Institution de la religion chrétienne - Jean Calvin - tome1

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    INSTITUTIONDE LARELIGION CHRESTIENNE.

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    T Y P O G R A P H I E D E C i l . M E Y R U E I S E T C O M P A G N I E ,Rue des f ircs, 11 . 185 9.

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    INSTITUTIOND E LARELIGION CIIRESTIENNE

    K o u r e l l c m c n t m i s e en q u a t re l i v re s : et d i s t i n g u e par c h a p i t r e s , eno r d r e et m t h o d e b i en p ro p re : a u g m e n t e a u s s i de tel a c c r o i s s e m e n tq u ' o n la p eu t p res q u e e s t i m er un l i v re n o u v ea u .

    PxVR

    JEHAN CALVINN o u s a v o n s a u s s i a d jo u s l d e u x i n d i c e s , l 'u n d e s m a t i re s p r i n c i p a l e s ; l ' a u t r e , d e s p a s s a g e s

    d e l 'E s c r i t n r e , e x p o s ez e n ic e l le , r e c u e i l l is p a r A . M a r b r a i .

    TOME PREMIER

    P A R I SLIBRAIRIE DE GH. MEYRUEIS ET COMPAGNIE

    HUE DE I t I V O M , 1 7

    1859

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    C'est avec un sentiment de joie profonde que nous traons cesqu elq ues lignes destines tre places en tte du che f-d' uv re,maintenant rimprim, du grand Rformateur. Lorsque nouscommenmes la rimpression des Commentaires sur le NouveauTestament, nous n'osions gure esprer qu'il nous serait possibled'entreprendre celle de quelque autre des uvres de Calvin. L'accueil fait par le public ce premier travail, en dpassant notreattente, nous permit d'entreprendre celui que nous terminons aujourd'hui. Nous en rendons Dieu, pour la gloire duquel nousnous sommes mis l 'uvre, de sincres actions de grces.

    Ce n'est pas qu'au point de vue financier, la publication desCommentaires et de Y Institution se soit suffi elle-mme, et queles souscriptions ou la vente de ces ouvrages aient subvenu oupuissent subvenir en entier aux frais de leur rimpression. Sansles secours gn reusem ent offerts depu is longtem ps pa r le Comit presbytrien de Publication de Philadelphie, il nous et timpossible d'entreprendre et de mener bonne fin cette uvre,

    i a

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    ij AVIS DE L'DITEUR.Il y a dj plusieurs annes que cette socit avait rsolu de

    consacrer une somme dtermine la rimpression en franais dequelque ouvrage de Calvin. Grce au concours dsintress defeu M. Marc Ducloux, dont la gnrosit tait toujours prte s'associer toute uvre grande et utile, nous pmes, sans puiserle fonds mis no tre d isposition, don ner au public les quatr e fortsvolumes de Calvin sur le Nouveau Testament.

    Ce qui nous restait de ressources et t insuffisant pour mettre au jour, un prix trs modique, l'Institution chrtienne, siMM. Ch. Meyrueis et C ie, entrant leur tour dans la voie suiviepar leur prdcesseur et imitant son dsintressement, n'avaientconsenti des sacrifices rels pour rendre possible la publicationde ce livre.

    Au moment o ces lignes seront devant le public, la rimpression des Commentaires sur les Psaumes sera commence, pour treacheve, s'il plat Dieu, huit mois aprs. Pour peu que les amisqui nous ont aid jusqu'ici, et surtout que le public, au profit dequi nous travaillons, veuillent bien nous continuer leur concours,nous nous efforcerons de poursuivre et d'tendre cette entrepriseen vue d'une rimpression complte des u v re s de Calvin. Un desvux les plus chers de notre vie serait rempli si Dieu nous donnait de raliser cette pense.

    Avant de quitter le lecteur, qu'il nous soit permis de dire unmot des soins qu'a cots cette dition nouvelle de Y Institution. Onn 'a auc une ide de l'incorrection des d itions ancie nnes. Celle quenous avions choisie pour texte, la meilleure, tait cependant crible de fautes ; fautes d'impression, fausses citations, fausses indications de passages, incorrections de tout genre. Pour ne donnerqu'un exemple, sur prs de quatre mille citations des Ecritures

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    AVIS DE L'DITEUR. iijqu'on a vrifies, on en a trouv d'inexactes et rtabli prs demille. L'arrangement des Tables a demand galement un grandtravail, et quoique nous n 'ayons pas l'espoir d'avoir fait une dition irrprochable sous le rapport typographique, nous pouvonsla dire au moins suprieure toutes celles qui nous sont connues.Si nous n'avions jug convenable, ds le dbut, de n'associeraucun nom cette publication, nous aimerions payer un justetribut d'loges tous ceux qui y ont concouru. Ils ne regretterontpas de n'en point recevoir, ni que mme leur nom soit pass soussilence, car pour eux tous comme pour nous, cette uvre est uneuvre d'amour qui porte en elle-mme sa rcompense.

    L'DITEUR.Janvier 1859.

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    TABLE DES MATIRES PRLIMINAIRES.

    Introduction.Jehan Calvin au lecteur.Au Roy de France trs chrestien Franois premier.Les principaux points contenus en ceste Institution chrestienne.Table ou brief sommaire des principales matires contenues en ceste Institutionde la Religion chrestienne, dresse selon l'ordre de l'alphabet.Extrait de la Prface d'Augustin Marlorat aux lecteurs fidles qui aiment le Seigneur Jsus.Indise premier des matires contenues en ce prsent livre.Autre Indice contenant les passages de la Bible, selon l'ordre des livres du Vieilet Nouveau Testament.

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    INTRODUCTIONLes temps de l'Institution. Bibliographie et influence. La dogmatique au seizime

    sicle ; principe de celle de Calvin. Analyse raisonne de l'Institution. Conclusion.

    Le jour d'une tardive rparation a lui en France pour Calvin,Trop longue a t la priode d'oubli, de prjugs, d'injustice, envers sa mmoire dans des Eglises qu i, aprsTheu, lui doivent leurexistence. Il n'est pas ncessaire de partager toutes les vues dogmatiques du grand Rformateur, ni de tout approuver dans sa vie,pour prononcer ce blme. Il ne faut qu'avoir pris la peine de sefamiliariser un peu avec lui, avec sa vivante pit, son incorruptible caractre, ses immenses travaux, ses longues souffrances ; ilne faut que se demander ce que, humainement parlant, serait devenue sans lui la Rforme franaise, qui, en France, s'affaissaitdans un vague et impuissant mysticisme, tandis que, dans la Suisseromande, elle remplaait tumultueusement le papisme par une conception superficielle de l'Evangile. O seraient aujourd'hui nosEglises, si la forte organisation qu'il leur donna, le souffle vivantdont il les anima ne les avaient soutenues pendant les deux siclesd'orages qu'elles ont traverss?Jamais l'Allemagne n'eut dplorer une ingratitude semblable l'gard de Luther, pas mme durant les plus mauvaisjours de son histoire religieuse. Il serait difficile de dire combiende biographies du Doctor Martinus ont popularis ce nom depuis 'le seizime sicle, combien d'ditions compltes ou partielles de sesuvres ont propag sa pense dans la nation, quelle place il occupe dans les annales de son pays, depuis les crits des savantsjusqu' l'cole de village o les enfants rcitent aujourd'hui encore

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    VJ INTRODUCTION.son catchisme. Que dis-je? l'Allemagne nous a devancs dansle soin de faire revivre notre Calvin au sein de la gnration actuelle. Elle a retrac longuement son histoire, tandis que nous ensommes encore, ou peu s'en faut, l'imparfaite esquisse de sonami Thodore de Bze ; elle a rimprim ses crits exgtiques,rpandus par milliers d'exemplaires, et retraduit son Institutionpour la mettre la porte du peuple. Et nous dont il a parl etpresque cr la langue Nous sommes l'uvre , oublions lepass. Dj un savant diteur nous a donn ses Lettres franaises,et nous fait esprer sa Correspondance latine ; ses principaux Commentaires nous ont t rendus, et voici enfin son chef-d'uvre,le travail de toute sa vie, Y Institution. Puisse le Protestantismefranais prouver enfin, par l'usage qu'il fera de ces trsors descience et de pit, qu'il est digne encore de ses glorieuses origines !Remontons d'abord un instant vers ces sources de notre viereligieuse pour esquisser rapidement l'histoire et les caractresdu livre dont nous offrons au public une dition nouvelle.

    I.En 1535, Calvin tait rfugi Ble, la cit des paisibles et savantes tudes, o dj resplendissait la pure lumire de l'Evan

    gile. N en 1509, le futur Rformateur, dont le nom va chappersans qu'il le veuille l'obscurit qu'il recherchait, tait g devingt-six ans. Plus de la moiti de ces annes avait t consacrepar lui acqurir d'abord une solide instruction, puis une scienceprofonde et varie. Il avait tudi le droit sous les docteurs lesplus renomms de l'poque, et depuis quelques annes il se livraittout entier et avec l'ardeur de son caractre l'tude de la thologie. Ce n'est point avant tout en vue d'une profession qu 'il s'adonnait cette science, c'tait par got, ou plutt par le besoinde son me altre de vrit. L'abandon du droit pour la thologieavait concid chez lui avec la premire aurore de la lumire divine, se faisant jour dans son cur. Trs attach au catholicisme,soumis l'autorit d 'une Eglise qu'il vnrait, il ne l'avait quitte

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    INTRODUCTION. V ljpour embrasser l 'Evangile qu'aprs de rudes combats qu'il nous alui-mme dcrits. Deux ans s'taient couls depuis que la vritdivine avait remport dans son cur cette victoire bnie qui dcide de la vie, et que la Bible appelle la conversion.Ds ce moment (1533), il s 'tait joint, Paris, ce petit troupeau de chrtiens perscuts qu'il consolait dans leurs souffrances,et dont il clairait et affermissait la foi. Il ne pouvait le faire qu'aupril de sa vie, et mme le moment ne tarda pas venir o, incapable d'tre utile d'autres, il dut songer suivre plusieurs deses frres sur la terre d'exil. Ces luttes de sa vie ont t retracesa i l leurs1 . Rappelons seulement ici quelques-uns des vnementsqui ont provoqu la publication de l'Institution.Franois 1er, mont sur le trne de Louis XII en 1515, peuavant le temps o la lumire de l'Evangile vint luire sur la Franceet sur l 'Europe, se montra, pendant plus de quinze ans, le prolecteur plutt que l 'adversaire de la Rforme. Soit par haine de cequ'il appelait la moynerie, soit que, fort ignorant lui-mme, ilconfondt assez longtemps le mouvement religieux de l'poque aveccelui des lettres dont il se faisait gloire d'tre le promoteur; soitenfin et surtout qu'il subt volontiers l'influence aime de sa nobleet pieuse su r, M arguerite, duch esse d'Alenon, le jeu ne m onarque s'opposa longtemps et directement aux fureurs perscutricesde la Sorbonne et du p arlem ent. Peut-tre mm e y eut-il un m oment plus srieux dans cette faveur premire de Franois. Marguerite l 'esprait du moins lorsque, aprs la premire perscution,elle parvint rappeler auprs d'elle quelques-uns des exils deMeaux, Michel d'Arande, Roussel, Courault, qui expliquaient lesEcritures dans des runions religieuses ouvertes au Louvre mme,et auxquelles assistait la cour. Si le jugement de la princesse n'estpas prvenu au gr de ses dsirs, le roi et sa mre auraient alorsmanifest la rsolution de favoriser la Rforme. Le roi et Madame ont bien dlibr de donner connatre que la vrit deDieu n'e st po int hrsie, crivait-elle Brionnet, vq ue deM eaux. Plus tard enco re, en 1 5 2 5 , de retou r d e sa captivit

