Innovation technologique Reformage à sec du … · reformage à la vapeur et les systèmes de...

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Description générale du projet Le gaz naturel est une des sources d’énergie les plus abordables sur la planète et le développement de cette énergie est en pleine expansion un peu partout à travers le monde. Cette source d’énergie, en plus de revêtir un intérêt certain pour la production de chaleur et d’électricité, représente aussi un potentiel certain pour la production de carburants de synthèse. Toutefois, les alcanes composant le gaz naturel ne peuvent être convertis directement en carburant et requièrent d’être transformés en un bloc de base plus propice pour les synthèses, le syngas. Ce dernier, aussi appelé gaz de synthèse, est en fait une mixture d’hydrogène et de monoxyde de carbone. La production de cette mixture à partir du gaz naturel se fait via des procédés de reformage. Parmi ces derniers, les plus communs à l’industrie sont les systèmes de reformage à la vapeur et les systèmes de reformage autothermiques. Dans les deux cas, les procédés comportent un certain lot d’avantages et d’inconvénients. Les agents oxydants généralement employés dans ces systèmes sont la vapeur d’eau et l’oxygène. Le dioxyde de carbone peut également agir en tant qu’agent oxydant vers une réaction portant le nom de reformage à sec. Lors de cette réaction, le méthane est oxydé en monoxyde de carbone tandis que le dioxyde de carbone est lui réduit en monoxyde de carbone, provoquant également la formation d’hydrogène dans un ratio équimolaire. Dans le cadre de ce projet, une nouvelle approche de reformage à sec a été mise de l’avant. Le système, impliquant un lit fixe de laine d’acier acheté tout bêtement à la quincaillerie, est électrifié à l’aide d’un courant électrique continu. Le méthane et le dioxyde de carbone sont alimentés dans le catalyseur qui est maintenu dans un four à 950 °C. Les résultats ont démontré que les deux gaz ont été convertis à plus de 95 % de façon stable pendant plus de 200 heures générant une mixture équimolaire d’hydrogène et de monoxyde de carbone. Cette nouvelle approche au reformage pourrait, dans une économie où l’utilisation du gaz naturel est en plein essor, permettre de réduire l’empreinte de carbone des procédés de reformage par rapport aux procédés classiques et particulièrement si le gaz de synthèse est destiné à la synthèse de carburants où, la moitié du carbone proviendrait du CO 2 , représentant une source de séquestration et de valorisation de ce dernier. Par ailleurs, le fait d’utiliser de l’hydroélectricité pour la conversion vient encore une fois réduire l’empreinte de carbone du procédé tout en représentant une approche chimique de stockage de l’électricité. Le système réactionnel comprend un réacteur à lit fixe dans lequel le catalyseur utilisé est de la laine d’acier Bulldog acheté à la quincaillerie. Le réacteur est chauffé de l’extérieur à l’aide d’une fournaise tubulaire. Le catalyseur à l’intérieur du réacteur est électrifié avec du courant continu alimenté par deux électrodes qui maintiennent le catalyseur en place au milieu du réacteur. Les gaz entrants sont régulés à l’aide d’un débitmètre de masse tandis que les gaz à la sortie sont quantifiés à l’aide d’un système chromatographique combiné à un système à infrarouge (FTIR). Afin de prouver la validité du procédé et surtout son potentiel pour une éventuelle mise à l’échelle, il a fallu prouver : Viabilité du catalyseur : cet aspect est bien important pour une mise à l’échelle d’un tel procédé, car non seulement le catalyseur représente des coûts, mais le changer représente aussi un investissement de temps pour le personnel de l’usine ainsi que le temps où les opérations devront être potentiellement arrêtées pour des fins de maintenance. Les résultats à ce point démontrent un maintien de l’opération du catalyseur pendant une période totale de plus de 200 heures sans faire preuve de désactivation. Par ailleurs, notre équipe a mis au point un procédé de réactivation du catalyseur qui évite l’arrêt prolongé des opérations. Perte de carbone : la perte de carbone