Kadath Chroniques Des Civilisations Disparues - 016

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COMITE DE REDACTION : ivan verheyden, rédacteur en chef patrick ferryn, secrétaire de rédaction jean-claude berck, robert dehon, jacques gossart, jacques victoor AVEC LA COLLABORATION DE : jacques blanchart, jacques dieu, guy druart, jacques keyaerts, pierre méraux-tanguy, édith pirson, albert szafarz, nicole torchet, albert van hoorenbeeck MAQUETTE DE GERARD DEUQUET

Au sommaire — le plus grand livre d’images du monde, Patrick Ferryn . . . . . — culture nazca, affirment les archéologue, Jacques Gossart . . . . — le plus grand livre d’astronomie du monde ?, Ivan Verheyden . . .

Maria Reiche, 26 - Gérald Hawkins, 28 - Simone Waisbard, 30 — un chandelier, un robot, une déesse…, Jacques Victoor . . . . . — hypothèses de conversation, hypothèses de de travail . . . . . carte, 10 — survol de nazca, 14 — bibliographie, 42.

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A la recherche

De kadath

« C'était un paysage lunaire de poussières et de roches. Sans repères sur le terrain, on se sentait désorienté. En marchant, les montagnes au loin bougeaient avec moi. Comme la Reine d'Alice, je courais mais ne progressais guère. C'était une mer désertique sans fin, au rivage irréel. Lorsque les hommes d'Apollo XIV se mirent en marche vers le cratère du Cône, ils furent désorientés. Au retour, ils ratèrent le LEM de 40 mètres (...) J'avais, à Nazca, la sensation d'une cécité lunaire, de me prome-ner sans direction. Le soleil n'était d'aucune utilité pour s'orienter, il frappait haut, intense, blanc, dis-tendu ». (Gerald Hawkins). C'est dans cet enfer que, depuis plus de trente ans, une vieille dame, Unesco à elle seule, œuvre à sauver une page d'Histoire. Aucune publication sur Nazca n'existe, à ce jour, en français. Comme pour Stonehenge, comme pour Glozel, KADATH a fait la première mise au point qui se veut exhaustive. Mais cette fois, nous n'avons aucune conclusion à offrir : c'est rigoureusement impossible dans l'état actuel des choses. Courant 1976 paraîtra probablement un livre sur la question, signé d'un membre de notre comité d'honneur, Madame Simone Waisbard. Elle nous a fourni une aide précieuse, plus particulièrement en ce qui concerne l'avis des péruanistes, que seul un long séjour sur place peut rendre accessible. Nous te-nons également à remercier ici Monsieur Harry Belevan, Premier Secrétaire de l'Ambassade du Pérou à Bruxelles, lequel nous a permis d'accéder, en peu de temps, aux documents iconographiques du Servicio Aerofotografico Nacional. De même que Monsieur Michel Bougard, rédacteur en chef de la revue Inforespace, qui a mis à notre disposition sa riche collection de diapositives. Et enfin, nos plus vifs remerciements à Madame Renate Reiche-Grosse, qui nous autorisa à publier, pour la première fois en langue française, un article de Maria Reiche, sa sœur, trop préoccupée sur place par sa guerre aux vandales pour pouvoir répondre personnellement. Grâce à l'aide précieuse de toutes ces personnes, nous pouvons vous offrir les livres et documents autrement inaccessibles que vous trouverez en dernière page. De plus, notre matériel a bien vite dé-bordé du cadre des quarante pages habituelles de la revue. Conscients de son importance, et malgré les charges financières que nous prions nos lecteurs (à l'exclusion des abonnés) de partager avec nous, nous avons donc « gonflé » ce numéro spécial de quatre pages supplémentaires. La première tentative de compréhension globale de Nazca méritait bien cela.

KADATH

Ce numéro spécial de KADATH est dédié à Maria Reiche… bien sûr.

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Le passe present

Point de départ de ce numéro : la ville de Pisco en bordure du Pacifique, à 245 kilomètres au sud de Lima. La direction générale est sud-est, sur la route panaméricaine qui traverse le Pérou tout entier et qui, à certains endroits, suit les ancien-nes routes incas. 78 kilomètres nous amènent à Ica, chef-lieu de la province du même nom. La route suit alors presque parallèlement la côte située à droite, à une quarantaine de kilomètres. A gauche elle longe les contreforts des Andes. A 93 kilomètres d’Ica, peu après avoir croisé le rio Grande, la petite ville de Palpa. Là s'ouvrent les premières pages du plus grand livre d'images du monde, iconographie folle et incompréhensible, qui s'étale sur les plateaux désolés émergeant des vallées vertes jusqu'à Nazca (on écrit aussi Nasca, mais nous avons choisi l'orthographe locale). A 20 kilomètres en-dessous de Palpa : San Javier puis San Jose, en bordure de la val-lée du rio Ingenio qui conduit, si on quitte la Pa-nam vers la gauche, sur la départementale 108, au village d’El Ingenio. La route grimpe ensuite pour arriver sur le vaste plateau qui s'étend sur 30 kilomètres en direction de Nazca. Cette région côtière, de plateaux (les mesetas, recouvertes de pampas) et de vallées est située à une altitude comprise entre 200 et 500 mètres. Au-delà on atteint immédiatement 700 puis 1000 mètres et

très rapidement surgissent les grands sommets de la Cordillère. Les géoglyphes (tel est le nom proposé en 1964 pour désigner les figures géan-tes dessinées au sol ou sur des pentes monta-gneuses) sont localisés dans les pampas s'éten-dant entre les huit branches du rio Grande et sur une aire totale d'environ 50 kilomètres de lon-gueur. Les géoglyphes de la zone de Palpa sont à proximité de la vallée et de la ville. Au sud, la vallée de l'Ingenio, oasis verdoyante comme tou-tes les vallées côtières du Pérou. C'est dans le secteur délimité par la vallée du rio Ingenio, la vallée du rio Nazca et par les montagnes à l'est de la Panam, que se trouvent dans la pampa de San Jose et dans la pampa Jumana-Colorada les plus fortes concentrations de lignes, surfaces géométriques, figures zoomorphes etc... (1) Qui et quand, mais surtout pourquoi ? Les Nazcas sont les auteurs de ces tracés in-compréhensibles, au même titre que les Glozé-liens gravèrent les tablettes de Glozel... Ce qui ne nous apprend pas grand-chose. En raison de la ressemblance évidente entre d'une part les motifs aux apparences de félins sauvages, d'oi-seaux de mer, de poissons prédateurs, de ser-pents fabuleux, de scolopendres etc... ornant les céramiques et les tissus, et d'autre part les géo-glyphes des pampas, on attribue ceux-ci aux cultures dites de Paracas et de Nazca, qui s'éten-dent de 300 avant J.-C. jusqu'en 800 de notre ère. Cela ne fait aucun doute pour personne et tous les auteurs sont unanimes et convaincus de cette évidente ressemblance. Oubliant le prestige de la chose écrite, nous y sommes allés voir de

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LE PLUS GRAND LIVRE D’IMAGES DU MONDE

(1) Dans ce secteur se trouve également Cahua-chi, l'ancienne capitale des Nazcas. Non loin de là, il y a la « Estaqueria », ce que Alden Mason nomme « le Stonehenge en bois » : 12 rangées de 20 repères ayant contenu des troncs d’arbres.

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plus près et surprise... Mais nous en parlerons plus loin. Plus en rapport direct avec les géogly-phes eux-mêmes, on a retrouvé de petits piquets de bois qui semblent avoir servi à la construction des tracés, et pour lesquels le carbone-14 donne une date de 525 après J.-C., à plus ou moins 80 ans près. Les géoglyphes remonteraient donc à cette époque, à condition bien sûr que les pi-quets de bois aient bel et bien servi à cela et qu'ils soient réellement contemporains des des-sins. Ce qui est très possible mais pas formel à cent pour cent. Quant à la signification des tra-cés, passez-moi l'expression, mais on nage com-plètement ! Je ne vois pas pourquoi il serait hon-teux de l'avouer. Bien entendu, il y a des hypo-thèses, nombreuses et intéressantes, mais n'ou-bliez jamais que ce ne sont que des hypothèses ; même si les autochtones et les publications loca-les parlent du calendario... Suivez le guide. Chose extraordinaire — et normale à la fois, en raison de la grandeur — les dessins ne se com-prennent absolument pas lorsqu'on se trouve au sol. Dans le cas des surfaces géométriques, on ne remarque que de longs remblais caillouteux qui délimitent des aires plus claires. Pour les lon-gues lignes droites, on ne peut voir qu'un sillon plus ou moins large, d'une profondeur n'excédant

pas 30 cm, et qui se perd à l'horizon. Quant aux dessins figuratifs, les lignes qui les forment sont généralement plus fines encore. Un observateur qui se promène sur un dessin n'en distingue que des parties et, même s'il devine un ensemble, celui-ci lui échappe totalement de par sa déme-sure. II est des choses tellement grandes qu'on ne les voit pas et Gerald Hawkins en eut la preu-ve durant ses travaux à Nazca : il chercha vaine-ment un grand trapèze de 850 mètres de long... alors qu'il se tenait à l'intérieur de celui-ci ! Quel-ques géoglyphes — à condition d'être de dimen-sions beaucoup plus raisonnables — sont cepen-dant visibles depuis les cerros, petites collines

Les pampas de Nazca et Palpa ; chaque trait représente une ou plusieurs pistes. Des plans détaillés figurent en page 10 et 21.

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sur les plateaux. Mais cela ne résout rien car dans la plupart des cas ils sont l'origine ou l'aboutisse-ment de lignes droites ou brisées qui les relient à d'autres motifs, et qui sont alors trop éloignés eux-mêmes, ou trop grands pour être ne fût-ce qu'aperçus. II a fallu attendre les premiers vols photogrammétriques, qui nécessitent une altitude de 500 mètres ou plus, pour tout d'abord identifier convenablement ce qui était représenté là et en-suite pour en apprécier pleinement le graphisme étonnant, magnifiquement précis. On a une excel-lente vue d'ensemble en survolant la région sur la ligne Lima-Arequipa, à mi-chemin entre ces deux villes, sur les versants ouest de la Cordillère. II ne faut donc pas s'étonner dès lors de la découverte tardive des figures que des centaines, des milliers d'hommes ont foulées au cours des siècles sans jamais bien réaliser ce qu'ils avaient sous les pieds. La question qui vient immédiatement à l'esprit est bien entendu de savoir si les auteurs des géogly-phes les ont jamais vus comme nous le permet-tent les moyens aériens dont nous disposons à présent... C'est là un des nœuds du problème, car ce n'est qu'à quelques centaines de mètres d'alti-tude qu'apparaissent distinctement les inextrica-bles réseaux de lignes découpant la pampa dans tous les sens, gravissant quelquefois des cerros et reprenant de plus belle de l'autre côté sans perdre de leur implacable rectitude. Dans bien des cas elles cessent leur course folle in extremis au bord des plateaux ou à leur opposé, au pied des mon-tagnes. En certains lieux la densité des lignes est telle — et je songe ici à la photographie des pages 60 et 61 du livre « Geheimnis der Wüste » — qu'il est pratiquement impossible de les dénombrer. A première vue tout cela semble incohérent, et pour-tant, une étude minutieuse révèle qu'une obscure loi régit ces réseaux ; si on suit telle ligne quittant par exemple un grand trapèze, un triangle ou un dessin zoomorphe, elle s'en va, parfois à des kilo-mètres de là, aboutir à un centre de dispersion de lignes, ou encore au milieu d'un des côtés d'une autre surface ou à l'un de ses sommets. Le hasard est exclu car précisément, de ce point de ren-contre, partent d'autres lignes dans des azimuts différents. On peut remarquer également qu'à plusieurs endroits une ligne se terminant à l'extré-mité d'un plateau, réapparaît curieusement à quel-que distance de là, sur le plateau voisin, dans la môme direction... Les pampas sont des étendues arides et chaoti-ques d'une morne coloration tantôt ocre, tantôt grise. Le sol est meuble et on y enfonce de quel-ques centimètres. De violents courants d'air em-portent le sable fin, ne laissant plus que de vérita-bles champs de pierrailles de plus ou moins gros calibre. Leur forte teneur en fer explique leur colo-ration sombre due à l'oxydation. Elles absorbent plus de chaleur et forment un coussin d'air chaud

protégeant leur surface des vents. II suffit que l'on déplace une pierre ou qu'on la retourne pour qu'une zone plus claire apparaisse. Creuser alors un sillon à cet endroit accentue la lisibilité. Une autre technique consiste à ramasser les cailloux et à les entasser sur un remblai d'une hauteur va-riant de 20 cm à un mètre. Ceci est utilisé pour les grandes surfaces géométriques. On a ensuite balayé l'aire obtenue pour éliminer les moindres petites pierres, ce qui laisse apparaître le sol sa-blonneux plus pâle. C'est le procédé du raspaje ou nettoyage. II peut sembler incroyable que des dessins exécutés aussi sommairement ont ainsi résisté aux siècles et aux intempéries. II faut sa-voir que le climat est l'un des plus secs du globe : il n'y pleut en tout et pour tout qu'une demi-heure tous les deux ans. De plus, la couche d'air chaud qui tapisse les pampas protège les dessins des vents et, chose appréciable, le sol contient du gypse qui avec l'aide de la rosée maintient assez fermement les pierres à leur base. Les longs ser-pents sinueux visibles sur la plupart des photos et qui nervent les pampas sont des traces de ruissel-lement qui se faufilent vers les vallées. Ces mil-liers de lits sont aujourd'hui asséchés et il serait intéressant d'essayer de savoir depuis quand exactement, car ils passent tantôt par-dessus les géoglyphes tantôt par-dessous. Des archéologues péruviens soutiennent que les plateaux étaient jadis fertiles. Cela fait songer aux mahamaes dont parle Rebeca Carrion Cachot, étroites bandes de terrains cultivés, obtenues en creusant le sable jusqu'à une profondeur où l'on trouvait un sol hu-midifié par des cours d'eau souterrains. Lignes de construction, axes ou routes ? II est important de distinguer deux sortes de li-gnes : les longues droites et les lignes brisées. Dans ce dernier cas, on peut en voir qui décrivent de curieux circuits, évitant de se recouper, formant à un endroit le dessin figuratif lui-même et, sans discontinuer poursuivant le trajet. Regardez par exemple le géoglyphe n° 18 (verso) qui représente une plante et ses racines : le parcours total de la ligne qui le forme, depuis son origine (au bout d'un triangle effilé) jusqu'à son retour non loin de là (dans un grand quadrilatère), représente une dis-tance de près de 5000 mètres ! S'il s'agit d'un che-min de procession, je n'aurais pas voulu en être ! Et ceci n'est qu'un bien modeste exemple. Dans la zone de Nazca et principalement dans la pampa Jumana-Colorada, on peut voir plusieurs centres de dispersion de grandes lignes (A, C, E, F et G, sur le plan de la page 10) qui s'en vont vers l'inté-rieur de la pampa, vers ses extrémités, ou vont rejoindre des surfaces géométriques en des points bien particuliers ou encore relient d'autres centres. II y a 24 droites qui rayonnent en A (elles ne sont pas toutes dessinées sur le plan) et une cinquan-taine qui partent de G, qui est en fait une petite colline. Parmi ces dernières qui mesurent environ 3000 mètres il en est une qui part en A et qui

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6 mesure 7500 mètres. Ce n'est encore rien car une autre, quittant précisément A vers l'intérieur, at-teint 10.000 mètres. La déviation moyenne des droites n'excède pas 9 minutes d'arc soit environ 3 m 50 pour une longueur de 1600 mètres. Peut-on qualifier cela de précision remarquable ? Disons que si un topographe actuel arrivait à ce résultat grâce à un théodolite, ce serait tout bon-nement catastrophique ! Par contre si la visée est faite d'une manière plus rudimentaire, la précision est bonne, et même étonnante dans le cas d'une ligne de près de 10.000 mètres, si l'on tient comp-te des erreurs de visée qui s'ajoutent si facilement, surtout sur des plateaux où les couches d'air chaud favorisent les réfractions. De plus, les géo-mètres nazcas n'avaient pas en leur possession le précieux walkie-talkie qui permet de rectifier im-médiatement un jalon mal placé, ni une solide paire de jumelles certainement bien utile si l'on trace une ligne droite de dix kilomètres... (2) Les « pistas » et les spirales. C'est sous ce terme un peu malheureux car il don-na lieu aux hypothèses les plus folles, qu'on a regroupé les surfaces géométriques, telles les quadrilatères, les trapèzes et les triangles. Je suis un peu étonné de ne pas trouver de carré ou de rectangle ; les plans n'en mentionnent pas et l'an-gle droit semble assez peu fréquent. Les pistas sont particulièrement nombreuses dans la pampa Jumana-Colorada (page 10) et c'est là que se

La plante avec ses racines et, à côté, ce que faute de mieux on désigne comme « un singe en raccourci » (!)

(1) On a coutume de supposer que les auteurs de Nazca sont partis de plans réduits pour aboutir à la réalisation sur grande échelle. Et s'il s'agissait du contraire ? Les nombreux centres de disper-sion de lignes me font songer à l'idée suivante : pour une raison quelconque ils auraient eu be-soin d'un plan précis des plateaux. Pour ce faire, ils auraient divisé ceux-ci en plusieurs secteurs. Dans chacun, une équipe trace de longues li-gnes, partant d'un centre, vers tous les points remarquables du secteur : collines, pieds des montagnes et bords particuliers du plateau, tels que proéminences et renfoncements (on peut remarquer sur les plans que c'est souvent le cas). Une fois les lignes tracées et leur mesure prise par l'adoption d'une unité, il est facile de reporter les résultats sur un plan. Pour fixer les positions relatives des différents chantiers, on réunit sur le terrain les centres de dispersion par d'autres droites, on mesure, et on reporte à nou-veau sur le plan, ce qui permet de le compléter en ajoutant de nouvelles portions de terrain me-suré. On recommence l'opération depuis de nou-veaux centres, plus à l'intérieur des plateaux, on vérifie à nouveau les positions relatives des pre-miers centres, pour augmenter la précision vu l'étendue du terrain, et ainsi de suite. Plus il y aura de lignes, plus le plan sera précis. Cette hypothèse ne concerne pas les dessins ni les pistas. Elle est peut-être absurde, mais après tout, aucune hypothèse avancée jusqu'à ce jour ne peut expliquer à la fois les lignes, les pistas et les dessins.

