Institutions Judiciaires Cours Complet

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Cours d'institutions judiciaires. Par Hilt Patrice. I/ Introduction. A toutes les époques et dans toutes les sociétés, il y a eu des juges chargés de rendre la justice. La fonction juridictionnelle (rendre la justice) découle de toute vie en société. La vie en société crée des conflits, on ne peut donc pas se passer de cette fonction. Il faut quelqu'un qui a le pouvoir de trancher ces conflits. Le juge est considéré comme une source de stabilité & de paix sociale. • Mais qu'est-ce que la justice ? Il existe différents sens, selon la manière dont on l'envisage. Il existe trois grands sens : Premier sens : la justice est une vertu (sens large) → sentiment d'équité que l'on porte au fond de soi-même. Cette notion est ici très subjective : son contenu varie d'une personne à l'autre. Deuxième sens : sens beaucoup plus technique. La justice est une fonction. A savoir, la fonction de juger. Le juge tranche, il « rend la justice ». Cette justice est considérée comme une prérogative souveraine qui appartient à l'état. Seul l'état peut trancher. Cette fonction de rendre la justice est capitale parce que toute vie en société repose sur un postulat : « nul ne peut se faire justice à soi-même. » Troisième sens : la justice désigne l'ensemble des institutions au moyen desquels la fonction de juger est exercée. Ces institutions englobent d'une part les organes de justice (les tribunaux et les cours). Les juridictions sont l'ensemble des tribunaux & des cours, mais aussi d'hommes qu'on appelle des gens de justice, c'est-à-dire des magistrats et des auxiliaires de justice (sous cette expression il faut ranger : l'avocat, le greffier etc...) La justice est comme un immense appareil administratif. L'ensemble de ces institutions chargées de rendre la justice est traditionnellement appelé « institutions judiciaires ». Sont donc désignées les institutions qui rendent la justice lorsqu'un litige oppose des individus entre eux, mais également un particulier à une collectivité publique. Mais cette appellation (institutions judiciaires) n'est pas correcte. Il faut savoir que l'organisation juridique Française repose sur un principe : le double ordre de juridiction. Selon ce principe, les tribunaux qui sont chargés de trancher des litiges opposant des particuliers, ne sont pas les mêmes que ceux chargés de trancher un litige entre un particulier et une collectivité. Les premiers (ceux chargés de trancher entre particuliers) sont les juridictions de l'ordre judiciaire. Les seconds forment l'ordre administratif. Or, dans le cas de ce cours intitulé « institutions

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Cours d'institutions judiciaires.

Par Hilt Patrice.

I/ Introduction.

A toutes les époques et dans toutes les sociétés, il y a eu des juges chargés de rendre la justice. La fonction juridictionnelle (rendre la justice) découle de toute vie en société. La vie en société crée des conflits, on ne peut donc pas se passer de cette fonction. Il faut quelqu'un qui a le pouvoir de trancher ces conflits. Le juge est considéré comme une source de stabilité & de paix sociale.• Mais qu'est-ce que la justice ? Il existe différents sens, selon la manière dont on l'envisage. Il existe trois grands sens :

→ Premier sens : la justice est une vertu (sens large) → sentiment d'équité que l'on porte au fond de soi-même. Cette notion est ici très subjective : son contenu varie d'une personne à l'autre.

→ Deuxième sens : sens beaucoup plus technique. La justice est une fonction. A savoir, la fonction de juger. Le juge tranche, il « rend la justice ». Cette justice est considérée comme une prérogative souveraine qui appartient à l'état. Seul l'état peut trancher. Cette fonction de rendre la justice est capitale parce que toute vie en société repose sur un postulat : « nul ne peut se faire justice à soi-même. »

→ Troisième sens : la justice désigne l'ensemble des institutions au moyen desquels la fonction de juger est exercée. Ces institutions englobent d'une part les organes de justice (les tribunaux et les cours). Les juridictions sont l'ensemble des tribunaux & des cours, mais aussi d'hommes qu'on appelle des gens de justice, c'est-à-dire des magistrats et des auxiliaires de justice (sous cette expression il faut ranger : l'avocat, le greffier etc...) La justice est comme un immense appareil administratif. L'ensemble de ces institutions chargées de rendre la justice est traditionnellement appelé « institutions judiciaires ». Sont donc désignées les institutions qui rendent la justice lorsqu'un litige oppose des individus entre eux, mais également un particulier à une collectivité publique. Mais cette appellation (institutions judiciaires) n'est pas correcte. Il faut savoir que l'organisation juridique Française repose sur un principe : le double ordre de juridiction. Selon ce principe, les tribunaux qui sont chargés de trancher des litiges opposant des particuliers, ne sont pas les mêmes que ceux chargés de trancher un litige entre un particulier et une collectivité. Les premiers (ceux chargés de trancher entre particuliers) sont les juridictions de l'ordre judiciaire. Les seconds forment l'ordre administratif. Or, dans le cas de ce cours intitulé « institutions judiciaires » nous n'allons pas limiter notre étude aux juridictions de l'ordre judiciaire, mais aussi à celles de l'ordre administratif. Il faudrait mieux parler d'un cours d'institutions juridictionnelles (qui regroupe les deux ordres).L'objet de ce cours est double : étudier l'ensemble des juridictions (1er ordre ou 2nd) mais également s'intéresser au personnel qui compose ces juridictions.

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I/ L'évolution historique de la justice.

L'objectif est de comprendre comment était rendue la justice autrefois, pour la comprendre aujourd'hui. Quatre périodes se distinguent :• Avant 1789• De 1789 à 1810• De 1810 à 1958• & enfin de 1958 à nos jours.

• Avant 1789 : une justice complexe et inégalitaire.a) Une organisation complexe.

Dans l'Ancien Régime, il existait un grand nombre de juridictions. Ces juridictions étaient si nombreuses qu'on avait souvent du mal à savoir quel juge était compétent et quelle juridiction était apte à trancher le litige. Parmi ces juridictions, on trouvait tout d'abord un 1er bloc : les juridictions de droit commun. Ce 1er bloc était lui-même subdivisé entre les juridictions royales, les juridictions des seigneurs et enfin les juridictions de l'Église que l'on appelle juridictions canoniques. Canonique renvoie aux règles applicables à l'Église. A coté de ces grandes juridictions, plein de juridictions spécialisées : les prévôtés (correspond à nos actuels tribunaux de commerce), mais aussi les tribunaux d'amirauté (correspondent aux tribunaux maritimes) ou encore la cour des aides (qui avait une compétence en matière fiscale) et qui correspondrait aujourd'hui au tribunal administratif. L'ensemble de ces juridictions sont dirigées par deux grandes juridictions : le Parlement (autrefois, c'était une juridiction supérieure) → il existait un Parlement dans chaque province. Et la deuxième juridiction était le conseil des partis qui siégeait directement aux côtés du roi. Bref, cette organisation était extrêmement complexe et cet enchevêtrement engendrait de nombreux conflits de compétences, ce qui rendait la question du saisissement du juge épineuse.

b) Un fonctionnement inégalitaire.

Le fonctionnement de la justice présentait 3 graves inconvénients.

→ Premier inconvénient : La lenteur des procès. A l'époque, il était possible de faire 6 fois appel (aujourd'hui une fois seulement). Le délai moyen pour qu'un jugement soit rendu était de 18 ans !

→ Deuxième inconvénient : l'existence de privilèges de juridictions. Certaines catégories de justiciables bénéficiaient de privilèges de juridictions. Ces personnes n'étaient jamais traduites devant un tribunal : elles étaient immunisées. (Le clergé, la noblesse...)

→ Troisième inconvénient : le coût de la justice. Chaque parti payait le juge. Ce paiement se faisait en argent, mais pour les justiciables les plus modestes, le paiement se faisait également en nature. On donnait au juge des aliments récoltés et des épices. Le juge était beaucoup plus enclin à

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rendre une décision favorable à celui qui donnait le plus au juge. Ce qui était profondément inégalitaire puisque les plus riches étaient toujours disculpés. La réforme de la justice de l'Ancien Régime était un souhait unanime et avec l'arrivée des Révolutionnaires au pouvoir, la justice a été considérablement changée.

• De 1789 à 1810 : La mise en place d'une nouvelle organisation juridictionnelle.

Dans un premier temps, le nouveau système fit table rase du système juridictionnel de l'Ancien Régime. Cela a été réalisé la nuit du 4 Août 1789 : les Révolutionnaires mirent fin à toutes les juridictions de l'Ancien Régime et ont aboli le principe selon lequel les partis d'un procès devaient payer le juge. Toutes les juridictions de l'Ancien Régime ont été effacées sauf une : les prévôtés. Elles ont été maintenues en 1789. Ces prévôtés se sont transformés en tribunaux de commerce : ce sont les plus anciennes juridictions. Dans un 2nd temps, la révolution posa les bases de la justice moderne. Ces bases ont été posées progressivement par l'Assemblée nationale constituante, puis le Consulat et enfin l'Empire (sous Napoléon). Le nouveau calendrier, le calendrier révolutionnaire a été adopté en 1792 pour s'opposer à l'Église. L'an 1 correspond à 1792. Ce calendrier était composé de 12 mois, qui comportaient d'autres noms : Brumaire, Pluviôse, Ventôse, Germinal, Thermidor etc. Chaque mois était composé de 30 jours qui étaient divisés en 3 semaines de 10 jours. Ce calendrier a été aboli en 1806 par Napoléon, qui est revenu au calendrier Grégorien.

a) L'œuvre de l'Assemblée nationale constituante.

L'apport de l'Assemblée nationale constituante a été considérable : ils ont voté une loi très importante, la loi des 16 & 24 Août 1790. Une des plus grandes lois Françaises. Tout d'abord, à travers cette loi, l'Assemblée nationale constituante a posé de nombreux principes fondamentaux dont certains régissent toujours encore les institutions d'aujourd'hui : le principe de gratuité de justice, la séparation des pouvoirs, le double degré de juridiction (différent du double ordre de juridiction !). Après avoir posé ces principes, l'Assemblée nationale constituante a crée de nouvelles juridictions dont certaines subsistent toujours aujourd'hui. Parmi ces nouvelles juridictions on retrouve les tribunaux de district (qui sont devenus les tribunaux de grande instance). Ou encore les tribunaux de paix (devenus tribunaux d'instance). On peut formuler deux observations ici : tout d'abord de législateur de 1790 a accordé une place importante à l'arbitrage. L'arbitrage est mode très spécial de règlement des conflits. Aucune loi ne nous impose d'aller devant un tribunal lors d'un conflit, nous pouvons choisir nous-même une personne pour régler le litige qui nous oppose.Mais aussi, la loi des 16 et 24 Août a posé la règle de l'élection des juges : ils ne sont plus nommés, mais élus. Cette loi présente d'incontestables mérites : grâce à elle on a pu mettre fin à de graves injustices. Les révolutionnaires n'ont cependant pas achevé totalement cette loi : d'une part, un bon nombre de juridictions n'ont pas été crées par la loi du 16 et 24 Août 1790. Il manque notamment la création d'une juridiction de cassation. Or, sans cette juridiction, l'appareil judiciaire est incapable de fonctionner. Les révolutionnaires se sont rendus compte de leur erreur quelques temps plus tard et grâce à la loi du 1er Décembre 1790, ils ont pu rattraper leur

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oubli puisque cet oubli est venu créer le tribunal de cassation (devenue cour de cassation). D'autre part, la loi des 16 et 24 Août 1790 n'avait pas prévu de juridiction supérieure pour juger l'affaire une seconde fois (lors d'un appel). Les révolutionnaires de 1790 avaient imaginé un système très curieux ; l'appel circulaire → il s'agissait de juger l'affaire une seconde fois, mais non pas par une juridiction supérieure, mais par une juridiction de même type, simplement située dans une autre ville. L'instance était la même, donc l'appel circulaire était souvent inutile.

b) L'œuvre du consulat (1799 – 1804).

Sous le consulat, les innovations introduites sont nombreuses. Il existe 4 innovations importantes : tout d'abord la constitution du 22 Frimaire de l'an VIII (1800) grâce à l'article 52, crée une nouvelle juridiction appelée le conseil d'État. C'est la clé de voûte de toute notre justice administrative.Ensuite, la loi du 28, Pluviôse de l'an VIII (1800) créa les conseils de préfecture, qui vont devenir, beaucoup plus tard (en 1953) les tribunaux administratifs chargés du contentieux administratif à l'échelon local.Par ailleurs, le consulat institua également des juridictions hiérarchiquement supérieures qui prirent le nom de tribunaux d'appel (loi du 27 Ventôse an VIII). Il supprima ainsi le système de l'appel circulaire qui fut instauré par l'Assemblée nationale constituante. Enfin, avec le consulat, le système de l'élection des juges commença à être revu : il fut notamment décidé que les juges de certains tribunaux seraient dorénavant nommés par le premier consul.

• L'œuvre de l'Empire (1804 – 1815).

Sous l'Empire, la première innovation est que les tribunaux d'appel sont rebaptisés cours d'appel. De même, le tribunal de cassation a été rebaptisé cour de cassation. La loi du 18 Mars 1806 a crée une nouvelle juridiction qui manquait jusqu'à présent, à savoir le conseil de prud'hommes. Ces juridictions existent toujours aujourd'hui et ce sont elles qui jugent les litiges entre salariés et travailleurs. Mais sous l'empire fut également votée une loi très importante, la loi du 21 Avril 1810 relative à l'organisation judiciaire.

• De 1810 à 1958 : la stabilité des institutions juridictionnelles.

La loi du 21 Avril 1810 va marquer une stabilité. En effet, de de 1810 à 1958, aucune nouveauté ne fut apportée aux institutions. Elles restèrent quasi les mêmes. La période fut cependant marquée par deux tendances : la création de nombreuses juridictions spécialisées (le contraire des juridictions de droit commun). Un exemple de juridictions spécialisées crées pendant cette période sont les tribunaux paritaires des beaux ruraux, les juridictions pour mineurs (tribunal pour enfants ou cour d'assises pour mineurs) ou encore les juridictions militaires (tribunaux des forces armées).La deuxième tendance est l'apparition, pendant cette période, d'une véritable justice administrative. La loi du 24 Mai 1872 a reconnu au conseil d'état ayant le pouvoir de rendre des décisions de justice dans un litige qui oppose un particulier à l'administration. Initialement, le conseil d'état se contentait de conseiller l'état, il n'avait aucun pouvoir juridictionnel. A partir du 24 Mai 1872, tous les litiges de l'ordre administratif entre un particulier et

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un service administratif ont été tranchés par ce conseil.

• A partir de 1958 : la rénovation des institutions juridictionnelles.

Dès la fin de la 1ère Guerre Mondiale, on a constaté que les anciennes juridictions ne permettaient plus de répondre aux besoins de la société. On s'est aperçu que les citoyens Français saisissaient de plus en plus de magistrats. Comme les litiges se multipliaient, très vite les juridictions ont été encombrées (ou engorgées). Ceci signifie que les juridictions sont tellement sollicitées qu'il est impossible de rendre des décisions dans un délai raisonnable. Il fallait des changements. Ces changements ont été opérées en 1958.

a) La réforme opérée en 1958.

Une réorganisation massive du système juridictionnel Français a eu lieu en 1958. La constitution du 4 Octobre 1958 contient elle-même (et c'est une grande première) des règlementations sur certains points juridiques. Dans la constitution figure la création et les règles de fonctionnement du conseil supérieur de la magistrature, la création des règles de fonctionnement du conseil constitutionnel (nouvelle juridiction créée en 1958) ou encore la création de la haute cour de justice, qui est une juridiction politique qui a pour seule compétence de juger le président de la république s'il a commis des manquements graves envers la loi durant son mandat.L'organisation juridictionnelle fut surtout modifiée par plusieurs ordonnances (différent d'une loi !) qui ont été rendues le 22 Décembre 1958 et qui sont venues modifier le système. Les principales réformes opérées par ces ordonnances sont :• Le législateur (c'est celui qui fait les lois, donc le Parlement composée de l'Assemblée nationale et du sénat) de 1958 n'a pas bouleversé la structure d'ensemble que nous avait légué la révolution Française, mais il a souhaité changer la terminologie (ou les appellations) retenues avant 1958. C'est donc un changement essentiellement sémantique. Ainsi, les tribunaux de district ont été rebaptisés tribunaux de grande instance (instance = conflit). De même, les tribunaux de paix, qui avaient été crées avant 1958 ont été rebaptisés tribunaux d'instance.• Mais aussi la fameuse carte judiciaire. Les juridictions avant 1958 n'étaient pas nombreuses. Si bien qu'il fallait parfois faire plusieurs centaines de kilomètres pour saisir un juge. On a donc fait coïncider la géographie du département avec le nombre de juridictions présentes dans ce département : plus un département avait de population, plus il avait de juridictions. En Alsace, par exemple, nous possédons beaucoup de juridictions, car le département est relativement peuplé. Cette carte a été maintenue jusqu'en 2007. En 2007, le ministre de la justice en fonction, Rachida Dati a décidé de créer une nouvelle carte puisque la population avait changé depuis 1958. Elle a été remaniée. En Alsace, des juridictions ont été supprimées puisque nous avons perdu de la population. Le législateur de 1958 a également sensiblement renforcé le rôle des cours d'appel, car elles sont devenues les seules juridictions du 2nd degré. Schématiquement, depuis 1958 si un 1er juge a rendu une décision qui vous est défavorable, nous pouvons demander un deuxième jugement d'affaire, qui sera jugé par la cour d'appel.• Enfin, dernière innovation, on s'est rendu compte qu'avant 1958, les

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magistrats n'étaient pas bien formés. Ils ont donc crée une école consacrée exclusivement à la formation des magistrats qui s'appelle aujourd'hui l'École Nationale de Magistrature ( ou ENM qui siège à Bordeaux).

b) Les réformes ultérieures.

Des réformes ont été opérées après 1958. Tout d'abord, la loi du 31 Décembre 1971 (modifiée le 31 Décembre 1990) a profondément réorganisé la profession d'avocat. Deuxième réforme : la loi du 31 Décembre 1987 a crée une nouvelle juridiction appelée les cours administratives d'appel. Troisième exemple : la loi du 10 Juillet 1990 a modernisé une ancienne institution appelée autrefois assistance judiciaire. Elle permet à un justiciable ayant peu de moyens d'obtenir une aide financière versée par l'état. L'assistance a été rebaptisée aide juridictionnelle. Les justiciables n'ayant pas les revenus nécessaires pour faire valoir leurs droits peuvent, dans certains cas, obtenir une aide de l'état.Troisième exemple : pendant cette période postérieure à 1958, de nouveaux codes de procédure ont été crées, applicables aux juridictions Françaises. La loi du 5 Juillet 1972 a crée un nouveau code appelé code de l'organisation judiciaire (COJ) contient toutes les règles de fonctionnement et de compétences des juridictions de l'ordre judiciaire. Une ordonnance du 4 Mai 2000 a crée un nouveau code appelé code de justice administrative qui contient toutes les règles de fonctionnement et de compétences de l'ordre administratif. Toutes ces réformes ont toujours eu pour souci principal d'éviter autant que possible l'encombrement des juridictions Françaises. Aujourd'hui, pourtant, nous avons toujours encore des problèmes d'engorgement des juridictions. Il faut souligner, pour terminer que le 18 Janvier 2008, le ministre de la justice de l'époque (Rachida Dati) a installé une commission de réflexion sur la répartition des contentieux : commission composée d'universitaires (une vingtaine). Elle a chargé cette commission de réfléchir sur les règles à adopter dans les prochaines années pour permettre un meilleur fonctionnement des juridictions Françaises. Cette commission a rendu un rapport le 30 Juin 2008 qui contient 65 propositions de réforme dans le but de moderniser les juridictions Françaises. Lorsqu'un ministre demande de rendre des propositions, dans 90% des cas ces propositions se transforment en lois. Et pour cause, 12 des 65 propositions sont déjà devenues des lois.

II/ Le service public Français de la justice.

Rendre la justice est un service public qui est fondamental dans le fonctionnement d'une démocratie, car rendre la justice permet de préserver l'équilibre social. Il appartient à l'État et à lui seul de l'organiser. Le budget annuel de la justice en France ne témoigne pourtant pas de l'importance qu'il faudrait consacrer au service public de la justice. En 2011, le budget total de l'État est de 286 Milliards d'Euros. Parmi ces 286 Milliards, 2,52% seulement sont affectés à la justice, ce qui représente concrètement environ 7 Milliards d'Euros. La justice Française est pauvre. La justice dépend d'un ministère : le ministère de la justice, ou encore dans le jargon judiciaire, la chancellerie, situé place Vendôme. Ce ministère est dirigé par un ministre appelé le garde des Sceaux. Quelques chiffres témoignant de l'importance de ce service public : ce service emploie environ 72 000 personnes dont 8000 magistrats,

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10 400 greffiers ou encore 1200 personnes de l'administration centrale (personnes nécessaires pour faire fonctionner la justice). Ce service public est composé de 35 cours d'appel, 158 tribunaux de grande instance, 288 tribunaux d'instance, 271 conseils de prud'hommes, 156 tribunaux pour enfants. Le service de la justice rend environ 3 million de décisions par an, en moyenne. Ce service est gouverné par de grands principes et est structuré par de grandes règles.

• Les principes qui gouvernent le service public Français de la justice.

• Le principe d'indépendance• Le principe d'égalité• Le principe de gratuité• Le principe de permanence• Le principe de liberté.

A) Le principe d'indépendance.

Le principe d'indépendance comprend 2 volets : d'une part, la justice doit être indépendante & d'autre part, le service public Français de la justice doit être indépendant face à l'exécutif.

Dire que la justice est indépendante face au pouvoir législatif signifie qu'un juge ne peut pas s'immiscer dans la fonction législative. Il ne peut pas s'opposer à l'application des lois. Même si le juge n'est pas en accord avec un texte, il doit l'appliquer. Un juge refusant d'appliquer la loi commet ce qu'on appelle un déni de justice.D'autre part, d'après l'article 5 du Code Civil, le juge ne peut pas rendre des arrêts de règlement (un arrêt de règlement est une décision de justice par laquelle un juge pose une règle applicable à tous, autrement dit, il édicte un règlement qui acquiert une portée générale). Seul le législateur a le pouvoir de rendre ces arrêts de règlement. Ces arrêts restes néanmoins rares.Dire que la justice est indépendante signifierait que le législateur ne peut pas juger. Il ne peut pas s'immiscer dans une affaire pendante (c'est-à-dire en cours de jugement). Cependant, le législateur a recours à quelques pratiques :• Les lois rétroactives : elles ont pour conséquence de faire renaître des droits qui n'existaient pas dans le passé. Voter une loi rétroactive est contraire au principe d'indépendance.• Les lois interprétatives : elles consistent à interpréter une loi antérieure.• Les lois de validation : lois qui tentent à valider un acte qui ne l'était pas initialement.

De plus, indépendance de la justice par rapport au pouvoir exécutif.→ Le juge ne peut pas s'ingérer dans le pouvoir exécutif→ Le juge administratif ne peut pas adresser des injonctions à l'administration. Il ne peut, en l'occurrence, pas forcer le ministre.Inversement, l'administration ne peut pas non plus faire ingérence dans le pouvoir judiciaire. Aucun ministre, préfet, maire ne peut donner un ordre à un juge.Il faut cependant préciser que lorsque l'on dit que le pouvoir exécutif ne peut donner aucun ordre, ce n'est valable que pour les magistrats du siège (donc les magistrats qui sont assis pendant une audience). Ceci ne

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s'applique pas pour le procureur ou tout autre magistrat faisant partie de la catégorie des magistrats debout.

B) Le principe d'égalité.

Toutes les personnes, depuis les lois du 16 & 24 Août 1790 ont vocation a être jugées de manière égale par les mêmes juridictions. Il n'y a plus de discrimination, comme c'était encore le cas dans l'Ancien Régime, avec les privilèges de juridictions.L'article 1er de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 dispose expressément que tous les Hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit. Ils doivent, par conséquent, être jugés par les mêmes tribunaux, au regard des mêmes règles de droit, tant de fond que de procédure, et ne doivent subir aucune discrimination en raison de leur couleur, leur race, leur religion, leur sexe ou encore leur condition sociale.Le principe d'égalité formule deux observations :• On a parfois présenté les juridictions d'exception (ou spécialisées) comme des atteintes à l'égalité. Le principe d'égalité condamne les discriminations judiciaires fondées sur des qualités inhérentes aux personnes. Pourtant, dans le cas des juridictions spécialisées, ne sont en réalité pas des juridictions de classes. Elles sont spécialisées car elles sont compétentes dans la nature du litige qui oppose des parties et non pas en raison de la classe sociale du plaideur.Exemple : Si un commerçant est jugé par un tribunal de commerce, ce n'est pas parce qu'il est commerçant, mais parce que la nature du litige appartient à un acte de commerce !Il existe néanmoins des dérogations à ce principe d'égalité. Ces dérogations concernent certaines personnes bien déterminées :- Les immunités diplomatiques : les diplomates échappent toujours à la justice française.- Mais aussi les immunités parlementaires : les parlementaires échappent en principe à la justice française. Mais la levée de leur immunité peut être décidée par l'assemblée à laquelle ils appartiennent. - Et les privilèges de juridiction du Président de la République.• Il subsiste néanmoins une inégalité. Tout procès entraîne des frais & tous les plaideurs n'ont pas la même capacité financière à assumer leur procès. Pour palier à cette inégalité économique, on créa l'aide juridictionnelle, destinée à aider les personnes ne pouvant se payer un procès. Néanmoins, l'aide juridictionnelle n'est offerte qu'aux foyers disposant d'un revenu inférieur à 1244€ nets par mois.

C) Le principe de gratuité.

La justice entraîne des coûts. Les coûts de fonctionnement (personnel & matériel) ne sont pas à la charge du justiciable, mais à la charge de l'État. C'est un principe posé par la loi des 16 & 24 Août 1790. En revanche, ce principe ne signifie pas pour autant que les plaideurs n'aient jamais rien à payer.

Les frais se répartissent en 3 grandes catégories :

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• Chaque avocat fixe librement ses honoraires. Ces honoraires restent à la charge des parties. D'après l'article 700 du code de procédure civile, le juge PEUT estimer que la partie perdante doive verser une partie des honoraires à la partie gagnante, mais ce n'est pas une obligation.• Une deuxième catégorie de frais existent : les émoluments. Ce sont les frais pour la rédaction des dossiers ainsi que des papiers. Les émoluments restent également à la charge de chaque partie, cependant ceux-ci restent les mêmes pour tous les avocats.• Et enfin, les frais divers : ce sont notamment les frais de déplacements, les indemnités dues aux témoins etc...

• Le principe de permanence.

L'article r711-1 du Code de l'organisation judiciaire, la justice Française est permanente. Pendant toute l'année, la justice reste active. Il est possible de saisir un juge les dimanches & jours fériés (juge d'astreinte). En cas d'urgence, c'est le juge des référés qui intervient dans l'heure qui suit.Par ailleurs, il est également possible de saisir un juge pendant la période estivale, puisqu'une permanence est toujours assurée. Pendant l'été, les juridictions tiennent des audiences en « service allégé ». Certaines juridictions ne siègent pas en permanence (ce sont des exceptions) : il est en par exemple ainsi des tribunaux paritaires des beaux ruraux et de la cour d'assises. Dans l'ordre administratif, les juridictions siègent par intermittence.

E) Le principe de liberté.

• Un aspect positif : le principe de liberté signifie que toute personne doit avoir accès à la justice. Le droit d'accès à un tribunal fait partie des droits de l'Homme.• Un aspect négatif : dans certains cas, les parties en conflit peuvent recourir à des accords amiables plutôt qu'à un juge. Dans les domaines dans lesquels les parties ont la libre disposition de leurs droits, le recours à un juge n'est jamais obligatoire. En effet, l'état propose ses juges aux justiciables mais ne les impose pas !Exemple : Un conflit de voisinage.A l'inverse, en matière familiale, il n'y a pas de libre disposition des droits. Lorsque nous avons accès à la libre disposition des droits, on conclut un accord amiable qui s'appelle une transaction (sorte de contrat). Cette transaction est définie à l'article 2044 du Code Civil comme un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître. La transaction est souvent utilisée en pratique. Il est possible de recourir à la transaction dans toutes les matières, sauf dans les matières qui appartiennent à l'ordre public (état des personnes, divorce...). Lorsqu'elle est conclue, la transaction met fin au litige, comme une décision de justice. En conséquence, toute action judiciaire ultérieure est irrecevable. En vertu de l'art. 2052 Code civil, la transaction a autorité de chose jugée en dernier ressort.Lorsque la transaction est conclue, elle mettra fin au litige et aura la même force qu'une décision rendue par un juge. Mais on peut également soumettre le litige à un arbitre : il faut pour cela signer une convention d'arbitrage. Si la convention d'arbitrage est signée avant le litige, on parle de clause

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compromissoire. La clause compromissoire n'est cependant valable qu'en matière commerciale. Elle est nulle en matière d'actes civils et d'actes mixtes, sauf s'ils sont conclus en raison d'une activité professionnelle quelle qu'elle soit, civile, commerciale, artisanale, libérale ou agricole ou en matière internationale. Dans le cas où la convention est signée pendant le litige, on parle de compromis. Pour juger une affaire par la convention d'arbitrage, il faut toujours désigner un nombre impair d'arbitres. En principe, ils doivent juger conformément au droit applicable. Par exception, les parties peuvent les en dispenser et leur confier la mission de statuer en équité. Ils ont alors la qualité d' « amiable compositeur ». Les arbitres rendent donc des sentences arbitrales. Ces sentences peuvent être contestées : le Code de Procédure Civil prévoit, dans l'article 1486, qu'une partie peut interjeter appel.

• Les règles qui structurent le service public de la justice.

A) La hiérarchie.

La hiérarchie découle du double ordre de juridiction et du double degré de juridiction.

a) Le double ordre de juridiction.

Il existe deux ordres de juridictions : la juridiction de l'ordre judiciaire & la juridiction de l'ordre administratif. La juridiction de l'ordre judiciaire est subdivisée en deux parties : d'une part l'ordre civil et d'autre part, l'ordre pénal.L'ordre civil comprend les juridictions compétentes pour trancher les litiges relatifs aux intérêts privés opposant des particuliers (civil, commercial, social).L'ordre pénal, quant à lui comprend les juridictions compétentes chargées de sanctionner les auteurs d'infractions pénales.

Mais pourquoi faut-il des juges différents ?

→ La dualité des ordres présente des avantages : c'est un système plus efficace, avec de meilleures décisions et surtout le fait que chaque litige est confié à un juge spécialisé et compétent.→ Malheureusement, cette dualité comprend aussi des désavantages : notamment les conflits de compétence.

b) Le double degré de juridiction.

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Les juridictions du premier degré (ou première instance) sont sous le contrôle des juridictions du second degré (ou de seconde instance). Les premiers juges saisis en cas de litige peuvent se tromper, ce principe du double degré permet d'éviter les erreurs judiciaires. Et pour cause : les juges du second degré ont en général beaucoup plus d'expérience. Ainsi, pour rejuger l'affaire une seconde fois, les juges de seconde instance traitent l'affaire comme si elle n'avait jamais été jugée. Mais pour pouvoir passer en seconde instance, le plaideur doit pour cela interjeter appel dans le mois qui suit la notification du résultat du juge. Dans certains cas exceptionnels, interjeter appel n'est pas possible ou il faut interjeter dans un délai plus bref qu'un mois.Cependant, un appel ne peut être interjeté que si la décision du juge de 1ère instance a été rendue en 1er ressort.Par exemple, le tribunal de grande instance, le tribunal correctionnel ou le tribunal de police statue toujours en 1er ressort. Par contre, le juge de proximité statue en 1er et dernier ressort (on ne peut alors pas interjeter appel).Le conseil de prud'hommes et le tribunal de commerce statuent en 1er et dernier ressort lorsque le montant du litige est inférieur à 4000€. Lorsqu'il est supérieur, il statue en 1er ressort. Cette barre des 4000€ se nomme le taux du ressort.

B) L'hétérogénéité.

La structure du service public est hétérogène.

a) La pluralité de juridictions.

Il existe des juridictions très diverses & variées. Généralement, les juridictions se classent selon 4 critères :• La classification des juridictions se fait en fonction de l'ordre (Ordre judiciaire ≠ Ordre Administratif ).• Mais aussi en fonction du degré (Juridictions du 1er degré & Juridictions du 2nd degré).• L'étendue de leur mission : il existe les juridictions du fond (qui jugent en fait & en droit) qui sont différentes des juridictions de cassation (qui jugent en droit).• Selon l'étendue de leur compétences : il existe les juridictions de droit commun (compétences « basiques ») & les juridictions spécialisées (compétences spéciales).

Cette multiplicité des juridictions pose la question de la compétence juridictionnelle. Le plaideur doit pouvoir déterminer la juridiction nécessaire. Pour la déterminer, le plaideur doit se poser deux questions essentielles :1st : « Quelle est la juridiction compétente pour juger la matière de mon litige ? »2nd : « Quelle est la juridiction compétente matériellement ? » (il s'agit ici d'une compétence territoriale du juge).

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1-a) La compétence d'attribution des juridictions.

La compétence matérielle d'attribution dépend de deux données objectives : la matière principale, la nature du litige (aspect qualitatif) et la valeur du litige (aspect quantitatif). • Le critère principal : En fonction de la nature du litige, le code obligera à choisir telle ou telle juridiction. Un conflit opposant un employeur à son salarié relèvera obligatoirement de la compétence du Conseil de Prud’hommes. On dira que la compétence matérielle du Conseil de Prud’hommes est de régler les conflits entre salariés et employeurs. Le code nous dit que les conflits qui peuvent naître dans l’application d’un contrat relèvent tout à la fois de la juridiction de proximité, du Tribunal d'Instance et du Tribunal de Grand Instance.• Le critère subsidiaire sera alors la valeur du litige. La loi fixe pour certaines juridictions un taux de compétence : un seuil en euros, en delà ou deçà duquel la juridiction est ou n’est plus la compétence ratione materiae. Lorsque dans un litige, (conformément à la loi du 26 Janvier 2005), la demande, le montant du contrat est comprise entre 0 et 4000 euros, elle devra être présentée à la juridiction de proximité, entre 4001 et 10000 euros au tribunal d'instance et si le montant du litige est supérieur ou égal à 10 001 euros, au Tribunal de Grande Instance. (compétence rationnée materiae)

En application de ces deux données objectives, les juridictions se classent en deux catégories bien distinctes :• Les juridictions spécialisées (encore appelées juridictions d'exception) dont la compétence est subordonnée à un texte de loi. En effet, leurs domaines de compétence sont limitativement énumérés par la loi.• Les juridictions de droit commun dont la compétence est générale. En effet, leur compétence est générale dans la mesure où ces juridictions peuvent traiter de tous les litiges qui ne sont pas expressément attribués à une autre juridiction.

1-b). La compétence territoriale des juridictions.

Toutes les autres juridictions ne peuvent exercer leurs compétences d’attribution à l’intérieur d’un périmètre géographique qu’on appelle les ressorts territorial, fixés par la loi.Un ressort territorial est une juridiction qui ne s'applique que dans ce ressort. Lorsque l’on connaît la nature de la juridiction, il faut localiser l’affaire dans l’espace géographique pour déterminer quelle est la juridiction parmi celles de même nature et de même degré, qui est territorialement compétente (varie selon la nature du contentieux).• Lors d'un contentieux privé, la juridiction compétente est celle dans le ressort du domicile du défendeur. Exceptions: exemple → quand le litige porte sur les immeubles, c'est le ressort du lieu où se trouve l’objet.• Lors d'un contentieux pénal, lorsqu’une infraction a été commise, le tribunal compétent est celui dans lequel l’infraction a été commise.• Et enfin, lors d'un contentieux administratif, la juridiction compétente est celle du ressort de laquelle l’autorité administrative est présente, a son siège.Toutes les autres juridictions ne peuvent exercer leurs compétences d’attribution à l’intérieur d’un périmètre géographique qu’on appelle les

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ressorts territorial, fixés par la loi.

b) La pluralité des magistrats.Expression taux de ressort (pour faire appel) et de compétence.Les juridictions Françaises ne sont pas uniquement composées de magistrats chargés de s’occuper des affaires. Les juges proprement dits, on sont les « les magistrats du siège ». On trouve également presque toujours d’autres magistrats qui sont chargés de veiller à la bonne application de la loi : les magistrats du ministère public dits « magistrats de l’ordre publique ou du parquet». Ils ont pour but de défendre les intérêts de la société, via bonne application de loi et au respect de l’ordre publique, ils émettent un avis dans ce sens.Il existe deux types de magistrats : ceux qui jugent et ceux qui ne jugent pas.Un tribunal rend un jugement et une cour rend un arret.

