Investissement dans l’hydraulique agricole en vue de la...

93
SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 Investissement dans l’hydraulique agricole en vue de la réduction de la pauvreté et de la croissance en Afrique subsaharienne Un programme de collaboration de la BAD, la FAO, le FIDA, l’IWMI et la Banque mondiale Rapport de synthèse Avant projet du 24 juillet 2006

Transcript of Investissement dans l’hydraulique agricole en vue de la...

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45

Investissement dans l’hydraulique agricole en vue de laréduction de la pauvreté et de la croissance en Afrique

subsaharienne

Un programme de collaboration de la BAD, la FAO, le FIDA, l’IWMI et laBanque mondiale

Rapport de synthèse

Avant projet du 24 juillet 2006

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45

Investissement dans l’hydraulique agricole en vue de la réduction de lapauvreté et de la croissance en Afrique subsaharienne

RAPPORT DE SYNTHÈSE

Table des matières

AVANT-PROPOS

ACRONYMES ET ABRÉVIATIONS

GLOSSAIRE

RÉSUMÉ ANALYTIQUE

Chapitre 1 Pauvreté rurale et développement de l’hydraulique agricole en Afriquesubsaharienne. .............................................................................................................. 14

1.1 Objectifs de développements du millénaire, agriculture et pauvreté rurale........... 141.2 Hydraulique agricole, croissance et systèmes de production ................................... 151.3 Progrès du développement de l’hydraulique agricole............................................... 18

Chapitre 2 Caractéristiques et rentabilité de l’hydraulique agricole ......................................... 192.1 Typologie de l’hydraulique agricole .......................................................................... 192.2 Caractéristiques de l’hydraulique agricole................................................................ 202.3 Culture irriguée et productivité .................................................................................. 222.4 Quels types de cultures irriguées se sont-ils révélés rentables ? .............................. 25

Chapitre 3 Performances, mise en œuvre et impact du développement..................................... 283.1 Performances des projets d’irrigation........................................................................ 283.2 Les frais d’investissement dans l’irrigation sont-ils plus élevés qu’ailleurs ? ........ 333.3 Conception et mise en œuvre de projets ..................................................................... 353.4 Le problème de la faible productivité ......................................................................... 373.5 Développement de l’hydraulique agricole et réduction de la pauvreté ................... 383.6 Gestion alternative de l’hydraulique agricole............................................................ 433.7 Aménagement des bassins hydrographiques ............................................................. 463.8 Aspects environnementaux et sanitaires du développement de l’hydraulique

agricole .......................................................................................................................... 47Chapitre 4 Le Contexte institutionnel en mutation ...................................................................... 49

4.1 Planification stratégique et hydraulique agricole...................................................... 494.2 Réformes des politique et stratégie de développement de l’hydraulique agricole .. 524.3 Gestion des systèmes d’irrigation financés par l’État............................................... 574.4 Développement décentralisé ........................................................................................ 614.5 Les eaux transfrontalières ........................................................................................... 62

Chapitre 5 Potentiel de développement et opportunités d’investissement ................................. 635.1 Demande du marché .................................................................................................... 635.2 Potentiel de développement des terres et des eaux.................................................... 655.3 Economie de l’investissement ...................................................................................... 725.4 Rôle de l’Etat dans le développement du potentiel ................................................... 745.5 Options d’investissement dans l’hydraulique agricole ............................................. 77

Chapitre 6 Leçons et recommandations pour un engagement dans l’hydraulique agricole .... 826.1 Hydraulique agricole, réduction de la pauvreté et conditions d’investissement .... 826.2 Possibilités d’investissements publics et privés additionnels.................................... 836.3 Réformes institutionnelles ........................................................................................... 856.4 Concevoir et mettre en œuvre de meilleurs projets d’investissements .................... 876.5 Vision stratégique......................................................................................................... 90

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 ii

RÉFÉRENCESAnnexe Tableaux et DiagrammesAnnexe 1 : Rapports des composantes préparés dans le cadre du Programme de collaborationAnnexe 2 : Objectifs de développement pour le millénaire et ciblesAnnexe 3 : Principaux systèmes d’agriculture de l’Afrique subsaharienneAnnexe 4 : Gestion de l’hydraulique agricole et ODMAnnexe 5 : Projets d’irrigation qui ont « réussi » en Afrique subsaharienne (TRE de 10% ou

plus)Annexe 6 : Comparaison de projets choisis, à l’achèvement et historiqueAnnexe 7 : Liste de contrôle pour l’amélioration de l’impact favorable aux pauvres des projets

d’irrigationAnnexe 8 : Technologies alternatives de gestion de l’hydraulique agricoleAnnexe 9 : CAADP du NEPAD et les NMTIPAnnexe 10 : Défis du stockage de l’eau en Afrique subsaharienne et la Commission mondiale

sur les barragesAnnexe 11 : Éléments de recherche sur l’hydraulique agricole en Afrique subsaharienne

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 iii

AVANT-PROPOS

Le présent rapport fait la synthèse des résultats d’un programme de collaboration d’un grouped’agences internationales de développement – BAD, FAO, FIDA, IWMI et Banque mondiale – chargéd’évaluer l’expérience acquise à ce jour en matière d’investissement dans l’hydraulique agricole enAfrique subsaharienne et d’identifier les conditions d’un investissement réussi dans la gestion durableet rentable de l’hydraulique agricole.

Le programme de collaboration

En 2001, la BAD, la FAO, le FIDA, l’IWMI et la Banque mondiale ont identifié en Afriquesubsaharienne le faible niveau d’investissement dans l’hydraulique agricole comme un problème dedéveloppement majeur. Aussi, ces institutions ont-elles décidé, dans le cadre d’un programme decoopération conjoint d’évaluer l’état actuel de la gestion de l’hydraulique agricole et l’expérienceacquise à ce jour en Afrique subsaharienne afin de (a) mieux comprendre sa performance et sonpotentiel, (b) identifier les changements intervenus dans le contexte du développement et (c) formulerdes recommandations permettant d’améliorer la performance des investissements réalisés dans lesecteur. En fait, l’objectif était d’améliorer la qualité de l’aide aux États et de produire des fluxd’investissements plus importants, ainsi que d’influencer l’aide fournie par les bailleurs de fondsbilatéraux.

Dans une première phase, en juin 2001, un atelier réunissant les principales parties prenantes a étéorganisé à Harare pour définir les problèmes et planifier l’étendue du programme conjoint et la façonde le conduire. Au cours de l’atelier, les principales parties prenantes ont identifié les facteurscontribuant aux faibles niveaux d’investissements. Les principales préoccupations exprimées portaientsur la faible rentabilité économique de l’hydraulique agricole par rapport à celle des investissementsalternatifs ; de son absence de viabilité financière ; de sa faible soutenabilité et de son manque relatifde rentabilité. Le programme a donc été conçu pour évaluer la validité de ces perceptions et proposerdes moyens de surmonter les contraintes sous-jacentes.

Durant l’atelier de Harare, il a également été décidé qu’un certain nombre de thèmes stratégiquesdevrait être étudiés avant d’aborder la grande question de la manière de favoriser l’accroissement desinvestissements dans le développement de l’hydraulique agricole pour la production agricole enAfrique subsaharienne. Sous la direction d’un comité de pilotage et d’un groupe de travail, des étudesdétaillées ont été réalisées sur les thèmes suivants1 :

Demande de produits de l’agriculture irriguée ;

Évaluation du potentiel de gestion de l’hydraulique agricole pour l’approvisionnementalimentaire ;

Développement de l’hydraulique agricole pour la réduction de la pauvreté ;

Coûts du développement de l’hydraulique agricole ;

Participation du secteur privé au développement de l’hydraulique agricole ;

Aspects sanitaires et environnementaux ;

Planification et mise en œuvre du processus de développement de l’irrigation ; et

Production hydro-agro-pastorale intégrée.

1 Les études détaillées composantes sont données dans l’annexe 1.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 iv

En 2002, le NEPAD a élaboré un Programme global de développement de l’agriculture africaine(CAADP) qui accorde une position centrale au développement de l’hydraulique agricole. Avec l’appuide la FAO, les états membres du NEPAD préparent actuellement des programmes nationauxd’investissement à moyen terme, qui proposent une augmentation significative des investissementsdans le secteur de l’hydraulique agricole. Le présent rapport devrait venir étayer ces processus deplanification.

Le rapport de synthèse

Le présent rapport de synthèse a été préparé sur la base d’études détaillées et d’autres sources qui ontservi de point de départ à un processus de discussion et de prise de décision visant à accroître lesinvestissements dans le secteur de l’hydraulique agricole en Afrique subsaharienne. Le rapport reprendles points de vue consolidés des agences préoccupées par la façon d’améliorer l’efficacité dudéveloppement de l’hydraulique agricole dans la région et d’accroître de ce fait les niveauxd’investissements.

Le rapport analyse la contribution apportée à ce jour par la gestion de l’hydraulique agricole à laréduction de la pauvreté et à la croissance dans la région, les raisons de sa lente expansion et desrésultats apparemment pauvres qui ont été enregistrés, et les moyens par lesquels l’accroissement desinvestissements dans la gestion de l’hydraulique agricole pourrait contribuer durablement à augmenterla réduction de la pauvreté et la croissance.

Le chapitre 1 du rapport place la gestion de l’hydraulique agricole dans le contexte des objectifs dedéveloppement du millénaire et propose des pistes pour une réduction de la pauvreté à travers ledéveloppement agricole. Les chapitres 2 à 5 contiennent un diagnostic régional qui aborde le rôle de lagestion de l’hydraulique agricole en Afrique subsaharienne, examine la contribution des projetsd’investissements passés, analyse le cadre institutionnel changeant et évalue le potentiel dedéveloppement futur. Le chapitre 6 résume finalement les leçons et recommandations visant àaccroître la contribution de la gestion de l’hydraulique agricole à la réduction de la pauvreté et à lacroissance dans la région.

Le rapport de synthèse a été préparé par Tony Peacock1 et Christopher Ward2 avec l’aide de GretelGambarelli3 sous la direction des membres du comité de pilotage et groupe de travail composé deTefera Woudeneh (BAD), Jacob Burke (FAO), Edward Heinemann (FIDA), Arlene Inocencio(IWMI), Doug Merrey (IWMI), Salah Darghouth (Banque mondiale) et IJsbrand de Jong (Banquemondiale). Tous nos remerciements aux auteurs des études composantes et aux services des agencesparticipantes pour leur assistance durant la préparation du rapport.

1 Consultant du FIDA (et membre du Groupe de travail du programme de coopération)2 Consultant de la Banque mondiale3 Banque mondiale

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 v

ACRONYMES ET ABRÉVIATIONS

ASS Afrique subsaharienneAUE Association d’usagers de l’eauBAD Banque africaine de développementBAsD Banque asiatique de développementBM Banque mondialeCAADP Programme intégré pour le développement de l’agriculture en AfriqueCP Programme coopératifDFID Département pour le développement international du Royaume-UniDRC Coût réel des devises (= coût en ressources intérieures)DSRP Document stratégique de réduction de la pauvretéEAP Région Asie de l’Est et du PacifiqueECA Région Europe et Asie centraleEPIN Evaluation des politiques et institutions nationalesFAO Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agricultureFIDA Fond international pour le développement de l’agricultureGIRE Gestion intégrée des ressources en eauIFPRI International Food Policy Research Institute (Institut international pour l'étude et la

recherche agronomiques)IPTRID Programme international pour la recherché et la technologie en matière d’irrigation et

de drainageIWMI Institut international de gestion des ressources en eauLAC Région Amérique latine et CaraïbesLUSIP Lower Usuthu Smallholder Irrigation Project (Swaziland)MaraFIP Mara Region Farmers’ Initiative Project (Tanzanie)MCM Millions de mètres cubesMENA Région Moyen-Orient et Afrique du NordNEPAD Nouveau partenariat pour le développement de l’AfriqueO&M Opérations et maintenanceODM Objectifs de développement pour le millénaireON Office du NigerONG Organisation non gouvernementalePHBM Projet de développement du haut Mandrare (Madagascar)PIB Produit intérieur brutPIDP Participatory Irrigation Development Project (Tanzanie)PPAR Rapport d’évaluation de la performance d’un projetS&E Suivi et évaluationSA Région Asie du SudSADC Communauté de développement pour l’Afrique australeTRE Taux de rentabilité économiqueUE Union européenneWARDA Association ouest africaine de développement du rizWP Document de travail

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 vi

GLOSSAIRE

Autonomisation

Renforcement des droits sociaux et économiques des populations – et l’aide qui leur est apportée pourqu’elles acquièrent suffisamment de confiance pour assumer un rôle significatif dans ledéveloppement de leurs propres moyens de subsistance. Cela implique de les rendre capables, en leurapportant les compétences et la connaissance nécessaires, d’influencer toutes les décisions quiaffectent leurs moyens de subsistance, et de mettre en place des institutions (des politiques, des cadresjuridiques et des organisations communautaires) capables de satisfaire leurs besoins.

Diversification

Ajustement du modèle de production agricole, exploitant de nouvelles opportunités commerciale oudes niches de marché existantes en vue d’augmenter les revenus agricoles ou de réduire leurvariabilité.

Champ-école paysan

Moyen de tester et adapter de nouvelles technologies. Il s’agit d’un programme de formation sur leterrain, communautaire et orienté vers la pratique. Destiné à un groupe d’agriculteurs, il est facilité parun agent de vulgarisation (public ou privé) ou, progressivement, par d’autres agriculteurs. Ensemble,les agriculteurs y apprennent, testent et adaptent des pratiques nouvelles, à travers la pratique et desméthodes pragmatiques d’apprentissage par la découverte, qui mettent l’accent sur l’observation, ladiscussion et l’analyse, pour combiner la connaissance locale traditionnelles avec de nouveauxconcepts (Khisa, GS et E. Heinemann 2004).

Gestion In situ des eaux de pluie

Capture et stockage des eaux de pluie à des fins agricoles.

Grande, moyenne et petite échelle

Dans le cadre du présent rapport, « grande échelle1 » fait référence à une surface irriguée égale ousupérieure à 1.000 hectares, « moyenne échelle » correspond à une surface irriguée comprise entre 100et 1.000 hectares et « petite échelle » qualifie une surface irriguée inférieure à 100 hectares. Chacunede ces catégories peut être exploitée soit par le secteur public, soit par le secteur privé ou encore par unensemble de petits exploitants rassemblés aux fins de cette exploitation

Intensification

Augmentation de la production par unité de surface de terrain, soit par la génération et l’adoption denouvelles techniques telles que la gestion sur site de l’eau, soit par des investissements qui lèvent descontraintes incontournables telles que la non disponibilité de l’eau.

Liens de marché

Dispositifs contractuels par lesquels des entreprises de transformation ou de commercialisation deproduits agricoles fournissent un appui technique et d’autres intrants à des producteurs contre lagarantie d’un volume de production (FIDA 2002 et 2005).

1 La définition de « grande échelle » peut varier selon les pays.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 vii

Récolte de l’eau

Collecte de l’eau de ruissellement dans les champs ou de mini-captages ou de bassins extérieurs telsque ceux des routes, avec ou sans stockage, dans un but d’irrigation des cultures.

Zones agro-écologiques

Zones identifiées par la FAO sur la base de la durée annuelle moyenne de la période végétative, quidépend, entre autres, des précipitations et de la température. On distingue les zones : humides > 270jours ; subhumides moites : 180-269 jours ; subhumides sèches : 120-179 jours ; semi-arides : 60-119jours ; arides 0-59 jours (Dixon et al 2001).

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 viii

RESUME ANALYTIQUE

Pauvreté en milieu rural et développement agricole

La réduction de la pauvreté est un énorme défi pour l’Afrique subsaharienne. Même si, globalement, lemonde est pratiquement en voie d’atteindre l’objectif de réduction de la pauvreté prévu dans le cadredes objectifs de développement du millénaire (ODM), la région a, au rythme actuel de sondéveloppement, peu de chance d’atteindre cet objectif.

Dans la mesure où 85 % des pauvres de la région dépendent largement de l’agriculture pour leursubsistance, le développement agricole est clairement essentiel à la réduction de la pauvreté. Il pourraitaussi contribuer de manière significative à la croissance économique nationale. L’agriculture restemalgré cela largement une activité de subsistance dans la région : la production n’a pas suivi lacroissance démographique, le nombre de personnes mal nourries augmente sans cesse tandis quel’autosuffisance alimentaire diminue sans que les revenus des ménages leur permettent d’acheter de lanourriture.

La croissance agricole future de la région dépendra de l’intensification et de la diversificationagricoles et l’hydraulique agricole pourrait y jouer un rôle important. L’investissement dans la gestionde l’hydraulique agricole peut réduire directement la pauvreté des revenus en favorisant : (a) unaccroissement de l’intensification agricole, un mouvement vers des cultures de rente et de ce fait uneaugmentation des rendements et des revenus agricoles ; (b) un accroissement des emplois agricoles ; et(c) une réduction du prix des vivres au niveau local et par conséquent une amélioration des revenusnets réels. Il peut également réduire indirectement la pauvreté des revenus à travers un accroissementde l’emploi rural et urbain résultant de l’effet multiplicateur sur la croissance des économies nonagricoles rurales et urbaines – les effets multiplicateurs potentiels des investissements dansl’hydraulique agricole sont en général plus importants que ceux résultant d’investissementscomparables réalisés dans l’agriculture pluviale. L’augmentation des revenus agricoles peut de plusavoir des effets positifs sur les autres ODM que sont la réduction de la faim et l’amélioration del’accès à l’éducation primaire, à l’eau potable et à l’assainissement de base.

L’hydraulique agricole reste sous-développée

Jusqu’à présent, le sous-secteur de l’hydraulique agricole en Afrique subsaharienne reste sous-développé : il y a aujourd’hui dans la région environ 9 millions d’hectares de terres exploitées dans lecadre de la gestion de l’eau. Ils ne représentent que 5 % des 183 millions d’hectares de la surfacetotale cultivée – une proportion de loin la plus faible du monde. Sur cette surface, environ 7 millionsd’hectares sont équipés de systèmes d’irrigation complets ou partiels – moins d’un cinquième des 39millions d’hectares du potentiel physique estimé – tandis que les 2 millions d’hectares restants sontsoumis à d’autres formes de gestion de l’eau telles que les cultures de décrue. Seuls 70 % environ(5 millions d’hectares) de la surface équipée sont fonctionnels. Les prélèvements d’eau destinés àl’agriculture sont très limités – moins de 3 % du total des ressources renouvelables. Si actuellement,un certain nombre de bassins hydrographiques connaissent ou sont sur le point de connaître unepénurie d’eau, le phénomène est plus causé par un manque de systèmes de stockage que par une réellepénurie.

Une des raisons du sous-développement du sous-secteur est que les stratégies du secteur de l’eau sonten général neutres – ou même négatives – par rapport à l’utilisation de l’hydraulique agricole. Cela estprobablement dû à l’idée que l’utilisation de l’eau et son économie sont inefficaces. De plus, bien queles stratégies de réduction de la pauvreté soient généralement fondées sur le développement agricole,le développement de l’hydraulique agricole occupe en général une place secondaire dans les DSRP.

Coûts et performance du développement de l’hydraulique agricole

Bien que le coût de développement de l’irrigation en Afrique subsaharienne ait été exorbitant dans lepassé, une nouvelle génération de projets d’irrigation bien conçus et convenablement mis en œuvre se

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 ix

sont révélés n’être que marginalement plus coûteux que ceux réalisés dans les autres régions.Toutefois, les cultures irriguées dans la région restent caractérisées par une faible productivité.

Cette faible productivité est liée à des approvisionnements en eau peu fiables, à une faible utilisationdes intrants (les pays d’Afrique subsaharienne n’utilisent en moyenne que 9 kg d’engrais par hectare àcomparer aux 100 kg/ha de l’Asie du Sud et aux 135 kg/ha de l’Asie de l’Est) et à la difficulté d’accèsà des marchés rentables. Ainsi, avec des approvisionnements fiables en eau, un accès approprié auxmarchés et un cadre institutionnel favorable à l’investissement dans les intrants permettant d’accroîtreles rendements, la productivité et la rentabilité se sont avérées comparables à celles obtenues en Asie àla suite de la Révolution verte.

La faible productivité peut également être attribuée une évaluation et atténuation inappropriée del’impact négatif sur l’environnement et la santé – notamment l’impact du le VIH/SIDA – même si ledéveloppement de l’hydraulique agricole peut également avoir un impact positif sur l’environnementet la santé, à travers une amélioration de la nutrition et de l’accès aux installations sanitaires, ainsi qu’àl’eau pour les besoins domestiques et pastoraux.

Demande des produits de la gestion de l’hydraulique agricole et rentabilité

Il semble qu’il y ait une certaine croissance dans la demande mondiale de sucre et de coton quipeuvent tous deux être rentables sous irrigation. L’horticulture irriguée est un secteur rentable et enexpansion rapide. Les marchés régionaux des vivres connaîtront une expansion rapide dans les annéesà venir et, à moins que la production domestique ne soit renforcée, les importations de vivrescontinueront à augmenter.

Etant donné que plus de la moitié de la surface actuellement irriguée sert à la culture des denrées debase, des analyses récentes ont identifié l’irrigation comme un moyen de réduire les importations devivres. Là où les rendements sont relativement bons et les coûts d’investissement raisonnables, laculture irriguée de riz s’est montée rentable, au moins sur le marché local. Toutefois, les autrescéréales – telles que le maïs et le blé – se sont révélées moins rentables sous irrigation en raison desrendements habituellement obtenus par les petits exploitants agricoles et surtout du déclin continu descours mondiaux. L’expansion de l’irrigation des cultures vivrières autres que le riz nécessitera doncsoit une amélioration significative de la productivité soit une réduction des coûts. En attendant,l’accroissement de la production de ces cultures pourrait largement dépendre de l’amélioration de laproduction pluviale.

Gestion alternative de l’hydraulique agricole

Les dernières décennies ont donc vu un regain d’intérêt pour des alternatives à l’irrigation – telles quela récolte de l’eau ou la gestion in situ des eaux de pluie (incluant le labour réduit ou nul) – pourstabiliser ou accroître les rendements des cultures des denrées de base et, dans certains cas , descultures de rente comme le coton. Il existe toute une gamme d’alternatives prometteuses mais dontl’adoption, à quelques exceptions près, a été généralement faible. Les programmes n’ont pas étésuffisamment basés sur les pratiques agricoles et les contraintes locales et n’ont pas été assezabordables et rentables pour inciter les agriculteurs à prendre le risque et entraîner une large utilisationsans subventions permanentes. La diffusion a été également axée sur la recherche ou les projets plutôtque sur le marché, avec trop peu d’attention portée à la réplication.

Potentiel et contraintes d’un investissement complémentaire

Seulement un cinquième du potentiel physique d’irrigation ayant été mis en valeur à ce jour, il y aclairement un potentiel d’expansion de la surface irriguée. Une certaine expansion nécessiterait laconstruction d’installations de stockage supplémentaires. Il est également possible d’améliorer laproductivité des 5 millions d’hectares actuellement irrigués et de remettre en production 2 millionsd’hectares de terre aménagés pour l’irrigation mais actuellement inexploités. Un mélanged’interventions pourrait être nécessaire pour exploiter ce potentiel, à savoir le développement de

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 x

nouvelles infrastructures d’irrigation, l’amélioration des surfaces existantes (systèmes à grande,moyenne et petite échelle), et l’amélioration de la gestion des ressources en eau et des cultures. Ilexiste également des possibilités d’amélioration du contrôle de l’eau sur les 2 millions d’hectares deterre soumises à « d’autres formes de gestion de l’eau » (en se référant à la terminologie AQUASTATde la FAO) – c’est-à-dire dans les zones humides et les fonds de vallées. Une bonne partie pourranécessiter la mise en place de systèmes d’irrigation et de drainage partagés par un certain nombre depaysans mais, dans beaucoup de cas, la mise en valeur de petits périmètres par des petits exploitantsindividuels utilisant des techniques de micro-irrigation (par exemple, les pompes à pédales) sera plusappropriée. Il y a également un potentiel considérable – sans doute plusieurs fois plus important quecelui de l’irrigation en termes de périmètre cultivé et de nombre des bénéficiaires – d’amélioration dela gestion in situ des eaux de pluies dans les cultures pluviales – en particulier, les cultures des denréesde base mais aussi de rente telles que le coton, et surtout dans les zones humides et subhumides.

Les principaux contraintes de la mise en valeur de ce potentiel sont économiques – c’est-à-dire lescoûts, l’accès à des marchés rentables et la productivité potentielle de l’approvisionnement de cesmarchés.

Leçons et recommandations

Réduction de la pauvreté et croissance

Le développement de l’hydraulique agricole en Afrique subsaharienne peut permettre de réduire defaçon significative la pauvreté des revenus à travers le développement agricole. Ce faisant, il peutégalement créer une dynamique de croissance économique au niveau national. Cela ne peut cependantse faire que si les investissements sont rentables au niveau de la production agricole, économiquementviables et soutenables. Les investissements réalisés à des fins dites « sociales » ou « stratégiques » –par exemple, pour accroître la production nationale des denrées de base – ne peuvent pas contribuer àla croissance s’ils ne sont pas économiquement viables ou s’ils dépendent de subventions publiques àlong terme.

La conception des projets et décisions d’investissements futurs ne doivent par conséquent être baséesque sur des considérations de viabilité économique, de rentabilité de la production agricole et desoutenabilité. Il faut éviter de réaliser des investissements non viables à des fins soi-disant « sociales »ou « stratégiques ». Là où des subventions sont nécessaires, celles-ci doivent rester limitées (a) à deséléments ayant un durée de vie économique moyenne ou longue (par exemple, des infrastructuresd’irrigation) dont le coût dépasse la capacité de paiement de la plupart des petits exploitants, plutôtqu’à des investissements moins coûteux de courte durée économique (par exemple, des pompes àpédales ou le développement à la ferme d’un système de gestion in situ des eaux de pluies), et (b) audéveloppement et à la promotion des techniques. Il vaut mieux éviter de subsidier les services d’appuiet/ou l’O&M. Si des subsides doivent être accordés, il faut qu’ils soient ciblés et accordés uniquementà court terme (par exemple, pour une saison unique) pour « démarrer » la production commerciale.

Vision stratégique

Il y a un potentiel considérable de développement complémentaire de l’hydraulique agricole pour laréduction de la pauvreté et la croissance, mais des opportunités ont été manquées à cause d’uneabsence de vision stratégique. Aussi, les pays d’Afrique subsaharienne doivent-ils formuler desstratégies nationales pour le sous-secteur de l’hydraulique agricole. Ces stratégies doivent reconnaîtreà la fois son importance dans le développement agricole et la réduction de la pauvreté, et les réalitéséconomiques mentionnées dans le présent rapport. Elles doivent être soutenues par une analyse desrôles respectifs des secteurs public et privé, ainsi que des moyens d’encourager la participation etl’investissement du secteur privé. Elles doivent être mises en œuvre là où elles sont appropriées, àtravers des approches sectorielles favorables à l’harmonisation et à la cohérence des initiatives dedéveloppement. Les approches de gestion intégrée des ressources en eau (GIRE) doivent trouver unéquilibre dans la gestion de l’offre et de la demande, ne prévoyant de nouveaux investissements dansl’offre que là où ceux-ci sont justifiés du point de vue économique, social et environnemental. Les

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 xi

stratégies doivent également s’assurer que l’allocation et la gestion des ressources en eau tiennentcompte des besoins des pauvres et prévoient une plus grande participation des petits exploitantsagricoles à l’aménagement sectoriel et des bassins hydrographiques.

Les stratégies nationales doivent être étayées par une analyse comparative des différentes optionsd’investissement :

l’accroissement de la productivité et de la rentabilité des systèmes existants ;

l’expansion ou la construction de grands, moyens, petits et microsystèmes d’irrigation liée àdes marchés rentables ; et

la recherche, la diffusion et l’adoption d’alternatives à l’irrigation peu coûteuses, viables etliées au marché, telles que la gestion in situ des eaux de pluie.

Là où les politiques et stratégies existantes reflètent la vision stratégique présentée ci-dessus, ellesdoivent constituer la base des nouveaux programmes d’investissement. Là où ce n’est pas le cas, ilfaut les réviser et élaborer de nouveaux programmes d’investissements. Si une assistance extérieureest nécessaire pour la formulation des nouvelles stratégies et nouveaux programmes d’investissement,il faudra recourir aux agences internationales de développement.

Réformes institutionnelles

Dans la plupart des cas, les réformes – des politiques macroéconomiques et sectorielles, des cadresjuridiques, des structures et organisations de gestion – sont une condition préalable au renforcement dela performance des investissements. Sans réformes, la rentabilité de la production continuera d’êtreentravée et les effets dissuasifs pour l’investissement persisteront. Les réformes demandent du tempset des approches cohérentes de la part des gouvernements et des bailleurs de fonds. Elles doivent êtreégalement accompagnées d’un renforcement effectif des capacités afin de doter les acteurs d’outilsleur permettant d’assumer leurs nouveaux rôles et responsabilités.

Le processus continu de réformes des politiques macroéconomiques, des cadres juridiques et desorganisations de gestion de l’hydraulique agricole doit donc être soutenu et renforcé, accompagné d’unrenforcement des capacités, si besoin est, afin de créer un cadre favorable à un investissement rentable,mobiliser les énergies des acteurs du secteur privé et des agriculteurs et rendre les prestataires deservices efficaces, commerciaux dans leur approche et responsables vis-à-vis de leurs clients. Laresponsabilité du développement doit être décentralisée sur la base du principe de subsidiarité et lesagriculteurs et leurs organisations doivent être capables d’assumer leurs nouveaux rôles etresponsabilités et d’améliorer la performance des investissements. La réforme organisationnelle desystèmes d’irrigation à grande échelle doit être fondée sur l’autonomisation des utilisateurs, laparticipation du secteur privé et le transfert de la gestion des systèmes d’irrigation. Il faut accorder untemps suffisant aux gouvernements et aux bailleurs de fonds pour formuler des approches cohérentes,qui pourront être sectorielles lorsque cela est approprié.

Concevoir et mettre en œuvre de meilleurs projets d’investissement

Inclure l’eau dans un ensemble global. Se contenter de fournir l’eau d’irrigation ne suffit pas àassurer que les rendements, la production et les revenus nets seront suffisants pour réduiresignificativement la pauvreté des revenus : il faut que l’approvisionnement en eau soit non seulementfiable mais également assuré dans le cadre d’un ensemble global qui encourage les agriculteurs àoptimiser les rendements et la production à travers des mesures incitatives. Les institutions definancement, y compris les gouvernements, doivent par conséquent tenir compte des contraintes et nemettre le financement qu’à la disposition des projets où l’eau est fournie dans le cadre d’un telensemble.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 xii

Cibler les pauvres et les femmes. Le ciblage inclusif des communautés rurales devrait avoir unimpact plus grand sur le développement que celui de la couche socioéconomique la plus démunie.Cependant, comprendre le profil socioéconomique du groupe cible en cherchant à savoir comment ilsgagnent leur vie, quelles sont leurs difficultés, comment ils interagissent et comment la gestion del’hydraulique en tant que facteur de production agricole peut les aider à améliorer leur conditionsociale, est indispensable pour s’assurer que l’investissement répond à leurs besoins et que lesmembres très pauvres des communautés ne sont pas davantage marginalisés. Il convient de soulignerque cibler spécifiquement les femmes et encourager leur participation aux structures de gouvernancepeut renforcer la productivité et de ce fait l’impact sur la réduction de la pauvreté.

Viser les zones agro-écologiques arides et semi-arides n’est pas non plus forcément favorable auxpauvres puisque toute réduction de grande envergure de la pauvreté et de la faim, en termes de densitéde population, d’incidence de la pauvreté, de potentiel agricole et de voies à suivre par les ménagespour accroître leurs revenus agricoles, se retrouve dans les zones à fort potentiel – en particulier leszones subhumides et humides.

Des études des facteurs socioéconomiques et des systèmes de production doivent donc être réaliséespour tracer le profil de la population cible et sa dynamique intra-communautaire en vue del’intégration de tous les membres de la communauté pour leur intérêt mutuel. Une attentionparticulière doit être portée à la prise en compte du rôle joué par les femmes dans le système deproduction et au fait que la couche la plus démunie de la communauté n’est ni exclue ni marginalisée.Il faudra aussi s’assurer que l’investissement est « favorable aux pauvres » en cherchant à maximiserla rentabilité de la production agricole, l’emploi direct et indirect et les revenus, et en élaborant desmécanismes permettant d’autonomiser les plus démunis et d’améliorer leur accès à la terre, à l’eau etaux services. Les investissements doivent cibler de préférence les zones subhumides et humides, saufquand la terre, l’eau et les marchés se combinent favorablement pour assurer la viabilité et lasoutenabilité des projets dans des zones plus sèches.

Concevoir, mettre en œuvre et gérer les investissements publics. La conception et la mise en œuvredes projets – à grande, moyenne et petite échelle – ont par le passé été largement faites de façondescendante. La qualité des projets a été diminuée par des faiblesses habituelles dans la préparation, enparticulier le mauvais traitement des questions clés liées à la terre et à la sécurité de l’eau, le manqued’évaluation des marchés et de rentabilité, l’absence d’un ensemble d’appui agricole, la surestimationdes capacités institutionnelles et une mauvaise conception technique. De plus, des capacitésinstitutionnelles insuffisantes et un appui limité au processus de supervision ont porté atteinte à lamise en œuvre des projets. Les récentes approches plus participatives ont commencé à produire desrésultats meilleurs et plus durables, et la qualité s’est améliorée en même temps que les dispositifs deconception, de mise en œuvre et de gestion ont reflété les avantages comparatifs des secteurs public etprivé, des ONG et des agriculteurs.

La gestion des projets par les agriculteurs doit être la première option de développement. Là où lagestion conjointe d’infrastructures importantes est nécessaire, les dispositions et les rôles etresponsabilités respectifs doivent être clairement définis. Les dispositions relatives à la prestation desservices et à leur supervision doivent être basées sur les forces respectives des secteurs public et privé,des ONG et des agriculteurs. Les organisations d’agriculteurs doivent être renforcées et disposer demoyens pour participer à la conception, la mise en œuvre et la gestion des projets. Là où des contratssont signés avec des ONG ou le secteur privé pour la prestation de services, les termes de référencedoivent clairement indiquer les caractéristiques des « livrables » et l’obligation redditionnelle yafférente, ainsi que les stratégies de sortie. Les gouvernements et les bailleurs de fonds doivents’assurer que le processus de supervision s’assure bien que les activités restent axées sur les objectifset techniquement saines, en apportant un appui technique approprié et en étant suffisamment souplepour s’adapter en fonction de l’expérience vécue.

Impact environnemental et sanitaire. Les coûts et avantages économiques des investissements dansl’hydraulique agricole doivent être entièrement pris en compte dans les évaluations et décisions

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 xiii

d’investissement. Le défi consiste à concevoir, mettre en œuvre et gérer les projets de telle sorte queles avantages socioéconomiques soient maximisés tout en minimisant l’impact négatif.

L’élaboration des projets doit donc non seulement évaluer et proposer des mesures d’atténuation deseffets potentiellement négatifs, mais aussi chercher à exploiter les synergies potentielles et l’impactpositif des projets. Etant donné que dans beaucoup de cas, l’efficacité des mesures d’atténuation oudes mesures d’exploitation de l’impact positif pourra être menacée par des insuffisancesinstitutionnelles, un appui devra, dans la mesure du possible, être apporté à la réforme et aurenforcement des institutions. La conception des projets doit aussi aborder spécifiquement la questionde l’attrition du personnel et des agriculteurs souffrant d’infections liées au VIH/SIDA.

Suivi et évaluation. Le suivi-évaluation de la performance des projets a été négligé et doit êtreamélioré pour aider à la prise de décision dans la gestion agricole, fournir de l’information à laplanification stratégique et à la conception des projets futurs, et mesurer l’apport du développement del’hydraulique agricole à la réalisation des ODM. Des informations de suivi fiables sont nécessairesnon seulement sur les intrants et rendements, mais aussi sur les changements dans la production, lesrevenus, l’emploi, la santé et l’environnement.

Le suivi-évaluation en tant qu’outil de gestion utilisé par les agriculteurs, les agences d’exécution etles partenaires financiers doit donc désormais être prioritaire. Les systèmes doivent être conçus detelle sorte qu’ils puissent servir d’outil de gestion pour les paysans, les agences d’exécution et desupervision des projets.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 14

Chapitre 1 Pauvreté rurale et développement de l’hydraulique agricole enAfrique subsaharienne.

1.1 Objectifs de développements du millénaire, agriculture et pauvreté rurale

La réduction de la pauvreté constitue un défi majeur pour l’Afrique subsaharienne. En 2000, par laDéclaration du millénaire, les pays – riches et pauvres – s’engageaient à éradiquer la pauvreté,promouvoir la dignité humaine et l’égalité et à assurer la paix, la démocratie et la pérennité del’environnement. Le premier des Objectifs de développements du millénaire (ODM – annexe 2) estl’éradication de l’extrême pauvreté et de la faim, avec comme cible une réduction de moitié, d’ici2015, de la proportion de la population dont le revenu est inférieur à 1 dollars EU par jour.

Si dans l’ensemble, le monde est globalementsur la bonne la voie, l’Afrique subsahariennen’est, elle, pas susceptible de suivre latendance actuelle (Figure 1.1) pour atteindrecet objectif clé du développement. Si rien nechange, le nombre absolu des pauvres dans larégion continuera d’augmenter et d’ici 2015,l’Afrique subsaharienne comptera près de lamoitié des pauvres du monde.

La croissance agricole est la clé de laréduction de la pauvreté. La pauvreté ruralereprésente 83 % de la pauvreté extrême totale

en Afrique subsaharienne, et 85 % des pauvres tiennent, au moins en partie, leurs sources de revenu del’agriculture. La croissance des revenus agricoles est par conséquent fondamentale pour la réductionde la pauvreté. Elle permettra également de tirer la croissance économique nationale (Timmer 1997,Mellor 2001, Diao et al 2003, Byerlee et al 2005, van Koppen et al 20056).

L’agriculture reste largement une activité desubsistance en Afrique subsaharienne. Laproduction est concentrée sur des cultures àfaible valeur. Dans l’ensemble, en termesd’argent, les céréales, les racines et les bananesplantain représentent plus de deux tiers desproduits agricoles de la région tandis que lesproduits agricoles d’exportation traditionnelset non traditionnels à plus forte valeurreprésentent seulement 8 % (FAO 2005a7). Laproductivité agricole est la plus faible dumonde, avec un résultat par habitantn’atteignant que 56 % de la moyenne mondiale(FAO 2005a:33). La production n’a pas suivi lacroissance démographique (Figure 1.2, FAO2003a:4.1, Rosegrant et al 2005:3,18) et la

croissance a été maintenue largement grâce à l’extension de la surface cultivée : depuis 1980, plus de80 % de la croissance de la production résultent de l’extension de la surface cultivée, par rapport àmoins de 20 % pour toutes les autres régions (Figure 1.3).

6 Le soulignement indique le rapport de la composante du Programme de collaboration.7 Le soulignement indique le rapport de la composante du Programme de collaboration.

