JOURNAL D’INFORMATION ET DE DEBAT DU … · terroriste, il s’est trouvé ... arrêter neuf...

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TRIMESTRIEL IPNS Institution Policière Néo Sarkosienne SOMMAIRE 2 Tarnac : la fabrique du terroriste 4 Dossier eau : État de l’eau sur le Plateau 5 Assainissement : Doit-on épurer nos standards de modernité ? 6 Eau potable : Régie directe ou gestion privée ? 7 Le Limousin, laissé pour compte des politiques de gestion de l’eau 8 Une peste de plus avec les pesticides, 3 éme partie 9 Les moutonniers sur la paille 12 “La bête du Limousin“, histoire de loups et psychose sociale 13 Lu et approuvé 14 La Pommerie, lieu d’ancrage de l’art contemporain sur le Plateau 15 Page écriture, les mots en liberté 16 Patrimoine : autour de l’eau JOURNAL D’INFORMATION ET DE DEBAT DU PLATEAU DE MILLEVACHES n 25 décembre 2008 3 EUROS Exclusif ! IPNS peut révéler ce qui s’est réel- lement passé à Tarnac le 11 novembre 2008. Un commando terroriste composé de 150 membres, cagoulés et largement armés, a pris d’assaut le village de Tarnac dès l’aube en concentrant son attaque sur la ferme du Goutailloux et sur l’épicerie restau- rant du bourg. Selon les tactiques avérées des groupes terroristes, celui-ci a attaqué par surprise, investissant le village dans la plus totale clandestinité. La population et les autorités locales ont décou- vert au réveil cette cellule ultra- visible qui a démontré son extrême organisation. Ainsi plusieurs membres du commando s’étaient répartis sur toutes les routes qui mènent au village, bloquant ainsi les voies de communication et interdisant l’accès à la zone occupée. Semant la terreur et l’ef- froi, les 150 terroristes appartien- nent à une organisation dont le cerveau est une femme répondant au nom de code M.A.M. (celle-ci n’était pas présente sur les lieux). Le groupe est connu pour avoir de nombreux liens avec des groupes similaires dans les autres pays d’Europe et jusqu’aux Etats-Unis. De très nombreuses images télévi- sées ont du reste montré d’autres actions ultra-violentes de ces groupes lors de manifestations en marge de sommets internationaux. L’organisation de cette action terro- riste était en préparation depuis plusieurs mois. (Lire nos informations en page 2) 11 novembre 2008 150 terroristes à Tarnac!

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Institution PolicièreNéo Sarkosienne

SOMMAIRE

2 Tarnac : la fabrique du terroriste4 Dossier eau : État de l’eau sur le Plateau5 Assainissement : Doit-on épurer nos standards de modernité ?6 Eau potable : Régie directe ou gestion privée ?7 Le Limousin, laissé pour compte des politiques de gestion de l’eau8 Une peste de plus avec les pesticides, 3éme partie9 Les moutonniers sur la paille12 “La bête du Limousin“, histoire de loups et psychose sociale13 Lu et approuvé14 La Pommerie, lieu d’ancrage de l’art contemporain sur le Plateau15 Page écriture, les mots en liberté16 Patrimoine : autour de l’eau

JOURNAL D’INFORMATION ET DE DEBAT DU PLATEAU DE MILLEVACHES

n25 décembre 2008 3 EUROS

Exclusif !

IPNS peut révéler ce qui s’est réel-lement passé à Tarnac le 11novembre 2008. Un commandoterroriste composé de 150membres, cagoulés et largementarmés, a pris d’assaut le village deTarnac dès l’aube en concentrantson attaque sur la ferme duGoutailloux et sur l’épicerie restau-rant du bourg. Selon les tactiquesavérées des groupes terroristes,celui-ci a attaqué par surprise,investissant le village dans la plustotale clandestinité. La populationet les autorités locales ont décou-vert au réveil cette cellule ultra-visible qui a démontré son extrêmeorganisation. Ainsi plusieursmembres du commando s’étaientrépartis sur toutes les routes quimènent au village, bloquant ainsiles voies de communication etinterdisant l’accès à la zoneoccupée. Semant la terreur et l’ef-froi, les 150 terroristes appartien-nent à une organisation dont lecerveau est une femme répondantau nom de code M.A.M. (celle-cin’était pas présente sur les lieux).Le groupe est connu pour avoir denombreux liens avec des groupessimilaires dans les autres paysd’Europe et jusqu’aux Etats-Unis.De très nombreuses images télévi-sées ont du reste montré d’autresactions ultra-violentes de cesgroupes lors de manifestations enmarge de sommets internationaux.L’organisation de cette action terro-riste était en préparation depuisplusieurs mois.

(Lire nos informations en page 2)

11 novembre 2008150 terroristes à Tarnac!

TARNAC

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 2

Trimestriel édité par l’association IPNS.

Clin d’oeil à “l’imprimé par nos soins“ queconnaissent les associations, notre titre décline différem-ment ses initiales dans chaque numéro.

Directeur de publication : Michel Lulek23340 Faux la MontagneMise en page graphique, illustrations : Michel BernardImprimerie : Rivet Presse EditionImprimerie labellisée Imprim’vert.le journal IPNS est imprimé sur du papier recyclé avec desencres végétales.Commission paritaire :1012 G 81797 - ISSN : 1635-0278site : http://journal-ipns.org

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ÉditoLes évènements de Tarnac du 11 novembre ont

été l’occasion d’un pot-pourri médiatico-politiqueoù les mots et les faits se sont télescopés dans

une étrange novlangue où s’associaient sansvergogne terroristes et jeunes gens bien intégrés,matériel de maçonnerie et armes de destruction,culpabilité et présomption d’innocence, complot etcommunauté, ramifications et sécurité... Le discourspolitique et médiatique bégayait un scénario, qu’avecles mêmes mots et les mêmes faits, nous pouvonsnous amuser à décrire tout autrement – c’est le sensde notre une. Et sur ce registre, nous faisonsconfiance aux fins limiers de la police pour trouvertoutes sortes de phrases dans la collection entièred’IPNS qui serviraient à rendre “présumés coupables“beaucoup de nos lecteurs !

Le pompon a peut-être été décroché par le Procureurde Paris, Monsieur Jean-Claude Marin qui le 14novembre déclarait que le groupe arrêté avait le projet“d’actions plus violentes contre des personnes“ tout enreconnaissant qu’il ne disposait pas “d’éléments solidi-fiés, pour l’instant“ pour l’affirmer... (Le Monde du 16 et17 novembre). Formidable époque où soudain lesconséquences se mettent à précéder les causes, lesfaits, les preuves...

Nous donnons ici la parole aux personnes concernéesà Tarnac, qui nous proposent une analyse des évène-ments qui ont abouti à l’arrestation des neuf personnesmises en examen – auxquelles IPNS apporte ici sonsoutien et sa solidarité.

Pour contacter le comité de soutien :www.soutien11novembre.org

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TARNAC

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 3

La frappe “chirurgicale“ qui a atteint Tarnac un 11 novembre 2008, a eu deseffets collatéraux dans la région, en particulier sur un certain nombred’élus régionaux.

Une dizaine de jours après ce spectaculaire, et très médiatique, show anti-terroriste, il s’est trouvé que la commission permanente du Conseil régional(Limousin) a été amenée à tenir une réunion afin de statuer sur l’attributiond’aides. Un certain Bélézy (président de la fédération MoDem 87 – c’est tout dire !) crutbon de signaler à ses collègues un dossier, à ses yeux, des plus sulfureux ! Ledossier d’aide à la création d’entreprise pour le “Magasin Général“ de Tarnac.Et cet individu, sans aucune hésitation, demanda l’ajournement de celui-ciconsidérant “qu’il est présenté par des personnes mises en cause dans l’affairedes sabotages des lignes SNCF“. Rappelons lui quelques évidences :- les personnes mises en cause n’ont pas été jugées, par conséquent elles nepeuvent, aujourd’hui, qu’être considérées comme innocentes. C’est la basemême de la loi : la présomption d’innocence. Que certains, tels, peut-être, cetélu souhaite plutôt une “présomption de culpabilité“, c’est leur droit d’opinionmais pour le moment, ce n’est pas ce qui doit être appliqué, que des personnesles condamnent avant même l’enquête et le jugement, cela peut surprendre.- le dossier a été “présenté par des personnes“. En effet, il y a trois gérants,mais que nous sachions, il n’y a qu’une personne suspectée dans cette affaire.Jusqu’à preuve du contraire, les deux autres sont totalement étrangères àcelle-ci. Comment peut-on alors accepter que ces deux personnes se retrou-vent responsables collectivement de ce qui a pu arriver à la troisième ?

Après ces rappels élémentaires, on peut s’interroger sur le fait que la demandede l’élu ait été acceptée à l’unanimité ! Cela montre la couardise et la bassessedont peuvent faire preuve parfois de bonnes gens. Mais gageons qu’à laprochaine présentation du dossier, leur avis, telle une girouette bien huilée,puisse être tout à fait autre si le “vent“ médiatique (et d’une bonne partie del’opinion) a tourné.

Finalement, quoi de plus atterrant et lamentable que ces passe-passes politi-ques ?

PS : Nous venons d’apprendre que le Conseil régional vient d’avertir lesgérants du “Magasin Général“ que leur demande de subvention sera repré-sentée à la prochaine commission permanente. Comme nous pouvions nous yattendre, la girouette étant parfaitement huilée et le vent ayant tourné, lescourageux élus en question, après avoir hurlé avec les loups anti-terroristes,ont pu retourner leurs vestes sans aucune honte apparemment. La vie poli-tique régionale continue.

Francis Laveix

De la couardise à la bassesse

Le 11 novembre au matin, les usagers du railsortent de la terreur : on vient d’arrêter les“commandos anti-TGV“. Michèle Alliot Marie

parade, sa belle prise est exposée par les médias,embarqués depuis le début dans l’opération. Deuxjours plus tard, alors que la justice s’empêtre dansdes histoires de preuves introuvables, on sembleplutôt reprocher aux interpellés d’avoir eu “l’inten-tion“ de commettre de tels actes. Dans le mêmeélan, ils allaient pouvoir devenir une sorte de“cellule“, appartenant à une “nébuleuse“, qui s’enserait tôt ou tard, dans quelques années, pris auxvies humaines. Magie de l’antiterrorisme : àmesure que les faits se dématérialisent, l’affaires’aggrave.

La lutte antiterroriste ne s’intéresse pas tant auxactes qu’aux sujets qui pourraient les commettre.Un sujet, cela se fabrique. A partir de vies bienréelles, avec leurs particularités, leurs habitudes,leurs liens. Ces liens constituent d’ailleurs un objetd’investigation privilégié. C’est ainsi que la policeconstruit une “mouvance“, un “réseau“, ou n’im-porte quelle autre élucubration signifiant uneappartenance diffuse.

Fabriquer un sujet terroriste, cela consiste en desprocédures concrètes. Annoncer des menacesfutures, leur fabriquer des appellations. Fairearrêter neuf personnes au petit matin, par 150policiers cagoulés, armés jusqu’aux dents, un héli-coptère, des chiens renifleurs d’explosifs, la policescientifique... Les conduire dans des locauxspéciaux. Là, les garder quatre jours en cellule.Quatre jours ponctués d’interrogatoires nombreuxet interminables, aux termes desquels n’importequi serait prêt à avouer que sa grand-mère a conçules attentats contre le World Trade Center. Pasd’avocat, si ce n’est à la fin, quand on aura eu letemps de les questionner sur ce qui est essentieldans cette affaire : ce qu’ils vivent, ce qu’ils lisent,qui ils fréquentent. Il faut savoir s’ils ont manifesté,un jour, à Vichy, s’ils ont compris ou commisquelque ouvrage et pourquoi, mais pourquoi ilsn’habitent pas seuls, dans un appartement, maisvivent et s’organisent ensemble. Il n’y a plus alorsqu’à extraire de cela les éléments adéquats et lesretraduire dans le jargon de l’antiterrorisme.Produire ainsi, assortie de détails pittoresques,l’image de neuf clandestins, organisés en cellule,disposant d’un chef, et s’abreuvant d’un manuel de

lutte armée.Qu’importe que le fameux bréviaire secret setrouvât déjà en possession de plusieurs milliers delecteurs, qui avaient pu se le procurer dans n’im-porte quelle librairie. Qu’importe qu’il fût impossiblemême aux journalistes venus accréditer cettethèse de confirmer tant soit peu ce portrait de clan-destins reclus, coupés du monde. Le terme de“terrorisme“ a le pouvoir de changer l’eau en vin, etpour ceux à qui on l’applique, chaque aspect del’existence devient l’objet de soupçons si ce n’estune preuve accablante. L’absence même depreuve devient la preuve qu’on a affaire à desterroristes spécialement retors, des experts de ladiscrétion. La réalité à partir de laquelle on aconstruit ici des terroristes, cette réalité, la justicepeut toujours la trouver criminelle.

