Jean Annestay - Introduction à Ibn Arabi, Par-delà le miroir

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PAR-DELÀ LE MIROIR TRADUCTION DE L'ARABE PAR A l'i Réservées à l'origine à une élite intellectuelle, les In d'Ibn 'Arabî étaient récitées tout au long de la M-IM.IIHI' IM coucher et le lever du soleil par le Shaykh al-Akhiii ci •.. i Elles reprennent sous forme synthétique les affirmai ions pilht |H de la doctrine de l'Unité ainsi que les vérités oscnn. Il i révélation islamique. Nourries de l'inspiration la plus s.i. i ont une dimension incantatoire que renforce, en arabe, mu I rythmée aux innombrables renvois symboliques et méiapliv En dépit de l'intérêt croissant du lectorat français pour Pu-imi .1 'Arabî, ces litanies n'avaient jamais été réunies en un seul volum- caractère universel des ces quatorze prières en fait nu i susceptible d'intéresser toute personne attirée par la spirituuliti Elles sont accompagnées ici de deux chapitres inédits des / /. al-Makkiyya, « Les Révélations de La Mecque », sur l'iiuli^i n. , .1. la créature et l'Indépendance de son Créateur. Considéré dans le soufisme comme le « Sceau des sainis . I. des gnostiques » et « le plus grand des Maîtres », Ibn 'Ai.iln oeuvre ont contribué à modeler la forme du soufisme ju.sqn'.i m>'> i Né en Andalousie, il parcourut le Maghreb avant de sVi.iN ..... à Damas où il mourut en 1240. Son oeuvre, sans éqmv.ili m -I littérature spirituelle mondiale, est incontournable ci muni i> synthèse des enseignements doctrinaux les plus élevés du Ibn Arabî disait de lui-même : « je ne suis ni un pmpl> envoyé, simplement un héritier, quelqu'un qui laboure le li •» la vie future ». D'Ibn Arabî est déjà paru dans la collection Hikma : / <•> A de La Mecque I B N ' A R A B î PAR-DELÀ LE MIROIR TRADUIT ET PRÉFACÉ PAR 'ABD ALLAH PENOT HIKMA PQ En couverture : l'arm n Le Caire. Musée d'Aï î î l .... >.(m ISBN : 978-2-901..." .MEDIATHEQUE MMSH LU CL CM ENTRELACS D 168 017708 5

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PAR-DELÀ LE MIROIR

TRADUCTION DE L'ARABE PAR A l'i

Réservées à l'origine à une élite intellectuelle, les Ind'Ibn 'Arabî étaient récitées tout au long de la M-IM.IIHI' IMcoucher et le lever du soleil par le Shaykh al-Akhiii ci •.. iElles reprennent sous forme synthétique les affirmai ions pilht |Hde la doctrine de l'Unité ainsi que les vérités oscnn. Il irévélation islamique. Nourries de l'inspiration la plus s.i. iont une dimension incantatoire que renforce, en arabe, mu I •rythmée aux innombrables renvois symboliques et méiapliv •

En dépit de l'intérêt croissant du lectorat français pour Pu-imi .1'Arabî, ces litanies n'avaient jamais été réunies en un seul volum-caractère universel des ces quatorze prières en fait nu isusceptible d'intéresser toute personne attirée par la spirituuliti

Elles sont accompagnées ici de deux chapitres inédits des / /.al-Makkiyya, « Les Révélations de La Mecque », sur l'iiuli^i n. , .1.la créature et l'Indépendance de son Créateur.

Considéré dans le soufisme comme le « Sceau des sainis • . I.des gnostiques » et « le plus grand des Maîtres », Ibn 'Ai.iln •œuvre ont contribué à modeler la forme du soufisme ju.sqn'.i m>'> iNé en Andalousie, il parcourut le Maghreb avant de sVi.iN .....à Damas où il mourut en 1240. Son œuvre, sans éqmv.ili m -Ilittérature spirituelle mondiale, est incontournable ci muni i>synthèse des enseignements doctrinaux les plus élevés du

Ibn Arabî disait de lui-même : « je ne suis ni un pmpl>envoyé, simplement un héritier, quelqu'un qui laboure le • li •»la vie future ».

D'Ibn Arabî est déjà paru dans la collection Hikma : / < •> Ade La Mecque

I B N ' A R A B î

PAR-DELÀLE MIROIRTRADUIT ET PRÉFACÉPAR 'ABD ALLAH PENOT

HIKMA

PQ

En couverture : l'arm nLe Caire. Musée d'Aï î î l....>.(m

ISBN : 978-2-901..."

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Introduction

Le texte dont nous présentons la traduction est un recueil deprières, au sens étymologique du terme ; II est attribué à sidnâIbn 'Arabî « et figure dans le répertoire général d'O. Yahia sousle n° 64. Il en existe plusieurs manuscrits, tous assez tardifs(xirVxvir s.). Une note en marge de l'un d'eux suggère que larédaction aurait pu se situer en 610H/1213. Un autremanuscrit contient un isnâd remontant à Ibn 'Arabî mais cettechaîne de transmission est manifestement incomplète puisqu'ily manque un maillon entre 'Alî >al-Qûnawî, né en 668, et Ibn'Arabî, mort en 638. Quant au ms. Shehit Ali 2796, il necomporte que le texte de l'oraison de la journée du jeudi maisle copiste affirme se baser sur un exemplaire transcrit par uncompagnon d'Ibn 'Arabî et provenant de la bibliothèque deSadr al-Dîn al-Qûnawî. Sans pouvoir être démontrée par despreuves incontestables, l'authenticité de l'attribution de cesprières au shaykh al-akbar paraît donc hautement probable etcette probabilité est renforcée par un examen du style et ducontenu doctrinal, l'un et l'autre très typiquement akbarien1. »

Prières, oraisons ou litanies, de quelque façon qu'on les appelle,s'agissant du plus grand des maîtres du soufisme, le lecteur ne doit

1. M. Chodkiewicz, « revue des livres » in Studia islamica, n° 94, 2002, p. 203.

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10Par-delà le miroirIntroduction-

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pas s'attendre à trouver dans celles-ci les demandes que lecommun des mortels adresse ordinairement à Dieu. Leur caractèreexceptionnel nous paraît justifier une introduction aidant lelecteur à mieux entrevoir sinon à saisir toute la portée de celles-ci.

