Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

23
Directive sur les procédures concernant les personnes vulnérables comparaissant devant la CISR (Directive 8) Conséquences pour les cliniciens Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations Université de Montréal et CSSS de la Montagne Université McGill

description

Directive sur les procédures concernant les personnes vulnérables comparaissant devant la CISR (Directive 8) Conséquences pour les cliniciens. Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations Université de Montréal et CSSS de la Montagne Université McGill. - PowerPoint PPT Presentation

Transcript of Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Page 1: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Directive sur les procédures concernant les personnes

vulnérables comparaissant devant la CISR (Directive 8)

Conséquences pour les cliniciens

Janet Cleveland, Ph.D.

Chaire de recherche en droit international des migrations

Université de Montréal

et

CSSS de la Montagne

Université McGill

Page 2: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Directive 8: adoptée 15 décembre 2006

Objet: “mettre en place des adaptations d’ordre procédural” pour les personnes identifiées comme vulnérables par la CISR “afin de s’assurer qu’elles ne soient pas désavantagées lorsqu’elles présentent leur cas » Vise uniquement des assouplissements de la procédure Codifie les ‘bonnes pratiques’ (rien de nouveau)

Portée: s’applique aux trois divisions de la CISR Demandes de statut de réfugié Révision de détention Renvoi

Ne s’applique pas à l’ERAR ou à la demande de résidence basée sur des considérations humanitaires (CIC ou ASFC)

Page 3: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Personne vulnérable: définition• Personne dont la capacité de présenter son cas est grandement diminuée• Vulnérabilité due à des facteurs tels que:

1. Facteurs expérientiels:Le fait d’avoir été victime ou témoin de torture, de

génocide, de viol, de persécution en raison du sexe, ou d’autres sévices graves

2. Caractéristiques personnelles:La maladie mentale L’âge (mineurs, personnes âgées)La maladie physique Un handicap mental ou physique

• Parfois aussi: proche parent affecté par la situation de la personne vulnérable

Page 4: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Restrictions

Beaucoup d’individus éprouvent des difficultés lors des procédures CISR en raison de la langue, de la culture, des expériences traumatisantes, etc.

MAIS

Directive 8 s’applique uniquement “aux cas de vulnérabilité les plus sévères” , des individus “qui éprouvent des difficultés particulières et qui doivent faire l’objet de considérations spéciales sur le plan procédural”

Donc: dans votre rapport, expliquer en quoi les difficultés éprouvées par cette personne sont particulièrement sévères et limitent sa capacité de faire valoir son cas devant la CISR

Page 5: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Personnes vulnérables: exemples• Femme éthiopienne, trouble bipolaire avec caractéristiques psychotiques, tentative

de suicide, hospitalisations multiples

• Homme rwandais témoin du génocide, très anxieux et passif, confusion sur détails et dates

• Mineure, aggressions sexuelles multiples, abus physique et émotionnelle – SSPT probable

• Jeune femme, handicap intellectuel, violée par son fiancé

• Homme schizophrène et toxicomane – demande de renvoi pour actes criminels

• Mineure, aggressions sexuelles et violence familiale sur longue période, anxiété sévère

• Femme, violence conjugale, SSPT, hémorragies subarachnoïdiennes suite à un anévrisme cérébral entraînant des problèmes de mémoire et de motricité

- a

Page 6: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Personne non-vulnérable: exempleFemme, Zimbabwe, 57 ans, violence conjugale,

contexte de violence politique, SSPT, flashback observé par psychiatre, dépressive, problèmes de concentration et mémoire Diagnostic de SSPT ou fait d’avoir vécu des trauma

graves ne rendent pas nécessairement la personne vulnérable au sens de la Directive 8

Pas de difficultés particulièrement sévères Pas démontré qu’elle est incapable de présenter son cas

Le commissaire accepte cependant d’ordonner plusieurs des adaptations procédurales demandées

Page 7: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Représentant désigné vs vulnérabilité

Désignation d’un représentantSi moins de 18 ans OU incapable d’apprécier la

nature des procédures

Vulnérabilité Capacité grandement diminuée de présenter

son cas en raison de troubles de mémoire, manque de cohérence, difficulté à relater les événements traumatiques, etc.

