Jérémy FisherL’Arbre Bleu et Ton Texte Georges!

Théâtredès 7 ans

Dès avant sa naissance, le petit Jérémy Fisher n’est pas comme tous les autres enfants. Son papa et sa maman sont intrigués mais très heureux d’avoir cet enfant qui a des pieds palmés et qui, petit à petit, se transformera en poisson. Ils l’accompagneront jusqu’à sa nouvelle maison, l’océan.

Maison de la Culture d’ArlonSaison scolaire 2015-2016

livre « coup de coeur » choisi par la Bibliothèque communale d’Arlon

Dans sa tête / Rémi Courgeon. – JBZ, 2010Pik fait souvent d’horribles cauchemars qui le réveillent la nuit, le hantent le jour, et inquiètent ses parents. C’est que dans le fond de son cerveau, il y a un petit bonhomme caché dans une pièce secrète, un petit bonhomme qui imagine les rêves que Pik fera. Selon l’humeur du bonhomme, les rêves sont épuisants, terribles ou apaisants. Malgré son désarroi, Pik n’abandonne pas le terrain. Il lui faut convaincre le bonhomme des rêves de le laisser vivre et grandir, et peut-être, un jour, écrire pour faire rêver les gens à son tour …Dès 6 ansRangé à : Album Jaune C

Préparer sa venue au spectacle...

C’est prendre le temps de présenter le spectacle qui sera vu (quelques minutes suffisent) : titre, histoire, thèmes... cela dépend du spectacle.

C’est prendre le temps de parler du rôle que joue chaque spectateur dans un spectacle vivant (les codes d’une salle de théâtre ne sont pas les mêmes que ceux du cinéma ou de l’école) : pourquoi ne peut-on pas manger dans la salle, pourquoi les plus petits bruits s’entendent d’un côté à l’autre de la salle, comment peut-on aider les comédiens à jouer «au top», qu’est-ce qu’un bon public...

Au spectacle, je reçois un ticket d’entrée que je donne à la personne qui se trouve à la porte.Je m’installe confortablement sur le siège que l’on m’indique et je ne joue pas avec.Je suis prêt à recevoir le spectacle car c’est pour moi que les artistes vont jouer.

Pendant le spectacle...

La lumière s’éteint dans la salle. S’il fait noir, c’est pour mieux voir ce qui se passe sur la scène.

Nous ne sommes pas devant la télé, il y a de vrais acteurs sur le plateau qui parlent à de vrais spectateurs. Je les entends et ils m’entendent aussi!

Je ne mange pas, j’évite de faire du bruit avec mon fauteuil ou mon ticket. Tout le monde profitera mieux du spectacle dans le silence.

Je ne parle pas à mes voisins.Ce que j’ai envie de dire sur le spectacle, je le garde dans ma tête jusqu’à la fin de la représentation. Parfois les acteurs prennent le tempsde répondre aux questions après le spectacle.

Les comédiens reviennent sur scène et nous font un salut. On les applaudit pour leur travail.

Prolonger sa venue au spectacle...

C’est prendre le temps de revenir sur le spectacle vu. De multiples angles de vue sont possibles: retour critique et argumentatif, ressenti et émotions vécues, discussion «philo» sur les thèmes ou la forme artistique, etc.

Pour nourrir votre réflexion, nous vous proposons de colorier la Rosace des émotions

Préparer / vivre / prolonger sa venue au spectacle

Et après... Colorie la Rosace des émotions

un peu beaucoup énormémentpas du tout

C’est quoi une émotion ?C’est un peu à cheval entre un sentiment et une sensation.Les idées, c’est dans la tête.Les sentiments, c’est dans le coeur.Les sensations, c’est par les 5 sens.Les émotions, c’est dans le corps.

