LA BATAILLE DE L'AISNE

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Général BUISSON Capitaine GRIOLET Commandant DESIDERI 1 2 8 Céation de notre amie Marie-Josée Torre de Bravura La bataille de l’Aisne GUERRE 1939 - 1945 Témoignages Nice - Juillet 1994

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1939/1945 AVEC LE 22°BCA

Transcript of LA BATAILLE DE L'AISNE

Général BUISSONCapitaine GRIOLET

Commandant DESIDERI1 2 8

Céation de notre amie Marie-Josée Torre de Bravura

La bataille de l’AisneGUERRE 1939 - 1945

TémoignagesNice - Juillet 1994

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

LES GUERRES DU XXe SIÈCLEÀ TRAVERS LES

TÉMOIGNAGES ORAUX

* *

Collection Michel El Bazeréalisée dans le cadre de l’Association Nationale des Croix de Guerre

et des Croix de la Valeur Militaire

2 Place Grimaldi - 06000Tél. 0493878677

Récits de vie des Anciens Combattants,Résistants, Internés, Déportés, Prisonniers

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Analyse des témoignages

128 - Chef de Bataillon DESIDERIDécédé - Nice

- Capitaine Edmond GRIOLETDécédé

- Général BUISSON - :Décédé

LA BATAILLE DE L’AISNEGUERRE 1939/1945

Écriture : 1940 - Édition Juillet 1994 - 66 pages

POSTFACE DE MICHEL EL BAZE

Pendant que le Général Buisson raconte la bataille de l’Aisne aux officiersprisonniers au Camp de Mailly, le Capitaine Griollet prend des notes que nouspublions ici en même temps que son propre récit de la campagne du 22e B.C.A.commencée le 9 Juin 1940 pour se terminer le 20 Juin par sa rédition aux Allemandsvainqueurs.

Nous avons voulu joindre à ces deux témoignages celui du Chef de BataillonDésidéri des événements du 22 Mai au 23 Juin, écrits par lui le 1er Août 1940 dansce même Camp de Mailly, c’est à dire alors que les souvenirs étaient encorecuisants.

While the General Bush tells the battle of the Aisne to captiveofficers to the Camp of Mailly, the Captain Griollet takes notesthat we publish here at the same time that his clean account theCampaign of 22e B.C.A. begun 9 June 1940 to end 20 June by itsrédition to the German victors.

We have wanted to join in these two testimonies that the Chiefof Battalion Désidéri of events of 22 May to 23 June, documents

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

written by him 1st August 1940 in this same Camp of Mailly, isto tell while souvenirs were again cuisants.

Während der General Buisson den Offizierengefangen im Lager von Mailly die Schlacht bei derAisne erzählt, macht Capitaine Griollet sich Notizen,die wir hier zu gleicher Zeit wie seinen eigenenBericht von dem Feldzug des 22. B.C.A.veröffentlichen, der am 9. Juni 1940 begann und am20. Juni beendet wurde durch seine Niederlagegegenüber den siegreichen Deutschen.

Wir haben diesen beiden Zeugnissen den Bericht desBataillonschefs Désidéri über die Ereignisse vom 22.Mai bis 23 Juni hinzufügen wollen, verfasst von ihmam l.August 1940, in demselben Feldlager von Mailly,das heisst dann, als die Erinnerungen noch frischwaren.

ORDRE N°1 DU GÉNÉRAL BOISSEAUCommandant par intérim la 44e D.I.

Constituée à la date du 1er mars I940, la 44eme Division d'Infanterie se trouvepour la première fois réunie.

Elle s'est rassemblée dans une région riche en glorieux souvenirs militaires, où enI8I4. le génie de Napoléon infligea de rudes échecs aux armées prussiennes,autrichiennes et russes, qui avaient envahi la France, et où, cent ans plus tard, leMaréchal Joffre arrêtait par la victoire de la Marne une nouvelle ruée allemande surParis.

Chasseurs, Fantassins, Cavaliers, Artilleurs, Sapeurs, Conducteurs duTrain,.Militaires de la Prévôté et des Services de la 44ème D.I., vous êtes venus detoutes les parties de la France, pour en finir cette fois avec la nation de proie, qui nesonge qu'à piller et à asservir ses voisins quand ils ne sont pas de taille à sedéfendre.

Vous serez dignes de vos Anciens. Tous, d'un même coeur, vous travaillerez pourfaire de la 44ème D.I. une Division solide, ardente, dont tous les éléments serontsoudés entre eux par une confiance et un dévouement réciproque absolu, uneDivision sur laquelle la France pourra compter en toute circonstance, et quel'ennemi apprendra à redouter.

Constituted to the date of 1st March I940, 44eme Division ofInfantry is found united for the time first.

It has gathered in a rich region in glorious remember military,where in I8I4. the spirit of Napoléon inflicted rough chess toarmies Prussians, Austrians and Russians, that had invadedFrance, and where, hundred later years, the Marshal Joffrestopped by the victory of the Marne a new German rush onParis.

Hunters, Infantrymen, Horsemen, Gunners, Sappers, Driversof the Train, Soldiers of the Prévôté and Services of 44ème D.I.,you have come from all parts of France, to in finish this timewith the nation of prey, that dreams only to loot and to enslaveits neighbors when they are not size to defend.

You will be deserving your Ancient. All, a same heart, youwill work to make 44ème D.I. a solid Division, fiery, whose allelements will be soldered between them by a confidence and anabsolute reciprocal dedication, a Division on which it Francewill be able to count in all circumstance, and that the enemy willlearn to fear.

Begründet am Datum des 1. Marz 1940, befindetsich die 44. Infanteriedivision zum ersten Mal vereint.

Sie hat sich versammelt in einer Region, die reich anehrenvollen militarischen Erinnerungen ist, wo 1814das Genie Napoleon den preussischen, österreichischenund russischen Armeen, die Frankreich überfallenhatten, harte Niederlagen bereitete, und wo, 100 Jahrespater Maréchal Joffre durch den Sieg an der Marneeinen neuen deutschen Ansturm auf Paris aufhielt.

Chasseurs, Fantassins, Kavalleristen, Artilleristen,Pioniere, Zugführer, Militär aus der Region und derAbteilung der 44. Infanteriedivision, ihr seid aus allenTeilen Frankreichs gekommen, um dieses Mal mit derräuberischen Nation, die nur daran denkt, seineNachbarn auszuplündern und zu unterjochen, wenn sienicht Manns genug sind sich zu verteidiger Schluss zumachen.

Ihr werdet Euerer Vorfahren würdig sein. Allewerdet Ihr mit gleichem Mut arbeiten, um aus der 44.Infanteriedivision eine starke, feurige Division zumachen, bei der alle Bestandteile fest mieinander

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

verbunden sind durch eine Zuversicht und eineabsolute gegenseitige Ergebenheit, eine Division, mitder Frankreich in allen Umstanden rechnen kann, unddie der Feind lernen wird zu fürchten.

Index

Abeille Lieutenant -16Ablois -21 - 22 - 27 - 36 - 49Agard Sous Lieutenant -32 -39Ailette -43 -46Aisne -10 - 26 - 29 - 43 - 44 - 47Alsace -29Ambrosi Capitaine -38Andréis Lieutenant -11 -13Anneau Chef de Bataillon -16Arcis sur Aube -23 -38Arcy Pont -9 - 11 - 47Ardisson Chef de Bataillon -16 -29Argonne -43 - 44 - 49Armingeat Général -46Attigny -43Aube -23 - 26 - 38 - 50Aublet Général -45Auxerres -50Avallon -50Ayme Général -45

Ballandras Lieutenant 2-5 - -26 -39 -32-40Bar le Duc -49Bazoches -3 -11 - 15 - 29 - 30 -31 -47 -48Beau Sous Lieutenant -32Becq Capitaine -11 - 14 - 36 -39 -40 -41-25 -26Becq Compagnie -10 - 12 - 13 - 37Bel Lieutenant colonel -10 - 12Bellin -39Bergéres les Vertus -22 -37Berges Capitaine -25Bertin Boussu Général -44Besay Capitaine -39Besson Général -43Bessy Capitaine -12 - 13 - 16 - 17 - 18 -21 - 23 - 25 - 38 - 39Beugneux la Fosse -40

Blanzy les Fismes -11 - 13 - 14 -15 -26- 29 -30 - 31Bodin Sous Lieutenant -14Bois Brûlé 3-6Boisseau Général -1 - 9 -45Bonafos Maréchal des Logis -40Bougnasse Sous Lieutenant -25 -26 -39-40 -41Bourg -11 - 29Boursault -20Braye en Laonnois -9Brenelle plateau de -12Bridoux Général -45Brugny -36Buchères -39Buisson Général -44 - 46 -47Bussat -16

Camp de Mailly -27Canal de l’Ailette -9 - 11 - 26 - 29Canal de l'Oise -43 - 47Canal des Ardennes -43Canal du Nord -43Cardot Chef d’Escadron -21Carle Général -43Causeret Sous Lieutenant -18 - 23 - 24- -26 -38 - 39 - 40Causeret Sous Lieutenant -25Cernon -43Cézanne -49Châlons sur Marne -29 -49Champfleury -22 - 37 - 38 - 50Chaource -50Charonne 2-9Chataignier Lieutenant -18Château Thierry -48Chatillon s/Marne -17 -31 -33 -50Chavonne -10 - 12Chemin des Dames -43Chène la Reine -33Chênes bois des -21Ciaudo Compagnie -11 - 13Clercy 2-5Combet Capitaine -20 - 32 - 34 -37 -39

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Combet Compagnie -15 - 19 - 20 - 24 -34 - 36Comin -11 - 29Congis -43Corbe Général -45Coré Sous Lieutenant -15 -30Cour des Moines -13 - 14Courbeton -39Courcelles -9Courtenot pont de -40Crenay -39Cys la Commune -10 - -11 -12

D’Allard Lieutenant -10Damery -33Darmont Sous Lieutenant -32De Cardailac Lieutenant -17 - 18De Panzer Capitaine -41de Bilemont Général -45de la Porte du Theil Général -43de Lattre Général -45de Mierry Général -46Debeney Général -46Decharmes Général -45Delmas Colonel 18Demaze Général -43Désidéri -Désidéri Chef de Bataillon -18 -34 -25- 29 - 30 - 31 - 32 - 33 - 35 - 37 - 38 -39Devauley Sergent chef -40Dewatre Capitaine -14Dhuizel -9 - 11 - 12 - 14Dijon -50Diot Capitaine -10 - 14 - 16 - 19 - -25 -36 - 39Dommange Capitaine -16Dormans -44 - 48Doyen Général -43Dupassage Capitaine -12 - 17 - 23 - 38

Ecury le Repos -22Elerz Sous Lieutenant -25 -26Elorz Lieutenant -32 -39Enghien -49Épernay -26 - 36 - -37 -48 - 49

Escande Lieutenant -25 -26 - 32 -39 -40 -41Estissac -38Etchebarrigaray Général -45Euvy -37 - 50

Faraut Commandant -18Faverolles -16Fére en Tardenois -47Fère Champenoise -22 - 26 - 37 - 38 -50Ferme Bois Brûlé -36Ferme de la Censée -22Ferme de la Montagne -10Ferme de Lantages -40Ferme des Chênes -21Ferme Pinçon -14 -26Ferme Soupir -9 - 11Fismes -15 - 16 - 26 - 29 - 30 -31 - 47 -48Fismes pont de -15 - 30Fismettes -29 - 30 -31Forgues Lieutenant -9Fossat Capitaine -20 - 22Fourchier Adjudant-Major -32Fradenberg Général -43Fritsch Sous Lieutenant -16 - -17 -31Fumas Lieutenant -11 - 14

Garzulino Compagnie -11Garzulino Sous Lieutenant -31Georges Sous Lieutenant -25 -26 - 39 -40 -41Germain Général -43Germain Lieutenant -10Gesta Sous Lieutenant -15 - 30Giacomoni Caporal-chef -10Giraud Lieutenant -11Gourgançon -37Grandes Chapelles -38Grandioli Adjudant-chef -31Grinons -11Griolet Capitaine -10 - 13 - 15 - 17 - 22- 25 - 32 - 39

Hauville -48Hubert Pont 23 - 38 - 39Hughes chef de pièce -13Huppel Général -45Hutzinger Général -43

Johansen Sergent-chef -39Josson Sous Lieutenant -13 -39Juguin Capitaine -19Jully sur Sarce -40

Keller Général -45Klopfenstein Général -44

La Creuse Carrée -33 -36La Neuville -48La Roche -10 - 11Lacaze Colonel -12Lajous Sous Lieutenant -32Laroque Sous Lieutenant -30Lascroux Général -46Latruffe Capitaine -32 - 34Latruffe Compagnie -15 - 16 - 19 - 20 -21 - 22 - 24 - 37Laurens Lieutenant -25Leclercq Capitaine -32Les Parres -24 - 26Lestien Général -29 -45Lhéry -16 - 17 -48Lienz -41Ligne Maginot -43Lions Lieutenant -9Longueval -11 - 13 - 14Lusigny 3-9

Maczek Général -46Mailly -48 - 49Marie Pont -38 - 39Marne -1 - 17 - 18 - 19 - 20 - 26 -31 - -32 -33 - 34 - 35 - 48 - 49Masse Sous Lieutenant -12Mast Général -44Maurins le Petit -22Merpillat Sous Lieutenant -20 -32 - 35

Merval -16Minot Compagnie -9 - 10 - 17 - 19 - 21- -32 - 35 -36 -37Misey Bois de -19 - 20Misy bois de -34 - 35Montbard -50Montet Lt. Colonel -9Montmédy -43Montmirail -48 - 49Montmort -49Morains le Petit -37 - 50Morangis -21 - 22 - 25 - 36 - 37 - 49Moulin de Bas -9

Nanteuil la Fosse -49Noël Général -43

Oeuilly sur Marne -16 -17 - 19 - 20 - 26- 32 - 33 - 34 - 35 - 36 - -48 -49Oeuvy -22 - 25 - 26Oise -43Olizy -31Ottavi Capitaine -10 - 37Outre pont -49

Pactus Lieutenant -14Parges -40Pauly Capitaine -25 -26Petit Morin 4-8 - 49Plancy Pont de -38Pluchot Capitaine -17 - 32Poigny Pont de -49Polli -39 - 40Pont Arcy -9 - 10 - 12Port à Binson -17 - 18 - 19 - 20 - 31 -32 - 33 - 34 -35Pouan -23 - 26 - 38Pourchier Capitaine -16Praslin -40

Reamery 3-1Reims -15 - -29 -44 - 48 -49Remusat chef d’escadrons -10Renaudo Sous Lieutenant -32

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Requin Général -43Rethel -48Reuil pont de -17 - 18 - -32 -34Reuil s/Marne -33 -34Revigny -49Ricatte Lieutenant -32 - 39Riceys -40 -41Rolland Sergent chef -13Romilly -50Rouilly sur Loup -9Roumegoux Lieutenant -10Roux Général -45Rulier Capitaine -14Rumilly les Vaudes -39

Sacy -16Saint Aventin Clercy -39Saint Dizier -50Saint Gilles -16Saint Mard -10 - 11 - 12Saint Morel -47Saint Parres -39Saint Parres les Vandes pont de -40Sainte Marie Pont -23 -38Salon 3-7 - 38Saulx -49Savigny -11Seine -23 - 24 - 26 -38 - 39Sens -50Serches -47Serre Colonel -18Sézanne -49Sidi Médecin-auxiliaire -16Soissons -15 - 47Somme -43

Souain -49Soupir -9 - 10 - 51Suippes -49

Tonnerre -50Touchon Général -43Tramery -16 - 31 -48Trolley de Prévaux Général -46Troyes -16 - 23 - 24 - 26 - 38 - 39Tyrol -41

Vaillant Sergent chef -39Vauxcére -29 -11 - 14Vauxtin -12 - 13Verneuil -48Vernières -39 -40Verrières -25Vertus -36 - 37 - 50Verzy Verzenay -49Vesle la -15 - 16 - -26 -31 - 47 - 48Vétroff Lieutenant -32 - 33Viapres le Petit -23 -38Vieil Arcy -9 - 10 - 11 - 12Vigneron Sous Lieutenant -30 - 31Villacerf -23 - 38Ville en Tardenois -43Ville Moyenne -24 -25Villechétif -24 - 39Villermet Compagnie -36 - 37Vincent Lieutenant -10Violaine -17 -31Virey sous Bar -40Vitry la Ville -49

Table

Préface................................................................................................ 8Chef de Bataillon Désidéri..................................................................... 9Les événements du 22 mai 1940 au 23 juin 1940Capitaine Edmond Griolet...................................................................... 29Mon rapport d’opérationsGénéral Buisson.................................................................................... 43La Bataille de l'Aisne

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Général BUISSONCapitaine GRIOLET

Commandant DESIDERI**

La bataille de l’AisneAvec le 22ème Bataillon de Chasseurs Alpins

L a m é m o i r e

L a m é m o i r e : s e u l b a g a g e i n c e s s i b l e J a c q u e s A T T A L I

Chef de Bataillon DésidériCommandant la 26ème D.B.C.A

44° Division d’infanterie26ème D.B.C.A.