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trouvent les plus grandes 850 et 800 mètres envi-ron. Elles auraient nécessité quelque 4000 hom-mes-heures de travail. Remarquez les lignes ra-diales ; elles viennent du centre G dont je parlais plus haut et illustrent ici cette loi mystérieuse qui lie les lignes aux figures. Avec un peu de patience vous verrez qu'elles passent par des sommets de triangles, des côtés de quadrilatères où souvent il y a précisément une autre intersection. Mais tout demeure incompréhensible. Ce sont bien sûr ces immenses surfaces qui se voient en premier lieu d'avion, en raison de leur taille et du relief des remblais qui les soulignent. II est fréquent que plusieurs pistas aient un élément, par exemple un petit côté, en commun. Certains grands quadrila-tères possèdent à leurs extrémités, presque à égale distance de celles-ci, un petit tertre de pier-res dans lequel on a vu un poste d'observation, un autel ou même une tombe. En différents endroits on trouve aussi des pistas contenant des aligne-ments plus ou moins réguliers de pierres plus sombres, de même que le long de quelques lignes droites. Les pistas chevauchent elles-mêmes plu-sieurs autres géoglyphes et parfois aussi les effa-cent quasi complètement, permettant de supposer différentes périodes d'occupation. J'attirerai parti-culièrement l'attention sur l'une des pistas, qui réduit à néant la fameuse théorie des terrains d'at-terrissages pour extraterrestres et dont la vue ôterait à coup sûr toute envie de se poser, même au pilote le plus hardi ! D'autre part ce document est suprêmement déconcertant car notre logique est ici ébranlée face à une construction émanant

d'une pensée certainement très différente ; dans quel but un énorme trapèze dessiné au sol avan-ce-t-il jusque sur la pente d'une colline qu'il gravit pour redescendre de l'autre côté ? Les plateaux nous ont toujours suggéré l'image de surfaces bien planes et elles le sont en effet pour la plupart, mais pas toutes... Parmi la centaine de spirales tracées dans les pampas, beaucoup sont fréquemment associées à un long triangle effilé ; tel est le cas d'un immense géoglyphe situé à 6 km à l'est de Nazca et consti-tué d'une spirale d'environ 50 mètres de diamètre dont le sillon s'en va, oscillant, décrire une série de zigzags sur une distance de 400 mètres, puis redevient rectiligne sur près de 200 mètres pour faire brusquement demi-tour, s'élargir et donner naissance à un triangle très effilé de plus de 600 mètres de long, qui coupe la figure précédemment formée en effaçant une partie des zigzags et de la spirale. A quelques rares exceptions, les spirales sont toutes à double révolution. La plus grande, non loin de la vallée de l'Ingenio, fut détruite par un champ de coton. La plus parfaite, par sa régu-larité, se trouve dans la même zone, mais à l'ex-trémité du plateau qui longe la vallée, au bout d'un long triangle adjacent au quadrilatère géant de 850 mètres. Elle a un diamètre de 80 mètres ; les doubles sillons ont une largeur de deux mètres et sont distants de 5 m 80. Elle fut tracée à l'aide de deux cordes (4 m 50 et 39 m 50) et de trois pieux en bois disposés en triangle. Toutes les autres spirales sont nettement plus grossières et moins harmonieuses.

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Une hypothèse, parmi tant d'autres, prétend à une intervention extraterrestre dans l'achèvement des figures au sol de la plaine de Nazca. Aujourd'hui, cette hypothèse peut être contrôlée grâce au satel-lite artificiel : nous avons fait l'expérience avec l'aide de l'EROS Data Center (Earth Research Organisation System, firme américaine qui fournit au public les photos des projets Apollo, Skylab, ERTS/Landsat (Earth Resources Technology Sa-tellite). Nous avons eu sous les yeux deux agran-dissements photographiques de la région de Naz-ca : il faut se rendre à l'évidence, aucun tracé ou piste n'est visible ! Malgré les objectifs spéciaux Questar, le haut rendement du balayage optique, le filtrage destiné à mettre en valeur les caractéris-tiques géologiques du terrain, il faut admettre l'im-possibilité d'une direction artistique en altitude. Seul fait indéniable, l'observation à basse altitude, donc d'avion ou d'hélicoptère, laisse le loisir d'étu-dier les figures géantes, nous vous en proposons de nombreux exemples tout au long de ce numéro. Encore, l'observation d'avion n'explique en rien comment les dessins furent exécutés. Le simple fait des communications air-sol présente des diffi-cultés insurmontables si on n'utilise pas des appa-reils radio : cela n'excluant pas, d'ailleurs, cette utilisation, toutefois, on n'a pas encore retrouvé le two-way radio qu' « ils » employèrent. Les archéologues qui se sont penchés sur le pro-blème de Nazca ont proposé plusieurs méthodes de dessin de grande envergure, ces méthodes étant dans l'ordre des possibilités pour un artiste sur le plancher des vaches. La première méthode, tirée de n'importe quel livre d'architecture de jardin, propose l'emploi de plan ou maquette. Par le pro-cessus de fragmentation des figures en polygones simples (triangles, carrés, losanges, etc.), il est aisé de reporter un dessin à une échelle différente (voir illustration). La deuxième méthode, dite « des carrés », est connue de tous : une maquette en projection verticale est découpée en un réseau de carrés, ceux-ci sont reportés sur le terrain à une échelle plus grande et le dessin est retranscrit. La

troisième méthode est celle de l'Inspiration totale. Je m'explique : quand nous admirons les figures de Nazca, nous faisons inconsciemment référence à notre connaissance de l'art pictural, de quelque sorte qu'il fût. Nous essayons, dès lors, de compa-rer les figures de Nazca à un exemple déjà connu, mais de culture diamétralement différente. C'est sans doute pourquoi il fut écrit que les pistas res-semblaient à des pistes d'atterrissage ! Toutefois, cette hypothèse doit être abandonnée, la représen-tation d'animaux gigantesques mais reconnaissa-bles, n'est certainement pas le résultat de dessins « instinctifs ». La quatrième méthode consiste en l'utilisation de données géométriques directement sur le terrain : par exemple le dessin d'une spirale à trois centres peut être tracé sans plus de moyens qu'un peu de ficelle et quelques morceaux de bois, ou encore de tout matériau y ressemblant. Cette méthode peut être celle des orientations et des dimensions contrôlées : par exemple, marcher plein sud pendant dix pas, puis tourner à droite en plein coucher du solstice d'hiver, etc. Un plan de base peut servir de mémo pour une telle action. Comme vous vous en rendez compte, nous som-mes loin de la gravure par laser embarqué à bord d'un astronef. Cette liste de méthodes est, bien entendu, parfaite-ment incomplète, tant s'en faut, mais notre but n'est pas de les recenser, tout juste de fixer quel-ques idées. Nous sommes pourtant persuadés que la photographie aérienne sera d'un grand secours dans l'élucidation des figures ce Nazca, pour au-tant que des prises de vue sérieuses soient entre-prises telles l'orthophotographie ou encore la sté-réophotogrammétrie. Dans l'état actuel de nos connaissances du site, il est inutile de s'aventurer à émettre des solutions. Déjà certains s'en mordent les doigts.

ROBERT DEHON (Réf. : « EROS Data Carter », Sioux Falls, South Dakota 57198 ; photos consul tées : 81501142925A000-5 et 81645142555A000-5.)

Comment construire une spirale en partant des trois sommets d'un triangle isocèle. A gauche, une tentative de reconstitution sur le terrain à Nazca avec des unités de longueur de 32,5 cm détermi-nées par Maria Reiche.

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Le bestiaire de Nazca. Nous n'avons pas repris sur nos cartes tous les géoglyphes de la pampa, il y en a trop, et je me limiterai ici aux plus importants (pour un inventaire complet je vous renvoie au magnifique ouvrage illustré « Peruvian Ground Drawings »). Les oi-seaux dominent, tant par leur nombre (dix-huit au total) que par leur élégant et curieux graphisme stylisé et par leurs dimensions. Le plus remarqua-ble est sans conteste l'oiseau-frégate, avec ses 135 mètres de long et 120 mètres d'envergure, à l'extrémité ouest du grand quadrilatère de 850 mètres auquel il est d'ailleurs relié. On a pu, ainsi que pour d'autres dessins, retrouver avec exacti-tude les différents arcs de cercles qui composent la tête et les articulations des pattes qui sont par ailleurs fortement exagérées. Cette recherche fit apparaître des arcs semblables fréquemment utili-sés. A 6 km au sud de Palpa se trouve un autre volatile également appelé oiseau-frégate, mesu-rant 135 mètres — est-ce un hasard ? — et un troisième de 53 mètres est dessiné dans la pampa Jumana-Colorada. Cependant ces deux derniers oiseaux me semblent plutôt d'une autre espèce : celui de 135 mètres a un bec, des ailes et une queue très différentes ; le dernier est encore plus

dissemblable. N'oublions pas non plus un magnifi-que colibri de 96 mètres (fig. 8) dont le bec se termine dans sept sillons parallèles de 500 mètres chacun, et le plus curieux, l'oiseau-serpent de 280 mètres, au cou démesurément étiré zigzagant jusqu'à la tête munie d'un bec manifestement trop long aussi (fig. 21) ; le plus grand enfin de 300 mètres, le « guano bird », associé à la piste de 800 mètres. La gent volatile compte quelques autres représentants, plus petits et d'allure plus primitive. La plus célèbre figure de Nazca, une splendide araignée, se trouve — mais je devrais plutôt dire ce qu'il en reste ! — à deux pas du quadrilatère géant. C'est une riniculei de la jungle amazonien-ne dont la taille réelle est six millimètres et qui a une étrange particularité. II faut d'abord savoir que toutes les araignées ont un grave problème sexuel, car les organes génitaux du mâle sont totalement séparés de l'appareil reproducteur. Le mâle se voit alors obligé de déposer sa semence sur un petit brin d'herbe. Le riniculei, et c'est un cas unique, se sert de sa troisième patte pourvue d'une petite excroissance pointue pour la copula-tion. Alors que seul un microscope permet paraît-il

9 Un enchevêtrement de lignes, de trapézoïdes, de spirales … et de traces de pneus. La photo est prise en aplomb au bord du plateau, là où passe la route panaméricaine (voir la photo générale de la page 22).

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La Pampa Jumana-Colorada, en bordure du rio Ingenio, site de concentration des pistas et des dessins. En B et D, l’important chevauchement de quadrilatères, au bord des collines (photos de la page 15). En A-C-E-F et G, les centres de dispersion des pistas.

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cette observation, l'araignée de Nazca possède bel et bien une troisième patte ainsi équipée et dont on a accentué la longueur comme pour souli-gner ce fait. Ceci suggéra à Hawkins un rapport avec un culte de la fertilité. Je signalerai en outre que du point de vue mythologique l'araignée joue un rôle extrêmement important chez plusieurs peuples précolombiens : chez les Indiens d'Améri-que du Nord et au Mexique, elle est la très véné-rée « Grand-Mère Araignée » qui apporta la lumiè-re aux hommes ; chez les Aztèques elle est le symbole du dieu des enfers et chez les Muiscas de Colombie, animal psychopompe. Enfin, les anciens Péruviens pratiquaient la divination par l'araignée, les pattes repliées signifiant un bon présage. Non loin de là se trouve un singe-araignée bien connu. Lui aussi ne se rencontre que dans la forêt amazonienne ; c'est l'ateles paviscus à la queue caractéristique. Cependant, celle-ci est ici enrou-lée à l'envers et, autre anomalie troublante, il n'a que quatre doigts à la main droite. C'est le cas également d'une sorte de gros haricot à deux mains dans lequel certains voient un plus petit primate. Cette anomalie me semble par trop gros-sière pour ne pas avoir une signification surtout

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Vingt-cinq ans séparent ces deux photos de I’araignée.

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chez des individus parfaitement capables d'obser-ver le mode de reproduction d'une toute petite araignée de six millimètres... De la base de la longue queue en spirale partent deux lignes paral-lèles (idem pour le dessin d'un chien — voir fig. 4) qui sont aussi pour Hawkins une allusion à un culte de la fertilité (3). Chez les Aztèques et les Mayas, le singe est associé au soleil et plusieurs codex le représentent comme le jumeau du dieu de la mort. II symbolise le ciel nocturne et ce qui est sacrifié à l'aube pour le retour du soleil. Chez d'autres Indiens il est parfois le héros civilisateur. Lorsque la route panaméricaine fut tracée dans la pampa, plusieurs géoglyphes furent défigurés car les ouvriers ne les virent pas. C'est le cas, notam-ment, d'un lézard de 188 mètres qui depuis fut très endommagé par les manœuvres d'une colon-ne armée. Tenu par la place je ne peux parler des autres géoglyphes ; il y en a trop et nous avons même réussi à en trouver d'autres sur les photos aériennes, qui ne sont même pas inventoriés. II faut cependant dire un mot des représentations humaines qui ne se trouvent que sur les cerrros ; elles sont nettement plus petites et de facture très différente. Malhabiles et quasiment effacées, on les attribue aux « pré-Nazcas » ou à la culture de Paracas, ce qui me fait un peu sourire car ce sont les mêmes personnes qui, d'un autre côté, décla-rent que les tissus et les poteries de Paracas sont de toute beauté... S.O.S. Nazca. Vous avez déjà pu apercevoir, sur presque toutes les photos, serpentant dans tous les sens, d'in-nombrables petites traces parallèles plus claires que les géoglyphes eux-mêmes : ce sont les em-preintes à jamais inscrites dans les pampas de véhicules automobiles en tous genres, camions, jeeps, voitures. A plusieurs endroits la fréquence de passage est telle qu'il se forment de véritables pistes, mais ô combien différentes des pistas de Nazca. Les ravages sont dramatiques et sans rémission. Les géoglyphes disparaissent un à un alors qu'ils sont demeurés intacts durant peut-être deux mille ans... Voyez l'araignée et l'oiseau-frégate : « avant » et « après »... Ce site n'a ja-mais été protégé d'aucune manière ; il a servi de champ de manœuvres à des militaires, de terrain d'entraînement à des dune-buggies et est parcou-ru dans tous les sens par les touristes incons-cients de l'irréparable outrage. On se révolte contre l'Eglise qui fit abattre les mégalithes : leur message est perdu. On s'insurge contre les

conquérants qui incendièrent les grandes biblio-thèques : un savoir inestimable a disparu. Nous ne faisons guère mieux, Nazca en est la triste preuve scandaleuse. Chaque ligne, chaque dessin qui s'efface est une page de l'Histoire d'un peuple qu'on arrache. II faut sauver Nazca, non pas dans quelques années — il sera trop tard — mais dès à présent. Pour parer au plus pressé il faudrait pro-téger le site par des clôtures et en interdire l'en-trée aux véhicules. Ceinturer de clôtures une zone de 50 kilomètres de longueur vous parait irréalisa-ble ? Soyez convaincu que si Nazca était une zone militaire, il y a longtemps que cela eût été fait... Alors, qu'attend-on ? Souvenez-vous du sauvetage d'Abou-Simbel ; nous sommes donc encore capables d'entreprendre des réalisations grandioses pour sauvegarder un prestigieux pas-sé. Nazca n'exige pas de tels moyens spectaculai-res et ruineux. Je sais, notre voix est faible et ne porte pas bien loin et sans doute, me dira-t-on, suis-je en train de prêcher dans la pampa ? Mais qui sait ? KADATH est lue par la presse et c'est à elle que j'adresse ces lignes ; peut-être qu'une campagne d'information réussirait à sensibiliser ceux pour qui l'Histoire de l'homme et ses réalisa-tions merveilleuses ont encore un sens ? Et peut-être au bout du chemin l'Unesco finirait-elle par entendre l'appel ? Aujourd'hui encore, il n'y a qu'une seule personne qui se bat depuis 1941 pour tenter de comprendre et surtout de sauvegar-der Nazca, mais elle est à présent bien lasse. Elle a 72 ans, elle s'appelle Maria Reiche. Elle a sauvé Nazca d'un projet d'irrigation visant la pampa de San Jose. C'est à elle que modestement nous dédions ce numéro.

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(3) Apportant de l'eau au moulin de Hawkins en ce qui concerne cette hypothèse, j'ajouterai que la poche représentée sous le cou des oiseaux-frégates, ne se gonfle qu'à la saison des amours

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La vieille dame du désert. Maria Reiche est diplômée en mathématiques de la Technische Hochschule Dresden de l'Université de Hambourg et en astronomie de l'Université de Leipzig. Elle s'établit au Pérou en 1932 où suite à la lecture de l'article de I’astronome Rolf Müller sur les intihuatanas (observatoires solaires) du Pérou ancien elle se passionne pour le sujet et se met à l'étudier. Lorsque Paul Kosok fut obligé de quitter Nazca en 1941, après avoir établi les pre-miers relevés aériens, il confia les documents à Maria Reiche qui dressa les premières cartes de travail. Elle visite les lieux durant la période du solstice d'été en décembre 1941 et confirme la direction solsticiale de certaines lignes. Elle re-tourne à Nazca — car elle vit à Lima — pour l'équinoxe de septembre et les solstices de juin et de décembre 1946. Depuis cette période. Maria Reiche consacre sa vie entière à l'étude de Nazca et dans des conditions souvent pénibles. Au début elle bénéficia d'une aide précieuse qui devait lui permettre de rassembler les données du problè-me. Elle reçoit quelques petites subventions pour ses travaux grâce à l'obligeance de l'Escuela de Altos Estudios, du Ministère de l'Education, de la Wenner-Green Foundation et de la Deutsche Forschungsgemeinschaft. Et grâce aux propriétai-res de l'hacienda San Pablo elle peut s'établir dans une maisonnette à proximité des géogly-phes. Une aide lui est également apportée par le Servicio Aerofotografico Nacional du Pérou (SAN) ; en effet, le recensement des premières figures découvertes exige des photographies pri-ses à la verticale. Pour cela il fallait un hélicoptère qui lui fut prêté la première fois par la Wenner-Green Foundation. Maria Reiche, suspendue à l'appareil, exécuta elle-même les prises de vues. Elle en réalisa d'autres lors d'un vol depuis Arequi-pa jusque Lima, ensuite depuis un avion privé appartenant à Gonzalo del Solor qui découvrit quelques géoglyphes. Enfin la SAN s'intéressa à ses travaux et le général Vargas Prada mit à sa disposition durant une semaine un hélicoptère militaire équipé d'une caméra automatique. Cette longue série de photos permit de repérer et d'identifier une multitude de détails. Depuis ce moment, inlassablement Maria Reiche reporte tous les renseignements sur des cartes, parcourt, explore chaque centimètre carré des plateaux, mesurant chaque géoglyphe, relevant toutes les orientations, et restaure lorsque cela est possible les figures endommagées. Les premières publications de ses travaux amenèrent des visi-teurs à Nazca et les dégâts commencèrent. De-puis, et surtout en raison du tourisme qui s'est développé, ils ne cessent de s'aggraver. II y a quelque temps, le gouvernement péruvien avait approuvé le projet d'une tour qui aurait permis aux visiteurs de contempler les géoglyphes sur un assez vaste périmètre. Les travaux avaient timide-

ment commencé et puis soudain, plus rien. Actuel-lement, Maria Reiche démarche, frappant à la porte de chaque ministère, mais rien n'y fait. Et pendant ce temps le message de Nazca s'efface inexorablement. Lorsqu'elle en a l'occasion, elle poursuit ses études sur le terrain, logeant la nuit sur la pampa, près de son camion, dans un som-maire abri de bâches en plastique ; et, alors que naguère elle pilotait volontiers les visiteurs, elle tente plutôt à présent de les écarter des lieux pour sauver ce qu'il reste à sauver. Les exemples de ceux qui ont sacrifié leur vie pour ressusciter un peu du passé de l'homme sont légion. Hélas bien souvent leur mérite est reconnu à titre posthume. A quand le Prix Nobel d'archéologie ? La « madre de la pampa » comme on appelle déjà Maria Rei-che au Pérou, me semble tout indiquée.