Wird

En premier lieu, quelques mots sur la spécificité du wird (pi.awrâd) en islam. Sa traduction par « litanie » ou « oraison » n'enrestitue que partiellement le sens ; en effet, en arabe, sa racinecontient les idées d'arriver, d'atteindre, d'apparaître et d'êtrereçu. « Pour les nomades du désert, la racine de ce mot désignaità l'origine un point d'eau ou un puits où les voyageurs venaients'abreuver. Dans le contexte d'une pratique spirituelle, le termewird lui-même se réfère à des prières dévotionnelles2. »

Premier traducteur en langue française de ces awrâd, MichelVâlsan présentait ce qu'elles étaient de façon générale dans lemonde islamique en ces termes : « Constituées de formulesrelatives aux vérités fondamentales de la révélation — le plussouvent tirées du Coran et des hadîth -, de louanges à faDivinité, de prières sur le Prophète et de demandes de toutesgrâces, leur fonction est à la fois doctrinale et incantatoire.Issues de l'inspiration sacrée des maîtres spirituels et destinées àservir d'adjuvants aux moyens initiatiques plus essentiels, ellessont normalement pratiquées par les fuqarâ d'appartenancespirituelle mais on les trouve aussi en usage chez de simplesexotériques qui en ont l'accès comme à des moyens de grâceofferts à la dévotion commune. Telles sont les oraisons qadiritesou shâdhilites, dont le célèbre Hizb al-Bahr, 'l'Oraison de laMer" du shaykh Abû-1-Hasan Alî ash-Shâdhilî, ou les litaniessur le Prophète, disposées par jours de la semaine, appeléesDalâil al-Khayrât, "Les Moyens de Grâce", du shaykh Abu 'AbdAllah Muhammad al-Jazûlî3. »2. Pablo Beneito et Stephen Hirtenstein, « Introduction >> in Ibn 'Arabi, The Sevett

Days ofthe Heart, Oxford, 2009, p. 2 ; c'est à cette introduction que nous empruntons toute une partie des références et des considérations qui suivent.3. M. Vâlsan, « présentation » des Oraisons métaphysiques d'Ibn 'Arabî in Études tru

dîtionnelles, n° 278, septembre 1949, p. 251.

Tout wirdsç. fonde sur le verset : Les habitants des deux et de laterre Lui adressent leurs suppliques ; chaque jour II vaque à uneoccupation différente* et l'affirmation coranique : Invoquez-Moi, Jevous exaucerai. Ce qu'Ibn Arabî commente en soulignant que « leTravail [divin] est la requête de ceux qui demandent. Il n'estaucune créature existante qui ne Lui demande (...) mais chacuneselon des degrés différents'1. » Dieu « demande aux serviteurs deL'appeler et les serviteurs Lui demandent de (leur) répondre. Ainsitous deux sont demandants et demandés (tâlib wa matlûb)7. »

Dans le cas des présentes litanies, il est clair que leur fonctionest aussi bien dévotionnelle que doctrinale car elles constituent unexposé et, plus encore, une véritable célébration de la doctrine del'Unité (tawhîd). « Si quelqu'un répond à l'appel de Dieu quand11 l'appelle par le langage de la Loi révélée — et II ne l'interpelle qu'à11 .ivers elle - Dieu lui répond quel que soit le sujet de sa demande.Aussi enjoint-Il à Ses fidèles serviteurs : Répondez à [l'appel] deI ÏH-U et de Son Envoyé, car ni Lui — gloire à Lui — ni Son Envoyén« unis appellent si ce n'est à ce qui est vital pour vous (ou : ace quit'tiin tienne vie)*. »

Ainsi entendu le wird n'est pas une simple prière au sensiniii.ini mais bel et bien un support en vue d'une illuminationiln npliaiiique. En dernière analyse, ce qui est demandé dans ces,iin,/,/<-si toujours de parvenir à une connaissance divine. Dans

l'i i'.pet tivc, wird et dhikr (récitation ininterrompue d'un<lc Mien) se rejoignent. Ce ne sont plus deux activités

•• i-s MI.us deux formes d'une seule'et même tension. Il s'agitu lui «JIM .s'y livre de réaliser en soi la Présence (hadra)

< M tout être. « Puisque (la prière) est une conversationI-un .n lèie, c'est ainsi une invocation ou un dhikr. Et

souvient de Dieu (...) Dieu S'assoit en sa• n .u » ord avec le hadîth qudsî proclamant : "Je suis

i|- M ni. tir ( elui qui se souvient de Moi". Quiconque est1 lui .loin il -.(- souvient est par là même capable d'une

un n voit Celui en compagnie de qui il se tient.

. • n

il S/1,/// ni AW//, Haydcrabad, 1948, p. 72.\IMwt. !'•< '.iin-, 1911, t. IV, p. 101.\ht,l,l,,h. <i. '<; ui.mt Cor. 8. 24.

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12Par-delà le miroirIntroductiony&&. #.••£••

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(...) C'est selon la réalisation ou l'absence de vision dans saprière que celui qui prie saura quel est son propre degréspirituel''. »

En ce sens le wird est véritablement « ce qui arrive dans lecœur » (wârid).

Il ne saurait en être autrement pour Ibn 'Arabî « dont,comme l'a écrit 'Abd Allah Penot, toute la vie n'aura été qu'unevaste quête et pour qui la seule chose qu'il pouvait demander àDieu c'était Dieu. Dieu qui présente d'innombrables facettesengendrant la perplexité de celui qui Le cherche, car, endéfinitive, II Se dérobe au moment même où l'on croit L'avoirtrouvé. Trop proche pour être ignorée, suffisamment éloignéepour être hors d'atteinte, la Présence divine est source de satis-faction et de désappointement à la fois et c'est ce qui expliqueque le connaissant ne .goûte jamais le repos. »

Wird et sacralisation du temps

D'une façon générale, la pratique du wird, répandue danstoutes les confréries souries, présuppose et participe d'une sacra-lisation du temps.

Pour le croyant comme pour le spirituel réalisé ou en voie deréalisation, la semaine n'est pas une simple succession de jourset de nuits mais un cycle dont l'alternance des jours et des nuitsreflète des réalités spirituelles.

Nuit et jour renvoient en effet toujours à la cosmogoniemême de notre monde ; on le savait du judaïsme, dont lespremiers versets de la Genèse sont fameux, c'est vrai aussi del'islam. Et si ces deux traditions font commencer la journée aumoment du coucher du soleil et de la nuit, c'est pour marquerla prééminence du non-manifeste sur le manifesté dont la nuitet le jour sont les symboles.

Ibn Arabî développe et explicite cette notion. Il écrit : « C'estDieu qui détermine la durée du jour et de la nuit (73, 20) enfaisant entrer, couvrant et enveloppant de façon à porter

9. Ibn 'Arabî, Fuçûç al-HiJcam, ch. sur Muhammad, Beyrouth, 1946, p. 223-

l'existence les propriétés et les entités concernant ce dont II aune connaissance antérieure et qu'il rendra manifestes dans lemonde des éléments. D'où il résulte que nous sommes lesenfants du jour et de la nuit. Quand quelque chose de nouveauarrive dans la journée, le jour est sa mère et la nuit son père cartous deux lui ont donné naissance. Et cet état ne cesse jamaisdans ce monde aussi longtemps que la nuit et le jour continuentà se recouvrir l'un l'autre. (...) [Par contre] ceux qui sont nésdans une seconde nuit ou une seconde journée sont nossemblables, mais non les enfants du même père et de la mêmemère, car la nuit et la journée sont [alors] nouvelles, en sorteque nos parents sont devenus non existants, et celles-ci sontleurs semblables, non leurs entités10. »

Ibn Arabî envisage cependant la relation du jour et de la nuitplus comme une relation du non-existant et de l'existence queVéritablement comme la relation du non-manifeste et duMi.inifcstc (notamment au sens où, par exemple, Guenon• mploir ces termes) et il sera utile d'en tenir compte dans la

i|>it'li(.-nsion de ses awrâd. Commentant le verset coranique :/,/ mut constitue un signe à leur intention : Nous en extrayons le

i /ci voilà plongés dans l'obscurité11, il écrit en effet : « Sache<|n- l,i lumière est conservée non manifestée par l'obscurité.

