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Fig. 1 : Nombre et types d'embarcations en 1963

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Document article ci-contre R.C . Lois Gonzales et J .A. Perez Sanchez

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Les changements dans la fonction productive des ports de pêche en Galice (Espagne), 1950-1995 Changes in the productive function of Galician fishing ports (Spain), 1950-1995

Ruben Camilo LOIS GONZALEZ José Antonio PÉREZ SANCHEZ Universidad de Santiago de Compostela

Departemento de Geografia

Praza Universidad I 15 703 - SANTIAGO de COMPOSTELA - Espagne

Résumé : La pêche en Galice a enregistré une profonde transformation depuis les années 1950 . Sa part dans

l'économie régionale n'a cessé de croître et les systèmes d ' exploitation des ressources marines ont

évolué de modèles d'autoconsommation vers des modèles totalement ouverts sur le marché . En outre , le

rayon d ' action des navires s'est considérablement étendu et concerne maintenant toutes les grandes

zones de pêche . En conséquence, les ports de la région se sont spécialisés en fonction de leurs capacités

de production et de leur importance et on constate une tendance à la concentration de l'activité dans les

lieux de forte tradition halieutique qui ont opté pour un développement de leurs équipements .

Mots-clés : Galice - Ports de pêche - Flotte de pêche - Pêcheries - Autoconsommation - Marché - Mutations

Abstract : Fishing in Galicia has experienced a profound transformation since the I 950s . lts contribution to the

regional economy has constantly increased and systems of exploiting marine resources have changed from those based on domestic local consumption to ones totally open to market forces . Futhermore,

fishing vessels have extended their activities ever further afield and now operate in ail the major fishing

grounds . Consequently , the ports of the region have become specialized according to their productive

capacities and size and a tendency for activity to concentrate in localities with a strong fishery tradition which have chosen to improve their facilities has been observed .

Keywords : Galicia - Fishing port - Fishing fleet - Fishing grounds - Self-consumer - Market - Changes

Dans le contexte espagnol, la Galice s'est traditionnellement distinguée par l'importance des activités de pêche et de culture marine. L'existence d'un vaste littoral très découpé (1 309 km) et de fortes densités de population qui, depuis . le xvn• siècle, ont caractérisé les zones côtières, expliquent l'importance de l'exploitation des ressources marines.

Ce travail se fixe comme objectif d'étudier les transformations qui, depuis le milieu de ce siècle, ont été enregistrées dans le secteur de la pêche, considéré comme un secteur économique de base au sein du système productif de nombreuses localités de la région orientées vers l'Atlantique ou la Cantabrique et comme un mode de vie pour des milliers de personnes travaillant sur les bateaux ou dans les entreprises de commercialisation et de transformation des espèces capturées. Les cultures marines seront délibéremment exclues de cette présentation car, malgré leur importance pour les économies domestiques des espaces littoraux galiciens, leur prise en compte conduirait à dépasser les objectifs d'un travail nécessairement synthétique.

Pour analyser les transformations socio-économiques et spatiales du secteur de la pêche, il est nécessaire d'utiliser une masse considérable d'informations saisies au niveau des ports distribués tout au long de la côte . Il s'ensuit que l'étude des changements dans la fonction productive des ports de pêche, consistera à mener une réflexion sur la dynamique de la flotte, les changements dans les conditions de travail des gens de mer et l'évolution du rayon d'action d'un secteur économique qui, en Galice, connaît une crise de développement.

Pendant la première moitié de ce siècle, et comme le montre l'étude Litoral espafi.ol, publiée en 1963 par l'Institut social de la marine dépendant du ministère du Travail, la pêche se définissait majoritairement comme une activité orientée vers l'autoconsommation, de même que l'activité agricole. Le faible développement des circuits de commercialisation des produits alimentaires, les fortes densités de population rurale et l'existence d'un réseau de communications terrestres déficient , expliquaient la nette prédominance de la flotte artisanale. Cependant, et parallèlement à

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l'évolution socio-économique globale du pays, l'exploitation des ressources marines devient une activité fortement capitalistique, marquée par une expansion rapide liée à la demande croissante des marchés urbains , et hautement techn~logique, dans un processus qui débute pendant les années 1960 et se prolonge actuellement. A partir des données officielles sur les différents ports et les embarcations recensées dans chacun d'eux, nous pourrons mesurer l'importance de ces changements et leur logique interne à travers un exposé de caractère qualitatif qui s'appuiera sur des traitements statistiques et cartographiques.