PATRICK FERRYN

13 Maria Reiche le long d’un des trapèzes qui se prolongent jusqu’en bordure du plateau.

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Dimanche, 5 heures du matin. Nous sommes au mois d'août. Le chauffeur de taxi est ponctuel ; les traits tirés et les yeux embués de fatigue, il nous fait monter dans une grosse voiture américaine. C'est un luxe dans ce pays où la plupart des taxis ont perdu depuis longtemps leurs phares et ailes avant, et ne sont plus que de pauvres « caisses » brinque-balantes et bariolées qui doivent rendre l'âme au moindre effort. Sous la garua, ce brouillard quasi permanent qui recouvre Lima, nous quittons le cen-tre de la ville où sont situés la plupart des hôtels. Vers 7 heures, bien qu'il n'y ait aucune circulation, nous venons à peine de quitter les faubourgs de la capitale péruvienne qui s'étend sur des dizaines de kilomètres. La panaméricaine (la seule route du pays qui soit asphaltée) déroule son long ruban monotone le long de la côte du Pacifique. Nous sommes en plein désert et de temps en temps, perçant la bruine qui n'arrête pas de tomber, on aperçoit la frange grisâtre de l'océan. Vers 10 heures, nous quittons la côte à hauteur de Pisco et de Paracas, pour rentrer à l'intérieur du pays en direction des premiers contreforts andins. A la sortie d'Ica, nous nous inquiétons pour le temps, car si la légère pluie a cessé, le ciel reste couvert et le plafond est très bas. Comme nous devons survoler Nazca, nous sommes particulière-ment impatients de voir enfin disparaître ces nua-ges. Brusquement, comme notre chauffeur optimis-te ne cessait de nous le promettre, le ciel bleu ap-paraît et dès que nous grimpons de quelques cen-taines de mètres en direction de Nazca, un soleil de plomb nous oblige à nous dépouiller des vêtements chauds du matin. Nous n'avons pas quitté le désert depuis Lima. De temps en temps, là où coule un petit cours d'eau, il est entrecoupé de bandes verdoyantes de quel-ques kilomètres de large. Le relief devient de plus en plus accentué et au loin se dessinent déjà quel-ques sommets des Andes. Soudain au sommet d'une de ces collines un peu plus élevées que les autres, apparaît un vaste plateau désertique suivi d'une vallée fertile : Nazca... A quelques kilomètres de la ville, j'avais repéré sur la carte un endroit où des pistes coupaient la route panaméricaine. Un panneau « zone archéologique » récemment placé nous évite de chercher longtemps cette portion de terrain. Et c'est alors notre premier choc : les lignes sont là, figées dans le sable du désert de pierrail-les, immuables. Celles que nous pouvons observer n'ont que quelques dizaines de centimètres de large. Elles ont été gravées dans le sol en « balayant » les petites pierres et en laissant appa-raître une bande de sable clair à nu. Au retour nous nous arrêterons à d'autres endroits où les pistes sont plus larges : cette fois il s'agit de véritables petits fossés soulignés de chaque côté par un re-bord formé des pierres enlevées du centre de la trace. II est environ 11 h 30 quand nous entrons dans Nazca, coquet village verdoyant entouré de champs de coton et diverses plantations. Ce fut notre seconde surprise : nous croyions trouver

quelques misérables maisons de terre séchée per-dues dans le désert et nous entrons dans une peti-te ville qui respire la propreté (toute relative, mais réelle après ce que j'avais rencontré en d'autres endroits du Pérou) et une certaine richesse. Les maisons sont construites en dur, un luxe, et le seul hôtel est ultramoderne (piscine, bar, etc ...). C'est là que nous avons rendez-vous avec un pilote de l'aéroclub local. Après avoir fixé le montant du vol, nous ne perdons pas une seconde de plus et nous nous dirigeons vers « l'aéroport », situé à un kilo-mètre à l'ouest de la ville. L'avion, un Cessna, nous attend au bout de la vallée, à la limite de l'oasis et du désert. La piste est une surface plus ou moins plane, recouverte de pierres parfois grosses com-me le poing, et elle semble avoir été installée pour prouver que des avions pourraient effectivement atterrir sur les longues pistas des plateaux de Naz-ca et de Palpa, à quelques kilomètres plus au nord... II est un peu plus de midi quand le moteur est lancé. S'élançant sur cette piste caillouteuse, brinquebalant de partout, le Cessna s'arrache au sol. Avec le pilote, nous sommes trois personnes à bord. Appareils photographiques chargés et armés, les poches bourrées de films vierges, nous mon-tons rapidement jusqu'à mille mètres. Devant nous, le plateau de Nazca s'étend jusqu'à quelques colli-nes toutes proches. Des sortes de torrents assé-chés sillonnent le désert ; ils descendent des colli-nes et coulent vers l'océan. Ce réseau dense strie littéralement toute cette partie du plateau et il ne fait pas de doute qu'il s'agit d'anciens lits de cours d'eau. Ultime image d'un déluge très ancien car plus tard nous constaterons que certaines pistas sont gravées par-dessus ces lits asséchés. De plus, depuis des siècles (sinon plus) plus une gout-te d'eau n'est tombée sur la région. Soudain notre pilote s'exclame : « The Man ! », et il pointe l'index vers la droite, en direction d'une colline basse que nous allons survoler. Nous ne comprenons pas immédiatement car il s'exprime avec un accent horrible. Mais effectivement, au fur et à mesure que nous approchons, nous distinguons maintenant une silhouette anthropomorphe gravée sur le versant de la colline. Mais toujours aucune piste ni figure. Rien que le désert pâle, uniforme, sans vie... Et puis une ligne se dessine, deux pistes, trois, une multitude de traits, de trapèzes, de triangles s'éta-lent au-dessous de nous. Spectacle sublime, indes-criptible et décevant tout à la fois. Sublime et indes-criptible, car cela ne ressemble en rien à toutes les photographies que j'avais pu voir jusqu'à présent. Décevant, parce que ces mêmes photographies m'avaient laissé entrevoir des pistas se détachant nettement sur le désert alors qu'en réalité, nous avons de la peine à les distinguer sur le sable, lé-gèrement plus claires que le reste du sol et souli-gnées par un fin trait grisâtre. Nous mitraillons litté-ralement ce chaos de lignes qui se chevauchent, s'entrecroisent, convergent vers certains points privilégiés, des tracés étroits, d'autres très larges, certains qui s'arrêtent après quelques dizaines de mètres, d'autres qui filent droit devant eux, en

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passant par-dessus des collines, obstacles insigni-fiants pour ces géométries d'un autre monde... Car nous sommes dans un autre monde, loin du Pérou, loin de la Terre, nous survolons une région lunaire, d'une pâleur sinistre. Dans la solitude de ce désert unique, le bruit du moteur nous paraît être une musique cosmique et les commentaires en (mauvais) anglais de notre pilote péruvien, autant d'instructions d'astronautes prêts à se poser sur une planète inconnue. Après les pistas, d'étranges figures sont apparues, un singe, un condor, un colibri, une fleur, une araignée, etc... A peine visi-bles, soulignées d'un contour clair, nous les survo-lons plusieurs fois. Ces figures sont recouvertes, pour la plupart, de traces sinueuses, parallèles, qui y dessinent des cercles concentriques. Nous comprendrons plus tard, quand nous pourrons les observer au sol, que ces traces plus visibles que les figures stylisées, ne sont rien d'autre que les empreintes laissées par les jeeps des vandales qui viennent s'entraîner à un quelconque auto cross sur le plateau de Nazca. Irréparable et ignominieuse attitude. La fameuse araignée représentée par tous les ouvrages traitant

de Nazca a quasiment disparu, effacée, recouverte par une multitude de traces de pneus. L'un des sites les plus grandioses du monde se meurt si l'Etat péruvien ne se décide pas à prendre des dispositions en sa faveur. Déjà notre appareil s'éloigne et la bande verte de l'oasis de Nazca nous rappelle que nous n'avons pas quitté la Terre. Nous avons pris presque deux cents photographies et pourtant il nous semble que nous avons décollé il y a cinq minutes à peine (notre vol a en fait duré une demi-heure). Nous nous posons sur la petite piste de l'aéroclub de Nazca dans un bruit infernal et un nuage de pous-sière. Nous sommes sans réaction… Je viens de survoler un territoire inconnu, une tache blanche de l'Histoire du monde. Une fois n'est pas coutume, toutes les descriptions des figures et pis-tes de Nazca que j'ai pu lire jusqu'à aujourd'hui sont en-deçà de la vérité. C'est plus beau, plus étrange, plus sinistre que tout ce que j'avais pu imaginer. Et pour moi, l'énigme reste plus entière que jamais...

MICHEL BOUGARD

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Cette dernière caractérise bien souvent une culture donnée ; les archéologues ont donc mis au point une classification basée essentiellement sur la céramique. Ce classement comprend sept grandes époques, qui sont : 1) l'époque précéra-mique ; 2) l'époque initiale de la céramique ; 3) l'époque évolutive ou de formation ; 4) l'époque de l'apogée ; 5) l'époque de la fusion ; 6) l'épo-que impériale ; 7) l'époque de la conquête. Cha-que époque est encore divisée en trois périodes : initiale, moyenne et finale. Certains voudraient même ne plus situer les différentes cultures que par rapport à cette classification. II s'agit d'une position d'avant-garde, avec ses qualités et ses défauts. Dans le cadre de cet exposé, nous limi-terons les époques ci-dessus au seul domaine de la poterie, bien que dans le cas précis de la cultu-re nazca, la céramique soit d'une importance particulière. Premières cultures. Le climat de la région de Nazca est assez peu propice au développement de brillantes civilisa-tions ; bon nombre de rivières sont semi-permanentes et certaines n'atteignent jamais l'océan. Particulièrement, la région côtière du littoral Pacifique est désertique. Nul doute cepen-dant que cette partie du Pérou ait été peuplée très tôt. Ainsi, on a retrouvé, près des embouchu-res des cours d'eau, de grands amas de coquilla-ges, parfois hauts de cinquante mètres. Dans les parties basses des vallées devait vivre, déjà aux environs du huitième millénaire avant Jésus-Christ, une population de chasseurs-pêcheurs que l'on commence seulement à découvrir. Un archéologue français, Frédéric Engel, a en effet retrouvé des villages semi-souterrains de ces pécheurs. Ainsi, à Cabezas Larfas, les fouilles ont permis de mettre à jour des maisons en pier-re, avec patio central, plate-formes à dormir et silos souterrains. Il est probable que ces popula-tions se nourrissaient essentiellement des pro-duits de la mer. Leurs affinités avec le milieu ma-rin sont attestées entre autres par le fait que bon

nombre d'armes furent fabriquées à partir d'os d'otarie, de baleine, de marsouin et d'autres ani-maux aquatiques. II existait une agriculture primi-tive, certainement marginale. L'art du textile ne leur était pas inconnu, puisqu'on a retrouvé de nombreux tissus, qui ont été datés de 2500 avant J.-C., approximativement. Nous passerons sur les premières cultures de la céramique, que nous aurons l'occasion de citer incidemment en cours d'étude. Au début de notre ère, c'est-à-dire aux environs du quatrième siècle après J.-C., se dé-veloppa, entre les vallées de Nazca et d'Ica, une culture assez particulière, que l'on désigne par le simple nom de « nazca », et qui fait suite aux cultures paracas. Plusieurs sites typiquement nazcas ont été mis à jour, entre autres Cahuachi, à six kilomètres des pampas à dessins. Qualifiée de « capitale des Nazcas », la ville a été longue-ment fouillée par W.H. Strong en 1953 d'abord, puis par différentes missions américaines. Ces recherches ont permis de découvrir quantité de céramiques, textiles, flèches. D'autres cités mor-tes, des palais, des forteresses, des temples ont été désensablés en partie, à Huayuri, Villacuri, Tajaraca, pour ne citer que quelques noms. II est certain cependant que beaucoup de stations sont encore à découvrir. Le nazca est en fart surtout caractérisé par ses céramiques et par ses textiles (le climat sec de cette région a d'ailleurs permis que ces objets nous parviennent dans un état de conservation remarquable). Dès lors, ce sont les arts de la céramique et du textile qui forment la base de l'étude de la culture nazca, et c'est à travers eux que, le plus souvent, nous nous ferons une idée de ce qu'a pu être cette culture. Remarquons avant de poursuivre que l'art de Nazca n'est pas vraiment original. II découle logiquement de tout ce qui l'a précédé, et fait partie de l'évolution ar-tistique du sud du Pérou. On peut établir, par une foule de détails, la parenté certaine existant entre les cultures paracas (Paracas Cavernas, Paracas Pinilla, Paracas Necropolis) et les cultures naz-cas. C'est ainsi que, par exemple, on retrouve

Culture nazca, affirment les archéologues Le propos de cet article est de nous faire découvrir — assez succinctement il est vrai — la culture nazca, que l'on a tendance à négliger lorsqu'on aborde l'étude du site et des dessins qui l'on rendu célèbre. Que le peuple nazca soit ou non l'auteur de ces fantastiques fresques, il paraît cependant du plus élémentaire esprit scientifique d'étudier toutes les composantes d'un problème donné. II nous sera parfois difficile, et même impossible de ne pas déborder, à un moment ou l'autre, du sujet lui-même, et nous serons dans l'obligation de faire référence à d'autres cultures péruviennes qui, dans de nombreux cas, s'influencent et s'interpénètrent. Nous prierons alors le lecteur de se reporter au « Petit memento des civilisations préco-lombiennes ». paru dans le numéro 1 de KADATH. Nous signalerons encore qu'une des notions les plus importantes de l'étude de l'histoire du Pérou est l'évolution de la céramique.

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aux Paracas et aux Nazcas des vases à double goulot et à pont. Ceci étant dit, nous pouvons nous pencher sur les produits de cette culture si mal connue. L'art de Nazca. L'art de Nazca, qui se développa pendant long-temps d'une manière locale, évolua bien entendu au fil du temps. C'est ainsi que les chercheurs ont été amenés à distinguer, sur base des styles de poteries, un Nazca A, qui correspond à la période moyenne de l'époque de l'apogée, et un Nazca B, qui caractérise l'art de toute la côte sud pendant la période finale de cette même époque. On peut estimer que le nazca disparut, en temps que culture propre, vers 800 après J.-C. Certains archéologues veulent même voir, dans cette évo-lution, un style de transition Nazca X entre Nazca A et B, et un style tardif Nazca Y, postérieur au Nazca B. Nous nous limiterons pour notre part aux seuls Nazca A et B (1). NAZCA A. L'artisan semble avoir attaché assez peu d'importance au modelage (c'est d'ailleurs une constante de l'art de la côte sud que de s'ex-primer essentiellement par la peinture). Comme partout au Pérou, on trouve des vases anthropo-morphes (notamment en forme de tête) et zoo-morphes, mais souvent, les poteries sont des récipients soit ouverts (allongés, plats ou tronco-niques), soit fermés, surmontés de deux becs parallèles reliés par un petit pont. La décoration de ces vases est de toute beauté. Certaines po-teries sont ornées de motifs géométriques sim-ples, où le rouge, le noir et le crème dominent. Mais dans la majorité des cas, nous nous trou-vons en présence d'une peinture polychrome remarquable. Les sujets, très finement représen-tés, sont variés. C'est ainsi que l'on retrouve la plupart des poissons qui constituent la faune marine de cette région, des reptiles, des oiseaux — vencejo (sorte de martinet), et colibri principa-lement —, des mammifères. D'autres tableaux nous montrent des hommes cultivant diverses plantes (haricot, concombre, sapotier, maïs, aji...), des guerriers en armes, des pêcheurs, bref, des scènes de la vie quotidienne. Mais l'ar-tiste de Nazca est également préoccupé de reli-gion, et les représentations mythologiques ne manquent pas. La divinité féline, généralement appelée « démon-chat »., qui se retrouve d'ail-leurs chez d'autres peuples du Pérou comme, derechef, les Paracas, est ici originale. Le dieu est doté d'une longue queue se terminant par une tête stylisée, affublée des moustaches du félin, parfois d'une sorte de masque d'or. La divi-

nité a, comme chez les Mochicas, le don d'ubi-quité, et se transforme tour à tour en oiseau ou en mille-pattes. Aux côtés du dieu-félin viennent prendre place des démons grimaçants et mena-çants, anthropomorphes et zoomorphes (entre autres le cachalot-démon). Notons enfin que, d'une part, les motifs sont délimités par un trait au pinceau et non plus, comme aux Paracas, par une ligne incisée et que, d'autre part, la peinture est appliquée sur les vases avant cuisson ; ce sont certainement deux importantes caractéristi-ques techniques de cette évolution dont nous avons parlé précédemment. NAZCA B. En fait, il s'agit d'un style déjà déca-dent, moins pur que celui de Nazca A, et c'est pourquoi nous le croyons postérieur à ce dernier. Influencé par l'art chanca, le Nazca B nous offre des vases-portraits aux visages jaunes et aux yeux semi-circulaires, des récipients tronconi-ques, des vases à double bec et à pont. Les va-ses en forme de tête diminuent en nombre par rapport à la période précédente. Beaucoup de poteries en cloche ou globulaires sont surmon-tées d'un large goulot. Mais c'est dans l'ornemen-tation que l'évolution est la plus nette : les motifs se compliquent par l'adjonction de lignes se ter-minant par un crochet, ou de traits en forme de harpons à pointes multiples. Le Nazca B emprun-te la technique des représentations zoomorphes et anthropomorphes des Chancas. Ces représen-

17 Le dieu-félin, tenant des fruits à la main (Nazca A).

(1) Pour certains chercheurs, le Nazca B précé-derait le Nazca A. II faut dire qu'aucune étude stratigraphique sérieuse n'a été faite à ce jour.

