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REWE AFRICAINE DE DfiVELOPPEMENT 61 La coophtion intemationale pour promouvoir la dkmocratie et les droits de l’homme : prhcipes et programmes Babacar Ndiaye * RCsumC: Au cours de la dCcennie CcoulCe, le monde entier a connu un mouvement gCn6ral favorable B la dimocratie et A la protection des droits de l’homme. Avec I’apparition d’un sens aigu de la co-responsabilite des nations pour les questions humanitaires, il est de plus en plus reconnu que la com- munautC internationale est moralement chargCe d’intervenir en cas d’im- menses souffrances humaines ou bien de violation des droits de l’homme de tout un peuple. MalgrC la convergence apparente des thbses politiques sur ces questions, il faut nCanmoins reconnaitre la 1Cgitimitt des diffirents systbmes politiques. La communautt internationale devrait donc reconnaitre le droit de toute nation ou de tout peuple zi disposer de son espace culturel et politi- que national. Compte tenu du conflit manifeste entre le principe du partage de la res- ponsabilitC des nations et celui de l’espace culturel et politique national, il est indispensable de dCfinir clairement les conditions dans lesquelles la commu- nautC internationale doit intervenir. Dans ce document, sont proposCs trois principes qui pourront guider de telles interventions. Tout d’abord selon cette thise, la communautt internationale a moralement le devoir d’exprimer son inquietude et de prendre toutes les mesures appropriies dans le cas d’une Cvidente violation des droits de l’homme (en cas de menace de genocide par exemple) ainsi que dans le cas de crises humanitaires ayant des dimensions inacceptables. Ensuite la communautk peut intervenir et prendre des mesures ripondant aux souhaits exprimis par la population, si par exemple tel ou tel gouvernement repressif fait obstacle A la dimocratie. Enfin, I’intervention de la communautC internationale devrait ttre rigie par le principe de la neutra- lit6 pour mCriter sa 1CgitimitC. Dans les cas ou les conditions requises sont rCunies pour que la cooptra- tion internationale favorise la dkmocratie et les droits de l’homme, une telle coopkration zi 1’Cchelon national pourrait comprendre des programmes et activitts visant A (i) moderniser I’Etat, (ii) renforcer la sociCt6 civile (iii) encourager les rCformes Cconomiques et la croissance pour contribuer A ren- dre durables les rtformes et ce processus dCmocratiques. Toutefois, les pro- grammes et activitCs B l’tchelon national, devraient etre complCtCs par la cooptration A 1’Cchelon international pour amCliorer tant la gouvernance Prtsident, Banque Africaine de Dtveloppement. Document prtpart pour la Conftrence sur la ”Coop4ration en matitre de dtveloppement pour la promotion des Droits de 1’Homme et dc la Dtmocratie” parrainhe par le gouvernement sutdois, Stockholm, Su&de, 22-24 ftvrier 1993

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La coophtion intemationale pour promouvoir la dkmocratie et les droits de l’homme : prhcipes et programmes

Babacar Ndiaye *

RCsumC: Au cours de la dCcennie CcoulCe, le monde entier a connu un mouvement gCn6ral favorable B la dimocratie et A la protection des droits de l’homme. Avec I’apparition d’un sens aigu de la co-responsabilite des nations pour les questions humanitaires, il est de plus en plus reconnu que la com- munautC internationale est moralement chargCe d’intervenir en cas d’im- menses souffrances humaines ou bien de violation des droits de l’homme de tout un peuple. MalgrC la convergence apparente des thbses politiques sur ces questions, il faut nCanmoins reconnaitre la 1Cgitimitt des diffirents systbmes politiques. La communautt internationale devrait donc reconnaitre le droit de toute nation ou de tout peuple zi disposer de son espace culturel et politi- que national.

Compte tenu du conflit manifeste entre le principe du partage de la res- ponsabilitC des nations et celui de l’espace culturel et politique national, il est indispensable de dCfinir clairement les conditions dans lesquelles la commu- nautC internationale doit intervenir. Dans ce document, sont proposCs trois principes qui pourront guider de telles interventions. Tout d’abord selon cette thise, la communautt internationale a moralement le devoir d’exprimer son inquietude et de prendre toutes les mesures appropriies dans le cas d’une Cvidente violation des droits de l’homme (en cas de menace de genocide par exemple) ainsi que dans le cas de crises humanitaires ayant des dimensions inacceptables. Ensuite la communautk peut intervenir et prendre des mesures ripondant aux souhaits exprimis par la population, si par exemple tel ou tel gouvernement repressif fait obstacle A la dimocratie. Enfin, I’intervention de la communautC internationale devrait ttre rigie par le principe de la neutra- lit6 pour mCriter sa 1CgitimitC.

Dans les cas ou les conditions requises sont rCunies pour que la cooptra- tion internationale favorise la dkmocratie et les droits de l’homme, une telle coopkration zi 1’Cchelon national pourrait comprendre des programmes et activitts visant A (i) moderniser I’Etat, (ii) renforcer la sociCt6 civile (iii) encourager les rCformes Cconomiques et la croissance pour contribuer A ren- dre durables les rtformes et ce processus dCmocratiques. Toutefois, les pro- grammes et activitCs B l’tchelon national, devraient etre complCtCs par la cooptration A 1’Cchelon international pour amCliorer tant la gouvernance

Prtsident, Banque Africaine de Dtveloppement. Document prtpart pour la Conftrence sur la ”Coop4ration en matitre de dtveloppement pour la promotion des Droits de 1’Homme et dc la Dtmocratie” parrainhe par le gouvernement sutdois, Stockholm, Su&de, 22-24 ftvrier 1993

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gCnCrale par des rCformes et par le renforcement du systtme des Nations Unies, que 1’Cconomie mondiale afin de rkpondre davantage aux besoins de l’humanitt toute entitre.

Abstract: In the course of the last decade, the world has witnessed a movement of global dimensions in support of democracy and the protection of human rights everywhere. With the emergence of a strong sense of “sha- red humanity’: there is a growing acceptance of the moral responsibility of the international community to intercede in cases of immense human suffe- rings, or in cases where the human rights of a people are being violated. Despite the seeming convergence of political thinking, there is, however, the need to recognize the legitimacy of different political systems. The interna- tional community would thus need to recognize the right of a nation or a people to its own ‘‘national politicaI and cuItural space. ’’

In the light of the apparent conflict between the principle of “shared humanity”, and the principle of “national political and cultural space”, it is essential to delineate clearly the conditions under which the international community should intervene. Three principles which could guide such inter- ventions are proposed in the paper. First, it is argued that the international community has the moral duty to express its concern and to take appro- priate measures in cases where there are egregious violations of human rights - such as attempted genocides - and in cases of humanitarian crises of unacceptable proportions. Second, in situations where a peoples’s expressed desire to exercise its democratic rights are being thwarted by a repressive government, it is argued that the international community should take mea- sures in support of a people’s expressed wishes. And third, international involvement should be guided by the principle of non-selectivity if it is to garner global legitimacy.

In situations where appropriate conditions for international cooperation to promote democracy and human rights exist, such cooperation at the national level could consist of programmes and activities that seek (i) to modernize the state, (ii) to strengthen civil society, and (iii) to promote economic reform and growth, to help ensure the sustainability of democratic reforms and processes. Programmes and activities at the national level should, howe- ver, be complemented by cooperation at the international level both to improve global governance through the reform and strengthening of the uni- ted Nations System and to improve the international economic system, to make it more responsive to the needs of all humanity.

