La Justice par S. de Guaita

download La Justice par S. de Guaita

of 28

Transcript of La Justice par S. de Guaita

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    1/28

    La Justice (huit) = quilibre = Balance = Harmonie...L'quilibre et son Agent

    CHAPITRE I L'QUILIBRE ET SON AGENT1

    Par Stanislas de Guaita

    1 Extrait du Serpent de la Gense, Tome II par Stanislas de Guaita.

    1

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    2/28

    Ouvrez le Livre de Thoth au huitime feuillet2. Thmis qui, trnant entre deuxcolonnes, tient ferme en sa droite le glaive et les balances dans sa maingauche, vous rvlera l'arcane de l'universel quilibre.

    Les deux plateaux qui se font contrepoids symboliseront pour vous :

    1 Dans le monde divin, les nuptiales harmonies de la Sagesse et del'Intelligence3 ;

    2 Dans le monde psychique, l'union salutaire et fconde de la Misricorde etde la Justice ;

    3 Enfin, dans le monde hylique4 ou astral (substratum du monde matriel),ces deux plateaux seront pour vous l'emblme des deux Puissances mle etfemelle gnratrices du Cosmos, lui-mme androgyne ; c'est savoir d'Herebet d'Inah5, principes des deux forces centripte et centrifuge, qui semanifestent : la premire par le Temps, crateur et dvorateur des formestransitoires ; l'autre, par l'tendue thre. L'tendue est Rha, (pouse de cetimplacable Kronos, dont le rle est d'vertuer sans trve la substance plastiquequi est en elle, de l'laborer et de la condenser en d'phmres modes dematire diversement spcifie, vivante et protenne l'infini).

    Ce que de pareilles notions peuvent offrir d'trange et d'nigmatique l'esprit,sera tir au clair par la suite.

    Quant au glaive qui charge la main droite de Thmis, il symbolise la Puissanceet ses moyens d'action, tous les degrs et dans tous les Mondes. Pour nous

    en tenir au plan astral, qui nous occupe ici, ce glaive est celui du collectifKroubm, image de l'ther instrumental et potentiel, qui dtermine etmaintient l'quilibre cosmique.

    Ce mystrieux agent compte ses noms par centaines. C'est, au dire des

    2 Huitime clef du Tarot : la Justice.3 Le franais n'tant pas une langue sacre, la plupart des mots de cet idiome sont arbitrairement dvolus aux genres

    masculin ou fminin ; or le hasard et l'intuition vague ne peuvent toujours tomber juste. Il ne faut donc pas trops'tonner qu'il soit question des noces de la Sagesse et de l'Intelligence, et plus bas, de l'union fconde de laMisricorde et de la Justice. Ce sont l termes kabbalistiques. Or, dans la classification des ternaires sphirothiquespolariss, que nous visons en ce passage, Hochmah, , (la Sagesse) est marque du signe mle et positif, commeaussi Hesed (la Misricorde) ; et ce, par opposition Binah, (l'Intelligence) et Geburah (laRigueur, la Justice), qui sont marques du signe fminin et ngatif. (Voir n'importe quel trait de Kabbale).

    4 sotriquement, Hyl, ,veut pas dire matire brute, sens trs restreint qui lui est vulgairement dvolu. Hyl des philosophes grecs, et des rabbins initis, signifie : substance en fermentation, matire subtile en travail.(Consulter Fabre d'Olivet, La Lang. hbr. rest., II, 77 ; Drach : l'Harmonie entre l'glise et la Synagogue, I. 56 et l'Hist. du Manichisme de Beausobre, II, 268).

    5 Pour rester fidle la terminologie des Kabbalistes zoharites (en suspendant la balance sphirothique dans letroisime monde au clou de Ysod, ,comme nous l'avons fait dans les deux premiers aux clous de Kether et deThiphereth), il nous faudrait crire Hod, ,, et Netzach ,, au lieu d'Hereb ,, et d'Inah . Mais aux motssacrs de la Kabbale, nous prfrerons toujours, quand l'occasion se prsentera d'en faire usage, les hirogrammesoriginaux de Mose, d'une prcision sotrique bien suprieure. Ne mettons jamais en oubli ce fait, que le Zohar,livre fondamental et sacr de la Kabbalah, n'est (si sublime soit-il et rvlateur) qu'un humble commentaire du

    Pentateuque mosaque, et principalement de la Gense. Il est crit d'ailleurs en dialecte de Jrusalem, c'est--dire enhbreu dgnr.

    2

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    3/28

    Kabbalistes, le serpent fluidique d'Asiah. Les vieux platoniciens y voyaientl'me physique du monde, qui tient enclose la semence de tous les tres, et lesGnostiques Valentiniens le personnifiaient en Dmiurge, l'ouvrier inconscientdes mondes d'en bas . Au gr des hermtiques, c'est, suivant le point devue, la Quintessence des lments, l'Azoth des Sages (ou 3 fcond par ), ouencore le Feu Secret, vivant et philosophal. C'est, pour les magiciens,

    l'Intermdiaire des deux natures ; c'est le Mdiateur convertible, indiffrent auBien comme au Mal, et qu'une volont ferme peut plier l'un comme l'autre. C'est le diable enfin, si l'on veut ; c'est--dire la Force substantielle que lessorciers mettent en uvre pour leurs malfices.

    Puissance inconsciente par elle-mme, mais propre rflchir toutes lespenses ; Puissance impersonnelle, mais susceptible de revtir toutes lespersonnalits ; Puissance envahissante et dominatrice, que l'adepte peutnanmoins pntrer, contraindre et subjuguer, et ce, dans une mesure plusstupfiante encore que ne l'imaginait le populaire superstitieux au beau tempsdes Lancre et des Michaelis : c'est, en un mot, la lumire astrale, ou Mdiateurplastique universel.

    Ce chapitre fera connatre au Lecteur averti la nature dconcertante et lesmodes d'activit de cet agent effectif de l'quilibre de ce mysticum robur queles sclrats de la Gotie ont personnifi monstrueux leur propre image, avecles stigmates distinctifs de l'animalit, vers laquelle eux-mmes rgressent. Sibien que le pote Piron a pu, pour leur plus grande joie, crayonner, en huit versdrolatiques, le portrait du Diable d'enfer, sans le flatter, il est vrai ; maissans qu'il ait droit aussi de rcuser la ressemblance :

    Il a la peau d'un rt qui brle,Le front cornu,Le nez fait comme une virgule,Le pied crochu,Le fuseau dont filoit HerculeNoir et tordu,Et, pour comble de ridicule,La queue au cu.

    C'est un axiome, en Magie, que tout verbe cre ce qu'il affirme. Or donc, force d'voquer le discourtois personnage, les imbciles ou les coquins qui

    l'imaginaient sous cet aspect traditionnel, mais peu hiratique6, type fixdepuis des sicles par le consensus de leurs semblables, ont, petit petit,ralis leur rve en astral.

    Ajoutons que chaque fois qu'un nouveau gotien fait appel la hideuse Image,l'voquant avec toute l'nergie cratrice de la foi et le cri des mauvaisespassions leur paroxysme ; non seulement l'Image lui apparat, mais encore ilajoute l'esquisse fluidique un nouveau trait de vigueur et prcise l'existencedu monstre, en le nourrissant de sa propre substance hyperphysique.

    6 Tout au moins, d'un hiratisme singulirement dprav.

    3

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    4/28

    Ceci n'est point un paradoxe, comme on le pourrait croire ; c'est une vrit quisera mieux sentie plus loin, quand nous aurons fait connatre la naturequivoque, inqualifiable, de certains spectres sans consistance ontologique,sortes de compromis entre le nant qu'ils manifestent et l'tre qu'ilsblasphment. L'occultisme les nomme des Larves.

    Mais trve d'anticipations d'un pareil genre. Nous n'avons point affaire, pourl'heure, au Satan fantastique et burlesque, ambigu, malingre et falot, vainreflet imprim par les imaginations malades sur le miroir psychique de notreplante.

    Fi du simulacre blme qui se rtracte devant un souffle d'air, se dissout aumoindre effort de la volont humaine, et qu'un clair d'intelligence foudroie !Non, ce croquemitaine n'est qu'une Larve, entre combien d'autres7 ! Le dmonpositif et formidable nous rclame, celui-l qui sert d'enveloppe Nahsh et desubstratum la matire ; l'universel Atlas qui soutient les mondes en quilibre ;le dispensateur de la vie et de la mort physiques ; le Dmiurge aux mille noms,dont quelques-uns nous sont dj connus : c'est le Feu panthomorphe ; c'estl'me plastique et imaginative du monde ; c'est le dragon de l'astral.

    Le dragon de l'Astral est le symbole absolu de la lumire du mme nom,envisage dans son double mouvement cosmique et dans la synthse de sesoprations.

    Or, si nous avons laiss pressentir jusqu'ici la nature et le rle de ce grandagent, ce que nous en avons dit ne doit gure s'clairer d'un jour prcis etsatisfaisant qu'en faveur des fidles de nos prcdents ouvrages, ou des

    chercheurs dj sur la voie, ou des rudits en mysticisme.Pour entrer au cur du sujet, abordons d'emble la table d'meraude, cettepage rvlatrice que le monde antique nous a lgue. L'quilibre universelet son agent y sont magistralement dcrits.

    Ne dchiffre pas qui veut ce vieux texte des Mystres gyptiens. Trs propre drouter les profanes, son laconisme trange et premier ravit le chercheurstudieux des causes, en proposant sa persvrante sagacit plus de sensprofonds que de vocables. Il les dcouvre tour tour. Ainsi les successivesnigmes se dpouillent de leur dernier voile, comme les desses rivales de

    beaut, devant le royal pasteur du mont Ida.

    En interprtant dans son entier l'inscription de la table d'meraude, noustenons simplement parole. Mais ici, traduire ne suffirait point il importe decommenter. On trouvera, dans le texte mme, tels mots d'claircissement, intercals entre parenthses, comme il sied aux fins de prvenir touteconfusion. Puis, la suite du texte, quelques dveloppements plus tenduspermettront au Lecteur d'en mieux scruter l'sotrisme mdullaire.