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tations sont bien sûr toujours en partie religieu-ses, mais elles peuvent présenter un caractère abstrait purement décoratif, ou bien se limiter à des sujets humains ou animaux. Le dieu-félin est toujours présent, mais il est plus stylisé, avec les traits et crochets décrits plus haut. II porte encore ses moustaches et son masque d'or. LES TEXTILES. L'art textile de Nazca est, ainsi que celui de la céramique, très développé. Les matériaux de base sont le coton (qui fut, contrai-rement aux régions septentrionales du Pérou, cultivé très tôt) provenant de la côte, et les laines du lama, de l'alpaga et de la vigogne. Remar-quons que, ces animaux vivant dans les régions d'altitude, il devait exister, entre les peuples du littoral et ceux de l'arrière-pays tout un système d'échanges commerciaux. Ce sont surtout la ri-chesse et la variété des couleurs qui frappent au premier examen. Sept couleurs primaires, quel-que cent quatre-vingt-dix nuances de tons... Cer-taines sont peut-être le résultat d'une perte de fraîcheur bien compréhensible ; dans la majorité des cas cependant, il est facile de constater que les subtils dégradés furent voulus par les arti-sans. Vraiment, il s'agit là d'un travail extrême-ment élaboré, et d'une richesse telle que l'on peut dire des tissus de Nazca qu'ils sont uniques au monde. Les sujets sont comparables à ceux qui ornent les céramiques : figures anthropomor-phes, oiseaux, fleurs, poissons... Remarquons cependant que, contrairement à la céramique, il est très difficile, et même fort aléatoire de vouloir classer les textiles en styles Nazca A et B ; tout au plus peut-on associer quelques tissus aux poteries du Nazca A. L'ART PLUMAIRE. Egalement de toute beauté,

l'art plumaire de Nazca est considéré par bon nombre de spécialistes comme un des grands moments de l'art américain :les Nazcas confec-tionnèrent de magnifiques tuniques, couronnes et éventails faits de plumes multicolores de perro-quet et de colibri. Quelques autres précisions. LA METALLURGIE. Le travail des métaux est, semble-t-il, plus primitif que dans le nord du Pé-rou (2). Certains objets sont mal laminés, le re-poussé est parfois grossier. On trouve cependant des pièces de belle facture, entre autres des or-nements de nez, des masques... II ne s'agit en tout cas pas d'un art majeur de cette culture. LE CULTE DES MORTS. On a découvert des tombes dans les sables secs le long des rives des cours d'eau. Ces tombes, dont la profondeur varie de 0,50 à 4,50 mètres, se présentent sous forme d'une chambre, ronde ou carrée, à laquelle on accède par un puits. Les morts y reposent en position fléchie ; autour d'eux sont disposés di-vers objets (céramiques, haches,...). L'HOMME DE LA RUE. On est plus ou moins bien renseigné à propos du citoyen moyen de Nazca. Nous l'avons déjà dit, la culture nazca est surtout connue à travers sa céramique, et celle-ci ne présente pas de témoignages ethnographi-ques vraiment éloquents, ainsi que le souligne F. Kauffmann Doig. Les peintures sur poterie nous montrent cependant bon nombre d'aspects de la vie courante : paysans et pêcheurs au travail,

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(2) C’est d’ailleurs une constance au Pérou, le sud semble avoir toujours eu quelque retard sur le nord.

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prêtres et guerriers. A propos de ces derniers, on peut penser que le peuple de Nazca n'était pas particulièrement belliqueux. Et s'il est vrai qu'il eut à se battre pour défendre son territoire, ainsi que le prouvent les nombreuses armes (massues, haches, flèches...) qui ont été retrouvées, il n'était pas un conquérant comme l'Inca. ET L'ECRITURE ? Nous touchons là un point particulièrement délicat et controversé. Il existe en effet une théorie, âprement défendue par cer-tains spécialistes comme Rafael Lance Hoyle, selon laquelle les Mochicas avaient mis au point un système d'écriture assez particulier, qui consistait à graver des idéogrammes (points, lignes,...) sur des haricots. II s'agissait de messa-ges qui étaient transmis par courriers rapides. Nous ne pouvons qu'émettre les plus vives réser-ves vis-à-vis de cette hypothèse. II est vrai que la solution présentait un grand avantage : à l'instar de nos modernes espions, le guerrier capturé par l'ennemi pouvait, sans danger d'indigestion, ava-ler son message ou ses instructions. Signalons en tout cas que ce « système d'écriture » se re-trouve sur les poteries de Nazca. Ce qu'il fallait démontrer. Cette brève étude de la culture de Nazca (nous ne ferons plus la distinction entre les Nazca A et B) nous parait d'ores et déjà suffisante pour affir-mer que tout l'art est, indépendamment des su-jets choisis, caractérisé par la finesse, la délica-tesse de sa décoration. L'art monumental n'existe pas à Nazca. II est dès lors difficile d'attribuer avec certitude à ce peuple les dessins gigantes-ques de la pampa, ainsi que le font beaucoup d'archéologues. On peut cependant faire un cer-tain rapprochement entre les figures géométri-ques de l'art nazca et celles inscrites sur le sol de la région. En ce qui concerne les représentations zoomorphes, on peut établir également des pa-rallèles. Notons par exemple l'existence, à six kilomètres au nord-ouest de Nazca, d'une baleine ou d'un cachalot — d'une soixantaine de mètres de long. Ce genre de représentation se retrouve,

nous l'avons vu, au Nazca A (cachalot-démon). De même, le colibri semble être un thème com-mun. Nous ne croyons pas pouvoir trancher une question aussi épineuse, mais nous étonnons cependant que ces artistes de Nazca, si méticu-leux, spécialistes de la miniature, aient eu l'envie de se recycler dans un style radicalement opposé à leur tradition. La relation, si souvent établie entre la culture nazca et les dessins de la pampa, ne nous semble pas une évidence. Nous admet-trions plus volontiers une source d'inspiration commune, voire un échange d'idées entre les peuples nazcas et les dessinateurs des méga-fresques.

JACQUES GOSSART

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Le cachalot, sur les poteries et sur la pampa.

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ARCHEOASTRONOMIE

Voici à peine quarante ans, on ignorait encore jusqu'à l'existence des figures sur la pampa de Nazca. A l'époque de la Conquista, les colons espagnols suivaient les anciennes routes incas, et ne virent rien. Un soldat, Francisco Hernandez, fut stationné durant un mois à Nazca même : son journal, axé pourtant sur des caractéristiques de terrain et d'histoire naturelle, ne signale aucune marque au sol. Le premier homme à le faire fut un certain George R. Johnson, en 1930. Mais la découverte resta confidentielle. Tout comme cel-le de Toribio Mejia Xesspe, du Museo de Antro-pologia de Lima, lequel avait observé, en 1927, certaines lignes droites partant de la route, au moment où il accompagnait une expédition de J.C. Tello entre les rio Ingenio et Copara. II se souvint d'un passage de la « Cronica del Peru » de Cieza de Leon (1553), faisant allusion à « des signaux en quelques parties du désert voisin ». Retourné seul en 1939, il fut le véritable décou-vreur des lignes de Nazca, dont il suggéra qu'el-les étaient des routes cérémonielles incas. On en était là, lorsque Paul Kosok, historien à la Long Island University de New York, se rendit au Pé-rou, pour le compte de l'American Géographie Society, afin d'y étudier les antiques systèmes d'irrigation des Indiens. Paul Kosok et la Fawcett Line (1940). Des rumeurs circulaient à ce moment, émises par les aviateurs de la société péruvienne de trans-ports aériens, la Fawcett Line. Elles faisaient allusion à de gigantesques dessins dans la pam-pa de l'altiplano méridional, à 400 kilomètres au sud de Lima. Ces dessins n'avaient pour eux de sens qu'en tant que points de repère dans leur route de vol. Dans les milieux aéronautiques, on plaisantait en parlant — déjà ! — de « pistes d'at-terrissage préhistoriques », et en les comparant aux canaux de Mars. Intrigué, Paul Kosok fit le tour du propriétaire. Désireux d'en savoir plus, il se plongea dans la lecture des anciennes chroniques, mais en vain. Peine perdue aussi de

s'adresser aux autochtones, qui n'avaient plus guère le souvenir de ces « routes incas ». Pour-tant, il était évident que le symbolisme des énor-mes figures devait être recherché dans l'antique mythologie indienne. Incompétent pour résoudre cette partie du mystère, Kosok se tourna vers les lignes, les fameuses pistas. Aucune ne mène à des ruines, les croisements ont tout I’air d'être accidentels, elles ne peuvent donc guère avoir servi de voie de communication. Aucun rapport avec l'irrigation non plus : il eut fallu, dans cer-tains cas, que l'eau remonte à flanc de monta-gne ! Ce n'est qu'au cours de sa seconde expédi-tion, en 1941, que Paul Kosok eut la révélation de I’aspect astronomique de la question.

LE PLUS GRAND LIVRE D’ASTRONOMIE DU MONDE ?

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Le solstice de Paul Kosock

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C’était le 22 juin, jour du solstice d'hiver dans I'hémisphère sud. Kosok se trouvait au centre d'une ligne, à l'endroit où un faisceau de rayons s'ouvrait en arc de cercle vers l'horizon. Et là, dans le prolongement d'un des rayons, il assista au coucher du soleil. Pour lui, la clé du plateau résidait dans ce « diamètre du solstice », point de départ d'un gigantesque calendrier. La lecture fut corrigée avec l'aide de données fournies par le Huancayo Magnetic Observatory. On calcula par la suite que le soleil du solstice d'hiver devait se coucher exactement dans l'axe à une époque située entre le ler et le Vle siècle avant notre ère ; le dernier point de contact avec la ligne devait se situer entre 350 et 950 après J.-C. Avec l'aide des aviateurs de la Fawcett Line, l'historien entre-prit une série de reconnaissances aériennes très précises, afin de vérifier son hypothèse. II appa-rut que les plateaux comportaient au moins dou-ze de ces systèmes linéaires astronomiques ; certaines lignes purent encore être identifiées comme solsticiales, car des alignements se répé-taient en divers endroits ; d'autres lignes sem-blaient marquer les équinoxes. Pour Paul Kosok, les tertres étaient des points d'observation astronomique. Toutes ces lignes auraient eu pour but de marquer, par leur relation avec les astres, l'alternance des saisons. Il croyait que pouvoir prédire l'avènement de la saison des pluies, devait être essentiel pour sa-voir quand la pampa aride se transformerait en une fertile terre de labour. Quand on sait qu'il pleut, dit-on, une demi-heure tous les deux ans à Nazca, on comprend qu'on puisse émettre des réserves. Pour le reste, il accordait une valeur totémique, puis astrologique, aux dessins. Maria Reiche et le Servicio Aerofotogratico National (1944 et 1947). L'historien devait reprendre ses cours à Long Island. Heureusement pour lui, et surtout pour l'avenir de Nazca, il rencontra à Lima une docto-resse allemande, spécialisée dans l'astronomie et les mathématiques. Munie d'une bourse de la Escuela de Altos Estudios de l'Université San Marcos, elle s'intéressait plus particulièrement à l'astronomie des anciens Péruviens. Piquée au vif, elle se mit immédiatement au travail. On connaît la suite. Aidée par la SAN (Servicio Aero-fotografico National), Maria Reiche allait dispo-ser, dès 1944, d'un premier relevé, complété en 1947. Dès ce moment, une douzaine de lignes solsticiales étaient confirmées. Pour elle, l'idée du calendrier astronomique se confirmait ; à ceci, elle apporte plusieurs arguments : — il y a incontestablement un niveau d'organisa-

tion dans les lignes : le nombre de centres de radiations est limité, et les lignes isolées sont relativement rares ;

Détail de la planche de la page 10, pris entre les numéros 18 et 20. Les lignes indiquées par une flèche pourraient être des orientations lunaires.

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Une vue aérienne du bord du plateau, là où le longue la route panaméricaine. En double page, gros-plan d’une série de pistes et de triangles ; au bas de la photo, à gauche, une des pistas est constellée de petits tas de cailloux. Sur la page ci-contre, la patte d’un oiseau-frégate vue du sol.

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— certains dessins ne sont vraiment visibles qu'aux levers et couchers de soleil, au moment où les ombres sont les plus allongées ;

— la façon dont sont signalés des points de l'hori-zon est trop répétée pour qu'il s'agisse d'une coïncidence ; et plus particulièrement lorsque le point visé est une dépression entre deux lignes d'horizon situées à des distances diffé-rentes ;

— le parallélisme sur de très longues distances ; — les grandes fêtes religieuses du Pérou tom-

baient aux équinoxes et aux solstices. Maria Reiche découvrit ainsi de nombreuses indi-cations concernant les levers et couchers du so-leil, de la lune, de diverses planètes et astres. II faut reconnaître — et elle le fait de bonne grâce que l'orientation des traces couvre pratiquement toutes les directions possibles ; pourtant certaines sont plus fréquentes que d'autres. Ainsi l'orienta-tion entre 68°15 et 70°10 NE, on la retrouve dans un groupe de trois grandes lignes, deux groupes de sept et onze lignes parallèles, deux grandes traces et six pistes associées, le tout s'étendant sur plus de 40 kilomètres. Deux lignes parallèles, à 640 mètres l'une de l'autre, ne divergent pas plus de 0,75 degré du méridien nord-sud ; une autre, longue de dix kilomètres, ne s'en écarte que de 25,8 minutes d'angle ; une autre encore, est d'un demi-degré à côté de la ligne est-ouest. Les lignes solsticiales et équinoxiales doivent, par la force des choses, être situées en-dedans des 33 et 34° de part et d'autre de la ligne est-ouest : au-delà, si l'astronomie il y a, cela ne peut concerner que les étoiles ; et là encore, il faut tenir compte de la dérive au cours des siècles. On imagine aisément l'imbroglio. Pourtant, un certain ordre transparaît pour ces lignes apparem-ment orientées sur les étoiles : on peut en trouver regroupées à égale distance de part et d'autre du méridien. Ici, Maria Reiche arriva à une constata-tion peut-être riche de conséquences. Des modifi-cations successives ont été apportées à certaines de ces lignes « astrales ». Des lignes presque parallèles peuvent avoir suivi les déplacements d'un astre (on sait que l'apparition d'une étoile à l'aube est une date du calendrier). Et ainsi une succession de lignes pourrait avoir abouti à créer un trapèze : certaines d'entre elles, en se basant sur l'orientation de leurs bords, signeraient une suite de 1000 ans ! Enfin, il y a aussi les connec-tions entre certaines lignes, de même que les pis-tes partant d'une figure pour se diriger vers un point de l'horizon. Ainsi, la ligne partant de la queue de l'oiseau-frégate (fig. 9) est solsticiale, tout comme celle qui prolonge la figure du pois-son-chat (fig. 6) ; la même chose en ce qui concerne le prolongement du bec de l'oiseau à tête de serpent (fig. 21). Dans ces cas, où la ligne caricature l'image, on est en droit de conclure que l'association astronomique est plus que probable.

Autre exemple frappant : la ligne soulignant l'en-vergure de l'oiseau-frégate est, elle aussi, orientée sur le solstice. Pour Maria Reiche, les dessins devaient dès lors avoir une signification proces-sionnelle, débouchant sur un rituel astronomique, en bout de piste si j'ose dire (1).

(1) Parmi les opposants à ce genre d'arguments, citons Antoon Vollemaere, que nos lecteurs connaissent maintenant : « Quelques centres sont reliés par une ligne droite : cela nous indi-que clairement qu'une interprétation solaire de ces lignes est exclue, puisqu'un grand nombre de ces lignes pointent au nord, c.-à-d. la direc-tion de la nuit. Si les centres étaient les points d'observation, on devrait retrouver quand mê-me quelques traces d'une présence régulière des prêtres-astronomes, ce qui n'est pas le cas. D'autre part, un seul point d'observation suffirait pour suivre l'évolution solaire. Pour-quoi alors se fatiguer à tracer une centaine de lignes partant d'autres centres situés à peine à trois ou quatre kilomètres de distance ? II faut ajouter qu'un horizon marqué par une crête dentelée n'est pas du tout l'idéal pour faire des observations exactes du lever ou du coucher du soleil. II est clair que parmi les centaines de lignes, quelques-unes peuvent bien coïncider avec les équinoxes ou les solstices, cela ne prouve que deux fois rien. D'ailleurs il y a toute une série de lignes parallèles qui sont vrai-ment inutiles pour l'observation du soleil. Les lignes ne peuvent servir pratiquement à rien pendant la nuit pour les observations astrono-miques, sauf — et encore — en utilisant des torches. Mais un fait curieux est à noter. Si nous comptons bien, nous avons un centre à 24 lignes, et deux autres à 12. Coïncidence ou préméditation ? »

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L’oiseau-frégate, avant...

