j du polynôme PΩ(t) = 4t3 − g2t − g3 peut être égalementappelé indifféremment l’invariant j du réseau Ω, de E ou de C/Ω. On lenote alors j(Ω) ou j(E ).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

Le cas réelSoit encore Ω ⊆ C un réseau. Nous dirons que Ω est réel s’il est stable

par conjugaison complexe.Lorsque c’est le cas, Ω ∩ R est un réseau de R que nous noterons Ω0.

Lemme. Soit Ω ⊆ C un réseau réel. Alors Gk(Ω) (k ≥ 3), g2, g3, ℘′(t),℘(t), ζ(t), σ(t) (t ∈ R− Ω0) sont réels. Si ω ∈ Ω0, alors η(ω) ∈ R.

Démonstration. La somme Gk(Ω) =∑

ω 6=0 1/ωk se décompose ensomme de couples de nombres complexes conjugués ; elle est donc stablepar conjugaison complexe. On en tire que Gk(Ω) et donc g2, g3 sont réels.

Un argument semblable montre que ℘′(t) est réel lorsque t ∈ R −Ω0. La fonction t 7→ ℘(t) ayant donc une dérivée réelle et étant Ω0-périodique, elle diffère d’une constante d’une fonction réelle. La normali-sation limz→0 (℘(z)− 1/z2) = 0 entraîne que ℘(t) est alors réelle.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

Soit ω0 le générateur positif de Ω0. On voit que ζ(t) est réel lorsquet ∈]− ω0, 0[∪]0, ω0[ en remarquant que le développement de Laurent de ζen 0 est à coefficients réels, puis en appliquant le principe de continuationanalytique. (Les coefficients sont des multiples rationnels des Gk(Ω), quisont réels.)

En prenant t ∈] − ω0, 0[, on en tire que η(ω0) = ζ(t + ω0) − ζ(t)est réel, puis que η(ω) est réel quelque soit ω ∈ Ω0. Il s’ensuit que sit ∈]nω0, (n + 1)ω0[, n ∈ Z, alors ζ(t) = ζ(t − nω0) + nη(ω0) est réel.

La démonstration que σ(t) est réel lorsque t ∈ R est laissée en exercice.

Exercice. Montrer plus généralement que, si Ω ∈ C est un réseau réel,alors ℘′(z) = ℘′(z), ℘(z) = ℘(z), ζ(z) = ζ(z) et σ(z) = σ(z) quelque soitz ∈ C− Ω, et que η(ω) = η(ω) pour tout ω ∈ Ω.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

Par périodicité, il suffit de considérer la fonction t 7→ ℘(t) sur l’inter-valle ]0, ω0[.

Proposition. La fonction t 7→ ℘(t) tend vers +∞ lorsque t → 0+ etlorsque t → ω−0 . Elle est strictement décroissante sur ]0, ω0/2[ et strictementcroissante sur ]ω0/2, ω0[, avec un unique minimum en t = ω0/2. On a℘′(t) < 0 lorsque t ∈]0, ω0/2[ et ℘′(t) > 0 lorsque t ∈]ω0/2, ω0[.

Démonstration. Les développements

℘(z) =1z2 + O(1), ℘′(z) = − 2

z3 + O(1),

au voisinage de 0 impliquent que ℘(t) → +∞ lorsque t → 0 et que ℘′(t) <0 sur un intervalle ]0, α[ avec α convenable.

On a ℘′(z) = 0 si et seulement si 2z ∈ Ω mais z /∈ Ω. On en tireaussitôt que l’unique point d’annulation de ℘′(t) sur ]0, ω0[ est t = ω0/2.Puisque ω′ est continue, on en tire que ℘′(t) < 0 pour tout t ∈]0, ω0/2[ etdonc que ℘ est strictement décroissante sur cet intervalle.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

On sait que ℘(z) = ℘(ω− z) pour tout z ∈ C, ω ∈ Ω, ce qui impliqueque la courbe de ℘(t) est symétrique par rapport à t = ω0/2. Les autresaffirmations de la proposition en découlent aussitôt.

Corollaire. Soit a ∈ [ω0/2, ω0[. Alors∫ +∞

℘(a)

dt√4t3 − g2t − g3

= ω0 − a.

Par conséquent, si on pose e0 = ℘(ω0/2), alors

ω0 = 2∫ +∞

e0

dt√4t3 − g2t − g3

Démonstration. Il suffit d’effectuer la substitution t = ℘(u), ce quiest justifié par la proposition, puis d’itiliser l’équation différentielle ℘′2 =4℘3 − g2℘− g3. La dernière affirmation découle du cas a = ω0/2.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

Corollaire. Soient a < b deux éléments de [ω0/2, ω0[. Alors∫ ℘(b)

℘(a)

t dt√4t3 − g2t − g3

= ζ(a)− ζ(b).

En particulier, ∫ ℘(b)

e0

t dt√4t3 − g2t − g3

= 12η(ω0)− ζ(b).

La démonstration est la même que celle du corollaire précédent, en rappelantque ζ ′(z) = −℘(z). La deuxième affirmation est le cas a = ω0/2 de lapremière, en rappelant que η(ω) = 2ζ(ω/2) pour tout ω ∈ Ω tel queω/2 /∈ Ω.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

On peut effectuer une étude semblable sur l’axe imaginaire, dont lesdétails étant laissés en exercice. On pose Ω′0 = Ω∩ iR et on note ω′0 le réelpositif tel que iω′0 engendre Ω′0.

Alors ℘′(is) ∈ iR, ℘(is) ∈ R, ζ(is) ∈ iR, η(ω′0) ∈ iR et σ(is) ∈ iRpour tout s ∈ R− iΩ′0.

Grâce à la périodicité, on se limitera à s ∈]0, ω′2[.

Proposition. La fonction s 7→ ℘(is) tend vers −∞ lorsque s → 0+

et lorsque s → ω′0−. Elle est strictement croissante sur ]0, ω′2[ et stricte-

ment décroissante sur ]ω′0/2, ω′0[, avec un unique maximum en ω′0/2. On ai℘′(is) > 0 sur ]0, ω′2[ et i℘′(is) < 0 sur ]ω′0/2, ω′0[.

On pose e′0 = ℘(iω′0/2).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

Pour tout a ∈]0, ω′0/2], on a, en effectuant la substition s = ℘(iv),∫ ℘(ia)

−∞

ds√−(4s3 − g2s − g3)

= a.

Par conséquent,

ω′0 = 2∫ e′0

−∞

ds√−(4s3 − g2s − g3)

.

De même, si b ∈]0, ω′0/2] et si a < b, alors∫ ℘(ib)

℘(ia)

s ds√−(4s3 − g2s − g3)

= i(ζ(ia)− ζ(ib)), et∫ e′0

℘(ia)

s ds√−(4s3 − g2s − g3)

= i(ζ(ia)− 12η(iω

′0)).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

La seule différence avec l’étude sur l’axe réel est le changement devariable s = ℘(iv). D’après la proposition, on a

√−(4s3 − g2s − g3) =

i℘′(iv). Puisque s ′(v) = i℘′(iv), on trouve bien, par exemple∫ ℘(ia)

−∞

ds√−(4s3 − g2s − g3)

=

∫ a

0

i℘′(iv)

i℘′(iv)dv = a.

Lemme.On a e′0 ≤ e0.

Démonstration. Rappelons que e0 = ℘(ω0/2) et que e′0 = ℘(ω′0/2).Si on avait e′0 > e0, les deux propositions qui précèdent montreraient qu’ilexisterait (au moins) quatre complexes z vérifiant ℘(z) = (e0 + e′0)/2 :deux réels dont un appartenait à l’intervalle ]0, ω0/2[ et l’autre à l’intervalle]ω0/2, ω0[, et deux imaginaires purs de la forme iy , avec y ∈]0, ω′0/2[ pourl’un et y ∈]ω′0/2, ω′0[ pour l’autre.

Mais ℘ est une fonction elliptique d’ordre deux, d’où une contradiction.John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 201 / 320

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

Le résultat suivant permet notamment de savoir si le polynôme 4t3 −g2t − g3 est à racines réelles ou non.

Théorème.On suppose encore que le réseau Ω ⊆ C soit stable par conjugaison

complexe et on reprend les autres notations qui viennent d’être introduites.On note Ω′ le réseau Ω0 + Ω′0 de C, dont une base est (ω0, iω′0).

(a) On a Ω′ ⊆ Ω et l’indice de Ω′ dans Ω est au plus deux.(b) Les conditions suivantes sont équivalentes.

(i) Ω′ = Ω

(ii) (ω0, iω′0) est une base de Ω.(iii) On a e′0 < e0.(iv) Le polynôme PΩ(t) = 4t3 − g2t − g3 a trois racines réelles,

dont e′0 et e0. La troisième racine appartient à l’intervalle ]e′0, e0[.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

(c) Les conditions suivantes sont équivalentes.(i) On a [Ω : Ω′] = 2.(ii) (ω0,

12(ω0 + iω′0)) est une base de Ω.

(iii) On a e′0 = e0.(iv) Le polynôme PΩ a une racine réelle e0 et une paire de racines

conjuguées complexes.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

Démonstration. (a) Il est clair que Ω′ ⊆ Ω, et l’égalité

2ω = (ω + ω) + (ω − ω), ω ∈ Ω,

montre que 2Ω ⊆ Ω. Puisque [Ω : 2Ω] = 4, il suffit de montrer que Ω′ 6= 2Ω.Or, si on avait Ω′ = 2Ω, alors ω0 appartiendrait à 2Ω, et donc ω0/2 ∈ Ω,ce que contredit la définition de ω0.

Puisque les conditions (iv) de (b) et de (c) s’excluent mutuellement,il suffit de montrer que (i)⇒(ii)⇒(iii)⇒(iv) dans chacun des deux cas (b)et (c).

(b) Il est clair que (i)⇒(ii). Ensuite, (ii) entraîne que les classes de ω0/2et iω′0/2 modulo Ω sont différentes : on en tire que ℘(ω0/2) 6= ℘(iω′0/2) etl’inégalité e′0 < e0 découle donc du lemme de la fiche 201, d’où le (iii). Ondéduit ce qui précède que PΩ a au moins deux racines réelles ; sa troisièmeracine est donc également réelle. En outre, les propositions des fiches 196 et199 montrent respectivent que PΩ(t) > 0 lorsque t > e0 et que PΩ(t) < 0lorsque t < e′0, d’où le (iv).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

(c) Il y a trois réseaux contenant Ω′ comme sous-groupe d’indice deux,soit Ω1 = Zω0

2 + Ziω′0, Ω2 = Zω0 + Zω0+iω′02 et Ω3 = Zω0 + Zi ω′0

2 . Lapossibilité Ω = Ω1 est exclut par la démonstration de (a), et un argumentsemblable exclut la possibilité Ω = Ω3. D’où le (ii). On en tire que lesclasses de ω0/2 et de iω′0/2 suivant Ω sont les mêmes, ce qui entraîne quee′0 = e0. Comme dans le cas (b), on voit que PΩ(t) > 0 lorsque t > e0et PΩ(t) < 0 lorsque t < e0. Par conséquent, PΩ n’a qu’une seule racineréelle.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Le cas réel

Corollaire. Soient g2, g3 deux réels tels que le polynôme P(t) = 4t3 −g2t − g3 soit à racines simples. On note respectivement e0 et e′0 la grandeet la plus petite des racines réelles (de sorte que e′0 = e0 si P n’a qu’uneseule racine réelle). On pose

ω0 = 2∫ +∞

e0

dt√4t3 − g2t − g3

, ω′0 = 2∫ e′0

−∞

ds√−(4s3 − g2s − g3)

.

Soit Ω le réseau de base (ω0, iω′0) lorsque P a trois racines réelles et de base(ω0,

ω0+iω′02 ) lorsque P n’a qu’une seule racine réelle.

Alors Ω est l’unique réseau tel que g2 = g2(Ω) et g3 = g3(Ω).