Figure 1.1 : L’Afrique subsaharienne est la région laplus pauvre du monde – et elle devient de plus en

plus pauvrePourcentage de la population vivant avec moins de un dollar EU par jour

0

10

20

30

40

50

SSA SA EAP LAC ECA MNA

perc

enta

ge

1990

1995

2001

Source : NEPAD 2005, sur la base des données de laBM

Figure 1.2 : La croissance démographique en Afriquesubsaharienne dépasse la croissance du PIB général

et de celui de l’agriculture, de sorte que la populationest devenue plus pauvre

PIB, PIB agricole et croissance de la population (%) 1980-2003

0

1

2

3

4

5

6

7

8

East Asia & Pacif ic Sout h Asia Middle East & Nor t h

Af rica

Lat in America &

Car ibbean

Sub-Saharan Af rica

GDP grow th (annual %)

Ag value added (annual grow th %)

Population grow th %

Source : Banque mondiale

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 15

Les familles d’agriculteurs ont tendance à seconfiner dans un système à faibles niveauxd’intrants et de revenus, où les rendementssont faibles et stagnants (NEPAD 2005a:7,Rosegrant et al 2005:51). La productivité aconnu une faible évolution tirée par latechnologie. Etant donné que la populationdépasse la production, le nombre de personnesmal nourries augmente. L’autosuffisancealimentaire a baissé (de 97 % au milieu desannées 60 à 82 % en 1997/9) sans que lesménages génèrent assez de revenus pourassurer l’achat de vivres (NEPAD 2005a:3,FAO 2003a:3.4). Les marchés agricoles sontrestés segmentés et les coûts des transactions

sont élevés. Le processus « d’extensification » agricole a aussi produit certaines conséquencesnégatives pour l’environnement, telles que la perte de forêts et de zones de fourrage, l’épuisement dessols et la dégradation des bassins hydrographiques.

En s’intéressant à la capacité potentielle de l’hydraulique agricole à augmenter les revenus despaysans, le présent rapport discute des impacts sur la pauvreté en termes de pauvreté liée au manquede revenus plutôt qu’à d’autres aspects de privation matérielle ou d’absence d’accès aux services . Lesévaluations participatives de la pauvreté ont révélé que les pauvres définissent leur situation en termesde dénuement matériel (insuffisance d’argent, de travail, d’alimentation, d’habillement et delogement), d’insuffisance d’accès aux services de santé et à l’eau potable ; d’insuffisance de facteursnon matériels tels que la sécurité, la paix et le pouvoir sur les décisions affectant leur vie (Robb 1999,cité dans FIDA 2001). Ces composantes de la pauvreté sont habituellement réparties en pauvreté liéeau manque de revenus et celle liée à d’autres facteurs. La réduction de la pauvreté liée au manque derevenus permet aux ménages d’assurer la sécurité alimentaire, d’acquérir des biens, de réduire lavulnérabilité aux chocs extérieurs et de prévoir l’avenir. La réduction de la pauvreté due au manque derevenus permet souvent d’améliorer aussi l’accès aux services de santé et à l’eau potable.

1.2 Hydraulique agricole, croissance et systèmes de production

L’intensification et la diversification devraient devenir les principales sources de la future croissanceagricole et de la réduction de la pauvreté dans la région, et l’hydraulique agricole y jouera un rôleclé. La croissance et la réduction de la pauvreté dans l’agriculture seront les produits de deux sourcesprincipales (Dixon et al 2001 : 14, Banque mondiale 2005m : 109) :

L’intensification, c’est-à-dire une production accrue par unité de terre soit par la création etl’adoption de techniques telles qu’une gestion améliorée de l’eau dans les champs, soit par desinvestissements qui réduisent des contraintes clés telles que la disponibilité de l’eau ;

La diversification, c’est-à-dire l’ajustement du modèle d’exploitation agricole, en exploitantde nouvelles opportunités de marché ou des niches existantes afin d’accroître les revenusagricoles ou de réduire la variabilité des revenus.

La conclusion de la FAO, dans sa perspective de l’agriculture mondiale à l’horizon 2015-2030 (FAO2003a) est qu’en Afrique subsaharienne, 73 % de la croissance de la production agricole attendue àl’horizon 2030 devrait venir d’une augmentation des rendements et de l’intensification des cultures.

Les 27 % restants sont supposés être induits par l’extension de la surface cultivée – principalement

Figure 1.3 : L’extension de la surface a été de loin le plusgrand moteur de la croissance agricole en Afrique

subsaharienneContribution de l’augmentation de la productivité et de l’extension de la

surface dans l’augmentation de la production céréalière totale 1980-2003 (%)

increases in aggregate cereals production 1980-2003 (%)

-10

0

10

20

30

40

50

SSA EA LAC MNA SA

perc

enta

ge

yield

area

Source : Sur la base des données de la FAO

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 16

pour le maïs – dans le nombre limité des pays ayant encore de l’espace pour l’extension8.

Le potentiel de croissance agricole et de réduction de la pauvreté varie selon le système d’exploitationagricole et la zone agro-écologique. Le potentiel de croissance agricole et les mécanismes par lesquelsla croissance et la réduction de la pauvreté se produiront diffèrent en fonction du systèmed’exploitation agricole. Quinze systèmes d’exploitation agricole ont été identifiés pour la région(Dixon et al 20019). Ces systèmes correspondent largement aux principales zones agro-écologiques(définies par la FAO sur la base de la durée annuelle moyenne du cycle végétatif des cultures10), bienque les facteurs locaux – particulièrement l’accès aux marchés – créent une possibilité d’exploitationplus intensive ou de diversification dans ces zones. Dans l’ensemble de la région, les zones agro-écologiques arides et semi-arides (durée du cycle végétatif des cultures inférieure à 120 jours)couvrent 43 % de l’aire continentale ; et les zones semi humides et humides (durée du cycle végétatifsupérieure à 120 jours) couvrent 53 % des terres (Dixon et al 2001 : 29).

Principaux systèmes d’exploitation agricolesAfrique subsaharienne

Carte 1

Source : FAO et Banque mondiale, 2001

8 En mettant l’accent sur l’augmentation de la production agricole plutôt que sur la croissance des revenus agricoles,la FAO 2003a ne quantifie pas les impacts sur la croissance attendus de la diversification. Les messages sontcependant cohérents : la croissance agricole en Afrique subsaharienne résultera fondamentalement de l’améliorationde l’utilisation des facteurs de production dans les exploitations existantes. Une indication de l’étendue relative del’extension est fournie par les données présentées dans le tableau I en annexe qui montre qu’au moins 13 des 48 paysd’Afrique subsaharienne exploitent déjà plus de 50 % de leurs terres cultivables, alors que cinq autres avoisinent les50 %. En outre, la surface cultivable inclut la terre de toutes les zones agro-écologiques et certaines des terrescultivables (et peut-être plus) actuellement non exploitées peuvent se situer dans des zones à faible potentiel, ce quisignifie que la pression sur la terre à plus fort potentiel est plus importante que ne le suggèrent les données.9 La description des principaux systèmes d’exploitation agricole fournie par Dixon et al est donnée en annexe 3.10 Pour les définitions, voir le Glossaire. Pour les cartes des systèmes d’exploitation et des zones agro-écologiques(durée du cycle végétatif) voir également http://www.fao.org/farmingsystems/mapstheme_02_en.htm

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 17

Les systèmes d’exploitation agricole irrigués ont un potentiel élevé mais couvrent une surface limitée.Seul un des quinze systèmes d’exploitation agricole identifiés est principalement irrigué. Dans cesystème qui couvre juste 1 % des terres et 2 % de la population agricole – environ 7 millions depersonnes – la pauvreté est limitée et le potentiel de croissance est élevé (Dixon et al 2001:71). Enplus de l’extension de la surface irriguée, les principales sources probables de croissance sont uneintensification et diversification continue ; l’efficience de ces deux facteurs passe essentiellement parun développement accru du marché et une meilleure maîtrise de l’eau.

L’intensification et la diversification axées sur le marché dans les zones humides et semi humides,notamment grâce à une gestion améliorée de l’eau, entraîneront une croissance agricole et laréduction de la pauvreté, même si les perspectives sont limitées pour certains systèmes d’exploitationagricole dans ces zones . Les perspectives de croissance et de réduction de la pauvreté dans le systèmepérenne des hautes terres (couvrant 8 % de la population agricole de la région) sont limitées (Dixon etal, 2001:71) et les principales stratégies des ménages consisteront à trouver un revenu d’appoint et à seretirer des activités agricoles. Pour les systèmes ayant un potentiel élevé ou moyen de croissance et deréduction de la pauvreté tels que la culture mixte de céréales et de racines (15 % de la populationagricole), le maïs mixte (15 %) et la culture de racines (11 %), la production continuera probablementà s’orienter vers la production de denrées essentielles pour la sécurité alimentaire des ménages etcertaines cultures de rente non périssables à forte valeur. L’intensification et la diversification dans cessystèmes pourraient présenter de bonnes opportunités pour la croissance agricole et la réduction de lapauvreté (Dixon et al 2001:71). Le processus de croissance pourrait être largement stimulé parl’amélioration de l’accès au marché qui est actuellement limité par : (a) la situation géographique(producteurs isolés des zones densément peuplées dotées de vastes marchés actifs) ; (b) l’inadéquationdes infrastructures et des services d’appui (communications, services financiers et de vulgarisation) ;et (c) la faiblesse du pouvoir d’achat et de la demande sur les marchés eux-mêmes (Dixon et al 2001,Banque mondiale 2005m). Une gestion améliorée de l’eau (encadré 1.1) sera un facteur important dela croissance liée au marché, en allant des simples techniques de maîtrise de l’eau de pluie in situ à uneirrigation complète, en fonction des ressources locales et des besoins ainsi que de la rentabilité desopportunités de marché.

Il n’y a que des opportunités limitées d’amélioration de la gestion de l’eau dans les systèmesd’exploitation agricole à faible potentiel dans les zones arides et semi-arides marginales. Lessystèmes d’exploitation agricole à faible potentiel des zones arides et semi arides marginalesprésentent un défi de croissance assez différent. Dans ces systèmes d’exploitation agricole (couvrantenviron 16 % de la population de la région), la population clairsemée dépend des systèmes desubsistance pastoraux et agro-pastoraux de culture du millet/sorgho, caractérisés par un faible accèsaux marchés, une production instable et une insécurité alimentaire. Une certaine stabilité de laproduction et de la croissance peut être atteinte lorsqu’une gestion viable de l’eau de pluie ou despratiques de récolte, telles que les systèmes tassa au Niger, peuvent être identifiés et reproduits àgrande échelle (Dixon et al:69). À certains endroits, l’irrigation est une possibilité lorsquel’hydraulique peut être aménagée à moindre coût et que les marchés peuvent être développés. Dansl’ensemble, les perspectives de réduction de la pauvreté dans ces régions sont généralement médiocreset la principale stratégie des ménages sera probablement un retrait des activités agricoles (Dixon etal:71).

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 18

1.3 Progrès du développement de l’hydraulique agricole

À ce jour, le développement de l’hydraulique agricole de l’eau en Afrique subsaharienne a été plusfaible que dans toute autre région. Avec juste 4,9 % des 182,7 millions d’hectares de la surface totalecultivée, la surface aménagée pour l’hydraulique agricole de l’eau en Afrique subsaharienne est deloin la plus faible de toutes les autres régions de la terre (figure 1.4). Trois pays (Soudan, Afrique duSud et Madagascar) représentent deux tiers du périmètre irrigable aménagé (voir le tableau 1 enannexe et la carte 1).

L’irrigation a connu une expansion lente. Aucours des quarante dernières années, seulsquatre millions d’hectares de nouvelles terresirriguées ont été aménagés dans la région ; cequi représente de loin la plus faible expansionde toutes les autres régions. Au cours de lamême période, la Chine a ajouté 25 millionsd’ha et l’Inde 32 millions d’ha (FAO 2003a).Entre 1994 et 2004, la croissance des terresaménagées en Afrique subsaharienne n’a étéque de 0,85 million d’ha (FAO 2005b).

Figure 1.4 : La part de la surface irriguée de l’Afriquesubsaharienne est de loin plus faible que celle d’autres

régionsTerres irriguées (% des terres arables)

0

5

10

15

20

25

30

35

40

South Asia Middle East &North Africa

East Asia &Pacif ic

Latin America &Caribbean

Sub-SaharanAfrica

Source : BM 2005b

Encadré 1.1 : Qu’est-ce que la gestion de l’utilisation agricole de l’eau ?

La gestion de l’utilisation agricole de l’eau inclut l’irrigation, le drainage, la gestion des bassins versants, lerecyclage des eaux usées, la récolte de l’eau et la gestion in situ de l’eau de pluie – incluant l’utilisation descrues et des décrues – pour améliorer la production agricole.

L’irrigation est le processus par lequel l’eau est déviée des cours d’eau, stockée, pompée à partir de puits,rivières ou installations de stockage ou autre, distribuée et utilisée pour la production agricole.

Le drainage est la suppression de l’excès d’eau dans la terre agricole.

La gestion des bassins versants consiste à conserver et l’utiliser l’eau d’un bassin versant.

Le recyclage des eaux usées pour la production agricole est l’utilisation des eaux de drainage ou d’autres eauxusées (y compris les eaux d’égout).

La récolte de l’eau ou collecte des eaux de ruissellement est la récolte, avec ou sans stockage, des eaux deruissellement des champs, de micro bassins versants ou de bassins extérieurs, tels que ceux des routes, pourirriguer les cultures.

La gestion in situ de l’eau de pluie est la retenue et le stockage des eaux de pluie en vue de leur utilisation dansla production de cultures pluviales.

Source : FAO 2005b ; FIDA 2005 ; Banque mondiale 2005b

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 19

Jusqu’à une date récente, les investissementsdans l’hydraulique agricole ont décliné. Leniveau et la tendance du financement desbailleurs de fonds sont conventionnellementconsidérés comme un indicateur du niveaud’investissement. Pour la dernière période detrois ans sur laquelle des données partiellessont disponibles (1994-1996) le montant totaldes projets financés par tous les bailleurs defonds en matière d’irrigation et de drainagereprésentait moins de 10 % des niveaux desvingt dernières années – juste 127 millionsde dollars EU toutes sources confondues. Lesprêts de la Banque mondiale à l’irrigation etau drainage a fortement chuté après 1985.Même si les niveaux de prêt ontpartiellement réaugmenté à la fin des années

90, le prêt de la période 2002-2005 était toujours inférieur de moitié au niveau de 1978-1981 (Figure1.5). En outre, les prêts de la Banque mondiale à l’irrigation et au drainage dans la région est trèsfaible par rapport à celui accordé dans d’autres régions. Par exemple, au cours de la période 1996-2005, l’assistance à l’irrigation et au drainage de la Banque mondiale en l’Afrique subsahariennereprésentait juste 6 % des ressources accordées à l’Asie.

…et l’investissement dans l’hydraulique agricole n’a reçu qu’une faible proportion de celui consacréau secteur de l’eau dans son ensemble. Par exemple, l’aide de la Banque africaine de développement àl’hydraulique agricole au cours de la période 1968-2001 était de 630 millions de dollars EU, ce qui nereprésente que 14 % de son assistance à l’ensemble du secteur de l’eau (4.574 millions de dollars EU).

Chapitre 2 Caractéristiques et rentabilité de l’hydraulique agricole

2.1 Typologie de l’hydraulique agricole

La typologie de la gestion de l’hydraulique agricole utilisée dans le présent rapport suit de manièregénérale celle adoptée par la FAO dans son système d’information globale sur l’eau et l’agriculture,AQUASTAT (http://www.fao.org/ag/aquastat). Toutefois, elle prend également en compte deuxdomaines de l’hydraulique agricole qui n’ont pas été pris en compte par AQUASTAT – c’est-à-dire larécolte de l’eau et la gestion in situ de l’eau de pluie (voir figure 2.1).

Figure 1.5 : Les prêts de la Banque mondiale pour l’irrigationet le drainage en Afrique subsaharienne représentent

seulement la moitié des niveaux d’il y a vingt ansPrêts de la Banque mondiale à l’irrigation et au drainage en l’Afrique

subsaharienneExercices fiscaux 1978-2005

175

133

45

3

46

8978

0

20

40

60

80

100

120

140

160

180

200

1978-1981 1982-1985 1986-1989 1990-1993 1994-1997 1998-2001 2002-2005

Mil

lion

US

$(c

on

sta

nt2

00

0U

S$)

Source : Base de données ESSD de la Banque mondiale

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 20

Figure 2.1 : Typologie de l’hydraulique agricole

Note : Adaptéed’AQUASTAT (les cadres en gris correspondent à la typologie d’AQUASTAT)

2.2 Caractéristiques de l’hydraulique agricole

Il y a aujourd’hui environ 9,1 millions d’hectares de terre en Afrique subsaharienne couverts parl’une ou l’autre forme de gestion de l’eau . Sur ces 9,1 millions d’hectares (voir tableau 2.1), 7,1millions sont « équipés » (c’est-à-dire aménagés avec des infrastructures d’irrigation). Sur ces 7,1millions, 6,2 millions sont sous irrigation avec contrôle total/partiel, et 0,9 million d’ha sont composésde basses terres aménagées et de zones irriguées par épandage11. Les 2 millions d’ha restants sont deszones de décrue et des zones humides non équipées de système de contrôle de l’eau. Sur les 7,1millions d’ha aménagés, on estime qu’environ 75 % seulement (environ 5,3 millions d’ha) sontopérationnels (FAO 2005b).

Il est difficile d’estimer le nombre de petits exploitants pratiquant l’irrigation impliqués dans cetteactivité. Toutefois, on pense qu’au total au moins la moitié des 9,1 millions d’ha aménagés est cultivéepar des petits exploitants. Si on suppose que chaque ménage cultive en moyenne environ un hectare, lenombre total de ménages de petits exploitants pratiquant l’irrigation pourrait dépasser 4,5 millions ; cequi représente plus de 27 millions de personnes12.

11 Selon la terminologie adoptée à la FAO (2005b), les « basses terres aménagées » comprennent : (a) les zones humides etles fonds de vallées intérieures cultivées qui ont été aménagés avec des structures de contrôle de l’eau pour l’irrigation et ledrainage ; (b) les zones le long des rivières où la culture utilise l’eau des décrues et où des structures ont été aménagées pourcapter cette eau et ; (c) les zones des mangroves pour l’agriculture.12 La taille de la parcelle varie avec le type d’investisseur (c’est-à-dire public ou privé) et les objectifs de l’investissement.Pour l’investissement dans la petite irrigation par exemple, l’objectif a souvent été de répartir les avantages del’investissement aussi largement que possible, même si cela s’est souvent soldé par des parcelles trop petites pour constituerune incitation à entreprendre des opérations commercialisables, particulièrement lorsque la rotation des cultures est visée. Àl’opposé, il y a eu des cas où les parcelles étaient trop grandes pour pouvoir être gérées de façon adéquate par les petitsexploitants, avec ou sans utilisation d’une main-d’œuvre complémentaire.

Surface couverte par l’utilisation agricole de l’eau

Surface aménagée pour l’irrigationSurface avec d’autres formes d’utilisation

agricole de l’eau

Basses terresaménagées

Irrigation par épandage Zones humides et fonds devallées intérieures

cultivées non aménagées

Irrigation desurface

Zones humides et valléesintérieures aménagées

Irrigation paraspersion

Système de décrue aménagé

Irrigationlocalisée Autre

Récolte de l’eau

Gestion in situ del’eau de pluie

Zones de décruenon aménagées

Surface aménagée pourl’irrigation à contrôle

total/partiel

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 21

Vingt pays ont plus de 100.000ha de périmètres aménagéspour l’hydraulique. La figure2.2 reprend la répartition dupérimètre aménagé dans lesprincipaux pays de l’Afriquesubsaharienne où l’hydrauliqueagricole est importante13. LeSoudan, l’Afrique du Sud,Madagascar et le Nigeria sontles principaux pays pratiquantl’agriculture irriguée. D’autrespays dotés de plus de 100.000ha d’une irrigation totalementcontrôlée sont : l’Éthiopie, leKenya, la Tanzanie, leZimbabwe, le Mozambique etle Sénégal. Dans plusieurspays, les systèmes d’irrigation

partiellement contrôlée (irrigation par épandage et exploitations des basses terres) prédominent : ils’agit de la Somalie, du Malawi, du Mali et de la Zambie. Au Nigeria, en Angola, au Sierra Leone, auTchad et en Zambie les systèmes de culture de décrue et de culture en zone humide sont importants. Ilest probable que les données fournies pour la FAO 2005b sous-estiment l’irrigation informelle,notamment l’irrigation urbaine et périurbaine.

Table 2.1 : Surface en Afrique subsaharienne par type de gestion de l’hydraulique agricole

Type de maîtrise de l’eau Million ha % Principaux pays Autres pays représentatifsAménagé1.1 Contrôle total de l’eau

Surface* 4,9 54 % Soudan,Madagascar,Afrique du Sud.

Éthiopie, Nigeria, Tanzanie, Mozambique,Sénégal, Mali, Angola, Somalie, Zimbabwe,Mauritanie

Aspersion 1,2 13 % Afrique du Sud Zimbabwe, Kenya, Malawi, Côte d'Ivoire,Swaziland, Zambie, Maurice

Localisée 0,2 2 % Afrique du Sud. Zimbabwe, Zambie, MalawiContrôle total 6,2 69 %Contrôle partielBasses terres 0,6 6 % Mali, Zambie,

Guinée, Niger,Nigeria

Côte d'Ivoire, Sénégal, Burundi, GuinéeBissau

Épandage 0,3 3 % Somali, Soudan. Érythrée, CamerounContrôle partiel 0,9 9 %Surface totale aménagée 7,1 78 %2. Non aménagée** 2,0 22 % Nigeria, Angola Sierra Leone, Tchad, Zambie, Rwanda,

Burundi, Mauritanie, Malawi, Mali, OugandaTotal périmètre avecmaîtrise de l’eau

9,1 100 %

*Si le type d’irrigation n’est pas précisé, la surface irriguée n’a pas été évaluée. **Autres formes de gestion de l’hydraulique(culture non aménagée, décrues et zones humides). Source : FAO (2005b).

Les prélèvements d’eau pour l’agriculture sont très limités – juste moins de 3 % du total desressources d’eau renouvelables – et le stockage d’eau est bien inférieur aux niveaux d’autres régions.Les prélèvements totaux pour l’agriculture en Afrique subsaharienne s’élèvent à 105 BCM, soit moinsde 3 % du total des ressources d’eau renouvelables. Le niveau des infrastructures de stockage de l’eauest faible dans la plupart des pays, une moyenne de 543 m3 par habitant, à comparer aux 2.428 m3 de

13 Le tableau 2 de l’annexe donne des détails des zones irriguées pour tous les pays d’Afrique subsaharienne selonAQUASTAT

Figure 2.2 : Périmètre aménagé par type de gestion de l’hydraulique(‘000)('000 has)

0 200 400 600 800 1,000 1,200 1,400 1,600 1,800 2,000

Rwanda

Burundi

Mauritania

Kenya

Mozambique

Malawi

Senegal

Chad

Sierra Leone

Tanzania

Zimbabwe

Somalia

Zambia

Ethiopia

Mali

Angola

Nigeria

Madagascar

South Africa

Sudan

Source : FAO 2005b

Zone aménagée : complet Zone aménagée : partiel (basses terres et épandage) Zones non aménagées : décrues et zones humides

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 22

l’Amérique du Sud et à la moyenne mondiale de 963 m3 par habitant. Au Kenya, la capacité destockage totale par habitant n’est que de 126m3, soit moins de 4 % de celle du Brésil (sur la base desdonnées de ICOLD et selon de Fraiture 200514, Banque mondiale 2004a:vii)15.

Pour l’irrigation, l’eau de surface est la source d’eau par excellence . AQUASTAT (FAO 2005b)indique que 91 % de la surface sous irrigation entièrement ou partiellement contrôlée en Afriquesubsaharienne sont approvisionnés par l’eau de surface et 9 % par l’eau souterraine. Il y a uneconcentration d’irrigation directement liée aux bassins du Nil, du Niger, de l’Orange, du Sénégal, de laVolta, du Zambèze.

Les systèmes d’irrigation à grande échelle sont généralement construits et gérés par lesgouvernements16. Dans plusieurs pays d’Afrique subsaharienne, en particulier au Soudan, àMadagascar et au Nigeria, les systèmes d’irrigation à grande échelle sont généralement construits etgérés par des agences publiques. Nombre de systèmes à petite et moyenne échelle sont égalementconstruits par les gouvernements et gérés par les agences publiques chargées de l’irrigation, même sileur gestion est de plus en plus confiée aux paysans – au Zimbabwe, au Sénégal, en Mauritanie, auNiger, au Mali et en Afrique du Sud, par exemple.

… mais au moins la moitié des surfaces alimentées en eau est aménagée et exploitée par le privé. Lasurface aménagée et exploitée par le privé comprend : (i) quelques industries sucrières de grande tailleen Afrique australe ; (ii) des milliers de systèmes à petite échelle gérés par des grandes exploitationscommerciales ; et (iii) de nombreux systèmes informels appartenant à de petits exploitants. Certainspetits systèmes d’irrigation privés sont destinés à l’agriculture de subsistance (comme dans le cas de laproduction du riz paddy malgache dans les bas fonds couvrant plus de 800.000 hectares), mais certainssont consacrés à une agriculture commerciale écoulée sur les marchés urbains, par exemple dans leszones périurbaines et dans les terres humides intérieures et dépendent la plupart du temps detechniques de micro-irrigation. On estime que l’irrigation dambo en Zambie couvre 100.000 hectares.

2.3 Culture irriguée et productivité

Les céréales, surtout le riz, sont les principales cultures irriguées. L’horticulture à forte valeur et lescultures industrielles – principalement le coton et la canne à sucre – sont également d’importantescultures irriguées. Les céréales constituent la culture irriguée dominante en Afrique subsaharienne,représentant près de 50 % des surfaces cultivées sous irrigation (tableau 2.2). Le riz est la céréaleprincipale et représente 25 % des surfaces cultivées sous irrigation, il est particulièrement importantdans les zones humides et subhumides. D’autres céréales irriguées comptent pour 24 % des zonescultivées sous irrigation et incluent le maïs et le blé irrigués. Ce dernier est particulièrement, importanten Afrique australe et en Éthiopie qui produisent ensemble 80 % du blé de l’Afrique subsaharienne.L’horticulture à forte valeur, les racines, les tubercules et les cultures industrielles – principalement lecoton et la canne à sucre – sont aussi d’importantes cultures irriguées couvrant 33 % des périmètresexploités sous irrigation. La production fourragère et les arbres fruitiers représentent ensemble 12 %,principalement en Afrique australe et particulièrement en Afrique du Sud.

14 Le soulignement indique le rapport de la composante du Programme de collaboration15 En réalité, les infrastructures de stockage de l’eau destinées à l’hydraulique agricole sont très inférieures aux chiffresindiqués, étant donné qu’une part importante des infrastructures est largement consacrée à l’hydroélectricité. En outre, lesmoyennes régionales sont gonflées par un petit nombre de barrages de très grande taille.16 Pour les définitions de grande, moyenne et petite échelle, voir le Glossaire.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 23

Tableau 2.2 : Zone de cultures irriguées en Afrique subsaharienne (en milliers d’ha)

Région Riz Autrescéréales

Légumes, racines,tubercules

Culturesindustrielles Fourrage Arbres

fruitiers Autres Total

Soudano-sahélien 242 721 181 397 142 5 5 1.693Golfe de Guinée 28 38 73 50 - - 32 221Centrale 27 8 10 55 - 4 1 105Orientale 108 193 169 123 - 6 85 684Îles de l’Océan indien 1.062 - 1 38 - - 1.101Australe 21 460 344 510 418 77 236 2.066Total 1.488 1.420 778 1.173 560 92 359 5.870a

% 25 % 24 % 13 % 20 % 10 % 2 % 6 % 100 %Source : FAO 2005b:30

a/ Les 5,9 millions ha de la surface totale cultivée reprise dans ce tableau est proportionnelle à la surface aménagée de 5,3millions d’ha qu’on estime être actuellement opérationnelle, en supposant que l’ensemble de l’intensité des cultures dépasse100 %. Voir la carte 2 pour les régions.

Carte 2 : Régions de l’Afrique subsaharienne

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 24

La contribution de la cultureirriguée à la production alimentairetotale de l’Afrique subsaharienne estfaible ; elle joue cependant un rôleimportant dans la substitution àl’importation de blé et de riz ainsique dans la culture de rente.L’irrigation est importante (tableau2.3) pour la canne à sucre (irriguée à69 %), le blé (irrigué à 20 %), le riz(irrigué à 33 %), l’horticulture(irriguée à 26 %) et le coton (irriguéà 11 %). Pour la production vivrière,l’irrigation ne joue qu’un rôle mineurde complément à l’eau de pluie.

Les rendements des céréales irriguéesobtenus par les petits exploitants sontgénéralement faibles par rapports auxniveaux mondiaux. Ils n’ont connu unelente augmentation qu’au cours desdernières années. En 1997/9, lerendement moyen du paddy en Afrique

subsaharienne était de 1,6 t/ha, comparé à 2,9 t/ha en Asie du Sud et à 4,2 t/ha en Asie de l’Est(tableau 2.4). Il y a eu un certain accroissement du rendement au cours des dernières années (desrendements moyens du paddy jusqu’à 20 % en 1979-1999) mais celui-ci a été beaucoup moins rapidequ’en Asie (autour de 53 % en Asie du Sud au cours de la même période). L’intensification de laculture du paddy dans le cadre de la Révolution verte n’a pas encore atteint l’Afrique subsaharienne.Les rendements moyens du paddy à Madagascar ont augmenté de juste 20 % au cours des vingtdernières années, passant à environ 2 t/ha, alors que ceux des pays asiatiques, qui étaient auparavantau même niveau, ont plus que doublé (voir figure 2.3). Toutefois, dans quelques grands systèmes biengérés d’Afrique subsaharienne, tels que l’Office du Niger au Mali, les rendements ont atteint les« niveaux asiatique » (5-6 t/ha).

Dans l’ensemble, la production irriguée en Afrique subsaharienne est généralement caractérisée parune faible productivité. De manière générale, les faibles rendements de la production irriguée del’Afrique subsaharienne peuvent être attribués à une fourniture non fiable de l’eau, une mauvaisegestion de l’eau, une faible utilisation des intrants et gestion des cultures, et à un accès difficile à desmarchés de produits rentables (voir 3.4 ci-dessous). À Madagascar, le rendement du paddy pourraitaugmenter de 50 à 80 % rien qu’en améliorant la gestion de l’eau (Tableau 2.5). En ce qui concernel’utilisation d’engrais, les paysans de l’Afrique subsaharienne sont encore à la traîne par rapport à ceuxd’autres régions. L’utilisation moyenne d’engrais reste à 9 kg par hectare en 2002/03 à comparer aux100 kg/ha de l’Asie du Sud et aux 135 kg/ha de l’Asie de l’Est (FAO 2004).

Tableau 2.3 : Pourcentage de la production totale qui est irrigué(chiffres de 2005)

Production totalede l’Afrique

subsaharienne(million de

tonnes)

Productionirriguée

(million detonnes)

Pourcentagede la

productionirriguée

Cultures vivrièresSorgho 18,5 0,7 4 %Maïs 34,6 0,4 1 %Blé 4,5 0,9 20 %Riz 11,5 3,8 33 %Cultures de renteFruits 12,8 3,3 26 %Légumes 20,3 6,2 31 %Canne à sucre 46,8 32,4 69 %Coton 3,6 0,4 11 %

Source : FAO (2005a) sur la base des données de FAOSTAT

Tableau 2.4 : Rendements du paddy en Afrique subsaharienne,Asie du Sud et Asie de l’Est

Rendement régional du paddy (kg/ha)Région 1979/81 1989/91 1997/99ASS 1.347 1.659 1.629Asie du Sud 1.910 2.602 2.917Asie de l’Est 3.374 4.134 4.180

Source : FAO 2003a

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 25

À Madagascar, 69 % de la surfaceirriguée consacrée au riz sontexploités sans utilisation d’engraisminéral ou organique, et larelation entre l’utilisationd’engrais et les rendements estclaire (Tableau 2.6, Banquemondiale 2003:67). La corrélationentre la faible intensité de laproduction irriguée etl’éloignement des marchés est trèsforte en Afrique subsaharienne. ÀMadagascar, la distance entre uneparcelle de riz et la route étaitsupposée avoir un fort effetnégatif sur les rendements de rizpaddy (Banque mondiale 2003).

2.4 Quels types de culturesirriguées se sont-ils révélés

rentables ?

Cultures vivrières

Les rendements généralementfaibles des cultures vivrièresirriguées ont largement contribuéà rendre non rentablel’investissement dans l’irrigation,particulièrement lorsque les coûtsdu capital sont élevés. Il y acependant des exceptions. Laculture du riz irrigué en Afrique

subsaharienne s’est avérée rentable, au moins pour le marché local, à condition que son rendement soitrelativement bon et que les coûts d’investissement ne soient pas trop élevés. Dans plusieurs paysd’Afrique subsaharienne, la rentabilité de la production de riz au niveau des fermes se reflète dansl’avantage économique comparatif du riz sur les marchés locaux. En Sierra Leone par exemple, laproduction irriguée assure de bonnes recettes aux paysans et une viabilité économique pour la ventelocale (coûts des ressources locales – DRC – bien en dessous de l’unité, voir tableau 2.7), mais paspour l’exportation (DRC supérieur à l’unité). Au Mali, la production intensive de riz irrigué(rendements jusqu’à 6 t/ha et intensité de culture de 1,2) est compétitive sur le marché local et danscertaines régions frontalières des pays voisins (Banque mondiale 2005k:51). En général, la productiondu riz irrigué est rentable dans les zones subhumides d’Afrique subsaharienne si : (a) les coûtsd’investissement sont relativement faibles (5.000 dollars EU/ha ont été suggérés comme « niveauplafond » pour une culture de paddy unitaire d’un rendement moyen de 3,3 t/ha – FIDA 200517) ; (b)des systèmes de production plus intensive sont utilisés (rendements jusqu’à 5-6 t/ha pour les systèmesà coûts plus élevés) ; et (c) la production vient en substitution de l’importation. Plusieurs facteursinfluencent le niveau plafond : des améliorations peuvent être profitables même à un niveau derendement de 2 t/ha – pour autant que les coûts d’investissement soient faibles. L’isolation du marchépeut entraîner une augmentation des prix du riz local (FIDA 2005).

17 Le soulignement indique le rapport de la composante du Programme de collaboration.

Figure 2.3 : Rendement du paddy à Madagascar, au Mali et en Indonésie

Source : FAOSTAT

Tableau 2.5 : Madagascar : effet de la gestion de l’eau sur les rendementsdu paddy (kg de riz paddy par hectare)

Niveau de gestion del’eau

Lac Alaotra Hautsplateaux

Haut 3.282 3.535Modéré 2.490 3.424Faible 2.139 2.740

Source : Banque mondiale 2003:67

Tableau 2.6 : Madagascar : comparaison régionale des rendements de rizirrigué

Rendement moyen deriz paddy irrigué

(kg/ha)

Utilisation d’engrais (%de surface cultivée)

Hauts plateaux 3.200 76 %Lac Alaotra 2.632 40 %Centre ouest 1.966 22 %

Source : Banque mondiale 2003:67

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 26

Tableau 2.7 : Rendement de la production de riz irrigué en Sierra Leone

Rendementfinancier netdollars EU/ha

Paritéimportation

DRC

Paritéexportation

DRCBoliland à production intensive (ycompris variétés à hautrendement)

653 0,73 1,33

Culture riveraine de décrue àproduction intensive (y comprisVHR)

892 0,72 1,31

Source : Banque mondiale 2005h:40

D’autres céréales se sont révélées moins rentables sous irrigation, en particulier dans le cadre de labaisse continue des prix mondiaux, même si elles sont souvent cultivées en association avec descultures à plus forte valeur . La valeur relativement faible d’autres céréales sur le marché mondialimplique que les prix sur les marchés locaux ne sont pas assez élevés pour faire de la productionirriguée un investissement rentable en Afrique subsaharienne. Par exemple, au Nigeria, la plupart dessystèmes publics d’irrigation ont été conçus pour la production céréalière lorsque les priorités étaientl’autosuffisance alimentaire plutôt que l’accroissement des revenus des paysans et la viabilitééconomique. Avec la libéralisation de l’économie nigériane et la baisse continue des prix des céréalesdans le monde, la majeure partie de cette production de cultures vivrières (surtout dans le cas desystèmes à pompe) est devenue non économique (Banque mondiale 2001:46). Les 1,4 million d’ha deterre irriguée consacrée en Afrique subsaharienne à d’autres céréales reflètent vraisemblablement lessubventions accordées pour le capital et les coûts d’O&M, plutôt qu’une véritable viabilitééconomique. De même, d’autres céréales sont souvent cultivées sous irrigation en même temps qued’autres cultures à plus forte valeur, même si, dans ce cas, la rentabilité artificiellement forte provientsouvent des subventions pour le capital et les coûts d’O&M (FAO 2005a:83 et annexe 4).

Toutefois, les conditionslocales peuvent transformerl’économie : sur dessystèmes maliens de grandetaille proches des marchés,par exemple, la combinaisondu paddy avec des culturesde rente contribue à de bonstaux de rendement, alors quedans les systèmes à grandeéchelle éloignés desmarchés, la monoculture duriz irrigué peut aussi êtrerentable si les coûtsd’investissement sont assezfaibles et la productivitéélevée (Encadré 2.1).

Horticulture

L’horticulture irriguée est une activité en croissance rapide. Les marchés de l’horticulture irriguée ontconnu une croissance, la majeure partie de la production étant destinée aux marchés locaux : au Kenyapar exemple, la production totale de fruits et légumes en 1996 était de 3,1 millions de tonnes dont plusde 3 millions de tonnes étaient consommées localement ou utilisées comme intrant dans latransformation, et seulement 90.000 tonnes étaient exportées sous forme de produit frais (IWMI2002:185).

Encadré 2.1 : Au Mali, à la fois le riz combiné avec des cultures de rente à fortevaleur et la monoculture irriguée de riz sont supposés être rentables

Dans le cadre du Projet national malien d’infrastructures rurales, différents types denouveaux systèmes d’irrigation sont en cours de développement pour la productionde riz, soit en rotation avec des cultures de rente, soit en monoculture. Dans le système à grande échelle de M’Bewani, l’Office du Niger aménagera

1.300 ha de nouvelle terre irriguée. Les rendements du paddy devraient atteindre5,0-5,5 t/ha, et les oignons, les échalotes et les tomates y seront égalementcultivés. L’intensité de culture est supposée être de 120 %. Pour un coûtd’investissement de 4.230 dollars EU/ha, le taux de rendement économiqueestimé à l’évaluation du projet est de 16 %.

Les périmètres irrigués de petite taille gérés par les paysans (250-500 ha)devraient permettre de poursuivre la monoculture du riz étant donné que cessystèmes sont très éloignés des centres de marché où les cultures de rentepourraient être écoulées. Pour la même raison, les prix du riz local sontrelativement élevés. Les rendements du paddy sont supposés être de 4,0-5,0 t/haet l’intensité de culture être de 120-150 %. Pour un coût d’investissement de5.000 dollars EU/ha, les taux de rendement attendus sont de 12-18 %.

Source : Banque mondiale 2005k:51, 70, 73-5

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 27

L’horticulture se développe surtout rapidement autour des villes – voire dans les villes. L’horticulturepériurbaine et urbaine est un phénomène qui croît rapidement et est souvent basé sur l’utilisation deseaux usées non traitées, ce qui, en l’absence de réglementation, crée certains risquesenvironnementaux et sanitaires. À Accra par exemple, on estime qu’environ 60 % des ménagesurbains sont engagés dans une agriculture artisanale de subsistance tandis que la production delégumes destinés à la commercialisation pratiquée dans des espaces urbains ouverts fournit 60 à 90 %de la consommation de légumes périssables et nourrit plus de 200.000 personnes chaque jour(Obuobie et al. 2006). À mesure que l’urbanisation exerce plus de pression sur la terre, le jardinageurbain et périurbain s’intensifie.

La production horticole destinée à l’exportation est devenue un domaine en forte expansion danscertains pays, avec un impact important sur la réduction de la pauvreté. Dans des pays tels quel’Éthiopie, le Kenya, le Sénégal, le Mali, le Niger, la Zambie et la Mauritanie, des entrepreneurs ontdéveloppé de nouveaux marchés d’exportation pour les produits irrigués à forte valeur. Ils recrutent etsupervisent des petits exploitants pour approvisionner leurs clients. Au Kenya, les fruits et légumesreprésentent actuellement la troisième source de devises et assure le gagne-pain de plus de 100.000petits paysans (Penning de Vries et al 2005:1118). L’horticulture irriguée à forte valeur apporte desbénéfices tout faits aux petits producteurs.