    1 Revue chrtienne, anne 1857.

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    j INTRODUCTION.Madrid, le roi, touch des tendres soins que lui avait prodigus sasur, ne sut mieux lui tmoigner sa reconnaissance qu'en mettantun terme aux supplices et en faisant vider les prisons remplies dechrtiens vangliques, que poursuivaient la Sorbonne et le Parlement pendant l 'absence du roi. Mme en 1533, Marguerite avaitencore la libert d'ouvrir une salle du Louvre aux prdications deRou ssel, qui voyait affluer en foule les aud iteurs avides de la P arole vanglique, et qui dut chercher un local plus vaste.Mais ce furent l les derniers moments de tolrance. Franois Ier tait trop esclave de ses passions, sa cour trop profondment corrompue, pour qu'il ne fint pas par prendre en haine l 'austrit de la doctrine van glique, laquelle les Rforms rend aientun clatant tmoignage par leurs enseignements et par leur vie.Entran d'ailleurs par les conseils d'une politique toute mondaineet pleine de mensonges, il eut, dans l 'automne de l 'anne 1533, Marseille, avec le pape Clment VII une entrevue solennelle, lasuite de laquelle sa conduite envers les Rforms fut totalementchange. Les prisons se rouvrirent, les bchers se dressrent denouveau, et l 'anne suivante, une imprudence due au zle inconsidr de quelques adversaires ardents de la messe attira sur tousles Evangliques la plus horrible des perscutions. Un trait violen t contre l'idoltrie de la, messe fut rp andu profusion,,placard sur les m urs de Paris et jusqu e dans le Louvre. Fr an ois Ier, se croyant personnellement brav, en prouva une si violente colre, qu'il se dtermina, dit Thodore de Bze, de toutexterminer, s'il et t en sa puissance. Il ordonna de saisir indiffremment tous ceux qui taient suspects de luthrerie. Les pri sons furent remplies d'hom me s et de femmes d e tout ge et de toutrang. On mit trois mois prparer la vengeance. Elle fut horrible.A quoi bon dcrire ici la trop fameuse procession expiatoire, qui eutlieu en janvier \ 535 ? Je ne sais si les longues perscutions sousles em pereurs paens offrent rien de si odieux qu e ce spectaclereligieux o le roi, sa cour, les ambassadeurs trangers, le peuple,par ordre de mtiers, tout Paris, conduit par les prtres murmurant leurs offices, vint repatre ses regards du supplice de chrtiens brls vifs, lentement, au moyen d'une machine bascule qui

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    INTRODUCTION. ixles plongeait dans les flammes, les en retirait et les y replongeait,jusqu' ce que la mort vnt terminer leurs tourments. Rien n'galala barbarie de ce fanatisme sanglant, si ce n'est la douceur angli-que, l 'hroque constance des martyrs.Pour mettre le comble l 'odieux de ces actes, les bourreauxs'appliqurent calomnier publiquement les victimes.C'est alorsqu'un cri universel d'indignation et d'horreur retentit en Suisse eten Allemagne, et Franois Ier, le roi-chevalier, en eut honte. Ouplutt sa politique l'obligeait se laver de ce sang aux yeux desprinces allemands qui adhraient la ligue de Smalkade. Il fitdonc dclarer officiellement par ses ambassadeurs qu'il n'avait faitque chtier quelques anabaptistes en rvolte contre son autorit,et des coupables dont les crimes mritaient le dernier supplice !C'en tait trop. Quand des hommes, esclaves de leur consciencejusqu' la mort, donnaient leur vie pour leur Sauveur, et qu'aprscela ils taient officiellement fltris comme des malfaiteurs, il fallait

    qu e la voix de la v rit, de la justic e, de l'hu m an it, se fit en ten dreau monde.Calvin, qui apprit coup sur coup dans sa retraite deBle ces supplices et ces mensonges, saisit la plume. C'est cesvnements que nous devons l'Institution.A l'ge de vingt-six ans, sans autre mission que celle qu'ilsentait en lui-mme, sans autre moyen de succs que l 'autorit deson talent, remarque M. Guizot, Calvin prend la parole au milieudu trouble immense qui, surtout en cette anne 1535, agitait l 'Europe en tire ; cette pa role , il l 'adresse directemen t au roi deFrance ; mais derrire ce monarque dont il avait si peu attendre,il voit des peuples, auprs desquels il ne laissera pas calomniersans dfenseur ses frres qui m eure nt sur les b ch ers. Vingt-sept ans plus tard, en crivant la prface du plus beau de ses ouvrages exgtiques, les Commentaires sur les Psaumes, Calvin nous.apprend en ces mots quels taient ses vues et son but lorsqu'ilpublia l'Institution : Retir en A llemagne, je cherchais dans qu elque coin obscur ce repos qui m'avait t longtemps refus. Maispend ant q ue je vivais inconnu Ble, les hom mes p ieux taient engrand nombre brls en France. Le feu de leurs bchers allumaen Allemagne une haine que l'on chercha teindre en rpan dan t,

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    X INTRODUCTION.par des libelles iniques et mensongers, le bruit que l 'on ne traitaitavec cette cruaut que des anabaptistes, des hommes turbulents,qui , par leurs dlires pervers, renversaient, non-seulement la religion, mais tout l'ordre politique. A la vue de ces artifices de courtisans, au moyen desquels on prtendait, non-seulement ensevelirda ns l'infamie les saints m ar ty rs et l'effusion du sang innocent,mais aussi justifier d'avance tous les carnages qu'on voudrait enfaire sans misricorde, j'estimai que mon silence deviendrait unetrahison , si je ne m'opposais de la manire la plus virile aux m ensonges. Telle fut la cause pour laquelle je publiai l'Institution. Jevoulais d'abord venger mes frres d'un injuste outrage (car leurmort tait prcieuse devant l 'Eternel ); puis, comme les mmes supplices attendaient encore tant de malheureux, je voulaisque les peuples trangers fussent touchs pour eux de quelquedouleur et de quelque sollicitude. Calvin avait donc un do ub le bu t : d 'abord, offrir aux croy antsencore peu clairs et peu affermis de son poque un expos clairet succinct de la doctrine chrtienne, qui en mme temps leurservt d'apologie, de confession de foi en prsence des calomniesde leurs adversaires ; puis, sous la pression douloureuse des vnements, adresser au roi de France cet loquent plaidoyer qui sertde prface son livre. L 'aute ur explique lui-mm e son prem ierdessein ds l'entre de son discours Franois Ier : Aucommence- ment qu e je m 'appliqu ay escrire ce prsent livre, je ne pe n- soye rien moins, Sire, que d'escrire choses qui fussent prsen- tes Vostre Majest. Seulement mon propos estoit d'enseigner quelques rudimens, par lesquels ceux qui seroyent touchez d'au- cune bonne affection de Dieu, fussent instruits la vraye pit. Et principalement je vouloye par ce mien labeu r servir nos Fr an - ois, desquels j 'en voyoye plusieurs avoir faim et soif de Jsus- Christ, et bien peu qui en eussent reu droicte cognoissance.Ce prem ier bu t, nou s le ve rron s bient t, fut atteint au del detoutes les prvisions de l 'auteur lui-mme. Quant au second, quin'allait rien moins qu' convaincre le roi de France par la plusnergique protestation, il servit l 'Europe, o le plaidoyer dujeune thologien eut un immense retentissement; mais, hlas!

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    INTRODUCTION. *jpo ur le prince frivole et corrom pu au que l il tait adres s, c e f u tpeine perdue. Thodore de Bze parat croire que jamais Franois Ier ne daigna en prendre connaissance ! Si ce grand princel'et voulu lire, s 'crie-t-il, l 'Eglise romaine et sans doute reuu ne plaie m ortelle. Ainsi ce temps de la Visitation, oDieu offrait la France et son roi les choses qui appartiennent la paix, passa mconnu ! Ah ! celui qui un jour pleurasur Jrusalem et alors aussi pleur sur la France et sur sonavenir .

    II .Mais une uvre fonde sur l 'ternelle vrit, qui ne se proposepour but que la gloire de Dieu, qui, en outre, runit toutes lesconditions dsirables de talent et d'op po rtunit, ne pouvait pas treperdue pour l'Eglise, comme elle le fut pour le prince sans con

    science qui rgnait sur la France. Quiconque dit vrai, dit plus vraienco re qu 'il ne pen se, a-t-on rem arqu avec raison. Ce qui n' taitd'abord qu'un crit de circonstance, devint, par le travail incessant de l 'aute ur, l 'u vre capitale de sa vie, le livre principal de laRformation, auquel taient rserves des destines qui jamais depuis lors n'ont t gales. Jetons un regard sur cette histoired e Y Institution avant de l'ouvrir p our nous en rendre com pte.La prface franaise adresse Franois I" est date de Ble,1 e r aot 1535. D'un autre ct, la premire impression aujourd'hui"connue de ce livre est en latin et porte le millsime de 1536. Del parmi les savants une question encore dbattue, savoir s'il ajamais exist une dition franaise de 1535, ou si la latine de 1 536est la premire. Ce n'est point ici le lieu d'entrer dans ce dbat.Tenons-nous-en ce qui est connu, savoir l 'dition de 1536, dontque lques exemplaires existent encore. C'tait, nous dit Calvin lui-mme, non pas cet pais et laborieux ouvrage que l 'on am aintenan t, mais seulement un bref man uel d ans lequel fut attestela foi de ceux que je voyais diffamer par d'impies et perfides adula teu rs. Ce bref m an ue l, cette confession de foi ou expos de ladoctrine vanglique, tait un volume de 514 pages petit in-8,

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    *'j INTRODUCTION.renfermant six chapitres dont voici les titres : 1. Del loi, contenantune explication du Dcalogue. 2. De la foi, o se trouve aussil 'exposition du symbo le des ap tres. 3 . De la prire, o estexplique l'oraison dominicale. -4. Dessacremens, t ra itant du b ap tme et de la cne du Seigneur. 5. Des sacremens, o est dmontr qu'il n'y a point cinq autres sacrements vulgairement tenuspour tels jusq u'ici. 6. De la libert chrtienne, du pouvoir ecclsiastique, de l 'administration politique.On le voit, ce trait suivait alors la mthode populaire du catchisme, et pourtant c'tait dj une dogmatique, une expositionsystmatique des doctrines chrtiennes, se distinguant de tout cequi avait paru jusqu'alors, tant par la solidit toute scripturaire dufond, que par l'lgance de la forme. Calvin s'y montre tel qu'ilresta toute sa vie. Ses contemporains dj en ont fait l'observation.Quoique ces six chapitres se soient multiplis, dvelopps, approfondis, enrichis d'dition en dition, jusqu' celle de 1559, diviseen quatre livres et en 80 chapitres, tous les principes fondamentaux de sa foi et de sa thologie sont en germe dans son brefm anuel de 1 53 6. Ce fait, qu e l 'on peu t apprcier des pointsde vue divers ou mme opposs, est trs remarquable en lui-mme,et peut servir expliquer les caractres les plus saillants de celivre, peut-tre mme de l 'uvre entire de Calvin. Esprit positif,grave, pratique, tranger aux besoins de la spculation, trs circonspect, n'mettant sa pense que lorsque sa conviction avaitatteint sa pleine maturit, prenant au srieux le fait d'une rvlation divine, Calvin forma sa foi l'cole des saintes Ecritures quin e va rient jamais, et telle la vrit du salut lui tait app arue auxjours de sa jeunesse, telle il la professa jusque sur son lit de mort.On peut, avec Bossuet, chercher d'autres raisons de cette fermetde principes ; on peut prfrer les nomb reuses variations de Lu ther,le fait que nous constatons n'en est pas moins incontestable et trsimportant .N'est-ce point ce caractre de solidit et de maturit de lapense chrtienne, vident ds l 'origine, que le livre de Calvin dutla confiance universelle avec laquelle il fut reu, et ds lors sonimmense succs? Un tel ouvrage, dans la phase o se trouvait la

