Innova n° 14 - Figuig en quête d'avenir

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MAGAZINE DES ETUDIANTS DE DEUXIÈME ANNÉE JOURNALISME - IUT DE TOURS tours Hors série Sésame - spécial MAROC - juillet 2007 - n°14 -2euros FIGUIG e n quête d’ a v e nir Portraits de femmes traditionnelles ou modernes, elles sont l’âme de l’oasis Chemin des écoliers tous les enfants sont scolarisés. Un record Frontière les déchirures de l’histoire Portfolio entre ombre et lumière, balade dans les ruelles des ksour Quand jeunesse se casse peu de loisirs, poids des traditions. Les jeunes rêvent d’ailleurs Pratique comment y aller , comment s’y loger , comment s’y promener ? Figuig se mérite. I n no v a ISSN 0291-4506

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Numéro hors série, spécial Maroc, réalisé en 2007

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MAGAZINE DES ETUDIANTS DE DEUXIÈME ANNÉE JOURNALISME - IUT DE TOURS

tour

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Hors série Sésame - spécial MAROC - juillet 2007 - n°14 - 2 euros

FIGUIGen quête d’avenir

Portraits de femmestraditionnelles oumodernes, elles sontl’âme de l’oasisChemin des écolierstous les enfants sont

scolarisés. Un recordFrontièreles déchirures de l’histoirePortfolioentre ombre

et lumière, balade dans les ruelles des ksourQuand jeunesse se cassepeu de loisirs, poids des traditions. Les jeunes

rêvent d’ailleursPratiquecomment y aller,comment s’y loger,comment s’y promener ?Figuig se mérite.

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Edito

epuis Oujda, 400 kilomètres de route droitequi file dans le désert caillouteux. Quelqueslacets dans la montagne, la route s’arrête,

bute sur la frontière. Et l’oasis est là. En pleinelumière. Figuig. Au bout du monde.Mais dans le monde.« Salam Aleikoum … Soyez les bienvenus ! » Parolesd’accueil qui résonnent au détour des ruelles ou surla place du marché. Pour l’étranger comme pour lenatif de l’oasis. A Figuig, on salue comme on sourit.Et l’on sourit tout le temps. Pourtant, la situation dela ville ne se prête guère aux démonstrations dejoie. L’eau se fait rare, le désert gagne. Les jeunes,désir d’Occident, caressent l’espoir de partir.Une palmeraie désertée, des ksour en ruine, unpatrimoine dégradé. Figuig, une vieille légendetombée dans l’oubli ? Si les Figuiguis baissent lesbras, à quoi ressemblera demain l’oasis ?Alors, malgré les obstacles, Figuig se veut bel etbien debout. Fière. A l’heure de la standardisationdes cultures, quand traditions riment trop souventavec folklore, cette perle du sud-est marocainaffirme ses particularités. L’atout de Figuig est biensa solidarité sans faille. Du simple geste amical auxdons de nourriture pour les nomades, là-bas, onoffre plus que l’on ne possède. Figuig, c’est avanttout une seule et même famille qui se serre lescoudes pour faire face à un destin aride.

« Salam Aleikoum … Soyez les bienvenus ! »

DD«Innova» Tours, n° 14

Hors-série Sésame juillet 2007 Etudiants en deuxième année

de journalisme,Institut universitaire de

technologie de Tours,29 rue du Pont-volant 37000 Tours

Tél. : 02 47 36 75 63ISSN n°0291-4506

Directeur de la publication :Claudine Ducol

Coordination : Hélène Lafarie,Olivier Sanmartin,

François Simon.Rédaction, secrétariat

de rédaction, maquette etphotos : Julien Billy, RomainBrusc, Emilie Cailleau, LucieDorothé, Amandine Dudek,Mélanie Le Beller, Laurence

Mijoin, Lucie Pehlivanian,Nolwenn Roussier,

Caroline ValloisPhoto de couverture :

Nolwenn Roussier Cartographie : Florence Troin

Remerciements : à toute lafamille Messaoudi-Duquenne

pour son hospitalité et sa disponibilité

Imprimé sur papier recyclé par Alinea 36, Châteauroux.

Tanger

RabatCasablanca

Marrakech

Fes

Figuig

Oran

Oujda

BecharBeni Ounif

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DU CARREFOUR À L’ENCLAVE Ancien carrefour commercial, Figuigétouffe depuis la fermeture de lafrontière qui la sépare de l’Algérie.Retour sur deux siècles d’histoire…p. 11

AMES DE FEMMESElles représentent les deux-tiers de la populationTraditionnelles ou modernes,les femmes incarnent l’espritde Figuig dans toute sadiversité . pp. 12 à14

MIEUX VAUT PRÉVENIR...Peu de médecins et d’infrastructures hospitalières :la prise en charge sanitaire reste unproblème majeur dans la palmeraie.Des démarches préventivespermettent d’éviter le pire…p.19

IL FAUT BIENQUE JEUNESSESE CASSE

Une ville à l’écart detout, peu de loisirs,poids des traditions :les jeunes rêvent deprendre le large.Etudier, trouver dutravail, se divertir, breffaire et vivre sa vie…L’ émigration est-elleinéluctable? pp. 22-24

FIGUIG, UNE FRONTIÈRE,QUEL HORIZON ? Une palmeraie perdue dansl’extrême orient marocain. Unepalmeraie qui se bat pour sa survie :ressources en eau limitées,émigration... Face aux difficultés, lesFiguiguis s’organisent. pp. 4 à 10

KSOUR D’OMBRE ET DE LUMIÈREBalade dans le dédale des ksour deFiguig, à la découverte des ruelles àsabas et des maisons en terre crue.pp. 15 à18

LE CHEMIN DESÉCOLIERSLes espoirs des Figuiguisreposentsur les nouvellesgénérations.Tous les enfants vontà l’école. Pour rêver et espérer un avenirmeilleur… pp.20-21

PRATIQUEVous venez d’atterrir à Oujda,à 400 km de votre destination,Figuig. Bus, voiture ou taxi :vous y serez (peut-être !) dans six heures ! pp.25 à 27

Figuig

sommaire

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dossier

FIGUIG,vers quels horizons ?

Zenaga, l’un des sept ksour de Figuig, émerge d’une forêt de 140 000 palmiers. Laligne de crête délimite la frontière avec l’Algérie.

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Loin de Marrakech et de Casablanca,un autre Maroc. A lafrontière algérienne,l’oasis de Figuig survittant bien que mal,grâce à la solidarité de ses habitants et àl’apport de ses émigrés.Un tourisme maîtrisé,la promotion del’artisanat et la relance de l’agriculture portentaujourd’hui les espoirsde la population.