I - LA PRÉDOMINANCE DE LA PÊCHE ARTISANALE PENDANT LES ANNÉES 1950

La situation économique de la pêche galicienne jusqu'aux années 1960 était caractérisée par la prédominance d'un secteur artisanal présent dans une multitude de petits ports et reposant sur de nombreuses embarcations, construites en bois du pays et propulsées à la rame par un ou deux marins, fréquemment le père et le fils . Les caractéristiques structurelles des moyens de production limitaient le rayon d'action du travailleur à une aire très proche du port de base, réduisant ainsi les possibilités de pêche et, par conséquent, le rendement de l'activité. Face aux faibles entrées d ' argent, la stratégie économique de l'entreprise de pêche était fondée sur des processus productifs où alternaient pêche-culture marine et industrie , selon la composition par sexe et par âge de la population active de l'unité familiale.

Dans les exploitations de petite envergure où le niveau d'activité était faible et se réduisait aux membres de l'unité domestique, le poste de patron était occupé par le chef de famille . Ce dernier , avec l'aide de certains de ses fils célibataires qui participaient très précocement à l'activité de pêche sans aucune formation spécifique, était responsable de la phase extractive, alors que les femmes, aussi bien l'épouse que les filles, collaboraient à des tâches complémentaires de la production, par exemple la réparation des engins ou la commercialisation du produit de la pêche. En fin de compte, non seulement la propriété de l'entreprise était familiale mais l'exploitation elle-même tendait aussi à l'être, et elle était caractérisée par la concentration des fonctions (production, administration et vente) à l'intérieur de l'unité familiale. Il n'était pas rare que les femmes des Rfas Baixas travaillent temporairement dans l'industrie locale de la transformation et/ou au conditionnement du poisson, en plus de l'entretien du petit jardin potager, du cheptel domestique, et de l'accomplissement des tâches ménagères, afin d'améliorer le revenu familial dégagé de l'exercice de la pêche .

A côté de ce secteur artisanal formé des gamelas (petites embarcations à fond plat), des barques et des dornas (embarcations très anciennes, propres des Rfas Baixas, pourvues d'un seul mât portant une voile latine), présent tout le long de la côte galicienne (Fig . 1), existait une flotte mécanisée composée de vedettes à moteur et à vapeur qui opéraient essentiellement dans les eaux côtières malgré l'existence des pêcheries de Terre-Neuve, de Grande Sole et des côtes africaines. La structure de cette flotte contrastait fortement avec celle de la pêche artisanale. Les caractéristiques morphologiques de l'embarcation (plus grand tonnage et puissance propulsive) permettaient aux pêcheurs d ' explorer des zones toujours plus éloigées avec des capacités de production plus grandes tout en augmentant la rentabilité de la pêche "côtière" et les revenus des armements .

Cependant, le développement du secteur productif impliquait une augmentation des disponibilités financières pour faire face au frais de construction d'une embarcation plus grande et mieux équipée, ce qui rendait nécessaire de recourir à la copropriété. D'autre part, cela exigeait du travailleur un plus haut niveau de formation professionnelle pour accéder, dans des conditions plus optimales, aux nouveaux territoires de pêche. Bien entendu, cela nécessitait également des équipages plus nombreux qu'il n'était pas toujours facile de recruter à l'intérieur de l'unité familiale ; la recherche de nouveaux marins en dehors de la cellule familiale entraînait l'émergence de nouveaux type de rapports sociaux productifs .

Les contraintes de l'écosystème marin et le faible degré d'équipement technique de ce sous­secteur de la flotte qui souffrait du manque de moyens de communication, de détection , de production, à l'exception du "winch", et de conservation du poisson, forçaient l'entreprise de pêche à adopter une stratégie d'exploitation diversifiée afin de maximiser les résultats de l'exploitation et de maintenir la capacité de l'emploi domestique dans le secteur. Cette stratégie productive reposait sur l'alternance de plusieurs types de pêche compatibles tout au long de l'année ; à cet égard, la flottille côtière chalutière avait l'habitude de combiner le métier hivernal des arts traînants, avec la pêche côtière estivale du thon (Thunnus alalunga).

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Fig. 2 Tonnage unitaire en 1963

BAAOUEIRO.a.o.RES

SAN O BRAO

0 10 km

CAlôN

• < 4 TRBfEmbarc .