Remarque. On peut montrer que si g2, g3 sont deux complexes telsque le polynôme 4t3 − g2t − g3 soit à racines simples, alors il existe ununique réseau Ω tel que g2 = g2(Ω), g3 = g3(Ω). On raisonne d’unemanière semblable que dans le cas réelle après une étude de la racine carréecomplexe de 4t3 − g2t − g3.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Rappelons les deux intégrales elliptiques

T (a, b) =

∫ +∞

−∞

dt√P(t)

, S(a, b) = b2∫ +∞

−∞

t2 + a2

t2 + b2dt√P(t)

,

où P(t) = (t2 + a2)(t2 + b2).Nous allons les transformer en intégrales faisant intervenir des racines

carrées de polynômes de la forme 4t3 − g2t − g3.On suppose 0 < b < a.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Les racines ±ia, ±ib de P sont alignées sur l’axe imaginaire. La trans-formation t = −iz les ramènent sur l’axe réel.

Lemme. On a

T (a, b) = 2∫ a

b

du√−(u2 − a2)(u2 − b2)

.

Démonstration. Le changement de variable t = −iz transforme le che-min d’intégration en l’axe imaginaire de −i∞ à +i∞.

La fonction z 7→ z − a possède une racine carrée holomorphe√

z − asur C dépourvu de la partie de l’axe réel situé à droite de z = a. On alimy→0+ (

√x + iy − a) = − limy→0− (

√x + iy − a) lorsque x > a.

De même, la fonction z 7→ z−b possède une racine carrée holomorphe√z − b sur C dépourvu de la partie de l’axe réel situé à droite de z = b et

limy→0+ (√

x + iy − b) = − limy→0− (√

x + iy − b) lorsque x > b.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Par conséquent, la fonction z 7→ (z − a)(z − b) possède une racinecarrée holomorphe

√(z − a)(z − b) sur C dépourvu de l’intervalle [b, a] de

l’axe réel, car

limy→0+

√(x + iy − a)(x + iy − b) = + lim

y→0−

√(x + iy − a)(x + iy − b).

De même façon, la fonction z 7→ (z + a)(z + b) a une racine carrée√(z + a)(z + b) holomorphe sur C dépourvu de l’intervalle [−a,−b].

Par conséquent, z 7→ (z2 − a2)(z2 − b2) possède une racine carréeholomomorphe sur C dépourvu de la réunion des deux intervalles [b, a] et[−a,−b].

En outre, la fonction z 7→ (z2 − a2)(z2 − b2) est réelle et positive surl’axe imaginaire

On note√

(z2 − a2)(z2 − b2) la racine carrée qui est réelle et positivesur l’axe imaginaire.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Avec ces conventions, on a

T (a, b) = −i∫ +i∞

−i∞

dz√(z2 − a2)(z2 − b2)

.

Soit donc R > a et soit γR le lacet formé du demi-cercle de DR centre0 et passant de −iR à iR dans le demi-plan <(z) > 0 suivi de la partiede l’axe imaginaire descendant de iR à −iR.

Puisque 1/√

(z2 − a2)(z2 − b2) = O(1/z2) lorsque |z | → +∞, l’inté-grale de 1/

√(z2 − a2)(z2 − b2) sur DR tend vers 0 lorsque R → +∞. Par

conséquent∫ +i∞

−i∞

dz√(z2 − a2)(z2 − b2)

= −∫

γR

dz√(z2 − a2)(z2 − b2)

.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Le lacet γR peut être déformée en une ellipse contournant l’intervalle[b, a] puis l’approchant depuis le haut et le bas. Si u ∈ [b, a] et si f (z) =√

(z2 − a2)(z2 − b2), alors

limy→0+

f (u + iy) = i√−(u2 − a2)(u2 − b2) = − lim

y→0+f (u − iy).

(C’est sûrement vrai au signe près et le signe est déterminé par le fait queT (a, b) est positif.)

Cela achève la démonstration du lemme.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Proposition 1. Soient 0 < b < a deux réels.On pose g2 = 3(a4 +14a2b2 +b6), g3 = −(a6−33b2a4−33b4a2 +b6),

e0 = (a2 + 6ab + b2)/2, e = (a2 − 6ab + b2)/2 et e′0 = −(a2 + b2), desorte que

4t3 − g2t − g3 = 4(t − e0)(t − e)(t − e′0), e′0 < e < e0.

AlorsT (a, b) = 2

√6

∫ +∞

e0

dt√4t3 − g2t − g3

,

Démonstration. Elle est élémentaire à partir du lemme. Les change-ments de variable successifs u = v + b, v = 1/w , w = x − a2−5b2

6b(a2−b2)et

x = t3(a2−b2)b permettent de conclure.

Exercice. Expliquer le choix de ces changements de variable.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

On aimerait traiter S(a, b) de la même manière, mais la fonction u 7→u2−a2

(u2−b2)(√−(u2−a2)(u2−b2))

est équivalente à une constante fois u 7→ 1/(u −

b)3/2 lorsque u → b+, ce qui conduit à une intégrale divergente en b.À la place du lemme, il faut donc écrire :

S(a, b) = 2b2∫ a

b+r

u2 − a2

u2 − b2du√

−(u2 − a2)(u2 − b2)+ ib2

∫γb,r

F (z) dz

où 0 < r < a − b et γb,r est le cercle de centre b et de rayon r pris avecl’orientation habituelle, et

F (z) =z2 − a2

z2 − b21√

(z2 − a2)(z2 − b2).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Les mêmes changements de variable u = v + b, . . ., montrent que

2b2∫ a

b+r

u2 − a2

u2 − b2du√

−(u2 − a2)(u2 − b2)=

=− 2√6

∫ R

e0

(t − e0)(t − e)

t − e′0dt√

4t3 − g2t − g3,

où R > e0 et R → +∞ lorsque r → 0.L’intégrale

∫γb,r

F (z)dz se traite en utilisant les changements de va-riable analogues mais dans le plan complexe. Le changement de variablez = z1 + b transforme γb,r et γ0,r . Ensuite, le changement z1 = 1/z2transforme γ0,r en le cercle γ0,1/r pris dans le sens inverse. Enfin les change-ments z2 = z3 − a2−5b2

6b(a2−b2)et z3 = w

3(a2−b2)b tranforment les cercles centrésà l’origine en les cercles centrés en (a2 − 5b2)/2.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Avec un peu de soin, on trouve donc

ib2∫

γb,r

F (z) dz =i√6

∫γc,R−c

(w − e0)(w − e)

w − e′0dw√

4w3 − g2w − g3,

où√

4w3 − g2w − g3 est la racine carrée de 4w3 − g2w − g3 holomorphesur C dépourvu de [e′0, e]∪ [e0,+∞[ et dont la limite est positive lorsque wapproche un point de l’intervalle ]e0,+∞[ par le haut.

Enfin, c = (a2 − 5b2)/2.Notons R − c par R, afin de simplifier la notation.Sur le cercle γc,R , on a

(w − e0)(w − e)

w − e′01√

4w3 − g2w − g3=

12√

w − c+ Ψ(w),

où la fonction Ψ est O(R−3/2) lorsque R → +∞.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

On a donc

i√6

∫γc,R

(w − e0)(w − e)

w − e′0dw√

4w3 − g2w − g3=

=i

2√

6

∫γc,R

dw√w − c

+ O(R−1/2)

lorsque R → +∞. Puisque∫γc,R

dw√w − c

=√

R∫ 2π

0e−

iθ2 dθ =

4√

Ri ,

nous avons démontré la proposition suivante.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Proposition 2. Avec les notations de la proposition précédente, on a

S(a, b) = limR→+∞

(− 2√

6

∫ R

e0

(t − e0)(t − e)

t − e′0dt√

4t3 − g2t − g3+

2√

R√6

).

Théorème. Soit a > b > 0 deux réels. On reprend les notations utiliséesdans les deux propositions précédentes et on note Ω le réseau de base(ω0, iω′0), où

ω0 = 2∫ +∞

e0

dt√4t3 − g2t − g3

, ω′0 = 2∫ e′0

−∞

ds√−(4s3 − g2s − g3)

.

On note η la fonction de Weierstrass associé à (voir la fiche 142). Alors

T (a, b) =√

6ω0, S(a, b) =1√6(2η(ω0) + (e0 + e)ω0

).

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 217 / 320

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Démonstration. L’équation T (a, b) =√

6ω0 découle de la proposition1. Considérons donc S(a, b). On pose t = ℘(u) dans la limite de la proposi-tion 2 et on applique la proposition de la fiche 196 ainsi que ses corollaires.

Alors e0 = ℘(ω0

2).

On définit ρ ∈]ω02 , ω0[ par ℘(ρ) = R, de sorte que ρ → ω−0 lorsque

R → +∞.Il s’ensuit que∫ R

e0

(t − e0)(t − e)

t − e′0dt√

4t3 − g2t − g3=

∫ ρ

ω02

(℘(u)− e0)(℘(u)− e)

℘(u)− e′0du.

L’intégrale à droite se traite en écrivant

(℘(u)− e0)(℘(u)− e)

℘(u)− e′0= ℘(u) + (e′0 − e0 − e) +

(e′0 − e0)(e′0 − e)

℘(u)− e′0.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

D’après le dernier exercice de la fiche 185, on a

(℘(u)− e′0)(℘(u +iω′2 ) =

12e′02 − g24 = (e′0 − e0)(e′0 − e).

Par conséquent,∫ ρ

ω02

(℘(u)− e0)(℘(u)− e)

℘(u)− e′0du =

=

∫ ρ

ω02

℘(u) du + (e′0 − e0 − e)

∫ ρ

ω02

du +

∫ ρ

ω02

(℘(u +

iω′02

)− e′0

)du

=

∫ ρ

ω02

(℘(u) + ℘

(u +

iω′02

))du − (e0 + e)

∫ ρ

ω02

du

=[− ζ(u)− ζ

(u +

iω′02

)]ρ

ω0/2− (e0 + e)

(ρ− ω0

2).

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Il s’ensuit que

− 2√6

∫ R

e0

(t − e0)(t − e)

t − e′0dt√

4t3 − g2t − g3+

2√

R√6

=

= − 2√6

∫ ρ

ω02

(℘(u)− e0)(℘(u)− e)

℘(u)− e′0du +

2√℘(ρ)√6

=2√6

(ζ(ρ) +

√℘(ρ) + ζ

(ρ+

iω′02

)− ζ

(ω02

)− ζ

(ω0 + iω′02

)+

+ (e0 + e)(ρ− ω0

2)).

Pour conclure, il reste à faire tendre ρ vers ω−0 .

On a ζ(ρ) +√℘(ρ) = ζ(ρ−ω0) + η(ω) +

√℘(ρ− ω0) et, en utilisant

les formules ζ(z) = 1z +O(z3), ℘(z) = 1

z2 +O(z2) lorsque z → 0, on trouveque limρ→ω−0

(ζ(ρ− ω0) +√℘(ρ− ω0)) = 0.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Expressions pour T (a, b) et S(a, b)

Par conséquent,

limρ→ω−0

2√6

(ζ(ρ) +

√℘(ρ) + ζ

(ρ+

iω′02

)− ζ

(ω02

)− ζ

(ω0 + iω′02

)+

+ (e0 + e)(ρ− ω0

2))

=

=2√6

(η(ω0) + ζ

(ω0 +

iω′02

)− ζ

(ω02

)− ζ

(ω0 + iω′02

)+ (e0 + e)

ω02

),

et on conclut en utilisant les relations η(ω + ω′) = η(ω) + η(ω′) lorsque ω,ω′ ∈ Ω et ζ

(ω2)

= 12η(ω) lorsque ω ∈ Ω, ω /∈ 2Ω.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Démonstration de la formule de Brent-Salamin

Démonstration de la formule de Brent-Salamin

Elle est facile à partir des formules pour T (a, b) et S(a, b) que nousvenons d’obtenir.

On choisit a = 1+ 12√

2, b = 1− 12√

2. Il s’agira alors d’une applicationde la formule de Legendre (voir la fiche 144).

D’après l’exercice de la fiche 19, il suffit de montrer que

T (a, b)(2S(a, b)− T (a, b)

)= 4π.

On a e0 = 3, e = 0 et e′0 = −3. Par conséquent,

ω0 = 2∫ +∞

3

dt√4t3 − 36t

, ω′0 = 2∫ −3

−∞

ds√36s − 4s3

et le changement de variable s = −t montre que ω′ = ω.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Démonstration de la formule de Brent-Salamin

Notons Ω le réseau de base (ω0, iω0) = ω0(1, i) a la particularité d’êtrestable par multiplication par i .

Lemme. On a η(iω0) = −iη(ω0). Par conséquent, ω0η(ω0) = π.Démonstration. Puisque Ω est stable par multiplication par i , on a

℘′(iz) = −2∑ω∈Ω

(iz − ω)−3 = −2∑ω∈Ω

(iz − iω)−3) =

= i∑ω∈Ω

(z − ω)−3 = i℘′(z).