L’Enquête sur les ménages ruraux (2000)réalisée au Kenya a révélé que les margesbrutes par hectare étaient 6 à 20 fois plusélevées pour le haricot vert irrigué destinéà l’exportation que pour la cultureintercalaire maïs -haricot sec. La moitié desproducteurs de haricot vert possédaientleurs propres équipements d’irrigationcontre 10 % pour les autres paysans. Lerevenu moyen par habitant des producteursde haricot vert était le double de celui desautres paysans (Minot dans IWMI 2002).L’impact sur la réduction de la pauvreté estimportant (voir encadrés 2.2 et 2.3). LaUganda Joint Assessement Strategy FY05-09 (2004) a noté que « … les recherchesindiquent qu’il existe une forte corrélationentre la croissance de la productionagricole commerciale et la réduction de lapauvreté dans les années 90 – près de lamoitié de la réduction de la pauvretéréalisée entre 1992 et 1997 était l’œuvredes ménages produisant des cultures de

rente » (Banque mondiale4c:8).

L’horticulture intensifie la rentabilité de l’investissement en irrigation. Au Kenya, environ 48.000 hasont exploités avec de petits systèmes d’irrigation, largement destinés à l’horticulture (FAO 2005b).La plupart sont des systèmes organisés par les paysans dans lesquels ils partagent le coût d’une pompeet le système de distribution (Ngigi dans IWMI 2002). La croissance rapide a été accompagnée denouvelles techniques d’irrigation. Les petits systèmes d’irrigation au goutte à goutte ont été amélioréspar l’Institut de recherche agricole du Kenya et disséminés par les ONG locales. Plusieurs types depompe à pédale coûtant moins de 80 dollars EU ont été introduits.

18 Le soulignement indique le rapport de la composante du Programme de collaboration

Encadré 2.2 : Croissance de l’horticulture et les pauvresau Kenya

Au Kenya, les données recueillies par l’Enquête sur lesménages ruraux de 2000 suggèrent que presque tous lespaysans, riches et pauvres, participent à une certaine formede production horticole. Le pourcentage de la contribution del’horticulture au revenu est assez constant à travers lescatégories de revenus et de taille des exploitations. Laproduction est principalement destinée au marché. Mêmechez les 20 % les plus pauvres des paysans kenyans, 41 % dela production de fruits et légumes sont commercialisés(Minot:38).Les petits producteurs produisent environ 47 % desexportations de produits frais du Kenya. En supposant que leprix à la ferme représente 60 % du prix franco à bord, celapourrait rapporter annuellement un revenu brut de 47millions de dollars EU aux petits producteurs kenyans.L’estimation du nombre de petits producteurs bénéficiairesvarie considérablement, entre 20.000 et 100.000 ménages, desorte que les recettes moyennes tirées des exportationshorticoles pourraient se situer entre 500 et 2.350 dollars EU.

Source : Minot dans IWMI 2002:185

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 28

Encadré 2.3 : Au Kenya, l’horticulture irriguée a amélioré la vie de la famille d’Asha Muthori

Asha Muthori est une femme d’âge moyen qui possède une ferme de cinq acres sur les rives de la rivièreThiba. Elle a commencé la culture de produits horticoles après avoir constaté que les voisins qui s’yadonnaient vivaient mieux. Pompant l’eau du fleuve, elle a commencé avec une culture de tomates qu’elle avendues à des négociants qui les revendaient sur le marché de gros de Nairobi. Après, elle a commencé àcultiver le haricot vert qu’elle a vendu à des intermédiaires qui opéraient pour les exportateurs. En 2002, elle aadhéré au Groupe d’entraide des paysans de Kimuri et a vendu son haricot vert à un exportateur par le biais dugroupe. Le groupe déposait ses paiements directement sur son compte épargne, de sorte qu’elle n’avait pas àse rendre à la banque en ville.

Le bien-être de la famille d’Asha s’est considérablement amélioré depuis qu’elle a démarré la culture deproduits horticoles. Avant, ses enfants ne pouvaient aller à l’école que sporadiquement mais actuellement ellen’a plus de problème pour payer les frais de scolarité. Elle a pu acquérir une vache laitière et deux bœufs detrait.

Source : Minot dans IWMI 2002:22

Chapitre 3 Performances, mise en œuvre et impact du développement

3.1 Performances des projets d’irrigation

Les récents projets d’irrigation en Afrique subsaharienne ont, de manière générale, enregistrédes taux de rentabilité satisfaisants

Même si de nombreux échecs ont été enregistrés dans les années 1970 et 1980, les projets récents ont,de manière générale, enregistré des taux de rentabilité acceptables. Une étude réalisée dans le cadrede ce rapport (Inocencio et al 2005) constate que les projets financés par des sources externes dans lesannées 1970 et jusqu’en 1984 avaient souvent enregistré de mauvais résultats. Ces investissementsavaient trait principalement à de nouveaux projets d’irrigation à grande échelle, avec des coûts parhectare extrêmement élevés et des taux de rentabilité faibles, voire négatifs. Après 1985, les résultatsse sont améliorés : sur les 22 projets subsahariens étudiés19, lancés à partir de 1985, seul un projet aaffiché un TRE inférieur à 10 %, contre un taux égal ou supérieur à 60 % pour les autres projets.

Tableau 3.1 : Taux de rentabilité des projets d’irrigation financés par des sources externes en Afriquesubsaharienne entre 1970 et 1999

1970 à1974

1975 à1979

1980 à1984

1985 à1989

1990 à1994

1995 à1999

Nombre de projets 3 9 11 15 4 3Coût/ha (dollars EU) 4 684 24 496 11 319 7 669 8 287 8 347TRE moyen 10 % 2 % 8 % 16 % 17 % 30 %

(Source : Inocencio et al 2005)

Les principaux facteurs associés à des taux de rentabilité plus élevés dans le cadre du développementde projets d’irrigation en Afrique subsaharienne sont les suivants : des coûts moindres par hectare,l’accès au marché et des systèmes de production qui utilisent les facteurs de production de manièreplus intensive. Plusieurs facteurs influencent les taux de rentabilité. Le premier, comme l’indique letableau ci-dessus, est le coût : les projets menés en Afrique subsaharienne, où les coûts par hectaresont plus élevés, affichent des TRE plus faibles. De plus, les projets classés comme « échecs » (c’est-à-dire, les projets dont les TRE sont inférieurs à 10 %) ont, en moyenne, des coûts unitaires/ha quatre

19 Voir l’annexe 2 pour les détails relatifs à ces projets. Les calculs du TRE de l’échantillon concernent certains projets pourlesquels les coûts liés aux barrages réservoirs, aux structures de déviation et aux adductions sur de longues distances ont étéinclus et d’autres projets pour lesquels ces coûts n’ont pas été pris en compte. La focalisation de l’ensemble des projets lancésavant 1985, dont tous les coûts relatifs aux barrages réservoirs et autres structures correspondantes ont été inclus, est sansaucun doute un des facteurs qui expliquent les faibles taux de rentabilité enregistrés au cours de la période pré-1985.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 29

fois supérieurs aux projets classés comme « succès ». L’étude de composantes a remarqué que lesprojets visant à améliorer l’existant, moins coûteux, enregistraient des TRE supérieurs aux projetsvisant à mettre en place de nouveaux aménagements ou équipements (Inocencio et al 2005). Cetteconstatation s’est confirmée au Zimbabwe où les coûts relatifs aux travaux d’amélioration ontreprésenté 20 % des nouveaux développements, contre 40 % pour la construction de nouveauxéquipements de pompage et où les projets d’amélioration ont enregistré des taux de rentabilitébeaucoup plus élevés (Banque mondiale 2005c:105). La section 3.2 ci-dessous explique les facteursayant un impact sur les coûts. Le second facteur ayant une influence sur les taux de rentabilité estl’accès au marché. Les projets visant à améliorer la commercialisation de cultures économiquementplus avantageuses ont un meilleur taux de rentabilité. Au Zimbabwe, les projets bénéficiant d’un bonaccès au marché présentent des taux de rentabilité généralement au moins trois fois plus élevés queceux dont l’accès au marché est faible (Banque mondiale 2005c). Le troisième facteur a trait à laproductivité. Au Malawi, par exemple, 28 projets à petite échelle ont été classés en fonction del’utilisation des facteurs de production. Les projets utilisant peu de facteurs de production etenregistrant de faibles résultats enregistraient tous des TRE considérablement plus faibles, voirenégatifs pour cinq d’entre eux (Projet de développement de l’irrigation à petite échelle du Malawi). Lequatrième et dernier facteur concerne l’attention accordée aux aspects institutionnels et logiciels desproblèmes liés aux projets, en particulier au renforcement de l’autonomie des agriculteurs et à larestructuration du rôle des organismes publics. Les systèmes gérés par les agriculteurs ou par legouvernement en collaboration avec les agriculteurs ont considérablement mieux fonctionné que lessystèmes administrés uniquement par les organismes publics (Inocencio et al 2005).

…mais les résultats relatifs à la soutenabilité se sont avérés mitigés

La rentabilité des investissements dans le domaine de l’irrigation peut être élevée, mais les risques lesont également et les projets d’irrigation présentent des antécédents mitigés en ce qui concerne lasoutenabilité. La fréquence des projets de réhabilitation de l’irrigation à petite échelle en Afriquesubsaharienne (Soudan, Madagascar, Mali) démontre la soutenabilité médiocre de certainsinvestissements dans ce secteur dont la durée de vie devait être de 50 ans. Les taux de rentabilitécalculés pour les projets ayant bénéficié d’un financement externe, au moment de l’achèvement de laphase de construction ont parfois dû être complètement réexaminés par la suite et les rapports actuelsrelatifs à la performance des projets précédemment évalués et classés comme « succès » sont parfoisloin d’être encourageants (tableau 3.2).

Tableau 3.2 : Comparaison des projets sélectionnés lors de leur achèvement et historique après évaluation

Projet (et dated’approbation)

TRE au moment del’achèvement

Historique du projet après évaluation

Office du Niger du Mali(Banque mondiale, 1989)

30 % Succès constant malgré certaines préoccupations concernant lacomptabilité et la transparence (Référence : Aw et Diemer 2005)

Madagascar Lac Alaotra(Lac Alaotra à Madagascar)(Banque mondiale, 1984)

25 % « Le démantèlement précipité, unilatéral et prématuré de l’organismechargé de la mise en place d’infrastructures d’irrigation a étédésastreux pour le projet. La distribution de l’eau est devenuechaotique, les redevances liées à l’eau ne sont plus collectées et lesorganisations d’agriculteurs n’ont pas survécu ». (Rapportd’évaluation rétrospective 1993)

Madagascar AnalaivaSugar Project (Projet relatifà la production de sucre deAnalaiva, Madagascar)(Banque africaine dedéveloppement, 1983)

21 % TRE recalculé, négatif dans le Rapport d’évaluation rétrospective(1995)20

20 Le PPAR (Rapport d’évaluation rétrospective) est l’instrument utilisé par la Banque africaine de développement et par laBanque mondiale pour étudier les résultats et les impacts des projets après l’achèvement de leur mise en œuvre.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 30

Projet (et dated’approbation)

TRE au moment del’achèvement

Historique du projet après évaluation

Cameroon Second SEMRYRice Project (Second projetSEMRY relatif à laproduction de riz auCameroun)(Banque mondiale, 1978)

20 % Rapport actuel (2005) : « les performances ne sont pas positives pourle moment, nous assistons à une sorte de pré-réforme de l’Office duNiger qui se traduit par la gestion du projet par un organismeparapublic, l’absence d’engagement de la part des agriculteurs, uneproductivité faible, une absence de récupération des coûts ».

Ethiopia Amibara IrrigationProject (Projet d’irrigationd’Amibara, Éthiopie)(Banque africaine dedéveloppement, 1987) etRevised Amibara Project(Projet révisé d’Amibara)(Banque mondiale, 1987)

15 % (Banqueafricaine de

développement) ;15 % (Banque

mondiale)

TRE recalculé, s’établit à 9 % dans le Rapport d’évaluationrétrospective. Rapport actuel (2005) : « L’absence de drainage, laforte sédimentation et l’évolution des lits ont entravé le système. Lerendement est maintenant faible et l’entretien très coûteux ».

Source : Annexes 5 et 6.

Quel type de projet d’irrigation a enregistré les meilleurs résultats ?

De récents investissements dans des projets d’irrigation à petite échelle et gérés par des communautésse sont avérés fructueux. Des projets relatifs à la culture du riz à petite échelle au fil de l’eaudéveloppés à faibles coûts (1 070 $/ha) dans le cadre du Tanzania Participatory IrrigationDevelopment Project (Projet participatif de développement de l’irrigation en Tanzanie) ont atteint untaux de rentabilité de 22 % (FIDA 2005) et ont augmenté les revenus agricoles de 86 %. Par ailleurs,les financements du Fonds social de développement et de réhabilitation éthiopien pour la mise enplace d’aménagements hydro-agricoles gérés par des communautés, y compris la construction debarrages en terre et des détournements de rivière, a bénéficié à 40 000 foyers, avec une améliorationvisible des vies des villageois se traduisant par la présence de pompes à eau, de vaches laitières, deradios et d’une éducation régulière pour les enfants (Banque mondiale 2002).

Les projets à l’initiative du secteur privé, menés par les petits exploitants avec des technologies peucoûteuses ont également enregistré de bons résultats. Le Nigeria National Fadama DevelopmentProject (Projet de développement national de Fadama au Nigeria), par exemple, a aidé les agriculteursà développer des systèmes d’irrigation individuels à petite échelle grâce à la mise en place de plus de55 000 pompes à faible coût, chacune irriguant environ un hectare (Banque mondiale 2001:WP8-14).Le Niger Pilot Private Irrigation Project (Projet pilote privé d’irrigation du Niger) a permis la mise enplace de diverses technologies d’irrigation mécanisées et manuelles à petite échelle. La technologie depompage manuelle a ainsi permis de doubler la surface de la zone cultivée et d’atteindre un TRE de68 %. Le Micro-Irrigation Pump Promotion Project, MIPP (Projet de promotion de la micro-irrigationpar pompe) financé par le DFID ainsi que ses prédécesseurs ont créé une demande et une offre pourles pompes à pédale au Kenya et en Tanzanie. Le secteur privé a ensuite été en mesure de fabriquer etde distribuer ces pompes en réalisant des bénéfices, mais conservant un prix abordable pour lesagriculteurs (FIDA 2005).

L’appui au développement de liens de marché combiné avec des approvisionnements fiables en eau aégalement été positif. Dans le cadre du Zimbabwe Pilot Market Linkage Project , PMLP (Projet pilotede liens de marché au Zimbabwe), financé par le FIDA, une ONG a facilité la création d’associationsd’agriculteurs et la production de cultures dans le cadre d’un contrat avec un conserveur local. Lesagriculteurs ont également commencé et irrigué la culture de maïs grain au cours de l’été pour leurconsommation personnelle et sa revente sur le marché local. L’accès au marché étant assuré etl’approvisionnement en eau souterraine fiable, les agriculteurs ont pris le risque d’investir dans desfacteurs de production pour améliorer le rendement et sont parvenus à une augmentation de 265 % deleurs revenus agricoles.

Les récents projets ont souvent adopté une « approche de programme » décentralisée. Dans le cadrede cette approche de programme, les critères de sélection des sous-projets sont convenus à l’avance,mais le processus de sélection des sous-projets est décentralisé et généralement mené par un

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 31

organisme chargé du projet et des organisations d’irrigateurs qui mettent en place un processusd’identification et d’approbation communes. Le « programme » peut se restreindre aux projetsd’irrigation, ce qui a été le cas pour le Nigeria National Fadama Development Project (Projet dedéveloppement national au Fadama, Nigeria). Cependant, l’irrigation peut également être intégrée à unensemble de projets plus vaste, comme pour le Ethiopia Social Rehabilitation and Development Fund(Fonds de développement et de réhabilitation sociale éthiopien) ou le Batha Rural DevelopmentProject (Projet de développement rural de Batha) au Tchad. Néanmoins, de mauvaises décisionsconcernant les projets risquent d’être prises si aucune disposition n’est mise en place pour la créationd’une capacité relative à l’approbation des sous-projets et le contrôle et la supervision des coûtscorrespondants (voir ci-dessous, 4.4).

Le défi de l’irrigation à grande échelle

Il existe peu d’exemples réussis de projets publics d’irrigation à grande échelle en raison de laplanification descendante, des économies peu solides et des échecs institutionnels. De nombreux paysd’Afrique subsaharienne ont beaucoup investi dans l’irrigation à grande échelle. Le projet Gezira auSoudan a créé la zone irriguée à gestion unique la plus vaste au monde (880 000 ha). Plusieurs pays,Madagascar, le Soudan, le Mali, le Kenya, ont eu recours à l’irrigation à grande échelle il y a 50 ansou plus. Cependant, peu de projets de ce type ont affiché des résultats positifs ou même satisfaisantsces dernières années et plusieurs échecs spectaculaires ont été constatés, comme à Bura au Kenya. Lecas des projets à grande échelle développés et gérés par les autorités publiques au Nigeria (voirl’encadré 3.1) est un exemple parfait des problèmes souvent rencontrés. Ces derniers comprennent parexemple les décisions maladroites de planification descendante pour l’investissement, le manque detransparence et de responsabilité des organismes de gestion du secteur public, les compétencesinadéquates pour la gestion de projets, les coûts élevés et le manque de viabilité financière, le manquede bénéfices et par conséquent de motivation de la part des agriculteurs et le manque d’engagementdes agriculteurs dans le processus.

Même si les mêmes faiblesses peuvent être constatées dans les projets d’irrigation à petite échelle, cesderniers se prêtent davantage à une gestion par les agriculteurs. Comme l’a constaté l’évaluation desprojets d’irrigation de la Banque mondiale (Banque mondiale 1995), nombre des problèmes survenantdans le cadre des projets d’irrigation à grande échelle concernent également les projets d’irrigation àpetite échelle. Cependant, les projets d’irrigation à petite échelle sont évidemment intrinsèquementplus faciles à adapter à une gestion par les agriculteurs.

Encadré 3.1 : Échec des projets d’irrigation publics à grande échelle au Nigeria

Au Nigeria, le programme d’investissement public en irrigation, lancé pendant le boom pétrolier des années1970, concernait la construction de 162 grands barrages, suffisants pour irriguer 725 000 ha. Cependant, seuls95 000 ha d’irrigation ont été développés (13 % du potentiel), principalement par des projets à grande échellecouvrant jusqu’à 15 000 ha chacun. Les coûts se sont avérés très élevés, soit 27 000 $/ha selon les cours de l’an2000.

En 2003/2004, seuls 29 000 ha de ces terres avaient été exploités (30 % de la zone développée pour l’irrigationet seulement 4 % de la zone irrigable gérée par les barrages). Les problèmes étaient non seulementéconomiques à cause du manque de bénéfices réalisés par le système agricole dominé par la culture du riz, dumaïs et du blé, mais également techniques, le contrôle de l’eau étant médiocre du fait des mauvais résultats desprojets et institutionnels avec une mauvaise gestion, une récupération faible des coûts et un engagementnégligeable des agriculteurs. Aujourd’hui, le gouvernement a reconnu l’importance d’orienter les organismesdavantage vers les services, en impliquant les agriculteurs grâce à des Associations des utilisateurs d’eau(AUE).

Source : Banque mondiale 2001 WP8-10-14, FAO 2004b

Même les projets de réhabilitation des programmes d’irrigation à grande échelle peuvent s’avérerinsignifiants si la technologie d’irrigation et le choix de culture ne sont pas viables. Au Nigeria, parexemple, la réhabilitation des aménagements hydro-agricoles par gravité est uniquement viable

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 32

jusqu’à un plafond d’investissement de 1 800 $/ha pour les cultures de riz/blé et de 2 500 $/ha pour laproduction légumière. Pour certains projets d’irrigation à grande échelle au Nigeria ayant recours àl’irrigation par pompe, les coûts sont plus élevés que les revenus et aucune réhabilitation ne peut êtreéconomiquement justifiée (Banque mondiale 2001: WP8-20).21

À ce jour, peu de projets d’amélioration visant à améliorer les projets d’irrigation à grande échelleont été classés comme « succès ». Même lorsque la technologie et le choix de culture promettent unerentabilité adéquate, les projets de réhabilitation infrastructures entrepris sans modèle institutionnelréalisable se sont avérés non rentables. Plusieurs projets focalisés sur la réhabilitation desaménagements hydro-agricoles ont échoué d’un point de vue économique comme le Sudan GeziraRehabilitation Project (Projet de réhabilitation de Gezira au Soudan), 1985, le Madagascar LacAlaotra Rice Intensification Project (Projet d’intensification de la production de riz du Lac Alaotra àMadagascar), 1984 et le Sudan Blue Nile Pump Scheme Rehabilitation Project (Projet de réhabilitationdu projet de pompe sur le Nil bleu au Soudan) 1982. Une amélioration intégrée des projets estnécessaire en réponse aux opportunités économiques. Il faut donc effectuer tous les changementsconcernant le système d’irrigation, les pratiques agricoles et les systèmes d’incitation et institutionnelrequis pour fournir aux agriculteurs un système d’approvisionnement en eau durable, efficace et lié àla demande qui permettra d’exploiter les opportunités de marché (Banque mondiale 2005b: 128ff).

Des institutions transparentes, responsables, efficaces et financièrement responsables sontindispensables à la réussite des projets d’amélioration des infrastructures d’irrigation à grandeéchelle. Le projet visant à améliorer les aménagements hydro-agricoles mené à bien par l’Office duNiger du Mali est un bon exemple de l’impact des réformes institutionnelles globales maisprogressives. L’Office a réussi à parvenir à un revirement de situation, passant d’une approchedirigiste à une approche plus orientée vers les services qui, combinée avec un investissement sélectifconcernant des changements de matériel et institutionnels, a produit des résultats impressionnants. Eneffet, les rendements des cultures de riz sont passés de 1,6 t/ha à 6,0 t/ha (encadré 3.2). Cetteexpérience est un exemple à suivre par les autres projets d’irrigation à grande échelle, à condition queles résultats économiques sous-jacents soient présents. D’autres pays ont essayé de mettre en œuvredes approches similaires avec des résultats moins encourageants. À Madagascar, le programme visantà améliorer les aménagements hydro-agricoles a été compromis par un désengagement de l’État plusque précipité sans soutien continu pour les organisations d’utilisateurs qui étaient supposées reprendrele flambeau (voir la section 4.3 ci-dessous). Le projet de l’Office du Niger a été un succès car lesréformes institutionnelles ont été introduites progressivement, permettant ainsi de surmonter lesrésistances au changement.

21 Au Nigeria, l’échec de la gestion du secteur public ainsi que les économies médiocres ont joué un rôle important dansl’ébranlement de la viabilité des projets d’irrigation à grande échelle.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 33

Encadré 3.2 : L’Office du Niger, projet d’irrigation public à grande échelle du Mali

L’Office du Niger (ON), mis en place au cœur du Mali, est l’un des plus anciens et des plus vastes projetsd’irrigation gérés par de petits exploitants d’Afrique subsaharienne. Lorsque le développement du projet acommencé en 1932, le développement d’environ 1 million d’hectares sur une période de 50 ans a été envisagé.En 1982, cependant, seuls 60 000 ha avaient été exploités et une grande partie de la zone n’était plusfonctionnelle en raison du manque d’entretien et avait été abandonnée. La production cotonnière avait cessé etles rendements moyens des cultures de riz s’étaient effondrés à 1,6 t/ha. Les tentatives de réhabilitation duprojet ont été un succès lorsque les investissements physiques pour l’amélioration de la sécurité de l’eau ontcoïncidé avec les réformes institutionnelles. Un revirement spectaculaire a été atteint. En plus des 50 000 hatoujours utilisés à l’époque, environ 10 000 ha de terres précédemment abandonnées ont été réclamées etexploitées et les rendements moyens des cultures de riz ont augmenté pour atteindre 6 t/ha. Le coût derécupération O&M a atteint 97 %.

Ces résultats sont imputables à une combinaison de facteurs, y compris :

L’amélioration et la modernisation du système d’irrigation L’amélioration du contrôle et de la gestion de l’eau L’amélioration des technologies (variétés à haut rendement, engrais, pratiques d’élevage

améliorées) La libéralisation du marketing et du traitement des cultures de riz, facilitée par un meilleur climat

macroéconomique L’amélioration de la sécurité de la méthode de tenure La restructuration institutionnelle, y compris la privatisation de la plupart des fonctions

commerciales, la sous-traitance des tâches d’entretien au secteur privé, la réduction des effectifs del’organisme de gestion et la concentration sur ses activités principales d’approvisionnement en eaulibre, d’aménagement du territoire et d’extension agricole

L’adoption d’approches plus participatives qui engagent les agriculteurs dans des décisions degestion telles que les redevances O&M

Le gouvernement et les responsables se sont engagés à encourager ce succès à long terme. Il a par ailleursbénéficié du soutien constant de partenaires externes. Le travail de l’ON n’est, cependant, pas encore terminé.Il faut encore renforcer les organisations d’agriculteurs, améliorer la sécurité de la méthode de tenure et faire ensorte que l’organisation soit plus responsable envers les agriculteurs.

Sources : Aw et Dejou (1996), Couture et al (2002), Aw et Diemer (2005)

3.2 Les frais d’investissement dans l’irrigation sont-ils plus élevés qu’ailleurs ?

Les études réalisées par le passé ont constaté que le coût du développement d’un projet d’irrigationdans la région était excessivement élevé. Une étude menée en 1995 a remarqué que les projetsd’irrigation financés par la Banque mondiale en Afrique subsaharienne représentaient un coût moyende 18 000 $ par ha, contre une moyenne mondiale de 4 800 $ par ha (Banque mondiale 1995). Cesrésultats reflétaient le coût très élevé de la mise en œuvre de projets à grande échelle menés à biendans la région dans les années 1970 et 1980. Les neuf projets principaux financés par des donateurs aucours de la période 1975-1979 affichaient un coût moyen par hectare de 24 500 $ (tableau 3.1). Sanssurprise, les gouvernements et les financiers ont eu tendance à considérer les investissements enirrigation comme très élevés et peu rentables, particulièrement les investissements à grande échelle quicomportaient également des risques environnementaux et sociaux plus élevés. Ces dernières années, lecomportement face aux investissements consistait à éviter les risques et l’investissement dans lesprojets d’irrigation a chuté (voir la section 1.3 ci-dessus).

…mais une étude récente a constaté qu’une nouvelle génération de projets d’irrigation mieux conçus,mis en œuvre en Afrique subsaharienne, ne sont pas beaucoup plus coûteux que ceux des autresrégions. Une étude de composantes réalisée pour ce rapport (Inocencio et al 2005)22 a constaté que les

22 La méthodologie consistait à analyser 314 projets dans un échantillon mondial (sur lesquels 44 se trouvaient en Afriquesubsaharienne) et à évaluer les coûts par hectare des 226 projets « réussis » (sur lesquels 25 se trouvaient en Afrique

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 34

projets d’irrigation bien conçus et mis en place en Afrique subsaharienne coûtaient un peu plus cherque ceux de l’ensemble des pays en voie de développement (tableau 3.3). Les nouveaux projets deconstruction d’aménagements hydro-agricoles classés comme « succès » en Afrique subsahariennecoûtaient un peu plus cher que les projets asiatiques classés comme « succès » (2 526 à 4 101 $/ha),mais moins onéreux que les projets des régions les plus coûteuses, soit l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient23.

Tableau 3.3 : Coût unitaire moyen/ha des projets « réussis » de 1970 à 1999(cours fixe de l’an 2000)

Construction de nouveauxaménagements hydro-agricoles

Amélioration desinfrastructures existantes

Coûttotal/ha

Coûtmatériel/ha

Coût total/ha Coûtmatériel/ha

Projets classés comme « succès »dans l’ensemble de l’échantillon

4 785 $ 3 748 $ 1 969 $ 1 488 $

Projets classés comme « succès »en Afrique subsaharienne

5 726 $ 3 566 $ 3 488 $ 2 303 $

Source : Inocencio et al 2005

…même si le coût des projets classés comme « échec » en Afrique subsaharienne a étéconsidérablement plus élevé que dans l’ensemble des pays en voie de développement. Les coûtsmoyens des projets classés comme « échec » dans la région (c’est-à-dire affichant un TRE interne< 10 %) s’établissaient entre 16 000 et 23 000 $/ha. Cependant, comme indiqué ci-dessus, lesperformances du projet semblent s’être améliorées au cours de ces dernières années. En effet, un seulprojet de l’échantillon lancé après 1990 a été classé comme « échec ».

Principaux facteurs ayant un impact sur les coûts

L’élément déterminant principal des coûts relatifs au projet est le type d’investissement d’irrigationfinancé. L’intervalle de coûts de l’échantillon pour l’étude de composantes est extrêmement vaste : de225 $/ha pour une simple réhabilitation à 55 000 $/ha pour un projet polyvalent à grande échelle. Cesdernières années, les coûts unitaires plus faibles des projets ont été dus au à la mise en œuvre deprojets de réhabilitation des infrastructures et, plus récemment, de projets de micro-irrigation à petiteéchelle au détriment des projets de construction d’aménagements hydro-agricoles à grande échelle desannées 1970 et 1980. Cette évolution est liée au déclin continu des prix des céréales et par conséquentdes résultats des projets d’irrigation à grande échelle d’aliments de base et à l’amélioration desrésultats de l’horticulture, à laquelle l’irrigation à plus petite échelle et la micro-irrigation sont bienadaptées (Inocencio et al 2005).

Les résultats concernant l’économie d’échelle sont mitigés. L’étude de composantes a constaté que lescoûts unitaires variaient de façon inversement proportionnelle à la taille du projet. En d’autres termes,il existe des économies d’échelle, mais des projets à plus petite échelle intégrés à des projets à grandeéchelle ont enregistré des rendements économiques plus élevés (Inocencio et al 2005). Au contraire,l’étude FAO (2005c) n’a constaté qu’une faible corrélation entre la taille du projet et des coûtsunitaires. En réalité, la taille des échantillons des études est trop petite et la population trop hétérogènepour établir des conclusions évidentes. Cependant, il est possible que les frais logiciels élevés de larégion diminuent effectivement lorsqu’ils sont partagés entre des projets à plus grande échelle.

L’autonomisation de la communauté peut permettre de maîtriser les coûts et d’améliorer lesperformances. L’étude de composantes a constaté que l’engagement de la communauté dans la prise

subsaharienne), définis comme ceux qui avaient des TRE internes d’au moins 10 %. L’annexe 2 répertorie les projets classéscomme « succès » en Afrique subsaharienne.23 Ce résultat a été confirmé par une étude FAO (FAO 2005c) qui a réexaminé le coût des 256 projets sur la base de donnéesFAO et a constaté que les « coûts purement physiques du développement de l’irrigation en Afrique subsaharienne sont justeun peu plus élevés que dans les autres régions ». L’étude FAO a remarqué, cependant, des coûts moyens différents (selon lecours de l’an 2000) de 6 500 $/ha pour les nouveaux projets et uniquement 1 900 $/ha pour les projets de réhabilitation.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 35

de décision permet de maîtriser les coûts et d’améliorer les performances. Les projets pour lesquels lesagriculteurs ont eux-mêmes considérablement contribué financièrement, ont géré les systèmesd’irrigation ou ont partagé la gestion avec un organisme gouvernemental chargé de l’irrigation,enregistrent des résultats considérablement meilleurs en termes de performances et de coûts unitaires(Inocencio et al 2005 : 26-27).

Dans une certaine mesure, ces leçons sur la maîtrise des coûts se reflètent dans les projets récents.Les projets les plus récents sont souvent décentralisés et dirigés par les agriculteurs, avec unecontribution plus élevée de ces derniers, des coûts unitaires plus bas et une orientation vers le marché.

3.3 Conception et mise en œuvre de projets

La conception des projets a été largement réduite, même si de nouvelles approches participativesproduisent de meilleurs résultats. La conception de projets a généralement été caractérisée par unmanque d’adéquation entre les projets et leurs objectifs, par un manque de considération desalternatives et d’incitation par la demande. Les projets développés par les gouvernements se sontsouvent appuyés sur une compréhension erronée des marchés, des systèmes d’exploitation agricole etdes moyens de subsistance (Morardet et al 2005 : 18-2024). Certains pays ont commencé à intégrer lesutilisateurs (de façon intellectuelle et financière) dans la planification et la mise en œuvre des projets.25

Certains de ces projets sont menés à bien grâce à des unités décentralisées dans le cadre deprogrammes de développement rural gérés par de plus grandes communautés (Morardet et al 2005 :34). Au cours de ces dernières années, nombre des projets financés par des donateurs, classés comme« succès » lors de leur achèvement, ont été caractérisés par des approches décentralisées etparticipatives. Cependant, il est également trop tôt pour déterminer si ces approches améliorentconstamment les performances des projets et si la décentralisation a rencontré des problèmes (voir lasection 4.3 ci-dessous).

La qualité des projets a été affectée par les faiblesses communes lors de la préparation. La qualité desprojets a été affectée par les faiblesses communes lors de la préparation. Ces faiblesses sont lessuivantes : (i) la considération médiocre des principales problématiques liées à la terre et à la sécuritéde l’eau, caractérisée par des analyses hydrologiques plus qu’optimistes (FIDA 2005 : 515), lanégligence de la méthode de tenure et des problématiques de gestion de l’eau et l’évaluationenvironnementale inadéquate ; (ii) le manque d’évaluation des marchés et de la rentabilité et lemanque de soutien agricole réaliste ; (iii) la surestimation de la capacité institutionnelle, traduite pardes conceptions trop complexes et de trop nombreux composants et (iv) une conception techniquemédiocre, impliquant des choix et des coûts technologiques non appropriés pour les perspectives demarché des cultures produites (Morardet et al 2005 : 14, 21).

L’autonomisation des agriculteurs est la solution pour l’amélioration de la qualité des projets. Lasous-estimation des faiblesses a été une des raisons principales de la réduction et de la négligence de lapropriété des agriculteurs. Les approches consistant à autonomiser les agriculteurs en les intégrant entant que partenaires et décisionnaires dès le lancement du projet et en soutenant leur développement entant qu’agents commerciaux capables de négocier sur le marché amélioreraient l’économie et lesperspectives de soutenabilité des projets pour l’étape de conception. Les approches liées àl’autonomisation des agriculteurs pourraient améliorer de façon significative la qualité des projets dèsleur lancement. Elles impliquent la centralisation des responsabilités et des capacités de mise en œuvredes projets et des services au niveau local, l’augmentation de la participation des groupes défavorisésdans la prise de décision, l’amélioration de la responsabilité des prestataires de services et le soutiendes petits exploitants agricoles dans la création d’organisations solides. Les organisations des petitsexploitants agricoles se sont avérées efficaces en matière de gestion durable des systèmes d’irrigation

24 Les éléments soulignés font référence au rapport de la composante du Programme de collaboration.25 Par exemple, le projet Bewani de la zone de l’Office du Niger et le Dodicha Small-scale Irrigation Project (Projetd’irrigation à petite échelle de Dodicha en Éthiopie) (Morardet et al 2005).

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 36

et de développement et d’alimentation des marchés (Morardet et al 2005 : 22, 33 – 1.90, Banquemondiale 2005m:14).

Les faiblesses de la capacité institutionnelle ont affecté la mise en œuvre des projets. Ces faiblessesreflètent dans de nombreux cas la complexité des structures organisationnelles mises en place et lesperformances du personnel impliqué. Les organismes publics ont souvent manqué de compétences, deressources et d’incitation pour la réalisation des tâches qui leur avaient été assignées. De plus,l’avantage comparatif des ONG ou du secteur privé pour certaines tâches a généralement été ignoré.Les organismes chargés des projets ont également eu des difficultés pour faire face au changementnécessaire de la conception alors que la mise en œuvre était en cours. Faire face aux problèmessociaux et culturels rencontrés au cours de la mise en œuvre du projet a été un défi de taille lors dechangements institutionnels tels que le transfert de gestion de l’irrigation ou la participation du secteurprivé (Morardet et al 2005 :15-31, FAO 2005a : 86).

Le soutien inadéquat aux organismes de mise en œuvre des projets a également été une des causes dela qualité médiocre des projets. En général, les gouvernements et les donateurs ont mis en place unprocessus de supervision inadéquat. En effet, ce dernier ne correspondait pas au défi qui consistait àmettre en œuvre un projet adapté aux conditions de la région. De plus, ce soutien s’est arrêté trop tôtdans le cycle. Les objectifs physiques et financiers ont été trop mis en avant au détriment del’efficacité du développement (Morardet et al 2005: 15, 21 ; FIDA 2005:515). Les gouvernements etles donateurs, forts de leurs perspectives et de leur expérience, ont le devoir de mettre en place uneapproche méticuleuse et flexible en ce qui concerne la conception et la mise en œuvre des projets.Même lorsque des approches éprouvées telles que la décentralisation et la participation ont étéintégrées dans les projets, le succès n’a pas été automatique. En effet, les problèmes liés à la faisabilitétechnique, financière et sociale sont apparus tout au long de la mise en œuvre. Même les responsablesdes projets dont la mise en œuvre avait été réussie ont parfois perdu de vue les impératifs de réductionde la pauvreté et de rentabilité.

Les faiblesses du processus d’apprentissage ont compliqué la détermination des impacts des projets etla rectification des défauts. Le suivi et l’évaluation ont généralement été mal gérés, la conception étantpeu liée au cadre logique, ce qui devrait en pratique être la base du système de suivi et d’évaluation.La mise en œuvre des systèmes M&E a généralement commencé beaucoup trop tard et il a été presqueimpossible de reconnaître que (a) les systèmes d’information n’étaient sont pas seulement uneexigence fondamentale pour le niveau M&E du projet, mais également pour la gestion de l’entreprisepar les agriculteurs et (b) que des systèmes d’information à l’échelle agricole étaient nécessaires pourleur intégration dans les systèmes M&E à l’échelle du projet. Ainsi, même si de nombreux projetspossèdent comme objectif la réduction de la pauvreté, presque aucun projet n’a surveillé lesindicateurs de revenu tels que les niveaux de facteurs de production, les rendements, la production etles prix. Dans une étude portant sur six projets de la région, pas un seul d’entre eux n’a contrôlésystématiquement les facteurs de production, les rendements, les prix et les revenus des agriculteurs(Morardet et al 2005 : 22 ; FIDA 2005 : 485, 509-11).26 Par conséquent, il a été impossible pour lesagriculteurs de juger avec précision de l’efficacité de l’amélioration des technologies et il a égalementété impossible pour les projets de fournir une justification postérieure des investissements réalisés.Aucune évaluation réaliste des impacts de la réduction de la pauvreté n’a pu être réalisée. De plus, lemanque de suivi s’applique de manière égale aux aspects environnementaux et sanitaires, malgré leurimportance manifeste en ce qui concerne la soutenabilité (voir la section 3.8 ci-dessous).

La soutenabilité médiocre des opérations suivantes reflète la faiblesse de la conception et de la miseen œuvre des projets. La faiblesse des opérations du projet après achèvement des travaux physiques est

26 Une ébauche d’évaluation par le Groupe indépendant d’évaluation de la Banque mondiale de 80 projets d’irrigationfinancés par cette dernière à l’échelle mondiale entre 1994 et 2004 a constaté que les impacts sur l’emploi et les revenusétaient prévus pour moins d’un tiers des projets et moins d’un cinquième d’entre eux faisait état du nombre de bénéficiairesou de la répartition des bénéfices (Soutien de la Banque mondiale pour la gestion de l’hydraulique agricole (1994-2004) :évaluation de portefeuille du GIE). Ébauche, février 2006. Washington DC)

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 37

en grande partie le résultat des faiblesses constatées plus tôt dans le cycle du projet : la surestimationde la disponibilité des ressources en eau, la conception et la construction médiocres, l’attentioninadéquate portée aux arrangements institutionnels et aux services de soutien agricole et surtout lanégligence générale de l’autonomisation des agriculteurs et des conditions sous-jacentes de rentabilité.La preuve la plus évidente est que, dans de nombreux cas, les agriculteurs ont refusé de prendre laresponsabilité des opérations et de l’entretien des projets supposés avoir été développés dans leurintérêt (Morardet et al 2005 : 15, 24-5 ; FAO 2005a : 86).