1-a) Les magistrats du siège.

Ce sont eux qui, dans une juridiction, tranchent les litiges. Un magistrat désigne toute personne appartenant au corps judiciaire. Le terme juge ne renvoie qu’à la personne qui est apte à décider.Ils sont, pour la grande majorité, des juges professionnels, c'est-à-dire des personnes qui sont issues de l’école nationale de magistrature (ENM située à Bordeaux). On parle aussi de magistrats de carrière (Il faut faire 4 années d'études de droit & l'école nationale de la magistrature pour devenir juge de carrière). Un juge qui n’a pas suivi ce cursus est un juge occasionnel (non professionnels). Mais il existe des exceptions : il existe des juridictions qui ne sont pas composées de juges de carrière. Ce sont des juges occasionnels ou des juges non professionnels, qui ne sont pas juges de profession. Ils jugent à côté de leur métier principal. Certains juges occasionnels sont élus, d'autres sont nommés par le gouvernement : par exemple, les juges de proximité(magistrat du siège nommé par garde des sceaux), les juges du tribunal pour enfants(nommés), ou encore les juges du tribunal des affaires (élus) de la sécurité sociale. Certains sont tirés au sort (valable pour une juridiction en France : cours d’assises.). Au sein des juridictions de l’ordre administratif, ce sont tous des hauts fonctionnaires, issus de l’ENA, et non pas de l'école de la magistrature.Tous les magistrats du siège rendent des décisions de justice, acte par lequel le juge se prononce sur les prétentions qui lui sont soumises. Par cet acte on dira que le Magistrat du siège dit le droit.

Toutes décisions de justice présente 3 caractères :• Sa forme écrite : signée par le président de la juridiction et du

greffier (forme orale : aucune existence légale).• Son contenu motivé : motivation correspondante à la décision

donnée par le juge, une décision non-motivée peut être annulée. (ex : pk 3ans de prison ? préviens l’arbitraire)

• Son prononcé en audience publique : décision non lue en audience publique n’aurait aucune existence légale.

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De la même façon toute décision de justice en France produit 3 effets :• Le jugement vient dessaisir le juge qui a rendu la décision, alors

instance éteinte : le juge, à partir du moment où il a écrit ou dit, il ne peut pas revenir sur sa décision

• La décision de justice est couverte par une autorité particulière qu’on appelle « autorité de chose jugée » : la décision du juge est devenue indiscutable, (sauf à pouvoir exercer les lois de recours ouvertes par la loi, interjeter appel) et lorsqu’aucune loi de recours n’est possible contre une décision de justice, on dira que la décision passe en force de chose jugée.

• La force exécutoire : de manière automatique, la décision peut donner lieu à exécution forcée (concours de la force publique voir armée).

1-b) Les magistrats du ministère public.

Ils ne jugent pas, ils sont simplement chargés par la loi de veiller à la bonne application de la loi et au respect de la loi publique. Ces Magistrats du Ministère Public se contentent d‘indiquer aux magistrats du siège quelle est, selon eux, la solution. Ils peuvent la suivre ou non.

α. Le ministère public auprès des juridictions de l’ordre judiciaire.1°. La présence du parquet.

Dans l’ordre judiciaire, seulement 3 catégories de juridictions sont pourvues d’un parquet permanent : le Tribunal de Grande Instance, les Cours d’appel & les Cours de Cassation. Auprès des Tribunaux de Grande Instance, le parquet est dirigé par le Procureur de la République. Ce chef du parquet est lui-même assisté d’un ou plusieurs collaborateurs appelés des « substituts ». Parfois dans les très grandes juridictions, les substituts sont eux-mêmes assistés par des « procureur de la République adjoint ». Au sein des Cours d’appel, le parquet dit général est dirigé par un « Procureur général de la République », ce procureur a sous ses ordres deux catégories de magistrats :Des collaborateurs qu’on appelle « avocats généraux ». Mais il a également sous ses ordres des « substituts généraux » qui ont une fonction administrative (gérer le parquet général). Devant la Cour de Cassation, le parquet est appelé « parquet général », et ce dernier est chapeauté par un magistrat qu’on appelle « procureur de la Cours de Cassation ». Ce dernier a des « avocats généraux » (ici, le terme avocat ne signifie pas avocat mais collaborateur) et un adjoint : « premier avocat général ». Les magistrats ne sont pas indépendants, ils sont sous l’autorité directe du Garde des Sceaux. Le procureur de la cour d’appel peut donner des ordres au procureur de la République dans le ressort de la Cour d’Appel.Dans toutes les autres juridictions d’ordre judiciaire, le parquet ne sera qu’occasionnel, cela signifie très concrètement qu’aucun magistrat du Ministère Public ne siège dans ces juridictions. Toutefois, en vertu de la loi, le procureur de la République peut exercer devant la loi s’il estime que c’est nécessaire ?. Exemple : Conseil du Prud’hommes = parquet occasionnel dans lequel il peut exercer.

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2°. L’organisation du parquet.

L’organisation du Ministère Public est extrêmement hiérarchisée :• Les Magistrats du Ministère Public sont des agents du pouvoir exécutif.

Pour cette raison ils sont tous placés sous le contrôle et la juridiction du garde des Sceaux : il peut donc donner des ordres à n’importe quel magistrat en France.

• A l’intérieur de ce Ministère Public, les procureurs de la République sont placés sous les procureurs généraux. Les procureurs généraux de cour d’appel ne sont pas placé sous les ordres du procureur général de la cour de cassation.

3°. Les attributions du parquet.

La mission du ministère public varie selon la nature de la juridiction. Intervient comme partie jointe, ou partie principal.

• Devant les juridictions civiles, sociales & commerciales, il peut être partie jointe lorsqu'il intervient dans un procès déjà engagé par les parties. Lorsqu'il se joint à un procès, sa mission est de faire connaître au juge la bonne application de la loi et le respect de l’ordre publique. Il prend des réquisitions (avis) et ne fait que se joindre. Il ne joue pas le rôle principal.

• Lorsqu'il intervient en tant que partie principale, il déclenche le procès. Le Ministère Public est une partie du procès. Il occupera notamment la place du demandeur. Cependant, il ne peut déclencher un procès que dans un cas particulier : en matière d'absence (lorsqu'une personne disparaît & qu'elle ne réapparait jamais), l'article 122 du Code Civil permet au Procureur de la République d'être partie principale en déclenchant un procès. En matière de nullité de mariage, le procureur peut déclencher le procès. Un procès peut également être déclenché en matière d'autorité parentale, par exemple. Auprès des juridictions pénales, le Ministère Public est toujours partie principale.

• Lorsque le procureur déclenche un procès pénal, il exerce un droit

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public. Le procureur a deux prérogatives : (a compléter)• Il appartient donc au procureur de mettre en mouvement l'action publique. Il a la possibilité de déclencher le procès pénal, même si rien ne l'y contraint. Il a également le principe de l'autorité des poursuites : il peut classer une plainte sans suite s'il le désire.• Le procureur exerce l'action publique s'il décide de déclencher un procès pénal. Il est obligé d'exercer. A contrario, une victime ne doit JAMAIS exercer une action publique.

β. Le ministère public auprès des juridictions de l'ordre administratif. ?

Auprès des juridictions de l'ordre administratif, le Ministère public est exercé par un membre de la juridiction qui porte le titre de « rapporteur public ». Avant le 7 Janvier 2009, ce magistrat était appelé « commissaire du gouvernement ». Sa mission est la même que celle du procureur. Il doit faire connaître, ce qui, selon lui est requis & quelle est la bonne application de la loi.Devant les juridictions de l'ordre administratif, le parquet est permanent et devant les tribunaux administratifs, le rapporteur public n'a pas pour fonction d'exercer un recours comme peut le faire le parquet devant l'ordre judiciaire. Le recours est exercé par l'administré ou l'administration. Le parquet sera donc toujours partie jointe.

• La Collégialité.

En principe, en France, plusieurs juges statuent ensemble pour trancher le conflit qui leur est soumis Il s'agit là d'une tradition bien française. En effet, le législateur a posé le principe de la collégialité, notamment en raison des garanties d'impartialité qu'il offre puisqu'il existe alors un contrôle réciproque des magistrats. Par ailleurs, ce principe permettrait également de limiter les erreurs judiciaires, puisqu'il est plus simple de se tromper seul qu'à trois. Elle offre une meilleure indépendance des juges, qui ne sont pas influencés ?. Enfin, une décision rendue collégialement est en générale mieux acceptée des accusés, elle a une plus grande autorité morale.

Il y a cependant deux inconvénients majeurs à ce système :

• La collégialité met beaucoup plus de temps à rendre des décisions. Par conséquent, il y a donc une lenteur des procès.• Le coût reste élevé. En effet, il est plus cher de payer plusieurs juges, qu'un seul.

Rq : Tous les systèmes européens n’ont pas choisis la collégialité.

En général les juges sont à 3. Il existe en France des collégialités composées de 4 à 5 juges. Celles de 4 juges sont le conseil de prud'hommes, celles de 5

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juges concernent les tribunaux des baux ruraux. D'autres, sont composées de 7 juges : la cour d'assise pour militaires par exemple. La cour d'appel pour militaire, quant à elle, est composée de 8 juges. Les cours d'assises du 1er degré, elles, sont composées de 9 juges. La cour d'assise d'appel est composée de 12 juges, 19 juges : assemblée plénière de la cour de cassation et il existe même une juridiction composée de 908 juges ! C'est la haute cour de justice, qui est censée juger le président dans le cas où celui-ci aurait commis une faute durant son mandat. Les 908 juges sont en réalités les membres du Sénat & de l'Assemblée Nationale (qui sont les 2 chambres du Parlement).

La collégialité peut prendre deux formes :

• Une forme homogène → entièrement composée de juges professionnels ou entièrement composée de juges occasionnels (par exemple : TGI, conseil des prud’hommes).• Une forme hétérogène → c'est une juridiction composée de juges professionnels et non professionnels (par exemple : les cours d'assise, baux ruraux, les tribunaux pour enfants...). Cette forme hétérogène peut également s'appeler formation échevinale.

Par exception, la justice est parfois rendue par un juge unique. En réalité, les hypothèses dans lesquelles la justice est rendue en France à juge unique sont de plus en plus nombreuses. La formation collégiale tend ainsi à devenir l'exception, et le juge unique le principe. Pourquoi ? Pour deux raisons essentielles :

• D'une part, le juge unique a plus conscience de ses responsabilités,• D'autre part, le recours au juge unique représente une économie

considérable pour l'état.

Exemples de juges uniques:• Le juge aux affaires familiales, compétent en matière de divorce ou encore de pension alimentaire,• Le juge de la mise en état qui supervise le bon déroulement de la procédure,• Le juge de l'exécution qui connaît des difficultés relatives à l'exécution des décisions de justice,• Le juge d'instruction en matière pénale, qui instruit les affaires. (à verifier)•infraction au code de la route par un juge qui siège au tribunal correctionnel.

Rq2 : Le tribunal administratif siège parfois à un seul juge, notamment en matière fiscale, ou également lorsqu’on demande à l’Etat des dommages et intérêt inférieur à 8000€.

• La responsabilité.

Le service public de la justice est un service responsable. Si quelqu'un subit un dommage en raison d'un fonctionnement défectueux du service public de la justice, ou encore en raison d’une faute commise par un juge, il a le droit d'obtenir réparation cad dommages et intérêt et doit engager la

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responsabilité de l’Etat.

a) Dommage subi en raison d'un fonctionnement défectueux.

L'article L.141-L du code de l'organisation judiciaire désigne l'État comme responsable en cas de dommage causé par le fonctionnement défectueux du service publique de la justice. Il ne peut y avoir un fonctionnement défectueux que dans deux hypothèses :• Dans le cas d'une faute lourde (toute déficience caractérisée par un fait ou par une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi). (ex : greffier a perdu les papiers)• Dans le cas d'un déni de justice, c'est-à-dire dans le cas où le juge refuserait de rendre la justice dans une affaire pour laquelle il est saisi.Et l’on pourra demander des dommages et intérêt à l’Etat, en saisissant le TGI.

b) Le dommage subit en raison d’une faute personnelle commise par un juge

Article L 141-2 : Les juges sont également responsables de leurs fautes personnels. Dans tous les cas, un juge qui commet une erreur dans la décision qu’il a rendu n’a pas commis de faute personnelle. En revanche, peut constituer une faute personnelle : de perdre le dossier, de commettre des fautes (crée des preuves ?), ou de montrer une partialité dans son intervention.

Lorsqu’une faute personnelle est commise, c’est au plaideur d’engager une action en responsabilité, pas contre le juge mais contre l’Etat car le juge est fonctionnaire, l’Etat encore une fois pourra verser des dommages et intérêts. L’Etat peut dans ce cas exercé une action récursoire contre le juge fautif, cad remboursement des dommages et intérêts payés par l’Etat. Un juge ayant commis une faute personnel verra sa responsabilité disciplinaire engagée. Seul le conseil supérieur de la magistrature peut exercer une sanction disciplinaire.

Nomenclature article :L : législatifD : décretR : RèglementQui a insérer l’article dans le code.

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Partie 1 : Les juridictions.

Elles sont nombreuses et diverses, mais peuvent être classée. Les juridictions de l'ordre administratif sont différentes des juridictions de l'ordre judiciaire. Il existe, en plus, en France, des juridictions en dehors des juridictions de l'ordre judiciaire & administratif : le conseil constitutionnel notamment.

Titre 1. Les juridictions composant les ordres juridictionnels.Sous titre 1.Les juges du fond de l'ordre judiciaire.

Les juridictions de l'ordre judiciaire comprennent une juridiction du fond. Les juridictions du fond ont pour but de juger en droit et en fait (toute l’affaire). Certains jugent du fond statuent sur des litiges privés. Les juges de cassation ne jugent que les faits.Les juges du fond de l'ordre judiciaire appartiennent à deux catégories différentes :• Certains d'entre eux ont pour mission de statuer sur des litiges d'intérêt privé. Ce sont les juridictions civiles de l'ordre judiciaire.• D'autres ont pour rôle de réprimer les infractions au moyen d'une peine : ce sont les juridictions pénales de l'ordre judiciaire.

Chapitre 1. Les juridictions civiles.

Conformément au principe du double degré de juridiction, certaines juridictions civiles relèvent du premier degré de juridiction. Il s'agit d'ailleurs de la très grande majorité des juridictions civiles. On dit que ces juridictions sont « du premier degré » ou encore « de première instance » parce que ce sont elles qui sont saisies du litige pour la première fois.D'autres juridictions civiles relèvent du second degré de juridiction. En réalité, il n'existe qu'une seule juridiction civile relevant du second degré de juridiction : c'est la Cour d'appel.

Section 1. Les juridictions civiles du 1er degré.

Ces juridictions sont appelées à connaître un litige pour la première fois. Elles possèdent à ce titre un pouvoir d'investigation et d'appréciation illimité.Deux types de juridictions coexistent ici :• Une juridiction de droit commun, encore appelée « juridiction ordinaire ».• De nombreuses juridictions spécialisées, encore appelées « juridictions d'exception ».

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§ 1 : La juridiction civile de droit commun : le Tribunal de Grande Instance.

Nous analyserons successivement l'organisation du tribunal de grande instance, puis sa compétence. Avant 1958, il était également appelé « Tribunal de District ».

A) L'organisation du Tribunal de Grande Instance.• Le ressort territorial.

L'appellation « tribunal de grande instance » a été introduite par la loi du 22 décembre 1958. Le tribunal de grande instance est l'ancêtre du « tribunal de district » créé en 1790 par l'Assemblée Constituante, lui-même rebaptisé « tribunal civil » sous le Consulat.En principe, il existe au moins un tribunal de grande instance par département, mais cette règle n'est pas absolue. En effet, depuis 1958, le tribunal de grande instance n'est plus rattaché à une circonscription administrative déterminée (avant 1958, il était rattaché à l'arrondissement : un tribunal de grande instance par arrondissement). Ainsi, certains départements n'ont aucun tribunal de grande instance. D'autres en ont plusieurs en raison de l'activité judiciaire ou encore de la densité de la population. En Alsace, par exemple, nous possédons deux tribunaux de grande instance.

• La composition du tribunal de grande instance.

La loi prévoit une composition minimum pour chaque tribunal de grande instance. Au minimum, chaque tribunal de grande instance est composé :• De trois magistrats du siège (1 président et 2 assesseurs). Selon le code de l'organisation judiciaire, s'il existe au sein d'un même tribunal de grande instance plus de 5 juges, le tribunal est divisé en chambres. Chaque chambre étant à son tour divisée en sections. En principe, les magistrats changent de chambre chaque année. Il s'agit de la règle de roulement.• D'un ministère public permanent comprenant 1 procureur de la République ainsi que 1 ou plusieurs substituts.• Un greffe, ou secrétariat-greffe tenu par un greffier en chef et de 1 ou plusieurs greffiers.• A la tête du tribunal de grande instance, se trouve le président. Ce dernier possède des fonctions particulières, tant juridiquement qu'administrativement. Le président va affecter les magistrats aux différentes chambres et répartir les affaires.Encore une fois, il ne s'agit ici que d'une exigence minimale posée par la loi. Certains tribunaux de grande instance importants (Paris, Lyon, Toulouse, Bordeaux) comprennent bien évidemment un nombre beaucoup plus important de magistrats tant du siège que du parquet. A titre d'exemple, le tribunal de grande instance de Paris comprend plus de 230 juges répartis en quelques 31 chambres.

3) Le fonctionnement du tribunal de grande instance.a) Les formations juridictionnelles du tribunal de grande

instance.

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La formation juridictionnelle est composée de 3 juges.

α) Le principe : 3 juges (formation collégiale).

La formation collégiale est la formation juridictionnelle de principe. Elle est composée d'un minimum de trois membres (1 président et 2 assesseurs qui forment ensemble une « chambre » du tribunal de grande instance). cette formation rend des jugements et les accusés peuvent interjeter appel. Ce sont donc des jugements en 1er ressort. Elle se réunit en principe en audience publique. Mais, dans plusieurs hypothèses, elle peut également se réunir en « chambre du conseil », c'est-à-dire à huis clos (hors la présence du public) :

• En matière gracieuse (dans laquelle il n'existe, par hypothèse, aucune contestation : article 435 du Code de Procédure Civile. Par exemple : lors d'une demande de changement de prénom, d'une demande de nationalité française, adoption, divorce par consentement mutuel, disparition, absence...).• En matière contentieuse :dans les hypothèses prévues expressément par la loi (filiation, divorce, mineurs...) ou sur décision du président du tribunal de grande instance. En effet, le président du tribunal de grande instance peut prononcer le huis clos dans trois hypothèses différentes :• Lorsqu'il existe un risque d'atteinte à l'intimité de la vie privée.• Lorsqu'il existe un risque de désordre de nature à troubler la sérénité de la justice.• Lorsque les parties, d'un commun accord, le demandent.Rappelons que, même si l'audience est tenue à huis clos, le jugement quant à lui sera toujours prononcé publiquement.

β) Les exceptions : le juge unique.

La loi prévoit la possibilité pour le tribunal de grande instance de statuer à juge unique. Il s'agit là d'une formation juridictionnelle qui doit être considérée comme étant exceptionnelle, le principe demeurant la collégialité. Ici, un seul magistrat va trancher le litige. Tel sera le cas dans deux hypothèses bien particulières :

• Le juge unique en vertu d'une décision du président du tribunal de grande instance :• le président du tribunal de grande instance peut en effet attribuer une affaire à un juge unique, pour des raisons de célérité, notamment lorsque la solution de l'affaire est simple.• Cela est possible dans toutes les matières relevant de la compétence d'attribution du tribunal de grande instance, sauf en matière disciplinaire ainsi que dans le domaine de l'état des personnes où la collégialité s'impose toujours.Précisons que dans l'hypothèse où le président du tribunal de grande instance a décidé d'attribuer une affaire à un juge unique, les plaideurs disposent toujours de la possibilité de demander le renvoi à la collégialité.

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• Le juge unique en vertu de la loi. En effet, il existe des hypothèses dans lesquelles la loi elle-même attribue une affaire à un juge unique. Exemples :• Le juge aux affaires familiales.• Le juge de l'expropriation qui a pour mission de fixer le montant des indemnités.• Le juge de l'exécution crée par la loi du 5 juillet 1972 qui a pour mission de statuer sur les titres exécutoires en cas de difficultés.• Le juge des accidents de la circulation crée par la loi du 5 juillet 1985. Cette loi précise cependant que les parties pourront demander le renvoi à la juridiction collégiale.

Le président du Tribunal de Grande Instance peut trancher lui-même, dans certains domaines, certains litiges grâce à une ordonnance. Il existe notamment 3 domaines où cela est possible :• En matière de louage d'immeubles à usage commercial, artisanal ou industriel.• En référé. Le président est en effet le juge des référés. Le juge des référés ne sert que dans les procédures d'urgence (articles 808 & suivants du code de l'organisation judiciaire).• La requête. C'est un recours commandé par la nécessité d'obtenir une décision sans que la partie adverse ne le sache.

b) Les formations administratives du tribunal de grande instance.

Au sein d'un tribunal de grande instance, les fonctions administratives sont exercées :

• Tout d'abord par le Président. Celui-ci :• Assure le bon fonctionnement de la juridiction.• Répartit les affaires entre les différentes chambres de la juridiction.• Surveille la détermination des jurés en Cour d'assises.• Tient les registres de l'état civil.

• Ensuite par l'Assemblée générale du tribunal de grande instance, laquelle comprend l'ensemble des membres du tribunal de grande instance. Celle-ci :• Détermine le contenu du règlement intérieur de la juridiction.• Détermine les jours et heures d'audience.• Répartit les matières entre les différentes chambres de la juridiction.

Les Assemblées Générales du tribunal de grande instance comprennent la réunion de tous les membres du tribunal. Depuis 1983, il y a une assemblée générale du parquet, une assemblée générale des magistrats du siège & une assemblée générale plénière. Ces assemblées n'ont absolument aucun pouvoir juridique. Seules sont prises des décisions administratives quant au fonctionnement du tribunal de grande instance.

B) La compétence du tribunal de grande instance.a) Compétence territoriale.

Le défendeur doit habiter dans le ressort territorial. En matière contractuelle, le tribunal de grande instance compétent est le lieu où le contrat a été exécuté. En matière d'assurances, par exemple, le tribunal compétent est le

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lieu où est domicilié la personne, pas le lieu où la personne a été assurée.

b) Compétence d'attribution.

Le tribunal de grande instance est la seule juridiction civile de droit commun. Aussi, elle a vocation à statuer sur tous les litiges qui ne relèvent pas expressément de la compétence d'une autre juridiction.Les choses sont toutefois un peu plus compliquées. En réalité, même si le tribunal de grande instance est une juridiction de droit commun, il a, outre une compétence de principe, une compétence exclusive.

α) La compétence de principe du tribunal de grande instance.

Le tribunal de grande instance a une compétence de principe pour connaître, en première instance, de tous les litiges de nature privée non attribués à une autre juridiction et dont le montant en cause est supérieur à 10000 euros.

• Quatre remarques sont à faire :• Premièrement : cette compétence de principe concerne tous les litiges de nature privée, et donc les litiges en matière personnelle, mobilière et immobilière.• Deuxièmement : cette compétence de principe ne concerne que les litiges de nature privée. Ne relèvent donc pas de sa compétence les litiges de nature publique qui relèvent de l'ordre administratif.• Troisièmement : parmi les litiges de nature privée, ne relèvent de la compétence de principe du tribunal de grande instance que ceux qui n'ont pas été expressément attribués à une autre juridiction. Sont ainsi exclus de la compétence de principe du tribunal de grande instance les affaires en droit du travail, les affaires commerciales, les affaires rurales ou encore les affaires de la sécurité sociale.• Quatrièmement : seuls les litiges de nature privée présentant une certaine importance relèvent de la compétence du tribunal de grande instance. En effet, seuls les litiges d'un montant supérieur à 10000 euros sont traités par le tribunal de grande instance. Ce seuil constitue le « taux du ressort » du tribunal de grande instance.

• Plusieurs observations sont également à formuler concernant le taux du ressort du tribunal de grande instance :• Ce montant de 10000 euros a été fixé par la loi du 26 janvier 2005 relative aux compétences du tribunal d'instance, de la juridiction de proximité et du tribunal de grande instance (V. aussi son décret d'application n°2005-460 du 13 mai 2005), Cette loi est entrée en vigueur le 27 avril 2005. Signalons qu'avant cette loi, le taux du ressort du tribunal de grande instance était fixé à 7600 euros.• Ce montant de 10000 euros correspond au montant minimal de la demande. Ce montant est déterminé directement par la partie demanderesse. Pour les demandes d'un montant indéterminé (Par exemple lors d'une demande de destruction d'un mur), elles relèvent toujours de la compétence du Tribunal de Grande Instance (article 40 du Code de Procédure Civile).• Les jugements rendus par le tribunal de grande instance sont toujours susceptibles d'appel et de pourvoi en cassation. Le tribunal de grande

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instance juge donc en premier ressort uniquement.• Enfin, qu'en est-il des litiges de nature privée dont le montant n'est pas supérieur à 10.000 euros ? Ces litiges relèvent de juridictions spécialisées, et notamment du juge de proximité (pour les demandes d'un montant compris entre 1000 et 4000 euros) et du tribunal d'instance (pour les demandes d'un montant compris entre 4001 et 10000 euros).

β) Les compétences exclusives du tribunal de grande instance.

On appelle « compétences exclusives » les compétences qui appartiennent toujours au tribunal de grande instance, quel que soit le montant de la demande (donc même pour les demandes d'un montant inférieur à 10000 euros). Ce sont des matières dans lesquelles le tribunal de grande instance dispose d'un monopole, ce monopole pouvant s'expliquer par l'existence d'un parquet permanent ainsi que par la collégialité de la formation de jugement.

Ces compétences exclusives sont nombreuses. Parmi elles :• Les brevets d'invention (article. R. 312-2 et article R. 312-2-1 du Code de l'organisation Judiciaire).• Les actions possessoires.• Les baux à loyer d'immeubles ou de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal (article R. 312-3 du Code de l'organisation Judiciaire).• L'état des personnes (divorce, filiation, nationalité, capacité, nom, successions, régimes matrimoniaux... (Article R. 312-1 et R. 312-1-1 du Code de l'organisation judiciaire).• Les droits réels immobiliers (actions pétitoires, actions relatives à l'ordre public...). On dit souvent que le tribunal de grande instance est le gardien de la propriété immobilière.

§ 2 : Les juridictions civiles spécialisées.A) Le tribunal d'instance.

Une remarque préalable s'impose : le tribunal d'instance est parfois qualifié de juridiction de droit commun, aux côtés du tribunal de grande instance. Pourtant, il s'agit bel et bien d'une juridiction spécialisée puisque la loi limite expressément les matières relevant de sa compétence. Nous étudierons successivement l'organisation du tribunal d'instance puis les règles qui fondent sa compétence.

1) L'organisation du tribunal d'instance.a) Le ressort territorial.

Ne correspond pas nécessairement à une circonscription administrative déterminée. Le ressort est fixé par décret, déterminé en fonction du volume des affaires à traiter et de la densité de la population. Il y a en France des tribunaux d'instance dont le ressort territorial correspond à une ville, plusieurs villes, voire même des cantons. Par exemple, Bastia possède 17 cantons. Il y a 288 Tribunaux d'instance au lieu de 400.

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b) La composition du tribunal d'instance.

Il est composé de plusieurs juges dont le nombre varie selon l’étendue du territoire et le nombre d’affaires. Ce sont des professionnels. Les magistrats du tribunal de grande instance, sont des magistrats qui ont été nommés par le Président du tribunal de grande instance pour 3 ans renouvelables. Le tribunal d'instance n’a qu’un parquet occasionnel, contrairement au Tribunal de grande instance. Le procureur du tribunal de grande instance peut décider d’intervenir dans des affaires quand il le juge nécessaire. Chaque tribunal d'instance a également un greffe, dont le nombre dépend de l'importance de la juridiction. Il n'existe aucun président du tribunal d'instance, car l'administration du tribunal est confiée à un juge d’instance, qui n’a pas la responsabilité du tribunal d'instance. La responsabilité est entre les mains du Président du tribunal de grande instance.

c) Le fonctionnement du tribunal d'instance.

Le tribunal d'instance intervient toujours à juge unique. La collégialité n’existe pas. L’audience est publique et le ministère d’avocats n’est jamais obligatoire.Le plaideur (ou tout proche) a la possibilité de recourir à un avocat. Le tribunal d'instance peut tenir des audiences foraines (mairie, salle des fêtes), à la seule condition que le lieu soit accessible au public (Principe de publicité de l’audience). Le juge d’instance préside le tribunal paritaire des baux-ruraux et il peut intervenir en tant que juge départiteur au Conseil des prud’hommes (il va notamment ajouter sa voix). Le juge d’instance concilie également les parties (la tentative de conciliation devant le tribunal de grande instance est menée par le juge d’instance, mais le juge d’instance n'a plus été en mesure de remplir l’affaire, car le délai était dépassé). C'est pourquoi le décret du 20 mars 1998, a institué des conciliateurs de justice (magistrats désignés comme « conciliateurs » par le premier Président de la Cour d’appel grâce une ordonnance). La conciliation devant le tribunal de grande instance n’est pas obligatoire, (mais il est nécessaire qu’une demande aux fins de mesures de conciliation soit écrite par au moins l'une des parties). La conciliation peut toutefois devenir obligatoire si le juge d’instance le décide (cf. loi de 2002), même si les parties sont contre. En cas d’échec de la conciliation, une procédure est mise en marche devant le juge d'instance, qui rend son jugement.

Récapitulatif :

Le tribunal d'instance a remplacé en 1958 les juges de paix qui avaient été créés par l'Assemblée Nationale Constituante en 1791.En principe, il existe aujourd'hui un tribunal d'instance par arrondissement. Cette règle n'est cependant pas absolue. Il peut en effet exister plusieurs tribunaux d'instance dans un même arrondissement. A l'inverse, certains arrondissements ne sont le siège d'aucun tribunal d'instance (cf. principe de la carte judiciaire Française).

• Cinq observations sont à faire :• Premièrement, le tribunal d'instance est composé d'un ou plusieurs

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juges qui statuent seuls. C'est donc une juridiction à juge unique.• Deuxièmement, les juges qui composent le tribunal d'instance sont des magistrats du tribunal de grande instance nommés pour trois ans renouvelables pour assurer le service du tribunal d'instance. On dit que le tribunal d'instance est « dans la mouvance » du tribunal de grande instance. En effet, il n'a aucun effectif propre.• Troisièmement, il n'existe aucun parquet permanent au sein du tribunal d'instance. Aussi, lorsque cela est nécessaire, le tribunal d'instance pourra faire appel au procureur de la République du tribunal de grande instance.• Quatrièmement, le juge d'instance peut également siéger dans deux autres juridictions : ► il préside régulièrement le tribunal paritaire des baux ruraux,

► il intervient ponctuellement au sein du conseil de prud'hommes en qualité de juge départiteur lorsqu'il existe un partage des voix entre conseillers prud'homaux employeurs et salariés.• Cinquièmement, il entre traditionnellement dans les attributions du juge d'instance une mission de conciliation. En effet, l'un des rôles du juge d'instance est de concilier les parties avant de trancher le litige en droit. Cette mission lui est dévolue par les articles 840 et 847 du Code de Procédure Civile. Plusieurs remarques concernant la mission de conciliation du juge d'instance :

► tout d'abord, la tentative préalable de conciliation est en principe menée par le juge (article 831 du Code de Procédure Civile). Cependant, en raison de l'augmentation du contentieux devant le tribunal d'instance, le juge d'instance n'est plus toujours à même de remplir convenablement son rôle de conciliateur. Pour lui venir en aide dans cette tâche, le législateur a alors institué des conciliateurs de justice (Décret du 20 mars 1978 modifié par le décret du 22 juillet 1996). Ces conciliateurs ne possèdent pas la qualité de magistrat. Ils exécutent leur mission de conciliation bénévolement. Ils sont nommés, pour une période d'un an, par ordonnance du premier président de la Cour d'appel sur proposition du juge d'instance.

► ensuite, la conciliation devant le tribunal d'instance n'est en principe pas obligatoire. En effet, il est nécessaire qu'une demande aux fins de tentative de conciliation préalable de conciliation soit formée verbalement ou par lettre simple au greffe (article 830 du Code de Procédure Civile). Néanmoins, par exception, la loi du 9 septembre 2002 permet au juge d'instance qui n'aurait pas recueilli l'accord des parties pour procéder à une tentative de conciliation de leur enjoindre de rencontrer un conciliateur de justice.

► enfin, en cas d'échec de la conciliation, les parties peuvent saisir le juge d'instance et lui demander de statuer en droit. En cas de conciliation, il est établi un constat d'accord signé par les parties et le conciliateur. Il s'agit d'une convention, qui tient lieu de loi pour les parties, conformément à l'article 1134 du Code civil. Mais cet acte n'a ni l'autorité de chose jugée attribuée à la transaction (article 2052 du Code civil), ni la force exécutoire attachée aux décisions de justice. La loi permet cependant au juge d'instance de donner force exécutoire à un tel constat d'accord.

• La compétence du tribunal d'instance.a) La compétence territoriale du tribunal d'instance.

En principe, la compétence territoriale vaut là où est domicilié le défendeur.

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Ce sont les mêmes règles que celles qui s'appliquent au tribunal de grande instance.

b) La compétence d'attribution du tribunal d'instance. α) La compétence générale du tribunal d'instance.

Comme son nom l'indique, le tribunal d'instance est compétent pour connaître des petites instances, c'est-à-dire des petites affaires. Depuis la loi du 26 janvier 2005, sa compétence générale se résume par les deux règles suivantes :• Première règle : le tribunal d'instance est compétent pour statuer sur les actions personnelles ou mobilières portant sur un montant compris entre 4001 et 10000 euros.• Deuxième règle : le tribunal d'instance connaît également des demandes indéterminées qui ont pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas 10.000 euros.

Ces deux règles appellent plusieurs observations :• Premièrement, la loi du 26 janvier 2005 est entrée en vigueur le 27 avril 2005. Avant cette date, le tribunal d'instance était compétent pour tous les litiges de nature privée dont le montant était compris entre 1501 et 7600 euros.• Deuxièmement, depuis cette loi du 26 janvier 2005, le tribunal d'instance rend systématiquement des jugements en premier ressort. L'appel est donc toujours possible, ainsi que le pourvoi en cassation. Auparavant, le tribunal d'instance était susceptible de rendre deux catégories de jugements : des jugements en premier et dernier ressort (lorsque le montant de la demande était situé entre 1501 et 3800 euros) et des jugements en dernier ressort (lorsque le montant de la demande était situé entre 3801 et 7600 euros).• Troisièmement, le taux du ressort du tribunal d'instance ne cesse d'augmenter :

► Jusqu'en 2000, ce taux était de 25000 Francs.► Puis, en 2000, il est passé à 7600 euros (soit près du double).► Enfin, depuis la loi du 26 janvier 2005, il a encore augmenté

pour passer à 10000 euros. La conséquence en est que le tribunal d'instance est compétent pour connaître de plus en plus d'affaires portant sur des sommes de plus en plus importantes. Il en résulte un encombrement du tribunal d'instance.• Quatrièmement : à l'instar du tribunal de grande instance, le juge d'instance peut, lui aussi, intervenir en référé et sur requête. Cette possibilité est prévue à l'article 848 du Code de Procédure Civile. Le juge d'instance ne peut cependant intervenir en référé ou sur requête que dans le cadre de sa compétence générale. Ainsi, la compétence en référés ou sur requête du juge d'instance est fonction de la compétence du tribunal d'instance au fond.