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    INTRODUCTION. xiijRforme, rpondait un besoin profondment senti. Les antiquesfondements de la foi avaient t branls avec l'Eglise dominanteet infaillible ; des questions de la plus haute importance flottaientdans le vide et sans rponse ; les esprits srieux se demandaientavec inquitude, au milieu des ides extravagantes qui agitaientl 'Euro pe, o devait s'arrter la ngation et comm encer l 'affirmation ; et tandis que la Rforme saxonne avait depuis cinq ans profess solennellement sa foi positive, tandis que Zurich et Bernesuivaient les enseignements trs clairs de Zwingli, l 'action tumultueuse de Farel dans la Suisse romande, la guerre civile entre lescantons, la perscution en France n'avaient point permis la Rforme de ces contres de se recueillir, d'arriver la conscienced'elle-m m e, et de formuler sa foi nou velle. L'Institution parut ,et dans cette exposition concise, lucide du christianisme apostolique , s'appuyant exclusivement sur l 'Ecriture sainte, traant avecprcision, par cette autorit souveraine, une limite entre les traditions hum aines et les vrits rvles, l'Eglise vang lique sentit qu'elle avait retrouv son fondement divin, l'expression de safoi, son drapeau en prsence du monde, son apologie contre lescalomnies de ses adversaires. Les croyants furent clairs, rassurs , affermis. Ceux qui ne demandaient au grand mouvement dusicle que la rforme de quelques abus, ceux qui n'en attendaientque des ngations, que l 'affranchissement de toute autorit, reculrent effrays la vue d'une doctrine la fois si radicale et sipositive. Dans un sens ou dans un autre, cet ouvrage provoqua ladcision.

    Noblesse oblige. Le livre o Calvin venait de rvler ce talent,cette science, cette fermet de vue, ce livre crit d'un style cic-ronien, il faudra qu'il le reproduise sans cesse. Mais le Rformateur n'est pas homme rimprimer son uvre sans travail nouveau. Pendant vingt-trois ans, de 1536 1559, YInstilulion grandit, d'dition en dition, comme un arb re vigoureux et toujours pluscharg de fruits. Dj la seconde dition la:ine, publie Strasbourg en 1539, comptait dix-sept chapitres au lieu de six, ettrois ans plus tard, une nouvelle rimpression dans la mme villeen renfermait vingt et un. Cette dition de 1543, entirement

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    XIV INTRODUCTION.retravaille, ne suffit que pendant deux ans l 'ardeur qui se manifestait de toutes parts pour l 'tude de la vrit divine. En 1550pa ru t Genve un e au tre dition refaite par l 'aute ur, et en 15 53Robert Estienne tenait honneur d'crire sur le titre d'une ditionnouvelle : Excudebal Roberlus Stephanus in sua officina, 15 53 , ce quin'empcha point un autre libraire de rimprimer le livre l 'annesuivante. Cependant, au milieu de ses rudes labeurs de Genve,Calvin trouva le temp s et les forces de refond re entir em ent sonouvrage, de l 'augmenter encore et de prparer la clbre ditionde 1559, galement imprime par Robert Estienne, et qui est restepour la postrit. Deux impressions qui eurent lieu encore du vivant de Calvin ne sont que des reproductions de celle-l. Depuisla mort de l 'auteur, les ditions ont t si frquentes, que les bibliophiles en discutent le nom bre ju sq u' ce jo ur . Celle de Genve, 1568, in-fol., est enrichie de deux nouveaux index faits parAugustin Marlorat. Celles de 1S90 et 1607, in-fol., sont augmentes d 'argu m ents et de notes. La belle rimp ression EIzvier, Leyde ,1654 , est une des plus correctes, et peu galent pour la beautdu type celle qui fait partie des Opra de l 'auteur, Amsterdam,1667 . Enfin le docteur Tholuck a de nouveau publi Y Institution Berlin, en 1834, ainsi que les principaux ouvrages exgtiques deCalvin.

    Nous n'avons parl jusqu'ici que de l 'ouvrage latin, objet de laprdilection particulire de Calvin, qui savait qu'en cette langue,dont il possdait tous les secrets, il parlait l'Europe entire. Quant aux ditions franaises, on ne peut en dterminer exactement le nombre et les dates de 1540 1559. Mais dans cette dernire anne Y Institution parut en franais, ainsi qu'en latin, soussa forme dfinitive, telle qu'elle existe aujourd'hui, et que la prsente dition la repro du it. De 155 9 1 56 6, l 'ouvrag e fut rimprim chaque anne, souvent en plusie urs lieux la fois, et frquem men t depuis lor s. En 16 96 , Charles Icard, pasteur Brme,fit paratre les deux premiers livres qu'il complta en 1713, enddiant l 'ouvrage au roi de Prusse. Icard eut l ' ide malheureusede vouloir rajeunir le style de Calvin, et c'est pourtant son ditionqui fut rimprime Genve en 1818, 3 vol. in-8.

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    INTRODUCTION. X VLes trangers n'ont pas laiss la France seule l privilge de celivre. Bien que les ditions latines fussent rpandues partout pourles lettrs, il fut traduit, encore du vivant de l 'auteur, en italien,en espagnol, en anglais, et bientt aprs en hollandais et en allemand. Le pasteur F.-A. Krummacher le traduisit de nouveau encette dernire langue, et le publia Elberfeld en 1833 et 1834. De plus, d' innombrables extraits de Y Institution ont paru -endivers temps, les diteurs tant convaincus qu'un chapitre de cetouvrag e tait le m eilleur trait qu 'on pt offrir au public sur un

    point quelconque de la dogm atique chrtienne.Nous venons d'esquisser rapidement l 'histoire extrieure, matrielle, bibliographique en un mot, du livre. Mais qui pourraiten crire l'histoire intrieure et spirituelle ? qui en retracer toutel'influence ? Pendant prs d'un sicle et demi l'Institution fut danstoutes les Eglises rformes la dogm atique d es savants, la croy ancedes simples, la base des confessions ecclsiastiques, parce qu'on yvoyait l'exposition la plus fidle du christianisme, l'expressioncomplte de ce qu 'avait voulu la Rforme. D es phases ultrie ure sdans le protestantisme, et qui ne furent pas toutes des pro gr s, ontpu faire re ntr er dan s l 'ombre le livre de Y Institution ; mais au fondson empreinte est reste ineffaable, et depuis un demi-siclecette empreinte reparat vidente, quoique diversement modifie.Les besoins du dix-neuvime sicle peuvent, bien des gards,n'tre plus ceux du seizime ; mais de fait, dans ses traits fondamentaux, la conception du christianisme la plus vivante et la plusrpa nd ue dans les Eglises de Suisse, de Fran ce, de Belgiqu e, d'Angleterre, d'Ecosse, de Hollande, de Hongrie, d'Amrique et descontres les plus lointaines o l 'Evangile se rpand de nos jours,ne saurait renier sa filiation directe du livre de Y Institution. Toutehistoire des d ogm es du protestantisme qui ne pre nd rait pas ce livrepour point de dpart, n'aurait jamais l ' intelligence des trois derniers sicles. L'Allemagne elle-mme, avec des origines rformatrices diffrentes, avec son profond besoin de spculation auquelCalvin n'aurait pas suffi, avec ce sentiment intime de mysticisme,d'enthousiasme, de religieuse posie dont la Rforme franaise at moins pntre, l'Allemagne a subi profondment son influence.

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    xvj INTRODUCTION.Cette influence est entre pour sa part dans tous les dveloppements de la thologie et de la vie religieuse ; elle se fait sentir dansde nombreuses et florissantes Eglises presbytriennes (dans lesprovinces du Rhin, de Westphalie, par exemple, et dans quelquespa rties du H anovre) ; elle a inspir l'ide si vra ie et si belle en e lle-mme de l 'Union, et l 'on peut dire qu'elle est indispensable commelment de vrit dans l 'uvre si profonde et si complexe de laRformation. Ce qui le prouve tristement de nos jours, c'est quepartout o le protestantisme a rpudi les doctrines et l 'esprit del'Eglise rforme, il a misrablement rtrograd vers Rome. Lepuseysme anglais ou allemand est l comme un avertissement svre que les deux familles de la Rformation sont ncessaires l'une l 'autre .

    III.Aussi est-il gn ralem ent recon nu, m me en Allemag ne, par tousles hommes comptents, que Y Institution assigne Calvin la premire place dans l 'uvre thologique du seizime sicle. Eminentcomme exgte, il fut le crateur de la thologie systmatique.Ceci nous paratra plus remarquable encore si nous nous arrtonsun moment cette question : Quelles ressources scientifiques Calvin avait-il devant lui pour composer son ouvrage? En d'autrestermes, o en tait la dogmatique avant VInstitution? Cette question nous conduira signaler le principe fondamental de ce livre.Quelque dfinition que l 'on donne de la dogmatique, il faudratoujours la considrer comme l'exposition systmatique du grandfait du salut. Cette exposition repose sur le double principe objectifet subjectif du protestantisme ; car, d'une part, un fait ne s'inventepas par la spculation, il est historiquement donn, on en examineles preu ves, on le constate av ant mm e de cherch er l 'exp liquer.