3.4 Le problème de la faible productivité

La productivité se situe fréquemment en dessous des attentes dans les projets agricoles d’irrigation.Comme expliqué ci-dessus (2.3), la culture irriguée dans la région a été caractérisée par de faiblesrendements économiques et agricoles. Les principaux problèmes ont été l’approvisionnement en eaunon fiable, la mauvaise qualité du contrôle et de la gestion de l’eau, l’utilisation trop restreinte desfacteurs de production et le faible recours à l’élevage, ainsi que l’éloignement par rapport auxmarchés.

L’amélioration de la fiabilité de l’approvisionnement en eau peut nécessiter plus d’investissements enmatière de réglementation et de stockage ou des projets mieux conçus pour que les zones irrigablescorrespondent à la disponibilité de l’eau. L’approvisionnement en eau non fiable peut être le résultatd’une variabilité hydrologique mal estimée ou de la rareté réelle de l’eau. Elle peut également êtrecausée par un manque de concordance entre la zone de commande irrigable et la disponibilité d’eaufiable. Les solutions disponibles sont la mise en place d’infrastructures de stockage et de règlements(ce qui peut permettre une production tout au long de l’année et davantage de rentabilité justifiant lescoûts) ou simplement l’amélioration de la qualité des estimations hydrologiques et des arrangementspour la construction d’installations au fil de l’eau. Les erreurs de conception sont fréquentes et uneattention plus particulière doit être portée à l’amélioration de la qualité du soutien technique et à laresponsabilisation des prestataires de services de conception vis-à-vis des agriculteurs, en particulierparce que ces derniers paient une part significative des coûts.

Les connaissances, les finances liées à la production et l’accès au marché sont des élémentsimportants pour la productivité. Il existe de nouvelles façons de les mettre à la disposition des petitsexploitants agricoles. La faible utilisation des facteurs de production et le faible recours à l’élevagepeuvent être dus à un accès restreint aux approvisionnements, à un manque de connaissancestechniques et aux finances liées à la production ou, si l’approvisionnement en eau n’est pas fiable, auxchoix de gestion des risques par les agriculteurs. Une solution innovante pouvant proposer unensemble de dispositifs de soutien technique, de finances liées à la production et d’opportunités demarché consiste à développer, pour des cultures à valeur élevée, des liens de marché à travers lesquelsles entreprises de transformation ou de marketing de produits agricoles établissent des contrats où unappui technique et d’autres intrants sont fournis à des producteurs en échange d’un volume deproduction assuré (FIDA 2002 et 2005). De façon alternative, les systèmes ne bénéficiant pasd’opportunités de développement de liens de marché (par exemple pour des systèmes rizicoles),peuvent se tourner vers les champs-écoles paysans où il est possible de tester et adapter de nouvellestechnologies (voir la section 4.2 ci-dessous).

L’infrastructure de transport est également un des principaux facteurs de la productivité. Danscertains cas, le problème de l’éloignement des marchés peut être insoluble. À part le renforcement desorganisations d’agriculteurs et l’autonomisation de ces derniers pour négocier avec de meilleures basesavec le marché, un investissement complémentaire dans la construction de routes peut être essentiel.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 38

3.5 Développement de l’hydraulique agricole et réduction de la pauvreté

Impacts directs et indirects sur l’augmentation des revenus des défavorisés

L’investissement dans la gestion de l’hydraulique agricole peut augmenter les revenus des défavorisésde manière directe ou indirecte. Le premier effet direct est constaté sur les revenus agricoles. En effet,la gestion de l’hydraulique agricole peut augmenter les rendements, le rendement des cultures, aider àproduire des cultures à plus haut rendement et par conséquent augmenter les résultats et les revenusagricoles. Les résultats et les revenus agricoles peuvent également être améliorés car l’irrigation elle-même justifie l’utilisation complémentaire de facteurs de production améliorant le rendement.

Tableau 3.4 : Revenu agricole net global des projets sélectionnés concernant la culture du riz àMadagascar et en Tanzanie (dollars EU de mi-2003)

ParamètresAvec Sans Sans Avec Sans Avec

Zone agricole irriguée (ha/foyer) 0,71 1,42 0,48 0,18 0,60Zone agricole non irriguée (ha/foyer) 1,71 1,00 3,16 3,04 2,70 2,28Rendement cultures, zone agricole non irriguée (%) 50 50 29 29 70 70Taille moyenne des foyers (membres du foyer) 5,5 5,5 5,5 5,5 5,5 5,5Bénéfice net grâce à l’irrigation /a

- ($ EU/ha/an) 131 424 576 68 389- ($ EU/foyer/an) 93 602 276 12 234- ($ EU/membre du foyer/jour) 0,05 0,30 0,14 0,01 0,12

Revenu additionnel grâce à l’irrigation- ($ EU/ha/an) 293 576 321- ($ EU/foyer/an) 509 276 221- ($ EU/membre du foyer/jour) 0,25 0,14 0,11

Bénéfice net, zone agricole non irriguée- ($ EU/ha/an) 96 96 39 39 77 77- ($ EU/foyer/an) 164 96 124 119 208 175- ($ EU/membre du foyer/jour) 0,08 0,05 0,06 0,06 0,10 0,09

Revenu net agricole ($ EU/foyer)- ($ EU/foyer/an) 257 699 124 395 220 409- ($ EU/membre du foyer/jour) 0,13 0,35 0,06 0,20 0,11 0,20

Revenu additionnel agricole net- ($ EU/foyer/an) 441 272 189- ($ EU/membre du foyer/jour) 0,22 0,14 0,09- (%) 172 220 86

a/ Après deduction des revenus O&M supplémentaires et des avantages perdus à cause du projetSource : FIDA, 2005

Madagascar PHBM Tanzanie MaraFIP Tanzanie PIDP

L’augmentation moyenne des revenus agricoles par habitant des zones concernées par les projetsconcernant la culture de riz à Madagascar et en Tanzanie, par exemple, est comprise entre 86 et220 %, contre 14 à 600 % pour les projets ne concernant pas la culture de riz au Zimbabwe (FIDA2005 ; tableaux 3.4 et 3.5). L’augmentation moyenne des revenus agricoles par habitant dans les deuxgroupes de l’étude de cas a été de 226 %.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 39

Tableau 3.5 : Revenu agricole net global des projets ne concernant pas la culture du riz au Zimbabwe(dollars EU mi-2003)

Paramètres

Sans Avec Sans Avec Sans AvecZone agricole irriguée (ha/foyer) 0,10 0,80 0,68Zone agricole non irriguée (ha/foyer) 3,49 3,39 3,50 2,70 1,18 0,50Rendement cultures de la zone agricole non irriguée(%)

43 43 56 56 100 100Taille moyenne du foyer (membres du foyer) 5,5 5,5 5,0 5,0 5,5 5,5Revenu net grâce à l’irrigation/a

- ($EU/ha/an) 149 364 609- ($ EU/foyer/an) 15 291 411- ($ EU/membre du foyer/jour) 0,01 0,16 0,20

Revenu net de la zone agricole non irriguée- ($ EU/ha/an) 25 25 29 29 50- ($ EU/foyer/an) 86 83 101 78 59- ($ EU/membre du foyer/jour) 0,04 0,04 0,06 0,04 0,03

Revenu net de l’ensemble de la zone agricole ($ EU/foyer)- ($ EU/foyer/an) 86 98 101 369 59 411- ($ EU/membre du foyer/jour) 0,04 0,05 0,06 0,20 0,03 0,20

Revenu additionnel net global agricole- ($ EU/foyer/an) 12 268 353- ($ EU/membre du foyer/jour) 0,01 0,15 0,18- (%) 14 265 600

a/ Après deduction des revenus O&M supplémentaires et des avantages perdus à cause du projetSource : FIDA, 2005

Dombolidenje Maunganidze Mupangwa/MutaradziZimbabwe

Dans ces cas, les projets d’aménagements hydro-agricoles ont en moyenne plus que triplé les revenuspar habitant. De plus, aucun des projets étudiés n’est parvenu à atteindre des rendements et desrésultats optimums. Par exemple, le rendement moyen des cultures de riz des projets « avec »irrigation au PHBM de Madagascar n’était que de 1,9 t/ha en pleine saison et de 1,3 t/ha hors saison,soit des résultats bien en dessous du potentiel (voir la section 2.3 ci-dessus). De la même façon, lerendement moyen des maïs grains des zones irriguées des trois projets ne concernant pas la culture deriz au Zimbabwe n’était que de 2,5-3,4 t/ha, soit un résultat bien en dessous du potentiel. La leçon à entirer est évidente : même les investissements en irrigation dont les performances sont modéréespeuvent entraîner des impacts significatifs sur les revenus agricoles et, par conséquent, sur la réductionde la pauvreté. Par conséquent, de tels projets pourraient avoir un impact bien plus important sur laréduction de la pauvreté s’ils fonctionnaient mieux.

Le second effet direct de la gestion de l’hydraulique agricole sur la pauvreté liée aux revenus est relatifà l’emploi rural. Une demande supplémentaire en main d’œuvre est créée premièrement pour laconstruction et l’entretien constant des canaux, puits, pompes, etc. et deuxièmement pour laproduction de cultures et la vente de produits dans les fermes. Ainsi, le développement del’hydraulique agricole augmente à la fois le nombre de travailleurs requis et, à cause des culturesmultiples, leur période d’embauche (Lipton et al, 2003). Dans les projets analysés dans les tableaux3.4 et 3.5, il a été constaté que l’investissement en irrigation avait provoqué une augmentationmoyenne des frais de main d’œuvre de 45 jours/ha en plus de la main d’œuvre représentée par lafamille propriétaire de la ferme, soit environ 1 $/de frais de main d’œuvre par jour (FIDA 2005).

Le troisième effet direct est relatif au prix des aliments. L’augmentation de la production de produitsalimentaires peut entraîner la réduction de leur prix sur les marchés locaux et ainsi améliorer lesrevenus nets réels (a) des acheteurs de produits alimentaires nets des zones irriguées, (b) des acheteursde produits alimentaires nets des zones non irriguées et non isolées et (c) des personnes défavoriséesdes zones urbaines. Les effets positifs sur les revenus nets réels seront toujours expérimentés par lesproducteurs de produits alimentaires nets et les manœuvres salariés à condition que l’effet de laréduction des prix soit contrebalancé par l’augmentation des résultats et de l’emploi. Par ailleurs, deseffets négatifs peuvent être expérimentés par les producteurs de surplus des zones non irriguées isoléeslors de l’introduction de l’hydraulique agricole. Cependant, puisque la majorité des pauvres en Afriquesubsaharienne est composée d’acheteurs nets de produits alimentaires, l’effet net global de la réduction

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 40

du prix des produits alimentaires sur la réduction de la pauvreté liée aux revenus et la famine peut êtreconsidéré comme positif (Lipton et al, 2003).

Les impacts indirects du développement de l’hydraulique agricole sur la pauvreté liée aux revenusenglobent ceux obtenus grâce à l’emploi rural et urbain du fait de la croissance de l’économie nonagricole rurale et urbaine. La croissance agricole peut influencer l’activité non agricole de troisfaçons au moins, soit par le biais des relations entre la production, la consommation et la demande demain d’œuvre (Rosegrant et al, 2005). Les multiplicateurs de revenu et d’emploi de l’économie nonagricole environnante peuvent être particulièrement vastes. Ils sont compris entre 1,5 et 2,027 en Asie(Haggblade et al, 1989 ; Hazell et al, 1991 – cités dans Rosegrant et al, 2005) même s’ils nereprésentent que la moitié des chiffres enregistrés en Afrique (Dorosh et al, 2000 ; Haggblade et al,1989 – également cités dans Rosegrant et al, 2005). Le fait que les multiplicateurs soient plus faiblesen Afrique était attribué par Dorosh et al aux faibles revenus par habitant, aux infrastructuresmédiocres et aux technologies agricoles requérant peu d’achat de facteurs de production. En d’autresmots, le niveau plus faible des multiplicateurs était attribué au fait que le secteur agricole était moinsdéveloppé.

Puisque l’agriculture gérée par l’eau implique intrinsèquement des niveaux plus élevés de facteurs deproduction, y compris de main d’œuvre et entraîne davantage d’embauches, de résultats et de revenusque l’agriculture non irriguée, les multiplicateurs liés aux projets d’aménagements hydro-agricolesclassés comme « succès » sont susceptibles d’être plus élevés que ceux des projets liés à l’agriculturenon irriguée en général. Même si aucune information n’était disponible sur les impacts dudéveloppement de l’agriculture irriguée sur l’emploi non agricole en Afrique subsaharienne, il a étéconstaté que l’emploi non agricole en Inde était plus élevé dans les villages irrigués que dans lesvillages non irrigués (Dasgupta et al, 1997, Jayaraj, 1992, Saleth, 1996, tous cités dans Rosegrant etal, 2005). En ce qui concerne le Muda Irrigation Project (Projet d’irrigation à grande échelle deMuda), pour chaque dollar de revenu généré directement par le projet, 83 cents étaient générés sous laforme de prestations de revenus indirectes ou en aval (Bell et al, 1982, cité dans Rosegrant et al,2005).

Pour résumer, même les investissements en irrigation dont le succès a été modéré peuvent tripler lesrevenus agricoles par habitant et fournir des revenus complémentaires aux employés d’environ 45jours de travail/ha, ce qui en soi entraîne un impact considérable sur la réduction de la pauvreté liéeaux revenus. Chaque dollar de revenu généré entraîne probablement au moins 0,40 à 0,50 dollar EUsous la forme de prestations de revenu indirectes. Il en va de même pour les projets d’investissementdont les résultats sont modestes.

Le développement de l’hydraulique agricole pourrait également être l’une des meilleures alternativespour la réduction de la pauvreté liée aux revenus. À l’évidence, les projets de développement del’hydraulique agricole peuvent entraîner des impacts considérables sur la réduction de la pauvreté liéeaux revenus, mais est-ce la meilleure alternative ? Comme l’explique le chapitre 1, lorsqu’unmaximum de 90 % de la population rurale est pauvre et considère l’agriculture comme son principalmoyen de subsistance, une croissance significative de l’agriculture est une étape nécessaire vers laréduction de la pauvreté. Même si l’amélioration de l’enseignement primaire, des services de santé, dela qualité de l’eau et des routes représente un investissement important et nécessaire, elle ne suffit pasà générer une amélioration des revenus ruraux (Brooks, 2005). Puisque la croissance agricole esttellement importante pour la réduction de la pauvreté comparée aux autres alternatives disponibles, ilest évident que le développement des systèmes d’irrigation dans le secteur agricole l’est encore plus.En effet, la croissance du revenu potentiel par hectare générée grâce à un projet d’irrigation classécomme « succès » est supérieure à celle constatée dans l’agriculture non irriguée. Aucune des donnéesdisponibles ne prouve la validité de cette hypothèse pour l’Afrique subsaharienne. Cependant, lesdifférences des taux de croissance des résultats agricoles moyens par unité de culture ont pu expliquer

27 C’est-à-dire que chaque augmentation d’un dollar en valeur agricole entraîne 0,5 à 1,0 $ de revenussupplémentaires créés dans l’économie non agricole locale.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 41

les différences entre les états dans la réduction de la pauvreté rurale en Inde, par exemple, où il a étéconstaté que l’impact de l’irrigation sur la réduction de la pauvreté était même supérieur à celui del’alphabétisme rural et considérablement supérieure à l’impact de la construction de routes, àl’utilisation d’engrais et de variétés de cultures modernes (Datt et al, 1997, cité dans Rosegrant et al,2005). Si le cas se présente ailleurs, il n’y aurait aucune raison de ne pas appliquer cette alternative enAfrique subsaharienne.

De plus, les impacts sur la réduction de la pauvreté liée aux revenus des systèmes d’hydrauliqueagricole peuvent induire des impacts positifs sur les autres ODM. Les impacts des projets deconstruction d’infrastructures d’hydraulique agricole sur la réduction de la pauvreté liée aux revenusimpliquent d’importants effets positifs sur les autres ODM, y compris la réduction de la famine,l’amélioration de l’accès à l’éducation primaire, à l’eau potable et aux services de santé de base. Ilscontribuent également à l’amélioration de la santé maternelle, à la réduction de la mortalité infantile etde façon générale à l’amélioration de la nutrition et de la santé (FIDA 2005 et encadré 3.3).

Encadré 3.3 : Les projets d’irrigation menés en Tanzanie et au Zimbabwe ont prouvé que l’irrigationrenforce considérablement les revenus agricoles, les moyens de subsistance et les opportunités

d’embauche

Dans le cadre du Projet participatif de développement de l’irrigation (PIDP) en Tanzanie, les foyers bénéficiantd’un accès à des infrastructures d’irrigation ont constaté une augmentation de 86 % de leurs revenus, ce qui leura permis de bénéficier d’un logement de meilleure qualité, d’acquérir des biens agricoles et immobiliers,d’avoir accès aux services de santé et de financer l’éducation de leurs enfants. Dans quatre zonesreprésentatives de sous-projets (représentant environ 400 ha), la propriété de chars à bœufs et de bétail aconsidérablement augmenté, le nombre de broyeurs a augmenté de 2 à 12 et le nombre de magasins de 2 à 74.

Dans le cadre du Maunganidze Irrigation Scheme (Projet d’irrigation de Maunganidze) au Zimbabwe, financépar l’UE, les foyers d’un accès à des infrastructures d’irrigation ont vu leurs revenus augmenter de plus de200 % et ont réussi à transformer un déficit en produits alimentaires en un surplus suffisant pour nourrir deuxfoyers supplémentaires. Les investissements des agriculteurs dans de nouveaux logements et dans ledéveloppement de l’eau et de l’assainissement ont été les signes les plus évidents de l’amélioration des moyensde subsistance, avec l’acquisition de maisons modernes à 2 ou 3 pièces, de latrines avec système d’aération et,dans la plupart des cas, d’un puits d’eau privé protégé. Les négociants ont déclaré avoir constaté uneaugmentation des ventes de facteurs de production agricoles et d’équipements et une demande accrue enproduits comestibles, en matériaux et en services de construction. De nouveaux broyeurs ont été installés ainsique de nouveaux ateliers pour la fabrication d’équipements agricoles tels que des chars à bœufs. Il ne fait aucundoute que ces impacts sont dus aux projets d’irrigation puisqu’il n’existait aucune autre source de revenu dansla zone. L’excellent accès aux routes, par exemple, n’avait pas eu d’impact discernable sur la réduction de lapauvreté dans la région.

Source : FIDA (2005)

Cibler les pauvres et les femmes

Certains projets d’irrigation lancés au cours des deux à trois dernières décennies ont essayé, souventen vain, de cibler les plus pauvres. Le ciblage de la pauvreté en termes de données de pauvreté liéeaux revenus dans le cadre des ODM a simplifié le ciblage. Même si le ciblage des stratessocioéconomiques les plus pauvres a été abordé par le passé, il a rarement été mis en œuvre commeprévu (FIDA 2005). Même la technologie n’était pas appropriée pour cette strate. De plus, laméthodologie de ciblage était faible, le personnel de mise en œuvre n’avait pas parfaitement intégréles intentions de cette méthode ou avait jugé que, d’un point de vue social, il ne pouvait être mené àbien en raison des implications sociogéographiques et politiques consistant à exclure les moinspauvres. Au cours de ces dernières années, cependant, la pauvreté a été considérée en termes derevenu par habitant et les individus vivant avec moins d’un dollar par jour ont été considérés commeles « plus pauvres des pauvres » (PNUD 2003). Par exemple, en ce qui concerne les cas deMadagascar, de la Tanzanie et du Zimbabwe cités ci-dessus (tableaux 3.4 et 3.5), les revenus agricolesdes cultures non irriguées ne bénéficiant pas de la mise en place d’un projet s’établissaient dans unintervalle compris entre 0,03 $ par habitant par jour et 0,10 $ par habitant par jour. Pour certains de ces

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 42

projets, il s’agissait d’une tentative de ciblage, mais il est évident que ce sont les pauvres qui ontbénéficié du projet.

En réalité, la grande majorité des populations rurales d’Afrique subsaharienne s’inscrit dans lacatégorie des « plus pauvres parmi les pauvres ». Presque chaque projet de développementd’infrastructures d’hydraulique agricole fondé sur des principes de rentabilité et d’équité bénéficie àune majorité de pauvres. Cependant, il est essentiel de comprendre le profil socioéconomique dugroupe ciblé, la façon dont il gère son moyen de subsistance, ses contraintes, la façon dont il interagitsocioéconomiquement et dont il gère l’hydraulique agricole, en tant que facteur de production pourson système agricole, pour l’aider à améliorer son moyen de subsistance. Grâce aux projets de gestionde l’hydraulique agricole, certaines strates socioéconomiques bénéficieront d’une participation directeen tant que producteurs, d’autres bénéficieront directement de salaires agricoles, d’un accès auxproduits dérivés de la culture pour le bétail ou encore de l’emploi dans des activités économiques enaval et en amont créées par le projet. De plus, les preuves indiquent que c’est la strate des plus pauvresqui bénéficiera le plus de ces opportunités supplémentaires en salaires (FIDA 2005).

Les projets peuvent être favorables aux pauvres de nombreuses autres façons. Ces alternatives sont lessuivantes : (a) la création d’une capacité ; (b) s’assurer que la voix des pauvres est bien entendue dansla planification participative et les décisions d’attribution de terres et d’eau ; (c) la minimisation desrecasements agricoles involontaires et s’assurer que les pauvres ne sont pas plus marginalisés par ledéveloppement ; (d) l’habilitation des pauvres en renforçant leurs pouvoirs de négociation grâce à uneréforme institutionnelle et la facilitation de leur accès aux terres et à l’eau ; (e) le ciblage des pauvresavec un soutien technique supplémentaire ; (f) s’assurer que le prix d’entrée d’un produit est abordablepour la strate la plus pauvre, par exemple moyennant l’utilisation de technologies abordables ; (g)s’assurer que les arrangements/redevances liées à l’eau de récupération des coûts ne sont pasinjustement établi(e)s contre la strate des plus pauvres et (h) l’optimisation du potentiel del’amélioration directe et indirecte de l’emploi (annexe 7).

Cibler les zones agro-écologiques et les systèmes agricoles avec un fort potentiel agricole et unepauvreté généralisée peut également être favorable aux pauvres. Il a été constaté que lorsque les zonesarides et semi-arides avaient été ciblées pour une réduction de la pauvreté, les résultats ont été mitigés,principalement en raison des coûts élevés généraux du développement des infrastructuresd’approvisionnement en eau dans de telles zones, leur isolement par rapport aux marchés et leurspopulations éparses (FIDA 2005). En revanche, les zones agro-écologiques plus humides affichaientégalement des taux de pauvreté élevés, ce qui indique qu’elles devraient être les principales zonesd’investissement pour que la réduction de la pauvreté soit optimale (Dixon et al, 2003)28. En effet,alors que les densités de population augmentent, les agriculteurs passent progressivement de systèmesde production extensifs à très intensifs. La tendance est encouragée une fois que des opportunités demarché importantes ont émergé. Dans les zones à faible densité de population et de productivitémarginale, le développement de l’hydraulique agricole est susceptible d’être moins urgent car lesagriculteurs ne ressentent pas le besoin d’intensifier leur production : au lieu de cela, on constate uneculture d’expansion de la superficie. En revanche, dans les zones où les densités de population sontélevées, où un processus d’intensification de la production a déjà commencé et où les opportunités demarché émergent, les projets de développement de l’hydraulique agricole sont susceptiblesd’enregistrer de meilleurs résultats. Cette focalisation sur les zones agro-écologiques plus humidesn’exclut pas, bien sûr, le fait qu’il puisse y avoir des opportunités de projets de gestion del’hydraulique agricole dans les zones arides et semi-arides, y compris des systèmes intégrés de cultureet de bétail ou que, à condition qu’elles soient économiquement viables et physiquement durables,elles puissent être mises en œuvre.

Mises à part les considérations d’égalité des sexes, le ciblage des femmes peut également renforcer lesimpacts de la réduction de la pauvreté. Les femmes représentent entre 60 et 80 % de la main d’œuvre

28 Dixon et al a indiqué que les zones arides et semi-arides abritaient seulement 14 % de la population totale de l’Afriquesubsaharienne.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 43

de la production de produits alimentaires en Afrique subsaharienne et jouent généralement un rôlemajeur dans le domaine de l’ensemencement, du désherbage, de l’application d’engrais et depesticides, de la récolte, du battage, du traitement des produits alimentaires, du transport et de lacommercialisation, alors que les hommes sont généralement responsables du défrichage, de lapréparation des terres et du labour (FAO 2003a). Cette répartition des tâches s’applique également àl’agriculture irriguée. Dans de nombreux pays d’Afrique du Sud, le pourcentage de foyers rurauxdirigés par des femmes et de fermes menées par des femmes peut être supérieur à 50 % (van Koppenet al 2005 :7). En ce qui concerne les projets sélectionnés au Zimbabwe, par exemple, 20 à 64 % despropriétaires de lots étaient des foyers dirigés par des femmes (FIDA 2005). Dans les zones de culturede riz en Afrique de l’Ouest et dans certaines zones d’Afrique du Sud et de l’Est, la culture du rizdevient de plus en plus un « système agricole féminin » dans lequel les femmes sont souvent lesdécisionnaires en raison de la migration des hommes vers les villes pour des raisons professionnelles.Autrefois les fermes étaient dirigées par les hommes (van Koppen et al 2005 :7). Les femmes prennentsouvent la tête de la production de fruits et de légumes (encadré 3.4) ainsi que des activités de soutiende la production telles que les groupes d’épargne (FIDA 2002). Les études ont démontré que laproduction agricole préservant l’égalité des sexes encourage la productivité (van Koppen 2005). Il estévident que cibler les femmes pour la formation et les services de soutien et s’assurer de leurparticipation équitable dans les projets d’hydraulique agricole peut améliorer la productivité etrenforcer la réduction de la pauvreté.

Cependant, malgré ce qui se dit, la plupart dupersonnel des services de soutien est constituéd’hommes et les politiques et stratégies decommunication sont dirigées vers les hommes.Alors que la répartition des tâches entre lesdeux sexes dans les systèmes agricoles enfonction des groupes ethniques (même dans unmême village) est extrêmement variable, dansde nombreux pays d’Afrique subsaharienne lesystème principal est un système agricoledouble dans lequel les femmes possèdent desfermes individuelles qu’elles dirigent, maispour lesquelles elles bénéficient uniquement dedroits secondaires, ce qui entrave lesinvestissements. Dans d’autres cas, un manquede contrôle sur les champs de leurs maris et un

partage restreint des récoltes des champs de ces derniers ont poussé les femmes à réduire leurs facteursde production globaux aux obligations minimums définies par la culture (van Koppen et al 2005).

3.6 Gestion alternative de l’hydraulique agricole

Importance de la gestion alternative de l’hydraulique agricole

L’intérêt porté aux formes alternatives de gestion de l’hydraulique agricole n’a cessé de croître cesdernières années. Il est de plus en plus évident que le potentiel de développement des infrastructuresd’irrigation est restreint par des contraintes physiques et économiques et que, par conséquent,l’investissement en aménagements hydro-agricoles seul ne serait pas suffisant pour répondreparfaitement aux objectifs ODM1 de réduction de la pauvreté et de la famine. Ces dernières années,l’intérêt porté aux autres formes de gestion de l’hydraulique agricole dont il est question sur la Figure2.1 n’a cessé de croître. Ces alternatives sont les suivantes :

La gestion de l’eau dans les zones humides cultivées non équipées et le bas des valléesinternes ainsi que dans les cultures de décrue non équipées ;

La récupération de l’eau et La gestion de l’eau de pluie sur place.

Encadré 3.4 : Les femmes et les pompes à pédale auservice de la production de fruits et légumes en

Tanzanie

Les contrôles réalisés sur les pompes à pédale venduesen Tanzanie pour la production de fruits et de légumesont constaté que 95 % des pompes vendues avaient étéachetées par des hommes. Dans un premier temps, 40 %de ces pompes ont été gérées par des femmes, mais cepourcentage a augmenté pour atteindre plus de 60 % enl’espace d’un an. Ceci peut s’expliquer par le fait quel’agriculture nouvellement irriguée ait permis auxhommes de se diriger vers d’autres activités génératricesde revenus.

Source : FIDA 2005

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 44

Au moins 22 % de la zone bénéficiant du système de gestion d’eau en Afrique subsaharienne (soit aumoins 2 millions d’hectares) appartient à la catégorie des « autres formes de gestion d’eau » (tableau2.1). La base de données FAO AQUASTAT indique qu’il existe au moins 2 millions d’hectares deterres dans les zones humides, le bas des vallées internes et les zones de culture de crue non équipés. Ilest possible que le coût du contrôle de l’eau dans la plupart de cette zone soit relativement bas si unesimple digue de réservoir et/ou de drainage est mise en place ou un système d’abstraction de l’eausouterraine grâce à un éventail de technologies – depuis les pompes manuelles simples (par exempleles pompes à pédale) jusqu’aux pompes motorisées plus élaborées. Cependant, même ci celareprésente un potentiel significatif, un développement tel que celui-ci impliquerait la constructiond’infrastructures d’« irrigation » plutôt que de « gestion alternative de l’eau »29.

Même si AQUASTAT a exclu la gestion de l’eau de pluie in situ et la récolte de l’eau, la zone totalecorrespondant à ces formes de gestion de l’eau serait relativement petite. La gestion de l’eau de pluiein situ, qui implique l’augmentation de l’infiltration de l’eau de pluie, son stockage dans le profil desol et une consommation accrue par les usines, a été exclue de la base de données AQUASTAT carelle n’était pas considérée comme de un système d’exploitation agricole « géré par l’eau ». La récoltede l’eau, qui implique la collecte d’écoulement depuis une zone de captage pour l’irrigation d’une pluspetite zone de culture (qu’elle soit stockée pour une utilisation future ou pas), a été exclue de la basede données car (a) seules quelques réponses au questionnaire AQUASTAT ont été reçues et (b) lesdonnées soumises se sont avérées non fiables. Cette exclusion pourrait s’expliquer par la confusionrelative aux définitions : la récolte d’eau pourrait être considérée comme une forme d’irrigation, carelle implique l’augmentation de l’eau directement disponible pour les cultures grâce à l’eau de pluie.Si c’était le cas, elle pourrait être considérée comme étant soumise aux mêmes limitations physiques etéconomiques que tout autre type d’irrigation30. Quel que soit le cas, il n’y a aucune raison de penserqu’il existe des zones significatives possédant ces formes de gestion de l’eau.

Cependant, le potentiel représenté par la construction d’aménagements hydro-agricoles dans deszones non irriguées est plusieurs fois supérieur à celui de toute la zone actuellement gérée par touteautre forme de gestion de l’eau, qu’elle soit équipée ou non. Étant donné que la zone cultivée enAfrique subsaharienne est estimée à 183 millions d’hectares et puisque seuls 9 millions d’hectares (ou5 %) bénéficient d’un système de gestion de l’eau quelconque, le potentiel d’amélioration de la gestionde l’eau de pluie in situ semble vaste. La principale problématique est de savoir si des technologiesviables existent ou peuvent être trouvées pour parvenir à mettre en œuvre un système de gestion del’eau de pluie amélioré.

Recherches et diffusion des systèmes alternatifs de gestion de l’hydraulique agricole

Divers efforts ont été réalisés pour chercher et diffuser des systèmes alternatifs de gestion de l’eau,avec des résultats mitigés. L’étude de composantes sur le développement de l’eau dans le domaineagricole pour la réduction de la pauvreté en Afrique de l’Est et du Sud (FIDA 2005) ont constaté queles recherches sur des systèmes alternatifs de gestion de l’eau avaient tenté de négliger lesproblématiques liées à la faisabilité technique et financière. Cette découverte a été mentionnéeégalement par Rosegrant et al (2005) dans le cadre d’une évaluation des perspectives à long terme dela sécurité alimentaire en Afrique.

L’étude de composantes a également constaté que certains efforts de diffusion avaient été réalisés pardes projets plutôt que par des agriculteurs et avaient parfois été trop dépendants des subventions. Lesessais n’ont parfois pas fait état d’une augmentation de l’alimentation en eau pour la culture ou ontrévélé une augmentation des résultats. Même si les recherches avaient réussi à démontrer le potentieldes gains de rendement grâce à l’amélioration de la gestion de l’eau de pluie, les résultats avaient

29 L’irrigation additionnelle (ou supplémentaire) est considérée par certains chercheurs comme une nouvelle alternative degestion de l’eau. Pour les besoins de ce rapport, l’irrigation supplémentaire et les pratiques de gestion associées telles quel’« irrigation déficitaire », sont considérées comme un système d’irrigation plutôt que comme une alternative. L’irrigationdéficitaire est explicitée dans l’annexe 8.30 Ce point est explicité dans l’annexe 8.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 45

parfois dépendu de l’utilisation de facteurs de renforcement de production, notamment d’herbicides etd’engrais. Cependant, les petits exploitants agricoles étaient souvent réticents à l’idée d’investir dansces produits (Hageblade et al 2004). Nombre des technologies disponibles bénéficiaient d’une vieéconomique de quelques années tout au plus, après lesquelles un nouvel investissement étaitnécessaire, impliquant que le montant de ces investissements devait être (a) abordable pour lesagriculteurs et (b) parfaitement justifié par des recettes supplémentaires. Dans le cas contraire,l’adoption de cette idée par les agriculteurs était faible.

Néanmoins, des succès ont été enregistrés. Un exemple est décrit dans l’encadré 3.5. L’étude decomposantes a également fait état d’une diffusion et de l’adoption réussie des billons cloisonnés parles cultivateurs de coton dans le Sud-est du Zimbabwe, où des liens de marché avaient été établis avecune entreprise locale d’égrenage du coton, qui s’est engagée à fournir un crédit en espèce pour lesfacteurs de production nécessaires, afin de justifier les investissements des agriculteurs dans ledéveloppement des exploitations. De tels succès suggèrent que, avec une approche plus ciblée,diverses alternatives viables de pratiques de gestion de l’eau pourraient être trouvées.

Encadré 3.5 : Améliorer les terres locales et les pratiques de stockage de l’eau dans les régions semi-arides du Niger

Comme beaucoup de régions semi-arides, le Niger a subi une dégradation de ses terres en raison de lapression démographique et de la sécheresse. Un projet financé par le FIDA a testé plusieurs technologieslocales pour permettre à nouveau l’exploitation des terres, réduire la variabilité des résultats d’une année àl’autre et renforcer la résistance des systèmes agricoles au risque climatique. Le développement d’une formemodifiée de la pratique tassa a été un succès clé. Elle a continué à se répandre spontanément vers denouvelles parcelles une fois le projet terminé.

La pratique tassa consiste à creuser des trous de 200 à 300 mm de diamètre et de 150 à 200 mm deprofondeur et à recouvrir le fond des trous avec du fumier, ce qui permet d’encourager l’activité des termitespendant la saison sèche et d’améliorer l’infiltration de l’eau. Les agriculteurs y plantent ensuite du millet oudu sorgho. Les Tassas ont permis à la région d’atteindre des rendements moyens en millet supérieurs à480 kg/ha, contre seulement 130 ha/kg sans les tassas. Par conséquent, les tassas font désormais partieintégrale de la technologie locale. La technique se répand à une vitesse déconcertante.

Trois facteurs principaux ont contribué au succès : (a) une approche action/recherche qui combine laflexibilité, l’ouverture d’esprit quant aux initiatives des agriculteurs, une attitude visionnaire et la volonté denégocier ; (b) une technologie entraînant des profits rapides et matériels, mais simple, facilementreproductible et parfaitement adaptée aux systèmes agricoles existants et (c) une technologie pouvants’adapter à l’évolution du contexte local. La tassa se fonde sur une pratique locale qui, même si elle neproduit que des résultats modestes, est efficace.

Les Tassas séduisent les agriculteurs car elles engendrent des résultats rapides et appréciables en restaurant laproductivité des terres, auparavant non exploitables tout en atténuant les risques agro-climatiques et enaugmentant la disponibilité des produits alimentaires des foyers participants de 20 à 40 %. Les tassas sontfacilement reproductibles car elles impliquent uniquement des ajustements mineurs des outils manuels locauxet n’impliquent aucun travail supplémentaire pendant les périodes cruciales d’ensemencement et dedésherbage. Elles peuvent être construites par des agriculteurs individuels sans aide externe, c’est pourquoiles tassas sont particulièrement intéressantes pour les jeunes car elles permettent de cultiver des plateaux, cequi est devenu une ressource de valeur face à la pression en constante croissance sur les terres.

Source : Mascaretti in Dixon et al (2001)

Conclusions et mesures à mettre en œuvre à l’avenir

Il existe bien des technologies alternatives prometteuses de gestion de l’eau et il ne fait aucundoute que davantage d’alternatives peuvent être trouvées. Parmi ces technologies, puisque larécolte de l’eau est une forme d’irrigation et qu’elle est par conséquent soumise à des limitesphysiques et économiques, la gestion de l’eau de pluie in situ semble proposer le meilleurpotentiel pour la réduction de la pauvreté et de la famine.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 46

Même s’il est possible d’argumenter que le coût des investissements pour la récolte de l’eauou la gestion in situ de l’eau de pluie pourrait et devrait être financé par les gouvernements, lavie économique généralement courte de telles inventions empêcherait cette pratique, sauf encas de mise en place d’un programme pilote ou d’une démonstration (puisque lesgouvernements seraient confrontés à des investissements répétés d’année en année). Parconséquent, les investissements doivent non seulement être parfaitement viablesfinancièrement, mais également abordables pour les agriculteurs.

Il existe des arguments irréfutables en faveur de l’investissement public dans les recherchesplus poussées, les campagnes promotionnelles et les services d’assistance technique. Il doitêtre orienté vers l’adaptation et le test de technologies viables et abordables et vers ledépassement des obstacles de l’adoption, notamment de toute barrière institutionnelleexistante.

Une fois des solutions viables trouvées, le soutien du projet pour leur diffusion doit sefocaliser sur l’encouragement des approches menées par les agriculteurs telles que lesChamps-écoles paysans dont les processus d’apprentissage par l’expérience permettent auxagriculteurs de prendre leurs propres décisions en ce qui concerne les techniques les plusadaptées à leurs besoins, les points devant être retravaillés et comment procéder.

La réussite est susceptible d’être plus facile dans les régions plus humides que dans les régionsarides et semi-arides pour les raisons mentionnées plus haut, c’est-à-dire parce que dans leszones les plus humides, le développement de l’eau est moins coûteux et les agriculteurs sontplus susceptibles d’être intéressés par l’intensification.

3.7 Aménagement des bassins hydrographiques

L’aménagement des bassins hydrographiques est important pour la gestion de l’hydraulique agricolemême si peu de projets ont été lancés dans la région. L’aménagement des bassins hydrographiques estpertinent en ce qui concerne la problématique de la gestion de l’hydraulique agricole pour les troisraisons suivantes : premièrement, l’un de ses principaux objectifs est de conserver et d’améliorer laquantité et la qualité des débits d’eau dans une zone de captage, dont l’agriculture irriguée en aval estla principale bénéficiaire. Deuxièmement, nombre des techniques appliquées en conservation enamont telles que la construction de terrasses et le plantage d’arbres utilisent des techniques de gestionde l’hydraulique agricole. Troisièmement, l’aménagement des bassins hydrographiques utilise uneapproche intégrée de gestion des terres et de l’eau dans une zone écologique définie, approchepertinente en ce qui concerne la gestion intégrée des ressources en eau.