A ux portes du désert,niché au cœur de l’Atlassaharien, Figuig. Uneoasis aux confins del’Est marocain, où

s’étendent à perte de vue les pal-miers dattiers. Trois kilomètres sépa-rent cette ville de quelque 13 000âmes de l’Algérie. Ici pas de feurouge : la charrette tirée par un âneet la bicyclette sont les principauxmoyens de locomotion. Aucunegoutte de pluie durant l’été depuissept ans, les relevés pluviométriquesdépassent rarement les 130 milli-mètres annuels. Le climat est aride,l’air sec, la lumière intense sublime

els horizons ?dossier

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les ocres des habitations en terre crue.Mais ce décor de carte postale mas-que une réalité bien moins idyllique.« Les oasis agonisent, s’inquièteBrahim Bahou, chargé de la coopé-ration à la municipalité, 4% des pal-miers disparaissent chaque année. »La gestion des ressources en eau estau coeur des préoccupations des agri-culteurs. L’oasis fonctionne selon unsystème traditionnel d’irrigation : lesfoggaras. Des canaux souterrainscreusés à une quinzaine de mètresde profondeur, conduisent l’eaujusqu’à de grands bassins collectifs,il y en a 200 à Figuig. Un réseaucomplexe de canalisations, lességuias, irriguent les parcelles. Laquantité d’eau disponible pour cha-que jardin est établie grâce à uneméthode séculaire. Aujourd’hui, cemode de gestion perdure, mais lessources se tarissent. Pluies rares,pompage excessif et consomma-tion domestique épuisent les réser-ves hydriques. « Chacun a sonpuits. C’est de là que vient le dan-ger. Il faut centraliser le systèmed’irrigation », prévient Aziz Ziani,responsable de l’association Acaf(Association de coopération agri-cole de Figuig). Pour ce spécialiste,la centralisation permettrait unmeilleur partage de l’eau et résou-drait les problèmes de salinité. Eneffet, avec les forages, le selremonte en surface et stérilise lessols cultivables.

UN FLÉAU, LE BAYOUDLa maladie du bayoud affecte lespalmiers. Ce champignon se propagepar les outils ou l’eau chaude desforages et provoque le dépérissementrapide des arbres (variable de quel-ques semaines à plusieurs mois). Laseule solution envisagée à ce jourconsiste à planter cinq pieds pourcompenser la perte d’un arbre. Unprojet qui consiste à semer des plantscultivés in vitro résistants à la mala-

die est en cours : l’Etat marocain enproduit et en distribue 500 par an àFiguig. Trop peu pour l’Acaf, qui enréclame trois fois plus. Protéger lapalmeraie est devenu l’un des prin-cipaux enjeux. Loin devant les cul-tures céréalières et fourragères (blé,orge, luzerne), maraîchères (pom-mes de terre, courgettes, tomates) etfruitières (amandes, grenades, oli-ves), le palmier procure l’essentieldes ressources pour les agriculteurs,avec 3 600 tonnes de dattes par an.La fierté locale, c’est l’Aziza Bouzid,une variété réputée pour ses quali-tés gustatives et sa conservation.Face à la fragilité du milieu naturel,le développement de l’agriculturepasse par l’extension des surfacescultivées à l’extérieur de la palme-raie et par l’utilisation de techniques

d’irrigation plus économes (goutte-à-goutte). Figuig veut également pro-mouvoir des produits de qualité.Si les ressources en eau suffisent àpeine à répondre aux besoins agri-coles et domestiques, comment ima-giner un avenir touristique à Figuig ?Depuis la fermeture de la frontièreen 1994, la ville est un cul-de-sac.Une route unique dessert l’oasis,assurant la liaison avec Bouarfa, lechef-lieu de la province de Figuig,à une centaine de kilomètres.L’aéroport le plus proche est à Oujda,à 360 kilomètres ; seul un serviced’autocars relie les deux villes. Pourl’heure, les capacités d’accueil res-tent limitées : deux hôtels de vingtet vingt-quatre lits, dont l’un auconfort sommaire, un camping dequinze emplacements et un système

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En 1994, la fermeturede la frontièreinterdit les échangesentre l’Algérie et laprovince marocainede l’Oriental. Lecommerce parallèleprend alors le relais.Aujourd’hui, lacontrebande procureune source de revenupour ceux quiassurent un traficquotidien entre lesdeux pays.Subventionnés enAlgérie, essence,gasoil, farine ou laiten poudre sontacheminés vers les

zones frontalièresmarocaines . Jeans et chaussuresempruntent, quantà eux, le chemininverse. A dos d’âne,la nuit, à travers les pistesmontagneuses, les

contrebandiersachètent leurpassage d’un pays à l’autre. Unealternative pourl’économie de larégion, handicapéepar son enclavementet la rupture deséchanges avec sonvoisin algérien.

LE REVERS DE LA FRONTIÈRE

Comme tous les mardismatins, des marchandsvenus de loin, d’Oujda ou de Bouarfa,approvisionnent Figuig.

La répartition de l’eaurépond à des règles précises.Chronomètre en main, lesraïfi mesure l’eau qui vavers les bassins collectifs.

Depuis son apparition dansles années 60, la maladie du bayoud a détruit plus de15 millions de palmiersen Algérie et au Maroc.

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de chambres d’hôtes tout juste nais-sant. Pour pallier ce manque d’infra-structures, les projets fleurissent. Onparle même d’un complexe de 6 000lits conçu par une société espagnole.Une perspective qui suscite quelquesréticences de la part de la municipa-lité. « J’ai vu Ouarzazate etMarrakech il y a vingt ans, etaujourd’hui. Le tourisme de massen’a pas que des retombées bénéfi-

ques au niveau local », soutient AmarAbbou, premier adjoint. Dégradationde l’environnement, déséquilibressociaux, consommation excessive del’eau, autant de dérives que la villecherche à éviter en misant sur lesspécificités locales : patrimoine, arti-sanat, tradition de l’accueil. Plutôtqu’un tourisme débridé, c’est l’idéed’un tourisme durable et raisonné,reposant sur la participation des habi-

tants, qui fait son che-min. Afin de permettreun partage équitable dela manne touristique,l’association montpel-liéraine Liens France(Lieux d’initiative etd’échanges nord-sud),en partenariat avec lamunicipalité, envisagede transformer enchambres d’hôtes unevingtaine de maisonsde familles démunies.Liens France forme

dans le même temps des jeunes dupays aux métiers du tourisme. Untour opérateur d’Oujda serait prêt àfaire étape dans l’oasis. Mais pouraccueillir un car entier, il faudraitdoubler les possibilités d’héberge-ment de l’hôtel Figuig, le plus coquetdes deux établissements de la ville.Or, l’argent manque. « Figuig est uneville oubliée du gouvernement. Tantque la frontière sera fermée, il sera

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La population de Figuig compte denombreux retraités. Les plus de 60ans représentent 14% de lapopulation, contre 5% pour le Marocdans son ensemble.

L’agriculture de la palmeraies’organise sur trois étages : céréaleset légumes ;au-dessus, les arbres fruitiers et,pour couronner le tout, les palmiers.

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Depuis deux ans,le ksar deLoudaghir, aunord de Figuig,fait l’objetd’attentionsparticulières.La municipalité

s’est rapprochéede l’universitéParis 7 Diderot,de l’écoled’architectureParis-Val-de-Seine et duConseil généralde Seine-Saint-Denis pour lancerun projet derevalorisation deson patrimoinearchitectural.Dans le cadre deson diplômed’architecture,Hervé Micauds’est installé à

Figuig pendantquatre mois, poury mener uneétude sur laréhabilitation duquartier juif, lemellah. Construitaux environs duXIe siècle, cequartier a étéhabité jusqu’à la fin des années50, quand lesdernièresfamilles juivessont parties.Le pari consiste à revitaliser le Figuigtraditionnel viaun quartier« test » pour enrépercuter leseffets positifs surl’ensemble duksar. « Le mellahest un symbole

de la richessefiguiguie.Il illustre lacohabitation quiexistait entre les différentescommunautés de l’oasis »,souligne le jeuneFrançais quisouhaiterait, àterme, ouvrir unmusée dans ceksar. Son travailest une desinitiatives quipermettrait dedévelopper untourismemaîtrisé àLoudaghir, etplus largementà Figuig.L’avancementdu projetdépendra desfinancements .