I. Introduction La dCcennie CcouICe a CtC timoin d‘un veritable mouvement mondial de

soutien des formes dCmocratiques de gouvernement et de dtfense des droits fondamentaux de l’homme. Ce mouvement a trouvC un Ccho favorable dans toutes les parties du monde, de l’Afrique, l’Asie et l’AmCrique latine jusqu’en Europe de 1’Est et aux anciennes rkpubliques de l’Union soviktique. Les idCaux de dkmocratie et la notion des droits inalihnables de l’homme ne sont naturellement pas nouveaux. 11s ont guide les mouvements politiques au moins pendant les deux cents dernitres annCes. On peut faire remonter leur origine aux notions de ”loi naturelle” et de ”droits naturels”, notions qui furent d’abord dtfendues durant le sitcle des Lumikres dans 1’Europe’ du

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17tme sikcle. Les idtaux de dtmocratie et de defense des droits fondamen- taux de l’homme ont aussi inspirt la constitution et la formation mCme des gouvernements, tant B l’Ouest que dans de nombreux pays en dtveloppe- ment. Cependant, ce qui est le trait le plus saillant du mouvement mondial actuel vers la dtmocratie, c’est la vaste convergence de la penste politique et la large acceptation des idtaux et des mtrites de la dtmocratie. Ceci B son tour s’est accompagnt de la defense acharnte des sysdmes juridiques et sociaux crits pour la protection des droits2 fondamentaux de I’homme.

Les causes sous-jacentes B cette apparente convergence de la penste et des idLaux politiques peuvent s’expliquer par des situations apparemment diver- gentes dans les diverses rtgions du monde. En Europe de 1’Est et dans les anciennes rtpubliques de 1’Union sovittique, la crise du communisme B la fois comme systkme politique et Cconomique et son effondrement tventuel - sembleraient avoir rehausst les valeurs des formes dtmocratiques de gou- vernement, ainsi que les principes sous-teridant le fonctionnement des Cco- nomies de marcht. En Afrique, les difficultts tconomiques de la dtcennie tcoulte et l’incapacitt des gouvernements de les surmonter, ont r tvtl t les limites de 1’Etat A parti unique. La crise a aussi r tvtl t les limitations prtcises des systtmes tconomiques qui reposaient surtout sur le contr6le et la direc- tion de 1’Etat. En Asie, le mouvement dtmocratique semblait rtpondre B la prosptritt croissante de la rtgion, les citoyens exigent maintenant, en plus des conquCtes tconomiques et sociales auxquelles ils sont parvenus dans le passt rtcent, davantage de droits politiques et leur voix au chapitre en matikre de gouvernement. L’exptrience asiatique, bien que difftrente de celle d’autres rigions, semblerait ntanmoins faire valoir les limites du dtveloppe- ment et de la croissance Cconomique sous des systtmes de gouvernement non dtmocratiques.

Tandis que la motivation fondamentale des mouvements dtmocratiques dans les diverses rtgions du monde semblait ainsi Ctre les tensions et crises internes, ces mouvements ont aussi t t t sensiblement aidis par des change- ments dans l’environnement mondial, ainsi que par les changements toujours en cours, des principes rtgissant les relations internationales. L’interdtpen- dance croissante des nations et des rtgions, et les liaisons entre elles, B leur tour rendues possibles par les progrb de la technologie des ttltcommunica- tions, changent le monde en un vtritable ”village mondial”. Les Cvtnements politiques et tconomiques importants qui se produisent n’importe oc dans le monde sont maintenant presque instantantment communiquts au reste du monde. En constquence, les cas de ripressions politiques ou de violation fla- grante des droits de l’homme ne peuvent plus &re soustraits B l’examen de l’opinion publique mondiale. 11s deviennent au contraire des faits divers radiodiffusts ou projetts sur les ttltviseurs dans le monde entier.

’ Les idtes de loi naturelle d‘oh a ttt tirte la notion des droits de l‘homme se profilaient demtre les deux declarations les plus ctltbres sur les droits de I’homme au lltme sibcle - celle de la Dtclaration d’indtpendance des Etats Unis en 1776 et la Dtclaration franwise des Droits de 1’Homme et du Citoyen en 1791.

* Une exception majeure au mouvement mondial de dtmocratie, c’est la montte du fondamenta- l ime dans certains pays du monde islamique. Le mouvement vaut la peine d’etre not6 par son rejet explicite des idtaux de gouvernement et des droits de l’homme d’inspiration occidentale, et par son dCsir d’ttablir la Sharia comme loi fondamentale rhgissant tous les rapports sociaux.

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La naissance d’un sentiment perceptible d’une ”humanit6 partagke” cons- titue un fait important de la communautC internationale attestant quotidien- nement des CvCnements a travers le monde. Cette nouvelle expkrience amkne de plus en plus A croire que les affaires internationales de chaque peuple sont, dans une certaine mesure, les affaires de tous. Ceci, a son tour, a entrain6 les appels croissants qui sont IancCs a la communautk internatio- nale, pour qu’elle intervienne en faveur de ceux qui souffrent de perskcution politique ou de graves contraintes3 tconomiques. A ce jour, la communautk internationale n’est intervenue que dans de cas de souffrances humaines extremes, ou dans des cas ou il y a eu une negligence flagrante des droits klkmentaires de I’homme. Ainsi, la famine, la faim et la souffrance humaine gCntralisCe provoquent habituellement des rCponses Cnergiques d’assistance de la communautt internationale, gCnCralement sous les auspices des Nations Unies. Et dans la rCcente intervention militaire en Somalie autorisCe par les Nations Unies, I’impCratif moral d’assistance humanitaire a CtC Clargi pour englober I’assurance de la protection militaire la population mourant de faim.

De meme, la revendication selon laquelle la communautk internationale a une obligation de promouvoir la dkmocratie et le respect des droits de I’homme dans les pays membres gagne du terrain, bien qu’elle doive cepen- dant Ctre formellement ClaborCe et codifiCe. On le retrouve dans les nom- breux programmes que les Nations Unies ont lances dans toutes les regions du monde, pour soutenir 1’Ctablissement des formes dtmocratiques de gou- vernement, ainsi que la dCfense des droits de l’homme. I1 convient de noter A cet Cgard que les Nations Unies ont rCcemment approuvC le droit de la communautt internationale d’intervenir - il est vrai dans des circonstances plut8t uniques - pour prottger une minorit6 ethnique ou religieuse de la perskution par son propre gouvernement. Ce nouveau dCpart semblerait &re un affaiblissement du principe de non-ingkrence dans les affaires intirieures des Etats membres - principe qui avait guidt les affaires des Nations Unies depuis leur crCation en 1945 -.

