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J. M. Littlejohn, discours du 12 octobre 1934 – page 1/1 – Nombre de signes : 39715 Évolution et futur de l’ostéopathie John Martin Littlejohn Ph. D. LL. D., D.O. 1 Discours prononcé devant la Convention de l’Association des Ostéopathes Réunis le 12 octobre 1934. Tant d’hommes de médecines, de masseurs, de naturopathes et autres ont tenté de s’approprier la technique ostéopathique pour en faire l’ultime prolongement d’autre chose ou un complément de quelque autre forme de traitement, que nous devons clairement comprendre ce qu’est l’ostéopathie. L’histoire passée, présente et future de l'ostéopathie la présente comme une mé- thode indépendante dans l’art de guérir ; elle ne saurait donc être enseignée ni pratiquée comme un complément. Mais les traîtres ne sont pas tous à l’extérieur. Récemment, un ostéopathe nous a clairement déclaré : « Je ne pratique pas ; je diagnostique le cas, puis je le dirige vers un masseur pour le traitement. » Une lettre reçue récemment des États-Unis nous parle d’ostéopathes du cen- tre du pays ayant installé des cabinets d’ostéopathie dans lesquels il n’y a même pas de table d’ostéopathie. Qu’est l’ostéopathie ? L’ostéopathie – principe et pratique précis –, fut élaborée et présentée au monde par le Dr A. T. Still il y a soixante ans. Ceux d’entre nous qui l’avons reçue de ses mains la considèrent comme une irrévocable contribution à l’art de guérir qui ne pourra jamais être abrogée. Nous ressentons un profond respect pour sa mémoire et notre amour pour lui se manifeste dans notre foi durable en sa découverte. Le contexte de sa découverte La découverte de tous les secrets de la nature ne saurait provenir d’un seul esprit. Exploration et investigation sont des processus graduels, constituant un développement synthétique progressif. Les pionniers ne sont pas seuls mais multiples. Les principes fondateurs de l’ostéopathie furent énoncés par Still, mais ils résultent d’une évolution s’étendant sur plus de deux milles ans. Ras- semblant toutes les découvertes mécaniques, physiologiques et anatomiques, se fondant sur le corps en tant que « mécanisme de la nature sujet aux lois matérielles », le Dr Still posa le fonde- ment des processus mécaniques physiologiques, complétés par les possibilités qu’a le corps d’élaborer ses propres remèdes et de les distribuer aux endroits nécessaires, désorganisés, propo- sant la méthode de thérapeutique corrective comme sa méthode. Ses prédécesseurs avaient posé les fondements – inconnus pour lui – des principes mécaniques du corps, insistant sur la nécessité d’une connaissance poussée de l’anatomie et de la physiologie au niveau des muscles, tendons, ligaments, nerfs, vaisseaux sanguins et os. Mais ils échouèrent en ne parvenant pas à collationner les conditions dans lesquelles cette coordination et cette corrélation anatomo-physiologiques des structures produisent l’harmonie dans le corps, et par conséquent, constituent les bases d’un sys- tème de thérapeutique naturelle. 1 In T. Edward Hall, John Wernham, The contribution of John Martin Littlejohn to Osteopathy, The Maidstone Osteopathic Clinic, Centenary edition 1874-1974, p. 51-69 – Traduit de l’anglais par Pierre Tricot DO MRO (F ), juillet 99. Les sous-titres ont été ajoutés lors de la traduction.

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J. M. Littlejohn, discours du 12 octobre 1934 – page 1/1 – Nombre de signes : 39715

Évolution et futur de l’ostéopathie

John Martin Littlejohn Ph. D. LL. D., D.O.1

Discours prononcé devant la Convention de l’Association des Ostéopathes Réunis le 12 octobre 1934.

Tant d’hommes de médecines, de masseurs, de naturopathes et autres ont tenté de s’approprier la technique ostéopathique pour en faire l’ultime prolongement d’autre chose ou un complément de quelque autre forme de traitement, que nous devons clairement comprendre ce qu’est l’ostéopathie. L’histoire passée, présente et future de l'ostéopathie la présente comme une mé-thode indépendante dans l’art de guérir ; elle ne saurait donc être enseignée ni pratiquée comme un complément. Mais les traîtres ne sont pas tous à l’extérieur. Récemment, un ostéopathe nous a clairement déclaré : « Je ne pratique pas ; je diagnostique le cas, puis je le dirige vers un masseur pour le traitement. » Une lettre reçue récemment des États-Unis nous parle d’ostéopathes du cen-tre du pays ayant installé des cabinets d’ostéopathie dans lesquels il n’y a même pas de table d’ostéopathie.

Qu’est l’ostéopathie ? L’ostéopathie – principe et pratique précis –, fut élaborée et présentée au monde par le Dr A. T. Still il y a soixante ans. Ceux d’entre nous qui l’avons reçue de ses mains la considèrent comme une irrévocable contribution à l’art de guérir qui ne pourra jamais être abrogée. Nous ressentons un profond respect pour sa mémoire et notre amour pour lui se manifeste dans notre foi durable en sa découverte.

Le contexte de sa découverte La découverte de tous les secrets de la nature ne saurait provenir d’un seul esprit. Exploration et investigation sont des processus graduels, constituant un développement synthétique progressif. Les pionniers ne sont pas seuls mais multiples. Les principes fondateurs de l’ostéopathie furent énoncés par Still, mais ils résultent d’une évolution s’étendant sur plus de deux milles ans. Ras-semblant toutes les découvertes mécaniques, physiologiques et anatomiques, se fondant sur le corps en tant que « mécanisme de la nature sujet aux lois matérielles », le Dr Still posa le fonde-ment des processus mécaniques physiologiques, complétés par les possibilités qu’a le corps d’élaborer ses propres remèdes et de les distribuer aux endroits nécessaires, désorganisés, propo-sant la méthode de thérapeutique corrective comme sa méthode. Ses prédécesseurs avaient posé les fondements – inconnus pour lui – des principes mécaniques du corps, insistant sur la nécessité d’une connaissance poussée de l’anatomie et de la physiologie au niveau des muscles, tendons, ligaments, nerfs, vaisseaux sanguins et os. Mais ils échouèrent en ne parvenant pas à collationner les conditions dans lesquelles cette coordination et cette corrélation anatomo-physiologiques des structures produisent l’harmonie dans le corps, et par conséquent, constituent les bases d’un sys-tème de thérapeutique naturelle.