LE PROJET DE RÉHABILITATIONDU QUARTIER JUIF

difficile de développer des activi-tés », explique Mohamed Berriane,géographe et doyen de la faculté desciences humaines de Rabat. La solu-tion viendra-t-elle des émigrés figui-guis ? Qu’ils vivent à l’étranger, ouqu’ils soient installés dans les gran-des villes du Maroc, leur apport està la fois essentiel et difficilementquantifiable. Les pensions des retrai-tés font vivre de nombreuses famil-les. De surcroît, les émigrés fournis-sent une aide décisive dans lesdomaines de la santé, de l’entretiendes ksour et de la scolarisation, en

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soutenant les associations. Finan-cièrement, mais aussi grâce à leurscompétences et à leurs réseaux.« L’oasis ne subsiste que par l’émi-gration. Mais certains projets indi-viduels ne respectent plus les tradi-tions, ajoute Mohamed Berriane.L’émigré veut parfois montrer lessignes de sa réussite en construisantde grandes maisons, dotées d’équi-pements modernes, souvent incom-patibles avec le climat et les ressour-ces en eau de Figuig. » D’autant plusque la population double durantl’été : les premiers touristes sont lesémigrés originaires de Figuig. Parailleurs, certains achètent des ter-rains, privilégiant la valeur sentimen-tale au potentiel économique. Cetinvestissement affectif n’est pas tou-jours rationnel. Toutefois, des éta-blissements fonctionnent uniquementgrâce aux dons de ceux que l’on sur-nomme les « bienfaiteurs ». Mais lamanne se raréfie avec le durcisse-ment des politiques migratoires enEurope : moins d’émigrés, moins dedevises pour les familles restées aupays. Construit en 1981 en marge del’hôpital public, la clinique du

Croissant-Rouge est un exemple del’implication des Figuiguis qui sontpartis. Ici, la construction, les salai-res du personnel et les médicamentssont entièrement pris en charge parles émigrés. L’équipement et leseffectifs dépendent des fluctuationsde l’aide : d’un médecin et cinq infir-mières il y a quelques années,l’équipe médicale s’est réduite à deuxprofessionnels. Si le tissu associatiftente de se substituer au rôle de l’Etat,il ne suffira pas à assurer la péren-nité de l’oasis. Les collectivités onteu tendance à diminuer, voire sup-primer certaines subventions néces-saires aux associations. Aujourd’hui,Figuig est à l’heure des choix.S’appuyer uniquement sur la solida-rité peut conduire au repli sur soi.Mais s’en remettre aux investisseursextérieurs et abdiquer son pouvoirde décision, c’est prendre un autrerisque : perdre son âme. n

dossier

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Ils l’appellent la twiza(entraide en berbère).A en croire lesanciens, cettesolidarité seraitparticulièrementdéveloppée à Figuig.C’est au moment del’indépendance duMaroc, en 1956,que le mouvementassociatif figuigui sedéveloppe. Lorsquel’Etat se met enplace, des carencesapparaissent dans de

nombreux domaines.Les habitantsprennent alors lerelais en serassemblant au seind’associations. On encompte aujourd’huiune centaine,œuvrant dans tousles domaines de lavie locale : jeunesse,agriculture, artisanat,éducation, santé ouculture …Parmi elles,l’association Ada

propose des activitéspour les jeunes, dusoutien scolaire à labibliothèque enpassant par le sportou l’accès à internet.Forums thématiques,débats : le local, estdevenu le QG desadolescents aprèsleur journée d’école.Ada assureégalement unprogrammed’alphabétisation desadultes.

LES ASSOCIATIONS TISSENT LEUR TOILE

Le tissage est une tradition àFiguig. L’association La femme et l’enfant aide des famillespauvres à travers un projet dedéveloppement artisanal.

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histoire

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Figuig s’est développée à partirdu XIe siècle. Carrefour carava-nier sur les routes du commerce

transsaharien, l’oasis était égalementune étape pour les pèlerins se ren-dant à La Mecque. Avec la coloni-sation, au XIXe siècle, la régiondevient une zone frontière.En soutenant l’émir Abd El-Kader,qui mène l’insurrection contre la pré-sence française en Algérie dès lesannées 1830, les habitants de Figuigs’attirent les foudres de la France.Les tensions s’accentuent au débutdu XXe siècle alors que les Figuiguiscontestent l’avancée de l’armée fran-çaise. En 1903, l’oasis subit un bom-bardement puis un nouveau tracé dela frontière, lui faisant perdre pro-gressivement ses territoires de l’est,autour du ksar de Beni-Ounif.La construction d’un chemin de fercôté algérien la marginalise par rap-port aux grandes voies de circula-tion. La domination française devientinéluctable, elle est officialisée en1912 avec la signature du protecto-rat. Loin de s’apaiser avec les indé-pendances du Maroc (1956) et del’Algérie (1962), la situation se

dégrade pour Figuig, tandis que larivalité entre les deux pays s’accen-tue. Un conflit éclate dès 1963 avecla guerre des Sables qui a pour objetle tracé de la frontière saharienne.Figuig se retrouve prise au piège,elle est le théâtre des principauxcombats.

AMPUTÉE DE SES TERRESLa fermeture de la frontière qui s’en-suit bouleverse une nouvelle foisl’organisation socio-économique del’oasis. Les paysans sont obligésd’obtenir des laissez-passer pour cul-tiver leurs terres du côté algérien. Larupture est totale au milieu desannées 1970 avec le déclenchementdu conflit du Sahara occidental.L’Algérie soutient alors les velléitésd’indépendance des Saharaouis surl’ancienne colonie espagnole,annexée par le Maroc. Figuig seretrouve totalement enclavée tandisque 45 000 Marocains sont expul-sés d’Algérie.Avec l’apaisement des relationsdiplomatiques et les perspectivesd’intégration régionale (création del’Union du Maghreb arabe en 1989),

la frontière est rouverte en 1986.Figuig redevient un lieu de passage.Un attentat perpétré à Marrakech en1994 met fin à l’accalmie. Le Marocaccuse les services secrets de sonvoisin, expulse ses ressortissants etimpose des visas. En représailles,l’Algérie décide de fermer à nou-veau la frontière. Depuis, hormis lacontrebande, les liens sont rompusentre Figuig et l’Algérie. L’oasis seretrouve amputée de ses terres, desfamilles sont séparées. Une situationqui hypothèque lourdement les pos-sibilités de développement d’unerégion historiquement vouée au com-merce et aux échanges.La frontière reste un enjeu central etl’objet de revendications. « Notreterre et notre terroir se trouvent dansun autre pays », souligne AmarAbbou, premier adjoint au maire.Dans le cadre de la détente politiqueamorcée au Maroc au début desannées 2000, l’association Equité etréparations réclame des indemnitéspour la perte des terres (elle estimeà 130 000 le nombre de palmiers dat-tiers perdus) et demande la renégo-ciation du tracé de la frontière. n

Du carrefour à l’enclaveOubliée du Maroc, prise au piège des rivalités avec l’Algérie, l’oasis, qui fut unlieu de passage tout au long de son histoire, est aujourd’hui un cul-de-sac.