est aussi un enjeu d’importance lorsque la conversion des alcanes est envisagée. Les réactions de reformage et particulièrement celle de reformage à sec sont reconnues pour impliquer beaucoup de craquage du méthane, ce qui cause une perte de carbone. Notre équipe a su contrer cette problématique par un système d’automatisation qui régule les concentrations de dioxyde de carbone et de CH4 entrant dans le réacteur. Validité de la laine d’acier : un autre aspect qu’il était important de clarifier est la validité de la laine d’acier comme catalyseur pour cette réaction. Elle est provoquée uniquement par effet joule de l’électricité circulant au sein du catalyseur. Les résultats démontrent que le système est de loin beaucoup moins efficace lorsqu’opéré avec une laine de stainless ou de nickel sous les mêmes conditions (courant entrant & température d’opération). Utilisation optimale de l’électricité : un des buts de l’optimisation du procédé était également de diminuer au maximum la consommation d’électricité. Les procédés de reformage classiques utilisent en moyenne 25 % de la valeur énergétique du méthane pour fournir l’énergie nécessaire à sa conversion. Le but était donc de fournir un bilan énergétique comparable. Après optimisation, notre système a atteint une consommation énergétique (électrique) sous la barre des 20 % de la valeur énergétique du méthane entrant. Opération à une température optimale : la réaction de reformage à sec est une réaction endothermique en ce sens qu’elle requiert un bon apport d’énergie pour avoir lieu. Les températures pour le reformage classique oscillent entre 1 000 et 2 000 °C, toutefois, dans le cadre de ce projet, nous avons pu atteindre des conversions optimales à des températures minimales de l’ordre de 860 °C. Impacts secondaires Les dernières années ont vu naître un engouement envers l’exploitation du méthane sous différentes formes, que ce soit sous la forme de gaz naturel, de gaz de schistes ou encore de biogaz. Le gaz naturel par exemple est une des sources d’énergie les plus abordables sur la planète avec un prix de marché de 3,98 $ (US) par GJ (prix avant livraison). La consommation de gaz naturel a été évaluée en 2012 à 120 017 milliards de mètres cubiques en 2012 et la consommation des États-Unis correspond à environ 21,27 % de ce total. Il est inévitable que les technologies associées au gaz naturel prennent de l’expansion au courant des prochaines années. De concert, les contraintes environnementales seront de plus en plus présentes et de plus en plus restrictives. Le procédé développé dans le cadre de ce projet pourra donc contribuer à réduire l’empreinte de carbone des technologies de reformage. Quand ces technologies de reformage seront combinées avec la production de synfuels, l’approche pourrait même mener à une nouvelle génération de biocarburants. De concert avec le potentiel pour la réduction de l’empreinte de carbone et la séquestration des gaz à effet de serre, cette technologie permet le stockage de l’énergie verte sous forme chimique. Donc, un peu à l’image d’une batterie chimique, l’électricité renouvelable peut être investie pour la conversion chimique où elle peut être plus facilement emmagasinée. Cette technologie peut s’appliquer au cas du Québec, mais également à toutes les technologies se basant sur les énergies renouvelables qui entraînent des périodes de pointe à des moments précis de la journée (comme les panneaux solaires ou les systèmes éoliens). Le procédé pourrait même être entièrement vert si combiné avec une source d’alcanes renouvelables comme celles provenant de la biométhanisation. Donc, les champs d’application de cette innovation pourraient atteindre de nombreux marchés, que ce soit dans l’industrie pétrolière comme dans l’électricité verte en passant par les biocarburants et la biométhanisation. Réalisé chez : Université de Sherbrooke Présenté par : Jean-Michel Lavoie Université de Sherbrooke Innovation technologique Reformage à sec du méthane sous l’effet d’un catalyseur électrifié Coûts du projet Coût global du projet 399 000 $ Subventions et participations externes OEE 66 000 $ HQ 11 000 $ Autres 22 000 $