Notons que la SNCF recensait en 2007 vingt-septmille actes de malveillance contre son réseau ferré.Le sabotage à proprement parler est un acteencore banal dans toute grève, et le mouvementcheminot de l’automne dernier est encore venu lerappeler. Pour autant, et malgré la vive terreur quesemble provoquer un blocage du trafic ferroviaire,on n’avait pas encore brandi, dans de tels cas, lacatégorie “terroriste“, et l’arsenal judiciaire etpolicier exceptionnel qui l’accompagne. Ce quis’est passé le 11 novembre est une provocationobjective, qui a valeur de test. On assiste donc bienà une dérive législative qui désormais assimile audélit de terrorisme chaque forme d’oppositionsociale qui s’oppose aux gouvernements et auxinstitutions et permet d’attribuer la visée de terror-isme pour des activités comme des piquets degrève, occupations, boycottages ou sabotages demarchandises et infrastructures, alors qu’ellesappartiennent à la longue histoire des bataillessociales du mouvement ouvrier. Il va de soi que sil’affaire s’éteint doucement dans le silence, tandisque croupissent en prison ceux qu’on a sigrossièrement désignés à la vindicte universellecomme terroristes, rien n’empêchera que cesilence soit interprété comme un assentimentgénéral donné au procédé, et à ses applications àvenir. Ici, comme en Italie, en Allemagne ou ailleursen Europe et aux Etats-Unis, il est clair que l’an-titerrorisme n’est pas une série de lois d’exceptionque chaque pays s’accorde mais bien la base d’unnouveau régime de gouvernement mondial.

La fabrique du terroriste

dans la bibliothèque des inculpés de Tarnac, un journaliste de l’AFP fouille-merde ...

LaCrix

Laurence B

DOSSIER

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Les zones humidesLes zones humides sont très nombreuses maiselles sont menacées de fermeture par le manqued’entretien et la mise en place d’ouvrages destinésà les drainer. Rappelons que les zones humides onttrois fonctionnalités principales : un rôle de filtre, unrôle de régulation des débits et un rôle de préserva-tion de la biodiversité.

Le risque lié au manque d’entretienSans entretien approprié, les zones humidesévoluent vers une colonisation par des ligneux etelles perdent à moyen terme tout leur intérêt, lesfonctionnalités décrites ci-dessus n’étant plus assu-rées. Les zones humides doivent être gérées pourexister. La solution la plus adaptée au plateau restele pâturage extensif raisonné par des ovins. Il s’agitd’organiser une rotation rapide de troupeauxd’ovins sur des parcelles de faibles surfaces. Decette manière les refus sont relativement peunombreux, et les ligneux ne peuvent pas s’im-planter. Cette organisation du pâturage demandeun accompagnement technique et financier spéci-fique pour être viable à moyen et long terme. Desmesures agro-environnementales peuvent êtremises en place avec les acteurs intéressés.

Le risque lié au drainageDepuis quelques années (vraisemblablementdepuis 2000/2001), l’ensemble des intervenants auniveau de l’eau constate une augmentation deszones humides profondément modifiées du point duvue des écoulements hydrauliques. Il s’agit trèssouvent de l’implantation de “fossés drainants“ dontl’exutoire se trouve au niveau du cours d’eau. Cesfossés abaissent le niveau piézométrique1 deszones concernées et mettent donc en péril leszones humides. Ces fossés sont souvent réalisés àl’occasion de plantations forestières ou de mises enculture plus ou moins hasardeuses d’ancienneszones humides. Malheureusement, si la mise enculture est généralement un échec, les fossésrestent présents. A remarquer également, l’achat,par un nombre croissant d’agriculteurs, d’engins detravaux publics type tracto-pelle, qu’ils utilisentensuite pour réaliser ces fossés.

Les pollutions diffusesLe grand nombre d’assainissements individuelsprésents sur le plateau pose un problème de pollu-tion diffuse. Plusieurs niveaux distincts sontrecensés : l’absence de véritable équipement detraitement, le mauvais état de fonctionnement ou lamauvais implantation. Des SPANC2 sont mis enplace, cependant, compte tenu de la présence

d’eau sur une grande partie du plateau, les pres-criptions techniques relatives à l’assainissementindividuel devraient être strictement appliquées. Aucontraire, les observations menées montrent :- des rejets directs dans le milieu (sous prétexted’une pseudo “auto-épuration“ qui n’existe quedans le discours de ceux qui n’ont pas d’équipe-ment).- des équipements non entretenus, non vérifiés, quin’ont plus aucune efficacité après plusieurs dizainesd’années.- des équipements implantés dans le lit majeur decours d’eau, ce qui revient à un rejet direct dans cecours d’eau. [Pour ouvrir le débat, voir l’article sur l’assainissement,“Doit-on épurer nos standards de modernité ?“pagesuivante]

Les modes de gestion des bassinsversantsL’exploitation forestière et la création de pistesentraînent sur certains bassins versants du plateaudes perturbations au niveau des cours d’eau. Lespentes importantes favorisent en effet les arrivéesmassives de sables et de matières organiques dansles cours d’eau, dès qu’un sol se retrouve sansvégétation (ce qui est le cas des pistes et decertaines coupes). A noter que la création de fossés“tampons“ à l’aval des zones forestières exploitéeset des pistes est une opération simple, peucoûteuse, et très efficace.

La gestion de la ripisylve3

Sur une partie du linéaire des cours d’eau, la ripi-sylve n’est pas gérée. Soit elle est absente, soit elles’est développée de manière “sauvage“. Le premiercas entraîne une fragilisation des berges, un méan-drage anormal du cours d’eau, la création d’atterris-sements importants qui peuvent perturber la conti-nuité écologique, et la dégradation de la qualité del’eau (augmentation des matières en suspension).Le second cas pose, à terme, des problèmes d’em-bâcles4 (multiplication des embâcles dès qu’unévènement climatique un peu atypique survient).

Les seuilsCertains seuils, principalement d’anciennes prisesd’eau pour des biefs5 de moulin sont actuellementen très mauvais état, et n’ont plus aucune fonction-nalité. Ils représentent cependant un obstacle à lalibre circulation piscicole et sédimentaire. Dans lamesure où leur état actuel ne permet pas d’envi-sager leur remise en état, la question de leur effa-cement peut se poser. Ces effacements peuvent

être envisagés en fonction des sites et avec l’accorddes propriétaires. Les cas qui aboutissent sont trèsrares dans la mesure où un seuil, même en trèsmauvais état conserve souvent une valeur “patrimo-niale“ pour le propriétaire. Beaucoup de communi-cation et de pédagogie sont nécessaires !

Les étangsQuelques étangs sur le plateau sont en trèsmauvais état et présentent un risque potentiel pourle milieu aquatique. Il s’agit principalement d’étangsnon vidangés depuis plusieurs dizaines d’années,et colmatés par les sédiments. Dans ces conditions,toute vidange, volontaire ou accidentelle, repré-sente un risque important pour le cours d’eau aval.Un départ massif de sédiments peut colmaterplusieurs kilomètres de cours d’eau. Les consé-quences de ces épisodes sont malheureusementbien connues : au moment de l’arrivée des sédi-ments il y a destruction de toute vie aquatique parabsence d’oxygène, ensuite (parfois pendantplusieurs années) le colmatage des frayèresempêche toute reproduction. Il faut insister surl’obligation de mettre des solutions en oeuvre. Eneffet, plus le temps passe et plus la remise en étatde ces étangs devient difficile et l’idée assezrépandue de laisser l’étang se colmater pourdevenir ... un pré ... ou autre est une aberrationtechnique et hydraulique. Cette solution n’existepas ! Les deux seules solutions sont la remise enétat de l’étang ou son effacement.

RemarqueAttention tout de même, il s’agit ici de la liste deséléments “problématiques“ à moyen ou long terme.Il ne faut pas perdre du vue que le plateau reste uneréférence en terme de qualité de l’eau (pour l’ins-tant), et que à notre niveau c’est, et de très loin, lemeilleur milieu que nous ayons eu à étudier !

1 niveau supérieur de l’eau stable dans un aquifère. C’estle toit de la nappe souterraine. Aquifère : réservoir forméde roches perméables2 Service public d’assainissement non-collectif3 Forêt bordant un cours d’eau ou une zone humide4 Obstruction du cours d’eau par un amas de branches5 Canal qui relie un cours d’eau à une machine hydrau-lique

Sur le plateau de Millevaches, la qualité des cours d’eau est globalement bonne, voire excellente et des populations piscicoles enéquilibre sont présentes sur de nombreux linéaires. Cependant plusieurs éléments à enjeux restent à prendre en compte pourconserver cette bonne qualité globale, ingénieur spécialisé en eau et environnement, l’auteur dans cet article nous le rappelle.

État de l’eau sur le plateau

DOSSIER

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 5

L’apogée de la chasse d’eauL’assainissement des eaux usées est depuistoujours un problème majeur de salubrité et desanté publique pour lesquels les sociétés antiquesou modernes ont dû trouver des solutions. Lachasse d’eau des WC telle qu’on la connaîtaujourd’hui, dans les pays riches, est finalementassez récente, même si la première daterait de1595. Ainsi certains affirment que les deux inven-tions ayant révolutionné le XXe s. furent la télécom-mande et la chasse d’eau. Démocratisée après1945, la chasse d’eau est apparue alors comme unbienfait de civilisation, un emblème de modernité. Ilest vrai que bon nombre de maladies graves ontdisparu sous nos latitudes avec l’arrivée de l’eaucourante dans les maisons. La toilette quotidiennedevenait facile tout comme l’évacuation des “sous-produits“ de notre métabolisme.

Les bienfaits du tuyauMalheureusement, la chasse d’eau est arrivéeavant le tout-à-l’égout et avant les stations d’épura-tion. Conséquence, l’émergence de gigantesquespollutions des milieux naturels, comme dans laSeine jusque dans les années 80, ou dans le lacd’Annecy, vaste réceptacle mettant bien enévidence ce qui était peut-être moins visible ailleursquoique tout aussi pollué. Mandatés par nos politi-ciens d’alors, nos brillants “ingénieurs du tuyau“ont investi tout leur génie dans la mise en œuvredes fameux réseaux de tout-à-l’égout et de stationsd’épuration. Outre le regain de salubrité, la récupé-ration et le traitement des eaux usées ont permis,dans un premier temps, à nos rivières, fleuves etlittoraux de retrouver une odeur acceptable et unesanté relative.

L’ère des grands travauxRéservées aux villes au départ, les techniques“modernes“ d’assainissement, considérées comme“le progrès incarné“ ont finalement gagné lacampagne, quitte parfois à engloutir les budgetscommunaux pour des décennies. Avec la créationdes six agences financières de bassin en 1964,dénommées aujourd’hui agences de l’eau, il aurafallu mobiliser les fonds de gigantesquesprogrammes financiers pendant 40 ans, pouraboutir au réseau actuel d’assainissement quasicomplet dans les villes, même si certains pointsnoirs demeurent. Progressivement a pu naître unvéritable business de l’assainissement axé sur la

logique du tuyau et du béton et améliorant sanscesse les techniques d’épuration au grè de l’évolu-tion des normes de rejet au milieu naturel : traite-ment primaire, secondaire puis tertiaire parfoisadditionné d’une unité de déphosphatation et/ou dedénitrification. Ainsi est apparue toute une cohorted’installations d’épuration complexes, gourmandesen entretien, en énergie et en compétences techni-ques, parfois mal dimensionnées et souvent totale-ment inadaptées au contexte local, notamment enzone rurale. Tout cela pour un rendement épuratoiremaximum de 50 à 60%. De plus, cette innovationd’alors était dotée d’un vice majeur : le désintéres-sement complet du citoyen vis-à-vis du devenir deses eaux usées et donc aussi de son impact surl’environnement, trop content de pouvoir laissercette tâche à l’élu.

Le tout-à-l’égout en questionDerrière le sentiment de propreté instantanée à lamaison, se cache toute une cohorte de problèmescroissants et de plus en plus insolubles : consom-mation exponentielle d’eau potable dont 26% pourles WC, pollution permanente à l’azote et au phos-phore des rivières par concentration en un point deflux croissants insuffisamment traités des stationsd’épuration, pollution des sols agricoles (métauxlourds en particulier) liée à l’épandage des bouesde station, pollutions ponctuelles liées au sous-dimensionnement des stations par temps de pluiedu fait de l’imperméabilisation croissante des sols,pollutions par les hormones contraceptives etautres molécules médicamenteuses rejetés àl’amont de captages d’eau potable. Telles sont lestristes réalités du choix généralisé du tout-à-l’égout.Malgré toutes les avancées techniques et la régle-mentation sans cesse croissante, les solutions trou-vées pour l’assainissement des eaux usées depuis50 ans apparaissent aujourd’hui avec l’expansiondémographique des villes et l’émergence de lasociété chimique initiée avec l’eau de Javel, commeune gigantesque impasse. De plus, à l’heure oùtrois quarts de la planète souffrent et meurent dumanque d’eau potable, nous consommons environ40 L. d’eau potable par jour et par personne pourévacuer 1,5 à 2 L. d’urine et 150 à 200 g. dematières fécales.