    7 Une Larve, dans l'acception la plus large de ce mot. A proprement parler, le Diable est une Image astrale vitalise.

    4

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    5/28

    LA TABLE D'MERAUDEParoles des arcanes d'Herms8

    Il est vrai (en principe), il est certain (en thorie), il est rel (en fait, enapplication)9 : que ce qui est en bas (le monde physique et matriel) estcomme ce qui est en haut (analogue et proportionnel au monde spirituel et

    intelligible) et ce qui est en haut comme ce qui est en bas (rciprocitcomplmentaire) : pour l'accomplissement des merveilles de la chose unique(loi suprme en vertu de quoi se parfont les harmonies de la Cration,omniverselle10 en son unit).

    Et de mme que toutes choses se sont faites (accomplies, ralises) d'un seul(en vertu d'un seul principe), par la mdiation d'un seul (par le ministre d'unseul agent) : ainsi, toutes choses sont nes de cette mme unique chose, paradaptation (ou par une sorte de copulation)11.

    Le soleil (condensateur de l'irradiation positive ou de la Lumire au rouge ,ad, Od) est son pre (lment producteur actif de cet agent, [ce qui n'est vraiqu' notre point de vue terrestre]) ; la lune (miroir de la rverbration ngativeou de la Lumire au bleu , ab, Ob) est sa mre (lment producteur passif[mme remarque]) ; le vent (atmosphre thrique ambulatoire) l'a port dansson ventre (lui a servi ou lui sert de vhicule). La terre (envisage commetype des centres de condensation matrielle) est sa nourrice (l'athanor de sonlaboration).

    C'est l le pre (lment producteur) de l'universel telesme12 (perfection, butfinal atteindre) du monde entier (de l'univers vivant).

    Sa puissance (force d'extriorisation cratrice, le fleuve Phishn de Mose)est entire (parfaite, accomplie ; intgralement dploye, jusqu'au totalpanouissement) quand elle s'est mtamorphose (mot mot : quand elle

    8 Verba secretorum Hermetis. Verum sine mendacio, certum et verissimum quod est inferius est sicut quod est

    superius ; et quod est superius est sicut quod est inferius, ad perpetranda miracula rei unius.

    Et sicut omnes res fuerunt ab uno, mediatione unius, sic omnes res natae fuerunt ab hac una re, adaptatione.

    Pater ejus est Sol, mater ejus Luna ; portavit illud Ventus in ventre suo ; nutrix ejus Terra est.

    Pater omnis Telesmi totius mundi est hic.

    Vis ejus integra est, si versa fuerit in terram.

    Separabis terram ab igne, subtile a spisso, suaviter, cum magno ingenio.

    Ascendit a terra, in clum, iterumque descendit in terram, et recipit vim superiorum et inferiorum. Sic habebis gloriam totius mundi. Ideo fugiet a te omnis obscuritas.

    Hic est totius fortitudinis fortitudo fortis quia vincet omnem rem subtilem, omnemque solidam penetrabit.

    Sic mundus creatus est. Hinc erunt adaptationes mirabiles, quarum modus est hic.

    Itaque vocatus sum Herms Trismegistus, habens tres partes philosophiae totius mundi. Completum est quod dixi de operatione Solis.

    (Version latine de Khunrath).

    9 Textuellement : Il est vrai sans mensonge, certain et trs vritable . Cette triple affirmation correspondvidemment aux trois mondes de la magie.

    10 Nologisme assez heureux, nous semble-t-il, cr par un mystique de nos jours, Louis Michel de Figannires.11 Per conjunctionem , variante de la version Glauber (Miraculum Mundi, de Mercurio philosophorum, Amstel.,

    653, in-8, p. 7).

    12 Autre version Thlma, ,volont. Cette version admise, faudrait restreindre l'acception symbolique du mot pre au sens d'lment de manifestation.

    5

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    6/28

    s'est tourne)13 en terre ( Aretz de Mose, substance condense et spcifie; forme ultime de l'extriorisation cratrice, matire sensible).

    Tu spareras la terre (ici, dans un sens plus gnral, la terre signifie ce quiappartient au monde matriel et tangible, au monde des effigies) du feu(Principe d'action ; ce qui appartient aux mondes moral et intelligible) ; Le

    subtil de l'pais (sens analogue)14

    avec dlicatesse et une extrme prudence.

    Il (le fluide pur, universel, mdiateur, et d'aprs tels gnostiques Corps duSaint-esprit) monte de la terre au ciel (courant hmicyclique de retour15,ascendant ; reflux de Synthse) et derechef (par un mouvement la foisalternatif et simultan), il descend du ciel en terre (courant hmicycliqued'mission, descendant ; influx d'analyse), et il reoit (il se charge, ils'imprgne tour tour de) la force (les vertus, les proprits, les influences)des choses d'en haut et d'en bas (des mondes physique ou matriel ethyperphysique, ou astral ; et encore, un autre point de vue, des sphressensible et intelligible).

    Ainsi (c'est par ces principes que) tu auras (tu acquerras, tu t'approprieras) lagloire (la souverainet, l'empire) de l'univers entier ; par la, toute obscurit(toute impuissance, toute indcision, toute erreur. L'hirogramme mosaque Hoshek exprime sotriquement toutes les ides ngatives, symbolisespar le cne d'ombre de la terre) s'enfuira de toi.

    L rside la force forte de toute force (le principe mutuel d'activit ; le potentielde toute manifestation, le support de toute action, la base immanente de toutordre phnomnal) qui vaincra (s'emparera de, coagulera, fixera) toute chose

    subtile (volatile, fuyante, insaisissable, fluidique) et pntrera (s'immisceradans, dcomposera, dissoudra) toute chose solide (cohsive, dense etpermanente, concrte).

    Ainsi (par cet agent, ou encore, par cette voie), l'univers a t cr (rduitde principe en essence, d'essence en puissance sementielle, de puissance enacte ; en un mot, ralis).

    De l proviendront (l trouveront leur origine, leur principe) des adaptations(des applications, ou des productions) merveilleuses, dont le mode (la manired'tre, le type de formation) est ici (indiqu, rvl, expos).

    C'est pourquoi je fus appel Herms (Mercure, mythe complexe ; au casprsent, emblme de la Mathse, science intgrale vivante, dont le caduce deMercure symbolise le double courant : intuitif-synthtique et analytique-exprimental) Le Trismgiste (trois fois trs grand ou le plus grand), possdant

    13 Si versa fuerit (version Khunrath) Si mutetur (version R. Glauber).

    14 C'est--dire, envisags du mme point de vue, comme antithse du spirituel au sensible. Mais nous ne pensons pasque ces mots, subtile a spisso, forment plonasme avec le membre de phrase prcdent ; on pourrait prciser nombrede significations diffrentes, toutes rigoureusement exactes. A l'gard des oprations du grand uvre, par exemple,le subtil et l'pais signifieront le volatil et le fixe. Cette table d'meraude recle plus de sens que de mots.

    15 Herms parle du retour, avant de parler de l'mission ; par l il veut faire entendre qu'il s'agit d'un double mouvementincessant.

    6

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    7/28

    (pour avoir acquis) les trois parties de la philosophie (la totale connaissancedes trois mondes divin ou intelligible, psychique ou passionnel, naturel ousensible)16 de l'univers tout entier.

    Ce que j'ai dit (mon enseignement, mon verbe) est complet (consomm,intgralement profr) sur le magistre17 (ou l'opration, le Grand uvre) du

    soleil (mille significations : le Magistre du Soleil peut dsigner tout travailconduit sa perfection ; l'on peut y voir la Gense intellectuelle ; la source et lerle des courants fluidiques universels ; l'volution de l'ar androgyne ouLumire engendreuse ; enfin le Magistre des alchimistes, proprement parler,dont le secret, disent-ils, se trouve dcouvert dans ce texte de la tablesmaragdine).

    Nous ne chicanerons point sur l'authenticit, l'attribution et la date de l'un desmonuments les plus magistralement initiatiques que nous ait transmisl'antiquit grco-gyptienne.

    Les uns s'obstinent n'y voir que l'uvre amphigourique d'un rveuralexandrin, d'autres taxent mme ce document d'apocryphe du Ve sicle.Quelques-uns le veulent de quatre mille ans plus ancien

    Que nous importe ? Dcouverte ou non par Alexandre le Grand dans laspulture d'Herms, grave ou non sur une tablette d'meraude, il est certainque cette page rsume les traditions de l'antique gypte. Or l'gypte a t, denombreux sicles durant, la dernire citadelle de l'sotrisme intgral : sessphinx ont t les gardiens du trsor lgu aux temps futurs par plusieurscycles de civilisations, tellement lointaines et refoules dans la nuit

    prhistorique des temps, que ces foyers aveuglants de lumire intellectuelle nedgagent plus une lueur qui les dnonce nos archologues.

    Les quelques mots explicatifs d'analyse, intercals dans notre version, exigentun commentaire gnral et synthtique. Nous pourrions dire que cecommentaire doit s'tendre tout le prsent volume, puisque la Tabled'meraude va servir de point de dpart nos dveloppements sur lesmerveilles de l'Astral.

    Mais nous tcherons d'tre, ds l'abord, aussi explicite qu'il se pourra.

    L'initiateur, quel qu'il soit, il mrite bien ce nom, promulgue en premierlieu la grande loi d'analogie hermtique : elle domine sur tous les mondes, etmet l'intelligence arme du compas de la logique mme de formuler desinductions, en procdant du connu l'inconnu, du sensible l'intelligible et duparticulier l'universel.

    Nous offrir ce fil d'Ariane, voil le premier souci de l'Herms hirographe.

    Puis il passe la description du Lien qui rattache ces extrmes ; du grandMdiateur des tres et des choses, ce Pre de l'universel tlesme, dont il est

    16 Le monde astral peut tre rattach, soit au monde psychique, soit au monde sensible.17 de magisterio Solis (version Glauber).

    7

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    8/28

    question jusqu'au bout. Voici l'agent essentiel de l'art royal, et le Trismgisteprend soin de nous prvenir qu'en dcrivant sa nature, il nous fournit la clefmystique du Grand uvre et nous enseigne le magistre du Soleil.

    Le Grand uvre se peut concevoir divers points de vue ; il se peut ralisersur divers plans. Mais il reste toujours la Chrysope, ou l'art de tirer le pur de

    l'impur et l'or des viles scories.