β) Les compétences spéciales du tribunal d'instance.

Les compétences spéciales du tribunal d'instance se répartissent en deux catégories :

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1° Compétence spéciale en matière contentieuse.• Compétence spéciale en matière de louage d'immeubles.

Le juge d'instance est spécialement compétent pour les actions dont un contrat de louage d'immeubles à usage d'habitation est l'objet. Cette compétence spéciale est issue de la loi du 26 janvier 2005.Plusieurs remarques sont à faire :• Le tribunal d'instance détient en cette matière une compétence spéciale et, pour être exacte, exclusive, puisqu'il connaît des litiges en matière de louage d'immeuble même si la valeur de la demande est inférieure à 4.001 euros ou supérieure à 10.000 euros. Le montant du litige est ici indifférent.• Toutefois, signalons que le tribunal d'instance intervient en cette matière en premier et dernier ressort lorsque la demande est inférieure ou égale à 4.000 euros. Il intervient en premier ressort lorsque la demande est supérieure à 4.001 euros.• Ensuite, signalons que la compétence spéciale du tribunal d'instance porte ici sur les baux d'habitation, et uniquement sur eux. Les litiges relatifs aux baux commerciaux ou encore aux baux ruraux ne relèvent donc pas de la compétence spéciale du juge d'instance.• Depuis la loi du 26 janvier 2005, la compétence spéciale du tribunal d'instance porte également sur les actions aux fins d'expulsion des occupants sans droit ni titre des immeubles d'habitation (expulsion des « squatteurs »).• Depuis la loi du 26 janvier 2005, le juge d'instance peut également intervenir en référés pour ordonner l'expulsion d'un locataire. Auparavant, ce pouvoir n'était reconnu qu'au président du tribunal de grande instance.

• Compétence spéciale en matière de protection des consommateurs.

Depuis la loi du 26 janvier 2005, le tribunal d'instance a encore compétence spéciale pour les litiges nés de l'application de la loi du 10 janvier 1978, relative à la protection des consommateurs en matière de crédit à la consommation.Plusieurs remarques sont à formuler, là encore :• Le tribunal d'instance détient en cette matière une compétence spéciale et, pour être exact, exclusive puisqu'il connaît des litiges en matière de crédit à la consommation même si la valeur de la demande est inférieure à 4.001 euros ou supérieure à 10.000 euros. Le montant du litige est ici indifférent.• Toutefois, signalons que le tribunal d'instance intervient en cette matière en premier et dernier ressort lorsque la demande est inférieure ou égale à 4.000 euros. Il intervient en premier ressort lorsque la demande est supérieure à 4.000 euros.

• Compétence spéciale dans les matières prévues aux articles R. 321-6, R. 321-7 & R. 321-8 du Code de l'organisation judiciaire.

Le juge d'instance est encore spécialement compétent dans les matières prévues aux articles R. 321-6 à R. 321-8 COJ. Ces matières sont, notamment :• Les contestations en matière de salaire différé,

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• Les contestations entre nourrices et ceux qui leur confient des enfants (parents etc...)• Les contestations relatives aux frais de scolarité ou d'internat,• Les dommages causés aux champs et aux cultures,• Les actions civiles en diffamation ou injures.

Plusieurs remarques :• le tribunal d'instance n'est compétent dans ces matières que pour autant que la demande porte sur une somme supérieure à 4000 euros. En deçà, ces matières relèvent de la compétence du juge de proximité.• le tribunal d'instance est compétent dans ces matières dès lors que la demande porte sur une somme supérieure à 4000 euros. Ainsi, même si la demande porte sur une somme supérieure à 10000 euros, sera toujours compétent le tribunal d'instance et jamais le tribunal de grande instance.• dans ces matières, le tribunal d'instance rend toujours des jugements à charge d'appel.

• Compétence spéciale dans les matières prévues à l'article R. 321-9 du Code de l'organisation judiciaire.

Le juge d'instance est encore spécialement compétent dans les matières prévues à l'art. R. 321-9 du code de l'organisation judiciaire. Ces matières sont, notamment :• Les actions en bornage. Le bornage consiste à délimiter deux fonds de terre contigus en plaçant des bornes sur les limites des propriétés. De manière plus précise, le bornage consiste à déterminer définitivement la ligne divisionnaire entre deux fonds contigus appartenant à des propriétaires différents par des signes matériels que l'on appelle des bornes.• Les actions relatives aux plantations d'arbres. Selon l'article 671 du Code civil, il n'est pas permis d'avoir des arbres près de la limite de la propriété voisine qu'à la distance prescrite par les règlements ou, à défaut de règlements, qu'à la distance de deux mètres de la ligne séparative des deux propriétés pour les plantations dont la hauteur dépasse deux mètres, et à la distance d'un demi mètre pour les autres plantations. Selon l'art. 672 du code civil, le voisin peut exiger que les arbres plantés à une distance moindre que la distance légale soient arrachés ou réduits à la hauteur légale.• Les actions relatives à l'élagage des arbres.

Plusieurs remarques :• le tribunal d'instance est compétent dans ces matières quelle que soit la valeur du litige (même inférieure à 4000 euros ou supérieure à 10001 euros).• dans ces matières, le tribunal d'instance intervient toujours à charge d'appel.

• Compétence spéciale en matière d'injonction de payer & d'injonction de faire (articles 1406 & 1425-1 du Code de Procédure Civile).

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Qu'appelle-t-on, en procédure civile, « injonction de payer » et « injonction de faire » ?

En 1988, le législateur a voulu donner aux particuliers une procédure simple et rapide qui leur permette d'obtenir soit la livraison de ce qui leur est dû, soit le paiement de la somme qui leur est due (décret du 4 mars 1988). Il suffit pour cela d'adresser une simple requête au juge d'instance avec les pièces justificatives :• Le juge d'instance peut rejeter la demande et le demandeur pourra alors encore agir par la voie ordinaire,• Le juge d'instance peut également recevoir la demande est prononcera alors, par ordonnance, une injonction de faire ou de payer. Dans cette hypothèse, le défendeur pourra s'opposer à l'ordonnance pendant un mois. S'il ne le fait pas, l'ordonnancement pourra alors acquérir force de chose jugée. Au contraire, s'il le fait, le tribunal examinera alors la demande contradictoirement lors d'une prochaine audience.Le contentieux des injonctions de faire ou de payer relève de la compétence spéciale du tribunal d'instance.

Plusieurs remarques sont à faire :• en matière d'injonction de payer, le tribunal d'instance est compétent dès lors que la créance due au demandeur est supérieure à 4000 euros (art. 1406 du code de procédure civile). En deçà de ce seuil, la demande d'injonction de payer doit être adressée au juge de proximité. Au delà de ce seuil, le juge d'instance sera toujours compétent, même si la demande d'injonction de payer porte sur une créance d'un montant supérieur à 10000 euros.• en matière d'injonction de faire, le tribunal d'instance ne peut être saisi que si la valeur de la prestation dont l'exécution est demandée est comprise dans les limites de la compétence générale du tribunal d'instance, c'est-à-dire entre 4.001 euros et 10.000 euros (art. 1425-1 du code de procédure civile). En deçà de ce seuil, la demande d'injonction de faire doit être adressée au juge de proximité. Au-delà de ce seuil, seul le tribunal de grande instance aura compétence pour connaître du litige.

2° Compétence spéciale en matière gracieuse.

En matière gracieuse, le juge d'instance est spécialement compétent en matière :• de tutelles : le juge d'instance est juge des tutelles. Il préside le Conseil de famille et donne des autorisations. Il reçoit également les déclarations d'émancipation.• de nationalité : c'est le juge d'instance qui délivre des certificats de nationalité.

B) La juridiction de proximité.

La juridiction de proximité est la plus jeune des juridictions judiciaires françaises. Elle a été créée par la loi n°2002-1138 du 9 septembre 2002.

Deux observations préalables s'imposent :

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• La première observation préalable porte sur les raisons d'être de la juridiction de proximité :C'est la campagne de l'élection présidentielle d'avril à mai 2002 qui est à l'origine des juridictions de proximité créée par la loi du 9 septembre 2002. Deux des principaux candidats (M. Lionel Jospin & M. Jacques Chirac) avaient en effet prévu de créer de telles juridictions, ou plus exactement d'instituer des juges non professionnels pour juger les petits litiges civils ou encore certaines contraventions de police. Le candidat élu en a fait l'une des priorités de son action gouvernementale. C'est ainsi que, quelques mois à peine après les élections, a été votée la loi du 9 septembre 2002 instituant dans le ressort de chaque cour d'appel, des juridictions dénommées « juridictions de proximité » (article L.331-1 du code de l'organisation judiciaire).Les objectifs affichés de ces nouvelles juridictions étaient :• tout d'abord, désengorger les tribunaux d'instance• ensuite, permettre une justice plus rapide et moins coûteuse• enfin, rapprocher, pour les petits litiges, la personne appelée à juger des parties.

• La deuxième observation préalable porte sur l'hostilité manifestée par les juges professionnels à l'égard de la juridiction de proximité :Il est vrai que des incompréhensions, pour ne pas dire une profonde hostilité, se sont manifestées à l'encontre de cette nouvelle juridiction, hostilité venant essentiellement du corps judiciaire et notamment des juges d'instance.Les raisons de cette hostilité sont connues : le juge de proximité n'est pas nécessairement un professionnel du droit. Or les litiges, quelle que soit leur valeur, posent des problèmes juridiques et techniques qui ne peuvent être résolus que par une personne spécialisée. Il s'agit là d'un contentieux difficile que la faiblesse du montant du litige n'atténue en rien. De plus, le juge de proximité statue en premier et dernier ressort. Il n'existe donc aucun contrôle sur les décisions qu'il rend, si ce n'est que le contrôle de la Cour de cassation, contrôle fort illusoire puisque les plaideurs renoncent souvent à se pourvoir en cassation dans les litiges de faible valeur.L'hostilité farouche des magistrats professionnels vis-à-vis des juges de proximité se manifeste de différentes manières, encourageant ainsi la démission des juges de proximité : participation imposée à des commissions non rétribuées, calcul mesquin des vacations, pas d'association à la vie de la juridiction, fixation des audiences sans aucune concertation etc.Cette hostilité n'est pourtant pas totalement justifiée :• d'une part, l'idée d'une participation de simples citoyens à l'œuvre de la justice existe dans tous les États européens,• d'autre part, en France, les citoyens participent déjà à l'œuvre de la justice dans certaines juridictions spécialisées, sans que cela nuise au bon fonctionnement de ces juridictions ou encore à la qualité de la Justice qui y est rendue (cours d'assises, tribunaux paritaires des baux ruraux, tribunaux des affaires de la sécurité sociale, tribunaux de commerce, conseil des prud'hommes...)

Soulignons, pour terminer, que le 18 janvier 2008, le Ministre de la Justice Rachida Dati a installé une Commission de réflexion sur la répartition des contentieux dite « Commission Guinchard » du nom de son président Serge Guinchard. Cette commission, composée de professionnels du droit et

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d'universitaires, a rendu son rapport au Garde des Sceaux le 30 juin 2008. Elle préconise la disparition pure et simple de la juridiction de proximité (proposition n°22).Nous étudierons donc successivement l'organisation de la juridiction de proximité, puis la compétence de cette juridiction.

• L'organisation de la juridiction de proximité.a) Le ressort territorial.

Différence avec les délimitations administratives. Ressorts fixés par décret en fonction des besoins : densité de la population et volume des affaires à traiter (il existe au minimum une juridiction de proximité dans le ressort de chaque cour d’appel). Le ressort territorial siège dans le bâtiment même du Tribunal d'instance. Ce ressort territorial correspond à celui du Tribunal d'instance, mais ce n'est pas le principe.Le siège et le ressort des juridictions de proximité sont fixés par décret pris en Conseil d'État :• en principe, le juge de proximité siège dans les locaux du tribunal d'instance. A terme (c'est-à-dire en 2008), il devrait exister au moins un juge de proximité par tribunal d'instance.• par exception, il est possible au juge de proximité de tenir des audiences foraines en « tout lieu public approprié ». Certaines conditions fixées par décret doivent toutefois être respectées. Ainsi, le juge de proximité peut tenir son audience dans les mairies avec l'accord du maire ou encore, de manière plus générale, dans tout local ouvert au public et aménagé à cet effet.• La loi n°2003-153 du 26 février 2003 portant statut des juges de proximité précise que c'est le magistrat du tribunal de grande instance chargé de l'administration du tribunal d'instance qui organise l'activité et les services de la juridiction de proximité. C'est donc lui qui fixe, par ordonnance annuelle, la répartition des juges de proximités dans les différents services de la juridiction. Pour cela, il doit recueillir l'avis du président du tribunal de grande instance concerné.• Par ailleurs, c'est le greffier du tribunal d'instance qui est chargé d'assurer le greffe de la juridiction de proximité.• Enfin, les juges de proximité sont inspectés annuellement par le président et le procureur du tribunal de grande instance.

b) La composition. α) Le recrutement des juges de proximité.

Les juges de proximité sont recrutés par nomination ministérielle. Peuvent être nommés juges de proximité par le Ministre de la justice, différentes catégories de personnes, dont notamment :• les anciens magistrats de l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif• les personnes âgées de 35 ans au moins. Ces personnes doivent satisfaire à une double condition :• être titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation juridique d'une durée au moins égale à quatre années d'études supérieures après le baccalauréat (Master I).• pouvoir justifier de quatre années au moins d'exercice professionnel dans le domaine juridique.

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• les personnes justifiant de 25 années au moins d'activité dans des fonctions impliquant des responsabilités de direction ou d'encadrement dans le domaine juridique, administratif, économique ou social les qualifiant pour l'exercice des fonctions judiciaires• les anciens fonctionnaires de catégorie A, les anciens militaires et autres anciens agents de l'État que leur expérience qualifie pour l'exercice des fonctions judiciaires.

Le recrutement ne suppose aucun examen, aucun concours. Leur recrutement se fait par nomination ministérielle. En effet, un dossier de candidature doit être déposé auprès de la Cour d'appel qui le transmettra au Ministre de la justice. Ce dernier décidera de la suite à donner à la candidature après avis du Conseil Supérieur de la Magistrature.

Plusieurs observations sont à formuler :• les juges de proximité prêtent serment lors de leur entrée en fonction,• les juges de proximité suivent une formation de cinq jours à l'ENM de Bordeaux. Ils prendront essentiellement connaissance, pendant ces 5 jours, des règles déontologiques qui leur sont applicables.• les juges de proximité sont nommés pour 7 ans, non renouvelables. Bien évidemment, un juge de proximité peut librement démissionner pendant son mandat,• on ne peut pas être juge de proximité au-delà de 75 ans. Au-delà 75 ans, le mandat du mandataire prend automatiquement fin.• il était prévu initialement de recruter 3000 juges de proximité entre 2002 et 2008. Au 1er Janvier 2005, seuls 306 juges de proximité ont été recrutés par le Ministère de la Justice.

β) Le statut des juges de proximité.

En réalité, le juge de proximité n'exerce ses fonctions qu'à temps partiel. On dit qu'il exerce des « vacations ».

Plusieurs remarques relatives aux vacations :• tout d'abord, les vacations de ce juge unique sont précisément fixées par les textes. Ainsi, ces derniers énoncent qu'un juge de proximité ne peut accomplir qu'un maximum de 15 vacations par mois et 132 par an sur onze mois, ce qui correspond environ à une audience par semaine.• ensuite, chaque vacation donne bien évidemment droit à une indemnité, appelée « indemnité forfaitaire de vacation ».• enfin, puisqu'il n'exerce ses fonctions qu'à temps partiel, le juge de proximité peut donc poursuivre une activité professionnelle. Il existe cependant quelques incompatibilités. Notamment les membres des professions libérales juridiques et judiciaires ne peuvent pas exercer les fonctions de juge de proximité dans le ressort du tribunal de grande instance dans lequel ils ont leur domicile professionnel.

Ce juge unique, qui ne porte pas la robe de magistrat, porte cependant un insigne autour du cou. Le Code de l'organisation judiciaire précise par ailleurs que le juge de proximité qui exerce encore une autre activité professionnelle ne peut pas faire état de sa qualité de juge dans sa vie professionnelle. Par exemple, il ne peut pas le mentionner sur ses cartes de visites

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professionnelles.

c) Le fonctionnement.

La juridiction de proximité statue à juge unique & le ministère d’avocats n'est pas obligatoire. Il existe plusieurs liens entre le juge de proximité et le juge d'instance. Nous savons déjà que la juridiction de proximité siège en principe dans les locaux du tribunal d'instance. Nous savons également que le greffe de la juridiction de proximité est celui du tribunal d'instance. Mais d'autres liens doivent encore être mentionnés. Ils correspondent à deux hypothèses bien distinctes :• d'une part, lorsqu'un juge de proximité a été nommé, la collaboration entre le juge de proximité et le juge d'instance se manifeste de deux manières différentes :• le juge de proximité peut être remplacé temporairement par le juge d'instance. Ce remplacement doit être justifié par l'absence momentanée ou l'empêchement momentané du juge de proximité (pour cause médicale ou professionnelle par exemple). Le remplacement est ordonné par le président du tribunal de grande instance, par ordonnance.• le juge de proximité peut renvoyer l'affaire au juge d'instance qui statuera alors en tant que juge de proximité. Ce renvoi est possible lorsque le juge de proximité est saisi d'une affaire dans laquelle il se heurte à une difficulté juridique sérieuse portant soit sur l'application d'une règle de droit, soit sur l'interprétation du contrat liant les parties. Ce renvoi est possible soit d'office, soit sur la demande d'une partie.

• d'autre part, lorsque aucun juge de proximité n'a encore été nommé, la loi du 9 mars 2004 prévoit alors que les fonctions de juge de proximité seront exercées, jusqu'à cette nomination, par le juge d'instance. Ici, nul besoin d'une ordonnance du président du tribunal de grande instance. Le juge d'instance exercera les fonctions de juge de proximité de plein droit.

• La compétence de la juridiction de proximité.a) La compétence territoriale.

Les règles du Tribunal d'instance : dans le ressort duquel est situé le domicile du défendeur. Exceptions : en matière contractuelle, c'est le ressort où se trouve le lieu où le contrat doit être exécuté qui prévaut.

b) La compétence d'attribution.

Initialement, la juridiction de proximité était compétente au civil pour les actions personnelles ou mobilières portant sur un montant inférieur ou égal à 1500 euros. La loi du 26 janvier 2005 revoit la compétence du juge de proximité. Plusieurs modifications ont été apportées par ce texte :• Première modification : le juge de proximité est désormais compétent au civil pour toutes les affaires personnelles ou mobilières portant sur un montant inférieur ou égal à 4000 euros (article L. 231-3 alinéa 1er du code de l'organisation judiciaire). Ses décisions sont toujours rendues en premier et dernier ressort. L'appel n'est donc pas possible. Seul un pourvoi en cassation - fort illusoire en raison de son coût et de sa longueur - est

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possible. Pour un exemple de cassation d'un jugement rendu par un juge de proximité : dans une récente affaire, plusieurs personnes avaient saisi le juge de proximité de Toulon. Elles avaient réservé par internet un mobile-home de 20 m² pour la période du 19 juillet 2003 au 9 août 2003 pour 1365 euros... Or, arrivées sur place, ces personnes ont vite déchanté : fuites de gaz ; panne de réchaud, fourmis dans les placards, toilettes bruyantes, cassées et scotchées, chasse d'eau défaillante, congélateur hors service, douche non raccordée, moustiques et frelons, mauvaises odeurs, compteur d'électricité disjoncté, serrure cassée... Elles saisissent le juge de proximité de Toulon et demandent le remboursement du prix de la location. Le juge de proximité de Toulon leur donne satisfaction. En outre, il condamne le bailleur à une amende civile de 1500 euros. Les termes du jugement étaient les suivants : « Le bailleur n'a pas craint d'exclure du champ d'examen du litige ici soumis, ce dont la juridiction de céans se devra de tirer les conséquences légales applicables à ces agissements là encore volontaires, d'une grossière déloyauté et révélateurs de la mauvaise foi aiguë et du grave manquement au respect dû à la Justice, ensemble d'éléments qui démontrent la piètre dimension de la défenderesse qui voudrait rivaliser avec les plus grands escrocs, ce qui ne constitue nullement un but louable en soi sauf pour certains personnages pétris de malhonnêteté comme ici le bailleur doté d'un quotient intellectuel aussi restreint que l'est la surface habitable de sa caravane dont la satisfaction des clients qu'il parvient à séduire en les trompant sur les qualités substantielles du bien loué ne figure absolument pas au nombre de ses préoccupations manifestement strictement financières et dont la cupidité le dispute à la fourberie ».Le bailleur, qui ne pouvait interjeter appel, s'est pourvu en cassation. Par un arrêt rendu le 14 septembre 2006, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation casse le jugement rendu par le juge de proximité de Toulon sur le fondement de l'article 6 §1 Conv. EDH aux termes duquel « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial ». Or le juge de Toulon ne l'était absolument pas en rendant son verdict ! (V. JCP G 2006, Actualités, n°537).

• Deuxième modification : le juge de proximité connaît également, mais cette fois-ci à charge d'appel, des demandes indéterminées qui trouvent leur origine dans l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas 4000 euros (article L. 231-3 alinéa 2 du Code de l'organisation judiciaire). Par exemple, une action en garantie des vices cachés peut être portée devant le juge de proximité si le prix de vente de la chose vendue ne dépasse pas 4000 euros. Plus généralement, cette hypothèse concerne toute action en nullité ou en résolution d'un contrat dont l'obligation n'excède pas 4000 euros.

• Troisième modification : la loi du 26 janvier 2005 accorde désormais compétence expresse au juge de proximité pour connaître en dernier ressort des actions relatives à l'application de l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989 sur l'amélioration des rapports locatifs, c'est-à-dire des demandes concernant le dépôt de garantie par le locataire et, notamment, sa restitution, mais seulement dans la limite de 4000 euros. Au delà de ce seuil, on retrouvera la compétence du tribunal d'instance.

• Quatrième modification : le juge de proximité peut également connaître, dans la limite de sa compétence, des demandes d'injonction de payer (article 1406 CPC - donc de 1 à 4000 euros) et des demandes d'injonction de faire

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(article 1425-1 CPC - donc pour les créances d'une valeur comprise entre 1 et 4000 euros). Ces compétences lui ont été attribuées par le décret du 23 juin 2003 pris en application de la loi du 9 septembre 2002.

• Cinquième modification : le juge de proximité peut dorénavant être saisi tant par une personne physique que par une personne morale, ce qui n'était pas possible sous l'empire de la loi du 9 septembre 2002.

• Sixième modification : le juge de proximité peut également être saisi à présent par une personne physique pour ses besoins professionnels.

Cette loi du 26 janvier 2005 était la bienvenue : en effet, les dispositions issues de la loi du 9 septembre 2002 s'étaient vite avérées mal rédigées, donc confuses et sources de difficultés d'interprétation et d'application. Le décret du 23 juin 2003 s'était efforcé de réduire ces difficultés, mais avait plutôt compliqué les choses. Finalement, la loi du 26 janvier 2005 clarifie les règles de compétence du juge de proximité. L'application de cette loi a été organisée par un décret n°2005-460 du 13 mai 2005.

• Le tribunal de Commerce.

Le tribunal de commerce présente deux caractères qui lui sont propres :• D'une part, le tribunal de commerce est l'une des plus anciennes juridictions du monde : elle remonte au XIVe siècle, dans les Républiques italiennes marchandes de Gênes et de Venise. Ces juridictions étaient composées de commerçants. Le tribunal de commerce a été transposé dans le système juridique français au Moyen-âge.• D'autre part, le tribunal de commerce n'est pas seulement l'une des plus anciennes juridictions de l'ordre juridique français, elle est également la seule juridiction qui ait été maintenue à la Révolution de 1789. En effet, la plupart des juridictions ont été abolies par l'Assemblée constituante. Seuls les tribunaux de commerce ont survécu aux réformes révolutionnaires.

Actuellement, les tribunaux de commerce fonctionnent toujours sur le même modèle. Ils sont notamment composés de commerçants élus appelés « juges consulaires ».Ce modèle ancestral est aujourd'hui critiqué : plusieurs propositions de réformes ont ainsi été faites. Toutes visent à introduire au sein du tribunal de commerce des magistrats de carrière rémunérés, aux côtés des juges consulaires bénévoles. Mais ces derniers ont cependant toujours été hostiles à ces propositions de réforme, et l'ont exprimé en démissionnant massivement, compromettant pendant un temps le bon fonctionnement des tribunaux de commerce. C'est pour cette raison qu'aucune proposition de réforme n'a jamais aboutie.Nous étudierons successivement l'organisation du tribunal de commerce, puis sa composition et enfin, sa compétence.

• L'organisation du tribunal de commerce.a) Le ressort territorial.

En principe, il existe aujourd'hui environ un tribunal de commerce par arrondissement (soit 191 tribunaux de commerce pour la France entière). Tel

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est cependant le principe. En effet, la création ainsi que la suppression d'un tribunal de commerce se font en fonction de l'activité commerciale de chaque région.Lorsqu'il n'existe aucun tribunal de commerce dans une région géographique, les affaires commerciales sont alors jugées par le tribunal de grande instance statuant commercialement, c'est-à-dire en appliquant les règles de procédure commerciale (article L. 721-2 du code de commerce).Les tribunaux de commerce les plus importants sont subdivisés en chambres spécialisées. Chaque chambre est composée de 8 juges et est présidée par un président désigné chaque année par l'assemblée générale du tribunal de commerce.

b) La composition du tribunal de commerce.

Il est composé de juges non professionnels. Le nombre varie en fonction de l’activité. Ces juges sont assistés par un greffe, qui est un fonctionnaire en temps normal. Mais il devient un officier ministériel devant le tribunal de commerce : nommé par un décret du garde des sceaux. Il se transmet par voie de succession. Notons qu'il n'y a pas de parquet permanent et aucun Procureur de la République n'intervient, mais il peut néanmoins participer aux audiences.

α) Le mode de recrutement des juges consulaires.

Le tribunal de commerce est composé de juges titulaires et de juges suppléants dont le nombre est fixé par décret. Ce nombre varie en fonction de l'importance de l'activité du tribunal. Par exemple, le tribunal de commerce de Paris compte à lui seul 166 juges.Deux observations :• Les juges du tribunal de commerce sont des juges occasionnels, dans la mesure où ils exercent leurs fonctions judiciaires tout en maintenant leur activité professionnelle. Pour cette raison, ils bénéficient d'une grande expérience professionnelle très utile au règlement des litiges commerciaux. Notons par ailleurs qu'ils remplissent leurs fonctions bénévolement (article L. 722-16 du code du commerce). Ils n'ont droit qu'à certaines indemnités en raison des frais qu'ils ont personnellement engagés pour l'accomplissement de leur mission.• Les juges du tribunal de commerce sont également des juges élus. Trois questions se posent alors :

Première question : comment ces juges sont-ils élus ? → En réalité, l'élection est à deux degrés (Article L. 723-2 et L. 723-3 du code de commerce) :• tout d'abord, les commerçants de l'arrondissement élisent un collège électoral. Les membres élus de ce collège sont appelés « délégués consulaires ». Le nombre de délégués varie en fonction de l'importance de la circonscription.• puis, le collège électoral élit, avec les membres en exercice du tribunal de commerce ainsi que les anciens membres du tribunal de commerce ayant demandé à être inscrit sur la liste, les nouveaux membres du tribunal de commerce, c'est-à-dire les juges consulaires. Le scrutin est plurinominal majoritaire à deux tours (article L. 723-9 s. du code du commerce). Sont déclarés élus au premier tour les candidats ayant obtenu un nombre de voix

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au moins égal à la majorité des suffrages exprimés et au ¼ des électeurs inscrits. Si aucun candidat n'est élu ou s'il reste des sièges à pourvoir, l'élection est acquise au second tour à la majorité relative des suffrages exprimés. Si plusieurs candidats obtiennent le même nombre de voix au second tour, le plus âgé est proclamé élu.

Deuxième question : qui peut élire, c'est-à-dire participer au vote ? Pour être électeur, il faut être commerçant (commerçant personne physique ou commerçant personne morale), de nationalité française, remplir des conditions de bonne moralité et exercer le commerce dans l'arrondissement (article L. 723-2 du code de commerce).

Troisième question : qui peut se faire élire, c'est-à-dire poser sa candidature aux fonctions de juge consulaires ? Pour être éligible, il faut être français, avoir 30 ans au moins, remplir des conditions de bonne moralité et avoir exercé la profession de commerçant pendant au moins 5 ans dans ou hors arrondissement. La loi n'exige aucune formation particulière (article L. 723-4 s. du code de commerce).

Le juge du tribunal de commerce est élu pour un mandat de 2 ans, suivi d'un mandat de 4 ans renouvelables trois fois. Par conséquent, son mandat est au maximum de 14 ans (article L. 722-6 du code de commerce). Chaque tribunal de commerce est présidé par un président. Celui-ci est élu par les magistrats du tribunal de commerce réunis en assemblée générale. Seul un juge ayant exercé des fonctions dans le tribunal depuis au moins 6 ans peut être élu président du tribunal de commerce (article L. 722-11 du code de commerce). Notons, pour finir, que les juges consulaires ne sont pas assistés en permanence d'un Parquet. Ce n'est que de manière occasionnelle que le Procureur de la République du Tribunal de grande instance pourra intervenir devant le tribunal de commerce, lorsqu'il l'estimera opportun notamment.

β) Le statut des juges consulaires.

Le juge consulaire ne peut exercer qu'après avoir prêté serment. De même que comme n'importe quel juge, tout manquement a l'honneur, à la probité ou à la dignité et au devoir de sa charge constitue une faute disciplinaire. Les juges consulaires ne peuvent pas exercer des fonctions analogues dans un autre tribunal. De plus, ils n'exercent cette fonction que de manière occasionnelle et exercent leur fonction de commerçant en même temps. Ils ont le droit a une indemnité en raison des frais engendrés par leur fonction mais sont bénévoles. La justice commerciale est ici assurée par des magistrats non professionnels qui ont une formation initiale et continue pendant 10 jours (soit pendant son mandat).

c) Le fonctionnement du tribunal de commerce.

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Il est présidé par un président élu pour 4 ans. L'élection se fait à bulletin secret par tous les juges consulaires qui vont se réunir en assemblée générale. Il faut une majorité absolue au deuxième tour et au troisième, seule une majorité relative est requise. Pour être élu, il faut avoir exercé la fonction de juge consulaire pendant au moins 6 années. Chaque année le président élu va désigner un ou plusieurs vice-présidents qui seront nécessairement des juges consulaires ayant exercé leur fonction depuis au moins 3 ans. Le président du tribunal de commerce détient les fonctions administratives : direction, organisation, discipline & il détient des attributions juridictionnelles : c'est lui qui rend des ordonnances sur requête, mais il rend aussi des ordonnances de référés, des ordonnances d'injonctions de payer en vue d'un recouvrement de créance commerciale. Lorsque que l'activité du tribunal est importante, on procèdera au découpage du tribunal en chambres. Au minimum, une chambre contient 8 juges consulaires, possède un président de chambre qui est lui-même désigné par le président du tribunal après avis de l'assemblée générale. Seuls peuvent être président de chambre les juges consulaires qui ont exercés pendant au moins 3 ans.La collégialité n'est pas toujours la même : les juges rendent des jugements à 3 ou plus mais le nombre doit être impaire. Lorsqu'ils statuent sur une question de redressement et de liquidation judiciaire, la formation de jugement doit comprendre une majorité de juges qui ont exercés leurs fonctions depuis au moins deux ans.Les débats devant ce tribunal sont publics sauf exception lorsque les jugements passent en chambre du conseil, soit en huis clos dans le cas précédent par exemple. Le tribunal de commerce contient une assemblée générale qui n'a aucun pouvoir juridictionnel mais possède des attributions administratives (notamment l'élection du président du tribunal de commerce).

2) La compétence du tribunal de commerce.a) La compétence territoriale.

Racione loci. Est compétent le tribunal dans le ressort duquel est situé le domicile du défendeur. Si le défendeur est un commerçant, son domicile personnel sera pris en compte. Si le défendeur est une personne morale, ca sera le siège de cette personne morale qui déterminera le tribunal de commerce compétent. Il existe néanmoins une exception : en matière contractuelle, le tribunal compétent est celui dans le ressort duquel se trouve le lieu où le contrat doit être exécuté.

b) La compétence d'attribution.

Racione materiae. Est compétent le tribunal dans toutes les affaires en matière commerciale. Le montant du litige n'est pas pris en considération. Le taux du ressort est fixé à 4000 euros : lorsque le montant est inférieur ou égal à 4000 euros, le juge tranche en premier et dernier ressort ce qui signifie qu'un pourvoi en cassation est possible, mais pas un appel. Si le montant du litige s'avère être supérieur à 4000 euros, le juge tranche alors en premier ressort ce qui signifie que le pourvoi en cassation, mais aussi

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l'appel sont possibles.En droit, l'acte qui lie un particulier à un commerçant est appelé un acte mixte : si le demandeur est le commerçant, le tribunal de commerce ne sera jamais compétent (tribunal de grande instance ou d'instance), mais si le demandeur est non commerçant, la loi reconnaît à ce commerce une option de juridiction : il peut choisir de saisir le tribunal de commerce ou les juridictions civiles.

• Le conseil de prud'hommes.

Les conseils de prud'hommes sont appelés à juger les litiges individuels, nés d'un contrat de travail ou d'apprentissage. Ces conseils ont été crées à Lyon sous l'Ancien Régime. C'est la loi du 18 mars 1806 qui a recrée les prud'hommes, afin qu'ils existent dans toute la France. Cette loi a étendu la compétence de cette juridiction du travail à l'ensemble des professions commerciales et artisanales. Il existe 208 conseils des prud'hommes en France et la réglementation se trouve dans le code du travail.

1) L'organisation du conseil de prud'hommes.a) Le ressort territorial.

Depuis la loi du 18 Janvier 1979, il existe au moins un conseil de prud'hommes dans le ressort de chaque tribunal de grande instance. Ce principe connait cependant des exceptions selon l'importance de l'activité judiciaire et de la démographie.

b) La composition du conseil de prud'hommes.

Comme pour le tribunal de commerce, il est composé de juges non professionnels : les conseillers prud'homaux. Leur nombre varie en fonction de l'activité judiciaire de la juridiction. Ces conseillers prud'homaux sont assistés d'un greffe et le parquet n'est pas permanent mais occasionnel.

α) Le mode de recrutement des conseillers prud'homaux.

Tout comme les juges consulaires, les conseillers prud'homaux sont également des juges élus directement au scrutin de liste à la représentation proportionnelle, sans panachage : en sein de deux collèges distincts : soit, d'un coté le collège des employeurs, soit de l'autre coté, le collège des salariés. Chacun de ces collèges est divisé en sous collèges : une section de l'encadrement (les cadres), une section de l'industrie, une du commerce et un service commercial mais aussi agricole ainsi que celle des activités diverses.• Pour être électeur, il faut soit :• Être employeur,• Être un salarié âgé de 16 ans révolus,• Exercer une activité professionnelle dans le ressort du conseil de prud'hommes,• Être de bonne moralité.

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La nationalité Française n'étant pas une des conditions requises pour être électeur.

• Pour être éligible, au contraire, il faut :• Avoir la nationalité Française,• Être inscrit sur les listes électorales,• Avoir plus de 21 ans,• Être de bonne moralité.

Dans chaque collège considéré, on va recenser les candidatures & les candidats seront élus par le collège de chacune de leur classe (employeurs ou salariés). Le vote se fait pendant le temps du travail avec maintien du salaire & le lien doit se faire dans l'entourage du lieu de travail. Les contestations se font auprès du juge d'instance. Lorsque les conseilleurs prud'homaux sont élus (il y a des juges prud'homaux employeurs et des salariés), il reçoivent un statut.

β) Le statut des conseillers prud'homaux.