MAIS pas nécessairement une incapacité d’apprécier la nature des procédures

Page 8: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Identification de la vulnérabilité

• La personne peut être identifiée comme vulnérable à tout moment

• Souhaitable de l’identifier le plus tôt possible

• La CISR, l’avocat ou “toute autre personne” peut initier le processus pour identifier la personne comme vulnérable

Page 9: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

But des adaptations procédurales

La vulnérabilité d’une personne peut notamment:- affecter sa mémoire, son comportement et sa

capacité de relater des événements pertinents- affecter la cohérence de son témoignage- l’amener à craindre les personnes en autorité- l’amener à être réticente ou incapable de parler

de ses expériences

But des adaptations procéduralesAtténuer ces difficultés afin que la personne

ne soit pas désavantagée dans la présentation de son cas

Donc: garantir l’équité (plus que de diminuer la souffrance)

Page 10: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Adaptations procédurales - exemples• Priorité (ou délai) pour l’audience • Permettre à l’avocat du demandeur de procéder

en premier • Créer un contexte plus informel • Sexe du commissaire, interprète, agent • “Permettre toute autre adaptation d’ordre

procédural raisonnable dans les circonstances” Consulter l’avocat pour savoir quelles

recommandations seraient utiles Soyez créateurs!

• En interrogeant le demandeur, la CISR “s’efforce d’éviter de causer un traumatisme ou un nouveau traumatisme à une personne vulnérable” Voir Guide de formation CISR concernant les victimes

de torture

Page 11: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Comment prouver la vulnérabilité?

• Rapport détaillé élaboré par un expert suite à une évaluation approfondie (si possible)

• Rapport portant sur “la difficulté particulière qu’éprouve la personne à composer avec le processus d’audience, et notamment sa capacité de témoigner avec cohérence” Évaluer l’effet des problèmes cognitifs et

psychologiques du demandeur d’asile sur sa capacité de comprendre les procédures et de témoigner de manière cohérente à l’audience

Page 12: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Rapport d’expert: contenu8.3 Le rapport d’expert devrait mentionner:a) la qualification et l’expérience particulières du

professionnel, qui indiquent une expertise pertinente par rapport à la condition particulière de la personne vulnérable;

b) les questions qui ont été posées à l’expert par la personne qui a demandé le rapport d’expert;

c) le fondement factuel sur lequel s’appuie l’avis de l’expert;

d) la méthodologie utilisée par l’expert pour évaluer la personne, notamment si une entrevue a été tenue ou non, le nombre et la durée des entrevues, si des tests ont été administrés ou non, et, dans l’affirmative, la nature de ces tests et la signification de leurs résultats;

Page 13: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Contenu du rapport d’expert (suite)

e) des précisions à savoir si la personne suit un traitement, et, dans l’affirmative, la nature du traitement, et s’il permet de contrôler la condition de la personne vulnérable;

f) des précisions à savoir si l’expert procédant à l’évaluation traitait également la personne au moment de la production de son rapport;

g) l’avis de l’expert concernant la condition de la personne et sa capacité à participer au processus d’audience, y compris toute adaptation d’ordre procédural qu’il pourrait recommander ainsi que les motifs de cette recommandation.

Page 14: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Rapports d’experts - limites

8.4 Les experts ne devraient pas présenter d’avis sur des questions qui relèvent de la compétence exclusive du décideur, notamment le bien-fondé du cas de la personne concernée.

8.5 L’avis d’un expert ne constitue pas en lui-même une preuve de la véracité des renseignements sur lesquels il repose. Le poids accordé au rapport est notamment fonction de la crédibilité des faits sous-jacents à l’appui de l’allégation de

vulnérabilité.

Page 15: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Critiques • Uniquement procédural• S’applique uniquement aux « cas les plus sévères»

Risque de restreindre le concept de vulnérabilité

• Comment prouver la vulnérabilité? Décision rendue avant ou en début d’audience sur la foi

des documents au dossier – peut être fondée sur des faits dont la crédibilité n’a pas été testée

Décision sur le fond peut être négative même si la personne a initialement été jugée vulnérable

Est-ce que cela signifie que, pour la reconnaissance de vulnérabilité, la CISR accepte le rapport d’expert à sa face même (sujet à 8.3), sans se soucier de la crédibilité du récit du demandeur? Ou non?

Qu’est-ce qui permet à un commissaire de mettre de côté le rapport d’expert et de conclure que la personne n’aura pas de difficulté particulière à présenter son cas?

