Jeunesse et Santé Mentale

LES JEUNES D'AUJOURD'HUI: UNE GÉNÉRATION HYPOTHÉQUÉE? Que leur réserve l'an 2000? Colloque du 5 mai 1989

ICIATION CANADIENNE

I LA SANTÉ MENTALE

LE DE MONTRÉAL

UN ORGANISME DE

^ ^ C e n t r a l d e Montréal

I

I . . J

j

LES JEUNES D'AUJOURD'HUI:

UNE GENERATION HYPOTHEQUEE ?

QUE LEUR RESERVE L'AN 2000 ?

C o l l o q u e d u 5 m a i 1 9 8 9

Institut national de santé publique du Québec 4835, avenue Christophe-Colomb, bureau 200

Montréal (Québec) H2J3G8

Tél.: (514) 597-0600

A S S O C I A T I O N C A N A D I E N N E P O U R L A S A N T E M E N T A L E

F I L I A L E D E M O N T R E A L

8 4 7 , R U E C H E R R I E R , B U R E A U 2 0 1

M O N T R E A L ( Q U E B E C ) H 2 L 1 H 6

T E L : ( 5 1 4 ) 5 2 1 - 4 9 9 3

T A B L E D E S M A T I E R E S

I

PRESENTATION DU COLLOQUE

Comité du colloque

Introduction et objectifs du colloque

Texte d'ouverture

Monologue

TABLE RONDE

Allocution de Madame Lise Gervais

Allocution de Monsieur André Archambault

Allocution de Monsieur David Mudie

Allocution de Monsieur Jean-François René

Allocution du D r . Claude Saint-Laurent

SYMPOSIUM-REFLEXION

Groupe A

Groupe B

Groupe C

- Groupe D

Groupe E

SYNTHESE DES PRINCIPALES RECOMMANDATIONS i

i i

P A G E S

2

3

4

5

7

13

14

20

27

31

38

42

43

50

59

64

71

75

REMERCIEMENTS 77

PRESENTATION DU COLLOQUE

A chaque année, durant la première semaine de

mai, 11 Association Canadienne pour la santé men-

tale propose un temps de sensibilisation à la

santé mentale. Dans le cadre de cet événement,

la Filiale de Montréal de l'ACSM a organisé le

présent colloque en collaboration avec l'Ecole

de service social de l'Université de Montréal.

M- Richard Chartrand

Mme Louise de Bellefeuille

M . Jacques Duval

M . Lucien Landry

M . Robert Lefebvre

M . Justin Lévesque

M . Pierre Maheu

Mme Marjolaine Marcil

Mme Linda Roy

0 « I • L • L •

A.C.S.M./MTL

A.C.S.M./MTL

A.C.S.M./MTL

A.Q.P.A.M.M.

Ecole de service social

Université de Montréal

Département de travail

social, U.Q.A.M.

A.C.S.M./ MTL

C.S.S. Ville-Marie

INTRODUCTION

En 1989, les jeunes adultes de 18-30 ans vivent

une réalité souvent qualifiée de difficile,

réalité qui est marquée par 11 insécurité du

présent et l'incertitude de l'avenir. Cela

affecte à divers degrés leur équilibre

émotionnel.

Quels sont les principaux problèmes que vit

cette génération que certains disent

"hypothéquée" ?

Quels sont les enjeux ?

Quels sont les. espoirs des jeunes ?

Comment s'en sortent-ils et que peut-on faire

pour les aider à relever les défis de l'an

2000 ?

Dans le cadre de son colloque marquant le 10e

anniversaire de sa fondation, la Filiale de

Montréal de l'ACSM donne la parole aux jeunes

et invite les intervenants, les parents et

toutes les autres personnes intéressées, à les

écouter et à chercher avec eux des solutions

adéquates•

OBJECTIFS DP COLLOQUE

. Se sensibiliser à la réalité des jeunes

• Identifier des pistes de solution.

4

TEXTE D'OUVERTURE

M . Justin Lévesque Président du comité organisateur

Mesdames et messieurs,

En tant que président du comité organisateur de cette journée, je

désire, au nom des membres de ce comité, souhaiter à tous la

bienvenue à l'Université de Montréal. Depuis quelques années déjà,

l'Ecole de service social de l'Université de Montréal s'associe à

la Filiale de Montréal de l'Association Canadienne pour la Santé

Mentale pour organiser un temps de sensibilisation et de réflexion

pour les parents, les intervenants et toutes les personnes

intéressées à la santé mentale.

En cette année qui marque le lOième anniversaire de là fondation

de la Filiale, il était approprié de choisir un thème qui nous

propose de regarder vers l'avenir. Pour cette raison, nous avons

choisi à dessein une question ouverte: Est-ce que les jeunes

d'aujourd'hui sont une génération hypothéquée? Que leur réserve

1 'an 2000? C'est une question qui ne veut pas restreindre les

possibilités de réponses et qui s'adresse à tous les aspects de la

vie des jeunes, soit les aspects économiques, sociaux, politiques,

éducationnels, etc..• La question présuppose aussi que les

réponses sont variées et je suis sûr que vous en connaissez déjà

quelques-unes ou que, peut-être, vous en trouverez quelques-unes

aujourd'hui.

L'organisation d'une telle journée demande les efforts et la

collaboration de beaucoup de monde et je voudrais les remercier.

Merci aux membres dù comité du colloque,. Richard Chartrand, Louise

de Bellefeuille, Lucien Landry, Robert Lefebvre, Pierre Maheu et

Linda Roy, qui ont contribué par leurs idées; merci à tous ceux qui

ont accepté de donner de leur temps ce matin pour faire un succès

de cette journée; à 1'animateur du panel, M . Jean Panet-Raymond;

à la monologuiste Johanne Doré; aux membres du panel qui ont bien

5

v o u l u d é v e l o p p e r l e t h è m e c h o i s i ; a u x a n i m a t e u r s e t a u x r a p p o r t e u r s d e s a t e l i e r s d e c e t a p r è s - m i d i ; a u x b é n é v o l e s q u i s e s o n t o c c u p é s d e l ' a c c u e i l e t d e l ' i n s c r i p t i o n ; u n m e r c i s p é c i a l à M a r j o l a i n e M a r c i l e t J a c q u e s D u v a l , l e s d e u x p e r m a n e n t s q u i s e s o n t o c c u p é s a v e c b e a u c o u p d e d i l i g e n c e d e 1 ' o r g a n i s a t i o n m a t é r i e l l e d e c e t t e j o u r n é e . E n f i n , u n g r a n d m e r c i à v o u s t o u s p o u r ê t r e v e n u s a u j o u r d ' h u i . S a n s v o t r e p a r t i c i p a t i o n c e c o l l o q u e n ' a u r a i t p a s e u l i e u . J e s o u h a i t e à t o u s u n e t r è s b o n n e j o u r n é e .

6 I

M O N O L O G U E Johanne Doré

Chant :

Haut les mains

Haut les mains

Haut les mains

Donne-moi ton coeur

Donne-moi, donne-moi ton coeur

Donne-moi, donne-moi

Ostie qu'elle m'écoeure cette annonce là!

Elle me fait penser à un don d'organes

Ben au moins si c'était une vente d'organes!

Chant :

Haut les mains, vends-moi ton rein

Vends-moi, vends-moi ton rein

Vends-moi, vends-moi

O.K. !

Dix mille piastresl

Moi je serais prête à faire pas mal d'affaires

pour dix mille piastres.

Mais pas par année, là!

Cashl

Moi je suis assez écoeurée de ne pas avoir de cash!

Vous n'êtes pas tannés vous-autres?

Ils disent que les temps sont durs, mets-en! Moi je trouve

que les temps y font durs! C'est pire ça!

Le thème c1 est.... euh.... c'est.... euh.••*. "Les jeunes

d'aujourd'hui: une génération hypothéquée ???"

Ben moi, je vais répondre.

Je ne vois pas comment on pourrait être hypothéqué,

on n'a pas d'argent!

Non....

7

Mais vous autres la génération... de quarante ans, du "flower

power" là, vous l'avez fait en masse votre jardin, hein?...

Vous vouliez faire la révolution, puis vous vous êtes faits de

l'argent à la place, c'est de valeur, hein!

Bien moi, je veux faire de l'argent. Bien, peut-être que c'est moi

qui vais finir par faire la révolution... Elle serait pas pire,

hein?

Je ne sais pas si ma mère elle embarquerait là-dedans?

Ma mère a embarqué dans toutes sortes d'affaires...

Elle a même été lesbienne à temps partiel.

Moi je suis née en '67.. Dans un retour à la terre précoce, ....

entre un père communiste, un "mon oncle pusher"... pis une mère qui

s'est auto-accouchée elle-même.

Ça te fait un moyen "start" ça pour un bébé!11

Asteure, ils me trouvent réactionnaire.

Bien, il fallait bien que je réactel Un peu plus,

ils m'enterraient vivante dans le granola, là 1

Pour, m o i , ça aurait été une mort horrible, çal!

Mais là, là, qu'est-ce que je suis supposée faire?

Les trente-quarante ans ils ont tous pogné les jobs

intéressantes....

Ils laissent les jobs à quatre piastres de l'heure pour nous

autres. Ça, ça m'écoeureli

Aïe, moi, je suis assez tannée là d'aller me chercher une job puis

de me faire refuser parce que j'ai pas d'expérience.

Je suis à la veille de leur dire... hé.... pas d'expérience.... ça

dépend dans quoi, Bonhomme!

Aïe je suis tannée hein

Je ne suis pas solidaire sur mon gros nerf.

i Là mon chum'là-dessus, il vient de sortir de Louis-Hippolyte.

Bien, la première affaire qu'il m'a dit en sortant là, c'est que

Louis était bien correct mais qu ' il a eu de la misère avec

Hippolyte. Aïe, je ne suis pas sûre qu'il est revenu, moil

8

Mathieu, il était sur le B.S. mais il était sur les pilules....

C'est comme l'alcool au volant, ça ne se mélange pas ça. Ça fait

qu'il a capoté.

Mais il était drôle pareil. Il n'arrêtait pas de me dire qu'il

avait gagné à la 6/49. La seule affaire qui ne marchait pas dans

son histoire là, c'est qu'il n'a jamais pris de "billet".

Ouais••.•.

Ils l'ont diagnostiqué là, maniaco quelque chose!

C'était pas un maniaque; il avait bien de l'allure. Lui au moins,

il n'écoeurait pas le monde!

Ça c'est rare de nos jours 11!

Aïe, la semaine passée là, j'ai été me chercher une job.... J'en

ai trouvé une dans un traiteur à trois piastres dé l'heure, en

dessous de la table.

Puis là, le boss, il poussait: " Envoyé là, plus vite!

Envoyé, plus vite, plus vite, plus vite!

Je me suis tannée. J'ai dit: " Ave César!

Ta salade là, f....-toi la donc dans le c...«!"

Non mais tu sais, il y a des limites à se faire exploiter hein !!

Aïel moi je trouve que ce n'est surtout pas parce que tu es jeune,

que tu devrais être esclave.

" La Liberté 55 ", moi ça ne me dit rien pantoute ça! Pas parce

que je veux prendre ma retraite tout de suite !•.• Parce que si

ça continue de même, moi, j'en aurai même pas de retraite!

Va falloir que je payes pour les vieux en plus.

Aïe, NO WAY MAN!

Des fois là, je me choquerais. Dans ce temps-là, je me dis:

" Nathalie, calme ton sexe".

Ça ma mère, elle haït ça quand je dis ça parce qu'elle est bien

féministes ...

Non mais, c'est vrai! C'est choquant!

Où est-ce qu'elle est notre place nous autres?

9

Moi je ne connais pas grand monde qui aimerait ça, à vingt-cinq ans

rester chez sa mère.

"Vous habitez chez vos parents? " Mais oui! Sacrament! J'ai pas

d'argent i

C'est "dull"...

Mais là, je vais changer de sujet là parce que bientôt vous allez

me "pitcher" des vingt-cinq cennes.

Aïe, saviez-vous ça que les BPC concentrés en grosse quantité, ça

peut transformer une vache laitière en radiateur de char?

Je me demande quel miracle ça pourrait faire sur nous autres ça!

Aïe, pensez-vous, vous autres, que si on "pluggait" des électrodes

là sur un petit bébé éprouvette on pourrait en faire un jeune

branché plus tard?

Ahl celle-là, je l'aime!

Quelle différence y a-t-il entre Fernand Gignac puis un groupe

Heavy Metal?...

Vous ne savez pas?

Vous êtes mieux de ne pas aller vous acheter de disque!-

Ah! Ahl Ah! Ahl Excusez-moil

Je dis toutes sortes d'affaires là... c'est parce que.... ça

m'énerve de venir parler de la santé mentale...

Santé mentale...

Des fois là, j'ai peur de devenir folle si je ne trouve pas ma

place..

Peut-être que je pourrais m'ouvrir un centre, appeler ça H Place

aux folles " puis aller me chercher une subvention...

Aïe, je ne suis pas une "looser" là, moi là, OKI LA!!

Mais je ne pense pas qu'ils financeraient çâ...

Ils ne financent même pas les maisons de jeunes.

Les maisons de jeunes, j'aimais ça.... le temps qu'ils avaient de

1 ' argent et que c ' était ouvert.... il y a quelques mois, là tu

sais. C'était correct.

Mais asteure, ce n'est plus de même.. Ça fait dur.

10

I l paraît qu'il-ne faut pas que je me décourage parce qu'il paraît

que les jeunes là, l'avenir est devant nous.

Ça veux-tu dire que ça va être vous autres mon avenir?

C'est pas que je ne vous fait pas confiance là...

Aïe, je ne sais.pas ce que ça va avoir l'air en l'an 2000? Je ne

sais pas...

Moi je vais être vieille, je vais avoir 33 ans là...

Si je suis pas suicidée ou si j'ai pas "pogné" le sida...

Je ne sais pas ce que ça va avoir l'air, hein?

Je ne sais pas si je vais être assise dans l'auditorium en train

d'écouter un témoignage d'une jeune là?

Je ne pense pas, par exemple, parce que dans ce temps-là, tout va

se faire par FAX, par photocopieuse Canon.... Ça fait que....

Je ne sais pas, hein.... Je ne sais pas ce que je vais faire...^

D'ici ce temps-là, moi, je vais avoir le temps de me recycler huit

fois et d'avoir fait quarante programmes du gouvernement.... hein?

Puis vous autres? Le savez-voua_où vous allez être dans onze ans?

Probablement, hein?

Parce qu'il y a deux ressources principales quand on veut "sticker"

quelque part dans la vie:.

La permanence pis la gomme ballounel

Puis j ' espère pour vous autres que vous avez pris la bonne

opt ion i...

Moi, je manque de ressourcel Moi, c'est tout ce que j'ai pour

coller ma vie à la réalité...

Ça pas d'allure....

Aïe, on vit dans un monde tellement compétitif là, que souvent mon

fun est en compétition avec mes peurs.... puis mes espoirs sont en

compétition avec le reste de la planète que je vois I Ça pas

d'allure!

Aïe là, là, s'il vous plaît là, Tassez-vousl

1 1

Faites-moi une place, O.K.? Parce que sinon là, moi mon avenir est

bloqué partout.

Si ça continue de même là..J

mais ça se pourrait bien. . • • (musique.) . . .ça se pourrait. . .. que ça

soit (musique)....

BIEN HEAVY PLUS TARD OK LAi......

.....(musique)

Johanne Doré Monologuiste Intervention humoristique sur mesure Tél: 259-0423

À

v

12 I

TABLE-RONDE

Animateur

H.Jean Panet-Raymond

Ecole de service social. Université de Montréal

Participants:

Mme Lise Gervais, secrétaire exécutive, Bureau de Consultation

Jeunesse (B.C.J.), nous parle de six éléments faisant obstacle à

la qualité de vie des jeunes.

M . André Archambault, vice-président, Regroupement des Maisons

d'Hébergement Jeunesse du Québec, nous trace un portrait de jeunes

qu'il côtoie et avance.quelques pistes intéressantes de solutions

à explorer.

M . David Mudie, coordonnateur de la ressource alternative Relax-

Action, nous fait part de ses réflexions sur la jeunesse d'aujour-

d'hui.

M . Jean-François René, chargé de cours en travail social (UQAM-U.de

Mtl), sociologue chercheur sur la thématique Jeunesse, s'arrête à

l'aspect "vie hypothéquée" des jeunes, nous invite à y réfléchir

et à lever cette étiquette.

Dr Claude Saint-Laurent, psychiatre et psychanalyste, auteur avec

Denise Bombardier du 1ivre "Le Mal de 1'âme", nous 1ivre ses

réflexions sur le rapport entre la tristesse et la violence chez

lé jeune.

13

Allocution présentée par Mme Lise Gervais Secrétaire Exécutive Bureau de Consultation Jeunesse

La santé mentale et les jeunes

Lorsque l'on m'a demandé de participer à ce panel sur la santé

mentale et les jeunes, mon premier réflexe a été de dire que nous,

au BCJ, on ne travaillait pas sur la santé mentale.

Mais à bien y penser, on ne fait que ça, travailler sur la santé

mentale• On travaille sur la santé mentale parce que 1 'on ne

travaille pas sur la santé mentale. Je m'explique.

Au BCJ, on ne travaille pas sur la santé mentale au sens où on

l'entend habituellement, soit sur la maladie mentale. La première

idée qui nous vient en tête lorsque l'on dit santé mentale c'est

l'opposé: la maladie mentale. Au BCJ on travaille la santé

mentale, bien sûr, mais on travaille surtout avec les jeunes, avec

tout ce que ça veut dire "les jeunes"«

Cela étant dit, actuellement on est confronté avec de nouvelles

réalités que vivent les jeunes que l'on côtoie. La santé mentale

est de moins en moins en santé et la maladie mentale est de plus

en plus présente chez les jeunes que l'on rejoint.

Avant d'entrer dans le thème qui nous occupe aujourd'hui, je

précise que nous ne sommes pas des experts de la maladie mentale,

pas psychiatres, ni psychologues. Nous sommes des gens qui

travaillons quotidiennement avec des jeunes, plus ou moins en santé

mentale. Dans notre action, nous rejoignons des jeunes dits

marginaux. Force nous est de constater que les marginaux sont de

plus en plus nombreux, donc de moins en moins marginaux. Nous y

reviendrons. Nous avons ainsi la prétention d'assez bien connaître

ces jeunes et à ce titre, on pourrait nous qualifier, à défaut de

spécialistes en santé mentale, de spécialistes des jeunes, donc

d'un certain point de vue de la santé mentale des jeunes.

14

Cela étant dit, notre proximité des jeunes et de leur réalité nous

fait poser quelques hypothèses quant aux enjeux et à ce qui leur

manque ou ce qu'ils ont en trop pour vivre en réelle santé mentale.

C'est une présentation quelque peu impressionniste, mais nous

croyons que ces six éléments sont des obstacles déterminants dans

la qualité de vie des jeunes.

Un petit avertissement de départ:' ce n'est pas parce que je ne

parlerai pas des conditions de vie, dé l'écart de plus en plus

grand entre les riches et les pauvres, de la toxicomanie, de la

prostitution que nous nions ces réalités; notre pratique quotidien-

ne prouve le contraire.

1. L'absence ou la perte des rites de passage : Depuis déjà

quelques années, nous remarquons que lès rites de passage de

l'adolescence à l'âge adulte qui existaient traditionnellement

se sont effrités. C'est de plus en plus difficile de devenir

adulte; tout ce qui était signe de ce passage d'un état à un

autre est actuellement précaire ou impossible à atteindre.

Il y a quelques années, un jeune devenait travailleur, il

avait une certaine autonomie financière qui le faisait passer

de jeune à adulte. Maintenant, plus de vrai travail, plus

d'autonomie financière.

A défaut de travail et surtout avec le travail, il se mariait.

La remise en question de valeurs traditionnelles a enlevé de

la liste le rituel q u1é t a i t le mariage; maintenant on ne se

marie plus ou si on se marie, c'est plus tard, donc le passage

de l'adolescence à l'âge adulte est d'autant reculé.

Le premier appartement avec tout ce que ça comprend d'espoir

est aussi de plus en plus inaccessible et s'il 1'est, c'est

la co-habitation à plusieurs qui écarte la réalité des rêves

investis dans ce projet.

L'âge: auparavant avoir 18 ans c'était une fête, on soulignait

l'événement, tout le décorum assumait une fonction initiatique

15

gui marquait le passage d'un état à un autre. Là aussi, il

n'en reste plus grand chose.

Il ne reste plus, comme rites de passage, que la première

auto r qui elle, n1 est pas accessible à tous, vous en con-

viendrez .

Ces facteurs induisent une nouvelle réalité: on ne finit plus

d'être jeune. En '85, l'année internationale de la jeunesse,

on parlait de 25 ou 30 ans, et ce, dépendamment du niveau de

gouvernement. En .'89, pour l'aide sociale, on parle de 30,

pour d'autres programmes de 35. Tout ça ne permet pas aux

jeunes de se situer; maintenant on reste jeune "éternelle-

ment" .

