Iraniens Et Saoudiens à l'Épreuve Des Révoltes Arabes

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  IRANIENS ET SAOUDIENS À L'ÉPREUVE DES RÉVOLTES ARABES  Mohammad-Rez a Djalili et Clément Therme I.F.R.I. | Politique étrangère 2012/1 - Printemps pages 111 à 122  ISSN 0032-342X Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-politique-etrangere-2012-1-page-111.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Djalili Mohammad-Reza et Therme Clément, « Iraniens et Saoudiens à l'épreuve des révoltes arabes », Politique étrangère , 2012/1 Printemps, p. 111-122. DOI : 10.3917/pe.121.0111 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour I.F.R.I..  © I.F.R.I.. Tous droits rés ervés pour tous pay s. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.    D   o   c   u   m   e   n    t    t    é    l    é   c    h   a   r   g    é    d   e   p   u    i   s   w   w   w  .   c   a    i   r   n  .    i   n    f   o   -    I   n   s    t    i    t   u    t    d       E    t   u    d   e   s    P   o    l    i    t    i   q   u   e   s    d   e    P   a   r    i   s   -   -    1    9    3  .    5    4  .    6    7  .    9    1      1    3    /    0    8    /    2    0    1    3    0    9    h    3    6  .    ©    I  .    F  .    R  .    I  . D m e é é g d s w c r n n n u d E u P q d P s 1 5 6 9 1 0 2 0 © F R

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  • IRANIENS ET SAOUDIENS L'PREUVE DES RVOLTES ARABES

    Mohammad-Reza Djalili et Clment Therme

    I.F.R.I. | Politique trangre

    2012/1 - Printempspages 111 122

    ISSN 0032-342X

    Article disponible en ligne l'adresse:--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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    Djalili Mohammad-Reza et Therme Clment, Iraniens et Saoudiens l'preuve des rvoltes arabes , Politique trangre, 2012/1 Printemps, p. 111-122. DOI : 10.3917/pe.121.0111--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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    Iraniens et Saoudiens lpreuve des rvoltes arabesPar Mohammad-Reza Djalili et Clment Therme

    Mohammad-Reza Djalili est professeur honoraire au Graduate Institute de Genve etauteur de LIran de A Z (Bruxelles, Andr Versaille, 2010).

    Clment Therme est chercheur au Graduate Institute de Genve et membre associ auCentre danalyse et dintervention sociologiques (CADIS) de lcole des hautes tudes ensciences sociales (EHESS) Paris.

    partir dune mme dfiance vis--vis des ruptions dmocratiques maisreposant sur des intrts spcifiques et des relations opposes avecWashington, les jugements de Thran et de Riyad sur les rvolutionsarabes divergent fortement. Do une vritable guerre froide entre lesdeux capitales, avec toutes les consquences imaginables pour largion, en particulier en Irak ou en Syrie. Les deux logiques conserva-trices sont ainsi mises en cause, en interne et dans leur diplomatiergionale.

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    Face au printemps arabe , les deux grands pays riverains du golfePersique, Arabie Saoudite et Iran, rivaux depuis plus de 30 ans, ont eu,comme il fallait sy attendre, deux interprtations, deux attitudes diff-rentes. Ces visions et actions diamtralement opposes engendrent uneaggravation de la guerre froide entre Thran et Riyad et un nouveaupositionnement de lensemble des huit tats qui jouxtent le Golfe. Par-delces visions antinomiques des rvoltes arabes, lArabie Saoudite et lIranont vu leurs poids rgionaux respectifs subir des volutions paradoxales :dune part, des dictatures allies de lArabie et de lOccident ont trenverses, ce qui renforce par dfaut la posture diplomatique iranienne ;dautre part, la vague dmocratique, soutenue, bien que tardivement, parlOccident, reprsente terme une menace existentielle pour la thocratieislamiste de Thran. En revanche, le risque dislamisation par le haut desmouvements spontans et dmocratiques pourrait constituer un lmentplutt positif dans les perspectives saoudiennes et iraniennes. LArabieSaoudite pourrait apparatre comme le principal bnficiaire des rvoltesarabes dans une lecture privilgiant lanalyse duMoyen-Orient laune duseul hard power1. Il est vrai que, alli deWashington et principal producteur

    1. D. Ignatius, Saudi Arabia Expands its Power as US Influence Diminishes , The Washington Post,19 novembre 2011.

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    dhydrocarbures de lOrganisation des pays exportateurs de ptrole(OPEP), le rgime saoudien apparat comme la premire puissancergionale. Force est pourtant de constater une rosion du soft powersaoudien dans un contexte de dmocratisation/islamisation des systmespolitiques.