L’acceptation apparente par la communautk internationale de certains ”principes suphieurs” qui tendraient a rCduire les prtrogatives des nations souveraines, avec I’application des mesures pour les faire respecter, soulkve une sCrie de questions litigieuses et probICmatiques, qui doivent Ctre pleine- ment discuttes et dCbattues dans tous les forums internationaux appropriks, par exemple A la prochaine ConfCrence des Nations Unies sur les Droits de 1’Homme. Un dCbat complet et approfondi est indispensable pour assurer que les points de vue et perceptions de tous les peuples et nations sont convenablement reprCsentCs. Ceci est essentiel pour que 1’Cnonciation des principes internationaux - et avec le temps, leur codification dans le droit international - ne refltte pas simplement la vision des pays les plus puis- sants, mais traduisent effectivement la prise en consideration des points de vue de toutes les nations. Les efforts pour parvenir A un consensus interna- tional sont ainsi essentiels pour que les principes internationaux rigissant la promotion de la democratic et la defense des droits de l’homme deviennent acceptables pour tous les peuples et nations.

II est important de rappeler qu’il n’y a pas si longternps, un tel engagement de la cornrnunaute internationale aurait kt6 consider6 comme une ingtrence dans les affaires intkrieures d’Etats sou- verains.

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Ce document cherche a rtpondre a certaines des questions qui surgissent en relation avec les efforts internationaux pour soutenir la dkmocratie et difendre les droits de l’homme dans chaque pays. I1 aborde en premier lieu, la question de savoir s’il existe en fait des notions de droits de l’homme, de dtmocratie et de bonne gestion de la chose publique qui soient acceptables pour toutes les sociitis et cultures (section 11). A la lumikre des differences intvitables des cultures et des systkmes de valeurs - ainsi que de la tendance inevitable a promouvoir des intCrCts nationaux sptcifiques dans tous les efforts de cooptration internattionale - ce document soulkve des principes gkntraux ou rkgles gintrales qui devraient rtgir l’engagement de la commu- nautt internationale dans des efforts visant a dtfendre les droits de l’homme et promouvoir la dimocratie (section 111). La section IV du document dis- cute du type d’actions/programmes conjoints que les membres de la com- munautt internationale pourraient entreprendre pour soutenir la dtmocratie et les droits de I’homme, en admettant par hypothtse que des principes internationalement admis ne tarderont pas a se dtgager.

11. Vers des notions de droits de lhomme et de dkmocratie universellement admises ?

L’engagement de la communautk internationale, dans des efforts pour promouvoir la dtmocratie et dtfendre les droits de l’homme dans chaque pays, suppose l’existence d’un certain consensus entre les membres de la communautt, sur les attributs essentiels de la dkmocratie et sur les droits qu’il faut considkrer comme des droits fondamentaux de l’homme. Un exa- men plus serrC de la question montrerait cependant que, s’il peut y avoir un accord sur le caracttre souhaitable des systkrnes dtmocratiques, des diver- gences importantes existent encore sur les propriCtCs essentielles des systkmes dtmocratiques de gouvernement. En outre, il peut y avoir un plus grand consensus sur des systkmes de gouvernement non dtmocratiques et sur des systkmes qui ne respectent pas les droits de l’homme, que sur les caractkristi- ques qui, dans un sens positif, constituent la dtmocratie. En d’autres termes, les membres de la communautt internationale peuvent trouver plus facile d’admettre qu’un systkme particulier de gouvernement n’est pas dtmocrati- que (comme par exemple, dans le cas du systtme d’apartheid en Afrique du Sud), que de se mettre d’accord sur les Cltments constitutifs d’une sociCtt dkm~cratique~.

Dans la penste libkrale occidentale, la dimocratie est traditionnellement identifike ?I deux attributs essentiels : la souveraineti du peuple et ’la libertk individuelle. Ces attributs laissent entendre que le pouvoir ICgitime appar- tient uniquement au peuple et que le peuple a le droit de choisir et de dimet- tre son gouvernement. Le caracttre inalienable de certains droits de l’homme et droits politiques, tels que le droit la liberti d’expression et au rassem- blement politique, complkte cet axiome fondamental de souveraineti du peu- ple. Le discours contemporain dans le monde occidental sur la notion de dtmocratie est marque par des dibats sur la question de savoir si des droits autres que des droits purement politiques devraient aussi Ctre inclus dans la

Comme 11 sera dtmontrt plus en dttail ci-dessous, I’absence de consensus sans ambiguiti sur ces questions critiques - ainsi que la poursuite intvitable d’inttrets nationaux dans tous les efforts internationaux - impliquerait la ntcessitt d’une certaine prudence et circonspection en deman- dant I’engagement international pour soutenir la dtmocratie et les droits de I’homme.

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notion de dtmocratie. Beaucoup soutiendraient par exemple que le droit i des besoins fondamentaux tels qu’un minimum alimentaire et une habitation acceptable, ainsi que le droit au travail, devrait etre i n c h dans la notion de droits dtmocratiques. Par contraste, dans les pays en dtveloppement, de nombreuses personnes plaideraient non seulement en faveur d’une hitrarchie de droits (les droits materiels fondamentaux faisant souvent l’objet d’une plus haute prioritt) mais insisteraient aussi sur la conciliation des attributs “universels” de la dtmocratie avec les systtmes de valeurs et les cultures spt- cifiques d’un peuple.

En examinant l’tvolution historique de la dtmocratie, il est aussi impor- tant de noter comment cette notion a peu i peu pris de l’ampleur au cours de sitcles. I1 convient de rappeler par exemple que, lorsque les dtfenseurs des droits naturels plaident passionntment en faveur des ”droits de l’homme” au dix-septitme et au dix-huititme sitcles, ils n’ont pas tenu compte des droits de la femme, pas plus qu’ils n’ont fait rtftrence aux droits des gens de cou- leur. Et & notre propre tpoque, il est important de rappeler la ntgligence totale affichte par les puissances coloniales en ce qui concerne les droits dtmocratiques et humains des peuples qu’ils ont subjuguts. Nous devrions noter par ailleurs que ce n’est qu’au cours de ce sitcle que la notion de “droits tconomiques” comme composante inttgrante des droits dimocrati- ques a gagnt un certain terraid. .

La question des droits qu’il faudrait considkrer comme des droits fonda- rnentaux de l’homme est aussi sujette i uri dtbat analogue. Tandis que beau- coup soutiendraient que les droits inscrits dans la Dtclaration universelle des Droits de I’Homme des Nations Unies constituent les droits fondamentaux de l’homme, cette dtclaration doit encore ttre largement acceptte. En outre, par suite de raisons culturelles et religieuses, un grand nombre de droits de l’homme tnumtrts dans la Dtclaration de l’ONU ne peuvent &tre acceptts par certaines socittts. Le statut des femmes est un cas d’esptce. Dans cer- taines socittts, les valeurs culturelles et religieuses attribuent aux femmes une situation voisine d’une proprittt. Pourtant, dans de nombreuses socittts - il y a un fort mouvement pour accorder aux femmes les mtmes droits qu’aux hommes. Ici de toute tvidence, il existe des conflits entre ce qui, & premitre vue, peut apparaitre des droits de l’homme universellement acceptts et les valeurs de socittts et cultures particulitres6.