ANC versus tout-à-l’égoutArrivé au terme d’une certaine politique d’assainis-sement qui, loin d’avoir réglé tous les problèmes, ena créé de nouveaux, des solutions différentes

commencent à être promues. Certaines d’entreelles ont été mises en œuvre depuis longtemps,telles le lagunage ou les filtres plantés, par des éluset techniciens plus clairvoyants. A l’heure où lescrises semblent s’additionner, à la fois écologique,climatique, énergétique, il semble que s’amorce undébut de prise de conscience pour envisager leschoses autrement. La plus faible disponibilité desmoyens publics et les textes de lois récents accrois-sent encore la logique d’épuration à la source enutilisant les capacités épuratoires des sols. Ainsi lamontée en puissance de l’assainissement noncollectif (ANC) ou autonome témoigne déjà d’uneévolution des paradigmes. Accepter cette tech-nique, c’est reconnaître qu’épurer ses eaux est unechose simple et efficace si l’on respecte quelquesprincipes de base, et que cela peut se faire chez soipour peu qu’on dispose d’un minimum de terrainnon arboré. Certains préfèreront même l’épurationaérienne par bassins plantés, ou phyto-épuration,qui a le grand mérite de rendre visible la dépollutionopérée et les accidents éventuels. De toute façon,désormais, quel que soit le moyen mis en œuvre,seul compte le résultat à la sortie.

Toujours plus loin, les toilettes sèchesPour autant, concernant les WC, il est possibled’aller plus loin si l’on veut bien réintégrer l’hommeau sein de la biosphère et si l’on considère alorsque ce qu’il produit doit être réinjecté dans le cycleperpétuel de la matière organique. Dans ce cas, ilapparaîtra à chacun comme évident que l’usage del’eau et de l’égout pour évacuer ses excrémentsn’est pas la solution la plus opportune. C’est ce quedémontre l’utilisation croissante des toilettes sèchesou TLB (toilettes à litière biomaîtrisée). Cette solu-tion encore complètement marginale en France segénéralise en Europe du Nord, à tel point que desvillages et quartiers entiers l’adoptent, y comprisdans des immeubles bien conçus. Cette techniquene s’apparente en rien aux toilettes du fond dujardin, elle repose simplement sur l’idée que ce quenous émettons doit repartir via un cycle de dégrada-tion aérobie pour permettre la fertilisation des solset non la pollution des eaux.

Vincent Magnet

Vincent Magnet habite Gentioux et est par ailleurs chargéde mission eau au PNR [email protected]

Assainissementdoit-on épurer nos standards de modernité ?

DOSSIER

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 6

Royère de Vassivière : une décision politiqueAprès des années de gestion par la SAUR, lacommune de Royère s’est posée la question duretour en régie. En effet, le contrat arrivait à expira-tion et le coût annuel (76 000 €) ne semblait pasêtre justifié par une qualité de service rendu. Deplus, l’équilibrage du budget aurait nécessité uneforte augmentation du prix du mètre cube. Pourfaire son choix, la commune a commandé un diag-nostic du réseau et une étude de faisabilité à laDAAF, où est apparu que le retour en régie était toutà fait possible mais ne présentait pas nécessaire-ment d’avantage financier. Il s’agissait donc surtoutd’une décision politique. Considérant qu’un telservice public ne devait pas être une source deprofit, le retour en régie a été décidé en décembre2006 et les mesures qui s’imposaient ont été misesen place : formation du personnel, investissementsen équipement, organisation du travail entre lesouvriers municipaux. Certaines opérations, cepen-dant, sont confiées à des intervenants extérieurs.Mais le résultat est positif car la régie permet demaîtriser le budget eau et, surtout, redonne toute saplace à la collectivité dans le contrôle de cetélément clef de l’aménagement du territoire.

Madelaine Lemeignanancienne conseillère municipale de Royère

Le Palais sur Vienne : un prix plus bas et plus équitableLe grand intérêt du retour en gestion directe par lacommune ou le syndicat intercommunal est lamaîtrise du coût de l’eau. Une entreprise privée sedoit de faire du bénéfice, pour les actionnaires et

pour payer les sièges régionaux et nationaux, lapublicité... Une régie n’a pas ces charges. Au Palaissur Vienne, où le retour en régie a été voté en 2001,le prix de l’eau a baissé de 30% et il est resté stabledepuis, alors qu’il augmentait de 6 à 10 % par andans le cadre de la gestion de la SAUR. Ce choix aégalement permis un débat sur l’abonnement, quenous avons décidé de supprimer. Ne correspondantà aucun service défini, c’est souvent le bénéfice queprend la société privée, et avec 6 mois d’avance. Lanouvelle loi sur l’eau précise qu’il faut tendre à lerendre le plus faible possible car il est socialementinjuste : le petit consommateur d’eau paie l’eau pluschère au m3 qu’un gros consommateur ! Les exem-ples que nous connaissons montrent que partout oùil y a eu retour en régie, le prix a baissé et la qualitédu service y a gagné.

Yvan Tricartconseiller municipal du Palais sur Vienne et

membre d’Attac 87

Felletin : le choix de l’indépendanceLe Syndicat intercommunal d’adduction d’eau de laHaute-vallée de la Creuse regroupe troiscommunes : Clairavaux, Croze et Felletin, quicomptent ensemble 1400 abonnés et commerciali-sent entre 100 à 120 000 m3 d’eau. En régie directedepuis sa création dans les années 1960, lesyndicat est confronté à plusieurs difficultés :- le faible débit des sources : parfois la productionest inférieure à la consommation et il faut avoirrecours à une alimentation de secours.- l’acidité de l’eau : l’eau de source non traitée esttrès appréciée par les abonnés, mais son acidité quiva de pair avec une faible minéralisation et uneexcellente qualité bactérienne, la met quelquefoisau-dessous du PH minimum de 6,5. Ce n’est pasdommageable pour la santé humaine, mais favorisela corrosion des vieilles canalisations en fonte.Heureusement il n’en existe pas en plomb quiprésenteraient, elles, un danger.- le coût des analyses : Les analyses de la DDASSdeviennent de plus en plus nombreuses et sophisti-quées donc plus onéreuses. Elles peuvent mêmeconduire à des travaux très lourds (ex : installationd’unités de traitement contre l’arsenic suite à undurcissement de la norme). - la diminution des subventions : Les aides de L’Etatet des agences de l’eau ont considérablementdiminué, aussi les charges du syndicat s’alourdis-sent.Pour pallier ces difficultés, les élus se sont donnésles moyens d’une véritable indépendance, enformant et en équipant une équipe technique. Cetteperformance a un coût qui se répercute sur le prixde vente. Actuellement un peu inférieur à lamoyenne départementale, il devra certainementêtre réajusté à la hausse. La gestion en régie a euune conséquence très favorable en ce qui concernele refus de neutraliser (diminuer l’acidité par un trai-tement approprié) l’eau distribuée. Connaissant l’at-tachement de la population à l’eau de source nontraitée du syndicat, les élus ont refusé de s’engagerdans la voie indiquée par les autorités sanitaires.C’est un choix qu’une entreprise privée n’aurait paspu faire car elle n’aurait pas eu la légitimité néces-saire pour prendre une telle décision.

Jean-François Pressicaudancien conseiller municipal de Felletin.

L’eau potable, régie directe

Comme la loi de 1992 le rappelle, l’eau est un bien commun et sa gestion est confiée aux communes. Au même titre que pour larestauration scolaire ou les ordures ménagères, les élus peuvent déléguer cette gestion à une entreprise privée. Un choix qui adonné lieu à des débats passionnés ! Des communes nous expliquent les atouts et les contraintes de la régie directe.

Apparue au début des années 80, la

délégation de service public au privé

est une notion de droit français. Les

communes restent propriétaires des infrastruc-

tures et l’entreprise privée assure le traite-

ment, la distribution de l’eau et son assainisse-

ment, l’entretien des réseaux et la facturation.

Trois entreprises se partagent le marché (sans

réelle concurrence d’ailleurs car elles se sont

mises d’accord implicitement sur des secteurs

géographiques) : Véolia (40%), Suez (27%) et

Saur-Bouygues (10%). En 2001, la gestion par

délégation privée atteignait 77% mais, suite à

de nombreuses critiques, on assiste à un

retour de la régie directe, à l’instar de la ville de

Paris. L’accent est souvent mis sur la diminu-

tion du prix de vente mais ce bénéfice ne doit

pas être exagéré car il dépend de nombreux

paramètres. En revanche, le bénéfice est

immense en terme de maîtrise de l’intérêt

général. Les entreprises privées assurent que,

dans un système délégué, la puissance

publique conserve toutes ses prérogatives au

service de l’intérêt général, l’entreprise n’ap-

portant que son efficacité technique et écono-

mique. Mais la réalité montre qu’il n’en est

rien. Le petit village peut-il réellement

contester des décisions prises par ces géants

de l’eau ? Que vaut la supériorité technique

dans un système automatisé où le moindre

contact avec un technicien passe par un

serveur vocal national ? Quant à la soi-disant

meilleure efficacité économique, ne vient-elle

pas d’une gestion du personnel privilégiant les

actionnaires au détriment des salariés ?

Pour réussir sa gestion en régie, plusieurs

conditions doivent toutefois être réunies :

- le bon moment : pour revenir en régie, il faut

profiter de la fin d’un contrat avec la société

privée car casser un contrat peut être onéreux.

Si vous n’êtes pas encore prêt, prolongez le

contrat d’un an, ne signez pas pour 10 ans de

plus !

- la taille du réseau : le millier d’abonnés

permet d’employer deux personnes à temps

plein, le minimum. En dessous, la recherche

de regroupements avec collectivités gestion-

naires paraît souhaitable.

- l’équipe technique : elle doit être équipée,

bien formée, et se sentir responsable.

- une vision stratégique : afin de pouvoir

réaliser les investissements nécessaires et se

préparer aux aléas, la gestion doit avoir pour

objectif de pérenniser le réseau plutôt que de

se targuer d’un faible prix de vente.

Yvan Tricart et Jean-François Préssicaud

ou délégation au privé ?

DOSSIER

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 7

SDAGE... Quésako ?Depuis la loi sur l’eau de 1992, la France a instauréune gestion de l’eau par grands bassins hydrogra-phiques. Au nombre de six, chaque bassin est gérépar une Agence de l’eau qui a en charge la réalisa-tion et le suivi de son SDAGE : Schéma directeurd’aménagement et de gestion des eaux. LeLimousin et le plateau de Millevaches en particulier,situés sur une ligne de partage des eaux, se trou-vent sur un territoire de “tête de bassin versant“, àcheval entre le Bassin Loire-Bretagne, incluant unegrande partie de la Haute-Vienne et de la Creuse,et le Bassin Adour Garonne, incluant la Corrèze etl’extrême sud de la Haute-Vienne. La DirectiveCadre Européenne sur l’Eau (DCE) adoptée en2000 demande aux Etats membres la mise enœuvre d’une gestion concertée de la ressource eneau et leur impose une obligation de résultat ayantpour objectif “d’atteindre le bon état de toutes leseaux à l’horizon 2015“. Pour répondre à ces obliga-tions, la France doit réviser son premier SDAGE quidate de 1996.

Que contient le SDAGE ?En 2004 un état des lieux a été réalisé sur les sixsous-bassins que compte le Bassin Loire Bretagne.En 2005 le comité de bassin, constitué de représen-tants de l’ensemble des acteurs, a commencé àtravailler autour des 15 grandes questions de lapremière consultation publique. Issu de cestravaux, le SDAGE décrit, pour une période de 6ans, la stratégie adoptée pour retrouver un bon étatdes eaux en tenant compte des facteurs naturels,techniques et économiques, sur chacun des sous-bassins. Il aborde tous les sujets qui font la gestionde l’eau : aménagement des cours d’eau, pollu-tions, maîtrise des prélèvements d’eau, protectionde la santé, préservation des zones humides, dulittoral et de la biodiversité, inondations, etc. C’estun document opposable devant la loi qui proposeun programme de mesures chiffrées et localisées.