Les événements du 22 mai 1940 au 23 juin 1940

Le 22 mai 1940, je fus nommé, par une lettre de service du Général Boisseau,commandant la 44° D.I., au commandement de la 26° Demi-Brigade enremplacement du Lt. Colonel Montet, évacué pour maladie. Cette prise decommandement fut régularisée par décision du G.Q.G., en date du 28 mai 1940.

Situation : La 26° D.B.C.A. tenait le canal de l’Ailette, depuis son confluentavec l’Aisne (à droite), jusqu’à Braye en Laonnois, (à gauche), ce dernier pointexclus.

Dispositif : 22° B.C.A. (à droite) S/Q de Soupir avec P.A. Pont Arcy.62° B.C.A. (à gauche) S/Q de la ferme Soupir.64° B.C.A. sur la ligne d’arrêt jalonné par la côte 171, Vieil Arcy - Moulin de

Bas, avec réduit à la cour des Moines (Sud de Dhuizel).

Liaison : à droite avec le 6ème R.I., à gauche avec le 99° I.

L’ennemi, depuis deux ou trois jours, avait fait son apparition sur le canal maisson artillerie ne paraissait pas encore en place. Des militaires isolés françaisappartenant à toutes formations se présentaient dans nos lignes, venant de la régionde Laon.

Dans la nuit du 21 au 22 mai

L’ennemi se montre agressif sur le Canal, notamment dans le P.A. de Pont-Arcy.La Compagnie Minot est attaquée mais par une défense vigilante évite touteinfiltration. Dans le quartier de la ferme de Soupir, la même activité de l’ennemi estenregistrée. Des infiltrations venant de la gauche de sous secteur sont jugulées par le62° B.C.A., qui a deux officiers blessés (Lieutenants Lions et Forgues), 1 chasseurtué, 2 blessés.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Devant cette situation, notamment à droite où le P.A. de Pont-Arcy pouvait êtreconsidéré, à juste raison, comme le point névralgique du S/secteur, je suggère augénéral commandant la D.I. un renforcement de cette position par des éléments de laligne d’arrêt (64° B.C.A.)

Le général prescrit alors un raccourcissement du front du 22° B.C.A. par l’entréeen secteur du 64° B.C.A. Celui-ci relève la Compagnie Minot à Pont-Arcy par laCompagnie Becq.

A la date du 24 mai: le dispositif de la demi-brigade est ainsi réalisé:P.C. à Chavonne.64° B.C.A. (à droite) une compagnie en ligne (P.A. de Pont-Arcy),

deux compagnies sur la ligne d’arrêt.

22° B.C.A. (au centre), deux compagnies en ligneune compagnie en réserve à Chavonne et Cys la Commune,à la disposition du Commandant du S/secteur pour boucherla trouée de Soupir, entre cette localité et l’Aisne.

62° B.C.A.: sans changement.

Commandement

A la suite de ma prise de commandement, le Capitaine Diot commandant le 62°est désigné pour prendre le 64° (P.C. la Roche) et le Capitaine Ottavi, Adjudant-Major au 62° pour commander ce même Bataillon, avec le Capitaine Griolet commeAdjudant-Major.

L’ennemi s’est renforcé, son artillerie est en place.Le canal est bombardé par les minen et les arrières sont copieusement arrosés par

l’artillerie dont le réglage est effectué par un avion divisionnaire.Le bombardement devient, chaque jour plus intense sur Soupir, Pont Arcy, Vieil

Arcy, Chavonne, St Mard.Nombreuses pertes.Un groupement d’artillerie ami se constitue pour la défense du S/secteur sous le

commandement du chef d’escadrons Remusat du 91° R.A.M. (2 batteries)

Le 26 mai, le Caporal-chef Giacomoni (2° Compagnie du 22°) ramène unemitraillette et divers papiers pris sur un allemand tué et qui permettent d’établir quenous avons en face de nous le 14° R.I.

Le 29 mai, un officier est blessé au 62° (Lieutenant d’Allard) et 2 chefs desection sont tués, un autre chef de section blessé, nombreuses pertes. Au 64°, 3officiers blessés (Lieutenant Vincent, s/Lieutenant Roumegoux, s/LieutenantGermain), 5 autres blessés.

Le 31 mai, le P.C. de la 26° D.B. et celui du Commandant du groupementd’appui direct se juxtaposent à la Ferme de la Montagne (sortie N de St Mard).

Dans la nuit du 1er au 2 juin , la 26° D.B. est relevée par la 25° D.B.(Lieutenant colonel Bel) de la 28° D.I.

Le 2 juin la situation de la demi-brigade s’établit comme suit P.C. à Blanzy.

valeur combative

Unités Stationnement Offic Troupe F.M Mitr Mort Engins22° Paars62° Dhuizel 14 820 36 16 2 264° Courlandon

La 25° D.B., après nous avoir relevé, tenait un front plus étendu que le notre, avecseulement deux bataillons en ligne. Le résultat de cette disproportion ne devait pastarder à se faire sentir

Le 3 juinLe 22° B.C.A. est placé à Bazoches en réserve de D.I.Le 64° B.C.A. part à Savigny s/Ardres en réserve du 7° C.A.Le 62° B.C.A. s’installe à Longueval avec une compagnie sur la ligne d’arrêt du

6° R.I.

Dans la nuit du 4 juin , l’ennemi réussit à enlever une section dans le P.A. dePont-Arcy (47° B.C.A., 25° D.B.). Dans le quartier de la Ferme Soupir, le 27°B.C.A. est fortement pressé par l’ennemi.

Le 5 juin, Bombardements intenses sur Longueval, nombreux tués et blessés au62° B.C.A. L’officier de la C.R.E. blessé (Lieutenant Giraud). A 14 heures un ordrede relever le 47° est envoyé au 62°. Le 64° retourne de Savigny pour Blanzy et StMard.

Le 6 juinLe P.C. de la D.B. se transporte de Blanzy les Fismes à Vauxcére.

Le commandement décide l’abandon du Canal de l’Ailette. Une Compagnie du47° B.C.A. monte aux Grinons pour parer aux infiltrations venant de la FermeSoupir encore tenue par le 27°. Le 47° glisse à St Mard et tous ses éléments sontrelevés.

Le 62° s’installe sur l’Aisne à Vieil Arcy, 2 compagnies en ligne: une au P.A. dePont Arcy (Compagnie Ciaudo) l’autre devant Bourg & Comin (Compagnie

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Garzulino). Une autre compagnie (Andréis) sur la ligne d’arrêt à Vieil Arcy. P.C. àla Roche. Liaison assurée à droite avec le 6° R.I. Le 64° B.C.A. après avoir laissé la1° Compagnie (Lieutenant Fumas) à la disposition du 6° R.I. dans le bois 2 km N delongueval installe une compagnie en ligne dans la boucle de l’Aisne à l’O de PontArcy (Becq) et l’autre compagnie à St Mard et Cys-la-Commune. Ce dispositif futréalisé dans la nuit du 6 après une marche pénible de 38 kilomètres. Le 22èmeB.C.A. demeure en réserve de D.I.

Le 7 juinLe P.C. de la D.B. se transporte à Dhuizel.Le 62° B.C.A. est fortement éprouvé par de puissants bombardements d’artillerie.Le 64° dont le P.C. se trouve à St Mard a 5 tués, 2 disparus et 10 blessés sous un

violent martèlement de 105.A 22 heures, le 6° R.I. contre-attaque vainement pour réoccuper les bords de

l’Aisne que les éléments avancés du 47° B.C.A. avaient perdus la veille.

Le bombardement ennemi augmente d’intensité sur les arrières. Il se fait de plusen plus puissant par minen sur Pont Arcy.

A gauche, la situation de la 28° D.I. parait assez critique. Dans l’éventualité d’unrepli de cette G.U., le général commandant la 44° D.I. prend ses dispositions etenvisage un repli partiel de ses éléments qui formeraient une bretelle face à l’ouest.Le Capitaine Dupassage, officier de liaison venant de l’I.D., me met au courant dece projet et j’établis alors un contre-projet contenant 3 paragraphes correspondant àdes éventualités diverses. Ce contre-projet est envoyé à l’I.D. et porté en mêmetemps à la connaissance du 64° et du 62°.

Le 8 juin, le P.C. de la D.B. se transporte à Vauxtin à côté de celui ducommandant de l’artillerie d’appui direct. Les 2 compagnies d’État-major doiventrejoindre le soir.

La préparation d’artillerie

Des bombardements intensifs d’artillerie plus puissants que jamais commencentle matin sur Dhuizel, le bois de Dhuizel, Vieil Arcy, St Mard, faisant présager uneattaque prochaine.

L’après-midi, des bombardements massifs par vagues d’avions se succédant à unquart d’heure d’intervalle sur la Roche, Vieil Arcy, Dhuizel (complètement rasé)bois de Dhuizel, St Mard.

Nombreuses pertes aux deux bataillons en ligne et aux deux compagnies d’État-major à Dhuizel. L’officier blessé (s/Lieutenant Masse). L’aumônier divisionnairedétaché à la 6° D.B. et le Capitaine Bessy, Commandant la C.R.E., procèdent eux-mêmes sous le bombardement d’avions et malgré leurs attaques à la bombe et à lamitrailleuse, au périlleux sauvetages des blessés de la C.R.E. Un sous-officier et un

chasseur sont ainsi sauvés par eux d’une mort certaine sous les décombres où ilsétaient enfouis, avec plusieurs de leurs camarades tués sur place.

La division de gauche se replie

Je fais alors demander au Commandant de la 25° D.B. de faire tout son possiblepour que ses unités ne se replient pas avant la tombée de la nuit. Mais vers 14heures, les unités de cette D.B. installées à Chavonne et Cys la Commune,abandonnent l’Aisne et se replient. Vers 15 heures, le Lieutenant Colonel Bel,m’envoie un mot conçu en ces termes : “Mon cher ami, j’ai presque honte de le dire,mes chasseurs ont F... le camp en désordre!”

Le 64e tourné à l’ouest

Complètement découverte à sa gauche, la Compagnie Becq (64°) qui occupait laboucle de l’Aisne, en liaison à droite avec le P.A. de Pont Arcy (62°) et à sa gaucheavec le 47° B.C.A. (28° D.I.) est contournée sur sa gauche par des éléments venantde St Mard. A 16 heures, de forts contingents allemands sont signalés sur le plateaude Brenelle, derrière St Mard. (confirmation faite par le Colonel Lacaze,commandant le 99° R.I.)

Attaque frontale

A partir de 16 heures, la Compagnie Becq est en même temps attaquée de front.Menacée à la fois sur sa gauche, elle fait face résolument à l’adversaire et résistevictorieusement jusqu’à 22 h 30 en infligeant à l’ennemi, qui attaque par vaguessuccessives, des pertes considérables. Cette compagnie très éprouvée, estcomplètement encerclée, et le Capitaine Becq lui-même ne réussit à se dégager avec29 chasseurs que grâce à la protection des deux sections du s/Lieutenant Josson quitiennent les pentes nord de la cote 171 (ligne d’arrêt).

Cette position est à son tour menacée par des contingents allemands qui venantdes bois de St Mard ont contourné la cote 171. Le s/Lieutenant Josson y fait face,mais doit se replier à son tour en direction du P.C. Laroche.

Le 62°, lui, reçoit l’attaque directe dès 14 heures.

Sur une poussée allemande, la Compagnie Ciaudo contre-attaque. Le LieutenantCiaudo est porté disparu. 30 survivants sont ramenés par le Sergent chef Rolland. La1er Compagnie (Lieutenant Andréis) reçoit l’ordre de tenir à tout prix la ligne l’arrêtqui est attaquée à 17 heures et bientôt contournée par la gauche.

Le Lieutenant Andréis est porté disparu.La 2° section de canons de 25 ne peut récupérer qu’un canon, avec le seul cheval

survivant. Les autres pièces sont rendues inutilisables. Le chef de pièce Hughes estblessé d’une balle à sa pièce.

Le Capitaine Griolet quitte le P.C. à minuit trente après avoir fait sauter le dépôtde munitions.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Ordres donnés après le repli

62° B.C.A.: s’installer sur la ligne allant de la cour des Moines incluse à 600 mouest de Longueval.

64° B.C.A.: tenir les lisières sud de Longueval, en liaison à gauche avec le 62°, àdroite avec la 1° Compagnie du 64°, déjà installé sur la ligne de réduit du 6° R.I. àqui elle avait été prêtée.

Le P.C. de la D.B. a assuré pendant tout ce temps la défense de Vauxtin en liaisonavec le G.R.D. Après avoir protégé le repli de l’artillerie, il se rend à Vauxcére,village continuellement bombardé, où il trouve le P.C. du G.R.D.

Une liaison téléphonique est établie entre le P.C. de la D.B. et le généralcommandant la D.I. Le général me donne l’ordre d’appliquer les paragraphes B et Cd’une proposition que je lui avais faite pour le cas d’un repli. Il s’agissait des ordresci-dessus précisés et déjà communiqués aux commandants des 62° et 64° B.C.A.

Le P.C. de la D.B. est fixé par le général à Blanzy les Fismes, et il s’y rend à lapointe du jour.

Situation des effectifs et du matériel en fin de journée (8 juin)

22° B.CA. réserve de D.I.62° B.C.A. 9 officiers/280 chasseurs/16 F.M./3 M.64° B.C.A. 11 off/327 chass./16 F.M/2 M. et 2 autres ramassés sur le champ de

bataille par la C.R.E. (Capitaine Bessy).

Le 9 juinLe 64° s’installe sur la ligne de repli qui lui avait été fixée à Longueval et entre en

liaison avec la 1ère Compagnie détachée au 6° R.I. (liaison effectuée par leCapitaine Becq lui-même).

Dispositif réalisé à 5 heures du matin.

A 9 heures, sous la pression très forte de l’ennemi, le 64° se repli des lisières deLongueval à la ferme Pinçon, où il trouve une compagnie du 6° R.I.

La 1ère Compagnie du 64° B.C.A., installé sur la ligne de réduit du 6° R.I., s’ydéfend énergiquement, mais submergée par le nombre, disparaît complètement avecses chefs: Lieutenant Fumas (présumé tué).

62° B.C.A.: dispositif mis en place à 6 heures du matin: 1ère Compagnie(Lieutenant Bodin) à Cour des Moines, 2ème Compagnie, à droite. 3èmeCompagnie, en réserve à la corne Ouest du bois ouest de la Ferme Pinçon, avec leP.C. et 3 mitrailleuses.

Ce dispositif s’avère impossible à tenir.Une menace d’encerclement se dessine à gauche. Le repli s’effectue sur la route

allant de la ferme Pinçon à Vauxcére.

Contre-attaque vers Dhuizel

Le général commandant la D.I., vient me voir à Blanzy, un peu avant midi. Ilordonne de pousser les éléments du 64° jusqu’à Longueval et de faire contre-attaquer le 62° en direction de Dhuizel.

Le 64° B.C.A., parvient, après de grosses difficultés à faire réoccuper les lisièressud de Longueval par son groupe franc et une section de F.V. jusqu’à 15 h et subitquelques pertes.

Le 62° B.C.A. amorce son mouvement, lorsque vers 15 heures une violenteattaque allemande repousse les éléments de ces deux B.C.A. Nombreux tués etblessés au 62° : Capitaine Rullier, grièvement blessé et disparu, s/Lieutenant Bodin,blessé et évacué, Lieutenant Pactus, disparu et présumé tué. Une cinquantaine detués et blessés. De nombreux disparus.

A signaler: pendant cet épisode, la belle conduite du Capitaine Diot, à la fermePinçon, qui resta le dernier sur la position après avoir assuré le repli de la compagniedu 6° d’abord, des éléments de son bataillon ensuite, et après avoir détruit le dépôtde munitions qui se trouvait dans cette ferme.

La défense de Blanzy les Fismes

A 17 heures, les deux bataillons refluent vers Blanzy.Installé personnellement au carrefour (sortie W de Blanzy), j’arrête ce repli et

installe le 62° face à l’ouest, le 64° face au nord.Dans la soirée du 9, je reçois successivement deux ordres du général

Commandant la D.I.Dans le 1er ordre, la 26° D.B., avec le bataillon de la 173 D.B. installée en ce

point devait tenir Blanzy les Fismes “coûte que coûte”.Dans le 2ème ordre, verbal, et transmis par le Capitaine Dewatre, Blanzy les

Fismes devait être défendu par la 26° D.B. et un bataillon du 6° R.I. Des élémentsde la 26° D.B. pouvaient, le cas échéant, être installés sur les pentes est de Perles.

Cette dernière solution a été adoptée, le 64° restant à Blanzy et le 62° détaché surles pentes sud-est de Perles, en liaison avec le G.R.D.

Le P.C. de la D.B. s’installe vers minuit, dans un boqueteau au sud-est de Perles.

Situation des effectifs et du matériel en fin de journée: (9 juin)

22° B.C.A. : Toujours en réserve de division, s’est battu à Bazoches et se replie sur Fismes à minuit.

