INTERPRÈTE DE CONFÉRENCE · En 4ème j’ai débuté l’anglais et en seconde, l’italien. Par...

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I N T E R P R È T E D E C O N F É R E N C E 2010-2011 l Champagne-Ardenne onisep.fr

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INTERPRÈTE

DE

CONFÉRENCE

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«Je suis interprète en cabine française 3 jours par semaine et rattachée à la Direction générale Interprétation le reste du temps, où mon rôle est alors de contribuer à l’organisation des réunions, des rencontres et des conférences. J’éprouve une grande satisfaction à exercer ce métier et suis heureuse de pouvoir partager mon expérience. J’espère ainsi encourager les jeunes qui hésiteraient à se lancer dans cette profession pour de mauvaises raisons.»

Une vocation précoce«Vers 10/11 ans, mes parents ont accueilli à la maison la correspondante de ma grande sœur. Voir ma sœur traduire à table pour toute la famille, ce fut une révélation !»

«L’allemand était ma 1ère langue au collège, et dès la 6ème je suis partie en séjour chez une correspondante, puis tous les étés qui ont suivis. En 4ème j’ai débuté l’anglais et en seconde, l’italien. Par la suite, j’ai pu apprendre l’espagnol dans le cadre de mon travail.»

«J’ai préparé un bac littéraire à Charleville-Mézières au lycée Madame de Sévigné. Mes parents, infirmiers tous les deux, ne connaissaient rien à l’interprétation. Mon père a donc téléphoné à un professionnel de la Commission européenne pour savoir quelles études je devais suivre. La proximité des Ardennes a incité ce dernier à me conseiller l’Ecole des Interprètes Internationaux (Faculté de traduction et d’interprétation – EII) de l’université de Mons en Belgique. Une école, à l’époque en 4 ans, qui délivre aujourd’hui un Master (bac+5), accessible directement après le bac sur tests d’aptitudes. J’ai suivi les deux cursus, traduction et interprétation, conjointement pour augmenter le potentiel des débouchés mais cela m’a demandé un investissement éprouvant.»

«A 22 ans, j’ai commencé avec une première réunion sur les retraites ! Les débuts sont très intenses, je rentrais de ma journée épuisée et me couchais parfois à 19h pour pouvoir récupérer. Ensuite, j’ai été embauchée par l’équivalent européen de la FNSEA, le COPA-COGEGA. Cette expérience m’a permis d’être spécialisée dans l’agriculture, même si je dois être à même de traiter tous les sujets.»

«Parmi mes collègues, je croise tous les profils. Certains comme moi, ont eu ce projet très tôt. Pour d’autres, l’idée leur est venue après un premier cursus d’études supérieures. Quoi qu’il en soit, la plupart des écoles recrute à bac + 3, après une formation généraliste. C’est plutôt bien de pouvoir mûrir son projet et d’acquérir, outre une bonne culture générale, une compétence spécifique. Les profils scientifiques ou juridiques sont par exemple très appréciés.»

Témoignage d’Anne-Laure

Interprète à la Commission

européenne à Bruxelles

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Des langues A, B ou C ?«La plupart du temps, un interprète traduit une langue étrangère dans sa langue maternelle qui est sa langue A. Quand il peut traduire vers une autre langue, celle-ci est alors sa langue B. Quand l’interprétation se fait ainsi, dans le double sens A et B, donc quand un retour est possible, on qualifie alors les interprètes de «retouristes». Passer un an dans le pays, suffit parfois à devenir «retouriste». Enfin, la ou les langue(s) que l’on traduit uniquement sont appelées langues C.»

Fonctionnaire ou libéral ?«Les interprètes peuvent devenir fonctionnaire d’un organisme européen, international ou travailler en libéral, être «free-lance». En free-lance, 3 langues peuvent suffire à condition d’avoir une langue B telle que l’anglais.»

«Il y a plus de souplesse à exercer en free lance. On peut varier plus facilement ses activités. Par exemple, travailler pour une institution et faire des traductions, combiner deux activités. J’ai même un ami qui est devenu interprète et chorégraphe !»

«Plusieurs centaines d’interprètes travaillent chaque jour pour les institutions européennes. Les concours sont accessibles dès l’obtention du diplôme mais quelques années d’expérience augmentent les chances d’être reçu.»

«EMCI, c’est le projet de coopération de la Commission européenne avec 18 écoles d’interprétation qui délivrent le Master d’interprète. Cette coopération instaure un socle commun d’apprentissage. Les enseignements sont visés, adaptés, pour favoriser la réussite des concours institutionnels.»

«Outre le concours, qui permet de devenir fonctionnaire, la Commission délivre une accréditation interinstitutionnelle pour être reconnu en free lance et pouvoir travailler dans les institutions européennes (Commission européenne ; Parlement européen ; Cour de justice…). Un domicile à Bruxelles peut favoriser le recrutement.»

Traduction consécutive ou simultanée ?«L’Union européenne a 23 langues officielles et les interprètes font beaucoup de «simultanée». C’est-à-dire que l’on traduit en cabine, en même temps que l’orateur s’exprime, contrairement à «la consécutive» qui implique de prendre des notes pendant un discours et de rapporter les propos dans un second temps. « Dans le cas de l’interprétation simultanée, on travaille principalement d’une langue C (passive) vers la langue A (maternelle). En tant que fonctionnaire de la Commission européenne, il est donc important de disposer de plusieurs langues passives.»

Quelles langues étudier ?«Pour ma part, je travaille de mes langues C anglais, allemand, espagnol, italien vers ma langue A le français.»