Fermée pour lapremière fois dans les années 60,la frontière cristallisetensions etmalentendus entre leMaroc et l’Algérie.Depuis 1994, plusd’échanges officielsentre Figuig etBeni-Ounif.

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Ames de femmesportraits

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Cœur du foyer,pas toujours maîtresses de leur destin,les femmes de Figuigreprésentent les deuxtiers de la population.Leur discrétion les rendpresque insaisissables.Rencontrées au détourd’une ruelle ou sur laplace du marché, ellesse confient. Parfois aveccrainte, mais toujoursavec le sourire.

Une toute petite femme émerged’un amas de couvertures.Péniblement, elle s’assoit en

tailleur. Aïcha, 110 ans, ouvre sesgrands yeux noirs et commence àraconter son enfance... Avec ses frè-res, elle emmène paître les moutons,de l’aube à midi. Pour déjeuner, ilsmangent des dattes et boivent du lait.L’après-midi, elle joue. Mariée à 13ans à un homme choisi par sesparents, elle devient mère de deuxfilles. Analphabète, elle ne sait quetisser. De sa voix fluette, Aïcha ditêtre fière d’avoir élevé seule ses troispetites-filles quand leur mère est

morte, trop tôt. Aujourd’hui, les rôlessont inversés. Sa famille éprouvebeaucoup de respect à son égard etla visite régulièrement. Obligée derester au lit parce que ses pieds ne laportent plus, la très vieille femmeprie toute la journée. Son visage porteles marques du temps. Des rides pro-fondes expriment cette longue vie,heureuse et pleine de dévotion. Unevie bouleversée par la présence fran-çaise au Maroc. Aïcha se souvientde la peur qu’elle a ressentie lors desbombardements de Figuig en 1903.Dès qu’elle entendait des tirs, ellerentrait se cacher. Les mains serréesl’une contre l’autre, elle écoute sesproches raconter des anecdotes surleur passé commun. Le regard apaiséet bienveillant, Aïcha garde dans soncœur toutes ces années de bonheuret espère en vivre encore. Inch Allah.

QUAND LES MENTALITÉS CHANGENT...

Naïma, à gauche, secrétairede l’association, soutient lesfemmes dans leur quotidien

AÏCHA,inch Allah

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HABIBA,tisser pour survivre

Aider les femmes. Rompre avec lamonotonie de leur vie.Valoriser leursavoir-faire lors d’expositions, etpourquoi pas, envisager pour ellesune activité salariée. L’associationpour la femme et l’enfant a de vraiesambitions pour ses 160 membres.Agir dans tous les domaines :économique, social, culturel,sanitaire… « Les ateliers, les réunions,sont aussi le moyen de faire sortirles femmes de chez elles et de faireévoluer les mentalités », expliqueNaïma, secrétaire de l’association.

Il y a sept ans, la première réunion abousculé les habitudes. Les toutesnouvelles adhérentes avaient hontede se rassembler dans le petit locald’exposition sur la place principale,sous le regard des hommes assis aucafé tout proche.Aujourd’hui,la seuleassociation de la ville dont le bureauest exclusivement féminin a prouvéson efficacité et réalise, peu à peu,toutes ses promesses.L’opinion des hommes a évolué.S’ilsn’avaient pas reconnu les bénéficesapportés par l’association, celle-ci

n’existerait peut-être plus. « Lechangement a été lent.Les hommescraignaient que cette nouveauté necrée des problèmes au sein de leurfamille », raconte Naïma.Le défi actuel : la valorisation dupatrimoine. En mai, Fouad Lahbib,chercheur à l’Institut royal de laculture amazighe (berbère) de Rabat,a formé les tisseuses à la création detapis typiques du ksar de Zenaga.Unatelier de cinq jours seulement,maisqui doit aboutir à un projet plusambitieux. Fatima, la présidente de

QUAND LES MENTALITÉS CHANGENT...

A ssise par terre dans le patio de sa maison,Habiba tisse un tapis. Tout près d’elle, samère peigne la laine et la roule contre son

tibia. Le tissage, « ennuyeux et fatigant », est laseule activité qui lui assure une rémunération.Cette femme seule de 42 ans raconte « la vie trèssimple » qu’elle a toujours menée dans le quar-tier de Zenaga. Une vie qui ne l’empêche ni desourire ni de plaisanter. Mariée par sa mère, justeavant sa majorité, à un homme de dix ans sonaîné, elle divorce une année plus tard. Habiba nel’aimait pas. Pour son unique fils, elle veut la plusgrande liberté. Elle lui paie des études de géogra-phie à l’université d’Oujda pour qu’il devienneprofesseur. « Bien sûr, les 150 dirhams que jegagne par tapis ne suffisent pas, alors mon frèrem’aide un peu. » Depuis la mort de son père, elletisse pour éviter la misère. La journée, elle doitaussi aller au marché acheter quelques légumes,les cuisiner, s’occuper de sa maison, de sa mère…C’est pour cela qu’elle met une dizaine de joursà réaliser un tapis. Malgré les difficultés, sous sonvoile noir, elle ne laisse paraître que sa joie devivre. Toujours optimiste, elle n’hésite pas à par-ler du jour où sa vie changera. Le premier de sessouhaits est de se remarier. « J’attends l'hommequi passera par hasard et deviendra mon mari ! »

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L es yeux noirs soulignés de khôl, Leila circule sansvoile dans les rues de Figuig. Dans cette petite oasis,c’est presque une rebelle. « Je veux me sentir libre »,

explique-t-elle. Fonctionnaire, elle vit avec sa mère et ses soeurs dansune belle maison de Figuig. À l’évocation de sa situa-tion actuelle, son visage empreint de douceur se crispe. Ses mots sont virulents. « Ici, tu ne peux pas

mettre ta djellaba sans un pull en dessous. Tu ne peuxpas aller au café. Tu ne peux pas avoir de relations avecles garçons. » Malgré tout, Leila parle aux hommes dansla rue, porte sa djellaba sans pull quand il fait chaud,mais la resserre au cou quand elle croise quelqu’un. Sanscesse, l’image qu’elle renvoie l’obsède. Déchirée entreson désir de liberté et le poids de la tradition, son exis-tence est une contradiction perpétuelle. Leila rêve departir. Changer sa vie. L’été, quand les femmes émigréesreviennent, son envie d’ailleurs s’accentue. Comme unejeune fille qui tombe amoureuse, elle évoque sa rencon-tre avec un Français sur internet. Ils voudraient se voir,en vrai, mais Leila hésite. Sa famille n’acceptera jamais.Figuiguienne de naissance, elle a été fiancée plusieursfois par sa mère. Elle a refusé d’épouser ces hommes :le mariage, c’est par amour. Sa vie de femme à Figuigcontraste avec son envie. A presque 40 ans, elle est heu-reuse, mais espère, un jour, pouvoir sourire sanscontrainte. Ailleurs. n