Par le passé, l’aménagement des bassins hydrographiques avait pour but premier de minimiser leseffets externes négatifs tels que la sédimentation, les inondations, etc. des pratiques non durablesd’utilisation des terres sur l’infrastructure en aval. Les approches datant d’avant les années 1990avaient tendance à envisager les interventions d’une façon plus unidimensionnelle, grâce à uneméthode descendante, en se concentrant sur ce qui devait être fait en amont pour protéger les intérêtsdes utilisateurs en aval (par ex. des projets d’irrigation), sans nécessairement fournir aux utilisateurs enamont les motivations suffisantes pour la conservation. Le point de focalisation était l’amélioration dela conservation des zones de captage grâce à la mise en œuvre de mesures physiques telles que laconservation du sol, de l’eau et le boisement (Banque mondiale, 2006).

L’aménagement des bassins hydrographiques a connu un changement paradigmatique dans lesannées 1990 lorsqu’on a réalisé qu’une approche plus intégrée et participative, bénéficiant à tous lesutilisateurs de la zone de captage pour obtenir un avantage commun serait plus durable. La nouvelleapproche, par conséquent, consiste à directement impliquer les communautés locales dans laplanification et la mise en œuvre des interventions, à construire des institutions locales plus fortes et àatteindre un vaste éventail d’objectifs de développement rural intégré et de conservation de l’eau et dusol. Ces objectifs concernaient les travaux de conservation du sol et de l’eau, l’intensification agricole,

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 47

la gestion des routes et des parcours naturels et l’intégration du bétail. Ils avaient pour but d’améliorerles moyens de subsistance dans les régions des hautes terres tout en réduisant le risque d’effetsexternes négatifs en aval.

Les nouvelles approches ont rencontré un franc succès. Les approches participatives etd’apprentissage commun et l’utilisation des plans de gestion des points de captage de la communautéont, dans de nombreux projets, réconcilié avec succès l’activité humaine et la gestion des ressourcesnaturelles. De plus, des programmes ont réussi à atteindre des objectifs de conservation et à améliorerles moyens de subsistance grâce à l’intensification de l’utilisation des ressources. Les projets classéscomme « succès » ont fait du développement institutionnel une priorité à l’échelle locale et ontrenforcé petit à petit la capacité du gouvernement à l’échelle régionale et nationale. L’engagement etle soutien du gouvernement grâce à la mise en place de politiques favorables, se sont révélés essentielspour la mise en œuvre et la soutenabilité du projet. Les politiques relatives à la tenure et aux réservesde ressources communes ont été capitales et ont influencé la volonté des individus à investir dans lesterres (Banque mondiale, 2006).

Plusieurs défis importants, cependant, n’ont pas été relevés et doivent être considérés avec soin dansla conception des projets. Alors que plusieurs évaluations (citées par la Banque mondiale, 2006) ontdémontré que les communautés des hautes terres avaient bénéficié de manière significative desinterventions du projet d’aménagement des bassins hydrographiques en termes de revenus du foyer etde disponibilité des produits alimentaires, les impacts en aval ont rarement été contrôlés de manièreadéquate. L’impact de l’aménagement des bassins hydrographiques sur le débit de l’eau n’a, enparticulier, plus bénéficié d’aucune réelle attention. En réalité, certains des avantages prévus desprojets d’aménagement des bassins hydrographiques pourraient ne se matérialiser qu’à long terme, au-delà de la durée de validité du projet. Dans certains cas, les impacts en aval pourraient être négatifs.De plus, des découvertes scientifiques récentes en hydrologie ont semé le doute sur certaines relationshypothétiques entre l’utilisation des terres et l’hydrologie. L’importance de l’influence de la forêt surl’augmentation de la disponibilité de l’eau, sur le débit de la saison sèche ou sur l’élimination desrisques d’inondation en aval est un bon exemple. De manière globale, les interventions enaménagement des bassins hydrographiques sont complexes et coûteuses et leur soutenabilité dépenddu soutien de la conservation, ce qui peut être handicapant à moins que les investissements réalisés negénèrent suffisamment de revenus pour motiver les agriculteurs. Les approches d’aménagement desbassins hydrographiques doivent être appliquées uniquement lorsque les objectifs de conservation desressources en aval et en amont sont clairs, lucides et mesurables (Banque mondiale, 2006).

3.8 Aspects environnementaux et sanitaires du développement de l’hydraulique agricole

Le développement de la gestion de l’hydraulique agricole peut avoir des impacts environnementaux etsanitaires positifs. D’un point de vue environnemental, les avantages du développement del’hydraulique agricole sont les suivants : la réduction des inondations, de l’érosion du sol et de laprésence de boue. De plus, l’intensification (plus que l’« extensification ») de l’agriculture peutpréserver les zones naturelles du développement. Le développement de l’hydraulique agricoleaméliore également directement la nutrition et la santé car il génère des revenus plus élevés et unmeilleur approvisionnement en produits alimentaires. De plus, il peut avoir un impact particulièrementmarqué lorsqu’il cible les pauvres et les femmes (McCartney et al 2005 : 3.8, 3.931). La santé et ladisponibilité des produits alimentaires peuvent également être améliorées indirectement grâce aurenforcement des institutions associées au développement de l’hydraulique agricole.

Cependant, l’échec de la gestion des impacts environnementaux a parfois réduit la productivité et amême mené à l’échec de certains projets liés à l’hydraulique agricole dans la région. Des interactionsmultiples et réciproques existent entre l’hydraulique agricole et l’environnement (McCartney et al2005 :3.21) et l’échec de la gestion des facteurs environnementaux a parfois été la cause de la chute dela productivité et même de l’échec des projets. En ce qui concerne le projet relatif à la culture du riz de

31 Les éléments soulignés se réfèrent au rapport factoriel du Programme de collaboration.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 48

350 ha de Gem-Rae au Kenya, la détérioration du point de captage a mené à de tels débits desédiments que les agriculteurs ont été contraints de consacrer leur temps chaque jour au nettoyage dessédiments au lieu de le dédier à leurs activités agricoles. Le projet a pratiquement été abandonné. Ence qui concerne le projet d’irrigation de Chokwe au Mozambique, un drainage insuffisant a mené à laperte d’environ 5 000 ha sur un total de 30 000 ha en raison de la salinisation. En Somalie, le réservoirexterne de Jowhar construit pour collecter les débits de crue pour l’irrigation des terres lors de lasaison sèche est devenu tellement boueux que l’irrigation à grande échelle en Somalie du Sud s’estpresque effondrée (McCartney et al 2005 :3).

Certains développements hydrauliques ont également affecté la santé de la population. En Éthiopie, laconstruction de petits barrages dans la région semi-aride du Nord du Tigre a entraîné undéveloppement accru des cas de paludisme, même à une altitude supérieure à 2 000 m. Au BurkinaFaso, près de 1 500 petits barrages ont été construits depuis 1974, mais aucune mesure n’a été prisepour contrôler les impacts sanitaires négatifs et la schistosomiase urinaire s’est répandue. Même si lesimpacts environnementaux individuels sont négligeables, le cumul des impacts environnementaux denombreuses petites interventions doit par conséquent être pris en compte. Le secteur public doit penseraux impacts sanitaires potentiels lors de l’étape de conception. Les agriculteurs sont souventconscients des problèmes environnementaux et sanitaires lorsqu’ils apparaissent, mais les actionscorrectives ne font pas partie des capacités des petits exploitants agricoles (McCartney et al2005 :3.5).

Nombre de ces problèmes peuvent êtreattribués aux faiblesses de la capacitéinstitutionnelle du secteur public enmatière de réglementation des aspectsenvironnementaux et sanitaires. Lecadre de réglementation et d’exécutiondes pays de la région est souventinadéquat. Les procédures nationalessont trop souvent inexistantes (encadré3.6) et les institutions nationalesmanquent de capacités pour prendre enmain les aspects environnementaux,sociaux et sanitaires. Souvent, desconséquences contraires sont constatéescar les projets sont conçus de façonisolée par rapport aux autresdéveloppements du bassin. Lesproblèmes environnementaux ont tropsouvent été négligés. En ce qui concerneles projets financés par des sourcesexternes, les donateurs imposent leursexigences, mais elles diffèrent parmid’un donateur à l’autre et, souvent, nefavorisent pas la construction d’uneconscience nationale et d’une capacitéinstitutionnelle. Les conséquencesenvironnementales et sanitairesnégatives peuvent également être lerésultat d’un développement del’hydraulique agricole privé non

réglementé (encadré 4.9, encadre 4.11, McCartney et al 2005). Les problèmes ne sont pas amoindrispar la décentralisation et le développement du secteur privé. En effet, les systèmes à petite échelle etl’irrigation périurbaine informelle utilisant les eaux d’égout peuvent provoquer des problèmes

Encadré 3.6 : Les procédures nationales nigériennes liées auxprojets d’irrigation à grande échelle ne sont pas adaptéespour la protection de l’environnement ou la réduction des

problèmes sociaux

Au Nigeria, les autorités du bassin n’ont pas prêté l’attentionnécessaire aux impacts environnementaux des projets d’irrigationà grande échelle mis en place dans les années 1970 et 1980. Parconséquent, ces projets ont considérablement détériorél’environnement. L’hydrologie en aval a été gravement modifiée,particulièrement dans le nord, dévastant de vastes zones defadama, bouleversant les méthodes traditionnelles de capture etdétruisant l’habitat sauvage. À présent les évaluations desimpacts environnementaux sont nécessaires pour les projetsd’irrigation ou de drainage de zones humides de plus de 100 ha,mais les effets nuisibles sur l’environnement des anciens projetspersistent. Les avantages économiques de l’irrigation en amontdes zones humides de Hadejia-Nguru ont été considérablementcontrebalancés par des pertes économiques dues auxdétériorations causées par le projet d’irrigation aux zoneshumides.

La plupart des vastes projets entrepris au Nigeria ont égalementconnu de sérieux problèmes sociaux. Les bergers Fulani n’ontgénéralement aucune sécurité de tenure et, alors que les projetsd’irrigation se multipliaient, les Fulani ont été forcés à quitterleurs terres, ce qui a engendré des conflits. Les familles déplacéesen raison de la construction des barrages et des réservoirs ontégalement été désavantagées. Leur rétablissement n’était pasorganisé et les familles dépossédées étaient purement etsimplement livrées à elles-mêmes.

Source : Banque mondiale 2001: WP 8-18 ; Barbier et al 1991.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 49

environnementaux et sanitaires (McCartney et al 2005). Le manque de contrôle environnemental etsanitaire est également une lacune considérable.

Cependant, de nombreux risques environnementaux et sanitaires peuvent être gérés à l’échelle duprojet. Ne nombreux effets socio-environnementaux et sanitaires nuisibles peuvent être évités enmenant à bien des évaluations intégrées et participatives d’impact au cours de la préparation afind’identifier les conceptions alternatives ou les mesures d’atténuation. Par exemple, un facteurd’aménagement des bassins hydrographiques peut être ajouté à un projet pour prévoir les problèmesd’envasement et y remédier. Un système fermé de conduites peut remplacer les canaux ouverts pourréduire le lieu de reproduction des moustiques ou un système de drainage peut être ajouté pour éviterl’engorgement des sols et la salinisation. L’encadré 3.7 décrit comment un projet d’irrigation a étéconçu pour réduire les risques de maladie. Des systèmes de contrôle et d’évaluation à l’échelle duprojet peuvent enregistrer les impacts environnementaux et sanitaires.

Encadré 3.7 : Systèmes de contrôle de la schistosomiase dans les projets d’irrigation

Dans le cadre du projet Mushandike au Zimbabwe, le besoin de contrôler la schistosomiase a déterminé laconception finale d’un projet d’irrigation de 400 ha mené par de petits exploitants agricoles. Le projet a étémené à bien le plus loin possible des villages. Les canaux étaient tous munis d’un revêtement extérieur enciment et leur débit était suffisamment rapide pour déloger les escargots. Les structures hydrauliques étaientconçues pour permettre un drainage rapide et ainsi éviter la stagnation de l’eau. Lors du fonctionnement dusystème, le séchage régulier des canaux, la fluctuation du niveau de l’eau dans les réservoirs au cours de la nuitet les opérations de nettoyage régulières contribuaient à la lutte permanente contre les escargots. Parconséquent, le nombre d’escargots « hôtes » a été considérablement réduit et une étude menée sur dix ans aprouvé que les populations d’escargots et les taux d’infection par la schistosomiase étaient plus bas que dansdes villages similaires où seul un traitement était utilisé.

Source : McCartney et al 2005

La gestion de l’hydraulique agricole doit également prendre en compte le problème du VIH/SIDA. Lefléau du VIH/SIDA est omniprésent sur le continent. La gestion de l’hydraulique agricole a un rôleimportant à jouer dans l’atténuation de ces impacts. Par ailleurs, la hausse des revenus et de ladisponibilité des produits alimentaires a été reconnue comme la solution clé pour aider les malades àcombattre les infections liées au VIH/SIDA. La perte d’ingénieurs qualifiés, de professionnels etd’agriculteurs expérimentés pour la prise en charge du développement, de la mise en œuvre et del’entretien des projets est un handicap de taille. Des stratégies spécifiques sont nécessaires,particulièrement un renforcement des capacités et, le cas échéant, la mise en place de solutionssanitaires pour remédier au départ du personnel et des agriculteurs.

Chapitre 4 Le Contexte institutionnel en mutation

4.1 Planification stratégique et hydraulique agricole

Les dix dernières années, les approches en matière d’aide au développement international ont connud’importants changements. Cela inclut le consensus sans précédent qui s’est formé autour des objectifsde développement exprimés dans les ODM, ainsi que l’engagement pris à Paris en 2005 par un grandnombre d’acteurs de l’aide au développement vis-à-vis de la manière de poursuivre ces objectifs defaçon plus efficace32. Les Documents de stratégie pour la réduction de la pauvreté (DSRP), ou d’autres

32 Lors du Forum de haut niveau sur l’efficacité de l’aide tenu à Paris en février/mars 2005, la communauté internationale aadopté la Déclaration de Paris sur l’harmonisation et l’alignement, en prenant un engagement vis-à-vis d’une série de mesuresvisant à atteindre une plus grande efficacité de l’aide : (1) les pays doivent prendre la responsabilité de définir des stratégiesnationales de développement ; (2) l’aide doit être harmonisée à travers des dispositions communes de financement etd’assistance technique ; (3) l’aide doit être alignée sur des stratégies et institutions nationales de développement et dessystèmes nationaux renforcés ; (4) l’aide doit être orientées vers les résultats ; et (5) il faut une obligation mutuelle de rendrecompte, par exemple, à travers des évaluations conjointes des actions des bailleurs de fonds.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 50

formes de stratégies de réduction de la pauvreté, ont constitué le point de référence pour les efforts dedéveloppement national dans la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne.

Cependant, les stratégies de réduction de la pauvreté n’ont en général pas reconnu le rôle quel’agriculture – et la gestion de l’hydraulique agricole en particulier – peuvent jouer en matière deréduction de pauvreté. Les premiers DSRP n’ont pas toujours reconnu, de façon explicite, le rôledécisif du secteur agricole dans la réduction de la pauvreté et la croissance, même si des exemples plusrécents l’ont fait. Ils n’ont cependant généralement pas accordé beaucoup d’importance audéveloppement de l’hydraulique agricole. Le sous-secteur tend donc à être négligé dans lesprogrammes d’investissement destinés aux secteurs de l’agriculture et de l’eau. La raison de cettenégligence réside en partie dans les perceptions négatives de l’hydraulique agricole évoquées plushaut dans ce rapport, et en partie dans le fait que, dans de nombreux pays, l’agriculture et l’eaurelèvent de ministères séparés, ce partage des responsabilité amenant trop souvent ceux-ci à négliger lesous-secteur (FIDA, 2002).

D’autre part, les stratégies de développement de l’hydraulique agricole n’ont pas été, par le passé,entièrement cohérentes avec les objectifs des DSRP. Les objectifs spécifiques de réduction de lapauvreté n’ont pas été bien mis en vue dans le secteur de l’eau et les stratégies d’irrigation, et ils n’ontpas souvent reflété les objectifs de réduction de la pauvreté des DSRP. Par exemple, le Plan nationalde l’eau adopté par le Mozambique en 1995 ne fait qu’une brève mention de l’irrigation des petitesexploitations (essentielle pour la réduction de la pauvreté), malgré l’importance accordée au sous-secteur dans le DSRP.

Il y a eu une absence d’approche stratégique en matière d’investissement dans le domaine del’hydraulique agricole. En général, aucune approche stratégique de l’hydraulique agricole n’a étéadoptée, et les programmes d’investissement dans l’hydraulique agricole ont été souvent mal intégrésdans les politiques et objectifs globaux de développement (Morardet et al 2005 : 18). Dans certainscas, les projets ont été sélectionnés en quête d’objectifs non économiques tels que la sécuritéalimentaire, et ont manqué d’une viabilité économique élémentaire : à titre d’exemple, citons ledéveloppement de systèmes d’irrigation par pompes pour la production de céréales au Nigeria discutéci-dessus (voir 2.3 et 3.1).Une nouvelle génération de stratégies d’irrigation a malgré tout commencé à émerger en Afriquesubsaharienne au cours des dernières années. Ces stratégies prennent en compte la nécessité d’uneapproche intégrée, stratégique du développement de l’hydraulique agricole et profitent de synergiespotentielles avec les politiques macroéconomiques et sectorielles (BM 2005b :8). Les meilleures deces stratégies reflètent aussi les nouveaux paradigmes de développement et reconnaissent la nécessitéde renforcer l’autonomie des communautés et de leur participation à la conception et à la mise enœuvre, de même qu’une approche axée sur le marché (Encadré 4.1). En particulier, elles reconnaissentque la productivité et la rentabilité sont les clés de la soutenabilité et qu’il est nécessaire de supprimerles contraintes à leur réalisation. Elles mettent l’accent sur la nécessité de la prise d’initiative par lesagriculteurs et d’un financement où le rôle de l’État est limité mais tactique. Ces stratégies sont entrain d’être traduites en résultats. Dans le cas du Mali, l’exercice de stratégie intégrée a abouti à untransfert des investissements destinés à de projets d’irrigation à grande échelle vers des systèmes àpetite échelle (< 100 ha).

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 51

Encadré 4.1 : Les récentes stratégies d’irrigation sont conformes à une approche axée sur le marché

En collaboration avec la FAO, six gouvernements d’Afrique de l’Ouest – le Mali, la Mauritanie, le Sénégal, laCôte d’Ivoire, le Niger et le Burkina Faso1 – ont développé des stratégies d’irrigation avec des approchescommunes. Celles-ci comportent :

une redéfinition des rôles de l’État, des agriculteurs et du secteur privé, avec un nouvel accent sur lalibéralisation, le renforcement de l’autonomie des agriculteurs et une implication minimale dugouvernement ;

des approches participatives appliquées depuis l’identification des projets jusqu’à la gestion destravaux ;

la priorité accordée aux systèmes individuels ou de petits groupes ; l’examen de plus d’alternatives pour trouver des solutions moins coûteuses et plus rentables pour les

agriculteurs ; la prise en compte des impacts environnementaux et de l’équité sociale ; l’exigence que les agriculteurs couvrent les coûts opérationnels et d’entretien et une partie des coûts

d’investissement ; la suppression des barrières administratives et fiscales ; et la promotion de la recherche basée sur la demande.

Source: Gadelle dans Sally et al, 2002:33

Un élan a été également donné au processus de planification stratégique par l’élaboration desProgrammes nationaux d’investissement à moyen terme dans le cadre du CAADP (Morardet et al2005 : 18-20, 34, 35, NEPAD 2005). Au niveau régional, le CAADP 2002 du NEPAD a adopté lagestion des terres et des ressources en eau en tant que premier des quatre piliers définis pour lesinvestissements prioritaires et a proposé d’étendre, d’ici à 2015, la superficie soumise à la « gestiondurable des terres et des systèmes fiables de contrôle des ressources en eau » à 20 millions d’hectares(soit approximativement le double de la superficie actuelle soumise à la gestion des ressources en eauen Afrique subsaharienne) 2, même si la justification de proposition est plus de diminuer lesimportations alimentaires nationales et régionales que de réduire la pauvreté. L’accent a étéprincipalement mis sur les investissements dans les infrastructures plutôt que dans les institutions.Cependant, une revue de l’état d’avancement réalisée en 2005 a attiré l’attention sur le faible niveaudes investissements effectivement réalisés depuis le lancement du CAADP en 2002 (seulement 0,5milliard de dollars EU, par rapport à son objectif de 9,9 milliards de dollars EU, avec seulement unemodeste réserve de projets). La revue a observé qu’une absence de capacité de mise en œuvre desorganismes publics et des prestataires de services privés a été une contrainte et a conclu, entre autres,qu’il fallait réaménager le CAADP afin de tenir compte de ce fait. La revue a aussi observé qu’uneaugmentation de la productivité ne pourrait être obtenue à travers le seul investissement dans desinfrastructures de gestion des ressources en eau : des investissements devaient être fait dans unensemble de mesures institutionnelles et dans des infrastructures rurales d’accès au marché/de post-récolte (FAO 2005). Á l’heure actuelle, les pays de la région sont en train de préparer, avecl’assistance de la FAO, des Plans nationaux d’investissement à moyen terme et un portefeuille deprojets bancables (Annexe 9).

1 Mali Stratégie de l’irrigation 1999 ; Mauritanie Stratégie du développement rural 1997 ; Sénégal Stratégie dedéveloppement de la petite irrigation 1999 ; Côte d’Ivoire Stratégie de développement de la petite irrigation 1999 ;Niger Stratégie nationale de développement de l’irrigation et de collecte des eaux de ruissellement 2001 ; et BurkinaFaso Stratégie de développement durable de l’agriculture irriguée 2004.2 Le NEPAD a proposé depuis le prolongement de ce délai.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 52

4.2 Réformes des politique et stratégie de développement de l’hydraulique agricole

Réformes macroéconomiques et du secteur public

Un certain nombre de pays ont entrepris des réformes de politique destinées à améliorer lamacroéconomie et à améliorer ainsi la performance des secteurs productifs. Ces réformescomprennent souvent la libéralisation des taux de change et des contrôles, la suppression des barrièrestarifaires, la libéralisation du marché et un cadre généralement favorable aux entreprises. Lesréformes du secteur public impliquent la redéfinition des fonctions essentielles du gouvernement –pour lui permettre de se concentrer davantage sur les questions de politique, la planificationstratégique, la réglementation et la facilitation du développement et moins sur le fait d’êtreinvestisseur, maître d’ouvrage ou d’œuvre et prestataire de services – avec une meilleure orientationvers le secteur privé et le marché.

Réformes du secteur agricole

Parallèlement à ce qui est mentionné ci-dessus, un certain nombre de pays de la région ont élaboré denouvelles stratégies de développement du secteur agricole et ont engagé des réformes visant àpromouvoir la croissance agricole. L’accent a été mis sur l’augmentation de la productivité et de larentabilité dans le secteur des petites exploitations, de même que sur une plus grande reconnaissancedu rôle que le secteur privé – des petits exploitants agricoles aux grands domaines commerciaux etagroindustriels – peut jouer et joue dans le secteur de l’agriculture (Encadré 4.2, FIDA, 2002).

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 53

Encadré 4.2 : Réformes faisant partie de la Stratégie de développement du secteur agricole de laTanzanie

La Stratégie de développement du secteur agricole (ASDS) de la Tanzanie, publiée en octobre 2001, comprendun ensemble d’actions novatrices et pratiques destinées à stimuler la croissance de l’agriculture et à réduire lapauvreté rurale. Celles-ci mettent l’accent sur la commercialisation du secteur agricole et l’augmentation de saproductivité et rentabilité.

Les dispositions relatives à la mise en œuvre de l’ASDS sont formulées dans le Projet de cadre et documentdécrivant le processus du programme de développement du secteur agricole (ASDP) publié en septembre 2002.Au cœur de l’ASDP, figure une approche sectorielle visant à faire évoluer la fonction de l’administrationcentrale d’un rôle d’exécution à un rôle normatif, à renforcer les moyens d’action de l’administration locale etdes communautés pour leur permettre de reprendre le contrôle de leurs processus de planification et de mise enœuvre, ainsi qu’à encourager la participation du secteur privé à tous les aspects du développement agricole – ycompris les investissements, la transformation et la commercialisation. Dans le cadre de cette nouvelleapproche, 70 à 80 % du financement public (gouvernement et/ou bailleurs de fonds) du secteur sera maintenantgéré par les conseils régionaux et utilisé à travers les Plans régionaux de développement agricole (DADP). Uneplus grande utilisation sera faite de la sous-traitance grâce à des contrats conclus avec des prestataires deservices du secteur privé, et il y aura également une plus grande prise de conscience des questionstransversales, à savoir la problématique du genre et l’environnement.

La nouvelle approche exigera une transformation dans la façon d’analyser, de planifier et de mettre en œuvreles investissements publics dans le sous-secteur de l’irrigation des petites exploitations. Conformément àl’ASDS et à l’ASDP, la planification et la mise en œuvre des projets d’investissement dans le sous-secteur del’irrigation des petites exploitations doivent maintenant être basées sur la nécessité pour elles d’être pilotéespar les irrigateurs (ou irrigateurs potentiels) eux-mêmes, d’être sensibles aux opportunités du marché,d’être coordonnées à l’échelle locale et rentables. Ceci implique un besoin d’analyses critiquessupplémentaires des projets d’investissement de même qu’une plus grande participation des agriculteurs à ceprocessus et à celui de la planification et mise en œuvre ultérieures. Cela implique également de reconnaîtreque la participation est plus qu’une simple consultation et qu’elle prend du temps. De plus, ceci implique lanécessité de reconnaître que les agriculteurs sont les meilleurs juges de leurs propres priorités en matièred’investissement et que celles-ci n’impliquent pas nécessairement d’investir dans des ouvrages d’irrigationphysiques, qui ne présentent pas toujours les meilleures opportunités d’augmentation du rendement et desrevenus. Les agriculteurs peuvent au contraire, avoir identifié une opportunité commerciale ou une contraintequi, si elle est saisie ou résolue, permettrait d’atteindre leurs objectifs de manière plus efficace.

Source: Ministère de l’Agriculture et de la Sécurité alimentaire, Tanzanie (2003)

Néanmoins, les impacts des réformes du secteur agricole n’ont pas encore atteint leur « état destabilité » ni produit les avantages prévus. En particulier, la diminution de l’ampleur et des opérationsdes services publics d’appui à l’agriculture a, dans certains cas, privé les petits exploitants de latechnologie ou du financement qui leur aurait permis d’accroître leur productivité (ce qui ne signifienullement que le niveau précédent de service était adéquat). Au même moment, même si le fait quel’État s’est désengagé de la commercialisation a fait disparaître certaines distorsions qui défavorisaientles petits producteurs, a souvent laissé les agriculteurs insuffisamment préparés pour affronter lemarché. Préparer les petits exploitants à relever ce défi est décisif pour la réussite du développementagricole en général. Par conséquent, le développement des structures, la formation et le renforcementdes capacités visant à relier les petits exploitants au marché sont maintenant au moins aussi importantsque le développement des infrastructures (Encadré 4.3, FIDA, 2003).

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 54

Encadré 4.3 : Soutenir la réforme de politique en Tanzanie

Les 42 millions de dollars EU du Programme de développement des systèmes de commercialisation desproduits agricoles, cofinancé par la BAD, le FIDA, l’Assistance irlandaise et d’autres, aident le gouvernementà apporter un changement total dans le secteur de la commercialisation des produits agricoles, avec pourobjectif de permettre aux marchés ruraux de mieux fonctionner et de renforcer l’autonomie des petitsexploitants à l’intérieur de ces marchés. Le programme vise à (a) renforcer près de 1.000 groupes deproducteurs afin de leur permettre de jouir d’une meilleure position dans les négociations et d’exercer plusd’influence sur la formulation des politiques, l’identification des opportunités commerciales, et la négociationdes prix aussi bien des intrants que des produits ; (b) appuyer les réformes de l’administration locale par unrenforcement des capacités visant la rationalisation de la réglementation et des régimes fiscaux, afin depromouvoir l’amélioration de l’efficacité de l’ensemble du système de commercialisation ; (c) améliorer lesinfrastructures commerciales à travers la construction ou la réhabilitation de 700 km de pistes rurales, 200 kmde voies d’accès et 30 centres commerciaux, et à travers le financement d’installations post-récolte ; (d)renforcer la capacité du ministère des Coopératives et de la Commercialisation (l’actuel ministère de laCommercialisation) ; (e) aider les groupes de producteurs, les institutions locales, les commerçants et lesfabricants à accéder à des prêts de banques commerciales pour la promotion d’activités de commercialisation ;et (f) établir et renforcer les liens de marché entre les groupes de producteurs, les institutions locales, lesfabricants, les chaînes commerciales et les exportateurs locaux.

Source: FIDA (2001)

Des efforts sont en train d’être déployés pour aider les petits exploitants à relever les défis que posentles réformes. Cela inclut des efforts visant à rendre autonomes les petits exploitants pour les rendre àmême de développer leur propre capacité à satisfaire leurs besoins en matière de (a) services financiers– grâce à l’adhésion à des institutions, telles que les coopératives d’épargne et de crédit, ainsi qu’à desorganisations apex, telles que les caisses de crédit – et (b) vulgarisation, à travers des contrats avec unesérie de prestataires de services établis directement par les paysans, ainsi qu’à travers des approchesparticipatives telles que les champs-écoles paysans (Encadré 4.4). Des efforts sont également faitspour renforcer l’autonomie des petits exploitants et de leurs organisations pour qu’ils s’engagentcollectivement sur les marchés des intrants et des produits. Cela inclut les tentatives visant àdévelopper les liens de marché dans lesquelles les divers acteurs – des entités commerciales privées(telles que les fabricants et exportateurs agroindustriels, les petits producteurs, le secteur public et lesONG) – se retrouvent dans des partenariats « gagnant-gagnant » destinés à assurer des revenuséquitables tant aux petits exploitants qu’aux entités du secteur privé concernées (Encadré 4.5). Il estessentiel de créer un cadre juridique et de politique favorable ainsi que de renforcer les capacités pouraider les petits exploitants à s’adapter aux transformations.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 55

Encadré 4.4 : Renforcement de l’autonomie des paysans à travers les champs-écoles au Kenya

Le Programme de production et de gestion intégrées des pesticides du Kenya a été mis en œuvre par leministère de l’Agriculture kenyan avec la collaboration de la Global IPM Facility de la FAO et l’appuifinancier du FIDA. Il a adopté l’approche des champs-écoles paysans (FFS) qu’on peut décrire comme unprogramme communautaire d’étude sur le terrain orienté vers la pratique, impliquant un groupe d’agriculteurset facilité par du personnel de vulgarisation (public ou privé) ou, progressivement, par d’autres agriculteurs.Le FFS donne aux agriculteurs l’opportunité d’apprendre ensemble et d’adapter leurs pratiques, en utilisantdes méthodes pratiques d’apprentissage par la découverte qui mettent l’accent sur l’observation, la discussion,l’analyse et la prise de décision collective. Le processus vise à renforcer la confiance en soi et à améliorer lesaptitudes communautaires et de groupe. Les connaissances acquises au cours du processus d’apprentissagepermettent aux agriculteurs d’adapter leurs technologies pour les rendre plus productives, plus rentables etplus conformes aux conditions du changement. Ces connaissances permettent également aux agriculteurs detester et d’adopter de nouvelles technologies.

Le Programme IPPM-FFS a été mis en œuvre sur trois saisons dans trois districts de la Province occidentaledu Kenya – tous des districts pauvres, très touchés par le VIH/SIDA, à fortes densités de population, avec uneréduction de la taille des plantations et une dégradation de la fertilité des sols. Au total, 471 FFS ont été créésdans le cadre du programme, avec en moyenne 25 à 30 membres chacune, soit un total de 13.000 agriculteursdont près de 60 % de femmes. L’auto-ciblage a conduit à une vaste majorité de membres issus de la classesocioéconomique moyenne et de la couche sociale la plus pauvre.

Les plus importantes leçons tirées ont été que :

Le FFS a encouragé les communautés à valider et adapter des technologies améliorées et leur a apportél’autonomie suffisante pour trouver des solutions à leurs problèmes.

La gestion des ressources du FFS par les agriculteurs, en particulier le paiement des services devulgarisation, ont amélioré de façon substantielle la responsabilité et la performance des prestataires deservices de vulgarisation.

La promotion des FFS dirigée par des agriculteurs, avec des agriculteurs (plutôt que du personnel devulgarisation) comme facilitateurs, a permis au programme d’atteindre un plus grand nombred’agriculteurs qu’il n’en aurait été autrement.

Le FFS a renforcé l’autonomie des communautés et amélioré leur profil à l’échelle du district, ce qui apermis d’augmenter leur capacité à influencer la planification au niveau local.

Les femmes ont surtout semblé apprécier l’approche, en raison de son intérêt pratique, de sonapprentissage axé sur le terrain et de la valeur sociale des groupes des FFS.

Source: Khisa et al dans Penning de Vries et al (2005)

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 56

Encadré 4.5 : Partenariats gagnant-gagnant de lien de marché en Zambie et au Zimbabwe

Malgré d’abondantes ressources en eau et en terres, l’agriculture zambienne est pauvre et se caractérise par lafaiblesse des marchés et l’aspect rudimentaire des techniques d’irrigation. Le Centre zambien d’assistancetechnique en agro-industrie (ZATAC) a développé des systèmes de petites cultures directement liées auxmarchés au comptant par le biais d’entreprises agro-alimentaires. Cette stratégie offre aux petits cultivateursune opportunité de devenir partenaires de la chaîne de valeur et donne aux entreprises agro-alimentaires unechance d’accroître leur base d’approvisionnement et de profiter d’économies d’échelle sans avoir à investir lecapital correspondant. Le ZATAC a permis de surmonter les contraintes liées à l’eau en fournissant du créditpour le matériel d’irrigation. Pour la première fois dans l’histoire de la Zambie, les petits exploitantsproduisent maintenant des légumes frais pour des marchés européens à travers une association entre les petitsproducteurs et les entreprises agro-alimentaires.

Les agriculteurs de Maunganidze et ceux des systèmes d’irrigation de Mupangwa/Mutaradzi au Zimbabwe ontbénéficié d’un programme pilote de lien de marché, financé par le FIDA et mis en œuvre par une ONGnationale. Ce programme mettait l’accent sur la production contractuelle de différentes cultures telles que lestomates et les petits pois du Michigan (pour les haricots sauce tomate), destinés à une conserverie locale.L’ONG a facilité les négociations contractuelles des associations de producteurs, aux termes desquelles il aété convenu que (a) la conserverie fournirait les intrants agricoles contre un dépôt de 10 % du coût total verséssur un compte bancaire exploité conjointement par la conserverie et l’association, (b) l’associations’emploierait à fournir un quota déterminé de légumes, et (c) la conserverie achèterait les produits à un prixfixé. Pour sa part, l’ONG fournit un appui technique aux producteurs.

Source: FIDA (2005); Banque mondiale (2005a:IP0102, Banque mondiale 2005b:97

Réformes du secteur de l’eau

Les nombreuses fonctions de l’eau et ses impacts conjugués requièrent une approche de planificationintersectorielle intégrée. Comme ailleurs dans le monde, l’agriculture est la plus grandeconsommatrice d’eau dans la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne. Cette utilisation a parconséquent le plus d’interactions et d’impacts avec les autres éléments du système hydrologique,environnemental, social et économique et doit s’inscrire dans une affectation rationnelle desressources en eau aux utilisations pour l’environnement, l’agriculture, l’hydroélectricité, laconsommation urbaine et industrielle, ainsi qu’à d’autres utilisations telles que le transport ou letourisme.

La Déclaration de Dublin de 1992 sur l’eau et le développement durable traduisait le consensusinternational sur le fait que, étant donné la concurrence intersectorielle autour de l’utilisation del’eau et la rareté croissante de l’eau dans le monde, une gestion efficace des ressources en eau étaitvitale. La Déclaration de Dublin appelait à une approche intersectorielle intégrée de la gestion et del’affectation des ressources en eau, à partir de laquelle s’est développé le concept de la Gestionintégrée des ressources en eau (GIRE1). Cinq pays d’Afrique subsaharienne ont répondu en adoptant laGIRE en tant qu’instrument de politique, et plusieurs autres envisagent d’en faire autant.

Les approches de GIRE sont de plus en plus nécessaires dans la mesure où les contraintes liées àl’eau se multiplient, afin de réduire les coûts sociaux, économiques et politiques résultant de lal’appropriation sauvage de l’eau, de droits incertains et d’effets externes environnementaux. AuKenya, par exemple, les coûts liés au manque de gestion intégrée des ressources en eau sont élevés(Encadré 4.6), avec des coûts sociaux liés à l’appropriation sauvage, des coûts économiques provenantde variations hydrologiques, de droits et affectations incertains, ainsi que des coûts politiques associésaux incertitudes liées aux ressources en eau transfrontalières. Ces coûts proviennent du cercle vicieuxcréé par l’absence de gestion intégrée des ressources, le sous investissement dans les infrastructures et

1 Le concept de la GIRE met l’accent sur : (a) la nécessité d’une approche du développement basée sur un captage complet etla subsidiarité en matière de planification et de prise de décisions ; (b) le rôle institutionnel primordial des femmes ; (c) lesdroits humains élémentaires à l’eau potable et à l’assainissement à un prix abordable ; et (d) le besoin d’efficacitééconomique dans l’utilisation de l’eau.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 57

la gestion, la dégradation des zones de captage qui en résulte, des capacités de régulation limitées dansles cas extrêmes, le tout constituant un frein à la croissance (Banque mondiale 2004a : v).

Encadré 4.6 : Le Kenya a besoin de la GIRE pour gérer le développement de l’irrigation

Le développement non contrôlé de l’irrigation dans le district de Laikipia au Kenya est en train de détruire lesmoyens de subsistance et l’habitat en aval. Au cours de la période 1990-3, on notait dans le district uneaugmentation de 300 % de l’hydraulique résultant essentiellement du développement de l’agriculture irriguée.Plus de 90 % de ces utilisations n’étaient pas autorisées. En aval, le flux moyen du fleuve Ewasso N’giri abaissé de 9 m3/seconde à 0,9 m3 /seconde en février (une baisse de 90 %). Maintenant, les utilisateurs situés enaval ne peuvent plus obtenir un niveau élémentaire d’eau, l’écosystème du fleuve est dégradé, les lacs et lesrégions humides se dessèchent, et la pêche – une source de protéine pour les démunis – est en déclin.

Sources : Banque mondiale 2004a: 19, v

La GIRE présente cependant des défis en termes de fonctionnement. Il n’est par exemple pas clair quele secteur agricole soit efficacement impliqué dans les débats réunissant les parties prenantes de laGIRE. Dans certains cas, la politique agricole nationale reste muette sur l’irrigation. De plus, même siles réformes du secteur de l’eau ont tenté de pallier les déséquilibres historiques liés à l’accès agricoleaux ressources en eau en prévoyant des autorités décentralisées chargées de la planification du captageet des associations agricoles de consommateurs d’eau, il n’est pas clair que la mise en œuvre despratiques de la GIRE ait encouragé les groupes défavorisés à participer de manière effective auxprocessus de décision en matière d’affectation et d’utilisation des ressources en eau (Perry et al, 1997et Derman et al, 2002). Bien que la GIRE prenne le bassin comme unité de planification, l’expériencedes approches basées sur les bassins est jusqu’ici mitigée dans la région : certaines organisations debassin hydrographique ont plus joué un rôle opérationnel et de développement qu’un rôle deplanification et de gestion des ressources. A titre d’exemple, l’Autorité de mise en valeur des bassinshydrographiques du Nigeria a commencé non seulement en tant que gestionnaire des ressources eneau, mais également comme un important investisseur dans des systèmes publics à grande échelle, à lafois, de barrages et d’irrigation.