L'anomie socialè: l'absence de valeurs dominantes. La période

que l'on vit actuellement est marquée par cette absence. On

a rejeté les valeurs traditionnelles, particulièrement la

morale religieuse, mais ce rejet n'a pas été suivi par un

consensus social autour d'une nouvelle morale dominante. Tout

est possible et tout est à peu près accepté et acceptable.

Les conséquences pour les jeunes sont importantes.

Cette absence, de balises les empêche de se situer . Pour ou

contre, au moins la morale religieuse avait l'avantage d'être

une balise stable qui nous permettait de nous définir; main-

tenant les balises sont tellement floues qu'il est difficile

de s'en servir pour se situer dans la vie. Et pire, on sent

se développer une nouvelle morale qui me semble plus in-

quiétante que l'ancienne: la "morale économique". C'est à

dire que maintenant ce qui est économiquement rentable est

moralement bon. Les jeunes sont rarement économiquement

rentables, ou du moins ils ne se perçoivent pas comme tel •

Il est significatif que les jeunes qui "agressent" n'attaquent

pas les symboles de réussite, mais plutôt l'inverse.

16

Je rie prône pas un retour aux valeurs traditionnelles, mais

plus 1' émergence de valeurs qui permettent aux jeunes de se

développer avec un minimum de respect des individus, ce qui

me semble absent dans la morale dite économique*

3. Le BCJ a toujours travaillé avec des jeunes dits marginaux;

la réalité à la fin des années 80. est toujours.la même sauf

que les "marginaux" sont de plus en plus nombreux. On a fini

par se dire que les "marginaux" sont la majorité et que s'ils

s'en rendaient compte, ils arrêteraient d'intérioriser cette

dite marginalité et ils auraient peut-être moins tendance à

se renfermer sur eux-mêmes.

Qu'on ne pense qu'à la pauvreté, l'homosexualité, la consomma-

tion de drogue, la violence, la précarité de l'habitat, les

tentatives de suicides,, bref si on additionne toutes les

marginalités, nous sommes convaincus d'y compter la majorité

des jeunes.

La plus grande faiblesse et le plus gros handicap que ces

jeunes ont, c'est de se croire et de vivre comme marginaux,

encore plus dans une période où l'on met la barre très haute.

Et on en arrive au quatrième facteur: l'excellence.

4 . L'excellence : les jeunes vivent de plus en plus la pression

de l'excellence. Maintenant on ne peut plus être ordinaire,

on ne peut plus n'être que bon, il faut être excellent. On

reçoit des appels téléphoniques de parents inquiets parce que

leur adolescent n ' a que 75 % dans tel le ou telle matière

académique. Nous avons le sentiment que cette pression va

aller en augmentant, détériorant du même fait leur qualité de

vie.

Dans un tel contexte le moindre, petit échec prend des

proportions de catastrophe. Dans cette valorisation de

l'excellence qu'est-ce que l'on fait de la majorité des

jeunes, gui eux, ne sont gue des jeunes ordinaires? On pousse

les jeunes à prendre n'importe quels moyens pour atteindre

cette dite excellence, la fin justifie n'importe guels moyens.

L'utilisation des stéroldes est une belle manifestation de ce

phénomène•

5 . L'absence d'espace social : on refuse aux jeunes le droit

d'avoir des lieux à eux, d'être considérés pour ce gu'ils

sont. Actuellement on les prend pour dès gens en devenir qui

n'ont de poids que pour leur futur. Sauf quand il s'agit de

les faire consommer, là ils sont considérés. C'est difficile

de s'y retrouver lorsque 1 ' on reçoit continuellement des

messages contradictoires.

Les jeunes n'ont pas de statut social, ils n'existent que pour

consommer, ce que peu d'entre eux sont capables de faire de

façon satisfaisante compte tenu de la pression qui s'exerce

sur eux dans ce domaine.

6 . Absence d'adulte significatif: la réorganisation sociale nous

obligé à constater que cette absence est de plus en plus

déterminante pour les jeunes. . La famille éclatée, la

diminution de la présence de la famille élargie, l'organisa-

tion scolaire qui empêche la création de liens significatifs

avec les professeurs bref beaucoup de facteurs entrent en

ligne de compte.

Nous ne favorisons pas un retour en arrière en empêchant les

divorces par exemple. Non. Nous pensons plutôt qu'il est

important, comme société, d'assumer nos choix. Qu'avons-nous

fait pour pa 11 ier ou remplacer ce qui a été perdu par ces

changëmënts sociaux? Pas grand chose'. Une grande partie de

ces liens doivent se faire hors de la famille, donc la famille

n'est pas la seule responsable de cette absence.

18

Mais où sont les espaces et les> personnes pouvant jouer ce

rôle auprès des jeunes* Nous avons la certitude que l'absence

de lien est une des clés pour comprendre l'a détérioration de

la "santé mentale" des jeunes• C'est pourquoi une grande

partie de notre travail consiste à être ces personnes

significatives.

Les jeunes sont victimes d'une réorganisation sociale, morale

et économique du monde dans lequel nous vivons. Ce qui est

grave- et inquiétant, c'est que les jeunes qui sont punis par

cette conjoncture qu'ils ne contrôlent pas, essaient de se

trouver une faute. Pourquoi- moi? Si c'est moi qui écope,

j'ai sûrement fait quelque chose de pas correct... Et quand

ça fonctionne bien, la victime devient le coupable.

Allocution présentée par H . André Archambault

Vice-président

Regroupement des Maisons d'Hébergement Jeunesse du Québec

La situation des jeunes d'aujourd'hui et quelques pistes de

solutions

A l'Auberge où nous recevons des jeunes sans-abri de 18 à 30 ans,

hommes et femmes, nous nous' questionnons continuellement sur ce

qu'on pourrait leur offrir afin qu'ils soient le mieux équipés pour

1'avenir. Mais de façon plus pragmatique, nous sommes moins

préoccupés par leur situation en l'an 2000 que par celle de cette

année 1989.

A v e c e u x , n o u s c h e r c h o n s d e s s o l u t i o n s à l ' e n s e m b l e d e l e u r s p r o b l è m e s . M a i s e n a b o r d a n t l a q u e s t i o n d é l ' i t i n é r a n c e d e s j e u n e s s u r u n e b a s e i n d i v i d u e l l e p e u t - ê t r e r e g a r d o n s - n o u s d a n s l a m a u v a i s e d i r e c t i o n .

ON TROP DANS NOTRE MEMOIRE COLLECTIVE

T o u t d ' a b o r d , i l f a u t c o n s t a t e r q u ' o n a t e n d a n c e à p a r l e r d e s j e u n e s c o m m e s ' i l s ' a g i s s a i t d e m u t a n t s d ' u n e a u t r e e s p è c e , c o m m e s ' i l s é t a i e n t s i d i f f é r e n t s d e n o u s , c o m m e s i n o u s n ' a v i o n s j a m a i s é t é j e u n e s n o u s - m ê m e s •

»

B i e n s û r > l a s i t u a t i o n d e s j e u n e s a c h a n g é , e t p a s n é c e s s a i r e m e n t p o u r l e m i e u x . B i e n s û r , l e u r s b e s o i n s i n d i v i d u e l s s ' e x p r i m e n t d e f a ç o n m o i n s m o n o l i t h i q u e q u ' a v a n t .

M a i s l e s b e s o i n s f o n d a m e n t a u x o n t - i l s c h a n g é à c e p o i n t c h e z l e s j e u n e s q u i s é j o u r n e n t à l ' A u b e r g e ? J e r e c o n n a i s l e s m ê m e s b e s o i n s q u e n o u s a v o n s t o u s : l e b e s o i n q u ' o n r e s p e c t e n o t r e i n t é g r i t é p h y s i q u e e t l e s m o y e n s p o u r l a m a i n t e n i r ; l e b e s o i n d e r a p p o r t s a f f e c t i f s s i g n i f i a n t s a v e c l e s a u t r e s .

20

Ils ont également les, mêmes peurs. La pauvreté, 11 isolement

(exclusion, solitude), l'angoisse de l'avenir font partie des

réalités avec lesquelles chacun doit composer, plus ou moins bien

selon qu'on soit "équipé" ou pas, avantagé ou pas, "plogué" bu pas,

confiant en soi-même ou pas.

Dans le fond, c ' est peut être par manque de mémoire qu1 on se

demande si souvent ce que veulent les jeunes, ce dont ils ont

besoin.

L'ELASTICITE DE LA JEPNESSE

Et encore faudrait-il savoir de quels jeunes on parle? Selon qu'on

est un employé au B.S., au CSS, au MSSS ou dans l'un ou l'autre des

organismes qui s'adressent à eux, on retrouvera des catégories

d'âges fort différentes. .

Ça semble, en effet, aberrant de parler des jeunes quand on parle

d'individus de 18 à 30 ans. C'est généralement l'âge où l'on

commence à être considéré comme adulte. Mais avec les crises

économiques successives de 1'après-révolution tranquille et depuis

les luttes pour la parité à l'aide sociale, on a dû reconnaître un

problème de fond dans l'intégration des jeunes dans la communauté

adulte.

Etre adulte c'est être capable d'assurer son existence par ses

propres, moyens. Rien d'étonnant alors que le concept "jeune" soit

devenu si élastique.

Alors qu'autrefois on devenait adulte à 12 ans et qu'il n'y a pas

si longtemps il y avait une place pour nous dès l'âge de 18 ou 21

ans, on en est encore à se demander si certains individus de 28 ou

29 ans peuvent prétendre à ce titre.

Les mécanismes de passage vers ce statut convoité d'adulte autonome

capable d'assumer son existence par lui-même, ne fonctionnent plus.

21

pour une proportion inquiétante de jeunes.

L'isolement social vient avec l'éclatement des réseaux, la rupture

entre les réseaux et la désuétude des rites de passage.

Ça semble incroyable d'associer un jeune de 14 ans qui quitte son

foyer ( naturel ou nourricier ) et un adulte de 27 ans. C1 est

pourtant le cas quand ils se retrouvent tous les deux isolés, sans

ressource, sans réseau... dans la rue.

LES SANS-ABRI: ONE EPIDEMIE OO ON PROBLEME SOCIAL

Et notre déformation professionnelle nous amène à ne plus les voir

autrement que comme des problèmes. Ce n'est pas très bon pour

^l'estime de soi. Surtout quand on sait que ces jeunes ont une

'estime d'eux-mêmes qui frise le zéro absolu.

On a tendance à associer le problème d'errance des jeun.es (terme

que j'emprunte à certains travailleurs en ressources alternatives

en santé mentale et que je trouve plus représentatif que celui

d'itinérance) à des questions de santé mentale et de toxicomanie,

à un quelconque "défaut de fabrication".

Il est vrai que nombre d'entre eux (mais pas tous) ont un passé

familial lourd. Ils ont souvent eu recours à diverses drogues

(prescrites ou pas)• Ils nous racontent des histoires d'horreur

où sont souvent présents le désespoir, la dépression, les tenta-

tives de suicide.

On est porté à croire que le problème c'est eux et c'est eux qu'on

essaie de traiter. Mais celà ne suffit pas et il n'est pas certain

qu'on arrive à des solutions durables en doublant les, ressources

en psychiatrie ou en toxicomanie.

Sans nier les difficultés personnelles de ces jeunes, il faut

reconnaître que le problème, ce n'est pas eux, mais c'est bien leur

22

situation sociale. Sinon on en sera réduit à admettre une

conception épidémique de la dépression et de la toxicomanie où

chaque nouveau cas est atteint par un "virus" quelconque sans lien

avec les conditions. socio-économiques qui prévalent pour les

jeunes.

Et de façon très pratique, le problème pour eux c 'est de savoir

quoi faire après la cure,. après le séjour à 11 hôpital, en prison

ou au centre d1 accueil. Une fois le symptôme temporairement

traité, comment faire pour régler le problème et.•• sortir de la

rue?

Malheureusement nous devons admettre que pour nombre d'entre eux,

la rue et ses réseaux sont le seul et même, le dernier recours.

-Ce sont ces réseaux de la rue qui vont les accueillir, leur offrir

le moyen de gagner de l'argent, d'être avec d'autres personnes et,

pourquoi pas, de trouver l'affection qu'ils cherchent.

Ainsi donc, pour nous, le problème des jeunes sans-abri ce n'est

ni la toxicomanie, ni la prostitution, ni le suicide. C'est tout

ça sur fond de pauvreté, de déracinement et d'angoisse de vivre

avec un passé trop lourd, un présent incertain et un avenir

inexistant.

DP TEMPS, DES RACINES ET.« « DES RAPPORTS SIGNIFICATIFS

Ce dont ils ont besoin avant tout c'est d'un lieu où s'enraciner,

un lieu autre que la rue ou 1 ' institution, un lieu physique ou

social auquel appartenir... Un lieu où ils ont le temps de se

réorganiser.

Ce dont ils ont également besoin, c'est d'avoir un statut autre que

celui de personne à risque, de citoyen de deuxième zone, de malade

à traiter ou encore, un statut d'"ex" quelque chose. Ils veulent

un statut d'adulte à part entière, un statut de partenaire.

23

Ce dont ils ont besoin ce sont des rapports significatifs avec du

vrai monde. Ils n'ont, plus de liens avec leur famille ou avec

I eur s amis auxquels ils doivent souvent de l'argent ou des

services. Les professionnels traitant ne représentent pas, non

plus, une alternative abordable. (On ne demande pas à son

garagiste d'être notre ami mais bien de régler nos ennuis.) Il

faut donc développer des rapports d'une autre nature.

QUELQUES PISTES

II existe des pistes de solutions qui sont importantes et trop

souvent négligées.

Face au déracinement social des jeunes il faut créer des lieux

d'appartenance où il est possible d'établir de nouveaux rapports

sur une base plus continue, plus égalitaire, des rapports basés sur

l'entraide, la solidarité et le respect.

Il faut permettre l'émergence de structures . petites, souples,

accessibles, ouvertes et sûres où ils pourront aller quand ça ne

va pas, où ils se sentiront un peu comme chez eux.

Il faut que dans ces lieux, dés rapports signifiants puissent

s'établir, avec les pairs, avant tout, mais aussi avec des

intervenants qui ne sont pas que des agents de contrôle et de

traitement.

Il est bien évident qu'aucun intervenant ne peut prendre sur lui

de remplacer tous les rapports significatifs manqués (père, mère,

amis, etc). C'est donc d'autant plus important que des lieux

d1 appartenance permettent de vivre ces 1 iens sans dépendance où

fardeau insupportable pour les intervenants.

24

PAUVRETE, TRAVAIL ET SOLIDARITE

Il faut également que les jeunes ne soient plus condamnés d'avance

à la pauvreté, qu'ils ne soient plus confinés dans des emplois

précaires sans aucune perspective de développement, d'avancement

et d'avenir. Il faut émpêcher qu'ils soient réduits à des rôles

de travailleurs de deuxième zone, par manque de formation et

d'information, par habitude à né-pas être responsables ou à cause

de cette mentalité de perdant qu'ils ont développée au fur et à

mesure des échecs accumulés.

Il faut parler de la création d'emploi. Il faut parler de recréer

des "rites de passage" efficaces. Mais il faut, à titre de

professionnels s'interroger sur notre solidarité... et sur nos

plans de carrières. A titre d'adultes installés quelle place veut-

on leur faire?

ON DISCOURS REDUCTEUR

Il y a , bien sûr, nombre de jeunes pour qui ça ne va pas si m a l .

Mais au contraire de ce qu'on tend à laisser voir, les jeunes en

difficulté sont de plus en plus nombreux. Ne regarder que les

quelques centaines d'itinérants chroniques de nos villes, c'est

refuser de regarder au-delà pour voir les milliers de jeunes

chômeurs, assistés sociaux et "non identifiés" qui vivent dans la

pauvreté à 14 ans ou à 30 ans, en Gaspésie ou à Montréal.

CONSIDERATIONS FUTURES: SERA-T-IL TROP TARD?

Dans les considérations futures énoncées dans la politique de santé

mentale ( les suites à donner), on pouvait lire qu'il serait

intéressant d'étudier les rapports qui existent entre la santé

mentale et les conditions socio-économiques des gens.

25

Peut-être qu'on regardait dans la mauvaise direction. Peut-être

que c'est par là qu'on aurait dû commencer.

Mais c'est rarement par là qu'on commence. Pourquoi? Peut-être

parce qu'on a pas vraiment de solutions à proposer.

Quand on parle de ces ^jeunes, il ne faudrait pas seulement se

demander ce que leur réserve 1 ' an 2000 mais également ce qu' ils

nous réservent à nous, fauté d'avoir été présents auprès d'eux au

cours des années 80.

780 I

Allocution présentée par David Mudie

Coordonnateur

Relax-Action (ressource alternative)

Les jeunes d'aujourd'hui: une génération hypothéquée

Quand j'ai commencé à réfléchir sur le thème de ce colloque: "Les

jeunes d'aujourd'hui: une génération hypothéquée", je me suis dit,

nous hypothéqués!! ! Moi Humrom!!i

Enfin, si on réfléchit deux secondes, c'est assez juste, nous

sommes hypothéqués• Quand je pense à la condition des jeunes je

me rappel le le temps où j ' étais très jeune, cinq ou six ans

environ. Mes parents se disputaient et je les écoutais, je les

observais. Tout à coup, ils ont réalisé que mon attention était

captée par eux. Ils ont dit "une chance que c'est un enfant, il

ne peut pas comprendre"• Mais moi j'avais compris, je rigolais

parce que je savais tout ce qui se passait.

A cette époque j'étais trop jeune, maintenant je suis jeune tout

court. Nous sommes à une époque de jeunesse élargie. Pour le

bien-être social, nous sommes jeunes jusqu'à 30 ans. Quelquefois

on parle de jeunes de 18-25 ans, 18-35 ans. Paradoxalement, l'âge

adulte au niveau des droits civils est passé de 21 ans à 18 ans.

Un jeune de 16 ans est assez vieux pour conduire une automobile.

Une jeune fille de 14 ans peut consentir elle-même à un avortement.

Ces contradictions sur le concept de jeunesse n'ont rien pour

m'aider à aborder ce thème.

T)ans ce bref exposé, je parlerai donc de jeune pour parler de ceux

que notre société laisse en attente d'un rôle social en raison de

leur âge.

C'est le premier sens que je donne au mot hypothéqué, une hypothè-

que de 35 ans sur l'avenir!!!

27

Au cours des prochaines minutes, je vais vous parler du passé, de

la réalité des jeunes qui ne sont plus jeunes, ensuite je vous

parlerai de.la réalité actuelle des jeunes et nous finirons sur les

perspectives d'avenir.

Je ne suis pas historien mais j'ai le goût de remonter aux années

60 pour voir si la jeunesse a changé depuis...

Mai 1968: qui n'a pas entendu parler de mai '68 ?... Des jeunes

qui osent affronter un système conformiste, traditionnel. Cette

masse de jeunes, politisés, solidaires. Des jeunes écoutant de la

musique flyée et qui se mettent des fleurs dans les cheveux. Ces

jeunes étaient contre le Vietnam, contre l'université, contre le

travail, contre la culture*..

Ils ont failli changer le monde nos "baby boomers". Aujourd'hui,

je les retrouve derrière des bureaux et ils me disent "désolé mon i

jeune, j'ai pas de job pour toi, je te plains, c'est dur d'être

jeune de nos jours".

Nos "baby boomers", des gens capables de dire non à une économie

en pleine croissance, Wow, quel courage! Des jeunes qui ont dit

oui au système juste à temps, juste quand l'économie ralentissait.

Puis arrive la crise, la récession. C'est l'effritement des

solidarités, la crainte en l'avenir, la désillusion tranquille.

La récréation est finie, il faut rentrer dans le rang, l'économie

va m a l . Il faut couper dans les dépenses si on ne veut pas être

endetté. C'est le deuxième sens que je donne au mot hypothéqué.

Les jeunes devront payer la dette des générations précédentes. Une

dette économique, une dette environnementale, une dette sociale.

Une société hypothéquée!

Oui les jeunes sont hypothéqués ! En 1989, les jeunes sont aux

prises avec des problèmes sérieux, peut-être si difficiles à vivre

qu'ils n'ont plus le temps de se construire une solidarité comme

dans les années 60.

28

On pourrait dire qu'avant les jeunes.vivaient selon leurs moyens,

maintenant ils vivent selon leurs besoins avec des petits moyens..

Maintenant, c1 est la politiquë du chacun pour soi. Le marché de

l'emploi est compétitif. Maintenant, il faut avoir scolarité plus

expérience plus polyvalence plus, plus, plus• Le marché de

l'emploi est instable, on passe de sur appel à contractuel, à temps

partiel temporaire à temps complet temporaire-, puis on recommence,

article 38, PDB, bon d'emploi, BES, travaux communautaires, etc.*. »

A travers ce labyrinthe, le jeune ne doit jamais oublier son

objectif initial, sa place dans la société telle qu'il l'avait

imaginée il y a dix ans. Sinon, il retourne aux études à trente

ans pour devenir spécialiste en spécialités.