    Pour comprendre laccentuation des tensions irano-saoudiennes, il fautdabord expliquer et comprendre les points de vue des deux pays sur cesmmes vnements, ainsi que les effets des rvoltes arabes sur les hard etsoft powers des deux pays. Il convient ensuite danalyser les consquencesrgionales de la guerre froide irano-saoudienne, qui provoque la fois unebipolarisation accrue de la situation gopolitique au Moyen-Orient et unrisque de transposition du conflit entre Riyad et Thran, notamment enIrak ou en Syrie. Enfin, on peut mettre en vidence laffaiblissement deleurs systmes politiques respectifs, qui ne peuvent apparatre comme desmodles permettant de rpondre aux nouvelles demandes dmocratiquesdes socits de la rgion.

    Visions saoudienne et iranienne des rvoltes arabes :la dimension antidmocratique

    Limpact des rvoltes arabes nest pas uniforme. LArabie Saoudite nat touche quindirectement. Anticipant une possible contagion, lesdirigeants saoudiens ont pris des dcisions visant amliorer la situationsocio-conomique du pays : le roi a ainsi fix comme priorit la lutte contrele chmage des jeunes (en Arabie Saoudite, 39 % des jeunes de 20 24 anssont au chmage). Au lendemain de la chute dHosni Moubarak et deZine el-Abidine Ben Ali, le roi Abdallah ben Abdelaziz Al-Saoud aannonc le dblocage de 35 milliards de dollars pour financer desprogrammes sociaux : les demandes de rforme de la socit civile serontpeut-tre contenues court terme, mais plus long terme le statu quosemble difficilement soutenable.

    Il sagit aussi de contrler et de rprimer la contestation chiite,notamment dans la rgion de Qatif (province orientale dArabie Saoudite).Enfin, il faut mettre en place quelques rformes modestes au plan poli-tique et au niveau de ladministration (lections municipales), pourmasquer la dimension autocratique et radicale, au plan religieux delidologie de la dynastie des Al-Saoud. Le risque existe dune contagiondu printemps arabe la population saoudienne, du fait dun dcalagecroissant entre la dynastie rgnante et les aspirations populaires. Ici aussi,les rseaux sociaux pourraient faciliter lexpression des mcontentementsdans lespace public : lArabie Saoudite a un taux dutilisation dInternetsuprieur celui de lIran ou de lgypte.

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    Ainsi le pilier de lalliance anti-iranienne dans le Golfe semble-t-il fragi-lis au plan interne. Manifestement, lArabie Saoudite, avec lappui desautres membres du Conseil de coopration du Golfe (CCG), est en train decrer une sainte alliance contre le printemps arabe renforant aupassage la pertinence de lanalogie avec le Printemps des peuples2 de1848 LArabie Saoudite se veut dsormais une puissance du statu quo,qui nhsite pas intgrer dans une mme politique rgionale une allianceavec les pays occidentaux et un soutien financier et logistique des mouve-ments salafistes, notamment en Syrie et en gypte. En outre, pour projetersa puissance sur la scne rgionale, Riyad instrumentalise le CCG.

    Lambition rgionale de Riyad sinscrit dans le contexte de tensionsrcurrentes avec son principal alli, Washington : quelques doutes sontapparus quant au soutien des Amricains leurs allis rgionaux aprsla chute de Moubarak. Pour Riyad, il sagit aussi de grer la perte de

    Source : C. Rhoads et F. Fassihi, Iran Vows to Unplug Internet , Wall Street Journal, 28 mai2011.