    L'Alchimiste cherche l'or mtallique ou terrestre.

    L'Adepte de la Matrise vitale cherche la Mdecin universelle, ou l'orphysiologique.

    Le Magicien cherche l'or thaumaturgique ou la Puissance.

    Le Mystique cherche l'or moral ou la Saintet.

    Le Thosophe enfin cherche l'or spirituel, l'identification de l'intelligencehumaine et de l'essence divine : en un mot, il cherche la Vrit absolue, laScience.

    Tous veulent acqurir la Lumire sous ses diffrents aspects. Car l'or physiquen'est, au dire des Spagyristes que lumire condense ; la mdecineuniverselle rside en une quintessence vitale de l'or ; la puissance magiquereste acquise qui saura diriger la Lumire astrale ou l'or hyperphysique ; lacommunion des saints reoit dans son giron quiconque a transmu sasubstance animique en or moral ; et la Vrit-lumire des thosophes n'est

    autre que l'or spirituel et divin.Mais nous traiterons principalement ici de l'or hyperphysique : c'est lui quel'auteur de la table d'meraude dsigne comme engendrant le Tlesme (ou laperfection des choses corporelles). Il est d'ailleurs le moyen terme de tous lesautres ors.

    Un dans son principe, androgyne (c'est--dire double et triple) dans sa nature,quadruple dans ses modalits manifestatives (les quatre lments occultes), cet tre proten se rvle multiple l'infini dans ses ultimes ralisations. Car ilconstitue la substance cosmique non diffrencie, dont la matire polymorphe

    prsente nos sens les spcifications phmres.

    C'est lui l'universel Mdiateur ; l'ther instrumental, convertible, omnilatent ; leServiteur de toutes les Puissances, bonnes ou mauvaises ; la Splendeurquivoque des Cieux, apte revtir alternativement dune apparence plastiqueet draper dans son manteau d'toffe sidrale le dragon Nahash ou l'ineffableroach Hakkadsch18.

    18 Peut-tre sera-t-on surpris de nous voir recourir de prfrence au vocabulaire hbreu, en des commentaires qu'amotivs un monument d'origine gyptienne. Nous permettra-t-on de rappeler que la langue hbraque pure, telle quel'a mise en uvre l'auteur du Berschith, n'est autre prcisment que l'idiome le plus occulte des sanctuaires de

    Mitzram ? C'est ce que Fabre d'Olivet a victorieusement tabli. Mose, prtre d'Osiris, a trac son livre desCinquante Chapitres en hirogrammes (du troisime degr), intelligibles seulement, dans leur sotrisme, aux

    8

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    9/28

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    10/28

    reflux de cette vivante essence que nous avons nomme, l'instar de Mose,Nephesch-ha-chaah, le souffle de vie.

    Pour motiver ce flux et ce reflux de l'me vivante, il suffit de la peindre tiraille,pour ainsi dire, entre deux aimants : en haut, roach elohm, souffle vivificateurde la substance collective, homogne, dnale ; en bas, Nahsh, agent

    suscitateur des existences individuelles, particulires, matrialises. C'est leprincipe de la divisibilit en face du principe de l'intgration ; c'est lemorcellement des Moi naissants ou natre, qui s'oppose l'unit du Soiternel.

    De cette opposition rsulte un double dynamisme de forces hostiles, qu'ilconvient d'tudier l'une et l'autre dans leur nature propre et dans la loi de leurmutuel mcanisme. Puis, revenant Nahsh (le dragon de l'Astral), noussurprendrons plus aisment le mystre du fluide lumineux de mme nom, avecle contraste de ses courants opposs et son point central d'quilibre.

    La lumire astrale est, somme toute, la substance universelle anime, mue endeux sens inverses et complmentaires, par l'effet d'une polarit double, duple intgration au ple dissolution, et vice versa.

    Elle subit en effet deux actions contraires : la puissance d'expansion fconde,la lumineuse Inah, effective des gnrations et dispensatrice de la vie, d'unepart ; et de l'autre, la puissance de constriction destructive des formes, letnbreux Hereb, agent principal de la mort, et par l de la rintgration

    (retour des individus la collectivit ; de la matire diffrencie et transitoire,

    10

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    11/28

    la substance une, permanente et non diffrencie)19.

    Ces deux hirogrammes, Hereb et Inah, que nous empruntons Mose,reviennent plusieurs fois dans le texte hbreu de la Gense, et notammentau VIIIe chapitre, qui traite du dluge (v. 6 2).

    Tous les traducteurs officiels rendent Hereb et Inah par corbeau et colombe :sens que ces deux vocables peuvent en effet revtir, dans l'acception la pluscirconscrite et matrialise dont ils soient susceptibles.Nous rsumerons pour mmoire le rcit qu'on prte Mose.Le dluge a fait son uvre, et les eaux se desschant petit petit, le sommetdes montagnes commence paratre. No laisse quarante jours s'couler, puisil ouvre la fentre de l'arche, et donne l'essor un corbeau (Hereb), quis'envole pour ne plus revenir20. Sept jours aprs, No met en libert unecolombe (Inah) ; mais celle-ci revient, n'ayant point trouv o prendre pied21,et No la rintgre dans l'arche. Une semaine s'coule encore ; il lche nouveau la colombe qui lui revient le soir du mme jour, mais portant en sonbec un rameau d'olivier Enfin, aprs sept nouveaux jours d'attente, Nol'ayant laisse partir pour la troisime fois, la colombe ne reparat plus.

    Telle est, du moins en substance, la version communment accrdite.Mais il suffit de recourir la traduction littrale de Fabre d'Olivet, soutenue denotes tymologiques dcisives, pour entrevoir, sous les purils emblmes de laVulgate et des autres versions reues, toute la porte sotrique et grandiose

    d'un texte aussi pitoyablement travesti. Sans entreprendre un commentairegnral qui serait un hors-d'uvre en ce chapitre, et d'ailleurs ncessiterait lui seul un chapitre de dveloppements, prcisons, avec le prcieux appui durestaurateur de la langue hbraque, le vrai sens attribuable aux deuxhirogrammes en litige. Il est bien vrai, dit Fabre d'Olivet, que le mot hbreu Inah signifie unecolombe ; mais c'est de la mme manire que le mot Hereb signifie uncorbeau : c'est--dire que les noms de ces deux oiseaux leur ont t donns,dans un sens restreint, par une suite des analogies morales et physiques qu'ona cru remarquer dans la signification primitive attache aux mots Inah et

    Hereb, et les qualits apparentes du corbeau et de la colombe. La noirceur del'erbe, sa tristesse, l'avidit avec laquelle on croyait qu'il dvorait les tres quitombaient dans son sein, pouvaient-elles tre mieux caractrises que par unoiseau tnbreux et vorace tel que le corbeau ? La blancheur de la colombe,au contraire, sa douceur, son inclination l'amour ne semblaient-elles pasinviter la choisir pour tre l'emblme de la facult gnratrice, de la force

    19 La force d'expansion, en agissant sur l'ar, engendre le courant de la lumire positive, ad ; et la force deconstriction, celui de la lumire ngative, ab.

    20 Les Septante traduisent ainsi ; mais S. Jrme est plus exact : le corbeau, dit-il, sortait et rentrait alternativement(egrediebatur et revertebatur).

    21 Mme au sommet des montagnes, qui mergeaient dj 7 jours auparavant ? Telle est la logique du sens admis desthologiens.

    11

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    12/28

    plastique de la Nature ? La colombe fut le symbole de Smiramis, de Derceto,de Mylitta, d'Aphrodite, de Vnus, de tous les personnages allgoriquesauxquels les anciens attribuaient la facult gnratrice reprsente par cetoiseau

    Il est vident que le nom de l'Ionie, le nom de cette contre fameuse, que

    l'Asie et l'Europe rclament galement, dcoule de la mme source que le motqui nous occupe22

    On le voit, l'antithse est rigoureuse entre Hereb et Inah. Celle-ci dsigne eneffet la facult d'expansion, gnratrice des tres corporels ; celui-l exprime laforce de compression destructive, qui pousse tout ce qui vit vers la dcrpitudeet la mort, puis dissout et engloutit la dpouille de ce qui a vcu23. Herebexprime aussi le champ d'action o domine par l'univers cette force corrosive.

    C'est plus particulirement dans cette dernire acception que l'ont connu lesGrecs, hritiers de la Cosmogonie d'Orphe. Ce thocrate, contemporain deMose, avait puis aux mmes sanctuaires que lui la notion de son erbe, legouffre d'Hcate ou de la Lune infernale, le champ de Proserpine, le sjour desombres, enfin

    L'Hereb mosaque, que l'on pourrait rattacher Kan (principe du Temps),pactise en tous lieux avec l'obscurit, Hosheck ; l'Inah, qui dploie sonnergie dans le royaume d'abel (principe de l'Espace thr), montre partoutl'affinit la plus intime avec l'lment lumineux, ar.