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Les étoiles de la constellation des Pléiades bril-lent, au Pérou, comme un diadème de joyaux dans le ciel d'automne. Selon Hermann Trimborn, « elles étaient au premier plan pour tous les peu-ples péruviens ». On suppose même que pour les Chimus, par exemple, il s'agissait là du grou-pe astral dominant. Classiquement, elles sont décrites comme les Sept Sœurs, ou aussi les Sept Chevreaux. Les grandes fêtes religieuses du Pérou tombaient aux solstices et aux équi-noxes. Le 22 juin, « inti raymi », coïncidait avec l'apparition des Pléiades : dans le ciel de Nazca, elles se levaient et se couchaient près des solsti-ces. De nos jours encore, c'est le moment où on allume de grands feux aux sommets des monta-gnes, pour danser autour et par-dessus, tout comme à l'époque inca on mariait ce jour-là les vierges du Soleil. Ce marqueur commun à tout le Pérou, Maria Reiche le retrouva à Nazca : elle détermina la direction et la déclinaison par rap-port au ciel, de la plus grande figure de la pampa, le quadrilatère, et constata qu'il pouvait pointer vers les Pléiades, entre 500 et 700 de notre ère. Mais, reconnaît-elle, la figure en question pourrait aussi bien se rapporter au cours de la lune, ou encore — mais on n'en voit pas la raison — l'étoi-le principale du Scorpion ou une étoile des Gé-meaux. En appliquant cette méthode à d’autres formations remarquables, Maria Reiche chercha à obtenir des recoupements d'ordre chronologi-que. Ainsi, la longue piste du chemin vers Pu-quio : entre 500 et 1500, les bords ne peuvent avoir pointé que vers quatre étoiles de la Grande Ourse, laquelle se couchait au-dessus de la piste en question entre l'an 0 et 710 ; pour une étoile, il eût fallu deux à trois cents ans pour passer d'un bord de la piste à l'autre. Pour une autre figure, plus à l'est, entre 500 et 1500, on ne retrouve qu'une seule étoile dans cette direction (entre

500 et 780), et une autre étoile de la Grande Our-se s'y couche. Par conséquent, dit Maria Reiche, si les deux figures sont associées astronomique-ment, c'est entre 500 et 710 qu'elles pointaient vers la plus brillante des étoiles de la Grande Ourse. Le singe serait, selon elle, la représenta-tion de cette constellation (2). Gerald Hawkins et la National Geographic Society (1968). Puis, tel Zorro, Hawkins est arrivé. Professeur d'astronomie à Boston, il est aussi membre de la Smithsonian Institution. Fort de ses performances astronomiques à Stonehenge, il s'était dit que, peut-être, en d'autres lieux du globe, il retrouve-rait les mêmes préoccupations dans le chef de certaines civilisations disparues. Une équipe, partiellement financée par la National Geographic Society, avait été envoyée sur place à Nazca, pour y effectuer les relevés préliminaires : des astronomes, des ingénieurs, des géologues car-tographièrent le terrain. Par le biais de l'Institut géophysique du Pérou, ils purent bénéficier de l'aide précieuse de la SAN. Un programme pho-togrammétrique standard avait été mis au point : deux objectifs, projection stéréoscopique sur machine, cartographie. Deux questions principa-les furent posées à l'ordinateur : « Combien de lignes sont pointées sur une des dix-huit direc-tions astronomiques sélectionnées ? ». Réponse : pas plus que le hasard. Et ensuite : « Vers quelles étoiles étaient orientées les lignes à n'importe quelle date entre — 500 et + 1900 ? ». Réponse : aucune plus qu'une autre (3). Résultat consternant, mais sujet à caution. Et c'est la raison pour laquelle nous avons traduit pour vous deux passages destinés à donner une idée de la différence essentielle entre les métho-des suivies par Maria Reiche et Gerald Hawkins. II est clair que si l'on reprend, en bloc, une gran-

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… et après l’avènement du tourisme.

(2) Frédéric Engel, dans « Le monde précolom-bien des Andes » (p. 162), croit savoir que « Maria Reische (sic) cherche à démontrer, calculs en main, qu'il s'agissait à Nazca d'un calendrier vénusien ». Interrogé à ce sujet par Simone Waisbard, il reconnut « qu'il avait lu cela quelque part et l'avait répété » !

(3) Allez dès lors comprendre comment Robert Charroux, dans son dernier ouvrage, « L'énigme des Andes », p. 254, en arrive à la conclusion que « Gerald Hawkins, comme Paul Kosok, pense à un calendrier astronomi-que, dont il évalue le tracé entre 100 avant ou 100 après J.-C. » ! Peut-être a-t-il eu en mains une autre version... ou bien aucune version du tout, et se contente-t-il de raconter n'importe quoi ?

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de quantité d'orientations dont certaines sont astronomiques et d'autres non, on peut arriver à un résultat statistiquement nul, les orientations véritables étant neutralisées par d'autres lignes à destination différente. C'est ce qu'a fait Hawkins. Tandis que, comme on le verra dans l’article de Maria Reiche, il se peut que certaines orienta-tions soient regroupées dans un secteur bien déterminé, et qu'à ces endroits, les données as-tronomiques deviennent statistiquement valables, alors qu'elles ne le sont peut-être pas ailleurs. En tout état de cause, nous croyons bien que les conclusions lapidaires de Hawkins, du genre « l'ordinateur a tué le calendrier », sont prématu-rées. Disons enfin que l'astronome américain voit en

Nazca un gigantesque champ d'exercices pour un quelconque culte de fertilité. Pour ajouter une touche d'humour, il propose encore une autre explication : une gigantesque surface à gribouilla-ges (« scratch-pad »). La nature a horreur du vide, rappelle-t-il. L'homme n'aime pas les surfa-ces vides ; un tiers du papier utilisé dans les ré-unions de comités sont couverts de graffiti ; si on ne les retient pas, les gens ne peuvent s'empê-cher d'aller griffonner partout. Peut-être, suggéra un sociologue mi-sérieux, y avait-il une impulsion préhistorique au gribouillage…

IVAN VERHEYDEN

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Voici trente-cinq ans, Paul Kosok fut le premier à attirer l'attention sur les mystérieux dessins qu'il appela le « plus grand livre d'astronomie du mon-de », après avoir vu se coucher le soleil exacte-ment dans l'axe d'une des lignes, le jour du solsti-ce. Attribuer des connaissances astronomiques à un peuple primitif parait absurde pour l'homme moderne pour qui l'astronomie est une science compliquée et inaccessible. Ce n'était pas le cas pour les Anciens lesquels étaient plus proches de la nature et observaient les étoiles, leurs mouve-ments et leurs déplacements annuels. Célébrant le moment solennel du lever du soleil, début d'un jour nouveau, ils pouvaient constater que cet événement n'était pas toujours identique. Parfois le soleil se levait derrière une certaine montagne et plus tard dans l'année derrière une autre à une distance considérable. Ainsi il put apprendre à connaître les solstices, jours où les lever et cou-cher du soleil se produisent en des points les plus éloignés de l'est et de l'ouest. Ils pouvaient aussi observer un phénomène similaire pour la lune dont les lever et coucher se déplacent à égale distance de part et d'autre de l'est et de l'ouest. Tout au long des plaines et des plateaux de Pal-pa et Nazca, nous trouvons des lignes et des côtés de triangles qui pourraient indiquer que de telles observations furent faites et enregistrées par les anciens Péruviens. Dans la zone au nord de la rivière Ingenio, plus d'une douzaine de li-gnes pointent dans des directions correspondan-tes. Les lignes lunaires sont plus fréquentes que les solaires. Ces dernières peuvent avoir été ajoutées plus tard par la dynastie des Incas, qui vouaient un culte au soleil, et avaient soumis les habitants de la côte, adorateurs de la lune, sans pour autant détruire leur culture originale et leurs coutumes. De ceci semble témoigner un centre plus petit sensiblement à l'écart d'un des grands centres de cette zone et qui semble contenir un véritable calendrier solaire, puisque nulle part

ailleurs on ne retrouve une telle concentration de lignes solaires. II y a deux lignes solsticiales, deux lignes équinoxiales et trois autres qui peu-vent avoir marqué des jours intermédiaires de l'année, tels que le 6 mai, le 6 avril, le 25 novem-bre.

Nous pouvons mentionner ici un fait intéressant en rapport avec les dimensions relatives. Trois spirales étroites partant de ce centre, ont une longueur de 183 m qui est la largeur du chande-lier de Paracas. Cette même longueur apparaît à plusieurs autres endroits de la pampa. La pre-mière portion d'une ligne droite avant de pénétrer dans la figure représentant le poisson-chat (figure 6), de même que la longue surface effilée faisant partie de l'ensemble du singe, sont toutes deux à la même échelle. Pour en revenir à ce que nous disions plus haut, il nous faut maintenant donner une brève explica-tion pour les lignes lunaires. Les modifications périodiques dans les points de lever et coucher de la lune sont quelques peu différentes de ce qui se passe avec le soleil : au lieu d'avoir une

1. Maria Reiche

Calendrier solaire, probablement ajouté par les Incas.

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demi-année d'un solstice à l'autre nous avons une périodicité d'un peu moins d'un mois (27,3 jours). L’ampleur de l’oscillation varie d'un an à l'autre. La raison en est que, à cause de l'attrac-tion du soleil l'orbite de la lune autour de la terre est inclinée de 5° sur celle de la terre autour du soleil (écliptique), Ceci produit une variation pé-riodique des distances extrêmes, d'est en ouest, atteintes par la lune chaque mois. Tous les 18 ans la lune atteint une position qu'elle n'avait pas occupée avant (écliptique plus 5°), un fait qui en cet endroit du moins semble avoir une influence sur le temps et aussi sur les mouvements sismi-ques. Son observation aurait en outre été néces-saire pour la prévision des éclipses, une science dont les Espagnols admettaient qu'elle était bien connue de la nation soumise. En tout état de cause, partout des lignes pointent dans les direc-tions correspondantes, de même que celles qui indiquent la déclinaison minimale des lever et coucher de la lune. Une de celles-ci est remar-quable de par sa longueur extraordinaire de près de 10 km, reliant un centre à une surface prati-quement rectangulaire. Cette ligne extraordinaire traverse en outre une ligne brisée dont les élé-ments s'éloignent vers la gauche et vers la droite dans à peu près la même direction, laissant une distance d'environ 500 mètres entre les points les plus éloignés. Dans le voisinage immédiat nous avons trois autres de ces dessins orientés vers la lune avec une légère différence dans l'orienta-tion, due à une élévation différente de l'horizon vers l'est et vers l'ouest. De nombreuses lignes pointent vers des endroits de l'horizon qui sont en dehors de la course du soleil et de la lune. Elles visent probablement des étoiles importantes. Malgré que nous ayons la liste d'étoiles de Neu-gebauer, ainsi que leur position dans les temps anciens, il est difficile d'identifier des lignes à des étoiles puisqu'il est évident que sur des centaines

voire peut-être des milliers d'années, de nouvel-les lignes ont continuellement été ajoutées aux mêmes centres, chaque point de l'horizon ayant vu passer diverses étoiles à diverses époques. II y a néanmoins un certain ordre dans la distribu-tion des directions linéaires ; certaines peuvent être regroupées à des distances égales à gauche et à droite du méridien. Elles auraient pointé vers le lever et vers le coucher de la même étoile.

(« Peruvian ground drawing », p.9-10)

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Les azimuts de 130 lignes et bords de pistes à 15 kilomètres au sud de la vallée de l'Ingenio. Certaines directions sont privilégiées : les flèches indiquent la symétrie par rapport au méridien. On observe la même chose en d'autres endroits plus au nord.

L'oiseau au cou serpentiforme : la ligne qui le prolonge est solsticiale.

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Les cartes aériennes recouvraient cinq feuilles grandes comme un bureau. L'échelle était de 1/2000e, avec les contours à chaque mètre au-dessus du niveau de la mer. Les dessins du dé-sert étaient repris à l'échelle — des zigzags, des lignes radiaires en étoile, des grilles parallèles de lignes. Le plan stéréoscopique, aussi détaillé fût-il, ne reprenait pas les lignes de moins de 12 pouces (30 cm). Mais la carte suffisait pour tester la théorie du calendrier astronomique. Les posi-tions du lever et du coucher du soleil et de la lune changent quotidiennement. Le lever de soleil s'arrête à l'horizon lorsque la déclinaison est de 23 1/2 degrés (24° en — 2000). Ceci est un ex-trême fixé par l'angle d'inclinaison de l'axe terres-tre. L'angle ne change guère beaucoup au cours des siècles. La lune, lorsqu'elle est pleine, tourne à des déclinaisons de ± 20 et ± 19° tous les 18 ou 19 ans, selon le cycle lunaire de 56 ans. Les étoiles se lèvent approximativement en position identique chaque nuit. Ceci est reporté sur la sphère fixe d'Aristote, constante et immuable. Constante, à l'exception de la précession de l'axe terrestre, dont le mouvement conique fait se dé-placer le point de lever d'une étoile, de près d'un demi degré par siècle. La première étape était de mesurer, sur le plan du sol, les coordonnées x-y de points sélectionnés sur une ligne. Nous mesu-râmes l'axe central de 21 minces triangles, et 72 formations linéaires — des lignes, des pistes et les côtés de rectangles. Nous ne mesurâmes pas plus d'une ligne dans une grille parallèle (et il y avait plusieurs de ces grilles), ni ne pouvions retenir les nombreuses lignes visibles lorsqu'on est sur le site, mais non reprises sur la carte. Mais les 93 mesures étaient suffisantes pour mettre la théorie à l'épreuve. La première question posée à la machine était : « Combien de lignes sont pointées sur les 18 directions de Stonehenge ? » (1) La machine avait été programmée pour tolérer et imprimer des erreurs allant jusqu'à un degré. L'épreuve révéla 39 alignements lunisolaires sur les 186 directions données par les signes au sol (93 lignes, chacune utilisée deux fois, une dans chaque sens). Ce résultat n'abondait pas en fa-veur de la théorie du calendrier. II était trop pro-che du nombre escompté par le hasard. Dix-huit cibles lunisolaires, chacune d'une amplitude de deux degrés, font une visée totale de 36°. Ce qui est le dixième du cercle de 360° que fait l'horizon. De ceci nous nous attendions à ce qu'une ligne

sur dix pointe par hasard vers le soleil ou la lune, soit en l'occurrence 19 sur les 186 coups. La machine trouva un total de 39 alignements, ce qui ne faisait que 20 au-dessus du nombre es-compté par le hasard. C'était une marge trop réduite. En langage mathématique, c'est dire que pas plus de 20 des 186 possibilités pourraient être considérées comme calendaires. Nous cherchâmes sur la carte ces 39 lignes luni-solaires rapportées par l'ordinateur. Elles n'avaient pas de signification spéciale dans le modèle, rien qui puisse suggérer une importance plus grande par rapport aux autres lignes. Et qu'en était-il alors de ces autres, les 80 pour-cent qui ne pointaient ni vers le soleil ni la lune ? Il est essentiel pour une théorie d'avoir une confirma-tion substantielle. Comme l'a démontré Fred Hoyle, toutes les régularités architecturales es-sentielles à Stonehenge s'accordent avec la théorie. II devrait en être ainsi à Nazca. Bien sûr, comme le suggèrent Maria Reiche et Paul Kosok, l'une ou l'autre ligne par-ci par-là peut pointer vers le soleil, mais si aucune explication, de pré-férence astronomique, ne peut être trouvée pour les lignes non attribuées, alors la spéculation n'est rien d'autre que cela — de la spéculation. Non, les lignes ne pointaient pas vers le soleil ou la lune. La seconde question posée à la machine était : « Vers quelles étoiles étaient orientées les lignes, à n'importe quelle date entre — 5000 et + 1900 ? » La machine était renseignée sur la posi-tion de 45 étoiles, celles dont la magnitude est plus grande que 2, ainsi que la plus brillante étoi-le des Pléiades, Eta du Taureau, de magnitude 2,9. Elle était codée pour discerner tout aligne-ment qui serait apparu durant cet intervalle de 6900 ans. La datation des poteries était limitée aux premiers siècles avant et après J.-C., mais cette date n'était pas sûre à un siècle près. Per-sonne non plus ne pourrait affirmer sans autre preuve que les lignes ont été tracées au moment où furent déposées les poteries. Bien sûr, cette relation temporelle entre les poteries et les lignes était l'assertion la plus simple, mais il est tout aussi concevable que les lignes soient venues avant les poteries ou (moins probable) le contrai-re. Et cela ne prit que quelques secondes pour envisager l'entière durée des 6900 ans. Si la datation des poteries était correcte, et si les lignes sont astronomiques, il y aurait une étoile pour chaque ligne en l'An 0, mais pas à d'autres dates. Les feuilles imprimées étaient pleines, des étoiles au bout de chaque ligne. Mais, à notre désappointement, pas plus en nombre que ce qu'on pouvait attendre du hasard. Tenant compte du mouvement de précession, une ligne aurait dû

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2. Gérald Hawkins

(1) Les directions utilisées sont, pour le soleil, quatre solstices et deux équinoxes, et pour la lune, huit déclinaisons au solstice et quatre à l'équinoxe.

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toucher une étoile-cible tous les mille ans, ou quelque chose du genre. C'est la chance qu'au-rait un marqueur tirant dans le noir, les yeux ban-dés. Pour chaque siècle offert, nous escomptions une ligne sur dix qui serait orientée. Sur 186 di-rections, il devrait y avoir 19 chances d'aligne-ment par siècle. Le décompte de l'ordinateur par siècle fut de 17,3 étoiles alignées, sur la période allant de — 5000 à + 1900. Les siècles ayant un intérêt archéologique n'étaient guère meilleurs que les autres. Lorsque c'était le cas, ces siècles étaient pires — seulement sept étoiles de - 100 à l'An 0, et six de 0 à + 100. Certains siècles fai-saient un score plus élevé que d'autres. Au tren-te-quatrième siècle avant J.-C., il y avait 31 ali-gnements, mais toujours rien qu'une fraction inacceptable des 186 directions testées. Même en ignorant la date trop improbable de — 3400-3500, il y avait de loin trop de lignes sans étoiles. Non, les lignes ne pointaient pas vers les étoiles. En dernier ressort, nous testâmes sur des objets célestes non identifiés, des objets visibles au moment où furent tracées les lignes, mais invisi-bles de nos jours. Une nouvelle étoile, une nova, brille avec éclat durant quelques mois, puis s'es-tompe et devient invisible. L'éclat estompé d'une comète brille dans la lumière matinale. La conjonction de deux ou de plusieurs planètes attire l'attention. Celle-ci, et d'autres phénomènes transitoires sont parfois identifiés à l'étoile de Bethléem. Le test à faire avec ces objets était de comparer un groupe de lignes à un autre. A pam-pa Jumana-Colorada, nous comparâmes les li-gnes à l'est de la route panaméricaine avec cel-les situées à l'ouest. Si une ligne du groupe oriental pointait vers la déclinaison X, l'objet in-connu, alors il faut s'attendre à retrouver dans le groupe occidental une ligne pointant également vers X. Nous comparâmes aussi les lignes de la pampa Jumana-Colorada avec un groupe proche de la bande de culture à Nazca. Résultat : dans les deux tests, aucun chevauchement. Conclu-sion : les traceurs de lignes ne les orientaient guère sur un groupe d'objets célestes aujourd'hui invisibles ou méconnaissables. Désappointés, nous rejetâmes la théorie du ca-lendrier astronomique. II n'y avait aucune époque dans un passé raisonnable où toutes les lignes, ou presque, s'accordaient avec le lever ou le

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La figure ci-contre mérite de retenir l'atten-tion .C'est le déroulé de ce qui est peint sur la paroi cylindrique d'une poterie nazca. Gérald Hawkins l'interprète ainsi : les raies et la ligne brisée pourraient être des pistas, le long des-quelles on voit des personnages figurés par des faces triangulaires avec yeux et bouche. A l'ex-trémité des pistes, on pourrait voir symbolisé un dieu stellaire. En bas à gauche, un dieu solaire, et à côté de lui le prêtre qui, pour « officier », s'est doté des attributs du dieu. Peut-être...