• 4-8 TRBIEmbarc .

• 8-12 TRBIEmbarc •

• 12-16 TRBfEmbarc. -> 16 TRBIEmbarc.

REDONOELA

AGUAROA

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nbr. de navires % tonna2e % tonna2e unitaire

à rames 6 029 71 ,00 9 252,77 16,46 1,53

à moteur 2 178 25,65 26 936,69 47,93 12,37

à vaoeur 284 3,35 20 013,71 35,61 70,47

lUfAL 8 491 100,00 56 203,17 100,00 6,62

Tabl. 1 : Structure de la flotte galicienne selon le système de propulsion Source : Données de Litoral espaiiol. Ministère de Travail. Institut Social de la Marine. Mutuelle d 'Accidents de Mer et de Travail, 1961-1963, Madrid, 1963.

Remarquons que presque les trois quarts de la flotte galicienne étaient composés d'embarcations de faible tonnage dont la force motrice était le bras du producteur. Il est évident que les conditions de sécurité et d'habitabilité à bord étaient très précaires sur ce type d'embarcations. Le secteur de la flotte mécanisée représentait le quart des embarcations recensées mais presque la moitié de la jauge. Ce type d'embarcation, appelée racu, travaillait en pêche côtière au cerco et à la palangre pour le congre, dans des eaux de la plate-forme galicienne. Finalement, les embarcations à vapeur étaient réduites à 3,35 % de l'ensemble de la flotte galicienne mais totalisaient plus du tiers de la jauge. Leur taille moyenne, 70,47 tjb, procurait au patron-armateur une plus grande autonomie dans son rayon d'action.

II- LA DYNAMIQUE DU CHANGEMENT

Dès le milieu des années 1950, et surtout à partir de la décennie suivante, le secteur de la pêche est intégré à un processus global de changement dont les effets sur le système productif de la période sont évidents. Cette dynamique de développement, transformation et modernisation des entreprises de pêche, ne peut être dissociée des cJ-tangements de l'environnement socio­économique qui jouent le rôle de facteurs stimulants. A cet égard, l'essor de l'urbanisation et l'augmentation des revenus personnels générés par le développement économique espagnol a fait gonfler progressivement le marché intérieur des produits de la mer ce qui a stimulé le processus de renouvellement et de modernisation des entreprises de pêche . Ce renouveau a été favorisé par la formation de capital, dans les économies domestiques, provenant des revenus issus de l'émigration (pêche hauturière, marine marchande, industrie européenne, plates-formes pétrolières, etc.) . S'y ajoutent les mesures institutionnelles visant à couvrir les besoins alimentaires de la demande interne ; la production sera destinée, en plus grandes proportions, au marché de consommation grâce à la mise en place de circuits commerciaux complexes. L'industrie joue, en même temps, le rôle de pourvoyeuse d'infrastructure de production et de principale source de demande de ressources d'origine animale. Enfin, l'intégration espagnole dans la Communauté Économique Européenne a joué le rôle d'accélérateur pour l'ouverture de l'économie espagnole sur l'extérieur, ce qui a conduit les entreprises à un important effort d'adaptation aux contraintes de la concurrence.

Comme nous avons déjà signalé, la faible rentabilité économique des entreprises de pêche artisanale ne permettait pas à ses patrons de moderniser leurs moyens de production . Les bas revenus de la pêche devaient être compl~tés par le travail de la totalité des membres de l'unité domestique, sans distinction de sexe et d'âge, en cumulant les emplois, ou en ayant recours, pour les hommes, à l'émigration. Il est indubitable que le mouvement migratoire de ces bras en âge de travailler va rendre possible l'accumulation monétaire à l'intérieur des communautés maritimes et de pêche. Ainsi, l'épargne bancaire des émigrants a favorisé la formation de capital au sein de l'économie domestique, ce qui a permis l'accès des travailleurs à la propriété des moyens de production, ou à leur modernisation (embarcation, engins et matériels), jusque-là limités aux entreprises de la transformation et/ou de la commercialisation du poisson.