Les conseillers prud'homaux sont élus pour 5 ans et leur mandat est renouvelable. Lorsqu'ils sont élus, ils doivent prêter serment et jurent devant les juges du tribunal de grande instance. Après serment, ils entrent immédiatement en fonction. Une formation juridique de 6 semaines leur est fournie en Faculté de Droit. Les salariés élus perçoivent normalement leur salaire. Les obligations des juges prud'homaux et des juges professionnels sont les mêmes : ils ont l'obligation de juger, de garder le secret des délibérés. Le conseiller va rendre la justice de manière impartiale et ne doit recevoir aucune rémunération des plaideurs. Leur responsabilité est soumise à un régime particulier organisé aux articles L-141-2 et L-141-3 du code le l'organisation judiciaire.L'employeur élu n'est confronté à aucune problématique. En revanche, pour exercer la fonction juridictionnelle, les salariés élus se trouvent dans une situation problématique : les absences fréquentes. Pour éviter toutes sortes de sanctions d'un employeur à un salarié, le code du travail dit que les salariés sont autorisés à s'absenter autant que nécessaire pour qu'ils puissent exercer convenablement leur fonction juridictionnelle & les employeurs doivent leur verser intégralement leur salaire, qui sera ensuite remboursé à l'employeur par l'État. Dans l'hypothèse où les conseillers siègent en dehors de leurs heures de travail, ils perçoivent de l'État une vacation dont le montant est fixé par un décret, soit 7 euros de l'heure.Le conseiller prud'homal possède également un statut protecteur : l'employeur ne peut le licencier au prétexte d'absence pour exercice de fonction juridictionnelle. Mais le conseiller prud'homal salarié demeure protégé pendant les 6 mois qui suivent la fin de son mandat (il ne peut être licencié que pour faute personnelle et qu'avec l'accord de l'inspecteur du travail). Toute entrave par l'employeur ou par un tiers dans l'exercice des fonction judiciaires d'un conseiller prud'homal salarié est pénalement sanctionnée (le délit d'entrave est prévu par le code du travail soit une peine de prison d'un an et d'une amende de 3700 euros).

c) Le fonctionnement du conseil de prud'hommes.

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A la tête du conseil de prud'hommes se trouve un président & un vice président, qui sont tous deux élus pendant un an par l'assemblée générale du conseil. Si en 2010, par exemple, l'élu est un employeur, le vice-président doit être un salarié. L'année suivante, les rôles seront inversés. On appelle ceci la règle de l'alternance. Chaque conseil de prud'hommes est composé de 5 chambres spécialisées :• La section de l'encadrement,• L'industrie,• Le commerce et les services commerciaux,• L'agriculture,• Et enfin, les activités diverses.

Chaque section contient au moins 3 conseillers employeurs et 3 conseillers salariés.Le ministère d'avocat n'est pas obligatoire. Au sein de chaque section, la procédure prud'homale comporte 2 phases successives : l'examen par le bureau de conciliation de la section puis par le bureau de jugement.Le bureau de conciliation : l'examen se fait sous huis clos. Le bureau est composé d'un conseiller prud'homal employeur et un conseiller prud'homal salarié. Si c'est le salarié qui est président, l'année suivante il y aura alternance : ce sera l'employeur. Le salarié et l'employeur en conflit doivent être présents tous les deux physiquement, il n'y a pas de représentation possible même s'ils peuvent être assistés par un avocat. Deux issues sont possibles :• Si la conciliation n'aboutit pas, le bureau de conciliation renverra l'affaire devant le bureau de jugement. Le bureau de conciliation peut prendre des mesures urgentes : il peut allouer des provisions sur les salaires dans la limite de 6 mois de salaire, il peut donc demander à l'employeur de verser une avance de salaire, ordonner des mesures d'instruction comme la position de sceller, il peut également ordonner la délivrance de certificats de travail ou bulletins de paye. Le bureau de jugement est composé de deux conseillers salariés et deux conseillers employeurs qui vont se prononcer sur le fond de l'affaire en prenant une décision. Ici, la présence physique des parties n'est pas obligatoire. Elles peuvent se faire représenter par un avocat. Dans le cas de partage égal des voix, l’audience est renvoyée a une audience ultérieure avec les même juges plus un juge d'instance qui départagera les parts.• Si la conciliation aboutit, un procès verbal sera dressé et l'affaire sera terminée.

2. La compétence du conseil de prud'hommes.a) La compétence territoriale.

Le législateur a fixé des règles particulières pour protéger les intérêts légitimes du salarié qui est censé être dans une situation plus faible que l'employeur. Le code du travail nous dit que le conseil de prud'hommes compétent est celui dans le ressort duquel se trouve l'établissement du travail accompli. S'il n'y a pas d'établissement (dans le cas des professions à domicile) alors on prend en compte le domicile du salarié. Ces règles ne sont pas absolues car la loi accorde parfois au salarié une option de compétence. Pour certaines situations, le code du travail dit que « Le salarié peut saisir le conseil de prud'hommes soit du lieu où l'engagement est contracté, soit du lieu où l'employeur est établi ».

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b) La compétence d'attribution du conseil de prud'hommes.

Le conseil de prud'hommes est compétent pour trancher les litiges individuels et privés nés d'un contrat de travail ou d'apprentissage, quelque soit le montant du litige. Cependant, le litige entre un salarié et un employeur doit présenter certaines conditions : il doit être individuel (un salarié contre un employeur), être de nature privée, concerner la conclusion, l’exécution ou la dissolution du contrat de travail (tous les litiges qui n'ont pas rapport avec le contrat ne concernent pas les prud'hommes). Quelque soit la valeur du litige, le conseil de prudhommes est compétent & il juge en premier et dernier ressort lorsque le montant du litige est inférieur à 4000 euros & en premier ressort lorsque le montant est supérieur ou égal à 4001 euros.

E) Le tribunal paritaire des baux ruraux.

Ce tribunal est une juridiction spécialisée car elle juge le contentieux rural et plus précisément le contentieux rural qui oppose le preneur (le locataire) rural au bailleur rural. Cette juridiction est règlementée par le code rural. Elle a été crée en 1940 sous le régime de Vichy.

1. L'organisation du tribunal paritaire des baux ruraux.a) Le ressort territorial.

Il existe un tribunal paritaire au siège de chaque tribunal d'instance. Si un tribunal paritaire ne peut fonctionner, il peut être supprimé par décret et ses attributions seront alors exercées par le juge d'instance qui appliquera les règles prévues pour le tribunal paritaire des baux ruraux. Ce sera le juge d'instance lui même qui interviendra comme juge et appliquera les règles du tribunal des baux ruraux.

b) La composition.

C'est une juridiction échevinale et présidée par le juge d'instance qui est assisté par 4 juges non professionnels : deux sont appelés des assesseurs et les deux autres sont des bailleurs. Ils sont élus et sont séparés en deux collèges : les bailleurs et les preneurs.Pour être électeur, il faut remplir un certain nombre de conditions :• Avoir 18ans,• Être français ou ressortissant de l'Union Européenne,• Jouir de tous ses droits civils et politiques,• Être domicilié dans le ressort du tribunal paritaire,• Être propriétaire ou locataire d'une terre agricole.

Pour être éligible, les conditions sont différentes. Il faut :• Avoir 26 ans,• Être Français ou ressortissant de l'Union Européenne,• Jouir de ses droits civils et politiques,

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• Être domicilié dans le ressort du tribunal paritaire,• Posséder depuis au moins 5 ans la qualité de bailleur ou de preneur (selon le collège). Les juges élus ont un mandat de 6 ans et vont prêter serment dans le tribunal qui dispose : d'un greffe (le même que celui du tribunal d'instance), d'un parquet non permanent et où le ministère d'avocat est non obligatoire.

• Le fonctionnement.

Le tribunal paritaire des baux ruraux est souvent séparé en sections : le bau à ferme et le bau à métayage. Chaque section comporte 4 assesseurs : deux bailleurs et deux preneurs (bailleur à ferme & bailleur à métayage ou preneur à ferme & preneur à métayage). Ce n'est pas une juridiction permanente, le tribunal paritaire ne siège que par sessions et seulement quelques fois dans l'année. Les audiences sont publiques et se tiennent dans le tribunal d'instance. Le tribunal paritaire intervient en collégialité : le juge d instance & 4 assesseurs jugent. On a une situation de jugement à juge unique lorsque la collégialité ne peut se réunir au complet : c'est alors le juge d'instance qui juge seul, les autres juges non professionnels étant des agriculteurs et pouvant donc être indisponibles. Ce tribunal ne fonctionne pas très bien et on propose souvent de supprimer ce tribunal.

• La compétence du tribunal paritaire des baux ruraux.a) La compétence territoriale.

Racione loci. Est compétent le tribunal paritaire dans le ressort duquel est situé l'immeuble concerné.

b) La compétence d'attribution.

Racione materiae. Est compétent le tribunal pour régler tous les litiges qui s'élèvent entre un bailleur rural et sont preneur, quelque soit la nature juridique du bailleur ferme et quelque soit le montant des litiges. Lorsqu'il se réunit, le tribunal rendra des jugements en premier et dernier ressort pour un litige inférieur à 4000 euros et en premier ressort pour un litige supérieur à 4000 euros.

F) Les juridictions de la sécurité sociale.

La sécurité sociale fonctionne en deux types de contentieux :• Toutes les questions juridiques qui opposent les organismes de la sécurité sociale et les usagers forment le contentieux général. Ces contentieux relèvent de la compétence exclusive du tribunal des affaires de la sécurité sociale.• Les questions purement techniques telles que l'invalidité, le handicap & les cures thermales forment le contentieux technique. Ces contentieux relèvent du tribunal du contentieux et de l'incapacité.

1. Le tribunal des affaires de la sécurité sociale. a) L'organisation de ce tribunal.

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Le ressort de ce tribunal est fixé suivant la population et le volume des affaires à juger. Le tribunal est composé de façon échevinale, soit un juge professionnel et deux juges non professionnels. Le juge professionnel est un magistrat du siège du tribunal de grande instance dans le ressort duquel le tribunal des affaires de la sécurité sociale a son siège. Ce magistrat est désigné pour 3 ans et sera désigné par ordonnance rendue par le premier président de la cour d'appel (= président de la cour d'appel) et aura la qualité de président du tribunal ds affaires de la sécurité sociale. Ce président peut rendre des ordonnances en référé dans les limites de la compétence du tribunal des affaires la sécurité sociale. Les deux juges non professionnels sont appelés des assesseurs qui sont des citoyens nommés pour 3 ans par le premier président de la cour d'appel après avis du président du tribunal de la sécurité sociale. Ces citoyens sont issus d'une liste dressée dans chaque tribunal des affaires de la sécurité sociale par les autorités compétentes de l'État en matière de sécurité sociale. L'un des citoyens doit forcement être salarié et l'autre représente nécessairement les employeurs ainsi que les travailleurs indépendants. Un nombre égal d'assesseurs suppléants sont désignés.Pour être assesseur, il faut :• Être Français,• Jouir de ses droits civils et politiques.

Avant d'entrer en fonction, il faut prêter serment devant la cour d'appel. Les fonctions d'assesseurs sont faites bénévolement et lorsqu'un assesseur est salarié, l'employeur a l'obligation légale de le laisser pratiquer correctement ses fonctions sinon l'employeur se rendra coupable de délit d'entrave. Le tribunal ne possède pas de greffe mais un secrétariat composé d'un secrétaire, qui prête serment devant la cour d'appel. Il n'y a aucun parquet permanent mais un parquet occasionnel, les audiences sont publiques et le ministère d'avocat n'est pas obligatoire. Le tribunal des affaires de la sécurité sociale ne peut pas trancher le litige immédiatement. Il doit d'abord essayer de concilier les parties.

b) La compétence du tribunal des affaires de la sécurité sociale.

Le tribunal des affaires de la sécurité sociale territorialement compétent est celui dans le ressort duquel se trouve le domicile du bénéficiaire de prestations ou de celui de l'employeur. Le tribunal des affaires de la sécurité sociale statue sur les litiges concernant le contentieux général de la sécurité sociale. Les règles du contentieux se trouvent dans le code de la sécurité sociale. Comme pour les autres juridictions d'exception, lorsque le montant du litige est inférieur à 4000 euros, le tribunal juge en dernier ressort et si le montant du litige est supérieur à 4000 euros, le tribunal juge en premier ressort.

• Le tribunal du contentieux de l'incapacité.

Ici, ce sera un contentieux technique car les litiges portent sur des questions médicales comme, par exemple, un handicap.

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a) L'organisation d tribunal du contentieux de l'incapacité.

Le ressort territorial de ce tribunal est le ressort territorial de la direction régionale de sécurité sociale. La composition est échevinale : un juge professionnel qui est un magistrat honoraire de l'ordre judiciaire ou administratif va présider le tribunal. Ce juge professionnel est nommé pour 3 ans renouvelables par un arrêté ministériel. En réalité dans chaque région, le premier président de la cour d'appel va établir une liste de 4 noms & le garde des sceaux (le premier ministre) va en choisir un qui deviendra le président de ce tribunal. Les deux assesseurs sont des citoyens désignés pour 3 ans par le premier président de la cour d'appel. Pour devenir assesseur, il faut :• Être français,• Avoir 23 ans,• Ne pas avoir de casier judiciaire.

Ce tribunal n'a pas de greffe mais un secrétariat (tout comme le tribunal des affaires de la sécurité sociale). Le parquet est occasionnel et n'est pas forcement d'avocat.

b) La compétence du tribunal du contentieux de l'incapacité.

Le tribunal compétent est celui dans le ressort du quel se trouve le domicile du bénéficiaire des prestations ou de l'employeur. Ce tribunal particulier traite du contentieux technique de la sécurité sociale. Ce tribunal rend des jugements en premier ressort quelque soit le montant du litige. L'appel ne doit pas être interjeté devant la cour d'appel mais devant une cour d'appel particulière : la cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des actions du travail. Cette cour se situe à Amiens. Elle rend des arrêts que l'on peut frapper en pourvoi en cassation.

Section 2. Les juridictions civiles du 2nd degré.

En matière de juridiction d'appel, il existe une juridiction civile de droit commun, la cour d'appel. Il existe aussi des juridictions d'exception du second degré.

§1. La cour d'appel

C'est la seule juridiction civile de droit commun du second degré. Elle a compétence pour statuer sur des affaires déjà jugées en premier ressort. La cour d'appel est hiérarchiquement supérieure aux juridictions du premier degré. Les magistrats ont une expériences professionnelle beaucoup plus grande que ceux des magistrats du premier degré.

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A. L'organisation de la cour d'appel.1. Le ressort territorial.

Le ressort territorial de chaque cour d'appel couvre au minimum un département et au maximum trois départements (en fonction de la population et de l'activité judiciaire). Il existe 35 cours d'appel en France. Le siège de la cour d'appel est fixé par décret du conseil d'état. Selon une tradition historique, les cours d'appel sont installées là où siégeaient les Parlements sous l'Ancien Régime. La cour d'appel prend le nom de la ville où elle siège. Par exemple : en Alsace, la cour d'appel est située à Colmar. On l'appelle donc la cour d'appel de Colmar.

• La composition de la cour d'appel.

Cette juridiction n'est composée que de magistrats professionnels qui sont appelés conseillers de la cour d'appel. Ces conseillers sont des magistrats d'un rang élevé par rapport aux autres magistrats de première instance. Depuis la loi du 19 janv 1995, des juges non professionnels peuvent être nommés à la cour d'appel pour être conseillers en service extraordinaires. Ils sont nommés par le garde des sceaux en fonction de leur compétence et de leur expérience professionnelle. A la tête de la cour d'appel, on trouve le premier président de la cour d'appel qui est assisté par un greffe. Le parquet est permanent et dirigé par un procureur général de la cour d'appel assisté par des avocats généraux.

• Le fonctionnement de la cour d'appel. La cour d'appel rend des arrêts. Les audiences sont publiques et comme pour le tribunal de grande instance, le ministère d'avocat est obligatoire. Devant une cour d'appel, on appelle l'avocat un avoué. Une cour d'appel est divisée en chambres qui seront formées par des conseillers. Cette chambre comportera un président de chambre. Les chambres de cour d'appel peuvent être subdivisées en sections. Il existe 6 chambres dans la cour d'appel :• La chambre civile,• La chambre sociale,• La chambre commerciale,• La chambre d'instruction,• La chambre correctionnelle,• La chambre des mineurs.

La cour d'appel peut intervenir en :• Audiences ordinaires et les magistrats portent la toge noire. Les audiences sont publiques et le ministère d'avoués obligatoire.• Audiences solennelles, notamment en cas de renvoi après cassation : 5 conseillers issus de deux chambres différentes de la cour d'appel et cette audience est présidée par le président de la cour d'appel. Dans ce cas, port de la toge rouge.• Assemblée des chambres : cette assemblée siège dans les cas exceptionnels prévues par la loi. Par exemple : en matière de discipline pour avocat et pour les huissiers. Elle sera constituée par des représentants de deux chambres de la cour d'appel. L'audience n'est pas publique.• Assemblée générale : présidence du premier président avec aucun rôle

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juridictionnel mais un rôle administratif propre à la cour d'appel. Trois assemblées générales : magistrats de siège, parquet, assemblée plénière.

B. La compétence de la cour d'appel.1. La compétence territoriale de la cour d'appel.

La cour d'appel est compétente pour juger des appels interjetés contre les décisions rendues en premier ressort par toutes les juridictions du premier degré ayant leur siège dans son ressort territorial.

• La compétence d'attribution de la cour d'appel. a) La compétence d'attribution de la cour d'appel.

La cour d'appel est la seule juridiction de droit commun du second degré et à ce titre, elle a compétence de principe pour connaître de tous les appels formés contre les décisions rendues en première instance par toutes les juridictions de son ressort territorial, à l'exception des appels dont l'examen a été expressément confié par la loi à une autre juridiction. En matière civile, la cour d'appel connait des affaires formées en première instance et en premier ressort par le tribunal d'instance, de commerce, le conseil de prud'hommes, le tribunal paritaire des baux ruraux et le tribunal de sécurité sociale. Lorsque la cour d'appel intervient, elle rejuge l'affaire comme si aucun juge n'avait jamais traité le dossier. Cela porte un mot : l'appel produit un effet dévolutif, ce qui signifie que la cour d'appel doit rejuger l'affaire comme si aucun jugement n'avait été rendu. La cour d'appel ne peut statuer que sur des questions qui ont été tranchées : les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel aucune demande nouvelle sinon la demande est irrecevable.Deux observations sont à faire :• Sur 35 cours d'appel qui existent aujourd’hui, 10 ont reçu une compétence exclusive sur la propriété industrielle.• La cour d'appel de Paris est la seule qui est compétente pour examiner les appels formés pour les décisions contre le conseil de la concurrence ou en droit boursier.

b) La compétence d'attribution du premier président de la cour d'appel.

• S'agissant des attributions administratives du premier président de la cour d'appel :• Le premier président exerce un pouvoir de direction, de contrôle, il veille à la discipline des magistrats du siège qui exercent au sein de la cour d'appel. Il exerce un pouvoir de discipline sur tous les magistrats du siège de sa cour mais aussi sur tous les magistrats du siège de toutes les juridictions.• Le premier président de la cour d'appel est d'ailleurs chargé chaque année de noter chacun des magistrats du siège. Cette note aura une influence sur l'avancement du magistrat. Le premier président va également nommer les magistrats chargés de présider les cour d'assises (qui jugent les crimes).• Et enfin, ce premier président doit inspecter chaque année les juridictions de première instance de son ressort et rendre compte de leur

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fonctionnement au garde des sceaux.

• S'agissant ensuite de ses attributions juridictionnelles du premier président de la cour d'appel :• Le premier président statue seul en appel sur les contestations des honoraires d'avocats.• Une nouvelle mission a été dévolue au premier président de la cour d'appel par deux lois : celles du 15 Juin & du 30 Décembre 2000. Il lui incombe désormais de se prononcer seul sur les demandes d'indemnisation des personnes placées en détention provisoire et bénéficiant d'une décision de non-lieu, d'une relaxe ou d'acquittement (articles 149 et suivants du code pénal).• Le premier président rend des ordonnances sur requête.• Le premier président est également compétent pour rendre des ordonnances en référé.

§2. Les juridictions spécialisées du second degré.

Il peut arriver qu'à titre exceptionnel, un appel formé contre une décision rendue en premier ressort ne soit pas examinée par la cour d'appel, mais plutôt par une juridiction spécialisée.Par exemple : les appels interjetés contre les jugements rendus par les tribunaux du contentieux de l'incapacité ne sont pas examinés par la cour d'appel, mais par une juridiction spécialisée d'appel que l'on appelle : la cour nationale de l'incapacité & de la tarification de l'assurance du travail (située à Amiens).On peut également citer, à titre d'exemple, les appels interjetés contre les décisions rendues par le juge commissaire (juge du tribunal de commerce) sont examinés par le Tribunal de Grande Instance.

Chapitre 2. Les juridictions pénales.

Les juridictions pénales sont chargées de sanctionner les personnes soupçonnées d'avoir commis des infractions pénales. On va leur infliger des peines pénales : les plus connues sont les amendes & l'emprisonnement. Mais il existe une centaine d'autres peines pénales. Ces juridictions pénales sont aussi appelées juridictions « répressives ». Comme les juridictions civiles, elles se distinguent en deux catégories.

Section 1. Les juridictions pénales de droit commun.

Les juridictions pénales de droit commun sont compétentes pour connaître de TOUTES les infractions pénales sauf celles que la loi confie expressément à une autre juridiction pénale. En droit pénal, il y a une particularité. En effet : avant d'être jugée, une affaire pénale inclut souvent une instruction. Cette partie de l'affaire, appelée « instruction » est le moment où l'on recherche les preuves. Puisque le procès pénal suppose très souvent une instruction, il existe de ce fait-là deux catégories de juridictions pénales de droit commun.

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§1. Les juridictions pénales d'instruction de droit commun.

La règle du double degré de juridiction s'applique pleinement à l'instruction pénale. Il existe deux degrés d'instruction. En premier degré, l'instruction est réalisée par un pôle de l'instruction. Au second degré, l'instruction est réalisée par la chambre de l'instruction, qui est une chambre spécialisée de la cour d'appel.

A) La juridiction pénale d'instruction du premier degré (le pôle de l'instruction).

Pendant longtemps, la recherche de preuves était réalisée par un juge unique appelé le juge d'instruction. Ce juge d'instruction était considéré (à juste titre) comme le juge le plus puissant en France. Avant d'être jugée, l'affaire pénale était instruite par une juridiction pénale d'instruction de premier degré. Mais cette juridiction présentait de graves dysfonctionnements (cf. l'affaire d'Outreau qui fut instruite par un juge débutant). Suite à cette affaire, le système de l'instruction a été entièrement réformé par la loi du 05 Mars 2007 sur l'équilibre de la procédure pénale. Cette loi a décidé de confier au premier degré l'instruction des affaires pénales à un pôle de l'instruction.

• L'organisation du pôle de l'instruction.

La création de ce pôle d'instruction fut décidée par la loi du 05 Mars 2007. Mais le changement n'est pas intervenu tout de suite. L'entrée en vigueur s'est seulement faite le 01 Janvier 2011. A compter de cette date, il existe un pôle d'instruction au sein de certains tribunaux de grande instance, expressément désignés par la Loi. Cette mise en place s'est faite progressivement avec, notamment, deux étapes :• Du 01 Mars 2008 au 01 Janvier 2011, le pôle de l'instruction était composé de deux juges d'instruction et ce pôle ne pouvait instruire que les crimes & les délits les plus graves.• A compter du 01 Janvier 2011, le pôle d'instruction est composé de 3 juges d'instruction. L'article 83 du Code de Procédure Civile nous dit que ces 3 juges d'instruction instruisent désormais toutes les infractions pénales. Ce pôle est donc présent dans la plupart des Tribunaux de Grande Instance, puisqu'une loi fixe les Tribunaux de Grande Instance qui connaissent un pôle d'instruction.

Ce passage à 3 juges a donc été extrêmement coûteux pour la justice Française. Récemment, le garde des sceaux a laissé entendre que ce passage à 3 juges pourrait être retardé dans certains Tribunaux de Grande Instance, jusqu'au 01 Janvier 2014.

Ce pôle d'instruction est composé de magistrats professionnels & plus précisément un juge d'instance et un juge qui siège au Tribunal de Grande Instance. L'avenir de ces pôles est cependant incertain, puisqu'en principe, au 01 Janvier 2014, tous les Tribunaux de Grande Instance comporteraient un pôle. Mais cet avenir est compromis, car en date du 07 Janvier 2009, le président de la république a déclaré qu'il était temps « que le juge d'instruction cède la place à un juge DE l'instruction qui contrôlera le

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déroulement des enquêtes, mais ne les dirigera plus ». Un comité de réflexion a été mis en place pour réfléchir à ce changement (comité composé d'universitaires). Ce comité a été présidé par Philippe LÉGER (on parle alors du comité LÉGER) & de comité a rendu son rapport définitif le 01 Septembre 2009. Dans ce rapport, le comité reconnaît qu'il est temps que le juge d'instruction cède la place au juge de l'instruction.Les juges de l'instruction sont des juges complètements indépendants du pouvoir exécutif & ils sont des juges professionnels (Bac +4 & diplômés de l'école nationale de magistrature de Bordeaux). Désormais, l'instruction devrait être réalisée par le parquet donc par la procureur de la république. Cependant, le procureur de la République n'est pas indépendant comme le juge d'instruction, car il est subordonné au gouvernement.La différence entre juge d'instruction et juge de l'instruction est la suivante : le juge d'instruction peut tout faire & fait tout, alors que le juge de l'instruction ne contrôlera que les actes les plus graves par un parquetiste. Ce projet de réforme est très critiqué car cela consistera à mettre entre les mains du procureur de la république (qui peut recevoir des ordres du gouvernement) le pouvoir. Mais cette décision est aussi regardable aux yeux des Droits de l'Homme. La Cour Européenne des Droits de l'Homme a d'ailleurs déjà pointé du doigt ce projet.En raison de ces critiques assez virulentes, le projet reste en suspens pour le moment. Tout dépendra de le couleur politique de l'assemblée suite à l'élection présidentielle de 2012. Si la droite est maintenue au pouvoir, la réforme aboutira sans doute.

• Le fonctionnement du pôle de l'instruction.

Il a compétence de principe pour instruire toutes les infractions pénales commises dans son ressort territorial mais également de toutes les infractions commises en dehors de son ressort, mais pour lesquelles la personne impliquée habite ou est arrêtée sur son ressort. Par exemple, si une personne commet une infraction à Bordeaux, mais qu'elle est arrêtée à Strasbourg, ce sera le pôle de l'instruction du tribunal de grande instance de Strasbourg qui jugera l'affaire.

a) La saisine du pôle de l'instruction.

Le pôle d'instruction ne peut pas s'autosaisir. Pour pouvoir instruire une affaire pénale, il faut qu'il soit saisi dans les formes de la loi. Deux aspects différents doivent être distingués.

a) Les modes de saisine.

Le pôle d'instruction peut être saisi de deux manières différentes : soit par le procureur de la République, soit par la victime de l'infraction elle-même.

I/ La saisine par le procureur de la République.

L'acte procédural par lequel le procureur de la République saisit le pôle d'instruction s'appelle un réquisitoire introductif d'instance ou encore un

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réquisitoire afin d'informer. Lorsque le procureur a connaissance d'une infraction pénale, a-t-il cependant l'obligation de saisir ce pôle d'instruction ? Ou bien est-ce facultatif ?La réponse varie selon la nature de l'infraction commise. Il existe trois types d'infractions : les contraventions, les délits, ou les crimes.Lorsque l'infraction commise est un crime, l'instruction est obligatoire. Ce qui veut dire que lorsque le procureur de la république a connaissance d'un crime, il a l'obligation de saisir le pôle d'instruction. Lorsque l'infraction commise est un délit, l'instruction, nous dit le code pénal, est facultative. Le procureur de la république est libre de saisir le pôle ou non. Enfin, lorsque l'infraction commise est une contravention, l'instruction n'a pas lieu. La juridiction de jugement est directement saisie. Le procureur n'a pas le droit de saisir le pôle de l'instruction.

II/ La saisine par la victime de l'infraction elle-même.

Le juge d'instruction peut également être saisi par la victime de l'infraction. L'acte procédural par lequel la victime saisit elle-même le juge d'instruction est appelé « plainte avec constitution de partie civile ».La plainte avec constitution de partie civile est faite par simple courrier auprès du doyen des juges d'instruction auprès du tribunal de grande instance territorialement compétent.Mais attention, la constitution de partie civile implique la consignation d'une somme d'argent entre les mains du greffier de la juridiction : le montant de cette consignation est déterminé par le juge d'instruction lui-même en fonction des ressources de la partie civile.

Deux issues sont alors possibles :• Soit l'instruction aboutit et l'auteur de l'infraction est effectivement présenté à la juridiction de jugement. Dans ce cas, la consignation est restituée entièrement à la partie civile.• Soit l'instruction n'aboutit pas. Dans ce cas, le juge d'instruction peut condamner la partie civile à une amende civile s'il considère que la constitution de partie civile a été abusive ou dilatoire. En cas de condamnation, l'amende sera payée au moyen de la somme consignée entre les mains du greffier. En d'autres termes, dans pareille hypothèse, la consignation ne sera pas restituée mais sera versée dans les caisses du Trésor public.• Finalement, le mécanisme de la consignation a pour but de garantir le paiement de l'amende civile susceptible d'être prononcée contre la personne qui s'est constituée partie civile (article 88-1 du Code de Procédure Pénale). Il permet ainsi d'éviter l'encombrement de la juridiction d'instruction, ainsi que les saisines abusives.

Depuis le 1er juillet 2007, date d'entrée en vigueur de certaines dispositions de la loi du 05 mars 2007, la plainte avec constitution de partie civile doit obligatoirement être précédée d'une plainte simple auprès des services de police, de gendarmerie ou directement auprès du procureur de la République.

Deux choses :• Suite à cette plainte, la constitution de partie civile ne peut être recevable

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que si le procureur de la République :• a soit décidé de ne pas engager de poursuites (décision de classement sans suite de la plainte),• soit n'a pas répondu au dépôt de plainte simple dans un délai de 3 mois.

• Cette nouvelle condition de recevabilité de la plainte avec constitution de partie civile n'est pas demandée en cas de crime, en cas de délit de presse ou encore pour certaines infractions au code électoral.

ß) L'étendue de la saisine.

L'étendue de la saisine du juge d'instruction repose sur deux règles :• Premièrement : le juge d'instruction est saisi in rem (quant à la chose), c'est-à-dire qu'il ne peut instruire que sur les faits qui lui ont été soumis dans le réquisitoire introductif d'instance ou l'acte de constitution de partie civile. Si, lors de ses investigations, le juge d'instruction constate l'existence d'autres faits répréhensibles, il ne pourra les instruire qu'en vertu d'un réquisitoire supplétif émanant du Procureur de la république.• Deuxièmement : le juge d'instruction n'est pas saisi in personam (quant à la personne). Aussi, il doit rechercher tous les auteurs de l'infraction sur laquelle il instruit. Il peut donc poursuivre une instruction contre toute personne dénommée ou non dénommée, c'est-à-dire contre X (article 80 alinéa 2 du Code de Procédure Pénale).

b) Les pouvoirs du pôle de l'instruction.∂) Les pouvoirs d'information du juge d'instruction.

Contrairement à une opinion largement répandue, le rôle du juge d'instruction ne consiste pas à rechercher exclusivement et systématiquement tous les faits de nature à accuser la personne mise en examen. Il doit également retenir tous les éléments de preuve qui la disculpent. On dit qu'il instruit « à charge et à décharge ».A cette fin, le juge d'instruction dispose de différents moyens d'investigation pour accomplir les actes d'instruction : audition de témoins, interrogatoire de la personne mise en examen, confrontation, transport sur les lieux, perquisition, saisie de documents, expertise, interception de communications téléphoniques, reconstitution, etc...Souvent, il y procède en personne. Mais ces actes d'investigation peuvent également être délégués par lui à un officier de police judiciaire. Dans ce cas, l'acte d'investigation sera exécuté par l'officier de policier judiciaire sous le contrôle du juge d'instruction. On dit alors que le juge d'instruction donne « commission rogatoire » à l'officier de police judiciaire.Signalons que la mission d'information du juge d'instruction risquerait d'être inefficace s'il n'avait pas le pouvoir d'obliger certaines personnes, au besoin par la contrainte, à se mettre à la disposition de la justice. Aussi, le législateur a-t-il doté le juge d'instruction de pouvoirs coercitifs au moyen de décisions que l'on appelle des « mandats ».

En effet, le juge d'instruction peut délivrer quatre types de mandats (article 122 du Code Pénal) :• Le mandat de comparution : il s'agit de la mise en demeure adressée à

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une personne de se présenter devant le juge à la date et à l'heure indiquées.• Le mandat d'amener : c'est l'ordre donné à la force publique de conduire telle personne désignée dans le cabinet du juge d'instruction afin qu'elle soit soumise à un interrogatoire.• Le mandat d'arrêt : c'est l'ordre donné à la force publique de rechercher la personne mise en examen qui est en fuite ou résidant hors du territoire national, de la conduire dans la maison d'arrêt indiquée sur le mandat où elle sera reçue et détenue. On dit que la personne sera « écrouée » (mise sous écrous). La personne sera entendue par le juge d'instruction dans les 24 heures et il statuera sur sa détention provisoire.• Enfin, le mandat de recherche : ce mandat a été crée par la loi du 09 mars 2004 (appelée PERBEN II). Le mandat de recherche est décerné contre toute personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction qualifiée de crime flagrant ou de délit flagrant puni au moins de 3 ans d'emprisonnement (article 70 du Code de Procédure Pénale). Il s'agit d'un ordre donné à la force publique de rechercher la personne à l'encontre de laquelle il est décerné, et de la placer en garde à vue (article 122 du Code de Procédure Pénale). Ce mandat peut être décerné à l'égard d'une personne ayant fait l'objet d'un réquisitoire, d'un témoin assisté ou d'une personne mise en examen.

Notons qu'avant la loi du 15 juin 2000, il existait un cinquième mandat : le mandat de dépôt qui était l'ordre donné au surveillant en chef d'un établissement pénitentiaire d'incarcérer telle personne nommément désignée, déjà présente devant le juge d'instruction en vertu d'un mandat de comparution ou d'amener. Depuis la réforme, c'est un nouveau juge, le « juge des libertés et de la détention », qui peut désormais délivrer un tel mandat. Le mandat de dépôt a pour effet de placer en détention provisoire la personne poursuivie, soit pour sa protection, soit (et c'est l'hypothèse la plus courante) pour éviter sa fuite ou pour qu'elle égale les poursuites en communiquant certaines informations à des tiers ou en sollicitant des faux témoignages.

Pour terminer, il faut souligner que le juge des libertés et de la détention dispose, comme le juge d'instruction, de certains pouvoirs d'information :• Il peut autoriser les perquisitions sans l'assentiment de la personne ou en dehors des heures légales pour les actes de terrorisme (article 706-24 du Code de Procédure Pénale) et la délinquance organisée, le trafic de stupéfiants (article 706-28 du Code de Procédure Pénale), en matière fiscale, douanière, de concurrence et de prix (voir loi PERBEN II du 09 mars 2004).• Il peut statuer sur la validité de la saisie sur perquisition opérée au cabinet d'un avocat (artIcke 56-1 du Code de Procédure Pénale).• Il peut accorder des prolongations exceptionnelles de la garde à vue au-delà des 48 heures de droit commun pour certaines infractions touchant au terrorisme et à la délinquance organisée (article 706-88 du Code de Procédure Pénale).• Il peut autoriser certaines mesures de détention des étrangers.• Il peut autoriser les interceptions de communications téléphoniques.

ß) Les pouvoirs de juridiction du juge d'instruction.

L'activité du juge d'instruction ne sa cantonne pas à des investigations. Il

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exerce un réel pouvoir juridictionnel, ce qui fait dire de lui qu'il est « le magistrat le plus puissant de France ». En effet, le juge d'instruction dispose de pouvoirs de juridiction dans deux hypothèses bien distinctes : au cours de l'instruction et en fin d'instruction.

Au cours de l'instruction.