Hypothéqué? Quand je pense à tout ce potentiel, toute cette

énergie mise en attente, (en banque) je me dis une génération

économe, débrouillarde, experte en moyens de survie. Cependant,

quant il est question de survie, c'est la politique du "chacun pour

soi", qui prime. Et le "chacun pour soi" c'est le^ contraire de la

solidarité.

Les jeunes d'aujourd'hui sont seuls face à l'avenir; il serait faux

de dire que les jeunes forment un tout cohérent, uniforme. Bien

sûr, l'isolement et les peurs face à l'avenir sont des caractéris-

tiques communes aux jeunes. La désillusion face à la société qui

les met à l'écart est certainement ce qu'il y a de plus dramatique.

Le Québec a un taux de suicide, chez les jeunes, parmi les plus

élevés au monde (25 % plus élevé qu'au Canada).

Une société si intolérante peut contribuer à amener les jeunes à vivre des problèmes de santé mentale.

A la ressource où je travaille, nous offrons des services de. suivi

en milieu naturel, d'accompagnement et de réinsertion sociale à des

jeunes qui sont défavorisés, exclus, peu outillés pour faire face

à notre société actuelle.

29

A Relax Action, nous sommes convaincus que 11 intervention doit

miser sur le potentiel des jeunes et non sur leurs faiblesses.

Nous voulons contribuer à changer les valeurs et les pratiques qui

créent des barrières à l'intégration sociale. Idéalisme d'une

jeune ressource diréz-vous? Peut-être que cet idéalisme est

finalement ce qu'il y a de commun entre les jeunes de toutes les

époques. Mais je crois qu'un idéal qui vise l'amélioration de nos

conditions de vie et la contribution commune de toutes les

générations, constitue le meilleur espoir qu'il faille entretenir

pour l'an 2000.

En terminant, j'aimerais vous transmettre les résultats d'un petit

sondage "maison" que j'ai réalisé pour ce colloque. J'ai demandé

à des jeunes ce qui leur venait à l'esprit quand je,leur prononçais

des mots clefs. Voici quelques résultats:

L'école —-—-— Pas une autre session i ! I

Le travail Hein, y'est 3 heures du matin?

Merci de m'avoir donné l'occasion de venir vous faire part de mes

réflexions sur la jeunesse d'aujourd'hui.

Quoi faire dans la vie

SIDA

Le Québec —

Les sports -

Les guerres

La Reine

Le Pape

L'avortement

La politique

Le cinéma

L'argent

Le B.E.S

Je commence à 7 heures...

Libre!

Les guerres à la télé.

Les sports à la télé.

Waach ! ! !

Qui?

Quand est-ce que c'est vraiment

un humain?

Mulroney Ahi Ah! Ah!

Rambo va-t-en !

Combien tu l'as payé ?

As-tu eu ton chèque ?

Qu'est-ce que je vais faire ?

Nous autres aujourd'hui" on se

protège (condom).

30

<

Allocution présentée par M. Jean-François René Chargé de cours en travail social (UQAM-O. de Mtl) Sociologue chercheur sur la thématique Jeunesse

Jeunesse: Au-delà de l'hypothèque

Le choix des mots n'est jamais l'effet du hasard. En 1985, durant

l'Année internationale de la jeunesse, nous parlions alors des

jeunes en utilisant le vocable de "génération sacrifiée". Or voilà

que 4 ans plus tard, nous en sommes rendus à la "génération

hypothéquée". Serait-ce un gain? Chose certaine, le glissement

sémantique qui se produit ici est fort intéressant.

Car voilà que le rituel sacrificiel fait maintenant place à

l'univers froid, rationnel et productiviste du marché des taux

d'intérêts. Le sacrifice renvoie au don, à l'offrande, à l'abandon

de quelques-uns, qui ne s'appartiennent pas, pour sauver les

autres. Il crée des victimes, et dans une société aux antécédents

judéo-chrétiens, une culpabilité inévitable. L'hypothèque, elle,

nous entraîne vers les calculs. Tels pourcentages vivent sur

l'aide-sociale, le chômage, se retrouvent itinérants, toxicomanes,

suicidaires. Combien peut-on en réinsérer, soigner, sauver même? »

En fait, ils semblent que ce soit la principale question, sinon la

seule que nos gouvernements se posent encore lorsqu'ils osent se

pencher sur cette génération. Combien? Le sacrifice appelait à

la globalité. L'hypothèque, elle, chiffre, précise, compartimente,

à l'image de cette fâcheuse et familière utilisation de l'expres-

sion 18-30 ans, qui m'apparaît bien plus une construction tech-

nocratique qu'un reflet réel de la réalité. La question d'aujour-

d'hui me semble donc relativement piégée, doublement même, par une

logique de marché, par cette recherche continuelle de "saine

gestion" étatique, à 1'image de 1'ère néo-libérale qui fait

présentement école.

31

Je veux donc bien jouer le jeu hypothécaire, mais je refuse de m"y

laisser enfermer, au même titre que j'ai déjà refusé, avec

d'autres, de me laisser enfermer dans le jeu sacrificiel de l'année

de la jeunesse (Deniger, Gamache, René, 1986), Cette mise en garde

faite, tant qu'à jouer le jeu, jouons-le donc pleinement.

Ainsi, afin d'alimenter un peu notre réflexion et la réponse qu'il

nous serait possible de donner à la question posée dans le cadre

de ce colloque, j'aurais le goût de m'arrêter d'abord sur le mot

hypothèque en lui-même. Peut-être cela nous permettra-t-il de bien

saisir en quoi il est possible de parler d'une vie hypothéquée.

Je voudrais faire ressortir deux points.

Primo, et je ne vous apprends rien, le mot hypothèque renvoie

d'abord directement au monde de l'immobilier. "Contracter une

hypothèque",,voilà qui fait généralement référence au paiement qui

se rattache à l'acquisition d'une maison. Ce qu'il ne faut pas

perdre de vue ici, c'est que si votre emprunt hypothécaire fait de

vous un heureux propriétaire, il confère à votre créancier un droit

réel de reprise de possession. La maison vous appartient sans

entièrement vous appartenir et ce, souvent pour un bon 25 ans.

Secondo, les racines grecques qui composent le mot hypothèque sont

fort éclairantes. "Hypo", vous vous en doutez, signifie en

dessous, en deçà, quelque chose qui qualifie une situation

inférieure, insuffisante. "Thèque" renvoie lui à loge, réceptacle,

armoire. Hypothèque, au niveau de ses racines, signifie donc "un

emplacement, un lieu, un espace inférieur et/ou insuffisant".

Dès lors, lorsque l'on se demande, comme c'est le cas aujourd'hui,

si les 18-30 ans sont une génération hypothéquée, nous nous

questionnons à savoir si cette catégorie technocratique n1 occupe-

rait pas un espace social à la fois emprunté et secondaire par

rapport à l'ensemble de la société. Une place qui, non seulement

ne leur appartiendrait pas en propre, mais qui serait en plus le

choix des générations précédentes. Une place qui en ferait des

sujets inférieurs, sans grand pouvoir, aux "possibles" limités.

Une place, la seule, que la société veut bien leur conférer. Un

32

petit 2£ au sous-sol, que l'on veut bien aider à aménager. Mais

attention les enfants, les déménagements aux étages supérieurs sont

proscrits. C'est donc bien à cela qu'il faut répondre aujourd'hui?

Personnellement, je répondrai oui... et non. Je m'explique.

f j e répondrai oui, parce qu'il est exact que la société québécoise,

à l'image de l'ensemble des pays occidentaux, présente bien peu de

.débouchés aux jeunes d'aujourd'hui. Même avec une formation

universitaire, il est difficile, voire impossible, .dans de nombreux

secteurs, de décrocher rapidement un emploi à plein temps,

permanent et protégé syndicalerôent. Conséquemment, une large

portion de la jeunesse québécoise est vouée à n'occuper que des

emplois précaires et/ou à s'activer dans l'univers de la débrouille

économique. L'espace économique non-précaire est bien peu

perméable aux jeunes générations et à leurs recherches d'insertion

(René, 1987). Ici, "1'hypo-thèque" se concrétise.

Et si cet espace se referme, le statut de jeune s ' en trouve

évidemment transformé. Catégorie construite en ce vingtième

siècle, la jeunesse, par définition, n'est qu'un temps de passage,

un temps de moratoire entre l'enfance et la vie adulte. Elle se

présente historiquement comme un temps d'expérimentation qui doit

conduire à l'insertion, insertion qui se réalise entre autres en

accédant à un emploi stable, suite à l'apprentissage d'un métier,

d'une technique ou d'une profession.' Ce fut du moins l'itinéraire

propre à de nombreux jeunes en ce siècle, en autant, toutefois,

qu'ils furent .occidentaux et de sexe masculin (Galland, 1984).

Or voilà que le blocage actuel remet radicalement en cause la

dimension temporaire intrinsèquement liée à cet état de vie. En

quelque sorte, dans les faits, par leur vécu précaire, beaucoup

sont encore considérés comme jeunes à trente ans, parce qu'ils ne

peuvent accéder à l'espace économique non-précaire. Cette période

de vie ne peut donc être considérée comme un simple entre-deux.

La catégorie jeunesse se transforme, devenant plus un "temps pour

la vie", qu'une étape, qu'un temps de vie.

33

Ici, "1'hypo-thèque" perdue et pour certains, elle trace la voie

à tout un cortège de problèmes sociaux qui sont, en partie tout au

moins, l'apanage de cette difficile insertion. L'isolement et la

dépendance s'installent. Le portrait tracé par certaines des

interventions qui m'ont précédé reflète bien cet état de faits.

Mais parallèlement, je répondrai non à la question, parce que dans

cet espace de précarité,il y a aussi toute une vie qui fourmille,

et qui se conjugue, par la force des choses, "au noir". En ce

sens, depuis quelques années le thème de la débrouillardise

économique et sociale a été abordé à quelques reprises dans la

littérature sociologique québécoise sur la jeunesse (Gauthier,

1988; Grell, 1985; Lesage, 1986; René, 1986). Il renvoie à toute

une série de pratiques de survie, vécues, soit sous un mode

individuel, soit à 1'intérieur de micro-réseaux. Parfois légales,

ces débrouilles se nichent très souvent dans l'univers des

transgressions économiques.

Ces formes de débrouilles, de réseaux d'entraide et de sociabilité

varieront toutefois en fonction du style propre aux jeunes

observés. Entre des jeunes rockeurs, des jeunes issus d'une

culture proche de la punkitude, ou tout simplement des jeunes

universitaires laissés à eux-même financièrement, nous observerons

des variantes tant dans la forme que dans le contenu des modes de

vie et d'agrégations. La résistance à un état de précarité

économique peut se vivre de mil le et une façons et force est de

constater qu'il y a une distinction entre la pige au noir d'un

jeune graphiste universitaire et les quarante heures non-déclarées

dans une usine de textile d'un jeune qui n'a pas terminé son cours

secondaire.

Des variations donc, qui renvoient à des itinéraires de vie

distincts, modelées tant par le passé de chacun de ces jeunes, que

par leurs 1ieux d'ancrage actuel. Mais des différences qui, si

elles nous obligent à parler de "jeunesses au pluriel", en

distinguant âge, classe, sexe et origine ethnique, rie nient pas la

"centralité" du phénomène. "L'hypo-thèque" n'est toujours pas

levée. Mais attention, il n' est pas sûr, par exemple, que nous

34

reconnaîtrions ce que nous avons bien voulu collectivement leur

allouer. Il se pourrait même que le petit 2£ se soit transformé

en un grand 5 ou même un 7£, par extension.

Devant 11 impossibilité de se trouver un emploi stable, bien des

jeunes apprennent donc à "vivre autrement". De nouvelles formés

de solidarités s'édifient. Une micro-société prend corps avec son

propre système économique et ses propres valeurs. A travers la

survie, jaillit une communication horizontale, essèntielle, la

seule qui leur soit vraiment permise socialement. Et encore 1

Au delà du travail au noir, ce "vivre autrement" éclate dans toutes

les directions, de 11entrepreneurship aux transgressions plus

dures, telles la délinquance et/ou la prostitution. Solutions

opposées, à 1'image bien souvent de 1'histoire de vie de chacun,

qui offrent aux uns 1 'ouverture vers plus de créativité et aux

autres la survie primaire'de la rue. Comme quoi, il faut le dire,

/ la débrouille n1 est pas toujours rose. Comme quoi, il ne faut

( surtout pas lui conférer des vertus qu'elle ne possède pas.

En terminant, de quoi ont-ils besoins ces jeunes? Surtout pas

d'être étiquetés, catégorisés, problématisés comme du bétail dont

on ne sait que faire • C1 est vrai que certains vivent de graves

problèmes. 11 faut y voir. Mais d'autres ont aussi trouvé des

solutions fort ingénieuses dans les circonstances• Dans ce cas,

il faut savoir regarder. Attention aussi aux larmes, qui sont

souvent vite essuyées• Car, ce n'est pas la première génération

en ce siècle à se sentir avec raison "hypothéquée" • Les faits

diffèrent, mais l'émotion qui est derrière, rejoint celle vécue en

d' autres temps. Et comme tous les jeunes qui ont grandi en ce siècle,. ceux d'aujourd'hui ont besoin d'espace, d'autonomie.

Toutefois, ils ont besoin d'autres choses que d'un sous-sol. Ils

ont aussi besoin de référents, de repères, de modèles, de personnes

significatives dont ils pourront à la fois se rapprocher à loisir

et se distancer en temps voulu. ^

Bien sûr, il faut regarder du côté des limites structurelles,

combattre des réformes contraignantes et sans débouchées comme

35

eel le de 1 ' aide-sociale, exiger de vrais emplois. Bien sûr, et

c'est crucial, il faut soutenir les seules pratiques qui souvent

les touchent encore vraiment, celles des organismes communautaires

jeunesse. Parce qu'elles permettent justement des rencontres

significatives, parce qu'elles sont au ras du sol, parfois

malheureusement très proches du sous-sol elles-mêmes, pour ne pas

dire presqu'enterrées, faute de reconnaissance réelle et d'autono-

mie financière. Mais, il faut aussi agir autour de soi, dans son

propre milieu. Arrêter de juger, et/ou de fuir. Etre les réfé-

rents, lès repères qu'ils n'ont souvent jamais eus, ou qu'ils n'ont

plus, en leur laissant l'espace dont ils ont besoin pour aller de

1'avant•

Oui il faut lever "1'hypo-thèque" que nous leur avons collecti-

vement imposée. Mais, pour ce faire, il faut commencer par lever

celle qui traîne encore dans nos têtes. Sinon, ces mêmes têtes

pourraient bien, en l'an 2000, être hantées par des cauchemars.

36

B I B L I O G R A P H I E

Deniger, M-A, Gamache r J.René, J-F., Jeunesse : des illusions

tranquilles, Montréal, VLB éditeur, 1986.

Galland, O . , "La prolongation de la jeunesse: vers un nouvel âge

de vie?", in Contradictions, no 40-41, 1984.

Gauthier, M., Les jeunes chômeurs, Québec, Institut québécois de

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Grell, P., Etude du chômage et des conséquences : les catégories

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politiques sociales, Ecole de Service social, Université de

Montréal, 1985.

Lesage, M., Les vagabonds du rêve, Montréal, Boréal, 1986.

René, J-F., "Jeunesse: la résistance à l'épreuve du quotidien". In

Jeunesse: des illusions tranquilles, op.cit.

»

René, J-F, "La jeunesse et le social: lorsque le temps vacille et

1.' espace éclate", in Les cahiers de la Recherche sur le Travail

Social, Université de Caen, no 13/1987.

3 7

Allocution du Dr Claude Saint-Laurent Psychiatre et psychanalyste Auteur avec Mme Denise Bombardier du livre Le Mal de l'âme

La dangereuse tristesse chez les jeunes

Lors de son inauguration comme Président des Etats-Unis,

John Kennedy avait récité dans la langue originale un poème de

l'écrivain anglais John Donne. Ce poème qui parle de solidarité

humaine et de responsabilité, avait beaucoup ému son auditoire.

Je voudrais vous en proposer mâ traduction:

Nul d'entre-noùs n'est une îlé, complète en elle-même

Chacun est un morceau de continent

Une partie de 1'ensemble-terre

Si une parcelle en est enlevée par la mer

L'Europe est diminuée

Et de même pour un cap

Ou la maison d'un ami

Ce serait comme si ta maison l'était aussi

Toute mort d'homme me diminue

Car je suis impliqué dans 1 * hommerie

Et, par conséquent, ne demande pas

Pour qui sonne le glas

Car toujours, il sonne pour toi.

J'ai déjà écrit dans le livre fait avec madame Bombardier et que

nous avons intitulé Le Mal de l'Ame que "plus que la vieillëssef*

l'adolescence est le temps de la solitude, la plus cruelle, la plus

lancinante, la plus mortelle". C'est de cette solitude et de la

dangereuse tristesse qui 1'accompagne que je veux dire un mot ce

matin. Certains, surtout parmi mes collègues m'ont reproché une

dramatisation superflue. On a feint d'oublier les statistiques de

décrochage scolaire, de suicides, de violence à l'école ou dans le

Métro. On a minimisé les M.T.S. et les avortements. On s'est

38

contenté de faire valoir que la vieillesse, avec son cortège

d'incertitudes, de malaises et d'impuissance, enferme bien

davantage le vieillard dans 1'esseulement et la tristesse et

qu'elle est intrinsèquement associée à la mort.

Cela est incontestable si l'on compare des processus biologiques

et si 1 'on établit des statistiques viagères. Mais si, aiP

contraire on essaie de scruter les contenus psychologiques et leurs i

répercussions dans les conduites,on se rend compte que la mémoire]

du passé réel et la capacité consciente de dépendance comblent le

vieillard alors que le passé réel est conspué par l'adolescent et

la dépendance rejetée sans appel. Le vide qui en découle augmente

le sentiment de futilité et la rage à l'égard de l'environnement.^,

Le vieillard compense volontiers sa faiblesse physique par une

conviction compensatoire de force morale et de dignité sociale:

il se sent souvent autorisé à condamner les générations montantes.

L'adolescent se sent essentiellement aliéné par rapport au pouvoir

matériel ou moral car il a la douloureuse conviction d'en ignorer

le langage et d'en subir l'abusive autorité. Cela aussi le laisse

pantois face à ses fantasmes de supériorité dérisoire et plein de

rage devant la force réelle des adultes au pouvoir partout autour

de lui. . Et nous pourrions continuer ainsi cette mise en parallèle

mais le besoin de simplifier notre propos nous oblige à avancer

plutôt dans la direction d'une affirmation plus explicite de notre

proposition principale, celle qui articule la violence sur la

tristesse de cet âge.

C'est au cours de l'adolescence que nous pouvons le plus aisément

observer le rapport dynamique entre la tristesse et la violence.

Chez le jeune enfant le rapport est direct entre la frustration

d'un besoin par l'objet extérieur et le retour presque automatique

de l'agressivité vers cet objet. Le monde intérieur n'est pas très

élaboré et n'engendre pas des conduites destructives d'une grande

durée ou d'une grande ampleur• I1 y faut toujours une privation

dans le monde extérieur. Chez 1 'adolescent, 1 'agressivité es£^j

vécue comme une répercussion dans le monde extérieur de privations \

essentiellement intérieures et donc, invisibles et i n c o m p r é h e n s i ^

bles.

39

« *

L'adolescent mord la main qui le nourrit aussi bien que la main qui

le caresse car cette main lui rappelle et lui fait revivre une

dépendance et des plaisirs infantiles qu'il doit rèjeter à tout

prix. Il doit accepter l'abandon des représentants parentaux

conscients et inconscients sous peine d'être voué à l'insignifiance

et même à la nul 1 ité de son " je". Il doit vivre 1 e deui 1 de

l'amour et de l'approbation parentale; il doit boire jusqu'à la lie

la tristesse d'un passé irrécupérable face à un avenir sans

certitude. Cette tristesse l'induit à refermer davantage son monde

intérieur et à se braquer contre les exigences et les conditions

des autres, conditions à l'acceptation, conditions à l'affection,

conditions à la conviction de l'être.

La violence de l'adolescent trouve dans cette tristesse un bouillon

de culture inépuisable. Les autres voies de sorties sont l'exal-

tation amoureuse (la voie de Roméo), les défis sportifs et les

solidarités collectives. C'est donc dire que la tristesse est un

puissant motif de propulsion vers l'extérieur, le concret, le

social. C'est là que nous pouvons rejoindre 1'adolescent en lui

proposant des projets d'insertion socio-culturelle, lui facilitant

l'exercice des maîtrises, l'adoption de modèles de conduite qui

tiennent compte de son ambivalence à l'égard des adultes. Nous

pouvons le rejoindre sur.tout en l'assurant de notre fidélité dans

l'affection, même s'il fait tout pour discréditer notre rôle, nos

valeurs et nos espérances. N'oublions pas que dans les catégories

que nous imposons aux mouvements psychiques complexes que nous

avons détectés chez les adolescents nous oublions souvent le

couplage dynamique qui relie 1'admiration à la crainte, la

tristesse à la douleur physique et morale. Cette incompréhension

fondamentale rend souvent notre action stérile et même nuisible.