La coopiration internationale pour la promotion de la dtmocratie et la dtfense des droits de l’homme sera affectte non seulement par l’absence d’un consensus net sur ces questions, mais aussi par des considtrations dont les nations doivent nkcessairement tenir compte, en dicidant de leur engagement dans ces efforts de cooptration. A cet tgard, l’engagement des nations est, et sera toujours sujet B des calculs d‘inttrtts nationaux. Si la communaut6 internationale a effectivement pris de nombreuses mesures qui ont t t t large-

L’cxpansion, avcc le temps, de la notion dc dimocratic, et tout Ic temps qu’il a fallu pour arriver aux concepts moderns de dtmocratit. comportent des implications importantes pour la promo- tion, sur Ic plan international, de la dkrnocratie dans des socittks ayant des traditions dkmocrati- qua limitks. C‘cst qu’en brtf, dans ces sociitks. les institutions dimocratiques prendront ntces- sairement du temps pour s’ktablir, et qui plus est, pour prendre racine. 11 est aussi tvident qu’on nc peut attendre que tous Is droits dtmocratiques et humains qui sont actuellemcnt reconnus dans Ie monde occidental comme des droits fondamentaux. se voiexit accorder Ies mtmes valeurs ct poi& dans les socittb nouvellcmcnt cngagts dans la dtmocratisation.

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ment motivtes par des prtoccupations humanitaires, le bilan cependant de sa promotion de la democratie et de la dtfense des droits de l’homme n’a pas toujours fait l’objet de prtoccupations si elevtes’.

L’absence des notions de dtmocratie et des droits de l’homme universelle- ment admises, ainsi que la poursuite intvitable par les pays de leurs propres intCrCts nationaux, ont de nombreuses implications graves pour la cooptra- tion internationale en matikre de promotion de la dtmocratie et de bon gou- vernement et de dCfense des droits de l’homme. Cela implique en premier lieu, que les rkgles et principes qui devraient rtgir l’intervention internatio- nale devraient Ctre formults de manitre B tenir compte des divergences de vue et d’intCrCt entre nations. Et B la lumitre de ces divergences - dont quelques-unes pourraient Ctre d’une grande portte - une certaine circons- pection et prudence sont ntcessaires pour s’assurer qu’un consensus se dtga- ge entre les nations. Comme ce sera discutt en dttail plus loin, cela appelle aussi certains accords et ententes entre la communautt internationale et ces pays ou peuples au nom desquels la communautt internationale peut vouloir intervenir.

111. Quetques principes fondamentaux qui devraient rCgir la coopCration internationale pour promouvoir la dkmocratie et les droits de I’homme

L’absence de notions de dtmocratie universellement admises, ainsi que les divergences de points de vue sur les droits qui constituent les droits fonda- mentaux de l’homme, impliquent la ntcessitt d’une delimitation prudente des conditions dans lcsqucllcs la communnut6 internationale devrait s’engager B promouvoir la dtmocratie et les droits de l’homme. Cela appelle aussi un examen attentif et des dtlibtrations prudentes sur les types de sanctions que la communautt internationale devrait autoriser pour repondre aux violations perGues des principes dimocratiques ou droits fondamentaux de l’homme.

La cooptration et I’engagement sur le plan international devraient &tre guides en premier lieu par la reconnaissance de la legitimite de systkmes poli- tiques, tconomiques et culturels nationaux difftrents. en d’autres termes, la communautt internationale ne peut pas prttendre que tous les pays aient des systtmes identiques d’organisations politiques ou de formes de gouverne- ment, mCme s’il semble exister present une certaine convergence vers les idtaux de democratie et de defense des droits de l’homme. Autrement dit, il faut reconnaitre la ltgitimite d’un “espace politique et culture1 national’’ dans la determination des systtmes de gouvernement et dans la reconnais- sance et le respect des droits fondamentaux de l’homme

Des questions analogues peuvent etre soulevtes eu Cgard A la dtmocratie et aux rtgles habituelles de gouvernement. Comme on le discutera en detail, ci-dessous, pour des raisons soit tradition- nelles, culturelles ou religieuses, un peuple peut accepter sinctrement des formes non dtmocrati- ques de gouvernement. ’ A cet tgard, il convient de noter que dans les regions ou pays ou les interits vitaux des nations puissantes sont en jeu, I’absence de dtmocratie ou de violation flagrante des droits de I’homme n’a pas toujours attirt beaucoup d‘inttrtt ou la condamnation de la communautt internationale. De mime, la communaute internationale n’a pas toujours t t t franche dans son appui aux trans- formations dimocratiques dans les regions ou pays qui peuvent ne pas prtsenter d’inttret particu- lier, pour les membres puissants de la communautt internationale.

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I1 est kvident qu’une pareille notion d”‘espace national” lkgitime peut entrer en conflit avec le principe plus large d’“humanit6 partagke”. On pourrait aussi soutenir que la notion d’ “espace national” ne diffkre pas beaucoup de celle de “souverainetk nationale” que la communautk interna- tionale, A bien des kgards, a dkjA commenck A restreindre. Mais une faGon de concilier ces principes apparemment contradictoires est de ne reconnaitre la supkrioritt de la 1Cgitimitk du principe d’ “humanitt partagke” que dans cer- taines conditions spkcifiques. En d’autres termes, c’est mieux de reconnaitre que la communautk internationale a Ie droit et le devoir moral d’exprimer sa profonde prtoccupation et mCme de prendre des mesures lorsque certaines conditions clairement dkfinies prtvalent. On peut en citer quelques unes: un cas de tentative de gtnocide contre un peuple, qu’il s’agisse d’une minoritt religieuse ou ethnique, et de l’kclatement d’une crise humanitaire aux porpor- tions inacceptables, soit A la suite d’un trouble de la loi et de I’ordre soit de la negligence criminelle de la part d’un gouvernement. Dans ces types de vio- lations extraordinaires des droits fondamentaux de I’homme ou de niveaux inacceptables de souffrance humaine, I’engagement de la communautt inter- nationale pourrait Ctre jug6 ltgitime et nettement justifik.

Un second principe qui devrait rtgir I’engagernent international pour sou- tenir la dtmocratie et les droits de l’homme, c’est lorsqu’un peuple exprime clairement le dtsir d’exercer ses droits dtmocratiques et humains, mais est frustrk par I’action repressive de son propre gouvernement. La logique d’une intervention dans ces conditions est la coincidence des systkmes de valeurs entre les valeurs des droits dtmocratiques et humains internationalement admises (telles qu’inscrites par exernple, dans la Dtclaration des Droits de 1’Homme des Nations Unies), et les valeurs politiques et culturelles d’un peuple. L’engagement en pareil cas se justifie a cause du mtpris manifeste des aspirations clairement tnonctes d’un peuple. Dans ces types de condi- tions, la rtponse approprike de la communautt internationale serait en gtnt- ral des mesures punitives telles que la suspension des flux de ressources, ou dans des cas trks graves, I’imposition d’embargos tconornique et commercial. ’.