Au cours de l'instruction, le juge d'instruction peut être amené à trancher des contestations au moyen d'un acte juridictionnel appelé « ordonnance ».Ainsi, il peut être appelé à statuer sur la recevabilité de la plainte, sur sa propre compétence ou encore sur des actes d'instruction qui lui sont demandés. C'est également par ordonnance que le juge d'instruction peut autoriser la mise en liberté d'une personne en détention.

• En fin d'instruction.

En fin d'instruction, le juge d'instruction doit décider s'il y a lieu ou non de renvoyer la personne mise en examen devant la juridiction de jugement (décision de poursuivre ou non).Deux situations peuvent alors apparaître :• Première situation : les charges ne lui paraissent pas suffisantes pour renvoyer la personne mise en examen devant la juridiction de jugement. Dans ce cas, le juge d'instruction rend une ordonnance de non-lieu (sous entendu, non-lieu de poursuivre). La personne, initialement mise en examen, ne sera pas jugée.• Deuxième situation : s'il s'agit d'un délit, le juge d'instruction rendra une ordonnance de renvoi de la personne poursuivie devant la juridiction de jugement compétente (tribunal correctionnel). S'il s'agit d'un crime, le juge d'instruction rendra une ordonnance de mise en accusation et la personne poursuivie sera renvoyée devant la Cour d'assises.

Dans tous les cas, il ne faut pas se méprendre sur la portée d'une ordonnance de renvoi ou de mise en accusation : en statuant de la sorte, le juge d'instruction ne se prononce pas sur la culpabilité de la personne poursuivie. Il estime simplement que, en l'état du dossier, il lui apparaît qu'il y a des charges suffisantes pour justifier un renvoi devant la juridiction de jugement qui aura seule le pouvoir d'apprécier si la personne poursuivie est coupable ou innocente.

B) La juridiction pénale d'instruction du second degré.

La chambre de l'instruction exerce un contrôle juridictionnel au second degré sur les instructions menées au premier degré par le juge d'instruction ou le pôle de l'instruction.En réalité, la chambre de l'instruction exerce un double contrôle : son contrôle porte non seulement sur les actes d'instruction réalisés par le juge d'instruction ou le pôle de l'instruction, mais également sur les ordonnances que ces derniers ont rendu.

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• Contrôle des actes d'instruction.

Le contrôle de la Chambre de l'instruction porte tout d'abord sur les actes de l'instruction réalisés par le juge d'instruction ou le pôle de l'instruction, soit directement, soit par le biais d'une commission rogatoire. Encore faut-il que ces actes aient été contestés par un appel interjeté devant la Chambre de l'instruction.

Lorsqu'un appel a été valablement interjeté, il appartient à la Chambre de l'instruction de vérifier la régularité en droit des actes accomplis par le juge d'instruction ou le pôle de l'instruction, ainsi que sur leur opportunité en fait.Ainsi, par exemple, la Chambre de l'instruction peut décider que l'interrogatoire de la personne mise en examen n'a pas été effectué conformément aux règles légales (régularité en droit) ou que telle perquisition aurait dû avoir lieu (opportunité en fait). De cette manière, la chambre de l'instruction exerce un contrôle qui, sous certaines conditions, peut conduire cette juridiction du second degré à refaire ou à compléter l'instruction.

• Contrôle des ordonnances.

La Chambre de l'instruction est également le juge d'appel des ordonnances rendues par le juge d'instruction ou le pôle de l'instruction. La personne mise en examen peut, par exemple, interjeter appel contre une ordonnance par laquelle le juge d'instruction ou le pôle de l'instruction retient sa compétence ou déclare recevable une constitution de partie civile. Signalons que pendant longtemps, la loi exigeait que l'instruction en matière criminelle soit soumise obligatoirement à un double degré de juridiction :Si le juge d'instruction estimait que les faits reprochés étaient constitutifs d'un crime, il ne pouvait renvoyer directement l'affaire devant la Cour d'assises. Il devait rendre une ordonnance de transmission de pièces au procureur général, lequel saisissait ensuite la Chambre d'accusation pour qu'elle procède à une nouvelle instruction au second degré. Il appartenait à la Chambre d'accusation, à l'issue de cette nouvelle instruction, de décider du renvoi ou non de la personne poursuivie devant la Cour d'assises. Les arrêts rendus par cette dernière n'étaient à l'époque pas susceptibles d'appel.Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. Depuis la loi du 15 juin 2000, les arrêts de la Cour d'assises peuvent faire l'objet d'un appel. Le législateur en a tiré la conséquence logique qu'un double degré obligatoire au niveau de l'instruction ne s'imposait plus. Désormais, si le juge d'instruction estime que les faits sont constitutifs d'un crime, c'est lui qui ordonne directement le renvoi de la personne poursuivie devant la Cour d'assises, au moyen d'une ordonnance de mise en accusation (article 181 du Code de Procédure Pénale).

§ 2 Les juridictions pénales de jugement.

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A) Les juridictions pénales de jugement du premier degré.

Le législateur a adopté une classification tripartite des infractions selon leur gravité, c'est-à-dire selon la peine encourue par l'auteur de l'infraction (et non la peine prononcée par le juge). Toute infraction constitue :• Soit une contravention (aucune peine d'emprisonnement n'est encourue).• Voir article 322-1 du Code Pénal : le fait de tracer des inscriptions, des signes ou des dessins, sans autorisation préalable, sur les façades, les véhicules, les voies publiques ou le mobilier urbain est puni de 3750 euros d'amende.• Soit un délit (lorsque la peine d'emprisonnement encourue est inférieure ou égale à 10 ans).• Voir article 222-33-2 du Code Pénal : le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou morale ou de compromettre son avenir professionnel (harcèlement moral) est puni d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende.• Voir article 222-37 du Code Pénal : le transport, la détention, l'offre, la cession, l'acquisition ou l'emploi illicite de stupéfiants sont punis de 10 ans d'emprisonnement et de 7 500 000 euros d'amende.• Voir article 311-3 du Code Pénal : le vol est puni de 3 ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.• Voir article 434-24 du Code Pénal : l'outrage par paroles, gestes ou menaces, par écrits ou images de toute nature adressé à un magistrat, un juré ou toute personne siégeant dans une formation juridictionnelle est puni d'un emprisonnement de un an et de 15 000 euros d'amende.• Soit un crime (lorsque la peine d'emprisonnement encourue est supérieure à 10 ans. En matière criminelle, on parlera de « réclusion criminelle » et non « d'emprisonnement »).• Voir article 221-1 du Code Pénal : le fait de donner volontairement la mort à autrui constitue un meurtre. Il est puni de 30 ans de réclusion criminelle.• Voir article 221-3 du Code Pénal : le meurtre commis avec préméditation constitue un assassinat. Il est puni de la réclusion criminelle à perpétuité.• Voir article 221-5 du Code Pénal : l'empoisonnement est puni de 30 ans de réclusion criminelle.• Voir article 222-23 du Code Pénal : tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur la personne d'autrui avec violence, contrainte ou surprise est un viol. Le viol est puni de 15 ans de réclusion criminelle.

Cette classification tripartite des infractions a été doublée d'une organisation juridictionnelle, elle aussi tripartite. En effet, à chaque catégorie d'infractions correspondent des juridictions de jugement différentes. Ainsi :• Les contraventions sont jugées par le juge de proximité ou par le tribunal de police,• Les délits sont jugés par le tribunal correctionnel,• Les crimes sont jugés par la cour d'assises.

Compte tenu du particularisme très marqué en matière criminelle, nous

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étudierons d'une part, les juridictions pénales compétentes pour juger les contraventions et les délits et, d'autre part, la juridiction pénale compétente pour juger les crimes

• Le jugement des contraventions. On appelle « contravention » une infraction qui ne fait encourir à son auteur aucune peine d'emprisonnement, mais uniquement une peine d'amende. En réalité, il existe plusieurs catégories de contraventions. On parle de « classes » de contraventions (article 131-13 du Code Pénal) :• Les contraventions de la 1ère classe qui font encourir à leurs auteurs une amende d'un montant de 38 euros.• Voir article R. 621-1 du Code Pénal : la diffamation non publique envers une personne est punie de l'amende prévue pour les contraventions de la 1ère

classe.• Les contraventions de la 2ème classe (150 euros).• Voir article R. 632-1 du Code Pénal : est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 2ème classe le fait de déposer, d'abandonner ou de jeter, en un lieu public ou privé, à l'exception des emplacements désignés à cet effet, des ordures, déchets, matériaux ou tout autre objet, de quelque nature qu'il soit.• Les contraventions de la 3ème classe (450 euros).• Voir article R. 623-2 du Code Pénal : les bruits ou tapages injurieux ou nocturnes troublant la tranquillité d'autrui sont punis de l'amende prévue pour les contraventions de la 3ème classe.• Les contraventions de la 4ème classe (750 euros).• Voir article R. 314-1 du Code de la route : le fait de circuler avec un véhicule à moteur dont les pneumatiques ne présentent pas sur toute leur surface de roulement des sculptures apparentes est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe.• Voir article R. 624-4 du Code Pénal : l'injure non publique commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion est punie de l'amende prévue pour les contraventions de la 4ème classe.• Les contraventions de la 5ème classe (1500 euros - 3000 euros en cas de récidive).• Voir article R. 625-1 du Code Pénal : les violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale du travail d'une durée inférieure ou égale à huit jours sont punies de l'amende prévue pour les contraventions de la 5ème

classe.• Voir article R. 635-2 du Code Pénal : le fait d'adresser à une personne, sans demande préalable de celle-ci, un objet accompagné d'une correspondance indiquant que cet objet peut être accepté contre versement d'un prix est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 5ème classe (vente forcée par correspondance).

En matière contraventionnelle, deux juridictions pénales de jugement sont compétentes : le juge de proximité et le tribunal de police. La répartition de la matière contraventionnelle entre le juge de proximité et le tribunal de police s'opère de la manière suivante : le juge de proximité a compétence pour juger les contraventions des quatre premières classes. Et le tribunal de police a compétence pour juger les contraventions de la cinquième classe.

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a) Le juge de proximité. Depuis la loi du 26 janvier 2005, le juge de proximité s'est vu reconnaître une compétence en matière pénale. Plus précisément, il a compétence pour juger les contraventions des quatre premières classes (article 706-12 du Code de Procédure Pénale). Il s'agit donc d'une juridiction à juge unique dont le siège et le ressort territorial correspondent à ceux de la juridiction de proximité. De manière plus précise, la juridiction de proximité compétente est celle du lieu de commission ou de constatation de la contravention ou encore de résidence du prévenu.

Plusieurs observations :• tout d'abord, notons que le juge de proximité est assisté d'un greffier. Le ministère public est lui aussi représenté, et notamment par le Commissaire de police de la ville dans laquelle siège le juge de proximité.• ensuite, en la matière, le juge de proximité statue en principe en premier et dernier ressort. Un appel ne peut donc être interjeté (article 546 du Code de Procédure Pénale). Un pourvoi en cassation peut cependant être formé.• ensuite, lorsqu'il se heurte à des difficultés juridiques sérieuses, le juge de proximité peut renvoyer l'affaire devant le tribunal de police.• enfin, le juge de proximité est également compétent pour recevoir l'action civile accessoire à l'action pénale, et ce, quel que soit le montant de l'indemnisation demandée par la victime de l'infraction.

b) Le tribunal de police. Le tribunal de police est compétent pour juger les contraventions de la cinquième classe. Il n'est autre que le tribunal d'instance. Lorsque celui-ci statue en matière contraventionnelle, il prend le nom de « tribunal de police ». Il s'agit donc d'une juridiction à juge unique dont le siège et le ressort territorial correspondent à ceux du tribunal d'instance lui-même. De manière plus précise, le tribunal de police compétent est celui du lieu de commission ou de constatation de la contravention, ou encore de résidence du prévenu. Dans les petits tribunaux d'instance, c'est parfois le même juge qui tient les audiences civiles (tribunal d'instance) et les audiences pénales (tribunal de police). Dans les villes importantes, compte tenu du volume des affaires, un ou plusieurs juges du tribunal d'instance sont affectés spécialement et exclusivement aux audiences pénales du tribunal de police. Le juge du tribunal de police est assisté d'un greffier. Le ministère public sera représenté directement par le procureur de la République près le tribunal de grande instance. Il est également compétent pour recevoir l'action civile accessoire à l'action pénale, et ce, quel que soit le montant de l'indemnisation demandée par la victime de l'infraction. Les jugements rendus par le tribunal de police peuvent faire l'objet d'un appel (article 556 du Code de Procédure Pénale).

• Le jugement des délits. Ils sont jugés par le tribunal correctionnel.

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a) L'organisation du tribunal correctionnel.

Il se trouve dans les locaux du tribunal de grande instance. Le ressort de ce tribunal est le même que celui du tribunal de grande instance. Le tribunal correctionnel est une juridiction collégiale constituée de 3 juges correctionnels. Il est assisté d'un greffier et les audiences sont publiques. Le procureur est le représentant du ministère public. Dans certains cas, le tribunal juge à juge unique. Ces exceptions sont énumérées à l'article 398-1, et lors de ces délits cités, le jugement se fait à un juge. Le ministère d'avocat n'est pas obligatoire.

b) La compétence du tribunal correctionnel.

S'agissant de la compétence territoriale, le tribunal dans le ressort duquel le délit a été commis, constaté, ou lieu de domicile de l'auteur du délit. S'agissant de sa compétence d'attribution, est compétent le tribunal pour tous les délits. Par exception, il y a parfois des hypothèses ou certains délits ne sont pas jugés par le tribunal correctionnel. Par exemple :

dans le cas des délits par un mineur, par un militaire ou un homme politique. Le tribunal correctionnel statue en premier & dernier ressort. Le ministère public n'est pas obligatoire.

• Le jugement des crimes.

En droit français, il y a une répartition tripartite. On ne juge pas un crime de la même manière qu’un délit ou une contravention, alors que c’est le cas dans d’autres pays. Le crime fait encourir au moins 10 ans et un jour d’emprisonnement. La gravité de l’infraction, et surtout l’importance des peines qui peuvent être infligées, justifient la mise en place de juridictions d’une certaine solennité. Pour cette raison, la juridiction compétente est originale quant à son organisation et quant à sa compétence.

a) L’organisation de la cour d’assises.

Le ressort territorial est celui d’un département (ce cas ne vaut cependant pas pour les cours d'assises de Paris). Il existe une cour par département sauf à Paris où il en existe plusieurs. La cour d’assises est toujours désignée par le nom du département où elle siège. Par exemple, on ne dira pas la cour d’assises d'Alsace, mais la cour d'assises du Bas-Rhin. En principe, la cour d’assises siège au chef-lieu, c'est-à-dire là où il y a le plus d’habitants. La cour siège dans les locaux du Tribunal de Grande Instance, mais peut aussi siéger dans une autre ville qui n’est pas le chef-lieu du département.En ce qui concerne la composition de la cour d'assises, il y a au sein de cette cour, une formation échevinale. Le ministère public y est représenté par un membre du parquet général de la cour d’appel et la fonction de greffier est assurée par le greffe de la cour d’appel. La principale originalité de la composition de la cour d’assise reste son caractère échevinal avec notamment trois magistrats professionnels et 9 citoyens tirés au sort pour former le jury populaire. Cette cour est donc composée au total de 12 juges.

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• Les magistrats professionnels.

Ensemble, les magistrats forment la cour d’assises proprement dite. Cette cour d’assises est composée d’un président désigné par le premier président de la cour d’appel pour chaque session d’assises. Il s’agit souvent d’un président de chambre de la cour d’appel ou d’un simple conseiller près (= auprès) de la cour d’appel. D’ailleurs, le premier président peut décider d’exercer lui-même les fonctions de la cour d’assises.En plus du président, il y a deux juges professionnels, les assesseurs. Ils sont désignés par le 1er président de la cour d’appel. En choisissant parmi l’ensemble des magistrats du Tribunal de Grande Instance ou de la cour d’appel. Il est prévu que des assesseurs supplémentaires soient désignés. Ils assistent aux débats mais pas aux délibérations.Ils n’interviendront qu’en cas d’empêchement d’un magistrat titulaire.

• Le jury populaire.

A côté des juges professionnels, siègent 9 citoyens qui forment ensemble le jury populaire. L’existence du jury populaire date de la loi des 16 et 26 Septembre 1791. La cour d’assises est la seule juridiction qui fait participer des citoyens en France. Pour être jury d’assises (ou juré d’assises), il faut remplir des conditions, et être tiré au sort.

I/ Les conditions légales.

Pour être juré d’assises, il faut :• Avoir la nationalité française,• Être âgé de 23 ans,• Savoir lire et écrire le français,• Avoir la pleine capacité juridique et jouir des droits civils et politiques (article 255 du Code de Procédure Pénale).• Par ailleurs, la personne ne doit être frappée d’aucune des causes d’incapacité énumérées à l’article 256 du Code de Procédure Pénale. Par exemple : l’article 256 nous dit que « la personne qui est emprisonnée ne peut être juré d’assises. »• La personne ne doit être frappée d’aucune des causes d’incommutabilité énumérées à l’article 257 du Code de Procédure Pénale : la fonction de juré d’assises est incompatible avec la fonction de ministre, de sénateur, de député, de magistrat, de préfet, de fonctionnaire de police ou encore de militaire.• D'autre part, l'article 258 nous dit que « les conjoints parents ou alliés de l’accusé ou de l’avocat de l’accusé ou de la partie civile, ou d’un témoin de peuvent pas être jurés d’assises ».

Lorsque toutes ces conditions sont réunies, il est possible de devenir juré d’assises.

II/ Le tirage au sort.

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La formation du jury d’assises comporte plusieurs étapes qui reposent sur le principe du tirage au sort.• Chaque année, chaque maire de chaque commune tire au sort plusieurs noms sur la liste électorale de la commune. Le nombre de noms tirés au sort se fait en fonction de l’importance de la population de la commune. C’est la loi qui détermine le nombre de noms à tirer au sort. La loi nous dit que le maire doit tirer au sort un nom pour 1800 citoyens. Ce tirage au sort est réalisé publiquement en mairie. La liste des noms tirés au sort est communiquée par chaque maire au greffier de la juridiction où siège la cour d’assise. Le maire doit aussi informer ceux dont le nom a été tiré au sort car il faut permettre à ces personnes de présenter une éventuelle demande de dispense. La liste comprenant les noms, tirés au sort par tous les maires, s’appelle la liste annuelle préparatoire. Elle sera soumise à une commission siégeant au chef-lieu de la cour d’assises. Cette commission est composée de quatre magistrats, d’un procureur général, bâtonnier de l’ordre général de l’ordre des avocats et de cinq conseillers généraux. Cette liste est donc examinée par cette commission qui va devoir exclure le nom des personnes qui ne rempliraient pas les conditions. Lorsque le tri a été fait, les noms forment la liste actuelle définitive.

• S’ouvre alors l’étape à partir de la liste annuelle définitive : la liste de session. Il s’agit de la liste des personnes qui peuvent être susceptibles d’être jurés au pôle de la session d’assises. 30 jours avant l’ouverture de la session d’assises, le premier président tire au sort publiquement 40 noms titulaires et 12 noms suppléants. 15 jours avant l’ouverture, le préfet du département notifie aux 52 personnes leur désignation, et leur fait sommation (donc c'est un ordre) de se présenter aux jour, heure, et lieu indiqués. Cette liste est également notifiée à l’accusé en vue d’une éventuelle récusation.

• S’ouvre alors la troisième étape : à partir de la liste session, sera établie la liste de jugement. Au début de la session d’assises, en audience publique, le président de la cour d’assises tire au sort neuf noms parmi les 40 titulaires, et plusieurs parmi les 12 noms suppléants. Ils composeront la liste de jugement. Ce seront en principe ces jurés qui siègeront au sein de la cour d’assises et jugeront des crimes. Le Code de Procédure Civile offre la possibilité au ministère public et à l’accusé de récuser un juré ainsi tiré au sort. « Il se doit de récusation. » Lorsqu’un juré est récusé, il est remplacé par un suppléant. L’accusé peut récuser 5 jurés. Le ministère public peut en récuser quatre.Lorsque les noms sont définitivement arrêtés, le président de la cour doit leur faire prêter serment après avoir indiqué aux jurés leur devoir. Une personne nommée jurée ne peut refuser de l’être sauf pour des motifs énumérés. Par exemple notamment lorsqu'une personne est âgée de plus de 70 ans, ou encore lorsqu'une personne n’habite pas dans le département, ou que la personne est malade (mais attention, dans ce cas, il faut l’avis de trois professionnels médicaux).

La loi prévoit une amende de 3750 euros par jour d’absence. Une autre précision : le juré a droit à une indemnité pour le déplacement et pour les repas (il ne dispose cependant que de 5,20 euros par repas) et dispose également d'indemnités en raison de la perte de salaire entraînée. L’employeur doit laisser le salarié exécuter la tâche de juger.

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Le fonctionnement de la cour d'assises :La cour n’est pas permanente, elle ne siège pas toute l’année. C'est une juridiction occasionnelle. On appelle les sessions de la cour d'assises, des « sessions d'assises ». A la différence des autres juridictions pénales Françaises, il y a des sessions que l’on appelle aussi les assises du Bas-Rhin pour designer les sessions. En principe, il y a une session tous les trois mois, sauf si le nombre des affaires est plus grand. Le premier président cour d’appel exigera alors une autre session. Chaque session d’assise dure le temps nécessaire pour épuiser la liste des affaires inscrites, mais cela ne peut être plus long que 15 jours. En effet, la majorité des citoyens sont des salariés et ne peuvent pas se permettre de manquer leur travail pendant une période de plus de 15 jours. Lors de la session d’assises, les jurés sont placés à la droite et à la gauche des juges professionnels. Ils viennent aux procès dans leur tenue habituelle, mais une tenue correcte est néanmoins exigée. Ils doivent être attentifs au débat et ne pas manifester prématurément leur opinion. Ils peuvent également poser des questions à l’accusé(e), mais ne peuvent pas lui poser la question directement. Le juré doit poser la question au président de la cour d’assises qui posera la question à l'accusé(e).Lorsque la cour d’assises est assez éclairée (en moyenne trois jours), elle va se retirer pour délibérer. Mais avant cela, le président a l’obligation légale de lire dans la salle d’audience l'article 353 du Code de Procédure Pénale.Pendant longtemps, les trois magistrats professionnels étaient les seuls à se prononcer sur les faits. Les peines infligées étaient décidé seulement après les magistrats professionnels.Mais cette conception a été remaniée par la loi du 25 Novembre 1941 : La décision sur la culpabilité ou l’innocence. Lors des délibérations, toute décision défavorable à l’accusé requiert la majorité des deux tiers : c'est-à-dire huit voix sur douze.La décision sur la peine infligée ne suppose qu’une majorité simple donc sept voix sur douze. Par exception, si la cour veut prononcer le maximum de la peine, il faut la majorité des deux tiers : à savoir, huit voix sur douze.Par exemple : dans le Code de Procédure Pénale, il est dit que l’auteur d’un meurtre encourt au maximum 30 ans d'emprisonnement. Si la cour veut infliger 29 ans, il faut 7 voix. Si la cour veut infliger trente ans, alors il faut 8 voix.

b) La compétence de la cour.

La cour d'assises ne peut être saisie que par une ordonnance. Il faut donc une mise en application émanant de la juridiction d’instruction.En ce qui concerne la question du ressort territorial, soit c'est la cour d’assises du ressort dans lequel le crime a été commis qui est compétente, soit celle dans le ressort duquel l’auteur a sa résidence, soit, cas échéant, l’endroit où l’auteur a été arrêté.

S’agissant de sa compétence d’attribution, la cour d’assises est compétence pour les crimes (peines d’emprisonnement de plus de 10 ans). Cependant le Code de Procédure Pénale dit que la cour a une plénitude de juridiction, c'est-à-dire qu’elle est compétente pour juger des crimes mais aussi pour juger des contraventions et des délits connexes au crime qu’elle est en train de juger.En réalité, la compétence de la cour d’assises n’est pas exclusive puisque

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certains crimes sont jugés par d’autres juridictions. Quelques exemples : dans le cas d'un crime commis par un mineur âgé de 16 à 18 ans, ce sera la cour d’assises des mineurs qui jugera. Aussi, pour les crimes d’un mineur de moins de 16 ans, ce sera le tribunal pour enfants qui sera compétent. De même, pour un crime commis par un militaire, ou pour des crimes terroristes ou en matière de stupéfiants, ce sera une cour d’assises spéciale.

A retenir : La cour d’assises rend des arrêts, on peut aussi dire qu’elle rend des verdicts rendus en 1er ressort. L’appel est possible tout comme le pourvoi en cassation.

Le droit pénal Français est sévère puisque le complice & le coauteur (dans le cas où plusieurs personnes effectuent le crime) encourent la même peine que l’auteur d’un crime ou d’un délit. L’infraction tentée = infraction effectuée. En droit Français, l’infraction impossible est aussi condamnée : trente ans sont encourus. Par exemple, si quelqu'un essaye de tuer un cadavre. La cour d’assises juge toutes les personnes qui ont participé au crime.

B) Les juridictions pénales du jugement de second degré.

Les décisions rendues en matière correctionnelle, contraventionnelle ou criminelle peuvent être frappées d’un appel. L’affaire sera alors entièrement rejugée.

• L’appel en matière contraventionnelle.

Pour les contraventions des quatre premières classes, c'est le juge de proximité qui rend des jugements en premier et dernier ressort. On ne peut pas interjeter appel. Mais pour la cinquième classe de contraventions, le tribunal de police rend un jugement en premier ressort, donc l’appel est possible. Il sera examiné par la chambre des appels correctionnels de la cour d’appel. Cette chambre est composée de trois magistrats professionnels qui interviennent en collégialité. Et le ministère public est exercé par un avocat général ou substitut général. Le prévenu peut interjeter appel tout comme la victime ou le ministère public cependant, le délai est court : il est de dix jours à compter du prononcement du jugement. En droit pénal l’appel est suspensif : tant que la cour d’appel ne s’est pas prononcée, la peine n’a pas à être exécutée.

• L’appel en matière correctionnelle.

Les appels formés sont eux aussi examinés par la cour d’appel, la chambre des appels correctionnels. C'est la même application qu’en matière contraventionnelle.

• L’appel en matière criminelle.

Jusqu’à récemment, il n’existait pas de règle du double degré de juridiction. Seul un pourvoi en cassation était possible. Cette impossibilité a été

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condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme. Cette convention reconnait un droit de faire rejuger son affaire. Cette réforme a été concrétisée par la loi du 15 juin 2000 entrée en vigueur le 01 Janvier 2001. Sont donc possibles :• Les appels contre les arrêts rendus de la cour d’assises,• Les appels organisés par l'article 381 et suivants du Code de Procédure Pénale,• Les appels examinés près la cour d’assises d’appel.

Jusqu’en 2000, on considérait qu’une décision a été rendue par le peuple Français. Il était considéré que le peuple français ne pouvait pas faire d’erreur. La faculté d’appel appartient à l’accusé, au ministère public ou à la victime. L’appel doit être formé dans les 10 jours à compter du prononcer de l’arrêt. Il y a alors un réexamen complet. Comme en matière correctionnelle, l’appel est suspensif.

a) La désignation de la cour d’assises d’appel.

Le législateur a mis en place un système original pour la désignation. Le système ressemble à l’appel circulaire de l’Ancien Régime car la cour d’assises n’est pas une juridiction supérieure mais c’est une juridiction d’un autre département. La chambre criminelle désignera la cour d’assises d’appel de n’importe quel autre département Français. Il y a un mois pour désigner la cour. Devant cette cour d’assises d’appel, le parquet est représenté dans les mêmes conditions que dans la cour d’assises.

b) Le fonctionnement de la cour d’assise d’appel.

La cour d’assises d’appel obéit en principe aux mêmes règles que celles de la cour d’assises du premier degré. Sauf qu'elle compte deux particularités :• le nombre de juges est de quinze (et non pas de douze) : il y a trois juges professionnels et douze citoyens.• La décision sur la culpabilité de l’accusé doit être prise à la majorité de dix voix sur quinze au lieu de huit voix sur douze. Mais sinon le fonctionnement est le même.

Section 2 : Les juridictions pénales spécialisées.

Elles sont aussi appelées juridictions d’exception ou d’attribution. Certaines infractions échappent aux juridictions de droit commun. C'est pour quoi, elles sont jugés par de nombreuses juridictions spécialisées : on peut citer les juridictions pour mineurs, les juridictions politiques, militaires, ou encore maritimes.

§1. Les juridictions pour mineurs.

Les mineurs délinquants (au moment des faits ils avaient moins de 18 ans) échappent à l’application du droit commun. Ils sont jugés selon des règles particulières (cf. ordonnance du 21 Février 1945). La spécificité de la justice

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pour mineurs se retrouve au stade de l’instruction et du jugement.

A) L’instruction.

Les contraventions de la cinquième classe, c'est-à-dire les délits et crimes commis par un mineur doivent obligatoirement faire l’objet d’une instruction. Pour les crimes, cette instruction sera réalisée par le pôle d’instruction comprenant deux juges d’instruction dont l’un est spécialisé ds les affaires des mineurs.C’est le procureur de la république qui décide. Souvent, le procureur décide de choisir le pôle de l’instruction lorsque l’affaire est délicate ou lorsque l'affaire nécessite des investigations poussées, ou encore lorsque des majeurs sont aussi impliqués. Sinon l’instruction concerne souvent le juge des enfants.Mais quel que soit la juridiction qui intervient, son rôle est toujours de rechercher des preuves : à charge et à décharge, c'est-à-dire celles qui innocentent et celles qui accusent. Quelle que soit la juridiction, elle a les mêmes pouvoirs que la juridiction des droits communs.Une particularité cependant : dans les affaires impliquant un mineur, il y a obligation d’ordonner une enquête de personnalité réalisée par trois médecins experts. Cette juridiction d’instruction peut aussi saisir le juge des libertés et de la détention pour placer le mineur en détention provisoire.Les règles de la détention :• En matière correctionnelle : la détention provisoire du mineur ne peut concerner qu’un mineur de plus de 16 ans et cette détention en peut être que d'un mois avec prolongation d'un mois supplémentaire possible. Exception : lorsque le délit est un délit dont la peine encourue est supérieure à 7 ans, dans ce cas-là la détention provisoire sera d'un an.• En matière criminelle : elle est possible pour les mineurs âgés de plus de 13 ans. Si le mineur a entre 13 et 16 ans, la détention provisoire ne peut excéder en principe 6 mois. S’il est âgé de plus de 16 ans c’est le droit commun des majeurs qui s’implique.

Lorsque l’instruction est menée, l’issue obéit aux règles de droit commun. A l’issue, la juridiction peut rendre une ordonnance de non-lieu, ou pourra rendre une ordonnance de renvoi ou de mise en accusation. Toutes les décisions rendues peuvent faire l’objet d’un appel qui sera examiné par la chambre de l’instruction.

B) Le jugement.

Le mineur doit être sanctionné.

• Les différentes sanctions.

• Catégorie des mesures éducatives : il s'agit ici de favoriser la rééducation, ainsi que la re-socialisation. Ces mesures éducatives incluent : l’avertissement solennel, le placement en internat ou en semi-liberté, en centre éducatif renforcé, mais passent aussi par l’encadrement militaire.• Catégorie des sanctions éducatives : il s'agit ici d'une peine plus ferme que les mesures éducatives. Il faut alors dissuader le mineur de commettre une nouvelle infraction pénale. Par exemple : la confiscation de l’objet ayant servi à l’infraction, ou l'interdiction de paraitre pour un an maximum dans les

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lieux dans lesquels l’infraction a été commise. Il peut également y avoir interdiction de rencontrer les coauteurs ou complices de l’infraction, ou l'interdiction de rencontrer la victime.• Catégorie des sanctions des peines pénales : elles sanctionnent lourdement les mineurs par le biais d'amendes et de peines d'emprisonnement. La loi distingue selon l’âge du délinquant, les sanctions possibles. Il y a 4 théories.

a) Le mineur délinquant est âgé de moins de 10 ans.

Le mineur délinquant âgé de moins de 10 au moment des faits ne peut être sanctionné.

b) Le mineur délinquant est âgé entre 10 et 13 ans.

Il peut faire l’objet que d’une mesure ou d’une sanction éducative. Mais en aucun cas d'une peine pénale.

Le mineur délinquant est âgé entre 13 et 16 ans.

En principe, toutes les sanctions peuvent lui être infligées. Elles peuvent même se cumuler entre elles. Cependant, si la juridiction de jugement décide de sanctionner le mineur par une peine pénale, deux règles peuvent s'appliquer :• Si le mineur délinquant encoure une peine privative de liberté, le maximum que la juridiction de jugement peut prononcer est la moitié du maximum pour un majeur. Mais si le majeur encoure la perpétuité, le maximum est de 20 ans pour un mineur.• Et si le mineur délinquant encoure une peine d’amende, le maximum de la juridiction de jugement est la moitié de la peine d’amende. Mais attention : le seuil maximal est de 7500 euros d'amende.

Ces deux règles constituent l’excuse de minorité qui profite au mineur délinquant âgé de 13 à 16 ans sans exceptions.

Le mineur délinquant est âgé entre 16 et 18 ans.

Toutes les sanctions peuvent lui être infligées. Elles peuvent se cumuler entre elles. Si la juridiction de jugement décide qu’il doit y avoir une peine pénale, les règles sont les suivantes : le mineur bénéficie lui aussi de la règle de minorité.Par exception, si le mineur est âgé de 16 à 18 ans, il peut ne pas bénéficier de la règle de minorité dans trois hypothèses.

2) Les différentes juridictions de jugement.

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La règle du double degré de juridiction nous impose de distinguer les juridictions du premier et du second degré.

a) Les juridictions de jugement du premier degré.

Au premier degré, les mineurs sont jugés :• soit par le juge des enfants, ou par le tribunal pour enfants, • soit par la cour d'assises pour mineurs.

∂) Le juge des enfants.

Il s'agit d'un magistrat du tribunal de grande instance qui est nommé par le président de la république après avis du conseil de la magistrature. Il l'est pour trois ans mais sa nomination est renouvelable. Il est nommé en fonction des aptitudes et intérêts qu'il manifeste à l'égard des mineurs. La loi du 25 juin 2001 a limité à 10 ans l'exercice de cette fonction. Ce magistrat professionnel a une compétence racione materiae très limitée : en effet il ne peut connaître que des seules contraventions de la cinquième classe et des délits commis par un mineur à l'exception des délits commis par un mineur d'au moins 16 ans et que le délit commis par ce mineur est puni de moins de 7 ans. Ainsi, le juge des enfants n'a aucune compétence pour les délits des quatre premières classes, commis par un mineur. Il s'agit de la compétence de droit commun du juge de proximité. Lorsqu'un mineur commet un crime il est jugé par le tribunal pour enfants ou la cour d'assises pour mineurs. Le juge des enfants n'a pas le droit de prononcer une peine pénale : c'est-à-dire une amende ou une peine d'emprisonnement. Lorsqu'il intervient, il ne peut prononcer qu'une mesure ou une sanction éducative.En revanche, lorsque le juge des enfants estime que le mineur mérite une peine pénale, la loi reconnaît à ce juge le pouvoir de renvoyer l'affaire devant le tribunal pour enfants qui lui peut prononcer une peine pénale :• si le juge des enfants entend prononcer une relaxe, il peut statuer seul.• si le juge des enfants estime qu'une mesure ou une sanction éducative est nécessaire, il peut statuer seul.• si le juge des enfants estime qu'une peine pénale doit être prononcée, il devra renvoyer l'affaire devant le tribunal pour enfants.

ß) Le tribunal pour enfants.1°) L'organisation du tribunal pour enfants.

Le ressort territorial du tribunal est en principe le département. Il faut se rendre au tribunal de grande instance.Le tribunal pour enfants présente une composition échevinale : un magistrat professionnel (soit le juge des enfants, qui préside le tribunal pour enfants) et deux magistrats non professionnels : les assesseurs (soit des citoyens âgés d'au moins 30 ans nommés à cette fonction pour quatre ans par arrêté du ministère de la justice). Le ministère choisit les citoyens en raison de l’intérêt que ces citoyens portent au problème de l'enfance. Le choix se fait

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sur une liste de candidats établie par le premier président de la cour d'appel. Les fonctions d'assesseurs sont indemnisées en fonction de la participation. Le ministère public est représenté par un membre du parquet et le greffe est assuré par celui du tribunal de grande instance.