62° B.C.A. : 4 officiers/90 chasseurs/5 F.M.64° B.C.A. : 10 officiers/297 chasseurs/13 F.M./1 canon de 37.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Le 10 juinA la pointe du jour, le bataillon du 6° qui tenait Blanzy, se présente au pont de

Fismes, pour traverser le Vesle, entraînant avec lui le 64°. Le chef de batailloncommandant le 6° lui interdit de franchir le pont. Ce bataillon du 6° fait demi-tour,longe la Vesle, sur la rive nord, et passe la rivière plus à l’est. Le 62°, venantderrière lui, passe la Vesle, et s’installe dans un petit bois à la sortie sud de Fismes.

Le 62° B.C.A., constitue en quelque sorte une tête de pont sur la Vesle, en avantde Fismettes.

La tête de pont de Fismes

A 7 heures du matin, un ordre du général commandant la D.I. me prescrit “deconstituer en avant de Fismes sur la Vesle, une tête de pont solide, en vue de barrerà l’adversaire la route Soissons - Reims. Le 22° B.C.A. est remis à la disposition dela D.B. Le G.R.D. sera retiré du Pont de Fismes pour être investi d’une autremission”.

Vers 9 heures du matin, le 64° reçoit mon ordre de rallier le pont de Fismes. Le22° ne peut mettre à ma disposition que la Compagnie Latruffe.

Vers 10 heures, la tête de pont était constituée dans les conditions suivantes :Les éléments restant du 62° B.C.A. sont renforcés par la Compagnie Latruffe qui

occupent les crêtes N.O. de Fismes et par les éléments du 64° B.C.A. qui prennentposition sur un mamelon au N. de Fismes, clé de la tête de pont.

1 section du 22° B.C.A. (Compagnie Combet) est envoyé à la cote 62 pour yprendre position et protéger efficacement la tête de pont contre une attaqueallemande venant de l’Est.

L’Adjudant-chef Coré, commandant cette section prend pied sur la positionassignée malgré un feu violent de mitraillettes allemandes et s’y maintient enprenant à son tour à partie l’ennemi qui dévale les pentes Est de Perles, en luiinfligeant de lourdes pertes.

A 10 heures 30, une puissante attaque allemande se déclenche; la Section Gestaelle-même fortement pressée par l’ennemi. C’est à l’arrivée de l’Adjudant chef Coréque le s/Lieutenant Gesta, commandant le groupe franc du 64° B.C.A., au coursd’une défense héroïque tombe frappé à mort d’une salve de mitraillette.

A signaler la belle conduite du Capitaine Griolet à qui j’avais confié lecommandement des éléments avancés de la tête de pont. Cet officier, debout enavant du pont, assura le repli de tous ses éléments et partit le dernier avant ladestruction du pont.

Destruction du pont de Fismes

Vers 11 h 30, en effet, le groupe franc du 64°, privé de son chef, et la SectionCoré se replient après avoir épuisé toutes leurs munitions. Les Allemands

s’installent au coude de la route de Merval et prennent sous leur feu le carrefour dupont. D’autre part, les éléments de la Compagnie Latruffe du 22° B.C.A. sontrefoulés également par l’ennemi très supérieur en nombre.

Étant donné la situation, à midi, je fais replier les éléments de la tête de pont duchemin de fer. Une fois le repli total effectué j’ordonne la mise de feu.

Défense de Fismes et l’ordre de repli

Tous les éléments repliés sont alors placés sur la défensive sur les bords de laVesle.

Le Capitaine Diot installe sur le pont de chemin de fer une partie de ses élémentsavec 2 F.M. prenant à parties d’importants contingents ennemis qui descendent versFismes et leur infligea des pertes massives.

Le Chef de Bataillon Ardisson est légèrement blessé à la main d’un éclat deminen. Le Capitaine Pourchier prend le commandement du 22° B.C.A. et exécutel’ordre donné par son chef, avant son évacuation : “Repli sur St Gilles”.

Le Capitaine Bussat, commandant la C.A. du 22°, précédant sa compagnie àbicyclette, disparaît. Cet officier n’a plus donné signe de vie depuis ce jour. Il auraitété vu le 11 juin à Troyes où il serait arrivé en auto (renseignement donné par leChef de Bataillon Anneau Commandant le bataillon régional)

Avec lui se trouvait au départ de Fismes le Médecin-auxiliaire de réserve Sidi, du22°, qui a rejoint, lui, son bataillon à Oeuilly sur Marne, le 12 juin.

Après que le pont de Fismes eut sauté, j’établis le P.C. de la D.B. à la mairie deFismes.

Vers 13 heures, le Lieutenant Abeille, officier de liaison, arrive au P.C. porteurd’un ordre de repli général, en direction de Lhéry et Faverolles pour la demi-brigade. Des ordres en ce sens sont aussitôt donnés. Les chasseurs privés de toutravitaillement sont exténués de fatigue.

L’ordre de repli parvient au 22° à St-Gilles.J’assure ensuite le repli des 62° et 64° B.C.A.. Je mets au courant une compagnie

isolée du 6° R.I. (Capitaine Dommange) de la nouvelle situation et je laisse surplace le Capitaine Bessy qui quitte Fismes le dernier, à 15 h 15.

A 16 heures le 62° B.C.A. assure la protection du repli des batteries du 91° R.A.par le groupe franc avec le S/Lieutenant Fritsch. Celui-ci rejoint le bataillon à Sacyoù il est autorisé, ainsi que ses hommes, à faire le trajet jusqu’à Tramery avec lescamionnettes du T.R.

C’est par une nouvelle étape très pénible que les chasseurs regagnent leursnouveaux points de stationnement, où, dans la nuit, le Capitaine Bessy assure leravitaillement en munitions.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Situations des effectifs et du matériel en fin de journée (10 juin)

22° B.C.A.: 16 officiers/400 chasseurs/30 F.M./9 mitr.62° B.C.A.: 4 officiers/80 chasseurs/64° B.C.A.: 10 officiers/271 chasseurs/11 F.M.

Le 11 juin, vers 2 heures du matin

Le Capitaine Dupassage, venant de l’I.D., arrive au P.C., à Lhéry, porteur d’unordre de repli immédiat en direction de Violaine où les éléments de la D.B. devaientattendre le ravitaillement et de nouveaux ordres.

A 5 heures, la D.B. est groupée à Violaine.

A 7 heures, le Lieutenant de Cardaillac est envoyé au Q.G. de la division pourprovoquer de nouveaux ordres et y demander du ravitaillement en vivres. Parti àmotocyclette, le Lieutenant de Cardaillac se heurte à sa sortie nord du village à unecolonne motorisée allemande. Il fait demi-tour brusquement et revient me prévenir.Puis, par un autre chemin, il se rend à la D.I. où il explique la situation.

Installation défensive sur la Marne

Je décide alors d’emmener la D.B. en direction de la Marne, en prenant commeaxe de marche la route de Châtillon (64° à droite, 62° et 22° à gauche. Des élémentsdu 22° en arrière-garde).

Grâce à des mouvements de terrains prononcés, les éléments de la D.B.parviennent à échapper à l’emprise de la colonne motorisée allemande. Mais à 2kilomètres avant d’arriver à Châtillon, des salves de mitraillettes allemandes sonttirées venant de ce village sur mes éléments de tête.

Presque en même temps, une forte explosion se fait entendre : le pont en arrièrede Châtillon (Port à Binson) vient de sauter. Je détache aussitôt la Compagnie Minot(22°) en direction des bois d’où venaient les coups de feu allemands, et, à l’abri decette protection, j’oriente la marche de la D.B. vers Reuil que nous atteignons sansencombre.

Avec un Compagnie du 22°, j’établis en ce point une tête de pont et fais franchirla coupure à tous mes éléments que j’installe aussitôt défensivement à Oeuilly, rivessud de la Marne. Je prends contact avec le Capitaine Pluchot, commandant la 1èreCompagnie du 21/46 B.I. qui tenait le secteur de la Marne depuis Port à Binson(exclus) jusqu’à Boursau (inclus), front très large avec trois sections disséminées surles berges sud de la Marne, sans aucune homogénéité.

Après avoir donné le commandement du 22° B.C.A. au Capitaine Griolet (àmidi), et pris la défense de ce secteur à mon compte j’adopte le dispositif suivant:

22° B.C.A.: Village d’Oeuilly, pont de Reuil.64° B.C.A. : En réserve dans le bois à 300 mètres S. d’Oeuilly.

62° B.C.A. : Très éprouvé ne compte plus que 60 hommes et 2 officiers. Il estchargé de construire des barricades dans Oeuilly. Le Lieutenant Fritsch, et le groupefranc n’ont pas rejoint.

Un compte-rendu est envoyé à l’I.D. au sujet de cette installation et un premierravitaillement en munitions est effectué par le Capitaine Bessy qui arrive enchenillettes.

La journée du 11 se passe sans incidents.Le contact est réalisé dans la journée, avant la tombée de la nuit, par l’apparition

des Allemands sur la Marne.Un deuxième ravitaillement en munitions est effectué dans la nuit par les soins de

la C.R.E.Le ravitaillement en vivres n’arrive toujours pas.

Situation des effectifs et du matériel en fin de journée (11 juin)

22° B.C.A.: 17 officiers/400 chasseurs/30 F.M./9 mitr.64° B.C.A.: 10 officiers/271 chasseurs/11 F.M./62° B.C.A.: 2 officiers/ 60 chasseurs(la plupart sans armes).

Une lettre du Colonel Delmas:

Le rétablissement de la 26° Demi-Brigade sur la Marne dans des conditions aussipénibles devait, le lendemain, motiver de la part du Colonel Delmas commandantl’I.D. la lettre de félicitations suivantes:

“Mon cher DésidériJe vous fais mes compliments pour la façon dont vous avez ramené et réinstallé la26° Demi-Brigade sur la Marne.Amitié le 12.VI 1940Signé: Delmas”

Le 12 juin, dans la matinée

D’importants contingents ennemie dévalent les pentes surplombant Reuil et denombreux véhicules blindés entrent dans cette localité.

Un ordre de la D.I. parvenu dans le milieu de la journée à la 26° D.B. prescritl’entrée en secteur sur la Marne de la 44° D.I. dans la nuit du 12 au 13. Les élémentsdes bataillons d’instruction se trouvant sur la Marne doivent être laissés sur place.

Secteur de la 26° D.B. : de Port à Binson exclus, au pont de Reuil inclus, enliaison à gauche avec la 45° D.I., à droite avec le 6° R.I.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Le groupement d’artillerie d’appui direct de la 26° D.B. n’étant pas encore enplace, j’envoies le s/Lieutenant Causeret à un P.C. d’artillerie voisin pour demanderun tir sur Reuil.

Ce tir est effectué aussitôt.A 13 heures je reçois l’ordre de faire présenter mon adjoint, le Commandant

Faraut à la visite du médecin divisionnaire. Celui-ci est évacué sur l’arrière pourraisons de santé. Je désigne le Capitaine Bessy pour le remplacer dans ses fonctionsd’adjoint. Le Lieutenant de Cardaillac remplace le Capitaine Bessy aucommandement de la C.R.E.

Les Allemands s’infiltrent à Port à Binson

A 16 heures le Colonel Serre, commandant le groupement d’artillerie arrive auP.C. de la demi-brigade et signale que, depuis 14 heures, son observatoire voit, àl’oeil nu, des Allemands traverser la Marne en barques, sur l’îlot de Port à Binson.Une navette régulière apporte de gros contingents d’une rive à l’autre. Le ColonelSerre repart aussitôt à l’A.D. en vue d’actionner toute l’artillerie de la D.I. sur cepoint.

En même temps j’envoie le Capitaine Bessy à Port à Binson, avec une voiture deliaison, avec mission de voir ce qui s’y passe et de s’en approcher le plus possible.Le Capitaine Bessy arrive à Port à Binson vers 16 h 30 et prend contact avec leLieutenant Chataignier du 48° B.I. qui, avec sa section, était en train d’abandonnerle pont qu’il était chargé de défendre. Interrogé, cet officier affirmait que de fortscontingents ennemis (plus d’un millier) avaient franchi la Marne et pris positiondans le bois en arrière de Port à Binson. Le Capitaine Bessy, qui n’avait du reste rienremarqué d’anormal, ordonna au Lieutenant Chataignier de réoccuper sesemplacements de défense. Cet ordre ayant reçu un commencement immédiatd’exécution, le Capitaine Bessy revint me rendre compte de sa mission.

Dispositions défensives

A 17 heures, je prends les dispositions suivantes portées à la connaissance dugénéral, commandant la D.I., par voie de C.R.

Ordre au 64° B.C.A. Se porter à la lisière du Bois de Misey avec- Mission de s’opposer à toute avance ennemie au cas où lesAllemands auraient franchi à Marne à Port à Binson.- De couvrir à l’ouest le village d’Oeuilly.- De s’installer à la tombée de la nuit sur la rive sud de la Marne et letalus de chemin de fer, en liaison à gauche avec la 45° D.I. qui doitvenir à Port à Binson et à droite avec le 22° B.C.A. qui doit étendreson secteur par l’intégration de la Compagnie Latruffe dans le systèmede défense à l’ouest d’Oeuilly.

Le Capitaine Diot, commandant le 64° B.C.A., dont les unités avaient étéjusqu’ici fortement éprouvée, accepta résolument cette mission s’exprimant en cestermes : “Cette fois-ci, mon commandant, c’est le coup de grâce que vous nousdonnez”.

Ordre au 22° B.C.A. :- Porter la Compagnie Latruffe à la gauche de la Compagnie Combetsur la Marne et la voie ferrée et prendre liaison à gauche avec le 64°B.C.A.- Placer les éléments restants de la Compagnie Minot (très réduite)dans le boqueteau derrière la Compagnie Latruffe pour barrer lecouloir compris entre cette compagnie et le 64° B.C.A. au cas oucelui-ci n’aurait pu déboucher du bois de Misey pour se porter sur laMarne.

Ordre au 62° B.C.A.:- Continuer dès la tombée de la nuit les barricades dans Oeuilly.

Le capitaine, commandant la Compagnie du 46° B.I. est prévenu de cesdispositions et ordre lui est donné de laisser ses éléments en place à ma disposition.

A 18 heures, le Capitaine Juguin, Commandant la Compagnie d’Instruction dePort à Binson (48° B.I.) arrive avec un chef de section au P.C. et rend compte qu’ils’est replié avec 2 sections devant une forte attaque allemande. Ordre lui est donnéaussitôt de repartir pour reprendre ses emplacements, avec une section du 22°B.C.A. mise à sa disposition. Le Capitaine Juguin s’arma lui-même d’un fusil etpartit résolument à la tête de sa troupe. Mais il fut rendu compte au bout d’une demiheure, au P.C., qu’il n’avait pu aller jusqu’au bout, arrêté par d’importantscontingents ennemis qui avaient déjà franchi la Marne.

Un officier du génie se disant être le commandant d’un groupe de 2 compagniesdu génie vient au P.C. vers 18 H 30 pour rendre compte de ce que ses 2 unitésréinstallées sur le plateau derrière le bois de Misey, s’étaient repliées et qu’il nesavait pas où elles étaient passées. Je lui donnais l’ordre d’aller à leur recherche etde les regrouper.

Je n’ai plus revu cet officier.

Préparation d’artillerie ennemie - Arrêt du tir de l’artillerie amie

Depuis 16 heures un violent tir de destruction s’est abattu sur Oeuilly. Ce tir s’estpoursuivi presque sans arrêt jusqu’à 21 h 30. Pendant tout ce temps la Marne étaitfranchie largement du côté de Port à Binson d’une part, et d’autre part des élémentsennemis commençaient à partir de 20 heures à passer cette coupure à 1 km de l’estd’Oeuilly.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Cette situation est portée à la connaissance du général commandant la D.I. dansun C.R. par lequel je fais ressortir qu’il n’y a rien à ma droite ni à ma gauche pours’opposer au franchissement de la rivière et demande que des dispositions soientprises pour en diriger l’avance allemande en ces deux points.

Des éléments du G.R.D. sont envoyés en direction de Port à Binson et entrent enliaison avec le 64° B.C.A. au bois de Misey.

L’attaque atteint une violence extrême entre 19 heures et 21 h 30 tout un grouped’artillerie ennemie tire sur Oeuilly sans interruption.

Pendant ce temps là aucun tir n’a pu être obtenu de notre artillerie qui futdécrochée pour des raisons inconnues de 17 h 30 à 21 heures passées (C.R. apportépar le Capitaine Fossat)

L’attaque devant le 22° B.C.A.

Le 22° B.C.A. résiste avec vigueur à cette attaque et mitraille les embarcationspneumatiques allemandes qui passent la rivière à 700 mètres ou 800 mètres sur sadroite. Sur sa gauche la Compagnie Latruffe, fortement pressée par des forcesélevées ennemies venant de Port à Binson, est contournée à l’ouest.

Un ordre de résistance sur place est donné à tous les éléments de la 26° D.B. deChasseurs Alpins qui défendent la Marne. Vers 20 heures un officier de liaison du6° R.I. venant de Boursault arrive au P.C. de la D.B., son régiment devant prendre lesecteur à la droite de la demi-brigade à la nuit. Je lui explique la situation dont ilparait se rendre compte lui-même par la violence du bombardement qui ne cesse decroître en intensité.

A 21 h 30, arrêt brusque du tir ennemi.Des fusées blanches de l’ennemi partent des directions nord, est et ouest. C’est le

moment où les Allemands devant encercler Oeuilly ont largement dépassé lacoupure et signalent à leur artillerie de ne plus tirer.