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Description générale du projetLe gaz naturel est une des sources d’énergie les plus abordables sur la planète et le développement de cette énergie est en pleine expansion un peu partout à travers le monde. Cette source d’énergie, en plus de revêtir un intérêt certain pour la production de chaleur et d’électricité, représente aussi un potentiel certain pour la production de carburants de synthèse. Toutefois, les alcanes composant le gaz naturel ne peuvent être convertis directement en carburant et requièrent d’être transformés en un bloc de baseplus propice pour les synthèses, le syngas. Ce dernier, aussi appelé gaz de synthèse, est en fait une mixtured’hydrogène et de monoxyde de carbone. La production de cette mixture à partir du gaz naturel se fait via des procédés de reformage. Parmi ces derniers, les plus communs à l’industrie sont les systèmes de reformage à la vapeur et les systèmes de reformage autothermiques. Dans les deux cas, les procédés comportent un certain lot d’avantages et d’inconvénients. Les agents oxydants généralement employés dans ces systèmes sont la vapeur d’eau et l’oxygène. Le dioxyde de carbone peut également agir en tant qu’agent oxydant vers une réaction portant le nom de reformage à sec. Lors de cette réaction, le méthaneest oxydé en monoxyde de carbone tandis que le dioxyde de carbone est lui réduit en monoxyde de carbone,provoquant également la formation d’hydrogène dans un ratio équimolaire. Dans le cadre de ce projet,une nouvelle approche de reformage à sec a été mise de l’avant. Le système, impliquant un lit fixe de laine d’acier acheté tout bêtement à la quincaillerie, est électrifié à l’aide d’un courant électrique continu. Le méthane et le dioxyde de carbone sont alimentés dans le catalyseur qui est maintenu dans un four à 950 °C. Les résultats ont démontré que les deux gaz ont été convertis à plus de 95 % de façon stable pendant plus de 200 heures générant une mixture équimolaire d’hydrogène et de monoxyde de carbone. Cette nouvelle approche au reformage pourrait, dans une économie où l’utilisation du gaz naturel est en plein essor, permettre de réduire l’empreinte de carbone des procédés de reformage par rapport aux procédés classiques et particulièrement si le gaz de synthèse est destiné à la synthèse de carburants où, la moitié du carbone proviendrait du CO2, représentant une source de séquestration et de valorisation de ce dernier. Par ailleurs, le fait d’utiliser de l’hydroélectricité pour la conversion vient encore une fois réduire l’empreinte de carbone du procédé tout en représentant une approche chimique de stockagede l’électricité.

Le système réactionnel comprend un réacteur à lit fixe dans lequel le catalyseur utilisé est de la laine d’acier Bulldog acheté à la quincaillerie. Le réacteur est chauffé de l’extérieur à l’aide d’une fournaise tubulaire. Le catalyseur à l’intérieur du réacteur est électrifié avec du courant continu alimenté par deux électrodes qui maintiennent le catalyseur en place au milieu du réacteur. Les gaz entrants sont régulés à l’aide d’un débitmètre de masse tandis que les gaz à la sortie sont quantifiés à l’aide d’un système chromatographique combiné à un système à infrarouge (FTIR). Afin de prouver la validité du procédé et surtout son potentiel pour une éventuelle mise à l’échelle, il a fallu prouver :

• Viabilité du catalyseur : cet aspect est bien important pour une mise à l’échelle d’un tel procédé, carnon seulement le catalyseur représente des coûts, mais le changer représente aussi un investissement de temps pour le personnel de l’usine ainsi que le temps où les opérations devront être potentiellement arrêtées pour des fins de maintenance. Les résultats à ce point démontrent un maintien de l’opération du catalyseur pendant une période totale de plus de 200 heures sans faire preuve de désactivation. Par ailleurs, notre équipe a mis au point un procédé de réactivation du catalyseur qui évite l’arrêt prolongé des opérations.