Je ne vous cache pas mon pessimisme, dans l'état actuel d'anomie

sociale et culturelle, quant à la possibilité pour les adultes

d'atteindre au niveau d'efficacité indispensable face à la

criminalité et à la pathologie psychosociale de la société

adolescente.

40

Il est possible que les seuls thérapeutes des adolescents nous

apparaissent être les seuls adolescents eux-mêmes. C'est une

avenue à considérer très humblement et très sérieusement.

Merci

41

SYMPOSIUM REFLEXION

Quelle est la réalité des jeunes d'aujourd1hui? Quels sont

leurs rêves? leurs espoirs? quelles sont leurs questions

existentielles?

Est-ce vraiment une génération hypothéquée? Peut-on avoir une

vision plus optimiste des choses?

Quels sont les problèmes les plus aigus auxquels les jeunes

font face? Est-ce le chômage, le monde du travail, l'avenir,

la famille, 1'hébergement,... etc.

Quel soutien trouvent-ils dans leur famille, dans leur milieu,

dans leur milieu éducatif, dans leur ville, dans la société

en général?

Est-ce que les adultes leur donnent de la place ou leur

permettent de prendre leur place?

Quelles sont les avenues de solutions?

C e s q u e s t i o n s , a i n s i q u e d i v e r s e s a u t r e s s u s c i t é e s p a r l e s a l l o c u t i o n s d e s m e m b r e s d u p a n e l , o n t é t é t r a i t é e s s i m u l t a n é m e n t p a r g r o u p e d e 2 0 à 3 0 p e r s o n n e s r é p a r t i e s d a n s c i n q a t e l i e r s .

42

ATELIER " A "

Animatrice : Madame Christine Archambault

Rapporteure: Madame Nicole Bérubé

Le groupe des trente-quatre participants de cet atelier était

constitué d1 intervenants de ressources institutionnelles ou

alternatives comme le Centre "Beau VOYAGE", "Centre-Ami", du

C.L.S.C. 01ivier-Guimond, du D.S.C. d1 une région de Québec, de

S.E.M.O. de Victoriaville, du C.H. Louis-H. Lafontaine; de plus,

se retrouvaient à cet atelier, un certain nombre d1 étudiants en

Service Social, des parents de jeunes adultes et des jeunes,

usagers ou non, desdits services ou ressources.

OBJECTIFS DE L'ATELIER:

Les objectifs de l'atelier furent les suivants:

a) Réfléchir sur le contenu des activités du colloque de la

matinée;

b) "S'arrêter" collectivement sur ce projet de société que

constitue l'intégration des jeunes à la société;

c) Dégager des mandats personnels en tant qu'intervenants auprès

de la clientèle des jeunes adultes.

PRINCIPAUX SUJETS TRAITES:

Les sujets qui furent davantage développés au cours de l'échange-

discussion furent les suivants: santé mentale et les jeunes;

absence des intéressés, à cet atelier; "réalité—précarité";

43

responsabilisation du jeune; valeurs chez les jeunes; objectifs et

recommandations•

LA SANTE MENTALE ET LES JEUNES:

Les participants ont tenté de clarifier certaines "dites"

notions de Santé Mentale, en ce gui a trait aux jeunes. Il

a été mentionné qu'est considérée "normale", une personne qui

travaille, produit, accumule du capital; les autres personnes

sont vues comme "marginales".

Une nuance est apportée au sujet de la santé mentale : les

adultes ont des "difficultés", les jeunes ont des "problèmes".

On dit qu'un jeune est en santé mentale, quand il accepte

constamment de relever des défis imposés par la société, quand

il accepte de faire constamment ses preuves. La perception

du jeune est que 1 ' excellence est obligatoire pour être

considéré "en bonne santé mentale".

ABSENCE DES INTERESSES, A CET ATELIER:

Nous relevons cet item, car à plusieurs reprises, au cours de

l'atelier, les participants ont déploré cet état de fait.

"Où sont, aujourd'hui, les employeurs, les gens de l'entrepri-

se?"

"Cela me met mal à l'aise de parler à la place des jeunes,

tellement absents, ici, aujourd'hui."

Invisibilité également, des "décideurs économiques"; absence

dramatique enfin, des "décideurs sociaux", ceux qui font les

politiques, qui définissent "expertise et compétence".

44

"REALITE-PRECARITE":

L'un des facteurs reconnus dans le fait que les jeunes,,

d'aujourd'hui seraient "hypothéqués", est la réalité-précari-

t é , en ce sens que constance et permanence disparaissent de

plus en plus et c e , globalement. Une participante signale

q u ' il est frustrant de constater que son C . V . est d'un

illogisme et d'une absence de planification, d é s o l a n t s .

Jusqu'à l'âge de trente a n s , rares sont les jeunes qui

obtiennent un poste régulier, à temps plein, p r o t é g é , même

chez ceux qui ont une formation poussée.

Même les adultes d ' âge mûr sont confrontés à la réal ité-

précarité; ils ne savent plus combattre 1'angoisse de perdre

un travail assuré, une stabilité affective, e t c .

RESPONSABILISATION DES JEUNES:

Les participants ont porté une attention particulière au mécanisme

de la responsabilisation des jeunes, comme source possible des

problèmes des jeunes.

La prise en charge de soi est une démarche q u i doit se faire

par é t a p e s , pour s'intégrer dans une structure faite par et

pour des a d u l t e s . Il y a des stades dè développement à

respecter et il ne faut pas tenter de dépasser le niveau

potentiel développemental du jeune.

La succession rapide et continuelle des adultes, dans la vie

du jeune, et tout 1'aspect provisoire impliqué, réduit la

signifiance des personnes-modèles dans l'idée du jeune et

ralentit ainsi son agir responsabilisant.

Un autre facteur de ralentissement du processus de responsa-

bilisation réside dans le' fait que beaucoup de jeunes sont

impliqués, projetés dans les problèmes des adultes (divorce.

45

chômage) et ils doivent assumer, en partie, les conséquences

desdits p r o b l è m e s .

Il faudrait inciter le jeune à se responsabiliser individuel-

lement , avant de le mobiliser à mil iter, à manifester, à

développer une solidarité CONTRE le système, souvent par

d é p i t .

Avec cette majorité légale acquise de façon hâtive, anticipée

m ê m e , les parents et la société se sont donné beau jeu pour

se déresponsabiliser des jeunes, de façon prématurée, peut-

ê t r e .

Le refus de la responsabilisation du jeune par lui-même est

une conséquence du fait de n'avoir plus de racines, plus

d'appartenance, plus de continuité de v i e , plus de modèle

stable, plus de référentiel signifiant puisque tous ces

éléments précités se remettent constamment en question et

modifient régulièrement leur propre système de v a l e u r s , leurs

propres objectifs de v i e , e t c .

VALEURS DES JEUNES:

Afin de comprendre la dynamique de vie des jeunes en 1989, les

participants, ont accordé un bon moment de réflexion au système de

valeurs des jeunes.

En ce qui a trait à la réalité-travail, les jeunes ne veulent

pas faire n'importe quoi; ils veulent aimer leur travail. Ils

refusent de produire pour p r o d u i r e , de travailler uniquement

pour "survivre"; or quantité d'emplois se situent au niveau

de la routine, de 11 automatisme où créativité et initiative

sont exclues. Comment concilier ces deux réalités?

De p l u s , le jeune exige d'être respecté dans son travail; il

s'agit là d'une volonté de s'affirmer, fort saine, qui donne

parfois une leçon aux adultes m ê m e s .

46

Comment, pour le jeune, concilier travail et valeurs, quand

les choix sociaux sont pré-établis, quand il leur faut se

récréer un modèle à travers une multiplicité de modèles?

A propos de la valeur-consommation, des observateurs qualifiés

ont réalisé que ce qui incite le jeune à consommer, c'est le

manque d'amour, la difficulté de communication avec l'adulte.

Les jeunes ont acquis un sens critique tout à fait pertinent,

depuis que l'enfant est reconnu comme personne entière qui a

le droit de s'exprimer.

Une participante à l'atelier; consultante qui fait enquête en

vue de l'établissement d'un programme-cadre de prévention chez

les jeunes, rapporte qu'il y a peu de vraie communication

entre les jeunes et les adultes. "ÔN" détermine leurs

besoins; "ON" crée des ressources en fonction desdits besoins,

sans tenir compte de ce qu'ils veulent et pensent : travail,

loisirs, e t c . Les deux cents recommandations et facteurs qui

ressortent de son enquête sont centrés sur les adultes et non

sur les jeunes. Voilà exprimées ici, quelques valeurs

importantes, pour les jeunes.

OBJECTIFS ET RECOMMANDATIONS:

Lors du déroulement de l'atelier, il n'a pas été défini un moment

spécifique pour énumérer les recommandations à apporter au

C o l l o q u e . Les participants exprimaient leurs objectifs et

"désiderata", selon la nature des sujets traités. Toutefois, nous

pouvons regrouper les recommandations (ou réflexions) sous deux

sujets principaux, à savoir: celles qui traitent de la nature même

des jeunes qui demandent des services et ce1les qui traitent du

travail des intervenants.

47

NATURE MEME DES JEUNES QUI DEMANDENT DES SERVICES:

Les jeunes n'ont ni "lieu", ni "sens" d'appartenance, puisque

la société ne leur fait pas de place pour réaliser leurs

f o r c e s . . . - ' i

Quand, il est question des jeunes peu scolarisés, on constate

qu'ils ont été confondus, "éteints" à cause de leur ignorance,

de leur incapacité d'identifier leurs besoins, leurs objec-

t i f s . Il faut regénérer, revitaliser la créativité du non-

scolarisé.

Aimer le jeune, ne serait-ce pas de l'écouter? Les jeunes ont

besoin de "se d i r e " , pour arriver eux-mêmes à une solution.

Dans les milieux de t r a v a i l , on tente d'intégrer le jeune dans

une structure faite par et pour les adultes d'âge moyen ou

m û r . Le jeune ne s'y retrouve p a s . Il devrait y avoir des

formules et structures de travail "mitoyennes" - ex: on

n'exigeait pas la perfection des apprentis, jadis 1

Pour le jeune, il serait "impératif" qu'on lui redonne sa

crédibilité en tant que "personne"; actuellement, il ne

l'obtient que s'il est "étudiant" ou "travailleur".

TRAVAIL ET MISSION DES INTERVENANTS:

'Il est suggéré de créer une alliance, d'établir une solidarité

entre jeunes et intervenants.

Il est constaté que lorsqu'on devient intervenant, on oublie

vite nos "acquis" de jeune, nos "référentiels" de jeune.

Pris entre les finalités des institutions et les finalités des

intervenants, l'aide et le support ne rencontrent souvent pas

les finalités des jeunes.

48,

Face à la récurrence des problèmes des jeunes, les inter-

venants ont-ils dépassé le sentiment d'échec ou s'y com-

plaisent-ils?

Deux écueils guettent l'intervenant dans sa pratique profes-

sionnel le : la tentation de performance, considérée comme

donnée de base, pour conserver son "poste" et le "protec-

tionnisme" envers la clientèle, lequel protectionnisme

engendre la répression du jeune, parfois.

Quelqu'un se demande pourquoi on a dépouillé l'environnement

du jeune, des personnes significatives pour lui? Quand il

demande de l'aide, on lui impose des modèles standardisés...

Le "Big Mac de l'interventionniste" est qualifié par une

surabondance de priorités, de plans d'interventions très

sophistiqués, d'objectifs très articulés.

Si on élimine l'écologie sociale naturelle du jeune, pour

faire place aux intervenants, si l'on refuse de favoriser

l'entraide naturelle, ne serait-ce pas pour assurer la

pertinence de l'intervenant?

L'intervenant qui se veut être signifiant pour le jeune, doit

être clair, cohérent, authentique et se refuser de paraître

"impérialiste" de son savoir, de son vécu professionnel, de

son expérience de vie.

Au risque de se répéter, les participants de l'atelier se sont

interrogés : finalités des institutions (compétition,

politiques internes) ainsi que les finalités des intervenants

(objectifs, valeurs personnelles) n'altèrent-elles pas souvent

la qualité et 11 efficacité de 1

1 intervention auprès des

jeunes?

49

ATELIER - B

Animateur: Monsieur David Cohen Rapporteure: Madame Annie Veillette

Le groupe était composé d'une vingtaine . de participant(e)s

représentant majoritairement les ressources alternatives en santé

mentale suivies d'organismes de Jeunesse, d1 étudiant(e)s et

d'intervenant*e)s du réseau.

L'animateur propose aux participant (e) s de poursuivre l'a réflexion

amorcée par les différents membres du panel dans 1'avant-midi en

tentant de .compléter par nos points de vue, nos expériences, la

compréhension des problèmes de santé mentale chez les jeunes et

enfin, de dégager les pistes de solutions que nous entrevoyons,

individuellement et collectivement.

Ainsi, quand on pense aux jeunes, ils sont pleins de vie, pleins

d'enthousiasme.•• et pourtant ce qu'on entend, dans les médias et

ici, ce sont des problèmes. Est-ce qu'il s'agit vraiment de la

réalité, du vécu des jeunes ou d'une minorité? Existe-t-il

réellement dés problèmes de santé mentale chez les jeunes?

Tour à tour, dans les échanges, plusieurs causes explicatives des

conditions et des réalités favorisant l'émergence de problèmes de

santé mentale chez les jeunes ont été abordées:

les carences biologiques chez certains individus ;

la démission ou la surcharge parentale;

le manque de soutien aux familles dont les enfants ont des

problèmes de santé mentale;

1'isolement des jeunes ;

le manque de moyens' et d'espace pour faire entendre leur

parole;

les problèmes de communication entre les gens;

50

la trop grande pénétration de la télévision dans l'éducation

des enfants ;

le mangue d'emplois;

la précarité et/ou les conditions aliénantes de ceux

disponibles;

l'intolérance sociale du non-travail comme choix de vie;

l'éclatement des familles;

l'anonymat des grandes villes;

l'absence de consensus social sur les valeurs de notre

société;

1'inadéquation de 1'école aux besoins des jeunes et aux

réelles possibilités du marché du travail;

les illusions des valeurs argent-productivité-performance-

excellence et la sur-valorisation du travail;

le racisme et la discrimination;

les choix douteux de l'Etat en matière de politiques sociales

(coupures dans l'aide sociale, ; l'assurance-chômage, les

ressources alternatives, etc.);

les limites des ressources tant communautaires qu'institution-

nelles dans la résolution des problèmes sociaux et psycho-

logiques des jeunes;

le manque d'espoir des intervenante e)s envers le pouvoir de

changement des individus et des collectivités.

Les participant(e)s à l'atelier s'entendaient pour dire que, au-

delà du discours dominant, il y a aujourd'hui une majorité de

jeunes qui vivent des difficultés économiques et sociales. Les

problèmes sociaux que l'on identifie aux jeunes se posent aussi

pour plein d'individus peu importe leur âge. Les jeunes, par leur

position et les conditions sociales précaires dans.lesquellés ils

sont maintenus, sont encore plus démunis pour y faire face.

Pour certains, si les conditions de vie et les rapports sociaux ont

été priorisés par rapport aux facteurs biologiques, c'est que des

études et les pratiques sociales quotidiennes prouvent que, par

exemple, le chômage augmente les risques de problèmes de santé

mentale. Avec de meilleures possibilités de travail, même lesYJ/

personnes ayant des failles neurobiologiques ou des faiblesses j

51

psychologiques seraient capables d'évoluer. Le chômage et le

stress important qu'il génère chez les personnes ayant fortement

intégré le travail comme valeur de reconnaissance personnelle et

sociale apparaissent clairement comme facteurs précipitant un

décrochage social ou un problème de santé mentale. Dans une

société différente, les porteurs de certaines faiblesses biolo-

giques ne seraient pas si stigmatisés. Cela amènerait sans doute

moins de décrochage ou d'exclusion sociale.

Il ressortait aussi que les jeunes n'acceptent pas n'importe quel

travail • Ils ne se satisfont pas du salaire minimum ou de

conditions de travail difficiles comme leurs aîné(e)s ont pu le

faire. Pour plusieurs, cette attitude face au travail est

répréhensible alors que pour d'autres, elle démontre la lucidité

et le sens critique des jeunes. Ceux-ci/celles-ci ne sont pas

prêt(e)s à entrer de plain-pied dans les contradictions du sytème.

Les jeunes veulent participer, être quelqu'un et reconnus. Le

travail précaire, l'aliénation par le travail, est-ce vraiment la

solution pour les valoriser? Des milliers de femmes vivent tous

les jours cette précarité. D'autres jeunes, par ailleurs,

répondent à 1'hyper-sollicitation du marché du travail. En plus

de leurs études, ils/elles ont 2-3 emplois à temps partiel.

L'ensemble de leur vie en est affecté. Tôt ou tard, ils/elles se

retrouvent avec de sérieux problèmes.

yOn rappelle qu'après un certain temps sans travail, des symptômes

de dépression apparaissent chez certains individus et parfois un

travail thérapeutique est nécessaire pour redonner confiance aux

personnes atteintes. On ne peut exiger du jour au lendemain de

"tous les sans-travail, dont des milliers de jeunes, de se trouver

un emploi. Il faudrait d'ailleurs que ces emplois soient dispo-

nibles, ce qui n'est pas toujours le cas.

Mais le travail demeure tout de même, actuellement, le principal

outil pour acquérir une certaine autonomie et une reconnaissance

sociale malgré toutes ses limites!

52

L a p o l é m i q u e t r a v a i l e t s a n t é m e n t a l e e s t l o i n d ' ê t r e r é s o l u e c o m m e n o u s p o u v o n s l e c o n s t a t e r !

L a t é l é v i s i o n f u t a u s s i p r i s e à p a r t i e . O n l a c r i t i q u e s o u v e n t c o m m e v é h i c u l e d e v a l e u r s e t d e r é a l i t é s c o n t r a d i c t o i r e s . N e d o n n e - t - o n p a s t r o p d e p o u v o i r d ' é d u c a t i o n à l a t é l é v i s i o n ? E s t -e l l e r e s p o n s a b l e d e l a d é m i s s i o n d e s p a r e n t s e t d u m a n q u e d e c o m m u n i c a t i o n e t d e r e l a t i o n s s a t i s f a i s a n t e s e n t r e l e s p a r e n t s e t l e s e n f a n t s ?

P o u r c e r t a i n s , c e t t e a c c u s a t i o n e s t i n d é n i a b l e . L a m o n t é e d e l a v i o l e n c e e t l a p r o m o t i o n d e s v a l e u r s d e c o n s o m m a t i o n v i e n n e n t e n c o n t r a d i c t i o n a v e c c e q u e l ' o n t e n t e d e c h a n g e r . P o u r d ' a u t r e s , l a t é l é v i s i o n , b i e n c o n t r ô l é e , n ' e s t p a s p l u s v i o l e n t e q u e l a v i e . E l l e a a i d é p a r s e s ' p r o g r a m m e s é d u c a t i f s l e s e n f a n t s à s ' a p p r i v o i -s e r à d e n o u v e l l e s r é a l i t é s c o m m e l a m o n o p a r e n t a l i t é , l e s d i f f é r e n -c e s e t h n i q u e s , e t c . C ' e s t l a c o m m u n i c a t i o n q u i m a n q u e e n t r é l e s g e n s . L e s j e u n e s n e s a v e n t p l u s e x p r i m e r c l a i r e m e n t l e u r s b e s o i n s .

L e s p a r t i c i p a n t ( e ) s e x p r i m e n t l e u r i n q u i é t u d e f a c e a u x c h a n g e m e n t s s o c i a u x s u r v e n u s a u c o u r s d e s d e r n i è r e s a n n é e s n o t a m m e n t d a n s l e s f a m i l l e s . L e s s é p a r a t i o n s , l e s d i v o r c e s s o n i t d e s é v é n e m e n t s s o u v e n t t r a u m a t i s a n t s d a n s l a v i e d e s e n f a n t s . Q u e v o n t - i l s d e v e n i r ? B i e n t ô t , p l u s d e 5 0 % d e s e n f a n t s d e m o i n s d e 1 0 a n s a u r o n t v é c u u n e s é p a r a t i o n . M a i s l e s c h a n g e m e n t s n e s o n t p a s e s s e n t i e l l e m e n t n é g a t i f s , r é i t è r e n t d ' a u t r e s p a r t i c i p a n t ( e ) s . N o u s a v o n s n o s p e u r s m a i s i l f a u t a u s s i p r é s e n t e r c e l a d e f a ç o n p o s i t i v e a u x e n f a n t s . I l s o n t d e s r e s s o u r c e s p o u r s ' a d a p t e r . C e r t a i n s d é v e l o p p e r o n t p l u s t ô t l e u r a u t o n o m i e , a u r o n t u n e m e i l l e u r e c a p a c i t é d ' e x p r i m e r l e u r s s e n t i m e n t s , a u r o n t u n r é s e a u a f f e c t i f p l u s g r a n d , e t c .