En dérivant, on voit alors que ℘(iz) = −℘(z) puis que ζ(iz) = −iζ(z) puisque η(iω) = −iη(ω) quelque soit ω ∈ Ω.

La relation ω0η(ω0) = π découle alors de la formule de Legendreη(ω2)ω1 − η(ω1)ω2 = 2πi (voir la fiche 144), appliquée avec ω1 = ω0,ω2 = iω0.

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Les fonctions elliptiques de Weierstrass Démonstration de la formule de Brent-Salamin

Appliquons donc le théorème de la fiche 217. On a T (a, b) =√

6ω0 etS(a, b) = 1√

6

(2η(ω0) + 3ω0

).

La relation T (a, b)(2S(a, b)−T (a, b)

)= 4π est alors une conséquence

immédiate de la relation ω0η(ω0) = π évoquée par le lemme.

Remarques. 1.) Nous avons présenté la formule de Brent-Salamin com-me une application de la formule de Legendre pour les fonctions elliptiquesde Weierstrass. On peut également établir une formule de Legendre pourles intégrales elliptiques et ainsi donner une démonstration plus directe dela formule de Brent-Salamin. Par ailleurs, cela permet d’en obtenir desgénéralisations. C’est la présentation que l’on trouve le plus souvent dans lalittérature.

2.) Le réseau Ω = ω0(1, i) utilisé dans la démonstration a la propriétéremarquable d’être stable par multiplication par i . C’est un cas particulierd’une propriété remarquable, la multiplication complexe. Le chapitre quisuit indique, pour la plupart sans démonstration, certaines de des propriétésremarquables des réseaux et courbes elliptiques à multiplication complexe.

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Multiplication complexe et cryptographie

Multiplication complexe et cryptographie

Dans ce chapitre, nous allons décrire certains propriétés des réseaux etcourbes elliptiques à multiplication complexe et leurs liens avec la crypto-graphie. Les démonstrations sont pour la plupart omises.

Soient Ω, Ω′ deux réseaux. On note respectivement E et E ′ les groupesde quotient C/Ω et C/Ω′, que l’on confond parfois avec les courbes ellip-tiques associées. On appelle homomorphisme de E vers E ′ toute applicationC-linéaire φ de C vers lui-même qui vérifie φ(Ω) ⊆ Ω′.

Une application C-linéaire φ : C → C est de la forme φ(z) = λz pourun unique λ ∈ C. La condition φ(Ω) ⊆ Ω′ signifie que λω ∈ Ω′ quelque soitω ∈ Ω. Le nombre complexe λ est uniquement déterminé par φ.

On en tire aussitôt que homomorphismes de E vers E ′ forment ungroupe, isomorphe à un sous-groupe du groupe additif C, que l’on noteHom(E ,E ′).

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Multiplication complexe et cryptographie

L’élément φ ∈ Hom(E ,E ′) est appelé une isogénie lorsque λ 6= 0, cequi équivaut à φ 6= 0.

Un endomorphisme de E est un élément de Hom(E ,E ). En utilisant lacomposition d’applications comme multiplication, on voit que Hom(E ,E )est muni de la structure d’un anneau unitaire, l’unité étant l’applicationidentique. On note cet anneau End(E ).

Tout entier relatif n induit un élément [n]E de End(E ), multiplicationpar n. On confond souvent [n]E l’entier n s’il n’y a pas de risque de confusion.

Par conséquent, End(E ) est un anneau unitaire. En outre, il est iso-morphe à un sous-anneau de C, donc commutatif et intègre.

Si l’on considère E et E ′ comme des courbes elliptiques, un élément deHom(E ,E ′) est un homomorphisme de groupes E → E ′ qui est donné pardes fonctions rationnelles en les coordonnées. Réciproquement, tout homo-morphisme de groupes de cette forme provient d’un élément de Hom(E ,E ′).

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Multiplication complexe et cryptographie

On dit que E (ou le réseau Ω) est à multiplication(s) complexe(s) siEnd(E ) contient des éléments qui ne sont pas de la forme [n]E , n ∈ Z.

Exemple. Soit Ω le réseau de base (1, i). Si ω ∈ Ω, alors iω ∈ Ω. Parconséquent, Ω est à multiplication complexe et End(E ) contient un anneauisomorphe à l’anneau de Gauss Z[i ].

Nous verrons un peu plus loin qu’en fait End(E ) est isomorphe à l’an-neau de Gauss.

Un autre exemple est le réseau de base (1, ρ), où ρ = e2πi/3 = (−1 +i√

3)/2. En effet, ce réseau est stable par multiplication par ρ.

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Multiplication complexe et cryptographie Corps de nombres et entiers algébriques

Corps de nombres et entiers algébriques

Rappelons qu’un nombre complexe α est dit un nombre algébrique s’ilexiste un polynôme f (X ) ∈ Q[X ] tel que f (α) = 0. Quitte à diviser f parson coefficient directeur, on peut supposer f unitaire. On dit que α estun entier algébrique si α est racine d’un polynôme unitaire à coefficientsentiers.

Par exemple, tout entier relatif est un entier algébrique. Le nombrecomplexe i est un entier algébrique, car racine de X 2 + 1.

On peut montrer que certains nombres, par exemple e et π, ne sontpas algébriques. Un nombre complexe qui n’est pas algébrique est dit trans-cendant.

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Multiplication complexe et cryptographie Corps de nombres et entiers algébriques

Un corps de nombres est un corps K qui est un Q-espace vectoriel dedimension finie. Par exemple, Q est un corps de nombres.

Un autre exemple est Q(i), l’ensemble des nombres complexes de laforme a + bi , avec a, b ∈ Q.

Si f (X ) ∈ Q[X ] est un polynôme irréductible, alors l’idéal I de Q[X ]engendré par f (X ) est maximal et, par conséquent, l’anneau quotient K =Q[X ]/I est un corps, qui est un Q-espace vectoriel de dimension égale audegré de f . Par conséquent, K est un corps de nombres.

Si α ∈ C est une racine de f , alors l’homomorphisme d’anneauxQ[X ] → C défini par l’évaluation d’un polynôme P et α est un homomor-phisme d’anneaux, de noyau I. Par conséquent, son image est un sous-corpsde C qui est isomorphe à K . On note l’image Q(α).

Exercice. Montrer que tout élément de Q(α) s’écrit de manière uniquesous la forme P(α), où P(X ) ∈ Q[X ] est de degré au plus deg(f )− 1.

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Multiplication complexe et cryptographie Corps de nombres et entiers algébriques

Soit encore K un corps de nombres.La dimension de K en tant que K -espace vectoriel est appelé le degré

de K . Il est noté [K : Q].Un élément de K est dit un entier de K (ou entier) s’il est racine d’un

polynôme unitaire à coefficients entiers. Lorsque K ⊆ C, un élément de Kest entier si et seulement s’il est un entier algébrique.

Le résultat suivant résume quelques propriétés de base des entiers d’uncorps de nombres.

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Multiplication complexe et cryptographie Corps de nombres et entiers algébriques

Théorème. Soit K un corps de nombres de degré d .(i) Les entiers de K constituent un sous-anneau de K , de corps de

fractions K .On note OK l’anneau des entiers de K .(ii) Le groupe additif de OK est isomorphe au groupe additif Zd .(iii) Tout idéal premier non-nul de OK est maximal.(iv) Si P est un idéal maximal de OK , alors l’anneau quotient OK/P

est un corps fini.

On appelle ordre dans K tout sous-anneau unitaire de OK dont le corpsde fractions est égal à K . Par exemple, OK est toujours un ordre, appeléparfois l’ordre maximal, car par définition il contient tous les autres.

Dans l’anneau de Gauss Z[i ] (qui est l’anneau des entiers de Q(i)),l’ensemble a + 2bi | (a, b) ∈ Z2 est un ordre de Q[i ].

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Multiplication complexe et cryptographie Corps de nombres et entiers algébriques

Théorème.Soit K un corps de nombres de degré d et soit O un ordre de K .(i) Le groupe additif de O est isomorphe à Zd .(ii) Le groupe OK/O est d’ordre fini.(iii) Tout idéal premier non-nul est maximal.(iv) Si P est un idéal maximal de OK , alors l’anneau quotient O/P est

un corps fini.

Exemple. Soit α ∈ OK tel que K = Q(α). Alors Z[α], le sous-anneau deK engendré par α, est un ordre. Un ordre de cette forme est dite monogène.

En général, il existe des ordres dans K qui en sont pas monogènes : ilexiste même des corps de nombres dont l’ordre maximal n’est pas monogène.

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Multiplication complexe et cryptographie Corps de nombres et entiers algébriques

Un corps quadratique est un corps de nombres de degré deux. Si K estun corps quadratique et si α ∈ K −Q, alors α est racine d’un polynôme fà coefficients rationnels et irréductible de degré deux. On dit que K est réelou imaginaire selon que les racines de f sont réelles ou non.

Théorème.Soit Ω ⊆ C un réseau et soit E = C/Ω la courbe elliptique associée. Si

E est à multiplication complexe, alors End(E ) est un ordre dans un corpsquadratique imaginaire.

Démonstration. Elle repose sur le lemme suivant.

Lemme. Soit φ ∈ End(E ), φ /∈ Z. Alors φ est un entier algébrique dansun corps quadratique imaginaire.

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Multiplication complexe et cryptographie Corps de nombres et entiers algébriques

Admettons momentanément le lemme et concluons la démonstrationdu théorème. Puisque E est à multiplication complexe, End(E ) contientun élément φ /∈ Z. D’après le lemme, le corps K = Q(φ) est un corpsquadratique imaginaire. Soit ψ ∈ End(E ). Si ψ /∈ Q, alors K ′ = Q(ψ) estencore un corps quadratique imaginaire.

En fait, K ′ = K , car dans le cas contraire, un argument standardde théorie de corps montrerait que φ + ψ serait de degré 4 sur Q. DoncEnd(E ) ⊆ K et, puisque φ est un entier algébrique, End(E ) est contenudans l’anneau des entiers de K .

Enfin, le corps de fractions de End(E ) est K . Par conséquent, End(E )est un ordre de K . D’où le théorème.

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Multiplication complexe et cryptographie Corps de nombres et entiers algébriques

Revenons à la démonstration du lemme. On sait qu’il existe λ ∈ C telque φ(z) = λz . Par hypothèse, λ /∈ Z.

Soit (ω1, ω2) une base de Ω. Par hypothèse, λω1 ∈ Ω et λω2 ∈ Ω.Il existe donc une matrice A =

( a bc d

)à coefficients entiers telle que

λω1 = aω1 + bω2,

λω2 = cω2 + dω2.

Soit χ(X ) = X 2 − (a + d)X + ad − bc le polynôme caractéristique deA. Alors χ(λ) = 0 ce qui implique que λ est un entier algébrique. Puisqueλ /∈ Z et χ est de degré deux, χ(X ) est irréductible. Donc Q(λ) est uncorps quadratique.

Si λ était réelle, alors λ serait irrationnel et donc

(λ− a)ω1 = bω2

serait une relation de R-dépendance linéaire entre ω1 et ω2, en contradictionavec l’hypothèse que (ω1, ω2) soit une base d’un réseau.

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Multiplication complexe et cryptographie Courbes elliptiques à nombre de points donné

Courbes elliptiques à nombre de points donnéLes courbes elliptiques sur un corps fini ont de nombreuses applications

en cryptographie, comme expliqué dans le cours de Denis Simon.Les deux résultats suivants résument une partie des propriétés impor-

tantes des courbes elliptiques sur un corps fini.

Théorème (Hasse). Soit k un corps fini à q éléments et soit E unecourbe elliptique sur k. Si N désigne l’ordre du groupe des points de Erationnels sur k, alors

|q + 1− N| ≤ 2√

q.

Théorème (Deuring). Soit k un corps fini à q éléments et soit N unentier premier à q et vérifiant |q + 1−N| ≤ 2

√q. Alors il existe une courbe

elliptique sur k dont le groupe des points rationnels sur k est d’ordre n.

(En fait, le résultat complet de Deuring traite également le cas où Nn’est pas premier à q.)

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Multiplication complexe et cryptographie Courbes elliptiques à nombre de points donné

Il existe des algorithmes de comptage des points d’une courbe elliptique(algorithme de Schoof, SEA, . . .).