Un nouveau projet discutablePremier constat, le principe “pollueur -payeur“ n’estabsolument pas pris en compte dans la nouvelletarification des redevances payées à l’agence. Cesont les ménages qui supportent la majeure partiedes redevances alors que la lutte contre les pollu-tions agricoles et industrielles dépasse 50 % des

dépenses prévues dans le projet de SDAGE !Deuxième constat, le nouveau projet de SDAGEdevait préserver les têtes de bassin mais de fortescontradictions existent entre les objectifs attendusdans le document du SDAGE et les moyens mis enoeuvre pour les atteindre à travers notamment leprogramme de mesures. La fragilité des têtes debassins, leur vulnérabilité face aux pollutionsactuelles, ne pourra attendre la dépollutioncomplète (?!) de toutes les masses d’eau en aval. Ilfaut agir simultanément sur les deux fronts : celuide l’aval et celui de l’amont des cours d’eau. Ondevrait appliquer dans le SDAGE un “principe deprécaution“ sur les têtes de bassin.

Quatre propositions

Réduire le phosphore et l’eutrophisationLe SDAGE prévoit de poursuivre la réduction desrejets directs de phosphore. Les plans d’eau identi-fiés comme étant un réel problème sont ceux deplus de 50 ha. Le SDAGE fait abstraction totale desterritoires sensibles, à forte densité de plans d’eau,construits en majorité sur des petits cours d’eaucomme sur le bassin Vienne Creuse (17 000 plansd’eau recensés), pourtant identifiés comme une descauses majeures de la forte dégradation de laqualité des masses d’eau. Il faut donc interdire lerejet de tous phosphates industriels et domestiquesdans les dispositifs d’assainissement d’ici à 2015 etmettre en place des mesures spécifiques sur lesterritoires de tête de bassin à forte densité de plansd’eau quelle que soit leur taille, à partir du momentoù ils compromettent la restauration physique etfonctionnelle des cours d’eau.

Maîtriser la pollution par les pesticidesLe SDAGE demande assez timidement la promo-tion des méthodes sans pesticides, la formation desprofessionnels, la prise de conscience des utilisa-teurs. Mais il ne fixe aucun objectif chiffré àatteindre en 2015 pour réduire l’usage des pesti-cides, aucune mesure stricte concernant la protec-tion de la qualité des eaux à proximité des aires decaptage d’eau destinée à l’alimentation en eaupotable. Il faut donc restreindre ou interdire l’utilisa-tion de pesticides par arrêtés préfectoraux auxzones amont des têtes de bassin versant, en raisonde leur grande vulnérabilité aux pollutions de

surface et de l’absence de nappe profonde permet-tant une réserve d’eau potable. Un programmechiffré annuel visant la réduction de 50% des pesti-cides en 2015, en agriculture et dans les espacespublics doit être mis en place sur l’ensemble desterritoires. Il faut enfin interdire tout usage de pesti-cides dans les périmètres rapprochés descaptages.

Réduire les pollutions organiquesBon nombre de petites collectivités en milieu ruraln’ont pas construit les stations d’épuration collec-tives définies dans leur plan de zonage d’assainis-sement, du fait de la complexité de réaliser despetites unités et de la disparition des financementsde l’Agence de l’eau. En conséquence, les rejetscontinuent de polluer. Il faut donc aider à l’améliora-tion de la collecte et du traitement des eaux uséescollectives, quelle que soit la taille des aggloméra-tions, dans les zones de tête de bassin (en raisonde leur grande vulnérabilité aux pollutions desurface) situées en amont des zones de captaged’eau destinée à l’alimentation en eau potable.

Préserver les zones humides Les zones humides prennent une place importantedans le projet de SDAGE par leur intégration dansles documents d’urbanisme. Sur les territoires desSAGE (Schéma d’aménagement et de gestion deseaux), des inventaires précis peuvent être réalisés.Hors SAGE ces inventaires restent à la bonnevolonté et à la charge financière des collectivités. Ilfaut donc imposer à toutes les collectivités d’identi-fier les zones humides et de définir les zoneshumides d’intérêt environnemental ou stratégiquepour la gestion de l’eau, en vue de leur intégrationdans les PLU (Plans locaux d’urbanisme).

Bernadette Freytet responsable du CPIE Creuse et membre des Verts

Pour en savoir plus : www.eau-loire-bretagne.fr

Le Limousin, laissé pour compte

Du 15 avril au 15 octobre 2008 une consultation publique s’est déroulée avant l’adoption du nouveau SDAGE (Schéma directeurd’aménagement et de gestion des eaux). Les Verts en Limousin ont dénoncé le manque de vision globale stratégique de ce projetpour le bassin Loire Bretagne, centré sur un unique objectif de “dépollution“ des territoires les plus atteints... au détriment de

ceux encore préservés comme le Limousin.

des politiques de gestion de l’eau

ENVIRONNEMENT

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 8

Chez le foetus et le bébéDe nombreuses études ont trouvé des pesticides(ou leurs métabolites) dans différents tissus ouannexes du fœtus ou du nouveau-né : tissuadipeux, liquide amniotique, méconium (premièreselle du nourrisson), sang ou tissu de cordon ombi-lical. Ceci ne paraît pas anormal au regard d’autresétudes qui révèlent la présence de pesticides dansle sang maternel, le tissu adipeux ou le placenta dela mère au moment de l’accouchement. Une mère enceinte contamine son fœtus par cequ’elle mange et par ce qu’elle respire. En 2006,une analyse du sang du cordon ombilical menéepar des chercheurs américains avait montré que250 substances chimiques s’y trouvent dès la nais-sance. Une analyse des premières selles dunouveau-né montre également que des centainesde substances chimiques s’y trouvent. La présence de substances synthétiques dans lesang ou le cordon ombilical indique clairement quele placenta n’a pas joué son rôle de filtre. Ce fait estnotamment rendu possible par le caractère lipo-phile de certains pesticides (ex. le malathion,matière active rencontrée couramment dans lesinsecticides). Cette contamination précoce estalors une empreinte indélébile car elle s’accumu-lera dans les tissus de l’individu au fil de ses expo-

sitions aux subs-tances chimiquesliposolubles.

Une étude réaliséeauprès de jeunesespagnols de 18 ansdans la région d’Al-méria en Andalousie,région d’agricultureintensive sousserres, a permisd’identifier chez cesindividus plus de 200dérivés chimiquesdans le sang. Nosenfants sont doncune population plussensible aux pesti-cides.

Pourquoi nos enfants courent-ilsdavantage de risques ?Ils mangent et boivent plus que les adultes, toutesproportions gardées. Conséquence : ils absorbentdavantage de pesticides proportionnellement à leurtaille.Ils respirent plus rapidement et absorbent la nourri-ture de manière plus efficace que les adultes. Ils ont un système moins développé et moins apteà dégrader les pesticides, particulièrement dans lecas des fœtus.Ils rampent sur le sol et ont tendance à porter leursmains et les objets à la bouche.L’enfant n’est pas un petit adulte : il n’est pascapable de métaboliser, de détoxifier et d’excréterles substances toxiques comme l’adulte. Sonsystème immunitaire est immature. Sa peau, très

perméable aux agents lipophiles, les absorbe plusrapidement que l’adulte.

Quels effets potentiels ?- des anomalies congénitales. En 2002, le Profes-seur Charles Sultan a réalisé une étude à partir de2043 naissances suivies à la maternité montpellié-raine Clémentville. Sur 1033 garçons, 25 avaientune malformation urogénitale (micropénis,pseudo-hermaphrodisme, hypospadias : l’orificede l’urètre n’est pas au niveau du gland, cryptor-chidie : testicules non descendus ). Il conclut avecces mots “Un enfant d’agriculteur a quatre fois plusde risques d’avoir une malformation génitale“. - une insuffisance de poids à la naissance liés àdes retards de croissance intra-utérine, avec desrisques accrus de diabète- un retard de développement du cerveau et trou-bles du système nerveux - des cancers : notamment leucémies, tumeurscérébrales et cancers du rein.Dans une interview réalisée en 2005, le Pr Sultandéclarait que le cancer précoce des testicules a étémultiplié par 4 sur les 15 dernières années enFrance.- des interférences avec les hormones du corps quicontrôlent la croissance et le développement.Le développement de la glande mammaire estprématuré chez certaines petites filles, ce qui pour-rait s’accompagner d’un risque accru de cancer dusein.Des études sur l’exposition précoce au Fipronil(substance active du Gaucho, insecticide autorisépour le traitement des semences des betteraves etdes céréales suivantes : blé, orge, seigle, triticaleet avoine) ont montré qu’elle pouvait faire chuterles hormones mâles de 20 à 30%. Or, ceshormones ont une action qualitative et quantitativesur le développement du système nerveux. Quanti-tativement, cette perte hormonale se traduira pardes déficiences psychomotrices, qualitativement,c’est l’identité sexuelle de l’individu qui risque d’êtreperturbée.L’activité ‘oestrogéno-mimétiques’ des pesticidessur des lignées cellulaires humaines a été démon-trée : ces derniers miment l’activité des oestro-gènes, hormones femelles, et ont un comportementanti-androgéniques. Cette activité se traduit pardes modifications du code génétique contenu dansl’ADN. On peut alors comparer l’action de cespesticides à celle d’un médicament autrefois pres-crit aux femmes enceintes pour le maintien de leurgrossesse, le ‘distilbène’. Cet exemple montre quela contamination peut s’exprimer plusieurs annéesaprès l’exposition. Il a fait émerger le concept del’origine fœtale d’une pathologie adulte. Ces patho-logies s’expriment par des malformations génitales,des précocités pubertaires, des cancers du sein, dela prostate … De plus, l’exposition multiple auxsubstances chimiques (pesticides, pollution d’inté-rieur, pollutions industrielles) rendent ces effetsplus nocifs.

Avec ces 3 articles (IPNS n° 23, 24 et 25), nousavons montré que l’usage généralisé des pesti-cides homologués est une source de pollution pour

l’environnement et pour la santé des humains.Comme le rappelait Jean Rostand “Attendre d’ensavoir assez pour agir en toute lumière, c’est secondamner à l’inaction“. Comme il est urgent quenous agissions dans notre quotidien, nous évoque-rons quelques alternatives aux pesticides dans leprochain numéro d’IPNS.

Monique Douillet

Une peste de plus avec les pesticides 3ème partie - Les pesticides dangereux

pour nos enfants

Les pesticides sont-ils dangereux pour les enfants ? Sans hésitation, oui... et mêmetrès dangereux pour le foetus. Des études épidémiologiques réalisées chez desfamilles d’agriculteurs ou dans la population générale ont permis d’établir une asso-

ciation entre l’usage par les parents de pesticides et certaines anomalies congénitales,des leucémies, des tumeurs cérébrales et autres pathologies pédiatriques. Détaillonsd’abord les transferts des pesticides dans nos tissus, et plus particulièrement dans ceuxde nos enfants.

les-renseignements généreux.org

Scepticisme devant les méthodes d’évaluation des pesticides

L’évaluation de la toxicité d’une matièreactive sur la santé à long terme repose sur laDES, Dose Sans Effet. C’est la dose la plusélevée d’une matière active qui ne provoqueaucun effet décelable chez 2 générationsd’animaux soumis à expérimentation(souris, lapin, rat, …).

A partir de la DES, d’autres doses sont défi-nies, notamment la DJA, Dose JournalièreAdmissible pour l’homme. C’est la quantitéde matière active, par kilo de poids corporel,que pourrait absorber une personne, quoti-diennement, durant toute sa vie, sans quecela ne lui pose des problèmes de santé(mg/kg/jour). Le calcul de la DJA est uneextrapolation de la DES en appliquant desfacteurs de “sécurité“, généralement en divi-sant par mille la DES.Cette méthode est certes codée scientifique-ment. Mais, est-elle fiable pour rendre unproduit homologué sécurisant ?

Rien ne prouve que la DES pour un animaldivisé par un facteur 1000 soit une garantiede dose sans effet pour l’homme (la DJA). Ainsi il a été montré in vitro que les celluleshumaines précurseurs des lignées hémato-logiques sont 1 000 fois plus sensibles aulindane que les mêmes cellules chez le rat.Chaque matière active est évaluée séparé-ment. Or, dans notre environnement, noussommes exposés simultanément à plusieurspesticides, à des doses faibles. Or, aucuneffet de cumul de ces molécules sur la santén’est évalué. Pourtant, plusieurs étudesmontrent qu’il peut y avoir des effets desynergie liés à la présence simultanée deplusieurs molécules.Une étude de 1996 a mis en évidence deseffets de synergie entre des pesticides auxpotentiels oestrogéniques faibles. Les effetsdes mélanges de pesticides étaient de 150 à1600 fois plus importants que ceux despesticides pris isolément.