«Le retour vers l’anglais est indispensable pour exercer en free lance en France, ou alors il faut avoir un retour vers l’allemand par exemple.»

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«Il est désolant de constater le recul de la langue allemande dans le choix des collégiens français car c’est un réel atout, non seulement dans l’interprétation mais pour travailler dans le commerce ou le tourisme. En outre, les interprètes qui travaillent en allemand sont réputés être parmi les meilleurs car cette langue structure la pensée et oblige à une gymnastique – par exemple anticiper le verbe à la fin ! – trop périlleuse si l’on n’a pas une bonne connaissance du sujet traité.»

«Une langue rare, pourquoi pas ? A condition d’y avoir associé l’anglais et une autre langue européenne. » Avec l’élargissement de l’Union, les besoins se font sentir pour les langues d’Europe centrale. Les pays émergeants (Brésil, Russie, Inde, Chine) sont aussi une bonne piste. Mais on manque toujours d’interprètes pour l’allemand, l’arabe, l’italien, le néerlandais… et l’anglais !

Avant tout : la maîtrise de la langue maternelle«Au lycée, un professeur m’avait dit que mon projet était irréalisable parce que je n’étais pas bilingue. Aussi curieux que cela puisse paraître, le bilinguisme n’est pas toujours un avantage. Il est plus rare de maîtriser ses deux langues maternelles aussi bien qu’une seule. Surtout le français, qui est une langue formelle, difficile.»

«L’excellente connaissance de sa langue maternelle est le pré-requis n°1. Pour un lycéen, plus que le niveau en langues vivantes (qui doit tout de même être prometteur mais qui pourra être amélioré), la capacité à paraphraser, l’aisance de l’expression orale (rapide, claire et précise), un vocabulaire riche seront des atouts essentiels.»

Gestion du stress… «C’est un métier qui requiert de nombreuses qualités. Il faut être très rapide, avoir un profil plutôt audacieux, une assurance suffisante pour se lancer (on trouvera les plus introvertis, les plus réfléchis du côté des traducteurs). Il est nécessaire d’aimer le contact, la communi-cation, être capable de surmonter le tract pour affronter des situations où l’on s’expose, com-me se retrouver devant 300 personnes pour l’interprétation «consécutive» d’un ministre !»

«Voir l’orateur de la cabine où l’on se trouve est nécessaire au travail d’interprétation simul-tanée. Parler en même temps qu’on écoute, ce n’est pas naturel. L’interprète de conférence développe une capacité au départ inconnue pour le cerveau et qui reste éprouvante. Il faut donc faire preuve d’une bonne capacité de concentration, mais aussi d’une bonne forme physique. Si on est fatigué, les réflexes seront moins rapides.»

… insatiable curiosité…«Il est indispensable de disposer d’une très vaste culture générale pour être à même de traiter une grande variété de sujets – de la centrale de Fukushima à des problèmes écono-miques ou agricoles. Cela exige une grande curiosité intellectuelle, d’avoir toujours envie d’apprendre sur quelque chose. Même s’il arrive que l’on devienne plus expert d’un sujet par affinité et pour l’avoir traité de nombreuses fois, la spécialisation des interprètes est très relative. Il faut donc parfois s’astreindre à aller vers des sujets qui à priori ne nous inspirent pas, et surtout avoir des goûts très éclectiques. Dans mon entourage professionnel, tout le monde a toujours entendu parler de toute l’actualité, qu’elle soit culturelle, politique, techno-logique…»

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«Plus que le mot juste (ce à quoi le traducteur va s’attacher), l’interprète transmet un message en respectant le contexte culturel et le ton de l’orateur. Avoir voyagé dans le pays est indispensable pour saisir les propos de l’orateur dans leur dimension socioculturelle, comprendre son horizon, les allusions, les nuances.»

«Travailler dans les affaires étrangères implique de connaître les capitales des pays bien sûr mais également les personnalités qui sont mentionnées et leur rôle.»

… et rigueur professionnelle«Il est important d’avoir le sens des responsabilités : face à une réunion d’experts, être capables de comprendre des termes techniques ou lors de réunions au sommet, ne pas commettre d’impairs qui pourraient avoir des conséquences importantes. D’ailleurs, la profession a un code éthique qui nous oblige à garder le secret des documents lus comme des délibérations. Cette confidentialité fait également appel à une certaine droiture. A noter, la tenue correcte vaut aussi en terme vestimentaire !»

«En conclusion, c’est un métier qui réclame de la passion pour être bien exercé car la fatigue et les contraintes sont fortes. Sans compter qu’une voix blasée, ça s’entend !»

Infos bulles n° 4 -

Juin 2010

LES

LANGUES RARES

La majorité des écoles spécialisées (ESIT, ISIT, ITI-RI...) recrute à bac+3. Quelques universités proposent également des Masters, mais aussi dès après le bac, des doubles cursus qui associent une discipline (le droit, l’économie, l’histoire...) à une langue, ou encore des licences «internationales» comme à Paris 7, Paris 12 ou Strasbourg.A l’Université de Reims Champagne-Ardenne (URCA), vous pourrez suivre une Licence langues littératures et civilisations étrangères (LLCE) allemand, anglais ou espagnol ou une Licence langues étrangères appliquées (LEA) allemand/anglais ; anglais/allemand ; anglais/espagnol. Citons également le Master langues et cultures étrangères et le Master interculturalité franco-allemande.

Zoom sur les formations

Pour en savoir plus : Interpréter pour l’Europe

ONISEP - Librairie17, boulevard de la Paix - 51100

03 26 40 32 [email protected]