Ici, nous serons plutôt intéressé par le problème posé par le théorème deDeuring : étant donné un entier N premier à q et vérifiant |q+1−N| ≤ 2

√q,

construire explicitement une courbe elliptique sur k dont l’ordre du groupedes points est N.

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Multiplication complexe et cryptographie Courbes elliptiques à nombre de points donné

Afin de simplifier la discussion, nous allons supposer que la caractéris-tique de k est différente de 2, de sorte que toute courbe elliptique sur kpossède un modèle de la forme

y2 = x3 + ax2 + bx + c,

où a, b et c ∈ k et le polynôme x3 + ax2 + bx + c est à racines simples.Si E est une courbe elliptique sur k, on note j = j(E ) son invariant j ,

c’est-à-dire l’invariant j du polynôme x3 + ax2 + bx + c.

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Multiplication complexe et cryptographie Courbes elliptiques à nombre de points donné

Soit donc N un entier premier à q et vérifiant |q + 1 − N| ≤ 2√

q.Supposons pour un instant qu’on connaît une courbe elliptique E sur kdont le groupe des points est d’ordre N.

La démonstration du théorème de Hasse fait intervenir un polynôme dela forme P(X ) = X 2−aq(E )X+q, où l’entier aq = aq(E ) vérifie |aq| ≤ 2

√q.

L’entier N est alors la valeur de P en 1 et l’on a aq = q + 1− N.L’hypothèse que N soit premier à q implique qu’en fait |aq| < 2

√q, et

donc que le discriminant ∆ = a2q − 4q de P est strictement négatif.

Or, si l’entier N est donné, on pose aq = q + 1−N puis ∆ = a2q − 4q.

Sans connaître la courbe E , on peut donc associer à N le polynôme P, puisson discriminant ∆, et enfin le corps de nombres K = Q(i

√|D|) de degré

deux (un tel corps est appelé un corps quadratique imaginaire).

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Multiplication complexe et cryptographie Courbes elliptiques à nombre de points donné

Or, le polynôme P apparaît dans la théorie des courbes elliptiquescomme le polynôme caractéristique d’un endomorphisme π de E , appelél’endomorphisme de Frobenius de E , et que nous noterons π.

Explicitement, π transforme le point à coordonnées (x , y) de E (avecx , y dans une clôture algébrique de k) en le point à coordonnées (xq, yq).

Ainsi, l’anneau des endomorphismes End(E ) de E contient l’anneauZ[π] qui est isomorphe à un ordre dans le corps quadratique K . Autrementdit, la courbe elliptique est à multiplication complexe par K .

En outre, l’ordre Z[π] est déjà déterminé par l’entier N. Puisqu’on peutmontrer que End(E ) est toujours isomorphe à un sous-anneau de OK , on al’encadrement

Z[π] ⊆ End(E ) ⊆ OK .

Le groupe quotient des groupes additifs OK/Z[π] est un groupe fini,et il n’y a donc qu’un nombre fini (explicite) de possibilités pour End(E ).

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Multiplication complexe et cryptographie Courbes elliptiques à nombre de points donné

Soit O un ordre dans un corps quadratique imaginaire. Alors il existedes réseaux Ω tel que l’anneau des endomorphismes End(E ) de la courbeelliptique E = C/Ω est isomorphe à O. (Par exemple, O peut lui-même êtreconsidéré comme un réseau de C.)

Théorème.Soit Ω un réseau à multiplication complexe de C. Alors j(Ω) est un

entier algébrique.

Soit F le corps de nombres Q(j(Ω)) et soit p la caractéristique de k.Soit P un idéal maximal de OF contenant p ; alors le corps quotient OF/Pest un corps fini k ′ de caractéristique p.

Et la classe j de j(Ω) dans k ′ est l’invariant j d’une courbe elliptiquesur k ′ (voir l’un des exercices de la fiche 112).

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Multiplication complexe et cryptographie Courbes elliptiques à nombre de points donné

En général, en cherchant parmi les différentes courbes elliptiques d’in-variant j pour les différentes valeurs de j on trouve la courbe cherchée.

Pour tester si le groupe de points d’une courbe elliptique est d’ordreN, on peut utiliser l’algorithme de Schoof ou SEA. Mais il est souvent utilede prendre des points P au hasard sur la courbe et voir si NP est l’originede la courbe.

Nous ne connaissons pas de méthode pour trouver une courbe elliptiqueavec un nombre de points donné qui ne passe pas par la caractéristique zéro.

Il existe une théorie très riche de la multiplication complexe, qui permetnotamment de donner une description très précise du corps de nombresengendré par j(Ω) lorsque Ω est à multiplication complexe.

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Formes modulaires et fonctions thêta.

Formes modulaires et fonctions thêta.

À partir de maintenant, nous allons étudier la variation des fonctionsque nous avons introduites aves le réseau Ω.

Nous désignons donc par z 7→ ℘(z ,Ω) la fonction ℘ de Weierstrassassociée au réseau Ω, et les notations ζ(z ,Ω), σ(z ,Ω), η(ω,Ω) auront unesignification analogue.

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Formes modulaires et fonctions thêta.

Soient Ω, Ω′ ⊆ C deux réseaux.On dit que Ω et Ω′ sont homothètes (ou isomorphes) s’il existe λ ∈ C×

tel que Ω′ = λΩ.

Proposition. Soit Ω ⊆ C un réseau et soit λ ∈ C×. Alors

℘(λz , λΩ) =1λ2℘(z ,Ω),

ζ(λz , λΩ) =1λζ(z ,Ω),

σ(λz , λΩ) = λσ(z ,Ω),

η(λω, λΩ) =1λη(ω,Ω),

Gk(λΩ) =1λk Gk(Ω), (k ≥ 3),

j(λΩ) = j(Ω).

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Formes modulaires et fonctions thêta.

La démonstration est facile et laissée en exercice. On a coutume deposer

∆(Ω) = g2(Ω)3 − 27g3(Ω)2,

où g2(Ω) = 60G4(Ω), g3(Ω) = 140G6(Ω) comme auparavant. On appelle∆(Ω) le discriminant de Ω.

Alors ∆(Ω) est la seizième du discriminant du polynôme 4t3−g2t−g3.Par conséquent, ∆(Ω) 6= 0.

En utilisant la proposition, on trouve que

∆(λΩ) =1λ12 ∆(Ω).

Enfin, un calcul aisé montre que

j(Ω) = 123 g2(Ω)3

∆(Ω),

ce qui entraîne que j(λΩ) = j(Ω).John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 245 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta.

Ces formules montrent que, pour calculer ℘, ζ, . . ., il suffit de savoir lefaire pour des réseaux ayant une base de la forme (1, τ), où τ ∈ C.

Ici, (1, τ) est une base d’un réseau si et seulement si τ /∈ R et, quitteà remplacer τ par −τ , on peut supposer =(τ) > 0.

La variable τ sert également dans l’étude des familles paramétrées decourbes elliptiques, munies éventuellement de structures supplémentaires(point d’ordre N . . .).

On note H le demi-plan supérieur τ ∈ C | =(τ) > 0.Si τ ∈ H, on note Ωτ le réseau de base (1, τ).D’après la proposition, on a, par exemple,

℘(z ,Ω) =1ω2

1℘( zω1,Ωω2/ω1

),

lorsque (ω1, ω2) est une base de Ω telle que =(ω2/ω1) > 0.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 246 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta.

Théorème. Soient τ , τ ′ ∈ H. Pour que les réseaux Ωτ et Ωτ ′ soienthomothètes, il faut et il suffit qu’il existe une matrice(

a bc d

)∈ SL2(Z) telle que τ ′ =

aτ + bcτ + d .

(Rappelons que, si A est un anneau commutatif unitaire, SLn(A) dé-signe le groupe multiplicatif des matrices carrées d’ordre n à coefficientsdans A et de déterminant 1.)

Démonstration. Rappelons d’abord que, si M =( a b

c d)∈ GL2(C),

l’homographie de P1(C) associée

M(τ) =aτ + bcτ + d

tranforme H en lui-même si et seulement si M est le produit d’un scalaireet d’une matrice réelle de déterminant positif.

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Formes modulaires et fonctions thêta.

Si donc la matrice envisagée dans l’énoncé du théorème existe, alors(cτ+d , aτ+b) est une base de Ωτ et, par conséquent, Ωτ ′ = (cτ+d)−1Ωτ .

Supposons réciproquement qu’il existe λ ∈ C× tel que Ωτ ′ = λΩτ .Alors (λ, λτ) est une base de Ωτ ′ : il existe donc une matrice N =( p q

r s)∈ GL2(Z) telle que λ = rτ ′ + s, λτ = pτ ′ + q.

On a doncτ =

pτ ′ + qrτ ′ + s = N(τ ′),

d’où τ ′ = N−1(τ).A priori, N−1 est de déterminant ±1. Mais le fait que τ ′ et τ appar-

tiennent à H entraîne que le déterminant est en fait +1.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

Formes modulaires

Rappelons que H désigne le demi-plan supérieur ouvert τ ∈ C |=(τ) > 0 et que, si τ ∈ H, Ωτ désigne le réseau de base (1, τ).

Le groupe multiplicatif GL+2 (R) des matrices carrées inversibles d’ordre

deux à coefficients réels et de déterminant positif opère sur H par

M(τ) =aτ + bcτ + d , où M =

(a bc d

).

Si τ ∈ H, on pose Gk(τ) = Gk(Ωτ ), g2(τ) = g2(Ωτ ), g3(τ) = g3(Ωτ ),∆(τ) = ∆(Ωτ ), j(τ) = j(Ωτ ).

Ce sont des fonctions holomorphes sur H, comme on voit en rappelantque, d’après la définition, on a Gk(τ) =

∑(m,n)∈Z2−(0,0)(mτ + n)−k .

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

Proposition. On a

Gk(M(τ)) = (cτ + d)kGk(τ) quelque soit M =

(a bc d

)∈ SL2(Z).

Démonstration. Si τ ′ =aτ + bcτ + d , alors Ωτ ′ = (cτ + d)−1Ωτ , comme

déjà remarqué. Par conséquent,

Gk(M(τ)) = Gk(Ωτ ′) = (cτ + d)kGk(Ωτ ) = (cτ + d)kGk(τ)

d’après la proposition précédente.On a alors g2(M(τ)) = (cτ +d)4g2(τ) et g3(M(τ)) = (cτ +d)6g3(τ).

Corollaire. On a

∆(M(τ)) = (cτ + d)12∆(τ) et j(M(τ)) = j(τ)

quelque soit M =

(a bc d

)∈ SL2(Z).

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 250 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

Définition. Soit k ∈ Z. Une forme modulaire de poids k (sur SL2(Z))est une fonction holomorphe f : H → C qui vérifie les deux conditionssuivantes.

(i) Pour tout M =

(a bc d

)∈ SL2(Z), on a f (M(τ)) = (cτ + d)k f (τ)

quelque soit τ ∈ H.(ii) f possède un développement de Fourier de la forme

f (τ) =∑n∈N

cnqn, q = q(τ) = e2πiτ ,

où cn ∈ C et la série est supposée convergente sur un demi-plan de la formeτ ∈ H | =(τ) > y0.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

Expliquons la condition (ii).

En appliquant la condition (i) avec la matrice M =

(1 10 1

), on voit

que f est de période 1.Fixons d’abord y > 0 : la fonction d’une variable réelle fy (x) = f (x+iy)

possède donc un développement de Fourier

fy (x) =∑n∈Z

cn(y)e2πinx , cn(y) =

∫ 1

0f (t + iy)e−2πint dt.

Si l’on pose w = t + iy , alors on trouve

cn(y)e2πny =

∫[iy ,iy+1]

f (w)e−2πinw dw

et l’intégrale à droite est indépendante de y , comme on, le voit en considé-rant

∫γ f (w)e−2πinw dw lorsque γ est un lacet en forme de rectangle avec

sommets iy , iy + 1, iy ′ + 1, iy ′ et en remarquant que les intégrales surles cotés opposées [iy + 1, iy ′ + 1] et [iy ′, iy ] se simplifient en raison de lapériodicité.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

Par conséquent, si l’on pose τ = x + iy , on trouve que

f (τ) = f (x + iy) =∑n∈Z

cne2πinτ , où cn =

∫[iy ,iy+1]

f (w)e−2πinw dw

est indépendant de y .La condition (ii) signifie alors que cn = 0 lorsque n < 0.Puisque e2πiτ → 0 lorsque =(τ) → +∞, la condition (ii) peut égale-

ment être interprétée comme disant que « f est analytique à l’infini ».Elle implique, en particulier, que lim=(τ)→+∞ f (τ) existe ; la limite sera

en fait c0.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

La proposition montre que Gk , g2, g3, ∆ et j vérifient la condition (i)de la définition d’une forme modulaire.