    L'une est la colombe de la lumire et de la vie ; l'autre, le corbeau des tnbres

    22 Langue hbr. rest., tome II, pages 23-232, passim.23 Cette antinomie des deux Agents prterait une foule de parallles fort tranges, et d'intrt majeur pour ceux dont

    l'il s'exerce sonder certains mystrieux abmes de la Nature et de la Vie. Ainsi, nous pouvons ddier auxtymologistes le contraste que voici d'une part, la racine sur laquelle s'lve l'Inah mosaque (cette facultgnratrice dont la colombe est l'emblme), la racine in se retrouve intacte aux Indes dans le vocable Yni, parquoi les Brahmes dsignent l'organe sexuel de la femme ; d'autre part, la racine constitutive d'Hereb se retrouve peine altre dans Herwah, (au pluriel Herwath, ), le mot dont se sert Mose (Bershith, ix, 22) pour dsignercet objet de scandale, que No, dans son ivresse, avait laiss dcouvert, la joie sacrilge de Cham, et que saintJrme qualifie sans ambages de verenda nudata .Remarquons encore que les Smites, arabes et hbreux, Harbi, ,, et Hebri , ces pres adorateurs duDieu mle, unique, portent un nom notoirement form d'Hereb, (le nom du Maroc, Maghreb, en drive aussi) ; tandis qu'Inah semble avoir nomm cette molle Ionie, le type des contres o l'on adorait la Nature fminine etplastique, sous ses innombrables et blouissantes incarnations.Les curieux se demanderont enfin, par quel chass-crois d'influences, le mle Hereb gouverne le courant de lalumire ngative et slnique 2, ab ; cependant que la fminine Inah domine sur le courant de la lumirepositive et solaire 1, Ad, .Observons cet gard, que la plupart de ces attributions sont, non point arbitraires, mais relatives. Absolumentparlant, il n'y a qu'un Principe mle, qui est Dieu ; qu'un Principe fminin, qui est la Nature. Dans le mondesubjectif, il n'y a qu'un Principe mle, qui est l'Esprit universel, et qu'un Principe fminin, qui est l'me vivante dansle monde objectif, enfin, qu'un Principe mle, qui est la Force, et qu'un Principe fminin, qui est la Matire. Mais,sur ces divers plans, il est loisible de qualifier de masculines ou de fminines, les diverses modifications, facults,nergies, etc., qui ressortissent l'un ou l'autre de ces Principes ; ainsi avons-nous qualifi Inah de fminine,parce qu'elle appartient plutt la Nature et la substance plastique ; et Hereb de masculin, parce qu'il constitue uneForce, et que, par son office de compacter la substance, il devient en quelque sorte le vhicule de la Forme, laquelle

    relve de l'Esprit. Qu'il nous suffise d'avoir attir l'attention sur ces singularits occultes, dont la raison d'tre, si elletait connue, pourrait conduire assez loin

    12

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    13/28

    et de la mort24.

    La douce colombe fait l'amour et bat des ailes partout o s'irradie la clartsidrale travers l'espace ; mais o l'obscurit domine, c'est le fief de l'precorbeau carnassier.

    Disons, pour prciser le point de vue spcial notre plante, que le soleil dardel'influence d'Inah sur l'hmisphre qu'il baigne de ses rayons, et quel'influence d'Hereb, lie aux phases de croissance et de dclin lunaires, selocalise dans le cne d'ombre que la terre trane sa suite, en gravitant par lescieux.

    Nous reviendrons en dtail sur cette organisation physique et hyperphysiquedu systme plantaire, laquelle sont subordonns le voyage cosmique desmes et toute la biologie de notre monde, non moins que l'existence positive etla localisation strictement dterminable (les sjours d'preuve et de flicitposthumes, connus ou souponns sous les noms de paradis, de purgatoire etd'enfer (voy. La Mort et ses arcanes).

    Ainsi, la substance universelle est rceptive d'une influence gmine : Inah larend fertile, plastique et configurative ; Hereb lui communique une forcecompressive et dvorante.D'o, deux proprits contraires dans la lumire astrale : l'une qui tend volatiliser le fixe, l'autre qui tend fixer le volatil.Dissoudre ici, pour concrter l25 L'lectricit nous offre, dans ses adaptations

    l'art galvanoplastique, une image sensible de cette double proprit : tandisque le mtal se corrode, au ple positif de l'appareil, les particules qui s'endtachent vont, charries par le courant, s'accumuler, se rpartir et se fixer la surface du moule ou de l'objet quelconque suspendu l'lectrode ngative.Cependant, par un mystre admirable qui contribue confirmer la grande loide l'harmonie par l'antagonisme des contraires26, la lutte mme des deuxprincipes devient fconde. Tous deux concourent, nous l'allons voir, en dpit deleur hostilit apparente, la gnration, la croissance, la succession desformes corporelles.

    Hereb, agent centripte, se manifeste, avons-nous dit, au cours du temps, etInah, agent centrifuge, se dploie travers l'espace. Or le temps et l'espacene sont-ils pas les conditions essentielles de toute existence physique ?

    24 Le mme symbolisme prside la terminologie des philosophes hermtiques. Ils nomment tte de corbeau la stasede dissolution, quand la matire, rduite en noir, semble toute dcompose et perdue (c'est le Nigrum nigro nigrius) ; et colombes de diane, la stase de rgnration de ladite matire, l'ablution du fixe par les larmes du volatil, quandla couleur blanche va paratre. Les colombes annoncent et prparent le rgime de Diane : alors nat la terre blanchefeuille (ou germe la semence de l'Or vif ).

    25 Solve, Coagula C'est l'Inscription double qui se lit sur les deux bras du Grand Androgyne d'Henry Khunrath,

    magnifique pentacle que nous avons reproduit et comment, au Seuil du Mystre.26 Voir liphas Lvi, qui nonce et dmontre cette loi (dogme et rituel, passim).

    13

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    14/28

    Ces deux actions, dit Fabre d'Olivet, selon la forme desquelles tout existedans la nature, issues de la mme source, sont ennemies ds leur naissance.Elles agissent incessamment l'une sur l'autre, et cherchent se dominerrciproquement, et se rduire leur propre nature. L'action compressive, plusnergique que l'action expansive, la domine toujours dans l'origine, etl'accablant pour ainsi dire, compacte la substance universelle sur laquelle elle

    agit, et donne l'existence aux formes matrielles qui n'taient pasauparavant27.

    Ce qui est vrai pour la condensation des nbuleuses, l'est aussi pour touteformation corporelle.

    La force crcitive, subjuguant sa complmentaire, condense la substanceoriginelle, selon tel type gnrique, dans la sphre d'action de tel rgne.Si nous examinons les rgnes vgtal et animal (o les individus, mieux dfinis,naissent, croissent, dclinent et meurent en des conditions cycliques plusaccessibles notre observation si borne), la victoire premire de la forcecompressive se manifestera vidente dans l'exemple de la semence, qui tientprisonnire en un si petit espace, et, pour ainsi dire, haute tension, lapotentialit d'un tre ; lequel, sous l'empire de la force inverse, va passer enacte, s'organiser, grandir, etc. A l'action succde en effet la raction : c'est letour de l'agent expansif, qui suscite l'tre son plein dveloppement, pousse la croissance du dedans au dehors, et favorise ainsi la btisse progressive d'uncorps matriel, qui s'difiera sur le patron du corps astral, et selon l'estampilleindividuelle imprime celui-ci par la facult plastique, efficiente de l'tre envoie d'incarnation.

    Cependant, la force compressive, centripte, s'exerce toujours du dehors audedans aprs avoir particip la cration de l'tre matriel28, en compactant lasubstance thre, il faut maintenant que cette mme Force accable sonouvrage, et agisse sur lui l'instar d'un ferment dissolutif. Le dynamismeconvergent d'Hereb n'a pas vari ; mais il produit des effets inverses, selonqu'il opre sur la substance non encore condense, ou sur la matire physique: dans le premier cas, l'action est cratrice ; elle est plus ou moinspromptement destructive dans le second cas.Rien n'est plus mystrieux, quand on y songe, que cette proprit inhrente au

    Temps, de tout modifier, altrer et dissoudre, d'une sorte lente, parfoisinsensible, mais inluctable et sans remde. Pourquoi cette fatale dcadencedes choses, cette usure progressive des formes matrielles ? Pourquoi(prcurseur d'une totale dissolution), ce dclin qu'inflige le vieux Saturne tous les tres qui peuplent l'tendue ? Enfin, pourquoi la vieillesse et la Mort,inversement complmentaires de la Naissance et de la Jeunesse ? C'est larplique d'Hereb au verbe universel d'Inah.

    Que la substance expansive, vivante, soit lie au principe de l'Espace, l'esprithumain le conoit sans peine ; mais il se persuade moins aisment de l'affinit

    27 Can, Lettre Lord Byron, page 3.28 Et, par consquent, collabor avec Inah.

    14

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    15/28

    secrte qui rattache au principe du Temps, l'insaisissable facteur de ladcrpitude et de la mort.

    Le Temps lui-mme est fort difficile saisir dans sa nature, comme reprsenter par une image sensible : comment pourrait-il affecter nosorganes corporels, puisque pass, il n'est plus ; que futur, il n'est pas ; que

    prsent, il est renferm dans un instant indivisible ? Le Temps est une nigmeindchiffrable pour quiconque se renferme dans le cercle des sensations, etcependant les sensations seules lui donnent une existence relative. Si ellesn'existaient pas, que serait-il ? Ce qu'il est : une mesure de la vie. Changezla vie, et vous changerez le Temps.

    Donnez un autre mouvement la matire et vous aurez un autre Espace29.

    Ainsi donc, comme Fabre d'Olivet le donne entendre avec sa profondeuraccoutume, le Temps procde de la Vie en fermentation, comme l'Espace, dela Matire en travail. Traduisons en hirogrammes mosaques : Kans'apparie Nephesh-ha-Chaah, comme Abel Hetz30, .

    On peut voir, dans le principe du Temps, la rgle de succession cosmique desformes phmres, o viennent s'laborer les mes en voie de rdemption, ou d'volution, car c'est tout un.

    Plus la vitalit des tres s'affirme intense, plus il semble que le Temps ait deprise sur elle, pour la tarir, en altrant, puis en ruinant les organismes quiconstituent les foyers de son laboration. L'action corrosive du Temps, trslente sur les minraux, dont l'me de vie est peine veille, se fait sentir

    davantage sur les exemplaires vgtaux ; cette action, plus intense encore surla moyenne des tres du rgne animal, devient foudroyante pour tels d'entreeux.

    Et cependant, les mes de vie distribues tous les tres n'en sont pas moinsles lments de conservation temporaire des organismes o elles s'incarnent.

    Il semble que ce soit l une contradiction, mais elle n'existe que dans lestermes.Nous savons qu'en tout tre organis, il y a plusieurs vies : depuis la vie

    universelle, quoi l'individu se rattache par l'intermdiaire de l'Espce, jusqu'la vie (rfracte) des cellules constitutives de son corps31. Ces extrmes, quitouchent l'absolu de l'unit d'une part, l'infini de la divisibilit de l'autre,n'appartiennent point en propre l'individu : dans l'intervalle se placelogiquement sa vie personnelle, synthtique par rapport aux vitalitscellulaires, mais subdivisionnelle par rapport la vie collective des tres. Cettevie moyenne, la sienne propre, la vie de son me est triple et quadruple,comme cette Psych mme.

    29 Fabre d'Olivet, Langue hbr. restit., tome I, pages -5.

    30 ,Identique au Hioul , rabbinique, et l'Hyl des Grecs.31 Et jusqu' la vie chimique des atomes dont les cellules sont formes.