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coucher d'un astre. Quelques-unes des lignes pourraient pointer vers les extrêmes solsticiaux du soleil ou de la lune, mais pas en nombre suffi-sant pour justifier le vaste complexe de grilles, de centres irradiants, de triangles et de lignes iso-lées Non, l'ouvrage dans le désert ne pouvait fonctionner comme un calendrier temporel. S'il devait y avoir la moindre crédibilité pour la théo-rie du calendrier, le rectangle principal considéré en lui-même devrait fonctionner astronomique-ment. L'opération à l'ordinateur fut révélatrice. La figure ne s'alignait sur aucune étoile à l'époque de Nazca 3 et 4. Elle pointait bien vers le lever des Pléiades en l'an 610 de notre ère, comme l'avait suggéré Maria Reiche, mais la date révi-sée du radio-carbone à l'An 0 décale cette pério-de. La figure pointait vers la lune à sa déclinaison extrême de + 19°, mais pour que ce soit crédible, on s'attendrait à trouver un assortiment de rec-tangles marquant d'autres extrêmes de la lune. II n'y en a pas. La théorie du calendrier astro-luni-solaire a été tuée par l'ordinateur. Rétrospectivement, le résultat était logique. En

pratique, il serait difficile d'utiliser une ligne pour situer une étoile. La visibilité à l'horizon était af-fectée par une brume de poussière — une brume pas assez épaisse pour faire écran au soleil flam-boyant, mais suffisante pour rendre difficile la vue d'une étoile. Et là, de nouveau, une ligne dans le sol du désert n'est pas visible de nuit. Ce devrait être balisé par des lampes. Les poteries dans les lignes étaient des coupes, des plats, non des lampes. Les tertres (endroits logiques pour placer une lampe) ne sont pas plus situés le long des lignes. Plus d'une fois, ces tertres étaient locali-sés d'un côté, ou proches de lignes incurvées. Non, Paul Kosok avait tort, et l'espoir de Ceram est toujours présent : « une nouvelle vision pour les réalisations des anciens peuples des An-des ». Les chercheurs modernes sont séparés de ces processus de pensée par le temps et le contexte culturel. Un psychologue a nommé cela avec justesse : « un gouffre de perception cogni-tive ».

(« Beyond Stonehenge », p. 113 à 117)

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3. Simone Waisbard : les péruanistes Que sait-on exactement, en Europe, sur les fa-meux « dessins » de la pampa de Nazca ? S'il suffit de prononcer ces quelques mots mystérieux pour que s'allument dans nos regards, les étoiles du rêve, à vrai dire, bien peu de textes — dignes de foi — leur ont été consacrés. C'est pourquoi je tiens à souligner l'effort de mise au point, le bilan en quelque sorte tenté pour la première fois et par KADATH, auquel j'ai volontiers accepté de participer, en exposant ici le point de vue des archéologues péruviens — ou de péruanistes compétents, qui résident de longue date au Pé-rou — et avec lesquels j'ai travaillé pendant plus de quinze années consécutives. Les travaux de Maria Reiche, disciple de Kosok et conservatrice ad honorem d'un legs millénaire si précieux, fai-sant l'objet d'autres commentaires dans cette revue, je ne les mentionnerai que pour faire état des dernières et récentes découvertes de l'ex-traordinaire investigatrice allemande, qui vien-nent de me parvenir. Disons le tout de suite, la plupart des archéolo-gues péruviens, se rangent aux côtés de Paul Kosok et de Maria Reiche, c'est-à-dire pour un calendrier astronomique, certains y apportant toutefois quelques nuances très intéressantes, les autres, peu nombreux il est vrai, proposant des hypothèses totalement différentes ou appa-rentées. L'historien Eugenio Alarco suppose que les an-ciens Nazcas utilisèrent leurs « connaissances astronomiques notoires... en association avec le

culte religieux ». II ne repousse pas l'idée que « les grandes lignes aient pu servir de chemins marqués pour des processions cérémonielles », du fait que ces lignes se terminent généralement presqu'au même endroit où elles commencent ». II s'agirait en somme, croit-il, d'une « forme de culte qui s'exprimait par des actes joués sur le désert ». Très versé dans l'étude des vestiges précolom-biens de l'ancien Pérou, Hermann Buse devine, « dans une géométrie de stricte valeur astrono-mique... les chemins du Soleil, de la Lune et des Etoiles... qui ont à voir avec la mesure du temps ». Partant du fait bien connu qu'au Pérou, « le thème de l'agriculture a une histoire vieille de près de 7000 ans », il juge qu'il fallait alors pou-voir « prédire et reconnaître les saisons propices aux divers travaux de la terre et fixer les dates des fêtes et des cérémonies qui toujours les ac-compagnaient ». Cependant, Hermann Buse fait quelques réserves sur « la seule interprétation astronomique ». Bien que « tentatrice » elle lui semble « exagérée »... L'architecte Emilio Hart-Terre, spécialiste de l'analyse esthétique de la céramique préhispanique de Nazca, qualifie « d'élucubrations d'ordre astronomique », les marques découvertes sur les déserts étendus de la vallée des Nazcas qui croyaient « dans la force magique de l'image ». Pour lui, les animaux re-présentés étaient sans doute les « porteurs des moyens de vie ». ... Moyens de vie des plus rares, sur les immensi-tés arides du littoral Pacifique. Ce qui amène le

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Professeur Jorge Salinas, à envisager une tout autre hypothèse de travail. « L'économie de la côte péruvienne, précise-t-il, est à la merci des variations du courant de Humboldt » qui, on le sait, nourrit dans ses eaux plus froides que celles de l'océan, une véritable « soupe de poissons » et de plancton. Cette richesse ichtyologique pro-digieuse est à l'origine d'une autre provende : le guano, déposé sur les îlots rocheux par des mil-lions d'oiseaux de mer qui les peuplent. Guano qui, depuis bien avant les Incas et de nos jours encore, est l'irremplaçable engrais des terrains désertiques du Sahara péruvien qui borde l'Océan et s'étendent jusqu'au piémont des An-des. Or, que l'année soit plus chaude que d'habi-tude, la température ambiante de la mer s'élève et le courant de Humboldt s'éloigne... Et les oi-seaux marins meurent par milliers ou émigrent vers le Chili. En conséquence, la récolte du gua-no baisse par dizaines de milliers de tonnes et c'est l'annonce d'une terrible année de disette. Pour y remédier dans la mesure du possible, Jorge Salinas avance que les Nazcas savaient lire les « indices météorologiques » dans les cou-tumes des oiseaux, si fréquemment représentés sur les fameuses pampas — l'un d'eux mesurant 135 mètres de long, qui vole précisément dans la direction du sud... Servait-il à prédire de telles anomalies ? La pampa de Nazca ne décrirait-elle pas les migrations climatologiques d'oiseaux gua-neros ? La question est posée... Auteur d'un livre sur « Les dieux de la pluie », Alfonsina Barrio-Neuvo y voit un « temple spatial ouvert sur l'infini ». Pour cette investigatrice, les prêtres de Nazca « copièrent le ciel et son trou-peau d'étoiles sur le sol », les dessins géants n'étant autres que des « signes calendrier » qui traduisent « le désir de donner des dimensions célestes aux modèles terrestres ». Pour Luis Lumbreras, de l'Université de San Mar-cos, c'est un gigantesques « zodiaque », reflet des étoiles, qui correspond à leurs mouvements périodiques. « Les animaux doivent être la repré-sentation idéalisée des constellations stellaires. Leur marche a pu servir à prédire les événe-ments immédiatement futurs, en relation avec l'arrivée de l'eau, de la saison sèche » etc... « Les cultivateurs de la côte du Pacifique et de la Cordillère des Andes, dit-il, lisent encore de nos jours, dans les étoiles, cette descente des eaux si anxieusement attendue. Ils se tiennent prêts à en contrôler le passage et les crues... Les figures d'une précision mathématique, représentaient des animaux et des plantes réels, directement copiés des étoiles, qui durent jouer un rôle précis en fonction du contexte magico-religieux. Ces « signes » devaient aider les grands prêtres as-trologues dans leur tâche de divination et de ma-gie... Ceux qui connaissaient le langage des étoi-les pouvaient révéler les secrets de la nature et programmer I’avenir. » Le Zodiaque de Nazca

est à son avis, « le plus riche document du passé de l'homme péruvien ». Le major Luis Mazzotti, chef du département d'Astronomie de l'Institut Géographique militaire de Las Palmas et inventeur d'un « chercheur d'étoiles », pense à une « ancienne carte stellai-re »... De la même façon que les Grecs et les cultures méditerranéennes et orientales utilisaient les constellations, les anciens Nazcas s'inspi-raient, estime-t-il, de la réalité pour leurs dessins, mais « en imaginant d'autres formes de représen-tations en accord avec leurs mythologies, arts, croyances et occupations... » Le major Mazzotti travaille depuis plusieurs années à la reconstitu-tion d'une carte géographique des dessins et des lignes des pampas de Nazca, d'après les photo-graphies aériennes prises en grand nombre et se raccordant parfaitement. Mais il faudrait, indique-t-il, composer aussi une « carte du ciel, tel qu'il se présentait à la vue en 500 de notre ère, date pro-bable des tracés... » Ainsi pourrait-on, en les comparant, savoir si les figures de la pampa re-présentaient réellement une carte céleste, qui serait en ce cas « la carte historique et astronomi-que la plus grande et singulière du monde. » Alejandro Pezzia Assereto, du musée d'Ica, pré-cise un point capital — s'il s'avère exact — parce qu'il vient à l'appui de l'hypothèse astronomique : parmi les huit lignes de solstices identifiées, il en existe une plus large que les autres, qui indique clairement, assure-t-il, « un lieu de la Cordillère où commencent les premières pluies. »

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En écho, Luis E. Valcarcel, doyen des grands h i s t o r i e n s p é r u v i e n s q u a l i f i e d e « mappemenonde géante » ou de « carte du ciel géante », l'ensemble de ces lignes qui seraient en rapport avec le lever des étoiles et des cons-tellations, et le coucher ou l'apparition de cer-tains astres. Mais une carte, axée sur l'étude du régime des eaux. « Les Nazcas, explique-t-il, connaissaient le système pour capter les sour-ces souterraines. On a découvert les veines de ces eaux qui filtrent de la Cordillère vers la mer », et qui renouvelaient périodiquement le miracle de rendre productifs ces sables appa-remment stériles. George Muelle, qui fut longtemps le directeur du Museo de Antropologia y Arqueologia de Lima, se prononça en faveur de « figures qui représen-taient des totems généalogiques, en rapport avec les astres ». Ce qui prouverait que les peuples de Nazca « sortaient de l'étape magique pour entrer dans l'ère scientifique ». L'érudit Carlos de la Puente s'interroge : « Les dessins contiendraient-ils un symbolisme qui permettait d'établir les heures du jour, les pério-des de solstice et d'équinoxe, le passage du so-leil au zénith... et les plazoletas — c'est-à-dire les pistes trapézoïdales, triangulaires ou rectangulai-res des auteurs européens — n'étaient-elles pas des enclos pour les troupeaux et les animaux sacrés ? » Peut-être dans l'attente des sacrifices propriatoires qui ne devaient pas manquer... Pourquoi pas ? Mais personne encore n'y avait pensé ! Le Père Rossel Castro, bien connu pour ses tra-vaux sur l'archéologie du département de Lima, a longuement réfléchi au problème de ces tracés, sans aucun doute pour lui « intentionnels et faits par des hommes versés dans la géodésie et l'agronométrie ». Avant de prendre position, il les divise en plusieurs catégories : — Tumulus et apachetas (tas coniques de pier-

res plates, servant d'autels commémoratifs du culte funéraire).

— Stylisations des motifs de l'art textile à des fins chorégraphiques.

— Groupes géométriques pour projets d'irriga-tion et lotisation de parcelles agraires.

Rossel Castro affirme que l'une des quinze plate-formes de la pampa de Sokos — un énorme trapè-ze long de 840 mètres et large de 100 — fut culti-vée et fertilisée au moyen d'humus, de plantes et d'algues marines, de guano des îles, de cendres et de crottes de lama, dont il a retrouvé les traces évidentes. Ces parcelles agraires auraient été irri-guées par les fameuses « galeries filtrantes », gé-niale invention nazca, dont Rossel Castro dit avoir identifié le « branchement dans l'angle supérieur » du trapèze géant. En outre, Rossel Castro aurait dépisté des « observatoires astronomiques, sorte de graphiques pour tenir le registre du temps », dont l'étude lui a permis de déterminer, « pour une ligne concentrique ... l'âge de 2 400 ans ».

Le Professeur Mejia Xesspe, se basant sur une indication du corregidor Luis de Monzon au chro-niqueur Polo De Ondegardo en 1586, d'après laquelle les naturels « faisaient des chemins aus-si larges qu'une rue avec de part et d'autre des parois basses », opine pour des seques ou che-mins sacrés, comme il y en avait, partant en tou-tes directions, depuis le cœur du Cuzco, capitale de l'empire des Incas. Et il en distingue deux sortes, soit en forme de rue ou d'avenue, soit des sillons ou canalisations. Des premiers cités, il identifie « une grande avenue sur la meseta de Wayuri, courant du sud au nord, sur 40 kilomè-tres de long et six à huit mètres de large »… Ecoutons Hans Horkheimer, qui fut l'un des meil-leurs investigateurs étrangers de l'archéologie péruvienne. « Ces reproductions sacrées étaient principalement dédiées au culte totémique », déclare-t-il. Comme le lui confièrent les paysans de la vallée de Nazca qu'il interrogea en ma pré-sence, c'étaient les « chemins des âmes ». Effec-tivement, Hans Horkheimer décela de très nom-breuses tombes isolées et des cimetières préco-lombiens entiers, à proximité des plazoletas. Ré-futant l'hypothèse « astronomique » pour des raisons bien précises qu'il est impossible de résu-mer ici, l'archéologue allemand avance que : — les plazoletas furent destinées aux réunions

sacrées dédiées au culte funéraire. — les raies seraient des lignes généalogiques

qui déterminaient le lieu d'origine et les liens de parenté unissant les groupes rassemblés.

— les figures servaient aux danses totémiques. Tout cela en fonction du mystérieux « chemin des âmes » des momies qui visitaient, selon la croyance, tout au long de ces tracés, les lieux sacrés sur lesquels le clan qui en était issu venait à dates fixes célébrer l'ancestral culte du souve-nir... Dans un même ordre d'idée, Arturo Jimenez Borja, qui a réalisé de magnifiques restaurations des monuments préincas de la vallée de Lima et que j'ai assisté, se prononce pour un « zodiaque de 500 km2, formé par un réseau enchevêtré de chemins cérémoniels, de lignes généalogiques, qui menaient aux centres de réunion des diffé-rentes tribus nazcas ». Ce sont des « schémas chorégraphiques pour les danseurs du totem-araignée, du totem-singe, du totem-poisson, etc... qui représentaient et reproduisaient par leurs danses rythmées au son d'un accompagne-ment musical impressionnant, le totem-animal, ancêtre et protecteur de chacun des groupes. Quant à Frédéric Kauffmann-Doig, directeur du Museo de Arta de Lima, après avoir noté « Ie sens surprenant de l'échelle selon laquelle raies et figu-res d'animaux furent exécutées et leur ressem-blance frappante avec les dessins de la céramique de la culture nazca », il doute cependant qu'il faille y voir « des préoccupations astronomiques et un type de calendrier ». II estime prudemment que « l'heure est encore éloignée où l'on pourra résou-dre l'énigme que présentent ces raies ».

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Dans le concert des voix qui orchestrent l'énigme des pampas de Nazca, peu nombreuses sont les voix françaises, tout au moins qui se soient expri-mées d'une manière ou d'une autre. Notons celle d'Henry Reichlen, qui a dirigé plusieurs expédi-tions archéologiques au Pérou. En 1960, lors d'une conférence, Reichlen signala que venaient d'être révélés par les photos aériennes d'une mission américaine, la très importante découver-te de « villages et de sites fortifiés de l'époque paracas, dans la vallée d'Ica et dans une zone aride où l'on n'avait jamais cherché ». Certaines de ces agglomérations groupaient jusqu'à 600 maisons en pierres sèches, protégées par quatre murailles successives. A proximité d'un petit sanctuaire isolé, Dawson repéra « une pampa sillonnée de nombreuses raies cérémonielles, semblables aux fameuses raies régulièrement creusées dans les pampas de Nazca ». Henry Reichlen souligne que « c'est la première fois que de telles raies sont associées à la civilisation paracas ». Opinion tout à fait nouvelle et qui révolutionna ce que l'on croyait bien établi auparavant : Nazca succédant à Paracas, alors que nous les savons à présent contemporains —, ce qui fut depuis confirmé par les fouilles prolongées et méthodi-ques de Frédéric Engel dans la péninsule de Paracas où il mit au jour les vestiges d'agri-culteurs sédentaires d'il y a environ 9000 ans, ainsi que le cimetière entier des « Hommes de cabeza larga » les « Longues Têtes » artificielle-ment déformées, d'il y a cinquante siècles. Dans une communication personnelle et répondant à mes questions précises, Frédéric Engel me confia que « les lignes de Nazca lui font penser aux lignes de courant vital des traités de médeci-ne chinoise, ce qui le porte à chercher dans ces lignes un sens cabalistique religieux ». En résu-mé, il ne voit que « trois solutions valables : un calendrier planétaire, un complexe cabalistique, et des chemins, ou plus précisément « le chemin le plus court d'un point à un autre ». Avant d'en terminer avec les dernières hypothè-ses de Maria Reiche je voudrais préciser que le tour d'horizon que je viens de faire pour la pre-mière fois et en exclusivité pour KADATH, est absolument inédit. Si j'insiste, c'est pour lui don-ner toute sa valeur documentaire, car nul ne pou-vait le réaliser au cours d'un simple voyage de quelques jours au Pérou, voire de plusieurs mois. Au Pérou, j'y suis arrivée en 1954 et le bilan de Nazca que je présente ici — avant de le dévelop-per en grand dans un livre en préparation — n'est pas un travail de bibliothèques où rien ou pres-que n'existe sur le sujet autour duquel renaissent périodiquement, facilitées par cette lacune, des polémiques acharnées ! II est le condensé des recherches archéologiques seulement commen-tées dans la presse péruvienne et surtout, des nombreuses conférences auxquelles je n'ai ces-

sé d'assister à Lima, Nazca ou Ica, et des échan-ges ou communications personnelles avec beau-coup des investigateurs cités ici. Maria Reiche vient précisément de prononcer plusieurs conférences à Lima, très bien docu-mentées. Elle semble sur le point d'aboutir, tout au moins dans la solution des moyens et des méthodes employées par les anciens Nazcas pour tracer sur le sol, ces lignes et ces figures monumentales qui intriguent le monde entier et qui sont sa raison de vivre depuis près de trente ans... Elle a retrouvé l'unité de mesure qui en permit et facilita l'exécution et un système « binaire » de report aussi simple qu'ingénieux. Par ailleurs, modifiant ses précédentes interpré-tations, il lui semble à présent que les lignes so-laires seraient moins nombreuses que les lignes lunaires. Enfin, pour en finir, dit-elle, avec les « contes de fée pour adultes » cogités par « un type d'auteurs qui ont recours, pour tout ce qui leur semble sans explication, à l'intervention d'êtres venus d'outre-monde... ceux qui écrivent de tels livres sont des voyageurs qui parcourent le nôtre sans jamais approfondir ce qu'ils y voient. Ils ne se rendent pas compte, ajoute Ma-ria Reiche, que la conséquence d'avoir remué toutes les pierres contenues dans les fameuses « pistes d'atterrissage pour extraterrestres », a rendu, en ces endroits, le terrain extrêmement blando, c'est-à-dire sans fermeté plutôt que mou comme il faudrait le traduire. Au point que, cons-tamment, les automobiles des visiteurs s'y enter-rent ! « En outre, indique encore Maria Reiche, ces superficies délimitées varient de grandeur selon une gamme qui va de quatre mètres de long à plus d'un kilomètre, bien que toutes cons-truites de même façon et pour une finalité qui ne peut être celle d'y atterrir ! » Et cette finalité, nous le savons, pour Maria Reicha, ne peut avoir été que la notation du ciel et du temps...