Il faudra alors montrer que Gk , et donc encore g2, g3 et ∆, vérifientégalement la condition (ii).

En fait, un calcul plus soigné permet de déterminer les coeffcients cnexplicitement. Voici l’esquisse de l’argument, qu’on pourra compléter enexercice.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

On peut supposer que k est pair. Alors, en séparant les termes avecm = 0 et en remarquant que ((−m)τ + (−n))k = (mτ + n)k , on trouve :

Gk(τ) =∑

(m,n) 6=(0,0)

1(mτ + n)k = 2

+∞∑n=1

1nk + 2

+∞∑m=1

∑n∈Z

1(mτ + n)k .

Ici,∑+∞

n=1 n−k est la valeur en k de la fonction dzêta de Riemann.Afin de traiter la somme double, on rappelle d’abord la formule clas-

sique :

πcos πzsinπz =

1z +

+∞∑n=1

( 1z + n +

1z − n

),

valable pour tout z ∈ C−Z, la convergence étant localement uniforme surl’ouvert de C en question.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

D’autre part,

πcos πzsinπz = πi eπiz + e−πiz

eπiz − e−πiz = −πi 1 + e2πiz

1− e2πiz

et donc, lorsque z ∈ H :

1z +

+∞∑n=1

( 1z + n +

1z − n

)= −πi 1 + e2πiz

1− e2πiz = −πi(1 + 2

+∞∑r=1

e2πirz).En dérivant k − 1 fois et en réarrangeant, on en tire que :

∑n∈Z

1(z + n)k = (−1)k (2πi)k

(k − 1)!

+∞∑r=1

rk−1e2πirz .

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

Le calcul se termine en replaçant z par mτ dans cette formule puis enprenant la somme de m = 1 à +∞. Il s’ensuit que :

Gk(τ) = 2ζ(k) + 2(−1)k (2πi)k

(k − 1)!

+∞∑m=1

+∞∑r=1

rk−1e2πimrτ .

En rappelant que k est paire et en réarrangeant, on obtient le résultatsuivant :

Théorème. Soit k ≥ 4 un entier pair. On note ζ de la fonction dzêtade Riemann et, si n ≥ 1 est un entier, on pose σk−1(n) =

∑d |n dk−1, la

somme portant sur les diviseurs d ≥ 1 de n. Alors

Gk(τ) = 2ζ(k) + 2(−1)k/2 (2π)k

(k − 1)!

+∞∑n=1

σk−1(n)e2πinτ .

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

Remarques. (i) Rappelons que, lorsque k ≥ 2 est un entier pair, lavaleur ζ(k) est un multiple rationnel de πk (voir la fiche 260). Le théorèmeimplique donc que les coefficients du développement de Fourier de la fonc-tion modulaire Gk/ζ(k) sont rationnels. En outre, l’apparition de la fonctiondzêta et de la fonction σk−1 portant sur les diviseurs d’un entier suggèrel’importance des séries d’Eisenstein en théorie des nombres.

(ii) Il est clair qus σk−1(n) ≤ nk . On en tire que la convergence de lasérie de Fourier de Gk est linéaire, donc nettement meilleure que celle de lasérie définissante de Gk . On en tire que les fonctions g2, g3, ∆ et j peuventégalement être calculées à l’aide de séries à convergence linéaire.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

(iii) La fonction

(∗) (z , τ) 7→ ℘′1(z , τ) = −2∑

(m,n)∈Z2

1(z + mτ + n)3

est de période 1, à la fois en z et en τ . Des calculs analogues permettent del’écrire comme somme de séries faisant intervenir des puissances de e2πiz etde e2πiτ , qui convergent beaucoup plus vite que la série (∗). Mais on peutfaire encore mieux. . .

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

Exercice. (i) Expliquer pourquoi la fonction z 7→ z/(ez−1) se prolongeen une fonction holomorphe en 0. Trouver le rayon de convergence de sondéveloppement en série entière au voisinage de 0.

Les coefficients Br de ce développement sont connus au nom desnombres des Bernouilli. Explicitement, les coefficients Br sont définis par

zez − 1 =

∞∑r=0

Brr ! z r .

(ii) Calculer B0. Vérifier que la fonction z 7→ zez−1 + 1

2z est paire. Endéduire que B1 = −1/2 et que Br = 0 lorsque r ≥ 3 est impair.

(iii) En utilisant l’égalité zez−1(ez−1) = z , montrer que

∑r−1`=0 B`

(r`

)=

0 lorsque r ≥ 2. En déduire que B2 = 1/6 et que Br est un nombre rationnelquelque soit l’entier r .

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Formes modulaires et fonctions thêta. Formes modulaires

On reprend la formule

πcos πzsinπz −

1z =

+∞∑n=1

( 1z + n +

1z − n

)déjà évoquée.

(iv) En utilisant les formules cos z = (eiz + e−iz)/2 et sin z = (eiz −e−iz)/2, exprimer les coefficients du développement en série entière au voi-sinage de 0 de

z 7→+∞∑n=1

( 1z + n +

1z − n

)en fonction des nombres de Bernouilli.

(v) En déduire que∞∑

n=1

1n2k = (2π)2k (−1)k−1B2k

2 · (2k)!.

quelque soit l’entier k ≥ 1.John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 261 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Fonctions modulaires

Fonctions modulairesPar contre, la fonction j ne vérifie pas la condition (ii) de la définition

d’une forme modulaire.En effet, en utilisant l’exercice de la fiche 260, on trouve que ζ(4) =

π4/90 et ζ(6) = π6/945. Puisque ∆(τ) = (60G4(τ))3− 27(140G6(τ))6, on

déduit du théorème de la fiche 257 que

lim=(τ)→+∞

∆(τ) = 0,

alors que lim=(τ)→+∞ G4(τ) = 2ζ(4) = π4/45. Par conséquent, j(τ) n’estpas borné lorsque =(τ) → +∞.

En fait, on peut montrer que les seules fonctions holomorphes bornéesf : H → C qui vérifient f ((aτ + b)/(cτ + d)) = f (τ) pour tout τ ∈ H et

pour tout(

a bc d

)∈ SL2(Z) sont les fonctions constantes.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Fonctions modulaires

On se trouve ainsi dans une situation analogue que pour les fonctionselliptiques : toute fonction elliptique holomorphe est constante.

Comme pour les fonctions elliptiques, la solution est d’autoriser lesfonctions méromorphes.

Définition. Une fonction modulaire sur SL2(Z) est une fonction méro-morphe f sur H qui vérifie les deux conditions suivantes :

(i) Pour tout(

a bc d

)∈ SL2(Z) on a

f( aτ + b

cτ + d)

= f (τ) pour tout τ ∈ H.

(ii) f est « méromorphe à l’infini », dans le sens qu’elle possède undéveloppement de Fourier de la forme

f (τ) =∑n≥n0

cnqn, q = q(τ) = e2πiτ .

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Formes modulaires et fonctions thêta. Fonctions modulaires

La fonction j rentre bien dans ce nouveau cadre. Nous savons déjàqu’elle vérifie la condition (i).

Afin de montrer qu’elle vérifie la condition (ii), on note que

∆(τ) = (60G4(τ))3 − 27(140G6(τ))

2 = π12(4096q − 98304q2) + O(q3),

et que123g2(τ)

3 = π12(4096 + 2949120q) + O(q2),

où l’on a encore écrit q = e2πiτ . (On rappelle que ζ(4) = π4/90 et ζ(6) =π6/945.)

Ces séries convergent sur le disque ouvert q ∈ C | |q| < 1. Parconséquent,

j(τ) =1q + 744 + O(q),

la série convergeant sur un disque épointé centré en 0. (En fait, elle convergesur le disque épointé de rayon un, car ∆(τ) 6= 0 quelque soit τ ∈ H, et jest alors holomorphe sur H.)

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Formes modulaires et fonctions thêta. Fonctions modulaires

Exercice. Montrer que les fonctions modulaires sur SL2(Z) forment uncorps.

Remarque. On peut montrer que toute fonction modulaire sur SL2(Z)sécrit comme fonction rationnelle en j . Ce résultat est analogue au fait quetoute fonction elliptique s’exprime sous la forme f (℘)+℘′g(℘), f et g étantdes fonctions rationnelles (voir la fiche 138).

Exercice. Montrer que les coefficients du développement de Fourier dej sont rationnels. (un peu plus difficile : montrer qu’ils sont entiers. Lescoefficients sont liés aux degrés de certaines représentations du groupe finisimple appelé « le monstre ».)

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Formes modulaires et fonctions thêta. Fonctions thêta

Fonctions thêta

Une autre manière de construire des formes modulaires est à l’aide defonctions thêta.

Par définition, la fonction thêta de Jacobi est la fonction définie surC×H par

θ(z , τ) =∑n∈Z

eπin2τ+2πinz .

Puisque τ ∈ H, le terme eπin2τ domine le terme e2πinz ce qui garantitla convergence quelque soit la valeur de z .

La série converge absolument sur C×H. Elle convergence uniformémentsur tout compact de C×H et θ est une fonction holomorphe sur ce domaine.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Fonctions thêta

Proposition.(i) On a θ(−z , τ) = θ(z , τ) pour tout (z , τ) ∈ C×H.(ii) On a θ(z + m, τ) = θ(z , τ) pour tout (z , τ) ∈ C×H et pour tout

m ∈ Z.(iii) On a θ(z+mτ, τ) = e−πim2τ−2πimzθ(z , τ) pour tout (z , τ) ∈ C×H

et pour tout m ∈ Z.

Démonstration. Le (i) se voit en remplaçant n par −n dans la sommedéfinissant θ. Le (ii) est également immédiat.

Montrons le (iii). Les manipulations qui suivent se justifient facilementà l’aide de la convergence absolue. On a :

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Formes modulaires et fonctions thêta. Fonctions thêta

θ(z + τm, τ) =∑n∈Z

eπin2τ+2πin(z+τm)

=∑n∈Z

eπi(n2+2nm)τ+2πinz

=∑n∈Z

eπi(n+m)2τ+2πi(n+m)z−πim2τ−2πimz

= e−πim2τ−2πimz∑n∈Z

eπi(n+m)2τ+2πi(n+m)z .

Lorsque n parcourt Z, n + m le parcourt aussi.

La proposition montre que z 7→ θ(z , τ) est une fonction quasi-périodiqueassociée au réseau Ωτ de base (1, τ). En particulier, on peut lui associer undiviseur div(θ) ∈ Div(C/Ωτ ), que nous allons bientôt déterminer.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Fonctions thêta

Soit (a, b) ∈ R2. Il est utile d’introduire la fonction thêta de Riemannavec caractéristiques

[ab]

:

θ

[ab

](z , τ) =

∑n∈Z

eπi(n+a)2τ+2πi(n+a)(z+b).

En particulier, θ(z , τ) = θ[0

0](z , τ).

La proposition suivante montre que, en fait, la fonction θ[a

b]

n’estqu’une réécriture de la fonction θ.

Proposition. Pour tout (z , τ) ∈ C ∈ H, on a :

θ

[ab

](z , τ) = eπia2τ+2πia(z+b)θ(z + τa + b, τ).

La démonstration est laissée en exercice. On déduit facilement de cetteproposition que θ

[ab]

est également une fonction quasi-périodique associéeà Ωτ .

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 269 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Fonctions thêta

Proposition Soit (a, b) ∈ R2. Alors(i) θ

[ab](z + m, τ) = e2πimaθ

[ab](z , τ) et

(ii) θ[a

b](z + mτ, τ) = e−πim2τ−2πim(z+b)θ

[ab](z , τ)

quelque soit m ∈ Z.

À nouveau, la démonstration est laissée en exercice. Il s’agit d’un exer-cice de réarrangement des termes de la série qui se justifie facilement enraison de la convergence absolue.

La proposition montre que θ[a

b]

est une fonction quasi-périodique as-socié au réseau Ωτ de base (1, τ).