    Dans ce sens, le fait de la rdemption est tout objectif et tout divin. Mais d'autre part, ce fait n'a de valeur et de ralit pourl'homme individuel, que s'il se lgitime lui, d'abord par sa ncessit, fonde sur notre nature morale, puis par son efficacit. End'autres termes, comme ce fait suppose le pch, il doit tre d'

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    INTRODUCTION. xvijmontr aussi qu'il rpond aux besoins de l 'homme dchu, qu'il lerelve, le rend sa destination. Dans ce sens, le fait de la rdem ption est subjectif et hu m ain. Il rsulte de l, d'u ne pa rt,qu ?aucune exposition du salut, aucune dogmatique ne sera dans levrai, dans la vie, moins de partir de l 'homme pour aboutir l 'homme, c 'est--dire de suivre une mthode anthropologique;mais d'un autre ct, puisque le fait du salut est un fait et qu'ila ses documents authentiques, les saintes Ecritures, l 'tude de cesEcritures, faite la lumire de l 'Esprit de Dieu se rendant tmoign ag e dans la foi indiv iduelle et dan s la foi de l'Eglise, fourniraseule la matire de la dogmatique. Tel est son double principe divin et humain, dont elle s'efforcera de trouver la synthse vivante.Or avan t la Rformation, cette ide de la dogm atique n'ta it pasmme souponne; elle tait impossible. D'une part, l 'autorit del'Eglise, prohibant la formation de la conviction individuelle, sesubstituant elle-mme au fait du salut comme objet de la foi, contestant l 'autorit unique des Ecritures et interdisant toute libreexgse, fermait d'un seul coup toutes les sources de la dogmatique comme science. D'un autre ct, la scolastique applique lathologie, tout occupe d'abstractions trangres la vie, n'abordant dans ses sentenliis que les principes religieux souvent les moinsessentiels au salut, jetait ces sujets (loci) en certaines rubriquessans lien entre eux et sans aucun rapport avec un principe fondam ental. On ne peu t pas mme dire qu e la Rforme, en cond amna nt pa r la voix de Luther la scolastique comme systme, ait rompuds l 'abord avec elle dans l 'exposition de la doctrine. Sans doute,elle tait revenue aux sources fcondes de l'Evangile, la Parolede vie, mais ses premiers essais de dogmatique, en particulier lesclbres Loci communes, sivehypolyposes de l'excellent Mlanchthon,publis d'abord en 1521, et traduits plus tard en franais par Calvin, ne se ressentent que trop encore de la manire traditionnelle.Lui-mme s'excuse d'avoir suivi la voie des loci aligns la suiteles uns des au tres, et il m ontre ds l 'abord le faible de la m tho de,en commenant par l 'article de Deo, sans aucun lien anthropologique avec cet Au teur de toutes choses. La vraie excuse deMlanchthon tait dans le but tout pratique de son petit livre, par

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    I V H j INTRODUCTION.lequel il voulait rend re accessible l 'esprit des jeu ne s gens de sonuniversit les principales vrits de la foi. C'est ce qui explique,non moins qu e le talent et le suave esprit de l 'au teu r, le grandsuccs de son ouvrage.De Mlanchthon Zwingli, il y a dj progrs notable, sous lerapport de la mthode. Le dernier, dans son livre intitul : Com-mentarius de vera et falsa Religione, qui parut en 1 525 , abandonnetout fait la mthode scolastique des loci, construit un systmereligieux qu i touch e la vie par tous les points, qu i em brasse laconnaissance de Dieu, de l 'homme, de la rdemption, de la sanctification, de l 'Eglise (ch. I-XVIII), et qui traite, dans les dernierschapitres, les questions controverses. Toutefois, l 'ouvrage deZw ingli ne peu t point encore tre considr comme un e d ogm atiquescientifique. La conception en est gra nd e, rem arq ue le doc teurEbrard dans sa Dogmatique chrtienne (t. I, p. 61), mais nulle partne se trouve un ensemble d'ides prcises et bien dfinies -, tout semeut dans un courant incessant. Il y a l un trsor de pensesvraiment spculatives, mais pas un seul dogme compltementformul. Cet crit est plu s prop re exciter l ' intrt qu ' instruire . Voil o en tait la dogmatique rforme quand Calvin crivitla sienne, qui dj avait subi ses principales transformations lorsque parut, en 1556, l 'excellent Com pendium religionis christian,de Bullinger, en sorte que le savant pasteur de Zurich dut profiterde Y Institution, et non l ' inverse. Afin qu'on n e nous souponnepoint de surfaire les m rites de cet ouvra ge, nous avons cit le ju gement d'un savant tranger sur la valeur du livre de Zwingli.Par la mme raison, nous laisserons un autre thologien allemand,le docteur Schenkel (Dogm . chrt., t . I , p. 65, 66), nous dire sapense sur le principe anthropologique de Y Institution. Cela nousparat d'autant plus important que ce principe tait alors nouveau,et que ce caractre du livre de Calvin est loin d'tre encore gnralement reco nnu . C alv in, dans son Institution, ce chef-d' uv re de la dog m atique rforme, a po ur la prem ire fois faitl 'essai d'un dveloppem ent complet de la vrit du salut au p ointde vue de la conscience humaine, et cela d'aprs les quatre mani-

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    INTRODUCTION. x i xfestations qui doivent la dterm iner : la rvlation dan s le P re,dans le Fils, dans le Saint-Esprit et dans la com munion d e l 'Eglise.Il prend son point de dpart dans le sentiment inn de Dieu enl'homme, et il dclare inadmissible la recherche de ce que Dieuest en soi (quid sit) ; dans son systme, la question de savoir ceque Dieu est pour l 'homme (qualis sit) a seule de l 'importance. Etdans son tude de ce sujet il est conduit par ce principe anthropologique : Insculptum meniibus humants esse divinilatis sensum , quideleri nunquam potest ; ind itum esse divinilus religionis sensum. Calvin ne procde donc p as , comme on l 'admet gnralemen t,de l'absolu ce qui est cr, mais de la conscience inne de Dieu la science du salut, et la consolation du salut... Ce livredclare ouvertement la gu erre au dogm atisme scolastique traditionnel, et le seul reproc he qu e nous lui ferions cet g ard , c'estque , dans l 'excution, l 'auteur ne fait point assez droit sonprincipe anthropologique et subjectif, mais se laisse encore imposer par le vieux systme mtaphysique, ne le soumet pas unecritique assez absolue, et ainsi, par gard pour les faibles, jetteun p ont au moyen du qu el ses succe sseurs reviend ront l 'ancientraditionalisme... Mais qua nd le catchisme de Heidelberg vint,avec une entire dcision, mettre dans tout son jour la mthodeanthrop ologiqu e subjective, ce n e fut point l, comm e on l'acru, une anomalie, mais au contraire la pleine consquence dusystme rform ... Mme la do ctrine de l 'lection, pu rem entthologique en app arence, et qu i a pu ici et l, envelopper ladogmatique dans d' insondables problmes mtaphysiques, ne doitpas nous rendre douteux le fait que le systme dogmatique reposesur un fondement anthropologique. Prcisment par celte doctrinele sentiment inn de Dieu nous apparat comme d'autant plus assu r dan s les profon deurs intimes de la conscience indiv idue lle.Ce qui fait l'essence pratique de la doctrine si souvent mcom-prise de l 'lection, ce n'est pas que Dieu veut de toute ternitle salut du croyant, mais que le croyant s'assure par la foi lapossession personnelle et consciente d'u n salut tern el. Ledo cteur Ebr ard fait aussi dan s sa Dogmatique cette remarque : La prdestination n'ap para t pas comme decretum Dei (dans la

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    X X INTRODUCTION.partie de Y Institution qui traite de Dieu), mais comme electio Deiydans celle qui s'occupe de l 'appropriation du salut; ainsi toujoursselon le principe anthropologique.

    IV.La doctrine de la justification par la foi seule devait ncessairem ent amen er la dogm atique se fonder su r le principe q ue nou svenons de reconnatre. Mais une vrit religieuse ne renverse pas

    en un jou r d e vieilles mtho des pou r s'y sub stituer dans la science.Faire ce pas, fut un des principaux mrites de Yinslilulion. Voyonsmaintenant comment l 'auteur, par plus de vingt ans de travail, alev sur cette base le majestueux difice qu'il nous a laisse.Nous l'avons dj indiqu dans la citation qui prcde : la connaissance de Dieu et de son uvre cratrice, de Jsus-Christ et deson uvre rdemptrice, du Saint-Esprit et de son uvre de sanctification, de l 'Eglise, envisage comme dpositaire des moyens degrce et de salut, telles sont les quatre grandes parties qui divisentl 'ouvrage en autant de livres. La matire de chaque livre se partage en chapitres nombreux embrassant chacun un sujet clairement dtermin, et se subdivisant en autant de sections qu'il y ad'ides dvelopper. L'auteur commence d'ordinaire par l 'exposition du sujet d'aprs l'Ecriture et l'analogie de la foi ; puis il discute les preuves et les objections dans les questions dbattues; ilmontre ensuite le ct pratique de la doctrine dont il s'agit, sonapplication la vie; enfin, il se livre aune polmique tendue, etdont on regrette souvent le ton, contre les erreurs opposes. Telleest l'arch itectu re de l'difice. Mais il faut y e ntr er pour se pn trer des richesses que l 'auteur y a dposes. Une rapide analysed'un si immense ouvrage ne saurait en donner l 'ide; aussi bien,le livre mm e est dan s la m ain du lecteu r, nous nous gardero ns dele retenir trop longtemps sur le seuil. Tout ce que nous dsirons,c'est de lui m ontrer comm ent Calvin dans l 'excution, ramn e tou tau principe anthropologique, moral, pratique, que nous avons djsignal.Le premier livre est consacr la connaissance de Dieu en litre et

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    INTRODUCTION. xxjqualit de Crateur et souverain Gouverneur du monde Mais ds l ' abo rd ,point d'abstraction, car le premier chapitre ne traite gure quede la connaissance de nous-mmes, ces deux connaissances tant choses conjointes. La somme de la vraie sagesse, c'est qu'en cognoissant Dieu, chacun de nous se cognoisse. Et voici le liende ces deux ides : Nul ne peu t po rter sa pense sur lui-mme sansl'lev er Dieu , en qui nou s avons la v ie ; pa r ses bienfaits qu i distillent du ciel goutte g outte, nous sommes con duits comme p ar petis ruisseaux la fontaine. Notre misre et no tre ruin e, n otreignorance et nos douleurs, tout nous presse de rechercher Dieu,tout nous mne comme par la main pour le trouv er. Ceci n'est-ilpas du Pascal anticip ? Mais d'un autre ct, nul ne se connatrasoi-mme jusqu' ce qu'il ait contempl la face de Dieu, et que du rega rd d'icelleil descende reg ard er soi. La perfection deDieu nous dit par un contraste criant, ce que nous sommes, et del l'tonnement et l'humiliation de tous les hommes de Dieu cettedcouverte .Mais qu'est-ce que connatre Dieu? Cette grave question est lelitre du second chapitre. Et la rponse revient nous rappeler queconnatre Dieu, ce n'es t point spculer su r sa na tur e insond able,mais l'adorer, le craindre, se confier en lui avec une vraie pit,chercher en lui toute sa flicit. Tout le reste sert peu de chose. Mais cette connaissance de Dieu est tellement ncessaire aucur humain, qu'elle se trouve naturellement enracine en l 'es- prit des hommes. C'est l la pense du troisime chapitre, pense qu e l 'aute ur exprime dans les termes mm es de Cicron homme payen , pour la tourner aussitt contre ceux qui prtendent que la religion a t controuve par l'astuce et finesse de quelques gen s, afin q u'ils missent qu elqu e brid e sur le simple po pulaire. La voix de la conscience, bou rre lan t les m alfaiteurs les plus puissantsqui n'avaient rien craindre des ho mm es, ne rpond-elle pas suffisamment ce men songe? Toutefois, un e longue et triste exprience ne p rouv e que trop que cette connaissance natu relle de Dieuest touffe, soit par la folie, soit par la malice des hommes. IIfaut donc qu'ils y soient ramens par d'autres moyens. Voici bien,sans do ute , le spectacle magnifique de la na ture qui raconte la gloire