l.i lumière, il n'y aurait pas d'obscurité. (...) s'il (Dieu)H p.is dû prendre la lumière d'elle, le wujûd des ténèbres

HioiniK- à la non-existence1'» «Le jour n'est pas; «M. .1 l.i nuit mais il est semblable à la lumière en ce que

I. \H manifestes par son intermédiaire. En sortenuM . i l'ombre de la lumière et, quand le jour est tiré de

II -I • m. ij'.i- sous la forme de la lumière. De même que le• «liLMid il émerge de Ce qui est celé, émerge sous la

• I iii.nsst'iir de ce qui est celé13.» «L'obscurité se

^> tlil, imttliitt. III, j>. Wl. Pour bien comprendre ce passage on ne doit» ni ijiir 1'ml.iiu nr prône pas une création réalisée une fois pour toutesnlnti «rtlM (('*«• rciittuvclcc d'un instant à l'autre en conformité au'Huit ni i n^ Nrlon Icijucl chaque jour II vaque à une occupation différente

II ,i iiI in

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rapporte à la connaissance de ce qui est celé et la lumière à laconnaissance de ce qui est manifesté (litt : de ce qui esttémoigné). En sorte que la nuit est un vêtement (...) et lajournée relève du mouvement et donc des occupations divines.Le mouvement est la vie et relève de Dieu (Haqq) et l'immobi-lité est la mort et relève de la création. Néanmoins, Dieupossède ce qui est immobile sous deux aspects - l'immobilité etPimmuabilité (ou ce qui est fixe)14. »

On voit que, chez Ibn 'Arabî, le visible n'est pas forcémentque la manifestation (ou « l'extériorisation ») de l'invisible(ghayb) ou son reflet mais que, toujours sur ia base de larévélation coranique, il envisage les choses sous un autre angle ;les deux points de vue ne se contredisent pas mais se complètent.

Il est en tout cas très important de tenir compte de cesdonnées pour comprendre pourquoi sinon comment, chez lui,les litanies se dédoublent, les unes étant destinées à être lues denuit et les autres de jour.

Ainsi, on sait que, pour lui, les nuits appartiennent tout par-ticulièrement aux saints (en relation avec la tension qui est laleur vers le monde intérieur) et les jours aux prophètes (enrelation au rôle de ceux-ci avec le monde extérieur). Et cela aussiest à rattacher à la source coranique. La nuit étant le vêtementde ce qui est celé, le moment où Dieu étant l'ombre (cf. Cor.25, 47), c'est la partie du jour qui est reliée au ghayb parexcellence. Et par là, elle se relie à Dieu qui possède les clefs de cequi est celé (ghayb)".

D'autre part, dans son Ayyâm al-sha'n, Ibn Arabî souligne uneinterrelation existant entre les vingt-quatre heures de la journée etles sept jours de la semaine. Pour lui, le jour présente un doubleaspect physique et spirituel. Ce qui présuppose une notion du« jour » très différente de celle qu'on entend couramment.

14. Ibiti, IV, p. 403.15. Cor. 6, 59. « Ibn 'Arabî fournit de nombreuses explications de ce verset, une de

celles-ci mérite d'être citée dans le présent contexte. Le terme miftah ou "clef" dérivede la même racine que le Kimefath ou "ouverture". Littéralement, une miftâh est lemoyen par lequel une ouverture est obtenue et "ouverture" est un des termes prétërés d'Ibn 'Arabî pour désigner le dévoilement (tajallî) » (Chittick, The Self-DisclosurrofGod, Albany, 1998, p. 244). On comprend aussi par là pourquoi Ibn Arabî meten relation la nuit avec le saints.

Introduction15

« Ce que nous désignons par "jour" est un cycle complet descycles de la sphère des étoiles fixes contenant les cieux et la terre(...). Chaque jour est le dernier jour [d'un cycle] de 360 jours[ou, si l'on préfère d'une année] (...) [ainsi] on pourra toutaussi bien dire que chaque jour actualise tout ce qui a pris placedans les six jours [précédents de la semaine], du commence-ment à la fin. Car en un jour s'achève chacun de ces six [autres]jours et il contient nécessairement la propriété de chacun d'eux.Néanmoins ceci demeure caché car chacun de ces jours a unachèvement particulier en lui. Un jour couvre ainsi 360 degrés» .11 la sphère tout entière [des étoiles fixes] se manifeste en lui,M' mouvant à travers tous les degrés. Ceci constitue le jour• < >i porel (al-yawm al-jismânî).

« l;.n lui réside un jour spirituel (yawm rûbânî), durant lequelI imellect reçoit sa connaissance, l'intelligence sa contemplation• i l'esprit ses secrets. Et ceci exactement à la façon dont le corpsi- >,"ii s.i nutrition, sa croissance et son développement, sa santé

i i maladie, sa vie et sa mort, durant le jour corporel. DuH de vue de ses propriétés régissantes lesquelles se

...... ilestem dans le cosmos grâce à la puissance active de l'Âmei selle, il y a sept différents jours [dimanche, lundi, mardi,

I» | A ir.s jours [corporels] correspondent sept jours spirituelsl' ..... • soin connus que des gnostiques. Ces jours [spirituels]•ni I. MIS |Hn|métés régissantes dans l'esprit et les intellects grâce

I > i ..... iue intuitive du Réel en qui existent les cieux et la' i|in esi la Parole Divine (al-kalimat al-ilâhiyya)l<>. »

.le l'«riivre

• un, n. e .1 voir en quoi, pour Ibn 'Arabî, la notion de jour,.iirtii//. dillère grandement de ce qu'on entend ordi-

I . ''i'.iyk/i eiuniicrc de fait différentes sortes de jour.• In u ei .ni dessus de tous, en accord avec l'ensei-iiut|iie, il place le « Jour de l'œuvre » (yawm al-

lui -lu temps solitaire » (al-zaman aï-fard) dont

./ (.,f,,l7 n. l'Htûhât, III. p. 549.

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16Par-delà le miroirIntroduction 17 . •* •

on peut dire qu'il en est la « durée »17 et qui est identique àl'instant (an) éternel de la création. C'est à lui que se réfère leverset coranique précédemment mentionné affirmant quechaque jour II vaque à une occupation différente™. Ce Jour del'Essence divine est l'Instant éternellement présent qui est le« Temps » (ou plus exactement l'Ins-tant intemporel) de l'Actedivin. C'est à lui que se réfère la notion de la créationrenouvelée sans cesse à chaque instant qui est au cœur de touteconception traditionnelle du temps mais qui a trouvé un exposétout particulièrement développé au sein de la traditionislamique1''. Il est le Souffle divin qui relie toutes choses entreelles comme les perles sur un fil. Ce Jour est identique au pointdu présent dans lequel « sont recueillis tous les cycles et toutes lessaisons, jours, mois et années. [Car] Le monde au commence-ment est un monde sans fin30. » II est le « moment de non-êtreentre les différents actes successifs de la création » dont parleIbn 'Arabî dans les Fuçûç al-Hikam.