    15

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    16/28

    Supposons-la intgralement dveloppe, chez l'homme parfait, par exemple ;elle se manifestera sous trois modifications : intellectuelle, passionnelle,instinctive. La vie passionnelle mdiane d'un individu constitue en effet le foyercentral de son existence proprement dite. Par sa vie intellectuelle suprieure,cet individu confine la vie collective de l'espce ; par sa vie instinctive,infrieure (vie du corps astral), il matrise les vitalits subdivises des cellules

    de son corps physique. Une quatrime vie, qui a sa racine dans le foyer centralde l'me, la vie volitive, englobe enfin les trois modifications susdites, pour lesramener l'unit.D'ailleurs, la vitalit cellulaire n'est point elle-mme le dernier terme de lasubdivision, pas plus que la vie collective de l'espce ne constitue le dernierterme de l'intgration : cette vie collective aboutit la vie universelle, intgrale; et pareillement, au-dessous de la vitalit des cellules, se place la vieatomique, dont tmoignent les affinits chimiques des atomes.

    Cela pos, l'apparente contradiction ci-dessus se rsout d'elle-mme. Nousavons dit que rgle gnrale le Temps exerce ses ravages en raisondirecte de l'activit vitale des tres, et qu'on doit nonobstant considrer lesmes de vie, comme les palladia d'phmre conservation des corps. Maisnous dsignons alors par me de vie la Psych elle-mme, la substance proprede l'tre individuel ; et par vitalit, la synthse de ces nergies biologiquesrfractes, qui sont comme les mes des cellules.

    H bien, la force hrbique du Temps fomente la vie chimique des atomes, et ce, en tendant relcher, puis dissoudre le lien sympathique qui tientgroupes, suivant une loi de hirarchie unitaire, les vitalits innombrables et

    infimes des cellules constitutives de l'organisme.Le lien sympathique mentionn n'est autre que le Corps astral. Sa ruptureoccasionne la libration de la Psych, autrement dit la Mort, dont la primeconsquence est l'anarchie dchane parmi les vitalits molculaires. Mais cesvitalits de cellules, n'tant que le produit d'une rfraction de la vie gnraleindividuelle, ne tardent gure s'teindre, l'instar de cette dernire : rien nematrise plus, ds lors, ce que nous avons appel la vie chimique des atomes ;bref, le jeu des affinits, (qu'asservissait ou, pour mieux dire, que rglaitnagure le principe agrgatif des vies), s'exerce enfin sans nulle contrainte :d'o la dcomposition organique, que certaines Larves32 fluidiques viennent

    activer encore, en y dveloppant des ferments spciaux de putrfaction

    Toutes ces ruines se rfrent au mystrieux ab, ; , de la primitive Kabbaleelles jonchent le domaine de la lumire ngative, laquelle reoit son impulsiond'Hereb, le principe universel constrictif (l'astringence de Jacob Bhme). Aussiles adeptes de certaine cole dsignaient-ils Hereb sous cette mystiquednomination : c'est le bras de Mouth (le bras de la mort) ; c'est l'agent duretour l'unit.Quant la lumire positive, Ad, nous l'avons vue gouverne par le principe

    32 Le mot Larve s'emploie souvent en magie comme synonyme de Lmure, c'est--dire dans un sens plus large quecelui de notre dfinition. C'est ici le cas. Cf. la Mort et ses arcanes.

    16

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    17/28

    expansif de l'universelle vivification, Inah (l'amertume de J. Bhme).

    Enfin, ces actions opposes se balancent et se temprent l'une par l'autre,dans les effluves de la lumire astrale quilibre, ar, .

    L'ar gnre intarissablement les formes matrielles, qui naissent, prennent

    leur dveloppement, puis dclinent, passent et se succdent, grce auconcours des deux Puissances hostiles, dont l'ternel conflit a la fcondit d'unembrassement d'amour.

    Cette mutualit (cratrice et destructive tout ensemble) apparat rgle parl'empire qu'exerce sur l'Ar certain agent occulte, Nahsh, qui est le principemme de la divisibilit indfinie et de l'gosme outrance : attributions quisemblent s'exclure, et s'unifient nanmoins en lui. Cet agent n'est pas moinsque le Diable, au sentiment de plusieurs mystiques.

    En tout tre qui s'incarne ici-bas, il fomente un Moi terrestre, infrieur,passager, exclusif et ambitieux de s'tendre aux dpens d'autrui. Pareillement,il dote d'une tendance froce l'autonomie (nous allions dire qu'il revt d'unsimulacre de Moi) chacune des cellules constitutives de tout corps organis,chacun des atomes groups pour former ces cellules. D'o, un rsultat quenous avons signal plus haut : tant que le corps astral, ou frein agrgatif desvies, dploie la puissance de matriser toutes ces vitalits fragmentaires, nonseulement elles restent soumises ; bien plus, elles concourentharmonieusement l'existence commune. Mais que ce frein vienne faiblir, etl'anarchie se dclare parmi ces infimes vitalits : la mort s'ensuit, et ladcomposition commence. En un mot, l'Agent qui nous occupe multiplie sous

    toutes les formes et attise chez tous les tres le sauvage instinct du strugglefor life Si le dmon n'est pas un mythe, en vrit, voil bien son signalement. Cre encor pour dtruire, et dtruis pour crer, clame vers Dieu le Luciferde Lord Byron. Lucifer se trompe d'adresse. Ce n'est point Dieu, c'est lui-mmequ'il devrait interpeller ainsi, lui-mme, aveugle Dmiurge du mondeinfrieur, despote de l'Astral, implacable de fatidique inconscience, et dontl'instinct seul vivace s'agite et se multiplie, indiffrent au mal comme au bien.

    Fauteur de toute division, n'est-il point cet Antchrist virtuel, que le Fils del'homme est venu combattre et terrasser ? Notre Seigneur Jsus-Christ lenomme positivement le Prince de ce monde : Confidete ! Ego vici mundum !

    Princeps hujus mundi ejicietur foras !

    Nos Lecteurs savent dj son vrai nom : Nahsh. C'est par de potiques fictionsqu'on l'a personnifi sous les appellations de Satan, de Lucifer, du Diable, etc.

    Il n'est point une personne distincte, mais une Puissance impersonnelle ; aucontraire, un agent occulte de la cration. Il domine d'en bas sur l'ar, demme qu'Inah et qu'Hereb, ses termes de polarisation33 (relatifs aux flux etreflux de Nephesch-ha-chaah, l'me universelle vivante) dominent de droite etde gauche sur ad et ab, les courants de lumire positive et ngative.

    33 L'on ne saurait s'tonner qu' dfaut d'un vocabulaire adquat et lorsque nous traitons un sujet inou (au sens radicalde ce terme), nous soyons contraint quelques peu prs d'expression.

    17

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    18/28

    Nahsh, dragon-sphinx, proposant l'nigme de son inqualifiable essence auxdipe du mysticisme, offre leur sagacit un sujet de constante mditation.Son origine se rfre aux plus vertigineux arcanes de la Nature et de la Vie.Faire la lumire intgrale sur Nahsh, quivaudrait rsoudre le problme dumal.

    Un thosophe allemand a eu l'audace d'affronter le monstre dans sa caverneoriginelle. Jacob Bhme a perscrut la racine tnbreuse des choses ; il ena dcrit le pivot, qui est Nahsh. Mais Bhme ne le connat pas sous ce nom :il l'appelle le vortex ou le tourbillon d'angoisse, et en fait la troisime propritde son abme virtuel. Les deux premires proprits ennemies dont l'treinterciproque engendre la troisime, sont les potentialits compressive etdilatante34, o l'on ne peut se dfendre de voir les principes radicaux d'Herebet d'Inah. Ces trois vertus combines35 concourent un ensemble que Bhmequalifie de racine tnbreuse de l'tre, antrieure toute manifestation d'icelui: c'est la matrice occulte de l'ternelle Nature36, tourmente d'une apptence gnrer la vie, apptence qu'il dfinit l'attract originel. Singulire rencontre !Ce sont les propres termes que choisira Fabre d'Olivet, pour traduirel'hirogramme hbreu Mais elle se tordrait jamais strile, cette angoissemagique du possible qui voudrait tre, elle s'puiserait en efforts impuissants,si Dieu n'y dardait un rayon de sa lumire invisible : le roach elohm de laGense. Sous l'influx divin, la roue d'angoisse s'allume37, et le dsir devientplaisir : de l s'engendre le feu-principe ou mdium universel du thosopheallemand.

    Nous empruntons en passant ces quelques traits fragmentaires au systme de

    Bhme, parce qu'ils offrent, avec l'objet de ce chapitre, des rapports frappantset d'intrt majeur. Cependant, s'il y a correspondance analogique, il n'y apoint identit. On fera bien d'y prendre garde. Le feu-principe, notamment,n'est pas la lumire astrale, cosmique ; mais sa source universelle, cleste38

    Retenons seulement que le principe originel de Nahsh tient au mystre detoute gnration ontologique, et que, dans les profondeurs du limbepotentiel, Nahsh est encore le point de soudure entre l'Homme et le Cosmos, natre tous deux.

    Au demeurant, c'est surtout Mose qu'il faut interroger, touchant Nahsh. Le

    thocrate d'Isral n'est point seulement l'diteur (l'auteur peut-tre) de cethirogramme ; historien, par surcrot, de l'tre ambigu qu'il nomme ainsi, Mosea trac une page dcisive de sa lgende sotrique, au troisime chapitre duBershith.

    34 L'astringence et l'amertume, selon la terminologie trange que lui a fidlement conserve son traducteur franais, lemarquis de Saint-Martin, mais le thosophe d'Amboise est loin d'avoir toujours compris Son divin Bhme .

    35 Les trois proprits du Dsir (Bhme).36 L'enfer est la matrice du Macrocosme (Paracelse).

    37 lmentisation lumineuse.38 Ainsi du reste. Le grand mystique traite des principes de la cleste Nature, conue antrieurement la dchance.

    Ce dcor ternel une fois pos, Bhme passe seulement aux drames de la chute des anges et du p ch originel.