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    xxij INTRODUCTION.de Dieu, voici l'adm irable organisation de l'homme, ses nobles facults, le gouvernement des nations par un Dieu puissant, sage -et jus te(et ici Calvin fait parler tour tour l'Ecriture, les Pres, les historiens, les savants, les potes de l'antiquit); mais tous ces moyensn'ont jamais suffi ; tant et de si belles lampes allumes au basti- ment du monde nous clairent en vain. Si donc l'homme doitarriver la connaissance de Dieu (les philosophes paens l'ont eux-mmes reconnu), il faut que Dieu se rvle lui. Or, Dieu s'estrvl, et il a voulu que ses rvlations fussent enregistres; car si l'on considre combien l'esprit humain est enclin et fragile pour tomber en oubliance de Dieu, combien aussi il est facile dcliner en toute espce d'erreurs, on pourra veoir combien il a est n- cessaire que Dieu eust ses registres authentiques pour y coucher sa vrit, afin qu'elle ne prist po int... Mais ces registres ,quel tmoignage auront-ils de leur autorit divine et mme de leurauthenticit? L'Eglise? On l'a prtendu depuis Augustin (dont l'auteur commente ici le fameux passage sur ce sujet) ; mais puisquel'Eglise elle-mme est fonde sur la parole des aptres et prophtes, comment serait-elle le fondement de cette parole? Non, iln'y a, pour les savants comme pour les simples, qu 'un tmoignageinfaillible de la vrit divine des Ecritures, c'est le Saint-Esprit ennous. En d'autres termes, Calvin en appelle l'exprience ducroyant, une telle persuasion laquelle ne requiert point de rai- sons. Il n'y a de vraye foi que celle que le Saint-Esprit seelle en nos curs. (I, 8, 5). Cette vrit, fconde en consquences, peut tre envisage comme le principe fondamental de ladogmatique de Calvin, comme la base de toute sa thologie. Cequi ne l'empche pas de consacrer un long chapitre exposer lespreuves apologtiques de la vrit de la Bible, ni de rfuter rudement les esprits escervelez qui, sous prtexte des lumires duSaint-Esprit, mprisent la lettre de l'Ecriture. Aprs cette digression sur l'Ecriture, Calvin revient son sujet, la connaissancede Dieu, qu'il oppose l'usage idoltre de se faire des images dela Divinit. Il arrive ainsi au clbre ch. 13, o, en 29 sections,il traite de la Trinit, il s'explique d'abord longuement et clairement sur la valeur des termes thologiques, de Trinit et de per-

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    INTRODUCTION. XX11Jsonnes, admis dans l'Eglise pour exprimer l'Essence divine (on saitque Calvin et Farel provoqus par Caroli, refusrent pendant untemps d'employer ces term es); il tablit ensuite, avec une adm irable connaissance des Ecritures, la preuve scripturaire de la divinitde Jsus-Christ et du Saint-Esprit ; puis, aprs une sobre spculation sur le rapport des trois personnes, il se livre une longue etviolente polmique contre les adversaires de cette doctrine. L'auteur passe ensuite la cration. Le chapitre le plus remarquable en ce sujet est celui qu'il consacre la cration de l'homme, ses facults et son tat primitif. Enfin, ce livre Ier se terminepar trois chapitres sur la Providence et le gouvernement du monde.Les adversaires de Calvin n'ont pas attendu sa doctrine de l'lection pour l'accuser de fatalisme, ils ont cru reconnatre cette erreur stocienne dans le sujet mme de la Providence. Il est certainqu'il y a pleine harmonie dans le systme de l'auteur ; ses vues surle gouvernement de Dieu prparent ses vues sur l'lection; il estcertain aussi que, la logique aidant, il serait possible de tirer del'une et de l'autre doctrine des consquences terriblement menaantes pour la libert. Ceux qui veulent rendre ceste doctrine odieuse, calomnient que c'est la fantasie des stoques, que toutes choses advienent par ncessit. Ceste opinion, c'est faussement et malicieusement qu'on nous la met sus. (1,16, 8.) Ainsi rpondCalvin, et il rfute longuement l'inculpation de fatalisme. Quiconque lit ses crits, plus la lumire de l'exprience chrtiennequ' celle de la logique, restera parfaitement convaincu que ni sadoctrine de la Providence, ni celle de l'lection ne renferme enpratique la ngation de la libert morale, bien moins encore de laresponsabilit. Quel crivain trouva jamais des raisons plus nergiques pour porter l'homme l'action, l'obissance, la sanctification? Dans le sens de Calvin, la foi en la Providence et en l'lection de grce est pour le croyant une force, non un oreiller ; celtefoi ne lui met point des entraves, mais lui donne des ailes.Le livre IIe va nous fournir des preuves nouvelles que Calvin,tout en exposant dans leur plnitude objective les doctrines dis-tinctives du christianisme, n'abandonne jamais son terrain anthropologique.

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    XXIV INTRODUCTION.Ce livre porte pour titre : De la cognoissance de Dieu, entant qu'ils'est monstre Rdempteur en Jsus-Christ, etc. Mais avant la rdemption, la chute, le pch. L'auteur ne consacre pas moins decinq longs chapitres ce sujet, trait sous toutes ses faces, souven t avec profon deur, toujours av ec un grand srieux. De la qu estion du pch, de la manire dont on l 'envisage dpend toute lathologie. Ici encore, tout en s'levant jusqu'aux problmes lesplus redoutables que se soit poss l 'esprit humain, tout en donna nt des solutions parfois fort hard ies, Calvin ne pe rd jam ais d e

    vue l 'homme, la vie pratique. Ce n'est pas sans cause que par le proverbe ancien a tousjours est tant recommande l 'hommela cognoissance de so y-m esme . Voil son prem ier m ot. Et s'ilpou ssejusqu' ses dernires consquences le triste fait de la chute et dupch, son but pratique est trs clair devant ses yeux : D'une part ,nous porter bnir Dieu qui continue pourtant nous tmoignersa bont, et nous rendre dpendants de la grce qu'il nous offre;d'a ut re pa rt, q ue n ostre misrable condition et le sentiment d 'icelle ab ate en nous toute gloire et prsom ption, et, en nous accablant de honte, nous hum ilie. (1 1,1 ,1.) To utefo is, il n'a pas ignorle danger qu'il y aurait accabler l 'homme de son impuissanceju sq u' lui $t er le sentimen t de sa responsabilit, lui qu i, d s lesprem iers m ots de son chapitre sur le franc arb itre , tablit sibien cet quilibre psycho logique : Or, voici le mo yen qui no us gardera d'errer, c 'est de considrer les dangers qui sont d'une part et d 'autre . Car quan d l 'homm e est desnu de tout bien, de cela il prend soudaine occasion de nonchalance. Et pource qu'on lui dit qu e d e soy-mesme il n'a n ulle v ertu bien faire, il ne se soucie de s'y app lique r, comme si cela ne lui appa rtenoit de rien . D'autre part, on ne lui p eut don ner le moins du m ond e, qu'il n e s'eslve en vaine confiance et tm rit , et aussi qu 'on ne de srob e autan t Dieu et son ho nne ur. Ces derniers termes renferment le vrai secret de la thologie de Calvin sur les points qui nousoccupent, et j 'ajoute le secret de to ute sa vie : l'honneur de Dieu.Aussi, est-ce ce principe suprme qui, dans la pratique, a toujourssauv le systme du Rformateur des consquences dsastreusesque la logique pourrait en dduire.

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    INTRODUCTION. XX VIncapable de se relever lui-mme de sa profonde dchance,l 'homme n'est pourtant pas abandonn de Dieu, qui lui offre unmoyen admirable de salut eu Jsus-Christ (ch. 6). Pour l 'y prparer et l 'y disposer, Dieu lui donne une loi morale qu'il ne pourrapas observer. Le but de cette loi, l 'exposition complte des commandements qu'elle renferme, la similarit et les diffrences desdeux Alliances occupent ici no tre au teur dans ses chapitres 7 - H .On a souvent reproch aux Rformateurs d'avoir confondu l'esprit de l 'Ancien Testament et celui du Nouveau. Nul, aprs avoir

    lu ces deux derniers chapitres, ne fera avec justice ce reproche Calvin ; au contraire, nous pensons que mme la thologie moderne peut y puiser, sur l 'harmonie du plan de Dieu, de profondesvrits, auxquelles elle fera bien de sacrifier plus d'une funesteerreur .Parvenu ce point de sa course, dj bien longue, Calvin peutenfin lever sa pense de l'homme dchu vers Celui qui est venu lesauver. Il traite donc ici du Rdempteur et de la rdemption. Or il estoit tant et plus requis que cestuy qui devoit estre nostre M diateur fust vray Dieu et ho m m e. Tels sont les premiers motsde cette partie fort remarquable de Y Institution, o l 'auteur tablit abondamment par les Ecritures, et dfend contre toutes lesobjections des incrdules la ncessit de l'incarnation du Fils deDieu, la ralit de son humanit, l 'union en lui des deux natures,son triple office de Prophte, de Sacrificateur et de Roi, son uvre rdemptrice accomplie par sa mort expiatoire, sa rsurrectionet son retour dans la gloire (ch. 12-16). Un dernier chapitre cltdignement ce livre en montrant que l 'uvre de Jsus-Christ arellement mrit l 'homme pcheur la grce de Dieu et le salutternel. C'est ici que, pour la troisime fois, mais tout fait exprofesso, Calvin dmontre, en puisant les dclarations de l 'Ecrit u r e , l'expiation du pch par le sang de la croix. Est-ce pour celaqu 'on a affirm d e nos jou rs qu 'il n'a point enseign celte do ctrine? Pourquoi p as? Les mmes homm es qui ne savent ou ne veulent pas la voir dans le Nouveau Testament ne peuvent-ils pas,avec autant de raison, la dnier l'Institution ?Le grand salut est objectivement accompli. Mais comment

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    XXVJ INTRODUCTION.l 'homme pcheur, encore irrgnr, pourra-t-il se l 'approprier?C'est cette question si imp ortante qu e va rpo nd re le troisimelivre, intitul : De ta manire de participer la grce de Jsus-Christ, des fruits qui nous en revienent, et des effecls qui s'en en-suyvent. Trouver un rapport assez intime et vivant pour que l 'uvre rdemptrice de Jsus-Christ accomplie hors de nous se raliseen nous, tel est, aujourd'hui encore, un des problmes les plusdifficiles de la dogmatique, une des questions les plus perplexes del'exprience chrtienne. D'ordinaire, on recourt immdiatement la foi, et Calvin n'y manquera pas. Mais, avec ce tact exquis quel'on pourrait appeler en lui un bon sens religieux, il a sentique ce lien entre les deux termes dont il s'agit n'est point nouencore, et qu'il doit l 'tre par une force plus grande et plus pntrante que tout ce qui est de l 'homme. Et cette force est ses yeux l'opration secrte du sainct Esprit. Aussi longtemps que noussommes hors de Christ et spars de lui, tout ce qu'il a fait ou souffert pour le salut du gen re hum ain nous est mu tile et de nu lle impo rtance. Il fautqu e nous soyons faits una ve c lui. Voil unegrave application du principe anthropologique que nous retrouvons parto ut dans ce livre. Or, combien qu e nous obtenions cela p ar foy, nantmo ins puisqu e no us voyons que tous indiffremment n'em bras sen t pas cette comm unication de Jsus-Christ, laquelle est offerte par l'Eva ng ile, la raison nous indu it m on ter plus hau t, pou r nou s en qu rir de la vertu et opration secrte du sainct Es- prit, laquelle est cause qu e nou s jouissons de tous ses biens (III, 2, 1). Et l 'auteur consacre cette pense si profondmentvraie son premier chap itre.Maintenant il peut sans lacune passer au ct subjectif du rapport cherch, je veux dire la foi. Mais pource que la foy est son principal chef-d'uvre (du Saint-Esprit) , lap lup artd e ce que nous lisons en l 'Escriture toucha nt sa v ertu et op ration, se rapp orte icelle foy... L'auteur traite ici ce grand sujet de la manire laplus complte ; il l'envisage sous toutes ses faces selon les Ecrit u r e s , interprtes la lumire de l 'exprience; il redresse leserreurs du catholicisme et rfute les objections de l'incrdulit. Cechapitre 2 n'a pas moins de 43 sections ; c'est tout un trait surla matire.