1 In T. Edward Hall, John Wernham, The contribution of John Martin Littlejohn to Osteopathy, The Maidstone

Osteopathic Clinic, Centenary edition 1874-1974, p. 51-69 – Traduit de l’anglais par Pierre Tricot DO MRO (F), juillet 99. Les sous-titres ont été ajoutés lors de la traduction.

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Le Dr Still développa son système à partir d’une profonde connaissance de l’anatomie et de la physiologie du corps humain, considérant les anomalies anatomiques et physiologiques comme causes de perversions des fonctions physiologiques à travers circulation et réflexes nerveux per-vertis. Cela signifie que le Dr Still rassembla simplement toutes les découvertes antérieures dans les domaines mécanique, anatomique et physiologique du corps en un système de diagnostic et de traitement. Aujourd’hui comme dans le passé et le futur, l’ostéopathie représente les méthodes à utiliser lorsque l’on applique cela à la science et à l’art de la guérison. Comme Still formula le nouveau fondement technique à la fois du diagnostic et du traitement, son développement a été étendu jusqu’à démontrer son application aux différents types de maladie.

Une définition de l’ostéopathie Je n’en ai jamais trouvé de meilleure définition de l’ostéopathie que celle préparée par le Dr Still et moi-même, et publiée en 1900 dans le premier numéro de The Journal of the Science of Osteo-pathy : « Définition de l’ostéopathie : l’ostéopathie est la science ou système de guérison qui met l’accent sur (a) le diagnostic des maladies par des méthodes physiques avec l’objectif de découvrir non pas

les symptômes, mais les causes de la maladie, en connexion avec les déplacements des tissus, l’obstruction des fluides et ce qui interfère avec les ressources et les forces nutritives de l’organisme ;

(b) le traitement de la maladie par des manipulations scientifiques par lesquelles le médecin trai-tant utilise et applique mécaniquement les ressources inhérentes de l’organisme soit en enle-vant, soit en corrigeant les désordres mécaniques, pour surmonter la maladie et établir la san-té, permettant ainsi à la nature de récupérer la partie malade, ou bien en produisant et en éta-blissant des conditions antitoxiques et antiseptiques permettant de contrecarrer les conditions toxiques ou septiques de l’organisme ou de ses parties, en suppléant et régulant les apports nutritionnels ;

(c) l’application d’une chirurgie mécanique et opératoire dans la réduction des os fracturés ou disloqués, réparant les lacérations et enlevant les excroissances tissulaires anormales ou des éléments tissulaires devenant dangereux pour la vie organique. » – The Journal of the Science of Osteopathy, 1900.

Aujourd’hui comme alors, la seule qualification fondamentale pour pratiquer et enseigner l’ostéopathie demeure la fidélité aux principes anatomiques, physiologiques, biochimiques et naturels des structures du corps et de leurs activités. Il existe vraiment un domaine pour une telle activité, comme l’a déclaré au nom des ostéopathes américains, en août 1934 à Wichita, le prési-dent de l’Association Ostéopathique Américaine (AOA), récemment élu : « L’enseignement doit intéresser les hommes et les femmes de notre profession concernés par le futur de l’ostéopathie. Nous avons un besoin sans cesse croissant d’étudiants pour fournir la demande continuelle en médecins ostéopathes bien entraînés. Nous avons besoin de plus d’écoles, de plus d’hôpitaux pour entraîner plus d’hommes et de femmes pour les spécialités. Derrière toutes ces activités se tiennent les praticiens généralistes de base. » Nous approuvons pleinement cette déclaration dé-montrant que « le futur de l’ostéopathie repose sur les enseignants et les hospitaliers, fidèles au système thérapeutique fondé par Andrew Taylor Still, chargés de le maintenir pur et d’un niveau le plus élevé possible, aussi bien dans le domaine de l’enseignement que dans celui de la clini-que… afin de le maintenir comme un système thérapeutique distinct, ainsi qu’il fut conçu. »

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L’ostéopathie, un reboutement ? Certains de nos amis, comme le Dr Marlin dans son récent livre sur le traitement manipulatif, considèrent l’ostéopathie comme du reboutement et rien de plus, l’essentiel reposant dans la technique de traitement. Le Dr Still a formulé son système comme un système de diagnostic et de traitement. Ses développements doivent donc se fonder sur la technique de traitement spécialisée et généralisée. Même si nous ne pouvons éprouver de la sympathie pour eux, nous ne pouvons ignorer ceux qui méconnaissent les domaines scientifiques de l’étiologie et de la pathologie comme les piliers enracinant notre nouvelle science. Le Dr Still, après s’être séparé des méthodes médicales de son époque, se détourna du savoir livresque insatisfaisant portant sur la santé et la maladie pour prendre directement ses leçons dans les livres de la nature, commençant la carrière débutante de son nouveau système en s’attaquant à une maladie aiguë – la paralysie infantile –, qu’il maîtrisa, et sur la maîtrise de laquelle il fonda les principes de base d’une nouvelle idée de l’étiologie et de la pathologie de la maladie.

Définir santé et maladie Sa première contribution fut l’élaboration des principes généraux, non pas du reboutement, mais de la santé par rapport à la maladie. Le Dr Lane, un temps collaborateur du pathologiste Banting, accepta les points suivants comme principes sous-jacents, fondant le nouvel art et de la nouvelle science de la guérison. (1) Le corps vivant, s’il est dans une condition d’intégrité structurelle et fonctionnelle normales est capable de se maintenir seul dans un état d’immunité native et naturelle et de créer ses propres remèdes pour s’opposer à la maladie. Le corps fait cela en utilisant ses propres laboratoires et en distribuant les remèdes appropriés par l’intermédiaire des différents fluides corporels sous la su-pervision et le contrôle directs du système nerveux central. Aucune mention ici des os et de leur rajustement – un fait souvent oublié y compris par les ostéopathes eux-mêmes. (2) Le corps est un mécanisme vivant, construit sur les principes d’un organisme et pour être normal, cet organo-mécanisme doit être correctement ajusté à lui-même, à son intégrité vitale et à l’unité du corps, ainsi qu’à l’intégrité de toutes ses parties, considérées comme des unités dans l’unité. Pour que le corps soit capable de préserver sa santé naturelle et donc son immunité natu-relle, l’intégrité de ses parties doit être préservée et corrigée ; c’est seulement lorsqu’elle est ainsi préservée et corrigée que l’action des remèdes naturels peut se produire au sein du corps.