En 1970, la flotte de pêche galicienne représentait près du tiers des embarcations espagnoles. Cependant, les deux tiers des bateaux localisés dans les ports de Galice et appartenant à de petits armateurs artisans ne dépassaient pas les 20 tjb . Comme nous l'avons déjà dit, le faible niveau d'équipement de la flotte conditionnait son rayon d'action et donc, les bénéfices de l'entreprise de pêche. L'activité productive s'exerçait à courte distance de la côte, les fluctuations des captures étaient importantes et, par conséquent, les résultats économiques des entreprises étaient dérisoires.

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Fig. 3 Tonnage unitaire en 1993 BAAOUEIRO..aAAES

' CEDEIRA

BURELA

FOZ

RINLO

0 10 km

PONTEOEUME

CAIÔN • < 10 TRBIEmbarc .

CAMELLE • 10-30 TRB/Embarc.

• 30~ TRBIEmbarc .

• 50-100 TRBIEmbarc .

• > 100 TRBIEmbarc.

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Le changement, qui coïncide avec le développement de l'économie espagnole, va survenir avec l'élévation du niveau technique de navigation, de capture et de conservation des produits stimulé par l'augmentation de la demande intérieure en poisson. Cependant, le progrès technique de la flotte n'a pas été uniforme ; plus important dans le secteur industriel qui opère à une échelle internationale, il est plus limité dans le secteur artisanal dont le rayon de travail se réduit à la mer territoriale de Galice . Les pouvoirs publics ont contribué à cette distorsion dans le développement technologique de la flotte en privilégiant les aides au secteur industriel.

La présence d'équipages plus nombreux et la généralisation de la propulsion diesel impliquaient, non seulement une amélioration substantielle de la sécurité physique des embarcations, des conditions de sécurité et d'habitabilité à bord, mais également la possibilité d'explorer de nouveaux territoires de pêche . De plus, l'adoption du froid à bord a permis d'améliorer les conditions de présentation du poisson sur le marché, contribuant ainsi à augmenter les prix à la vente donc les revenus des producteurs.

En somme, le système productif de la pêche est passé d'une structure fonctionnelle fondamentalement familiale et artisanale, à une structure industrielle spécialisée développant des systèmes productifs opérant dans des zones sous juridiction de pays tiers. Il est évident que les flottes industrielles au vaste rayon d'action seront toujours soumises à des conventions internationales et à des accords bilatéraux de pêche avec quotas de captures, redevances de pêche, licences et autres limitations .

L'augmentation de la demande de protéines et l'élevation conséquente des prix qui coïncident avec le décollage économique espagnol contribuent à stimuler les efforts d'investissement dans le secteur de la pêche et des cultures marines qui connaît alors un processus de rénovation, de modernisation et de restructuration de son potentiel productif.

L'approvisionnement du marché espagnol s'est développé comme une nécessité face à 1' expansion de la demande. Si, jusqu'alors, la consommation de poisson frais était réduite au littoral et à de rares points de l'intérieur péninsulaire, le nouveau contexte économique national va entraîner une forte expansion . La consommation interne de poisson a augmenté de 20 % de 1964 à 1967, également la consommation per capita qui a atteint 21,87 kg en 1967, ce qui suppose une augmentation de 17% depuis 1964.

De plus, l'intensité de la demande en produits de la pêche va conduire à la mécanisation du secteur à travers l'investissement dans des infrastructures de production plus sophistiquées et coûteuses , ce qui va conduire à une situation de surexploitation des pêcheries et d'épuisement du stock biologique . De toute façon, et comme nous l'avons déjà signalé, 1' effort financier va concerner principalement les flottes de type industriel, plus que la flottille artisanale , orientée vers la pêche et les cultures marines.

Enfin, l'intégration espagnole à l'Union Européenne va entraîner des changements structurels importants pour le secteur de la pêche qui va devoir inévitablement s'adapter aux règlements communautaires . Le respect de ces normes, que l'Espagne a acceptées lors de son adhésion, est obligatoire ; c'est pourquoi le modèle de production et de commercialisation dans notre pays doit subir un profond changement qu'il faut reconnaître et assumer afin de pouvoir en tirer profit. À l'intérieur de la politique de pêche communautaire, les Organisations de Producteurs de la Pêche (OP), constituent les piliers de l'Organisation commune des marchés des produits de la pêche ; ce sont des associations constituées à l'initiative des producteurs et reconnues par la législation en vigueur, qui ont comme finalité de garantir l'exercice rationnel de la pêche et l'amélioration des conditions de vente de sa production.