La communautk internationale devra toutefois respecter strictement I’op- posk du type de situation ci-dessus. I1 lui faudra act-cptcr le principc dc non- ingkrence si un peuple, soit pour des raisons religieuses ou culturelles, sou- tient sinckrement un systkme particulier de gouvernement, mCme si un tel systkme peut contredire des principes dtmocratiques gCnCralement admis et mCme s’il reste en-dessous du respect des principes des droits de l’homme. Dans le contexte contemporain, ceci signifierait par exemple I’acceptation de systkmes politiques fondks sur la loi de la Sharia, s’il est prouvk que la grande majoritk souhaite avoir ses rapports politiques et sociaux rkgis par un tel systkme religieux. mais le droit de la majorit6 d’ktablir un tel systkme politique ne lui donne pas aussi d’un autre cGtk, la libertt d’imposer par la force, ses croyances ou sa volontt A une minoritk qui pour des raisons reli- gieuses ou autres peut ne pas le soutenir. ,

Enfin un troisikme principe qui devrait Ctre appliquk est le principe de non sklectivitt. En d’autres termes, la communautk internationale, dans l’utilisa- tion du principe d’“humanitk partagke” pour justifier son engagement dans les affaires des pays pris individuellement, devra dkmontrer son impartialit6 dans l’application de ce principe. A ce jour, il existe des cas nets de sklecti- vitk, non seulement dans les actions que des pays individuels engagent en

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rtponse aux violations des droits de l’homme et des principes dkmocratiques, mais encore dans la mise en Deuvre des rksolutions des Nations Unies. Si le principe d’humaniti partagCe doit Ctre effectivement un principe universelle- ment admis et utilist pour justifier l’engagement de la communautC interna- tionale dans les affaires des nations, il ne peut 1’Ctre que s’il est appliqut de manitre non discriminatoire.

L’application impartiale des principes ci-dessus justifierait le renforcement et la dCmocratisation des organisations internationales qui, au nom de la communautt internationale, seraient engagkes dans la promotion de la dCmo- cratie et la dtfense des droits de l’homme. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, les Nations Unies et en particulier, son Conseil de skcuritk, ont CtC les principaux organes qui ont autorisC les interventions internationales, tant militaires que non militaires, contre des Etats qu’on a vu violer les principes des Nations Unies. Comme note auparavant, avec la fin de la guerre froide, les Nations Unies sont de plus en plus engagkes dans la promotion de la dCmocratie et des droits de l’homme dans leurs pays membres. Mais malgrt ce plus grand engagement, il y a toujours une place importante pour le ren- forcement et la rtforme des institutions des Nations Unies pour leur permet- tre d’assurer leurs nouvelles responsabilitCs plus efficacement et plus effec- tivement.

IV. Domaines de coopkration internationale pour promouvoir la dkmocratie et les droits de l’homme

La coopkration internationale pour promouvoir la dkmocratie et les droits de l’homme pourrait sans doute Ctre mieux examinCe, discutke aux niveaux national et international. Au niveau national, la coopCration internationale comporterait des programmes et activitks pour soutenir l’kvolution des sys- tkmes politiques nationaux de gouvernement vers des formes dkmocratiques, ainsi que des programmes pour soutenir la dkfense des droits fondamentaux de l’homme. Ces programmes, pour Ctre lkgitimes et durables, auront toute- fois besoin d’etre complCtCs par des rkformes des systtmes politiques et kco- nomiques internationaux pour les rendre plus dbmocratiques et adaptks aux besoins de la grande masse de l’humanitk. . Coopbration internationale au niveau national

La coopCration internationale pour promouvoir la dbmocratie et les droits de l’homme au niveau national n’est pas problCmatique lorsqu’il y a des mouvements tangibles vers des formes dkmocratiques de gouvernement, dans les sociCtCs en question et que de telles kvolutions sont accompagnkes d’invi- tations Cmanant du gouvernement ou d‘organisations populaires demandant l’assistance de la communautk internationale. Dans ces conditions, la com- munautC internationale devrait fournir diverses formes d’assistance pour sou- tenir la transformation des systkmes politiques et Cconomiques. En effet dans nombre de pays pauvres en dkveloppement et manquant de ressources, ce soutien peut Ctre dCcisif pour la mise en ceuvre des rCformes dkmocratiques avec succks.

La coopCration internationale pour soutenir la dkmocratie et les droits de l’homme devient problkmatique cependant, lorsque ces conditions intkrieures favorables n’existent pas. En cas de suppression Cvidente par un gouverne-

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ment du dCsir exprimt par un peuple d’exercer ses droits dCmocratiques et humains, la communautk internationale peut autoriser des mesures punitives. Dans des cas plus flagrants, un soutien international direct peut aussi Ctre apportt ii des groupes politiques de l’opposition*. Par ailleurs, dans des situations oh, soit pour des raisons religieuses ou culturelles, une socittt accepte d’une manibre gCnCrale un systbme de gouvernement qui peut parai- tre aux Ctrangers peu dCmocratique ou violant les droits fondanmentaux de l’homme, la communautk internationale ne peut pas faire grand’chose. Elle ne peut pas prksumer savoir ce qui est meilleur pour un peuple que ce peuple lui-meme, et prendre ainsi des mesures pour soutenir des rCformes politiques et tconomiques internes.

Dans ce cas, lorsqu’il existe un appel clair de la part d’un gouvernement ou d’un peuple, en vue d’une assistance internationale, les types de pro- grammes internationaux de coop6ration pour promouvoir la dCmocratie et le soutien en faveur des droits de l’homme peuvent se classer en trois groupes : - les programmes et activitts pour “moderniser’ 1’Etat ; - les programmes et activitks pour “renforcer la sociCtC civile et ; - les programmes et activitts pour promouvoir la rkforme et la croissance

tconomique pour permettre d’assurer le caractbre durable des rCformes et du processus dhmocratiques.

La modernisation de I’Etat. Le dkveloppement de systbmes dtmocratiques de gouvernement ntcessiterait ce que certains ont appelC la “modernisation de 1’Etat”9. Ce concept se rtf2re li l’importance de I’amClioration du fonc- tionnement de I’appareil administratif du gouvernement de telle sorte que : le travail gouvernemental devienne plus ouvert et accessible, les dtcisions et l’utilisation des ressources deviennent plus transparentes et que les pouvoirs de l’Etat sur les citoyens soient delimites et nettement circonscrits. Pour que ces conditions existent, il faut promulguer des rtgles administratives et finan- cibres claires et Ctablir des codes et rtglements de la fonction publique qui dkfinissent les devoirs et les droits des fonctionnaires. I1 est tout aussi impor- tant qu’un organe judiciaire indkpendant et honnete - auquel les citoyens peuvent recourir - soit institut. Enfin, il faudrait permettre le fonctionne- ment en toute IibertC de mCdia Cnergiques, vigilants et indtpendants.

Les programmes visant la modernisation de 1’Etat pourraient ainsi cons- tituer un domaine important de coopCration internationale pour la promo- tion de la dimocratie et des droits de l’homme. La communauti internatio- nale pourrait prendre diverses mesures pour renforcer les institutions de 1’Etat. Elle pourrait dispenser une formation pour renforcer les systbmes financier et administratif contribuer li 1’Claboration des codes civil et admi- nistratif et aider aussi les pays li mettre en place des systbmes judiciaires effi- caces et independants. Les bailleurs de fonds rtpugnent souvent 5 fournir ces types d’assistance technique et financibre en faveur du renforcement institu- tionnel Ctant donnC que les rtsultats des projets qui visent 5 renforcer la capacitC administrative ne sont pas souvent trbs tangibles; il faut en outre, attendre trbs longtemps pour que leurs avantages se manifestent. Ntanmoins,

* Ce fut le cas, par exemple, avec l’assistance internationale apportte aux mouvements de IibCra- tion en Mrique. Voir le Rapport de la Commission Sud, The Challenge to the South, (Londres: Oxford Univer- sity Press 1990) pp. 116-1 18 en vue d‘une bonne discussion de ce thtme.

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les activitCs de modernisation de 1’Etat pourraient, B long terme, avoir autant d’impact positif, sinon plus, sur le dheloppement (dkmocratique) gCnCral d’une nation.