    2. T. de Montbrial, Perspectives , in T. de Montbrial et P. Moreau Defarges (dir.), Ramses 2012.Les tats submergs ?, Paris, Dunod, 2011, p. 17.

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    puissance de lalliance sunnite, du fait notamment des incertitudes surlavenir de lgypte et du risque de voir merger un ensemble gopoli-tique rassemblant lIran, lIrak, la Syrie et le Liban, dans lequel lessunnites seraient durablement exclus du pouvoir. Au niveau de la pnin-sule, il sagit de grer la situation au Ymen et dempcher tout chan-gement politique Bahren. Cette hostilit de Riyad aux rvoltes arabessuscite la rprobation de Washington mais, pour rsister aux pressionsamricaines, Riyad agite le spectre de la menace iranienne . Autrementdit, la dnonciation de linterfrence iranienne Bahren ou dans la rgionde Qatif3 sert de justification la rpression de la contestation populaire

    chiite par les monarchies sunnites. Depuis la rvo-lution islamique de 1979, Riyad impute gnrale-ment les tensions internes dues la communautchiite Thran, sans que la ralit du soutien oude la manipulation iranienne des chiites saoudiens

    soit avre. Cette stratgie dinstrumentalisation de lIran pour justifier lescontestations chiites saoudiennes a t particulirement utilise aprslintervention militaire en Irak4 de 2003 ; face aux rvoltes arabes, lesdirigeants saoudiens ont une fois encore recouru une rhtorique anti-iranienne qui permet de ddouaner la monarchie saoudienne de sesresponsabilits vis--vis de sa propre population chiite.

    La recherche de la stabilit rgionale par toutes les monarchies ptro-lires sassimile galement un moyen de contenir lIran, de constituer unaxe sunnite conservateur et de renforcer les orientations scuritaires duCCG. Cest dans le cadre de ce dernier objectif quil faut comprendre laproposition de coopration entre lOrganisation du trait de lAtlantiquenord (OTAN) et le CCG. Avec lintervention de lOTAN en Libye, lepartenariat avec les pays du Golfe sest dvelopp de manire signifi-cative en 2011, ce qui pourrait permettre une institutionnalisation delalliance de scurit entre pays occidentaux et pays membres du CCG5.Le printemps arabe a aussi pouss Riyad afficher sa prfrence pourle CCG, organisation rgionale valorise au dtriment de la Ligue arabe,divise6 et surtout permable linfluence iranienne du fait de la prsence

    3. En novembre 2010, quatre citoyens chiites de la province orientale de Qatif ont t abattus par lesforces de lordre saoudiennes. Le ministre de lIntrieur a dclar que les forces de scurit avaient ragi des tirs de manifestants agissant suivant des ordres de ltranger . Voir Time for Saudi Arabia toEmbrace its Shias , AFP, 26 novembre 2011.4. Sur la communaut chiite dArabie Saoudite et ses relations avec la monarchie, voir J. Teitelbaum, The Shiites of Saudi Arabia , Current Trends in Islamist Ideology, vol. 10, 2010.5. I. Franois, NATO and the Arab Spring, Institute for National Strategic Studies (INSS), NationalDefense University, octobre 2011, Transatlantic Current , n 1, p. 2.6. M. Kamrava, The Arab Spring and the Saudi-Led Counterrevolution , Orbis, vol. 56, n 1, 2012,p. 99-101.

    Les tensionsrcurrentes entre

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    en son sein du Liban, de la Syrie et de lIrak. LIran est donc redevenulaccus principal des rgimes du Golfe, qui voient aisment la main deltranger dans les troubles que traversent les monarchies de la rgion.