2°) Les compétences du tribunal pour enfants.

S'agissant de sa compétence territoriale, le tribunal compétent est soit celui où l'infraction a été commise, soit celui du lieu de résidence du mineur, soit encore celui du lieu où le mineur a été arrêté.S'agissant de sa compétence d'attribution, le tribunal connait des contraventions de la cinquième classe commises par un mineur et qui sont confiées au tribunal par le juge des enfants par une ordonnance. Mais aussi les délits commis par un mineur confiés sur renvoi du juge des enfants, un mineur d'au moins 16 ans et fait encourir une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à 7 ans, crime commis par un mineur de moins de 16 ans. Pour ces infractions, il importe peu que le mineur ait été auteur, co-auteur ou complice. Ce tribunal n'est pas compétent pour juger les complices ou co-auteurs majeurs. Le tribunal pour enfants peut prononcer toutes les peines ou sanctions possibles et les cumuler.

Ỵ) La cour d'assises pour mineurs.

Elle a été créée en 1951 et cette cour d'assises ne se distingue en rien de la cour d'assises des majeurs : son ressort, son siège, son fonctionnement et sa composition sont identiques à ceux de la cour d'assises pour majeurs. Par exemple : trois magistrats professionnels et neufs jurés composent le jury populaire.

• Il existe néanmoins des différences :• Les deux assesseurs sont nécessairement des juges des enfants.• Au sein de la Cour d'assises pour mineurs, le mineur public est représenté par le procureur général près la cour d'appel ou un magistrat du parquet spécialisé dans affaires pour mineurs.• Les audiences se tiennent à huis clos (néanmoins, si le mineur est devenu majeur au moment de l'audience, l'audience peut, sous sa demande expresse, devenir publique).

b) Les juridictions de jugement du second degré.

En vertu de la règle du double degré de juridiction, les décisions des juridictions pénales de jugement du premier degré peuvent être frappées d'appel. Les appels interjetés pour le juge des enfants et pour le tribunal pour enfants sont examinés par une chambre spécialisée de la chambre d'appel soit la chambre spéciale des mineurs. Quant aux arrêts de la cour d'assises des mineurs, ils sont examinés par la cour d'assises des mineurs qui est composée de trois magistrats professionnels (dont deux sont juges des enfants) et de douze citoyens tirés au sort.(A titre optionnel : la loi du 10 Août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs : elle entrera

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en vigueur le 01 janvier 2012 et elle opèrera des réformes importantes.)

§2. Les juridictions politiques.

Comme les mineurs, les hommes politiques échappent à l'application du droit pénal commun. Jusqu'à la constitution du 04 octobre 1958, le président et les membres du gouvernement étaient frappés d'une immunité totale et absolue. Les constituants ont inséré un article 67 dans la constitution et ont crée la haute cour de justice qui est devenue en 2007 la haute cour. Initialement, elle avait compétence pour juger le président comme les hommes politiques. Mais au fil des années, il est apparu nécessaire de différencier les juridictions appelées a juger le président & les juridictions appelées à juger les membres du gouvernement : on ne peut les juger de la même façon.Le 27 juillet 1993, une reforme apporte deux points essentiels : elle a restreint la compétence de la haute cour au seul président de la république, et elle a crée une nouvelle juridiction pour les membres du gouvernement, qui est la cour de justice de la république.

A) La Haute Cour.

Elle est réglementée par l'article 68 de la constitution et elle a compétence exclusive pour juger le président de la république. Le procès pénal intenté pour le président de la république suppose deux étapes : l'instruction et le jugement.La Haute Cour est compétente pour juger les manquements par le Président de la République à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat. Malheureusement, ni la Constitution, ni le Code pénal ne définissent cette notion de « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec son mandat ».

→ Comment fonctionne alors la Haute Cour ?

La Haute Cour est composée par l'ensemble des députés et des sénateurs. Elle est présidée par le Président de l'Assemblée Nationale et elle ne peut prononcer qu'une seule sanction : la destitution du Président de la République. Encore, pour pouvoir prononcer cette sanction, la Haute Cour doit réunir la majorité des deux tiers des membres qui la composent, toute délégation de vote étant strictement interdite. Seuls sont recensés les votes favorables à la destitution. Ce vote sur la destitution se fait par bulletins secrets. Enfin, la Haute Cour doit statuer dans un délai d'un mois à compter de sa saisine. En principe, ses décisions ne sont susceptibles d'aucun recours. Par bonheur, et pour l'honneur de la France, cette juridiction n'a jamais eu l'occasion de siéger.

B) La Cour de justice de la République.

Cette juridiction, instituée par la loi constitutionnelle du 27 Juillet 1993, est chargée de juger les crimes et délits dont se serait rendu coupable un

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membre du Gouvernement (ministre, secrétaire d'état) dans l'exercice de ses fonctions (ceci ne concerne toutefois pas les contravention, car dans ce domaine-là, les membres du Gouvernement sont couverts par une immunité pénale). Elle est prévue et réglementée par les articles 68-1 et 68-2 de la Constitution du 04 Octobre 1958. Un membre du Gouvernement peut donc aujourd'hui être poursuivi en justice sans qu'il y ait nécessairement crime de haute trahison. Une simple infraction (crime ou délit) peut justifier des poursuites devant cette juridiction.Cette Cour de justice est une juridiction échevinale car elle est composée de 15 juges :• Six députés,• Six sénateurs,• Trois magistrats du siège de la Cour de cassation dont l'un d'eux est désigné par le Président de la République pour assurer la présidence de cette juridiction.

Cette Cour est saisie soit d'office par le Procureur général près la Cour de cassation, soit par toute personne par le biais d'une plainte. Cette plainte doit cependant avoir été examinée par une Commission des requêtes. L'arrêt de la Cour de justice de la République est susceptible de recours devant l'Assemblée plénière de la Cour de cassation. Si l'arrêt est cassé, la Cour de Justice de la République, entièrement recomposée, juge à nouveau l'affaire.

Sous-titre 2 : Les juges de cassation de l'ordre judiciaire.

Une bonne justice exige que l'interprétation et l'application du droit par les magistrats soient contrôlées afin que soient évitées les contradictions de décisions. Ce contrôle est exercé en France par une haute juridiction appelée « Cour de cassation ». Celle-ci a précisément pour mission de contrôler l'application des règles de droit et d'unifier leur interprétation. Il s'agit là d'une mission extrêmement technique et délicate. La Cour de cassation est une juridiction unique pour toute la République Française. Son siège est à Paris (au Palais de Justice, 5 quai de l'Horloge). C'est la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire : elle est au sommet de l'ordre judiciaire, c'est-à-dire des juridictions tant civiles que pénales. Mais, au sens technique, ce n'est ni une « cour suprême », ni un « troisième degré de juridiction ». Les juges qui composent la Cour de cassation sont appelés des « conseillers à la Cour de cassation».La Cour de cassation a pour ancêtre le Conseil des parties qui tranchait, sous l'Ancien Régime, les recours formés par les particuliers contre les arrêts du Parlement. L'Assemblée Constituante a crée en 1790 le Tribunal de cassation qui est devenu, en 1804, la Cour de cassation composée initialement d'une Chambre civile, d'une Chambre criminelle et d'une Chambre des requêtes.En raison d'un encombrement chronique de la Cour de cassation, plusieurs remaniements dans son fonctionnement et dans son organisation se sont succédés. Cet encombrement trouve plusieurs explications, dont :• La multiplication des lois,• L'existence d'une aide juridictionnelle,• La multiplication des juges non professionnels.

Quels ont été les remaniements successifs de la Cour de cassation ?

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• Un décret-loi du 17 Juin 1938 : création d'une Chambre sociale.• Une loi du 23 Juillet 1947 : suppression de la Chambre des requêtes et création d'une Chambre commerciale. Cette loi a également crée l'Assemblée Plénière.• Une loi du 12 Juillet 1952 : création d'une deuxième Chambre civile.• Une loi du 04 Août 1956 : augmentation du nombre de conseillers au sein de la Cour de cassation.• Une loi du 03 Juillet 1963 : création d'une troisième Chambre civile.• Une loi du 20 Février 1967 : création de conseillers référendaires au sein de la Cour de cassation. Initialement, ces conseillers n'avaient qu'une voix consultative. La loi du 12 juillet 1978 leur a donné voix délibérative.• Une loi du 03 Janvier 1979 : création d'une formation restreinte au sein des Chambres civiles.• Une loi du 06 Août 1981 : réduction du nombre des conseillers par Chambre (de 7 à 5). Cette loi permet à la formation restreinte de casser une décision, alors qu'elle ne pouvait jusque là que rejeter les pourvois ou transmettre l'affaire à la formation complète.• Une loi du 15 Mai 1991 : création du recours pour avis.• Une loi du 23 Avril 1997 : la formation restreinte constitue désormais la formation de principe de toutes les Chambres de la Cour de cassation, hormis la Chambre criminelle.• Une loi du 25 Juin 2001 : cette loi augmente les pouvoirs de la formation restreinte des Chambres civiles, sociale et commerciale de la Cour de cassation. En effet, elle leur permet de déclarer un pourvoi irrecevable lorsqu'il apparaît que celui-ci n'est pas fondé « sur un moyen sérieux de cassation ». La formation restreinte constitue, pour ainsi dire, un organe de filtrage des pourvois en cassation.• Un décret n°2008-484 du 22 Mai 2008 : ce décret est venu simplifier la procédure de cassation, notamment en raccourcissant les délais d'instruction mais également en permettant au premier Président de la Cour de cassation de constater d'office la péremption d'un pourvoi faute d'exécution de la décision attaquée (JCP éditions G. 2008, actualités p. 399).

Malgré toutes ces réformes, l'encombrement de la Cour de cassation perdure. En effet, au 31 décembre 2005, le nombre des affaires restant à juger s'élevait encore à 25 367. Pour y remédier, on a parfois proposé de créer de mini Cours de cassation régionales.

Chapitre 1. Le rôle de la Cour de cassation.

Section 1. Le rôle juridictionnel de la Cour de cassation.

La Cour de cassation est la « gardienne de l'unité du droit ». L'idée qui présida à sa création fut d'unifier l'interprétation des règles de droit sur l'ensemble du territoire de la République. Sa vocation initiale était d'être une Cour régulatrice afin qu'une même règle de droit soit interprétée et appliquée de la même façon dans toutes les

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juridictions du territoire français.

§I. La Cour de cassation, juge du droit.

La Cour de cassation n'est pas un troisième degré de juridiction dans la mesure où elle ne traite pas le fond de l'affaire (les faits de l'espèce). Elle n'est pas juge du fait, mais exclusivement juge du droit, c'est-à-dire qu'elle juge la bonne application du droit par les juges du fond.

A) Le principe : la Cour de cassation ne juge que le droit.

En principe, la Cour de cassation ne juge que le droit. En d'autres termes, elle n'a pas à s'occuper des éléments de fait du procès. Son rôle consiste à contrôler la rectitude juridique des décisions de justice rendues par une juridiction de l'ordre judiciaire. Elle se prononce sur la légalité de la décision rendue par les juges du fond. On dit que la Cour de cassation « juge les jugements et non les affaires ».Prenons un exemple : un automobiliste a causé un accident de la circulation. Le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable en raison de l'excès de vitesse qu'il a commis, et le punit à une peine d'amende et à l'annulation définitive de son permis de conduire. Cet automobiliste ne pourra pas arguer devant la Cour de cassation les faits (excès de vitesse). Mais il pourra soulever devant elle la méconnaissance d'une règle de droit (interdiction pour le juge répressif de prononcer une annulation définitive du permis de conduire).La fonction principale de la Cour de cassation est donc de contrôler la bonne application des règles de droit par les juridictions du fond. La Cour de cassation est compétente pour contrôler la totalité des décisions rendues en dernier ressort par les juridictions de l'ordre judiciaire (le tribunal d'instance, le tribunal de grande instance, la Cour d'assises, le juge de proximité, le tribunal de police, le tribunal correctionnel, le conseil des prud'hommes, le tribunal paritaire des baux ruraux, le tribunal des affaires de la sécurité sociale ou encore le tribunal de commerce).Elle est saisie par le moyen d'un pourvoi en cassation. Ce pourvoi est formé par la partie qui estime que la décision prononcée en dernier ressort par les juges du fond viole une règle de droit. Sauf disposition contraire, le délai pour former un pourvoi en cassation est de deux mois. Il commence à courir à compter de la notification de la décision contestée.

Trois observations s'imposent alors :

• Première observation : selon l'article 604 du Code de procédure civile, le pourvoi en cassation « tend à faire censurer par la Cour de cassation la non-conformité du jugement à la règle de droit ». Selon la doctrine, cette « non-conformité à la règle de droit » peut revêtir plusieurs réalités, lesquelles sont appelées en procédure civile les « cas d'ouverture à cassation ». En d'autres termes, un pourvoi en cassation ne peut être formé que si un cas d'ouverture à cassation peut être invoqué. Ces cas d'ouverture sont les

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suivants :• La violation de la loi : le terme « loi » ne doit pas être entendu strictement. Toute méconnaissance d'une règle juridique est susceptible de justifier un pourvoi en cassation. Ici, à la violation de la loi est assimilée la mauvaise interprétation de la loi.• Le défaut de motif : le défaut de motif consiste, pour les juges du fond, en une absence de motivation.• Le manque de base légale : le manque de base légale consiste, pour les juges du fond, à une insuffisance de leurs motivations.• L'incompétence : la méconnaissance des règles de compétence constitue un cas de pourvoi.• L'excès de pouvoir : il s'agit de l'hypothèse d'empiètement sur d'autres pouvoirs.• La contrariété de jugements rendus entre les mêmes parties : l'article 618 du Code de Procédure Civile dispose qu'un pourvoi peut être formé à l'encontre du jugement second en date lorsque la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée a été en vain opposée devant les juges du fond.• L'inobservation des formes : l'inobservation des formes prescrites à peine de nullité est un cas d'ouverture à cassation.• La perte de fondement juridique : il faut supposer une décision parfaitement légale au jour de son prononcé, mais qui perd son fondement juridique en raison d'un acte qui lui est postérieur, par exemple l'intervention d'une nouvelle loi déclarée applicable aux instances en cours devant la juridiction de cassation, ou encore l'annulation d'un acte administratif ou juridictionnel qui servait de base à la décision.• Deuxième observation : il existe des hypothèses dans lesquelles la Cour de cassation ne juge pas le droit :• Elle ne contrôle pas l'application de la loi étrangère, des coutumes locales ou professionnelles ou encore des contrats.• Elle ne contrôle pas certaines qualifications juridiques (Par exemple : le caractère réel et sérieux du prix de la vente, la faute dans le mariage, l'urgence en matière de référé...).• Troisième observation : pour vérifier la légalité de la décision rendue par les juges du fond, la Cour de cassation est toujours appelée, non pas à juger les faits, mais à les contrôler.

En effet, pour que la Cour de cassation puisse se livrer à un examen de l'affaire en pur droit, il faut qu'elle trouve dans la décision des juges du fond tous les éléments de faits qui lui sont nécessaires pour opérer son contrôle de la légalité de la décision qui lui est déférée. En d'autres termes, pour opérer son contrôle de la légalité, la Cour de cassation a besoin de connaître la motivation retenue par les juges du fond, laquelle repose exclusivement sur des éléments de fait. Mais attention : ce faisant, la Cour de cassation ne juge pas les faits dans la mesure où elle ne se prononce pas sur leur existence. Elle ne fait que les contrôler pour vérifier s'ils sont suffisants pour permettre un contrôle de la légalité.Le contrôle des faits par la Cour de cassation est bien évidemment quantitatif. Elle recherche si les éléments de faits retenus par les juges du fond sont suffisants en nombre pour justifier en droit leur décision. Mais ce contrôle est également qualitatif : les éléments de fait sur lesquels les juges du fond fondent leur décision doivent être cohérents et satisfaisants. Est ainsi cassée la décision qui repose sur des motifs d'ordre général, sur des motifs dubitatifs, sur des motifs hypothétiques ou encore sur des motifs contradictoires.

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B) L'exception : la Cour de cassation juge également les faits.

Dans une hypothèse très particulière, la Cour de cassation juge également les faits. Il faut savoir que, en matière pénale, la Cour de cassation a compétence pour connaître des recours en révision. Le recours en révision qui a pour objet de réparer une erreur judiciaire commise lors d'une condamnation correctionnelle ou criminelle (selon l'article 622 du code de procédure pénale). Dans ce cas, une question de fait doit exceptionnellement être examinée par la Cour de cassation qui doit statuer sur le fond. Cela constitue une exception notable à la règle selon laquelle la Cour de cassation n'est juge que du droit. Le condamné, mais également sa famille s'il est décédé ou encore le ministre de la Justice, peuvent saisir la Cour de cassation d'un pourvoi en révision. Il faut prouver qu'un fait important n'a pas été examiné par la juridiction du fond, et que, s'il l'avait été, la solution eut été différente. Le recours en révision est adressé à une Commission de révision chargée d'instruire l'affaire. Cette Commission est présidée par un conseiller à la Chambre criminelle, assisté de 4 conseillers à la Cour de cassation. Son rôle consiste à contrôler la véracité des faits nouveaux susceptibles de remettre en cause l'autorité de la chose jugée. Au regard de ces éléments, la Commission de révision accepte ou refuse la révision dans un arrêt motivé non susceptible de recours. Dans l'hypothèse où il y a effectivement matière à révision, la demande est alors transmise à la Chambre criminelle qui, en qualité de cour de révision, doit juger l'affaire en droit et en faits.

Deux issues sont alors possibles :• Si la demande lui paraît mal fondée, la cour la rejette.• Si la demande lui paraît fondée, la cour annule la condamnation. La Chambre criminelle peut statuer elle-même sur le fond de l'affaire. Elle peut également décider de renvoyer l'accusé ou le prévenu devant une juridiction de même ordre et de même degré, mais autre que celle dont émane la décision annulée (en référence à l'article 625 du code de procédure pénale).

Lorsque le condamné est reconnu innocent, deux conséquences se produisent :• Lui (ou sa famille s'il est décédé) peuvent obtenir de l'État une indemnité en raison du préjudice que la condamnation annulée a engendré. C'est la Commission nationale d'indemnisation en matière de détention provisoire qui se prononcera sur le montant de l'indemnisation. Cette Commission, créée par une loi du 17 Juillet 1970, est composée de trois magistrats du siège de la Cour de cassation.• La décision qui l'innocente fait l'objet d'une publicité en mairie, dans des journaux et au journal officiel. Les cas de révision demeurent rarissimes.

§II. La Cour de cassation, juge de cassation.

Pour pouvoir unifier l'interprétation de la règle de droit sur l'ensemble du territoire de la République, la Cour de cassation dispose d'une arme redoutable : comme son nom l'indique, elle peut « casser » les décisions qui lui sont déférées, c'est-à-dire les annuler. Ce faisant, elle peut imposer

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l'interprétation du texte qui lui paraît correcte à toutes les juridictions inférieures. Par ce biais se réalise l'unification de l'interprétation du droit. Quand elle est saisie d'un pourvoi, la Cour a alors le choix entre deux solutions : elle peut rejeter le pourvoi ou casser la décision qui lui est déférée.

A) La décision de rejet.

Lorsque la Cour de cassation estime que les juges du fond n'ont commis aucune erreur de droit, qu'ils ont interprété et appliqué correctement la règle juridique, elle ne peut alors que rejeter le pourvoi. La décision attaquée devient irrévocable. L'affaire est terminée.

B) La décision de cassation.

Lorsque la Cour de cassation constate une erreur d'interprétation, elle casse la décision contestée, c'est-à-dire l'annule. Une option s'offre alors à la Cour de cassation : elle peut casser avec ou sans renvoi devant une autre juridiction de la même nature et du même degré.

1) La cassation sans renvoi.

La cassation sans renvoi se pratique quand l'affaire est simple et qu'il n'y a plus rien à juger.Exemple n°1 : l'arrêt est cassé sans renvoi pour avoir déclaré recevable l'appel formé hors délai.Exemple n°2 : l'arrêt est cassé sans renvoi pour avoir fixé une sanction pénale au regard d'un texte abrogé ou pour des faits amnistiés.Exemple n°3 : l'arrêt est cassé sans renvoi lorsque la Cour dispose des éléments de faits lui permettant d'appliquer directement la règle de droit appropriée. C'est le cas, par exemple, lorsque la cour d'appel ayant refusé à tort le paiement des intérêts, la Cour de cassation casse l'arrêt et en ordonne le paiement.

2) La cassation avec renvoi.

La cassation avec renvoi est décidée quand l'affaire doit être rejugée en faits. En effet, ne pouvant elle-même appliquer sa propre décision aux faits de l'espèce (puisqu'elle n'est juge que du droit), la Cour va alors confier à une juridiction du fond le soin d'appliquer la décision de droit qu'elle vient de rendre aux faits de l'espèce. Encore une fois, lorsqu'elle décide de renvoyer l'affaire, les parties sont renvoyées devant une juridiction de même nature et de même degré que celle qui a initialement jugé.Exemple n°1 : si un arrêt de la cour d'appel de Colmar est cassé avec renvoi, l'affaire peut être renvoyée devant la cour d'appel de Lyon.Exemple n°2 : si un jugement rendu en premier et dernier ressort par le tribunal d'instance de Strasbourg est cassé avec renvoi, l'affaire peut être renvoyée devant le tribunal d'instance de Paris.La juridiction de renvoi examine alors l'affaire dans son intégralité, c'est-à-dire en fait et en droit. Elle dispose ici d'une liberté parfaite quant à la

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décision à prendre. En principe, elle n'est pas tenue de retenir l'interprétation de la Cour de cassation. Deux issues sont alors possibles :• Si la juridiction de renvoi statue dans le même sens que la Cour de cassation, l'affaire sera terminée.• En revanche, si la juridiction de renvoi ne statue pas dans le même sens que la Cour de cassation (on dit qu'elle refuse de « s'incliner ») et adopte la même solution que la juridiction dont la décision a été contestée à travers le pourvoi en cassation, le plaideur pourra former un deuxième pourvoi. Celui-ci sera alors jugé par l'Assemblée Plénière de la Cour de cassation.

Deux issues sont à nouveau possibles :• Si l'Assemblée Plénière donne raison à la juridiction de renvoi, la décision contestée devient irrévocable. Il s'agit alors d'un revirement jurisprudentiel dû à la résistance des juges du fond.• Si l'Assemblée Plénière ne donne pas raison à la juridiction de renvoi, elle casse la décision rendue par celle-ci et renvoie les parties devant une deuxième juridiction de renvoi. Celle-ci apprécie alors les faits en toute liberté. En revanche, elle sera tenue d'adopter l'interprétation juridique retenue par l'Assemblée Plénière.

Section 2. Le rôle non juridictionnel de la Cour de cassation.

La Cour de cassation remplit également une mission consultative. En effet, depuis la loi du 15 Mai 1991, elle peut simplement être saisie pour avis.Depuis cette loi, les juridictions de l'ordre judiciaire, peuvent, à l'occasion des litiges dont elles sont saisies, saisir la Cour de cassation afin d'obtenir d'elle un avis sur une question de droit qui leur est posée.

Plusieurs remarques :• Première remarque : la très grande majorité des juridictions de l'ordre judiciaire peuvent saisir pour avis la Cour de cassation. Initialement, seules les juridictions civiles pouvaient le faire. Depuis une loi du 25 Juin 2001, les juridictions pénales de jugement peuvent également le faire. Leur nature et leur degré importent peu (tribunal d'instance, juge de proximité, tribunal de grande instance, cour d'appel...). En revanche : les parties au litige n'ont pas ce droit. De même, le recours pour avis reste fermé aux juridictions pénales d'instruction ainsi qu'aux Cour d'assises. Enfin, bien évidemment, le recours pour avis reste fermé aux juridictions de l'ordre administratif.• Deuxième remarque : le recours pour avis suppose que soient réunies trois conditions cumulatives :• Il faut une question de droit nouvelle, c'est-à-dire une question non encore résolue par la Cour de cassation.• La question doit présenter une difficulté sérieuse : elle doit raisonnablement pouvoir donner lieu à des solutions divergentes de la part des juridictions de fond.• La question doit se poser dans de nombreux litiges : il faut un vaste mouvement contentieux.• Troisième remarque : la Cour de cassation dispose d'un délai de trois mois pour rendre son avis. Pendant ce délai, le juge qui a sollicité l'avis doit surseoir à statuer.

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• Quatrième remarque : l'avis de la Cour n'a aucune autorité de chose jugée. Le juge demandeur de l'avis est libre de le suivre ou non. L'avis ne lie pas la Cour de cassation elle-même.• Cinquième remarque : lorsqu'elle rend un avis, la Cour de cassation est composée du premier Président, des présidents de chambres et de deux conseillers de chaque chambre spécialement concernée

Chapitre 2. L'organisation de la Cour de cassation.

Section 1. La composition de la Cour de cassation.§I. Les magistrats.

A) Les magistrats su siège.

La Cour de cassation compte actuellement 167 magistrats du siège. Ces derniers appartiennent à différentes catégories bien distinctes :• Le premier Président : la Cour de cassation est présidée par un premier Président. C'est le plus haut magistrat de l'ordre judiciaire (son nom : Vincent LAMANDA, depuis le 30 Mai 2007. Il a succédé à Guy CANIVET qui, lui-même, avait succédé à Pierre TRUCHE). Le premier Président n'a aucun pouvoir juridictionnel propre. Toutefois :• Il est le chef de la plus prestigieuse juridiction de l'ordre judiciaire. A ce titre, il exerce des fonctions administratives importantes.• Il décide du renvoi en Chambre mixte ou en Assemblée Plénière.• Il préside la Chambre mixte ainsi que l'Assemblée Plénière.• Il préside également la formation spéciale pour avis, ainsi que le Conseil Supérieur de la Magistrature se réunissant en formation disciplinaire contre les magistrats du siège.• Six présidents de Chambre : ils répartissent les dossiers entre leurs conseillers, animent les débats et siègent dans la Chambre mixte, dans l'Assemblée Plénière et dans la formation spéciale pour avis.• 88 conseillers, appelés « Hauts conseillers » : ce sont des magistrats de carrière confirmés. Ils appartiennent à deux catégories : la plupart sont des Hauts conseillers en service ordinaire, certains sont des Hauts conseillers en service extraordinaire. Ces derniers sont des personnes qui, sans être magistrats, sont recrutées pour cinq ans en raison de leur expérience professionnelle antérieure d'au moins 25 ans. Ces Hauts conseillers en service extraordinaire exercent des fonctions juridictionnelles, tout comme les Hauts conseillers en service ordinaire.• 54 conseillers référendaires : ce sont des jeunes magistrats qui sont momentanément affectés à la Cour de cassation pour une durée non renouvelable de 10 ans. Après quoi, ils regagnent leur juridiction d'origine. Leur rôle est d'assister les Hauts conseillers et notamment d'alléger leur charge. En effet, ils ont pour mission principale de « rapporter » les affaires de la Chambre à laquelle ils sont affectés, c'est-à-dire de les présenter synthétiquement aux Hauts conseillers afin de faciliter et accélérer leur prise de décision. Initialement, les conseillers référendaires n'avaient qu'une voix consultative. Depuis la loi du 12 Juillet 1978, ils ont voix délibérative. De plus, ils peuvent désormais être appelés à compléter la Chambre à laquelle ils appartiennent, lorsque le nombre exigé de cinq conseillers n'est pas atteint.• 18 auditeurs : ils exercent des attributions administratives au sein de la Cour de cassation. Par ailleurs, grâce à leurs recherches, ils jouent un rôle

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d'aide à la décision.

B) Les magistrats du parquet.

Le parquet de la Cour de cassation est placé sous l'autorité du Procureur général près la Cour de cassation (Jean-Louis Nadal) assisté de quatre premiers avocats généraux (Régis De Goutte, Cécile Petit, André Gariazzo et Alexandre Benmakhlouf) et de 28 avocats généraux répartis dans les différents Chambres de la Cour de cassation. C'est le Procureur général qui préside la formation disciplinaire du Conseil Supérieur de la Magistrature se réunissant en formation disciplinaire pour les membres du parquet.

§2. Le greffe.

La cour de cassation dispose d’un greffe (secrétariat) qui emploie 200 personnes. Chaque chambre dispose d’un greffier. Il sont plusieurs au sein d’une chambre, et leur rôle dans la Cour de cassation est exactement le même que celui de ceux des juridictions du fond.

Section 2 : Les différentes formations de la Cour de cassation.

Les formations que la Cour de cassation peut prendre sont assez nombreuses mais classées sous deux catégories : certaines sont des formations juridictionnelles, et d’autres, au contraire, ne sont pas des formations juridictionnelles.

§1. Les formations juridictionnelles.A. La formation en chambre.

La Cour de cassation est divisée en 10 chambres qui ont pour fonction principale de juger les pourvois en cassation. Pour ce faire, ces chambres rendent des arrêts. A la tête de chaque chambre est placé un président de chambre, toutefois le premier président peut présider n’importe quelle chambre s’il l'estime nécessaire. Chaque chambre a des attributions qui lui sont spécifiques :• La première chambre est la première chambre civile, aussi nommée la grande chambre (car c'est la plus grande), a pour attribution le droit des personnes, les contrats, les assurances, le droit international privé, ou encore le droit de la famille.• La deuxième chambre est également une chambre civile. Mais celle-ci s’occupe de la procédure civile et des questions de personnalité.• La troisième chambre est la troisième chambre civile, qui, elle, s’occupe des droits réels, de la propriété en droit et des questions relatives à l'urbanisme.• La quatrième chambre, est aussi nommée chambre commerciale et financière car elle s’occupe du droit des affaires, du droit commercial et du droit boursier.• La cinquième chambre est aussi nommée chambre sociale car elle s’occupe du droit de travail et de la sécurité sociale.• Enfin, la sixième chambre est nommée chambre criminelle car c'est

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elle qui s’occupe de la procédure pénale.

Chaque année, dans la première quinzaine du mois de Décembre, l'affectation des magistrats pour chaque chambre peut changer : les chambres de la Cour de cassation peuvent donc se réunir en différentes manières, cependant, les pourvois peuvent se former devant des chambres en formation restreinte ou, à l'inverse, devant des chambres en formation ordinaire. Par exception, le pourvoi peut être jugé par la chambre mixte ou l’assemblée plénière de la Cour de cassation.

1. Le principe.a. Le principe devant l’une des cinq chambres civiles.

Devant ces chambres civiles, le pourvoi en cassation est en principe jugé par la chambre restreinte, laquelle peut renvoyer le pourvoi devant une chambre ordinaire.Lorsque le pourvoi est déposé au greffe de la Cour de cassation, le greffier va transmettre le pourvoi à la chambre concernée, celle qui est jugée compétente. Dans un premier temps, lorsque le pourvoi arrive, cette chambre interviendra toujours en formation restreinte, formation composée de trois magistrats. Son rôle consiste a filtrer les pourvois distribués a la chambre, cette commission de filtrage peut affirmer la non admission des pourvois recevables ou elle peut aussi déclarer non admis le pourvoi qui n’est pas fondé. A partir de là, il y a deux issues possibles :• Si la chambre déclare le pourvoi non admis, l’affaire est terminée & la cour de cassation n’interviendra jamais.• Si la chambre en formation restreinte déclare le pourvoi admis, elle peut décider de le juger elle-même, mais elle ne peut le faire que lorsque la solution du pouRvoi s’impose. Elle peut décider de juger le pourvoi mais n'est pas obligée de le faire.

Lorsque la solution du pourvoi ne s’impose pas, la chambre de solution restreinte qui a déclaré le pourvoi admis, doit alors le renvoyer devant la chambre en formation ordinaire. La chambre en formation ordinaire ne peut intervenir que sur renvoi par la chambre restreinte, soit par renvoi ordonné par le premier président ou le président de la chambre concernée. Lorsque cette formation ordinaire intervient, elle sera composée au minimum de cinq magistrats. Et c’est le président de la chambre qui décide de sa composition, mais le nombre doit être impair. Lorsque la chambre est composée, elle va rendre un arrêt. Encore une fois, deux issues sont possibles :• La chambre ordinaire peut rejeter le pourvoi, elle rend donc un rejet : et la décision rendue ne peut pas être jugée.• La chambre peut aussi recevoir le pourvoi : si cette chambre ordinaire rend un arrêt de cassation sans renvoi, l’affaire est terminée, mais si elle rend un arrêt avec renvoi, l’affaire est renvoyée devant une juridiction de premier degré.

b. Devant une chambre criminelle.

En matière pénale, le pourvoi est directement confié au greffier devant la chambre criminelle, composée au minimum de 5 magistrats. Exceptionnellement, le premier président ou le président de la chambre

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criminelle peut décider que ce pourvoi criminel soit jugé par trois juges au lieu de cinq, notamment lorsque la solution de l’affaire lui parait s’imposer. Lorsque ce pourvoi est renvoyé devant la formation ordinaire, à la demande d’une des parties au procès, le pourvoi sera automatiquement retransmis, soit a la demande de l’un des magistrats de la formation restreinte.

2. Les exceptions.a. La chambre mixte.

La chambre mixte est un instrument de régulation interne de la jurisprudence de la Cour de cassation. Elle permet d’éviter la naissance de divergences de solutions entre les différentes chambre de la cour de cassation. Elle siège seulement cinq à six fois dans l’année. Ainsi, à titre exceptionnel, le pourvoi en cassation peut être confié à la chambre mixte de la Cour de cassation.La question est de savoir qui peut renvoyer le pourvoi en chambre mixte.Le renvoi du pourvoi devant la chambre mixte peut être formulé que dans deux hypothèses :• Le renvoi peut être facultatif lorsque l’affaire pose une question relevant normalement des attributions de plusieurs chambres, ou lorsque la question est susceptible de recevoir des solutions différentes devant la chambre compétente. Le renvoi ici est réalisé avant l’ouverture des débats par le premier président, ou sur la proposition d’un président de l’une des chambres compétentes. Mais après l’ouverture des débats, le renvoi peut encore être décidé par un arrêt non motivé.• Le renvoi peut aussi être obligatoire en cas de partage égal des voix. Il y a alors une intervention obligatoire de la chambre mixte, ou encore lorsque le procureur général le demande avant l’ouverture des débats.

Lorsque la chambre mixte intervient (que ce soit obligatoirement ou facultativement), elle va réunir au moins trois chambres de la Cour de cassation. La chambre mixte comprend tout d’abord le premier président (qui va présider), les doyens de chambres saisies, ainsi que deux conseillers de chacune des chambres saisies.

b. L'Assemblée Plénière.

L'assemblée plénière est un instrument de régulation interne, puisque elle intervient lorsqu’il existe un conflit entre une juridiction du fond et la Cour de cassation.• Le renvoi peut être facultatif lorsque il existe des solutions divergentes, soit entre les juges du fond, soit lorsqu'il existe une solution divergente entre les juges du fond et la Cour de cassation. Le débat sera réalisé avant l’ouverture des débats, et après l’ouverture des débats par un arrêt motivé de la chambre saisie.• Le renvoi peut également être obligatoire lorsqu'après cassation d’une première décision, la décision rendue par le juge du fond est attaquée a nouveau.

B. Les formations en commission.

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Il existe au sein de la cour de cassation plusieurs commissions :• La commission nationale de réparation des détentions : elle est toujours composée du premier président de la Cour de cassation et de deux magistrats du siège. Elle est compétente pour statuer sur un appel sur les décisions prises par le premier président de la cour d’appel, soit en matière de réparation, soit d’un préjudice d’une détention injustifiée, soit d’une réparation de préjudices suivie par une personne condamnée subie d’une personne condamnée pénalement.• La commission juridictionnelle concernant les officiers de police judiciaire est composée de trois magistrats du siège de la Cour de cassation et elle est chargée de statuer sur les pourvois formés par les officiers de police judiciaire OPJ, qui fait l’objet d’une décision de suspension ou de retrait d’habilitation. Lorsqu’un officier de police a la qualité d’Officier de Police Judiciaire et commet une exercice de faute de qualité, il a un recours devant cette fameuse commission judiciaire.• La commission de réexamen intervenu en violation de la cour européenne des droits de l’homme : cette cour ne peut que condamner l’état à verser des dommages et intérêts a la victime. Elle a été créée par la loi du 15 Juin 2000; Désormais, lorsque la cour européenne décide qu’une décision pénale Française est contraire aux droits de l’homme, la cour de Strasbourg ne peut pas l’annuler elle-même mais cette commission, elle, en a le pouvoir.