Les leviers osseux C’est à ce point que, suivant ses idées sur l’étiologie et la pathologie, le Dr Still introduisit les os, parce qu’il avait découvert que dans l’anatomie du corps, les os représentent la charpente du corps, tous les tissus mous y étant attachés. Ajustés en relation à cette charpente osseuse ils inter-viennent dans le maintien des mouvements physiologiques du corps et de ses parties en état de vie et de santé. C’est ainsi que reconnaissant la nécessité d’une mobilité parfaitement équilibrée dans le corps entier aussi bien que dans ses parties séparées, il ressentit la nécessité d’utiliser les leviers osseux pour la correction de conditions d’adaptation anormale. Ainsi, ses techniques de rajustement correctif ramenaient ou préparaient le retour de conditions correctes de mobilité sur la base d’un corps normal. Cela explique pourquoi nous appelons sa nouvelle découverte ostéo-pathie – et non pas médecine, ni chiropraxie ni cure naturiste.

Le corps laboratoire Pour résumer, selon qu’il est en état de santé ou de maladie, le corps représente une immunité

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naturelle et native – la santé –, ou bien une rupture ou une destruction de l’immunité naturelle – la maladie. C’est l’immunité qui préserve la santé, se fondant sur (a) les nerfs et le système ne r-veux et (b) la circulation sanguine, incluant tous les fluides du corps. C’est ainsi que le Dr Still parlait de l’interférence dans le flux artériel comme étant le point de départ de la maladie. Ces deux choses se fondent sur l’intégrité de la structure du corps et sur la normalité de son fonction-nement. Toutes les substances essentielles à la construction, la réparation et la guérison du corps sont élaborées dans les laboratoires humains. Cela explique la présence de sécrétions et de glan-des destinées à fournir les sécrétions spécifiques de telle sorte que les anti-toxines aussi bien que les matériaux de réparation puissent être préparés avec délicatesse par le corps pour son usage. Le pouvoir naturel de guérison s’ensuit uniquement lorsque la correction habile des anomalies par rajustement a été accomplie. Cela implique que les conditions de santé au sein du corps dépen-dent de deux conditions : « l’ajustement des conditions corporelles au niveau de leur mécanique de manière à fournir une parfaite intégrité structurelle et fonctionnelle » et la réorganisation des forces de la nature au sein du corps selon des lignes réparatrices et curatrices, suivant les correc-tions dans les domaines mécaniques et la correction de l’apport nutritionnel.

La structure et la fonction Pour cette raison, le Dr Still établit le premier principe de pathologie : « Toute maladie remonte à quelque désordre mécanique dans la machinerie du corps humain. » D’où la nécessité de décou-vrir et de corriger les irrégularités dans la structure et la fonction, fondement et explication de notre idée de la lésion. D’où le premier principe de la thérapeutique : si et quand la structure cor-porelle est en ordre ou remise dans un arrangement mécanique ordonné, l’insuffisance du fonc-tionnement corporel que nous appelons maladie laisse place à l’efficience du fonctionnement du corps. C’est cet réarrangement qui rend la nature capable d’exercer ses pouvoirs curatifs. Le Dr Lane, en résumant l’œuvre de la vie du Dr Still, s’exprime ainsi : « le corps contient en lui-même tout le pouvoir nécessaire pour se guérir de ses maladies et il (le Dr Still) apporta la méthode par-ticulière grâce à laquelle ce pouvoir guérisseur peut être utilisé et appliqué à la maladie à traiter, qu’il appela l’ostéopathie… C’est à lui que revient d’avoir amené toutes les maladies sous une seule grande loi – celle de la résistance du corps, selon laquelle le sang et les tissus contiennent théoriquement le remède pour les maladies de toutes sortes. Par certaines manipulations appli-quées aux structures du corps, particulièrement celles de la colonne vertébrale, cette résistance naturelle à la maladie peut être libérée de certaines interférences cachées ou bien, dans certaines autres circonstances, augmentée en quantité. »

L’importance de la nutrition D’où (c) la nécessité d’un approvisionnement en matériaux appropriés par une alimentation de base reconstituante pour le corps, de manière à maintenir l’intégrité de sa biochimie.2 Cela est

2 Still ne s’intéressait pas à cette question : « … vous devez manger telle quantité, à telle heure, et aller au lit à telle

heure. En Amérique, nous allons nous coucher tôt ou tard, mangeons ce que nous voulons et tout ce que nous voulons si nous pouvons l'avoir. Cela prouve que le commerce pour les aliments de régime n'est pas nécessaire et que nous pouvons tout à fait nous en passer ; c'est le système consistant à manger ceci et cela où risquer de mo u-rir. Si l'estomac est connecté à la bonne batterie, le cerveau et les nerfs de la nutrition fonctionnant correctement, vous pouvez manger une grenouille à longues pattes et en vivre ; vous pouvez manger du chien et bien vous en porter. Si vous ne le croyez pas, achetez un morceau de bœuf dans cette ville et si vous pouvez le manger, vous pourrez manger n'importe quoi. L'Architecte avisé de l'univers a placé ce moulin en vous et il broiera tout ce qui est nutritif. Les choses étant ainsi, il est tout aussi utile pour vos repas principaux de grignoter d'une certaine ma-nière qu'il est d'avoir votre batterie et votre mécanisme de telle sorte qu'ils puissent fonctionner comme Dieu et

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confirmé par le Dr Alexander Haig qui nous dit que la santé est : « un état satisfaisant de nutri-tion, de force et de puissance. » Dans la même lignée, dans ses recherches expérimentales présen-tées à la Medical and Surgical Association en 1843, le Dr William Addison, du Collège Royal de Chirurgiens, stipule que la nutrition est à la base de la vitalité structurelle. La maladie indique donc des « changements nutritifs morbides dans la structure. » La santé, par conséquent, dépend d’une certaine quantité et d’un certain ordre dans le changement intervenant au sein de la matière, pour un temps donné, et « presque toutes les formes interminables de désordres et de maladies sont des variations sévères dans la quantité et l’ordre du changement. » La nutrition constitue donc un facteur primordial de la santé, l’altération ou la modification de la nutrition constituant un élément primordial dans les maladies. Les conditions de malnutrition représentent par cons é-quent un vaste domaine dans lequel des conditions anormales de structure et de relation structu-relles sont découvertes, et des réactions pathologiques dans l’activité fondamentale résultent en des changements pathologiques que nous appelons maladie. Tous dépendent du sang, de sa circu-lation et de sa distribution correcte sous l’influence et le contrôle des nerfs.