    En ce tome, au contraire, nous acceptons la chute comme un fait accompli : nous traitons de la Nature d chue, sanschercher ce qu'elle pouvait tre avant la catastrophe.

    18

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    19/28

    Il dsigne sous cette appellation, l'Agent primordial de la chute, le Tentateurdnal ; sous ce mme nom, les Bibles vulgaires dsignent un serpent,subtil animal des champs39 , et le scoliaste agnostique ajoute en marge : c'est--dire le dmon, dguis sous cette apparence.

    Nahsh, crit Fabre d'Olivet, caractrise proprement ce sentiment intrieur etprofond qui attache l'tre sa propre existence individuelle, et qui lui faitardemment dsirer de la conserver et de l'tendre. Ce nom, que j'ai rendu parcelui d'attract originel, a t malheureusement traduit dans la version deshellnistes par celui de serpent ; mais jamais il n'a eu ce sens, mme dans lelangage le plus vulgaire. L'hbreu a deux ou trois mots, entirement diffrentsde celui-l, pour dsigner un serpent. Nahsh est plutt, si je puis m'exprimerainsi, cet gosme radical qui porte l'tre se faire centre et tout rapporter lui. Mose dit que ce sentiment tait la passion entranante de l'animalitlmentaire, le ressort secret ou le levain que Dieu avait donn la nature. Ilest trs remarquable que le nom employ ici par l'crivain hirographe pourexprimer cette passion, ce ressort ou ce levain, est Harym, le mme queZoroastre, parmi les Perses, avait employ pour dsigner le Gnie du MalAinsi, d'aprs l'esprit du Sepher et la vraie doctrine de Moyse, Nahsh Harymne serait pas un tre distinct, indpendant, mais bien un mobile centraldonn la matire, un ressort cach, un levain agissant dans la profondit deschoses, que Dieu avait plac dans la nature corporelle pour en laborer leslments40. C'est de ce levain, insparable pour nous du fluide universel qui constitue sabase de manifestation, c'est de ce levain que parle Quantius Aucler,

    l'hirophante paen de la Thrcie, dans une page tonnante, o il effleure legrand problme de la biologie sidrale.

    Vous avez des ides bien grossires : vous pensez que ces globes lumineux,qui gardent toujours leurs places dans un fluide qui ne peut les soutenir ; qui,dans des oppositions et divers aspects, ont des marches toujours rgulires,ont t placs sur vos ttes pour amuser vos yeux et les calculs de vosastronomes ! Il n'y a dans la nature que des corps morts ou vivants ; tout cequi est mort n'est pas vivant ; tout ce qui est vivant n'est pas mort.

    Il y a un ferment qui est l'esprit () qui joint l'me au monde : son action est

    continuelle ; il change tout, c'est le grand Prote ; il dissout les tres morts, et illes prpare, en les dissolvant, tre le lieu o de nouveaux tres, d'unemanire que vous ne pouvez pas mme maintenant souponner, viennent dugrand abme de la Nuit pour se corporifier. Si vous savez interprter l'Hymne la nuit d'Orphe, vous aurez un des premiers points de la Doctrine : voussaurez comment tout se forme, vous pourrez voir vos yeux sans miroir, etbranler les cornes du taureau.

    39 Les modernes traducteurs, qui n'y voient point malice, suivent la remorque de saint Jrme mystifi et des Septantemystificateurs.Chacun peut se reporter l'Introduction gnrale du Serpent de la Gense (tome I, page 20-2), onous avons transcrit le texte hbreu du verset en litige, avec les deux traductions, exotrique et sotrique en

    regard.40 Can, p. 3-35, passim. Esprit est employ par Aucler dans le sens de spiritueux, et non pas de spirituel.

    19

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    20/28

    Ce ferment n'agit pas sur les corps vivants41, parce que l'Animus qui lesinforme, les maintient, est plus fort que le ferment qui tend les dissoudre,tant d'une nature suprieure. Si le ferment pouvoit quelque chose sur lestres, il les disposeroit recevoir de nouveaux Animus, qui de l'abme de laNuit, viendroient se corporifier ; ainsi il les dissoudroit. Il faut donc qu'ils aient

    quelque chose en eux qui repousse les atteintes du ferment et qui soitsuprieur cet esprit ; il faut donc qu'ils aient en eux chacun un animus qui lesinforme, qui maintient leur forme et qui repousse l'action du ferment : ainsi ilsvivent donc. Si la terre n'toit pas anime, le ferment aussi la dissoudroit, et ladisposeroit recevoir de nouveaux tres qui rongeroient les rcoltes,tourmenteroient les espces primitives, leur nuiroient, les dtruiroient ; et ellesne seroient plus alors une simple altration, mais ne ressembleroient plus auxides archtypes.

    Le propre du cadavre est de tomber ; c'est de l qu'il est appel cadavre acadendo ; le propre de l'tre vivant est de se dresser et de se soutenir, parcequ'il a le principe de son mouvement et de sa vie en lui. C'est ainsi que jesoutiens mon bras, que je dresse ma tte ! Si les astres n'toient que descadavres, ils tomberoient ; c'est--dire qu'ils se rassembleroient dans un mmelieu, selon les lois de la pesanteur42.

    L'opinion qu'exprime Aucler ne doit point surprendre, bien que le sentimentcontraire ait prvalu. Elle est conforme la doctrine secrte de tous les Sagesde l'antiquit.

    L'on enseignait partout dans les temples que l'Univers est anim. Sur ce point

    tombaient d'accord les deux coles rivales, thosophique et naturaliste, que divisait pourtant la question fondamentale de la Divinit. Soit que lespenseurs ne reconnussent point de Cause premire en dehors de la Natureproductrice, immanente l'Univers qu'Elle engendre ternellement ; soit qu'ilsadmissent l'existence indpendante d'un tre ineffable qui, principe de cetteNature, en demeure nanmoins distinct : le Macrocosme tait pour eux un trevivant, dans son ensemble comme dans ses parties.

    Tous les initis du monde antique, Herms, Zoroastre, Pythagore, Platon, les

    41 Ceci n'est point tout fait exact. Le ferment agit sur les corps vivants ; il les vieillit et tend les dissoudre, mais lalongue C'est ce que nous avons tch de faire comprendre plus haut. Nous avons ajout que cette immunitrelative et temporaire tait due l'nergie ractive des mes de vie.

    42 La Thrcie, ou la seule voie des Sciences divines et humaines, par Quantius Aucler. Paris, an VII de la Rpublique, in-8 (pages 228-230). Si cet ouvrage n'tait crit d'un style inculte, rocailleux jusqu'

    devenir insupportable par endroits, il mriterait coup sr les honneurs de la rimpression, dont on se montre sitourdiment prodigue de nos jours d'autant plus qu'il est devenu fort rare. Le fragment que nous reproduisons l peutcompter parmi les moins mal crits ; encore avons-nous d amender la ponctuation de l'hirophante. liphas (LaScience des esprits, page 22) a eu le tort de ridiculiser Quantius Aucler. La Thrcie constitue, telle quelle, un traitde paganisme occulte, tout fait unique en son genre, et dont on ne saurait trop recommander la lecture auxamateurs de mysticisme. Ils y trouveront de piquants dtails, et, qui mieux est, quelques vues infiniment prcieuseset qu'ils seraient fort empchs de dcouvrir nulle autre part. La doctrine sotrique y est prsente sous une formepolythiste, d'un archasme trange et savoureux. L'ouvrage n'est pas moins singulier que remarquable et difficile

    trouver en librairie. La Thrcie tait un des livres de chevet du noble pote des Chimres. On peut consulter lanotice qu'il a consacre son auteur (Les Illumins, par Grard de Nerval, Paris, 82, in-2, p. 38-35).

    20

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    21/28

    Kabbalistes, les Alexandrins, etc., pensaient ainsi. Mais n'allez pas en induireque Pythagore, par exemple, s'il revivait de nos jours, s'inscrirait en faux contreNewton, et le systme de l'attraction universelle. De ce que les corps clestess'attirent mutuellement, en raison directe des masses, et en raison inverse ducarr des distances, il ne rsulte pas qu'ils soient inanims. Le mcanismeinvariable de leur gravitation n'implique rien contre l'hypothse en litige. Vie et

    Libert ne sont point synonymes. Ce chne, de l'aveu de tous, est vivant :mais sa croissance n'en est pas moins soumise des lois fixes ; il se revt deson feuillage et s'en dpouille, selon les alternatives des saisons. Cet hommeest vivant : mais une loi indpendante de sa volont n'en rgle pas moins chezlui la circulation du sang ; il n'est point libre d'arrter les battements de soncur Les Matres de l'antique Sagesse contesteraient d'autant moins lemcanisme de la gravitation universelle, que ncessairement ils furent amens en construire la thorie, par suite de la connaissance trs certaine et trsapprofondie qu'ils avaient acquise, non seulement des forces centripte etcentrifuge, mais encore, comme nous l'avons laiss entendre, des essencesoccultes dont ces forces ne sont que la rsultante sur le plan physique.

    Que si notre assertion semblait tmraire, et qu'on suppost les anciensthosophes trop arrirs en cosmologie pour se pouvoir lever de pareillesnotions, il nous serait facile de prouver aux incrdules, que la doctrine secrtedes temples comportait les thories le plus en faveur aujourd'hui, thoriesdont la science se fait gloire comme de rcentes conqutes, et que sesAristarques ont enregistres depuis deux ou trois sicles peine, aprs lesavoir revtues de leur haute sanction. Les Pythagoriciens n'enseignaient-ils pasouvertement, au grand scandale des profanes, que la Terre gravite autour duSoleil ? Aristote nous en est garant. Ne lit-on point dans le Zohar que la Terre

    tourne sur elle-mme en forme de cercle ; que les uns sont en haut, les autresen bas ; qu'il y a telle contre de la terre qui est claire, tandis que lesautres sont dans les tnbres ; que ceux-ci ont le jour quand pour ceux-l il faitnuit ; et qu'il y a des pays o il fait constamment jour, o du moins la nuit nedure que quelques instants43 ?