Et c'est parce qu'il est cette éternité au cœur de toutetemporalité que les soufis considèrent que « la plus précieuse des

17. Cf. Futûhât, III, p. 549.18. Cor., 55, 29. Ce verset se réfère aussi à la notion de création sans cesse renouve-

lée abondamment commentée dans le soufisme. « L'univers est constitué d'accidentsappartenant à une unique "substance", qui est la Réalité sous-jacente de toutes lesexistences. Cet univers est modifié et renouvelé sans cesse à chaque moment et àchaque souffle. À chaque instant un univers est anéanti et un autre qui lui ressembleprend sa place (...). À cause de la rapidité de cette succession, le spectateur est abuseet croit que l'univers a une existence permanente {...). Ainsi l'Être Véritable ne Serévèle jamais deux moments de suite sous les dehors d'un même phénomène » (Jamî,Lawâ'ih, ch. XXVI, d'après la trad. De Whinfield et Kazvini, Oriental TranslationFund, XVI, Londres, 1906, pp. 42-45). Selon cette conception, le monde est enchangement perpétuel tandis que Dieu demeure à jamais tel qu'il était, est et sera. Lasérie indéfinie de ces renouvellements ininterrompus n'est, en réalité, qu'une seule etéternelle « illumination » (tajallî) absolue et qui ne saurait souffrir la moindre répé-tition. Attendu que, comme aimait à le rappeler Ibn Arabî, « l'illumination ne serépète jamais elle-même >> (là takrar_/?-/-tajallî). L'infini divin - Son immensité (aitawassu' al-ilâhî) - interdit toute répétition quelle qu'elle soit. « La racine de ci-constant renouvellement est le fait qu'il est impossible que toutes les entités viennentà l'existence en une fois. D'où un flot ininterrompu d'actes divins qui devienm-mmanifestes sous la forme des choses et de leurs activités » (Chittick, op. cit., p. 67 ; cf.aussi pp. 84-86).19. Sur ce sujet, on se reportera avec profit aux études d'Ananda Coomaraswamy,

Temps et Éternité, et d'Adrian Snodgrass Architecture, Time and Eternity.20. Shabestarî {Sâ'd al-Dîn Mahmûd), Gulshan-i-Râz cité in Lederer, The Secret /(V>»

Garden ofSa'd Ud Din Mahmûd Shahistari, Lahore, p. 80.

choses humaines est l'état de l'être situé entre le passé et le futur(...) et (que) les Shuyukh ont dit que "le Temps (c'est-à-direl'Instant) est une épée tranchante" car c'est une caractéristiqued'une épée de couper et le "Temps" coupe les racines du futuret du passé et efface du cœur le souci du passé et dulendemain21. »

D'où encore l'injonction de Rûmî : « Hâte-toi car "l'InstantCM une épée tranchante", et le Soufi est un "fils de l'Instant" ;ce n'est pas la règle de la Voie que de dire : "Demain"22. » Car,comme le rappelle 'Attâr, « Un millier d'années passéesmultipliées par un millier d'années à venir sont présentes à toien cet "Instant" (waqt) dans lequel Tu es23. » Les citationspourraient être multipliées à l'indéfini, toutes attestant que, du< ni. ni aux plus grands des maîtres spirituels, cette notion d'unIHIH unique, principe et fin de la multiplicité des jours, a(•M unit et toujours été affirmée en terre d'islam.

Mais, là aussi, la particularité d'Ibn Arabî est d'avoir exposéplu . (ii détail ce qu'était le jeu entre le temps et l'éternité en ceM ..... de et dans l'autre. Il explique ainsi qu'il existe unem.li hune de «jours solitaires» qu'il appelle «les jours du'..Millle » (i'ntûhât, III, p. 287) ; ce sont eux qui relient l'indéfi-

•I- iimmlcs qui sont à chaque instant anéantis et à chaque..... iti iet lécs. (Test grâce à eux que la reconduction au « Jour• !• I -i m te " (yttwm al-shan) dont ils ne sont pas en soi vérita-

MI .IIMIIHIS, est possible.Il ....... un iK cependant d'entrer plus en détail sur tout ceci

I.M M'CSI qu'une introduction visant à faire entrevoir• p. I |niii essentiel tendent à orienter ceux qui ley récitent

-tiifl se succédant au fil des jours. Mais même ces...... .lie/ Ibn 'Arabî, susceptibles d'une compréhen-

iii ui. [..mu tilière les reliant à tout un pan de réalitéprésupposait connu de ceux qui effectuaient, de

... .1. mm .es récitations et c'est ce que nous allons, nu

' 1,1-fi, I M.ii'/iii/. d'après la traduction de Nicholson, Cibbil i ..... II,-,. l')l I. pp. 368-369.

.il Ait'liyà, II. 179. 10 cité par Nicholson, The• H i.ini <|iic note à Mathnatut, I. 133.

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18Par-delà le miroir

Les différentes sortes de jour et la structure des awrâd

Si Ton en vient à la notion de jour relevant non plus duprincipe de la création mais de la création proprement dite, onverra que, là aussi, Ibn 'Arabî distingue trois différentes sortes dejour.

En premier lieu, le jour disons du monde corporel, celui quetout le monde perçoit et qui est marqué par l'alternance de la nuitet de la journée et à laquelle le Coran fait allusion en ces termes :// a créé les deux et la terre selon la Vérité, faisant succéder la nuit aujour et le jour à la nuit (litt. : enroulant la nuit sur le jour et le joursur la nuit)14. Le Shaykh appelle ce jour de vingt-quatre heures le« petit jour » ou « le plus petit des jours », c'est celui que tous leshumains, quels qu'ils soient, vivent. En lui-même, ce jour n'a pasde réalité car il est soumis au temps qui, en lui-même, « n'estqu'une chose imaginaire, sans réalité véritable". »

C'est donc relié à son principe éternel que le jour acquiert saréalité et le Shaykh rappelle, toujours dans les Futûhât, qu'àchaque Nom divin correspond un jour26. « Ces véritables jourssont les propriétés régissantes de Ses Noms dans le cosmos". »De même, « à chacune des sphères (cosmiques) correspond unjour spécifique, et cela des vingt-huit jours du "jour de lune"aux jours de 36 000 années des étoiles fixes28. »

La seconde sorte de jour est appelée le jour détaché (yawmal-salkh) ; ce jour-là n'est connu que des gnostiques. C'est à luique fait allusion le verset coranique affirmant que La nuitconstitue un signe à leur intention : Nous en détachons le jour et lesvoilà plongés dans l'obscurité2^. Le spirituel voit la réalité

24. Cor. 39, 5.25- Futûhât, I, p. 291. Ibn 'Arabî dit ailleurs : « Sache que le temps est une relation

qui n'a pas de wujùd en propre » (Futûhât., III, p. 546). Ce qui esr tout à fait enaccord avec la conception de la création sans cesse renouvelée. Le temps marqué parl'alternance du jour et de la nuit « est une période imaginaire délimitée par tes mou-vements des sphères ; or, ce temps est la juxtaposition d'une chose nouvellement arri-vée avec une autre nouvellement arrivée » (lbid.> III, p. 547).2(>.Ibid., II, p. 441.27. Ibid., III, p. 201.28. Chittick, op.cit., p. 393. Le texte tout entier de cette note 14 est à lire en relation

avec le présent sujet. Cf. aussi Futûhât, II, p. 441 et III, p. 549.29. Cor, 36, 37.