Dans la palmeraie, au détour d’une rigole, un lavoir improvisé.Accroupie dans la mousse, avec deux de ses filles, Latifa fait salessive. « Je rêve d’une machine à laver », avoue la mère de famille

avec un grand sourire. Tous les jours, elle apporte sa brouette de linge salepour laver les vêtements usés de son mari et de ses neuf enfants. En 1990,cette femme a quitté Figuig pour suivre son époux dans sa quête de tra-vail. « Au Liban, la vie était plus agréable. L’alimentation moins chère,l’eau et l’électricité gratuites, les hôpitaux toujours ouverts…» Une épo-que heureuse qui s’est achevée au bout de neuf ans. Elle regrette d’êtrerevenue dans l’oasis. « C’est mon mari qui a voulu rentrer. Il voulait éle-ver nos enfants ici pour qu’ils apprennent l’arabe et le français. » Rinçantles petits pantalons de ses chérubins, Latifa raconte qu’elle n’est jamaisallée à l’école. Elle a seulement appris le tricot. En scolarisant tous sesenfants, elle espère pour eux un avenir meilleur.

LATIFA,une vie sans choix

l’association, veut à moyen termeproposer une formation continue detissage. Elle souhaite créer unecoopérative, de façon à mettre encommun le matériel et rassembler lesfemmes aujourd’hui isolées.« Il faut poursuivre sur notre lancée. »Une trentaine de femmes recréent desmotifs traditionnels,oubliés depuis troisgénérations au profit de ceux des tapisbon marché d’Orient. Elles dessinent,tissent et colorent avec des pigmentsvégétaux. Elles espèrent ainsi s’inscriredans une logique de commerceéquitable, grâce à la vente de « vrais »tapis traditionnels.

LEILA,désir de liberté

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12-14FemmesBAT CD 2/07/07 16:10 Page 4

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Ksour d’ombre et de lumière

Un dédale de passages couverts, les ruelles à sabas : pour l’étranger,les ksour traditionnels de Figuig, en terre crue, sont un labyrinthe obscuroù seuls quelques puits de lumière permettent de se repérer. Cemaillage organise la circulation à l’intérieur du quartier. Les impassesmènent aux maisons dont la porte seule révèle l’existence.

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Pour préserver l’intimitéfamiliale, les maisons n’ontpas de fenêtres sur lespassages. Seule la pièceréservée aux invités(tanesrit) dont l’accès peutse faire par un escalierindépendant ouvre sur l’extérieur.Le patio(saray), est le coeur de la maison. C’est un puitsde lumière, un espace devie, de détente et d’accueildes invités pendant lesfêtes, de jeu pour lesenfants… Les différentespièces de la maisons’organisent tout autour.Sur la terrasse, une galeriecouverte orientée au sudabrite, au fil des saisons, lesactivités: le filage de lalaine, le tissage, le séchage

des dattes… Ces terrasses, après les mursaveugles des ruellesobscures, s’offrent commeune récompense. Ellesouvrent sur l’horizon, le cielet la lumière.Les soirs de chaleur, la

famille peut y dormir.Comme ellescommuniquent entre elles,une vie sociale s’y organise.Aux époques de résistance,elles permettaient auxopposants d’échapper auxforces de représsion.

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Les briques (adobes) deterre crue, faites d’argile etd’eau, sont séchées ausoleil. Un matériau adaptéau climat désertique

puisqu’il garde la fraîcheurl’été et la chaleur l’hiver.Les plafonds sont faits detroncs et d’écailles depalmier (kaernafs) ou debranches de laurier,suivant la richesse deshabitants.Zenaga, dont une desportes d’entrée vient d’êtrerestaurée, est le ksar leplus peuplé de l’oasis. 80%

des maisons sont encorehabitées. Mais pourcombien de temps ? Le savoir-faire se perd.Une ONG italienne (Africa 70) a formé desjeunes aux techniques de constructiontraditionnelles.Des projets deréhabilitation, de tourismesolidaire avec des maisonsd’hôte existent. Maisl’argent du développementmanque cruellement.

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Au détour des ruelles àsabas, quelques arcadesélégantes surprennent :c’est la jema’a, désignantà la fois l’assemblée desanciens qui prenaient lesdécisions politiques du ksaret le lieu où ils seréunissaient. Le ksar s’ouvrepar des chemins bordés demurs en terre crue sur lapalmeraie. Dans l’espaceainsi retrouvé, la viecollective s’organise : ruecommerçante, servicespublics qui portent encore

les traces de la colonisationfrançaise, lieux sacréscomme les tombes demarabouts (saints).La taille et l’architecture du mausolée varient enfonction de la popularité du Saint.La renommée de SidiMalak, dont le mausolée estseulement peint, ne doitguère aller au delà des mursdu ksar de Loudaghir…

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SANTÉ

Les médicaments manquent, le matériel est obsolète. Mais l’état sanitairede la population figuiguie est satisfaisant. Grâce à la prévention.

Les maladies parasitaires et les can-cers sont les deux bêtes noires dudocteur Abdelhak. « Manque d’hy-giène alimentaire », diagnostique-t-il. En poste à la clinique du Croissant-Rouge depuis 26 ans, ce médecingénéraliste a assisté à la disparitiondu trachome (forme de conjonctivitepouvant entraîner la cécité) et au reculde la tuberculose. Il relève une amé-lioration de l’état sanitaire de la popu-lation. Figuig affiche aujourd’hui uneespérance de vie de 70 ans, supé-rieure à la moyenne nationale. Lacrise économique cache une consé-quence positive : pas de pollutionindustrielle, ni d’accidents du travaildans la région.Menées par l’Etat marocain, les cam-pagnes de prévention (ophtalmolo-gie et hygiène dentaire) ont portéleurs fruits. Une action renforcée parle soutien des émigrés et l’aide despartenaires étrangers. En 2005, laville de Stains (Seine-Saint-Denis)offrait un cabinet dentaire auCroissant-Rouge. Rudimentaire maisfonctionnel. Le dentiste ne consulteque deux fois par semaine.

RECOURS AUX SOINSTRADITIONNELSUn exemple symptomatique du sys-tème de santé précaire de Figuig.Laissée pour compte, la ville, quirecense six généralistes, couvre sesbesoins de santé grâce aux aides desassociations et des émigrés. « Nousmanquons de tous les médicaments,de l’aspirine jusqu’aux médicamentsd’urgence », confie le docteurAbdelhak. Il existe un hôpital de 120lits à Figuig. Pas de spécialiste, qua-

tre médecins s’occupent des casbénins. L’établissement le plus pro-che, équipé pour des opérations com-plexes, n’est distant que de sept kilo-mètres. Seul problème : il est situé àBeni-Ounif, en Algérie. Depuis lafermeture de la frontière, impossibled’y accéder. L’hôpital de Bouarfa, àune centaine de kilomètres, a pris lerelais. Pas de transport en hélicop-tère. Le trajet s’effectue à bord del’une des six ambulances offertes parla Belgique, la France, le Japon et leCroissant-Rouge. De plus, pas depersonnel médical pour accompa-gner les accouchements. Des assis-tantes sont recrutées dans la familleou le voisinage. Le suivi des nour-rissons est assuré par la clinique.Beaucoup d’habitants de Figuig s’enremettent aux médecines tradition-

nelles. En cas de crise d’épilepsie,priorité aux exorcistes. L’hôpital est le dernier recours si lesrebouteux locaux n’ont pas réussi àcalmer la douleur. « Un ancien com-merçant s’est reconverti en spécia-liste des plantes. Il a fait fortune »,raconte le docteur Abdelhak, quis’avoue avec regret impuissant faceaux croyances ancestrales. Si l’onpeut parfois soigner par les plantes,attention aussi à l’intoxication. n

Mieux vaut prévenir...