§2. Les formations non juridictionnelles de la Cour de cassation.

Plusieurs formations ne rendent aucune décision de justice :• La formation en saisine pour avis : elle ne tranche pas. Elle ne fait que donner son avis, donc c’est une formation non juridictionnelle.• L’assemblée générale de la Cour de cassation : elle traite de toutes les questions internes de la Cour de cassation et est composée de tous les magistrats de la Cour de cassation.• Le bureau de la Cour de cassation :constitué par le premier président et les 6 présidents de chambre, par le procureur général, le premier avocat général sur les 4, et le greffier en chef. Elle constitue un organe de réflexion à la disposition du premier président, et il va également conseiller le premier président dans l’exercice de ces missions administratif.• Le service de documentation et d’études de la Cour de cassation : il est assuré par les auditeurs, qui établissent deux bulletins mensuels :• Tout d’abord le bulletin criminel, qui rassemble toutes les décisions rendues en matière criminelle.• Et puis le bulletin civil.

Tous les arrêts rendus ne sont pas publiés. Seuls sont publiés ceux que le président juge utiles de faire publier. Elle établit également le rapport annuel de la Cour de cassation, où on y trouve les décisions les plus importantes rendues par la Cour de cassation durant l’année. On choisit cinq à six arrêts qui figurent dans le rapport annuel du garde de sceaux. On trouve également dans ce rapport les défectuosités législatives, et les propositions de réforme qu’il serait souhaitable que le législateur prenne, et enfin une analyse complète détaillée sur un thème juridique donné.

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Section 3 : Le fonctionnement de la Cour de cassation.

En réalité l’examen du pourvoi en cassation peut se dérouler selon un mécanisme classique ou un mécanisme spécial.

§1. Le mécanisme classique.

Il comporte toujours quatre étapes :• Première étape :• En matière civile, le pourvoi en cassation est tout d’abord examiné dans la formation restreinte. Si la formation restreinte le déclare admis, elle peut décider de juger le pourvoi elle-même. Si elle ne s’impose pas, elle doit renvoyer le pourvoi devant une chambre civile compétente. Celle-ci peut toujours rendre une décision. Elle peut soit rejeter le pourvoi et donc l'affaire est définitivement terminée, elle peut casser sans renvoi, auquel l’affaire sera également terminée, ou elle peut encore casser avec renvoi, auquel cas l’affaire sera donc renvoyée devant une juridiction de même nature et de même degré. En matière pénale, il y a une examination directe, sans filtrage, par la chambre ordinaire ou restreinte. Sauf exception, le président de chambre peut décider de faire juger l’affaire devant la formation restreinte (c'est-à-dire trois juges). Trois solutions sont donc possibles : la formation peut rejeter le pourvoi. L'affaire est définitivement terminée. Elle peut casser le pourvoi sans renvoi, l’affaire est définitivement terminée. Ou elle peut casser avec renvoi de l’affaire, auquel cas elle est donc renvoyée devant un autre juridiction du même degré.• Deuxième étape : en cas de cassation avec renvoi, il appartiendra à la première juridiction de renvoi de rejuger complètement l’affaire. Soit cette juridiction de renvoi s’incline et l’affaire est définitivement terminée, soit la juridiction de renvoi refuse de s’incliner (décision contraire a celle donnée par la Cour de cassation). Dans le cas où la juridiction de renvoi refuse de s'incliner, l’auteur du premier pourvoi peut en former un second sur les mêmes moyens. S’il forme un deuxième pourvoi fondé sur d’autres moyens que ceux invoqués dans le premier pourvoi, ce ne sera alors plus l’assemblée plénière qui interviendra. Lorsque la juridiction de renvoi refuse de se soumettre à l'avis de la Cour de cassation, on dit que les juges du fond font de la « résistance ».• Troisième étape : si la juridiction refuse de s’incliner, ici interviendra obligatoirement l’assemblée plénière, qui pourra adopter trois solutions : elle peut rejeter le pourvoi, auquel cas l'affaire est définitivement terminée. Si elle rejette le pourvoi, elle se range du côté de l'avis des juges du fond. Mais elle peut aussi casser sans renvoi. Dans cas cas-là, l'affaire est aussi terminée. Ou alors elle peut casser avec renvoi. Dans le cas d'une cassation avec renvoi, l'Assemblée Plénière ne se range pas à l'avis des juges du fond.• Quatrième étape : lorsque l’assemblée plénière a cassé et renvoyé l'affaire, il appartiendra à la deuxième juridiction de renvoi de statuer à nouveau sur l’affaire. Cette seconde juridiction de renvoi n'aura pourtant pas d'autre choix que d’appliquer la solution de droit donnée par l'Assemblée Plénière de la Cour de cassation.

§2. Les mécanismes spéciaux.

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Ils sont au nombre de quatre :• Le pourvoi est porté devant la chambre compétente de la Cour de cassation qui ne statue cependant pas pour deux raisons : car avant l’ouverture des débats, le premier président ou le procureur général a décidé de confier l’affaire à la chambre mixte. Lorsque cette chambre mixte est saisie, elle pourra rejeter le pourvoi et l'affaire sera terminée, mais elle pourra aussi casser sans renvoi, auquel cas l'affaire sera également terminé, et enfin, elle pourra casser avec renvoi à une autre juridiction doit intervenir.• Le pourvoi est porté devant la chambre compétente mais cette dernière ne statue pas : elle a confié l’affaire a l’assemblée plénière ou elle ne statue pas car après ouverture des débats elle a saisi l’assemblée plénière. Lorsque cette assemblée plénière est saisie, elle peut rejeter le pourvoi, casser sans renvoi : l'affaire est terminée dans les deux, et pourra casser avec renvoi à l’affaire s’impose.• Le pourvoi est transmis a la chambre compétente qui refuse de statuer : car avant l’ouverture des débat le premier président ou le procureur général a fait comme dans la premier hypothèse, ou après l’ouverture des débat le président a saisi la chambre mixte. Il peut arriver ici que la chambre mixte ne statue pas aussi et saisi l’assemblé plénière on est donc dans une situation spécifique et celle-ci interviendra avec les trois possibilité de solution de rejet, cassation, cassation avec renvoi.

Titre 2 : Les juridictions de l’ordre administratif.

C’est une implication entre une personne morale et une personne de droit public : est un litige administratif un litige entre un contribuable et une

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administration fiscale.Pendant longtemps, ces litiges administratifs était tranchés directement par le supérieur hiérarchique. Ainsi, le justiciable qui pensait attaquer une personne de droit public, devait saisir non pas un juge, mais un supérieur hiérarchique qui était souvent un ministre. Cette période était appelée période du ministre juge. Pour remédier a cet état, il y a eu la création du conseil d’État, chargé de conseiller les ministres. Cela veut dire que même avec le conseil d’État, le ministre restait juge de tout. On qualifie cette période de la période de la justice retenue. Cette impartialité n’était toujours pas garantie, et finalement ce sera la loi du 14 Mai 1872, qui opérera un révolution dans la matière, car cette loi a confié au conseil d’État le soin de juger à la place des ministres tous les litiges administratifs et on est passé de la période de justice retenue a la période de justice déléguée. Et c’est suite à cette loi de 1872 qu’a été créer en France le nouvel ordre de juridiction. Désormais nous avons deux ordres de juridiction : l’ordre judiciaire, et l’ordre administratif (avant ces deux ordres étaient assemblés en un dans le conseil d’État, qui tranchait tous les litiges qui lui étaient soumis). On a crée en 1953, une deuxième juridiction administrative nommée « tribunal administratif ». Le conseil d’État en 1953, avait donc pour rôle à la fois d'être juge de cassation et de cour d’appel. Depuis 1987 cependant, il y a la création de la CAA et aujourd'hui, on a la CAA qui juge les affaires du premier degré renvoyées au conseil d’État ayant pour rôle de cour de cassation.

Chapitre 1. Les juges du fond de l’ordre administratif.

COURS DE LA SEMAINE DERNIERE.

• La compétence d'attribution.

Deux types d'attributions :• Les attributions consultatives,• Les attributions juridictionnelles.

a. Les attributions consultatives.

Conseille les préfets des régions.

b. Les attributions juridictionnelles.

Ce sont les juridictions de droit commun de l'ordre administratif du second degré. Par conséquent, elles ont vocation à connaître des appels formés, dès lors que cet appel n'est pas attribué à un autre juridiction. Sont alors exclus de sa compétence, tout d'abord les appels formés dans le contentieux de la légalité, mais aussi de l'excès de pouvoir ou encore des élections municipales ou cantonales, parce que ces appels relèvent non pas de la compétence de la cour administrative d'appel, mais du conseil d'État. Il

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faudra alors saisir exceptionnellement en appel non pas la cour administrative d'appel, mais le conseil d'État. Sont exclus aussi les appels formés contre les décisions rendues par une juridiction autre qu'un tribunal administratif, telle qu'une juridiction administrative spécialisée. Les arrêtes rendus par la cour administrative d'appel peuvent être frappés d'un pourvoi en cassation, pourvoi alors examiné par le conseil d'État.

Section 2. Les juridictions administratives spécialisées.

Les juridictions administratives spécialisées sont aussi appelées les juridictions administratives d'attribution ou juridictions administratives d'exception. Ces juridictions administratives spécialisées sont extrêmement nombreuses : il existe notamment le conseil supérieur de l'éducation nationale, le conseil supérieur de la magistrature ou encore les juridictions administratives spécialisées financières, telles que la Cour des comptes ou les chambres régionales des comptes.

Chapitre 2. Les juges de cassation de l'ordre administratif.

Il s'agit ici du conseil d'État, qui est le pendant de la Cour de cassation dans l'ordre administratif. Il n'y en a qu'un seul en France, qui siège au Palais Royal de Paris. Il existe cependant une différence fondamentale entre le conseil d'État et la Cour de cassation : la mission principale du conseil d'État, ce n'est pas de juger, mais de conseiller.Ce n'est qu'accessoirement que le Conseil d'État juge les pourvois en cassation (alors que c'est l'inverse pour la Cour de cassation). La raison est à trouver dans l'histoire. En effet, le conseil d'État trouve son origine dans l'Ancien Régime, notamment au XIIIe siècle, lorsqu'il s'appelait alors « Conseil du Roi ». Sous la Révolution, ce Conseil du Roi s'est transformé en Conseil d'État, qui ne faisait alors que conseiller. Cette fonction de conseil a duré jusqu'à la loi du 24 Mai 1872. A partir de cette loi de 1872, s'est ajouté à cette mission une mission accessoire : celle de juger. Ce n'est qu'à partir de cette date que les pourvois en cassation furent jugés par le Conseil d'État.

Section 1. L'organisation du Conseil d'État.§I. La composition du conseil d'État.

Le conseil d'État compte environ 200 personnes, et est extrêmement hiérarchisé. Il existe donc des normes hiérarchiques croissantes, qui viennent dans l'ordre suivant :• Au bas de la hiérarchie, se trouvent les auditeurs. Ils sont au nombre de 18. Normalement, ce sont des novices qui ne connaissent rien, et s'instruisent en écoutant les anciens. Ils sont cependant issus de l'ENA. Ce sont en général les premiers du classement de l'ENA. Ils choisissent d'être affectés au Conseil d'État, qui est considéré comme une affectation noble.• Puis se trouvent les maitres des requêtes. Ce nom est la survivance du nom de la personne qui, sous l'Ancien Régime, présentait les requêtes au Roi. Ces maitres sont aujourd'hui au nombre de 119. Certains maitres des

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requêtes n'ont pas forcément été auditeurs auparavant, ils sont parfois des fonctionnaires. Lorsque le maitre des requêtes n'est pas recruté parmi les auditeurs, on dira qu'il a été recruté par le « tour extérieur ». Le maitre des requêtes ne juge pas, il ne fait que préparer les dossiers. Il a un salaire de 11 247€ par mois.• Puis viennent les conseillers d'État, qui sont divisés en deux catégories :• Ceux qui sont recrutés parmi les maitres des requêtes,• Et ceux qui sont recrutés par le tour extérieur.Ils sont au nombre de 151 et assurent une double fonction : d'une part ils tranchent les pourvois en cassation, et d'autre part, ils participent à l'élaboration des avis du conseil d'État. On appelle ces conseillers des « conseillers d'État en service ordinaire ».A côté de ces conseillers en service ordinaire, nous avons les conseillers d'État en service extraordinaire. Ils peuvent siéger temporairement au conseil d'État pour une durée de 04 ans au maximum. N'importe quelle personnalité extérieure peut être nommée. Ils sont au nombre de 12 et sont nommés discrétionnairement. Ils ne jugent jamais les pourvois, leur rôle au sein du conseil d'État se cantonnant à participer à l'avis sollicité par le gouvernement.• A l'échelon supérieur se trouvent les présidents de sections. La cour de cassation est divisée en chambres, le conseil d'État en sections. Ces présidents sont choisis parmi les conseillers d'État en service ordinaire.• Puis, au sommet de la hiérarchie du conseil d'État se trouve le vice président du conseil d'État, qui assure la présidence effective de la juridiction. Depuis 2006, ce poste est occupé par monsieur Jean-Marc SAUVÉ.

Mais y a-t-il un président du conseil d'État, si cette présidence est effectuée par le vice-président ? En effet. C'est le premier ministre, conformément au code. En son absence, le président est le Garde des Sceaux. Cette présidence est exercée seulement pour la forme, de façon protocolaire pour les grandes cérémonies se déroulant devant le conseil d'État (c'est-à-dire deux à trois fois par an). Le premier ministre n'a aucun pouvoir juridictionnel, ni aucun pouvoir administratif. De sorte que durant toute l'année, la présidence effective est exercée par le vice-président. Le conseil d'État est également doté d'un Ministère Public permanent. Dans l'ordre judiciaire, on parle de Procureur Général ou Procureur de la République. Ici, on parlera de « Rapporteurs Publics ». Comme le Procureur de la République, le Rapporteur Public a pour mission d'indiquer au Conseil d'État, ce qui, pour lui, requiert l'intérêt général. Il veille à la bonne application et à la bonne interprétation de la loi. Il y en a environ une vingtaine. Le rapporteur public ne rend pas des réquisitoires, mais des conclusions.

B. Les formations du Conseil d'État.

Il existe plusieurs formations du Conseil d'État : les formations administratives, qui rendent des avis sollicités par le gouvernement, et les formations contentieuses, qui elles, rendent des arrêts (elles tranchent les pourvois).

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A. Les formations administratives.1) L'organisation des formations administratives.

Le Conseil d'État est avant tout le conseiller juridique du gouvernement. Pour remplir cette fonction, il est composé de 06 sections administratives, qui n'ont que des fonctions consultatives. Les sections sont les suivantes :• La section des finances.• La section de l'intérieur.• La section des travaux publics.• La section sociale.• La section du rapport et des études.• La section de l'administration (créée en 2008).

Chacune de ces sections est composée des personnels de tous les grades du conseil d'État. Ainsi, on retrouve dans chaque section un président, plusieurs auditeurs, plusieurs rapporteurs publics, plusieurs maitres des requêtes, et plusieurs conseillers d'État ordinaires et extraordinaires.

2) Le fonctionnement des formations administratives.a. Quand l'avis doit-il être sollicité ?

Le gouvernement peut parfois solliciter l'avis, et d'autres fois il doit le solliciter.• La consultation obligatoire : dans cette hypothèse-là, le gouvernement, représenté par un ministre, doit obligatoirement solliciter le conseil d'État en matière de. Les projets d'ordonnance sont obligatoirement soumis à l'avis du conseil d'État et ces projets de lois et d'ordonnances doivent être soumis au conseil d'État avant que celui-ci n'arrête la rédaction qui sera soumise au Parlement. Qu'en est-il alors du projet décret ?Les projets de décrets et d'arrêtés ministériels n'existent pas en principe. Cependant, concernant les décrets, cette règle connait tout de même quelques exceptions : parfois le législateur exige pour certains projets décrets une consultation du conseil d'État. A titre d'exemple, il en est ainsi pour les décrets modifiant des textes législatifs votés par les Parlements avant 1958. Néanmoins, l'avis ne lie jamais le gouvernement.• La consultation facultative : cette consultation a lieu dans toutes les autres matières, celles dans lesquelles la consultation n'est pas obligatoire. Le conseil d'État peut ainsi être saisi d'un avis sur une question de droit, mais aussi pour des questions sociétales. C'est dans ce cadre que le conseil d'État fut saisi pour la question du voile intégral, par exemple.

Le gouvernement n'est pourtant pas la seule autorité pouvant saisir le conseil d'État. Les Cours administratives d'appel ont également le pouvoir de saisir pour avis le conseil d'État. La Cour administrative d'appel est en droit de saisir pour avis le conseil d'État lorsqu'elle se trouve saisie d'une question de droit nouvelle présentant un caractère sérieux et étant présente dans de nombreux litiges. Cela rappelle la saisine pour avis de la Cour de cassation. L'avis du Conseil d'État doit être rendu dans les 03 mois suivants.

b. Par qui l'avis est-il donné au sein du conseil d'État ?

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En principe, l'avis est donné par la section administrative concernée par la nature de l'avis. Si l'avis est demandé par le ministre de l'intérieur, ce sera la section de l'intérieur qui sera compétente. Lorsque cette section compétente intervient, elle peut prendre deux formes sur décision du président de la section. Tout d'abord en formation plénière ou alors en formation ordinaire. Le nombre est fixé par le président de section en fonction de l'importance. Mais ce principe connait plusieurs exceptions :• Lorsqu'une affaire concerne plusieurs personnes : l'avis peut-être donné par des sections réunies ou alors l'avis peut-être donné par une commission commune qui réunira certains membres des sections concernées.• Il existe des hypothèses où, en raison de l'importance de l'avis exigé, la question est portée devant une formation beaucoup plus solennelle que l'on appelle « l'Assemblée Générale du Conseil d'État » qui comprend elle-même deux formations :• La formation ordinaire (composé de 35 membres et présidée par le vice-président du Conseil d'État). Cette formation est appelée à donner son avis sur des projets de loi, et des ordonnances.• Et la formation plénière qui comprend l'ensemble des conseillers d'États, les présidents de section et le vice-président. Elle a compétence pour examiner les affaires qui lui sont renvoyées par la formation ordinaire.• La troisième exception est que dans les cas d'urgence, l'avis peut-être donné par une commission permanente, composée d'un certain nombre de conseillers d'États fixés par le vice-président du Conseil d'État. Lorsque la commission permanente se réunit, elle peut se réunir dans la semaine même où la demande est posée. En moyenne, le conseil d'État rend 1500 avis chaque année. Plus il y a de projets de lois, plus il y aura d'avis.

B. Les formations contentieuses.

Il existe au sein du Conseil d'État une seule formation contentieuse, appelée la section du contentieux. Cette section a un pouvoir juridictionnel. Elle rend ainsi des arrêts (et non pas des avis) et elle juge les pourvois adressés au Conseil d'État. Elle comprend le plus grand nombre de membres, puisque chaque année plus de 10 000 pourvois en cassation sont adressés au Conseil d'État. Il y a en tout 150 membres dans cette section. Elle est composée d'auditeurs, des maitres des requêtes & des conseillers d'État en service ordinaire. Pour répondre à l'augmentation constante du nombre de recours, cette section a très vite été encombrée. Il a alors été décidé de subdiviser la section du contentieux en sous-sections du contentieux. Ces sous-sections sont au nombre de 10, ayant chacune une compétence particulière. Chaque sous section comporte 03 conseillers d'États, dont l'un fait fonction de président de la sous-section.

2) Le fonctionnement des formations contentieuses.

On saisit le conseil d'État par un pourvoi en cassation. Dès que ce pourvoi est présenté, il est transmis à la sous-section du contentieux compétente et cette sous-section va procéder à l'instruction de ce pourvoi. Avant d'être adressé à la sous-section, il existe une commission de filtrage. La requête ne sera adressée à la sous-section qu'à condition d'avoir été filtrée positivement par la commission de filtrage. S'ouvre ensuite l'instruction de cette requête

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lorsqu'elle arrive devant la sous-section compétente. Lorsque l'instruction est terminée, la décision finale peut être rendue selon 04 formations différentes :• Soit c'est la sous-section elle-même qui a instruit l'affaire qui rend la solution finale (solution habituelle).• Soit ce sont les sous-sections réunies (un pourvoi peut toucher aux compétences de deux ou plusieurs sections) qui rendent la décision finale.• Soit c'est la section du contentieux en formation de jugement qui rend la décision finale. Celle-ci se réunira à la fin de l'instruction lorsqu'il s'agit d'une affaire qui « par les problèmes juridiques qu'elle soulève, ou par ses applications politiques, exige que la décision soit prise par une formation importante du Conseil d'État ». Cette section est composée de représentants de chaque sous-section du Conseil d'État.• Enfin, ce sera peut-être l'assemblée du contentieux qui pourra rendre la décision finale. C'est la formation la plus importante (tant par ses nombres que par son caractère solennel) et elle est présidée par le vice-président. Elle comprend le président de la section du contentieux, le président de la sous-section qui a instruit l'affaire, les 04 présidents de sous-section les plus anciens dans leur fonction, les 03 présidents adjoints de la section du contentieux, le rapporteur de l'affaire et enfin le président de chacun des 06 sections administratives.

Toutes ces formations rendent des arrêts et il faut relever que le président de la section du contentieux possède des attributions juridictionnelles qui lui sont propres :• Tout d'abord, il joue un rôle pour régler les difficultés de compétence entre les tribunaux administratifs et les autres juridictions administratives,• Enfin, son deuxième rôle qui lui est propre est qu'il est également le juge du référé administratif.

Section 2. La compétence du Conseil d'État.

C'est ici que le Conseil d'État se différencie pleinement de la Cour de cassation. Le Conseil d'État est à la fois juge de première instance, juge d'appel ainsi que juge de cassation.

§I. Le Conseil d'État, juge de première instance.

Jusqu'en 1953, le Conseil d'État connaissait de tous les litiges administratifs. Le décret de 1953 a crée les tribunaux administratifs et depuis, les litiges de première instance sont soumis, en principe, au tribunaux administratifs. Mais ce principe n'est pas absolu. Car certains litiges, même depuis 1953, continuent de relever du conseil d'État en première instance. Lorsqu'il est saisi en tant que juge du premier degré, on parle de sa compétence directe, ou alors encore de sa compétence en premier et dernier ressort. Lorsque le conseil d'État statue en première instance, il n'y a aucun recours possible. Les cas où le conseil d'État peut être saisi de cette manière sont des cas exceptionnels, mais quantitativement, ils représentent tout de même environ 15% des arrêts rendus par le conseil d'État dans le cadre de sa compétence directe. Les cas d'accès à cette compétence sont assez exceptionnels.Les hypothèses où il faut saisir en première instance le conseil d'État sont

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limitativement énumérées à l'article R300-1 :• Lorsque la requête vise à mettre en cause un acte administratif de portée nationale,• Ou lorsque le recours que le justiciable souhaite intenter présente un enjeu national.

Dans la première hypothèse, on parle « d'acte administratif de portée nationale ». Il faut savoir qu'est considéré comme un acte administratif de portée nationale un acte émanant de ...Dans le même ordre d'idée, relèvent également de la compétence directe du Conseil d'État les décisions prises par les organes suivants :• L'agence Française de lutte contre le dopage,• L'autorité de la concurrence,• L'autorité des marchés financiers,• Le conseil supérieur de l'audiovisuel,• La commission internationale de l'informatique et des libertés.

Une deuxième hypothèse est le recours qui présente un enjeu important. Est un tel recours le recours qui vise à mettre en œuvre la responsabilité de l'État pour durée excessive de la procédure. En vertu de Convention Européenne des Droits de l'Homme, le juge Français doit rendre sa décision dans un délai raisonnable. Si tel n'est pas le cas, la France peut être condamnée par la Cour Européenne des Droits de l'Homme.

§II. Le Conseil d'État, juge d'appel.

C'est en 1953, lorsque le Tribunal Administratif a été crée que le conseil d'État est devenu le juge d'appel de droit commun dans l'ordre administratif. A partir de 1953, la requête devait être présentée au Tribunal Administratif et en appel, au Conseil d'État. La loi du 31 Décembre 1987 a crée des cours administratives d'appel et donc, la logique aurait voulu qu'à partir de 1987, le juge d'appel soit maintenant la Cour administrative d'appel et non plus le Conseil d'État. Sauf que la loi du 31 Décembre 1987 a assorti ce principe d'exceptions, dans lesquels le Conseil d'État peut toujours être juge d'appel. Il existe 04 exceptions :• Le Conseil d'État est juge d'appel pour trancher le contentieux des élections municipales et cantonales.• Il demeure juge d'appel pour connaitre des recours pour excès de pouvoir formés contre des actes règlementaires. Il existe en droit administratif les actes individuels et les actes règlementaires. Les actes individuels en appel sont traités par la Cour administrative d'appel. Les actes règlementaires en appel, quant à eux, sont traités par le Conseil d'État.• Enfin, il est juge d'appel pour connaître des recours en appréciation de la légalité des actes réglementaires résultant des renvois préjudiciels opérés par les juridictions judiciaires.

§III. Le Conseil d'État, juge de cassation.

Le Conseil d'État est juge de cassation des décisions rendues en dernier ressort par les Cours administratives d'appel, mais aussi par les juridictions administratives spécialisées (telles que la Cour des comptes, la Cour de discipline budgétaire et financière, le Conseil supérieur de la Magistrature, le

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Conseil supérieur de l'éducation nationale, ou encore les sections disciplinaires des ordres professionnels...). En tant que tel, il veille à la bonne application et à la bonne interprétation de la règle de droit. Ainsi est assurée la rectitude de l'application du droit administratif à l'intérieur de l'ordre administratif. Pour cette raison, le Conseil d'État n'est pas « une troisième degré de juridiction ». Pour provoquer ce contrôle, le Conseil d'État, comme la Cour de cassation, doit être saisi d'un pourvoi en cassation.

A. Le filtrage des pourvois en cassation.

Devant la Cour de cassation, seuls les pourvois adressés à l'une des Chambres civiles entendues lato sensu font l'objet d'un filtrage par une formation de trois juges. La Chambre compétente ne pourra examiner le pourvoi que si l'admission de celui-ci a été déclarée par la formation de filtrage. En revanche, les pourvois adressés à la Chambre criminelle ne font l'objet d'aucun filtrage.Devant le Conseil d'État cependant, tous les pourvois font l'objet d'un filtrage préalable. En effet, il existe au sein du Conseil d'État une Commission d'admission des pourvois en cassation. Cette Commission est composée de trois membres du Conseil d'État. Son rôle consiste à écarter les pourvois dilatoires ou encore abusifs. Cette Commission peut donc prendre deux types de décisions :• Si le pourvoi lui paraît irrecevable ou non fondé sur un moyen sérieux, la Commission prend alors une décision de refus d'admission qui rejette ce recours. L'affaire est définitivement terminée.• Si le pourvoi lui paraît recevable et qu'il comporte des moyens sérieux, la Commission transmet le pourvoi à la sous-section compétente de la section du contentieux, laquelle procède alors à son instruction et l'affaire sera jugée selon la procédure classique.

Force est de constater que la technique de filtrage du Conseil d'État, très expéditive, n'a aucune commune mesure avec la formation de trois juges de la Cour de cassation.

B. L'examen des pourvois en cassation.

Le pourvoi dont l'admission a été déclarée par la Commission d'admission est examiné par la formation compétente du Conseil d'État (soit en sous-section, soit en sous-sections réunies, soit en section du contentieux ou soit en Assemblée du contentieux). Comme la Cour de cassation, dans son contrôle de la bonne application et de la bonne interprétation de la règle de droit, le Conseil d'État ne peut connaître que des moyens de droit. Tel est du moins le principe car, dans une hypothèse particulière, le Conseil d'État est autorisé à juger, outre la légalité de la décision qui lui est déférée, les faits de l'espèce. En sa qualité de juge de cassation, le Conseil d'État peut rendre deux sortes de décisions : une décision de rejet du pourvoi ou une décision de cassation.

1) La décision de rejet.

Bien évidemment, le Conseil d'État peut rendre un arrêt de rejet lorsque le

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pourvoi ne lui paraît pas convainquant. L'affaire sera alors définitivement terminée.

2) La décision de cassation.

Le Conseil d'État peut également rendre un arrêt de cassation s'il estime que la décision qui lui est déférée n'est pas conforme à la loi. Comme la Cour de cassation, le Conseil d'État peut casser avec ou sans renvoi :• En principe, la cassation s'opère avec renvoi puisqu'il est impossible pour le Conseil d'État, juge du droit, d'appliquer lui-même aux faits de l'espèce la solution juridique qu'il vient d'adopter. Le renvoi s'opère devant une juridiction de même nature et de même degré. Il peut aussi s'opérer devant la même juridiction que celle ayant rendu la décision contestée, mais composée autrement. Tel sera le cas lorsque cette juridiction est unique (Cour des comptes, Cour de discipline budgétaire et financière par exemple).• Par exception, la cassation s'opère sans renvoi dans trois hypothèses distinctes :

• Tout d'abord, lorsque l'annulation de la décision contestée est pleinement satisfaisante dans la mesure où elle met fin au contentieux et qu'il n'y a plus rien à juger.

• Ensuite, lorsque le Conseil d'État décide de trancher lui-même l'affaire au fond, « dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice ». En effet (la règle est remarquable), le Code de l'organisation judiciaire autorise le Conseil d'État à juger, outre le droit, les faits dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice. Cette possibilité lui a été reconnue par une loi du 31 décembre 1987. Cet intérêt sera notamment le souci de parvenir plus

rapidement à une décision de justice définitive.• Enfin, lorsque le Conseil d'État a été saisi par un second

pourvoi, fondé sur les mêmes moyens. Dans cette hypothèse, il lui appartient de trancher lui- même l'affaire au fond.

Il faut en effet savoir que, comme la Cour de cassation, le Conseil d'État peut être saisi d'un second pourvoi fondé sur les mêmes moyens lorsque, après un premier pourvoi, la juridiction de renvoi refuse de s'incliner à la décision rendue par le Conseil d'État. Mais, dans cette hypothèse, et contrairement au mécanisme du pourvoi devant la Cour de cassation, le Conseil d'État intervenant à nouveau ne pourra plus renvoyer l'affaire devant une seconde juridiction de renvoi. Lorsqu'il examine le second pourvoi, il est légalement tenu de trancher l'affaire tant en droit qu'en faits. L'affaire est alors obligatoirement terminée.

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Sous-titre 2. Les juridictions extérieures aux ordres juridictionnels.

Il existe un certain nombre de juridictions qui n'appartiennent ni à l'ordre judiciaire, ni à l'ordre administratif. On dira de ces juridictions qu'elles sont « extérieures » aux ordres juridictionnels. Certaines d'entre-elles sont rattachées à la souveraineté Étatique Française, tandis que d'autres n'ont pas été créées par la France, mais par une instance supra-nationale.

Chapitre 1. Les juridictions nationales extérieures aux ordres juridictionnels.

On a l'habitude de dire que ces juridictions extérieures sont soit placées en dehors des ordres, soit au dessus des ordres. Par exemple, le tribunal des conflits, est placé au dessus des deux ordres. En ce sens, ce tribunal vient chapeauter l'ordre judiciaire et l'ordre administratif. Ce tribunal intervient concrètement lorsqu'il y a un conflit de compétence entre les deux ordres juridictionnels. Lorsqu'il y a un conflit d'attribution, il sera alors tranché par ce tribunal des conflits.Ensuite, en dehors des ordres juridictionnels est placé le conseil constitutionnel : il n'a rien à voir avec les ordres juridictionnels, car il ne les chapeaute pas. Son rôle n'est pas de régler les conflits entre les différents ordres, mais de vérifier la conformité de la loi à la Constitution.

Section 1. Au dessus des ordres : le tribunal des conflits.

Au moment de porter un litige devant la justice, se pose bien évidemment la question de la compétence de la juridiction. En général, la compétence est assez facile à déterminer. Mais dans certains cas, un justiciable ne peut pas être sûr de la juridiction à saisir. Est-elle judiciaire ou administrative ? On appelle alors ceci un conflit de compétence ou conflit d'attribution.Par exemple, un cycliste se fait renverser par un véhicule de la police nationale. Est-ce alors à une juridiction de l'ordre judiciaire de trancher le litige ? Ou à une juridiction administrative ? On pourrait très bien imaginer qu'un juge de l'ordre judiciaire se sente compétent, puisque le policier, au moment des faits était un automobiliste, donc un particulier. De même, un juge administratif pourra revendiquer sa compétence, en prétextant qu'au moment de l'accident, le policier conduisait un véhicule et était alors dans l'exercice de ses fonctions.Pendant longtemps, ces conflits étaient tranchés par le chef de l'État directement et discrétionnairement, c'est-à-dire le président de la République. Finalement, ces conflits furent confiés à une juridiction spéciale : le tribunal des conflits. Il fut institué une première fois par la Constitution du 04 Novembre 1848, mais fut supprimé par un décret de 1852. Et ce n'est qu'une loi du 24 Mai 1872 qui le réhabilita. On dit que le tribunal des conflits « coiffe » les deux ordres juridictionnels. Il n'existe qu'un tribunal des

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conflits, qui siège à Paris. Il présente un caractère paritaire, car l'idée directrice lors de sa création était de créer une juridiction n'appartenant à aucun ordre. Pour manifester cette non-appartenance à l'un des deux ordres, il fut instauré une composition paritaire (en effet, des juges administratifs et de juges judiciaires siègent au tribunal des conflits).

§I. L'organisation du tribunal des conflits.A. La composition du tribunal des conflits.

Le tribunal des conflits est composé de 03 conseillers d'État en service ordinaire élus au sein du Conseil d'État, et 03 conseillers à la Cour de cassation élus au sein de la Cour de cassation. Ces 06 membres vont élire à leur tour 02 autres membres (un autre membre de la Cour de cassation & un autre membre du Conseil d'État). Ce tribunal est présidé par le ministre de la justice. Mais il n'a aucun pouvoir juridictionnel. Puisque le tribunal est composé de 08 membres au total, il peut arriver qu'il y ait un partage égal des voix. Dans ce cas, et seulement dans ce cas, le ministre de la justice interviendra et tranchera. On dira qu'il aura un rôle départiteur pour évacuer le conflit. A part cela, il n'a un rôle que purement honorifique. Comme pour le Conseil d'État, la présidence est en réalité assurée par un vice-président, qui est un juge qui émane par alternance du Conseil d'État ou de la Cour de cassation. Le ministère public est lui aussi représenté de manière paritaire : il est composé de 02 maitres des requêtes au sein du Conseil d'État & de 02 avocats généraux au sein de la Cour de cassation. Ces 04 personnes sont appelées des « Rapporteurs Publics ». Leur mission est également la même que celle de n'importe quel rapporteur public, à savoir indiquer, selon eux, quelle est la bonne interprétation de la loi.

B. Le fonctionnement du tribunal des conflits.

Il siège dans un local à Paris, qui est très précisément le même local que celui où siège le Conseil d'État, c'est-à-dire le Palais Royal, rue de Rivoli. Ce tribunal des conflits comporte un secrétariat (et non pas un greffe). Ce n'est pas une juridiction permanente, dans la mesure où les conflits d'attribution ne sont pas nombreux chaque année. Ce tribunal des conflits va se réunir lorsque le nombre des conflits d'attribution sera assez important (c'est-à-dire environ 05, 06 ou 07 conflits). L'audience ne peut se dérouler que si 05 membres au moins sur 08 sont présents. Peu importe leur provenance (il peut ainsi y avoir les 04 membres du Conseil d'État et uniquement 01 membre de la Cour de cassation, par exemple). L'audience est publique, en revanche, le délibéré s'effectue à huis-clos. Le tribunal des conflits et le seul tribunal Français à rendre non pas un jugement, mais des arrêts. Il a également une autre particularité : lorsque l'arrêt est rendu, il n'y a ici pas de double degré de juridiction : aucun appel ou aucun pourvoi en cassation n'est possible. C'est une décision rendue en premier et dernier ressort immédiatement. Le tribunal des conflits rend en moyenne 40 arrêts par an.