Introduction' , - v ** i r,

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intérieure et non seulement extérieure de chaque jour. Pour Ibn'Arabî, la journée est « l'ombre de la nuit et s'accorde à saforme ».

« Le Kitâb ayyâm ash-sha'n fait apparaître, en effet, qu'Ibn'Arabî découple les nuits des jours qui les suivent selon lecalendrier commun : selon lui, entre chaque nuit et le jour quilui a été "arraché" (ail. à Cor. 36, 37), il y a un intervalle de troisjours. À la nuit du dimanche correspond donc le jour dumercredi, à la nuit du lundi le jour du jeudi et ainsi de suite. Lenu ihémère, pour les 'art/un, n'est donc pas celui qui règlel'existence du vulgaire30. » « La nuit est encore la racine ou le|»i iiu'ipc du jour mais ici la nuit et le jour sont devenus séparésI un de l'autre. Le soir d'un jour est relié à la journée d'unM nu- (...). L'intervalle entre la nuit et le jour qui lui correspond

K- 7 unités de 4 nuits et de 3 jours-11. »

« li troisième sorte de jour est appelée le jour entrelacé'i .il îlâj). Ici chaque heure de chaque nuit et de chaque

/entrelace dans un enchevêtrement inextricableI- lit-lires des nuits et jours successifs. (...) Chaqueni lui 4 heures nocturnes et 3 heures diurnes en cycle

', i.uiilis qiu- la journée, son ombre, contient 4 heures• i t heures nocturnes. Il semblerait que certains

\n li s awrâd en tenant compte de ces connexions : un'i spécifie, par exemple, que la litanie de la

IMIII doit être lue lors de la première heure de la> ilu in.iuli nu encore que la- litanie de la "troisième

II • in lut- lors de la première heure de la soirée du''i I présente les quatorze nuits et jours autour

( limllii "/> (//,. p. 204.Irlhi n 11 . mu, nf>. fit., p. 105. Les traducteurs représentent les différents

ut fur iléduii* tics passages des traités d'Ibn 'Arabî mais nousin» le t Jtlrr de cette introduction, plus générale que vraimentI \\\i 1rs ilifléirnicN applications détaillées auxquelles ces don-

!i. ti I r Iriirur qui désirerait en savoir plus se reportera doncI II ilrvij icprndani être attentif à ce que les applications pra-mit \mi nnijinii^ cire utilisées sans risque en dehors de la gui-

>l une lluni'r .ikluncnnc et, pour autant que je le comprenne,ni1 pi imiMinti 1*111,111.1111 d'un shaykh authentique sans risquerivc» niitllii uiriiti'iiifiii Iréqufiites des délirants autoproclamésli ijul diiumi il'nnlin.iÎH- it se répandre sur ces questions.

Page 8: Jean Annestay - Introduction à Ibn Arabi, Par-delà le miroir

20Par-delà le miroir

de la circonférence d'un cercle, nous pouvons voir commentces heures du jour entrelacé se relient les unes aux autres32. »Le « travail » de cet entrelacs est à l'image du Travail effectuépar l'Artisan divin sur le Métier à tisser cosmique auquelfait allusion le verset coranique 31, 29 : Ne vois-tu pas queDieu fait pénétrer le jour dans la nuit et la nuit dans le jour,qu'il a assujetti le soleil et la lune, chacun évoluant jusqu'à unterme fixé ?

L'interpénétration du jour et de la nuit est un entrelacementqui trouve de multiples prolongements dans la traditionmusulmane et n'a qu'un seul et unique but : permettre ledévoilement intérieur (tajallî) dont le dévoilement de la fiancéeà son époux lors de la nuit de noces (désignée traditionnellementpar le terme jiltua issu de la même racine justement que tajallî}était autrefois le symbole. En d'autres termes, ce complexeentrelacs a pour but ultime le total dénuement et le completdénouement de tous les liens hormis celui nous rattachant auPrincipe.

« Comme c'est souvent le cas dans les écrits du maîtreandalou, ces quatorze oraisons en prose rimée, dont la structureest apparemment assez simple, révèlent à un regard attentif desarrière-plans insoupçonnés des lecteurs peu familiers avec ladoctrine et la méthode du shaykh al-akbar. Le ïlm al-hurûf[\i\e des lettres], dont le rôle est considérable chez celui-ci,

mais aussi les relations complexes entre les jours de la semaine,les Noms divins, les sphères célestes et les prophètes qui leursont associés sont à prendre en considération pour pénétrer lessecrets de ces awrâd^. »

Leur lecture peut être effectuée isolément comme descondensés métaphysiques mais elle peut s'éclairer en lesrapprochant du contenu d'autres traités d'Ibn 'Arabî ou desaveur akbarienne tels que, notamment, le Kitâb ayyâm al-shanet les Tawajjuhât al-hurûf.

32. Ibid., pp. 107-108.33. M. Chodkicwicz, op. cit., p. 204. Pour ceux qui désirent savoir de quelle manirii

les correspondances avec les différentes lettres s'établissent, on se reportera -nupp.117 à 123 de Pablo Beneito et Stephen Hirtenstein, op. cit., qui fournissetil unrésumé partiel du traité attribué à Ibn 'Arabî.

Introduction ' • 'J *•*£*&•**'&& -<2I

"'"•'' '':--3f' ' 'Les sept jours de la semaine et les sept prophètes

Mais les arrière-plans présupposés par le Shaykh ne s'arrêtentpas là et il convient d'examiner maintenant ce qu'est la semaineen islam.

On sait que traditionnellement, celle-ci débute par ledimanche et non le lundi. On appelle d'ailleurs ce jour jumwzttl-Ahad, à la fois premier jour de la semaine mais aussi jour del'I Inique ; Ibn Arabî le met d'autre part en correspondance avecle Soleil qui occupe le quatrième ciel et se trouve ainsi au centreîles sept planètes de notre monde.

l,e mercredi est, lui, traditionnellement mis en rapport avecMrreurc et, selon Ibn Arabî, svccsidnâ 'Isa (Jésus) auquel celui-11 miorde une importance toute particulière en tant que Sceauîle l.i .sainteté universelle34 et jour de la Lumière (nûr). Cette(timiuV. qui se trouve au centre de la semaine, est mise enirliinnn avec la lettre alif <\\\\, comme on le sait, dans leliiulisnie en général, le symbole de Dieu ou de l'Essence divinetfli i ii'iii de toute chose en accord avec sa valeur numérique (un)IM «un ns|>ei i (un simple trait vertical, forme qui, outre l'islam,A tlnitm* lieu à divers développements symboliques dans les||i nies (militions du christianisme au taoïsme).