I l e s t p r o p o s é , à c e s t a d e - c i d e l a r é f l e x i o n , d e v o i r c o m m e n t l e s ' o r g a n i s m e s i n t e r v e n a n t a u p r è s d e s j e u n e s r é p o n d e n t a u x b e s o i n s d e

c e u x - c i , q u e l l e s s o n t l e s 1 i m i t e s r e n c o n t r é e s e t c o m m e n t l e s d é p a s s e r .

5 3

R a p i d e m e n t , l a d i v i s i o n d u t r a v a i l p a r p r o b l é m a t i q u e s f a i t s u r f a c e . O n p a r l e d e f r a g m e n t a t i o n d u t i s s u s o c i a l , d e l ' é c l a t e m e n t d e s c o m m u n a u t é s . C e p e n d a n t , i l f a u t r e c o n n a î t r e q u e l e s o r g a n i s m e s d ' a c t i o n e t d ' i n t e r v e n t i o n s o c i a l e s a u s s i s o n t f r a g m e n t é s e t t r a v a i l l e n t d e f a ç o n p a r c e l i a i r e , m o r c e l é e a v e c l e s j e u n e s . O n f a i t s o u v e n t u n t r a v a i l r é p a r t i t e u r ! S o u v e n t , l a p e r s o n n e r é f é r é e " r e b o n d i t " , s e s b e s o i n s n e s o n t p a s c o m b l é s . U n e i n t e r v e n t i o n d e r é s e a u , p l u s g l o b a l e , u n s u i v i p l u s a d é q u a t , u n e c o l l a b o r a t i o n e n t r e l e s r e s s o u r c e s s e r a i e n t n é c e s s a i r e s .

L a f a ç o n d o n t l e s j e u n e s é t a b l i s s e n t l e u r r a p p o r t a u x o r g a n i s m e s a u n i m p a c t c o n s i d é r a b l e s u r l ' i n t e r v e n t i o n . A i n s i , i l e s t c l a i r q u e l e s j e u n e s a c c o r d e n t b e a u c o u p d ' i m p o r t a n c e a u x r e l a t i o n s s i g n i f i c a t i v e s a v e c l e s a d u l t e s q u ' i l s / e l l e s c h o i s s i s s e n t . A c e t é g a r d , l e s o r g a n i s m e s c o m m u n a u t a i r e s j e u n e s s e c o n s t i t u e n t u n e p o r t e d ' e n t r é e p r o p i c e , d a n s u n c a d r e n o n - c o n t r ô l a n t , p o u r l ' é t a b l i s s e -m e n t d e l i e n s p r i v i l é g i é s a v e c l e s j e u n e s , d a n s l e r e s p e c t d e c e q u ' i 1 s s o n t e t n o n s e u l e m e n t d a n s c e q u ' i 1 s f o n t o u d e v r a i e n t f a i r e .

L e s i n t e r v e n a n t ( e ) s a u p r è s d e s j e u n e s s o n t d o n c r é g u l i è r e m e n t c o n f r o n t é s à d e s p r o b l è m e s v é c u s p a r l e s u s a g e r s d e l e u r o r g a n i s m è . M a i s l e s p r o b l è m e s e t l e s b e s o i n s d é p a s s e n t p a r f o i s l e u r s c o m p é -t e n c e s . U n e r é f é r e n c e s e r a i t a l o r s n é c e s s a i r e . C e p e n d a n t , l e s j e u n e s , m ê m e s ' i l s e x p r i m e n t d e s b e s o i n s s p é c i f i q u e s , n ' a c c e p t e r o n t p a s n é c e s s a i r e m e n t u n e r é f é r e n c e . C e u x / c e l l e s q u i o n t u n p r o b l è m e d e s a n t é m e n t a l e n e c o n s u l t e r o n t p a s f a c i l e m e n t s u r u n e b a s e v o l o n t a i r e . L a c o n f i a n c e l e n t e m e n t é t a b l i e a v e c 1 ' i n t e r v e n a n t ( e ) n e s e t r a n s f è r e p a s s i f a c i l e m e n t . . . C o m m e n t a r r ê t e r l a f r a g m e n -t a t i o n d e s b e s o i n s d e s j e u n e s e t e n m ê m e t e m p s , r e s p e c t e r n o s 1 i m i t e s c o m m e i n t e r v e n a n t ( e ) s ? S u r t o u t , c o m m e n t r e s p e c t e r l e r a p p o r t d e c o n f i a n c e , n e p a s f o r c e r l a r é f é r e n c e e t r é p o n d r e a u b e s o i n ? C o m m e n t é t a b l i r u n e c o n c e r t a t i o n e n t r e o r g a n i s m e s s a n s q u e l e s o r g a n i s m e s c o m m u n a u t a i r e s n e t r a h i s s e n t l e u r m a n d a t d e r é p o n d r e a u x b e s o i n s d e l a c o m m u n a u t é e n t e r m e s d ' i n f o r m a t i o n s , d ' é c h a n g e s , d e r e s s o u r c e s d i s p o n i b l e s ?

5 4

I l y a e u u n e e x p é r i e n c e d e c o n c e r t a t i o n i n t é r e s s a n t e d a n s l a r é g i o n d e D r u m m o n d v i l l e s u r l e p r o b l è m e d e 1 ' i t i n é r a n c e e t d e 1 ' h é b e r g e m e n t . P o u r é v i t e r 1 ' é p a r p i l l e m e n t d e s i n f o r m a t i o n s e t d e s r e s s o u r c e s , u n n u m é r o d e t é l é p h o n e u n i q u e s e r t à r e c e v o i r l e s d e m a n d e s e t f a i r e l a r é f é r e n c e . L e s o r g a n i s m e s t r a v a i l l e n t e n c o n c e r t a t i o n t o u t e n g a r d a n t l e u r r e s p o n s a b i l i t é d a n s l ' i n t e r v e n -t i o n e t l e s u i v i a u p r è s d e s p e r s o n n e s . C ' e s t u n e x e m p l e à i n v e s t i g u e r .

L a f a m i l l e a é t é p o s é e c o m m e l i e u d ' i n t e r v e n t i o n s o c i a l e . N ' é t a n t p l u s , p o u r n o m b r e d e j e u n e s , l e l i e u d e r é f é r e n c e q u a n t a u c h o i x d e s v a l e u r s , q u ' a v o n s - n o u s à p r o p o s e r c o m m e a l t e r n a t i v e ? L e s v a l e u r s d e n o t r e s o c i é t é c o m m e d e s f a m i l l e s s o n t f r a g m e n t é e s . L e s j e u n e s n e v e u l e n t p a s a d h é r e r à c e l a . I l s n ' o n t p a s d e v a l e u r s , i l s e n c h e r c h e n t , i l s n e s a v e n t p a s q u o i c h e r c h e r . L e s a d u l t e s q u i p o u r r a i e n t ê t r e s i g n i f i a n t s p o u r e u x n e s a v e n t m ê m e p a s q u o i p r o p o s e r .

" M a i s e s t - c e r é e l l e m e n t u n e c r i s e d e v a l e u r s ? q u e s t i o n n e n t d ' a u t r e s p a r t i c i p a n t ( e ) s . I l y a d e s n u a n c e s à f a i r e e n t r e u n e a b s e n c e d e v a l e u r s c h e z l e s i n d i v i d u s , d e s c h a n g e m e n t s d a n s l e s v a l e u r s t r a d i t i o n n e l l e s e t u n m a n q u e d e c o n s e n s u s s o c i a l s u r u n c e r t a i n n o m b r e d e v a l e u r s c o m m u n e s . C ' e s t s e n i e r s o i - m ê m e q u e d e p o s t u l e r e n l ' a b s e n c e d e v a l e u r s a c t u e l l e m e n t . N o u s a v o n s f a i t d e s c h o i x p e r s o n n e l s q u e n o u s t e n t o n s l e p l u s p o s s i b l e d e p r o p o s e r d a n s n o s l i e u x d e t r a v a i l , d ' e n g a g e m e n t , e t c .

C e l a p o s e l a d i f f i c i l e q u e s t i o n d u p o u v o i r d e s i n t e r v e n a n t < e ) s . A v o n s - n o u s l e s m o y e n s d e c h a n g e r l e s s i t u a t i o n s i n j u s t e s ? N o u s s o m m e s s o u m i s a u x m ê m e s n o r m e s q u e l e s j e u n e s , d a n s n o t r e t r a v a i l p a r e x e m p l e , e t c ' e s t i m p o r t a n t d ' a c c e p t e r l e s d i f f é r e n c e s . L ' é c l a t e m e n t d e s n o r m e s q u e n o u s v i v o n s a m è n e r a d e n o u v e l l e s . f o r m e s d e v i e , d e n o u v e l l e s a c t i o n s . C e r t a i n e s p o p u l a t i o n s , d a n s d e s p a y s t r è s m i s é r e u x , s o n t a u s s i a u x p r i s e s a v e c d e s é r i e u x p r o b l è m e s s o c i o - p o l i t i q u e s . P o u r t a n t , l à - b a s , i l s o n t u n d é s i r d e v i v r e , d e c h a n g e r d e s c h o s e s . S i 1 ' o n s e s e n t é c r a s é p a r l e s p r o b l è m e s , c ' e s t l e s u i c i d e c o l l e c t i f . " N o u s - m ê m e s , i c i , a v o n s - n o u s l e d é s i r d e v i v r e ? " p o s e c r u c i a l e m e n t u n e p a r t i c i p a n t e e l l e - m ê m e i m m i g r a n t e .

5 5

" B i e n s û r , l a r é a l i t é e s t d u r e , e s t t r i s t e m a i s c ' e s t l a r é a l i t é " r a p p e l l e u n e t r a v a i l l e u s e d e r u e . L ' i s o l e m e n t d e s j e u n e s e s t t r è s g r a n d . M a i s i c i e t m a i n t e n a n t , i l y a d e s c h o s e s à f a i r e . I l n e f a u t p l u s m i s e r s u r l a f a m i l l e m a i s s u r l a r e c o n s t r u c t i o n d u t i s s u s o c i a l , c o m m u n a u t a i r e . O n n e p r e n d p a s p u b l i q u e m e n t l a p a r o l e p o u r l e s j e u n e s m a i s l a v i e s e r e c r é e d e t o u t e f a ç o n , t o u s l e s j o u r s , d a n s l e u r s m i l i e u x : é c o l e , p a r c , r u e l l e s , . . . I l f a u t c o n t i n u e r l ' a c c o m p a g n e m e n t , l e v i v r e a v e c , i n v e n t e r d e s o u t i l s d ' e x p r e s s i o n e t d ' i n f o r m a t i o n s , l e s l e u r r e n d r e d i s p o n i b l e s . L e s j e u n e s o n t b e s o i n d e p r e n d r e l a p a r o l e . S i l ' o n m i s é m a i n t e n a n t s u r l e s j e u n e s , s i o n l e s r e c o n n a î t d a n s c e q u ' i l s s o n t à 1 0 - 1 1 - 1 2 a n s , ç a n e r é g l e r a s p a s l e p r o b l è m e d e c h ô m a g e , p a r e x e m p l e , m a i s ç a d o n n e l e s m o y e n s d e p r e n d r e t o u t e l a p l a c e à l a q u e l l e i l s o n t d r o i t , l à o ù c ' e s t n é c e s s a i r e .

N o u s e n a r r i v o n s , a u f i l d e l a r é f l e x i o n , à n o m m e r n o t r e m a n q u e d e r e s p e c t e n v e r s l e s v a l e u r s d e s j e u n e s . O n a h a b i t u é l e s j e u n e s s ' e x p r i m e r e t m a i n t e n a n t , o n l e u r d i t d e s e t a i r e e t d e c o r r e s -p o n d r e à n o s v a l e u r s c o m m e a d u l t e s . L e m a r c h é d u t r a v a i l n e l e u r d o n n e p a s l a p o s s i b i l i t é d e s ' e x p r i m e r , d e p a r t i c i p e r , d ' u t i l i s e r l e u r c r é a t i v i t é . L ' é c o l e , d e m o i n s e n m o i n s . O n - l e s - m e t d e p l u s e n p l u s e n b o î t e . L a r é p r e s s i o n d e s j e u n e s e s t d e p l u s e n p l u s g r a n d e . Q u i l e u r d o n n e r a c e t t e p l a c e ? D e p l u s e n p l u s , t o u t e s t s o u m i s à l a p r o d u c t i v i t é . L e s b e s o i n s h u m a i n s s o n t l i q u i d é s . S u r l e p l a n m a t é r i e l , l e s j e u n e s o n t p e u t - ê t r e p l u s m a i s a f f e c t i v e m e n t , l e u r s b e s o i n s s o n t é n o r m e s . D e s j e u n e s c o n t i n u e n t d e s e r e t r o u v e r d a n s l a r u e . D e s f a m i l l e s s o n t i r r é m é d i a b l e m e n t d i s l o q u é e s , o n t d é m i s s i o n n é o u s o n t d é p a s s é e s . C e s j e u n e s s o n t a u x p r i s e s a v e c d e t r è s g r o s p r o b l è m e s . I l s n ' o n t p a s d e r é f é r e n c e . C o m m e n t y , r é p o n d - o n ?

U n e p a r t i c i p a n t e r a p p e l l e q u ' e n s i t u a t i o n e x t r ê m e c o m m e u n e g u e r r e , l e s j e u n e s v i v e n t s a n s p a r e n t e t s u r v i v e n t . N ' y a u r a i t - i l p a s l i e u d ' é l a r g i r l a r e s p o n s a b i l i t é s o c i a l e d e l a p r i s e e n c h a r g e d e s e n f a n t s ? A v o i r d e s l i e u x e t d e s m o y e n s c o l l e c t i f s p o u r a i d e r l e s p a r e n t s ? C 1 e s t t o u t u n s y s t è m e é c o n o m i q u e q u i a m è n e c e s d i s l o -c a t i o n s f a m i l i a l e s e t p e r s o n n e l l e s . D e s c h a n g e m e n t s é c o n o m i q u e s , i d é o l o g i q u e s s o n t n é c e s s a i r e s . L e s n o r m e s s o n t e n c o r e i n c r o y a b l e -

5 6

m e n t f o r t e s m a i s l a r é a l i t é q u e n o u s v i v o n s e s t d i f f é r e n t e d e c e s n o r m e s . N o u s s o m m e s d i v i s é s p a r c e s c o n t r a d i c t i o n s .

M a l g r é t o u t c e l a , l e s j e u n e s s 1 e n t r a i d e n t , s e c o n f r o n t e n t , s e s o u t i e n n e n t , f o n t c o n f i a n c e p a r f o i s à l e u r p e r c e p t i o n d e s p r o b l è -m e s . I l s / e l l e s s o n t t r è s n o v a t e u r < t r i c e ) s e t c r i t i q u e s . I l s / e l l e s f o n t c o n f i a n c e à c e r t a i n s a d u l t e s d a n s l e u r s m i l i e u x .

L a s a n t é m e n t a l e d e s j e u n e s r é f è r e à d e s c o n d i t i o n s p e r s o n n e l l e s e t d e s p r o b l è m e s s o c i o - é c o n o m i q u e s , h i s t o r i q u e s e t g l o b a u x q u ' i l i m p o r t e a u j o u r d ' h u i d ' i n t e r r o g e r .

R E C O M M A N D A T I O N S :

L e s p a r t i c i p a n t ( e ) s d e l ' a t e l i e r a u c o u r s d e l a d i s c u s s i o n o n t é m i s u n c e r t a i n n o m b r e d e r e c o m m a n d a t i o n s :

P o u r s u i v r e l e t r a v a i l d ' a c c o m p a g n e m e n t s o u p l e a u p r è s d e s j e u n e s a f i n d e l e s o u t i l l e r d a n s l e u r q u ê t e d ' a u t o n o m i e , d a n s l e u r s p r i s e s d e d é c i s i o n , d a n s l e u r r é f l e x i o n e t l e u r c o m p r é h e n s i o n d e s r é a l i t é s p e r s o n n e l l e s e t c o l l e c t i v e s , d a n s l e u r r é s o l u t i o n d e p r o b l è m e s , e t c ;

D a n s n o t r e t r a v a i l d ' a c t i o n e t d ' i n t e r v e n t i o n s o c i a l e s , c o n s i d é r e r l e s b e s o i n s d e s j e u n e s e t f a i r e a p p e l à l e u r f a m i l l e p o u r l e s s o u t e n i r e n t e n a n t c o m p t e d e l a r e s p o n s a -b i l i t é f a m i l i a l e e t d e s c o n t r a i n t e s e t l i m i t e s c o n c r è t e s d e c e l l e - c i ;

D o n n e r l e s m o y e n s a u x j e u n e s d e s ' e x p é r i m e n t e r ( a c t i v i t é s p a r a s c o l a i r e s , l i e u x d ' a c t i v i t é s s t a b l e s e n d e h o r s d e l ' é c o l e : s p o r t , t h é â t r e , a t e l i e r s , e t c . ) e t r e n d r e a c c e s s i b l e s , d e s m o y e n s p o u r q u ' i l s / e l l e s p r e n n e n t l a p a r o l e s u r l e u r s r é a l i t é s ;

5 7

S e n s i b i l i s e r l e p u b l i c s u r l e s c o n s é q u e n c e s s o c i a l e s d e n o s c h o i x i n d i v i d u e l s e t c o l l e c t i f s . Q u i ç a h y p o t h è q u e ? Q u i ç a d e s s e r t ? Q u i ç a s e r t ? ;

A p p u y e r l a r e c o n n a i s s a n c e d e s o r g a n i s m e s c o m m u n a u t a i r e s a u t o n o m e s , a u Q u é b e c d o n t l e s o r g a n i s m e s c o m m u n a u t a i r e s j e u n e s s e ;

A m e n e r l e s m e n t a l i t é s à c h a n g e r p a r r a p p o r t à l a v a l e u r t r a v a i l d a n s n o t r e s o c i é t é e n m u t a t i o n ;

P r o m o u v o i r l e t r a v a i l p a r t a g é , a p p u y e r l e s r e v e n d i c a t i o n s p o u r 1 1 a l l é g e m e n t d u t e m p s d e t r a v a i l p a r s e m a i n e o u a u t r e s a l t e r n a t i v e s ;

E x i g e r u n e f o r m a t i o n a d é q u a t e d e s j e u n e s f a c e a u m a r c h é d u t r a v a i l ( r e s p o n s a b i l i t é d e l ' é c o l e e t d e s e n t r e p r i s e s ) ; d é v e l o p p e r l a r e s p o n s a b i l i t é s o c i a l e d e d o n n e r d e l ' e x p é r i e n c e d e t r a v a i l a u x j e u n e s ;

S ' a r r ê t e r , , s ' i n t é r e s s e r , é c o u t e r e t r e s p e c t e r l e s j e u n e s d a n s c e q u ' i l s / e l l e s s o n t e t r é a l i s e n t ;

F a i r e s i g n e a u x j e u n e s , à p a r t i r d e n o t r e a u t h e n t i c i t é e t l e s i n v i t e r à n o u s f a i r e s i g n e e u x a u s s i d e f a ç o n à d é v e l o p p e r d e s r e l a t i o n s s i g n i f i c a t i v e s e t i n t é r e s s a n t e s e n t r e g é n é r a t i o n s .

5 8

ATELIER - C

A n i m a t e u r : M o n s i e u r D a n i e l B o i v i n R a p p o r t e u r e : M a d a m e L u c i e L e f e b v r e

2 2 p a r t i c i p a n t s é t a i e n t p r é s e n t s à c e t a t e l i e r . L e g r o u p e é t a i t c o n s t i t u é d e q u e l q u e s p a r e n t s , d 1 i n t e r v e n a n t s d u r é s e a u e t d 1 u n e m a j o r i t é d ' i n t e r v e n a n t s c o m m u n a u t a i r e s i m p l i q u é s a u p r è s d e s j e u n e s .

A p r è s a v o i r f a i t u n b r e f r e t o u r s u r l e s e x p o s é s p r é s e n t é s l o r s d u p a n e l e n m a t i n é e a f i n d ' e n d é g a g e r l e s p r i n c i p a l e s i d é e s , l ' a n i m a -t e u r i n v i t e l e s p a r t i c i p a n t s à p o u r s u i v r e l a r é f l e x i o n s u r l e r ô l e e t l a p l a c e d e s j e u n e s , é l é m e n t s p e r ç u s c o m m e f o n d a m e n t a u x d a n s l e p r é s e n t d é b a t .