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    INTRODUCTION. XXV1JL'uvre intrieure commence par le Saint-Esprit produisant la

    foi, se poursuit et devient repentance, rgnration du cur et dela vie. C'est l le sujet du chapitre 3 : Combien que j'ay desj enseign en partie comment la foy possde Christ, et comment par icelle nous jouissons de ses biens, toutesfois cela seroit ente cores obscur, si nous n'adjoustions l'explication des fruits et ef- fets q ue les fidles en senten t en eu x. Ce n'es t pas sans cause qu e la somm e de l 'Evangile est rdu ite en pnitence et rm ission des pch s. Parq uoy e n laissant ces deu x articles, tout ce qu'on pourra prescher ou disputer de la foy, sera bien maigre et desbif (dit. lat. jejuna et mutila), voire du tout inutile (III, 3, 1). Ici Calvininsiste sur cette ide trs digne de remarque que la foi prcde larepen tance et la pro du it. Il consacre ensuite deux "chapitres p olmiques (4 et o) la confession, aux satisfactions humaines, aux indulgences, au purgatoire. Quant la confession, il rejette les dangereuses erreurs du catholicisme; mais il conserve la confessionscripturaire, libre l 'gard des personnes, pleine de confiance, ettrs propre rendre la paix telle conscience travaille et charge . Inutile, du reste, d'ajouter que selon le Rformateur, la vraieconfession se fait par le chrtien aux pieds de son Dieu-Sauveur.L'autre n'est qu'un moyen de rendre celle-ci plus complte, plussincre.La vie chrtienne est forme : comment se dveloppe-t-elle ? quels signes reconnatre ses progrs ? Ces questions se sont pr-( sentes Calvin et il y rpond ici dan s u ne suite de ch apitres (6-10 )que ne liront pas sans tonnement ceux qui ne voient en lui qu'untholog ien froid et sec. N 'tait le sty le, toujours recon naissab le son nergie, on serait tent d'attribuer saint Bernard, Kempisou quelqu e au tre my stique d u m oyen ge telle de ces pages sur lavie de l'homm e chrtien. Faire consister cette vie de l 'homme chrtien dans le renoncement nous-mmes, se manifestant par l 'obissance, par la charit envers tous les hommes, par l 'amour pourDieu, par la patience souffrir la croix ; inspirer au croyant cerenoncement par les plus puissants motifs ; lui montrer sa consolation suprm e dan s la mditation de la vie ve nir , sans luipermettre ni dcouragement, ni dgot de la vie prsente; lui

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    IXV11J INTRODUCTION.donner des directions pleines de sagesse sur l'apprciation et l'usage des biens de la terre et de la pauvret, voil ce qui dnotedans le Rformateur une notion trop profonde de la vie intrieure,po ur q u'elle soit en lui au tre chose qu e le fruit de l 'exprience.L'auteur n'a point encore abord de front la doctrine capitale dela Rforme, le point central de la dogmatique au seizime sicle,la justification par la foi, dans son rapport avec les uvres. C'estici seulement que Calvin traite cette grande vrit, et l 'on ne conoit gure la raison de la place qu'il lui assigne. Pourquoi pas immdiatement aprs le riche chapitre sur la foi, dont la justificationest le premier fruit? Quoi qu'il en soit, ce n'est pas faute d'enavoir reconnu l'importance, car ce sujet n'occupe pas moins dehuit longs chapitres (H-18) tant il y avait enseigner, discuter, rfuter sur cette d octrin e. Aprs avoir puis po ur la prou vertoutes les dclarations de l 'Ecriture, lucides par une lumineuseexgse, l 'auteur cite l 'homme au tribunal de Dieu et le convaincsans rplique qu'il ne saurait y subsister autrem ent que par la ju stice dont le couvre son Sauveur. Il y a dans cette redoutable dmonstration une force qui s'lve souvent jusqu' l 'loquence.Quant aux objections que Calvin rfute si victorieusement, ce sontles mmes, ou peu prs, qu'on oppose aujourd'hui encore laglorieuse doctrine apostolique. Nul ne lira ce trait sans un vifintrt, ni sans en retirer une solide instruction, alors mme qu'iln'ad m ettrait pas telle vue ou tel argum ent de l 'auteur.

    La justification par la foi seule est la source de la libert chr- %tienne, envisage dans ses rapports avec la socit humaine etavec les jouissanc es de la vi e. Calvin consacre ce sujet u n ch apitre (19) qu'il est intressant de comparer avec la pratique tablie par lui dans l 'Eglise de Genve. Ensuite il traite ici, sansque l 'on puisse voir par quelle raison d'ordre, de l'Oraison. Cechapitre, qui n'a pas moins de 52 sections, et qui renferme entreautres une exposition de l 'Oraison dominicale, est riche d'exprience chrtienne.En tre ce chapitre sur la prire et un d ernier sur la rsu rrectio n,l 'auteur dveloppe longuement dans quatre chapitres (21-24) sesvues sur une doctrine qui, aux yeux de la postrit, a marqu de

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    INTRODUCTION. XXI Xson cachet toute la thologie calviniste, je veux dire la doctrinede la prdestina tion. Tandis qu e la plu par t des au tres vrits v an-gliques, plus ou moins modifies par la pense individuelle, sontadmises encore dans les Eglises rformes telles peu prs queCalvin les avait comprises et exposes, nous croyons qu'il est peine aujourd'hui quelques rares chrtiens qui puissent partageren plein ses convictions sur la doctrine dont il s'agit ici. Non queces convictions lui soient particulires ; il les trouvait chez saintAugustin, qu'il cite sans cesse dans ces pages, et l 'un et l 'autrecroyaient fermement les avoir puises dans les Ecritures. En prsence des redoutables questions que soulvent dans la consciencehumaine les faits de l 'existence du mal, de la chute, des causesefficientes du salut des uns, de la condamnation des autres, lesesprits soumis aux enseignements de la Parole de Dieu ont touscherch une thodice dans une certaine harmonie entre la souverainet de Dieu et la libert de l 'homme. Selon qu'ils ont pressplus ou moins tel ou tel ord re de dclarations de l 'Ec ritu re, ils ontinclin plus ou moins vers la souverainet divine ou vers la liberthum aine. P eu sont alls, dans ce dern ier sens , ju sq u' nier un election de grce, diminuant l 'uvre de Dieu pour faire tout dpendre de l 'homme, semi-plagianisme aussi peu conforme auxfaits de l 'exprience qu'aux enseignements de l 'Ecriture. Mais, enadmettant l 'lection de grce, qui, bien comprise, est pour lefidle une source la fois d'humiliation, d'assurance et de paix,tous , ou peu prs, s'accordent croire que la Bible n'enseignepoint un dcret de rprobation ; tous aussi s'accordent penserque Dieu possde par devers lui le secret de concilier cette lection avec la libert et la responsabilit de l 'homme, soit quecelui-ci accepte ou rejette le salut qui lui est offert.Quant Calvin, entran par la logique en traitant ce redo utab lesujet, il conclut que s'il y a un dcret d'lection, il y en a un ausside rprobation. Voici sa doctrine telle qu'il la dfinit: Nous appe- Ions prd estination le conseil tern el' de D ieu , pa r lequel il a dtermin ce qu'il vouloit faire d'un chacun homme. Car il ne les cre pas tous en pareille condition; mais ordonne les uns vie ternelle, les autres ternelle damnation (III, 21, 5).

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    XXX INTRODUCTION.Cette double prdestination, prcdant tous les temps et la cration du m ond e, Calvin l 'attrib ue au conseil ternel et imm uable de Dieu. Nous disons qu e ce conseil, qu an t aux lu s, est fond en sa misricorde, sans aucun regard de dignit humaine ; au con-ce traire, que l'entre de vie est forclose tous ceux qu'il veut livrer damnation (III, 21,7). Il faut bien remarquer que Calvin neprouve la rprobation ternelle, qui n'est nulle part enseigne dansl'Ecriture, que par une conclusion logique : Il y a une lection,donc aussi une rprob ation. Ceux que Dieu laisse en eslisant, il les

    rpro uve (III, 2 3 , 4). Ad m ettre l 'lection et rejeter la rpro bation san s s'inquiter de la logiqu e, est ses yeu x puril et un e sottise trop lou rde . Rien dans les dveloppements et dans les preuves n'adoucit lacrudit de cette opinion. Calvin est convaincu qu'il y va de l 'hon- neur de Dieu ce qu e le ct hu m ain disparaisse dans ses m ystrieux rapports pour laisser seule et inconteste la souverainetdivine.Il semble, au premier abord, qu'avec une si impitoyable doctrine Calvin abandonne tout fait le principe anthropologiqueque nous avons reconnu; bien plus, on se demande s ' i l ne va pastomber dans toutes les dsastreuses consquences du fatalisme.Chose rema rquab le ! il n'en est rien. Aucune partie de son livre nefait cette impression, et l'on sait ce que fut l'action de sa vie entire. Il suffit que le Matre dont il proclame l'absolue souverainet soit, non un aveugle falum, mais le Dieu de l 'Evangile dontla misricorde triomphe de toutes nos erreurs ; il suffit que Calvin dclare, avec l 'austre nergie de son me, ceux qui prissent, q ue nu l ne prira sans l 'avoir m ri t, aux lus , qu'ilsle sont selon l 'Esprit de saintet, pour tre saints et irrprhensibles devant Dieu ; il suffit qu'il rappelle aux uns et aux autresque le dessein ternel de l 'lection, qui est secret, se manifestepar la vocation, par la Parole, laquelle nous devons croire etobir pour travailler notre salut avec crainte et tremblement ; ilsuffit de cela pour neutraliser dans la pratique une conceptionpouvantablement fausse force d'tre logique. Cela seul expliquela srnit avec laquelle un homme aussi consciencieux se meut

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    INTRODUCTION. xxxjparmi ces terribles cueils : Combien toutesfois qu e ceste dispute de prdestination soit estime comm e un e m er ora ge us e, si est-ce q ue la nav igation y est seure et paisible, et mesm e joy eu se, sinon que quelqu'un affecte de son bon gr se mettre en danger (III, 24, 4) .Nous n'analyserons pas le quatrime livre, non que l 'importanceen soit moindre que celle des autres; mais nous devons nousborner, et d'ailleurs la plupart des sujets traits ici se laissentdifficilement rsumer. Des vingt chapitres que renferme ce dernierlivre l 'auteur en consacre douze aux diverses questions relatives l 'Eglise, avec force polmique contre le catholicisme; un auxvux monastiques; six aux sacrements, et un dernier au gouvernement civil. On ne peut assez s'tonner qu' notre poque derenouv ellement ecclsiastique, o toutes les questions qui touchen tde prs ou de loin l 'Eglise sont agites en tous sens, on n'aitpas prouv un besoin plus universel de prendre en srieuse considration cette voix imposante de notre Rforme. Quoi ! on veutreconstituer nos Eglises, et l 'on ne daigne pas mm e s'enqu rir deleurs origines, ni couter les conseils d'une exprience de troissicles ! Libre chacun d e rejeter les vues du grand Rfo rm ateur;mais sera-ce sans l 'avoir entendu?