Le contrôle du système nerveux C’est ainsi que lorsque l’immunité naturelle du corps est abaissée ou détruite, le corps ou ses par-ties deviennent susceptibles de présenter différents types de maladie. Ces types de maladie sont déterminés par : (a) une fragilité du corps dans ses différentes parties séparées ou groupes de parties, organes et / ou fonctionnements. Cela nous fournit la raison pour laquelle des maladies se localisent spécia-lement sur certains organes ou tissus. C’est là que surgit l’étiologie de conditions obstructives ou irritatives comme celles que l’on trouve dans les maladies aiguës. (b) Parfois, des conditions irritatives secondaires dans le domaine sympathique réagissent sur le système nerveux central par l’intermédiaire des centres spinaux. Cela se rapporte au système ner-veux autonome et crée le fondement pour les maladies nerveuses chroniques. (c) Différents types d’accidents donnent origine à des perturbations réflexes soit locales, soit gé-nérales, et les effets réactionnels peuvent se projeter soit le long du système nerveux central, soit le long des trajets sympathiques, résultant en perturbations concrètes ou en maladies de coordina-tion, de coopération, d’activité viscéromotrice, sécréto-motrice, se terminant finalement en condi-tions spécifiques concentrées dans des domaines éloignés. Les dires des auteurs médicaux et scientifiques du siècle passé prouvent que cette idée est correc-te. Ils ont appelé l’attention sur la connexion existant entre les blessures de la colonne vertébrale et les perturbations symptomatiques ou maladies se manifestant dans d’autres parties du corps. Les commotions ne peuvent plus être limitées au cerveau, mais peuvent se trouver n’importe où, là où des subluxations sont capables de produire des effets. Il en résulte qu’hystérie et névroses3 sont étroitement associées à des malformations et des malajustements physiques. Les conditions mécaniques provoquent non seulement des expressions sensorielles et motrices mais également des effets terminaux dans les organes et les tissus. L’effet d’une perturbation articulaire se mani-feste dans les circulations sanguine et lymphatique et / ou par l’intermédiaire du système nerveux sympathique sur les organes viscéraux, les organes des sens, les structures sécrétoires spécialisées et même dans le cœur.

Son jugement l'ont prévu lorsqu'ils les planifièrent. Nous découvrons qu'Il est compétent et sait comment accom-plir Son œuvre et lorsqu'Il a fait un travail, vous ne pouvez pas l'améliorer. » Autobiographie , Editions Sully, 1998, p. 315. (N.d.T.).

3 À cette époque, on classait dans ces domaines tous les symptômes dont on ne connaissait pas l’origine. (N.d.T.).

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En 1898, Clevenger, nous disait que non seulement les torsions et lésions des vertèbres pertur-baient « la fragile circulation de la mœlle épinière, mais par les contraintes induites, produisaient une irritation plus ou moins permanente sur les racines nerveuses et les méninges et – ce qui semble avoir été totalement ignoré de tous les auteurs –, des lésions des fibrilles de communica-tion du système sympathique, légères et peu protégées. »

Le futur de l’ostéopathie Que dire à propos du futur ? Nous sommes nés pour évoluer, le progrès scientifique diffère légè-rement des progrès commerciaux et industriels. Quelle que soit le domaine du progrès, nous de-vons satisfaire les besoins de l’humanité et servir les intérêts de la science. Si la médecine avait été parfaite avant l’avènement de l’ostéopathie, il n’y aurait pas eu besoin d’un nouveau concept. Mais l’art de la guérison était dans un état immature, les résultats des méthodes existantes deve-nant de patents échecs. Les conditions étaient réunies pour le développement d’une nouvelle idée. Si, comme le dit le Dr M. A. Lane – chercheur médical devenu un inconditionnel de l’ostéopathie –, l’ostéopathie doit évoluer, nous devons étudier le Maître à l’œuvre avec les outils qu’il inventa pour transformer ses théories en faits. Demeurer un pur ostéopathe fut difficile, même pour le fondateur, mais cela ne justifie pas que les ostéopathes modernes se départissent des purs princi-pes essentiels de l’ostéopathie sur lesquels Still s’appuya et qui tous ensemble, sont entièrement responsables des magnifiques succès de l’ostéopathie d’aujourd’hui.

Le pur ostéopathe le Dr Lane définit ainsi le pur ostéopathe : « Un ostéopathe qui traite la maladie par manipulation en accord avec la technique ostéopathique, les tissus du corps, particulièrement ceux qui consti-tuent le support de la colonne vertébrale et des nerfs émergeant entre les vertèbres. Cette manipu-lation ne répond à aucune règle ou système figé ou expéditif, mais peut et doit aller du simple mouvement par lequel la subluxation, petite ou grande, ou tout autre importante tension ou dévia-tion peut être enlevée, au traitement général dans lequel toute la colonne vertébrale et ses tissus anatomiques sont profondément relâchés et réajustés. Aussi longtemps que l’ostéopathe utilise ses mains pour sa thérapeutique, il peut être appelé pur ostéopathe. A l’exact moment où il adopte toute autre procédure quelle qu’elle soit, il n’utilise plus l’ostéopathie. Par cela, nous ne voulons pas dire, comme se l’imaginent quelques critiques mal pensants ou mal informés sur l’ostéopathie, qu’un ostéopathe doit nécessairement être un idiot stupide qui, dans les cas de frac-ture du crâne, tenterait d’arrêter une hémorragie des oreilles en manipulant les os du dos, ou qui soutiendrait que les insectes ne transmettent pas de germes maladifs, ou refuserait tout autre fait connu et reconnu. Dans une définition stricte du terme pure ostéopathie, ou, comme beaucoup d’entre-nous l’appellent en raccourci, ostéopathie à dix doigts, nous n’avons pas besoin d’exclure l’utilisation de méthodes d’hygiène ou de diète, pas plus, évidemment que n’importe quel autre régime scientifique qui viendrait soutenir le pur traitement ostéopathique. Et pourtant, jusqu’à ce que ce que le dernier mot en science ostéopathique ait été prononcé et la dernière expérimentation possible en recherche ostéopathique effectuée, aucun homme ne peut positivement affirmer que la pure manipulation ostéopathique ne pourrait finalement être tout ce qui est nécessaire dans le traitement de la maladie et par cela nous voulons dire toute maladie, y compris les tumeurs. » La portée, la sphère, le futur immédiat de l’ostéopathie n’ont jamais été évoqués en termes plus clairs et scientifiques que par notre très cher ami le Dr Lane. Vous remarquerez qu’il réduit la