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C O N N A I T R E L A R E A L I T E D E S J E U N E S

L e c o n t a c t a v e c l e s j e u n e s n e c o n c e r n e p a s q u e l e s a c t e u r s q u i i n t e r v i e n n e n t d i r e c t e m e n t a u p r è s d ' e u x • C e u x - c i c o n n a i s s e n t l e < m e s s a g e q u e l e u r l i v r e n t l e s j e u n e s . C e t t e r é a l i t é d o i t ê t r e

<• c o n n u e p a r 1 ' e n s e m b l e d e s a d u l t e s d a n s l a s o c i é t é , n o t a m m e n t p a r c e u x q u i s o n t s o c i a l e m e n t e n p o s i t i o n d e , p o u v o i r e t d e d é c i s i o n . " N o t r e r ô l e e n t a n t q u ' i n t e r v e n a n t s , c ' e s t p e u t - ê t r e d e v u l g a r i s e r e t d e t r a n s m e t t r e l ' i n f o r m a t i o n q u e n o ù s a v o n s . N o u s d e v r i o n s a g i r c o m m e a g e n t s m u l t i p l i c a t e u r s " , i l f a u d r a i t , s e l o n c e t i n t e r v e n a n t , s o l l i c i t e r l e s t r i b u n e s d a n s d i f f é r e n t s m i l i e u x a f i n d e s e n s i b i l i -s e r .

L E B E S O I N D E C O M M U N I Q U E R

S e l o n l e p r é s i d e n t d u c o m i t é d e s b é n é f i c i a i r e s d e L o u i s - H L a f o r i -t a i n e , l a c l i e n t è l e q u i e n t r e à L o u i s - H e s t d é p l u s e n p l u s j e u n e . T o u j o u r s s e l o n c e t i n t e r v e n a n t , c e q u e c e s j e u n e s d e m a n d e n t l e p l u s , c ' e s t d ' ê t r e é c o u t é s e t c o m p r i s . M ê m e s i c e s j e u n e s o n t u n

5 9

b e s o i n d ' a p p a r t e n a n c e à u n g r o u p e d o n n é , i l s v o n t s u r t o u t l à o ù l e d i a l o g u e e s t p e r m i s e t p o s s i b l e .

L e u r p r e m i e r d r o i t , e n t a n t q u e p e r s o n n e , c ' e s t d ' ê t r e e n t e n d u e , é c o u t é e e t a c c u e i l l i e . P o u r c e f a i r e , i l f a u t l e s a c c e p t e r d a n s l e u r s d i f f é r e n c e s e t l e u r s m a r g i n a l i t é s . S i d e s j e u n e s a y a n t e u d e s p r o b l è m e s p s y c h o l o g i q u e s o n t é t é r e j e t é s a i l l e u r s , i l s r e v i e n n e n t l à o ù o n l e s a é c o u t é s . .

L A P A R T D ' A U T O N O M I E

L e s j e u n e s o n t b e s o i n d e s ' a f f i r m e r d a v a n t a g e . M a i s o n a d é v e l o p p é d e s r e s s o u r c e s e t d e s s t r u c t u r e s p o u r l e s p r o t é g e r a u l i e u d e l e s a i d e r à - s ' o r g a n i s e r a f i n q u ' i l s t r o u v e n t e u x - m ê m e s l e s s o l u t i o n s q u i l e u r c o n v i e n n e n t . C e s s t r u c t u r e s m a i n t i e n n e n t l e s j e u n e s d a n s u n e s i t u a t i o n p r é c a i r e , q u i l a i s s e p e u d e p l a c e à l a p r i s e e n c h a r g e .

L E S R A P P O R T S D E P O U V O I R A D U L T E S / J E U N E S

L e s a d u l t e s e n t r e t i e n n e n t d e s r a p p o r t s s o c i a u x d e d o m i n a t i o n e n v e r s l e s j e u n e s s o u s p r é t e x t e d e " v o u l o i r l e u r b i e n " . C e s r a p p o r t s s e c o n s t i t u e n t s u r d e u x a x e s : o n l e s p r e n d e n p i t i é o ù o n l e s i n f a n t i l i s e p o u r q u ' e n t a n t q u ' a d u l t e , o n p u i s s e l e u r m o n t r e r l e c h e m i n . I l e s t a i n s i t r è s c o n f o r t a b l e p o u r l e s a d u l t e s d ' a v o i r d u p o u v o i r é c o n o m i q u e , p o l i t i q u e , e t c . . . . , e t d e l ' e x p é r i e n c e . C ' e s t d ' a i l l e u r s à t r a v e r s c e p o u v o i r e t e n r é f é r e n c e à l e u r s e x p é r i e n c e s q u ' i l s é t a b l i s s e n t l e u r s r a p p o r t s a u x j e u n e s . M Q u ' i l s c o m m e n c e n t a u b a s d e l ' é c h e l l e , c o m m e n o u s l ' a v o n s f a i t . " O n l e s s u r - p r o t è g e e t d é c i d e p o u r e u x o u o n l e s j a l o u s e s ' i l s s o n t d i f f é r e n t s e t n e p a s s e n t . p a s p a r l e s m ê m e s c h e m i n s q u e n o u s .

" N ' y a u r a i t - i l p a s . u n e a u t r e f a ç o n d ' e n t r e t e n i r d e s r a p p o r t s s o c i a u x a v e c l e s j e u n e s ? " s e d e m a n d e u n e i n t e r v e n a n t e . E n t r e c e s d e u x p ô l e s p e u t - ê t r e e x i s t e - t - i l l ' e s p a c e n é c e s s a i r e p o u r l a i s s e r v i v r e e t l a i s s e r ê t r e .

6 0

L e c o n t e x t e a c t u e l d a n s l e q u e l v i v e n t l é s j e u n e s e s t d i f f é r e n t . N o t r e s o c i é t é e s t e n p l e i n e t r a n s f o r m a t i o n e t e n p l e i n b o u l e v e r s e -m e n t . L e c h a n g e m e n t n e r é s i d e p a s t a n t d a n s l a f a m i l l e é c l a t é e m a i s s u r t o u t à d ' a u t r e s n i v e a u x t e l s l a r é o r g a n i s a t i o n d u t r a v a i l . C ' e s t t o u t l e c o n t e x t e e n v i r o n n e m e n t a l q u i e n g e n d r e d e s p r o b l è m e s d ' o r d r e s o c i a l e t p s y c h o l o g i q u e . L a s a n t é m e n t a l e d e s j e u n e s d o i t ê t r e r a m e n é e a u x n o r m e s e t v a l e u r s e x i s t a n t e s , e t d u m ê m e j e t , c e l l e d e s a d u l t e s . " S i n o u s s a v o n s q u i n o u s s o m m e s e t c e q u e n o u s v o u l o n s , p e u t - ê t r e p o u r r o n s - n o u s d e v e n i r d e s a d u l t e s ' s i g n i f i c a -t i f s . "

E n r é a c t i o n à c e t y p e d ' i n t e r v e n t i o n , d ' a u t r e s i n t e r v e n a n t s s e d e m a n d e n t s i a u f o n d , l e s j e u n e s n e t e n d e n t p a s a u x m ê m e s a s p i r a -t i o n s q u e c e l l e s d e s g é n é r a t i o n s p r é c é d e n t e s : v i e a f f e c t i v e , s é c u r i t é , t r a v a i l , e t c . A i n s i , l a r u p t u r e n ' e s t p a s s i f o r t e . L a f a ç o n d ' e x p r i m e r c e s d é s i r s e s t p e u t - ê t r e d i f f é r e n t e , i l n ' y a p l u s d e 1 i e u d ' e x p r e s s i o n c o l l e c t i v e . L a v i o l e n c e , l e r e p l i s u r s o i , l e f a i t d e d é c r o c h e r , l e s i l e n c e , s o n t p r o b a b l e m e n t d ' u l t i m e s m o y e n s d ' e x p r e s s i o n s f a c e a u " n o f u t u r e " • C e q u e l e s j e u n e s v e u l e n t s u r t o u t c ' e s t q u ' o n l e u r l a i s s e l e u r p l a c e .

P R E N D R E S A P L A C E D A N S L E C O N T E X T E A C T U E L

P r e n d r e s a p l a c e , c e l a n e s e m b l e p a s f a c i l e m e n t r é a l i s a b l e s e l o n u n e j e u n e p a r t i c i p a n t e q u i d é n o n c e l e s d i f f i c u l t é s é p r o u v é e s e n s i t u a t i o n d e r e c h e r c h e d ' e m p l o i • S e l o n e l l e , l e s j e u n e s d o i v e n t s e c o n f o r m e r à d e s p r o g r a m m e s d ' e m p l o i s g o u v e r n e m e n t a u x a u x q u e l s i l s d o i v e n t r é p o n d r e . " N o s c o m p é t e n c e s n e s u f f i s e n t p a s à l ' e m b a u c h e ; c e q u i c o m p t e c ' e s t n o t r e é l i g i b i l i t é à t e l t y p e d e p r o g r a m m e , s e l o n n o t r e s t a t u t , n o t r e t e m p s d e c h ô m a g e , . . . I l s ' a g i t d e c o r r e s p o n d r e a u b o n p r o g r a m m e a u b o n m o m e n t p o u r a c c é d e r à u n e m p l o i , d ' a i l l e u r s o c c a s i o n n e l . "

A c e t t e i n t e r v e n t i o n , u n e a g e n t e d e m a i n - d ' o e u v r e d ' u n g r o u p e c o m m u n a u t a i r e c o n f i r m e c e t t e s i t u a t i o n e n a j o u t a n t q u 1 i l e s t d i f f i c i l e d e r é p o n d r e a u x a t t e n t e s d e s j e u n e s e n m a t i è r e d ' e m p l o i , n o t a m m e n t l o r s q u ' i l s ' a g i t d ' i n t e r v e n i r a u p r è s d e d é c r o c h e u r s ; l e s

6 1

d e m a n d e s e t l e s b e s o i n s s o n t n o m b r e u x e t u r g e n t s m a i s l e s o u v e r -t u r e s r e s t r e i n t e s .

C e q u ' i l f a u t t r a v a i l l e r a v e c l e s j e u n e s s a n s e m p l o i e t v i v a n t d a n s l a p a u v r e t é , c ' e s t l a c u l p a b i l i t é e t l a h o n t e d e l e u r s i t u a t i o n , d e r a j o u t e r u n t r a v a i l l e u r c o m m u n a u t a i r e . I l f a u t i n f o r m e r e t c o n s c i e n t i s e r l e s p r i n c i p a u x c o n c e r n é s a f i n d e d é m y s t i f i e r d e s r é a l i t é s e t d e r e l a t i v i s e r c e r t a i n s c a d r e s d e r é f é r e n c e i n t é g r é s , p a r l e s j e u n e s . " A u f o n d , q u ' e s t - c e q u e ç a p e u t b i e n f a i r e , s i u n j e u n e v i t c h e z s e s p a r e n t s à 2 2 a n s ? "

C O N C L U S I O N

" I l f a u t p o u r c o m p r e n d r e e t i n t e r v e n i r a d é q u a t e m e n t , a l l e r a u d e l à d u p r o b l è m e v é c u p a r l e s j e u n e s . L ' e n j e u r é s i d e d a n s n o t r e p r o p r e q u e s t i o n n e m e n t c o m m e s o c i é t é . "

P I S T E S D ' A C T I O N

A c e s t a d e - c i d e l ' a t e l i e r , l ' a n i m a t e u r i n v i t e l e s p a r t i c i p a n t s à r é f l é c h i r s u r d e s r e c o m m a n d a t i o n s c o n c r è t e s q u i p o u r r a i e n t s o l u t i o n n e r l e p r o b l è m e .

L e s r e c o m m a n d a t i o n s é m i s e s p a r l e s p a r t i c i p a n t s . c o n c e r n e n t s u r t o u t l ' i m p o r t a n c e d e d i f f u s e r 1 ' i n f o r m a t i o n :

F a v o r i s e r e t m a i n t e n i r l e d i a l o g u e a v e c l e s j e u n e s ;

C o n t i n u e r à s e c o n s c i e n t i s e r a u x p r o b l è m e s v é c u s p a r l e s j e u n e s p o u r n e p a s e n t r e t e n i r 1 ' i g n o r a n c e , p u i s q u e l o r s q u 1 o n a l ' i n f o r m a t i o n n é c e s s a i r e , o n p e u t v r a i m e n t i n t e r v e n i r ;

D i f f u s e r l ' i n f o r m a t i o n r e ç u e , a u p r è s d e l a p o p u l a t i o n " a t l a r g e " p u i s q u e l e p r o b l è m e c o n c e r n e l ' e n s e m b l e d e l a s o c i é t é -p o u r c e f a i r e , i l f a u t s o l l i e i t e r l e p l u s g r a n d n o m b r e d e t r i b u n e s ;

6 2

D é v e l o p p e r e t s u p p o r t e r d i f f é r e n t e s f o r m e s d ' e n t r a i d e e t d e p r i s e e n c h a r g e p a r l e b i a i s d e g r o u p e s p o p u l a i r e s e t c o m m u n a u t a i r e s e t m i s e r s u r l e u r c o m p l é m e n t a r i t é .

S u i t e à c e s q u e l q u e s r e c o m m a n d a t i o n s , l e s p a r t i c i p a n t s c o n v i e n n e n t d a n s 1 1 e n s e m b l e , q u e l a v é r i t a b l e s o l u t i o n r e p o s e s u r 1 1 a c t i o n p o l i t i q u e . B i e n q u ' o n s ' e n t e n d e à f a v o r i s e r c e t t e o p t i o n , o n c o n v i e n t c e p e n d a n t q u ' i l e s t d e p l u s e n p l u s d i f f i c i l e d e m e n e r d e s l u t t e s p o l i t i q u e s p u i s q u ' à 1 1 i n t é r i e u r d e s g r o u p e s , o n e s t d é j à d é b o r d é a v e c l e s s e r v i c e s à o f f r i r , 1 1 a u t o - f i n a n c e m e n t , l a f o r m a t i o n , e t c • L a c o n c e r t a t i o n d e v i e n t a u s s i d e p l u s e n p l u s d i f f i c i l e s u r t o u t a v e c l a d é c e n t r a l i s a t i o n . " O u t u a s l ' e s p a c e p o u r r e v e n d i q u e r m a i s t u n ' a s p a s l e t e m p s , o u t ' a s l e t e m p s m a i s p a s l ' e s p a c e . " Q u o i q u ' i l e n s o i t , i l f a u t d é n o n c e r d e s c o n d i t i o n s g é n é r a t r i c e s d e p r o b l è m e s d e s a n t é m e n t a l e , e t l a p r e s s i o n a v e c l e t e m p s p o r t e r a f r u i t .

S i l e s m o y e n s d ' a c t i o n s s o n t d i f f i c i l e m e n t a p p l i c a b l e s à 1 ' i n t é -r i e u r d u s y s t è m e , l a s o l u t i o n r e p o s e p e u t - ê t r e à l e c o n t o u r n e r e t à b â t i r d e f a ç o n p a r a l l è l e e t a l t e r n a t i v e .

6 3

ATELIER - D

A n i m a t r i c e : M a d a m e D a n i e l l e F o u r n i e r R a p p o r t e u r e : M a d a m e S y l v i e C a m e r o n

L e g r o u p e c o m p o r t a i t a u - d e l à d ' u n e v i n g t a i n e d e p a r t i c i p a n t < e ) s r e p r é s e n t a n t m a j o r i t a i r e m e n t l e m i l i e u u n i v e r s i t a i r e ( é t u d i a n t s e t p r o f e s s e u r s ) e t l e r é s e a u s u i v i s p a r l e s r e s s o u r c e s a l t e r n a t i v e s e t l e s o r g a n i s m e s J e u n e s s e .

L A R E A L I T E D E S J E O N E S : U N E R E A L I T E D I F F I C I L E A V I V R E

E n r e g a r d a n t l a r é a l i t é d e s j e u n e s , o n s ' a p e r ç o i t q u e c e u x - c i v i v e n t c e q u e l a s o c i é t é v i t e l l e - m ê m e . E n f a i t , l a p r o b l é m a t i q u e d e l a j e u n e s s e e s t e n g e n d r é e p a r u n e s o c i é t é " m a l a d e " , u n e s o c i é t é " s c h i z o p h r é n i q u e " , u n e s o c i é t é q u i é c l a t e d a n s t o u t e s s e s d i m e n -s i o n s . S i o n d i t q u e l e s j e u n e s s o n t h y p o t h é q u é s , c ' e s t q u e l a s o c i é t é h y p o t h è q u e l a j e u n e s s e . D ' a i l l e u r s , p l u s i e u r s f a c t e u r s p r é s e n t s d a n s l ' e n v i r o n n e m e n t d e s j e u n e s l e s a m è n e n t à v i v r e u n e r é a l i t é t r è s d i f f é r e n t e d e l a r é a l i t é q u e n o u s a v o n s v é c u e l o r s q u e n o u s é t i o n s d e s a d o l e s c e n t ( e ) s .

L e s j e u n e s d ' a u j o u r d ' h u i d o i v e n t " d e a l e r " a v e c p l u s i e u r s s i t u a t i o n s e n m ê m e t e m p s e t i l s s o n t s e u l s à l e s a f f r o n t e r . T o u t : d ' a b o r d , l e s v a l e u r s t r a d i t i o n n e l l e s s e m o d i f i e n t à u n r y t h m e a l a r m a n t .

D a n s u n p r e m i e r t e m p s , c ' e s t l a f a m i l l e q u i é c l a t e , e t t o u s l e s r a p p o r t s a f f e c t i f s q u i l u i s o n t i n t r i n s è q u e s . P o u r l e s a d o l e s c e n t s d o n t l e s p a r e n t s d i v o r c e n t , c e t t e s i t u a t i o n e s t t r è s d i f f i c i l e , v o i r e m ê m e p é n i b l e à v i v r e p o u r c e r t a i n s . A y a n t t r è s p e u d e s u p p o r t l o r s d e c e t t e t r a n s i t i o n , i l s n e p e u v e n t e x p r i m e r l e u r s s e n t i m e n t s , l e u r s m a l a i s e s , e t c .

6 4

D a n s u n d e u x i è m e t e m p s , l e s j e u n e s o n t d e p l u s e n p l u s d e d i f f i -c u l t é à t r o u v e r d e s l i e n s s i g n i f i c a t i f s a v e c d e s g e n s e t p l u s p a r t i c u l i è r e m e n t a v e c l e s a d u l t e s . L ' a b s e n c e d e l i e n s s e m b l a b l e s l e s a m è n e n t à c h e r c h e r d e s e s p a c e s o ù i l s s e s e n t i r o n t a i m é s e t v a l o r i s é s . A t i t r e d ' e x e m p l e , l e s j e u n e s f i l l e s q u i s o n t h é b e r g é e s à u n c e r t a i n c e n t r e o n t é t é t e l l e m e n t c a r e n c é e s a f f e c t i v e m e n t , q u ' e l l e s o n t u n t r è s g r a n d b e s o i n d ' ê t r e " b e r c é e s " e t " m a t e r n é e s " . D e m ê m e , u n j e u n e a r é v é l é q u e l e s e u l l i e n a f f e c t i f q u ' i l a v a i t d é v e l o p p é é t a i t c e l u i a v e c u n p e t i t c h i e n . E n c e s e n s , i l e s t i m p o r t a n t d e c o m p r e n d r e q u e l a p r o s t i t u t i o n c h e z l e s j e u n e s r e p r é s e n t e l a q u ê t e d e c e s l i e n s q u i m a n q u e n t d a n s l e u r v i e .

D a n s u n t r o i s i è m e t e m p s , l a r é a l i t é d e s j e u n e s d o i t a u s s i ê t r e a s s o c i é e à u n c o n t e x t e s o c i o - é c o n o m i q u e d e p l u s e n p l u s p r é c a i r e , q u i f a v o r i s e u n e m i n o r i t é d ' i n d i v i d u s e t d é f a v o r i s e l a m a j o r i t é . L o r s q u e l ' o n r e g a r d e p l u s s p é c i f i q u e m e n t l e s t r a n s f o r m a t i o n s r e l i é e s a u m a r c h é d u t r a v a i l , o n s ' a p e r ç o i t q u e l e s p l a c e s o f f e r t e s a u x j e u n e s s o n t n o n s e u l e m e n t r e s t r e i n t e s , m a i s c e l l e s q u i s o n t d i s p o n i b l e s n ' a s s u r e n t a u c u n e s é c u r i t é é c o n o m i q u e e t s o n t t r è s p e u v a l o r i s a n t e s .

P a r a i l l e u r s , l e s m a s s - m é d i a s v é h i c u l e n t d e s i m a g e s d e r i c h e s s e s p a r l e b i a i s d ' é m i s s i o n s t e l l e s q u e " D a l a s " . L e s j e u n e s é t a n t d e g r a n d s " c o n s o m m a t e u r s d e t é l é " , i l s s o n t c o n f r o n t é s à d e s r é a l i t é s d é m e s u r é e s , q u i n e s e r o n t j a m a i s l e s l e u r s . C o m m e n t p e u v e n t - i l s s e t r o u v e r d e s r a c i n e s e t u n e c u l t u r e b i e n à e u x ?