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Formes modulaires et fonctions thêta. Fonctions thêta

Les cas où a, b ∈ 0, 1/2 seront particulièrement importants par lasuite et nous écrirons alors θ2a,2b(z , τ) pour θ

[ab].

On a ainsi quatre fonctions θ0,0, θ0,1, θ1,0 et θ1,1. En particulier, θ0,0 =θ.

Proposition. Fixons τ ∈ H. Les fonctions z 7→ θ0,0(z , τ), z 7→ θ0,1(z , τ)et z 7→ θ1,0(z , τ) sont paires, alors que la fonction z 7→ θ1,1(z , τ) est impaire.

Le cas de θ0,0 = θ a déjà été remarqué. Les autres cas se démontrentde la même manière.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Fonctions thêta

Théorème. Soit (a, b) ∈ R2. La fonction z 7→ θ[a

b](z , τ) a un unique

zéro simple modulo Ωτ , et son diviseur est [−(aτ + b + 12(τ + 1)].

Démonstration. Puisque z 7→ θ1,1(z , τ) est impaire, on a θ1,1(0, τ) = 0quelque soit τ ∈ H.

D’après la proposition de la fiche 269, on déduit que z 7→ θ[a

b](z , τ)

s’annule lorsque z = −(aτ + b + 12(τ + 1)).

Pour conclure, il suffit de démontrer, pour un choix convenable de(a, b), que θ

[ab]

a un unique zéro dans un parallèlogramme Πα = α+λ1 +λ2τ | 0 ≤ λ1, λ2 ≤ 1.

Prenons donc (a, b) = (0, 0) afin de simplifier les calculs, en utilisantla proposition de la fiche 267.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Fonctions thêta

Il suffit de montrer ∫γ

θ′(z , τ)θ(z , τ) dz = 2πi ,

γ étant le bord du parallèlogramme muni de l’orientation usuelle et θ′ dési-gnant la dérivée de θ par rapport à z . Grâce à la périodicité, on a∫ α+1+τ

α+1

θ′(z , τ)θ(z , τ) dz = −

∫ α

α+τ

θ′(z , τ)θ(z , τ) dz .

Par contre,∫ α+1

α

θ′(z , τ)θ(z , τ) dz +

∫ α+τ

α+1+τ

θ′(z , τ)θ(z , τ) dz

=

∫ α+1

α

(θ′(z , τ)θ(z , τ) −

θ′(z + τ, τ)

θ(z + τ, τ)

)dz

=

∫ α+1

α

(θ′(z , τ)θ(z , τ) −

(θ′(z , τ)θ(z , τ) − 2πi

))dz

(en utilisant θ(z + τ, τ) = e−πiτ−2πizθ(z , τ)), ce qui vaut 2πi .John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 273 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Comparaison entre θ1,1 et σ

Comparaison entre θ1,1 et σ

Soit τ ∈ H et soit σ(z , τ) la fonction σ de Weierstrass associée auréseau Ωτ de base (1, τ).

Les fonctions z 7→ θ1,1(z , τ) et z 7→ σ(z , τ) sont des fonctions quasi-périodiques associées à Ωτ . Elles sont toutes les deux impaires et de diviseur[0]. Il est donc naturel de les comparer.

D’après la proposition de la fiche 270, on a

θ1,1(z + 1, τ) = −θ(z , τ), θ1,1(z + τ, τ) = −e−πiτ−2πizθ1,1(z , τ).

Puisque θ1,1 et impair, dlog θ1,1 est impair et θ1,1 ayant un zéro simpleen 0, on voit que

dlog(θ1,1(z , τ)

)=

1z + O(z),

où la fonction O(z) dépend de τ .

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 274 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Comparaison entre θ1,1 et σ

En outre,

dlog(θ1,1(z + 1, τ)

)= dlog

(θ1,1(z , τ)

),

dlog(θ1,1(z + τ, τ)

)= −2πi + dlog

(θ1,1(z , τ)

).

En dérivant encore une fois, on voit que − ddz dlog

(θ1,1(z , τ)

)est une

fonction elliptique qui vérifie

− ddz dlog

(θ1,1(z , τ)

)=

1z2 + O(1).

D’autre part, on a

− ddz dlog

(σ(z , τ)

)= ℘(z) =

1z2 + O(z2).

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 275 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Comparaison entre θ1,1 et σ

Par conséquent, la fonction ddz dlog

(θ1,1(z , τ)

)− d

dz dlog(σ(z , τ)

)est

une fonction elliptique sans pôle, donc constante par rapport à z .Il existe donc une fonction φ : H → C telle que

ddz dlog

(θ1,1(z , τ))

σ(z , τ)

)= φ(τ)

pour tout z ∈ C, puis

dlog(θ1,1(z , τ)

)σ(z , τ)

)= φ(τ)z .

(Il n’y a pas de constante d’intégration car le membre gauche est unefonction impaire.)

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 276 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Comparaison entre θ1,1 et σ

Puisque φ(τ)z = dlog(e 1

2 φ(τ)z2), on en tire que

θ1,1(z , τ) = ψ(τ)e12 φ(τ)z2

σ(z , τ),

où ψ : H → C est une nouvelle fonction.On peut déterminer la fonction φ en comparant les relations de quasi-

périodicité

θ1,1(z + 1, τ) = −θ1,1(z , τ), σ(z + 1, τ) = −eη(1)(z+ 12 )σ(z , τ).

On en tire que φ(τ) = η(1) (ce qui dépend du réseau Ωτ et donc de τ !).

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Formes modulaires et fonctions thêta. Comparaison entre θ1,1 et σ

La fonction ψ, quant à elle, peut être interprétée de diverses façons.En faisant tendre z vers 0 et en rappelant que σ(z , τ) = z + O(z2), on

voit que ψ(τ) = θ′1,1(0, τ).

En substituant z = 12 , z = τ

2 et z = 1+τ2 , on trouve d’autres formules

pour ψ(τ) en termes de θ0,1(0, τ), θ1,0(0, τ) et θ0,0(0, τ) ainsi que desvaleurs de la fonction σ aux mêmes points.

La comparaison de ces formules permet de démontrer quelques identitésremarquables, telle la formule dérivée de Jacobi

θ′1,1(0, τ)3 = −πθ0,0(0, τ)θ0,1(0, τ)θ1,0(0, τ).

Les détails sont omis.En résumé, nous avons démontré le résultat suivant.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Comparaison entre θ1,1 et σ

Théorème.Pour tout (z , τ) ∈ C×H, on a

θ1,1(z , τ) = θ′1,1(0, τ)e12 η(1)σ(z , τ).

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Les thêta constantes

Par définition, les trois thêta constantes sont les fonctions sur H don-nées par

θ0,0(τ) = θ0,0(0, τ) =∑n∈Z

eπin2τ ,

θ0,1(τ) = θ0,1(0, τ) =∑n∈Z

(−1)neπin2τ ,

θ1,0(τ) = θ1,0(0, τ) = eπiτ

4∑n∈Z

eπin(n+1)τ .

(Il serait inutile d’ajouter θ1,1(τ) = θ1,1(0, τ) car, la fonction z 7→θ1,1(z , τ) étant impaire, le membre de droite est identiquement nul.)

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Les thêta constantes vérifient une myriade d’identités, dont les suivantsméritent une mention particulière dans ce cours, en raison de leur lien avecl’AGM.

Théorème (formules de duplication). Pour tout τ ∈ H, on a

θ0,0(2τ)2 = 12(θ0,0(τ)

2 + θ0,1(τ)2),

θ0,1(2τ)2 = θ0,0(τ)θ0,1(τ),

θ1,0(2τ)2 = 12(θ0,0(τ)

2 − θ0,1(τ)2).

Démonstration. Le principe est le même dans les trois cas ; je me limi-terai donc à la première formule.

La convergence des séries doubles étant absolue, les manipulations quisuivent se justifient en appliquant le théorème de Fubini.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

On a

θ0,0(τ)2 =

( ∑m∈Z

eπim2τ)( ∑

n∈Zeπin2τ

)=

∑(m,n)∈Z2

eπi(m2+n2)τ

et

θ0,1(τ)2 =

( ∑m∈Z

(−1)meπim2τ)( ∑

n∈Z(−1)neπin2τ

)=

∑(m,n)∈Z2

(−1)m+neπi(m2+n2)τ .

Par conséquent,

θ0,0(τ)2 + θ0,1(τ)

2 =∑

(m,n)∈Z2

(1 + (−1)m+n)eπi(m2+n2)τ

= 2∑

(m,n)∈Λ

eπi(m2+n2)τ ,

où cette dernière somme parcourt le sous-groupe Λ de Z2 formé des couplesd’entiers (m, n) avec m et n de la même parité.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Or, l’application(m, n) 7→

(m+n2 , m−n

2)

est une bijection de Λ sur Z2, et si l’on pose

p =m + n

2 , q =m − n

2 ,

alorsm2 + n2 = 2(p2 + q2).

Par conséquent,

θ0,0(τ)2 + θ0,1(τ)

2 = 2∑

(p,q)∈Z2

e2πi(p2+q2)τ = θ0,0(2τ)2;

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Corollaire. Soit τ ∈ H. Alors la suite (an, bn) ∈ C2 définie par an =θ0,0(2nτ)2, bn = θ0,1(2nτ)2 est une bonne suite AGM.

Démonstration. Le théorème montre qu’il s’agit bien d’une suite AGM.En écrivant

θ0,0(v) = 1 +∑n 6=0

eπin2v ,

θ0,1(v) = 1 +∑n 6=0

(−1)neπin2v , v ∈ H,

on voit que θ0,0(v) → 1 et θ0,1(v) → 1 lorsque =(v) → +∞. Par consé-quent, si τ ∈ H est fixé, les suites θ0,0(2nτ) et θ0,1(2nτ) convergent égale-ment vers 1 lorsque n → +∞.

D’après le (iii) du théorème de la fiche 55, on en conclut que (an, bn)est une bonne suite AGM.

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Nous allons voir que, lorsque =(τ) est assez grand, il s’agit de lameilleure suite AGM. L’essentiel de la démonstration se trouve dans le lemmesuivant

Lemme. Soit τ ∈ H. Si =(τ) > log(2√

2 + 1)/π ≈ 0, 4273 . . . , alors|θ0,0(τ)− 1| < 1/

√2 et |θ0,1(τ)− 1| < 1/

√2.

Démonstration. Posons y = =(τ). Alors

|θ0,0(τ)− 1| =∣∣ ∑

n 6=0eπin2τ

∣∣ ≤ ∑n 6=0

e−πn2y

≤ 2∑n≥1

e−πny =2e−πy

1− e−πy .

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Un calcul facile montre que

2e−πy

1− e−πy <1√2

si et seulement si y > log(2√

2 + 1)

π,

ce qui achève la démonstration du cas de θ0,0. Le cas de θ0,1 se traite de lamême manière.

Théorème. Soit τ ∈ H. On suppose que =(τ) ≥ log (2√

2 + 1)/π.Alors la suite

an = θ0,0(2nτ)2, bn = θ0,1(2nτ)2

est la meilleure suite AGM de terme initial(θ0,0(τ)

2, θ0,1(τ)2). Par consé-

quent, on a

M(θ0,1(τ)

2

θ0,0(τ)2)

=1

θ0,0(τ)2 .

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 286 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Démonstration. L’hypothèse implique que

=(2nτ) = 2n=(τ) > log(2√

2 + 1)/π

quelque soit n. Le lemme montre donc que, quelque soit n, θ0,0(2nτ) etθ0,1(2nτ) sont situés dans le disque ouvert de centre 1 et de rayon 1/

√2.

Cela implique que

| arg(θ0,0(2nτ))| ≤ π

4 , | arg(θ0,1(2nτ))| ≤ π

4

puis que an et bn se trouvent dans le demi-plan ouvert z | <(z) > 0quelque soit n.

On déduit que (an+1, bn+1) est toujours le bon itéré de (an, bn). Puisquean → 1 et bn → 1, on a M(θ0,0(τ)

2, θ0,1(τ)2) = 1 et la dernière formule

alors est une conséquence des arguments à partir de la fiche 67.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 287 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Voici une autre formule liant les trois thêta constantes ; elle est encoredue à Jacobi.

Théorème. Pour tout τ ∈ H, on a

θ0,1(τ)4 + θ1,0(τ)

4 = θ0,0(τ)4.