Nonobstant ces défis, la question n’est pas de savoir s’il faut adopter la GIRE et une approche deplanification intersectorielle, mais de déterminer comment améliorer le processus pour obtenir lesmeilleurs résultats dans l’utilisation agricole et la réduction de la pauvreté. Une approcheintersectorielle, décentralisée de la gestion des ressources en eau, ainsi qu’une mise en œuvre demécanismes d’autorégulation et d’auto application de la gestion durable prenant en compte tous lesbesoins à l’intérieur d’un bassin hydrographique et assurant une représentation convenable des petitsexploitants agricoles dans la conduite des affaires, des débats entres les parties prenantes et desdécisions relatives aux affectations sont essentiels pour le concept de la GIRE. Le défi consiste àmettre ces approches en pratique. La GIRE doit prendre appui sur les pratiquestraditionnelles/indigènes et les intégrer, lorsque cela a un sens. La responsabilisation totale desorganisations de bassins hydrographique sera essentielle (Banque mondiale).

4.3 Gestion des systèmes d’irrigation financés par l’État

Comme dans la plupart des régions, la soutenabilité des systèmes d’irrigation financés par l’État estmédiocre en Afrique subsaharienne, surtout à cause de la dépendance excessive de la gestion dessystèmes et de l’O&M vis-à-vis de l’aide du gouvernement, de la réduction des budgets publicsconsacrés aux dépenses courantes et de la faiblesse des niveaux de recouvrement des coûts desutilisateurs. Comme mentionné plus haut (3.1), les gouvernements de nombreux pays de la région ont,dans le passé, non seulement financé les coûts d’investissement des projets d’irrigation – à grande,moyenne et petite échelle – mais ont ensuite joué un rôle déterminant dans la gestion des systèmes,surtout des plus importants, et ont aussi pris la responsabilité de l’essentiel des coûts de l’O&M.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 58

Au cours des dernières années, la tendance a été d’encourager les utilisateurs des systèmesd’irrigation financés par l’État, organisés en associations de consommateurs, à prendre laresponsabilité de leur gestion et de l’O&M. Bien que ceci se soit appliqué aux systèmes existants etnouveaux (voir Encadré 3.2 pour le cas de l’Office du Niger), le niveau d’acceptation de cetteresponsabilité par les utilisateurs des systèmes dépend d’une série de facteurs, dont notammentl’échelle et la complexité du système, son adéquation technique à la gestion des agriculteurs, lacapacité des utilisateurs et la rentabilité intrinsèque du système. Pour les nouveaux aménagements, ons’assure aujourd’hui régulièrement que les études techniques sont adaptées à la gestion desagriculteurs, que les coûts d’O&M sont abordables par rapport aux recettes de la vente des récoltes, etqu’il reste une marge suffisante pour constituer une incitation à l’irrigation. Il est aussi habitueld’adopter un processus participatif d’identification, conception et mise en œuvre des systèmes pourpromouvoir l’appropriation et l’engagement des utilisateurs, et de mettre en place des organisationsdurables d’agriculteurs – telles que les associations de consommateurs de l’eau (ACE) – pourreprendre la responsabilité entière de la gestion et de l’O&M. Toutefois, il est peu probable qu’une« appropriation » totale soit atteinte si le régime foncier n’est pas assuré, de même que la clarté desdroits légaux sur les infrastructures et l’équipement.

En général, les interventions à petite et moyenne échelle sont plus intrinsèquement adaptées à lagestion des agriculteurs que les grands systèmes. Les systèmes à petite et moyenne échelle sont paressence plus faciles à gérer par les organisations d’agriculteurs que ceux à plus grande échelle, mêmesi le renforcement des capacités de gestion des systèmes reste essentiel même pour les petits systèmes.Le Projet de développement participatif de l’irrigation (PIDP) de la Tanzanie, par exemple, facilite lacréation d’ACE basée sur la demande et travaille avec elles pour améliorer les systèmes d’irrigation àpetite échelle existants et en développer de nouveaux, à la condition (consignée dans les protocolesd’accord) que l’association accepte l’entière responsabilité de l’O&M1

Cependant, il y a des cas où d’importantes économies ou opportunités commerciales correspondent àde nouveaux investissements dans de grands aménagements, qui transcendent la capacité de gestion,exploitation et entretien des ACE. Dans ces cas, il est probable que le gouvernement joue un rôlesoutenu dans la gestion des systèmes et l’O&M, dans des partenariats avec une fédération d’ACE ouun secteur d’irrigation, où il assumerait la responsabilité des infrastructures majeures et où lesorganisations de consommateurs se chargeraient des unités secondaires et tertiaires. Parmi de récentesinnovations, le Projet d’irrigation en faveur des petits exploitants du Bas Usuthu, un projet sucrier de11.500 ha en faveur des petits exploitants au Swaziland, envisage que tout le système, incluant unbarrage de dérivation, un système de stockage hors cours d’eau et de canaux, soit régi par le districtirrigué qui sous-traitera l’O&M à un prestataire de services du secteur privé (Encadré 4.7).

1 L’expérience du PIDP a servi de base à de nouvelles directives relatives au développement participatif décentralisé del’irrigation, qui ont été préparées par le ministère de l’Agriculture et de la Sécurité alimentaire (Gouvernement de Tanzanie2003).

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 59

Encadré 4.7 : Le Swaziland adopte une approche innovante pour la prestation des services d’eau et lerecouvrement des coûts

Le Projet d’irrigation en faveur des petits exploitants du Bas Usuthu (LUSIP), d’une superficie de 11.500 ha,sera exploité par des organisations de petits exploitants produisant de la canne à sucre destinée à lacommercialisation. L’infrastructure principale, secondaire et tertiaire sera subventionnée par l’État. Lesorganisations d’agriculteurs paieront 100 % du coût d’investissement des travaux au niveau des exploitationsen prenant des prêts commerciaux remboursables à partir des recettes de la production de canne à sucre. Deplus, ils paieront des charges couvrant le coût de l’O&M sous-traitée à un prestataire privé de services souscontrat avec l’organisation centrale des agriculteurs. Une partie de ces coûts fera l’objet d’une subventioncroisée de la part des grands producteurs de canne à sucre qui ne paient actuellement rien pour l’eau qu’ilstirent directement des rivières.

Source: FIDA 2001a

L’expérience en matière de gestion des systèmes publics d’irrigation par les agriculteurs est mitigée.Les ACE constituées autour de petits systèmes de culture du riz dans le cadre du Projetd’aménagement du Haut Mandrare (PHBM) à Madagascar ont souffert de la faiblesse de leur créationet de l’imprécision de leur responsabilité en matière de réparations en cas de dommages causés auxouvrages de tête par les inondations. Dans le PIDP de Tanzanie, les ACE étaient informées du faitqu’elles étaient responsables d’importantes réparations, mais la manière dont elles allaient, le caséchéant, financer ces réparations n’était pas précisée. A Maunganidze au Zimbabwe, même si l’ACEavait été bien établie et bien organisée, elle aurait probablement eu des difficultés à trouver l’argentpour des réparations majeures sur les pompes de captage. Dans aucun de ces cas, la soutenabilitéfinancière – l’un des principaux objectifs de la gestion des agriculteurs – n’était assurée (FIDA 2005).

Le transfert de la gestion de l’irrigation vers les systèmes existants ne s’est pas toujours opéréconformément au plan. Par exemple, dans le cadre du Projet de petits périmètres irrigués deMadagascar, des groupes de consommateurs ont été mis en place pour gérer l’O&M et donc reprendreles systèmes de l’État. Cependant, le transfert formel a été extrêmement lent, un pourcentagerelativement faible de systèmes a été cédé et moins de 10 % de ceux-ci restent opérationnels (vanKoppen 2005 :35).

Dans certains cas, l’État s’est trop vite retiré après le transfert de la gestion de l’irrigation et lespaysans ont été contraints de reprendre le flambeau sans préparation à cette tâche, ce qui a eu desconséquences très néfastes pour la productivité. Parfois, le transfert de la gestion de l’irrigationéchoue lorsque les irrigants héritent d’un système pour lequel la rentabilité financière et les capacitésinstitutionnelles nécessaires à une irrigation soutenable font défaut (Encadré 4.8). A Madagascar, parexemple, le gouvernement a adopté en 1990 une loi régissant le transfert de la gestion de l’irrigation eta entrepris un programme, avec l’assistance des bailleurs de fonds, afin de réhabiliter les systèmes,d’accroître le recouvrement des coûts, et de passer le témoin aux ACE. En 2003, seulement 3 % de lasuperficie du système du secteur public avaient été transférés (8.607 ha sur un total de 270.000 ha).Entretemps, les dépenses publiques liées à l’O&M ont baissé de 50 % du budget du ministère del’Agriculture à seulement 42.000 dollars EU, avec très peu d’assistance en conseil ou en gestion. Lesfrais des services d’irrigation n’ont été fixés qu’à 6 dollars EU/ha, ce qui est jusqu’ici inférieur auniveau requis (au moins 23 à 38 dollars EU) de sorte que l’entretien des systèmes n’est pas assuré. Enfait, le processus s’apparentait plus à un abandon qu’à un transfert, et cela a sapé la production. Enconséquence, des systèmes qui étaient précédemment très productifs et dans lesquels la nation avaiténormément investi pendant plus de cinquante ans, sont presque complètement perdus (Banquemondiale 2003).

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 60

Encadré 4.8 : Symptômes de retrait – exemples de transfert de la gestion de l’irrigation mal réalisés

Dans le système Arabie-Olifants de l’Afrique du Sud, la superficie cultivée a chuté de 70 % l’année qui a suivile retrait de la Société de développement rural et agricole. Les petits exploitants étaient incapables d’accéder aufonds de roulement pour se procurer les intrants et les services.

Dans la cession des systèmes de pompes au Niger, la propriété foncière n’a pas été transférée. Les irrigantspouvaient être expulsés et remplacés et n’étaient ainsi pas incités à investir et n’avaient aucun sens del’appropriation du système qu’ils étaient censés payer et gérer.

Source: IIGE 2002

Les problèmes rencontrés ne sont pas inhérents au concept de transfert de la gestion de l’irrigation.La plupart des transferts de gestion de l’irrigation ont échoué dans la région simplement parce qu’ilsavaient été mal réalisés et n’avaient pas respecté les conditions préalables institutionnelles etfinancières essentielles. Trop souvent, des gouvernements et projets ont été interrompus faute derenforcement des capacités et de renforcement de l’autonomie des agriculteurs, et les prestataires deservices (secteur public et privé) ne se sont pas montré responsables vis-à-vis des agriculteurs pour lesservices tels que l’étude et la construction, la vulgarisation, l’alimentation en eau, l’O&M, qu’ilsdevaient fournir.

Il y a clairement eu des succès dans la création des ACE et le transfert de la gestion de l’irrigation etils donnent des pistes pour l’avenir (Encadré 4.9). Par exemple, dans le programme de transfert de lagestion de l’irrigation au Sénégal soutenu dans le cadre du Quatrième projet d’irrigation 1988-1993financé par la Banque mondiale, un certain nombre de systèmes de grande taille du delta du fleuveSénégal ont été transférés aux Unions hydrauliques, mises en place pour gérer les stations de pompesélectriques et recouvrer les coûts auprès des agriculteurs. Après un début difficile, ces organisationsont réussi à obtenir un crédit bancaire pour financer les opérations et améliorer le service de l’eau,elles ont aussi contribué à faire diminuer le vol. Les Unions ont investi dans la recherche et lavulgarisation, et avec de nouvelles variétés de riz de l’ADRAO la rentabilité s’est améliorée et laproduction a été relancée. Maintenant, les Unions se tournent vers la fourniture d’intrants et letraitement et la commercialisation de produits afin d’augmenter la valeur ajoutée et les revenus. Lesclés de cette réussite semblent être : le renforcement continu des capacités de l’État et des ONG ;l’accès au fonds de roulement ; et un sens de l’appropriation qui a fait ressortir l’esprit d’entreprise etles aptitudes managériales requises au sein des Unions (Ibrahima Dia Irrigation par le secteur privédans le delta du fleuve Sénégal, in IIGE 2002 :121ff).

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 61

Encadré 4.9 : Exemples de transfert réussi de la gestion de l’irrigation

En Afrique du Sud, la Trust de développement des petits producteurs gère un programme de services d’appuifinancier et à la formation qui a aidé 42.000 petits producteurs de cannes dans le Natal/Kwazulu et auKaNgwane, à prendre la relève et à gérer leurs systèmes d’irrigation.

L’IPTRID a étudié le transfert de la gestion de l’irrigation dans douze systèmes rizicoles de cinq pays del’Afrique de l’Ouest (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Sénégal). Les systèmes étaient tous des pompesaccompagnées de modèles de répartition par gravité. L’étude a conclu que malgré de nombreux problèmes, lesagriculteurs avaient trouvé des solutions ingénieuses, avec l’aide d’agences d’irrigation étatiques ou d’ONG.Les exemples incluent : des contrats (avec l’aide de l’agence d’irrigation étatique) passés avec une sociétéd’étude locale pour la distribution de l’eau, l’entretien et la gestion financière ; l’utilisation de logiciels pourcalculer le calendrier optimal des cultures et les tarifs de l’eau (avec l’aide des ONG) ; et l’acquisition d’unmoulin à riz et la vente directe d’un riz de haute qualité aux épiceries de la capitale pour une primesubstantielle (Ingrid Hermiteau : Soutenir le transfert soutenable de la gestion de l’irrigation in IIGE2002 :105 ff).

Un groupe de petits agriculteurs d’Hereford en Afrique du Sud a repris son système d’irrigation. Le groupe aobtenu l’appui d’une ONG, Africare et cela lui a permis de signer un contrat d’exploitation pour l’exportationde légumes vers Hong Kong et la France et pour la vente sur le marché national. La société d’exportation afourni un planning de plantation strict et des conseils de vulgarisation. Les revenus ont augmenté et lesagriculteurs ont été en mesure de financer l’O&M du système et d’améliorer leur niveau de vie.

Source: IIGE 2002

Puisque dans la plupart des cas, il est peu probable qu’augmente le financement public de la gestiondes systèmes et de l’O&M, la question n’est pas de savoir si les systèmes doivent être gérés par lesagriculteurs, mais de s’assurer que les systèmes soient efficacement gérés et que les coûts d’O&Msoient recouvrés. Même s’il est peu probable que les agriculteurs puissent faire face aux coûtsd’investissement des infrastructures majeures, il est essentiel, pour des raisons de soutenabilité qu’ilsassurent au moins la totalité des coûts d’O&M. De façon idéale, les systèmes devraient êtreentièrement gérés par les agriculteurs ou par leurs organisations centrales. Le succès dépend : (a) de larentabilité intrinsèque et de la soutenabilité physique du programme ; (b) du renforcement descapacités de gestion, exploitation et entretien du système ; (c) de la garantie des droits fonciers etrelatifs à l’eau ; et (d) d’une gestion prudente du processus de transfert de la création/gestion des ACE,incluant un appui post-transfert (Encadré 4.9). Là où l’échelle et la complexité empêchent une gestiontotale par les agriculteurs et qu’il n’y a pas d’alternative à la gestion par une agence d’État, il faut quel’autonomie financière soit effective. Les redevances des services d’eau doivent évidemment êtresuffisantes pour couvrir les coûts réels d’O&M, mais les frais généraux doivent être maintenus auminimum. Surtout, il faut que l’agence soit transparente et responsable vis-à-vis des utilisateurs – unecondition qui ne peut être généralement réalisée que lorsque les irrigants participent à sa gestion demanière authentique.

4.4 Développement décentralisé

Traditionnellement, les gouvernements de la plupart des pays en développement ont utilisé desorganisations conventionnelles du secteur privé pour fournir les infrastructures et les services auniveau local. Les approches alternatives au développement local ont cependant évolué au cours desdeux ou trois dernières décennies. Dans le cadre des grandes réformes de la fonction publique, uncertain nombre de pays de la région se sont engagés (ou envisagent de s’engager) dans ladécentralisation de leurs efforts de développement public, afin d’accroître la participation etl’appropriation des communautés rurales en matière de planification, budgétisation et mise en œuvredes programmes publics de développement rural, y compris ceux de l’hydraulique agricole.

Essentiellement, il existe deux formes de décentralisation : l’administration « sectorielledécentralisée » et « locale décentralisée ». Dans la première, le développement est budgétisé,coordonné et mis en œuvre par des ministères sectoriels à travers leur personnel local (au niveauprovince et/ou district). Dans les approches « d’administration locale décentralisée », une partie du

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 62

financement sectoriel public (gouvernement et/ou bailleurs de fonds) est gérée par les autorités localeset utilisée à travers des plans de développement élaborés à l’échelle locale.

La décentralisation n’est pas une fin en soi ; elle est plutôt un moyen de développer des servicesefficaces, réactifs, orientés vers la demande et, en particulier, de rendre les services de l’État plusresponsables vis-à-vis des populations rurales au niveau local. Prise isolément, il n’y a pas de raisonparticulière pour que la décentralisation améliore la responsabilité, elle peut au contraire réduirel’influence et le pouvoir des élites locales – et même aboutir à des inefficacités plus prononcées quepar le passé (Encadré 4.10). La clé d’une décentralisation réussie c’est (i) de renforcer l’autonomie despopulations rurales, en leur permettant de développer les aptitudes, les connaissances, la confiance ensoi et l’organisation nécessaires pour participer aux processus politiques à l’échelle locale ; et (ii) detenir les prestataires de services publics et privés responsables vis-à-vis d’eux. Par conséquent, mêmesi la décentralisation peut améliorer l’impact sur le développement des investissements dansl’hydraulique agricole, elle pose aux gouvernements un défi politique, technique et administratifcomplexe et requiert une forte capacité de gestion pour guider la progression du processus. Elle doitêtre accompagnée par des programmes d’appui à la promotion de la bonne gouvernance, durenforcement des capacités et de l’autonomisation (FIDA 2002).

Encadré 4.10 : Développement décentralisé de l’hydraulique agricole sans renforcement de l’autonomieLe Programme d’irrigation et de barrage de Dombolidenie au Zimbabwe, d’une superficie de 5 ha, a étéfinancé à travers un projet national mais il avait été planifié et décidé au niveau du conseil de district à la suited’un long processus participatif qui incluait une formation approfondie et le renforcement des capacités descommunautés locales. La mise en œuvre a été gérée par le personnel du conseil de district avec l’appui dupersonnel chargé du district au ministère de tutelle. Le coût était de 82.000 dollars EU/ha et revenait à un centpar jour pour les agriculteurs. L’expérience a suggéré que la décentralisation et la participation ne garantissentpas, par eux-mêmes, de bons résultats. Dans ce cas, les communautés concernées n’ont pas eu la possibilité deprendre une décision avisée en matière d’investissement : même informées des coûts et des alternativesd’investissement, elles auraient pu choisir une utilisation plus rentable des ressources disponibles. Elles n’ontpas non plus été habilitées à assurer la maîtrise des coûts, dans la mesure où les prestataires de services – tantdu secteur public que privé – n’avaient pas de comptes à leur rendre. L’expérience n’a pas seulement mis enévidence un manque d’autonomie, mais aussi une absence de capacité au sein des structures locales deplanification en matière de sélection, évaluation, approbation et exécution des sous-projets.

Source: FIDA 2005

4.5 Les eaux transfrontalières

Etant donné le niveau élevé des ressources transfrontalières en Afrique subsaharienne, un accord surleur utilisation est la clé en matière d’investissements dans l’hydraulique agricole durable. Lesprocessus actuels mettent par conséquent l’accent sur un développement coopératif et mutuellementbénéfique. Les bassins partagés couvrent 63 % de la superficie des terres en Afrique subsaharienne etdouze pays de la région dépendent de l’extérieur pour plus de la moitié de leurs ressources en eau.Avec une telle proportion de ressources en eau partagées, la planification et la coordination régionalesde l’affection des ressources transfrontalières, de la GIRE et de la gestion du captage sontparticulièrement importantes (FAO 2005a:99). Un certain nombre d’états ont coopéré dans le cadre dedivers programmes. Par exemple, la Mauritanie, le Sénégal et le Mali ont créé en 1972 l’Organisationde mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS), et ont depuis construit des barrages à Daima au Sénégalet à Manantali au Mali pour l’irrigation, l’hydroélectricité et la navigation. Le Lac Victoria estconfronté à une menace de dégradation environnementale, qui risque d’être aggravée par une irrigationaccrue en amont, et bien qu’il n’y ait pas encore de traité officiel, les États riverains coopèrent pourélaborer un « Cadre de stratégie et de vision » conjoint pour sa gestion (Encadré 4.11). Ce cadrepourrait cependant s’avérer inapproprié pour enrayer les impacts négatifs sur l’environnement causés,par exemple, par les prises d’eau excessives liées aux systèmes hydroélectriques, qui provoquent unebaisse excessive du niveau du lac. Un accent initial mis sur les avantages d’une gestion coopérative –disons des flux et de la qualité de l’eau – et d’un développement de commun accord ou coopératif de

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 63

l’irrigation et de l’hydroélectricité peut conduire, en temps opportun, à des relations plus formelles et àdes institutions transfrontalières plus viables.

Encadré 4.11 : Le Kenya a commencé par une coopération sur les questions environnementales avec lesriverains du Lac Victoria – mais envisage pour l’avenir une coopération plus vaste sur le développement

des ressources en eau

Le Kenya partage plus de la moitié de ses cours d’eau, lacs et nappes aquifères avec les pays voisins, mais n’aencore conclu aucun accord officiel avec aucun pays riverain. Cependant, le Kenya est impatient de développerles ressources en eau du bassin du Lac Victoria pour l’agriculture et à d’autres fins, et il s’est associé à d’autresriverains pour formuler un « Cadre de stratégie et de vision » conjoint pour sa gestion. Cette action collective aété enclenchée pour l’eutrophisation croissante du lac par une charge excessive de substances dont une partieconsidérable provient de l’utilisation des engrais au Kenya.

Source: Banque mondiale 2004a:iv, 33

Ceci créé des opportunités d’optimisation des stratégies d’investissement à l’échelle du bassin, et despartenariats pour la gestion conjointe et le développement d’un certain nombre de bassins partagés enAfrique subsaharienne ont été établis. Par exemple, les riverains du Bassin du Nil travaillent sur lepartage des eaux, pour arriver à une sécurité durable des ressources en eau. L’Initiative du Bassin duNil offre un potentiel énorme pour un important développement coopératif du bassin, incluant undéveloppement à grande échelle de l’irrigation et de l’hydroélectricité. De plus, des opportunités decoopération et d’intégration régionales dans une gamme d’activités allant au-delà du fleuve se sontprésentées consécutivement au renforcement des relations construites à partir de l’Initiative (Banquemondiale 2005f :1, Banque mondiale 2005b :79).

Les organisations régionales et les bailleurs de fonds ont aidé à forger ces partenariats et ont fournil’appui à l’investissement, par exemple pour l’OMVS et l’Initiative du Bassin du Nil. Avec l’appui desbailleurs de fonds, les pays de la SADC ont conclu en 1995 un Protocole sur les cours d’eau partagésen tant que base pour l’intégration régionale de la gestion et de l’investissement dans les ressources eneau. Cela a abouti au Plan d’action stratégique régional de 1998 pour la GIRE dans les pays de laSADC et a maintenant déclenché le Processus du Zambèze au sein des huit États riverains et lacréation d’une Commission permanente du fleuve Zambèze (Banque mondiale 2005c :1-3). Cespartenariats accordent la priorité à l’investissement dans l’hydraulique agricole et l’hydroélectricité.

Chapitre 5 Potentiel de développement et opportunités d’investissement

5.1 Demande du marché

Les marchés de l’alimentation se développeront rapidement au cours des prochaines années mais ilest peu probable que change beaucoup la viabilité économique des systèmes d’irrigation destinés à laproduction de céréales en tant que culture principale : les systèmes rizicoles et ceux où d’autrescéréales sont produites à côté de cultures à valeur élevée devraient se montrer plus viables que lessystèmes réservés à la monoculture de céréales autres que le riz. L’Afrique subsaharienne estactuellement autosuffisante en ce qui concerne la plupart des aliments de base et importe moins de 5% de ses besoins en nourriture autres que le riz et le blé, les seules cultures vivrières pour lesquellesl’irrigation est actuellement importante (voir 2.2). Le blé, le riz et l’huile végétale dominent lesimportations de nourriture. Celles des céréales totalisent 24 millions de tonnes dont 21 millionsproviennent des importations commerciales et 3 millions de l’aide alimentaire. Le volume des marchésnationaux d’Afrique subsaharienne devrait doubler d’ici à 2015, avec un accroissement de la demandeen aliments de qualité supérieure parallèle à l’augmentation des revenus. Les importations nettes deblé et de riz devraient tripler d’ici à 2030 (à 85 millions de tonnes) et celles du maïs, des huilesvégétales et du riz devrait augmenter considérablement. Globalement, à l’échelle de la région,l’autosuffisance céréalière devrait diminuer légèrement, de 82 % à 1997/9 à 81 % en 2030 (FAO2003a : 68).

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 64

La contribution éventuelle de l’irrigation à la satisfaction de la demande alimentaire future a étémodélisée dans une des études du Programme de collaboration (de Fraiture 2005, basé sur le modèlede simulation de l’eau de la FAO (Watersim), Tableau 5.1). Avec l’avantage de la protection naturelleet de faibles frais de main-d’œuvre, il est possible de déplacer certaines importations, en particulier deriz et, dans les zones plus tempérées, éventuellement de blé. Toutefois, rien n’indique que les prixréels des céréales s’amélioreront dans le cadre du cycle de Doha, même si les pays d’Afriquesubsaharienne ont plus de latitude d’appliquer l’appui intérieur (FAO 2005a :84, Diao et al 2003 :vii).Ainsi, ce n’est que si productivité augmente que la viabilité économique des systèmes d’irrigationdestinés à la production de céréales en tant que culture principale pourra s’améliorer. Les systèmesrizicoles et ceux où les céréales sont produites avec d’autres cultures à forte valeur s’avèreront plusviables que ceux destinés à la monoculture de céréales autres que le riz. Il est vraisemblable que cesderniers ne se révèleront plus viables que si les coûts d’investissement dans l’exploitation de l’eau sonttrès bas ou que la productivité augmente grâce à des changements technologiques tels que la mise aupoint de variétés à haut rendement.1

Tableau 5.2 : Simulation de la contribution de l’irrigation à la demande future de produitsalimentaires

Demande 2000(millions t)

Demande 2025(millions t)

Augmentationdu pourcentage

Pourcentage 2025demande irriguée

Manioc et autresracines et tubercules

106,5 196,8 85% 0%

Patates douces 43,8 82,4 88% 0%Maïs 37,8 75,4 99% 3%Autres grains 35,0 78,6 125% 2%Blé 13,6 24,8 82% 17%Riz 12,0 22,5 87% 23%Source: de Fraiture 2005: 8,11

La demande mondiale de sucre et de coton augmentera quelque peu – mais si les cours du cotonpeuvent connaître une hausse, ceux du sucre sont susceptibles d’être instables. Les culturesindustrielles irriguées, en particulier le sucre et le coton, continueront d’approvisionner les marchésintérieurs et d’exportation. La croissance de la demande intérieure continuera à augmenter. Les coursdu coton à l’exportation pourraient augmenter considérablement si les mesures de protection et lessubventions américaines et européennes sont réduites dans le cadre du cycle de Doha (FAO 2005a :85,88, Diao 62). Cependant, l’impact combiné de la réforme de la politique sucrière européenne et del’accroissement de la demande mondiale pourrait accentuer l’instabilité des cours du sucre.

L’horticulture irriguée promet d’être un secteur rentable à croissance rapide. L’horticulture irriguéeprésente des perspectives de croissance considérables avec sa vaste panoplie de produits potentiels(plus de 80 types de « fruits et légumes » selon la classification commerciale des Nations Unies) etcompte tenu de la part congrue de l’Afrique subsaharienne dans le commerce mondial de ces produits(Diao et al 2003 :61). Le faible niveau des salaires est susceptible de conserver à la région un avantagecomparatif considérable au niveau des exportations horticoles qui pourraient augmenter rapidement. Ily a plusieurs niches porteuses dans ce domaine, en dépit de la concurrence élevée et des risques quecomporte le marché. Le vaste marché intérieur qui absorbe l’essentiel de la production s’étendraégalement de façon constante.

La réduction de la pauvreté et l’incidence de l’expansion de l’horticulture irriguée pourraient êtreimportantes dans le futur. Dans l’ensemble de la région, selon les hypothèses de croissance rapide(6 % l’an dans toute la région, l’équivalent du taux de croissance des exportations non traditionnellesdu Kenya au cours des années 90), les exportations de fruits et légumes frais pourraient ajouter 2 % au

1 Les tableaux 3 et 4 en annexe montrent les prévisions de la FAO pour le déficit de gains et la production irriguée à2030.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 65

PIB agricole de la région d’ici à 2015. Même s’il ne s’agit là que d’une contribution relativementfaible à la valeur ajoutée agricole globale, plus de 2 millions de familles de paysans de la région tirentdéjà profit de l’horticulture irriguée et, dans certains pays, l’impact de la croissance future dans cesecteur pourrait être considérable. On estime par exemple qu’au Mozambique, les exportationsagricoles non traditionnelles pourraient ajouter 8 % au PIB agricole (c’est-à-dire au revenu moyen despaysans) au cours d’une période de croissance de 12 ans (Diao et al : 57).

5.2 Potentiel de développement des terres et des eaux

Ressources en terres et potentiel

Moins du cinquième des terrespotentiellement irrigables ont étéaménagées. Sur 39,4 millions d’hapotentiellement irrigables, selon lesestimations de la FAO, seuls 7,1millions – soit 18 % du potentiel –ont été aménagés à cet effet . Encomparaison, l’Asie du Sud aaménagé 57 % de ses terres etl’Asie de l’Est 64 % (la Chine 70%). Certains pays d’Afriquesubsaharienne ont aménagé plus deterres (Figure 5.1 et carte 1), mais leSoudan, la Somalie, le Mali,l’Afrique du Sud, le Zimbabwe, leMalawi et Madagascar sont les seulsà avoir aménagé plus de 30 % de

leur potentiel théorique (Tableau 5.2).

Tableau 5.2 : Surfaces irriguées actuelles et potentielles

Surfaces cultivées Surfaces irriguéesTerres

potentiellementirrigables

Surfaces irriguéesen % des

surfaces cultivées

Surfaces irriguéesen % dupotentiel

(‘000 ha) (‘000 ha) (‘000 ha) (%) (%)

Afrique du Sud 15712 1498 1500 9,5% 99,9%

Somalie 1 071 200 240 18,7% 83,3%

Madagascar 3 550 1 086 1 517 30,6% 71,6%

Soudan 16 653 1 863 2 784 11,2% 66,9%

Zimbabwe 3 350 174 366 5,2% 47,5%

Mali 4 700 236 566 5,0% 41,7%

Malawi 2 440 56 162 2,3% 34,8%

Zambie 5 289 156 523 2,9% 29,8%

Nigeria 33 000 293 2 331 0,9% 12,6%

Mozambique 4 435 118 3 072 2,7% 3,8%

Ghana 6 331 31 1 900 0,5% 1,6%

Congo, République démocratique 7 800 11 7 000 0,1% 0,2%

Total Afrique subsaharienne 182 682 7 105 39 413 3,9% 18,0%Total Afrique subsahariennesauf les trois plus grands paysd’irrigation 146 767 2 658 33 613 1,8% 7,9%Source: FAO 2005b

Figure 5.1: Certaines régions d’Afrique subsaharienne ont dessystèmes d’irrigation plus développés que d’autres

Source: FAO 2005b

Surfaces aménagées pour l’irrigation en % du potentiel71,4%

49,5%

35,6%

10,9%7,6%

1,0%0,0%

10,0%

20,0%

30,0%

40,0%

50,0%

60,0%

70,0%

80,0%

Iles etautres

Soudano-sahélienne

Australe Est Golfe deGuinée

Centrale

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 66

Théoriquement, le potentiel dedéveloppement de l’irrigation est de32,3 millions d’hectares. Parailleurs, il y a 1,8 million d’hectares(25 % de la surface totale aménagée)qui sont aménagés mais ne sont pasirrigués actuellement et quipourraient éventuellement être remisen production grâce à unecombinaison d’investissementsciblés et de réformesinstitutionnelles. Il s’y ajoute 2millions d’hectares soumis àd’autres formes de gestion de l’eautelles que les décrues ou les zoneshumides (Tableau 2.1), qui sontsusceptibles d’amélioration. De plus,la productivité végétale est faible sur

les surfaces irriguées cultivées existantes (voir 2.3 ci-dessus) et investir dans ces terres, dans le butpremier d’améliorer la fiabilité et le contrôle de l’eau, pourrait accroître la performance sil’investissement est combiné avec l’apport d’intrants, les liens de marché et un changementinstitutionnel. Qui plus est, il est possible d’améliorer la gestion de l’eau dans une agriculture pluviale(voir ci-dessous).

Ressources en eau et potentiel

Si toutes les terres irrigables étaient aménagées, elles n’utiliseraient que 12 % de l’eau disponible.Les prélèvements d’eau actuels pour l’agriculture atteignant moins de 3 % du total des ressourcesrenouvelables (voir 2.1 ci-dessus et carte 2) sont extrêmement faibles comparés à ceux de l’Asie duSud (46 % des ressources renouvelables) et de l’Asie de l’Est et du Sud-est (8 %). Ce pourcentage estplus élevé dans certains pays : en Afrique du Sud par exemple, il est de 17 % du total des ressourcesen eau renouvelables internes, au Zimbabwe il est de 27 % (Tableau 5.3). Si les 39,4 millionsd’hectares du potentiel total des terres irrigables étaient aménagés, les besoins totaux en eau seraientde 473 BCM par an, soit 12 % du total des ressources en eau renouvelables. Même en tenant compted’une croissance annuelle de 5 % de la demande en eau industrielle et urbaine, l’ensemble desprélèvements n’atteindrait que 13 % des ressources renouvelables d’ici à 2030 (ce chiffre seraitbeaucoup plus élevé dans certains pays - plus de 40 % au Soudan, au Ghana, en Somalie et en Afriquedu Sud). Cependant, comme discuté plus loin, les ressources internes en eau renouvelables (RIER)d’un pays ou d’un bassin sont souvent concentrées dans une fenêtre saisonnière et peuvent varier. Deplus, dans un nombre croissant de bassins fluviaux, il y a concurrence entre les différents usagers.

Figure 5.2: un faible pourcentage des surfaces potentiellementirrigables a été aménagé en Afrique subsaharienne

Source: FAO 2005b

Total des terres irrigables en ASS

(Potentiel total: 39,4 millions d’ha)12%

6%

82%

Surfaces aménagées pour l’irrigation actuellement irriguées

Surfaces aménagées pour l’irrigation actuellement non irriguéesSurfaces présentant un potentiel d’irrigation future

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 67

Carte 1: Surfaces des eaux gérées en pourcentage du potentiel d’irrigation

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 68

Tableau 5.3 : Utilisation présente et potentielle de l’hydraulique agricole

Total desRIER

Pourcentagede RIER

utilisé

Pourcentageprélevé pourl’agriculture

Volumeprélevé pourl’agriculture

Utilisationactuelle del’eau dans

l’agricultureen % des RIER

Terrespotentiellement

irrigables

Besoinsen eau

pour irriguertout le

potentiel a/

(mm3) (%) (%) (mm3) (%) (000 ha) (mm3) (% )

Congo 222 000 0 9 4 0,0 340 5 440 2,5

Ghana 30 300 3,2 66 652 2,2 1 900 30 400 100,3Madagascar 337 000 4,4 96 14 313 4,2 1 517 24 269 7,2

Malawi 16 140 6,2 80 810 5,0 162 2 590 16,0

Mali 60 000 10,9 90 5 900 9,8 566 9 056 15,1

Mozambique 100 300 0,6 87 550 0,5 3 072 49 152 49,0Nigeria 221 000 3,6 69 5 507 2,5 2 331 37 288 16,9

Somalie 6 000 55 99,5 3 281 54,7 240 3 840 64,0

Afrique du Sud 44 800 27,9 63 7 836 17,5 1 500 24 000 53,6

Soudan 30 000 124,4b/ 97 36 069 120,2 2 784 44 544 148,5Zambie 80 200 2,2 76 1 320 1,6 523 8 368 10,4

Zimbabwe 12 260 34,3 79 3 318 27,1 366 5 850 47,7

Totaux 1 160 000 79 560 15 300 244 798 21,1

ASS 3 884 061 104 687 39 400 630 400 16,2ASS sauf lestrois plus grandspaysd’irrigation 3 472 261 46 469 33 599 537587 15,5

a/ 16.000 m3/ hab/ Le recours aux RIER est supérieur à 100% car le Soudan compte beaucoup sur les débits des sources extérieures.Source: AQUASTAT et données Banque mondiale

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 69

Carte 2: Total des ressources internes en eau renouvelables par habitant et ratio de dépendance

Les ressources en eau sont souvent concentrées dans une fenêtre saisonnière et peuvent varier . Larépartition des ressources est irrégulière et inégale dans le temps. Dans le Zambèze par exemple, prèsde 80 à 90 % des ressources se présentent sous forme d’écoulement fluvial pendant la saison despluies, entre décembre et mai, alors que pendant six mois, de juin à novembre, l’écoulement baisserapidement ou est extrêmement faible à inexistant. Même en saison des pluies, la configuration decelles-ci et des écoulements connexes est souvent imprévisible et mal espacée. Par ailleurs, lechangement climatique est susceptible d’aggraver la variabilité des pluies.

Dans un nombre croissant de bassins fluviaux, les différents usagers se font concurrence. En dépit de« l’abondance » globale de l’eau, il y a des cas où apparaît une concurrence entre les usagers. Celapeut conduire à des pénuries et à des frictions et se traduire par une production sous-optimale et unedégradation de l’environnement (Encadré 5.1). Dans bien des cas, ce n’est pas la rareté absolue del’eau qui est en cause mais plutôt un problème institutionnel – absence de cadre réglementaire, dedroits relatifs à l’eau et d’organisations pour coopérer autour de l’allocation et de la gestion de laressource. Dans d’autres cas, il peut s’agir d’une absence d’infrastructures de régulation des sources

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 70

par rapport aux saisons et années sèches. La variabilité saisonnière et l’incertitude des ressources,combinées à la rareté localisée de l’eau, pourraient militer en faveur d’investissements dans lesinstitutions ou de plus d’investissements dans des infrastructures hydrauliques ou des deux à la fois.

Encadré 5.1 : Demande concurrentielle de l’eau en Tanzanie

La Great Ruaha River est vitale pour le parc national de Ruaha et son écosystème. Elle fait également tournerles stations d’énergie hydraulique de Mtera et Kidatu qui fournissent 85 % de l’électricité de la Tanzanie.Cependant, le développement de l’irrigation en amont dans les plaines d’Usangu entre en compétition pourl’eau du Ruaha.

Les systèmes d’irrigation des petites exploitations d’Usangu ont été mis en place par de petits agriculteurs àpartir des années 40, essentiellement pour l’irrigation du riz pendant l’hivernage. Avec l’accroissement de lademande de riz en Tanzanie, un certain nombre de grandes fermes rizicoles parapubliques ont été égalementaménagées. Des pénuries d’eau commencèrent à apparaître dans le Ruaha et en 1993 le fleuve s’est asséché auniveau du parc national. Les débits servant à la production d’énergie hydraulique ont été également réduits, cequi s’est traduit par des coupures d’électricité à Dar es Salaam. Le développement de l’irrigation en amont aété tenu pour responsable de ces déficits.

L’autorité du bassin fluvial a dû arbitrer les demandes concurrentielles de l’agriculture, de l’énergie, del’environnement et du tourisme, même si des recherches des universités de Sokoine et d’East Anglia etd’IWMI ont montré que les pénuries d’électricité étaient dues à une mauvaise gestion des barrageshydroélectriques plutôt qu’aux prélèvements en amont effectués pour l’irrigation. Il y a des possibilitésconsidérables d’accroissement de l’efficacité de l’utilisation de l’eau en amont mais les options d’améliorationde la gestion dans les zones humides des plaines méritent également d’être examinées.