    La menace dmocratique se transforme donc en menace iranienne. Cesont les manifestations violentes aux frontires de lArabie Saoudite, Bahren ou au Ymen, qui ont pouss les autorits saoudiennes organiserla contre-rvolution au niveau rgional7. Pour ce faire, Riyad a propos quele CCG intgre, au mpris de la gographie8, la Jordanie et le Maroc, qui nesont pas, de plus, producteurs de ptrole. Cette campagne idologiquesaoudienne sest accompagne de la dnonciation sans relche des inter-frences iraniennes dans la pninsule Arabique, comme si les mouvementsde contestation des rgimes autocratiques taient toujours dclenchsdepuis Thran.

    lorientation scuritaire pro-occidentale des monarchies du Golfe secombinent les intrts conomiques des producteurs de ptrole. Linter-ruption des exportations du pays a t lune des consquences de linter-vention de lOTAN en Libye. Pour pallier cette interruption, les miratsarabes unis (EAU), le Kowet et lArabie Saoudite ont dcid daugmenterleur production et leurs exportations9. Les effets conomiques du prin-temps arabe sont galement positifs pour lIran : le soulvement anti-Kadhafi de fvrier 2011 se traduit pour une courte priode par uneaugmentation de la demande internationale de ptrole iranien10. Aubainepour Thran qui, du fait des sanctions financires de Washington lencontre des banques iraniennes, vendait difficilement son ptrole sur lemarch international : le pays avait t oblig de mettre en place, en 2009,une politique de stockage du brut enmer dans des tankers11. En dpit de cessanctions, les dirigeants iraniens dcident alors de satisfaire la demandeinternationale en vendant plus de ptrole, comme nimporte quel autrepays de lOPEP. Il est vrai que la quantit de ptrole stock dans les tankersdu Golfe reprsentait la mi-fvrier 2011 20 millions de barils. La criselibyenne a aussi entran une augmentation significative du prix du brutiranien, avec un prix moyen de 104,96 dollars le baril au 26 fvrier 2011.Cette amlioration a cependant t de courte dure puisquen ce dbutdanne 2012 la mise en place progressive dun embargo ptrolier par lespays occidentaux rduit dores et dj les capacits dexportation de lIran.

    7. V. Nasr, Will the Saudis Kill the Arab Spring? , Bloomberg, 24 mai 2011.8. A. Gresh, Sisme gopolitique au Proche-Orient , Le Monde diplomatique, dcembre 2011, p. 8.9. F. Beaug, Les pays concerns par le printemps arabe connaissent une forte chute de leurcroissance conomique. Les ptromonarchies du Golfe ont profit de leffondrement de la production enLibye , Le Monde, 26 novembre 2011.10. Dclaration dAhmad Ghalebani, vice-ministre du Ptrole iranien, 25 fvrier 2011.11. Very Large Crude Carrier (VLCC).

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    Par ailleurs, lIran regarde les rvoltes arabes avec un intrt certainmais aussi avec des proccupations essentiellement lies leur dimensiondmocratique. Linfluence des rvoltes arabes sur la politique intrieureiranienne reste relative. En Iran, au moment du dclenchement du printemps arabe , lexpression publique massive de la contestation delordre islamiste a dj t circonscrite entre la fin de lanne 2009 et le

    dbut de lanne 2010. Mais mme si le rgimeaffirme sa confiance vis--vis de la reconfigurationrgionale en cours, la perte de lgitimit populaire dela thocratie islamiste reste un des acquis du mou-vement vert qui a suivi llection prsidentielle de

    juin 2009. En raison de lambigut de ses dirigeants (Mir Hossein Mous-savi, ancien Premier ministre, Mehdi Karoubi, ancien prsident du Parle-ment, Mohammad Khatami, ancien prsident), qui ne souhaitaient pas lerenversement de la thocratie islamique, leMouvement vert na cependantpas pu imposer de rforme, mme limite, des institutions. Sa principalevictoire demeure davoir dlgitim le processus lectoral.

    Face au printemps arabe , Thran tente de faire entrer les contesta-tions des rgimes autocratiques arabes dans le cadre de limminence dungrand soir islamiste au Moyen-Orient. Cet idal rvolutionnaire en politi-que trangre sinscrit pleinement dans lidologie khomeyniste qui donnesa cohsion ldifice institutionnel de la Rpublique islamique. Mais au-del, la diplomatie khomeyniste a aussi une dimension de Realpolitik. Entmoigne la prise de contact, la fin de lt 2011, entre les diplomatesiraniens et des opposants syriens. Il existe une certaine proximit entre laRpublique islamique et les Frres musulmans gyptiens et syriens, quisexplique en partie par le soutien de Thran au Hamas palestinien.Autrement dit, le soulvement arabe constitue pour la Rpublique isla-mique la fois une opportunit (dtournement de lattention interna-tionale du programme nuclaire de Thran et chute de dictatures alliesde lOccident) et une menace, du fait dune reconfiguration rgionale quifragilise son alli syrien.