Renforcement de la socikte civile. La ripartition du pouvoir politique et Cconomique entre les citoyens est une caractbristique fondamentale de la dimocratie. Les systkmes sociaux totalitaires ou repressifs sont tout B fait le contraire - la concentration du pouvoir politique et tconomique entre les mains d’une petite minorite, qu’il s’agisse des membres du parti, d’une oli- garchie, ou des fonctionnaires de l’Etat. Les programmes et activitQ destinks B renforcer les innombrables institutions de la sociCtC civile devraient donc constituer une important domaine de coopCration internationale en faveur de la dimocratie et des droits de l’homme. Une sociCtC civile plus forte - qui se distingue clairement des institutions de 1’Etat - est indispensable pour lui permettre d’avoir un contrepoids pour contrebalancer les pouvoirs de l’Etat, et de ce fait garantir les conditions fondamentales de la dtmocratie.

Le soutien de la communautC internationale en faveur de la soci6tC civile peut emprunter plusieurs formes. I1 peut prendre la forme d’assistance tech- nique et financikre aux organisations populaires au niveau de la commu- nautk. D’autres types de soutien peuvent revetir la forme de soutien techni- que et financier aux programmes visant B amiliorer la “formation politique” gtnkrale d’une population. A cet Cgard, les projets qui assurent une forma- tion en matikre de dimocratie et des droits de l’homme sont I mCme de favoriser une ivolution vers des formes dimocratiques de gouvernement, ainsi que la naissance &institutions dimocratiques au niveau local. Et les programmes d’amilioration des taux d’alphabitisation gCnCrale peuvent aussi aider le peuple en lui permettant d’exercer pleinement ses droits dCmocrati- ques fondamentaux. Le soutien de la communauti internationale devrait enfin s’itendre Cgalement aux institutions nationales et indipendantes de recherche et de politique. Celle-ci pourraient jouer un rale important en cherchant B adapter les principes dtmocratiques genCraux aux conditions his- toriques particulikres d’une sociCtC. Elles peuvent aussi fournir au peuple des Ctudes et Cvaluations Cconomiques, politiques et sociales indbpendantes afin de permettre aux citoyens de porter des jugements et de prendre des dCci- sions en connaissance de cause.

Promotion de la croissance et des rkformes bconomiques. Plusieurs per- sonnes avanceront que la durabilitC du processus dimocratique dans les pays en diveloppement est, et sera tributaire du succbs que ceux-ci connaitront en crCant des Cconomies de marchC, ainsi que du rythme de croissance de leurs Cconomies. D’aprb cet argument, pour que la dCmocratie prenne racine, le pluralisme dans le domaine politique - qui implique une repartition du pouvoir politique - devrait avoir sa repercussion dans l’artne iconomique sous forme de repartition du pouvoir Cconomique entre les citoyens. Etant donnC que la concentration du pouvoir Cconomique, que ce soit dans une bureaucratie Ctatique ou une oligarchie, a, historiquement, soutenu les sys- tkmes politiques totalitaires ou ripressifs, l’instauration d’iconomies de mar- chi, de mCme que la naissance d’un secteur privC solide et indipendant, constituent les conditions sine que non du succbs des transformations demo- cratiques.

Une telle ripartition du pouvoir tconomique devrait Ctre sauvegardte par les attributs fondamentaux de l’iconomie de march6 qui sont notamment : la

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propriCtC privCe des moyens de production, la libre concurrence entre les agents Cconomiques, le droit d’entreprendre et de cesser librement tout type de production ou d’emploi, la dktermination des prix et l’affectation des res- sources, grice au libre jeu des forces du marcht. De meme, les conditions politiques et juridiques minimales necessaires pour assurer le fonctionnement harmonieux d’une 6conomie de march6 sont : un systkme transparent et non discriminatoire de droits de propritti, un systkme juridique efficace pour I’exCcution des contrats et engagements juridiques, un cadre favorable A la concurrence, B la libre circulation et l’Cgalit6 devant la loi pour tous les agents Cconomiques.

En rCponse, d’une part, aux difficult6s Cconomiques qu’ils ont connues au cours de la “dtcennie perdue” des annkes 80, et d’autre part, au mouvement de dtmocratisation en cours, bon nombre de pays d’Afrique, d’Asie et d’AmCrique latine ont cherchC B crier des Cconomies de march6 pleinement Cpanouies. En effet, la ruCe vers la creation d’tconomies de march& ressem- ble, par son intensitt, au mouvement dbmocratique mondial. En Afrique par exemple, la grande majorit6 des pays ont entrepris des rtformes Cconomiques radicales qui ont entrain6 l’abandon des anciens systkmes Cconomiques basts essentiellement sur I’intervention et le contr6Ie de l’Etat, en faveur de la crkation d’Cconomies de march&. Le soutien apportC par les gouvernements au secteur privt a CtC pour ces rCformes une initiative complimentaire. Dans bon nombre de pays, le secteur privt est de plus en plus p e r p comme un agent vital de la croissance Cconomique rapide.

Dans de nombreux pays, notamment dans ceux du continent africain, les rCsultats des efforts de rCforme Cconomique sont, B ce jour, plut6t mitigis. Dans certains pays, les indices de relance et de croissance Cconomiques sont quelque peu encourageants, et un secteur privC Cnergique, encouragC par le changement des politiques Cconomiques, commence B Cmerger. Dans d’autres pays, il est 6vident qu’il faudra encore du temps pour assurer le dtveloppe- ment d’un secteur dynamique, capable de jouer le r d e qui lui est dtvolu. En condquence, la transition des systimes Cconomiques dirigCs par 1’Etat vers de dritables kconomies de march6 prendra beaucoup plus de temps, en par- ticulier dans les pays africains les plus dtmunis. I1 a aussi CtC constati qu’un des parambtres clC du succbs des rCformes Cconomiques est constitut-pr le volume et l’envergure du soutien extCrieur que reqoivent les pays. Ceux qui ont r6ussi h mobiliser d’importantes ressources extkrieures B I’appui de leurs efforts, de reforme ont pu rkaliser de grandes transformations structurelles. Par contre, les efforts de reforme se sont effondrCs dans les pays qui ont eu du ma1 B obtenir le soutien extirieur requis.

Mais au-delh des efforts de rCforme tconomique qui doivent nicessaire- ment accompagner la transition vers la dkmocratie, la durabilitt du proces- sus de rCforme dkmocratique hi-mCme dtpend finalement du rythme de la croissance Cconomique atteint dans ces pays. Une croissance Cconomique rapide est indispensable pour assurer la production des biens et services nCcessaires B I’amtlioration du bien-etre matCriel des citoyens, et pour arriver A rCduire le nombre de personnes vivant dans une pauvretC absolue. Une Cconomie B croissance rapide est aussi indispensable pour crCer des emplois, et assurer des moyens de subsistance dkcents h une main-d’axvre qui Cvolue vite”. En l’absence de ressources et d’emplois que procure une Cconomie h croissance rapide, on se demande si le processus de dCmocratisation pourra 2tre maintenu pendant longtemps. Car la stagnation et le dCclin de 1’Ccono-

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mie - se traduisant par une spirale descendante des niveaux de vie - ris- queraient sans aucun doute de s’avc5rer un terrain fertile pour les forces anti- dbmocratiques qui finiraient bien par &ouffer et renverser les institutions et les processus dkmocratiques.