En matière de toxicologie, 1 + 1 est parfoisbien supérieur à 2 …

SOCIÉTÉ

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 9

Pas farouches, les brebis cheminent sage-ment en troupeau dans les rues de Limoges,ce jeudi 4 septembre, suivies d’une centaine

de militants de la Confédération Paysanne. Lesbadauds sourient devant ce cortège improbable.Mais la situation n’invite pas franchement à la rigo-lade. C’est qu’il y a urgence : les moutonniers sonten train de crever. “Aujourd’hui, je n’arrive plus àfaire face aux investissements que j’ai engagés lorsde mon installation ni à faire vivre ma famille. Pour-tant, mon exploitation a techniquement des résul-tats très corrects“ s’alarme Dominique Bouzage, 32ans, dans Campagnes Solidaires, le mensuel de laConf’. “Aucun salaire dégagé, des factures quis’accumulent : la vie au jour le jour devient uncasse-tête. Depuis longtemps les vêtements sontd’occasion. Beaucoup de choses sont à bout desouffle et nous aussi“ témoignent Marie-Pierre etPhilippe Camus, éleveurs dans la Nièvre. SurFrance 3 Limousin, un éleveur à Janailhac expliquequ’il dégage 260 € de salaire mensuel en travaillantde 7h à 21h !

Mais comment en est-ton arrivé là ?Certes, la hausse du prix des carburants et descéréales fourragères, ou l’épidémie de la fièvrecatarrhale n’ont pas arrangé les choses. Mais lacrise ovine est avant-tout la conséquence de lalibéralisation du marché, entamée dans les années80. Les frontières se sont ouvertes à la NouvelleZélande et à l’Australie, qui ont des coûts deproduction bien moindres. Résultat : 60% de notreconsommation de mouton est importée de l’autrebout du monde. Une invasion de gigot pas cher, quia décimé les moutonniers français : la moitiéd’entre eux a disparu en 15 ans. Aujourd’hui, lesagneaux sont payés moins cher aux éleveurs qu’ily a 20 ans et le revenu moyen d’un moutonniers’élève à 700 €... “La filière ovine a été littéralementsacrifiée, cela a commencé à se voir sur la laine,puis sur la viande. Par contre, on a misé sur leboeuf : contingents d’importation, soutien tech-nique, subventions...“ explique Guillaume Challet,permanent de la Confédération PaysanneLimousin. En terme d’aides, il faut 7 brebis pourfaire une vache !

Pour assurer la survie immédiate deséleveurs, la Confédération Paysanne a réclaméfin août une aide d’urgence de 35 € par brebis (soit150 millions d’euros), une cellule de crise nationaleet un rééquilibrage des aides au profit deséleveurs, en prélevant par exemple une partie auxcéréaliers, toujours bien garnis. Michel Barnier nes’étant pas engagé sur ces revendications, lesyndicat paysan a appelé à perturber la conférencede Limoges. Le 4 septembre, les CRS étaient sur lepied de guerre. Une protection policière qui “frisaitl’état de siège“1 pour une centaine d’éleveurs etune trentaine de brebis dans la rue. Le lendemain,

ils étaient 400 paysans, dont plusieurs syndica-listes espagnols, à s’être rassemblés autour du sitehyper protégé où les ministres européens (Irlande,Roumanie, Angleterre et Espagne) tenaient confé-rence. Tandis que le gros des troupes est parvenuà bloquer une demi-heure l’autoroute A20, unevingtaine de militants s’est infiltrée jusqu’à la confé-rence pour interpeller Michel Barnier. Il s’estengagé à demander un plan de soutien immédiat àBruxelles. Reste à savoir quelle somme en sortira.Car, comme le dit très justement MarjolaineMaurette, présidente de Solidarité PaysansLimousin2 “Si l’Europe n’accorde pas 35 € parbrebis, alors nos moutonniers se mettront au Rmi.Et là, ça coûtera beaucoup plus cher à la collecti-vité ! La moitié des moutonniers aura disparuquand les aides d’urgence dont nous parlonsaujourd’hui seront enfin mises en place !“.

“A long terme, le but n’est bien-sûr pas de vivredes aides, mais de nos productions. Pour cela, ilfaut remettre une autre politique en marche, cellede la souveraineté alimentaire. Malheureusement,Mariann Fischer Boal (commissaire européenne àl’agriculture, absente à la conférence de Limoges)ne nous donne pas beaucoup de signes dans cesens-là“ déplore Philippe Revel, porte parole de la

Confédération Paysanne Corrèze. Contre touteattente, certains paysans expérimentent des alter-natives. Ainsi le Gaec Alys, à Eymoutiers (87), quia créé sa propre marque et vend directement auxbouchers et aux restaurateurs. D’autres investis-sent dans un atelier de découpe pour fournir lesconsommateurs sans intermédiaires. Pour AnneLacroix, éleveuse et productrice de fromage dechèvre, “la vente directe peut être une piste quivalorise davantage l'agneau. Mais pour réussir ilfaut un rayon d'action très important et passer outreles nombreux obstacles comme la disparition desabattoirs de proximité ou la nécessité de vendresous deux jours car la viande est fragile. Ce n'estdonc pas une solution généralisable“. Mi-novembre, le gouvernement a dévoilé son pland'urgence pour sauver les éleveurs : largementinsuffisant selon la Conf'. Quant au compromis surla réforme de la PAC, annoncé le 20 novembre, ils'obstine dans la dérégulation des marchés. Lasuite dans les urnes, pour les élections euro-péennes...

Emmanuelle Mayer(article paru sur www.politis.fr)

crédit photos : Emmanuelle Mayer

1 : Le Monde du 6 septembre2 : Association nationale venant en aide auxpaysans en difficulté

Moutonniers

Les 4 et 5 septembre derniers, la Confédération Paysanne a emmené ses moutons à Limoges pour perturber le colloque européen“Enjeux et avenir de la filière ovine“. Une énième table ronde, à l’heure où les éleveurs ont cruellement besoin de monnaiesonnante et trébuchante. Derrière la survie des moutonniers, c’est celle des paysages et du dynamisme rural qui est en jeu !

sur la paille

INITIATIVE

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 10

Une entreprise d’insertion professionnelle s’estinstallée depuis le 1er Avril 2008 à Felletin. L’acti-vité de l’entreprise “Les petites mains de

Felletin“ repose non seulement sur tous les travaux decouture, mais également le repassage du linge, la loca-tion de costumes et déguisements, ainsi que la collecte etrecyclage des textiles usagés.Particuliers, entreprises, collectivités, associations, toutesles retouches de vêtements et prestations de couture sontproposées en complément d’une large gamme de tissuset galons – dont un choix important de tissus ignifugés (classés M1) répondantaux normes de sécurité obligatoires et destinés aux établissements et collecti-vités recevant du public. Un déguisement vous attend, comité des fêtes, école, troupe théâtrale, ou par-ticulier, parmi 2000 autres si vous désirez ajouter une note d’humour à vosfêtes, soirées ou tout autre évènement.

“Les petites mains de Felletin“ est aussi un centre de collecte des textilesusagés. Ne jetez plus les vêtements et linge de maison qui encombrent vosarmoires, ils peuvent encore servir. Le textile collecté est trié puis réemployésoit en vêtement d’occasion - une braderie a lieu tous les 1er vendredis de cha-que mois à l’atelier- soit exporté vers les pays en voie de développement, s’ilest en bon état. Les textiles en mauvais état – déchirés, défraichis ou usésmais propres - seront soit transformés à l’atelier en chiffons, puis vendus auxprofessionnels utilisateurs de chiffons en grande quantité, soit dirigés versd’autres professionnels pour être recyclés et valorisés sous différentes formes(industrie du papier, industrie automobile ou en isolant thermique).“Les petites mains de Felletin“ est une entreprise d’insertion agréée parl’Etat, elle intègre les principes de l’économie sociale et solidaire. Les activitésliées à la couture et les dons de textiles permettent à l’entreprise de dévelop-per 3 objectifs : social, écologique et économique.

La démarche sociale : l’entreprise embauche et accompagne des personnesen situation d’exclusion ou de précarité qui s’engagent dans un parcours d’in-sertion professionnelle. Les salariés embauchés bénéficient d’un CDD d’inser-tion à temps plein pouvant aller jusqu’à 24 mois pendant lesquels ils peuventse former, se qualifier. L’issue de leur contrat signifie soit l’embauche dans uneautre entreprise, soit une formation vers un autre secteur d’activité, soit uneembauche en CDI au sein “des petites mains de Felletin“.

L’objectif écologique est de traiter et revaloriser 85 à 90% des textiles usa-gés ou non exploités, collectés auprès des particuliers, associations ou profes-sionnels du textile au lieu d’aller en déchetterie pour être incinérés ou enfouis( source de pollution ).

L’enjeu est économique également car outre le fait de générer un pouvoird’achat aux salariés qui leur permet de retrouver une vie sociale et citoyenne,il permet également aux collectivités locales de réduire le coût de collecte etd’élimination des déchets textiles, qui est financé comme chacun le sait par nosimpôts locaux.

Détails pratiques :L’atelier des petites mains de Felletin est ouvert du Lundi au Vendredi de9h à 12h30 et 13h30 à 17h,atelier : 7 Route de Crocq et magasin de location de déguisement : 16 Routede Crocq – FELLETINTél : 05 55 67 23 63 – email : [email protected]

contact : Isabelle Chaumont

Les petites mainsde Felletin

Un nouveau blog, frais et campagnardEmmanuelle Mayer est journaliste spécialisée dansles questions du monde rural. Vous l'avez du restepeut-être déjà croisée puisqu'elle habite à Eymou-tiers :"Je me suis installée au pied du plateau deMillevaches, ce territoire que j’ai découvert et aiméà force de venir y faire des reportages." Elle a aussirejoint l'équipe d'IPNS... Depuis quelques mois elletient un blog sur l'actualité des "nouvelles campa-gnes" que nous vous invitons à découvrir :http://neocampagne.wordpress.com

Critique des médiasLes médias, il faut savoir y faire le tri... Le traitementde l'affaire de Tarnac nous en a apporté une

nouvelle preuve et nous vous renvoyons sur cesujet au reportage que diffuse dans son numéro dedécembre Télé Millevaches. Si vous voulez allerencore plus loin vous pouvez aussi participer à laformation organisée par Pivoine et La Bandemagnétique à Eymoutiers du 19 au 25 janvierprochains. Cette formation vise à s'interroger sur lefonctionnement concret des médias et la façon dontils jouent leur rôle d'information. En visant àproposer un regard critique sur les médias, elledonnera l'occasion de réfléchir à des situationsconcrètes dans lesquelles des acteurs associatifssont confrontés à un média.Renseignements au 05 55 69 24 59.

Club multi-médiaL'Association Ctrl-A met en place un club multi-média afin de monter des projets autour de la vidéoet du son. Nous disposons actuellement d'uneCaméra HDV, d'un appareil photo numérique, d'or-dinateurs (Windows, Mac et Linux) orientés multi-média avec des logiciels de montage tel que AdobePremiere, Stop Motion Pro, Cinepaint... Nous avonsdéjà quelques idées de projets comme la réalisationde films d'animation, de documentaires, de vidéospour la promotion des logiciels libres (réalisés entiè-

rement sous logiciels libres), mais nous sommesouverts à toute autre proposition.Si vous souhaitez participer ou vous renseignern'hésitez pas à nous contacter : www.ctrl-a.fr

Un guide des télés en milieu ruralUne étude sur les télévisions participatives enmilieu rural vient d'être publiée par la Fédérationdes Vidéos de pays et de quartiers. Elaborée àpartir de l'exemple de Télé Millevaches, AldudarrakBidéo (Pays Basque), Trégor Vidéo (Bretagne) etdu projet de télévision locale de la Brenne, ce guideest disponible depuis novembre auprès de TéléMillevaches.Résultat de deux ans d'étude, d'échanges d'expé-riences et de savoir-faire, de rencontres entre struc-tures, ce livre propose des réflexions sur ce qu'estl'audiovisuel participatif, le lien entre télévision parti-cipative, territoire et développement local. Desfiches explicatives issues des expériences localessont également présentées sur différents thèmes :la ligne éditoriale, les financements, le cadre juri-dique, les modes de diffusion, la participation deshabitants.Plus d'info sur le site de la Fédération :http://vdpq.org

AVENTURE

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 11

Sans vouloir faire dans le romantisme, leprojet de Lachaud, c’est bien l’histoire d’ungroupe de jeunes qui décide de redonnervie à un hameau. Un hameau situé au

centre d’un triangle qui relie Gentioux, Royère etFaux la Montagne, là où bat le coeur du plateau.Sur les 138 hectares qui auraient pu être dissé-minés entre les agriculteurs voisins, trois familles,un jeune couple et deux passionnés ont bâti unprojet d’éco-site en 5 dimensions : agriculturepaysanne / écoconstruction / formation et péda-gogie / biologie / accueil. Côté agricole, le GAEC dela Fève («Ferme expérimentale à vocation environ-nementale») a démarré son activité avec JulieCuenot et Johanna Corbin, éleveuses d’un trou-peau de 160 brebis limousines. Elles font del’agneau en vente directe. Le volet scientifique, unlaboratoire chargé d’étudier l’impact du change-ment climatique et de l’agriculture sur la biodiver-sité de certaines parcelles de la ferme (dont desparcelles Natura 2000) a trouvé un financement(CNRS et l’Université de St Etienne). Le voletécoconstruction a été entamé à travers la rénova-tion écologique de la maison de l’ancien fermier.Cette future maison collective accueillera lesbureaux de l’association Le Champ des possibles,qui porte le projet global, le laboratoire d’écologieainsi qu’une salle commune, une salle pour lesenfants et une cuisine. En attendant, les bureauxsont installés dans des caravanes et une cabane.Excepté Philippe Simon, qui réside à Eymoutiers,tout le monde habite sur place : certains ont achetéune yourte, d’autres louent dans le hameau. Ducoup, tous les habitants permanents de Lachaudparticipent au projet d’éco-site, les autres habitantsétant des résidents secondaires... ravis de voir queça bouge dans leur campagne !