    Dans la grille de lecture de la Rpublique islamique, la contre-rvolution conduite par lArabie Saoudite au Moyen-Orient et soutenuepar Washington est une opportunit saisir pour renforcer le soft powerde Thran et dnoncer le double standard occidental en matire deDroits de lhomme et de dmocratie. Cette accusation de la propagandeiranienne ne donne pas pour autant de consistance la thorie du rveilislamique promue par Thran pour expliquer le printemps arabe .Lattnuation de la porte de la rvolte syrienne et le soutien de la rvolte Bahren rvlent tout autant un double standard iranien dans la rgion.

    Une perte delgitimit populairedu rgime iranien

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    Ltat thocratique est parvenu contenir les mcontentements popu-laires en empchant la jonction entre les revendications des tudiants etcelles des travailleurs. La dernire expression publique de mconten-tement, autour de la question dOrumiyeh la fin de lt 2011, a runi desfacteurs environnementalistes et culturels azris. Le dblocage de finan-cements exceptionnels semble une nouvelle fois privilgi par les autoritspour teindre ce foyer de crise12. Et si les autorits iraniennes accusent lestats-Unis de tenter de dstabiliser le pays par la priphrie (en soutenantdes groupes dopposition azris, kurdes ou baloutches), le pouvoir centrala jusqu prsent dmontr sa capacit matriser les dfis ethniques.

    Plus largement, le printemps arabe a confirm ce que le printempsiranien de 2009 avait illustr : ce nest pas lactivisme dmocratique de lapolitique trangre amricaine qui a permis lmergence dune contes-tation des pouvoirs autoritaires ; cest plutt lchec des noconservateurset de leur politique dimposition de la dmocratie de lextrieur qui apermis lexpression soudaine des mcontentements, en Iran en 2009 etdans les pays arabes la fin de lanne 2010. La prise de conscience parWashington des limites inhrentes sa capacit dimposer la dmocratieau Moyen-Orient na pourtant pas rtabli sa position hgmonique dansla rgion : les campagnes dIrak ou dAfghanistan et les interventionscibles au Pakistan ont durablement entam le crdit dmocratique delAmrique. Paradoxalement, cest largement en raison de lanti-amri-canisme des autorits de Thran que les tats-Unis ont en Iran une imagemoins ngative que dans le reste de la rgion. Si la vision iranienne du printemps arabe comme rplique du sisme de la rvolution islamiquede 1979 a t largement tourne en drision dans les mdias occidentaux,la victoire des partis islamistes aux lections tunisiennes et gyptiennesconduit nuancer la premire analyse. Certes, lislamisme politique neproduit pas des partis uniformes : leur nature, leur idologie varientfortement selon les pays et leur ancrage, chiite ou sunnite. Les modesdaccession au pouvoir des partis islamistes arabes contrastent avec leprocessus suivi par les partisans de Khomeyni en Iran. En 1979, layatollahKhomeyni organisait un rfrendum pour ou contre la Rpublique isla-mique, prlude au filtrage des partis non islamistes et de ceux qui contes-taient le principe de la tutelle du juriste-thologien (velayat-e faqih). linverse, en Tunisie ou en gypte, les islamistes entrent dans un jeulectoral fond sur le multipartisme. Autre diffrence : Khomeyni sestappuy sur une partie du clerg chiite pour accder au pouvoir alors que

    12. Pour plus de dtails : Iran Allocates About 900m Dollars to Prevent Drying Up of Orumiyeh Lake ,Vision of the Islamic Republic of Iran, Network 2, Thran (en persan), 4 septembre 2011, accessiblesur le site de BBC Monitoring Iran.

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    dans le monde arabe, ce sont des partis politiques islamistes qui sedisputent la prise du pouvoir. Le discours iranien sur le rveil islamiquedes Arabes ne reflte donc que trs partiellement la nature des mou-vements de contestation populaire au Moyen-Orient.