Le rythme rapide de la croissance Cconomique dCpend d’un certain nom- bre de facteurs dont les plus importants sont : un niveau ClevC de 1’Cpargne et de l’investissement, un environnement macroCconomique stable (caractCrist par un taux d’inflation faible, une croissance stable de la masse monetaire et des situations soutenables de la fiscalit6 et de la balance des paiements), des flux suffisants de ressources extCrieures (par une combinaison de flux de capitaux privCs et publics), et une intervention judicieuse de I’Etat dont un investissement public suffisant pour assurer la mise en place de l’infrastruc- ture sociale et mattrielle pouvant favoriser la croissance Cconomique. Les efforts de rCforme Cconomique engagts par bon nombre de pays en divelop- pement visaient i crCer les conditions nicessaires d’une croissance Cconomi- que rapide. Quelques pays ont vu leurs efforts couronnts de succlts, par contre, pour bon nombre d’entre eux, en particulier des pays africains trks pauvres, tout reste A faire pour assurer une relance et une croissance Ccono- miques soutenables. Leurs efforts ont CtC battus en brhche non seulement par 1’hCritage lourd du pass6 mais aussi par l’environnement extCrieur exception- nellement dCfavorable de la dCcennie Ccoulte y compris des cours des pro- duits de base les plus bas jamais enregistrbs, un endettement Cnorme, des taux d’intQCt blevCs et des rkductions sbvtres des flux de capitaux extCrieurs. Aussi, faute de gros efforts A I’tchelon international pour amCliorer l’envi- ronnement Cconomique exttrieur auquel se heurtent bon nombre de pays en dheloppement, il est peu probable que ces pays atteignent durablement des niveaux ClevCs de croissance Cconomique.

Compte tenu du lien essentiel qu’il y a entre la dCmocratie et les Ccono- mies de marcht, un important domaine de coopCration internationale pour le soutien a la dbmocratie et aux droits de I’homme doit forcCment Ctre un sou- tien plus grand aux rCformes Cconomiques engagCs par les pays en divelop- pement. La cooptration internationale devrait aussi viser i soutenir les efforts que les pays en dtveloppement fournissent pour atteindre des taux Cleds de croissance Cconomique. LA aussi, le soutien international peut Ctre multiforme. Mais au regard des pCnuries aigui3 de ressources extCrieures que connaissent bon nombre de pays en developpement - en particulier ceux d’ Afrique - l’accroissement des flux des ressources extkrieures en faveur des pays en dCveloppement et surtout en faveur des plus pauvres d’entre eux. Une autre mesure importante que la communautb internationale peut pren- dre a cet Cgard est la mise en euvre de mesures relatives A une remise subs- tantielle de la dette extkrieure de ces pays de manibre A dCgager des res- sources additionnelles pour l’investissement.

Ces deux mesures sont t r b importantes mais la communautC internatio- nale devrait les complCter par d’autres mesures d’appui aux efforts de rtfor- me et de croissance Cconomiques engages par les pays en developpement. Ces mesures complCmentaires sont les suivantes : appui technique et financier au diveloppement de l’entreprise privCe, assistance pour l’amblioration et la

lo Sur le seul continent africain, I’effectif de la main-d‘muvre doit se situer A quclque 70 millions de personnes dans les anntes 1990.

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simplification des rbglements et regimes fiscaux officiels, assistance technique pour la rCvision et le perfectionnement des codes de commerce et les lois foncibres, et soutien technique pour le renforcement des organes rkgulateurs et pour la simplification et la rationalisation des dgles qui rCgissent les milieux d’affaires”.

Coopkration internationale a 1 Ychelon rkgional et mondial La coopCration internationale pour la promotion de la dkmocratie et des

droits de l’homme dans chaque pays devra Ctre complttte par des efforts visant B amtliorer la gestion du monde, et par des efforts de rCforme du sys- tbme Cconomique international afin que celui-ci rCponde mieux aux besoins de la plus grande partie des populations des pays en dtveloppement. En effet, pour que les efforts nationaux de rCformes politiques et Cconomiques soient couronnts de succ&s, il leur faut un soutien rCgional et international.

Amdlioration de la gestion du monde. Des mesures visant A amCliorer la gestion du monde doivent Ctre axCes sur le r61e des Nations Unies, et sur les voies et moyens de rendre cette institution plus dkmocratique et plus effi- cacel*. Pendant une grande partie de son existence, l’organisation des Nations Unies a CtC le reflet des tensions et conflits qui ont CmaillC l’bre de la guerre froide, les superpuissances tirant sur les ficelles pour utiliser l’institu- tion pour l’avancement de leurs propres programmes politiques. Mais avec la fin de la guerre froide et la convergence apparente des opinions sur des ques- tions telles que la dCmocratie et les droits de l’homme, il importe que 1’0r- ganisation des Nations Unies commence A jouer plus pleinement le r61e qui lui incombe dans les efforts visant A amCliorer la gestion du monde. Pour cela, il faudra une rtforme et un renforcement des Nations Unies. une des mesures les plus importantes B cet Cgard est la reforme du Conseil de sku- rite en vue d’une reprisentation equitable et correcte de toutes les rtgions et nations du monde..

La redynamisation et la rCforme des Nations Unies peuvent apporter un soutien non negligeable aux Cbauches de la dCmocratie dans plusieurs pays et commence A jouer plus pleinement le r61e qui lui incombe dans les efforts visant B amCliorer la gestion du monde. Pour cela, il faudra une rtforme et un renforcement des Nations Unies. L’ONU itant le seul organe supranatio- nal A pouvoir ltgitimement jouer ce r61e dans toutes les rigions du monde, son intervention pourrait Ctre mieux acceptie par les Etats souverains que l’intervention d’autres institutions ou pays. A cet Cgard, il convient cepen- dant de noter que les institutions rdgionales peuvent aussi jouer des rbles importants. En Afrique par exemple, le renforcement de l’organisation de 1’UnitC africaine (OUA) pourrait amener cette institution a jouer un grand r61e en apportant son appui aux efforts de rCforme des systkmes politiques engages par les pays membres. De mCme, la Banque africaine de diveloppe- ment (BAD) joue et continuera, sans nu1 doute, B jouer u n r61e de premier plan dans les efforts des pays membres rkgionaux visant A rtformer leurs sys- tbmes Cconomiques et ii rCaliser des taux plus ClevCs de croissance Cconomi- que.

‘ I La sous-section suivante prksente un examen des diverses autres mesures que la communautk internationate devrait prendre pour amCliorer I’environnement kconomique extCrieur pour les pays en dCveloppement.

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Reforme du s y s t h e economique global. De grandes rtformes du systtme tconomique mondial seront tgalement ntcessaires si I’on tient A ce que les efforts de rtforme Cconomique des pays en dtveloppement soient couronnts de succts et que, par extension, I’tvolution vers des systtmes dtmocratiques de gestion se maintienne durablement. Bon nombre de pays en dtveloppe- ment, et en particulier les pays pauvres, ont des tconomies trts ouvertes qui sont influenctes par l’tvolution de I’tconomie mondiale et plus particulikre- ment par les fluctuations des cours internationaux des produits de base. Ces tconomies sont aussi fortement tributaires des flux externes de capitaux tant publics que privts, ntcessaires pour soutenir l’investissement et la croissance. Comme prtctdemment mentionnt, l’environnement Cconomique externe des anntes 1980 et du dtbut des anntes 1990 a t t t trts dtfavorable pour ces pays. C’est ainsi que pour bon nombre d’entre eux, les efforts de dtmocrati- sation et de rtforme tconomique ont t t t engagts a une ptriode particulikre- ment ntfaste.