    Voil cinq lignes qui, connues ou ignores de Copernic, rduisent peu dechose son mrite d'inventeur. Du reste, les tmoignages que nous avonsproduits sont loin d'tre des faits isols. Le systme anticip de Copernic setrahit sous la plume d'un grand nombre d'auteurs grecs ou latins, initis latradition sotrique. C'est au point qu'on a lieu d'tre surpris, avec Dutens,

    qu'un systme si clairement enseign par les anciens, ait pris son nom d'unphilosophe moderne. Pythagore, Philolas, Nictas de Syracuse, Platon,Aristarque et plusieurs autres parmi les anciens, ont, en mille endroits, pari decette opinion : Diogne Larce, Plutarque et Stobbe nous ont transmis avecprcision leurs ides l-dessus ; et si on ne l'a pas admis plus tt, cela ne doits'attribuer qu' la force du prjug44

    Ces choses notifies pour mmoire, nous n'insisterons pas davantage surl'identit des thories astronomiques anciennes et modernes. Le prsentchapitre fait connatre les principes de l'quilibre magique, dont nous dcrivons

    43 Le Zohar, cit par Adolphe Franck, La Kabbale, 83, in-8, p. 02.44 Dutens, Origine des dcouvertes attribues aux modernes, Paris, 776, 2 vol. in-8 (t. I, p. 205-206).

    21

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    22/28

    l'Agent. L'quilibre matriel des mondes n'en est qu'une consquence, facile dduire au mme titre que plusieurs autres ; une adaptation secondaire sur leplan objectif.

    En insistant sur les influences peu connues qui s'opposent, se croisent et semarient dans les ondes fluidiques de l'Astral ; en prcisant plusieurs notions

    assez neuves, sinon insouponnes, sur la gense des divers courants qui s'yforment et sur les Agents occultes dont ils procdent, nous estimons avoirt plus intressant et plus utile que si, prodigue de dveloppementsdescriptifs, nous eussions ressass ce que d'autres ont dj dit, et trs bien dit.

    liphas Lvi est particulirement consulter, au sujet de l'quilibre desmondes, que nous n'avons fait qu'effleurer. Nous emprunterons seulement cemagiste une page remarquable, interprtative de la table d'meraude : il ydcrit la Lumire universelle, au point de vue spcial notre plante

    L'me de la terre, dit-il, est un regard permanent du soleil, que la terreconoit et garde par imprgnation. La lune concourt cette imprgnation de la terre, en repoussant vers elle uneimage solaire pendant la nuit, en sorte qu'Herms a eu raison de dire, enparlant du grand agent : le Soleil est son pre, la Lune est sa mre. Puis ilajoute : le vent l'a port dans son ventre, parce que l'atmosphre est lercipient et comme le creuset des rayons solaires, au moyen desquels se formecette image vivante du soleil, qui pntre la terre tout entire, la vivifie, lafconde et dtermine tout ce qui se produit sa surface par ses effluves et sescourants continuels, analogues ceux du soleil lui-mme.

    Cet agent solaire est vivant par deux forces contraires : une force d'attractionet une force de projection, ce qui fait dire Herms que toujours il remonte etredescend.

    La force d'attraction se fixe toujours au centre des corps, et la force deprojection dans leurs contours ou leur surface.

    C'est par cette double force que tout a t cr et que tout subsiste.

    Son mouvement est un enroulement et un droulement successifs et

    indfinis, ou plutt simultans et perptuels, par spirales de mouvementscontraires qui ne se rencontrent jamais.

    C'est le mme mouvement que celui du Soleil, qui attire et repousse enmme temps tous les astres de son systme.

    Connatre le mouvement de ce soleil terrestre, de manire pouvoir profiterde ses courants et les diriger, c'est avoir accompli le Grand uvre, et c'est trematre du monde45.

    45 Dogme et rituel de la Haute-Magie, t. I, p. 52-53.

    22

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    23/28

    Nous l'avons dit ailleurs : ce qu'liphas Lvi appelle courant de projection(actif), c'est l'ad ou le Soufre-principe des alchimistes ; courant d'attraction(passif), c'est l'ab ou Mercure-principe des alchimistes. Enfin, ce qu'il nommemouvement quilibr, c'est l'ar ou l'azoth des Sages : c'est le foyer de laquintessence, o rside la force de leur dissolvant universel.

    Ad, ab, ar : positif (+) ngatif (), intgral (). Sommes-nous curieux devoir quel sens Fabre d'Olivet, dans son vocabulaire radical, assigne ces troisracines hbraques ?

    Consultons-le ; sa rponse semblera peut-tre nigmatique et dconcertante, l'abord. Mais qu'on y veuille bien rflchir, premier que de se croire du, carnous protestons ici, qu' la faveur des trois lignes qu'on va lire, studieusementrapproches de nos explications sur les Puissances motrices de l'Astral (savoirHereb, Inah et Nahsh), il deviendra loisible aux amateurs de thosophied'entrevoir l'essence mme de l'anima mundi, et de surprendre, non pointseulement le quomodo, mais le quia de l'quilibre universel

    Le dsir, agissant l'intrieur. Le dsir, agissant l'extrieur.............. Le dsir, livr son mouvement propre, produisant l'ardeur, tout ce quienflamme, ce qui brle, etc46.

    Sans commenter outre mesure un texte dont il conviendrait que chacun saisitpar soi-mme et apprcit toute la porte, quelques observations n'en serontpas moins de mise, qui aideront y parvenir

    Le thosophe Jacob Bhme, cet explorateur enfivr des suprmes arcanes,nous dnonce le Dsir comme la racine premire de tout tre, et de la Natureproductrice elle-mme.

    Le Dsir est plus spcialement la Puissance magique d'vocation aux miragesde l'existence objective, sensible. Il s'affirme crateur comme la Volont, dont iln'est peut-tre qu'une forme obscure, rudimentaire ou dgrade47.

    Il se diversifie d'ailleurs, selon les milieux o il se dveloppe. Simpleconsquence de la chute et rpercussion de la chair sur l'me, quand il

    fermente au cur humain, le Dsir prend un autre caractre chez tous lestres qui vivent de la vie cleste : il tmoigne d'un acquiescement de lasensibilit aux suggestions tacites de Nahsh.

    Dans le monde des mes, il incite les monades dchoir, et les fait rouler surla pente de l'incarnation ; au royaume de la vie et de la mort physiques, ilpousse les incarns perptuer leur race :

    46 La Langue hbraque restitue, t. , p. 8 du Vocabulaire radical. Rappelons-nous que Bhme appelle les troisformes de son Abme potentiel les trois proprits du Dsir , et que la racine tnbreuse des choses, que nousavons qualifie de pile physiognique, est forme de ces trois lments.

    47 Imaginons la Volont qui s'veille, inconsciente et despotique, aux limbes des vies instinctive et passionnelle ; laVolont aveugle, acoquine aux sductions de la vie physique, le Dsir semble-t-il autre chose ?

    23

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    24/28

    efficit ut cupid generatim saecla propagent.

    Le Dsir apparat donc la base de toute manifestation objective. Le Feu secretconstitue le lien, l'instrument mdiateur entre le Dsir et l'objet dsir ; enfin lamatire marque le terme, la limite, l'aboutissement infime du Dsir ralis.

    La Forme spirituelle, que le Dsir a fait descendre du Ciel empyre, se fixe uninstant dans la matire qu'elle ptrit son image ; puis, ses potentialits taries,la Forme fait retour l'occulte, par l'entremise de ce mme Feu secret, quiavait servi nagure la manifester. La terrestre dpouille de la Formespirituelle envole en garde la fugitive empreinte : c'est la signature, ici-bas,d'une nergie rintgre sa source d'en haut. Mais la signature va s'effacergraduellement, l'empreinte disparatre, sous l'action du ferment universel,c'est--dire encore et toujours du Feu secret !

    L'on serait fort en peine de rien expliquer de la nature ni de l'origine duCosmos, sans recourir la connaissance de cette mystrieuse Lumire,invisible aux yeux charnels ; car c'est d'elle que tout est sorti, et rien nesubsiste encore que par elle.

    Indpendamment des matrialisations objectives dont l'ensemble constituel'univers physique, la lumire astrale se spcialise encore et se fixepartiellement, selon les milieux : elle forme ainsi le corps sidral, et par suite lenimbe de tous les tres qu'elle baigne de ses ondes.

    Ainsi chaque astre est envelopp d'une atmosphre hyperphysique approprie

    sa nature : c'est son me vitale et infrieure, ou son corps armal etsuprieur.

    Cette atmosphre, rserve viruelle et milieu nourricier, s'labore et s'entretientelle-mme, en aspirant et en expirant tour tour la substance universelle, ouLumire astrale non spcialise, non fixe.

    Il en est de mme de tous les tres, quels qu'ils soient ; tous ont leur corpsastral ou mdiateur plastique.

    Le Lecteur pourra bientt comprendre quels troublants mystres la

    connaissance positive des corps sidraux (et particulirement du corps sidralhumain) peut servir de clef. Nous nous contenterons d'observer, en ce chapitre,qu'il n'est point de peuple sur la terre, dont les traditions mystiques se taisentsur ce point.

    Si la Lumire astrale compte plusieurs centaines de noms, le corps fluidiquepeut lui faire concurrence sous ce rapport. La liste numrative en seraitfastidieuse ; nous y mettrons quelque discrtion, et nul ne songera peut-tre s'en plaindre.

    L'ide mme du fantme, si universellement reue des hommes toutes lespoques de l'histoire, traduit en mode exotrique l'occulte notion de cette

    24

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    25/28

    ralit : le corps astral.Qu'on l'appelle avec les brahmes Linga Sharira, Nephesh avec les Kabbalistes,eidlon avec l'cole hellnique, Houen avec les magistes chinois, c'esttoujours ce double mystrieux, dont Psellus enseigne qu'il tient le milieu entrele corps physique et l'me spirituelle. C'est l'angoid d'Origne et le

    Simulacrum des latins48

    .

    Virgile en fait mention plus d'une fois ; il le montre survivant au cadavre dechair :

    et nunc magna mei sub terras ibit imago 49.

    Saint Paul crit hardiment : S'il y a un corps animal, il y a aussi un corpsspirituel50.

    Les mes, dit Saint Hilaire, qu'elles soient ou non incarnes, possdent enoutre une substance corporelle inhrente leur nature51.

    On pourrait multiplier les citations, mais il n'importe

    Le corps astral, qui n'est autre que le Prisprit des Kardcistes, doubleexactement le corps physique, dont il se peut sparer sous certainesconditions.