    Les consquences rgionales de la guerre froide irano-saoudienne

    Il existe non seulement une polarisation croissante entre lIran et lesmonarchies du Golfe mais encore un risque dextension de guerre froide des foyers de crise tels que lIrak ou la Syrie. En avril 2011, une telle guerrefroide entre lArabie Saoudite et la Rpublique islamique sest matrialisepar des menaces de recours la force manant des mdias ou de person-nalits politiques aussi bien saoudiennes quiraniennes. Ct saoudien,lambassadeur au Caire dclarait : Nous pourrons faire face [militaire-ment] lIran si jamais ce pays cherche dstabiliser la rgion duGolfe13. Ct iranien, des tudiants ont manifest en nombre devant

    lambassade dArabie Saoudite Thran et les mdias ontouvertement voqu le recours loption militaire pourrpondre loccupation de Bahren par lArabie Saoudite(entre 1 500 et 4 500 soldats selon les sources). Avec le

    Kowet, la tension sest accrue aprs le dmantlement dun rseaudespionnage iranien qui a entran lexpulsion de diplomates des deuxpays au mois davril 2011. Enfin, le 4 avril, le Conseil de coopration duGolfe a accus lIran d interfrence flagrante dans les affaires internesdes pays membres, le prsident Mahmoud Ahmadinejad jugeant laffir-mation dnue de tout fondement. Plus largement, Thran dnonce la contre-rvolution saoudienne en particulier Bahren, pays qui abriteune base militaire amricaine.

    LArabie Saoudite accepte mal, dautre part, lambition de lIran, quimise sur une volution qui lui semble favorable en gypte. La chutedHosni Moubarak a t perue Thran comme le signe de la fin de lastratgie gyptienne visant constituer une coalition anti-iranienne dansle monde arabe. En dpit de dclarations de bonne volont des deux cts,il semble pourtant prmatur denvisager la restauration des relationsdiplomatiques entre les deux pays. En mai 2011, un diplomate iranien at arrt en gypte, accus par la justice gyptienne davoir tent desoudoyer certains groupes politiques gyptiens pour quils agissent danslintrt de Thran, puis expuls dgypte. Les contentieux historiquesentre les deux pays sannoncent difficiles surmonter. Pour Ahmadinejad,

    13. Dclarations de lambassadeur dArabie Saoudite en gypte, Ahmad Al-Qattan, cites par MEMRI,10 avril 2011.

    Le contentieuxirano-gyptien

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    ces difficults sont lies laction d ennemis qui refusent de voir seconstituer un axe antisioniste entre Thran et Le Caire14. Pourtant, lesdifficults bilatrales vont au-del de ces contraintes externes : elles sontlies de lourds contentieux (lien entre lgypte et la famille Pahlavi parexemple) que la chute de Moubarak na pas suffi apurer.

    Dans cette guerre froide, lIrak semble se tenir aux cts de lIran, ce quine manque pas de susciter linquitude dAmricains qui nont pasobtenu la prolongation de laccord de stationnement de leurs troupesaprs fin 2011. La situation pourrait inciter Washington ngocier avec laRpublique islamique pour viter une aggravation des tensions confes-sionnelles en Irak, attises par Riyad et Thran. Face la crise syrienne,lIran aide son alli stratgique au Moyen-Orient pour endiguer la vaguede contestation laquelle se trouve confront ltat syrien. Cest doncsans surprise que les autorits iraniennes ont accus lOccident, aulendemain du dclenchement de la rvolte syrienne, de mener une guerre douce (djang-e narm) non seulement contre lIran mais aussicontre la Syrie, en raison de leur positionnement antisioniste commun.Cette guerre douce occidentale saccompagne, selon les autoritsiraniennes, dune campagne psychologique et dun programme desanctions visant lasphyxie conomique du pays.