Par constquent, la communautt i nternationale devrait prendre un certain nombre de mesures tant pour contribuer aux efforts de ces pays que pour soutenir les objectifs de dtveloppement des peuples des pays en dtveloppe- ment. Outre de l’augmentation des apports de ressources exterieures et de I’adoption de mesures efficaces visant P alleger la dette des pays pauvres, la communautt internationale devrait envisager certaines des trts importantes mesures compltmentaires suivantes :

les accords internationaux en vue de stabiliser les prix des matitres pre- mikres a court et a moyen termes et contribuer A plus long terme aux efforts de diversification des pays en dtveloppement ; les rtformes des rtgles du commerce et du systkme monttaire internatio- nal en vue de supprimer ou de rtduire les mesures protectionnistes du Nord et a’accroitre la liquiditt globale pour favoriser I’accks des pays en dtveloppement ; les mesures visant a faciliter l’accks la technologie moderne et a son transfert des pays industrialists aux pays en dtveloppement.

RCsumt! et conclusion Tout au long de la dtcennie tcoulte, on a assist6 a un mouvement mon-

dial en faveur de la dtmocratie et des droits de l’homme. Ce mouvement a t t t , en partie, la rtaction aux crises politiques, tconomiques et sociales aux- quelles sont confrontts plusieurs pays, occasionntes surtout par I’tchec des anciens systtmes ttatistes et de rtpression sociale. G r k e aux progrts techno- logiques en m a t i t r e d e t t l t c o m m u n i c a t i o n s , l ’ in te rd tpendance accrue, et les liens entre les peuples ont tgalement contribut au renforcement de ce mouvement mondial. En permettant au monde de porter ttmoignage des tvtnements qui se produisent partout, cette nouvelle technologie a favo- risk la naissance d’un sentiment aigu ”d’humanite partagke” entre les peuples du monde. Ainsi, les affaires de chaque pays deviennent de plus en plus l’af- faire de tous. L’une des constquences est l’apparente acceptation de la res- ponsabilitt morale de la communautt internationale d’intervenir en cas de

”Ces questions sont examintes en dttail dans la dtclaration de l’lnitiative de Stockholm sur la stcuritt et la gestion du monde “Responsabilitt commune dans les anntes 1990” (Stockholm 1991).

76 AFRICAN DEVELOPMENT REVIEW souffrances hurnaines immenses, ou lorsque les droits de l’homme sont violes de faqon monstrueuse vis-A-vis d’un peuple. L’argument selon lequel la cornrnunautt internationale, avec le concours des Nations Unies devrait contribuer aux efforts nationaux en vue de transformer les systtmes politi- ques conformkment aux normes dtmocratiques, giniralement admises, gagne (1 ( I term i i i .

Mais en dCpit de cette convergence apparente des opinions politiques et de l’engagement accru de la communautt internationale pour soutenir la dtmo- cratie et dtfendre les droits de l’homme, il est toujours ntcessaire de recon- naftre la validitt et la ltgitimitt des difftrents systtmes et arrangements poli- tiques qui rtflhent les difftrentes traditions, cultures et systtmes de valeurs, qui peuvent ne pas Ctre toujours en accord avec les principes de la dtmocra- tie et des droits de l’homme. I1 faudrait par constquent, que la communautt internationale reconnaisse le droit d‘une nation ou d’un peuple d‘avoir son propre “espace politique et culture1 national”. Elle ne saurait donc exiger que tous les pays aient des systtmes identiques de gouvernement.

A la lumitre du conflit apparent qui existe entre le principe “d‘humanitt partagte” qui peut ltgitimer l’ingtrence de la communautt internationale dans les affaires des Etats souverains et le principe “d’espace politique et cul- turel national” il est indispensable de dtfinir clairement les conditions dans lesquelles la prioritt sera accordte au premier principe. Trois principes qui devraient orienter ces interventions ont Ctt proposts dans ce document. Pre- mibrement, il est soutenu que la communautt internationale a le droit ainsi que le devoir moral d’exprimer sa prioccupation et de prendre des mesures approprides en cas de graves violations des droits de I’homme - telles que les tentatives de gtnocides - et lorsque les crises humanitaires atteignent des proportions inacceptables. Deuxibmement, dans des cas oii les aspirations d’un peuple A exercer ses droits democratiques sont frustrtes par un gouver- nement rtpressif, il est prtconist que la communautt internationale prenne des mesures pour soutenir les aspirations de ce peuple. Par contre, lorsque pour des motifs religieux ou culturels un peuple soutient un systbme politi- que susceptible d‘aller A l’encontre des principes dkmocratiques gtntralement admis, la communautt internationale doit se garder de toute ingtrence. Troi- sibmement, l’engagement de la communauti internationale ne peut recueillir la ltgitimitt mondiale requise, que si le principe de non stlectivitt est stric- tement appliqut, pour assurer que les mesures que pourrait prendre la com- munautt internationale seront examintes et appliqutes de manib-e impar- tiale.

Lorsque les conditions approprites de coop6ration internationale pour la promotion de la dtmocratie et des droits de I’homme sont riunies, cette coopkation pourrait se traduire au niveau national par des programmes et des activitts visant A : (i) moderniser l’Etat, (ii) renforcer la sociCtC eivile et (iii) promouvoir la rCforme et la croissance Cconomlque, pour permettre d’assurer la durabilitt des reformes et des processus dbmocratiques.

Ntanmoins, les programmes et activitts entrepris au niveau national devraient ttre complttts par la cooptration internationale tant pour amtlio- rer la gestion mondiale que pour amCliorer le syst&me Cconomique intema- tional et les rendre plus aptes A rtpondre aux besoins de toute l’humanitt. Une gestion mondiale amtliorte ntcessitera la rCforme et le renforcement du systtme des Nations Unies. La rtforme du systtme des Nations Unies devrait

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tendre 4 assurer que toutes les rCgions et ,nations sont reprbsenttes tquitac blement et convenablement, et le renforcement de cette institution devrait viser 4 lui permettre d'assumer plus efficacement et effectivement ses nou- velles responsabilitb aprts la guerre froide.

La rtforme du systtme Cconomique international devrait quant 4 elle, viser une amilioration de I'environnement Cconomique extCrieur des pays en dtve- loppement afin que leurs efforts de r6formes politiques et Cconomiques ne soient pas compromis par de nouvelles situations Cconomiques mondiales n6fastes. Certaines de ces mesures spCcifiques que la communautC internatio- nale devrait prendre 4 cet effet sont: l'augmentation des apports de res- sources destinCes aux pays et aux rigions pauvres, des riductions substan- tielles de la dette ext6rieure des pays les plus dCmunis, la stabilisation des pix des matitres premitres, et des systtmes internationaux en matitre commer- ciale et monCtaire, en vue de supprimer les mesures protectionnistes, accroi- tre la liquidit6 mondiale, pour permettre un plus grand accts aux pays en dCveloppement .