    V.Nous n'hsitons pas tendre toute VInstitution la remarqueque nous venons de faire sur le quatrime livre. Scientifiquement, il n'est permis aujourd'hui, ni au thologien, ni au laquequi prtend de solides connaissances religieuses, de ngligerl'ouvrage qui fut le fondement dogmatique de la Rforme franaise, et dont les neuf diximes au moins du Protestantisme porte

    aujourd'hui encore l 'ineffaable empreinte.Que l'on veuille bien ne pas nous comprendre mal : Nous dclarons bien haut qu'en matire de vrit religieuse, nous ne reconnaissons comme matre aucun h om m e, et comme au torit aucunlivre d'homme. Nous nous inclinons avec l 'obissance de la foi devan t Celui-l seul qu i pu t d ire : Je suis la v r it , je suis la lu -

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    XXX1J INTRODUCTION.mire, je suis la vie. Nous n'admettons, comme l'expression adquate de sa rvlation, que le Testament qu'il nous a donn parle Saint-Esprit. A tout le reste nous appliquons le grand principede Paul : Examinez toutes choses, retenez ce qui est bon. Nous dclarons non moins ha ut q ue n ous n e pensons point que les productionsde l 'esprit religieux d'une poque, mme les plus excellentes etles plus illustres, soient propres rpondre tous les besoinsd'un e autre poq ue. Ic i, comme en toutes choses, nous croyons auprogrs. Loin de nous l 'ide de prcher la perfectibilit de l 'Eva ng ile, qui fut parfait ds le jo ur o Jsus-Christ acheva sonuvre par l'effusion de son Saint-Esprit sur son Eglise. Mais cequi est trs perfectible, ce en quoi nous devons faire de continuelsprogrs , c'est la conception et l'exposition de la vrit chrtiennedans des applications toujours nouvelles, dans des rsultats toujours plus riches et plus beaux, pour le salut de notre humanitdchue. Or, s'il en est ainsi, il est vident que nous trouveronsdans un livre humain qui a trois sicles de date des formes vieillies , des procds de polmique qui rpugnent notre sentiment,des opinions qui portent l 'empreinte des erreurs du temps, enun mot, une insuffisance rpondre tous les besoins intellectuels et moraux de notre poque.

    Mais ces concessions abondamment faites, que de motifs appelaient imp rieusem ent la reproduction du livre qu i nous occupe !En est-il aucun qui ait un e telle importance historique d'a bo rd ?Qui connatra bien la Rforme sans s'tre familiaris avec ses doctrines , et qui connatra ses doctrines sans avoir lu le livre qui enfut pend ant deu x sicles l 'arsenal et l 'tend ard ? N'oublions pas,d'ailleurs, que ces immortels principes sont bien ceux qui soulevrent le monde, renouvelrent l 'Europe, firent des milliers demartyrs, crrent nos Eglises, et furent leur force, leur vie, leurconsolation au sein des orages et des souffrances de plusieurs sicles. Pour revivre avec nos pres, pour les comprendre, pour sympathiser avec eux dans leurs combats et dans leur foi, il faut relireY Institution, don t ils se nou rrissaient, eux qui les presses de Genve, de Hollande et d'ailleurs ne pouvaient en fournir assez.

    Mais si l ' imp ortance historique de l'Institution est gra nd e, sa va-

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    INTRODUCTION. xxxiijleur intrinsque l 'est plus encore. Dans quels ouvrages de thologie moderne retrouve-t^on cette richesse de pense et cetteclart limpide de style, cette vaste rudition et cette vivantepit, cette profonde connaissance des Ecritures et cette mreexprience de la vie chrtienne ? En lisant ce livre on fait la foisun cours de dogmatique, de morale, d'exgse, d'histoire dudogme et de patristique. Que ne renferme-t-il pas ? Nos d iscussionsactuelles? Qu'elles aient rapport la doctrine ou une questionquelconque du gouvernement de l 'Eglise, elles sont l avec tousles arguments pour et contre, et une solution le plus souvent conforme au bon sens et la Parole divine. Et l'on se dit : Il n'ya rien de nouveau sous le soleil.Ces caractres, joints l 'espritpratique de Calvin, et tous pntrs de son principe anthropologique, rendent son livre immdiatement applicable la vie. Onoublie en le lisant la rudesse des formes et les restes de scolas-tique qui s'y trouvent, tant l 'me est leve et difie par cetteconscience austre et brlante de zle pour la gloire de Dieu.Nous avons rimprim les Commentaires de Calvin, et il est permis d'esprer qu'ils seront beaucoup consults parmi nous. Maisl'auteur lui-mme, se rfrant son Institution, nous apprendquelque part qu'il ne s'est tudi si grande brivet dans seslivres exgtiques que parce qu'il avait expos l toute sa pensesur les grandes vrits de la foi. De sorte que, mme pour la lecture des Commentaires, l'Institution est un complment indispensable.Enfin l 'poque o reparat ce chef-d'uvre sans gal du seizime sicle est des plus graves. Le rveil de la foi et de la pitdan s nos Eglises a ramen les esp rits srieux ver s les tudes thologiques et religieuses. Mais ces tudes mmes, en soulevant une une toutes les questions, ont d recevoir des solutions fort diffrentes, et de l, sur tous les points, les luttes dont nous sommestmoins. Les un s, rega rdan t vers l 'avenir plus qu 'au pass, repro chent au Rveil d'tre revenu simplement aux doctrines de la Rforme acceptes en bloc comme un hritage traditionnel; les aut res , voyan t les fondements renverss et le dou te couler plein bo rd mm e parm i ceux dont la vocation est de prch er la foi,

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    XXXIV INTRODUCTION.,se dfient du travail de la pense, s'effrayent de la science, rpudient cette Eglise de l'avenir qu'on leur promet, et s'attristentd'un mouvement qu'ils ne peuvent ni rprimer ni mesurer dansses rsultats inconnus. Ailleurs encore monte 'le flot croissant desprjugs qui ne vont rien moins qu' faire de l'auteur de l'Institution un dangereux hrsiarque, b riser tout lien de communionchrtienne entre les deux grandes familles de la Rformation, exclure du corps de Christ tout ce qui n'abjure pas Genve pourWittenberg et Augsbourg. De son ct, le catholicisme en estencore puiser ses notions de la Rforme franaise dans les livresd'Audin, ou, ce qui ne vaut pas beaucoup mieux, dans les Variations de Bossuet, ou encore dans quelques traits polmiques deCalvin qu'on a donns au monde comme des curiosits littraires ;et aprs tout il persiste ne voir dans le grand mouvement duseizime sicle qu'une rvolution en faveur de la libert, que letriomphe de la religion toute ngative du libre examen.Questions srieuses, sans doute, et qui doivent tre dbattues jusqu'aubout, vides et rsolues sans aucune crainte pour la vrit deDieu qui est ternelle ; mais questions que nous voyons partoutcompliques de prjugs, de malentendus. Ne faudrait-il pas, avanttoute discussion, s'efforcer de les dissiper?Dans ce but, nous prsentons chaque parti le livre de l'Institution, et nous disons tous : Lisez ! Hommes de la science etdu progrs, consentez suspendre pour un moment vos rvesd'avenir, regarder une fois encore en arrire, vous replongerdans ce seizime sicle que peut-tre vous connaissez trop peu; etaprs avoir relu, vous verrez si vous pourrez encore fltrir dunom d'orthodoxie et rejeter comme des formules ce qui aura saisivotre conscience, humili et relev votre cur. Des formules, oh !elles nous importent peu; mais quel dplorable malentendu si,sous ce nom, vous alliez rpudier la vrit et la vie, et si, sans enavoir le droit, vous accusiez un seul de vos frres d'avoir cru des formules! Hommes du Rveil, lisez! et quand vous serezpnts de la sainte spontanit avec laquelle nos grands Rformateurs laborrent leur foi par les Ecritures librement interprtes et par le rude travail de la conscience et de la pense, quand

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    INTRODUCTION. XXXVvous les entendrez en appeler sans cesse l'exprience individuelleet au tmoignage intrieur du Saint-Esprit comme dmonstrationsuprme de la divinit des Ecritures elles-mmes, peut-tre re-douterez-vous moins chez vos frres cette mthode d'arriver lafoi, peut-tre la trouverez-vous moins que toute autre sujette deterribles illusions, peut-tre conclurez-vous que le Rveil lui-mmes'est inspir beaucoup moins de notre Rformation que de certaines coles modernes et trangres. Frres luthriens, l isez! etvous verrez que le livre qui servit d'tendard l 'Eglise rformen'enseigne ni sur l 'Eglise elle-mme, ni sur le ministre de laPa role , ni sur la perso nne de Christ, ni s ur la justification p ar lafoi, ni sur les sacrements du baptme et de la cne, ce qu'on vousprsente comme article de foi dans votre Formula Concordi, ouque vous avez entendu dans la chaleur de la polmique, ou quevous avez vu dans quelques congrgations rformes. Vous comprendrez que pour chercher et trouver entre les deux familles dela Rformation un fraternel consensus, les termes rduire en synthses ne sont pas le luthranisme d'une part, et de l 'autre unzwinglianisme superficiel, mais que la partie qui vous tend lamain et vous propose une alliance de foi et d'amour, c'est l'Egliserforme, avec sa pure doctrine et sa belle vie, scelles du sangde ses martyrs.Catholiques srieux, ouvrirez-vous le livre quenous vous prsentons? Ne vous laissez pas rebuter par une polm ique acerbe, dont tous les partis usaient et abusaien t au seizimesicle ; pntrez au fond des choses, et vous y trouverez non desngations et des protestations seulement, ou des problmes proposs aux spculations des philosophes, mais cette vrit positive,apostolique, divine, apporte un monde perdu dans les tnbresdu pch, par le Fils du Dieu vivant que nous adorons avec vous,vrit qui seule peut rpondre aux besoins profonds des mes.Conduits par Calvin lui-mm e au pied de la croix du Calvaire, vou sy puiserez comme lui, avec le pardon, la paix et la vie.Irons-nous plus loin? convierons-nous au somptueux banquetprpar par le Rformateur ceux qui le rationalisme philosophique a rendu absurde l 'ide de toute rvlation positive, ceux-lmme que la spculation a pousss de proche en proche jusqu'

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    xxxvj INTRODUCTION;l'abme sans fond du panthisme? Pourquoi pas ? Justement parceque Calvin prsente sans mnagements, avec toute l 'nergie d'uneconscience honnte, ces doctrines et ces faits du christianisme quePa ul appelait la folie de la c roix ; justem ent parce qu e, unsicle avant Pascal, il se montre assez fort pour accabler l'hommeorgueilleux du poids de sa misre, et pour lui montrer ensuite leseul relvement possible,qui sait si cette mthode trange, inaugure par le Prophte de Nazareth, suivie par son plus grandmissionnaire, et non sans succs, devant l 'aropage d'Athnes,n'atte ind rait pas tel pens eur trop srieux pou r trou ver la paixauprs de Kant ou de Hegel ? Quant aux hommes, cela est impossible, mais toutes choses sont possibles Dieu. Nous laissons le lecteur dans la socit du plus grand thologien du seizime sicle. Que l'Esprit de Dieu prside leurs secretsentretiens !