Le défi devant lequel se trouve le secteur de la pêche galicienne, organisée en confréries de pêcheurs et coopératives d'armateurs, est celui d'adapter ses structures fonctionnelles au dispositif législatif communautaire . Sur une période d'observation de presque dix ans, de 1987 à 1995, nous pouvons constater que le facteur déterminant d'adaptation des structures professionnelles galiciennes au nouveau schéma communautaire réside plus dans le fait de bénéficier des aides provenant de l'Administration (de gestion et de financement) que dans celui de mettre en place une nouvelle stratégie de production et de commercialisation de la pêche en accord · avec les objectifs de la Communauté européenne ; ainsi, le retard en ce qui concerne l'adoption de plans de pêche qui intègrent d'éventuelles fluctuations des prix du marché et comprennent des mesures d'ajustement de la production à la demande, le non-respect des normes de taille et de qualité préalablement imposées à tous les associés, etc., témoignent du phénomène.

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III - CARACTÉRISTIQUES ACTUELLES DE LA FLOTTE ET DES PORTS DE PÊCHE

L'ensemble des transformations en interrelations que nous avons eu l'occasion d'expliquer sommairement, se traduit nettement par un changement qualitatif de la structure de la flotte et de son rayon d' action . D' après des données de 1993, le nombre d'embarcations recensées dans les ports de pêche galiciens atteignait 7 996, c'est-à-dire 5,5 % de moins que celui donné par l'Institut social de la marine au début des années 1960. Cependant , on peut observer simultanément que le tonnage total de la flotte a été multiplié par quatre pendant les trente dernière s années et que le tonnage moyen par embarcation est de 31,2 tjb, soit cinq fois plus que les 6,62 de 1963. Donc, on constate le déclin du modèle artisanal de pêche pratiqué par l'unité familiale et le développement des systèmes d'exploitation industrielle des ressources marines.

Si, pendant la première moitié du siècle, une activité de pêche reposant sur des stratégies d' autoconsommation domestique était associée à l'exploitation de pêcheries proches du port de base alors que seule une petite partie de la flotte, formée d'embarcations à moteur ou à vapeur, commençait à pêcher dans des espaces maritimes beaucoup plus éloignés , actuellement la situation a complètement changé.

Il est alors possible de distinguer quatre types de pêche d'après leur rayon d' action , les espèces capturées et les caractéristiques techniques et humaines des bateaux utilisés.

D' abord, nous relevons le système d'exploitation artisanale, continuateur, d'une certaine façon, de la tradition, étant donné qu'il est lié à l'utilisation de petites embarcations, en bois, à rames, qui opèrent dans des aires très proches du littoral, surtout dans les espaces intérieurs des Rias Baixas. Cependant, il serait faux de comparer le modèle de travail artisanal actuel avec celui qui était en vigueur il y a quelques décennies. Si dans le passé la possession d'une modeste gamela ou dorna de la part d'une famille de pêcheurs servait fondamentalement à obtenir quelques ressource s alimentaires nécessaires à la consommation domestique avec une très faible commercialisation, actuellement, ce type d'exploitation permet de pratiquer ce qu'on appelle les cultures marines a flot e ou de capturer un nombre limité d'espèces destinées de préférence à la vente dans la criée la plus proche .

En second lieu, il est possible d'individualiser une pêche semi-industrielle , réalisée par des bateaux de cerco, palangre et chaluts de fond, qui s' adonnent à l'exploitation des pêcheries situées à l' intérieur de la plate-forme continentale . Les embarcations de grandeur moyenne dominent , avec un nombre variable de marins, mais qui dépasse les dimensions de l'unité familiale . Dans ce type de pêche, les captures d'espèces communes , comme la sardine ou le maquereau , l'emportent ; cependant, les débarquements d'espèces de fond d 'une plus grande valeur marchande (baudroie , langoustine, limande, etc.) sont également recherchées .

Troisièmement, s' individualise la pêche hauturière pratiquée par des bateaux travaillant sur la Grande Sole ou sur le banc Canarien-Saharien où les espèces exploitées sont le colin , le thon, des céphalopodes et certaines espèces de crustacés . De nos jours, nous nous trouvons face à un modèle d'exploitation des ressources marines très touché par la crise, liée tant aux conflits existant avec les flottes des autres nations européennes , qu ' à la signature des accords internationaux qui permettent de maintenir le niveau de captures dans des eaux territoriales extracommunitaires , objectif assez difficile à atteindre.