Librement inspiré de la rosace des émotions de Robert PlutchikCe document est téléchargeable sur notre site : www.maison-culture-arlon.be/scolaireN’hésitez pas à nous envoyer des copies de votre classe afin de connaître les émotions des enfants par rapport au spectacle visionné.Info : Marie Hainaut, animatrice - m.hainaut@maison-culture-arlon.be - 063/ 54 58 57

Durant le spectacle, nous avons été traversés par des émotions de toutes sortes. Certaines arrivent à petits pas et d’autres, à grand fracas.Chacun les ressent et les exprime différemment.Colorie ta propre rosace d’émotions !

curiositéorange

joiejaune

colèrerouge

surprisebleu clair

peurvert foncé

ennuimauve

admirationvert clair

tristessebleu foncé

« L’arbre bleu » présente….

Jérémy Fisher Une pièce de Mohamed Rouabhi

Note d’intention pédagogique

« Une éducation réussie, c’est aller à la découverte du multiple, du divers et de la relation. » (Barbara Cassin, philosophe, directrice de recherche au CNRS)

Quelques mots sur Jérémy Fisher…

Dès avant sa naissance, le petit Jérémy Fisher n'est pas comme tous les autres enfants. Son papa et sa maman sont intrigués mais très heureux d'avoir cet enfant qui a des pieds palmés

et qui, petit à petit, se transformera en poisson. Ils l'accompagneront jusqu'à sa nouvelle maison, l'océan.

Ce conte théâtral de Mohamed Rouabhi est un prétexte pour aborder avec les enfants les thèmes de la différence et de la tolérance. Comme chacun sait, la fonction du conte est d’alimenter l’imagination des enfants et de leur procurer des frayeurs qu’ils pourront apprivoiser, exorciser et surmonter grâce à l’issue heureuse et libératrice du récit. Jérémy Fisher remplit parfaitement cette fonction : tout au long du récit, le spectateur – idéalement entre 8 et 11/12 ans-accompagne Jérémy et sa famille lors des différentes étapes cruciales de son évolution. L’annonce de la différence, d’abord, qui suscite l’effroi et l’inquiétude chez les parents. La naissance, ensuite, synonyme de joie et de perplexité. C’est le moment de la rencontre avec la singularité. Le temps des ajustements. L’instant où le spectateur va assister, pour la première fois, à la confrontation de la différence de son héros avec la réalité. Mais ce sont aussi les parents, autres héros de ce conte, que nous suivons et au combat desquels nous ne pouvons qu’adhérer. Un combat sous-tendu par un amour parental inconditionnel, un message positif inscrit en filigrane dans toutes les scènes. Tous les moments-clés de la pièce, tous les sentiments abordés, sont autant d’occasions de réfléchir ensemble aux thèmes de la différence, de la « normalité » et de l’identité. Grâce au spectacle en lui-même mais aussi par le biais de diverses animations en classe que la compagnie proposera à toutes les écoles qui assisteront au spectacle.

*** L’identité de la personne handicapée est souvent ramenée à leur différence visible et la solidité de leur monde intérieur est mise à mal par le regard des autres, tantôt fuyant, tantôt curieux ou insistant. « Jamais à la bonne distance », comme le dit Bertrand Quentin dans « La philosophie face au handicap. Car toute personne enfant a besoin, pour bien grandir, pour se développer harmonieusement, du regard empathique de l’autre. Du regard aimant d’un père ou d’une mère, du regard encourageant d’un professeur, du regard amical d’un camarade. Et c’est cette notion de « juste distance » que nous voulons essayer d’apporter aux enfants par l’intermédiaire de l’histoire de Jérémy Fisher. Le manque d’éducation à la différence engendre la peur et la peur engendre le rejet. En œuvrant dans les écoles, en donnant à voir une histoire telle que celle de Jérémy Fisher, nous voulons éveiller la curiosité des enfants et atténuer la peur née de l’ignorance. Loin de les culpabiliser, nous voulons leur apporter ouverture d’esprit, attention et curiosité. Des qualités qui, réunies, forment le respect et induisent un regard bienveillant sur l’Autre.