Source : Lankford, 2004 ; Fox, 2004

Exploiter le potentiel de l’eau

Les paragraphes suivants examinent les possibilités de deux méthodes d’exploitation du potentielhydraulique : (i) investir dans le stockage de l’eau et (ii) développer les eaux souterraines.

…à travers davantage de stockage et de régulation de l’eau

La plupart des pays d’Afrique subsaharienne présentent de faibles niveaux de stockage de l’eau. Bienque plusieurs bassins de la région comptent un certain nombre de barrages – c’est le cas par exempledes pays riverains du Zambèze avec 94 barrages d’une capacité de stockage > 1 MCM – l’Afriquesubsaharienne n’abrite que 5 % des barrages du monde et la plupart des pays de la région disposent depeu d’infrastructures de stockage (voir Figure 5.3, section 2.1 ci-dessus et Banque mondiale 2005c).

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 71

Figure 5.3

Source: World Registry of Dams

Tableau 5.4: Capacité des barrages en Afrique subsaharienne

Sous-région Capacité des barragesen km3

% du totalde la capacité de l’ASS

Nombre de barrages

Soudano-sahélienne 30 5% 90Golfe de Guinée 235 39% 126Centrale 5 1% 45Orientale 27 4% 33Australe 307 51% 723Iles de l’Océan Indien 1 - 24

ASS Total 604 100% 1041Source: FAO 2005b

Les possibilités de développement sont considérables et pourtant les États et les bailleurs de fonds ontpeu investi dans les barrages au cours des dernières années, d’une part à cause des coûts élevés et de lafaible économie de l’irrigation à grande échelle (voir 3.1, 3.2 ci-dessous) et d’autre part en raison duscepticisme qui entoure les avantages des barrages en termes de développement par rapport auxrisques financiers, sociaux et environnementaux connexes.

Pourtant, le financement privé des structures de stockage s’est avéré rentable. Les agriculteurscommerciaux d’Afrique australe ont investi dans des milliers de structures de stockage destinées àl’irrigation habituellement de cultures à fort rapport économique telles que le tabac, les fruits, leslégumes et les fleurs, quelquefois en association avec des cultures vivrières. De toute évidence, cesbarrages étaient à la fois abordables et rentables car les agriculteurs ont pu faire face eux-mêmes auxcoûts. Au niveau du projet « Initiative des agriculteurs » de la région de Mara, en Tanzanie,l’investissement dans un petit barrage et des infrastructures d’irrigation a donné un taux de rendementinterne de 12 % pour la seule culture de paddy avec un rendement moyen de 3,3 t/ha (FIDA 2005).

Il est probable que les années à venir voient une augmentation des investissements dans le stockage del’eau en Afrique subsaharienne. Bon nombre de barrages seront probablement destinés à l’énergiehydraulique : 40 nouvelles centrales sont prévues sur le Zambèze moyen et inférieur par exemple oùl’énergie hydraulique sera la principale utilisation en termes d’évaporation des eaux libres desréservoirs (Banque mondiale 2005c:29). Nombre de ces barrages pourraient être à usages multiples,combinant énergie hydraulique et irrigation, lutte contre les inondations, etc.1 La demande de stockagedes petits exploitants en vue de l’irrigation va également être forte, dans la mesure où les barragespermettent une régulation des débits qui minimise les risques agricoles et un investissement dans une

1 Voir ci-dessous les améliorations qu’apporte la multifonctionnalité à l’économie des barrages.

Répartition des barrages par zone géographique

39%

32%

19%

5%3% 2%

AsieAmerique du NordEuropeAfriqueAmerique SudAsie du Sud

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 72

production plus intensive (Encadré 5.2). Il faudra cependant veiller à ce que les règles opérationnellesde ces barrages multifonctionnels ne portent pas préjudice à l’irrigation. Le développement dustockage devra également être régi par des procédures de consultation et d’évaluation des pratiquesmodèles élaborées au cours des dernières années (Annexe 10). Les coûts économiques et les avantagesde l’impact sur l’environnement doivent être complètement pris en compte dans les évaluations et lesdécisions d’investissement.1

Encadré 5.2 : Pourquoi le stockage de l’eau est-il nécessaire au développement du riz en Tanzanie ?

Les agriculteurs utilisateurs des systèmes rizicoles au fil de l’eau aménagés dans le cadre du Projet participatif dedéveloppement de l’irrigation (PIDP) en Tanzanie se sont plaints du fait que l’eau d’irrigation était l’une de leursprincipales contraintes. Avec le gouvernement, ils venaient d’investir plus de 1000 dollars EU par hectare pouraméliorer le détournement et la distribution de l’eau d’irrigation, ce qui n’en a malheureusement amélioré ni ladisponibilité ni la fiabilité. En quelques années, seul un quart du périmètre prévu a pu être irrigué et il était troprisqué pour les paysans d’investir dans des facteurs de production si bien que même les années où la fournitured’eau d’irrigation était suffisante, les rendements moyens (3.3 t/ha) sont restés inférieurs au potentiel.Aujourd’hui, les paysans font pression pour obtenir des barrages permettant de réguler les débits vers lesaménagements.

Source : FIDA (2005)

…et à travers l’extraction des eaux souterraines pour l’irrigation

Il est possible de développer les eaux souterraines. Dans certains pays, il existe des réservesconsidérables mais localisées d’eaux souterraines renouvelables qui peuvent servir de sourced’irrigation. Au Zimbabwe par exemple, où de petits exploitants utilisent déjà la nappe phréatique peuprofonde à l’aide d’une technologie à prix modique dans les zones humides de dambo, les eauxsouterraines renouvelables pourraient irriguer jusqu’à 80.000 ha, une surface égale à environ le quartdes terres irrigables restantes. À l’Office du Niger, l’irrigation du paddy pendant la saison des pluiesoù l’eau abonde permet la reconstitution de la nappe phréatique qui peut ensuite être utilisée pourl’irrigation par des pompes fonctionnant individuellement en saison sèche lorsque l’eau se fait rare. Ilest probable que des possibilités similaires existent dans beaucoup d’autres zones rizicoles. À d’autresendroits, quand le sol le permet, la transmissivité des terrains sous-jacents peut être trop faible pourfournir des quantités viables d’eau. Il existe des exceptions notables, par exemple les aquifèreskarstiques de Ceinture du cuivre de la Zambie/RDC mais ailleurs, les eaux souterraines sont trèslimitées et peu susceptibles de constituer une option pour le développement de l’irrigation (Banquemondiale 2005c). Dans tous les cas, le développement des eaux souterraines pour l’agriculture doit sedérouler dans un cadre légal et réglementaire permettant le suivi et le contrôle des prélèvements afind’éviter une exploitation non viable de la ressource.

5.3 Economie de l’investissement

Principaux facteurs déterminant la viabilité des investissements

Investir dans l’irrigation en Afrique subsaharienne peut permettre de réaliser des taux de rendementacceptables si la productivité est améliorée et les coûts maintenus à un niveau bas. La solutionconsiste à atteindre des niveaux de productivité justifiant les coûts d’irrigation. Les facteurscontribuant à y arriver sont :

Une alimentation fiable en eau, une régularisation adéquate des eaux et une bonne gestion del’eau sur l’exploitation,

1 Cf. Dixon J, L Fallon Scura, R. Carpenter et P. Sherman, 1994. Economic Analysis of Environmental Impacts, EarthscanPublications Ltd, Londres.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 73

Des avantages maximisés par un système de culture axé sur le marché où les prix sontsuffisamment incitatifs pour amener les agriculteurs à prendre le risque d’investir dans desfacteurs de production afin d’atteindre les niveaux cibles,

L’accès à des services d’appui responsables et rentables fournissant la technologie et lescompétences nécessaires à la commercialisation de la production et à l’accès au crédit,

L’autonomisation des agriculteurs en tant qu’opérateurs commerciaux, en permettant enparticulier aux organisations paysannes de disposer de pouvoirs légaux et en assurant lerenforcement de leurs capacités pour qu’elles puissent se lancer sur les marchés et collaborercommercialement avec les fournisseurs de services,

Des changements technologiques permettant d’améliorer la productivité (voir 3.4 ci-dessus).

Certaines cultures (riz, coton, sucre et horticulture) ainsi que certains investissements (améliorationde l’irrigation, systèmes au fil de l’eau, etc.) se sont en général mieux comportés, mais la viabilité desinvestissements dépend en grande partie du site et des possibilités du marché. Typiquement, lesinvestissements publics et privés dans le riz irrigué, le coton, la canne à sucre et l’horticulture se sontavérés économiquement viables et ont généré une rentabilité raisonnable pour les agriculteurs lorsquela productivité est assez élevée – plus de 3t/ha au moins pour le paddy – et lorsque les coûtsd’aménagement et de gestion ont été contenus dans des proportions abordables (voir 2.4).L’amélioration de l’irrigation et les nouveaux investissements dans les systèmes au fil de l’eau ont eu,dans l’ensemble, des coûts faibles et se sont mieux comportés que les investissements complexes dansl’exploitation de l’eau et les systèmes d’irrigation à grande échelle. Cependant, la viabilité et laperformance de tous les investissements dans l’hydraulique agricole sont fonction du site. Lesinvestissements de toute nature ont été rentables lorsque les facteurs évoqués ci-dessus avaient étéréunis.

En dépit des coûts moyens actuels d’investissements « rentables » qui se situent dans la fourchette de3.750 à 6.000 dollars EU/ha, des projets évalués dernièrement ont été estimés entre 1.000 et 15.000dollars EU. Comme on l’a vu plus haut (3.2), les coûts moyens par hectare (en termes constants de2000) des investissements rentables dans l’hydraulique agricole s’élevaient au cours des dernières àprès de 5.700 dollars EU/ha pour les nouveaux systèmes et 3.500 dollars EU/ha pour les améliorations(équivalent à environ 6.000 et 3.750 dollars EU en 2006). Ces coûts comprennent à la fois lesinvestissements physiques et « non matériels ». Il s’agit là de chiffres très approximatifs – commeindiqué dans le chapitre 3.2 ci-dessus, une étude de la FAO a trouvé les coûts de réhabilitation plusfaibles (FAO 2005c). Qui plus est, la fourchette des coûts entre les différents types d’investissementsest très vaste. Une analyse des projets récents, nouvellement élaborés avec des taux de rentabilité àpriori satisfaisants a montré des variations allant de 1.000 dollars EU/ha pour une simple pompe àpédale et une meilleure répartition de l’eau à 15.000 dollars EU/ha pour des systèmes d’irrigation desurface nouvellement aménagés.1

Autres facteurs affectant l’économie de l’investissement dans l’hydraulique agricole

Des mesures d’accompagnement sont nécessaires aux niveaux macro et sectoriels. L’expériencemontre que ce type d’investissement est plus productif en présence d’un cadre favorable de politiquesmacro et sectorielles, en particulier : (1) une politique macroéconomique et de développementexpansionniste qui contribue à la croissance de la main-d’œuvre dans les secteurs agricoles et non

1 Des projets récents élaborés par le Centre d’investissement de la FAO en Afrique subsaharienne ont enregistré les coûts àpriori suivants : systèmes de surface nouvellement aménagés (moyenne à grande échelle) : 13.000-15 000 dollars EU ;réhabilitation (moyenne à grande échelle) : 5.000-9.000 dollars EU ; goutte-à-goutte (systèmes de 10-500 ha) : 2.000-4.000dollars EU ; système d’arrosage (unités de 20 ha) : 5.000 dollars EU ; pompes à pédale et petites pompes aspirantes etmeilleure répartition : 1.000-3.000 dollars EU ; et irrigation améliorée des basses terres : 3.000-4.000 dollars EU (J. Burke,communication personnelle).

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 74

agricoles, étendant ainsi la demande de produits irrigués, (2) un cadre de pleine concurrence, favorableà l’entreprise, et (3) des politiques visant à développer le transport et les marchés afin d’améliorer lacompétitivité, accroître la demande et les revenus.

L’économie de l’investissement dans l’hydraulique agricole peut s’améliorer lorsque lesinvestissements visent plusieurs fonctions. Des projets multifonctionnels peuvent quelquefois amenerà un niveau acceptable des taux de rentabilité de l’hydraulique agricole sans cela non viables.L’énergie hydraulique, par exemple, est capable d’améliorer la viabilité économique desinvestissements dans l’hydraulique agricole. En Ethiopie, il existe des possibilités considérables dedéveloppement de l’irrigation dans les hauts plateaux, notamment autour du lac Tana : dans certainscas, des investissements uniquement dans l’irrigation ne seraient pas économiques, mais combinéeavec l’énergie hydraulique, l’irrigation peut porter le taux de rentabilité à des niveaux acceptables(Banque mondiale 2005f :9).

Les avantages des investissements dans l’hydraulique agricole sont souvent sous-estimés. Laméthodologie économique n’identifie pas de manière efficace tous les avantages de l’investissementdans l’hydraulique agricole. Ces sous-évaluations négligent, entre autres, la croissance directe etindirecte, en parallèle et en aval, induite à travers des effets multiplicateurs (voir 3.5 ci-dessus).Lorsque ces avantages sont identifiés, la rentabilité de l’irrigation peut être bien plus élevée qu’on nel’avait pensé. Aucune étude n’est disponible pour l’Afrique subsaharienne mais une étude sur lePakistan a révélé que la productivité de l’hydraulique agricole in situ était de 0,04 dollar EU/m3 etqu’elle atteignait 0,24 dollar EU /m3 lorsque d’autres avantages locaux sont pris en compte et 0,48dollar EU /m3 – 12 fois les avantages in situ – quand tous les avantages économiques et sociaux sontintégrés au niveau national (BAD/IWMI 2004, Banque mondiale 2005a :149).

5.4 Rôle de l’Etat dans le développement du potentiel

Leçons tirées des investissements privés et publics

Les investisseurs privés ont mieux réussi que les investisseurs publics . L’investissement dansl’hydraulique agricole peut certainement contribuer à la croissance et à la réduction de la pauvreté enpermettant aux agriculteurs d’intensifier et diversifier leur production et d’irriguer de nouveauxpérimètres. Les innombrables systèmes de la région témoignent de l’aptitude du secteur privé àidentifier des opportunités viables, mettre en œuvre des projets et les gérer durablement. Les systèmesprivés varient en taille et en nature, allant de l’agro-industrie – projet de Kenana au Soudan, ledomaine sucrier irrigué le plus vaste du monde – à la petite exploitation qui parvient à exporter desproduits horticoles à haute valeur, en passant par les systèmes traditionnels d’irrigation à petite échelledu paddy de Madagascar. Les facteurs de réussite déterminants ont été les choix d’investissementbasés sur une demande confirmée et l’aptitude à gérer de façon rentable et soutenable (NEPAD2005 :12).

En revanche, les investissements publics ont rencontré des problèmes à la fois d’exécution et degestion. Les raisons en sont diverses et variées mais on peut retenir parmi les principales : (a) lapoursuite d’objectifs multiples tels que la réinstallation ou la réduction de la pauvreté qui ont amenéles planificateurs à prendre des décisions d’investissement négligeant les conditions de base de laviabilité économique, de la rentabilité et de la soutenabilité ; (b) le coût élevé du capital dû à uneconception trop poussée et à des dépassements des coûts de mise en œuvre ; et (c) absence d’unmodèle d’exploitation et de maintenance durable. Les investissements publics les plus productifs ontété ceux où les agriculteurs avaient leur mot à dire dans la conception et la mise en œuvre et où ils ontété par la suite chargés de la gestion.

Un nouveau paradigme de développement

Le développement de l’hydraulique agricole exige un nouveau paradigme de développement où larentabilité axée sur le marché et l’investissement privé conduisent le développement et où l’État joue

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 75

le rôle de facilitateur et de protecteur de l’intérêt public. À travers la région, les gouvernements ont deplus en plus adopté une vision du développement agricole (voir 4.2 ci-dessus) axé sur le marché etconduit par le secteur privé, où le rôle du secteur public est d’aider le privé à servir les agriculteurscommerciaux et à concentrer les ressources publiques au service des pauvres en (a) améliorant lesrevenus et minimisant la vulnérabilité de la petite agriculture orientée vers le marché ; et (b) enpermettant aux exploitants pratiquant l’agriculture de subsistance d’accéder aux marchés (ou de quitterl’agriculture). Le développement de l’irrigation et d’autres formes de gestion de l’eau dans le cadre decette approche de la croissance du secteur fait appel à un nouveau modèle privilégiant la rentabilitédéterminée par marché et où le secteur privé - de la petite à la grande exploitation - est l’investisseur etl’administrateur de choix et où les pouvoirs public jouent un rôle de facilitateur du développement axésur le privé en investissant dans des projets rentables et financièrement durables lorsque le secteurprivé ne peut le faire et où la volonté de réduire la pauvreté est manifeste. Dans une telle approche, lespetits exploitants sont censés devenir des agriculteurs commerciaux : les pouvoirs publics ont parconséquent un rôle important à jouer dans leur autonomisation afin de leur permettre de s’investirpleinement dans l’agriculture commerciale.

Ainsi, de manière générale, le rôle des pouvoirs publics dans la promotion d’un développement del’hydraulique agricole orienté vers le marché dans le cadre d’une stratégie de développement globaleen faveur des pauvres est de :

Créer un cadre macroéconomique favorable à la croissance : la croissance de l’agriculturenécessite les mesures macro et sectorielles évoquées ci-dessus (voir 4.2) permettant d’élargirles marchés et de faciliter l’investissement.

Intégrer les approches de croissance de l’agriculture : les stratégies de croissance doiventêtre dirigées par une vision de la manière dont la croissance agricole peut réduire la pauvreté.D’où la nécessité d’un DSRP donnant la priorité à une croissance orientée vers le marché, aurôle de l’hydraulique agricole dans cette croissance, aux relations structurelles etinstitutionnelles entre la stratégie de réduction de la pauvreté, celle du secteur agricole et laplanification du secteur de l’eau (voir 4.2).

Investir dans le développement rural : il faut des investissements publics dans desinfrastructures rurales pour accroître la rentabilité agricole par : (a) l’amélioration des liens demarché (p. ex. en investissant dans les routes et les systèmes d’information), (b) ledéveloppement de structures institutionnelles qui autonomisent les agriculteurs afin qu’ilspuissent se lancer sur les marchés et traiter avec les fournisseurs de services, et (c) lerenforcement de la recherche et développement sur les technologies qui améliorent laproductivité de l’eau et d’autres facteurs de production.

Encourager l’investissement dans l’hydraulique agricole : les gouvernements ont un rôlede facilitation à jouer dans l’investissement privé de l’hydraulique agricole (voir ci-dessous).L’investissement public y a également un rôle clair là où le secteur privé n’intervient pas, pourdes projets qui satisfont aux critères de viabilité économique, de rentabilité et de soutenabilitéet qui sont basés sur des modèles institutionnels garantissant aux agriculteursl’autonomisation, la participation et l’appropriation. L’essentiel dans tout investissement estde privilégier des services efficients et à faible coût qui tienne compte des besoins desagriculteurs ainsi que de l’accroissement de la production et des revenus qui en découlent.

Rôle de l’État dans la promotion de l’investissement privé dans l’hydraulique agricole

Les pouvoirs publics peuvent encourager l’investissement privé en mettant en place un cadrejuridique et institutionnel et en investissant dans les infrastructures et dans la recherche etdéveloppement . À l’intérieur de cette définition générique du rôle de l’État, des mesuresspécifiques peuvent être prises pour la promotion de l’investissement privé dans l’hydrauliqueagricole par de grands et petits investisseurs. La priorité est de trouver une forme juridique

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 76

d’exploitation des terres et des eaux qui encourage un investissement privé à long terme ainsi quele développement de marchés fonciers et de l’eau. La planification et la régulation intégrées etparticipatives de l’eau sont particulièrement importantes pour garantir les droits liés à l’eau etminimiser les risques des effets externes négatifs. Il est tout aussi important d’élaborer unepanoplie d’instruments de partenariat public-privé afin de réduire les risques commerciaux etd’atténuer ceux découlant d’un changement de politique du gouvernement (voir Encadré 5.3). Ledéveloppement des infrastructures pour réduire les coûts de transaction s’impose également.Enfin, investir dans une recherche-développement axée sur le marché, si possible en collaborationavec le secteur privé, est nécessaire pour mettre au point des technologies économiques de gestionde l’eau en vue d’une production commerciale.

Encadré 5.3 : Partenariats public-privé autour de l’hydraulique agricole

L’Etat tient le un rôle essentiel de garant des droits et de l’équité, d’investisseur dans les biens collectifs, degardien des ressources naturelles, de catalyseur et facilitateur de l’entreprise privée. Lorsque les risques sonttrop élevés pour le secteur privé, les pouvoirs publics peuvent conclurent des accords de partenariat public-privé, dont quelques exemples sont donnés ci-dessous.

Partenariats en matière de :

Recherche et développement de nouvelles technologies, par exemple, à travers des partenariatsONG/PME pour la promotion des pompes à pédale ;

Aide au secteur privé pour la mise en place de chaînes d’approvisionnement permettant aux petitsexploitants irrigants de réagir aux opportunités du marché, comme l’initiative pour le marché del’irrigation destinée aux petites exploitations ;

Promotion de relations entre petites et grandes entreprises, comme c’est le cas dans les projets GreenScheme en Namibie, LUSIP au Swaziland ou d’agriculture sous contrat à Maunganidze, au Zimbabwe ;

Gestion de l’irrigation et prestation de services ;Développement et fonctionnement des principales infrastructures d’hydraulique agricole ;Développement de l’irrigation, à l’exemple du partenariat existant au Mali où le gouvernement a

investi dans le barrage de Markala et une entreprise privée se charge d’aménager 25.000 ha pour laplantation de la canne à sucre.

Source : Penning de Vries et al 2005

Améliorer l’investissement public dans l’irrigation

En ce qui concerne les projets à gestion publique existants, l’investissement et le développementinstitutionnel devraient privilégier l’autonomisation des agriculteurs pour maximiser leurparticipation et appropriation et améliorer la rentabilité . Les pouvoirs publics devraient continuer àtester et renforcer les modèles réussis d’autonomisation des agriculteurs, investir dans l’améliorationdes infrastructures des systèmes et le développement d’organisations d’O&M soutenables là où cela sejustifie économiquement, et préparer, au besoin, le transfert de la gestion de l’irrigation. Une approched’apprentissage patiente et itérative du développement institutionnel sera nécessaire et la séquence desopérations sera cruciale : le transfert des responsabilités ne doit être envisagé que lorsque lesinstitutions sont matures et l’exploitation est assez rentable pour couvrir les coûts.

Les futurs investissements publics devraient être basés sur des critères économiques et sur laprésomption d’un transfert de responsabilités aux agriculteurs. Les nouveaux investissements publicsdevraient se faire sélectivement sur la base de critères de viabilité économique, de rentabilité, desoutenabilité et de réduction de la pauvreté, de systèmes basés sur les modes d’exploitation et lesstratégies de subsistance des agriculteurs, en incluant dès le départ ces derniers en tant que partenaireset en prévoyant, sauf si cela est absolument nécessaire, de leur transférer la gestion des projetsachevés. Lorsque le secteur public assume un rôle essentiel, tel que celui de gestionnaire desprincipaux ouvrages de dérivation et des réseaux, des mesures claires doivent être définies en matièrede cogestion et de cofinancement des opérations, de maintenance et de coûts de remplacement. Le

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 77

suivi et évaluation de la performance des projets est impératif pour éclairer la planification stratégiqueet la conception futures des projets ainsi que pour mesurer la contribution du développement del’hydraulique agricole à la réalisation des OMD.

Le partenariat avec les investisseurs privés devrait être basé sur l’intérêt général et les avantagescomparatifs. Le co-investissement avec le secteur privé peut se justifier lorsque les pouvoirs publicssont à même de prendre en charge une partie des coûts d’une initiative de petite envergure capable deprendre de l’extension sous l’impulsion du marché (la promotion, par exemple, d’une chaîned’approvisionnement de pompes à pédale). Dans certains cas, l’État peut partager avec le secteur privéles coûts d’investissements importants afin de stimuler la croissance (à titre d’exemple, la constructiondu barrage de Markala par le gouvernement malien et l’investissement privé dans l’aménagement desterres irriguées). Il n’y a pas encore d’exemple dans la région de processus de « construction-propriété-opération » ni de « construction-propriété-transfert » en hydraulique agricole où les pouvoirspublics ont utilisé les ressources d’investissement et les compétences de gestion d’entrepreneurs privéspour mettre en œuvre un projet d’intérêt public, mais des exemples au Maroc et en l’Egypte enindiquent la possibilité.

Les pouvoirs publics ont des responsabilités particulières à l’égard des régions dépourvues deressources . Dans les régions arides et semi-arides, les possibilités d’investissement dans l’hydrauliqueagricole sont limitées. Même si, à plus long terme, les stratégies de subsistance des ménages sontsusceptibles de privilégier l’exode, là où des technologies d’hydraulique agricole économiquementviables et financièrement soutenables sont disponibles, l’investissement public dans la promotion depratiques durables d’utilisation de la terre et de l’eau peut être justifié pour optimiser l’utilisation deressources rares, comme c’est le cas du système tassa au Niger, qui est basé sur des pratiques localeset qui acquiert de plus en plus d’ampleur (Dixon :70). Prouver la viabilité et la reproductibilité de telssystèmes demande une adaptation minutieuse et qui demande du temps. Le secteur public a un rôle àjouer dans la mise au point de technologies et la création de modèles reproductibles, mais leurdéveloppement à grande échelle dépend du marché qui fournit la technologie et des agriculteurs quitrouvent l’investissement rentable. Lorsqu’il est possible de démontrer que ces technologies à faiblesintrants sont viables techniquement et économiquement et rentables pour les agriculteurs dans lecontexte des systèmes d’exploitation locaux, les pouvoirs publics peuvent trouver des moyens derenforcer l’investissement à travers le marché, en faisant de la sensibilisation et en créant une massecritique de demande, tout en encourageant le développement de chaînes d’approvisionnement privéessoutenables à travers des accords de partenariat. Il est également possible de trouver un créneau pourdes investissements spécifiques orientés vers le marché, pour l’irrigation à petite échelle par exemple.

5.5 Options d’investissement dans l’hydraulique agricole

Dernières estimations régionales du potentiel d’investissement dans l’hydraulique agricole

Les projections d’extension de l’agriculture irriguée varient largement. Sur la base d’un examen desplans d’extension de l’irrigation, du potentiel d’irrigation et de la croissance de la demande, la FAO aestimé que l’augmentation des terres irriguées sera lente en Afrique subsaharienne (0,9 % par an), soitune extension de 2 millions d’ha à l’horizon 2030 ou 75.000 ha par an (FAO 2003a :137). Ce quitranche avec la recommandation de la Commission pour l’Afrique de doubler les surfaces irriguéesd’ici à 2015. Une récente simulation (Tableau 5.4) en montre certaines répercussions : 4,2 millionsd’ha supplémentaires en supposant que les surfaces consacrées au riz irrigué passeront de 1,5 milliond’ha actuellement à 4,4 millions en 2015 et que celles du blé irrigué augmenteront de 0,8 million d’haà 2,2 millions (de Fraiture 2005:15,16). La simulation fait l’hypothèse que les principaux bassinssusceptibles d’expansion se trouvent dans la Corne de l’Afrique, au Niger, à Madagascar et autour de

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 78

la côte sud-africaine tandis que les bassins du Limpopo et de l’Orange déjà bien aménagés ferontl’objet d’assez peu d’aménagements.1

Le programme CAADP du NEPAD sur la gestion des terres et de l’eau (voir 4.1 ci-dessus) a étérécemment révisé afin d’inviter à investir dans une meilleure gestion de l’eau sur 15,9 millions d’had’ici à 2030, dont 6,6 millions seront consacré à une extension de l’irrigation et de la régulation del’eau dans les zones humides et fonds de vallées, 2,1 millions à la réhabilitation de systèmes à grandeéchelle et 7,2 millions à des investissements dans la récolte de l’eau et la gestion in situ des eaux depluie (Tableau 5.5). Cela entraîne un taux de croissance des surfaces où l’eau est régulée (horsréhabilitation, récolte de l’eau et gestion in situ des eaux de pluie) d’à peu près 260.000 ha par an, plusde trois fois le taux actuel de croissance (NEPAD 2005b: 21). Le NEPAD, avec l’assistance de la FAOest en train de procéder à une réévaluation du potentiel national réel de croissance des surfacesaménagées en élaborant des programmes nationaux d’investissement à moyen terme et réexaminerales objectifs initiaux en partant de cette base.

Tableau 5.4: Simulation de l’extension des surfaces irriguées en Afrique subsaharienne 2000 – 2025 sur labase des recommandations de la Commission pour l’Afrique (milliers d’ha)

Surfaces irriguées20002

Surfaces irriguées2025

Accroissement enhectares

Accroissement enpourcentage

Sénégal 130 320 190 146%Côte Afrique orientale 230 460 230 100%Volta 240 520 280 117%Zambèze 250 510 260 104%Limpopo 270 300 30 11%Orange 390 420 30 8%Corne de l’Afrique 460 900 440 96%Niger 640 1.200 560 87%Madagascar 940 1.500 560 60%Côte sud-africaine 950 1.450 500 53%Total ASS 6.200 10.400 4.200 68%Source : de Fraiture 2005:16

Tableau 5.5 : Programme CAADP d’investissement en hydraulique agricole d’ici à 2030

R é g i o n Domaine d investissement par type (1000 ha)Nouveaux

projetsd’irrigation

à grandeéchelle

Réhabilitationde projets

d’irrigation àgrandeéchelle

Nouveauxprojets

d’irrigationà petiteéchelle

Zoneshumides

et fonds devallées

intérieures

Récupération del’eau/conservationdes sols et de l’eau

Total

Soudano-sahélienne

208 1 200 516 729 1 684 4 337

Golfe deGuinée

68 110 350 1 061 2 109 3 698

Centrale 40 99 163 281 169 752Orientale 110 143 411 914 1 570 3 147Australe 208 485 533 443 1 566 3 235Iles 39 77 332 200 100 748TOTAL 673 2 114 2 305 3 628 7 198 15 917

(Source: BAD/FAO 2005)

1 La FAO a associé ses prévisions des surfaces récoltées sous irrigation et celles d’AQUASTAT (voit Tableau 5 en annexe)pour comparer les taux de croissance réels dans les surfaces récolées ayant fait l’objet d’une enquête entre 1994 et 2004, avecles taux prévus. Les surfaces récoltées sous irrigation ont augmenté de près de 1 million d’ha en 10 ans. FAO 2003a déclareun taux similaire entre 1998 et 2030.2 Les chiffres de ce tableau sont basés sur les prévisions de 2000, raison pour laquelle ils sont inférieurs à ceux de FAO2005b donnés ailleurs dans le rapport.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 79

Les investissements dépendront de la satisfaction des conditions préalables de viabilité économique etde soutenabilité. Les prévisions ci-dessus présentent de sérieuses limites et invitent à réexaminer lesprémisses. À titre d’exemple, la viabilité de l’aménagement de 1,4 million d’ha supplémentaires pourla production de blé irrigué (de Fraiture 2005:15,16) doit être minutieusement examinée à la lumièrede la faible économie de ce type de culture sous irrigation. Les cibles ne peuvent être réalistes ques’elles se fondent sur une évaluation réellement pragmatique des possibilités économiques et l’étenduedes possibilités de résolution des différentes contraintes institutionnelles.

Les stratégies d’investissement dans l’irrigation peuvent être adaptées à la demande locale etrégionale. Les niveaux de production des différents pays de la région sont si bas comparés auxmarchés mondiaux que les producteurs se verront toujours imposer les prix du marché sans jamaispouvoir les fixer. Cependant, à l’intérieur des groupes commerciaux sous-régionaux, il y a despossibilités d’accroître les échanges, y compris pour les produits de première nécessité et les prixlocaux de substitution des importations sont généralement plus élevés que les prix à l’exportation.Avec l’extension régulière des marchés locaux et urbains, cela peut ouvrir une possibilité d’accroîtrela production irriguée, à condition que les types d’investissements effectués cadrent avec la structurede la demande. Ainsi, l’irrigation à petite échelle et à faible coût ou les investissements dans la récoltede l’eau pourraient s’avérer économiques et profitables, même pour les produits de première nécessité,mais uniquement dans des poches de demande locale et sous-régionale où les prix sont suffisammentélevés. Il peut être également possible d’augmenter progressivement les rendements des infrastructuresd’irrigation existantes en améliorant la performance de la chaîne logistique, le stockage et latransformation ciblant des débouchés spécifiques (FAO 2005a).

5.6 Choix auxquels les pouvoirs publics sont confrontés au niveau national

Au niveau national, il existe beaucoup de contraintes au développement du potentiel physique etéconomique identifié. Ces contraintes sont généralement économiques (exemple : les projets identifiésne sont pas économiquement viables), financières (exemple : le coût d’investissement est trop élevépour les financements disponibles), institutionnelles (exemple : le modèle institutionnel a peu dechances d’assurer une bonne alimentation en eau ou ne sera pas soutenable financièrement etsocialement), environnementales (exemple : l’irrigation est viable mais le cadre réglementaire estincapable de maîtriser ses conséquences néfastes sur l’environnement), liées aux capacités (exemple :faiblesse des capacités locales en matière d’exécution efficace des projets), et liées à la pauvreté(exemple : les agriculteurs démunis sont incapables d’investir dans une technologie d’hydrauliqueagricole rentable pour améliorer leur productivité car ils manquent de ressources et sont peu enclins àprendre des risques). Ces nombreuses contraintes entrent en jeu à différents degrés au niveau dechaque pays.

Pour chaque situation nationale, il faut trouver des réponses institutionnelles et d’investissementpermettant d’exploiter le potentiel en dépit des contraintes. Il convient avant tout de faire des choixreflétant les priorités du développement et la capacité d’absorption de chaque pays. Les principesgénéraux qui peuvent guider les pouvoirs publics dans l’élaboration de stratégies d’hydrauliqueagricole ont été examinés ci-dessus (chapitre 5.4). Au niveau de chaque pays, adapter ces principesaux opportunités et contraintes spécifiques fait appel à un processus itératif laborieux. La liste ci-dessous décrit certains des défis à affronter dans certains pays. Elle n’illustre que la nature des défis :chaque pays est confronté à une vaste panoplie de difficultés très variées.

En Éthiopie, il y a un énorme potentiel physique de développement et la possibilité d’investirdans de grandes infrastructures tant pour de production que pour de régulation stabilisant lesdébits des cours d’eau. Cependant, le pays est très pauvre, manque de capitaux etd’institutions solides et des compromis entre les objectifs de développement sont inévitables.Le pays pourrait être amené à investir davantage, à moyen terme, dans les institutions et lagestion de l’eau, au fur et à mesure qu’il développe sa capacité d’absorption desinvestissements hydrauliques à grande échelle.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 80

Au Kenya, l’irrigation privée prend de l’ampleur mais avec de plus en plus d’effets néfastespour l’environnement dans un cadre réglementaire faible. Le pays devra retrouver un équilibreentre une politique de développement favorable au privé et la réglementation des principauxeffets sociaux et environnementaux.

Au Soudan, il existe de vastes zones d’irrigation à grande échelle peu performante. Le pays aadopté des mesures de suppression de l’appui public à l’irrigation à grande échelle mais celan’a pas amené les systèmes à être viables ou soutenables. Un compromis devra être trouvéentre le souhait du gouvernement de se retirer et la nécessité de poursuivre l’appui politique,institutionnel et financier tant que les systèmes ne sont pas autonomes.

Au Nigeria, le potentiel d’irrigation est estimé à plus de 2 millions d’ha dont seulement220.000 sont aménagés. Le gouvernement s’est battu pendant des années avec des problèmesinstitutionnels et économiques d’irrigation à grande échelle. Mais aujourd’hui il privilégiel’irrigation fadama à faible coût, détenue et gérée par les agriculteurs. Cependant, se posetoujours la question de savoir que faire des barrages existants et des périmètres irrigués àgrande échelle et de comment exploiter le potentiel apparent de développement d’uneirrigation d’envergure (FAO 2004b).

À Madagascar , les rendements du vaste secteur de l’irrigation traditionnelle ne se sont pasaméliorés en 40 ans et la démographie galopante entraîne une expansion de l’agriculture surde nouvelles terres, au détriment de l’environnement. Le pays doit trouver des moyens destimuler la croissance d’une agriculture durable tout en investissant dans la conservation àlong terme de ses écosystèmes uniques.

La Zambie dispose d’un bon potentiel physique d’investissement dans l’hydraulique agricolemais le coût de développement de l’irrigation formelle est élevé et nécessite une agricultureintensive pour être viable. Il y a peut-être moyen de réaliser la croissance économique et decréer des emplois en facilitant l’agriculture commerciale à grande échelle. Le gouvernementpeut aussi privilégier une stratégie de promotion d’un développement orienté vers le marchéd’une irrigation à faible coût des petites exploitations, qui a généralement un plus grandimpact sur la réduction de la pauvreté (Encadré 5.4).

Le Mali a, après 30 ans d’efforts, amélioré la viabilité du système de 60.000 ha géré parl’Office du Niger. Le gouvernement est aujourd’hui confronté à la question de savoir s’il fautaménager le reste du million d’ha initialement prévu. Une concession a été récemmentaccordée à une société privée pour l’aménagement de 25.000 ha supplémentaires (voirEncadré 5.3). Ceci pourrait démontrer la viabilité d’un modèle de développement alternatif àl’investissement public en faveur des petits exploitants. Cependant, les effets économiques,sur l’emploi et la réduction de la pauvreté des deux options, doivent être minutieusementcomparés.

Encadré 5.4 : Irrigation d’initiative personnelle dans l’agriculture dambo de la Zambie – créneau pourl’investissement favorable aux pauvres

La forme d’irrigation la plus commune en Zambie – couvrant une zone de 100.000 ha, soit deux fois la surfaceirriguée formelle – est le système dambo. Le jardinage dambo sur de petits lopins de terre contribuegrandement à la nutrition des ménages et à la réduction de la pauvreté tout en fournissant la plupart deslégumes vendus dans les villes et les communautés rurales. A l’échelle nationale, le potentiel total del’irrigation de type dambo est estimé à près de 80-85 % des possibilités d’irrigation du pays. L’accès auxmarchés constitue la principale contrainte à son développement. Le gouvernement pourrait contribuer àl’alléger par un train de mesures « non matérielles ». Des pratiques de gestion sont toutefois indispensablespour préserver les ressources naturelles et les principales fonctions hydrologiques tout en contribuant à laréduction de la pauvreté. Il convient, en particulier, de prendre en compte les impacts cumulatifs surl’environnement de nombreuses interventions à petite échelle ainsi que les conséquences du paludisme et autres

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 81

maladies hydriques sur la soutenabilité.

Source : Banque mondiale 2005c:109ff ; McCartney et al, 2004.

La capacité d’absorption et le potentiel de développement efficace diffèrent entre les pays

Le Plan d’action pour l’Afrique établi pour renforcer le partenariat en matière de développement envue de la réalisation des OMD (Banque mondiale 2005d) classe les pays en quatre catégories selontrois critères : (a) la performance économique mesurée par la croissance du PIB et les classements del’EPIN1, (b) les progrès de la réalisation des OMD, et (c) les perspectives d’une harmonisationeffective de l’action des partenaires au développement. Ces critères peuvent guider l’allocation definancements à l’hydraulique agricole aux pays qui ont une capacité d’absorption démontrable.Catégories des pays de la région :

Pays capables d’utiliser rapidement un supplément d’aide, pour une vaste panoplied’interventions – Burkina Faso, Ghana et Tanzanie. L’orientation des résultats est élevéedans ces pays. L’action des bailleurs de fonds y est bien coordonnée et tout supplément deressources peut être utilisé immédiatement de façon efficace. Le financement de l’hydrauliqueagricole peut être absorbé et des approches sectorielles et un appui budgétaire sont possibles.