Enfin, nous pouvons distinguer une grande pêche au large ou de grande onde pratiquée par des bateaux-congélateurs de plus de 250 tjb sur diverses pêcheries parmi lesquelles nous pouvons distinguer les Malouines , la Namibie, le Pacifique et les eaux NAFO. Comme pour le cas précédent, la capacité de pêche d'une flotte extrêmement puissante inspire une méfiance aux autorités des pays tiers qui poussent à la réduction du volume de captures des flottes étrangères travaillant dans leurs eaux ou imposent des mesures compensatoires diverses en échange du droit d'accès afin de pouvoir maintenir un certain niveau de production nationale.

Traditionnellement, le peuplement des espaces littoraux galiciens s'organisait à partir d'une multitude de petits établissements portuaires, où l' activité de pêche et le travail des champs se combinaient pour assurer les revenus d'une bonne partie des familles. Il est vrai que, dans ces zones existaient déjà les grandes agglomérations régionales qui, comme A Corufia et Vigo, avaient bénéficié d'un énorme développement démographique et économique liés à leur situation d'importants ports de commerce à vocation transatlantique . Dans d'autres cas, comme Ferrol et Pontevedra, l'essor des fonctions industrielle et militaire, pour la première de ces villes, ou administrative, pour la seconde, explique leur accès au rang de villes à partir du XIX• siècle.

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Fig. 4: Total des ventes en tonnage et en valeur (pesetas), 1993

'° li 0 10km

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Cependant, en faisant abstraction de ces quatres exceptions, le nombre de centres ruraux agricoles et halieutiques était très réduit ; seules quelques localités de modeste grandeur (Baiona, Padr6n, Betanzos, Pontedeume, Viveiro, etc.) fonctionnaient comme petits centres marchands d'envergure locale. Pendant les trente dernières années, la Galice, et spécialement son littoral, a connu un important essor de l'urbanisation qui a entraîné de multiples transformations pour les espaces pris en considération. D'autre part, l'effectif démographique augmente spectaculairement, comme conséquence de l'expansion des principales villes et de l'urbanisation diffuse de vastes secteurs côtiers. Ce développement exprime également la diversification de la structure économique qui a eu lieu et qui suppose, à son tour, un développement sans précédent dans les secteurs industriel, touristique, de la pêche et des cultures marines. Enfin, si dans le passé l'exploitation des ressources marines représentait le secteur économique dominant, de nos jours, la branche productive halieutique, intensément modernisée, ne constitue plus qu'une option de travail au milieu d'une vaste gamme de possibilités économiques qu'offre le littoral. En liaison avec ce changement des conditions socio-structurelles qui affectent la pêche, le plan des ports de pêche de la région a été profondément modifié ; ainsi, face à la prédominance presque totale des petites installations qui bénéficient d'un emplacement naturel très favorable (le port lié à la survie d'une communauté rurale fermée), il faut distinguer, maintenant, depuis les grands centres de pêche où sont basés les bateaux-congélateurs travaillant dans l'Atlantique et dans le Pacifique, jusqu'aux modestes localités où prédominent encore les embarcations qui pêchent à l'intérieur de la plate­forme continentale ou dans les eaux intérieures des Rfas.

D'après les données de 1993, l'activité de la pêche de la région est concentrée en un nombre réduit de ports qui se détachent d'un ensemble assez vaste de localités côtières maintenant encore une flotte à caractère artisanal. En témoigne le fait suivant : les débarquements de poisson et de fruits de mer dans le port de Vigo a atteint, en 1993, 143 516 t et, à A Corufia, Ribeira, Vilagarcfa et Marin, les apports ont oscillé entre 50 000 et 80 000 t. En revanche, sur un ensemble de 4 7 centres portuaires, les transactions dans les halles à marée ont atteint moins de 5 000 t. Ces valeurs sont spécialement significatives si nous prenons en considération le fait que le nombre d'embarcations de certains petits ports de la région peut arriver à dépasser la totalité des bateaux recensés dans les grands centres de débarquement. Concrètement, Rianxo, qui a 520 embarcations immatriculées, ou La Illa de Arousa, qui en possède 566, ont enregistré un volume d'apports, tout au long de l'année, représentant moins de 1 % de celui comptabilisé à Vigo, qui compte 3 14 grands bateaux, ou à A Corufia, port-base avec 261 unités. Par conséquent, une rapide observation de la structure de la flotte existante dans les différentes localités, dont l'activité la plus importante est celle de la pêche, nous permet d'établir un classement en trois groupes bien distincts.