Une énergie collectiveTout a commencé l’été 2005 quand Johanna, alorsanimatrice dans l’associatif, et Frédéric, biologiste,décident de quitter les Deux Sèvres pour unecampagne moins polluée où monter un projetmêlant agriculture, écologie et milieu naturel àrestaurer. Avec son Réseau d’acteurs et ses landeset tourbières, le Plateau de Millevaches a tout pourles séduire. Ils rencontrent Emilie Lordemus, coor-dinatrice du réseau (De Fil en réseaux), et leConservatoire des espaces naturels (Cren), repar-tent avec un carnet d’adresses. “Pendant un an, jesuis venue tous les deux mois pendant une dizainede jours à chaque fois pour rencontrer les gens,être au courant des opportunités, voir si le projetpouvait se monter avec d’autres“ raconte Johanna.L’été 2006, la petite famille pose ses valises à StMoreil, pour continuer à construire son projet insitù. Johanna suit une formation agricole tandis queFrédéric télétravaille. Ils entendent parler de lavente d’une grosse ferme à Lachaud. Johanna serend à la Safer, va voir les institutions, remue lescollectivités, le dossier traîne, et la ferme n’est réel-lement mise en vente qu’en juillet 2007. A cemoment-là, nos porteurs de projets organisent uneréunion pour rassembler les personnes intéresséespour créer ensemble sur ce site prometteur. Il enressort un ambitieux projet d’éco-site, valorisant lescompétences de chacun (écoconstruction, arti-sanat, écologie scientifique, agriculture...) etrassemblant leurs aspirations à vivre autrement,faire ensemble et accueillir, transmettre, échanger.

Des élus locaux enthousiastesEn septembre 2007, une rencontre est organiséeentre le groupe constitué et la région, la commu-nauté de communes du plateau de Gentioux, lePNR, le CREN et la mairie de Gentioux pourtrouver des partenariats et des financements. Il est

décidé que la communauté de communes achète lesite (275 000 €) et le loue au GAEC. Grâce à unesubvention de 120 000 € du PNR, la communautéde communes leur apporte également une aidepour la rénovation écologique du bâti (maisoncommune + bâtiments agricoles). En avril 2008, lecollectif s’installe sur les lieux. Commence alors larestauration du lieu, le démarrage de l’activité agri-cole, la mise en place du laboratoire et la réalisa-tion d’une étude prévisionnelle sur 6 ans, destinéeaux partenaires financiers. Lorsque les bâtimentsseront rénovés, les autres activités pourront êtredéveloppées. Philippe Liboureau, constructeurpaille, et Yann Hélip-Soulié, tailleur de pierre-sculp-teur, souhaitent y animer des chantiers et desformations. Guillaume Paillard, en formation plom-berie-chauffage, mettra ses compétences en éner-gies renouvelables au service du site. VirginieLarrue pense s’y installer en plantes médicinales.Son compagnon, Grégory Séval, souhaite conti-nuer de travailler à CtrlA tout en s’investissant dansle lieu : “ce qui me plaît, c’est le collectif, pourmutualiser un jardin, par exemple, partager desprojets, sans tomber dans une vie communautaire“.L’aspect collectif, c’est aussi ce qui motive PhilippeSimon, ancien paysan puis acteur du Monde allantvers, aujourd’hui salarié à mi-temps d’AmbianceBois. “J’ai 25 ans d’histoire collective derrière moi,je me suis toujours retrouvé dans ces aventures.Ce qui m’intéresse particulièrement, à Lachaud,c’est l’aspect ouvert. Nous voulons développer l’ac-cueil, les stages, en faire un lieu-témoin des alter-natives. La particularité, c’est de mêler l’agricole àla préservation d’espaces naturels et à l’écocons-truction“. Pas de doute, c’est bien un lieu unique quise construit pas à pas par cette bande d’utopistesnéanmoins pragmatiques !

Emmanuelle Mayer

la ferme des possiblesLachaud

ALachaud, sur la commune de Gentioux, un collectif s’est implanté avec un projet d’éco-site. Innovant, enthousiasmant, impres-sionnant, ce projet aux multiples facettes a réussi à tisser des partenariats solides avec les institutions, sans renier sa partd’utopie. Récit d’une aventure qui n’en est encore qu’au début.

Lachaud, c’est qui ?

- Yann Hélip Soulié (sculpteur tailleur de

pierre, fossoyeur à Cesam Oxalis), Julie

Cuenot (éleveuse dans le GAEC) et leurs

enfants

- Johanna Corbin (éleveuse dans le GAEC),

Frédéric Lagarde (chercheur en écologie et

prof de bio à mi-temps au collège de Bourga-

neuf) et leurs enfants

- Marion Michaux (en congé parental), Guil-

laume Paillard (en formation plomberie-chauf-

fage pour s’installer à son compte sur le site)

et leurs enfants

- Virginie Larrue (salariée à mi-temps de la

communauté de communes, en projet de

plantes médicinales) et Grégory Seval

(animateur de CtrlA à temps plein)

Future maison commune

HISTOIRE

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 12

Au cœur du règne de Louis XIV,la province du LIMOUSINconnut une affaire qui, toutes

proportions gardées, préfigurait lestragédies de la célèbre “Bête duGEVAUDAN“. Si le phénomène futcirconscrit dans un espace et untemps plus réduits, il n’en annonçaitpas moins les questionnements ethypothèses qui auront cours 60 ansplus tard. Les deux affaires permet-tent à l’historien d’aborder des problé-matiques très utiles à l’heure où sedéveloppe dans les Alpes unepsychose moderne. A travers ceslignes, il s’agit pour nous de démonterune mystification. Derrière le loup,évident bouc–émissaire, se sonttoujours cachés d’autres coupables.

Les faitsL’essentiel tient en quelques lignessuccinctes portées par les curés surles registres paroissiaux – outracées par des témoins dans descahiers de souvenirs, dits “livres deraison“. On y lit par exemple :“Il est sorti une bête du côté de Faux,faite en guise de renard et de lamême longueur, qui mangeait lesgens, mais surtout les petits enfants.remarque qui doit faire prendre gardeun chacun à soi“ (Livre de raison, M.Arfeuillère, avocat à Guéret, 1699)Le même phénomène est alors reprisen 1700, par le curé de Banize(Creuse) :“Inhumation de Louise Ponsat, 4 ans,égorgée hier environ les 3 heures dusoir par une bête féroce et inconnue “(26 septembre 1700).Un bourgeois de Millevaches(Corrèze) reprend ces informations :“La dite année (1698), il est sorti unebête de la grandeur d’un grand loupqui dévore le monde, grands et petits,du côté de Saint Léonard et Bujaleuf,et les loups s’attroupent qui font degrands ravages aux bestiaux. Toutcela est de méchantes marques et lesdits loups n’appréhendent pas lemonde quoiqu’ils soient aux armes“(Registre domestique de LéonardMagimel).Cette documentation peut paraîtrebien maigre au regard des milliers delignes qu’un phénomène comparableproduira plus tard en Gévaudan. Ellepermet toutefois un parallèle édifiantet pose le débat en termes identiques :- la bête (ou les ?) a dévoré, mais a-t-elle tué ?- de quel animal s’ agit-il réellement ?- quelle part tient le loup dans cesaffaires ?- peut-il y avoir un homme derrièretout cela ?Compte tenu des études zoologi-ques, il semble acquis que le loupn’attaque pas l’homme, à l’exceptionnotable des loups enragés. On noteraque dans les lignes ci-dessus, lesattaques des loups ne concernentque les bestiaux. Le loup, seul ou en

meute, « accompagne » d’autresmalheurs des temps, qui étaient pourlui pourvoyeurs de chair fraîche. Loupanthropophage sans doute, loupmeurtrier sûrement pas. Les morts “en série“ ont pu êtreexagérées : 12 personnes “tuées“pour la commune de Vallières dansune seule année, sur une populationde quelques 200 habitants (cité dansun ouvrage de 1919). Les archivesfiables, les registres paroissiaux, n’engardent aucune trace. On a là unsymptôme de la psychose. Quant auxpersonnes dévorées avec certitude,quel animal peut en être responsable ?Si l’on veut bien relire les témoignages,on remarquera qu’ils ne se ressem-blent que sur un point unique : la bêten’est pas un loup. Cet animal étaitassez répandu à l’époque pour quenos ancêtres en connaissent lasilhouette et les caractéristiques. Untroisième texte apporte encore uneautre version :“Cette bête est d’une grosseur consi-dérable, et à peu près celle d’un veaude deux ou trois mois, mais fort déliéeet agile ; elle a la tête d’une médiocregrosseur, et depuis les yeux jusqu’aumuseau comme un lévrier, au poilrougeâtre ; elle a une marque noirecomme deux cornes : selon la rela-tion de ceux qui ont été blessés parelle, elle a la langue fort douce » ( Lecatéchisme des peuples des villes etdes campagnes , 1699). Renards, panthères, voire veaux oulévriers ? les hypothèses semblentassez variées pour refléter la circula-tion des témoignages selon leprocessus de la rumeur. Voici cequ’en dit J.M. Teulière, du centrenature “La loutre“ :“De nombreux chroniqueurs et histo-riens contribuèrent à faire, de ce qui

reste un mystère avéré de l’histoire,un mythe. Simultanément, denombreuses bêtes fantastiques firentleur apparition un peu partout enFrance“.La dimension surnaturelle de “la bête“étant ainsi soulignée, il convientd‘interpréter ses actes à la lumière dela conjoncture socio-économique dutemps, comme à la réalité du cadrenaturel, des paysages, des habitudesagraires, qui sont ici fondamentaux.

Un pays misérableJ’explique la survenue de ces phéno-mènes par un contexte général de

dépression économique, entraînantune situation de misère physiologiqueet matérielle, mais aussi psycholo-gique. Comme en Gévaudan plustard, différents témoignagesévoquent ce contexte dramatique .Les différents rapports officiels lecernent ainsi :“En rêvant dans mon carrosse auxmisères extrêmes du peuple duLimousin, il m’est venu à l’esprit …“(le conseiller du roi, d’Aguesseau)ou encore :“Si le prix des blés n’a pas encoreaugmenté, la seule misère en est lacause … Il n’ y a que deux ans quecette généralité s’est vue à la veille depérir par la famine … Il n’ y a rien deplus précieux (…) que la conservationd’un grand nombre de sujets quipérissent par la faim dans cetteprovince … » ( l’intendant Bernage,de 1698 à 1701).

“les fonds accordés par le roi ne suffi-ront point à réparer ce désastre ; parsuite, il sera impossible de forcer lesparoisses à subvenir à la subsistancede leurs pauvres et empêcherceux–ci d’émigrer pendant l’hiver“( Barnage, 22 octobre 1700). De nombreux documents témoignentde l’importance de cette pauvretéabsolue et du nombre de vagabondscourant les campagnes. Ces genssont à la fois des victimes et descoupables potentiels de vols, oud’agressions. Le fait que la grandemajorité des victimes soit de sexeféminin est un indice.

La cause principale des morts doitêtre reliée à la situation de misère :les victimes ont pu mourir de froid, defaim, voire d’accidents déclenchéspar une fuite sous l’emprise de lapanique (les sols sont très acci-dentés). Ils ont pu être victimes demeurtres aux motivations diverses.Dans ces cas, les loups n’ont été quedes mangeurs de cadavres. Lesbêtes sauvages ont dû être attiréesplus près des terroirs habités, par laterrible situation sanitaire. L’état descorps, comme l’observation de loupsles dévorant, a pu être à l’origine depeurs paniques propices à la nais-sance de rumeurs sur la qualité deces “dévoreurs“.