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science à la technique du diagnostic, à la technique de traitement et qu’en elle, il établit une diffé-rence entre technique générale de traitement et technique spécifique. L’étiologie et la pathologie spéciale fondée sur l’hyper ou la sous-physiologie, avec leurs effets résultants sur le tissu, consti-tuent le fondement de notre domaine diagnostique. Le traitement spécifique visant à la correction de lésions spécifiques et le traitement général – palliatif ou autre –, avec en vue l’établissement et la restauration de l’immunité du corps, fournissent les clés de la direction de notre traitement.

La colonne comme un arbre Grâce à cette belle analogie entre le corps et l’arbre, Gunnar Frostell nous donne la clé de notre technique : « Regardez ce grand arbre qui semble avoir poussé parfaitement droit et paraît bien équilibré dans ses tentatives d’élévation ; en l’examinant de plus près, nous découvrons dans son architecture de petites courbes et nous remarquons que si elles avaient poursuivi dans leurs direc-tions, cela aurait conduit à une perturbation de l’équilibre en produisant à terme une dispersion ou un effondrement prématurés de l’arbre. De la même manière, un examen attentif de la colonne vertébrale humaine révélera un fait dont la fréquence est surprenante : les courbures normales, même si elles semblent normales, présentent en leur sein de petites courbures brusques, locali-sées, que l’on peut discerner dans n’importe quelle région vertébrale, mais plus fréquemment au niveau des cervicales basses, des lombaires hautes et de la région sacrée de la colonne. » Cela nous donne la clé de la colonne dans sa relation avec le système nerveux central. Mais le système nerveux autonome ne doit pas être oublié. Dans Symptoms of Visceral Disease, Pottinger nous dit : « Chaque viscère interne important est tellement connecté au système nerveux central qu’il est capable de produire des réflexes à travers les afférences sympathiques ou les efférences spina-les, avec des structure squelettiques déterminées et, en cas d’inflammation aiguë, peut montrer des réflexes et une sensibilité altérés et, en cas d’inflammation chronique, des changement stro-phiques. Par conséquent, le spasme musculaire, la sensibilité cutanée altérée et la dégénérescence musculaire, la peau et les tissus sous cutanés dans les zones ayant une innervation segmentaire définie et limité, deviennent des phénomènes importants sur le plan diagnostic. »

La relation sympathique Voilà qui établit le fondement pour la technique spinale de diagnostic. Dans sa Physiologie ap-pliquée, Wright confirme cela : « dans certains cas de maladies viscérales, existe une sensibilité le long de la colonne vertébrale. » Il fait ressortir que « les zones d’effet vertébrales sont, pour les affections cardiaques, le segment dorsal D1-D4, pour le foie, D8-D11, le rectum et l’utérus, L5-S2. » Dans son travail sur le système nerveux autonome, Kuntz indique très précisément que « les perturbations de l’équilibre fonctionnel du système nerveux autonome sont accompagnées par des changements régionaux dans la perméabilité des vaisseaux sanguins et la distribution corres-pondante des leucocytes. Les réponses viscérales surviennent seulement après qu’un changement dans la condition tonique des vaisseaux sanguins cutanés dans la région stimulée soit survenu. L’organe viscéral affecté subit un changement vasomoteur correspondant au changement vaso-moteur localisé de la peau, c’est-à-dire que l’hyperémie et l’ischémie cutanées résultent respecti-vement en hyperémie et en ischémie dans les organes viscéraux. » D’après cela, une stimulation hyper ou sub physiologique des zones cutanées peuvent résulter en une pathologie viscérale. Cela corrobore la loi de Head concernant les corrélations entre zones de faible sensibilité représentant les viscères auxquels les fibres du système nerveux autonome sont distribués, contrastant avec les zones de haute sensibilité en connexion avec la distribution des

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nerfs spinaux. Ceci explique les réflexes viscéro-somatiques. Mais nous devons y ajouter la loi de Hilton : « Les nerfs approvisionnant une articulation innervent également les muscles qui mo-bilisent l'articulation et la peau qui la recouvre et les insertions articulaires de ces muscles. » C’est-à-dire qu'une hyper ou une sub-physiologie des nerfs d'une articulation provoquée par une lésion spinale résulte en une pathologie viscérale. D’où la technique thérapeutique consistant à enlever ou corriger l’irritation et ainsi permettre la coordination équilibrée des nerfs et de l'action nerveuse entre les structures de l'articulation et ses structures articulaires mobiles. Ainsi, nous trouvons dans la littérature portant sur la recherche dans les domaines médical et chirurgical, tou-tes les preuves nécessaires à confirmer et élaborer nos idées sur la technique de diagnostic et de traitement ostéopathiques.