• Perte de carbone : la perte de carbone est aussi un enjeu d’importance lorsque la conversion des alcanes est envisagée. Les réactions de reformage et particulièrement celle de reformage à sec sontreconnues pour impliquer beaucoup de craquage du méthane, ce qui cause une perte de carbone. Notre équipe a su contrer cette problématique par un système d’automatisation qui régule les concentrationsde dioxyde de carbone et de CH4 entrant dans le réacteur.

• Validité de la laine d’acier : un autre aspect qu’il était important de clarifier est la validité de la laine d’acier comme catalyseur pour cette réaction. Elle est provoquée uniquement par effet joule de l’électricitécirculant au sein du catalyseur. Les résultats démontrent que le système est de loin beaucoup moins efficacelorsqu’opéré avec une laine de stainless ou de nickel sous les mêmes conditions (courant entrant &température d’opération).

• Utilisation optimale de l’électricité : un des buts de l’optimisation du procédé était également de diminuer au maximum la consommation d’électricité. Les procédés de reformage classiques utilisent en moyenne 25 % de la valeur énergétique du méthane pour fournir l’énergie nécessaire à sa conversion. Le but était donc de fournir un bilan énergétique comparable. Après optimisation, notre système a atteintune consommation énergétique (électrique) sous la barre des 20 % de la valeur énergétique duméthane entrant.

• Opération à une température optimale : la réaction de reformage à sec est une réaction endothermiqueen ce sens qu’elle requiert un bon apport d’énergie pour avoir lieu. Les températures pour le reformageclassique oscillent entre 1 000 et 2 000 °C, toutefois, dans le cadre de ce projet, nous avons pu atteindre des conversions optimales à des températures minimales de l’ordre de 860 °C.

Impacts secondairesLes dernières années ont vu naître un engouement envers l’exploitation du méthane sous différentes formes, que ce soit sous la forme de gaz naturel, de gaz de schistes ou encore de biogaz. Le gaz naturel par exemple est une des sources d’énergie les plus abordables sur la planète avec un prix de marché de 3,98 $ (US) par GJ (prix avant livraison). La consommation de gaz naturel a été évaluée en 2012 à 120 017 milliards de mètres cubiques en 2012 et la consommation des États-Unis correspond à environ 21,27 % de ce total. Il est inévitable que les technologies associées au gaz naturel prennent de l’expansion au courant des prochaines années. De concert, les contraintes environnementales seront de plus en plus présentes et de plus en plus restrictives. Le procédé développé dans le cadre de ce projet pourra donc contribuer à réduire l’empreinte de carbone des technologies de reformage. Quand ces technologies de reformage seront combinées avec la production de synfuels, l’approche pourrait même mener à une nouvelle génération de biocarburants.

De concert avec le potentiel pour la réduction de l’empreinte de carbone et la séquestration des gaz à effet de serre, cette technologie permet le stockage de l’énergie verte sous forme chimique. Donc, un peu à l’image d’une batterie chimique, l’électricité renouvelable peut être investie pour la conversion chimique où elle peut être plus facilement emmagasinée. Cette technologie peut s’appliquer au cas du Québec, mais également à toutes les technologies se basant sur les énergies renouvelables qui entraînent des périodes de pointe à des moments précis de la journée (comme les panneaux solaires ou les systèmes éoliens).

Le procédé pourrait même être entièrement vert si combiné avec une source d’alcanes renouvelables comme celles provenant de la biométhanisation.

Donc, les champs d’application de cette innovation pourraient atteindre de nombreux marchés, que ce soit dans l’industrie pétrolière comme dans l’électricité verte en passant par les biocarburants et la biométhanisation.

Réalisé chez : Université de SherbrookePrésenté par : Jean-Michel Lavoie Université de Sherbrooke

Innovation technologiqueReformage à sec du méthane sous l’effetd’un catalyseur électrifié

Coûts du projet

Coût global du projet 399 000 $

Subventions et participations externesOEE 66 000 $HQ 11 000 $Autres 22 000 $

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