Les “bêtes“ du Limousin et duGévaudanSoixante ans plus tard, certainscrurent que “la bête du Limousin“avait pu réapparaître en Gévaudan.Au début des méfaits de l’autreanimal démoniaque, en 1764, oninterrogea officiellement les autoritéslimousines pour connaître lesmoyens mis en œuvre pour sarecherche et sa destruction. Si laréponse n’a pu être retrouvée, onpeut sans risque relever la situationdécrite dans d’autres rapports. Ellemontre une évidente amélioration.Dès août 1701, le même intendant deBernage écrivait :“L’élection de Limoges n’a pasrecueilli beaucoup de seigle qui faitsa principale récolte, mais les pâtu-rages y ont été assez bons. Les blésnoirs et les raves sont d’une belleespérance…“La nombreuse documentationconcernant les malheurs duGévaudan a permis d’élaborer deshypothèses plus précises. Decelles–ci on peut retenir qu’une largemajorité des nombreuses observa-tions disculpent le loup. On y ajouteratout ce qui tourne autour de loups-garous, d’hommes déguisés en loupou de grands fauves dressés. Partout, nous lisons la patte del’homme. Quelles que soient leursmotivations, qu’ils aient été réunis enbandes, ou agissant seuls, on ne peutque rapprocher ces théories ducélèbre dicton : “l’homme est un louppour l’homme“.

Michel Patinaud

Histoire du loup et psychoses socialesla “bête du Limousin“

Cette bêteest d’unegrosseurconsidérable

Depuis quelques décennies, agronomes,anthropologues et historiens défrichent etlivrent peu à peu “L’histoire des agricultures

du monde depuis le néolithique jusqu’à la crisecontemporaine“ pour reprendre le titre de l’ouvragede référence en la matière. Un corrézien, RogerPouget, lui aussi agronome et directeur de recher-ches à l’Institut National de Recherche Agrono-mique se propose de retracer l’histoire de l’agricul-ture et des paysans limousins depuis 10 000 ans.À partir des sources scientifiques et techniques dela recherche contemporaine Roger Pouget nousrappelle la longue durée de la grande misère despaysans limousins luttant sur des sols pauvres auxrendements faibles et aléatoires. Soulignant ainsique jusqu’au XIX° siècle une très forte proportionde la population de la province se livre à l’agricul-ture pour retirer de cette terre rude et maigre lanourriture indispensable à sa survie. Cette longuestagnation de l’agriculture est à quelques raresexceptions près le lot de toute la paysannerie fran-çaise même si le Limousin figure parmi lesprovinces les moins favorisées en raison de sessols peu fertiles et de son isolement dû à l’absence

de moyens de communication. À ces conditionsdifficiles s’ajoute la lourde charge des impositions,redevances et autres corvées que leur infligent lanoblesse, la bourgeoisie et le clergé. Cette pres-sion financière demeure un frein à la pénétration del’innovation et du progrès dans les campagnes. Lechapitre sur l’introduction de la pomme de terre enLimousin au milieu du XVIII° siècle illustre cetterésistance que l’on retrouve constamment dans lalente évolution de notre agriculture. Elle expliqueaussi l’arrivée tardive du développement descultures fourragères et de l’introduction des engraisqui favoriseront la naissance de l’élevage bovinlimousin dans la seconde moitié du XIX° siècle.C’est toujours avec un certain retard que l’agricul-ture limousine rejoint le progrès technique. Etlorsque survient la grande mutation de l’agriculturefrançaise dans les années 1950 l’agriculture limou-sine peine à s’y engager tant elle ressent encoreles effets de l’émigration de sa population ruralevers les villes depuis plus d’un siècle.

Tout au long de son argumentation, l’auteur s’ef-force de nous défaire des clichés d’une agriculture

“archaïque et rétrograde“ pour nousaider à mieux comprendre les diffi-cultés que les paysans limousins ontsurmontées pour accumuler connais-sance et savoir-faire. Deux chapitresl’un sur le châtaignier, base de l’agri-culture limousine et l’autre sur cavigne, principale culture de la basseCorrèze, apportent un éclairagesingulier sur leur capacité d’adapta-tion face aux aléas auxquels ils ontété confrontés. Sans oublier derapporter l’utilisation astucieuse desrigoles pour l’irrigation fertilisante desprairies, une maîtrise de l’eau datantpeut-être de l’époque gallo-romaine.L’ouvrage est agrémenté d’une illus-tration abondante en planches de

dessins et photographies remarquables.Spécialiste de la vigne, Roger Pouget a dirigé lastation de recherches sur la viticulture à Bordeaux.En clôturant son chapitre sur la vigne, il fait remar-quer la renaissance du vignoble de Branceilles en1990, l’arrivée en 2000 du vin paillé de Queyssac-les-vignes et plus récemment encore en 2007 Lescoteaux de la Vézère à Voutezac et Allassac. Unpetit clin d’oeil à la capacité d’innovation des agri-culteurs d’aujourd’hui pour diversifier leur sourcede revenus et développer un tourisme rural.

Alain Carof

Roger Pouget, L’agriculture limousine des originesau milieu du XX° siècle. Préface de RobertJoudoux, Tulle, éditions Lemouzi, janvier 2008,323 p.

HISTOIRE LIMOUSINE

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 13

Charrue brabant double

L’agriculture limousinedes origines au milieu du XXe siècle

Adeux reprises déjà IPNS a publié des travaux de Jean-Luc de Ochan-diano. Il nous avait donné un aperçu de la place importante laissée àLyon par les maçons de la montagne limousine dans le bâtiment

pendant un siècle.Jean Luc vient de rassembler le résultat de ses recherches dans un superbeouvrage de 270 pages : Lyon, un chantier limousin. Les maçonsmigrants (1848-1940). Dans l'histoire des migrations saisonnières puis défi-nitives il montre comment les Limousins se sont insérés dans la transforma-tion de la ville au moment où elle entre dans l'ère industrielle. Ils ont laissél'empreinte de leurs savoir faire dans les métiers du bâtiment et notammentdans la maçonnerie. La trace des Limousins dans cette modernisationurbaine est un révélateur des difficultés rencontrées par les migrants de tousles temps dans la transformation des sociétés. Ancrés dans leur solidaritévillageoise, les maçons de la montagne limousine se sont retrouvés dans lesmêmes quartiers et sur les mêmes chantiers. Ils ont aussi subi lessarcasmes des réactions xénophobes de la population comme des autrescorporations du bâtiment. Mais, au fil du temps leur cohésion sociale sera leferment de l'émergence à partir duquel grandira leur conscience ouvrière. Aubasculement des XIX° et XX° siècle ils sont la cheville ouvrière du syndicatgénéral des ouvriers maçons de Lyon et du Rhône. En 1920 l'effroyable saignée des migrants limousins dans le désastre de lapremière guerre mondiale affaiblit considérablement la filière limousine dansla corporation des maçons de Lyon. Devenus minoritaires dans la profes-sion, les maçons limousins sont à l'initiative d'une innovation remarquableTrois anciens leaders du syndicat des maçons originaires du Millevachess'aventurent dans la création d'une coopérative ouvrière l'Avenir. En quel-ques années avec l'appui du maire de Lyon elle devient une entreprise floris-sante où les Limousins restent majoritaires.Ce très beau livre illustré de photos et de dessins remarquables nous aide àcomprendre la métamorphose d'une grande métropole pour entrer dans lamodernité. Au fil des pages on y retrouve l'empreinte du labeur, de la souf-france et de la créativité de nos ancêtres. Un magnifique cadeau souvenir àoffrir dans cette période de fêtes et de rassemblements familiaux.

Jean-Luc de Orchandiano, Lyon un chantier Limousin. Les maçons migrants (1848-1940).Editions Lieux Dits, octobre 2008, 270 pages, 30 €.

Alain Carof

Lyonun chantier limousin

CULTURE

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 14

Dans les années 90, aux Pays-Bas, MichèleLaveix, artiste peintre originaire du hameaude La Pommerie à Saint-Setiers, rencontre

Hubertus Nollen, dit Huub, galeriste et historiend’art, et surtout, désireux de créer un lieu d’accueild’artistes en France. De cette rencontre naît en1995 la résidence d’artistes Appelboom, aménagéedans l’une des granges du hameau. Huub accueil-lera ainsi plus de 200 artistes. Peintres, sculpteurs,musiciens, danseurs, vidéastes… trouvent ici lesconditions idéales à la production artistique,influencés par le territoire, les habitants, le climat,les paysages, les coutumes…

En avril 2007, suite à la triste disparition de Huub,l’association Appelboom constitue une nouvelleéquipe. Fidèle à la notion de transdisciplinarité, ellechoisit des artistes dont le travail se fonde sur unecertaine porosité avec le contexte dans lequel ilsenvisagent ou réalisent leur travail. Ainsi, Appel-boom s’affirme avant tout comme un lieu d’expéri-mentation dédié à la jeune création où les proposi-tions artistiques sont envisagées dans unaller/retour avec le territoire et ses habitants et meten place un programme annuel qui alterne rési-dences d’artistes, concerts et ateliers pédagogi-ques.

La nouvelle équipe achève sa première saison. Unesaison qui a parfaitement su s’ancrer au territoire. Le projet de Jacques Loeuille est à l’image de cetancrage. Ce jeune artiste vit et travaille à Lille etdéfinit “sa pratique de la vidéo comme des filmsd’artistes à caractère documentaire“. Fin 2007, ilrépond à l’appel à résidence lancé par l’associationet propose un projet de vidéo dans lequel il déga-gera le contenu narratif des images quotidiennes duPlateau de Millevaches.

Jacques Loeuille échelonne ses séjours à LaPommerie d’avril à novembre 2008 au coursdesquels repérage et définition précise du sujet dela vidéo laissent place à la prise de vue et à laconstruction même de l’œuvre. Puisant dans laréalité un potentiel narratif, Jacques Loeuille s’inté-resse aux stations essence désaffectées et réinves-ties du Plateau de Millevaches. Il construit ainsi unedramaturgie en dialogue avec le territoire et seshabitants qui prend la forme d’un documentaire de35 minutes : Essence Ordinaire.

Jacques Loeuille nous parle de son film :“Quiconque pratique les routes nationales connaîtces stations abandonnées qui constellent le réseauroutier de France ; la célèbre nationale 7, la pitto-resque nationale 20, la froide nationale 17 abritentces bicoques de verre, de tôles, de masses mainte-nant poussiéreuses ou moussues et qui semblentdévier de cette route où elles furent jadis appon-tées. Toutes véhiculent cette indiscernable et singu-lière saveur qui nourrit la légende de la route en l’or-nant de petits satellites abandonnés.Mais quiconque est étranger au plateau de Milleva-ches et à ses routes communales et départemen-tales qui strient un paysage plié, ignore sûrementque ces stations délaissées ailleurs sont ici le pointd’approvisionnement du pays.

Le caractère de ce paysage échancré et dépeupléconditionne, on s’en doute, une adaptation ducommerce. Les stations qui restent ne peuvent pasvivre seulement de la vente de carburant et doiventcumuler des activités pour joindre les deux bouts ;et ces activités transforment ces stations en vérita-bles cavernes d’Ali Baba qui ne se dévoilentsouvent qu’à celui qui veut bien pousser la porte.Mi-caverne, et mi-souk parfois, ces stations parta-gent un certain secret allant parfois jusqu’à lapudeur. La présence de ces commerces multiser-vices témoigne manifestement d’une dispositionespiègle au bric et broc de laquelle émerge unetension poétique.C’est sur cette poésie du commun que je souhaite-rais me focaliser.“

Essence Ordinaire a été programmé à LaPommerie et dans les cinémas de Tulle, Eymou-tiers, Neuvic et Aubusson du 19 au 22 novembre2008, dans le cadre de Pause, événement vidéoinitié par 5,25-réseau d’art contemporain enLimousin et dans le cadre du mois du film docu-mentaire. Suivie chaque fois d’une discussion avecJacques Loeuille, la projection d’Essence ordinairea également donné lieu à la programmation de filmssélectionnés par l’artiste, différents pour chaquesoirée, et qui ont influencé son travail d’unemanière ou d’une autre. L’accueil de Jacques Loeuille à La Pommerie adonc permis à l’artiste de disposer de moyensfinanciers et de temps pour réaliser un film, maisaussi d’inscrire sa démarche artistique au cœur duterritoire. Ainsi, dans une volonté de médiation et desensibilisation à l’art contemporain, l’association acréé les conditions favorables à la rencontre entrele réalisateur et le public, en cours et en fin deprocessus de création.