Créée en 1997 au Théâtre de Sartrouville par la compagnie de Mohamed Rouabhi (« Les

acharnés »), la pièce a été éditée dans la collection « Heyoka Jeunesse ». Pour rappel, il s’agit

d’une collection fondée par Christian Dupeyron et coéditée par Actes Sud- Papiers et le

Théâtre de Sartrouville. Son objectif avoué est de conforter « les passerelles nécessaires

entre l’éphémère de la représentation et la mémoire de l’écrit » mais aussi « de participer à

l’émergence d’un répertoire théatral ambitieux pour l’enfant spectateur et de susciter de

nouvelles écritures. »

Jérémy Fisher sert également de livret à l’opéra du même nom, créé en 2010 à l’Opéra

National de Lyon, sur une musique d’Isabelle Aboulker et dans une mise en scène de Michel

Dieuaide. Suite au vif succès rencontré par ce – trop rare- opéra pour enfants, il est repris

une nouvelle fois en juin 2014.

Note d’intention artistique

Chaque fois qu’une idée de spectacle germe dans mon esprit, elle fait éclore cette question: «Qu’allons-nous apporter à notre public avec cette pièce ? En quoi sera-t-il changé, grandi à la fin de la représentation ? ». Avec Jérémy Fisher, la réponse m’a paru évidente: nous allions pouvoir plonger les enfants dans un univers merveilleux tout en les emmenant à la rencontre de la « différence ».

« Je m’appelle Jérémy Fisher et l’histoire que je vais vous raconter est une histoire vraie : c’est l’histoire de ma vie. J’ai vécu les choses que je vais vous raconter et si un jour, dans la rue, un inconnu vous parle de moi, ne dites pas : « oui, je sais » : oubliez tout et passez votre chemin. Ne les répétez à personnes ces choses, les plus étranges qu’un être humain doué de raison ait pu entendre sur la Terre. »

C’est par ces mots, prononcés par un Jérémy hors du temps et de l’espace, que commence l’incroyable histoire de Jérémy Fisher. Ce processus de distanciation utilisé dans l’écriture de Mohamed Rouabhi, j’ai choisi de l’exploiter pleinement dans ma mise en scène. Jérémy, installé en bord de scène, un peu à l’écart du décor principal, entamera un dialogue direct avec les spectateurs. Ce parti pris me permettra de créer une réelle intimité avec les enfants et de les amener à découvrir sur scène les projections de la pensée du héros.

*** Dans la scène d’introduction, les spectateurs font connaissance avec Tom et Jody, les parents de Jérémy. De retour de pêche, Tom retrouve Jody et lui relate son périple en mer : le jeune Foster a disparu en mer, emporté par une lame. Juste avant, une étrange baleine, prisonnière des filets, l’avait attaqué. Un drôle d’animal, “une chose qui n’aurait jamais dû exister sur cette terre“, que Foster finit par tuer. Un instant après, Jody annonce à Tom qu’elle attend un enfant. La rencontre de Tom avec cette baleine hors-normes nous place au cœur du sujet : que provoque chez nous la confrontation avec l’étrangeté? Force est de constater que ce sont souvent la peur, l’ignorance, la méconnaissance et les fausses croyances qui guident nos premières réactions face à la différence. Et les parents de Jérémy n’échappent pas à la règle.

***

La deuxième scène se déroule chez le médecin, le jour d’échographie. Tout va bien, à un détail près : le petit garçon a les doigts palmés. C’est le moment du choc. Le temps du pourquoi. Les parents de Jérémy, et les spectateurs avec eux, sont confrontés à la question de la normalité et à celle de mettre au monde un enfant différent. Cette survenue de l’étrangeté dans leur propre univers bouleverse Tom et Jody et les pousse à remettre en cause toutes leurs certitudes, à se défaire de leurs codes et à accepter de prendre un nouveau chemin inconnu. Aussi terrifiantes que soient l’annonce de la différence de leur fils et la notion d’étrangeté qui baigne la pièce, j’ai choisi de les communiquer aux spectateurs de manière résolument positive. D’un point de vue scénique, il s’agit de récréer un cocon familial, un endroit qui respire l’amour, dans lequel l’enfant peut projeter qu’on se sent bien. Ce décor rassurant sert mon objectif principal : celui de faire passer le message que l’on peut se sentir bien dans la différence. Lors des ateliers sur le handicap que j’anime, j’ai l’habitude de proposer un petit jeu de rôles aux enfants : ils ont pour consigne de recréer tous ensemble la cour de récréation d’une école pour enfants handicapés. Sans que je ne donne aucune autre directive, le résultat est frappant : les enfants miment la prostration et prennent des mines tristes. Comme si le handicap était l’opposé de la joie et du bonheur. Si j’ai décidé de monter Jérémy Fisher, c’est aussi pour démonter cette croyance tenace qui voudrait faire rimer à jamais malheur et handicap.