La Compagnie Combet est débordée vers la droite.La Section Merpillat est encerclée et ne réussit pas à se dégager. Le Capitaine

Combet fait replier ses autres sections dans Oeuilly où l’ennemi avait déjà pris piedpar endroit.

La Compagnie Latruffe contournée vers sa gauche se défend énergiquement et sereplie à son tour en faisant un prisonnier (blessé évacué).

Devant le 64° B.C.A.

D’autre part le 64° B.C.A. se bat depuis 20 heures dans le bois de Misey contreune forte patrouille ennemie. Il fait un prisonnier qui est envoyé à la D.I. Lapatrouille allemande du début s’est renforcée progressivement par des élémentsnouveaux qui aux dires du prisonnier s’élèvent à 6 compagnies.

Les éléments du G.R.D. 41 en liaison avec le 64° B.C.A. luttent courageusementcôte à côte. Ils se trouvent dans l’obligation de se replier vers 23 heures après avoircombattu avec énergie et infligé à l’adversaire de lourdes pertes. Le 64° B.C.A.dégage deux officiers d’artillerie encerclés dans leur observation.

Repli dans l’ordre et nouvelle installation défensive

A 22 h 30, je donne l’ordre de repli qui se fait dans l’ordre le plus parfait. Lademi-brigade derrière moi, en colonne par 3, et à des distances appropriées. Jedécide de me défendre sur les lisières nord et ouest du bois de la ferme des Chênes àtravers lesquels passe la route d’Ablois. Je rencontre à 23 h 30 le groupementd’artillerie du Colonel Serre qui venait de se remettre en batterie suivant l’ordre del’A.D.

Je place la Compagnie Latruffe en couverture de l’artillerie et dispose le reste demes éléments aux lisières du bois.

Le Capitaine Bessy chargé d’instruire le général commandant la D.I. de ce replirevient avec un ordre verbal pour la D.B. d’avoir à se reporter en directiond’Oeuilly. Un ordre arrive peu après pour préciser et prescrire de s’installer sur laligne jalonnée par la ferme de la cense-carrée et la corne ouest du bois des Chênes.La demi-brigade, presque sur place, n’a qu’une petite rectification à faire pouroccuper ses emplacements où un ravitaillement en munitions est effectué par leCapitaine Bessy avec les chenillettes de la C.R.E.

Situation des effectifs et du matériel en fin de journée (12 juin)

22° B.C.A. : 10 officiers/150 chasseurs/6 F.M.62° B.C.A. : 2 officiers/40 chasseurs64° B.C.A. : 9 officiers/ 219 chasseurs/8 F.M.

Le 13 juin

A l'aube un ordre prescrivant le repli en direction de Morangis me parvient. Cetordre indique, en outre, qu’une compagnie du 99° R.I.A. est mise à ma dispositiondans la région d’Ablois. Je me mets aussitôt en relations avec le Chef d’EscadronCardot (303° R.A) commandant le groupe d’appui direct; je règle avec lui lesdifférents arrêts de l’artillerie en vue de son appui et décroche mes éléments sanscontact avec l’ennemi. Je rencontre aux environs d’Ablois le commandant de laCompagnie du 6° R.I. et celui-ci me fait connaître qu’il a reçu mission de renforcerle G.R.D.I. 41 pendant ce repli.

Je n’ai plus revu, par la suite, cet officier.Avant d’arriver à Morangis, un officier régulateur se disant appartenir au C.A.

m’interpelle en criant : “26ème Demi-Brigade! Morangis!”La 26° demi-brigade s’installe à Morangis.La Compagnie Minot du 22° B.C.A. est placée en lisière nord en couverture

approchée. Le G.R.D. et la Compagnie du 6° assurent la couverture éloignée.L’état de fatigue des chasseurs, qui, depuis de longs jours, n’avaient ni mangé ni

dormi (se déplaçant la nuit pour se battre le jour), était tel qu’il paraissait impossiblede leur demander alors le moindre effort.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

C’est à ce moment que je suis appelé au P.C. de la D.I. Le général commandant laD.I. projette une contre-attaque en direction d’Oeuilly avec l’appui de chars qu’ildemande au commandant d’une division voisine, sans pouvoir les obtenir.

Pendant l’élaboration de ce plan on me conseille de me reposer un peu et lachambre du général fut mise à ma disposition. Réveillé une heure après vers midi,j’appris du général que les Allemands étant à Ablois, il fallait qu’avec les élémentsde la 26° D.B. j’aille occuper le plateau sud de cette localité, en contre-attaquant. Jemis alors le général au courant de l’état de fatigue extrême des chasseurs, mais,comprenant qu’il s’agissait surtout d’une mission de sacrifice devant permettre aureste de la D.I. de se replier, je demandais au général d’envoyer tout de suite de quoifaire manger les hommes de façon à pouvoir assurer cette mission avec plusd’efficacité. Effectivement, je pouvais rapporter du ravitaillement à Morangis, àmidi trente.

A 14 h 30, le dispositif de contre-attaque composé de quatre compagnies de 3sections de la D.B. avec 14 F.M. et d’une demie compagnie du 99° R.I.A. estdéclenché ayant comme axe de marche la route d’Ablois. Les hommes ont mangé etdormi deux heures. Les éléments d’avant-garde venaient à peine de prendre lecontact qu’un ordre très urgent de repli était donné en direction de Bergéres lesVertus. Deux automitrailleuses, mises à la disposition de la demi-brigade s’étaientportées en direction d’Ablois. L’ordre impliquant la rapidité de l’exécution en raisondes menaces sérieuses à l’ouest, la 26° D.B. se décroche et commence son repli.

Le Capitaine Griolet commandant l’arrière-garde de la 26° D.B. rencontrependant le repli deux capitaines qui stationnaient, avec leurs chars, sur la route.Après lui avoir appris que les deux automitrailleuses envoyées en avant deséléments de contre-attaque avaient été détruites et brûlées par l’ennemi à la sortiesud d’Ablois, ces deux officiers français firent la réflexion : “Au moins voilà unetroupe qui se replie en ordre. pour une fois, cela fait plaisir.”

A Vertus, la Compagnie Latruffe (22° B.C.A.) est placée en couverture sur leshauteurs qui dominent la localité au nord. Des bouchons sont installés sur la voieferrée, en direction de l’ouest. Le reste de la demi-brigade, cantonne à la ferme de laCensée où elle subit un bombardement intensif d’aviation.

Aucun ravitaillement ce soir-là encore et fatigue accrue des hommes.

Le 14 juin

A une heure du matin, arrive l’ordre de départ, apporté par un motocycliste. Cetordre prescrit le passage de la D.B. à 2 heures au point initial fixé par la D.I. à 3kilomètres de là. La demi-brigade doit se rendre sur la bretelle Maurins le Petit -Ecury le Repos, où de nouveaux ordres seront donnés. Les éléments de la D.B.arrivent vers 6 heures.

A 11 heures, le Capitaine Fossat, commandant la section de transmission de lacompagnie de commandement, apporte un ordre prescrivant à la 26°D.B. de partir seplacer à 600 mètres au nord d’Oeuvy, à l’ouest de la route Fère Champenoise -

Oeuvy. Les 2 autres régiments de la D.I. devaient se disposer dans la même régionde façon à former un triangle, la pointe au nord avec le 6° R.I.

Après une étape, durant laquelle, l’aviation italienne ne cesse d’effectuer desbombardements par vagues successives, créant un intense désarroi parmi lesinnombrables convois qui sillonnaient la région, la 26° D.B. s’installe, vers 14heures, aux emplacements prescrits. La liaison recherchée avec le 6° et le 173°permet de constater l’absence de ces unités qui, semble-t-il, n’avaient été touchéespar l’ordre. La D.B. essuie de nouveaux bombardements aériens ne provoquantheureusement que des pertes légères.

Vers 17 heures, un chauffeur du P.C. de la D.B. prescrivant le repli de la D.B. en2 bonds : a) Champfleury. - b) Rives sud de la Seine.

Les éléments de la D.B. se mettent en route et atteignent Champfleury vers 20 h30. Aucun ravitaillement en vivres n’est encore arrivé. Et la faim ajoute encore à lafatigue des hommes.

A 21 heures, le Capitaine Dupassage, venant de l’I.D., arrive avec un nouvelordre de repli immédiat sur Pouan (Aube). Le P.C. de la D.I. était fixé pour lelendemain à 8 km S.E. d’Arcis sur Aube.

Le Capitaine Dupassage avait expliqué que la poussée ennemie se faisant surtoutà l’Ouest, il y aurait lieu de passer la Seine plus au sud, sans autre précision. Et ilavait laissé entendre que désormais les ordres parviendraient difficilement.

Ce fut le dernier contact que la 26° D.B. eut avec la D.I.

Le 15 juin

La D.B. franchit l’Aube au pont de Viapres le Petit et atteint Pouan vers 2 heuresdu matin, toujours sans ravitaillement. Le lieutenant chargé de faire sauter le pontme fit part de son pessimisme en me disant qu’il n’était pas prudent de s’attarder àPouan.

Je pris l’initiative de partir à 4 heures pour traverser la Seine à Villacerf etcommuniquais cet ordre aux chefs de bataillon. Puis je partis en avant avec mavoiture personnelle et mon adjoint pour reconnaître le passage.

Le pont de Villacerf était déjà tenu par des blindés allemands. Je fis alors lareconnaissance de tous les ponts jusqu’à Troyes. L’ennemi était partout.

Arrivé à Troyes vers 9 heures, je remarquais que le pont Hube situé un peu plusloin que le pont Ste Marie et coupé par une bombe d’avion, venait d’être à nouveauà la circulation. Je reviens aussitôt à Villacerf croisant d’innombrables camions deréfugiés embouteillant la route latérale à la Seine. A Villacerf j’attendis les élémentsde la D.B. et j’expliquais la situation aux chefs de bataillons. Je leur demandais dedire aux hommes que malgré leurs fatigues un nouvel effort s’imposait à eux pourfranchir la Seine à Troyes avant que les Allemands n’y arrivent (15 km environ).

Je leur fis également part de mon intention de me rendre à Troyes pour yorganiser un cantonnement provisoire et du ravitaillement en vivres.

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L’affaire du Pont Hubert

J’arrivais à Troyes avec le Capitaine Bessy, mon adjoint, et s/Lieutenant Causeret.Le pont Hubert est maintenant barré par les Allemands. Et un double convoi civil etmilitaire, sans conducteur dont la tête arrive jusqu’au pont embouteille la route.

Un bombardement de l’aviation italienne ajoute encore au désordre complet quirègne dans ce faubourg. Ayant remarqué la présence de divers éléments épars je lesregroupe et les constitue en patrouilles avec mission d’expulser des jardins bordantla route les éléments légers ennemis qui s’y étaient infiltrés.

Un capitaine du génie de la 28° D.I., et le Capitaine Bessy, s’offrent pour faireune patrouille ainsi que 2 autres officiers (Lieutenant Potier du 80° R.I.) et uncavalier du G.R.D. Grâce à l’action de ces patrouilles, les jardins ont pu être“nettoyés” aux deux ailes, mais la défense ennemie se concentre sur le pont et dansles maisons environnantes au delà du pont.

Deux automitrailleuses se défilent derrière les haies et mitraillent les petits postesque j’avais placés autour du pont. Des minen semblant tirés d'une maisond’habitation, bientôt repérée, tombent en avant du pont balayé en même temps parun feu nourri de mitraillettes.

Le Capitaine Bessy découvre un canon de 25 et des munitions dans un convoi dechenillettes abandonné. il le met en batterie et à défaut de personnel, cet officierassure seul le service de la pièce sous le tir des armes automatiques et minenallemands.

Avec un mortier de 60, trouvé également sur les lieux, un officier et un sous-officier d’infanterie tirent pendant ce temps sur la maison d’où viennent les minen.

Mais le combat s’amplifie.Des renforts allemands surviennent. Deux mitrailleuses d’un régiment de zouaves

sont mises en batterie. L’aviation italienne reparaît et bombarde et mitraille le pont.Assurant la direction des opérations je regroupe le plus grand nombre d’hommesdans le but d’essayer de faire une brèche dans le dispositif et de faire passer le pontà l'interminable convoi stationnant à ses abords. Cependant la défense ennemie serenforce de plus en plus et la vanité de nos efforts apparaît malgré l’héroïsme decertaines individualités dont une surtout est à retenir: celle d’un tireur de F.M qui,ayant un mauvais champ de tir pour utiliser sont arme, se dresse debout à l’entrée dupont, mitraillant les Allemands à 150 mètres, il tombe grièvement blessé atteint parune rafale de mitraillette. J’ai rédigé sur le champ un ordre de citation à l’ordre del’armée pour ce soldat dont j’ai oublié le nom, et j’en ai remis le texte à l’officier durégiment de ce jeune héros.

Vers 18 heures ayant acquis la certitude que tout effort de percée en direction deTroyes était vain, la ville étant fortement occupée par l’adversaire, j’abandonne cesopérations de nettoyage et me porte au devant de la 26° D.B. dont les différentséléments venaient d’arriver et de se regrouper dans un bois à l’entrée de Troyes. Jeréunis les chefs de bataillon et prends la décision de passer la Seine plus au sud. Aumême moment, des vagues successives d’avions italiens, bombardant le bois etl’entrée de la ville. Les faubourgs sont complètement rasés et les convois hippo oumotorisés fortement endommagés.

Après avoir consulté une carte Michelin, je donne l’ordre suivant : “La 26° D.B.traversera la Seine à Ville-Moyenne et se regroupera au delà de la coupure auvillage de Foucarde”.

Je renvoie alors mes deux voitures de liaison avec le Capitaine Ambrosi de monE.M. et, suivi de mon adjoint, et du s/Lieutenant Causeret, prends le tête de la D.B.,qui ne constitue plus qu’un détachement de 200 hommes.

La Compagnie Latruffe du 22° B.C.A. et la Compagnie Combet, fortementréduites et encore dispersées par le dernier bombardement d’avions, furentregroupées par leur chef respectif mais ne rejoindront pas le gros de la D.B. etpasseront la Seine, le lendemain à des endroits différents.

Affaire de Les Parres

Après Villechétif qu’elle quitte à 19 heures, la D.B. traverse une forêt puisdébouche sur un vaste champ de blé. Le groupe du 22° B.C.A. est en avant-garde.Devant, à environ 600 mètres, une crête parallèle à la route nationale Troyes, Bar-sur-Seine. Des coups de feu partent de cette crête située à 2 ou 3 km à l’est de LesParres. Le groupe franc se déploie et prend le contact. Des éléments du 64° B.C.A.le renforcent et le combat s’engage.

Je demande un volontaire pour porter un F.M sur un point afin de prendre de flancl’ennemi. Un s/officier du 22° B.C.A. se présente, enfourche une bicyclette et parune route perpendiculaire à la crête va prendre position au point indiqué, malgré letir ennemi qui l’oblige à abandonner son vélo. Appuyé par le tir de ce F.M., legroupe franc avance et l’ennemi se replie vers Les Parres, laissant entre nos mainsun prisonnier valide du 14° R.I. allemand.

La 26° demi-brigade reprend sa marche en avant et sans être inquiétée de lasoirée, poursuit sa progression en direction du sud-ouest. A quelques kilomètres plusloin, devant une ferme, nous rencontrons un officier du G.R.D en side-car. Celui-cim’apprend que sa division (42° D.I.) doit se frayer un passage sur la Seine lelendemain et demande qu’on lui remette le prisonnier. Ce prisonnier interrogé à laD.I. pouvant fournir des renseignements utiles à l’opération projetée, je le remisentre les mains de l’officier du G.R.D. et la demi-brigade reprit sa route, en directionde Ville Moyenne.

Arrivé dans une ferme, à environ 7 km du village de Verrières, un s/officier m’afait connaître que le pont sur la Seine à hauteur de cette localité, était libre. La D.B.s’y dirige et atteint ce pont à 22 h 30. Il avait sauté!

Le détachement reprit alors la direction de Clercy bas dans l’espoir de trouver unpassage libre.

La fatigue des chasseurs

Depuis le départ d’Oeuvy, le 14 juin à 18 heures (c’est à dire en 30 heures), ledétachement avait parcouru 80 km sans manger ni dormir et avait soutenu deuxcombats, faisant un prisonnier. Le dernier ravitaillement datait du 13 Juin midi à

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Morangis où les chasseurs avaient touché du pain et du singe (pas en abondance)avant la contre-attaque amorcée.

A Clercy-bas, ce n’étaient plus des chasseurs, mais des fantômes titubant,littéralement épuisés de fatigue, harassés par le manque persistant de sommeildepuis neuf jours.

Situation des effectifs de la demi-brigade

Officiers :E.M. - Commandant Désidéri, Capitaine Bessy, s/Lieutenant Causeret22° B.C.A.: Capitaine Griolet, s/Lieutenant Escande, Ballandras, Elerz.62° B.C.A. néant64° B.C.A.: Capitaine Diot, Pauly, Becq, Berges, Lieutenant Laurens,s/Lts Georges et Bounias.

Hommes:150 chasseurs et 200 hommes environ de toutes armes qui s’étaientjoints à la demi-brigade.