Démonstration. Cette formule se déduit des formules de duplication enremplaçant τ par τ/2. En effet, on a :

θ0,1(τ)4 + θ1,0(τ)

4 = θ0,0(

τ2)2θ0,1

(τ2)2

+14(θ0,0

(τ2)2 − θ0,1

(τ2)2)2

=14(θ0,0

(τ2)2

+ θ0,1(

τ2)2)2

= θ0,0(τ)4.

Ainsi, comme les fonctions elliptiques paramètrent les courbes ellip-tiques, les thêta constantes paramètrent la « quatrième courbe de Fermat »,dont l’équation projective est x4 + y4 = z4.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 288 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Nous allons maintenant montrer que les thêta constantes sont liées auxformes modulaires.

Proposition. Pour tout τ ∈ H, on a

θ0,0(τ + 1) = θ0,1(τ),

θ0,1(τ + 1) = θ0,0(τ),

θ1,0(τ + 1) = eπi4 θ1,0(τ).

Démonstration. On a

θ0,0(τ + 1) =∑n∈Z

eπin2(τ+1) =∑n∈Z

eπin2τeπin2

=∑n∈Z

(−1)neπin2τ = θ0,1(τ).

Les autre formules se démontrent de la même manière.John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 289 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Théorème. Pour tout τ ∈ H, on a

θ0,0(−1τ

)=

√τ

i θ0,0(τ),

θ0,1(−1τ

)=

√τ

i θ1,0(τ),

θ1,0(−1τ

)=

√τ

i θ0,1(τ).

Ici,√τ

i désigne la racine carrée holomorphe sur H qui est positivelorsque τ est imaginaire pur.

Le trois identités sont des cas particuliers d’un résultat plus général, àsavoir le théorème suivant.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 290 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Théorème. Pour tout (z , τ) ∈ H, on a

e−πi z2

τ θ(− zτ,−1

τ

)=

√τ

i θ(z , τ).

En effet, on obtient la première identité en prenant z = 0 et la se-conde en prenant z = 1

2 . Enfin, la troisième découle de la seconde par lasubstitution τ = −1/τ .

La démonstration de ce théorème est une application classique de laformule de Poisson ∑

n∈Zf (n) =

∑n∈Z

f (n),

où f : R → C est une fonction à décroissance rapide et

f (v) =

∫R

f (u)e−2πiuv du

sa transformation de Fourier.John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 291 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

En effet, si l’on pose f (u) = eπiu2τ+2πiuz , avec (z , τ) ∈ C ×H fixé, ilest clair que θ(z , τ) =

∑n∈Z f (n).

En outre, lim|u|→+∞ |u|αf (k)(u) = 0 quelque soit α ∈ R et k ∈ N, cequi suffit largement pour justifier l’égalité

∑n∈Z f (n) =

∑n∈Z f (n).

Calculons donc f (v). On a

f (v) =

∫R

eπiu2τ+2πiuz−2πiuv du

= e−πi (z−v)2

τ

∫R

eπiτ(u+ z−vτ

)2 du

= e−πi (z−v)2

τ

∫R

eπiτ(u+λ)2 du,

où λ = (z − v)/τ est indépendant de u.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 292 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

En intégrant w 7→ eπiτw2 sur le bord du parallèlogramme de sommets−R, R, R + λ, −R + λ et en faisant tendre R vers +∞, on voit que∫

Reπiτ(u+λ)2 du =

∫R

eπiτu2 du.

Lorsque τ = iy avec y > 0, on a vu en Licence que∫R

eπiτu2 du =

∫R

e−πyu2 du =1√y =

(√τ

i

)−1.

Les fonctions τ 7→∫

R eπiτu2 du et τ 7→√

τi étant holomorphes sur H, on

déduit par prolongement analytique que

f (v) = e−πi (z−v)2

τ

∫R

eπiτu2 du = e−πi (z−v)2

τ

(√τ

i

)−1.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 293 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Au total, donc√τ

i θ(z , τ) =

√τ

i∑n∈Z

f (n) =

√τ

i∑n∈Z

f (n)

=∑n∈Z

e−πi (z−n)2

τ = e−πi z2

τ∑n∈Z

e−πin2 1τ −2πin z

τ

= e−πi z2

τ θ(− zτ,−1

τ

),

ce qui achève la démonstration du théorème.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 294 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Soit f : H → C la fonction définie par f (τ) = θ0,0(τ)8 + θ0,1(τ)

8 +θ1,0(τ)

8. Nous allons montrer que f est une forme modulaire de poids 4pour SL2(Z).

D’après la proposition de la fiche 289, on a

f (τ + 1) = θ0,0(τ + 1)8 + θ0,1(τ + 1)8 + θ1,0(τ + 1)8

= θ0,1(τ)8 + θ0,0(τ)

8 +(e

πi4)8θ1,0(τ)

8 = f (τ)

quelque soit τ ∈ H.De même, le théorème de la fiche 290 implique que

f(− 1τ

)= τ4f (τ)

quelque soit τ ∈ H.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 295 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Proposition. Soit k ≥ 1 un entier. Soit f : H → C une fonction vérifiant(a) f (τ + 1) = f (τ) pour tout τ ∈ H,

(b) f(− 1τ

)= τk f (τ) pour tout τ ∈ H.

Alorsf( aτ + b

cτ + d

)= (cτ + d)k f (τ)

pour tout τ ∈ H et pour tout(

a bc d

)∈ SL2(Z).

Démonstration. Le point essentiel est que les matrices(

1 10 1

)et(

0 −11 0

)engendrent le groupe SL2(Z).

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 296 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Si M =

(a bc d

)∈ SL2(Z), on pose

γM(τ) = (cτ + d)k .

Afin de montrer la proposition, il suffit de montrer que si f (M(τ)) =γM(τ)f (τ) pour tout M appartenant à une famille génératrice de SL2(Z),alors cette même relation est vraie quelque soit M ∈ SL2(Z).

Pour cela, il suffit de voir que si M, N ∈ SL2(Z), et si f (M(τ)) =γM(τ)f (τ) et si f (N(τ)) = γN(τ)f (τ) quelque soit τ ∈ H, alors

f (MN(τ)) = γMN(τ)f (τ), f (M−1(τ)) = γM−1(τ)f (τ)

quelque soit τ ∈ H.Il s’agit alors d’un calcul facile qui fait usage de l’identité γMN(τ) =

γM(N(τ))γN(τ). Les détails sont omis.

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 297 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Revenons à la fonction f (τ) = θ0,0(τ)8 + θ0,1(τ)

8 + θ1,0(τ)8.

En appliquant la proposition, on voit que f vérifie la condition (i) dela définition d’une forme modulaire de poids 4 (voir la fiche 251).

Vérifions donc la condition (ii).Soit k ≥ 1 un entier. Si n ≥ 1 est un entier, on note Rk(n) le nombre de

représentantions de n comme somme de k carrés d’entiers et Sk(n) le nombrede représentations de n comme somme d’entiers de la forme m(m+1). (Lesreprésentations obtenues par permutation ou par changement de signe sontconsidérées comme distinctes. On remarque que Rk(n) = Sk(n) = 0 lorsquen < 0.)

On a alors

θ0,0(τ)k =

∞∑n=0

Rk(n)eπinτ , θ0,1(τ)k =

∞∑n=0

(−1)nRk(n)eπinτ

et

θ1,0(τ)k = e

πikτ4

∞∑n=0

Sk(n)eπinτ .

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 298 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Par conséquent,

θ0,0(τ)k + θ0,1(τ)

k = 2∑n≥0

n pair

Rk(n)eπinτ = 2∞∑

n=0Rk(2n)e2πinτ

(en remplaçant n par 2n) et

θ1,0(τ)k = e

πikτ4

∞∑n=0

Sk(2n)e2πinτ

car un entier de la forme m(m + 1) est toujours pair.En prenant k = 8, on en tire que

f (τ) = 2∞∑

n=0R8(2n)e2πinτ + e2πiτ

∞∑n=0

S8(2n)e2πinτ

=∞∑

n=0(2R8(2n) + S8(2n − 2))e2πinτ .

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 299 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

On en tire aussitôt que f vérifie bien la condition (ii) de la fiche 251.

Remarques. 1.) On peut montrer que, si k ∈ Z, le C-espace vectorieldes formes modulaires de poids k pour SL2(Z) est de dimension finie et, enparticulier, de dimension un dans le cas k = 4.

Mais nous connaissons deux formes modulaires de poids 4, à savoir fet la série d’Eisenstein G4.

Il existe donc une constante C telle que f (τ) = CG4(τ) quelque soitτ ∈ H.

La valeur de C peut être calculée en comparant les coefficients desséries de Fourier de f et de G4. On a alors

∞∑n=0

(2R8(2n) + S8(2n − 2))e2πinτ = C(

2ζ(4) +16π4

3

∞∑n=1

σ3(n)e2πinτ).

John Boxall (LMNO) L’AGM : applications et généralisations. le 2 avril 2008 300 / 320

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

Prenons n = 1. On a σ3(1) = 1, alors que R8(2) = 112 et S8(0) = 28,comme on voit en calculant directement les coefficients de e2πiτ de θ0,0(τ)

8

et de θ1,0(τ)8. En comparant les coefficients de e2πiτ de f et de CG4, on

trouve que

2× 112 + 28 =16π4C

3 , soit C =90π4 .

(Ceci permet alors, en comparant les coefficients constants de retouverla formule ζ(4) = π4

90 .)On en tire alors la formule

2R8(2n) + S8(2n − 2) = 480σ3(n) = 480∑d | nd≥1

d3,

valable pour tout n ≥ 1, reliant les fonctions arithmétiques R8(2n), S8(2n−2) et σ3(n).

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

2.) Soit Γ un sous-groupe d’indice fini de SL2(Z) et soit k un entier (oujuste un réel). La fonction holomorphe f : H → C est une forme modulairede poids k pour Γ si

f (M(τ)) = (cτ + d)k f (τ), M =

(a bc d

)seulement lorsque M appartient à Γ, et lorsque la fonction τ 7→ f (S(τ))possède un développement de Fourier dans un sens convenable lorsque Sparourt un système de représentants des classes de SL2(Z) suivant Γ.

Dans ce sens étendu, les thêta caractéristiques deviennent elles-mêmesdes formes modulaires (de poids 1

2) sur des sous-groupes convenables deSL2(Z).

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Formes modulaires et fonctions thêta. Les thêta constantes

De même, la fonction θ0,0(τ)4 =

∑∞n=0 R4(n)eπinτ est une fonction

modulaire, de poids 2 cette fois.En utilisant les formes modulaires convenables, on peut montrer R4(n) ≥

1 quelque soit l’entier naturel n (et, en fait, donner une formule explicitepour R(n)). C’est le théorème des quatre carrés, qui affirme que tout entiernaturel est somme de quattre carrés d’entiers naturels.

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Formes modulaires et fonctions thêta. L’AGM : le dernier mot.

L’AGM : le dernier mot.On pose

κ(τ) =θ1,0(τ)

2

θ0,0(τ)2 , κ′(τ) =θ0,1(τ)

2

θ0,0(τ)2 .

Nous allons esquisser une méthode, proposée par Régis Dupont, quipermet de calculer pour certaines τ ∈ H les valeurs de κ(τ) et de κ′(τ) àl’aide de l’AGM et la méthode de Newton.

La formule θ0,1(τ)4 + θ1,0(τ)

4 = θ0,0(τ)4 entraîne alors que κ(τ)2 +

κ′(τ)2 = 1.En outre, on a M(κ′(τ)) = 1

θ0,0(τ)2 si =(τ) > log(2√

2 + 1)/π (voir lelemme de la fiche 285).

En appliquant le théorème de la fiche 290, on voit que

κ(−1τ

)= κ′(τ), κ′

(−1τ

)= κ(τ),

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Formes modulaires et fonctions thêta. L’AGM : le dernier mot.

On en tire que, si à la fois =(τ) > log(2√

2 + 1)/π et =(−1τ ) >

log(2√

2 + 1)/π :

M(κ(τ)) = M(κ′(−1τ )) =

1θ0,0(

−1τ )2

=i

τθ0,0(τ)2 =iτ

M(κ′(τ)).

Nous avons donc démontré le lemme suivant :

Lemme. Soit τ ∈ H tel que =(τ) > log(2√

2 + 1)/π et =(−1τ ) >

log(2√

2 + 1)/π. Alors

τ =iM(κ′(τ))

M(κ(τ)).

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Formes modulaires et fonctions thêta. L’AGM : le dernier mot.