§II. Le rôle du tribunal des conflits.

Initialement, le tribunal des conflits ne tranchait que des conflits d'attribution entre les juridictions de l'ordre judiciaire & les juridictions de l'ordre

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administratif. Mais à cette mission principale s'est ajoutée une mission accessoire par une loi du 20 Avril 1932 : dans certains cas, il peut également connaître du fond de l'affaire afin d'éviter les contrariétés de décisions, c'est-à-dire éviter qu'un juge administratif ne prenne une décision contraire à celle d'un juge judiciaire & inversement. Dans ce cas-là, on ne parlera plus de conflit de compétence, mais de conflit de décision.

A. Le règlement des conflits d'attribution.

Ici, c'est la mission historique du tribunal des conflits, à savoir les conflits de compétences qui peuvent survenir entre un juge judiciaire et un juge administratif. Il existe plusieurs types de conflits d'attribution. En effet, nous dit la loi, peut survenir entre les deux ordres, 03 types de conflits : un conflit positif, un conflit négatif ou encore un conflit sur renvoi.

• Le conflit positif d'attribution.

Il y a conflit positif d'attribution lorsqu'un juge judiciaire est saisi d'une affaire et lorsque l'administration estime que la compétence devrait revenir à une juridiction administrative. Lorsque l'administration souhaite ainsi soustraire à une juridiction judiciaire la connaissance d'un litige, il lui appartient à l'administration, d'élever le conflit.03 observations sont alors à faire :• Le conflit doit être élevé par le préfet du département (aucune autre personne n'est compétente).• Le conflit ne peut être élevé par le préfet que dans les matières qui ne sont pas expressément exclues par un texte spécial. Il ne peut pas l'être sur l'action publique en matière criminelle ou correctionnelle ou encore dans tous les cas d'atteinte à la liberté individuelle.• Le conflit peut être élevé par le préfet devant toutes les juridictions de l'ordre judiciaire, sauf devant la Cour de cassation.

La procédure, en présence d'un conflit positif, comporte 03 phases successives :• Le préfet prend un acte (un déclinatoire de compétence). Ce déclinatoire est transmis à la juridiction d'affaire qui conteste la décision de la juridiction judiciaire. Si la juridiction judiciaire reconnait son incompétence, cette juridiction va se dessaisir et renvoyer l’affaire au juge administratif. Si elle ne se reconnait pas incompétente, s’ouvre la deuxième phase :• Le préfet rend un arrêt de conflit. Il aura pour effet de paralyser le procès, car des qu’un arrêt de conflit est rendu, le juge a l'obligation de surseoir à statuer et doit attendre que le tribunal des conflits tranche le conflit.• S’ouvre alors la 3ephase : celle du jugement. Le tribunal des conflits doit trancher. Soit il annule l’arrêté de conflit (la compétence revient à la juridiction judiciaire qui a été saisie. L’arrêté est transmis au juge judiciaire qui pourra trancher), soit il le confirme (le tribunal des conflits estime que le juge judiciaire saisi est incompétent). L’arrêt du tribunal des conflits va dessaisir le juge judiciaire, et le dossier est transmis au juge administratif. Il a un délai de 03 mois pour rendre son conflit).

2. Le conflit négatif.

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Le conflit négatif vise à dénigre le déni de justice (la requête d’un justiciable n’est tranchée par aucun juge puisqu'ils se déclarent tous deux incompétents). Les deux ordres de juridiction sont saisis de la même question, et se déclarent tous les deux incompétents. Dans ce cas-là, il y a deux étapes :• Il appartient au requérant de saisir le tribunal des conflits, qui va prendre position soit pour l’ordre administratif, soit pour l’ordre judiciaire.• Le requérant doit à nouveau présenter sa demande devant le juge déclaré compétent qui devra alors statuer.

3. Le conflit sur renvoi.

C'est un décret du 25 Juillet 1960 qui autorise la saisine du tribunal des conflits par un juge, afin d’éviter les incidents de compétence. C’est une procédure préventive. Le but du renvoi est de prévenir l’apparition ultérieure de différents points de vue entre les différents ordres juridictionnels en soumettant par avance au tribunal des conflits en éventuel conflit.Parfois, le renvoi est obligé, quand la décision d’une juridiction, par une décision définitive a décliné la compétence de l’ordre juridictionnel à laquelle elle appartient, toute juridiction de l’autre ordre saisie de même litige, devra surseoir à statuer et renvoyer la compétence au tribunal des conflits. Le renvoi est parfois facultatif, car la Cour de cassation et le conseil d’État, peuvent, quand il y a conflit de compétence, surseoir à statuer et renvoyer l’affaire devant le tribunal des conflits.

B. Le règlement des conflits de décision.

On parle alors de règlement de conflit de décision ou de conflit de contrariété de jugement. Ici, c’est un problème de fond et non pas de compétence. Et cela de la manière suivante : lorsque, dans une même affaire, une juridiction judiciaire et une juridiction administrative se sont déclarées toutes les deux compétentes. Mais lorsqu'un juge judiciaire et administratif se déclarent tous deux compétents dans la même affaire et donnent tous les deux une décision, le tribunal des conflits peut intervenir pour statuer lui-même sur le fond. Il a deux mois a compter du jour ou il aura été saisi. En cas de contrariété de jugement, il pourra être saisi par le requérant mais aussi par l’un des juges. Mais cela est très rare. Cette situation a été prévue par la loi du 20 Avril 1932. Auparavant, lorsqu’il y avait contrariété de jugement entre les deux ordres, le tribunal de conflit pouvait également être saisi, mais en se contentant d’indiquer le juge compétent.

Section 2. En-dehors des ordres : le Conseil constitutionnel.

La tradition politique Française fut hostile pendant très longtemps à ce que la conformité à la Constitution d’une loi soit contrôlée : les raisons sont historiques, doctrinales, car on pensait que la Constitution était l'expression de la volonté générale. Ce n'est qu'après la seconde guerre mondiale que des critiques se sont élevées, notamment car beaucoup de pays européens avaient choisi ce système. C’est pourquoi la Constitution de 1946 a décidé

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de rompre avec le système ancien, en mettant en place le comité Constitutionnel, dont le but était alors de vérifier si les lois promulguées étaient conformes à la Constitution. Mais ce comité n’agissait pas vraiment. Il fonctionna jusqu’à la Ve République, mais fut remplacé par le Conseil constitutionnel, qui est désormais doté de véritables pouvoirs de sanction. Le Conseil constitutionnel est à ce titre placé en dehors des ordres. Le Conseil constitutionnel est aujourd'hui placé sous le titre 7 de la Constitution, intitulé « Le Conseil constitutionnel ». Les articles de cette section furent précisés par une loi organique du 07 Novembre 1958.

§1. L’organisation du Conseil constitutionnel.A. La composition du Conseil constitutionnel.

La composition du Conseil constitutionnel est définie à l'article 58 de la Constitution Française du 04 Octobre 1958. Il y a deux catégories de membres :• Tout d'abord les membres nommés. Ils sont nommés par le Président de la République, par le président de l'assemblée nationale & par le président du sénat. Chaque président nomme 03 membres, ce qui en fait 09 au total. On les appelle les 09 sages. Ils ont un mandat de neuf ans, et il ne peut être renouvelé. Le Conseil constitutionnel est renouvelé par tiers tous les 03 ans, afin de garantir une certaine continuité. Ils sont nommés discrétionnairement (de façon libre et sans conditions : il n'y a en effet pas de condition d’âge. La plupart sont des juristes, mais ce n’est pas une condition).• Les membres de droit : les anciens Présidents de la République peuvent intégrer le Conseil à vie, dès que leur mandat prend fin. A titre d'exemple, Valéry Giscard d'Estaing avait refusé de siéger, alors que Jacques Chirac avait immédiatement accepté. Le Conseil est présidé par un président désigné discrétionnairement par le président de la République. Sa voix est prépondérante en cas de partage. Elle est double.

Le Conseil constitutionnel est donc composé de 11 membres. Il existe différentes règles pour garantir l'indépendance :• Ils sont irrévocables,• Le mandat n‘est pas renouvelable,• Des règles d’incompatibilité ont été posées (un membre du Conseil constitutionnel ne peut exercer dans d’autres domaines) et des règles d’interdiction (les membres ne peuvent occuper aucun mandat public pendant l’exercice de leur mandat).• Il faut prêter serment devant le Président de la République (les membres s’engagent à juger en toute impartialité et s'engagent à se soumettre à une obligation de réserve qui leur interdit toute prise de position publique). En contrepartie, les membres perçoivent une rémunération la plus élevée de tous les fonctionnaires publics. En 2007, Debré, Valéry Giscard d’Estaing, Jacques Chirac, Renaud de Saint-Marc, Guy CANNIVET, CHARASS, HENEL, Jacques BAROT, STEINMETZ, GILLEN SCHMIDT, CLESANT. Par décret du Président de la République, est nommé un secrétaire.

B. Le fonctionnement du Conseil constitutionnel.

Chaque requête adressée au Conseil constitutionnel est d’abord soumise à une section composée de 03 membres, qui a pour mission d’instruire

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l’affaire. Quand elle est instruite, elle est transmise au Conseil constitutionnel, siégeant en séance ordinaire. Le Conseil rend des décisions. Il faut la présence de 07 membres au moins pour délibérer. Le conseil a l'obligation de rendre la décision dans un délai d’un mois, qui peut être ramené à 08 jours en cas d’urgence. Les décisions sont publiées au Journal Officiel de la République. Il n'y a pas d’appel possible.

§2. Les attributions du Conseil constitutionnel.

La Constitution de 1958 a conféré deux catégories d’attributions.

A. Les attributions juridictionnelles.1. Le contrôle de la répartition des compétences entre le

législateur et l’exécutif.

Les articles 34 et 37de la Constitution répartissent les compétences du parlement (article 34) et du gouvernement (article 37). Deux procédures ont été instituées pour répartir les compétences.

a. La procédure de l’irrecevabilité.

C'est l'article 41 de la Constitution qui met en place cette procédure qui permet d’assurer la protection du domaine du règlement. Le gouvernement peut soulever l’irrecevabilité d’une proposition ou d’un amendement qui ne relève pas de la loi pour arrêter la discussion du texte. Cette demande est soumise au président de l’Assemblée parlementaire intéressée, qui décide de la demande d’irrecevabilité. Si le Président est d’accord, le débat prend fin immédiatement. S'il n'est pas d’accord, le Conseil constitutionnel intervient à la demande de l’un ou de l’autre et doit statuer dans les 08 jours. Depuis la Constitution de 1958, le Conseil a été saisi 11 fois.

b. La procédure du déclassement.

Cette procédure est prévue à l’article 37 alinéa 2 de la Constitution. Elle permet au gouvernement de demander au Conseil constitutionnel de déclarer qu’une disposition figurant dans une loi déjà en vigueur est intervenue dans une domaine appartenant au pouvoir exécutif. Si le conseil constate que cette disposition est effectivement intervenue dans un domaine non appartenant au législateur, il va la déclasser et en conséquence le gouvernement pourra la modifier en décret. Cette procédure est aussi appelée procédure de délégation. Et cette procédure, contrairement a l’autre procédure, est très utilisée par le gouvernement, et a donné lieu a plus de 200 décisions du Conseil Constitutionnel. Par exemple, en 2006, le premier ministre Dominique de VILLEPIN a saisi le Conseil Constitutionnel sous la procédure de déclassement. Ce qui été reproché était l’article 4 de la loi du 23 Février 2005 portant reconnaissance de la nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés, indiqué : « que des programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence Française outre mer

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de l’Afrique du nord », il a proclamé que ceci relevait du domaine exécutif et non législatif et donc, il y a eu déclassement, et le gouvernement a abrogé l’article 4 par un décret, car elle avait un caractère réglementaire.

2. Le contrôle de la constitutionnalité de certaines normes.a. La constitutionnalité des lois organiques.

Selon l’article 61 de la Constitution, avant leur promulgation, les lois organiques doivent être soumises au Conseil Constitutionnel, qui se prononcera sur la conformité à la Constitution. Et ce contrôle systématique permet d’éviter que le parlement ne profite du vote d’une loi organique en sa faveur. Le Conseil constitutionnel doit être saisi par le premier ministre avant la promulgation de la loi organique.

b. La constitutionnalité des règlements des assemblées parlementaires.

L’Assemblée nationale et le Sénat ont un règlement intérieur et l’article 61 indique que ces règlements, avant leur mise en application, devraient être soumis au Conseil constitutionnel. Le contrôle opéré par le Conseil constitutionnel est obligatoire, il sera ici saisi par le président de l’assemblée parlementaire en question.

c. La constitutionnalité des lois ordinaires.

C'est une innovation de la Constitution de 1958. Le contrôle est facultatif. Ce contrôle pose 04 questions.

α. Qui peut provoquer le contrôle de la constitutionnalité des lois ordinaires ?

Jusqu'au 23 Juillet 2008, la saisine du Conseil constitutionnel était réservée à certaines personnes limitativement énumérées : le Président de la République, le Premier ministre, le Président de l’Assemblée Nationale, le Président du Sénat, et un groupe de 60 députés ou 60 sénateurs. Avec la loi de modernisation des institutions de la Ve République, du 23 Juillet 2008, la faculté de provoquer le contrôle est également appliquée aux citoyens. Cette faculté fut alors inscrite dans l'article 61-1 de la Constitution : « lorsqu'à l’occasion d’une instance en cour devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’état ou de la Cour de cassation, qui se prononce dans un délai déterminé ». Cette disposition du nouvel article 61-1 de la Constitution a été précisé par la loi organique du 19 Décembre 2009, entrée en vigueur le 1er Mars 2010. Depuis cette date, on parle de la Question Prioritaire de Constitutionnalité (c'est-à-dire la possibilité de saisir le Conseil Constitutionnel par un citoyen). La saisine du Conseil constitutionnel par un citoyen ne se fait pas par voie d’action, mais par voie d’exception. On dit qu’une saisine se fait par voie d’action lorsqu’une personne peut saisir directement le juge, or ici ce n’est pas le cas. En France, la saisine se fait par voie d'exception pour un citoyen : il peut saisir le Conseil

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constitutionnel seul seulement s’il est engagé d’abord devant une juridiction (un procès est obligatoire devant une juridiction nationale de l'ordre judiciaire ou administratif).• La saisine du Conseil constitutionnel par un citoyen est fortement encadrée, car si au cours d’un procès un citoyen estime que la loi est contre la Constitution, sa question prioritaire de constitutionnalité ne sera pas directement transmise au Conseil constitutionnel, mais fera l’objet préalable de deux filtres, qui se mettront en place selon 04 étapes successives :• La juridiction devant laquelle la question prioritaire de constitutionnalité est présentée devra apprécier le bien fondé de cette question.• La juridiction ne pourra pas l’envoyer directement au Conseil constitutionnel, mais devra l’envoyer a la Cour de cassation ou au Conseil d'État, qui a son tour devra apprécier le sérieux et le bien fondé de la question.• Si la Cour de cassation ou le Conseil d'État estime que la question prioritaire de constitutionnalité est bien sérieuse, elle sera alors transmise au Conseil constitutionnel, et jusqu’à la décision du Conseil, l’instance en cours sera suspendue.• Il appartiendra alors au juge initialement saisi d’appliquer a l’instance en cours la solution donnée par le Conseil constitutionnel.

β. A quel moment ce contrôle peut-il être invoqué ?

Le moment du contrôle varie en fonction du demandeur :• Les autorités ont un délai entre l’adoption de la loi et sa promulgation. Une fois que la loi a été promulguée, les autorités ne pourront plus jamais la contrôler.• Le citoyen agit par exception d'inconstitutionnalité. Cette dernière peut être invoquée même à l’encontre d’une loi déjà promulguée.

γ. Dans quel délai le conseil constitutionnel doit-il opérer ce contrôle ?

Si le Conseil constitutionnel est saisi par les autorités, il possèdera un délai de 01 mois pour statuer. Mais ce délai pourra être ramené à 08 jours s'il y a un caractère d'urgence. Si c’est le citoyen qui saisit le Conseil, le Conseil aura 03 mois pour statuer.

δ. Quel est l'étendue du contrôle opéré par le Conseil constitutionnel ?

Le Conseil constitutionnel vérifie non seulement la conformité de la loi à la Constitution, mais aussi que la loi respecte le bloc de constitutionnalité (le bloc de constitutionnalité comprend la Constitution, le préambule de la Constitution de 1958, la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, le préambule de la Constitution de 1946, les principes à valeur constitutionnelle et la Charte de l’environnement de 2004). En revanche, le Conseil refuse toujours de contrôler la conformité de la loi à un traité international (loi du 15 Janvier 1975, dite décision « IVG »). On contrôle par rapport au bloc de Constitution. Dans une décision du 10 Juin 2004, le Conseil a refusé de

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sanctionner une loi qui ne ferait que transposer une directive européenne en droit interne.

d. La constitutionnalité des engagements internationaux.

L'article 54 de la Constitution dispose que le Conseil constitutionnel peut être saisi par le président de la république, le premier ministres, le président de l’Assemblée Nationale, le président du sénat, 60 députés et 60 sénateurs, afin d’apprécier le conformité à la Constitution d’un traité international. Ce contrôle est facultatif, cette saisine doit donc intervenir avant le ratification du traité. Il existe donc deux possibilités :• Si le Conseil constitutionnel considère que le traité est conforme à la Constitution, il est ratifié.• Si le Conseil constitutionnel considère qu’une des clauses n’est pas conforme à la Constitution, la ratification ne pourra intervenir qu’après la modification du traité.

Il est très difficile pour un pays d’imposer une modification dans un traité international. Par conséquent, ce qui se fait habituellement lorsque le Conseil considère que le traité est non conforme a la Constitution, est la révision de la Constitution et non pas du traité.

3. Le contrôle de la régularité de certaines élections.

Les élections du président de la république, des députés, des sénateurs, et la régularité des opérations de référendums relèvent également de la compétence juridictionnelle du Conseil constitutionnel.• Les élections présidentielles : le Conseil constitutionnel est appelé à intervenir dans toutes les phases de l'élection. Par exemple, c'est lui qui règle les problèmes en cas de décès d'un candidat, ou d'empêchement d'un candidat entre les deux tours, c'est lui qui arrête la liste des candidats, c'est lui qui vérifie et contrôle les votes et tranche les réclamations postérieures à l'élection. Enfin, il proclame les résultats ou invalide les élections irrégulières. Ici, le mode de saisine du Conseil constitutionnel est particulier, il ne peut être saisi que par l'un des 500 présentateurs de chaque candidat à la présidence de la république. Pour être candidat, il faut recueillir 500 signatures (maires, conseillers général...) et c'est eux qui peuvent saisir le Conseil constitutionnel. Il peut aussi être saisi par les 06 personnes.• Pour les élections des députés et des sénateurs, le Conseil constitutionnel statue en cas de contestation sur la régularité des élections des députés et des sénateurs. Il peut être saisi dans les 10 jours au-delà de la proclamation des résultats par tout candidat qui s'est présenté, ou par tous les électeurs de la circonscription. Lorsqu'il est saisi, il vérifie tous les stades des opérations de vote, notamment les incompatibilités du parlementaire élu, ou si les règles sur les finances ont été respectées.• Pour la régularité des opérations de référendums : le Conseil constitutionnel vérifie et proclame alors les résultats des référendums. Il n'est pas compétent pour vérifier le texte soumis à référendum, car si une loi fait suite à un référendum, elle ne peut qu'être conforme à la Constitution car c'est, selon le Conseil constitutionnel, le peuple souverain qui l'a choisie.

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B. Les attributions non juridictionnelles du Conseil constitutionnel.

Elles sont au nombre de 02 :• Le Conseil constitutionnel est consulté par le président de la république avant la mise en œuvre des pouvoirs exceptionnels de l'article 16 de la Constitution. Il doit alors se réunir immédiatement, car il y a urgence, et émettre un avis sur la réunion des conditions de l'article 16. Pendant la durée de l'application de l'article 16, si le président décide de le mettre en application, le Conseil constitutionnel devra être consulté sur chaque mesure qu'il veut prendre. En 1961 le Conseil constitutionnel avait décidé que les conditions de l'article 16 étaient réunies.• Il appartient au Conseil saisi par le gouvernement de constater soit la vacance de la présidence de la république (décès, démission), soit de constater l'empêchement du président de la république (maladie...). Lorsqu'il y a vacance, le Conseil constitutionnel organise de nouvelles élections et l'intérim entre la vacance et la proclamation du nouveau président sera assuré par le président du Sénat. Lorsqu'il y empêchement du président, le Conseil constitutionnel confiera l'intérim au président du Sénat. Par 02 fois, Alain POHER, alors président du sénat, a assuré l'intérim. En 1969, à la suite de la démission du Général de Gaulle, et en 1971 a la suite de la mort de Georges Pompidou.

Chapitre 2. Les juridictions supranationales.

Au fil des années la justice d'un pays a cessé de constituer le monopole de l'État pour 02 raisons :• Les juridictions des États étrangers rendent elles aussi des décisions de justice. Or, il arrive que ces décisions étrangères doivent être exécutées sur le sol Français et notre droit permet qu'une décision rendue par un tribunal étranger s'applique en France. En France, une décision étrangère ne peut s'appliquer qu'à la condition d'avoir obtenu l'exequatur (ce qui correspond à une décision de justice par laquelle un tribunal de grande instance Français autorise l'exécution en France d'un arrêt ou d'un jugement rendu par une juridiction étrangère). Avant d'accorder l'exequatur, le Tribunal de grande instance va d'abord vérifier : la compétence de la juridiction étrangère, la compétence de la loi étrangère, l'absence de fraude à la loi et la conformité de la décision étrangère à l'ordre public international Français.• Il existe de plus en plus de juridictions qui ne sont rattachées à aucune souveraineté étatique. Ces juridictions sont appelées les juridictions supranationales, elles existent mais ne sont rattachées à aucun pays. Et elles ont pour mission d'assurer le respect des traités internationaux par les États qui les ont signé. Ainsi, le respect par la France des engagements internationaux pris par celle-ci est assuré par des juridictions supranationales qui peuvent rendre des décisions des justice. Certaines veillent au respect de l'ordre juridique international (traité de l'ONU) : on les appelle les juridictions internationales. D'autres veillent au respect de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, c'est la Cour européenne des droit de l'Homme. D'autres encore veillent au respect du droit communautaire et au droit de l'Union Européenne, ce sont les juridictions communautaires.

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Section 1. Les juridictions internationales.

Schématiquement, elles veillent au respect des dispositions émises par l'ONU, mais ces dispositions peuvent être d'ordre pénal ou d'ordre privé. La cour internationale de justice veille au respect des dispositions privées de l'ONU par les États membres. Et la Cour pénale internationale veille au respect des dispositions d'ordre pénal émises par l'ONU.

§1. La Cour internationale de justice.

C'est l'ONU qui a instauré cette cour après le seconde guerre mondiale. La Cour internationale de justice remplace la cour permanente de justice internationale qui avait été créée par l'ancêtre de l'ONU, la société des nations. Sa mission principale est de trancher les différends juridiques, d'ordre privé, entre les États membres de l'ONU. Par exemple, lorsqu'un État conteste une frontière avec un autre État. Son siège est fixé à La Haye (aux Pays-Bas). Son fonctionnement organisé par deux textes : la charte des nations unies (articles 92 à 96) et les statuts de la Cour internationale de Justice (règlement intérieur).

A. L'organisation de la Cour internationale de justice.

La Cour internationale de justice est composée de 15 juges, tous élus pour 09 ans avec un mandat renouvelable. Ces juges le sont à la majorité absolue par l'assemblée générale de l'ONU. Il faut savoir que lorsque les élections sont organisées, chaque État membre de l'ONU (il existe 192 États membres au total) va présenter une liste de trois personnes que l'État propose pour être juge à cette cour internationale de justice. En sachant que pour être inscrit sur les listes de chaque État, les candidats sont nommés discrétionnairement, mais que quelques conditions sont tout de même fixées :• Les personnalités de la plus haute considération morale et les personnes inscrites doivent avoir une compétence notoire en droit international public. Lorsqu'ils sont élus, ils le sont de manière indépendante, et sont inamovibles. Ils bénéficient de l’immunité diplomatique.• Pendant leur mandat, ils ne peuvent exercer aucune fonction politique ou administrative ni se livrer à aucune occupation à titre professionnel.

Afin d'assurer la continuité dans la jurisprudence de la Cour internationale de Justice, elle est renouvelée par tiers tous les trois ans. A la tête de cette cour est placé un président et un vice président élus par la Cour. Leur mandat est de trois ans renouvelable et d'un greffier. La composition actuelle est la suivante : c'est le Royaume-Uni qui est président de la cour européenne des droits de l'homme et la Cour internationale de justice, la Jordanie est vice président, Madagascar, la chine, la Sierra Léone, le Japon, les États Unis, l'Allemagne, la Slovaquie, la France (Ronnie Abraham), la Nouvelle Zélande, le Mexique, le Maroc et la fédération Russe. Lorsqu'un État est parti à un procès et qui ne compte pas l'un de ses nationaux parmi les magistrats de la cour, il lui est possible de désigner une personne de son choix appelée juge ad hoc, qui siégera au côté des 15 juges membres de la Cour. En principe,

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elle intervient en séance plénière avec un minimum de 09 sur 15 pour avoir correctement jugé. Mais par exception, elle peut constituer une ou plusieurs chambres composées de trois juges. Lorsqu'elle l'a fait, ces chambres de trois juges pourront intervenir à trois chacune dans les domaines limitativement énumérés dans les statuts de la Cour.

B. La compétence de la Cour internationale de justice.1. La compétence contentieuse.

C'est une véritable juridiction car elle rend des arrêts.

a. La compétence matérielle.

L'article 38 du statut de cette Cour nous dit qu'elle a pour mission de régler, conformément au droit international, les différends qui lui sont soumis. Il appartient à la Cour de veiller au respect de ce droit international public, appelé le droit onusien. Le droit international public comprend tous les textes émis par l'ONU (chartes) mais aussi d'autres conventions internationales, les principes généraux de droit international public (bonne foi, égalité des armes...), et les coutumes internationales. Lorsque les parties sont d'accord, la Cour, au lieu de juger en droit conformément à ces textes, est autorisée à juger en équité.

b. La compétence personnelle.

L'article 34 du statut de la Cour internationale de justice nous dit qu'elle peut être saisie par l'ONU en tant que personne morale ou par l'un des États membres de l'ONU. Dans les 02 cas, la requête doit être dirigée contre un État membre de l'ONU, donc un État qui ne serait pas membre de l'ONU ne peut pas saisir la Cour et ne peut jamais être impliqué dans un procès qui se passe devant la Cour. Un particulier ne peut pas saisir la Cour internationale de justice. La compétence de la Cour internationale de justice doit être acceptée par les États membres, sinon la Cour ne pourra pas statuer. L'intervention de la Cour ne s'impose pas à l'ONU. Avant la naissance du litige, les États qui ont signé le traité de l'ONU peuvent y insérer une clause compromissoire par laquelle ils décident que tous litiges relatifs à l'application ou à l’interprétation du traité sera soumis à la compétence de la Cour internationale de justice. Lorsque le litige est déjà né, l'État qui n'aurait pas accepté la compétence de la Cour internationale de justice pourrait encore accepter la clause et reconnaît donc que cette cour peut intervenir pour régler le litige. Un arrêt de la Cour internationale de justice n'est pas exécutoire, donc un État peut refuser d'exécuter un arrêt rendu par la Cour internationale de justice. Si un État refuse, l'autre État peut saisir le Conseil de sécurité de l'ONU et qui décidera de donner des recommandations ou mesures plus contraignantes.

2. La compétence consultative.

L'assemblée générale de l'ONU ou le Conseil de sécurité de l'ONU peuvent demander des conseils juridiques au conseil de La Haye mais cela ne lie pas

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le demandeur.

§2. La Cour pénale internationale.

Pas d'étude sur cette juridiction.

Section 2. La Cour Européenne des Droits de l'Homme.

C'est une juridiction supra-nationale, qui appartient à la catégorie des juridictions qui veillent au respect du droit européen. Le droit européen est composé d’un seul texte : la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome par les États membres du Conseil de l’Europe. Son objectif est de protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales. Sont garantis les droits à la vie, les droits à un procès équitable, le droit à une vie privée et familiale, le droit au mariage, la liberté d’expression, de religion, d’appréciation. Elle interdit également la torture, l’esclavage, la discrimination, la peine de mort. L'avantage de ces dispositions est qu'elles sont d’applicabilité directe, c'est-à-dire que tout français peut s’en prévaloir devant n’importe quel juge national. S’il considère que la règle conventionnelle s’applique, il donnera l’application par priorité au droit Français. Le juge national est le juge de droit commun de la Cour Européenne des Droits de l'Homme .

§1. La composition de la Cour Européenne des Droits de l'Homme.

Elle siège à Strasbourg et les audiences sont publiques. Elle est composée d’autant de juges que d’États signataires de la Convention. Les États sont aussi membres du Conseil de l’Europe : aujourd’hui, ils sont au nombre de 47. Les juges sont élus. Chaque pays propose trois noms. Il appartiendra ensuite à l’Assemblée générale du Conseil de l’Europe de choisir une personne sur les trois. Il faut, pour être élu, remplir certaines conditions :• Jouir de la plus haute considération morale, et détenir des compétences notoires,• Limite d'âge fixe à 70 ans.

Depuis le 1er Juin 2010, date de l'entrée en vigueur du protocole additionnel n°14, les membres sont élus pour 09 ans non renouvelables. Ils bénéficient de tous les privilèges et de toutes les immunités attachées à la qualité des membres du Conseil de l’Europe. La Cour est renouvelée par tiers tous les 03 ans. Il y a un Président et 02 vice-présidents, qui ont un mandat renouvelable de 03 ans. De 2006 au 04 Novembre 2011, le président de la Cour était un juge Français : Monsieur COSTA. Depuis le 04 Novembre 2011, c'est un juge Anglais : Monsieur BRAZZA. Les 47 juges sont répartis en sections. Chaque section est équilibrée du point de vue du sexe et de leur origine géographique. Il y a également un président de section dans chaque section.

§2. Le fonctionnement de la Cour Européenne des Droits de l'Homme.

Les requêtes qui sont soumises à cette cour ne cessent d’augmenter, à tel point qu’une réforme de fonctionnement de la cour a été opérée en 1994. Le

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11 Mai 1994 est nommé le protocole additionnel n°11 qui a réformé la cour afin de la désengorger. Mais cette mesure n’a pas suffit pour la désengorger. Une deuxième réforme a eu lieu par le protocole additionnel n°14, qui date du 12 mai 2004 et qui est entré en vigueur le 1er juin 2010. Depuis juin 2010 la cour est tout de même désengorgée, car le nombre des affaires a juger a atteint le record avec 119 300 requêtes. La cour réfléchit donc actuellement à une troisième réforme.

Qui peut saisir la cour ? Quels sont les différentes procédures applicables devant la cour ? Quels sont leur portée ?

A. La saisine de la Cour.

Elle se fait de deux manières :• Soit par un État signataire : la requête est dirigée nécessairement contre un autre État signataire. C'est une requête inter-étatique. Il n'y a, en l'espèce, aucun filtrage. Ces requêtes sont rares.• Soit par un particulier : toute personne physique et morale qui se prétendrait victime de la violation par un État signataire, peut saisir la Cour Européenne des Droits de l'Homme. On parle de requête individuelle. Il y a 04 conditions pour que la requête individuelle soit recevable :

• Le requérant doit avoir épuisé préalablement l’ensemble des voies de recours internes.

• La requête ne doit pas être manifestement mal fondée, et doit reposer sur des moyens sérieux.

• La requête doit être déposée dans un délai de 06 mois a compter de la décision nationale définitive devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme.

• Depuis le 1er juin 2010, le requérant peut saisir la Cour que s'il a subi un préjudice important. L’importance est appréciée par les juges européens.

B. Les différentes procédures applicables devant la Cour.1. La procédure ordinaire.

Elle est assez complexe, mais on retiendra qu'elle se déroule en trois phases successives. Dans chaque phase interviendra une formation différente de la Cour.• Un seul juge va examiner la requête : il va se prononcer sur la recevabilité des recours et vérifier si toutes les conditions sont réunies. La requête sera déclarée irrecevable si l'une des 04 conditions fait défaut. Le juge unique rend sa décision, mais quand il a un doute, il peut soumettre la question à un comité de 03 juges pour un examen complémentaire.• Quand la requête est filtrée, s’ouvre alors la seconde phase de la procédure ordinaire : la transmission à une chambre de la Cour Européenne des Droits de l'Homme, composée de 07 juges, et qui va statuer au fond. La chambre se prononce une nouvelle fois sur la recevabilité de la requête : elle peut la déclarer irrecevable. Quand elle est recevable, il appartiendra alors à la chambre d’instruire l’affaire. La chambre recherche ensuite un accord amiable entre les particuliers et l’État. Quand l’accord est possible, la chambre va statuer au fond par un arrêt. Par exception, la chambre peut s’abstenir de statuer et renvoyer l’affaire devant la grande chambre de la

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Cour Européenne des Droits de l'Homme .• Enfin, la troisième phase est lorsque la grande chambre intervient, composée de 17 juges : elle peut être saisie de 02 manières différentes :• La grande chambre peut être saisie par la chambre ordinaire quand se pose une question de principe. Ce renvoi suppose l’accord des parties.• Un particulier peut saisir la grande chambre afin qu’elle réexamine l’affaire dans un délai de trois mois pour interjeter appel. Quand il y a appel, avant que l’affaire soit réexaminée, l’affaire sera réexaminée par un collège de 05 juges, qui décidera si oui ou non l’affaire doit être rejugée. Ce collège ne peut accepter le recours que si l’affaire soulève une question grave relative à l’interprétation ou à l’application de la Cour Européenne des Droits de l'Homme. Si tel est le cas, un arrêt définitif sera rendu.

2. Les procédures spéciales.

Il existe deux types de procédures dites « spéciales » :• La procédure spéciale pour les affaires répétitives par le Protocole n°14. Quand l‘affaire se répète souvent, elle sera tranchée par un comité de trois juges qui va rendre un arrêt dans le cadre d’une procédure simplifiée. Un juge unique va estimer si l’affaire est répétitive ou non. Si elle est répétitive, elle sera tranchée par 03 juges. Si non, elle sera tranchée en chambre ordinaire.• L'avis consultatif par le Conseil de l’Europe à la Cour Européenne des Droits de l'Homme. Mais cet avis consultatif ne lie pas le Conseil.

C. La portée des arrêts rendus par cette Cour.

La Cour Européenne des Droits de l'Homme ne peut prononcer que les dommages et intérêts. On parle de satisfaction équitable. La Cour ne peut prononcer aucune mesure coercitive à l’encontre de l’État. Elle ne peut pas annuler une décision de justice nationale, même si elle est contraire aux droits de l’homme. La Cour ne peut pas abroger, compléter ou modifier un règlement, une loi nationale, ou un arrêté. Chaque arrêt est transmis au Conseil de l’Europe, qui a pour mission de surveiller. Le comité peut seulement prendre des recommandations. L’État qui se déborderait a cette recommandation, s’exposerait à une censure nationale.

Section 3. Les juridictions communautaires.

Le traité de Rome, de Maastricht et celui de Lisbonne forment le droit communautaire. Il existe deux juridictions supra-nationales : la Cour de justice de l’Union Européenne et le Tribunal de première instance de l’Union Européenne. Ces deux juridictions siègent à Luxembourg. Mais ce sera tout pour les juridictions communautaires, que l'on n'étudiera pas davantage en détails.

• Partiel : la durée de l'examen est d'une heure. L'examen portera sur tout le programme de l'année, mais il n'y aura que 03 questions, portant chacune

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sur une partie différente du cours.