Page 16: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Preuve d’expert – admissibilité

Règle générale: la preuve d’opinion est inadmissible

La preuve d’expert est une exception à cette règle, mais seulement si:L’expert a les qualifications pertinentesL’opinion relève du domaine d’expertise du

clinicienL’opinion est basée sur un examen approfondi

de la personne Les faits sur lesquels s’appuie l’opinion sont

crédibles

Page 17: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Critiques de la CISR sur les rapports d’experts

• Rapports peu détaillés, stéréotypés (‘coupé-collé’)

• Empiéter sur la juridiction de la CISR (ex., se prononcer sur le bien-fondé de la demande)

• Rapports basés uniquement sur la parole du demandeur d’asile Dans un tel cas, si le commissaire ne trouve pas le

demandeur d’asile crédible, il ignore souvent le rapport

DONC• Appuyez votre opinion sur les symptômes

spécifiques de l’individu • Limitez-vous à votre domaine d’expertise clinique• Mettez l’accent sur les faits observés• Pour les symptômes auto-rapportés: mettre

l’accent sur la vraisemblance clinique

Page 18: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Compétence exclusive du clinicien

La CISR ne peut pas ignorer:- Les comportements et signes directement

observés par le clinicien Ex. Y tremblait en me racontant comment il a été frappé

par des soldats OU Z semblait confus quand on a abordé la question du viol

Il s’agit d’un témoignage factuel du clinicien au sujet de faits observés

- Le diagnostic

Page 19: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Symptômes auto-rapportés: compétence partagée

• Symptômes rapportés par la personne (ex., insomnie, cauchemars, flashbacks) L’interprétation des symptômes relève de l’expertise du

clinicien MAIS Le clinicien n’a aucun moyen de vérifier si la personne

vit réellement les symptômes rapportés Si le commissaire trouve la personne non-crédible à

l’audience lorsqu’elle décrit ce qu’elle a vécu, il sera sceptique face aux symptômes auto-rapportés et au rapport de l’expert en général

Important d’expliquer la vraisemblance clinique de ces symptômes (cohérence avec les signes observés, le tableau clinique typique, etc. ), puisque cela relève de votre expertise

Page 20: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Symptômes et trauma: compétence partagée

Le clinicien n’a aucune expertise quant à la véracité du récit du demandeur d’asile

Par contre, le clinicien a une certaine expertise quant à la compatibilité entre les symptômes et le trauma allégué Il faut expliquer le fondement clinique de cette opinion

(ex., ces symptômes correspondent au séquelles typiques du type d’événement allégué)

“Les symptômes sont compatibles avec [antécédents allégués]” ET NON PAS “Les symptômes sont dûs à …”

Lorsque vous résumez le récit du demandeur d’asile Inclure le strict minimum de détails nécessaire pour

justifier votre opinion sur la compatibilité entre les symptômes et les antécédents

ÉVITER de mentionner des dates ou tout autre fait qui n’est pas essentiel pour fonder votre opinion

Page 21: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Opinion sur la sincérité

ÉVITER d’écrire: [X] est clairement un réfugié ou [X] est visiblement une personne honnête

MAIS vous pouvez écrire (par exemple):“Je trouve que X a relaté les faits qu’il a vécus avec

beaucoup de sincérité et d’ouverture. Ceci me donne particulièrement confiance en mon diagnostic”, ou

“ Z a répondu à mes questions de manière très honnête et directe, ce qui renforce mon opinion que ses symptômes sont compatibles avec les faits traumatiques allégués”

Page 22: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Prédictions : comportement à l’audience

• Décrire les comportements pertinents observés lors de l’entrevue, tels que la confusion, l’incohérence, l’absence d’affect, etc.

• Expliquer pourquoi vous croyez que ceci est imputable aux événements traumatiques ou aux problèmes cognitifs ou psychologiques de l’individu

• Faire le lien entre vos prédictions et les caractéristiques particulières de cet individu

• Soyez très prudents dans vos prédictions du comportement probable lors de l’audience CISR – une prédiction erronée mine votre crédibilité

• Expliquez la difficulté de prédire comment chaque individu réagira dans différents contextes

Page 23: Janet Cleveland, Ph.D. Chaire de recherche en droit international des migrations

Guide de formation sur les victimes de torture - CISR

www.irb-cisr.gc.ca/fr/ausujet/tribunaux/spr/victorture/index_f.htm

Directive 8

www.irb-cisr.gc.ca/fr/references/politique/directives/vulnerable_f.htm