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Archeologie parallele

UN CHANDELIER, UN ROBOT, UNE DEESSE... Si la pampa de Nazca se caractérise par une extraordinaire densité de géoglyphes, il ne faudrait pas en conclure pour autant qu'elle en détient l'exclusivité. Les dessins au sol sont — comme les pyramides, com-me les mégalithes — un phénomène mondial et il serait bien difficile d'en dresser une liste exhaustive. Les plus beaux spécimens européens se trouvent en Angleterre. Nos lecteurs, et ceux qui suivent nos confé-rences, en connaissent déjà quelques-uns. Citons pour mémoire le Westbury Hill White Horse (ou Cheval de Bratton Down), le Cheval d'Uffington, l'Homme de Wilmington, l'Homme de Cerne Abbas. Ces dessins couvrent pratiquement tout un flanc de colline et ne sont visibles dans leur entièreté que du ciel ou, par-fois, d'une colline voisine, pour autant que colline il y ait. C'est donc là un fréquent point commun entre les géoglyphes. Au sol, le plus souvent, on ne voit à peu près rien, comme à Nazca. En avion, par contre, le spectacle est grandiose. Ces réflexions engendrent automatiquement des questions épineuses : que signi-fie cette macro-écriture qui semble dédiée aux oiseaux, et quels procédés furent mis en œuvre pour réali-ser des dessins à pareille échelle ? Les trois sites qui font l'objet du présent article sont américains. Ils sont très différents par la taille, la beauté et l'origine. Deux d'entre eux ne sont visibles que d'en haut (ciel ou colline). Un seul a livré son secret. Tous trois sont des géoglyphes géants. 34

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Le chandelier de Pisco. A tout seigneur, tout honneur : commençons donc par le plus important, qui est aussi voisin du plateau de Nazca. A la fois célèbre et méconnu, le chandelier de Pisco, alias « Chandelier des Andes », alias « El Candelabro », alias « Las Tres Cruces », alias « Trident des Andes », a déjà suscité moultes réactions délirantes dans le petit monde des marchands de sensationnel. Mais avant de dénoncer les élucubrations de ces messieurs, voyons de quoi il s’agit. Le chandelier se trouve au Pérou, a 245 kilomé-tras au sud de Lima, dans la péninsule de Para-cas. II est dessiné au flanc d'une colline sablon-neuse à l'extrême bout de la Cordillère des An-des. II fait face à Pisco, de l'autre côté de l'im-mense baie du même nom, et n'est visible que de la mer. Son accès est malaisé, que ce soit par terre ou par mer. La colline elle-même, qui l’arbo-re, présente une inclinaison d'environ 40° et une dénivellation de plus ou moins 400 mètres. Com-me à Nazca, on est en présence de deux cou-ches de terrain de coloration différente. En surfa-ce une mince couche de gravier violet, et des-sous une couche épaisse de sable ocre. Le sol de la colline garde indéfiniment toute trace, que ce soient celles du chandelier lui-même, des tra-ces de pas ou encore, ô sacrilège, des traces de pneus laissées par des visiteurs aussi peu intelli-gents que dénués de scrupules. Le sable y est si fin, si impalpable, qu'il brave les intempéries et les vents les plus violents. Ecoutons Robert Charroux : « Le chandelier se présente sur la pente, en tracés creux, générale-ment bordés par des pierres calcaires, friables et striées, où suinte ce que nous croyons être du cristal de roche un peu à la façon des millefeuil-les du pâtissier ! » C'est exactement cela. On distingue un axe central qui repose sur une sorte de socle rectangulaire. Au sommet de l'axe, un totem aux bras levés encadré de deux ramifica-tions « décoratives ». Entre le totem et le socle, l'axe donne naissance à deux branches, qui lui sont perpendiculaires et qui semblent soutenues par deux « bras de force ». Chaque ensemble « segment d'axe-branche-bras de force » dessine donc un triangle rectangle. Chacune des deux branches latérales remonte alors, selon un angle légèrement inférieur à 90°, vers le totem, et se termine par un motif qui fait songer à un lézard ou encore à un cactus (1) Et voilà strictement tout ce qu’on peut dire du chandelier de Pisco sans verser dans de hasar-deuses spéculations On ignore tout de son âge, de son origine et de sa destination. On a dit qu'il était la représentation, si fréquente de par le monde, de l’arbre de vie. Pourquoi pas ? Cer-tains voient un rapport avec les momies qui

étaient apportées par la mer pour être ensevelies dans les sables des nécropoles de Paracas. Cet arbre serait alors un signal de navigation funérai-re pour des radeaux d’apparat. On sait en effet que les momies étaient visitées et vénérées à certaines dates. II est aussi question du chande-lier dans l'ouvrage « Codigo de los Piratas » d'Eduardo Montero, où il devient un signal laissé par des pirates pour situer un fabuleux trésor. Astucieux mais peu discret. Les métis de la côte de Paracas affirment, quant à eux, qu'il s'agit de trois croix tracées par le Père Guatemala dont la vie fut marquée par une série de prodiges, pour protéger ou mettre en garde les pêcheurs qui fréquentaient la mer en ces parages fouettés par le terrible vent de sable nommé paraca et qui vient de la zone d'Ica. Ceci est rapporté par Al-fonsina Barrionuevo. Un repère ? Oui mais alors c’est un repère a posteriori. On peut se repérer sur n’importe quoi. Je doute que le chandelier ait été tracé dans ce but. Plus intéressante est peut-être une similitude remarquée par Eugenio Alarco et partagée par plusieurs archéologues péruviens, entre le chan-delier et un motif qui apparaît sur d'antiques tis-sus trouvés à Pachacamac. Ce motif illustre ce qu’on croit être l'arbuste de la cantuta qui fut la fleur sacrée des Incas et des dites Vierges du Soleil. Il est une autre version encore qui trans-forme le chandelier en trident ; dans le but d’être complet, je signalerai que le missionnaire Barna-be Cobo fait allusion à des objets semblables dans son « Historia del Nuevo Mundo » (cité dans « Nouvelle Géographie Universelle » d’Eli-sée Reclus) lorsqu’il parle des îlots rocheux si-tués en face de Pisco : ... « en d’anciennes car-rières on a trouvé leurs instruments (appartenant aux Quechuas) surtout des espèces de tridents en bois dur, à côté de bijoux et d’autres objets précieux ». Enfin, d’aucuns prétendent que le chandelier est une balise tracée par d’antiques extraterrestres pour indiquer la direction de leur « cosmodrome » (entendez les pistes de Nazca) Je ne suis cas spécialement allergique aux extra-

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(1) Impossible d'obtenir des mesures précises ! Décrit d'abord comme ayant 480 mètres ou même 500, le chandelier mesure maintenant sous la plume de Maria Reiche 183 mètres de hauteur. Par contre, l'archéologue Eugnio Alarco lui donne avec précision 128 mètres de long sur 74 mètres de large. La largeur des siIlons varierait, toujours selon lui, de 1 m 60 à 4 mètres et plus dans certaines sections.

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terrestres, mais je préfère les hypothèses de tra-vail aux hypothèses de conversation... II faut signaler que le chandelier de Pisco ne serait pas unique en son genre. Maria Scholten d'Ebneth déclare, dans la « Revista del Museo Nacional de Lima », tome XXIII, p. 245 (1954), qu'au nord de Pisco, à Cañete très exactement, un autre chan-delier fait face à la mer. II serait dessiné sur un rocher. Une affaire à suivre. Si un de nos lecteurs possédait une documentation à ce sujet, nous lui saurions gré de se manifester. Notre colonne d'humour. J'ai cité plus haut Robert Charroux. La descrip-tion du chandelier qu'il nous donne dans son « Livre des mondes oubliés » (1971) est exacte. Mais si l'on se réfère au premier volume du mê-me auteur, soit « Histoire inconnue des hommes depuis 100.000 ans » (1963), on se rend compte qu'à l'époque il ne savait pas de quoi il parlait. On y lit en effet que le chandelier est un « dessin gravé sur la paroi rouge d'une falaise à pic », et qu'il est « taillé en profondes tranchées à même le roc » ; il y est question également de « filins trouvés dans la colonne centrale ». Charroux précise même qu'il s'agit d'une « très longue cor-de servant de pendule vertical », et que « dans les bras extérieurs passaient des pendules hori-zontaux » ! L'auteur annonçait en 1963 que l'in-nocent chandelier était un « calculateur de ma-rées » et même un « gigantesque sismographe de précision pouvant enregistrer les ondes telluri-ques (sic !) et les secousses sismiques en prove-nance non seulement du Pérou mais de toute la planète ». Ouf ! ! ! Qu'est-ce que à dire, et pourquoi, huit ans plus tard, Robert Charroux démentait-il catégorique-ment ses propos fantaisistes ? Tout simplement parce qu'il fut roulé à l'époque par un illuminé nommé Garcia Beltran qui se pré-sente, à tort ou à raison, comme un descendant du célèbre chroniqueur mi-indien, mi-espagnol, de la Conquista : Garcilaso de la Vega. Garcia Beltran a fondé à Paris la « Religion du Soleil Inca ! » II se prend pour un Fils du Soleil et prési-de à des cérémonies où l'on sacrifie... des grai-nes de tournesol ! II croit dur comme fer que, jadis, Orejona aux pieds palmés descendit de Vénus sur le lac Titicaca pour s'accoupler à un tapir (mais oui !), donnant ainsi naissance à ... l'humanité ! Pauvre Adam en vérité, et pauvre Garcia Beltran. Si vous ne me croyez pas, de-mandez à Guy Breton, demandez à Simone Waisbard. Ceci dit, rendons tout de même hom-mage à Robert Charroux, qui, s'il se rend souvent coupable de précipitation et de naïveté, n'hésite pas à rectifier ses affirmations lorsqu'il se rend compte de son erreur. Inutile donc de le croire la première fois. Dans ce cas-ci, il visita lui-même le site ultérieurement.

Vérifions aussi les propos d'un forcené de la sen-sation primhistorique, j'ai cité Erich Von Däniken, ineffable entre tous. Ouvrons « Retour aux étoi-les » (1969) à la page 165. L'auteur, qui prétend être allé sur place, déclare froidement : « Après plusieurs heures d'un travail acharné, nous dû-mes convenir qu'il était au-dessus de nos forces de débarrasser de la couche de sable durci ne fut-ce qu'un fragment d'une branche ». A propos desdites branches, Von Däniken affirme sans rire qu'elles « se composent de blocs phosphores-cents, d'une blancheur éclatante, aussi durs que du granit ». Tous ces blocs, bien sûr, étaient « recouverts par le sable »... Les ouvrages cités sont diffusés dans le monde entier, en plusieurs langues. Leur tirage est énor-me. Ma mise au point est donc indispensable. J'affirme une fois pour toutes que : 1) Le chande-lier n'est pas gravé dans le roc dur mais dessiné dans le sable mou. 2) La falaise n'est pas à pic, c'est la dune qui est inclinée. 3) Aucun filin ne fut jamais trouvé nulle part. Le calculateur n'existe donc que dans le cerveau dérangé de Garcia Beltran. Le lecteur aura compris qu'il existe diver-ses manières de traiter la primhistoire. La nôtre, qui se veut objective, ne rejette pas le sensation-nel, à condition qu'il existe. Tant pis si elle est moins commerciale. A défaut de mieux, j'opte personnellement pour ceux qui voient dans le chandelier de Pisco une représentation de la fleur sacrée. Ce qui n'éclaircit pas grand-chose... Le robot du Chili. En 1967, à bord d'un avion Cesena 172, le géné-ral chilien Eduardo Jensen Franke, accompagné de l'archéologue Delbert True, découvrit un géo-glyphe anthropomorphe géant, sur le site de Cer-ro Unitas, sur le bord le plus oriental de la pampa de Tamarugal (province de Tarapaca) au Chili. La figure se trouve en plein désert, sans route d'accès. Eduardo Jensen Franke la photographia puis la visita par voie terrestre et la mesura. II remarqua quantité d'autres géoglyphes géométri-ques, zoomorphes et anthropomorphes mais ne donne pas de détails. Par contre, ceux-ci se trou-vent dans l'ouvrage de l'archéologue Lautare Nuñez Atencio qui parle d'une autre figure très semblable à proximité, mais plus petite, ne mesu-rant que 20 mètres. II donne également l'exemple d'un autre type de géoglyphe, faisant un peu son-ger aux surfaces géométriques de Nazca : « Quand la route Huara-Tarapaca passe perpen-diculairement au Cerro Unitas, on distingue des raies plus ou moins verticales, formant au total trois ou quatre grands dessins anthropomorphi-ques, dont les grandes têtes, les yeux, le nez, la bouche, sont faits de tas de pierres. Les corps sont rectangulaires, très allongés et sans extré-mités inférieures ». Eduardo Jensen Franke ajou-te cependant que la région est riche en pierres et

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en débris de roches volcaniques recouvertes de sable par les vents du désert. Ce sont ces débris qui, ramassés et ordonnés, constituent les contours des figures en question. La plus importante — le géoglyphe géant qui nous occupe — ressemble à un robot d'environ 120 mètres de long. Tout y est carré, anguleux ou rectangulaire. La tète porte trois fois quatre appendices, le visage contient trois carrés. La main gauche soutient un étrange prolongement du visage, qui pourrait être un instrument de mu-sique et auquel est appendu un bizarre animal au long nez. Le thorax rectangulaire est longiligne, les membres inférieurs sont courts. Hanches et genoux sont naïvement représentés. L'ensemble dénote une facture très primitive. On est loin de la beauté parfaite de l'oiseau de feu, de l'arai-gnée, du singe de Nazca. L'origine de ce géogly-phe n'est pas claire ; on peut vraisemblablement l'attribuer aux habitants des villages indiens pré-historiques découverts alentour. La déesse de Blythe. USA, été 1932. Dans son biplan, George Palmer se rend de Las Vegas à Blythe. Brusquement, à environ 30 kilomètres de Blythe, deux géogly-

phes se détachent sur le fond monotone du dé-sert. Une figure humaine étendue sur le dos et, à proximité, un animal aux pattes grêles. Un cercle très irrégulier entoure le dessus de la silhouette humaine, et la traverse au-dessous des genoux. Intrigué par sa découverte dont il flaire l'importan-ce, Palmer revient sur les lieux une semaine plus tard et réalise quelques mauvaises photogra-phies aériennes qu'il soumet au docteur Wood-ward, conservateur du musée de Los Angeles. Celui-ci, convaincu de l'intérêt présenté par les géoglyphes, alerte les autorités militaires U.S. qui effectuent alors une reconnaissance aérienne détaillée. En possession des excellents clichés de l'armée, Woodward organise ensuite une ex-pédition terrestre. Comme à Nazca, comme à Pisco, les figures sont dessinées dans le sable. La couche supé-rieure, brunie par les éléments, est écartée au profit de la couche inférieure, beaucoup plus clai-re. Le sable enlevé sert de contrefort à la tranche du tracé, ce qui lui donne beaucoup de relief. Le grand cercle irrégulier est le résultat du martela-ge du sable par des milliers de danseurs qui ef-fectuèrent sans doute autour de la figure d'inter-minables danses rituelles. L'ensemble est d'un primitivisme total : technique simple, échelle mo-deste (la figure humaine mesure 40 mètres de long), tracé malhabile. Et le docteur Woodward attribua le tout à une antique tribu d'Indiens. En 1951, grâce à l'effort collectif de plusieurs institutions scientifiques et de l'aviation américai-ne, une nouvelle expédition fut mise sur pied. Cette fois, des avions de reconnaissance, des bateaux sur coussins d'air, des hélicoptères y

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Le « robot » du Chili, accompagné d'autres géo-glyphes de dimension plus réduite (reproduits ici à une échelle voisine). La figure du milieu pour-raît être une transition avec les figures de Nazca.

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participèrent. Ils explorèrent toute la région sau-vage des abords du Colorado qui fut habitée, il y a de nombreux siècles, par des tribus indiennes, les Yumans. D'autre géoglyphes furent décou-verts, qui livrèrent la clé de l'énigme. La silhouet-te était celle de la féroce déesse Hâ-âk, la dévo-reuse d'hommes. Celle-ci fut un jour terrassée dans le désert par le dieu Grand-Frère. Moralité. Dans cet article essentiellement descriptif, j'ai pleinement conscience de n'avoir rien résolu du tout. La déesse de Blythe ne m'a pas attendu pour livrer son secret. Le robot du Chili a gardé le sien, mais il est probable que l'explication soit aussi simple qu'à Blythe. Quant au chandelier de Pisco qui est le plus important des trois sites, sa réalisation dut aussi être relativement simple, et sa signification autant que son origine demeurent mystérieuses. Si le gigantisme et la difficulté de réalisation sont pris comme critères pour juger

les civilisations productrices de géoglyphes, alors bien sûr nous devons placer largement en tête les auteurs des pistes de Nazca, qui réalisèrent un tour de force digne d'une grande civilisation. A très bonne distance nous classerons Pisco puis le robot chilien ; enfin, bonne dernière, la déesse de Blythe. Ceci prouve une seule chose : de nombreux peuples de la primhistoire firent usage de géoglyphes, et la beauté de ceux-ci est direc-tement proportionnelle au degré de civilisation des auteurs. Cela n'a rien d'étonnant : en notre vingtième siècle également, la construction de New York exige un niveau technologique infini-ment plus élevé que la réalisation d'un modeste village de cases africaines. Et nous en arrivons ainsi, invariablement, à une des certitudes de l'équipe de KADATH : dans un passé très reculé, tout comme à notre époque, de brillantes civilisa-tions ont côtoyé les peuplades les plus primitives.