P a r a d o x a l e m e n t , l e m o n d e d e s a d u l t e s e t l a s o c i é t é d e m a n d e n t t r è s f o r t e m e n t a u x j e u n e s d e p e r f o r m e r , d ' e x c e l l e r , e t d ' ê t r e p r o d u c t i f s d a n s t o u t e s l e s d é m a r c h e s q u ' i l s e n t r e p r e n n e n t . S i u n j e u n e r é u s s i m o y e n n e m e n t , i l p e r d l a c o u r s e . E t s ' i l p e r d , l e s y s t è m e m é r i t o -c r a t i q u e l e d é c l a s s e . C e l a e n t r a î n e b e a u c o u p d e p r e s s i o n s c h e z l e s j e u n e s . C e r t a i n s s e s e n t e n t i n c a p a b l e s d e r é p o n d r e à c e s n o u v e l l e s n o r m e s s o c i a l e s d e p e r f o r m a n c e e t d e p r o d u c t i v i t é , t a n d i s q u e d ' a u t r e s n ' y s o n t p a s i n t é r e s s é s .

C e p e n d a n t , q u e l l e q u e s o i t l a r é a c t i o n d e s j e u n e s f a c e à c e s n o r m e s , u n a s p e c t e s s e n t i e l d e m e u r e : l a s o c i é t é s e r e f u s e à c r é e r

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d e s c o n d i t i o n s f a v o r a b l e s a f i n d e l e s a i d e r . Q u e v a l e n t l e s b e a u x d i s c o u r s é l e c t o r a u x l o r s q u ' a u c u n e d é m a r c h e c o n c r è t e n 1 e s t e n t r e -p r i s e p o u r q u e l a j e u n e s s e p u i s s e s e t r o u v e r u n e p l a c e s i g n i f i -c a t i v e d a n s l a s o c i é t é , p o u r q u ' e l l e p u i s s e s e p r o j e t e r d a n s 1 1 a v e n i r s a n s e n a v o i r p e u r ? . . . U n a v e n i r q u i j u s q u ' à p r é s e n t s i g n i f i e p o u r e l l e " l ' i n s é c u r i t é p e r m a n e n t e " .

N o u s p o u v o n s a u s s i ê t r e à ' 1 ' a f f û t d u d i s c o u r s o f f i c i e l q u i . i d e n t i f i e t o u s l e s j e u n e s a v e c l a m ê m e é t i q u e t t e . C ' e s t d ' a i l l e u r s l a s e u l e s o l u t i o n q u e l a s o c i é t é a t r o u v é e a f i n d e r é s o u d r e l a " p r o b l é m a t i q u e d e l a j e u n e s s e " . C o m m e s i t o u s l e s j e u n e s d e 0 à 3 0 a n s v i v a i e n t l e s m ê m e s p r o b l è m e s !

E n f a i t , l a r é a l i t é s e t r a d u i t t o u t a u t r e m e n t . E n e f f e t , l e s j e u n e s n e v i v e n t p a s l e s m ê m e s p r o b l è m e s p a r c e q u ' i l s n ' o n t p a s l e m ê m e â g e , n i l e s m ê m e s e x p é r i e n c e s . D e p l u s , c h a c u n r é a g i t à s a f a ç o n e t s ' a d a p t e à s a f a ç o n . C ' e s t p o u r q u o i i l f a u t d i s s o c i e r l e " p r o b l è m e d e l a j e u n e s s e " , d e s j e u n e s q u i v i v e n t d e s c o n f 1 i t s i n t é r i e u r s , d e l a t r è s g r a n d e t r i s t e s s e e t d e l a c u l p a b i l i t é .

U n e d e s p l u s g r a n d e s " e r r e u r s " d e l a s o c i é t é , c ' e s t q u ' e l l e " p a t h o l o g i s e " l e j e u n e i n d i v i d u e l l e m e n t e h u t i l i s a n t l a p s y c h i a t r i e s p é c i a l i s é e . E n f a i t , c e t t e f o r m e d e p s y c h i a t r i e a p p o s e d è s é t i q u e t t e s e n i n t e r p r é t a n t d e " f a ç o n p a t h o l o g i q u e " l e s p r o b l è m e s d e s j e u n e s . C e s i n t e r p r é t a t i o n s f o n t e n s o r t e q u ' i l s d e v i e n n e n t l e s s e u l s r e s p o n s a b l e s d e l e u r s i t u a t i o n .

P a r e x e m p l e , l e p h é n o m è n e d u s u i c i d e c h e z l e s j e u n e s p r e n d b e a u c o u p d ' a m p l e u r , . S e l o n u n e a n a l y s e i n d i v i d u a l i s é e , l e c o m p o r t e m e n t s u i c i d a i r e e s t c o n s i d é r é c o m m e é t a n t " p a t h o l o g i q u e " . C e p e n d a n t , i l p e u t a u s s i s ' e x p l i q u e r p a r u n m a n q u e d e p o i n t s d e r e p è r e , d ' a t t a -c h e s s o l i d e s e t i d e n t i f i a b l e s . E n c e s e n s , l e s u i c i d e t r a d u i t u n p r o b l è m e a f f e c t i f q u i e s t r e l i é l u i - m ê m e à u n e i d e n t i t é q u e l e j e u n e n ' a r r i v e p a s à t r o u v e r .

D ' a u t r e p a r t , l e s u i c i d e a p p a r a î t s o u s d i f f é r e n t e s f o r m e s . P a r e x e m p l e , l o r s q u ' u n j e u n e h o m m e d e 1 8 a n s m e n t i o n n e q u ' i l v o u d r a i t " ê t r e e n c o r e u n p ' t i t e n f a n t " o u l o r s q u ' u n e b a n d e d ' a m i s d i s e n t

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v o u l o i r s e s u i c i d e r e t q u e c h a c u n p a s s e à l ' a c t e , c e t t e r é a l i t é e s t t r è s i n q u i é t a n t e . C e p e n d a n t , i l f a u t c e s s e r d e m e t t r e d e s é t i q u e t t e s . I l v a u t m i e u x i d e n t i f i e r l e s c a u s e s d e c e p h é n o m è n e à u n m a n q u e d ' e s p a c e , d e p l a c e , à l ' i m p o s s i b i l i t é d e s e c r é e r d è s 1 i e n s s i g n i f i c a t i f s a v e c d ' a u t r e s i n d i v i d u s .

S ' i l e s t v r a i d e d i r e q u e l e s d i f f i c u l t é s d e s j e u n e s s o n t t r è s l o u r d e s e t t r è s d é p r i m a n t e s , l a s o l u t i o n n ' e s t p a s c e l l e d e d é c i d e r p o u r l e s j e u n e s o u e n c o r e d e f r a g m e n t e r e n s o u s - c a t é g o r i e s s o c i a l e s ( 1 8 - 3 0 ; 2 4 - 3 0 ; 0 - 3 0 ) , l a j e u n e s s e . A • c e t e f f e t , q u e d i r e d e l ' é v o l u t i o n d u v o c a b u l a i r e p o u r e x p l i q u ë r l e s r é a l i t é s d e s j e u n e s . P a r e x e m p l e , l a s o c i é t é a b a p t i s é d i f f é r e m m e n t 1 ' i t i n é r a n c e d e s j e u n e s , p a r l e s e x p r e s s i o n s s u i v a n t e s : j e u n e s i t i n é r a n t s , j e u n e s s a n s - a b r i , e t c . C e v o c a b u l a i r e e n t r a î n e t o u j o u r s l a p r é s e n c e d ' u n e , é t i q u e t t e . L e m ê m e p r o c e s s u s s e p r o d u i t l o r s q u e 1 ' o n p a r l e d e s j e u n e s s a n s e m p l o i , c o m m e s i l e s j e u n e s n e v o u l a i e n t p a s t r a v a i l l e r . E n f a i t , c e s o n t t o u t e s c e s é t i q u e t t e s q u i l e s r e n d e n t m a r g i n a u x e t q u i l e s " p a t h o l o g i s e n t " .

F a c e a u x d i f f é r e n t s a s p e c t s q u i c o m p o s e n t l a r é a l i t é d e s j e u n e s , p l u s i e u r s s o l u t i o n s p e u v e n t ê t r e é l a b o r é e s . I l s ' a g i t t o u t s i m p l e m e n t d ' ê t r e i n n o v a t e u r d a n s l ' i n t e r v e n t i o n a u p r è s d e s j e u n e s .

PISTES DE SOLUTIONS

Relatives à l'intervention auprès des jeunes

D a n s u n p r e m i e r t e m p s , i l s e r a i t t r è s p e r t i n e n t d e d o n n e r l a p a r o l e a u x j e u n e s e u x - m ê m e s . P a r e x e m p l e , l o r s q u e d a n s u n c o l l o q u e c o m m e c e l u i - c i d e s i n t e r v e n a n t s d i s c u t e n t s u r l a r é a l i t é d e s j e u n e s , p o u r q u o i n e p a s o u v r i r n o s p o r t e s à c e s d e r n i e r s p o u r q u ' i l s p u i s s e n t v e n i r e x p r i m e r l e u r p e r c e p t i o n d e l e u r r é a l i t é . P a r l a s u i t e , i l p o u r r a i t y a v o i r c o n f r o n t a t i o n d e s d e u x p e r c e p t i o n s a f i n d ' e n r i c h i r l a c o m p r é h e n s i o n d e , l a r é a l i t é d e s j e u n e s . T o u t c o m p t e f a i t , n o u s p o u v o n s é m e t t r e p l u s i e u r s h y p o t h è s e s p o u r a n a l y s e r l a

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r é a l i t é d e s j e u n e s m a i s q u e v a l e n t - e l l e s l o r s q u e n o u s n e p o u v o n s l e s v é r i f i e r a v e c l e s p e r s o n n e s q u i s o n t c o n c e r n é e s d i r e c t e m e n t ? !

U n e d e u x i è m e s o l u t i o n s e r a i t d e t r a v a i l l e r a v e c l e s j e u n e s . D é j à d e s o r g a n i s m e s p o s s è d e n t u n e p h i l o s o p h i e p a r t i c u l i è r e a f i n d e r é t a b l i r l e s l i e n s s i g n i f i c a t i f s e n t r e l e s j e u n e s e t l e s a d u l t e s . U n e a p p r o c h e d e c o m m u n i c a t i o n à t r a v e r s l a q u e l l e l e s r e l a t i o n s h u m a i n e s s o n t f o n d é e s s u r l e r e s p e c t d e l ' a u t r e e s t e s s e n t i e l l e , c a r c e b e s o i n e s t n o n s e u l e m e n t r é e l , m a i s f o n d a m e n t a l .

A t i t r e d ' e x e m p l e , l a M a i s o n S t - J a c q u e s e s s a i e d ' é t a b l i r u n r a p p o r t é g a l i t a i r e e n t r e l e j e u n e e t l ' i n t e r v e n a n t . A c e t é g a r d , i l e s t i m p o r t a n t d ' a v o i r e n t ê t e q u e c e r a p p o r t d o i t ê t r e c o n t i n u e t c o n s t a n t . L ' o b j e c t i f p r i n c i p a l é t a n t d e : r e d o n n e r l ' e s p o i r a u j e u n e a f i n q u ' i l p u i s s e r e p r e n d r e d u p o u v o i r s u r s a v i e q u o t i d i e n n e .

M a i s c o m m e n t p e u v e n t s e t r a d u i r e c e s p r i n c i p e s ?

D ' u n e p a r t , i l s e r a i t t r è s p e r t i n e n t e t e s s e n t i e l d e r e d é f i n i r a v e c l e j e u n e l a s i g n i f i c a t i o n d u m o t " é c h e c " . S i c e r t a i n s j e u n e s o n t p e u r d e s ' e n g a g e r d a n s c e r t a i n e s d é m a r c h e s o u d e c o n t i n u e r c e l l e s -c i , c ' e s t q u ' i l s a p p r é h e n d e n t l ' é c h e c . A y a n t v é c u p l u s d ' e x p é r i e n -c e s n é g a t i v e s q u e p o s i t i v e s , c e c i a u n i m p a c t s u r l a p e r c e p t i o n q u ' i l s o n t d e l e u r s c a p a c i t é s • U n e s o l u t i o n s e r a i t d e r e s p e c t e r , l e u r r y t h m e d ' a p p r e n t i s s a g e e t l e u r é v o l u t i o n à t r a v e r s l e s d é m a r c h e s q u ' i l s c h o i s i s s e n t d e f a i r e . D ' a u t r e p a r t , i l e s t e s s e n t i e l d ' a t t e i n d r e l e j e u n e d a n s s o n m i l i e u d e v i e . A l ' i n t é r i e u r d e c e c o n t e x t e , i l e s t b e a u c o u p p l u s f a c i l e d ' é t a b l i r d e s 1 i e n s d e c o n f i a n c e a v e c l e s j e u n e s c e q u i d i f f è r e d e s s t r u c t u r e s r i g i d e s q u e l ' o n r e t r o u v e d a n s l ' i n t e r v e n t i o n t r a d i t i o n n e l l e .

D è s c e m o m e n t , i l f a u t c h e r c h e r à f a i r e é m e r g e r l e p o t e n t i e l q u e l e j e u n e p o s s è d e e t q u ' i l e s t e n m e s u r e d ' e x p l o i t e r . L ' é t i q u e t a g e f a i t e n s o r t e q u e l ' o n p e r ç o i t u n j e u n e s e u l e m e n t e n f o n c t i o n d ' u n p r o b l è m e . q u i a é t é i d e n t i f i é c h e z l u i . I l e s t r i d i c u l e d e r é d u i r e l ' i d e n t i t é d ' u n j e u n e a u l x ) p r o b l è m e ( s ) q u ' i l a v é c u ( s ) . P a r

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e x e m p l e , u n e f i l l e a y a n t v é c u l ' i n c e s t e e s t u n e p e r s o n n e q u i a d e s h a b i l e t é s , d e s q u a l i t é s , d e s i n t é r ê t s .

A u n c e r t a i n c e n t r e , l e s f i l l e s d é v e l o p p e n t b e a u c o u p d e s u p p o r t e n t r e e l l e s e t l e m i l i e u d e v i e e s t p e r ç u p a r c e s d e r n i è r e s c o m m e u n m i l i e u f a m i l i a l e t n o n p a s c o m m e u n c e n t r e d ' a c c u e i l . D è s l o r s , u n e d i m e n s i o n d e v r a i t t o u j o u r s ê t r e p r é s e n t e : a m e n e r l e j e u n e à t r o u v e r s e s p r o p r e s s o l u t i o n s p o u r q u ' i l p u i s s e s e c r é e r u n e p l a c e s i g n i f i c a t i v e , v o i r e m ê m e u n l i e u o u u n g r o u p e d ' a p p a r t e n a n c e .

Relatives a 1'intervention auprès des gouvernements

P u i s q u e n o u s s o m m e s d e s i n t e r v e n a n t ( e ) s q u i s e c o n c e r t e n t , n o u s d e v o n s a u s s i r e v e n d i q u e r p l u s i e u r s c h o s e s a u p r è s d e s g o u v e r n e -m e n t s .

P r e m i è r e m e n t , l e s a r g e n t s n é c e s s a i r e s a f i n q u e s e p r o l o n g e n t n o s m a n d a t s a u p r è s d e s j e u n e s , e n t e n a n t c o m p t e d e s d a n g e r s d e l a " r é c u p é r a t i o n é t a t i q u e " . P u i s q u e n o u s a v o n s i l l u s t r é q u e l a j e u n e s s e n ' e s t p a s u n e r é a l i t é h o m o g è n e , l e s r e s s o u r c e s d o i v e n t ê t r e d i f f é r e n t e s e n f o n c t i o n d e l e u r s b e s o i n s . C ' e s t p o u r q u o i l e p l u r a l i s m e d e s r e s s o u r c e s e x i s t a n t e s d o i t ê t r e s a u v e g a r d é . C e p e n d a n t , i l f a u t n o u s p r é p a r e r à l u t t e r a f i n q u e l e s g o u v e r n e -m e n t s r e c o n n a i s s e n t n o s f o r m e s d ' i n t e r v e n t i o n s q u i d i f f è r e n t d e l ' i n t e r v e n t i o n s p é c i a l i s é e . A c e t e f f e t , n o u s d e v o n s t r a v a i l l e r à l a r e c o n n a i s s a n c e d u p l u r a l i s m e e t d e l a c r é a t i v i t é .

N o u s d e v o n s a u s s i ê t r e v i g i l a n t s f a c e a u d i s c o u r s d e l a p r é v e n t i o n . 1 1 e s t c e r t a i n q u e l a p r é v e n t i o n c o m m e f o r m e d ' i n t e r v e n t i o n p e u t s e m b l e r t r è s i n t é r e s s a n t e , t o u t e f o i s n o u s d e v o n s c o n n a î t r e l e s v a l e u r s , l e s m o y e n s e t l e s m é c a n i s m e s d e c o n t r ô l e q u i s o n t m i s d e l ' a v a n t . S i l a p r é v e n t i o n e s t s y n o n y m e d e c o n t r ô l e , i l v a u t m i e u x s ' e n é l o i g n e r . L a p r é v e n t i o n e s t a v a n t t o u t u n e q u e s t i o n d ' a t t i t u -d e s e t d e m o y e n s d ' i n t e r v e n t i o n n o u v e a u x q u i l a i s s e n t d e l a p l a c e à l a j e u n e s s e .

6 9

Relatives a la revendication de droits sociaux

I l e s t n é c e s s a i r e d e f a i r e d e s r e v e n d i c a t i o n s p o u r l e s b e s o i n s d e b a s e q u i n e s o n t p a s c o m b l é s c h e z l e s j e u n e s . E t a n t d o n n é " l ' é t a t d e d é s o r g a n i s a t i o n d e s j e u n e s " , n o u s d e v o n s t r a v a i l l e r à p l u s i e u r s n i v e a u x . L e l o g e m e n t , t o u t c o m m e l e t r a v a i l , n e s o n t p a s d e s p r i v i l è g e s m a i s d e s d r o i t s s o c i a u x e s s e n t i e l s .

E n f a i t , i l s ' a g i t d e s e b a t t r e p o u r u n e m e i l l e u r e q u a l i t é d e v i e p o u r 1 ' e n s e m b l e d e s c i t o y e n s e t n e p a s o u b l i e r q u e l e s j e u n e s r e p r é s e n t e n t u n d e s g r o u p e s s o c i a u x q u i v i t d e s d i f f i c u l t é s c o m m e d ' a u t r e s g r o u p e s s o c i a u x q u i s o n t m a r g i n a l i s é s . E n c e s e n s , s i n o u s n e s o m m e s p a s r e s p o n s a b l e s d e s p r o b l é m a t i q u e s s o c i a l e s q u e p e u v e n t v i v r e c e s g r o u p e s , n o u s d e v o n s n o u s s e n t i r c o n c e r n é s p a r d e t e l l e s r é a l i t é s .

7 0

ATELIER - E

A n i m a t r i c e : M a d a m e J o c e l y n e V a i l l a n t R a p p o r t e u r e : M a d a m e L o u i s e B é r u b é

L e g r o u p e é t a i t f o r m é d ' u n e v i n g t a i n e d e p e r s o n n e s . L a c o m p o s i t i o n e n é t a i t t r è s d i v e r s i f i é e e t l e s i n t e r v e n a n t s h o r s r é s e a u é t a i e n t l a r g e m e n t r e p r é s e n t é s • C e u x - c i o e u v r a i e n t , s o i t a u n i v e a u d e l ' o r i e n t a t i o n d e s j e u n e s v e r s l e m a r c h é d u t r a v a i l , s o i t a u n i v e a u d e l ' h é b e r g e m e n t , d e s m a i s o n s d e j e u n e s o u d e s g r o u p e s d ' e n t r a i d e . Q u e l q u ' u n s é t a i e n t e n g a g é s d a n s u n p r o j e t d e c o o r d i n a t i o n r é g i o n a l e d e s r e s s o u r c e s c o m m u n a u t a i r e s p o u r l e s j e u n e s . E n f i n , q u e l q u e s -u n s p r o v e n a i e n t d ' o r g a n i s m e s d u r é s e a u , t e l s C L S C e t h ô p i t a u x .

P O I N T D E D E P A R T D E L A D I S C U S S I O N : L A R É A L I T É D E S J E U N E S D ' A U -J O U R D ' H U I

L e s j e u n e s : Q u i s o n t - i l s ? Q u e v i v e n t - i l s ?

L a p r i n c i p a l e r é a l i t é s o u l i g n é e p a r l ' e n s e m b l e d e s m e m b r e s d e 1 ' a t e l i e r a é t é c e l l e d e l a m a r g i n a l i s a t i o n d e s j e u n e s . C e t t e m a r g i n a l i s a t i o n s ' e x p r i m e d e d i v e r s e s f a ç o n s . D ' a b o r d , o n s ' e s t é t o n n é q u e l e s j e u n e s d e 1 8 - 3 5 a n s n e s o i e n t p a s , d a n s l e s f a i t s , i d e n t i f i é s c o m m e d e s a d u l t e s , c e q u ' i l s s o n t l é g a l e m e n t . L e s e u i l d e p a s s a g e à l a v i e a d u l t e e s t c o n s t a m m e n t r e p o u s s é e t p e r m e t d ' e n v i s a g e r j u s q u ' à q u e l p o i n t l e n o m b r e d e s . e x c l u s a u g m e n t e .