• t 'Ai ,ihî enumère et commente ces correspondancesii l'iiiie les jours et les différents prophètes ; le shaykh al-

\. « Sache, mon fils, qu'à chaque jour [de la semaine]••I un prophète parmi les prophètes, duquel descend

Lui1, le ( u-ur de celui qui en est témoin, un secret dont" ilur.mi la journée et par lequel il prend connaissance

hose qui doit être connu. Ceci n'arrive qu'à ceux1 î un unir (éveillé].

' lui, iiiiMi.ul rst le Sceau des Prophètes, il existe un Sceau de la"» !iii|iirllr .uitun .saint n'atteindra plus ce degré « depuis.|t î MI m N - (f-'utûtiilt. II, p. 9) et ce Sceau est Jésus, non en

mi (i»d/J/J iiui.s en lant que, précisément, désormais déta-l'ttl.tiilir du f.til de la venue de sayyidinâ Muhammad.î I» lin tir» irmps, ce .sera en qualité d'héritier et de Sceauun un «nim h «)iii jppanienne la prophétie générale » (Ibid.,> l HII M- irpinicr« au Si'fau des saints de M. Chodkiewicz,i>!, k riniiiitliKiion ,uix Révélations de La Mecque, trad. A.

Page 9: Jean Annestay - Introduction à Ibn Arabi, Par-delà le miroir

22Par-delà le miroirIntroduction • '• .w,*'̂̂:!* ;23 h f . *- *iF * • ̂ *r J ^

« Le premier jour [i.e. le dimanche comme on l'a dit], c'estIdrîs3^ qui s'adresse à lui avec un secret lui révélant les causes deschoses avant l'existence de leurs effets. Le lundi, c'est Adam36 quis'adresse à lui avec un secret par lequel il prend connaissance desraisons pour lesquelles les stations croissent et décroissent selonles chercheurs et comment Dieu Se révèle Lui-même. Le mardi,c'est soit Aaron soit Yahyia (Jean-Baptiste)17 qui lui adresse unsecret par lequel il vient à savoir ce qui est bénéfique ou nuisibledans les influences qui descendent sur lui du monde del'Invisible. Le mercredi, c'est Jésus qui lui adresse un secret parlequel il vient à connaître la réalisation des stations, commentelles sont scellées et par qui. Le jeudi, c'est Moïse qui lui adresseun secret par lequel il vient à connaître les prescriptionsreligieuses et les mystères de la conversation intérieure. Levendredi, c'est Joseph qui lui adresse un secret par lequel il vientà connaître les mystères de la constante ascension à travers lesstations, le décret [divin] et où il est établi. Et le samedi, c'estAbraham qui lui adresse un secret par lequel il vient à savoircomment traiter les ennemis et quand on doit les combattre, etc'est [le lieu de] la présence des substituts (abdâl)™. »

35. Le prophète Idrîs est le patriarche que la Bible appelle Enoch (ou Hénoch).Arrière-petit-fils du Prophète Shiçe, il serait né cent ans après la mort d'Adam.Arrière-grand-père de Noé, il est dit qu'il fut transporté vivant au Paradis. Il est ditrésider, selon Ibn 'Arabî, dans te Soleil.36. Selon Ibn 'Arabî, Adam est dit résider dans la lune. Comme le remarque

Burckhardt, « il y a dans cette hiérarchie, le même rapport entre Hénoch [Idrîs] ciAdam qu'entre T'homme transcendant" et T'homme véritable" dans la doctrine'taoïste : Hénoch réside dans le soleil en tant qu'il représente l'"homme divin" par excellencc, ou le premier "grand spirituel" des fils d'Adam et, par conséquent, le "prototypehistorique" de tous les hommes ayant réalisé Dieu ; quant à Adam, il sera T'hommcprimordial" ou, selon l'expression d'Ibn 'Arabî, ['"homme unique" (al-insân al-mujrurl,par opposition à al-insân at-kâmil, ['"homme universel"), c'est-à-dire, il sera le reprcsentant par excellence de la qualité cosmique qui revient à l'homme seulement, et quis'exprime dans le rôle de médiateur entre la "terre" et le "Ciel". Ibn Arabî compare l.ilune au cœur de l'"homme unique", qui reçoit la révélation (tajallt) de l'Essence divine(Dktt)* (Clé spirituelle clé l'Astrologie musulmane, Milan, 1974, pp. 37-38).37. Qui est considéré, tout comme Aaron, dans l'islam, comme un prophète.38. Ibn Arabî, Mawâqi' al-nujûm, \£ Caire, 1965, p. 157. Le baïkii (pi. abdâî) CM

un des plus hauts degrés de la hiérarchie des saints ; selon la majorité des sources, Iciabdâl sont précédés seulement des prophètes, du Pôle (Qutb), de ses deux « licuhnants » (al-imâmân), des quatre « piliers » (awtâd) et aussi des sept afrâetdom ils soinen quelque sorte les substituts ; appelés aussi les « gardiens » (al-rukabâ), ils snnidécrits comme les saints cachés, inconnus de la multitude mais remplissant à l.i lui»la fonction de fondation et de support des affaires des hommes.

Dans le 'Anqâ'Mughrih, Ibn Arabî reprend cette énumérationet conclut significativement par ces mots : « Tels sont les Joursdes Gnostiques (ayyâm al-'ârifîn) et les étoiles rayonnantes desSphères des Voyageurs. »

On s'étonnera cependant qu'aucun jour n'ait été mis enirl.uion avec l'Envoyé, sayyidinâ Muhammad. Se fondant sur lekiiiih ayyâm al-shan, P. Beneito et S. Hirtenstein nous expliquent>|ii il n'en est rien et considèrent qu'il y a même trois façons de" ilcicrminer » le jour de l'Envoyé de Dieu. « La première

sisir à le rapporter au jour universel ou dit "connu" (ma'rûf),différenciation particulière, l'unité constituant "chaque

IMUI". |I)ans cette perspective] la réalité muhammadienne n'estC ' n lice à un jour spécifique car elle est considérée le principe• mlii.iv..mt toute chose. Son jour est la véritable unité du "jour",i '|urlqiif niveau qu'il puisse être considéré, que ce soit en tant

• I' mur, heure ou la semaine elle-même". »I ' un .mire côté, selon une autre interprétation, les jours

ulins du mardi et du vendredi peuvent être reliés plusulu u-im-nt au Prophète. Le mardi, en tant que le

ii mi I.IMI de lu semaine, se rattache au nombre 3, le1rs nombres impairs. Or, dans le chapitre des Fuçûç

nu . imsaur au Prophète, Ibn Arabî écrit : « Sa sagesseHi|Mil.uiir" (fardiyya) car il fut l'être le plus complet

ii il.MIS l.i présente humanité et c'est pourquoi leI nu ni ininmcnce avec lui et s'achève avec lui. Car

H |«inpli. ir alors qu'Adam était encofe entre l'eau etin. il'.mur part, dans son existence élémentaire et

il lui L S( r.m des prophètes. Le premier des nombres. i Ir unis duquel tous les autres nombres entiers

\u..i ri.ni il le plus grand symbole de son

IL ii I litii iisicin, <>/>. cit., p. 18.,i us îles icrmes : entier et singulier, d'une part, et la