Évolution et changement Les auteurs médicaux et chirurgicaux dénigrent le changement thérapeutique qu’implique le concept ostéopathique. Rappelons-nous ces auteurs antiques de l’aube de la science médicale. Héraclius disait au monde que la seule chose certaine dans le domaine de la science et de la gué-rison était le changement. L’ostéopathie en est une simple illustration. Le savoir dans n’importe quel domaine sera toujours un processus de changement. Le futur de l’ostéopathie repose sur ce processus et tant qu’elle sera une science et un art de la guérison, promouvant de manière crois-sante la santé des gens, elle sera elle-même un facteur de guérison croissant et progressant. Cela signifie que nous devons constamment réexaminer et réévaluer nos fondements et reconstruire quand et où cela s’avère nécessaire. Still vécut à une époque de scepticisme, rejetant les théories thérapeutiques dogmatiques alors acceptées, parce que ces théories échouaient à expliquer la phi-losophie de la santé et de ce fait échouaient à guérir. Still nous a donné un nouveau principe. Il nous revient de construire et au besoin de reconstruire sur les fondements qu’il nous a laissés. Comme de nouveaux faits émergent dans les domaines de l’anatomie, de la physiologie et de la biochimie, nous devons façonner nos principes de technique en conséquence. C’est-à-dire que notre chemin d’évolution doit nous amener à rechercher la connaissance où qu’elle puisse être découverte, sans nous préoccuper de l’endroit où cela nous conduira.

L’unité du corps Nous devons nous rappeler la pensée centrale de la philosophie thérapeutique de Galien selon laquelle l’organisme humain devrait toujours être considéré comme une unité et comme tel, ne pas être divisé en parties ou sections. L’idée de Galien est une tentative pour élaborer une théorie de la maladie autour d’une cellule isolée ou de groupes de cellules. « L’ensemble de l’organisme vivant dans son environnement est plus important que la connaissance la plus intime de toutes ses parties. » Notre système est un succès parce que nous suivons cette idée. Notre technique se fonde sur le corps humain comme un tout, sur la relation mutuelle de toutes ses structures et sur la relation mutuelle entre la structure et l’environnement, fournissant la clé pour la découverte des changements qui génèrent la maladie. Lorsque nous détectons une maladie, le point essentiel à étudier et à considérer, c’est de savoir pourquoi il existe une diminution de la résistance et où cette diminution de résistance se localise. La réponse à ces deux questions fournit la clé concer-nant notre diagnostic et la conduite de notre traitement qui seront déterminés par la réponse que nous donnerons à ces deux requêtes.

Trois propositions essentielles Mon ultime message aux membres de la profession ostéopathique est contenu dans trois proposi-

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tions : (1) Dans la technique du diagnostic et du traitement, chaque cas doit être envisagé du point de vue de l’unité du corps humain. Chaque maladie est simplement un facteur anormal dans le déve-loppement du corps ou une dégradation du corps et doit être traitée comme telle. Lorsque nous avons affaire à des maladies aiguës ou à des formes spéciales de maladies localisées dans des zones particulières, nous ne devons pas oublier l’unité du corps. Voilà quelques années, j’ai dis-séqué plusieurs cadavres pour établir une carte de la totalité du système nerveux dans tout le corps. Le résultat en fut ma carte des aspects anatomiques et physiologiques du corps humain. Ultérieurement, d’autres chercheurs ont produit la carte du système nerveux autonome. Ces deux cartes mettent en exergue et démontrent la relation et la corrélation existant entre toutes les par-ties du corps humain au sein de l’organisme. Et c’est sur cette base que j’enseigne l’intégrité du corps humain à la British School of Osteopathy. (2) Dans la technique du diagnostic et du traitement, chaque cas doit être envisagé du point de vue de l’immunité native du corps normal face à la maladie. Nous entendons tellement parler aujourd’hui d’infections, de germes et de poisons que nous oublions presque que le corps possè-des ses propres pouvoirs inhérents, capables de les détruire tous. L’attention se concentre toujours sur ce qui détruit la vitalité du corps, oublieuse de son pouvoir natif à combattre. Et pourtant, ce principe est aussi vieux que le guérison elle-même, vis medicatrix naturae4, c’est-à-dire que le corps possède en lui-même les moyens essentiels pour sa propre défense. Là, nous découvrons la valeur d’un traitement plus ou moins général pour établir, régénérer et renouveler la résistance vitale. Et le point le plus délicat de notre thérapeutique, c’est d’associer les formes spécialisées de techniques au traitement général de certains cas, tout en les synchroni-sant. Le fait que les enfants maintenus sous observation et traitement ostéopathiques soient plus résistants aux infections courantes constitue la preuve de ce que nous avançons. Dans les domai-nes de la recherche, les preuves abondent prouvant que les lésions de différentes sortes diminuent l’immunité et dans beaucoup d’épidémies, il a été prouvé que la correction des conditions structu-rales et des relations de l’organisme augmentait l’indice phagocytaire. Whiting, Burns et Lane, sont pour nous les noms familiers de cette démonstration. Allant dans ce sens, l’ostéopathie a toujours mis l’accent sur la valeur d’un approvisionnement sanguin de qualité et d’abondantes preuves existent quant à l’interférence très fréquente de lésions avec la circulation sanguine et nerveuse. Le Dr Louisa Burns fit cette grande déclaration : « Rien mieux que la structure normale ne peut être donné à un tissu ou un organe blessé pour augmenter l’immunité, prévenir l’infection et restaurer les fonctions normales. » Nous pouvons être certains que le maintien des relations structurales normales au sein du corps est la chose la plus importante pouvant être faite pour le développement de l’immunité. Voilà le summum de la recherche ostéopathique. (3) Dans la technique du diagnostic et du traitement, chaque cas doit être examiné en fonction de la meilleure méthode permettant de déterminer la technique qui lui est spécifiquement applicable. La technique de traitement dépend de la localisation de la lésion pathologique et la technique utilisée doit être déterminée par le lieu de la lésion et par son type.

Notions de physiologie vertébrale Le fondement de toute technique est le mouvement physiologique. Les différentes articulations vertébrales ont chacune leur mouvement particulier. Les mouvements simples sont la flexion, l’extension, la rotation et la latéroflexion rotation. Le deux premiers sont primaires et les deux autres secondaires et complémentaires l’un par rapport à l’autre. La latéroflexion rotation se pro- 4 Vis medicatrix naturae : L’action curatrice de la nature (N.d.T.).