Le 16 juin

L’arrivée à Clercy a lieu à 3 heures du matin.Je prends la décision de donner 2 heures de repos aux hommes et de passer le

pont à 5 heures. A 5 heures 30 le détachement se présente à Clercy-pont. Il avaitsauté depuis une heure!

On recherche alors un gué et, par chance, on en trouve un en amont. Tout lemonde passe la Seine, avec de l’eau jusqu'au genoux.

Le détachement se reforme dans un bois au sud de la Seine. Les hommes serhabillent et se chaussent et après une courte halte, la marche est reprise directionsud-ouest à travers champs, en petites colonnes.

Accompagné du Capitaine Diot et du Capitaine Bessy et d’un groupe de chasseurs(liaison), je me porte à quelques centaines de mètres en avant, vers les Vaudes. Apeine après avoir débouché sur la grande route qui traverse le village, une colonnemotorisée ennemie surprend le détachement, le harcèle et le disperse causant 6blessés qui ont pu être ramenés. Cette colonne allemande venait de Bar sur Seine.

Je me trouve, avec un groupe de 7 ou 8 chasseurs, coupé du Capitaine Diot et duCapitaine Bessy qu’ont suivi une quinzaine d’hommes, d’une part, et d’autre part,du gros du détachement où se trouvent les Capitaines Pauly et Becq et les s/LtsGeorges, Escande, Causeret, Bounias, Ballandras et Elerz.

Malgré nos efforts, nous ne pouvons nous rejoindre. Tous nous progressons dansle bois d’Aumont que nous avons gagné afin de nous soustraire aux Allemands.

Malgré toutes les patrouilles organisés dans la matinée, dans cette forêt, immenseet touffue, aux rayons sinueux, les groupes demeurent disloqués.

C’est le dernier acte de guerre de la 26° Demi-Brigade.

Des détachements isolés continueront encore à combattre, mais en dehors ducadre tactique et pour essayer d’éviter de tomber entre les mains de l’ennemi.

Conclusions

La 26ème Demi-Brigade a organisé et tenu pendant prés de quinze jours un soussecteur sur le Canal de l’Ailette à l’Aisne, en repoussant à plusieurs reprises destentatives isolées de l’ennemi qui cherchait à s’infiltrer à l’intérieur de sondispositif.

I . Disposée à gauche de la D.I., elle a toujours eu à subir le premier choc parmiles éléments constitutifs de la 44° D.I. et cela en raison même de la situation crééepar la rupture progressive des fronts que les événements de la Somme et de la régionde Paris avaient provoquée.

Le 8 juin 1940, sur l’Aisne, la 28° D.I. à sa gauche, lâche au début de l’après-midipendant que la 26° D.B. attaquée sur son flanc gauche et de front résiste pendanttoute la journée et ne se replie, encerclée, qu’à la nuit, vers 22 h 30 et même 24heures pour les derniers éléments.

Le 10 juin 1940 devant Fismes, après une défense héroïque sur la tête du pont, la26° D.B. rétablit la défense sur les bords sud de la Vesle et reçoit l’ordre de sereplier en évitant de se laisser couper d’Épernay.

Le 11 juin 1940 à Oeuilly-sur-Marne, la 26° D.B. se rétablit sur la Marne, de sapropre initiative, et s’y maintient pendant deux jours alors que, à gauche et à droite,les unités voisines n’étaient pas encore en place le 12 juin à 22 heures 30, heure àlaquelle les Allemands prennent pied dans Oeuilly.

II . Dans tous les replis effectués, la demi-brigade s’est toujours dégagée en bonordre pour se rétablir un peu plus loin et faire front à l’ennemi:

Ligne Dhuizel - Longueval.Ligne Ferme Pinson - carrefour N.W. de Blanzy les Fismes.Ligne de la Vesles, avec établissement d’une tête de pont sur Fismes qui infligea

des pertes sévères à l’ennemi.Ligne de la Marne à Oeuilly (deux prisonniers allemands) Oeuvy, près de Fère

Champenoise où la demi-brigade se trouvait seule en position et y subit desbombardements aériens répétés et puissants.

Ligne de l’Aube à Pouan.Ligne de la Seine à Troyes et à Les Parres où la demi-brigade se fraya un passage

en combattant et en faisant un prisonnier allemand.

I I I . A aucun moment pendant toute la durée des opérations je n’ai perdu lecontact avec mes bataillons, ni la liaison avec la D.I. Ce désir constant d’une liaisonétroite fut réalisé dans les circonstances les plus difficiles et permit de maintenir une

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cohésion intime entre tous les éléments de la demi-brigade. Cette cohésion,génératrice de l’ordre, à même provoqué de la part de 2 officiers de chars français,lors du repli après la contre-attaque sur Ablois, cette réflexion encourageante :“Voilà au moins une troupe qui se replie en ordre. Pour une fois cela fait plaisir”.

En résumé, au cours d’un mois d’opérations, les éléments de la demi-brigaderestèrent toujours groupés autour de leur chef et le restèrent jusqu’au bout, c’est àdire jusqu’au moment où après le franchissement de la Seine, troupe et chefspartageront la même sort dans un camp de prisonniers.

Comme commandant de la 26° Demi-Brigade j’ai tenu à souligner dans cerapport la grande satisfaction que j’ai obtenu dans le commandement de cette troupedont les efforts collectifs et les actions d’éclat isolées ont contribué à conserverintacte la renommée traditionnelle des chasseurs alpins.

Camp de Mailly, le 1er août 1940

Capitaine Edmond GrioletRentré de captivité militaire le 26.8.1941

Mon rapport d’opérations

Rappel de la situation de la 44e D.I.

Enlevée du front d'Alsace du 11 au 15 Mai 1940, par voieferré la 44e D.I débarque dans la région de Châlons sur Marne,le 17 Mai, est transportée par camions à 20 Km de l’Aisne, auNord de Reims. Elle entre en contact avec l’armée allemandequi progresse en direction de cette rivière le 19 Mai sur le canalde l’Ailette à l’Aisne et sur l’Aisne. La 44e D.I. (6e R I et 173eD B C A 26e D B C.A combat sur cette position jusqu’au 1erJuin, date à laquelle elle est partiellement relevée par la 28e D.I.(Général Lestien).

Malgré des pertes importantes, la 26e D B C A est engagée ànouveau sur l’Aisne entre Charonne et Bourg et Comin, du 5 au8 Juin (62e et 64e en premier échelon, 22e B C A Bazoches enréserve de D.I.)

Le 9 Juin, après l’enfoncement du front de l’Aisne par lesAllemands, la 44e D.I. poursuit le combat sur les plateaux quidominent la rivière.

Le 22e B C A attaqué à Bazoches même, est replier surFismes.

La 26e D B C A tient une tête de pont en avant de Fismes àBlanzy les Fismes. Le Commandant Ardisson commandant le22e B.C.A, est blessé le 10 Juin au matin.

9 Juin

19 H. Les Allemands occupent la crête entre le plateau E. de Vauxeiré et Blanzy.Reçus par des feux serrés, ils ne poursuivent pas leur avance jusqu’à la nuit.

A 21 H. : Ordre de départ pour Fismettes afin d’y établir une tête de pont. Je suischargé par le Commandant Désidéri, Commandant la 26e D B C A de protégerjusqu’à 22H., le repli du 6e R.I. et des services de la 26e D.B.C.A.

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Au moment où je me dispose à rallier Fismettes, un contre-ordre nous faireremonter à Blanzy. Au retour, nous sommes accrochés par les Allemands qui, à lafaveur de la nuit, se sont approchés de la route Blanzy - Fismes.

A 23 H., nouvel ordre pour la constitution avec le G.R.D. et la 1ère Compagnie du22ème B.C.A. de la tête de pont de Fismettes. La mise en place se fait en longeant leruisseau de Blanzy, la route étant tenue par les Allemands.

Dans la nuit, la mise en place des éléments du 22 et du 62 est faite par leS/Lieutenant Laroque du G.R.D. et consiste à doubler les F.M. du FRD. Surtout envue de tenir le carrefour de Fismettes sur la route de Blanzy.

Au petit jour, le 64ème B.C.A. passe à Fismettes. Le Commandant Désidériétablit son P.C. dans une villa contre le pont de Fismes, côté Fismes le capitaine duG.R.D. commandant la tête de pont, adopte le même P.C.

Le 10 Juin

Le jour levé, m’étant rendu compte que seul le carrefour de la route de Blanzyétait efficacement tenu, aucune défense n’étant assurée sur les sentiers vers leruisseau, la route vers cote 162 etc.... je propose au Commandant Désidéri unremaniement de la tête de pont avec le dispositif suivant: 62ème B.C.A. à l’esttenant la route cote 162, les débouchés des sentiers venant de Blanzy, G.R.D. aucentre tenant le carrefour de Fismettes, 1ère Compagnie du 22ème B.C.A. à l’Ouesttenant la route vers Bazoches. J’informe en même temps tous ces éléments que jeprends le commandement de la tête de pont.

A 9 H. le 22ème B.C.A. est attaqué à courte distance par des éléments allemandsdescendus de l’Ouest en direction du pont de Fismes. Pressés, les chasseurs du22ème lâchent les lisières de Fismettes, je fais tenir les carrefours par leurs F.M.m’efforçant d’empêcher leur retraite.

A 10 H. ordre de la D.I. de réoccuper les emplacements suivants de l’Ouest àl’Est; route venant de Bazoches à Fismettes, carrefour Nord de Fismettes, cote 162.

Le Commandant Désidéri me confie le commandement de la tête de pont avec la1ère Compagnie du 22, 1 Section de la 2ème Compagnie du 22 le G.R.D. motorisé,le 62ème, 1ère Compagnie du 64ème B.C.A.

Par la suite, l’escadron moto du G.R.D. sera envoyé pour parer à des infiltrationsallemandes du côté de Bazoches et sera remplacé par des F.M. du 64ème B.C.A.

La 22ème réoccupe la route Bazoches-Fismettes.La G.R.D. réoccupe le carrefour N. de Fismettes.La 64ème B.C.A. section S/Lieutenant Gesta occupe le carrefour 800 m.E de la

route côte 162.Le s/Lieutenant Coré de la 2ème Compagnie , reçût l’ordre d’attaquer avec sa

section la cote 162 et de s’y maintenir.Cette section, dès le coude de la route, est prise à partie par les Allemands qui

progressent en direction, eux aussi, de la cote 162. Le s/Lieutenant Coré déploie sasection face à l’ennemi, met sa F.M. en batterie et disperse l’ennemi, lui infligeantdes pertes. Il se maintiendra jusqu’à épuisement de ses munitions sur cette position,puis repliera sa section en bon ordre sur le coude de la route. A cet endroit, la

section du 64 attaquée par les Allemands a subi de lourdes pertes, le s/LieutenantGesta a été tué ainsi que de nombreux chasseurs.

Le s/Lieutenant Vigneron, officier de liaison du 91ème R.A.D., qui se tient avecmoi sur le pont de Fismes, suit le déroulement du combat et prend possession descrêtes au fur et à mesure de leur évacuation. Les tirs d’artillerie causent auxAllemands de lourdes pertes.

A 10 H.30, un bataillon du 6ème se présente à la tête de pont. J’organise lepassage du pont par petits groupes car les Allemands qui tiennent 162 tirent sansarrêt sur le pont sur lequel ils ont des vues.

Les Allemands, à 11 H., ont réussi à s’infiltrer jusqu’au coude de la route verscote 162 , d’où ils coupent en deux par leurs feux le carrefour N. du pont. D’autrepart, ils sont au contact sur la route de Bazoches où ils tentent de s’infiltrer le longde la Vesle au carrefour N. de Fismettes et au ruisseau de Blanzy, ils poussentégalement nos postes. Progressant du coude de la toute 162, je prévois qu’ilsarriveront au carrefour du Pont rendant la retraite impossible aux éléments du 22 etdu 62.

Après avoir rendu compte de la situation au Commandant Désidéri, je décide defaire replier d’abord la 1ère Compagnie du 22ème , homme par homme. Le 62èmepasse le pont à son tour à l’exception du groupe franc du s/Lieutenant Fritsch quicontient l’ennemi face au pont et que je ferai replier à vu au dernier moment.

A 11 H. 30, le Commandant Désidéri est venu me retrouver au pont. LesAllemands sont à peu près au carrefour; ils tirent sur le pont même à l’aide deminens. Je fais placer des mitrailleuses du 3ème sur le pont du chemin de fer pourinterdire l’accès du pont de la Vesle, dans le cas où la mise de feu raterait. Je fais parsignaux rentrer le s/Lieutenant Fritsch et j’attends le débouché des allemands pourfaire sauter le pont. Il saute à leur arrivée même.

Les bataillons sont mis en place sur la rive Sud de la Vesle. Les Allemands quiarrivent en masse le long de la rivière sont accueillis par des feux nourris etefficaces.

A 13 H. dans le sous-sol de la Mairie de Fismes où le Commandant Désidéri ainstallé son P.C., nous recevons de la D.I. un ordre de repli.

Le 62ème B.C.A. devra cantonner à Tramery.

Au milieu de l’étape, nous sommes rejoints par le s/Lieutenant Vigneron. Il medemande de lui donner un détachement de protection pour faire décrocher lesbatteries de son groupe. Je désigne le s/Lieutenant Fritsch et son groupe franc. Nousavons été ravitaillés par le T.R. du bataillon avant le départ de ce détachement dus/Lieutenant Fritsch, en pain, en vin et viande de conserve. Les hommes serestaurent au cours d’une pause pour la première fois depuis trois jours.

A Reamery, où j’arrive en même temps que les débris du Bataillon, conduits parle S/Lieutenant Garzulino, nous reclassons les unités. La 1ère Compagnie a, à satête, l’Adjudant-chef Grandioli. La 2ème Compagnie , le s/Lieutenant Garzulino.L’effectif total du 62ème bataillon est de cent hommes. Ce reclassement s’opère surla route encombrée par des éléments de toutes armes, qui retraitent en désordre.

Nous n’avons encore pu organiser les postes et le logement que les Allemandssont signalés à l’entrée du village. Je conduis rapidement la 1ère Compagnie à lasortie N. après avoir fait ramasser toutes les munitions des autres chasseurs; cette1ère Compagnie dispose de cent cartouches par F.M. et cinquante par voltigeur. Les

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tris dans la nuit sont rendus très délicats par la suite de la présence de nombreuxFrançais qui se replient.

A 22 H. 30, le Capitaine Dupassage nous apporte un ordre de repli pour O H. surOlizy-Violaine où le bataillon arrive à 5 H. du matin.

Le 11 Juin

Il y retrouve la 26ème D.B.C.A. qui cantonnera toute entière dans ce village.A l’arrivée, le Commandant Désidéri me fait appeler pour me demander de

prendre effectivement le commandement du 22ème B.C.A., commandement quim’avait été confié la veille.

Le cantonnement est reparti entre les Bataillons.A 7 heures, les automitrailleuse et les chars allemands défilent sous nos yeux, sur

la route d’Olizy. Ordre de repli sur la Marne, par Bataillon, est donne par leCommandant Désidéri sur Chatillon, Port à Binson.

Départ à travers champs, les routes sont obstruées par des convoi d’artillerie, à larecherche d’un pont.

Le bataillon, survolé et bombardé par avions, arrive en vue du Pont de Port àBinson attaqué par avions et chars ennemis lorsque ce pont saute.

Force est de rechercher un autre passage. Nous nous dirigeons en amont vers lepont de Reuil-Oeuilly distant de 4 km environ.

Sur la rive Sud le Commandant Désidéri rassemble les bataillons. Il les dirige surle plateau au sud du village, laissant le pont et le village à la garde de la 1èreCompagnie du 22ème B.C.A.

Le Bataillon a l’encadrement suivant :

E.M. Capitaine Griolet Commandant le Bataillon Capitaine Fourchier, Adjudant-MajorLieutenant Ricatte officier de renseignements.

C.A. S/Lieutenant AgardS/Lieutenant Elorz.

1ère Compagnie Capitaine LatruffeS/Lieutenant LajousS/Lieutenant Ballandras

2ème Compagnie Capitaine CombetS/Lieutenant MerpillatS/Lieutenant Beau.

3ème Compagnie Lieutenant MinotS/Lieutenant EscandeS/Lieutenant RenaudoS/Lieutenant Darmont.

Il reste neuf mitrailleuses utilisables, ainsi que les deux tiers des F.M.Les compagnies sont toutes à trois sections.Il n’existe aucune voiture de liaison.

Par la suite, j’utiliserai la moto du Service de Santé; elle me laissera en panne le13.

Après, plus rien.A 14 H., ordre d’assurer la défense du Pont de Reuil - Oeuilly à l’aide d’une

compagnie qui relèvera la section de la 1ère Compagnie .Je trouve au pont une section de la 22ème Compagnie du 46ème R.I. (Bataillon

d’Instruction). Ce bataillon est commandé par le Capitaine Leclercq et la Compagniepar le Capitaine Pluchot.

Ils défendent le pont de Reuil - Oeuilly avec une section et le village d’Oeuillyavec le reste de la compagnie .

Ils sont vaguement en liaison avec une 22ème Compagnie du 48ème R.I.(Bataillon d’Instruction également) qui tient le pont de Port à Binson. Quant à leurliaison à droite, ils l’ignorent.