I |ilu .M mus qu'elles ont du point de vue de la hiérarchie• !«• fardiyya renvoyant au plus haut degré de la hié-.In.un •, fi//r/jflj, i|ui réalisent justement en eux de façon

"i.in .il f./i-ff) dont on a dit qu'il en est la « durée ». ,il J'.inl

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^4 Par-delà le miroir

De même que du 3 dérivent les autres nombres en sorte qu'onpeut dire que ce nombre les synthétise, de même le Prophète, entant qu'Homme universel ou parfait, est dit posséder les Parolessynthétiques (jawâmi'u-l-kalim) qui symbolisent l'ensemble de lamanifestation. Le Prophète qui, cosmogoniquement, en tant quenûr muhammadiyya, est à l'origine de la création qu'il synthétisede même en lui en sorte qu'à l'instar de sidnâ Adam, il connaissaittous les noms considérés comme autant de prolongements de lanature de l'« homme parfait » ou de l'« homme universel ». Toutceci, par conséquent, le mettant en relation consubstantielle avecle vendredi qui, dans l'islam, est \zyawm al-jumua, littéralementet extérieurement, le jour de la réunion (des croyants) mais aussi,intérieurement, le jour de la synthèse (jarn).

Il en résulte que, sans qu'aucun jour ne lui soit attribuéexplicitement, le Prophète est au cœur de tous les jours car, entant que Sceau de la prophétie, il synthétise en lui les messagesdes différents envoyés qui le précédèrent.

Mois lunaire, semaine et perfection intérieure

On l'aura compris à ce qui précède, ces litanies présententun caractère d'élévation exceptionnel et elles ne sauraient êtretout à fait récitées comme la majorité de celles qui ont coursdans le soufisme comme l'a montré le jeu complexe de corres-pondances que présupposait le shaykh.

Et cela s'étend, on l'a vu, de la notion de jour à celle de semaineet on va le voir maintenant se prolonge en toute logique à lanotion de mois lunaire, et cela d'autant plus qu'Ibn Arabî merci)correspondance mois lunaire et perfection intérieure.

Selon lui, « il y a 28 degrés de l'existence qui correspondentaux 28 mansions de la lune et aux 28 lettres de l'alphabeiarabe42. Décrits par les 28 Noms divins, ils sont classés en

42. « Ce ne sont pas, comme le pensent les gens, les mansions de la lune qui repirs. ncent le modèle des lettres ; ce sont les 28 sons qui déterminent les mansions luiun.- Ibn 'Arabî cité par Burckhardt, op. cit., p. 39, qui commente cette affirmation en < •.termes : « Ces sons représentent en effet l'expression microcosmique et humaine ' «déterminations essentielles de l'Expir divin, qui lui-même est le moteur premiri ilwcycles cosmiques. Le Maître compte les 28 sons de l'alphabet arabe à partir .lipremière mansion lunaire, qui suit l'équinoxe de printemps, dans l'ordre ilr I. ni

Introduction • '•• -w.'C/'-v;!* > 25, •* / ; -" «-̂

" '•-.•y# : 'descendant à partir du principe de l'ordre lui-même, qui estappelé le Calame ou l'Intellect Premier43» jusqu'à la création del'homme. « Dans sa hiérarchie elle comprend aussi les degréscosmiques qui correspondent aux différents cieux, c'est-à-direttii ciel du zodiaque, au ciel des étoiles fixes et aux sept cieuxplanétaires. (...) Ces degrés, qui sont ici rapportés à certainesrelions du zodiaque, mesurées par des mansions lunaires,doivent en réalité être conçus en une succession "verticale" parr.i|»poit au cycle zodiacal, et il faut bien comprendre qu'il y a,il.ins «.vtte attribution d'une série de degrés cosmiques aux'\iaiions" lunaires, et par là aux régions zodiacales, comme une|mi|ci lion d'une hiérarchie "verticale" sur un plan "horizontal".

I I .1 hiérarchie des degrés cosmiques, qu'Ibn Arabî énumère.mi l'ordre des mansions lunaires, ne doit pas être comprise

.une une série de productions successives, mais comme uneIle iléliniiive de degrés d'existence ; car l'ordre de productionniH-spoiul pas à la hiérarchie définitive ; il est inverse suivantI l'.ijfii îles degrés de l'existence universelle et informelle, ou

,u;s inlerieurs au ciel des étoiles fixes, c'est-à-dire, desIn inonde individuel, et cela se comprend aisément, vu

l'iutlmtion des états supérieurs ne peut être conçue quei.,iiii |iiiieineni logique, dans le sens d'une différenciationII»- il IMIIII de l'unité de l'Être44. »

i*n h'venii plus précisément au mois lunaire, selon Ibni i le* m.iîtrrs du soufisme en général, les 28 jours de ce

,'lh"ii.'ll»|lir Min.fv.ivc, en commençant par le hiatus (hamza), et allant1.1 ' • ! .-il ptivMiiii par les palatales et les dentales. Si l'on tient compte

i n>« pus il proprement parler un son, mais seulement l'instanti I Vli H in ion, la série des sons attribués aux mansions lunairesutil jm Ir ii'itii' ces deux lettres composant le Nom divin

i l'Wiur ri identique à Elle-même. »i Km I liticiiMcin, of>. cit., p. 101. Selon un hadîth, « La pre-

i *o li1 ( '.il.iriie. » lx- Calante (al-Qaiam) est un autre desiiiiinllrnnr Kn etïet, « la Plume divine symbolise l'Intellect.. ih'.ini «nus la dkïi'e divine les Idées éternelles sur la Table

ni Imjutiriiii.iliic'.s des êtres à venir. Dans la Genèse dui du l'rir i-i la 'labié gardée (al-iawh al-mahjuz), sur

Util* .!< l'Ame universelle (al-Na.fiat-kulliyya), celui dejinln i ni topoiul aux [tôles actif et réceptif ou, si l'on

• » t n<mii|iir!> de h manifestation universelle. Sur toutiliui iMlt Ni'i't'ltittiim tir La Mecque (Paris, 2009).

H '"H

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Par-delà le miroirIntroduction27

mois renvoient au nombre 14 qui est le symbole de l'âmeparfaite (nafi kâmila), c'est-à-dire de l'âme réalisée, donc en étatde parfaite réceptivité à l'influence spirituelle. De fait, commele notent Beneito et Hirtenstein, dans la culture arabe, on dirad'une beauté qu'elle est une « jeune fille de quatorze ans ». Eneffet, dans le quatorzième poème du Tarjumân al-a$hwâq, Ibn'Arabî écrit parlant d'une jeune femme : « Elle est dotée del'attribut de la perfection en sorte qu'elle est dotée du plusparfait des nombres, qui est le 4 et qui est aussi le 10 [car1+2+3+4 = 10]. C'est de là que provient le 14 [= 4+10]. Lenombre 4 contient ainsi le 3 et le 2 et le 1, tout aussi bien quele 1045. »

II relie par ailleurs assez, explicitement cette beauté et cetteperfection au nombre quatorze et à la perfection du moislunaire dans un autre poème du même recueil :

Entre Adhri'ât et Busrâ une jeune fdle de quatorze (ans)apparut à mon regard comme une pleine lune.