D'abord, existent les grands centres portuaires spécialisés en pêche hauturière et de grande onde. Il s'agit, par exemple, de Vigo, A Corufia, Marin, Ribeira, Meira et A Guarda, localités d'où partent des bateaux qui travaillent sur des pêcheries aussi bien communautaires qu'appartenant à d'autres pays riverains. Parmi ces centres, il faut distinguer le cas de Vigo (spécialisé en grands bateaux-congélateurs) et celui de A Corufia qui intègrent leur fonction d'activité de pêche et de commercialisation des produits de la mer à une gamme très vaste d'activités liées à leur situation de pôles du réseau urbain galicien. Il reste donc le modèle que représentent, entre autres, Ribeira, Burela ou A Guarda, agglomérations de 5 000 à 10 000 habitants approximativement qui sont très liées à l'exploitation des ressources marines. Dans la plupart de ces localités se trouvent les principaux centres de marée de Galice, où arrivent de nombreux bateaux dont la base est située dans d'autres ports proches, afin de bénéficier de meilleures conditions de vente.

En second lieu, il faut distinguer une série de centres d'envergure moins importante dans lesquels la pêche joue un rôle fondamental en ce qui concerne la création d'emplois et la richesse au niveau local, et ceci, même s'il y a une nette prédominance de la pêche côtière sortant pratiquement tous les jours. À ce groupe appartiennent Cedeira, Sada, Malpica, Laxe, Muras, Portosifio, Portonovo ou Bueu comme exemples les plus caractéristiques. Ce sont des localités qui possèdent une longue tradition de pêche, qui se sont développées au cours des dernières années en liaison avec les excellentes conditions de commercialisation du début des années 1970 ce qui a entraîné la substitution d'un nouveau modèle d'exploitation des richesses de la mer orienté vers le marché aux pratiques auto-consommatrices passées.

Enfin, dans un nombre non négligeable de petits villages distribués le long du littoral (Barallobre, 0 Pindo, Raxo, Arcade, Cesantes, etc.), de nombreuses familles possèdent encore une modeste embarcation ou barque à l'aide de laquelle elles travaillent dans les eaux intérieures des "rias" ou à proximité du port. La bonne valeur marchande de certaines espèces de crustacés et de mollusques

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ou l'abondance d'autres espèces expliquent le maintien d'une activité qui fournit du travail à un grand nombre de personnes embarquant seules ou accompagnées d'autres membres de l'unité familiale .

Comme nous avons pu le constater dans cette rapide analyse , les transformations qui ont touché le secteur de la pêche, à partir de 1960, se traduisent par une nette spécialisation des ports de pêche de la région et par une remarquable augmentation du volume de captures, bien que les systèmes d'exploitation des ressources marines peuvent différer complètement d'un lieu à l'autre ; en effet, il n'y a presque rien de comparable entre le travail d'une campagne de pêche qui se déroule à des milliers de kilomètres de distance du port d'origine et la capture de plusieurs dizaines de kilos de poisson et de fruits de mer à l'aide d'une barque qui s'éloigne à peine de la côte.

Conclusion

Depuis 1960, l'activité de la pêche en Galice a connu un processus de recompos1t1on, de modernisation et de rénovation de sa structure productive. D'une part, les systèmes artisanaux d'exploitation des ressources marines ont peu à peu fait place à l'essor d'un secteur industriel fortement capitalistique . D'autre part, le rayon d'action des bateaux s'est agrandi jusqu'au point d ' inclure les principales zones de pêche de l'Atlantique et du Pacifique, fait qui a accentué la dépendance de notre flotte vis-à-vis des accords internationaux concernant les eaux extra­communautaires. Finalement , un ensemble restreint de ports concentrent les embarcations de plus de 250 tjb et les circuits de commercialisation du poisson frais . Comme on a pu le constater, la pêche et les cultures marines ont perdu leur caractère d'activités d'autoconsommation qu'elles ont maintenu jusqu'au milieu de ce siècle, pour s'intégrer complètement à l'économie de marché, de manière parallèle et avec une chronologie identique à ce qui est arrivé dans d'autres secteurs productifs espagnols.

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Cahiers Nantais n° 47-48