Une visite au capitaine Pluchot dans Oeuilly me donne les moyens et la missionde la compagnie de garde du pont. Les hommes sont des permissionnaires de touscorps et des récupérés récents, il ne faut pas faire fond sur cette unité.

Compte-rendu verbal de cette situation étant fait au Commandant Désidéri, la2ème Compagnie du 22ème B.C.A. prend le dispositif suivant : 1 section sur la riveSud de la Marne, au pont de Reuil - Oeuilly, 2 sections sur la voie ferré parallèle à laMarne, de part et d’autre du pont de la route Reuil - Oeuilly.

En outre, I.S.M. complète commandée par le s/Lieutenant Elorz s’établira encaponnière à la croupe 600 m. S.O. du pont tirant sur ce pont 36 caisses decartouches. Les deux autres compagnies du 22ème B.C.A. s’installeront dans le boissur le plateau N. d’Oeuilly. le dispositif est mis en place immédiatement.

A 18 H. les Allemands se présentent devant le pont que fait sauter le LieutenantVétroff du 46ème.

Jusqu’à la nuit, des coups de feu sont échangés de part et d’autre. Je rends comptede l’activité des Allemands dans Reuil où ils se sont emparés d’un dépôt du Génieimportant; le Lieutenant Vétroff avait à différentes reprises, demandé le transport dece matériel sur la rive Sud de la Marne.

A la nuit, je descends sur la rivière, on entend nettement l’ennemi travailler,vraisemblablement à la construction de passerelles.

A 23 H., je reçois par chenillette, 3 caisses de grenades, 3 caisses de cartouches deF.M. ainsi qu’un ravitaillement de cinq boules de pain et vingt boîtes de viande deconserve par compagnie . Ordre d’alerte est donné pour tout le monde à 3 H. dumatin, afin de parer à une attaque possible au lever du jour. Malgré de nombreusesalertes et bombardements d’avions qui ont mis le feu à une partie du village, aucuneattaque d’infanterie ennemie ne se produit.

Le 12 Juin

Le Commandant Désidéri a établi son P.C. dans une maison du haut d'Oeuilly àcourte distance de celui du 22ème B.C.A.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Toute la matinée, les avions ennemis survolent et mitraillent le village. L’artillerieallemande s’est installée sur les crêtes N. de la Marne et effectue ses réglages. Lesmitrailleuses ennemies, très nombreuses, entrent en action contre tout personnel quise déplace dans nos lignes.

Le Commandant Désidéri me convoque vers 11 H. à son P.C. pour mecommuniquer un nouveau dispositif de la 26ème D.B.C.A. qui sera à réaliser à latombée de la nuit: voici le texte de l’ordre d’opérations qui ne me sera remis qu’à 16H 30 :

26ème D.B.C.A. - Ordre Général d’Opérations

1° La 44ème D.I. a pour mission de tenir la Marne de Port àBinson exclus à Damery inclus.

2° Barrage principal appliqué sur la rivière.Ligne principale de résistance jalonnée par la voie ferrée.Barrage en profondeur par l’organisation des villages en

points d’appui fermés et l’obstruction complète de toutes voiesde communication allant vers le Sud (Barricades et mines).

3 ° Le secteur de la D.I. est divisé en trois sous-secteurs.26ème D.B.C.A. s/secteur Ouest.Limites Ouest (avec 45ème D.I.) carrefour de routes 800 m.

S.E. de Chatillon s/Marne, Port à Binson, Chène la Reine, tousces points à la 45ème D.I.

Limite Est (avec le 6ème R.I.) Reuil s/Marne, la CenseCarrée: Ces deux points au 6ème R.I.

4° Répartition des unités2 Quartiers.A droite: le 22ème B.C.A.Limite Est: celle du s/SecteurLimite Ouest: corne S.E. du bois situé au Sud de la voie

ferrée à 1 km. à l’Est de Port à Binson.P.C. du chef de Bataillon: Oeuilly.A Gauche: 64ème B.C.A.Limite Est: celles du quartier de droite.Limite Ouest: celles de la gauches du s/secteur.Le Commandant du 64ème B.C.A. recherchera la liaison à

gauche avec la 45ème D.I.P.C. du chef de Bataillon: Nord du bois de Misy.En entrant en secteur, ces deux bataillons laisseront sur

place les éléments du 48ème B.I. à gauche (Port à Binson) et46ème B.I. à droite (Oeuilly) ces éléments resteront sur place àla disposition des commandants du Quartier.

5°- Conception de la défense:

A) Quartier de droite2 compagnies en premier échelon.1 compagnie en point d’appui dans Oeuilly.La compagnie de 1er échelon détachera unes section sur les

bords de la Marne, le reste sur la ligne principale de résistanceen arrière de la ligne de chemin de fer.

B)- Quartier de gauche3 sections sur la ligne principale de résistance, celle-ci se

confondant avec les bords de la rivière.1 section en point d’appui lisière N. du bois de Misy.Ce dispositif sera réalisé ce soir dès la tombée de la nuit.Le commandant du 64ème B.C.A. (quartier de gauche)

devra assurer de façon étroite la liaison à sa gauche d’abordavec les éléments du 48ème E d’instruction, ensuite avec ceuxde la 45ème D.I. qui doivent entrer en secteur.

Le 62ème B.C.A. à effectif très restreint sera chargé de’l’aménagement intérieur du réduit d’Oeuilly (barricadesfermées à ériger sur toute les voies d’accès venant du N. del’E. et de l’Ouest)

Artillerie : Un groupe 1/302 d’artillerie appliquera devant lefront du secteur des tirs d’arrêt déjà préparés après ententeavec le commandant du groupe d’artillerie.

P.C. le 12 Juin, 16 HeuresLe Chef de Bataillon Désidéri

Commandant 26ème D.B.C.A.

Sans attendre la réception de cet ordre détaillé, les commandants de compagnieont été réunis au P.C. du 22ème B.C.A. et mis en possession des éléments leurpermettant d’exécuter les reconnaissances de leurs quartiers. Ces reconnaissancessont prévues pour 14 H.

L’ordre du bataillon, en plus des dispositions prescrites par la 26ème D.B.C.A.donne pour limite entre le s/quartier de droite (2ème Compagnie Capitaine Combet)et le s/quartier de gauche (1ère Compagnie Capitaine Latruffe) une ligne N.E. - S.O.passant par le ruisseau 150 m. Ouest d’Oeuilly. Il précise en outre que la Marne seradéfendue sans esprit de recul. En outre, le Pont de Reuil est donné au CapitaineCombet de manière à ce qu’il ne puisse y avoir manque de liaison à ce point avec le6ème R.I. Dans la journée, le 6ème R.I. n’ayant pas pris position, il sera mêmeordonné à la Compagnie Combet de déborder largement le pont à l’Est pour parer àtoute attaque allemande en face de ce pont.

La préparation d’attaque allemande commence aux environs de 14 H 30.La violence du bombardement est telle qu’il n’est pas possible de se méprendre

sur les intentions ennemies. En effet, en quelques heures le village d’Oeuilly sera enruines et en flammes. D’importantes concentrations de troupes dans Reuil, desconstructions de passerelle des tentatives de mises à l’eau de radeaux sont signalées

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

à la 26ème D.B.C.A. car je ne possède aucun moyen de liaison, ni de signalisation.Plusieurs demandes de munitions sont faites également ainsi qu’en témoigne lecarnet d’ordres. Le Commandant Désidéri me donne l’ordre de prendreimmédiatement le dispositif qui ne devait être appliqué qu’à la nuit. La 3èmeCompagnie (Lieutenant Minot) qui devait venir former un P.A. fermé à Oeuilly estplacée sur la croupe Ouest du village pour protéger la D.B.C.A. contre desinfiltrations signalées dans le bois de Misy.

La 1ère Compagnie est alertée par nos soins et dirigée vers ses emplacements enattendant le retour de reconnaissance de son capitaine.

Le 62ème ne peut commencer la construction des barricades sous le feu violentdes canons et des avions ennemis.

Vers 16 H., par le 48ème B.I. dont une partie s’est repliée sur Oeuilly, nousconnaissons le passage de la Marne à Port à Binson par l’ennemi. Un prisonnierallemand fait dans le bois de Misy, indique que 3 compagnies allemandes se sontinfiltrées par la route Port à Binson - Oeuilly dans la partie N. du bois de Misy.

La 1ère Compagnie progressant vers ses emplacements, par cette même route,arrête et met en fuite un peloton cycliste parvenu à l’entrée d’Oeuilly.

La section de cette compagnie qui devait occuper le bord de la Marne, prise sousles feux violents de la rive Nord, ne peut atteindre ses emplacements. Cettecompagnie toute entière sera donc placée en flèche face à l’Ouest en bordure du boisde Misy.

Les pertes de toutes les compagnies sous le feu d’enfer de l’ennemi, sont élevées.Fidèles à une tactique qui leur a constamment réussi en face d’une ennemi

numériquement inférieur, les Allemands repoussés devant Oeuilly par les tirsd’artillerie, les feux de la 2ème et de la 1ère Compagnie cherchent à déborder par lesailes.

Un lieutenant du 6ème R.I se présente vers 19 H. au P.C. de la 26ème D.B.C.A.au moment où je viens rendre compte de la situation du bataillon. Il vient demanderdes renseignements sur la situation et informe que son régiment viendra prendreposition dès la tombée de la nuit. Je lui réponds qu’il sera sans doute trop tard pournous aider ou nous retrouver vivants.

En effet, la situation devient grave dans la soirée.L’ennemi a réussi à passer des éléments importants par radeaux à l’Est du

bataillon dans le secteur du 6ème R.I. à l’abri d’une boucle de la Marne. Ceséléments, pris à partie par les sections de la 2ème Compagnie placées sur la voieferrée, poursuivent vers le Sud, leur marche en avant, sans se rabattre sur lebataillon.

Un peu avant la tombée de la nuit, des infiltrations se sont produites un peupartout sur les flancs du bataillon. L’importance des troupes transbordées parl’ennemi est considérable, vers S.E. l’ennemi contourne le village par les jardins.

Les compagnies demandent sans arrêt des munitions que je ne puis obtenir et destirs d’artillerie qui se font plus rares. D’autre part, elles signalent un inconvénientque j’ai déjà remarqué au 62ème. Les F.M. plus fragiles que nous l’avions supposé,par suite du manque de graissage et de la poussière, deviennent inutilisables.

Les pertes sont importantes.La 3ème Compagnie est réduite à 50 hommes, la 2ème au même effectif,

approximativement.

Enfin, à 21 H., l’attaque frontale allemande augmente et vigueur coïncidant avecune attaque par le flanc Est des unités ennemies traversées

Le s/Lieutenant Merpillat de la 2ème Compagnie est fait prisonnier avec quelqueshommes après de très lourdes pertes.

Le village est rempli de blessés.Nous plaçons un bouchon à la sortie Nord du village.Bientôt, les fusées éclairantes allemandes nous apprennent que l’ennemi, tant par

le bois de Misy que par l’est du village d’Oeuilly, progresse largement vers le Sud.A 22 H.30, le Commandant Désidéri me donne l’ordre de replier les compagnies

sur la sortie Nord du village.A 22 H 45, les compagnies rassemblées, le repli du Bataillon s’opère en Direction

de la ferme Bois brûlé. Le 64ème B.C.A. est alerté au passage.La nuit toute entière sera employée en manoeuvres.D’abord, la 1ère Compagnie est placée en protection de batteries qui doivent

s’installer sur la route d’Oeuilly à hauteur du Bois Brûlé. Le capitaine commandantle groupe ayant décidé de ne pas faire quitter la route çà ses pièces, je ramène cettecompagnie avec le gros du bataillon.

Le 13 Juin

Au petit jour, un nouveau dispositif est pris.Le bataillon sera disposé sur un front de 2 km. environ entre la ferme La Creuse

Carrée et la ferme Bois Brûlé, en protection de batteries.Le dispositif est réalisé dans les blés mouillés. Les hommes qui ne connaissent ni

repos, ni sommeil, ni repas, marchent comme des automates.Il n’y a plus de munitions.En raison des effectifs et du front à tenir, le bataillon est en ligne entre les deux

fermes.Fort heureusement, quelques patrouilles ennemies se présentent seules et

n’insistent pas.Il fait un brouillard très épais qui a dissimulé à l’ennemi toutes nos manoeuvres.A 7 H.30, me parvient l’ordre suivant :

Ordre à 22ème B.C.A.Ordre de repli

Axe général Ablois - Vertus.Axe de retrait de la 1/2 Brigade

OeuillyBrugnyMorangis

Décrochage dès réception du présent ordre.La manoeuvre en retraite doit éviter de se laisser accrocher et de se laisser couper

d’Épernay.Le G.R.D. reste sur place.

P.C. 5 H.15

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

En même temps que cet ordre, un chenillette nous apporte les munitions... quinous ont fait défaut à Oeuilly et dont une partie doit être refoulée.

La marche sur Morangis est pénible. Les hommes ont leurs chaussures pleinesd’eau, ils sont harassés.

En forêt, nous croisons le G.R.D. en position et la Compagnie Villernet du 99èmeR.I.A.

Nous arrivons à Morangis le Petit à Midi.Quelques granges sont réparties aux compagnies pour faire reposer les hommes.

Du pain et de la viande de conserve sont distribués par le T.R. du bataillon qui nousa rejoint.

A 13 H.30: alerte.Le Commandant Désidéri m’informe que les Allemands occupent le bois N.O. du

village, contenus par la Compagnie Villermet du 99ème.L’ordre de la 44ème D.I. est de contre-attaquer en direction du carrefour 1.500 m.

Sud de Brugny et de s’y installer.Un bataillon sera constitué avec une compagnie du 64ème commandée par le

Capitaine Becq, 2 compagnies du 22ème, la Compagnie Combet (2ème) et laCompagnie Minot (3ème).

J’assume la direction de cette contre-attaque, le Capitaine Diot commandant le64ème, rassemblant les éclopés de tous les bataillons et en assurant le repli versVertus.

Avec la route pour axe de marche, le bataillon progresse vers le carrefour,rejoignant la Compagnie Villermet du 99ème R.I.A. Les Allemands ont un bouchoncomposé de side-cars de mitrailleuses et d’un mortier dans le bois N.O. deMorangis.

Conservant la Compagnie Becq sur la route, en soutien de la compagnie du 99èmeje découple à gauche par le bois la Compagnie Combet, à droite, la CompagnieMinot pour tourner et réduire la résistance ennemie.

L’opération est en bonne voie, le contact est pris avec l’ennemi lorsque à 14 H.30,je reçois ordre du Commandant Désidéri de rompre le contact et de me replier leplus rapidement possible sur Vertus.

Nous sommes croisés à ce moment par trois automitrailleuses qui se rendent sur laroute Epernay - Montmort.

Le repli s’effectue en ordre parfait, la Compagnie Becq du 64ème B.C.A. assurantle service d’arrière-garde.

A Vertus où toute la demi-brigade cantonne dans la ferme La Cense 2 km E. deVertus, la Compagnie Latruffe est laissée en bouchon sur la crête au carrefour, 1 km.Ouest de Vertus.

Le 14 Juin

A 1 H., ordre de repli sur Morains le Petit par Bergères les Vertus.Les routes sont encombrées de convois, d’artillerie, de troupes de couleur, dans

un désordre complet.

Aux carrefours, il faut se battre pour assurer la circulation. Le bataillon est encolonne par un, et ce trajet exige une surveillance constante.

Arrivés à Morangis à 7 H. du matin, nous nous établissons face au Nord. LesAllemands bombardent par avions à plusieurs reprises nos emplacements et lesconvois qui refluent.

A 11 H.30, ordre de repli en direction de bois N.O. d’Euvy (4 km. Sud de FèreChampenoise).

Le repli s’opère très difficilement en raison de l’encombrement. Je suis obligé defaire retraiter par compagnie. L’aviation allemande accompagne sans répit lesconvois, tuant les chevaux, éventrant les voitures. Les réfugiés commencent à semêler à la troupe.

A Fère Champenoise, le désordre est tel que la circulation est totalement arrêtée.Je me porte au carrefour central et je constate que les colonnes descendant du

Nord au Sud et celles allant de l’Est vers l’Ouest se sont pénétrées au point que toutmouvement est devenu impossible. Les avions allemands mettent le feu à la ville, lapanique dans les convois où sans vergogne les conducteurs abandonnent chevaux etvoitures pour se terrer dans les caves.

De Midi à 16 H.30, laissant les compagnies du 22ème se diriger vers Euvy, jeresterai à ce carrefour pour assurer la circulation identifiant douze divisionsd’infanterie, renseignant les repliés sur les directions de rassemblement, grâce auxrenseignements obtenus par d’autres éléments de leurs unités. Le soir, dans unrapport remis à Champfleury au Commandant Désidéri, je signalerai ce désordreindescriptible en regrettant qu’un officier d’État-major n’ai pas été placé par lecommandement à ce carrefour important pour effectuer ce travail de remise enordre.

Le spectacle est le même d’ailleurs sur la route d’Euvy où, la route étant obstruée,les convois défilent sur plusieurs rangs à travers champs, soldats et réfugiés mêlés,bombardés par les avions.