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duit donc toujours avec de la rotation et vice versa. Et pourtant, ces deux mouvements complé-mentaires sont ceux qui contrôlent, parce que les hyper et sub mouvements de la colonne antéro-postérieure normale déterminent la totalité du mouvement de la colonne vertébrale mais égale-ment la manière dont rotation et latéroflexion rotation s’associent l’une à l’autre lors du mouve-ment de la colonne. Aucun diagnostic concernant une condition spinale ne peut donc être réalisé valablement sans un test complet de la latéroflexion rotation et de la rotation en tant que mouve-ments complémentaires. Ceci explique pourquoi la pathologie congestive et inflammatoire d’une articulation ne produit jamais un équilibre de mobilité équivalent sur toutes les parties de l’articulation. La limitation du mouvement ou le changement du tissu intervient toujours d’un côté ou de l’autre, antérieur ou postérieur, interarticulaire, dans le disque ou bien dans une capsule. Cela explique également que les accumulation d’adhérences pathologiques résultantes n’existent pas de manière symétrique, expliquant l’asymétrie d’une seule articulation, d’un groupe d’articulations avec asymétrie résul-tante dans la position osseuse et l’amplitude du mouvement articulaire. Ce manque de symétrie dans la position du tissus, de l’os ou autre tissus et dans l’amplitude du mouvement explique le mauvais placement des structures que nous considérons habituellement comme lésions. Il appa-raît alors primordial que notre pathologie soit analysée de manière différentielle, parce que très souvent, on se forme une idée fausse de la malposition. L’idée correcte, c’est que les change-ments pathologiques déterminent la malposition et vice versa. Nous avons là le fondement de la pathologie ostéopathique, ce qui la distingue de la pathologie médicale générale.

Le développement de la pathologie D’après cela, toute pathologie de lésion est péri articulaire et le fondement de l’altération est tou-jours soit hyper physiologique, soit sub-physiologique. C’est-à-dire que quelque changement dans le mouvement articulaire – par contrainte, traumatisme ou autre condition physiologique –, constitue l’origine sous-jacente de la pathologie. C’est cette condition d’hyper physiologie ou de sub physiologie que nous classons comme irritation et les effets de l’irritation sont la congestion et l’inflammation. Le second stade de la condition pathologique est un processus inflammatoire représenté par la condition statique des tissus de soutien avec stase résultante des fluides, le li-quide œdémateux emplissant les espaces vides, réagissant sur les tissus de surface péri articulai-res, particulièrement les ligaments et les muscles, produisant de l’étirement dans les tissus fibreux inélastiques et de l’inélasticité dans les tissus fibreux jaunes élastiques. Le changement est indiqué par la modification de la position des tissus de l’articulation, avec des irrégularités dans le contour de la surface, spécialement, des élargissements autour des surfaces osseuses. Suivant ces changements, nous remarquons la perturbation des réflexes nerveux avec de l’hypertension dans le muscle et certaines modifications biologiques dans les tissus, résultant en conditions tissulaires imparfaites. Une mobilité diminuée, des tissus solidifiés, des muscles hypertoniques, irritables et sensibles accompagnent ces modifications. Dans le troisième degré de la pathologie, le produit final des changements du stade deux deviennent évidents dans et autour de l’articulation, représentant des processus de durcissement, par opposition à la condition molle du stade deux. Ce durcissement est consécutif à l’accumulation de matériaux fibreux blancs ex-pliquant la fibrose, avec modification de l’activité dans les tissus fonctionnels et l’augmentation finale des matériaux fibreux blancs. Lorsque cela devient chronique, le mouvement de l’articulation se détériore, la pression articulaire se réduit et l’affinement et l’épaississement al-ternés du cartilage détruit le mouvement normal. Le résultat final en est une modification de la

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formation osseuse avec une diminution résultante de l’amplitude du mouvement, durcissement, enraidissement et amaigrissement autour de l’articulation. Voilà en gros les grandes lignes du développement pathologique.

Principes de traitement Puisque le facteur principal de la lésion est la restriction de mobilité, la première partie de la technique de traitement doit être dirigée vers la libération de la restriction. D’aucuns objecteront certainement que cela ne touche en rien la localisation de la pathologie spécifique. Cela est vrai, mais ce qu’il faut noter, c’est qu’une telle pathologie résulte de l’altération de l’immunité du corps, ainsi sa résolution est sous l’entière dépendance de la réaction du corps à cette altération. On doit donc s’occuper de toute pathologie localisée de manière palliative, s’occuper des symp-tômes, puis traiter pour ramener l’immunité vers la normale. Par conséquent, le but de la technique de traitement est de venir à bout des éléments de restriction qui irritent et produisent une mobilité restreinte ; puis, lorsque les conditions de mobilité sont normalisées, cette technique doit être poursuivie en dirigeant la mobilité normalisée vers la correction des conditions pathologiques spécifiquement développées dans ce cas précis. Le type de technique doit être déterminé selon les mouvements physiologiques normaux en cause, ajusté à ces mouvements et à la restriction de mobilité existant dans le cas particulier. À partir de là, on comprend facilement que seuls les principes de la technique de traitement peuvent être utilement développés parce chaque cas particulier détermine le type. Certains praticiens disent que le meilleur type de mouvement est celui que parcours une articula-tion ordinaire dans les conditions normales. Cela est cependant impossible parce qu’aucun compte n’est tenu de la restriction de mouvement. Les accumulations pathologiques péri articu-laires limitent le mouvement normal et la tentative de suivre toutes les amplitudes de mouvement normales résulteront en blessure. Cela survient fréquemment dans les articulations tuberculeuses avec des techniques ignorantes. La première chose à faire est donc de découvrir la modification réelle de mouvement ou de mobi-lité, dans le but d’évaluer les troubles et d’inventer le mouvement qui trouvera et combattra avec sûreté la restriction pathologique. Cela implique la mesure physiologique du degré de flexion et/ou d’extension perdue aussi bien que le degré de rotation et/ou latéroflexion rotation perdu. Le point suivant consiste à déterminer si la restriction se centre en flexion ou en extension, en rota-tion ou en rotation et en latéroflexion rotation, ou en flexion rotation et latéroflexion rotation ou en rotation extension et latéroflexion rotation. Il se peut que de la restriction existe dans toutes les amplitudes de mouvement, mais habituellement, il existe un type de mouvement prépondérant dominant la lésion de perte ou de manque de mobilité. Cela signifie que chaque cas doit être considéré comme particulier, ainsi que le mouvement et la force appropriés. L’expérience seule permet d’évaluer cela. Pour y préparer, deux préalables sont nécessaires : (a) La relaxation de tous les tissus mous et de l’articulation et surtout une relaxation articulaire du corps entier, en le considérant comme une unité. Dans les premiers temps du reboutement, cela était fait par anesthésie générale. Dans les premiers temps de l’ostéopathie, nous avons découvert que cela était sans valeur parce qu’une anesthésie générale relâche seulement le contrôle des tis-sus mous par les nerfs les approvisionnant, sans réellement relâcher les tissus en eux-mêmes.