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    JEHAN CALVIN A U LECTEURPource qu'en la premire dition de ce livre je n'attendoye pasqu'il deust estre si bien receu comme Dieu l'a voulu par sa bontinestimable, je m'en estoye acquitt plus lgrement, m'estudiant briefvet : mais ayant cognu avec le temps qu'il a est recueillyde telle faveur que je n'eusse pas os dsirer (tant s'en faut que jel'esprasse) je me suis senty d'autant plus oblig de m'acquittermieux et plus plenement envers ceux qui recevoyent ma doctrinede si bonne affection, pource que c'eust t ingratitude moy, dene point satisfaire leur dsir selon que ma petitesse le portoit.Parquoyj'ay tasch d'en faire mon devoir : non-seulement quandledit livre a est imprim pour la seconde fois, mais toutes fois etquantes qu'on l'a r'imprim, il a est aucunement augment etenrichy. Or combien que je n'eusse point occasion de me desplaireau travail que j 'y avoyeprins, toutesfois je confesse que jamais je

    ne me suis content moy-mesme, jusques ce que je l'ay eu digren l'ordre que vous y verrez maintenant, lequel vous approuverez, comme j'espre. Et de faict, je puis allguer pour bonne approbation, que je ne me suis point espargn de servir l'Eglise deDieu en cest endroict, le plus affectueusement qu'il m'a est possible : en ce que l'hyver prochain, estant menac par la fivrequarte de partir de ce monde, d'autant plus que la maladie mepressoit, je me suis d'autant moins espargn, jusques ce quej'eusse parfait le livre, lequel survivant aprs ma mort monstrastcombien je dsiroye satisfaire ceux qui desj y avoient proufit,et dsiroyent d'y proufiter plus amplement. Je l'eusse bien voulufaire plustost : mais ce sera assez tost, si assez bien : et quant

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    xxxviij JEHAN CALVINmoy, il me suffira qu'il ait apport fruit l'Eglise de Dieu, encoresplus ample que par cy-devant. Voyl mon seul souhait : commeaussi de faictje seroye bien mal rcompens de mon labeur, si jene me contentoye estre approuv de mon Dieu, pour mespriserles folles opinions et perverses des ignorans, ou les calomnies etdtraclions des malins. Car combien que Dieu ait du tout attachmon cur une droicte affection et pure d'augmenter son rgne,et servir l'utilit de son Eglise : que ma conscience me rendebon et certain tesmoignage devant luy et devant ses Anges, que jen'ay eu autre intention depuis qu'il m'a donn ceste charge et office d'enseigner, sinon de proufiter son Eglise en dclairant etmaintenant la pure doctrine qu'il nous a apprise : toutesfois je nepense point qu'il y ait homme sur la terre qui soit plus assailly,mords et deschir par fausses dtractions, tant des ennemis manifestes de la vrit de Dieu, que de beaucoup de canailles qui sesont fourrez en son Eglise : tant des Moines qui ont apport leursfrocs hors de leurs cloistres pour infecter le lieu o ils venoyent,que d'autres vileins qui ne valent pas mieux qu'eux. Sans allerplus loing, desj ceste Ep istre esloit sous la presse quan d j' a y receucertaines nouvelles d'Ausbourg, o les estatsde l 'Empire se te-noyent, qu'il y avoit l couru un grand bruit que je m'estoye rvolt la Papaut, lequel avoit est recueilly par les cours desPrinces avec trop grande facilit : ce qui monstroit que beaucoupde meschans hypocrites faisans profession de l'Evangile, eussentbien voulu qu'ainsi fust. Voyl le bon loyer que me rendent beaucoup de cou rtisans, lesquels ont souvent expriment ma con stance,et pourtant me devoyent bien servir d'advocats, si l ' ingratitude neles eust empeschez : et tant plus devoyent juger quitablement dem oi, m 'ayan t cognu tel. Or le diable avec toute sa band e se trompefort s'il cuide m'abatre ou descourager en me chargeant de mensonge s si frivoles. Car je m e confie qu e Dieu par sa bont souve raine me donnera de persvrer avec patience invincible au coursde sa saincte vocation, comme j 'en donne de nouveau bonnes en-

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    AU LECTEUR. xxxixseignes tous Chrestiens. Or mon but a est de tellement prpareret instruire ceux qui se voudront adonner l'estude de Thologie, ce qu'ils ayent facile accs lire l'Escriture saincte, et prou-fiter et se bien advancer l'entendre, et tenir le bon chemin etdroict sans choper. Car je pense avoir tellement comprins la sommede la religion chrestienne en toutes ses parties, et l'avoir digreen tel ordre , queceluy qui aura bien comprins la forme d'enseignerque j' ay suyvie, pourra aisment juger et se rsoudre de ce qu'ildoit chercher en l'Escriture, et quel but il faut rapporter le contenu d'icelle. Et pourtant il n'est j besoin qu'en mes Commentaires, ausquels j'expose les livres de l'Escriture saincte, j'e ntreen longues disputes des matires qui sont l traittes, veu que leprsent livre est une addresse gnrale pour guider ceux qui dsirent d'estre aidez : comme de faict on voit que je n'aime pointd'extravaguer ny user de longue prolixit. Par ce moyen les Lecteurs seront soulagez d'ennuy et de fascherie, quand ils auront estdiligens se munir par l'instruction de ce prsent Livre, pourtenir en tout le reste un train ais : ce que j'aime mieux qu 'on co-gnoisse par effect, que de m'en vanter. Sur quoy je vous recom-manderay la garde de Dieu, dsirant aussi de n'estre point oubli en vos sainctes prires, selon le fruit que vous recevrez demes labeurs.A Genve, ce premier jour d'Aoust, M. D. LIX.

    SAINCT AUGUSTIN EN i/HSTRE VII.Je me confesse estre du rang de ceux qui escrivent en proufitant,et proufitent en escrivant.QUATRAIN TRADUICT D'UN DISTIQUE LATIN DE L'AUTHEUR.Ceux desquels je voulois l'innocence dfendreEn un simple livret, m'ont si bien seu poursuivre,Par leur zle fervent, et saint dsir d'apprendre,Qu'ils ont tir de moy lafince grand livre.

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    AU ROY DE FRANC E TRS C H RES TI EN,* FRANOIS, PREMIER DE CE NOM, SON PRINCE ET SOUVERAIN SEIGNEUR,

    J E H A N C A L V I N ,PAI X ET S ALUT EN JS US -C HRI S T .

    Au commencement que je m'appliquay escrire ce prsent livre, je ne pensoye rien moins, Sire, que d'escrire choses qui fussent prsentes vostre Majest : seulement mon propos estoitd'enseigner quelques rudimens, par lesquels ceux qui seroyenttouchez d'aucune bonne affection de Dieu, fussent instruits lavraye pit. Et principalement je vouloye par ce mien labeur servir nos Franois : desquels j'en voyoye plusieurs avoir faim etsoif de Jsus-Christ, et bien peu qui en eussent receu droicte co-gnoissance. Laquelle miene dlibration on pourra facilementappercevoir du livre, entant que je l'ay accomod la plus simpleforme d'enseigner qu'il m'a est possible. Mais voyant que la fureur d'aucuns iniques s'estoit tant esleve en vostre Royaume,qu'elle n'avoit laiss lieu aucun toute saine doctrine, il m'a sembl estre expdient de faire servir ce prsent livre, tant d'instruc-tionceuxq ue premirement j'avoye dlibr d'enseigner, qu'ausside confession de foy envers vous : dont vous cognoissiez quelle estla doctrine contre laquelle d'une telle rage furieusement sont en-flambez ceux qui par feu et par glaive troublent aujourd'huyvostre Royaume. Car je n'auray nulle honte de confesser que j'ayycicomprins quasi une somme de ceste mesme doctrine laquelle ilsestiment devoir estre punie par prison, bannissement, proscriptionet feu : et laquelle ils crient devoir estre deschasse hors de terreet de mer. Bien say-je de quels horribles rapports ils ont remplyvos aureilles et vostre cur, pour vous rendre nostre cause fortodieuse : mais vous avez rpu ter selon vostre clmence et mansutude, qu'il ne resteroit innocence aucune ny en dits ny en faits,s'il suffisoit d'accuser. Certainement si quelqu'un, pour esmouvoir

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    xlij PRFACEhaine l'encontre de ceste doctrine de laquelle je me veux efforcerde vous rendre raison, vient arguer qu'elle est desj condamnepar un commun consentement de tous estats, qu'elle a receu enjug em en t plusieurs sentences contre elle, il ne dira au tre chose,sinon qu'en partie elle a est violentement abatue par la puissanceet conjuration des adversaires, en partie malicieusement opprimepar leurs mensonges, tromperies, calomnies et trahisons. C'estforce et violence, que cruelles sentences sont prononces rencontre d'icelle devant qu'elle ait est dfendue. C'est fraude ettrahison, que sans cause elle est note de sdition et malfice. Afinque nul ne pense que nous nous complaignons de ces choses tort, vous-mesme nous pouvez estre tesmoin, Sire, par combienfausses calomnies elle est tous les jo ur s diffame env ers v ous :c'est asavoir, q u'elle ne tend au tre fin, sinon qu e tous rgne s etpolices soyent r uin es , la paix soit troub le , les loix abolies, lesseigneuries et possessions dissipes : brief, que toutes chosessoyent renverses en confusion. Et nantmoins encores vous n'enoyez que la moindre portion. Car entre le populaire on sme contre icelle horribles ra pp orts : lesquels s'ils estoyent vritables, bon droict tout le monde la pourroit juger avec tous ses autheurs,digne de mille feux et mille gib ets. Qui s'esmerveillera m ain te-napt pourquoy elle est tellement haye de tout le monde, puis qu'onadjouste foy telles et si iniques dtractions? Yoyl pourquoytous les estats d'un commun accord conspirent condamner tantnous que nostre doctrine. Ceux qui sont constituez pour en juger,estans ravis et transportez de telle affection, prononcent pour sentence, la conception qu'ils ont apporte de leur maison : et pensent trsbien estre acquittez de leur office s'ils ne jugent personne mort, sinon ceux qui sont, ou par leur confession, ou par certaintesmo ignag e, co nvaincus. Mais de quel crime? De ceste doctrinedamne, disent-ils. Mais quel tiltre.est-elle damne? Or c'estoitle point de la dfense : non pas dsadvouer icelle doctrine, mais lasoustenir pour vraye. Yci est ost le cong d'ouvrir la bouche.Pourtant je ne demande point sans raison, Sire, que vous vueilliezpre nd re la cognoissance entire.de ceste cause , laquelle jusques-ycia est dm ene confusment sans nul o rdre de droict : et pa r un

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    AU ROY DE FRANCE. xliijardeur imptueux, plustost que par une modration et gravitjudiciaire. Et ne pensez point que je tasche traitter yci ma dfense particulire, pour imptrer retour au pays de ma naissance ;auquel combien q