Elle était élevée en majesté au-dessus du temps et le transcendaiten splendeur et en gloire.

Toute pleine lune, quand elle atteint sa perfection, subit undécours pour en faire un mois complet,

Excepté celui-là : car elle ne se meut pas dans les signeszodiacaux ni ne transforme le pair en impair4''.

Tu es un ciboire contenant odeurs et parfums mêlés ; tu esune prairie produisant les herbes printanières et les fleurs.

La beauté atteint en toi sa plus haute limite : un autre mimême est impossible47.

On voit que dans ce poème Ibn 'Arabî met là encore- enrelation la perfection et le 14 et relie aussi cette perfection à l.i

45. Ibn 'Arabî, Dhakhâ'ir al-a'lâq. Le Caire, 1995, p. 443.46. « L'idée est ici qu'en tant que support de la manifestation divine, elle ne .1 i

point comme la lune qui, une fois parvenue à son plein, recommence il clôt lim i * i .»se mouvoir. Dans cette station aïtière, qui correspond à la station de l'Uni, ut*(maqâm al-wâhidiyya), elle est seule .si bien qu'elle ne transforme pus K \>.n>impair : si l'on considère It-.s tn-.iiino. clic I-M in.u ti'vtiMi-, d si l'un uuisiili n I i luiqu'elle manifeste, clic est totalement clï.uc'c en Lui. » (Non- d'A. IViiiu . • I non lp. 154 de l'édition Dm• (.ïul.it du l.ir/itni.iti. llrvnmili. l'Jdd)47. làrjurni)tt itl .ti/Ht'dff, XL.

forme de la pleine lune (qui est celle de la sphère parfaite,•>\e de l'éternité). Ibn Arabî écrit lui-même à ce sujet que•• li- dévoilement (tajallî) est semblable à la lune la nuit où elle• i pleine. » En sorte qu'elle est l'attribut de l'être réalisé ou« Illuminé » par la vision de la Vérité. « En d'autres termes,i|ii.iiiil ni atteins la perfection, la Vérité te parle en te dévoilant11 IHIU- en tant que pleine lune car II est toute chose existant à

i . Son Essence48. »toujours sur le 14, on soulignera, par ailleurs, que ce

lue " est le double de 7 : ce qui renvoie aux 7 versets de lat.itti'.i ijui sont connus comme les "sept redoublés" ($ab'

!i,lnf) ou aux sept cieux et aux sept terres de la cosmologieni|th .pu incluent les mondes de la manifestation des plus•. ,MI\s bas4''. » Renvoyant aussi aux sept jours de la

, l.i semaine est, comme on l'a vu, un symbole de laMIMÉ universelle elle-même. De même la tétraktys

l.i doctrine pythagoricienne de laquelle cetten, un l'iiura compris, n'est pas sans rapport. La

in-, comme le sait, la série des quatre nombresl'im l.i Minime est égale à dix. Elle est mise en relation

pvi.imid;»lc qui est dite contenir la somme des. i . lie ruii considérée, selon Jamblique, comme

i I • n.unie de l'éternelle nature ». Selon Pythagore,l-t, jt.iti.iii. (",c qui n'est pas contradictoire avec

I H'ii 'At.ibi qui considère, lui, le 14 comme étantil MI |<nr.(|iie celui ci le décompose comme étant la. i du H) ou. si l'on préfère, la mise en évidence du

du di n.un in lui. Or, comme le rappellei i i si p.uiout et toujours le nombre de

elle"' » ei les quatre âges de l'humanité,M I. -|u.itir s.tisons, les phases lunaires, les

i 'ii sont les traces en ce monde. Laiiu.ts nombres produisant le dénaire,l'I'i dniit icMci de la manifestation

i'M»/Wn fHHtt.imfHt,tu\f la •I- ..... "'

Page 12: Jean Annestay - Introduction à Ibn Arabi, Par-delà le miroir

Par-delà le miroir'

Introduction

universelle, elle est la jonction des formes rectilignes (lecarré étant le symbole géométrique du quaternaire) et curviligne(le cercle étant le symbole géométrique du dénaire).

Mis en relation avec les sept redoublés de la Fâtiha, les septjours de la semaine sont aussi un symbole du cycle macrocos-mique. Ce que le shaykh dit de la Fâtiha peut être appliquésouvent de façon quasi identique à la semaine envisagée en tantque cycle sacré, à savoir que celle-ci « contient à la fois les signi-fications de la Seigneurie et celles de la servitude (...) enfermeles (sept) attributs (de l'Essence) (...) est la somme immense (al-qurân al-'azîm) car elle enveloppe le contingent et l'éternel51. » Sil'on veut bien développer cette correspondance entre les septjours de la semaine et les sept versets de la Fâtiha, on pourraconsidérer que, comme la Fâtiha, la semaine « a deux côtés etun milieu, ou encore deux parties et un lien entre elles », cor-respondant l'une à la « part de Dieu » et l'autre à la « part del'homme » en relation avec le hadîth qudsî enseignant : « J'aidivisé la prière [entendue comme la Fâtiha qui en est unélément fondamental] en deux moitiés entre Moi et Monserviteur. » Ce qu'Ibn 'Arabî commente en disant qu'« un de sescôtés est suspendu aux réalités divines et l'autre se rattache auxréalités humaines tandis que son milieu procède des unes et desautres52. » II en résultera une autre forme de sacralisation de-.différents jours qui composent la semaine, les uns étant mis enrelation avec l'essence divine et les autres avec la naturehumaine. Ce qui transposé à l'échelle d'un mois (dontmultiplié par quatre) renforce encore le lien de tout ceci avec l.inotion de perfection contenue dans cette conception du tenipnou, si l'on préfère, souligne encore plus la trace de l'éterniu .msein de la temporalité.

On terminera ces remarques très générales, en notant qu> Idiagrammes des correspondances existant entre les diffeuin-,jours de la semaine comme du mois ne sont pas non plus vm*rapport avec les motifs bien connus des arabesques musulm.mrnet tout particulièrement avec la figure du polygone étoile qui • ieffectivement un symbole fameux de ce passage à la limih j <>lequel le spirituel réalise une rupture de la dualité et passe d uni

51. Ibn 'Arabî, Tanazzulât mawçtlliyya, Le Caire, 1961.52. Ibid.

i itnscience individuelle à une conscience universelle par laquelleil ne vit plus lui-même mais le Soi en lui et vers laquelle ceuxi|iii récitaient ces awrâd ne manquaient de tendre.

( ,ct ensemble de références qui pourraient être prolongées àM.n dire à l'indéfini renvoie à une immensité qui n'est autre quel'Immensité divine dont la richesse de la tradition est un écho.1. -nu-ii éveiller en nous le souvenir. Rien n'est hasardeux dansI H eption des jours et du temps que développe Ibn 'Arabî,UIM, llr ne lui appartient d'ailleurs pas en propre, mais relève.1 MM rnsi-mble qui, s'il a été exposé de façon théorique, plus

uln-Kment par le shaykh, n'est pas pour autant un concepti.lncl mais le symbole d'une réalité transcendant à la fois

ulus ci les systèmes de pensée.

Jean ANNESTAY