*** La scène 5, dans laquelle le directeur de la piscine veut faire de Jérémy une attraction, est pour moi l’occasion d’aborder le thème de l’enfant magique. A coup sûr, Jérémy séduira les enfants par son côté extraordinaire, par ses « super pouvoirs ». Mais, et nous aurons largement l’occasion de l’aborder lors de nos animations en classe, ce n’est pas toujours le cas. Si le handicap semble plus facilement accepté lorsqu’il se double d’un don fabuleux, visible de tous, je souhaite pousser les enfants à aller voir plus loin. A découvrir l’autre, différent, déficient, qui est pourtant « capable autrement. » Ce qui m’intéresse, comme c’est le cas dans tous mes spectacles, c’est de susciter la curiosité dans le regard de mes spectateurs.

*** Par le biais de toutes les autres scènes, pendant lesquelles on assiste à la grossesse de Jody, à la naissance de Jérémy et à son évolution, mon envie est d’emmener les enfants sur le chemin de l’acceptation. Le chemin que doivent emprunter Jérémy et ses parents s’ils veulent apprivoiser la différence. Personnellement, ce chemin, qui exige un sens aigu de l’observation et une grande capacité d’acceptation, me paraît être celui de la réconciliation avec soi-même et, donc, du bonheur.

Pour Jérémy, en effet, comme ce fut le cas pour moi et comme ça l’est pour toutes les personnes qui présentent une particularité, il s’agit de trouver sa place. Une place bien difficile à trouver, comme l’illustrent parfaitement les propos de la psychanalyste Simone Korff-Sausse : « Les handicapés sont nulle part. Ils occupent un non-lieu. Ou un entre-deux. Exilé sur le seuil, entre le non-être et le nulle part, comme le formule Charles Gardou (1997). « Cela signifie littéralement qu’il est sur la frontière. En situation d’arrêt. D’attente. De marge. De suspension. De périphérie. Sur le seuil. […] Il n’a pas encore sa place. Il flotte entre deux mondes. Son statut demeure indéfinissable » (p. 9). Ou comme le dit Murphy, « ni malades ni en bonne santé, ni morts ni pleinement vivants, ni en dehors de la société ni tout à fait à l’intérieur. […] L’invalide […] n’est ni chair ni poisson… »

*** Les deux dernières scènes donnent à voir la métamorphose finale de Jérémy: il devient poisson. Personne ne peut rien y changer. Jérémy a du mal à respirer, à voir, à entendre. Les parents de Jérémy accompagnent doucement leur fils vers son nouveau monde: l’océan. La pièce se termine sur ces quelques mots simples, qui reflètent toute la tendresse des parents pour leur enfant. « Adieu mon petit enfant, mon amour. Ne prends pas froid. » A mes yeux, ces deux dernière scènes illustrent la fin du processus d’acceptation, tant pour l’enfant que pour les parents. Pour Jérémy, il est temps de devenir qui il est. Il doit apprivoiser son handicap, l’accepter. En effet, cesser de se battre avec soi-même est la seule manière de ne plus être limité par sa différence. Pour Tom et Jody, il s’agit d’aller au bout du processus de deuil de l’enfant rêvé, d’offrir à leur enfant son autonomie et de faire le choix de ce chemin différent, qui peut aussi être celui du bonheur.