Remarquons que, si τ est imaginaire pur, alors θ0,0(τ), θ0,1(τ) et θ1,0(τ)sont réels, et donc que κ(τ) et κ′(τ) sont réels et positifs. L’identité κ(τ)2+κ′(τ)2 = 1 montre alors que κ(τ), κ′(τ) ∈]0, 1[ et que κ(τ) =

√1− κ′(τ)2.

Par prolongement analytique, la relation κ(τ) =√

1− κ′(τ)2 est va-lable sur un domaine D ⊆ H contenant les nombres imaginaires purs.

Fixons τ ∈ D comme dans le lemme et considérons la fonction fτ (z) =iM(z)− τM(

√1− z2).

D’après le lemme, on a fτ (κ′(τ)) = 0.On aimerait donc calculer κ′(τ) comme racine de fτ à l’aide de la

méthode de Newton.Cela peut être justifié ; on trouvera une étude beaucoup plus détaillée

dans la thèse de Régis Dupont.

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Formes modulaires et fonctions thêta. L’AGM : le dernier mot.

Remarque. L’un des intérêts de savoir calculer rapidement κ(τ) et κ′(τ)est que cela permet de calculer rapidement j(τ).

En effet, on peut montrer que

j(τ) = 28 (λ(τ)2 − λ(τ) + 1)3

(λ(τ)(1− λ(τ)))2

et λ(τ) désigne soit κ(τ)2 soit κ′(τ)2.Ainsi, j(τ) peut être calculé, au moins pour certaines valeurs de τ , à

l’aide de l’AGM et la méthode de Newton, donc comme limite d’une suitequadratiquement convergente.

En fait, la méthode peut être adaptée pour calculer j(τ) quelque soitle choix de τ ∈ H, mais cela nécessiterait une discussion des domainesfondementaux de SL2(Z) et de ses sous-groupes, alors que nous sommesdéjà à la fiche 307 !

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Suites de Borchardt.

Suites de Borchardt.

Bien qu’il n’ait publié ses résultats qu’à partir de 1880, Borchardt aproposé dès 1858 une généralisation des suites AGM à certaines suites de2g nombres réels, g ≥ 1 étant un entier quelconque.

Ici, nous nous limiterons à une présentation brève du cas g = 2. Parcontre, nous travaillerons dans le cadre complexe.

Les démonstrations seront omises. On en trouve un bon nombre dansla thèse de Régis Dupont.

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Suites de Borchardt.

Définition. Soit (a, b, c, d) ∈ C4. Un itéré de Borchardt de (a, b, c, d)est un quadruple (A,B,C ,D) ∈ C4 tel que A = (a + b + c + d)/4, B =(αβ + γδ)/2, C = (αγ + βδ)/2, D = (αδ + βγ)/2. Ici, α, β, γ et δ sontdes choix de racine carrée de a, b, c, d (c’est-à-dire α2 = a, . . .).

On dit que (A,B,C ,D) est le bon itéré de Borchardt si |αi − αj | <|αi + αj | pour tout i , j , où α1, α2, α3, α4 = α, β, γ, δ. Dans tout autrecas, on parle d’un mauvais itéré de Borchardt.

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Suites de Borchardt. Propriétés de base.

Propriétés de base.

Si (α, β, γ, δ) est un choix de racines carrées de (a, b, c, d), alors(α, β, γ, δ) et (−α,−β,−γ,−δ) définissent le même itéré de Borchardt.En général, donc, un élément de C4 possède 8 itérés de Borchardt distincts.

Soit (a′, b′, c ′, d ′) une permutation de (a, b, c, d). Si (A,B,C ,D) est unitéré de Borchardt de (a, b, c, d), alors l’itéré de Borchardt de (a′, b′, c ′, d ′)obtenu en utilisant les mêmes choix de racines carrées est de la forme(A,B′,C ′,D′), (B′,C ′,D′) étant une permutation de (B,C ,D).

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Suites de Borchardt. Propriétés de base.

Définition. Soit (a, b, c, d) ∈ C4. La suite (an, bn, cn, dn)n∈N est appeléeune suite de Borchardt associée à (a, b, c, d) si (a0, b0, c0, d0) = (a, b, c, d)et si, pour tout n ∈ N, (an+1, bn+1, cn+1, dn+1) est un itéré de Borchardtde (an, bn, cn, dn).

On dit que la suite (an, bn, cn, dn)n∈N est une bonne suite de Bor-chardt associée à (a, b, c, d) si (an+1, bn+1, cn+1, dn+1) est le bon itéré de(an, bn, cn, dn) pour tout n à un nombre fini d’exceptions près. Dans le cascontraire, on dit que (an, bn, cn, dn)n∈N est une mauvaise suite de Borchardt.

On parle de la bonne suite de Borchardt associée à (a, b, c, d) si tousles itérés sont bons.

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Suites de Borchardt. Propriétés de base.

Théorème. Soit (an, bn, cn, dn)n∈N une suite de Borchardt associée auquadruple (a, b, c, d).

(i) Les suites (an)n∈N, (bn)n∈N, (cn)n∈N et (dn)n∈N convergent versune limite commune `.

(ii) La limite ` est invariante par permutation de a, b, c et d .(iii) Pour que ` 6= 0, il faut et il suffit que (an, bn, cn, dn)n∈N soit une

bonne suite de Borchardt.(iv) Une bonne suite de Borchardt converge quadratiquement.

La démonstration se calque sur celle des résultats analogues concernantl’AGM.

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Suites de Borchardt. Fonction thêta de Riemann

Fonction thêta de RiemannSoit g ≥ 1 un entier et soit Ω ⊆ Cg un réseau.Lorsque g > 1, il n’y a pas de généralisation satisfaisante de la théorie

de Weierstrass qui permettrait de construire des fonctions méromorphesΩ-périodiques sur Cg .

En général, lorsque g > 1, les seules fonctions Ω-périodiques sur Cg

sont des constantes.Par contre, la théorie des fonctions thêta se généralisent bien au cas

g > 1, ce qui permet de construire des fonctions fonctions méromorphesΩ-périodiques sur Cg lorsque Ω vérifient des conditions bien précises.

La fonction thêta de Riemann est la fonction définie Cg ×Hg par

θ(z ,T ) =∑n∈Zg

eπi tnTn+2πi tnz .

Ici, on identifie les éléments de Zg , Rg et Cg avec des matrices à unecolonne et g lignes.

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Suites de Borchardt. Fonction thêta de Riemann

En outre, Hg désigne l’espace des matrices carrées complexes d’ordreg , symétriques et à partie imaginaire définie positive.

Cela signifie qu’un élément T ∈ Hg s’écrit T = X + iY , où X et Ysont des matrices réelles symétriques, et Y est définie positive.

Ainsi, la forme quadratique u 7→ tuYu sur Rg est définie positive, cequi entraîne la convergence de la série.

En outre, la convergence est uniforme sur tout compact de Cg ×Hg ,ce qui implique que θ est une fonction holomorphe sur Cg ×Hg .

Plus généralement, si a ∈ Rg , b ∈ Rg , on définit la fonction thêta deRiemann avec caractéristiques

[ab]

par

θ

[ab

](z ,T ) =

∑n∈Zg

eπi t(n+a)T (n+a)+2πi t(n+a)(z+b).

Comme dans le cas g = 1, ces fonctions ne sont pas vraiement nou-velles :

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Suites de Borchardt. Fonction thêta de Riemann

Proposition. Soient a, b ∈ Rg . Alors

θ

[ab

](z ,T ) = eπi taTa+2πi ta(z+b)θ(z+Ta+b).

Proposition. Soient a, b ∈ Rg . Alors(i) θ

[ab](z + m,T ) = e2πi tmaθ

[ab](z ,T ) et

(ii) θ[a

b](z + Tm,T ) = e−πi tmTm−2πi tm(z+b)θ

[ab](z ,T ).

Les démonstrations se calquent sur le cas g = 1.Soit Ω le réseau de Cg engendré par les colonnes de la matrice identité

d’ordre g et les colonnes de T . La deuxième proposition montre qu’on puisseconstruire des fonctions méromorphes Ω-périodiques sur Cg en prenant desdérivées partielles des fonctions

z 7→∂

∂zkθ[a

b](z ,T )

θ[a

b](z ,T )

, (1 ≤ k ≤ g).

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Suites de Borchardt. Fonction thêta de Riemann

Nous sommes particulièrement interessés par le cas où les coefficientsde a et de b appartiennent à 0, 1

2, ce qui donne 22g fonctions différentes.La fonction θ

[ab]

sera alors notée θ2a,2b.

Lemme. Soient p, q ∈ 0, 1g . Alors

θp,q(−z ,T ) = (−1)tpqθp,q(z ,T ).

Ainsi, la fonction z 7→ θp,q(z ,T ) est paire ou impaire selon que (−1)tpq

vaut 1 ou −1.On dit que la caractéristique

[p/2q/2

](ou, par abus de langage, (p, q)) est

paire ou impaire selon que (−1)tpq vaut 1 ou −1.

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Suites de Borchardt. Thêta constantes et suites de Borchardt.

Thêta constantes et suites de Borchardt.Soient p, q ∈ 0, 1g . On pose θp,q(T ) = θp,q(0,T ). θp,q(T ) est la

thêta constante associée à (p, q).(Ainsi, θp,q ≡ 0 lorsque (−1)

tpq = −1.)

Théorème (formules de duplication). Pour tout p, q ∈ 0, 1g , on a

θp,q(2T ) =12g

∑r+s≡q (mod 2)

(−1)tprθ0,r (T )θ0,s(T ),

la somme portant sur les 2g couples (r , s) avec r , s ∈ 0, 1g qui vérifientr + s ≡ q (mod 2).

La démonstration est une adaptation de celle du cas g = 1. Au mini-mum, on vérifiera en exercice que l’énoncé se réduit à celui de la fiche 281lorsque g = 1.

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Suites de Borchardt. Thêta constantes et suites de Borchardt.

Nous nous limiterons désormais au cas g = 2. Il y a alors 16 caracté-ristiques au total, dont 10 sont paires et les 6 restantes sont impaires.

Fixons donc T ∈ H2 et prenons p =(0

0)

dans la formule de duplication.Posons donc θq = θ(0

0),q afin d’alléger la notation.

On trouve alors

θ(00)

(2T )2 =14

(θ(0

0)(T )2 + θ(1

0)(T )2 + θ(0

1)(T )2 + θ(1

1)(T )2

),

θ(01)

(2T )2 =12

(θ(0

0)(T )θ(0

1)(T ) + θ(1

0)(T )θ(1

1)(T )

),

θ(10)

(2T )2 =12

(θ(0

0)(T )θ(1

0)(T ) + θ(0

1)(T )θ(1

1)(T )

),

θ(11)

(2T )2 =12

(θ(0

0)(T )θ(1

1)(T ) + θ(1

0)(T )θ(0

1)(T )

).

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Suites de Borchardt. Thêta constantes et suites de Borchardt.

Ces formules montrent que

(an, bn, cn, dn) =(θ(0

0)(2nT )2, θ(0

1)(2nT )2, θ(1

0)(2nT )2, θ(1

1)(2nT )2)

est une suite de Borchardt qui, pour certains choix de T , se trouve être lameilleure suite de Borchardt.

Remarque. Lorsque g = 2, les fonctions thêta sont intimement liées àla théorie des courbes possédant une équation de la forme y2 = P(x), Pétant un polynôme de degré 5 ou 6 sans racine multiple.

Le groupe projectif opère sur l’ensemble des ces polynômes de façonanalogue à l’action que nous avons étudié sur l’ensemble des polynômes dedegré 3 ou 4 sans racine muliple. Les invariants de cette action peuvent êtreexprimés en terme des fonctions thêta et les suites de Borchardt peuventdonc servir au calcul de ses invariants.

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Une très courte bibliographie.

Une très courte bibliographie.

J. M. Borwein, P. B. Borwein. Pi and the AGM. John Wiley, 1987.E. T. Whittaker, G. N. Watson. A course in modern analysis. Cambridge

University Press, souvent réédité depuis 1927.

Régis Dupont. Moyenne arithmético-géométrique, suites de Borchardtet applications. Thèse soutenue en avril 2006, disponible à :http ://www.lix.polytechnique.fr/Labo/Regis.Dupont/ .

On trouvera de nombreuses autres références bibliographiques à la finde cette thèse.

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