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L’hôpital public de Figuig compte quatre généralistes mais aucun spécialiste.A la clinique du Croissant-Rouge,

le docteur Abdelhak est, lui, l’unique médecin en poste .

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«Salam Aleikoum ! ». Les voixdes enfants résonnent dansla classe. Il est 8 heures, les

petits de maternelle chantent pouraccueillir leur maîtresse. Dans cetteancienne habitation, l’école a prisses quartiers. Les élèves de 3 à 5 anss’accomodent des murs gris et dusol poussiéreux. Ils sont 40, assisderrière leurs pupitres. Face à eux,un tableau décrépi. Rien dans lescasiers. Des cartons de lessive enguise de guirlande pendent du pla-fond. Quelques vieux Lego traînentdans des fonds de bidons. Au milieude ce décor sommaire, la maîtresse,Karima, commence la leçon. Au pro-gramme ce matin, écriture. Chacunreproduit sur son ardoise, plus oumoins soigneusement, la lettre arabedessinée au tableau. L’institutricepasse dans les rangs pour vérifier le

travail. Blotti dans un coin, un enfanttrisomique semble un peu perdu, nesachant que faire de sa craie. La maî-tresse ne peut lui accorder plus detemps. Les plus grands passent enpremier : ils affronteront le CP l’anprochain. Ce sont les seuls à avoirleur propre manuel. Dans le fond,deux élèves finissent leur nuit, pen-dant que les filles du premier rangs’agitent. Pour autant, Karima neperd pas patience. Sous son voilenoir et blanc, elle arbore un sourirepermanent.

UNE BONNE RÉPUTATIONMais cette passionnée sait aussi êtrestricte quand il le faut. Sans hausserla voix, juste avec un regard qui forcele respect. C’est ce comportementqui lui vaut d’avoir autant d’élèvesdans sa classe. Les parents du quar-tier ont donné leur accord pour sonaffectation, comme pour chaquenouvelle maîtresse. Ce sont égale-ment eux qui la payent, grâce auxcotisations données, chaque année,pour la maternelle. L’institutrice,comme la plupart de ses consoeursde Figuig, n’est pas mariée et n’apas d’enfants. Karima a remplacé

une amie enseignante qui vient dese fiancer. Le mariage ? Elle a letemps d’y penser. C’est l’heure dela récré. Tous les bambins reposentleur ardoise, pressés de rejoindre leurterrain de jeux : la terrasse exiguëde l’ancienne bâtisse. n

éducation

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Chemindes

écoliers

DANS LE DÉSERT, “ QUA ND ON VEUT ON PEUT ”

Les petits Figuiguis sontbien lotis. Leur ville a letaux de scolarisation le

plus élevé du Maroc.Il avoisine les 100%.

Dès 3 ans, tousoccupent les bancs de

l’école. Reportage dansla classe de maternelle

An-Nasr à Zenaga.

L’association Amicale coopérationFiguig a équipé cinq écolesmaternelles depuis 1995. Sans elle,les enfants seraient encore assis àmême le sol, sur des tapis.

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éducation

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Les Caisses des écoles publiquesexistent depuis 1958 au Maroc.Comment a évolué celle deFiguig ?« Le ministère a encouragé lacréation de ces Caisses pour aiderles écoles primaires. Les moyensn’étaient pas suffisants, beaucoupont donc disparu. Celle de Figuiga survécu grâce à l’investissementdes habitants. Ils financent notrebudget à 60 %. Aujourd’hui, lacaisse contribue à l’éducation des500 enfants des quatre écoles pri-maires de Zenaga. »

70 % de votre budget est consa-cré à l’achat de fournitures sco-laires. Quelles sont vos autresactions ?« Nous proposons du sport, duthéâtre et des randonnées. En juin,nous recensons les besoins desenfants pour la rentrée. Nousavons organisé un forum en marspour faire un état des lieux. Lesparents ont pris conscience des

problèmes liés à l’éducation enprimaire. Le but est aussi d’amé-liorer la qualité de notre service,en nous équipant par exempled’ordinateurs. »

Vous aidez les écoles primaires,qu’en est-il des maternelles ?« Elles ont un statut particulier.Elles ne dépendent pas de l’Etat,les parents d’élèves s’en occu-pent. L’association Amicale coo-pération Figuig les a équipées enmatériel en 1995. Depuis elle s’in-vestit moins. Les écoles mater-nelles sont une spécificité deFiguig. Tous les enfants y sontscolarisés et ce sont les pépiniè-res des écoles primaires. »

DES SOUS POUR LES BOUTS D’CHOUQuestions à Mohammed Hammou,président de la Caisse des écoles publiques.

Un bloc de béton rose au milieudes sables. Sur les murs, desdessins aux couleurs vives. Pour lerejoindre, les enfants de nomadesmarchent près de deux heures.C’est leur école, située à plusieurskilomètres du premier ksar deFiguig. L’école du désert. A 7 ans,c’est la première fois que lesenfants tiennent un stylo. Chezeux, ils devront faire leurs devoirssans électricité et par terre. Ikramtravaille à l’école du désert depuis5 ans. C’est son premier posted’institutrice. « Je n’ai pas choisi

d’enseigner ici, mais le sourire desenfants est la plus belle desrécompenses. Mon travail estvalorisé », déclare-t-elletimidement. Et pour cause.Les bédouins sont, pour laplupart, analphabètes ets’intéressent peu à lascolarisation de leurs enfants.Pauvres, ils n’ont souvent pas lesmoyens d’acheter les fournitures.Ikram ne voit quasiment jamaisces parents, même si elle les aidequand elle peut. Des personnes,attachées à l’éducation desnomades, participent égalementen donnant des vêtements.

“ QUA ND ON VEUT ON PEUT ” Pour la pharmacie, il faudra enrevanche attendre un peu. « Si unenfant se blesse, il n’y a rien àfaire. Et l’hôpital est trop loin »,déplore Ikram. Mais il en faudraitplus pour décourager les petitsnomades. Ils aiment venir dansleur classe aux murs jaunes. Letravail y est moins dur qu’à lamaison. « Ils sont attirés par lerepas de midi », affirme la jeuneinstitutrice en souriant. Manger àsa faim et avoir l’espoir de ne pasmener la même vie que sesparents est plus fort que tout.« Quand on veut, on peut », lit-onsur le mur de l’école.

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enquête

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Il faut bienque jeunesse

se casse!