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Un traitement relaxant sert donc notre but de manière beaucoup plus satisfaisante et plus physio-logique parce que la correction qui s’ensuit se fait orientée vers le rajustement de l’articulation qui conduit à la relaxation des tissus mous, et non pas orienté vers la relaxation ou la rémission de la sensation de la douleur ou de la sensibilité. (b) Il est essentiel que la coordination des nerfs, des muscles et de l’activité musculaire soit éta-blie, d’abord dans la région qui doit être corrigée, puis, dans toutes les régions adjacentes. Cela permettra que le rajustement soit effectué sans recourir à de la force physique, avec la coopéra-tion active des tissus mous de la région, de telle sorte que l’articulation ou les articulations ajus-tées seront plus susceptibles de retrouver un emplacement normal dans l’économie tissulaire. (c) De plus, si de l’hypertonicité s’est installée dans la région tissulaire de la lésion, avec accumu-lation conséquente d’œdème dans les tissus mous environnants, le mouvement appliqué doit être surveillé, accompli en étant attentivement et lentement conduit, de manière à prévenir toute réac-tion physique de force, parce que le temps doit être accordé au fluide pour surmonter les condi-tions statiques et lui permettre de se mobiliser simultanément à l’augmentation de la mobilité relaxante du muscle. Ici, nous devons nous rappeler que dans le domaine spinal, de telles accu-mulations de fluides et infiltrations n’impliquent pas seulement le muscle et le ligament, mais également, le ou les disques, ainsi que les rebords cartilagineux des surfaces articulaires. Alors, le relâchement s’installant et le mouvement des fluides s’améliorant, le mouvement qui était le moins fort possible pourra progressivement s’intensifier de manière à surmonter graduellement les forces limitantes de la lésion générale. Si la congestion et l’inflammation sont présentes, le mouvement devra être lent et l’amplitude grande, la rapidité s’augmentant progressivement et l’amplitude diminuant au fur et à mesure de la progression du rajustement correctif. Dans le cas d’une lésion articulaire devenant chronique, la technique doit être déterminée par deux conditions : mouvements déployant énergie et amplitude suffisantes pour surmonter lente-ment et progressivement les accumulations fibreuses d’adhérences, mais pas suffisamment éner-giques ni amples pour convertir l’accumulation adhérente en hyperémie. Pour faire cela, il est essentiel de donner un profond traitement circulatoire afin d’établir une circulation environnante plus libre qui absorbera progressivement les fluides de déchet. Pour promouvoir cette absorption et y préparer la région tissulaire, l’utilisation conjointe des fomentations de sel d’Epsom5 et de friction à l’huile de ricin nature, avec, dans les cas septique, l’utilisation de teinture d’iode comme antiseptique régional sont des conditions essentielles. Dans les états de lésion chronique, il faut noter que la mobilité diminuée est généralement – si ce n’est tout le temps –, celle de l’amplitude du mouvement plutôt que celle du degré de mouvement. C’est-à-dire que le mouve-ment de petite amplitude est celui qui s’indique dans les types chroniques, la force appliquée de-vant être transmise à toute la région de lésion concernée, puis une force plus importante, mais de plus courte amplitude devra être utilisée pour la correction. Entre les différents mouvements de rajustement de ce type, un repos de quelques secondes doit être accordé. Voilà qui incorpore les principes de mouvement à la technique de traitement mise au point par l’expérience, issue de l’étude de l’anatomie et de la physiologie, menée conjointement à une étude attentive de près de 162 000 cas diagnostiqués et traités au cours de 37 ans de pratique et d’enseignement. De cela résulte qu’aucune règle absolue de technique ne peut être posée en fonc-tion des types de maladies. La détermination repose dans le diagnostic de chaque cas. De plus, le type change au cours des traitements successifs, au fur à mesure des progrès accomplis dans le 5 Sel d’Epsom ou sel de Sedlitz : Sulfate de magnésium dont l’action est essentiellement purgative (N.d.T.).

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traitement de ce patient particulier. Dans les cas aigus, le premier traitement s’occupe de manière palliative des symptômes, spécia-lement la douleur et la congestion ; et comme ces états aigus cèdent au traitement, reste la résis-tance diminuée du patient qui marque soit la pathologie originale d’irritation ou les vestiges de l’inflammation, de sorte que dans les étapes ultérieures du traitement de la maladie aiguë, l’attention doit se porter sur la restauration des forces de résistances et/ou des effets tardifs de la fièvre, de la température, de l’inflammation ou de la malnutrition. Dans les états chroniques, l’attention doit se porter d’abord sur le relâchement des tissus mous, la coordination de l’action nerveuse et du tonus neuro-musculaire et ensuite sur le traitement de l’accumulation des fluides, de l’œdème et de la résorption des matériaux fibreux. La chose à éviter lorsque l’on s’occupe des cas chronique, c’est l’organisation d’inflammations secondaires. Il faut donc se préoccuper avec une attention persistante de la circulation, non seu-lement sanguine, mais plus particulièrement lymphatique, parce que ces deux circulations repré-sentent les retours aux conditions embryonnaires et au sang blanc ou circulation lymphatique. D’où le traitement par pompage lymphatique dans les maladies chroniques. Le point essentiel à noter dans cette relation est cependant l’adaptation de la technique de traite-ment à la condition pathologique localisée et l’utilisation du degré de force adapté au type et au degré pathologique, déterminé par un diagnostic attentif et discriminant. Accessoirement, chaque mouvement de rajustement correctif devrait se conformer le plus possible au mouvement physio-logique normal des parties manipulées, la force et l’amplitude étant modifiées en fonction des conditions trouvées à ce moment dans la région de manipulation, cela variant de temps en temps au cours du traitement du patient. Cela donne à la technique de diagnostic et à la technique de traitement des règles définies, témoi-gnant du caractère physiologique des directions thérapeutiques ostéopathiques. Cela donne un fondement défini au diagnostic en vue de la thérapeutique ostéopathique.