    48 Oswald Crollius, lve de Paracelse, numre quelques autres noms, coutumirement attribus au corps astral par lesadeptes de son cole. Aprs avoir parl du corps physique, dans l'introduction de la royalle Chymie, le clbreDocteur poursuit en ces termes : Quant l'autre partie de l'homme, c'est--dire le corps syderique, appel leGnie de l'homme, d'autant qu'il tire son origine du firmament, les latins l'appellent encore Penates, cause de laproximit qu'il a de nous et vient encor au monde avec nous, Ombre visible, esprit domestique, Homme ombrageux,petit homme familier des Philosophes, dmon ou bon Gnie, adech interne de Paracelse, Spectre-lumire de nature,euestre-prophetique en l'homme. Outre ces noms, il s'appelle encore Imagination, qui enclost tous les astres dans

    soy L'imagination est comme la porte, la fontaine et le commencement de toutes les op rations magiques et sansle detriment ou diminution de l'Esprit astral ou syderique, elle a la puissance de produire et engendrer des corps

    visibles ; voire (ce qui surpasse l'entendement humain), soit qu'elle soit presente ou absente, elle peut mettre au iour

    toutes les plus admirables operations L'imagination de l'homme est un vray Aymant, lequel a puissance de tirer a

    soy de cent lieues D'o le sage ou vray magicien peut attirer l'operation des astres, et la ioindre aux pierres,images et metaux, lesquels par apres ont le mesme pouuoir que les astres tout ce que nous voyons au grand monde

    peut estre produict par le moyen de l'Imagination d'o s'ensuit que toutes les plantes, metaux, et tout ce qui a lesvertus crescitiues, peut estre produict par l'imagination ou la vraye Gabalie ; et cecy est la partie de magie appeleGabalistique, appuyee sur ces trois colomnes suiuantes : premierement, aux vrayes prires, faictes en esprit deVerit, o se faict vnion de l'esprit cr auec Dieu Secondement, par la foy naturelle ou sapience ingeneree ;tiercement par la forte exaltation de l'imagination, les forces de laquelle sont manifestement demonstrees tant par le

    baston de Iacob, duquel Moyse faict mention, que par les marques imprimees aux enfans dans le ventre maternel

    donc l'imagination ou fantaisie en l'homme est semblable l'Aymant (La royalle Chymie de Crollius, traduitteen franais par I. Marcel de Boulene (Lyon, 62, in-8). Prface admonitoire, p. 7-76 et 80-8, passim). Ces lignessurprenantes de Crollius donnent, par anticipation, un aperu des magiques merveilles qui peuvent s'accomplir lafaveur du corps astral, vertu ad hoc. L'auteur de la Basilica Chymica tait profondment vers dans les arcanes dela Science.

    49 Enide, livre IV, v. 65.50 Corinth., XV, . Peut-tre saint Paul fait-il allusion, non point au Corps astral proprement dit (expression terrestre

    de la facult plastique de l'me), mais bien au Corps glorieux (son expression cleste).51 In Matth., V, 8. Mme remarque qu' la note prcdente.

    25

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    26/28

    Distinct de l'nergie vitale passive qui rside dans le globule sanguin52 et quientretient la subsistance des cellules, le prisprit a pour sige le systmecrbro-spinal et le grand sympathique : toute fibre nerveuse, si minime soit-elle, sert de vhicule sa force lastique, invisiblement diffuse en toutes lesparties du corps visible.

    Cette substance insaisissable se rpare et se renouvelle par un phnomne entout point analogue celui de la respiration pulmonaire. Mais le produit del'expir fluidique forme, autour du corps astral, une sorte de halo d'therspcialis, atmosphre individuelle de puret ou de corruption, de vertu ou device, dans laquelle vivent et se meuvent les tres potentiels gnrs par lavolont ou par les passions.

    Chez l'homme et les animaux, mme chez les plantes, le nimbe est trs distinctdu corps astral, auquel il sert d'enveloppe, de vtement fluidique. Dans lergne minral, au contraire, les deux termes se confondent en quelque sorte ;du moins la ligne de dmarcation semble-t-elle vague et malaise dfinir.

    Il en est de mme pour la vie des astres : le corps fluidique et le nimbe yparaissent intimement combins, comme ailleurs il sera dit.

    Mais le prsent chapitre doit se limiter l'examen de l'quilibre et de sonAgent, c'est--dire l'tude de la Lumire astrale, envisage dansl'antagonisme de ses principes moteurs et dans la synthse de sesmouvements. C'est ce que nous avons tch de mettre au jour, en insistant surles ressorts trop ignors qui commandent le dynamisme universel. Que si nousavons pu paratre obscur, on daignera nous excuser en faveur de l'aventureuse

    audace qu'il y avait, peut-tre, scruter l'essence mme des Puissancescosmogniques, au lieu de nous en tenir la description, souvent produite etreproduite, du monde astral, souponn d'aprs l'tude de ses phnomnalesmanifestations, reflets fugaces qu'il jette sur notre monde matriel.

    Dans tous les sanctuaires du vieux monde, la substance universelle, avec sondouble mouvement, a t reprsente par le signe symbolique de Mercure 3.Nous sommes heureux d'offrir au Public, ce propos, la primeur d'une noteentirement indite, due l'obligeance de l'minent aptre des Missions, lemarquis de Saint-Yves d'Alveydre.

    52 Voyez Papus, trait mthodique de Science occulte, pages 82-86. Cette force vitale des cellules est le Jiva deshindous. Insparable du corps, la vie durant, elle forme aprs la mort cette silhouette, vaguement phosphorescente

    parfois, qui se dcompose trs vite, aprs avoir err quelque temps autour de la dpouille mortelle, dont elle nes'loigne jamais.

    26

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    27/28

    Telle est l'explication donne par M. de Saint-Yves.

    L'hiroglyphe mercuriel 3 comporte une autre analyse, familire auxalchimistes. Il peut se dcomposer en trois termes, comme suit :

    1. Le signe du Soleil 1, image du Principe mle, spirituel et fcondateur del'Univers vivant, d'une part ;2. Et de l'autre, le signe de la Lune 2, emblme de la Facult fminine,rceptive et morphognique ;

    3. Ce principe et cette facult sont nuptialement combins la faveur dela croix (+) reprsentation linghamique du Thau Sacr () qui symboliselui-mme tout agent de Synthse, de rciprocit, de mutuelle raction : toutlien agglutinatif et cohobant.

    Ce n'est pas tout : le pentacle c souffre une troisime dcomposition : n'y peut-

    on voir l'astrisme zodiacal du taureau dominant le quaternaire des lments

    27

  • 8/8/2019 La Justice par S. de Guaita

    28/28

    + ?

    Rien n'est arbitraire en Kabbale hiroglyphique le signe du taureau marque eneffet l'action, galement rpartie, des influences phbique et isiaque spares53.

    Faites dominer ce signe sur celui de la Croix (emblme binaire de la conjonctiondes deux lignes, verticale-active et horizontale-passive, ou, si l'on prfre,emblme quaternaire des lments occultes, qui sont les fruits de cetteconjonction mme) : et vous aurez la reprsentation parfaite des vertuslatentes du Mercure des Sages ou de l'anima mundi.

    Quelquefois, pour prciser certaines spcifications du Mercure des Sages, lesalchimistes l'ont figur par cet hiroglyphe , substituant au signe fminin dutaureau (symbole de l'humide radical) le signe mle du Blier ou 3(expressif du feu-principe).

    Nous sommes entr dans ces dtails, pour fournir un exemple frappant del'inflexible logique dploye par les adeptes, dans la formation et l'emploi duverbe hiroglyphique. On a pu voir trois mthodes d'analyse, assez diffrentes,donner trois rsultats absolument concordants.

    Cherchez, a dit le grand Matre, et vous trouverez : frappez, et il vous seraouvert.

    53 Nous dfendrons-nous du grief d'avoir, en cette phrase, plac le taureau sous la dpendance du Soleil et de la Lune ?En d'autres termes, d'avoir soumis la synthse zodiacale de plusieurs univers lointains, l'influence d'une modestetoile de troisime grandeur, et d'un infime Sous-satellite, l'un ngligeable, l'autre parfaitement imperceptible dansl'immensit cosmique ? Le Lecteur voudra bien, du moins l'osons-nous croire, nous faire grce d'un pareil souponde surprenante navet ! Les qualits positive et ngative, irradiante et absorbante, mle et femelle, se rpartissent etse localisent dans les astres de toutes les rgions du Cosmos ; elles s'quilibrent et s'opposent harmonieusement l'une

    l'autre, selon des lois prfixes. Les astrologues tirent grand parti, pour leurs calculs, de ces contrastes bissexuelsdes corps clestes. Le Soleil et la Lune tant, notre point de vue terrestre, les types locaux de ces deux vertusopposes, nous avons qualifi celles-ci de phbique et d'isiaque, au mme sens o Mose, pour figurer cettegmination d'influences, et signifier le type de leur rpartition, crit au premier chapitre de la Gense, v. 6e : Et il-fit, Lui-les-Dieux, cette dut-de-clarts-extrieures, les-grandes : l'ipset-de-la-lumire-centrale, la-grande, pour-reprsenter-symboliquement-le-jour, et l'ipset-de-la-lumire-centrale, la-petite, pour-reprsenter-symboliquement-la- nuit (Version Fabre d'Olivet). Faites dominer ce signe sur celui de la Croix (emblme binaire de laconjonction des deux lignes, verticale-active et horizontale-passive, ou, si l'on prfre, emblme quaternaire deslments occultes, qui sont les fruits de cette conjonction mme) : et vous aurez la reprsentation parfaite des vertuslatentes du Mercure des Sages ou de l'anima mundi. Quelquefois, pour prciser certaines spcifications du Mercuredes Sages, les alchimistes l'ont figur par cet hiroglyphe , substituant au signe fminin du taureau (symbole del'humide radical) le signe mle du Blier ou (expressif du feu-principe). La Bible d'Osterwald traduit : Dieu

    donc fit deux grands luminaires, le plus grand pour dominer sur le jour, le moindre pour dominer sur la nuit. Autant dire ; Soleil et la Lune. tait-ce bien l toute la pense de Mose ? ?