JACQUES VICTOOR

Et ce n'est pas tout !... Voici un gigantesque trapézoïde situé sur une montagne non loin de Lima.

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JACQUES BERGIER : DES ENGINS AERIENS. C'est dans le cadre de nos possibilités que je vais tenter d'imaginer et de décrire ce qui s'est passé à Nazca. Si la vérité est un jour révélée, ma descrip-tion paraîtra peut-être ridicule, mais je n'y peux rien. Cette description comporte deux variantes. 1. L'utilisation pour établir les tracés de Nazca d'un véhicule analogue à nos véhicules à coussin d'air, par exemple l'aérotrain. Volant à deux ou trois mètres du sol, cet engin, que la population devait regarder avec une admiration mêlée d'ef-froi, a soulevé les cailloux en les aspirant, puis les a projetés sur les côtés du tracé à charge pour la population de les ranger en tas. Avec une techno-logie de cet ordre, on pourrait probablement établir les tracés de Nazca en un mois. Après quoi, l'en-gin, probablement téléguidé, est monté au ciel et a été récupéré par un astronef ou une capsule en orbite. De nombreuses légendes de ce genre exis-tent au Pérou, mais les spécialistes, on le sait, refusent de prendre les légendes au sérieux. 2. Une seconde version suppose que les tracés ont été faits par la population locale qui suivait les ordres sinon directement des Intelligences, du moins d'une race supérieure qui les représentait. Ce qui soulève certains problèmes : les tracés n'ayant leur sens que vus d'en haut, comment faire comprendre aux populations locales ce qu'el-les devaient faire ? Le Professeur J. Alden Mason, savant très respectable, curator emeritus de l'Uni-versité de Pennsylvanie, avance que les tracés de Nazca ont pu être réalisés à partir d'un modèle réduit, par exemple un dessin. Mais qui aurait établi le dessin ? Et cette hypothèse ne tient pas compte de l'énorme difficulté qu'on rencontre à faire travailler des primitifs d'après un plan ou une photographie. On l'a essayé, notamment pendant la Seconde Guerre mondiale, pour la construction d'aérodromes et personne n'y est jamais parvenu. II me semble que l'hypothèse du Professeur Ma-son doit être rejetée. On peut se représenter une scène assez sembla-ble à celles de la Bible et des légendes. Après un certain nombre de miracles, une voix se fait enten-dre, le peuple se rassemble et chaque ouvrier reçoit des instructions précises sur ce qu'il a à faire dans un territoire déterminé. L'ensemble de la manœuvre étant dirigé à partir d'un hélicoptère, d'un ballon ou de quelque engin capable de voler au point fixe, et que nous n’avons pas encore inventé. L'œuvre dure des années, voire des dé-cennies et, lorsqu'elle est finalement achevée, les Intelligences ou leurs représentants s'en vont. Ils auront laissé un certain nombre de techniques, notamment l'usinage du platine, qui fut connu pratiquement de tout temps au Pérou et que les Européens n'ont maîtrisé qu'en 1730, avec des méthodes très inférieures à celles des Péruviens. Ce qui est établi positivement grâce aux recher-ches de Bergsoe.

A quoi a servi tout ce travail ? Sans doute à cons-truire une sorte de cosmodrome où l'on puisse amener, pour qu'ils soient récupérés par des en-gins relativement simples, optiquement autogui-dés, les enregistreurs qui ont rassemblé les infor-mations sur ce qui se passe sur la Terre. Voilà la partie du tracé qui ressemble à un dessin abstrait. En ce qui concerne la partie figurative qui repré-sente des êtres non humains et des objets bizar-res, on peut émettre diverses opinions. Elle peut être là par un simple fait décoratif ; l'art peut se mêler à la technique et l'on plante bien des fleurs sur les aérodromes. Cette partie figurative peut aussi représenter, selon une notation de l'époque, les constellations célestes avec lesquelles les visiteurs voulaient être associés. II se peut enfin que les interprétations soient complètement faus-ses, que ce que les archéologues appellent « animal inconnu » représente les visiteurs, que ce qu'ils appellent « baleine » soit en fait un astro-nef, etc. II faut bien se dire qu'un archéologue, même contemporain, voyant une représentation du véhicule LEM qui s'est posé sur la lune conclu-rait sans hésitation qu'il s'agit d'un insecte. II fau-dra sans doute déchiffrer soigneusement les figu-res « abstraites » pour savoir si les spirales cor-respondent à des nébuleuses connues, comme c'est le cas pour des spirales analogues découver-tes en Sibérie.»

(In. « Les extra-terrestres dans l'Histoire » Ed. J'ai lu n° A 250. 1970)

ROBERT CHARROUX : LES VENUSIENS. « La Nazca, en elle-même, est une énigme impé-nétrable mais qui se dévoile, s'éclaire jusqu'à de-venir lumineuse quand on la replace dans son contexte (...) Incontestablement, une lueur jaillit dans le sens nord ouest-sud est donné par la ma-jorité des tracés de la Nazca *, par l'axe du Can-delabro et par la ligne incroyablement droite où se situent la nécropole de Paracas, les grottes à pier-res du docteur Cabrera **, la Nazca et la fascinan-te Puerta del Sol, toute grande ouverte sur le che-min des sanctuaires (...) (Ces trois points) corres-pondent aux endroits où sont situés les trois sanc-tuaires secrets des Andes ! En effet : — Paracas : nécropole destinée aux Etrangers

masculins, blancs, barbus, aux cheveux roux, dont on ne sait rigoureusement rien.

— Nazca : crypte où les Ancêtres Supérieurs ont enfoui l'histoire inconnue des hommes* (les pierres du docteur Cabrera).

— Tiahuanaco, cité-temple énigmatique où, sur la Puerta del Sol, sont dessinées des machines étranges * et des hommes à quatre doigts * n'appartenant pas plus à notre race que les Ancêtres Supérieurs sans pouce des pierres du docteur Cabrera.

Hypothèses de conversation * Hypothèse de conversation : hypothèse invérifiable dans l'état actuel de nos connaissances.

* Affirmation gratuite (NDLR). **Authenticité douteuse (NDLR).

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Etrange coïncidence, en vérité, si l'on y ajoute la pampa de Nazca, juste en bordure de la ligne, avec des milliers de pistas allant en tous sens, mais principalement en direction NO-SE *, et le temple du Soleil de l'île la plus sacrée du lac Titi-caca, là où, selon une tradition, la mère de l'huma-nité, Orejona, aurait débarqué « d'un astronef aussi brillant que le soleil » *. D'autant qu'Orejona avait des mains à quatre doigts et un crâne allon-gé en pain de sucre, ce qui est en corrélation évi-dente avec les crânes géants et allongés de la même façon trouvés à Tiahuanaco et qui sont exposés actuellement dans un musée de La Paz ! Un aussi fantastique mystère évoque irrésistible-ment une race d’êtres supérieurs, non originaires de notre Terre ! La logique la plus élémentaire nous oblige, avec les incertitudes que comportent les faits, à aiguiller notre imagination et nos tenta-tives d'explication vers l'hypothèse, audacieuse mais cernant parfaitement le problème, d'un mes-sage venu soit d'une autre planète ; soit d'un peu-ple disparu depuis de longs millénaires. Dans ce cas, le Tridente de los Andes serait un repère, un poteau indicateur destiné à orienter les investiga-tions des archéologues éclairés de nos temps (...) La Porte du Soleil de Tiahuanaco a été orientée de façon à ce que le soleil du solstice qui se lève le matin pour l'éclairer en pleine face passe ensui-te par son ouverture pour aller se poser sur la Nazca, Ica et Paracas. Quant à l'énigmatique Tri-dente, terminus de la « ligne sacrée », il est gravé

sur une colline dont la pente moyenne est de 38°, de telle sorte que ses trois sommets pointent vers le ciel dans une direction bien déterminée. Que désigne donc la fourche symbolique du dieu Océan ? La Terre de Mu, qui dans des temps lointains émergeait vers l'autre bord du Pacifique ? II est difficile de retenir une telle suggestion si l'on veut — et on le doit — tenir compte de l'inclinaison des collines de Paracas. Ce n'est pas par hasard que la « ligne sacrée » Tiahuanaco-Nazca-Ica s'élève brusquement comme pour indiquer un point du ciel très probablement en relation avec les Grands Ancêtres qui fondèrent les sanctuaires ou en mémoire de qui ils furent édifiés. Or, précisément, dans la direction donnée, à quel-que 40 millions de kilomètres, Vénus la Verte, la Divine, étincelle chaque soir et pare le firmament de son émeraude incomparable. Vénus, patrie de Chasca, de Viracocha, d'Orejona, selon les tradi-tions ! Patrie aussi, peut-être, des Initiateurs de la science terrestre ! Et quand Vénus, en courtisane soumise, accompagne Inti, le dieu Soleil, en décri-vant une révérence de 180°, le Trident des Andes, alors, pointe en direction de Sirius, la Sothis des Egyptiens, la mère de notre système solaire d'après les Dogon d'Afrique. Or, Sirius occupe une place primordiale, non seulement dans la mytholo-gie des peuples, mais aussi dans leur astronomie opérative. »

(in « L'énigme des Andes », Ed. Robert Laffont, 1974)

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Hypothèses de travail * * Hypothèse de travail susceptible de vérification en l'occurrence dans la société et la culture des Indiens du Pérou JACQUES BERGIER : LA CLAIRVOYANCE. Je pense qu'il y a deux explications possibles de Nazca. La première m'a été donnée par un ami revenant de Chine. II a vu à Canton, sur la grand'place, 600.000 jeunes gens et jeunes filles chinois qui s'étaient réunis, qui avaient formé une fleur, puis la fleur tournait lentement sur elle-même Imaginez qu’on fasse la même chose sur un terrain sablonneux pendant deux mille ans, il restera l'empreinte d'une fleur. Et il y a encore une autre hypothèse. On a fait des études sur des gens clairvoyants, et on a constaté que, très souvent, la vision qu'ils ont de l'objet est une vision prise d'en haut. J'ai trouvé cela en lisant les travaux sur Ted Serios, un clairvoyant américain, qui empreinte sa pensée sur des pellicules vierges polaroïd ; ceci en présence de prestidigitateurs et d'experts de chez Polaroïd. Or, le Professeur Eisenbud observe dans son livre sur Serios que les photos obtenues sont toujours prises d'en haut. Alors, il y avait peut-être à Nazca des grands prêtres qui pouvaient en quelque sorte projeter leur vision d'en haut, et diriger ensuite les opérations en voyant ce que ça donne. Ils disaient : allez creuser là ou là, parce qu'ils désiraient que ça fasse un puma ou autre cho-se, eux le voyant d'en haut. Evidemment, c'est une explication qui ne plaira pas aux rationalistes,

(Communication personnelle) FREDERIC ENGEL : UNE AUTOCRATIE CABALISTIQUE. « Personnellement, nous serions assez porté à chercher dans les « lignes » un sens cabalistique, religieux ; leur existence est, à notre avis, un des points très importants de l'histoire des Andes et qui aurait pu fournir des indices relatifs à l'organisation socio-politique des Nazca, pour autant que ces derniers aient vraiment été les créateurs de ce complexe, qui aurait également pu être l'œuvre d'une société plus ancienne. Pour être en mesure de choisir l'emplacement optimum pour créer les lignes, il fallait commander de façon auto-cratique dans un territoire très vaste, dans lequel on disposait d'un pouvoir autoritaire ; ces exigences ca-drent mal avec l'idée que nous nous faisons des Nazca, que nous imaginons organisés en chefferies grou-pant des pécheurs ou des agriculteurs encore chasseurs de têtes. »

(« Le monde précolombien des Andes »)

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GÉRALD HAWKINS : UN CULTE DE LA FERTILITE. « Les marques dans le désert sont mortes, muettes, des modèles géométriques — rectangles, triangles, zigzags —, mais les figures sont celles d'êtres vivants. La plupart d'entre elles peuvent être directement en rapport avec la fertilité. Cette troisième patte de l'araignée, les organes sexuels du singe, le chien, le chemin en épingle à cheveux menant dans le pollen de la fleur. Les signes de vie dans le désert paraissent témoigner d'une préoccupation de la nature, et la même connaissance se retrouve dans les motifs des céramiques nazcas. Ceci n'est rien de plus qu'une spéculation. Des symboles de fertilité dans un désert mort ? Une sorte de rite de la fertilité avait-il lieu sur ces rou-tes ornementales — un culte sexuel orgiaque, au service de la vie dans un désert qui anéantit la vie ? Je suis ame-né à croire que le plateau, flottant sous les montagnes violettes, était un ancien lieu sacré péruvien, un séjour des esprits. Une ligne ou une forme géométrique gigantesque pourrait avoir été tracée comme une expiation pour plaire aux dieux. Quelles que fussent les inventions des constructeurs, les lignes servaient sur le sol comme grille d'orien-tation pour placer et situer la poterie cérémonielle. Le corps pourrait avoir été enterré dans une tombe de la vallée, avec une coupe, tandis que l'âme serait placée dans une coupe jumelle, assortie, dans le désert. Ou alors l'offrande commémorait peut-être un événement tribal ou familial. Peut-être les poteries funéraires rete-naient-elles la puissance de la vie, la fertilité, ainsi que l'avenir inconnu — un génie, un esprit gardien avec lequel communier, dans la solitude de cet endroit qui n'est pas de ce monde. »

(« Beyond Stonehenge ») ANTOON VOLLEMAERE : UNE ACADEMIE A CIEL OUVERT. Voyons les choses en face. De la comparaison de centaines de lignes, de trapézoïdes et de figures géométriques et zoomorphes dans un désert du sud du Pérou, il ne me vient pour l'instant qu'une possibilité à l'esprit. Notons les points de départ. II y a, à première vue, une centaine de lignes et trapézoïdes « inutiles », ce qui fait songer à des exercices et des figures dont on ne sait quoi faire. La région est vraiment hostile à l'homme, le désert n'encoura-geant certainement pas l'habitation régulière. II faut donc une raison très valable et obligeante pour forcer l'homme à travailler et justifier amplement sa présence dans un coin si ingrat du Pérou : soit une punition (des travaux for-cés), soit des motifs politiques ou religieux importants, ou ... Supposons un seul instant que le désert de Nazca à Palpa soit un camp de prisonniers ou une grande école en plein air, ou les deux, et que les centaines de dessins soient les exercices pour de futurs maîtres-constructeurs de route ou de futurs architectes, aidés par des prison-niers par exemple. Cela expliquerait bien une grande partie des lignes et trapézoïdes « inutiles », mais ne convien-drait pas tout à fait pour expliquer la présence des figures. Pour cette raison, il ne faut pas trop s'emballer pour cette possibilité hypothétique, qui vaut probablement plus que ce qu'on a donné jusqu'à ce moment, mais qui sera certai-nement moins bonne que ce que la science trouvera demain comme réponse à l'énigme du désert de Nazca.

(Communication personnelle) SIMONE WAISBARD : DES CLANS D'HOMMES VOLANTS. Ce que je soupçonne comme davantage possible, c'est toujours cette idée, qui est à la base de tout le peuple péru-vien, même à l'heure actuelle, l'idée des clans totémiques. Contrairement à ce que dit Engel, je connais des Indiens qui s'appellent « Puma », et tout le clan se nomme ainsi, et un autre groupe s'appelle « Condor », etc. II y a toujours l'ancêtre commun, et il y a toujours la pacarina, l'endroit de la naissance. On peut penser que, sur la pampa, ils ont tracé une ligne en direction de l'endroit de la sierra d'où ils pensent être venus, et cette ligne viendrait en rejoindre une autre, issue d'un autre groupe, qui se serait joint à eux à une certaine époque. Et toutes ces lignes finissant par aboutir à une ligne parallèle, qui aboutit à un centre ou une figure. Le plateau de la pampa est surchauffé, et cela provoque de très fortes ascendances au point de créer des tourbil-lons de sable qui montent comme des colonnes sur plusieurs mètres de haut. Et il y a une chose dont personne ne parle, et qui m'étonne beaucoup : si vous allez dans les musées au Pérou, vous verrez partout de magnifiques tis-sus de Paracas avec des hommes volants : il n'y a aucun doute, les dessins représentent des personnages mas-qués extraordinaires, mais qui sont en position de vol ; et qui ont autour d'eux des cuisantes d'accessoires, comme un cerf-volant. Elisabeth Della Santa, qui y a pensé aussi, fait provenir les Nazcas des Brahmanes, au travers de la Chine. Engel et d'autres n'y sont pas opposés. Ce serait parallèle aux céramiques de Valdivia, qui sont identiques à celles du Jômon japonais. Et il y a les traditions qui racontent que les Chimus et les Mochicas sont arrivés sur des bateaux. Par conséquent, comme le cerf-volant était utilisé en Chine dans les rites magiques, il est très possible qu'Il y en ait eu des survivances. Et dans ce cas, n'auraient-ils pas utilisé ces courants ascendants pour voler ? C'est très possi-ble, on ne peut le repousser car, lorsqu'on a vu les tissus de Paracas, on est obligé d'y penser. Seulement, de là à voler droit : comment stabiliser un cerf-volant ?... II ne reste aucune trace de ces cerfs volants, car ils devaient être faits en matières périssables.

(Communication personnelle) … Au moment de mettre sous presse, on apprend qu'une expérience, financée par l'International Explorer Society, vient d'être tentée au-dessus de Nazca à l'aide d'un ballon. Un chercheur américain, Jim Woodman, aidé d'un pilote anglais, Julian Nott, devait démontrer que les anciens Péruviens auraient pu diriger les travaux à partir du ciel. Ils ont donc survolé Nazca à bord d'un ballon, baptisé « Condor », dont l'enveloppe et la nacelle sont faites dans les mêmes matériaux que ceux utilisés couramment au Pérou ; l'air du ballon est chauffé par un feu de roseaux coupés au bord du lac Titicaca. La première hypothèse de travail à être mise à l'épreuve est donc celle de Simone Wais-bard. Espérons maintenant que l'expérience ne se bornera pas à démontrer simplement que nous sommes encore capables, à notre époque, de construire des montgolfières... (NDLR)

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