A Euvy, je suis informé par le Capitaine Ottavi qui s’y trouve en voiture, que lesordres donnés pour la défense des bois Ouest-Est d'Euvy et la remise en ordre desunités, ne tiennent plus, la 26ème D.B.C.A. devant se rendre à Champfleury.

D’Euvy à Gourgançon et à Salon, la retraite est plus pénible encore. Lesbombardements sont plus violents, les réfugiés plus nombreux, les pistes à traverschamps plus nombreuses aussi. Les bombes font des dégâts importants dans lepersonnel et le matériel.

Après Salon, la route est libre, civils et troupes en retraite empruntant la routed’Arcy s/Aube.

Je retrouve le soir à 20 H., à Champfleury les compagnies de mon bataillon.A 21 H., le Capitaine Dupassage vient nous communiquer l’ordre de repli nous

prescrivant de gagner au cours de la nuit la rive Sud de l’Aube, à Pouan.Ce sera le dernier ordre reçu.

Le Commandant Désidéri donne ses ordres pour le départ qui s'effectue à 22 H. Jesuis chargé d’orienter la demi-brigade, plus spécialement de reconnaître le passagede l’Aube.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Trajet difficile dans la nuit.Depuis Fère Champenoise, j’ai prescrit au commandants de compagnies de

conduire isolément leurs unités suivant les itinéraires que je leur indiquerai demanière à éviter les longues colonnes. Le Pont de Plancy est inutilisable, une bombeétant tombée au milieu de la route. Je recommence à organiser à ce carrefour lacirculation jusqu'à l’arrivée des éléments de tête de la D.B.C.A.

L’encombrement est encore compliqué par l’obscurité. Je trouve un passage àViapres le Petit; j’arrive à temps pour empêcher de faire sauter le pont. Une colonnede réfugiés et de troupe vient en effet échouer à ce pont parce que celui d’Arcy surAube est coupé. J’attends à ce passage les éléments de la D.B.C.A. Je reste auprèsde la garde du pont jusqu’à écoulement complet des unités.

Le 15 Juin

Je rejoins Pouan à 4 H. du matin.J’erre à la recherche de mes compagnies.A 5 H., je rencontre le Capitaine Ambrosi en possession d’une voiture. Le

Commandant Désidéri me donne un ordre de repli sur Estissac par Premierfait, lesGrandes Chapelles, Villacerf. Je communique cet ordre aux capitaines.

Nous partons avec le Commandant Désidéri reconnaître le passage de la Seine àVillacerf. Au moment où nous y arrivons, les Allemands viennent de prendrepossession du pont. Des blessés sont au village. Nous sommes reçus sur la route dupont par des coups de feu.

Le Commandant Désidéri décide de glisser le long de la Seine vers Troyes.Nous partons en voiture reconnaître les ponts.La circulation à partir de Pont Marie est arrêtée; troupes et réfugiés bloquent la

route sur plusieurs kilomètres de longueur. Nous allons à pied à Pont Hubert. Lepont est coupé par une bombe d’avion qui a creusé au milieu de la route unentonnoir de cinq mètres de profondeur. Des volontaires s’emploient à reboucher letrou, à essayer, grâce aux rails de tramway restés suspendus au-dessus du vide defaire passer des véhicules légers; on peut espérer rétablir en quelques heures lacirculation.

Nous retournons aux voitures.Le Commandant Désidéri me ramène à Villacerf où j’attendrai au passage les

unités de la demi-brigade pour leur indiquer le changement d’itinéraire.Il part à Troyes avec le Capitaine Bessy, le Capitaine Ambrosi, le s/Lieutenant

Causeret, tenter d’organiser un ravitaillement pour les hommes en fin d’étape.Toutes les unités sont touchées au passage de Villacerf.

A 10 H.30, je quitte Villacerf avec les compagnies du 22.Les bombardements d’avions, fréquents, détruisent les convois sur la route. Je

dois faire déployer les hommes à travers champs pour éviter des pertes sérieuses,mais le regroupement une fois l’attaque passée est difficile.

A Pont Sainte Marie, à 15 H.; j’arrête la tête de colonne pour rechercher leCommandant Désidéri. Il est impossible de circuler même à pied, la route étantcomplètement obstruée par les convois d’artillerie et de réfugiés sur plusieurs rangs.

Je trouve à Pont-Hubert le commandant avec le Capitaine Bessy, le s/LieutenéantCauseret et des hommes de toutes armes qu’ils ont récupérés. Le Pont est tenu pardes chars allemands, de l’infanterie, avec des mitrailleuses.

Le commandant me demande d’amener le Bataillon pour essayer de forcer lepassage du pont. Je retourne à Pont Marie où j’ai laissé les s/Lieutenants Agards,Escande, Ballandras, Elorz.

La 2ème Compagnie n’est pas encore arrivée.Le capitaine Coubet me rejoindra dans l’après-midi. Le capitaine Diot revient

avec moi à Pont Hubert où le Capitaine Besay sert un canon de 25 qu’il a trouvé.Des patrouilles sont organisées pour essayer de détruire la résistance ennemie. Il y

a des tués et des blessés sans résultat appréciable.

Dès le début, j’ai conseillé au Commandant Désidéri, comprenant que tous lespassages sur la Seine sont tenus par l’ennemi qui occupe la rive gauche, de glisservers la source de la rivière à la recherche d’un passage.

J’obtiendrai gain de cause vers le soir.A 18 H. le Commandant Désidéri rassemble à la sortie N.E. de Pont Marie sur la

route de Crenay, les débris de la demi-brigade, après qu’une dernière tentative depassage ait été effectuée sans succès par un G.R.C.A. Nous subissons desbombardements d’avions italiens. Le Commandant Désidéri décide de renvoyer lesdeux voitures touristes de la demi-brigade vers l’arrière.

La demi-brigade va essayer de contourner Troyes par l’Est et recherchera unpassage de la Seine. Je suis chargé de conduire la colonne. Itinéraire: route deCrenay, Villechétif, direction Sud, par les bois, traversés d’un marécage.

De l’autre côté du bois, des camions abandonnés dans lesquels nous trouvons sesvivres. Une patrouille commandée par le s/Lieutenant Elorz, est envoyée reconnaîtrela route de Bellin à Saint Parres qui passe sur la crête. Elle la trouve libre maisdécouvre des Allemands en direction de Troyes.

Le Sergent-chef Johansen revient en bicyclette chercher un F.M. De notreemplacement, nous voyons une patrouille allemande descendre la crête, dans unangle mort, à 200 mètres à l’Ouest de notre propre patrouille. Un fusil mitrailleur estmis en batterie, servi par le Lieutenant Ricatte. Nous décidons de les attendre, pourles capturer, mais comme à notre droite, un groupe de Français marche à leurrencontre, les bras levés, je fais ouvrir le feu et la patrouille allemande s’enfuit,laissant entre nos mains un prisonnier qui sera remis ultérieurement entre les mainsde la 42ème D.I.

Je conduis une patrouille pour fouiller le village de Bellin pendant que, par lesbois, le reste de la 26ème D.B.C.A. gagne la route nationale Troyes - Lusigny. Laroute est libre. Sont présents : Commandant Désidéri, Capitaine Bessy, s/LieutenantCauseret de la 26ème demi-brigade, Capitaine Griolet, Lieutenant Ricatte,s/Lieutenants Escande, Ballandras, Elors du 22e, Capitaine Diot, Capitaines Becq,Polli, S/Lieutenants Josson, Bougnasse, Georges du 64.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Le 16 Juin

Après bien des marches et contre marches, nous arrivons à 3 H. du matin àRouilly sur Loup. Nous entrons faire de la lumière pour consulter la carte dans unemaison. Le Commandant Désidéri décide de traverser la Seine avant de laisserreposer les hommes, apprenant que le pont de Vernières doit sauter incessamment.

Au pont de Vernières, qui est sauté, je découvre à cent mètres en aval unepasserelle oubliée par laquelle j’atteins la route de Buchères. Un renseignement reçula veille nous a donné Rumilly les Vaudes comme P.C. de la 44ème D.I.

Je suis la route sur l’autre rive de la Seine par Saint Aventin Clercy, Courcelles etCourbeton. Ma troupe s’est augmentée de zouaves (20 Hommes sous lecommandement. du Sergent chef Vaillant du 1er Zouave), 10 Hommes du G.R.C.A.sous le commandement du Maréchal des Logis Bonafos - 30 Hommes du 115èmeR.I. 3ème Compagnie sous le commandement du Sergent chef Devauley, etc.

A Courbeton, à midi, nous trouvons quelques maigres provisions.J’envoie une patrouille reconnaître le pont de Saint Parres les Vandes. Elle se

heurte à un char allemand escorté de sides exactement comme à Vernières.Le pont de Courtenot est tenu par des chars français. Nous le passons en même

temps qu’un groupe du 66ème R.A.D. Dans le village de Virey sous Bar, je trouve lecolonel commandant le 80ème R.I. (42ème D.I. dont le P.C. est à Jully sur Sarce).

A 18 H., je trouve à la ferme de Lantages les Capitaines Becq, Polli, s/LieutenantGeorges, Bougnasse du 64ème S/Lieutenants Escande, Ballandras, du 22ème,S/Lieutenant Causeret et une centaine de chasseurs. Je prends le commandement dudétachement.

Les Allemands attaquent le village.La ferme est pleine de civils de soldats de toutes armes, de blessés auxquels nous

refaisons les pansements.Les Allemands arrivent en camions à deux cents mètres de la ferme. Ils tirent sur

nous avec des canons de 20 mm et des mitrailleuses, blessant plusieurs hommes àl’entrée de la ferme.

Nous attendrons la nuit pour retraiter car les abords sont dénudés. Nous prenonsdes dispositions pour résister à une attaque si elle se produit avant ce moment.

Rien ne se passe.A 21 H., après avoir fait charger les blessés sur les voitures des réfugiés, nous

retraitons par Praslin, Parges, Beugneux la Fosse. Les villages étant signalés tenuspar l’ennemi, différentes patrouilles sont effectuées.

Le 17 Juin

A la pause de Beugneux la Fosse, je pars devant la colonne avec les S/LieutenantsEscande, Georges et Ballandras pour reconnaître dans le village des Riceys uncantonnement où faire reposer les homme exténués.

A l’entrée du village, nous approchons avec précautions des barricades. Rien nebouge, nous pénétrons dans le bourg. Après avoir trouvé à la sortie Est, devant

l’hôtel du Commerce, une grange suffisante, j’envoie le s/Lieutenant Ballandras aupremier carrefour à l’entrée Ouest rechercher la colonne.

Après un quart d’heure d’attente, ne voyant rien venir, j’envoie alors les/Lieutenant Georges. Il fait à peine cent mètres, est accueilli par des coups de feu. Ilfait demi-tour; à 20 m de nous, il est à nouveau apostrophé par une patrouilleallemande qui sort d’une autre rue.

Il se replie sur nous, nous disparaissons derrière une maison. La retraite nous estcoupée. Nous entrons dans un magasin, passons dans une cour. Nous sommestellement fatigués que nous décidons de nous reposer un peu. Nous nous barricadonsdans une chambre.

Nous dormons de 5 H à 8 H.Un peu reposés, nous tentons une sortie. Pas loin, des Allemands discutent devant

la porte de la cour. Nous franchissons un mur, puis d'autres murs et de propriété enpropriété, nous gagnons une villa en bordure de la route, séparée de celle-ci par unmur crêté d’une grille. Je suis à califourchon sur le mur quand une patrouilleallemande qui m’observe, me tire dessus.

Je descends du mur rapidement.Nous enfonçons la porte de la villa que nous barricadons derrière nous.Nous nous couchons et nous dormons jusqu’au lendemain midi.

Le 18 Juin

Sans interruption, sous nos fenêtres passent les chars, d’artillerie, l’infanterieportée allemande.

Le soir et toute la nuit des orages se succèdent, rendant tout départ impossible.Les troupes allemandes occupent le village pour la nuit, une brigade entière ycantonne. Sans arrêt, des hommes tentent de forcer la porte d’entrée sur la route;même situation dans la journée du lendemain. Nous décidons de laisser écouler legros des troupes avant de reprendre notre marche.

Nous vivons sur quelques légumes secs trouvés dans le grenier et des salades quinous ont été données par une habitante d’une maison voisine avec laquelle nouscommuniquons à la tombée de la nuit par les jardins.

20 Juin

Le soir du 20, reposés, restaurés, je décide de partir à la nuit. Nous marcherons àtravers champs, de nuit seulement, à la boussole.

A 19 H.30, nous sommes équipés prêts au départ.Un capitaine de Panzer se présente à la grille sur la route; ne pouvant l’ouvrir, il

demande à la voisine si la maison est inoccupée, sur sa réponse affirmative, ildéclare qu’il lui faut loger ses troupes puis il s’en va.

Il revient un quart d’heure plus tard après par le jardin, avec une section environ.Il opère comme nous l’aurions fait nous-mêmes, en enfonçant la porte.

J’ai cinq cartouches dans mon revolver. Les s/Lieutenants Escande et Georgesn’ont rien dans les leurs.

Il n’y a rien à tenter.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Quant aux restes de la demi-brigade; j’ai recueilli à leur sujet les déclarations dus/Lieutenant Bougnasse du 64ème B.C.A. à l’Oflag XVII A. à Lienz (Tyrol).

Lorsqu’ils se sont présentés, un quart d’heure environ aprèsmoi à la barricade de l’entrée des Riceys, les Allemands aunombre d’une centaine, qui avaient laissé passer les isolés, c'est-à-dire mes trois s/lieutenants et moi-même, sans se montrer,ouvrirent le feu sur les arrivants.

Le Capitaine Becq qui savait que les munitions portées par leshommes représentaient quelques cartouches seulement pourchacun, dans quel lamentable état physique étaient les chasseurs,a estimé qu’il était impossible de combattre ni de chercher à fuir.C’eût été vouer inutilement à la mort la plupart des hommes.

Il se rendit.J’aurais agi comme lui.

Général Buisson

La Bataille de l'Aisne1

2ème phase - Juin 1940

1 - SITUATION

Au début du mois de Juin, les Allemands ont liquidé le Nord de la France. Laposition de résistance des Armées Françaises passe par (de l'Ouest à l'Est): laSomme, Canal du Nord, Oise, Canal des Ardennes, Ailette, Chemin des Dames,Canal de l'Oise, Aisne, Montmédy, Ligne Maginot.

2 - ORGANISATION

De l'Oise à l'Argonne, la position est tenue par le Groupe d'Armées n°4, sous lecommandement du Général Hutzinger, ayant à sa gauche le Groupe d'Armées duGénéral Besson.

1er - à gauche : VIème Armée - Général Touchon-P.C. Congis.7ème C.A. - Général Noël

47ème D.I. - 7ème D.I.28ème D.I.

17éme C.A. - Général de la Porte du Theil -44ème, 45ème et 42ème D.I.P.C. Ville en Tardenois.

2e-au centre : IVème Armée - Général Requin - P.C. Cernon.8ème C.A. - Général Demaze

14ème D.I.23ème C.A. - Général Germain

2ème D.I. - 1Oème D.I.

3e- à droite : IIème Armée - Général FradenbergP.C. Attigny (Verdun).

C.A. Colonial - Général Carle

1 - Conférence faite le 5 août 1940 aux officiers prisonniers au Camp de Mailly. Notes prisespar le Capitaine Edmond Griolet, commandant le 22ème B.C.A.2 - Conférence faite le 5 août 1940 aux officiers prisonniers au Camp de Mailly. Notes prisespar le Capitaine Edmond Griolet, commandant le 22ème B.C.A.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

35ème D.I. - 36ème D.I.21ème C.A.18ème C.A. - Général Doyen

4e- Réserves : 27ème D.I.A. - Dormans.82ème D.I.N.A. - Montagne de Reims.

à partir du 8 juin :235ème D.I.238ème D.I.- N.O. de Reims.53ème D.I.Légère. - Mailly.

En plus : Groupement Cuirassé du Général Buisson:- 3ème D.I. Motorisée. La seule restante des 7 possédées par la France. Ellesort de la bataille.- 3ème D.Cu. qui sort également de la bataille avec 30 chars B sur 50, 50chars Hotchkiss au lieu de 80. Pas de transmissions.- 7ème D.L.M.

En outre, le Groupement Polonais (arrivera le 16) et le Groupement D.1 (quin'arrivera pas)

Ce Groupement Cuirassé a été constitué pour contre-attaquer d'est en ouest endirection de l'Aisne, si l'ennemi franchit cette rivière.

Il est rassemblé dans la région de l'Argonne. Sa première difficulté serait donc unchangement d'Armée au cours de sa mission.

3 - ÉTAT DES DIVISIONS ENGAGÉES

a/ HommesDivisions en ligne fatiguées par vingt jours de combat ou secteur de combat. Arrêt

de l'ennemi sur la ligne de repli.Effectifs diminués par les pertes de ces combats, les évacués, les permissionnaires

non rentrés. (26ème D.B.C.A. le 10/6).Changements et glissements fréquents avec marches pour l'aménagement des

C.A.

b/ Matériel.- Artillerie : Complet.- Infanterie : Complet.D.C.A. : F.M. et mitrailleuses. (peu de munitions)D.C.B. : 25 - à peu près complet.

47 - peu. Matériel peu connu.37 - pétoires.