A Figuig, pas de cinémani de discothèque.

Difficile pour un jeunede fuir la routine.

Filles et garçonstentent de s’évader

chacun à leur manière.Avec en tête, toujours

la même question :partir ou rester ?

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enquête

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Entre garçons et filles, une barrière invisible.Alors que les premiers restent en bande dans les locaux de l’association Ada,les secondes restent à l’écart, sous le poids

des traditions familiales.

École, asso, dodo. Tel est le quo-tidien de Mohamed, jeuneFiguigui de 23 ans. Chaque jour,

c’est la même rengaine. Levé à 6 h30, l’étudiant en informatique enfileson bas de jogging, attrape son blou-son en jean et saute dans ses baskets.Le voilà prêt à affronter ses huit heu-res de cours. Ensuite, direction lelocal de l’association Ada (1), situéà quelques centaines de mètres deson établissement. Un véritable QGoù il retrouve des amis pour discu-ter. Plutôt introverti, le jeune homme

y a trouvé sa place. Ce passionnéd’ordinateur peut alors s’évader decette routine qu’il subit depuis troplongtemps. Le sentiment deMohamed, tous les jeunes de l’oasisle partagent. « Il n’y a rien à faireici », résume-t-il. Hormis l’école, labibliothèque et l’association, le seullieu de rencontre des jeunes restefinalement la rue. Quand ils n’errentpas les mains dans les poches, ils fontdu vélo ou restent assis à converserdurant des heures, parfois accompa-gnés du son d’une guitare. A Figuig,pas de cinéma, pas de théâtre, etencore moins de discothèque. La pre-mière est à environ 400 kilomètres.

6 000 EUROS POUR ÉMIGRERAlors, ils passent leur temps libre àsurfer sur le Net. Figuig compte denombreux cybercafés, donnant surla rue au rez-de-chaussée des mai-sons. Quelques ordinateurs séparéspar de simples rideaux, pour « chat-ter » de longues heures durant à l’abrides regards indiscrets. Les autres loi-sirs se comptent sur les doigts de lamain : baby-foot, volley, football. Etmieux vaut être motivé au vu des

conditions de jeux. Terrain vaguepour le foot, bétonné pour le volley.Au final, peu de jeunes s’entraînentrégulièrement. Un sur vingt seule-ment s’adonne à un sport de ballon.Tous des hommes.Pour les jeunes filles, la palette d’ac-tivités est encore plus restreinte. « Onne peut pas faire de sport en dehorsdes cours. C’est réservé aux gar-çons », regrette Fatima, pourtant trèsdynamique. La jeune fille au carac-tère bien trempé s’habille d’un sur-vêtement et ajuste soigneusementson voile. Pour cette pétillantelycéenne, pas question non plus desortir trop tard. Sa famille le lui inter-dit. Rachida, plus timide, confirme :« Quand je suis rentrée à 21 heuresd’un forum organisé par l’associa-tion, mes parents n’ont pas appré-cié. » Dans un contexte où le poidsde la famille reste important, les ado-lescentes sont tiraillées entre tradi-tion et modernité. Sara, tout de rosevêtue, est déjà en quête de liberté. Apeine majeure, cette fan de Diam’ss’interroge : « Comment faire pourréaliser notre rêve tout en respectantla tradition ? » Kribii Abdslen,

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enquête

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31 ans, vit désormais en France, àPoitiers. Aujourd’hui restaurateur, ilse souvient de son adolescence pas-sée à Figuig : « Si une fille a uncopain, ses parents ne doivent pas lesavoir. S’ils se promènent ensemble,ça donne une mauvaise image de lafille. » On pourrait alors penser quele mariage est la solution. Maisencore faudrait-il que l’union soitsynonyme de liberté. Ce qui n’a riend’évident, les mariages arrangésétant encore de mise. « Mes parentsm’ont présentée à un étranger. J’aifugué quatre jours. Ils ont réalisé queje n’avais aucune envie de passer mavie à ses côtés », confie une Saravolubile. Difficile dans ces condi-tions de s’épanouir. Leur espace deliberté, les adolescentes le trouventau sein des associations. « Je peux yexprimer mon point de vue et parlersans contraintes », murmure Rachida,encore peu sûre d’elle. En attendant,peut-être, de pouvoir le faire en d’au-tres lieux, et pourquoi pas en France.Comme une envie d’évasion, d’unailleurs prometteur. Certains, commeMohamed, pensent même à l’immi-gration illégale : « On me demandait60 000 dirhams (environ 6 000euros), mais j’ai refusé à cause des

conditions de voyage. Il fallait pas-ser par la Libye et l’Italie pour rejoin-dre la France. Je saisirai la prochaineoccasion, même si le prix est plusélevé. »

« ILS M’EN METTENT PLEIN LA VUE »Chaque été, le retour de ses prochesémigrés en France nourrit l’espoirde fouler un jour le sol de ce pays.« Ils m’en mettent plein la vue, avecleur voiture, leurs vêtements et leurportable dernier cri », reprocheMohammed, envieux. Mais tous lesjeunes ne sont pas aussi déterminés.L’attachement à leur terre, à leurfamille est le plus fort. « Vivre loind’ici me fait peur. Je ne veux pas êtreseule et séparée de mes proches »,appréhende Fatima. Pourtant, cettebrillante élève devra quitter Figuigl’année prochaine. Les sept années

de médecine qui l’attendent se pas-seront à Rabat. En effet, après lelycée, il n’existe qu’un seul établis-sement supérieur dans la ville, uneécole d’informatique. Les jeunessont donc obligés d’aller à Oujda ouailleurs. S’il y avait ce qu’il fallait àFiguig, Fatima resterait volontiers :« Si nous n’étions pas sous pressionde la société, je ne partirais pas. » Etune fois ailleurs, les jeunes tournent-ils définitivement la page ? « Quandles jeunes Figuiguis s’en vont, c’estavec l’espoir de revenir » soupireKribii, nostalgique de son oasisnatale. Un jour peut-être… Lui-même songe à retrouver Figuig, son« petit paradis ».n

(1) Association possédant une salleinformatique et proposant des acti-vités parascolaires.

Kribii (ci-dessous, à droite) a voyagé dans lesgrandes villes marocaines avant de s’installeren France en 2000. Samir (ci-contre), rêve d’undestin similaire : partir étudier en Belgique.

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SS’’yy rreennddrreeTous les chemins nemènent pas à Figuig. Ilfaut d’abord se rendre àOujda, au nord-est duMaroc. En avion, voldirect le samedi depuisl’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle.Ensuite, il vous fautprendre le bus qui se rendà Figuig. Quelquescompagnies (CTM, Mid-Nord et Champion)proposent des navettesdans la journée pour 90dirhams.Attention, pour parcourirles quelque 400 km qui séparent les deuxvilles comptez six bonnesheures de route.

Se déplacerLe meilleur moyen de locomotionsera vos pieds.Prévoyez de bonneschaussures en conséquence.Le moyen de transport privilégié des Figuiguisest le vélo. Il n’existe pas de compagnies de location de cycles officielles,mais vous pouvez toujours tenter d’en emprunter un à quelqu’un.

Pour vous loger à Figuig,deux solutions.