Appelboom-La Pommerie prépare désormais lasaison 2009 au cours de laquelle elle proposera 3résidences dans les domaines de l’art sonore etdes arts visuels, des événements musicaux etperformatifs à La Pommerie et ailleurs, et desateliers pédagogiques.

Pour tout renseignement, consultez le site de l’as-sociation - www.lapommerie.org

Appelboom - La Pommerie - 19290 Saint-Setiers05 55 95 23 30 - [email protected]

Pour vous inscrire à la mailing-list et recevoir régu-lièrement les informations sur la programmation :[email protected]

La Pommerie

Jacques Loeuille s’inté-resse aux stations essencedésaffectées et réinvestiesdu Plateau de Millevaches

lieu d’ancrage de l’art contemporain sur le plateau

C’est un projet ambitieux mené sous l’égide du PNRpar la troupe de la Chélidoine (Saint Angel) et les asso-ciations Pays Sage, Conte en Creuse et Faire etDéfaire. L’idée ? Une randonnée théâtrale qui duranttrois jours traversera le plateau cet été. LaurenceBiberfeld, auteur de polars et ancienne habitante duplateau, a écrit le texte de ce spectacle itinérant où l’oncroisera le présent et l’histoire du plateau, et en parti-culier ses faits héroïques qui ont façonné la figurerebelle de ce territoire.Ligne de partage se déroulera à pied, en chemin de ferou en véhicules du jeudi 23 au samedi 25 juillet 2008.Le premier jour, départ en train d’Eymoutiers jusqu’àPérols sur Vézère, puis marche jusqu’aux ruines desCars. La première étape, le soir, aura lieu à Peyrele-vade. Le lendemain on ira jusqu’à Féniers via StSetiers. Le troisième jour on atterira à St GeorgesNigremont en passant par Magnat l’Etrange. Une manifestation originale qui permettra de découvrirou redécouvrir le plateau de Millevaches.

Comme tous les ans Pays Sage propose dejanvier à mars ses bistrots d’hiver. Gastro-nomie et musique font le succès de cettemanifestation qui se veut aussi occasion derencontres et de découvertes. Ainsi cetteannée, les «apéros-tchatche» proposeront aumoment de l’apéro de découvrir quelquespersonnages emblématiques du plateau, quiy ont vécu, l’ont traversé ou s’y sont réfugié...Parmi eux des noms aussi divers que ceux deRaymond Poulidor, Martin Nadaud, l’écrivainPierre Bergounioux, le sultan Zizim ou lepoète Armand Gatti... ça se passera du 11janvier au 15 mars.Tous renseignements sur le site de PaysSage : www.pays-sage

Ligne de partage Le retour des bistrotsd’hiver

ATELIER D’ÉCRITURE

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 15

A l’angle de la route il y a un cheminet le chemin doit être sinueuxLe long du chemin, il y a des maisonset les maisons doivent être bellesau bout du chemin se trouve une forêtet les arbres doivent être nombreuxpour abriter les nids et les oiseauxEt le plus grand doit dire au soleil :Va chercher quelques nuageset le soleil voilera son imagepour que l’arbre puisse rêveret quand il aura fini de rêveret que le soleil sera fatiguéil lui dira d’aller chercher la luneet l’astre doré viendra le voiril se mettra en quatre, en croissantet lui dira qu’il est le plus grandqu’on ne voit que lui du haut du cielet l’arbre doit être heureux.Alors l’oiseau de nuit se posera sur sa tête verteet avant de s’envoler dans son monde d’étoilesaile contre aile avec le vent,il poussera son cri et le voyageur du soirmélancolique et solitairelèvera la tête pour entendre le chant de l’arbrequi connait si bien la terre et le ciel, le soleil et l’orageet l’homme désenchanté lui racontera son histoireses tendresses et ses meurtrissures, ses regrets et ses joieset l’arbre doit le regarder, l’écouterpour lui donner le courage de rentrer chez lui.

Claudine Lesire-Ogrel

ISBN: inquisition spécule, brocardentnouvellistes

Mesdames, Messieurs ! En direct de la renommée place de Gentioux. Déposée aux pieds de la mairie, devant notaire, une curiosité, symbole de l’ingéniositéde la maîtrise des maçons de la Creuse. Un objet précurseur du design, fonctionnalité,économie des formes, simplicité d’utilisation mais surtout efficacité. L’inventeur génialparti pour en déposer le brevet a vraiment pensé à tout: : un antivol est intégré ausystème. Je veux parler du range-marteau créé par M. Faucille qui en partant nous avaitdit: “si cet instrument ne sert pas à tous, alors, foi de Faucille, je m’arrête de travaillerpour le bien de l’humanité“.Laurence

Le marteau de gentioux

C’est Noël à l’ELyséeles socialistes se sont plantésOn est dans la merde encore quatre ansLes choses n’peuvent pas êt’pireLes UMP boivent du p’tit laitRemerciant leur bonne étoileIls pensent: on aura pas d’autre chancePlus jamais de couilles en orJ’étais chez moi à MillevachesLes yeux rivés sur l’écranJ’en avais gros sur la patateMe demandant à quoi ça rime

Refrain:Reviens donc ColucheNous aider maintenantSèches tes larmes du paradisEt renais d’une façon ou d’une autreSi tu te cognes à JésusPeut-être qu’il peut t’aider à sortirReviens nous maintenant

J’ai suivi tes pas une fois dans l’tempsOù je galèrais j’ai sûrementEchoué à trouver ta traceEt maintenant je titube dans la brumeGare aux tueurs sur la route à c’t’heureComme un homme ne peut pas vivre seulJ’ai vendu mon âme aux capitalistesMaintenant je suis scotché ici dans ce patelinLes renards sont dans l’poulaillerEt les cochons courent dans le maïsLes syndicats ont été cassésLeurs fières bannières rouges déchiréesSi on écoute la radio, on croit que tout va aller mieuxMais toi et moi et Brassens savonsQu’on va directement en enferAussi, reviens nous Jacques BrelRelève toi vieux FerréDes barricades seront dresséesIls ne peuvent pas briser notre volontéRevenez Louise-Michel et RosaNous défilerons dans ParisEt les cloches de la liberté résonneront

Le texte à plusieurs mains : voici un début, à vous de trouver la suite.

Le mien, je l’ai scié avec la petite scie. Lui, en me laissant scier, est allé un peu plus loin, et estrevenu un peu plus tard avec son sapin, qu’il avait délicatement, je le connais, défait de sa terreet pris sous son bras. Il est venu vers moi, et je les ai vus, lui et le sapin, lui, avec dans ses yeuxtout ce que ça voulait dire, d’avoir un sapin sous le bras, et le sapin, moins ordinaire que le mien,le tronc faisant un virage juste en haut des racines. Ils allaient bien ensemble, lui et son sapin.

Jeux du Brin dePlume

Réponse à la consigne: lesphrases commencent par je,tu, il, etc

Je, seule au bord du monderegardant le soir déposer sonombreTu, perdu de l’autre côté,marchant le long des rochersIl est des histoires auxquellesnul ne peut échapperNous avons bu au calice desfleurs le nectar de roséeVous, silencieux etmoqueurs, avez cru pouvoirnous séparerIls resteront pourtant là, noscoeurs émerveillés.

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PATRIMOINE

IPNS le journal - n°25 - décembre 2008 16

Retenir l’eau plutôt que l’évacuer

Si la pratique agricole sur la Montagne se résumeessentiellement, aujourd’hui, au drainage et à l’éva-cuation la plus rapide possible de l’eau, il en fut toutautrement pendant des siècles.

Captée dès l’amont des rivières et ruisseaux, voiredans les chemins et cours de fermes, pour êtreensuite restituée aux flancs des vallons de manièrerégulée, l’eau était alors soigneusement gérée.

Des pêcheries (“las pescharias“) où elle étaitstockée, en passant par les rigoles (“las levadas“),c’était tout un système technique et des savoir-fairequi s’étaient mis en place pour permettre la culturede l’herbe et l’irrigation fertilisante des prairies. Augré des saisons, les paysans de la Montagne“baignaient“ ainsi “le pré“ (“far banhar los prats“)afin d’améliorer la pousse ou, à l’inverse, pourprotéger l’herbe des premiers gels.

Longues parfois de plusieurs kilomètres (pour l’uned’elles de 7 km), les rigoles constituaient donc unevéritable richesse tant collective – en témoignentles phases d’entretien communautaire collectif(“l’arban“) - qu’individuelle. Certaines furent ainsidonnées en dot lors de mariages !Il n’est dès lors pas étonnant qu’elles aient obéi àune gestion stricte, les droits d’eau (“lo termad’aiga“) faisant par exemple l’objet d’un calendrierstrict. Et, pour qui se souvient de Jean de Florette,il n’y a pas plus de surprise à savoir que cettegestion fut prétexte à de nombreux conflits, lorsqued’aucuns “enlevaient la motte“ (“las glevas“),détournant à leur profit le cours des canaux.

Survivances de pratiques paysannes, cesméthodes de gestion ont aujourd’hui quasiment

disparu. Seules quelques exploitations agricoles (àViam, Saint Merd, La Nouaille) entretiennentencore un système de rigoles et pratiquent une irri-gation traditionnelle.

Pas sûr qu’il faille s’en réjouir car ce système jouaitclairement un rôle de stabilisateur dans la distribu-

tion de la ressource en eau tout au long de l’année,contribuant à amortir les effets des crues ou despénuries. Si l’on ajoute qu’il contribuait à unepousse régulière sans l’adjonction d’intrants chimi-ques dont on connaît les effets néfastes sur l’envi-ronnement des têtes de bassin, il y a lieu de s’inter-roger sur son abandon massif.

Tirer partie de la force motrice de l’eau

L’utilisation de l’énergie hydraulique est anciennesur la Montagne. Sur ce territoire où l’abondancede la ressource en eau favorise les installations,des moulins à farine ou à huile sont attestés dès leMoyen Age dans les états de propriété. Rarementinstallés au fil de l’eau, ils sont plutôt alimentés viaun étang ou par le biais d’un canal de dérivation,afin de pouvoir réguler les flux et gérer l’alimenta-tion en eau. La vidange partielle d’un étang - “l’es-tanchada“ -, renouvelée après remplissage,permettait ainsi d’améliorer le rendement de ceséquipements, qui pour certains tournaient jour et

nuit selon les périodes.

Faisant fréquemment l’objet d’une gestion commu-nautaire ou familiale, ils disposaient rarement d’unmeunier attitré - chacun son tour était meunier - etne comportaient donc généralement pas d’habita-tions. Frustres, de fort petite taille, ils n’en présen-taient pas moins un astucieux mécanisme à rouehorizontale encore appelée roue à cuillers (“lorodet“), positionnée sous le bâtiment, surmontée dedeux meules, l’une fixe et l’autre mobile, en granite.Ce n’est que tardivement, fin XIXème, que desinnovations furent introduites : mécanismes à roueverticale à aubes ou meules en pierre de La Fertésous Jouarre.

Destinés à subvenir aux besoins locaux dans unelogique d’autosubsistance et d’autarcie, ilsservaient essentiellement à moudre le seigle. Quel-ques usages alternatifs sont toutefois mentionnés :broyage des faînes de hêtre pour la productiond’huile servant à l’éclairage, pressage des pommespour la production de cidre (Saint Yrieix laMontagne).

S’ils ponctuèrent longtemps le paysage de laMontagne, leurs traces se sont aujourd’hui large-ment estompées et l’on estime que la quasi-totalitédes quelques 800 moulins avérés au début duXIXème siècle ont disparu. Témoignages d’unesociété dont l’économie fonctionnait largement surelle-même, les derniers d’entre eux cessèrentd’être utilisés dans les années 1960, remplacés pardes concasseurs thermiques ou hydrauliques etpar le développement de minoteries industrielles.Seules subsistent quelques exemples, à l’instardes trois beaux moulins de Razel sur le ruisseau deBonne à Pérols sur Vézère.

Stéphane Grasser

Gérer l’eau sur la Montagne limousine un souci séculaire

L’Institut d’Etudes Occitanes du Limousin met actuellement la dernière main à la préparation d’un ouvrage consacré à l’eau sous toutes sesformes (domestiquée avec l’irrigation ou les moulins, sacrée avec les bonnes fontaines …) sur la Montagne limousine. Fruit d’un travail d’en-quête mené en occitan sur 25 communes du centre de la Montagne, ce travail paraîtra fin 2008, chez l’éditeur Doublevébé recup, dans lacollection Carnets de Mission. Petit aperçu de certains de ces usages ancestraux.

roue à cuillers “rodet dau molin de La Comba“

les paysans“baignaient le pré“ “far

banhar los prats“ ...“

lo moulin dau Mont Buschos

levada chas Barba