Pays où le renforcement sélectif est possible – par exemple, Ethiopie, Mali et Nigeria.L’orientation des résultats est modérée dans ces pays. L’action des partenaires audéveloppement est partiellement coordonnée (autour d’un certain appui budgétaire et dequelques programmes sectoriels). Des ressources additionnelles peuvent être utilisées demanière sélective pour le renforcement de programmes sectoriels. Le financement duprogramme de gestion de l’hydraulique agricole est possible.

Etats fragiles où l’aide additionnelle est susceptible d’être concentrée sur desprogrammes ciblés – par exemple, Burundi, Tchad, République démocratique du Congo etSoudan. Il y a peu d’orientation des résultats dans ces pays. Les stratégies nationalesmanquent de priorités, les organismes d’aide pilotent l’effort d’assistance et la capacité demise en œuvre est faible. Le financement sélectif de projets d’hydraulique agricole estpossible.

Etats affectés par de récents conflits – par exemple, Libéria. La priorité dans ces pays estaccordée à l’arrêt des conflits et à leur prévention ainsi qu’à la création des rudiments d’unÉtat. L’investissement dans l’hydraulique agricole a peu de chances d’être faisable tant que lasituation reste instable.

Approches sectoriellesL’efficacité de développement des approches de projet antérieures a été limitée. Le financementpublic de l’hydraulique agricole s’est d’abord effectué à travers des projets individuels, le plus souventfinancés en partie par les bailleurs de fonds. L’efficacité du développement des approches de projetrésulte de problèmes de conception et de mise en œuvre mais aussi de la fragmentation et de laredondance qui leur sont inhérentes. Au niveau politique et institutionnel, les approches ont manquéd’une stratégie partagée et d’un établissement des priorités. Elles ont accordé une attention insuffisanteaux questions systémiques et au développement institutionnel structuré. Au niveau de la mise enœuvre, les projets ont souvent reflété un agenda inspiré par les bailleurs de fonds et leur méthoded’allocation des ressources et ont engendré des systèmes parallèles et des « projets impériaux » au lieude renforcer les capacités nationales. Les coûts de transaction des approches ont été élevés.Les approches sectorielles en général et agricoles en particulier, se veulent un moyen de coordinationet d’harmonisation des efforts au niveau du dialogue sur les politiques, des réformes institutionnelles

1 Evaluation de la politique et des institutions nationales

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 82

et des investissements efficients. Au cours des dernières années, un certain nombre de pays de la régionont entrepris d’élaborer des « approches sectorielles », passant progressivement d’approches projets àdes approches programmes au sein d’un cadre stratégique cohérent. Cette démarche a été renforcée parles accords de Paris sur l’efficacité de l’aide (voir 4.1 ci-dessus). Les approches sectorielles se fondentsur un partenariat entre le gouvernement, censé apporter le leadership et élaborer une stratégiesectorielle cohérente, les partenaires internationaux au développement, supposés aligner leur appuisur la stratégie conduite par le pays et, dans la mesure du possible, harmoniser leur appui à travers desaccords communs de financement et d’assistance technique, et d’autres intervenants incluant la sociétécivile et le secteur privé. Contrairement aux approches antérieures, les approches sectoriellesentendent privilégier non seulement le financement d’un programme d’investissement global maiségalement le dialogue sur les politiques et le changement ainsi que l’appui et la réforme desinstitutions nationales (FIDA 2005.) Les avantages de ces approches sont essentiellement un meilleurimpact sur le développement et la baisse des coûts de transaction. Au niveau de la stratégie, lesavantages devraient se traduire par une appropriation et un leadership du pays plus forts, un dialoguesur les politiques coordonné et ouvert et une allocation rationnelle des ressources basée sur lespriorités. Au niveau institutionnel, l’approche sectorielle devrait aider à renforcer les capacités, lessystèmes et institutions nationales. Concernant la mise en œuvre, l’extension des pratiques modèles etdes avantages à un secteur dans son ensemble devrait être plus facile, avec une obligation de rendrecompte étendue à l’ensemble du secteur, des pratiques fiduciaires finalement communes et desmesures de sauvegarde environnementales et de sociales. Une attention particulière devrait êtreapportée aux résultats et à la réduction de la redondance dans le rapportage et les transactions.Les approches sectorielles peuvent améliorer la planification stratégique, le développementinstitutionnel et le renforcement des capacités, et accroître la rentabilité de l’investissement public etde l’aide extérieure. L’expérience des approches sectorielles dans l’agriculture ou de l’eau de la régionest limitée, même si un certain nombre de pays les aient appliquées dans les secteurs de la santé et del’éducation (Zambie, Afrique du Sud, Ghana, Mozambique, Tanzanie, Ouganda, Éthiopie, BurkinaFaso). Elles sont capables d’aborder les problèmes spécifiques identifiés tout au long du présentrapport, en particulier la planification stratégique, le développement institutionnel et le renforcementdes capacités ainsi que la rentabilité de l’investissement public.

Chapitre 6 Leçons et recommandations pour un engagement dansl’hydraulique agricole

6.1 Hydraulique agricole, réduction de la pauvreté et conditions d’investissement

Leçon : Le développement de l’hydraulique agricole en Afrique subsaharienne peut contribuer demanière importante à la croissance des revenus agricoles, réduisant de ce fait la pauvreté et la faim.Ce processus ne peut toutefois réussir que si les investissements sont économiquement viables,rentables au niveau de la production agricole et soutenables. Ces conditions ne peuvent être réaliséesque lorsque l’eau est fournie dans un environnement économique qui propose aux paysans desmesures incitatives, des conditions physiques et des services d’appui leur permettant d’amener leursrendements à un niveau commercial et de commercialiser leur production de façon rentable.L’investissement dans le développement devra souvent être précédé par un investissement égalementsignificatif dans les institutions, y compris les organisations d’agriculteurs.

L’investissement dans l’hydraulique agricole ne pourra réduire la pauvreté et contribuer à lacroissance économique nationale que s’il est économiquement viable, rentable au niveau de laproduction et soutenable. Sans rentabilité de la production agricole, la réduction de la pauvreté desrevenus ne peut être réalisée et sans soutenabilité financière, sociale et environnementale, il ne peut yavoir ni viabilité économique ni rentabilité de la production.

N’offrir que l’irrigation ne suffit généralement pas à s’assurer que les rendements, la production et lesrevenus nets seront suffisants pour réaliser des réductions significatives de la pauvreté des revenus :l’approvisionnement en eau doit être fiable et fourni en tant que composant d’un paquet complet qui

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 83

permet aux agriculteurs d’optimiser leurs rendements et production et qui leur propose également desmesures incitatives pour ce faire.

Les investissements à des fins dites « sociales » ou « stratégiques » – par exemple, pour accroître laproduction nationale des denrées de base – ne pourront pas contribuer à la croissance s’ils ne sont paséconomiquement viables. Même si la subvention publique du coût des investissements dans lesinfrastructures d’irrigation destinées aux petites exploitations peut être justifiée, les services et/oul’O&M subventionnés se sont rarement révélés durables.

Recommandation : Les futures conceptions de projets et décisions d’investissements doivent êtrefondées exclusivement sur des considérations de viabilité économique, de rentabilité de la productionagricole et de soutenabilité. En plus de l’approvisionnement fiable de l’eau, elles doivent égalementveiller à ce que des mesures soient prises, si nécessaire avec l’appui du projet, pour permettre auxagriculteurs – à travers des mesures incitatives – de commercialiser leur production sur des marchésde plus en plus sophistiqués où la quantité et la qualité de la production sont cruciales pour maintenirla viabilité des prix au producteur.

La viabilité économique et une rentabilité durable de la production – basées sur une conceptionefficace du point de vue des coûts et des hypothèses réalistes de rendement, de production et de prix –doivent être les principales préoccupations dans les décisions d’investissements. La technologie et, parvoie de conséquence, les coûts doivent être adaptés aux perspectives de commercialisation des culturesproduites. Les conceptions de projets doivent tenir compte de l’environnement économique et prévoirtoutes les mesures nécessaires pour permettre aux agriculteurs de commercialiser leur production, enles y encourageant par des mesures incitatives. Cela pourrait inclure : (a) le fait de donner auxagriculteurs le pouvoir de s’engager sur les marchés d’intrants et d’extrants ; (b) la mise en place deservices d’appui responsables et rentables offrant une technologie et des compétences orientées vers lacommercialisation de la production ; (c) le financement de la production ; et (d) l’accès à un matérielde plantation de qualité. Là où le secteur public ne peut pas offrir ces services d’appui sur une basecommercialement orientée durable, il faut que les programmes d’investissements prévoient en faveurdes agriculteurs des dispositifs alternatifs à mettre en œuvre par le secteur privé. Il faut aussi éviter lesinvestissements non viables proposés pour des raisons soi -disant « sociales » ou « stratégiques » desinvestissements qui dépendent de subventions à long terme.

6.2 Possibilités d’investissements publics et privés additionnels

Possibilités d’investissements dans l’irrigation

Leçon : Il existe des possibilités de multiplier à peu près par cinq la surface irriguée – même si unepartie de cette expansion nécessitera la construction d’infrastructures de stockage supplémentaires. Ily a également des possibilités d’amélioration de la productivité des terres déjà sous irrigation ainsique de celles soumises à « d’autres formes de gestion de l’eau ». Les contraintes de ce développementsont principalement économiques – c’est-à-dire les coûts, la productivité et l’accès à des marchésrentables.

Théoriquement, les possibilités de développement additionnel de l’irrigation sont estimées à plus de 32millions d’hectares – Presque cinq fois la superficie actuellement aménagée. En général, ladisponibilité des ressources en eau n’est pas un obstacle : bien qu’un certain nombre de bassinsconnaissent déjà ou soient sur le point de connaître une pénurie d’eau, cela est souvent dû à unmanque d’infrastructures de stockage plutôt qu’à une réelle pénurie.

Il y a un potentiel pour la mise en œuvre de toutes les formes d’irrigation, depuis l’irrigationindividuelle jusqu’à l’irrigation à grande échelle. Dans certains cas, l’investissement dans l’irrigation àgrande échelle peut être le plus indiqué en raison des conditions physiques et des possibilitésd’économies d’échelle. Certains développements peuvent nécessiter la construction de nouvellesinstallations de stockage capables d’offrir des opportunités d’exploitation de synergies entre

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 84

l’irrigation et l’environnement (par exemple, en pourvoyant aux flux environnementaux) et entrel’irrigation et l’hydroélectricité.

En plus de nouveaux développements de l’irrigation, il est possible d’améliorer la productivité de 5millions d’ha actuellement irrigués et de remettre en production 2 millions d’ha de terres aménagéespour l’irrigation mais actuellement inexploitées. Pour réaliser ce potentiel – que l’on retrouve dans lessystèmes à grande, moyenne et petite échelle – il faut un mélange d’interventions telles que desréformes institutionnelles, des améliorations des ouvrages physiques et de la gestion des ressources eneau et des cultures. Il est également possible d’améliorer le contrôle de l’eau sur 2 millions d’ha deterre soumis à « d’autres formes de gestion de l’eau » (en utilisant la terminologie AQUASTAT) –c’est-à-dire dans les zones humides et les fonds de vallées. Une partie de ces améliorations peutnécessiter la mise en œuvre de systèmes d’irrigation et de drainage, mais dans beaucoup de cas, lamise en valeur de petits périmètres par de petits exploitants individuels utilisant des techniques demicro-irrigation (par exemple, les pompes à pédales) sera plus appropriée.

Les principaux obstacles à la mise en valeur de ce potentiel sont d’ordre économique – c’est-à-dire lescoûts, l’accès à des marchés rentables et la productivité potentielle résultant de l’approvisionnement deces marchés. La moitié de la surface actuellement irriguée produisant actuellement des denrées depremière nécessité, de récentes analyses ont permis de considérer l’irrigation comme une optionpermettant de réduire les futures importations de vivres dans la région. Toutefois, au vu du coût moyendes investissements dans de récents projets bien conçus (6.000 dollars EU par hectare) et compte tenudes rendements habituellement obtenus par les petits exploitants, le retour économique et la rentabilitéseraient marginaux dans le cas de la riziculture et trop faibles pour justifier un investissement dans descultures comme le maïs et le blé. L’expansion de l’irrigation aux cultures vivrières nécessitera doncsoit une amélioration de la productivité permettant d’augmenter les recettes, soit une réductionsubstantielle des coûts. L’extension de l’irrigation aux cultures de rente se poursuivra tout en restantlimitée par les possibilités offertes par les marchés domestiques et d’exportation.

Recommandation : les institutions de financement, y compris les gouvernements, doivent tenir comptedes contraintes et n’accorder un financement qu’aux projets où l’eau est fournie dans le cadre d’unensemble de mesures favorisant la productivité et l’utilisation rentable de l’eau, et pour lesquels laviabilité économique, la rentabilité de la production et la soutenabilité peuvent être réalisées.

Des programmes de développement et d’investissement progressifs doivent être élaborés, (a) sur labase du potentiel physique et des marchés disponibles et de la possibilité de réalisation de niveaux deproductivité et de rentabilité justifiant le coût des investissements éventuels, (b) en identifiant lesendroits où la viabilité économique, la rentabilité de la production et la soutenabilité peuvent le mieuxêtre réalisées par les différentes options de développement (c’est-à-dire le développement de nouvellesinfrastructures ou le renforcement de systèmes d’irrigation à grande, moyenne et petite échelle ou demicro-irrigation existants ou autres alternatives), et (c) en indiquant les mesures nécessaires à lapromotion de la rentabilité. La priorité du programme doit déterminée en fonction de ses perspectivesde viabilité économique, de rentabilité de la production et de soutenabilité, et donc, de réduction de lapauvreté et de croissance. Plusieurs pays ont déjà élaboré des stratégies pour le secteur de l’irrigation.Celles-ci doivent être réexaminées et actualisées, si besoin est, pour tenir compte des impératifsindiqués ci-dessus.

Technologies alternatives de gestion de l’hydraulique agricole

Leçon : Il ya toute une gamme de techniques alternatives de gestion de l’hydraulique agricole.Quoiqu’elles doivent encore faire l’objet de recherches approfondies, ces alternatives promettent desrésultats utiles et des possibilités sans doute considérables d’extension et d’impact sur la productiondes denrées de première nécessité, sur le développement agricole et sur la réduction de la pauvreté.

Il existe une gamme très variée de techniques alternatives de gestion de l’hydraulique agricole,incluant la conservation et la gestion in situ des eaux de pluies, la récolte de l’eau et la gestion de l’eaupour les cultures en zones humides. Ce dernier type de technique présente un potentiel considérable –

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 85

en particulier, dans les zones humides et subhumides – de stabilisation ou d’amélioration durendement des cultures, avec probablement des implications significatives pour la sécurité alimentaire,le développement agricole et la réduction de la pauvreté. Toutefois, la recherche et l’évaluation de cestechniques ont omis d’analyser la faisabilité technique et la viabilité socioéconomique, et les tentativesde promotion de ces techniques ont souvent eu tendance à être guidée par la recherche ou des projets –et à être insoutenables – plutôt que par le marché.

Recommandation : La conception des projets de développement de l’hydraulique agricole doitconsidérer les perspectives d’investissement dans des techniques alternatives viables de gestion del’hydraulique agricole. Un investissement public futur devra être consenti pout tester les alternativesprometteuses, lever les obstacles à une utilisation plus large et basée sur le marché et promouvoir lesinvestissements.

Les stratégies de développement de l’hydraulique agricole doivent désormais considérer lacontribution potentiellement significative à une croissance agricole durable et à la réduction de lapauvreté, qui peut être apportée à travers l’investissement dans des alternatives à l’irrigationéconomiquement viables, rentables et soutenables. Elles doivent également préciser le niveau d’appuinécessaire pour tester les alternatives prometteuses et encourager une plus large utilisation orientéevers le marché.

6.3 Réformes institutionnelles

Leçon : Les réformes institutionnelles peuvent renforcer la performance du programme dedéveloppement de l’hydraulique agricole et sa contribution au développement agricole durable et à laréduction de la pauvreté. Toutefois, les réformes demandent du temps et des approches cohérentes dela part des gouvernements et des bailleurs de fonds. La décentralisation de la responsabilité dudéveloppement peut également renforcer leur impact. Les réformes doivent être accompagnées d’unrenforcement efficace des capacités afin d’outiller les acteurs pour leur permettre d’assumer denouveaux rôles et responsabilités.

Les réformes institutionnelles peuvent améliorer la performance des investissements dansl’hydraulique agricole, y compris dans l’irrigation à grande échelle. Dans les projets où les réformesinstitutionnelles ont pris effet, les rendements et les niveaux de production réalisés par les petitsexploitants sont comparables à ceux obtenus à la suite de la révolution verte en Asie, avec des effetsdu même ordre de grandeur sur la pauvreté et la faim.

Sans réformes, la rentabilité de la production agricole sera en général limitée et les effets dissuasifs surl’investissement persisteront. Les réformes des politiques macroéconomiques facilitent les affaires etencouragent l’investissement dans l’intensification agricole tandis que celles des politiques de sécuritéalimentaire créent des marchés de vivres efficaces et améliorent la capacité des pauvres à se nourrirpar eux-mêmes. Les secteurs privé et public ont un rôle à tenir : les gouvernements ont un rôlefondamental à jouer en créant un cadre institutionnel favorable et en investissant dans lesinfrastructures clés là où le secteur privé ne le fera pas ; le secteur privé aura un rôle clé à jouer dans lecadre des investissements (soit dans les PPP soit à leur propre initiative), de la transformation, de laprestation de services et de la participation aux liens de marché. La décentralisation peut promouvoirune bonne réactivité des prestataires face aux besoins et marchés locaux – même si la décentralisationest actuellement poursuivie de façon quelque peu irrégulière et qu’il faille améliorer les mécanismesd’évaluation et d’approbation des sous-projets.

Les réformes des cadres juridiques et organisationnels des projets d’irrigation à large échelle ontmontré les chemins du succès. Elles ont porté sur : l’amélioration de la propriété terrienne ; laréduction des effectifs des agences de gestion et le renforcement de la transparence et de l’obligationde rendre compte aux agriculteurs ; la participation des agriculteurs à la gestion ; et la sous-traitance àdes agences privées des activités non principales telles que l’entretien des systèmes. Certainestentatives de transfert de la responsabilité de gestion aux agriculteurs n’ont pas donné les résultatsescomptés. Toutefois, les cas qui ont réussis montrent quelles conditions s’avèrent nécessaires : une

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 86

approche de partenariat entre les concepteurs des politiques, l’agence d’irrigation et lesconsommateurs d’eau ; un cadre stratégique et juridique favorable ; la rentabilité et l’autonomiefinancière des systèmes ; le renforcement des organisations de consommateurs ; un plan et uncalendrier clairs, accompagnés d’une gestion prudente du processus, incluant l’appui post-remise dessystèmes ; et un engagement politique et managérial.

En général, il reste encore beaucoup à faire pour améliorer la participation des petits exploitantsagricoles. Des efforts louables ont été réalisés à cet égard pour promouvoir les associations deconsommateurs d’eau et encourager les petits exploitants agricoles recourant à l’irrigation à participerà la planification, à la conception et à la mise en œuvre de leurs systèmes d’irrigation, mais cela n’asouvent pas suffi à leur rendre à même de prendre des décisions avisées.

Les États ayant redéfini leurs fonctions essentielles, certaines lacunes ont été relevées dans les servicesd’appui agricole clés – en particulier, la recherche, la vulgarisation et le crédit agricoles. Si les petitsexploitants irrigants doivent réellement commercialiser leur production, la capacité des organisationsd’agriculteurs à obtenir des services efficaces et responsables et à faire des affaires sur les marchésd’intrants et d’extrants devra être renforcée.

Les réformes institutionnelles demandent du temps et de la patience, mais l’expérience a montréqu’une approche coordonnée des réformes, appliquée progressivement et avec cohérence par lesgouvernements et les bailleurs de fonds, peut réussir. La plupart de réformes doivent êtreaccompagnées de programmes de renforcement des capacités pour permettre aux acteurs de s’adapteret de tirer parti du changement. Certaines réformes peuvent être réalisables dans le contexte d’unprojet individuel ; pour d’autres types de réformes, une approche sectorielle peut s’avérer appropriée.

Recommandation : Un processus continu de réforme des politiques macroéconomiques, des cadresjuridiques et des organisations de gestion de l’hydraulique agricole doivent être soutenus, renforcéset accompagnés, le cas échéant, d’un renforcement des capacités pour créer un environnementfavorable à des investissements rentables, mobiliser les énergies du secteur privé et des agriculteurs etrendre responsables les prestataires de services. La décentralisation de la responsabilité dudéveloppement et l’autonomisation des agriculteurs, incluant le renforcement des capacités desorganisations d’agriculteurs, sont nécessaires pour améliorer la performance des investissements.Des améliorations de la gestion des terres et de l’eau sont nécessaires pour faciliter l’investissementprivé et autonomiser les agriculteurs. La réforme organisationnelle de l’irrigation à grande échelledoit être basée sur l’autonomie des consommateurs, la participation du secteur privé et le transfert dela gestion de l’irrigation. Ces réformes demandent du temps et des approches cohérentes de la partdes gouvernements et des bailleurs de fonds, et des approches sectorielles peuvent s’avérerappropriées.

Le processus continu de réformes des politiques macroéconomiques, des cadres juridiques et desorganisations de gestion de l’hydraulique agricole doit être soutenu, renforcé et, le cas échéant,accompagné d’un renforcement des capacités afin de créer un environnement favorable à desinvestissements rentables. Les points particuliers liés aux réformes institutionnelles comprennent entreautres :

Achever les réformes des politiques macroéconomiques et de sécurité alimentaire pourpromouvoir les investissements rentables et les emplois dans le secteur de l’hydrauliqueagricole et encourager une plus grande participation du secteur privé à travers des politiquesfavorisant les entreprises et des partenariats public-privé.

Dans la conception des projets, accorder une attention systématique aux questions de gestiondes terres et de l’eau et de propriété terrienne.

Appuyer le développement décentralisé via le renforcement des capacités des autoritéslocales, des agences décentralisées et des groupements d’agriculteurs.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 87

Développer des approches cohérentes et soutenues de la réforme organisationnelle du secteurde l’irrigation à grande échelle, notamment les pratiques modèles relatives à l’engagementdes consommateurs, à la participation du secteur privé et au transfert de la gestion del’irrigation.

Donner aux organisations d’agriculteurs les moyens de fonctionner dans les économieslibéralisées tout en s’assurant que les prestataires de services sont responsables et répondentà leurs besoins et que les organisations sont capables de participer à la conception, la mise enœuvre et la gestion des projets et d’être compétitives sur les marchés.

Proposer des mesures incitatives pour amener tous les partenaires à changer.

La conception des programmes de réforme institutionnelle doit reconnaître que du temps et unengagement soutenu sont nécessaires. Tous les partenaires impliqués dans le secteur doivent travaillerà l’élaboration d’un programme conjoint harmonisé afin d’aligner le programme d’appui sur lesprogrammes et institutions nationaux et d’investir aussi dans le renforcement des capacités.

6.4 Concevoir et mettre en œuvre de meilleurs projets d’investissements

Cibler les pauvres et les femmes

Leçon : La conception des projets d’investissements dans le secteur de l’hydraulique agricole doittenir compte de toutes les couches sociales de la communauté en s’assurant que toutes tirent profit deleurs avantages mutuels. Prendre exclusivement pour cible la couche socioéconomique la plusdémunie n’est pas forcément efficace en matière de réduction de la pauvreté – même si viserspécifiquement les femmes peut l’être. De même, cibler les zones agro-écologiques très sèches n’estpas forcément « favorable aux pauvres ».

L’expérience montre que viser exclusivement « les plus pauvres des pauvres » n’est pas forcément lemoyen le plus efficace de réduire la pauvreté en milieu rural. Puisque la grande majorité de lapopulation rurale de la région vit avec moins d’un dollar par jour (et est donc classée comme la « pluspauvre » en termes de réalisation des ODM), une approche plus intégrée pourrait mener à de meilleursrésultats. De cette façon, toutes les couches sociales de la communauté – y compris les plus pauvres –peuvent tirer mutuellement parti des investissements.

Il est par conséquent essentiel pour la conception de projets favorables au pauvres de comprendre leprofil socioéconomique du groupe cible, notamment comment les gens gagnent leur vie, quelles sontleurs difficultés, comment ils interagissent sur le plan socioéconomique et comment la gestion del’hydraulique agricole, en tant que facteur de production agricole, peut leur permettre d’améliorer leurexistence. En outre, étant donné que plus de 50 % des agriculteurs et de la main-d’œuvre agricole sontdes femmes, orienter spécifiquement l’appui en faveur des femmes et encourager leur participationaux structures de gestion peut renforcer la productivité, la rentabilité et donc la réduction de lapauvreté.

Cibler les zones agro-écologiques arides et semi-arides n’est pas forcément favorable aux pauvres. Eneffet, que ce soit en termes de densité de la population, d’incidence de la pauvreté, de potentielagricole ou de moyens permettant aux ménages d’accroître leurs revenus agricoles, les possibilités deréduction de la pauvreté et de la faim se trouvent essentiellement dans les zones à fort potentiel, enparticulier dans les zones humides et subhumides.

Recommandation : Les études et conceptions de projets doivent être orientées de manière à accroîtreles perspectives de toutes les couches sociales de la communauté, y compris les femmes, de tirer profitdes investissements à leur avantage mutuel, sans marginalisation de la couche la plus démunie. Il fautéviter de cibler les zones à faible potentiel agricole, à moins que des possibilités de développementclaires, viables et liées au marché ne s’offrent.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 88

Des études des systèmes socioéconomiques et de production doivent être réalisées pour permettre decomprendre le profil de la population cible et sa dynamique intracommunautaire et exploiter cetteinformation dans l’intérêt mutuel de tous les membres de la communauté, y compris les femmes. Desprécautions particulières doivent être prises pour s’assurer que l’investissement prend en compte lerôle des femmes dans le système de production et n’exclut ou ne marginalise pas davantage la couchesociale la plus démunie. Il faut aussi s’assurer que l’investissement sera « favorable aux pauvres » encherchant à maximiser la rentabilité de la production agricole, l’emploi et les revenus et en mettant surpied des mécanismes pour autonomiser les plus pauvres, notamment les femmes, et améliorer leuraccès à la terre, à l’eau et aux services. Les investissements doivent généralement cibler les zonessubhumides et humides, sauf là où la terre, l’eau et les marchés s’associent favorablement pourgarantir la viabilité et la soutenabilité dans les zones plus sèches.

Mettre en œuvre et gérer les investissements publics

Leçon : Les mécanismes institutionnels d’élaboration, de mise en œuvre et de gestion des projets sontplus efficaces lorsqu’ils reflètent les avantages comparatifs du secteur public, des agriculteurs, desONG et du secteur privé. La soutenabilité est mieux assurée en impliquant les agriculteurs tout aulong du processus et en confiant les systèmes aux organisations d’agriculteurs une fois achevés. Dansbeaucoup de cas, il serait plus efficace d’obtenir les services de mise en œuvre auprès du secteurprivé/ONG que de créer des institutions publiques à cette fin, même là où les capacités du secteurprivé/ONG locaux sont insuffisantes.

Des insuffisances dans les capacités institutionnelles du secteur public ont réduit la qualité de lapréparation, de la mise en œuvre et de la gestion des projets. L’appui insuffisant apporté au processusde supervision par les gouvernements et les bailleurs de fonds a également été à la base de la pauvrequalité des projets. L’expérience des mécanismes institutionnels d’élaboration et de gestion des projetsa montré que l’implication des agriculteurs permet d’améliorer la conception et de réduire les coûts, etque les projets les plus rentables et les plus durables sont ceux où les agriculteurs sont capables deprendre la relève de l’O&M une fois le projet mis en place. Les prestataires de services privés/ONGpeuvent également jouer un rôle efficace dans le développement de l’hydraulique agricole, surtoutparce qu’ils peuvent plus être tenus responsables de leurs services que les prestataires de servicespublics, même s’ils ont besoin d’une supervision efficace. Le choix est fondamentalementpragmatique : quelle organisation – publique, non gouvernementale ou privée – peut offrir le service leplus efficient et le plus responsable ?

Recommandation : La gestion des systèmes par les organisations d’agriculteurs devrait être lapremière option et il faut se mettre d’accord sur des mécanismes clairs en cas de gestion conjointe.Les mécanismes de prestation des services et la supervision de ceux-ci doivent être basés sur lesforces respectives des secteurs public et privé, des ONG et des agriculteurs. Les gouvernements et lesbailleurs de fonds doivent améliorer le processus de supervision.

Il faut impliquer les agriculteurs et leurs organisations depuis le début de la concept ion d’un projet. Entous les cas, la gestion des projets achevés par les organisations d’agriculteurs doit être la premièreoption et il faut des mécanismes clairs pour la gestion conjointe et le cofinancement de l’exploitation,de la maintenance et des remplacements si tâches dépassent la capacité des agriculteurs comme lagestion des ouvrages de dérivation et des réseaux. Il faudra renforcer et autonomiser les organisationsd’agriculteurs pour leur permettre de participer à la conception, la mise en œuvre et la gestion desprojets. Là où les ONG ou le secteur privé est sollicité pour offrir des services, des termes de référencedoivent clairement indiquer les caractéristiques des « livrables » et la responsabilité y afférente, ainsique les stratégies de sortie. La supervision doit veiller à ce que les activités restent concentrées sur lesobjectifs. Les gouvernements et les bailleurs de fonds doivent appuyer la mise en œuvre des projets eny consacrant assez de temps et de ressources techniques et être assez souples pour s’adapter à lalumière de l’expérience vécue.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 89

Suivi et évaluation

Leçon : Le processus de suivi et évaluation de la performance des projets a été négligé par le passé etdoit être amélioré à l’avenir pour que de l’information puisse être communiquée aux acteurs chargésde la planification stratégique et de l’élaboration futures des projets, et pour que la contribution dudéveloppement de l’hydraulique agricole à la réalisation des ODM puisse être mesurée.

Pour mesurer la contribution des investissements dans l’hydraulique agricole à la réduction de lapauvreté et à l’atteinte des ODM, il faut une bonne information de suivi, non seulement des intrants etdes extrants, mais aussi de résultats tels que l’évolution des revenus et de l’emploi et, à plus longterme, les effets sur la pauvreté, la faim, la santé et l’environnement. Par le passé, le suivi-évaluation aété l’une des faiblesses les plus courantes relevée dans la conception et la mise en œuvre des projets. Ilfaut aussi une plus grande responsabilité de la part de toutes les parties concernées, notamment desagences publiques et de financement, pour lesquelles un suivi -évaluation objectif est un outil essentiel.

Recommandation : Le suivi et évaluation en tant qu’outil de gestion destiné aux agriculteurs, auxagences d’exécution et aux partenaires financiers doit désormais être prioritaire.

Le suivi-évaluation, non seulement des objectifs physiques et financiers, mais aussi de l’évolution desrevenus et de l’emploi ainsi que des effets sur la pauvreté, la faim, la santé et l’environnement doitdésormais être prioritaire. Les systèmes doivent être conçus de telle sorte qu’ils puissent servir d’outilde gestion pour les agriculteurs, les agences d’exécution et de supervision des projets.

Impact sur l’environnement et la santé

Leçon : Le développement de l’hydraulique agricole peut avoir des effets à la fois négatifs et positifssur l’environnement et la santé. Le défi consiste à élaborer, mettre en œuvre et gérer des projets detelle sorte que les avantages socioéconomiques soient maximisés tandis que les effets négatifs sontminimisés.

Les effets négatifs du développement de l’hydraulique agricole sur l’environnement et la santé sontlargement documentés. Une mauvaise évaluation des effets potentiels et une absence de mesuresd’atténuation dans la conception, ainsi que les faiblesses relevées au niveau des institutions publiqueschargées de réglementer les aspects environnementaux et sanitaires, peuvent conduire à une réductionde la productivité et même à un échec.

Le développement de l’hydraulique agricole peut également avoir un impact positif surl’environnement et la santé en améliorant les flux environnementaux, en rendant plus durables leshabitats naturels, en améliorant la nutrition, l’accès aux installations sanitaires et aux services de santé,et en offrant de l’eau pour les besoins domestiques et l’élevage. La gestion de l’hydraulique agricolepeut permettre d’atténuer l’impact du VIH/SIDA grâce à l’augmentation des revenus et à unemeilleure nutrition.

Recommandation : La conception des projets doit non seulement évaluer et proposer des mesuresd’atténuation des effets potentiellement négatifs, mais aussi chercher à exploiter les effetspotentiellement positifs. Elle doit également, en cas de besoin, prévoir le renforcement des institutionspubliques responsables.

La conception des projets doit non seulement évaluer et proposer des mesures d’atténuation des effetspotentiellement négatifs, mais aussi tirer parti des opportunités offertes par les synergies et effetspositifs potentiels. Si cela est fait, les projets peuvent améliorer leurs perspectives en termes deproductivité et de soutenabilité et peuvent également contribuer à la réalisation des ODM en matièrede réduction de la mortalité infantile et maternelle, de lutte contre le VIH/SIDA, le paludisme et lesautres maladies, et de protection de l’environnement (notamment l’eau et l’assainissement). Les coûtset avantages économiques de l’impact sur l’environnement doivent être entièrement pris en comptedans le cadre des évaluations et des décisions d’investissement.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 90

Etant donné que dans beaucoup de cas, l’efficacité des mesures d’atténuation ou des mesures visant àexploiter les effets positifs risque d’être limitée par des faiblesses institutionnelles, il faut apporter unappui à la réforme et renforcer les institutions, éventuellement à travers des approches sectorielles. Lesagences publiques doivent également être outillées pour gérer l’impact du développement dessystèmes d’irrigation privés sur l’environnement. Il faut des stratégies spécifiques pour pallierl’attrition du personnel et des responsables d’organisations d’agriculteurs souffrant d’infections liéesau VIH/SIDA.

6.5 Vision stratégique

Leçon : Il manque une vision stratégique du développement de l’hydraulique agricole. Enconséquence, d’énormes possibilités de développement agricole et de réduction de la pauvreté sontratées. Il y a cependant d’énormes possibilités pour un développement poussé de l’hydrauliqueagricole, mais aussi d’énormes contraintes, dont quelques-unes seulement peuvent être surmontées.

Même si, dans le passé, le développement de l’hydraulique agricole a pu être, sans doute à juste titre,jugé inefficace – en termes de consommation et d’économie de l’eau – un certain nombre de projetsrécents ont montré que grâce à une identification, une conception et une évaluation minutieuses, ce nedevrait pas toujours être le cas. Les stratégies et programmes du secteur de l’eau sont cependantgénéralement neutres – ou mêmes négatifs – en ce qui concerne le développement et l’utilisation del’hydraulique agricole. Ils accordent typiquement une plus grande priorité à d’autres typesd’utilisation. La plupart des stratégies de réduction de la pauvreté sont fondées sur le développementagricole, mais le développement de l’hydraulique agricole a généralement une moindre priorité dansles DSRP – en raison probablement de la perception négative mentionnée ci-dessus. Ledéveloppement de l’hydraulique agricole a donc souffert d’une absence de vision stratégique.Résultat : d’énormes possibilités de réalisation des objectifs de développement agricole et de réductionde la pauvreté sont restées inexploitées.

Comme déjà mentionné, il existe d’importantes contraintes économiques et institutionnelles dontcertaines peuvent être résolues au niveau des programmes et projets et d’autres au niveau sectoriel oudans un cadre macroéconomique plus large. D’autres contraintes sont difficiles voire impossibles àsurmonter et offrent un contexte où la vision stratégique doit être formulée. Elles comprennent : lapauvreté des termes de l’échange, l’accès limité et coûteux aux marchés mondiaux, la dispersion de lapopulation et l’insuffisance du potentiel agricole de beaucoup de zones, en particulier arides et semi-arides.

Recommandation : Les pays d’Afrique subsaharienne doivent désormais formuler des stratégiesnationales pour le sous-secteur de l’hydraulique agricole. Ces stratégies doivent reconnaître sonimportance dans le développement agricole et la réduction de la pauvreté mais aussi les réalitéséconomiques ici mentionnées. Elles doivent aussi tenir compte de la nécessité de mettre en valeur lesressources en eau dans un cadre plus large favorisant le développement agricole grâce à des projetsd’investissements rentables et à une production orientée vers le marché. Les stratégies dedéveloppement de l’hydraulique agricole doivent être intégrées dans la stratégie de gestion plus largedes ressources en eau et dans la stratégie de réduction de la pauvreté. Les stratégies doivent êtreétayées par une analyse du rôle de l’investissement public et privé, des moyens d’encouragerl’investissement privé et des options d’investissement public reprises dans un plan d’investissement.Elles doivent, si possible, être mise en œuvre à travers des approches sectorielles.

Les pays d’Afrique subsaharienne doivent désormais formuler une vision stratégique du secteur del’hydraulique agricole. Cette vision doit être intégrée dans une stratégie nationale de développementde l’hydraulique agricole en tant que composante clé des politiques nationales des secteurs del’agriculture et de l’eau. Le profil de développement de l’hydraulique agricole doit également êtrerehaussé dans le cadre des stratégies des secteurs de l’eau et de l’agriculture. Les stratégies dedéveloppement de l’hydraulique agricole doivent être liées aux stratégies du secteur de l’eau etfondées sur des approches de gestion intégrée des ressources en eau, respectant et soutenant les

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 91

accords transfrontaliers de partage des ressources en eau, avec des investissements optimisés àl’échelle des bassins hydrologiques. Les approches de gestion intégrée des ressources en eau doiventtrouver un équilibre entre la gestion de l’offre et de la demande, tout en prévoyant de nouveauxinvestissements dans l’offre là où ils sont justifiés sur le plan économique, social et environnemental.Elles doivent également veiller à ce que l’allocation et la gestion de l’eau tiennent compte des besoinsdes pauvres et prévoir une plus grande participation des petits exploitants agricoles à la planificationsectorielle et des bassins hydrographiques. Par ailleurs, elles doivent aussi occuper une place de choixdans les stratégies de réduction de la pauvreté énoncées dans les DSRP afin d’attirer l’attention desgouvernements et des potentiels bailleurs de fonds.

Les stratégies de développement de l’hydraulique agricole doivent être étayées par une analysecomparative des différentes options d’investissement, incluant :

L’investissement dans le renforcement de la productivité et de la rentabilité des systèmes existants.

L’expansion ou la construction de systèmes d’irrigation à grande, moyenne et petite échelleliés à des marchés rentables, conformément aux pratiques modèles de stockage, et basés surdes modèles institutionnels viables.

L’extension des techniques de micro-irrigation confirmées et des alternatives à faible coût àl’irrigation, telles que la récolte de l’eau et la gestion in situ des eaux de pluies, à conditionqu’il soit prouvé qu’elles soient techniquement et financièrement faisables et abordables pourles agriculteurs sur une base durable.

L’investissement dans la recherche sur la gestion de l’hydraulique agricole, aussi bien avancéeaux niveaux national et régional et que de base au niveau régional. Un accent particulier doitêtre mis sur trois composantes : (a) la technologie et l’économie de pratique alternatives degestion de l’eau ; (b) l’amélioration de la culture et de la gestion des cultures des denrées debase ; et (c) le suivi et évaluation de la performance des investissements dans l’hydrauliqueagricole au niveau régional afin d’offrir une base à une extension rapide des succès qui voientle jour.

L’investissement dans les réformes institutionnelles, y compris celles relatives audéveloppement décentralisé, et dans tout le renforcement des capacités requis.

Tous ces investissements doivent, si possible, être réalisés en adoptant des approches sectorielles pours’assurer de la cohérence d’approche entre les gouvernements et les bailleurs de fonds.

Là où les politiques et stratégies existantes reflètent la vision stratégique présentée ci-dessus, ellesdoivent servir de base à de nouveaux programmes d’investissements. Là où ce n’est pas le cas, ilfaudra les réviser et élaborer de nouveaux programmes d’investissement. Si une assistance extérieureest nécessaire pour la formulation des nouvelles stratégies et programmes d’investissement, il faudra larechercher auprès des agences internationales de développement.

SR Texte principal 24 juillet 06 7/2/07 16:45 92