L’hôtel Figuig hôtel, qui comptedix chambres avec, cha-cune, salle d’eau et WC,est ouvert toute l’année.R. N. Figuig Centre (près de la municipalité)Tél. : (0212) 36 89 93 [email protected]

Tarifs : chambre simple : 120 à 200 DH,chambre double : 190 à 320 DH, place supplémentaire : 60 DHPossibilité de camping et de caravaning dans l’enceinte même de l’hôtel.

Les chambres d’hôtesà l’Auberge Oasis Figuig. Trois chambres double (douche et WCprivatifs) sont proposées pour 300 DH par jour en pension complète. Rue Jemaa dans le ksar de Zenaga. Contacter Smail Harkass.

Tél. : (00212) 36 89 92 62,ou (00212) 68 26 38 20. [email protected]

Figuig pratique

Se loger

Se documenterTrois pagesdans leGuide duRoutardMaroc pourFiguig.

Et ce commentairealléchant : « Une chancepour le voyageur quidécouvre ici une oasisauthentique. »

« Comme les arbres qui ont desfeuillages différents, les villesont chacune leur caractère ».

PROVERBE ARABE

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CAFÉS ET RESTAURANT

Le seulrestaurantde Figuigest celui de l’hôtel.

Sa terrasse fait office de café etpropose jus de fruits frais, sodas,cafés ou thés à la menthe avec unevue de Zenaga depuis le jorf(escarpement rocheux). Mais lesmeilleurs endroits pour vousmêler à la population locale sontles sept cafés que compte Figuig.

ÀVOIRu Le charme de Figuig résidedans son architecture en terrecrue, liée à son histoire. Pour l’ap-précier pleinement, promenez-vous dans le dédale de rues àsabas (rues couvertes), ou per-dez-vous dans les méandres dela palmeraie. Et, pour les contem-pler d’en haut, le moindre bal-con ou point de vue fera l’affaire.u Vous voulez unguide? DemandezMohammed Slimanià l’hôtel. Il vous feradécouvrir Figuig, sesminarets, peinturesrupestres, etc., pour200 DH la journée.uUn site préhistorique se trouvedans la région d’El Haiitima, à8 km de Figuig. Vous y trouve-rez un ensemble de tumulus(tombes)et d’objets de pierre.u On trouve des articles de l’ar-tisanat local, sur la place princi-pale de Zenaga, dans les locauxde l’association pour la femmeet l’enfant. Et dans le centre arti-sanal situé dans le quartier admi-nistratif.

BANQUESDans le quartieradministratif et dans la rueprincipale de Zenaga,se trouventdeux agences de la Banquepopulaire etune Poste, avecdistributeurs et change.

MMaarrcchhééssSur la place principale deZenaga, le mardi dès 5h du matinpuis à la municipalité de midi à 18h, vous y trouverez produitslocaux, épices, dattes, fruits etlégumes de saison. On y faitaussi des affaires : quincaillerie,produits de beauté, chaussures…

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figuig pratique

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L’exilé, oh ! maman l’exilé, dans les pays lointains devient orphelinNi parents ni ami(e)s, n’a que Dieucomme tuteurL’espace d’une vie oubliée ne s’accélèrepas, et, l’univers oublié ne se hâte pasUne fois que le Maroc se calmera, nousrenoncerons à l’exil à contre-cœurEt même si l’amertume s’instaureentre ami(e)s, elle sera meilleure que le miel qui s’échange entre desinconnus.Je préfère ma pauvreté dans mon pays,que d’être riche et exilé

MEKKI ATHMANE

Dans une oasis lointaine, très lointaine, existeun jeu : l’Amazigh Tiddatt, ou guerre de l’eau.C’est une sorte de jeu d’échec propre à la régionde l’Atlas saharien. Il n’est joué que par leshommes, jeunes comme plus âgés.L’échiquier est composé de vingt-cinq cases, quipour la plupart ont des noms spécifiques. Le butdu jeu étant de le traverser pour aller boire prèsde la source ennemie, à l’angle opposé, avantde se rendre au terminus, dans un des angles de l’échiquier. Le tout, par une série dedéplacements, tous plus ou moins complexes.

LLee ttrriidd ((rreecceettttee ddee bbaassee))

Né dans les années 1950 à Figuig, le poète Mekki Athmane vità présent en France. Ses poèmes, particulièrement appréciésdes femmes, abordent des thèmes aussi divers que l’histoire, lapolitique ou la société. La plupart évoquent Figuig. Ils sontaujourd’hui appris par les enfants dans les écoles de l’oasis.

Temps de préparation : 1hPour 4 à 5 personnes.Ingrédients : 500 g de semoule fine,500 g de farine, 1 cuillère à caférase de sel, eau, huile

Tamisez la semoule et la farine dansun grand plateau. Faites un puits etversez un demi-verre d’eau, mélan-gez le tout. Travaillez énergiquementla pâte en l’aspergeant de temps en

temps d’eau jusqu’à ce qu’elledevienne assez molle, mais toujoursélastique. Recouvrez d’une servietteet laissez reposer 5 minutes.Huilez vos paumes pour que la pâteglisse facilement. Formez des bou-les de la grosseur d’un œuf en rou-lant la pâte entre vos mains. Mettezun plat huilé à feu doux, déposez uneboule de pâte dessus, étirez-la déli-catement dans tous les sens du boutdes doigts jusqu’à obtenir une galettetrès fine. Aspergez-la d’huile. Etirez-la à nouveau. Laissez cuire 30 secondes sans lais-ser sécher pour que la feuille restemolle. Posez la feuille pliées dans unplat. Répétez l’opération jusqu’à

épuisement des boules de pâte.Ces voiles de pâte peuvent êtreconsommés avec de la confiture oudu miel. On les utilise égalementpour des plats salés (voir photo).Par exemple :avec des petits morceaux de poulet,revenus avec des oignons, de l’ail,des carottes, des épices à couscous(ras-el-hanout) et du concentré detomate. Ajoutez des raisins secs etdes œufs durs… Mettez la prépara-tion au centre du plat où les feuillesde trid ont été disposées. Dégustation : servez-vous desfeuilles de trid pour attraper l’ac-compagnement.Bssaha !

L’ExilL’Amazigh Tiddatt,jeu d’échec local

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Concert nomade11 mai 2007 : Abrid Aziza et l’associationfiguiguienne An-Nahda (Renaissance) sontà l’origine de ce concert qui a réuni, dansune belle improvisation, le groupe demusique traditionnelle FG 7K (Figuig 7Ksours), la chanteuse Marie-Hélène Martinet la chorale des enfants des écoles.D’autres musiciens, d’autres chanteurs et chanteuses ont, dans la simplicité de cemoment partagé, permis à la variété desrépertoires de se mélanger, de se fondre,et d’entraîner un public très divers dans la farandole des sons métissés. La musiqueet la voix ont parlé le langage du cœur.Ce soir-là, le chant s’est fait offrande.

Une association pour la préservation des oasis

le développement du tourisme solidaire

et les échanges cullturels

siège social :M. et Mme Messaoudi-Duquenne

34 avenue Raspail 94250 Gentilly

abrid azizale chemin vert

4ème couv-CD BATbon 2/07/07 18:25 Page 3