    Or la prise de contact, la fin de lt 2011, entre diplomates iraniens etopposants syriens ne doit pas inciter surestimer linflexion de la rhto-rique du prsident iranien, qui appelle au dialogue pour rgler la crisesyrienne : avec la Russie et la Chine, lIran reste un des soutiensmajeurs durgime alaouite sur la scne internationale15. Et le modle de rpressioniranien aprs les mouvements de juin 2009 pourrait tre utile en Syrie.Cette exemplarit possible conforte lambition des autorits iraniennes se poser en mdiateurs dans la crise syrienne. Face cette alliance,lArabie Saoudite inscrit sa diplomatie syrienne dans le cadre fix parles pays occidentaux tout en finanant les opposants au rgime de BacharAl-Assad.

    La rivalit accrue avec lArabie Saoudite a aussi pour consquence decompliquer la sortie de crise en Afghanistan. Alors que le retrait des forcesde lOTAN est annonc pour 2014, lintention des tats-Unis de maintenirsix bases militaires permanentes en territoire afghan suscite une viveopposition de la Russie, de la Chine, de lInde, du Pakistan, mais aussi et

    14. Discours du 1er juin 2011.15. A. Fielding-Smith et L. Saigal, Syrias Allies Seen as Offering Lifeline Against Sanctions , FinancialTimes, 5 dcembre 2011, p. 6.

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    surtout de lIran, qui peroit cette prsence militaire potentielle commeune menace. Plus encore, laccroissement des tensions entre Thran etRiyad sur les rvoltes arabes risque de provoquer un raidissement de laposition saoudienne vis--vis de lAfghanistan et du Pakistan. LArabieSaoudite va probablement chercher garder le bloc Afghanistan-Pakistandans son camp afin de contrebalancer le soutien iranien aux soulvementschiites dans son arrire-cour, en particulier Bahren16.

    Dans ce contexte, le positionnement du Qatar parat intressant plusieurs titres. La dynastie al-Thani sest positionne en faveur desrvoltes arabes, en particulier en Libye, en Syrie et en gypte par unsoutien financier et logistique aux mouvements islamistes. Malgr sadiscrtion sur la rvolte bahrenie, Doha constitue en quelque sorte lacaution diplomatique du CCG, que lon peut qualifier de dmocratique en ce sens que le Qatar soutient les changements, politiquement et mdia-

    tiquement, via la chane Al-Jazira. Lmirat a de plus choiside servir et de favoriser lacceptation par lOccident de lapousse des partis islamistes au Moyen-Orient17. Enfin, leQatar a profit de laffaiblissement de lgypte pour jouer

    un rle diplomatique dpassant largement son vritable poids gopoli-tique. Le soutien du Qatar la dmocratisation dumonde arabe a aussimis en vidence un dficit dmocratique interne. Et pourtant, dans laguerre froide entre Thran et Riyad, Doha soutient laxe gopolitiquesunnite, dfendu par Riyad, tout en gardant des relations de bon voisinageavec Thran.

    Les mirats arabes unis (EAU) partagent ce positionnement ambigudans la rivalit opposant la principale puissance de la pninsule Arabiqueau grand voisin iranien. Face au risque descalade militaire, les petitsmirats du Golfe savent quils ont intrt un gel du conflit entre, dunct, lIran et, de lautre, lOccident et ses allis arabes. En cas descalade, ilnest pas exclu quils constituent un des objectifs militaires de lIran pourrpondre au bombardement de ses installations nuclaires. Ils mettentdonc en uvre une diplomatie d apaisement autour du programmenuclaire iranien, une stratgie qui sera difficile maintenir dans lhypo-thse de la mise en uvre effective dun embargo ptrolier occidentalcontre lIran partir de lt 2012. Leur compensation des exportationsdhydrocarbures iraniennes au bnfice des pays occidentaux pourraitconduire Thran prendre des mesures de rtorsion contre ces tats. Les

    16. A. Rashid, How US Intends to End War with Taliban , Financial Times, 18 avril 2011.17. R. Khalaf et H. Saleh, Qatars Premier Urges West to Embrace Rise of Political Islam , FinancialTimes, 1er dcembre 2011, p. 1 et 8.