S e l o n l e s p a r t i c i p a n t s , c e t t e e x c l u s i o n e s t f o r t e m e n t r e s s e n t i e p a r l e s j e u n e s , p a r t i c u l i è r e m e n t a u n i v e a u d u t r a v a i l , p r e m i e r l i e u d e

- r e c o n n a i s s a n c e d e l a v a l e u r e t d e l ' u t i l i t é d e l ' i n d i v i d u d a n s n o s . . s o c i é t é s . P r e m i e r m o y e n a u s s i p o u r l e s j e u n e s d ' a c c é d e r à

l ' i n d é p e n d a n c e e t à l ' a u t o n o m i e a d u l t e s .

O n a s o u l i g n é e n c e s e n s q u ' o n v i t r é e l l e m e n t u n p r o b l è m e d e s o c i é t é : l e s j e u n e s s o n t d ' a u t a n t p l u s d é v a l o r i s é s q u e n o t r e

7 1

s o c i é t é e s t a x é e s u r l a p r o d u c t i o n e t l a c o n s o m m a t i o n , s u r d e s v a l e u r s m a t é r i e l l e s a u x q u e l l e s l e u r n o n - i n t é g r a t i o n o u l e u r i n t é g r a t i o n i n a d é q u a t e ( c o n t r a c t u e l s , p i g e , e t c ) n e l e u r d o n n e n t p a s a c c è s .

E t c ' e s t d ' a i l l e u r s a u n o m m ê m e d e c e s v a l e u r s d e p r o d u c t i v i t é e t d ' e f f i c a c i t é q u ' o n l e u r r e f u s e d e p a r t i c i p e r à p a r t e n t i è r e a u m a r c h é d u t r a v a i l : o n s e r e f u s e à l e s i n i t i e r , à l e s e n t r a î n e r a d é q u a t e m e n t , o n a p e u r d e l e u r i n e x p é r i e n c e . C ' e s t l a c o u r s e à l a p e r f o r m a n c e . S e u l s l e s c h a m p i o n s s o n t d i g n e s d e p a r t i c i p e r . P a s d e p l a c e p o u r c e u x d o n t l e s t a l e n t s s o n t m o y e n s . I l f a u t ê t r e g a g n a n t s o u c r e v e r .

C e p h é n o m è n e d ' e x c l u s i o n e s t a c c e n t u é , s e l o n l e g r o u p e , p a r l ' a b s e n c e d e s o u t i e n d u o u d e s m i l i e u x p r i m a i r e s , f a m i l l e s , a d u l t e s s i g n i f i c a t i f s q u i p o u r r a i e n t s u p p o r t e r , g u i d e r l e s j e u n e s . L e s a d u l t e s s o n t e u x - m ê m e s d é b o r d é s , s o u v e n t d é s o r i e n t é s , e u x - m ê m e s e x p l o i t é s d a n s l e u r m i l i e u d e t r a v a i l .

C e t t e e x c l u s i o n e s t a u s s i r e n d u e p l u s p é n i b l e p a s 1 ' a b s e n c e d e v a l e u r s a l t e r n a t i v e s à c e l l e d e l a p r o d u c t i v i t é . N ' a d e v a l e u r q u e c e l u i q u i p r o d u i t e t q u i c o n s o m m e . A m o u r , s o l i d a r i t é , c o l l a b o -r a t i o n , e x p r e s s i o n a r t i s t i q u e , c u l t u r e l l e , t o u t c e c i e s t é v a c u é , e t d é v a l o r i s é . C ' e s t l a s u p r é m a t i e d e s v a l e u r s é c o n o m i q u e s .

ÎT"s

L e s t e n t a t i v e s d e s o l u t i o n s p r é s e n t e r o n t e l l e s - m ê m e s d e s l a c u n e s . L e s p r o j e t s j e u n e s s e s o n t , t o u t c o m m e l e s j e u n e s , m a r g i n a l i s é s , n o n

i i n t é g r é s d a n s d e s p l a n s d ' e n s e m b l e . C e s p r o j e t s s o n t d e n a t u r e p r é c a i r e , t e m p o r a i r e e t s o u v e n t à c o u r t e v u e . I l s c r é e n t d e s e s p o i r s d ' i n t é g r a t i o n c h e z l e s j e u n e s , e s p o i r s q u i , f a u t e d e m o y e n s e t d e c o l l a b o r a t i o n d e s e m p l o y e u r s , n e s e c o n c r é t i s e n t p a s e t l e s l a i s s e n t d o u b l e m e n t d é ç u s .

L e m a n q u e d e c o l l â b o r a t i o n d e s e m p l o y e u r s à i n t é g r e r l e s e x c l u s s ' e x p l i q u e p a r l e u r m é f i a n c e à 1 ' e n d r o i t d e c e s j e u n e s , d é s o r g a -n i s é s , a y a n t p e u d e s c o l a r i t é , s a n s , t o i t r s o u v e n t v u s c o m m e i m p u l s i f s e t i n s o u m i s , i m p r o d u c t i f s e t n o n p e r f o r m a n t s .

7 2

C e c u l t e d e l a p e r f o r m a n c e e t d e l a r e n t a b i l i t é l a i s s e d ' a i l l e u r s s u p p o s e r j u s q u ' à q u e l p o i n t p e u t ê t r e g r a n d e l ' e x c l u s i o n d e s j e u n e s q u i s o n t a u x p r i s e s a v e c l a m a l a d i e m e n t a l e . D a n s l e u r c a s , s ' a j o u t e , c h e z l ' e m p l o y e u r , l a c r a i n t e d e l a " f o l i e " , l a p e u r d ' u n p h é n o m è n e i n c o n n u e t p e r ç u c o m m e i n c o n t r ô l a b l e .

O n n o t e , e n f i n , q u ' à l ' h e u r e a c t u e l l e l e s m e s u r e s i n c i t a t i v e s a u p r è s d e s e m p l o y e u r s p o u r q u ' i l s i n t è g r e n t l e s j e u n e s à l ' e m p l o i s o n t i n s u f f i s a n t e s . L e s e m p l o y e u r s n e r e m p l i s s e n t p a s l e u r s o b l i g a t i o n s e n c e q u i c o n c e r n e l e s s t a g e s e n m i l i e u d e t r a v a i l . I l s o n t p l u t ô t t e n d a n c e à t i r e r p r o f i t d e s j e u n é s , à l e s e x p l o i t e r p l u t ô t q u ' à l e s i n t é g r e r à l o n g t e r m e .

A C T I O N S E N C O U R S E T P I S T E S D E S O L U T I O N S

A p r è s a v o i r t r a c é c e t a b l e a u a s s e z s o m b r e d e l a s i t u a t i o n a c t u e l l e d e s j e u n e s , l e s p a r t i c i p a n t s s e s o n t p e n c h é s s u r l e s a c t i o n s , d o n t c e r t a i n e s s o n t e n c o u r s , s u s c e p t i b l e s d ' a m é l i o r e r c e t t e s i t u a t i o n .

L a m a j o r i t é d e s p r o j e t s e x i s t a n t s d o n t o n a f a i t é t a t é t a i e n t r e l i é s à 1 ' i n t é g r a t i o n d e s j e u n e s a u m a r c h é d e 1 ' e m p l o i . I l s s ' a v è r e n t , s e l o n p l u s i e u r s , i n s u f f i s a n t s , n o n i n s c r i t s d a n s u n p l a n d ' e n s e m b l e q u i l e u r p e r m e t t r a i t d e r e m p l i r l e u r s p r o m e s s e s . P o u r q u ' u n e i n t é g r a t i o n a u m a r c h é d u t r a v a i l s o i t r é e l l e , o n p r o p o s e u n e r é g l e m e n t a t i o n q u i o b l i g e r a i t l e s e m p l o y e u r s à a v o i r à l e u r e m p l o i u n p o u r c e n t a g e d e j e u n e s . O n a é g a l e m e n t p r o p o s é l ' a b o l i t i o n d e s e m p l o i s p r é c a i r e s q u i f o n t d e s j e u n e s d ' é t e r n e l s i t i n é r a n t s s u r l e m a r c h é d u t r a v a i l . D e p l u s , o n a s u g g é r é q u e l e s e m p l o y e u r s s o i e n t o b l i g é s d e f a i r e d e l a f o r m a t i o n e n c o u r s d ' e m p l o i .

U n t r a v a i l d ' é d u c a t i o n e s t é g a l e m e n t n é c e s s a i r e p o u r s e n s i b i l i s e r l e s e m p l o y e u r s à l e u r s r e s p o n s a b i l i t é s s o c i a l e s e n c e d o m a i n e , d e m ê m e q u ' a u x c o n s é q u e n c e s t r a g i q u e s d e l e u r i n a c t i o n .

C e b e s o i n d ' é d u c a t i o n s e f a i t p a r t i c u l i è r e m e n t s e n t i r e n c e q u i a t r a i t à l a d é m y s t i f i c a t i o n d e l a m a l a d i e m e n t a l e t a n t c h e z l e s e m p l o y e u r s q u e d a n s l a p o p u l a t i o n e n g é n é r a l . I l f a u t e x p l i q u e r

7 3

a u x g e n s l a m a l a d i e m e n t a l e e t a m e n u i s e r l a t e r r e u r q u ' e l l e p r o v o q u e p o u r q u e c e u x q u i e n s o u f f r e n t p u i s s e n t d e v e n i r m e m b r e s à p a r t e n t i è r e d e l a s o c i é t é . L ' é d u c a t i o n p e r m e t t r a i t d e d é s a m o r -c e r l e l i e n " m a l a d i e m e n t a l e = v i o l e n c e " p r é s e n t c h e z p l u s i e u r s , a l o r s q u e l a r é a l i t é n o u s m o n t r e p l u t ô t l e m a l a d e c o m m e r e t i r é , r e p l i é s u r l u i - m ê m e o u p a r f o i s r e t o u r n é c o n t r e l u i - m ê m e .

E n f i n , 1 ' a c c e n t a é t é m i s s u r l a n é c e s s i t é d e c r é e r d e n o u v e a u x 1 m o d è l e s d e s o c i é t é ' a x é s s u r d e s v a l e u r s a u t r e s q u e c e l l e s d e l a [1 r e n t a b i l i t é e t d e l a c o n s o m m a t i o n . A c e t é g a r d v u n c h a n g e m e n t d a n s i l e s m e s s a g e s v é h i c u l é s a u x j e u n e s à t r a v e r s l e s m é d i a s e s t u r g e n t O n f a i ^ r é f é r e n c e i c i à l ' a c q u i s i t i o n d e s t a t u t g r â c e a u x b i e n s d e c o n s o m m a t i o n e t à l ' u t i l i s a t i o n d e l a v i o l e n c e c o m m e m o y e n f a c i l e d ' y p a r v e n i r o u c o m m e s i g n e d e p o u v o i r e n s o i .

O n p r o p o s e q u e l é s m é d i a s , p a r t i c u l i è r e m e n t l a t é l é v i s i o n , s ' e m p l o i e n t à f a i r e u n t r a v a i l d ' é d u c a t i o n à p a r t i r d e v a l e u r s p l u s h u m a n i t a i r e s e t c e , e n u t i l i s a n t n o n s e u l e m e n t l e l a n g a g e d e s j e u n e s b i e n n a n t i s m a i s e n t e n t a n t d e - r e j o i n d r e , e n t e n a n t c o m p t e d e l e u r r é a l i t é , l e s j e u n e s p r o v e n a n t d e t o u s l e s m i l i e u x .

L ' é c o l e a é g a l e m e n t u n r ô l ë d ' é d u c a t i o n é c o n o m i q u e à j o u e r a u p r è s d e s j e u n e s e n ^ e n a n t c o m p t e d e s p r o g r è s t e c h n o l o g i q u e s : u t i l i s a t i o n c i r c o n s p e c t e - d e s c a r t e s d e c r é d i t e t d e s c a r t e s b a n c a i r e s , v a l o r i s a t i o n d e l ' e f f o r t c o m m e m o y e n d ' a t t e i n d r e s e s o b j e c t i f s , g e s t i o n d e l ' a r g e n t , e t c .

F i n a l e m e n t , , l e g r o u p e a i n s i s t é s u r l ' i m p o r t a n c e d ' i n v e n t e r , d a n s u n e s o c i é t é o ù , l e s \ r é s e a u x d e s u p p o r t t r a d i t i o n n e l s é c l a t e n t , d e n o u v e a u x m o d e ' s d e s o u t i e n a u x j e u n e s , g r â c e à u n e p r i s e d e c o n s c i e n c e , p a r l e s a d u l t e s , d e l e u r r e s p o n s a b i l i t é à l e u r e n d r o i t .

r-

' \

7 4

S Y N T H E S E D E S P R I N C I P A L E S R E C O M M A N D A T I O N S R E T E N D E S E N A T E L I E R

I N T E R V E N T I O N E T A C T I O N S O C I A L E

L e r a p p o r t d ' i n t e r v e n t i o n d e v r a i t s ' é t a b l i r s u r u n e b a s e é g a l i t a i -r e , f a v o r i s a n t l a c o n c e r t a t i o n e t l a s o l i d a r i t é e n t r e l e s i n t e r v e -n a n t s e t l e s j e u n e s . P o u r c e f a i r e , i l s e r a i t s o u h a i t a b l e q u e l ' i n t e r v e n t i o n s e s i t u e h o r s s t r u c t u r e s , s o i t d i r e c t e m e n t d a n s l e m i l i e u d e v i e d e s j e u n e s . O n s u g g è r e a u s s i l e d é v e l o p p e m e n t d e r e s s o u r c e s d i v e r s i f i é e s a f i n d e r é p o n d r e à l a r é a l i t é p l u r i e l l e v é c u e p a r l e s j e u n e s .

I l f a u t d o n c s o r t i r d e s m o d è l e s s t a n d a r d i s é s e t c r é e r d e n o u v e a u x c a d r e s d e r é f é r e n c e e n r e l a t i v i s a n t l e s v a l e u r s d o m i n a n t e s a c t u e l l e s d e p r o d u c t i o n , p e r f o r m a n c e , c o n s o m m a t i o n p o u r e n v é h i c u l e r d e p l u s h u m a n i t a i r e s e t m o i n s c o n t r a i g n a n t e s .

O n c r o i t i m p o r t a n t d e r e v a l o r i s e r l e s j e u n e s e n m i s a n t s u r l e u r p o t e n t i a l i t é :

e n p r i o r i s a n t l a p r i s e e n c h a r g e e t l a f o r m u l e . d ' e n t r a i d e e n t r e l e s j e u n e s ;

e n l e u r d o n n a n t l e s m o y e n s d e p r e n d r e l a p a r o l e .

I l e s t n é c e s s a i r e d ' i n f o r m e r l e s d i v e r s a c t e u r s c o n c e r n é s s u r l a r é a l i t é d e s j e u n e s . N o t r e r ô l e d ' i n f o r m a t e u r e t d ' é d u c a t e u r c o m p o r t e a u s s i u n v o l e t d e d é m y s t i f i c a t i o n d e s p r o b l è m e s d e s a n t é m e n t a l e .

A C T I O N P O L I T I Q U E

E n c o n c e r t a t i o n , i l f a u t d é n o n c e r l e s c o n d i t i o n s d a n s l e s q u e l l e s v i v e n t d e p l u s e n p l u s d e j e u n e s e t e x i g e r d e s a c t i o n s c o n c r è t e s p o u r l e s c o n t r e r . I l f a u t é g a l e m e n t r e v e n d i q u e r l ' i n v e s t i s s e m e n t

7 5

n é c e s s a i r e a f i n d e d é v e l o p p e r e t m a i n t e n i r d e s r e s s o u r c e s a u t o n o m e s d a n s l e m i l i e u *

T R A V A I L

D e s p r e s s i o n s d o i v e n t ê t r e f a i t e s a f i n d ' e x i g e r d e l à p a r t d e s a c t e u r s c o n c e r n é s , u n e a p p r o c h e p l u s g l o b a l e d ' i n t é g r a t i o n a u m a r c h é d e l ' e m p l o i , t o u t e n d é n o n ç a n t s a p r é c a r i t é a c t u e l l e . A i n s i , i l s ' a v è r e e s s e n t i e l d e r a p p e l e r a u x e m p l o y e u r s l e u r s r e s p o n s a b i l i t é s , n o t a m m e n t a u n i v e a u d e l a f o r m a t i o n e n m i l i e u d e t r a v a i l .

E D U C A T I O N

I l s e r a i t s o u h a i t a b l e q u e l e s p r o g r a m m e s o f f e r t s e n m i l i e u s c o l a i r e c o r r e s p o n d e n t a u x v é r i t a b l e s e x i g e n c e s d u m a r c h é d u t r a v a i l . L e s j e u n e s d o i v e n t y ê t r e m i e u x i n f o r m é s s u r l e s e x i g e n c e s d e l a v i e q u o t i d i e n n e d a n s l e c o n t e x t e a c t u e l •

. 7 6

fitEME&CI E M E M T S

La Filiale de Montréal de l'Association Canadienne pour la santé mentale remercie chaleureusement les membres du panel pour leur apport hautement apprécié, ainsi que les animateurs, les rapporteurs d'ateliers et les membres du comité du colloque 1989. Egalement, elle remercie les compagnies suivantes qui ont généreusement contribué à cette publication et dont les annonces apparaissent au présent document:

i Û a ^ t / i i i o T ?

P r o t / i 7 9 c m > j r

Z- ^ C i ^ r c

ff. Dfnix Bouchard Président de l e f i l i a l e de Montréal

M. L#C2»rc Cosité financement

M * J a c g a e * B a v a i

Septembre 1989.

7 7

• À l'heure des grands défis, nous sommes fiers de nous associer

à la Filiale de Montréal de L'Association canadienne pour la

santé mentale

Zifi PROVINCES IPJ UNIES

Compagnie d'assurances Société membre du Groupe

735, Hocquart Duvernay, Laval (Québec) H7E3N8

Courtier en assurances Vie, groupe, hypothécaire Taux spéciaux non-fumeur

661-5444 270-4090

INVITATION À DEVENIR MEMBRE

Avec les compliments de

EXPERT EN ART ET ENCADREMENT 9770, boul. Gouin Ouest Pierrefonds (Québec) H8Y1R5 Tél.: (514) 683-1251

Ce document a étô réalisé en collaboration avec

ginette de bellefeuille Service de traitement de textes

«Word Perfect»

Tél.: 656-6394

La Filiale de Montréal de l'Association Canadienne pour la santé mentale, organisme sans but lucratif, entreprend sa campagne de recrutement de membres. Elle recherche des personnes dynamiques, actives et impliquées afin de mieux promouvoir ses objectifs qui sont les suivants: 1) La promotion de la santé mentale. 2) La défense des droits des malades mentaux.

En devenant membre, vous pourrez participer aux différentes activités de l'association, aux assemblées générales, aux conférences, aux colloques etc., et voua pourrez vous Impliquer à titre de bénévole sur divers comités de promotion de la santé mentale de l'association.

En outre, vous recevrez votre carte de membre et la série «Faire Face» qui porte notamment sur la santé mentale, le. stress et les problèmes de la vie quotidienne, le vieillissement, le chômage, le deuil, la vie professionnelle et familiale.

Vos contributions permettront à l'Association d'informer le public et d'aider les personnes aux prises avec des difficultés d'ordre émotionnel.

Enfin, il nous fera toujours plaisir de répondre à vos demandes d'information. Merci de votre encouragement.

. . . .

Je désire adhérer à la Filiale de Montréal de l'ACSM,

NOM: : :

ADRESSE: :

CODE POSTAL: : T E L . : _ _

Ci-inclus ma cotisation de 20.00$ • Je désire m'impliquer à titre bénévole • Pour les étudiants et personnes en chômage 5.00$ • Voici un don additionnel de $ Reçu s.v.p. : • No enregistrement 0551507-11 -08

S.V.P. faire votre chèque à l'ordre de la Filiale de Mtl de l'ACSM, 847, Cherrier, suite 201, Montréal, Qué. H2L1H6Tél.:(514)521-4993

G 5 5 5 3 Ex. 2

E 4041

Jeunesse et santé mentale. Les jeu-nes d'aujourd'hui: une génération "RypQT^équée ? Que" H eur rëserve "Pan 2000? Colloque du i 5 mai 1989

i *.1 f. 1r •1 M.iME^n 1

fcfrfi, <U) jfli . <U) jfli .

G 5553

Enseignement de soins hospitaliers

Hélène Quevillon Inc.

17, avenue Laurier Est Montréal, Québec H2T 1E4 (514) 272-2129

Intervention psychologique et

physique non abusive

Une approche rassurante