- Aviation : Néant.

4 - DÉTAIL DES DIVISIONS ENGAGÉES

- 2ème D.I.- Gal Klopfenstein Inf: 33-73-127.Art: 1-34-234.G.R.D.11.

- 3ème D.I. - Gal Bertin Boussu Inf: 51-67-91.Art: 42-242.G.R.D.6.

- 3ème D.I.N.A. - Gal Mast Inf: 12ème Zouaves14 et 15ème Tirailleurs.Art : 20-220.G.R.D.

-3ème D.C.R. - Gal Buisson4ème Bat de Chars.319ème R.A.16ème B.C.P.

- 6ème D.I.C.- 7ème D.I. - Gal Huppel Inf : 93-102-130.

Art : 31- 231.G.R.D.40.

- 10ème D.I. - Gal Ayme Inf : 5-24-46.Art : 32-232.G.R.D15.

- 14ème D.I. - Gal de Lattre Inf : 35-1523ème Demi-Brigade

Art: 4-204G.R.D.25

- 20ème D.I - Gal Corbe Inf : 2-47-115.Art : 7-207.G.R.D.20.

- 27ème D.I - Gal de Bilemont Inf: 7I-1597ème Demi-Brigade

Art : 58-258G.R.D.20

- 28ème D.I - Gal Lestien Inf : 97-99-25ème Demi-Brigade.

Art : 2-202.G.R.D.22.

- 35ème D.I - Gal Decharmes Inf : R.E.T.-11-123.Art : 24-224.G.R.D.

- 36ème D.I - Gal Aublet Inf : 14-18-57.Art : 24-224.G.R.D.

- 41ème D.I - Gal Bridoux Inf : 101-103-104.Art : 13-213.G.R.D.

- 42ème D.I - Gal Keller Inf : 80-94-150.Art : 61-261.G.R.D.37.

- 44ème D.I - Gal Boisseau Inf : 6-26ème D.B.C.A.173 Demi-Brigade.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Art : 91-291.G.R.D.41.

- 45ème D.I - Gal ROUX Inf : 31-85-113.Art : 55-255.G.R.D.33.

- 53ème D.I - GalEtchebarrigaray Inf : 208-329.Art : 22-G.R.D.60.

- 56ème D.I - Gal de Mierry Inf : 294-306-332.Art : 26-226.G.R.D. 63.

- 59ème D.I. - Gal Lascroux Inf : 83-135.Art : 84.G.R.D.

- 82ème D.I. - Gal Armingeat Inf : 4 et 6èmes Tirailleurs.1er Zouaves - 439 R.P.Art : 66-266.G.R.D. 82

- 235ème D.I - Gal Trolley de Prévaux Inf : 9-108.Art : 323. G.R.D.

- 238ème D.I - Gal Debeney Inf : 25-114.Art :G.R.D.

- 240ème D.I - Gal Buisson Inf : 42ème R.I.C.40ème Demi B.T.

- Brigade Polonaise - Gal Maczek 1 Bat Chars.1 Bat porté.

5 - LA BATAILLE

Le front du Groupe d'Armées, étendu sur cent cinquante kilomètres, est tenu parneuf divisions, ce qui représente seize kilomètres au minimum par D.I.

Or, au peloton des élèves-caporaux, on apprend qu'une D.I. tient défensivementsur six kilomètres d'une position organisée.

Dans le cas présent, il n'y a dans la presque totalité des cas pas de positionorganisée, pas de tranchées, pas d'aviation, pas même l'avion de reconnaissancedivisionnaire de l'ancienne guerre.

Le 5 juin

Les Allemands attaquent sur l'Ailette, sur le front des 7ème, 41ème et 28ème D.I.L'attaque est menée comme elle le sera par la suite sur toutes les coupures, à l'aidedes moyens de 1918 : préparation d'artillerie, infanterie en masse, reconnaissances,et emploi de l'aviation de bombardement en plein.

L'ennemi, donc, sur l'aile gauche du IVème Groupe d'Armées, pénètre jusqu'à laligne d'arrêt, très faiblement étoffée.

Le 6 juin

L'attaque de l'aile gauche continue.Vers 15 heures, l'ennemi met en oeuvre la nouvelle arme : attaque massive par

blindés. La 28ème D.I., la 41ème D.I. et la 7ème battent en retraite derrière l'Aisne.La 27ème D.I. est alertée. Elle contre-attaque en direction de Soissons, mais ne

réussit qu'à recueillir les éléments de la 41ème D.I.

Le 7 juin

L'Allemand prépare la rupture de l'Aisne. Pour cela, il amènera toute la journéeses moyens à pied d’oeuvre.

Le Groupe de Contre-Attaque du Général Buisson fait un bond de 45 kilomètresvers l'ouest, au sud d'Attigny, dans la région de St Morel. Il n'a aucun renseignementsur la situation. La 7ème D.L.M. le rejoint à ce moment.

Le 8 juin

Attaque de l'Aisne, toujours sur l'aile gauche du IVème Groupe d'Armées. 41ème,28ème, 44ème D.I., jusqu'à l'est de Pont-Arcy, charnière du canal de l'Oise à l'Aisneet de l'Aisne.

Partout il franchit l'Aisne, grâce aux trous très importants de notre dispositif et àla disproportion des moyens. Mais, alors que devant la 26ème D.B.C.A., aile gauchede la 44ème D.I., ses gains se bornent à la rive sud de l'Aisne, à gauche, il réussit àpercer dans la région de Soissons, établissant une tête de pont. Le P.C. de la 28èmeD.I., à Serches, manque d'être enlevé.

La 28ème D.I. s'installe face à l'est sur la Vesle, sous la protection du 22èmeB.C.A., qui tient le plateau de Bazoches.

La 27ème D.I. contre-attaque sur Soissons, se heurte aux chars allemands et sereplie.

La 238ème D.I., envoyée en renfort, est embarquée. Les routes sont encombréesde réfugiés. Elle n'arrivera pas, et sera dirigée sur la Marne par la suite.

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Le 9 juin

La 27ème D.I. se replie de Soissons sur l'Ourcq d'Oulchy le Château. La 28èmeD.I. cède du terrain. Il se produit un trou entre elle et la 44ème D.I. Lecommandement bouche ce trou en y mettant la 45ème D.I. qu'il retire de l'Aisne(région de Berry au Bac), à 3 H 30 du matin.

De cette opération découlent une série de fausses manoeuvres, bientôt la pagaille.Autobus parisiens non employés alors que la troupe fait le chemin à pied ou par desmoyens de fortune. Les Allemands ayant étendu l'attaque à l'ensemble du front,certaines unités, accrochées, restent sur place (4 bataillons sur 9 - 1 groupe de 75).

La 44ème et la 42ème D.I. s'étirent dans les deux sens pour tenir l'Aisne. La42ème arrive à Berry au Bac et y trouve les Allemands installés depuis le départ dela 45ème.

L'artillerie de la 28ème D.I. est donnée à la 45ème.Ordre de repli est donné dans la nuit aux 44ème, 45ème et 42ème D.I. sur Fismes.

Trou entre Fismes et Fére en Tardenois.

Devant les 10ème et 2ème D.I., les Allemands ont réussi à créer des poches, àdroite de Rethel. Plus à droite, à la 36ème D.I., ils ont également fait une poche.

Nuit du 9 au 10

La 26ème D.B.C.A. organise une tête de pont pour la défense de la Vesle àFismes. Le 22ème B.C.A. est sur la rive sud de la Vesle à Bazoches.

Le Groupement Cuirassé se porte vers l'Ouest, région de La Neuville - P.C.Hauville. La 3ème D.I.M. n'ayant pas rejoint, les ordres sont laissés sur place.

La 53ème D.I. est toujours à Mailly.

Le 10 juin

L'ennemi poursuit son attaque générale.A gauche, la 27ème D.I. retraite sur Château-Thierry. La 238ème, amenée en

renfort, se place à sa droite derrière la Marne. La 44ème, sous les ordres de laquelleont été placés les éléments de la 28ème, se bat sur la Vesle, à Fismes. La 45èmes'oriente Nord-Sud pour essayer de joindre la 238ème et la 44ème. Dans l'après-midi, la 44ème, attaquée par derrière, se replie sur Lhéry - Tramery. La 45ème apassé la Marne à 23 heures.

La 42ème se replie sur la Vesle, à l’est de Reims.

La 82ème tient la montagne de Reims.Les 1Oème et 2ème sont dépassées par les engins blindés. Les restes de la 10ème

se réunissent à la 233ème. Les restes de la 2ème se replient au sud de...

A 19 heures, les chars allemands sont à Reims.

Les deux tiers de ces divisions sont perdus. Il ne reste que des îlots encerclés.

La 14ème D.I. tient son front.Une contre-attaque de chars lui fait reprendre une partie du terrain perdu. Le

Groupement Cuirassé d'Attaque reçoit de tous côtés des appels au secours. Il reçoitdu commandant de la IVème Armée quatre avis de contre-attaque; trois vers l'ouest,un vers le nord-est, à déclencher sur ordre écrit du général commandant la IVèmeArmée. Cependant, sur demande de la 14ème D.I., menacée d'être tournée, versmidi, la 3ème D.I.M. attaque en direction de Perthes et voie ferrée Rethel-Reims.Les chars sont pris à partie et détruits par des canons de 47 servis par desAllemands. La 7ème D.I.M. attaque sur La Retourne et fait faire demi-tour auxblindés allemands.

Le Groupement chars Maczek débarque à Épernay. La 36ème D.I. bat en retraiteen direction de Vouziers, mais dans cette région l'attaque allemande est faible.

Le 11 juin

L’ennemi passe la Marne à Château Thierry et progresse en direction du PetitMorin.

La 20ème D.I., arrivant de l'Est est débarquée entre Dormans et Épernay et estengagée en pagaille avant d'être rassemblée.

La gauche des 27ème, 238ème et se replie sur Montmirail.La 45ème laisse à Dormansun un bataillon qui sera fait prisonnier. Le reste de la

division s'organise au sud de la Marne, sur Verneuil.

La 44ème franchit la Marne (ordre de repli) à 12 heures, à Reuil-Oeuilly. La26ème D.B.C.A se retourne défensivement sur la rivière. Les 6ème R.I. et 173èmedemi-brigade sont à quelques kilomètres au sud - Forêt d’Enghien - Boursault.

Reims est tenu jusqu'au soir par le 439ème Régiment de Pionniers. On a laissé desD.I. à la Montagne de Reims, (survivance des souvenirs historiques), pendant lesjournées du 11 et du 12 : la 42ème D.I., qui se replie sur la Marne, la 82ème, legroupe 235ème et 1Oème, qui est à Verzy - Verzenay dans la soirée.

La 36ème et la 14ème se sont repliées entre Suippes et le nord de l'Argonne, sousla protection de la 3ème D.I.M.

La 7ème D.L.M. reçoit l'ordre de se porter sur Épernay, mais ne part que lelendemain, (trente chars), disloquée en deux groupes, car le commandant de la14ème D.I. en conserve une partie.

La 3ème D.C.R. reste seule.

La 53ème D.I. Légère, venant de Mailly, s'installe entre Châlons et Outrepont(S.E. de Châlons), avec deux régiments, sur un front de cinquante kilomètres !

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

Le 12 juin

A gauche, les Allemands avancent leurs moyens.La 27ème D.I. est à Montmirail, derrière le Petit Morin. La 238ème, en crochet

défensif, se replie sur la gauche, puis recule un peu en direction de l'est.La 59ème arrive à 19 heures entre Montmirail et Cézanne. La 45ème se replie en

direction de Montmort.La 44ème tient à Oeuilly, derrière la Marne.

On commence à dégarnir la Montagne de Reims, qui tient toute la journée, mais,les Allemands étant à Nanteuil la Fosse le soir, il faut se replier. On regroupe les1Oème et 235ème D.I. A droite, la 14ème s'aligne à la Montagne de Reims, la 3ème,région de Souain, la 6ème D.I.C. (nouvelle) à l'est d’Épernay, prolongée par la36ème.

Mais les chars allemands sont sur la route Reims-Châlons.Les ponts sautent à 12 heures. Les D.I. décrochent, la 14ème en direction de Vitry

la Ville. La 3ème D.I.M. est attaquée vers Suippes par des chars, mais, couverte partrois bataillons de chars, elle se replie en direction de La Saulx. La 3ème D.C.R.couvre la retraite en attaquant dans le camp de Mourmelon, où elle laisse quatorzechars B sur les Ouvrages Blancs. Le passage du Pont de Poigny est forcé à 16 heurespar treize chars de la 3ème D.C.R., envoyés en arrière pour réparations. Cela permetle passage des colonnes en retraite. Le pont saute à 22 heures

La 3ème D.I.N.A. arrive et vient tenir le front de la nasse entre La Saulx etl'Argonne. La marche des D.I. 14, 3, 6, 36, atteint 80 kilomètres pour joindre le sudde la poche (Revigny, Bar le Duc).

Le 13 juin

Les Allemands percent à Montmirail, tombent sur la 52ème D.I. Légère, quidébarque. Elle est rejetée avec la 235ème et la 7ème et disparaît de la bataille.

Ces D.I. retraitent vers Sézanne.

Au centre, la 44ème est accrochée à la forêt d'Enghien, se replie vers 13 heures àAblois, et la 26ème D.B.C.A. contre-attaque de Morangis sur le plateau d'Ablois à14 heures.

Action locale de la 7ème D.L.M.

Les Allemands étant à Romilly, ordre de repli lui est donné sur Vertus, qu'elleatteindra dans la nuit.

A 21 heures, les Allemands entrent à Romilly.

Les Divisions d'Infanterie ont perdu de un tiers à trois quart de leurs effectifs. La53ème tient derrière la Marne. Les 14ème et 3ème se regroupent derrière la Marne.La 3ème D.I.N.A. est complètement bousculée. A 19 heures, las Allemands entrent àSt Dizier par le nord de la Marne.

Le 14 juin

Le 18ème Corps d'Armée arrive de l'Est, (56ème et 306èmes D.I.) et débarque enpleine bataille. Son artillerie et une bonne partie de son infanterie sontimmédiatement capturées.

La 44ème D.I., en arrière-garde, reçoit un ordre de repli sur Morains le Petit,qu'elle atteint à 8 heures du matin. A 11 heures, elle retraite sur Euvy, puis surChampfleury, par Fére Champenoise, où sont identifiés à midi le passage d'élémentsde dix divisions.

Le soir, nouvel ordre de repli prescrivant de traverser l'Aube. Bombardement descolonnes par avions. La 3ème D.C.R. se replie de nuit sur l'Aube.

Le 15 juin

Les Allemands, glissant le long de la Seine, postent à chaque pont un ou deuxchars et quelques sides, qui interdisent les passages et la reconstruction d'un pont.De ce fait, toutes les colonnes en retraite qui s'y présentent, roquent vers l'est etviennent par la suite se heurter aux grandes colonnes blindées allemandes, dont lepassage est signalé:

- Le 15 : Auxerres - Tonnerre à 18 heures.

- Le 16 : Avallon à 5 h - Clamecy à 6 h 30 - Sens à 12 h - Saulieu à 12 h - Dijonet Montbard à 14 heures.

Les colonnes disloquées franchissent parfois la Seine, mais seront faitesprisonnières dans la région Montbard, Chaource, Châtillon, Dijon, exténuées par lesfatigues de dix jours de combats en retraite, sans alimentation, sans munitions, sansordres.

6 CONCLUSIONS

Les causes de l'échec de la bataille peuvent se résumer ainsi:

L A B A T A I L L E D E L ’ A I S N E

-1°- Dimension exagérée du front, ainsi qu'il a été exposé au début.

-2°- Fatigue des troupes en secteur, résultant des travaux exécutés de nuit, dumanque de sommeil, des marches répétées pour prendre position, des changementsde secteur provenant des glissements et du manque de réserves.

-3°- Défectuosité des liaisons :a - Téléphone : zéro.b - Radio : insuffisante en nombre et en force.c - Avionsd - Liaisons sur route non prévues au cours de la retraite - Aucune indication aux

grands croisements - Aucune police.

- 4° - Réfugiés : Aucune prévision - Aucune organisation Aucun ordre -Encombrement des routes : Ex: Soupir le 18 Mai - Cars rentrant à vide - Grandemisère Victimes - Peur et affolement.

- 5° - P.C. inversés dans les déplacements - Chevauchement des unités - Manquede renseignements d'en haut.

- 6° - Insuffisance numérique de chars - 1200 + 600 (cavalerie) - Environ 2000 enquelques D.Cu et bataillons isolés. Les Allemands avaient des masses blindées enGrandes Unités. G.R.C.A. sans blindés.

- 7° - L'aviation ennemie, maîtresse indiscutée du ciel, a brisé nos arrières dès le 5juin. Plus de ravitaillement en vivres et munitions - Les unités sont obligées de pillerpar ordre pour vivre - Le pillage devient individuel - Les réfugiés l'augmententencore en vivant dans les maisons.

- 8° - Contre nous : Troupes préparées, sélectionnées pour les panzer - Souplesse,puissance, rapidité - Propriété du ciel - Infanterie moyenne - Artillerie à forceségales.

- 9° - Chez nous : Préparation insuffisante - Croyance forcenée à la paix - Moralinsuffisant.