    Le nouveaupoids du Qatar

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    rodomontades iraniennes ne semblent nanmoins pas en mesure daltrerlalliance entre les petits mirats du Golfe et lArabie. En dautres termes,si Riyad dcide daugmenter ses livraisons dhydrocarbures aux pays occi-dentaux, il est probable que les autres tats du CCG saligneront sur cettedcision.

    Cette relative cohsion des monarchies du CCG nempche pascertaines contradictions quant lattitude adopter face la Rpubliqueislamique. Ainsi, outre le Qatar, la diplomatie kowetienne prne lapai-sement, tout comme le sultanat dOman, qui a traditionnellement debonnes relations avec lIran, fondes sur une coopration autour de lagestion du dtroit dOrmuz et des changes conomiques significatifs. Parailleurs, au sein des EAU, si AbouDhabi est trs agressif lgard de lIran,Duba joue un jeu ambigu, ce dernier choix sexpliquant par des raisonsconomiques videntes et par la prsence dune importante communautdaffaires iranienne sur son territoire.

    ***

    Riyad, selon les termes mmes de sa diplomatie, entend se poser engarant de lordre rgional face au chaos rvolutionnaire. Mme si Riyadpeut accompagner la transition (Ymen), voire aider les rebelles (Syrie),ces deux exemples ne concernent pas des monarchies ptrolires. LesSaoudiens appliquent ce que lon peut qualifier de doctrine Monroe pourles monarchies ptrolires de la pninsule Arabique. Pour Riyad, le Ymenet la Syrie sont gouverns par des systmes politiques rpublicains qui, parnature, constituent une menace pour la stabilit de la rgion.

    De leur ct, les dirigeants iraniens sont conservateurs parce quilsont perdu le monopole du front du refus auprs des opinions arabes.Paradoxalement, lIran rvolutionnaire et lArabie traditionnaliste par-tagent donc la mme crainte dun bouleversement rgional chappant leur contrle. Quant aux aspirations dmocratiques de 2011, elles semblentsarrter aux frontires de larabit et nont jusquici que marginalementtouch la Rpublique islamique. Elles sont directement lies un senti-ment dappartenance commune (le nationalisme arabe) fond sur unelangue et une exprience historique partages18. Mais au-del de cettedimension culturelle, le souffle politique des rvoltes arabes perturbe lediscours de ces deux puissances sur les volutions de la rgion, ce quiexplique quen dpit de leurs analyses divergentes, leurs comportementsaient quelques traits communs.

    18. E. Rogan, The Arab Wave , The National Interest, 19 avril 2011.

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    Le bouleversement gopolitique rgional a aussi des incidencesglobales. La guerre froide irano-saoudienne sinscrit par exemple dansune rivalit gopolitique plus globale entre la Chine et les tats-Unis. AuMoyen-Orient, lIran tend intgrer la sphre chinoise pour des raisons la fois conomiques (la croissance de la demande nergtique) et gopoli-tiques : consquence des sanctions amricaines et europennes contre leprogramme nuclaire iranien. En revanche, lArabie inscrit son action dansle cadre de la politique rgionale amricaine, tout en prenant ses distancesavec lagenda de dmocratisation affich par Washington. Si laffaiblis-sement des tats-Unis dans la rgion est propice au renforcement de lIran,Riyad compensera sans aucun doute cette reconfiguration de puissancepar un activisme diplomatique accru. Lincertitude gopolitique cre parlclatement des rvoltes arabes renforce le risque dexplosion sur deslignes de fracture nouvelles, qui vont bien au-del de la rivalit tradi-tionnelle entre front du refus et camp arabe pro-occidental. Lmer-gence des Frres musulmans sunnites comme force politique rgionaleincontournable pourrait ainsi attnuer la rivalit et les tensions confes-sionnelles entre chiites et sunnites. Le risque dun rapprochement entreislamistes sunnites modrs et chiites rvolutionnaires contribue aurenforcement du soutien que lArabie apporte aux mouvements salafistes,en Syrie et en gypte notamment. Le choix des alliances rgionales de lanouvelle gypte sera dcisif dans la lutte acharne que se livrent Riyad etThran pour lhgmonie rgionale.

    MOTS CLS

    Rvolutions arabesArabie SaouditeIranConseil de coopration du Golfe

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