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IMPÔT - Politique fiscale  Article écrit par Jean-Marie MONNIER Prise de vue Longtemps, la politique fiscale n'a suscité qu'une attention modérée aussi bien de la part des économistes que de celle des pouvoirs publics. Si l'on définit la politique budgétaire au sens large comme l'ensemble des actions menées par les décideurs publics ayant un support financier, qu'il s'agisse de dépenses ou de recettes, la politique fiscale n'est alors que l'une des dimensions de cet ensemble. Or, durant la période du keynésianisme triomphant, la manipulation de la fiscalité était considérée comme moins efficace que l'usage des dépenses budgétaires ou de la monnaie. C'est la raison pour laquelle le principal objectif assigné à l'impôt – entendu au sens large de prélèvement obligatoire –, était la couverture des dépenses publiques, ce qui réduisait la place accordée à l'interventionnisme fiscal. Les attitudes à l'égard de la fiscalité ont changé à partir du début des années 1970 sous l'influence d'une double mutation, politique et théorique, liée à l'irruption de la crise économique. L'échec des politiques contracycliques de stabilisation a provoqué une très nette défiance à l'encontre des politiques traditionnelles d'inspiration keynésienne. La redéfinition des politiques monétaires et le retour de l'orthodoxie budgétaire ont débouché sur une tendance à réduire le pouvoir discrétionnaire de l'État et à fixer des règles budgétaires et monétaires stables et prévisibles. La loi Gramm-Rudman-Holings, adoptée en 1985 aux États-Unis, qui impose au Congrès des plafonds annuels pour le déficit budgétaire, et le traité de l'Union européenne signé en 1992, qui fixe des limites au déficit budgétaire et à l'endettement public des États membres, procèdent de cette même inspiration. Au plan théorique, le rejet du keynésianisme a engendré, sous de nouvelles appellations, le retour d'anciens courants d'inspiration libérale, à commencer par le monétarisme. L'économie de l'offre est également née de cette contestation des thèses keynésiennes. Elle privilégie l'approche par la fiscalité tout en offrant un support théorique aux politiques économiques issues de la mouvance néoconservatrice au pouvoir aux États-Unis et en Grande-Bretagne au début des années 1980. Finalement, ces bouleversements ont sorti la politique fiscale de l'indifférence dans laquelle les conceptions traditionnelles de l'intervention publique la cantonnaient. Désormais, l'impôt n'est plus perçu comme un simple instrument de financement au service des activités publiques. Il occupe une place croissante dans les autres domaines des politiques publiques et s'inscrit dans un cadre international où les nations sont interdépendantes, et où de nouvelles institutions comme l'Union européenne exercent des fonctions de coordination. I-Nature des prélèvements et techniques de la politique fiscale Double nature des prélèvements obligatoires Éléments indispensables au bon fonctionnement démocratique des États modernes, les prélèvements obligatoires (impositions de toute nature et cotisations sociales selon la distinction opérée par l'article 34 de la Constitution de la V e République) se caractérisent par leur double nature, juridique et économique. Au plan  juridique et selon la formule de Michel Bouvier, ils procèdent du pouvoir de contrainte dont l'autorité étatique est légalement détentrice. Ce pouvoir s'exprime dans le droit fiscal, qui s'articule autour d'un ensemble de règles dont la combinaison détermine la portée des contributions et que la politique fiscale modifie afin de donner une forme concrète aux options dont elle procède. Le champ d'application d'un prélèvement s'apprécie à partir de trois éléments généraux : le redevable de l'impôt qui peut être une personne physique ou une entreprise, le fait générateur qui est donné par l'élément ou l'évènement déclencheur de l'imposition et la matière imposable qui est évaluée lors de l'établissement de l'assiette. Ensuite, la liquidation consiste à

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IMPÔT - Politique fiscale

 Article écrit par Jean-Marie MONNIER

Prise de vue

Longtemps, la politique fiscale n'a suscité qu'une attention modérée aussi bien de la part deséconomistes que de celle des pouvoirs publics. Si l'on définit la politique budgétaire au sens large commel'ensemble des actions menées par les décideurs publics ayant un support financier, qu'il s'agisse dedépenses ou de recettes, la politique fiscale n'est alors que l'une des dimensions de cet ensemble. Or, durantla période du keynésianisme triomphant, la manipulation de la fiscalité était considérée comme moinsefficace que l'usage des dépenses budgétaires ou de la monnaie. C'est la raison pour laquelle le principalobjectif assigné à l'impôt – entendu au sens large de prélèvement obligatoire –, était la couverture desdépenses publiques, ce qui réduisait la place accordée à l'interventionnisme fiscal.

Les attitudes à l'égard de la fiscalité ont changé à partir du début des années 1970 sous l'influence d'unedouble mutation, politique et théorique, liée à l'irruption de la crise économique. L'échec des politiquescontracycliques de stabilisation a provoqué une très nette défiance à l'encontre des politiques traditionnellesd'inspiration keynésienne. La redéfinition des politiques monétaires et le retour de l'orthodoxie budgétaireont débouché sur une tendance à réduire le pouvoir discrétionnaire de l'État et à fixer des règles budgétaireset monétaires stables et prévisibles. La loi Gramm-Rudman-Holings, adoptée en 1985 aux États-Unis, quiimpose au Congrès des plafonds annuels pour le déficit budgétaire, et le traité de l'Union européenne signéen 1992, qui fixe des limites au déficit budgétaire et à l'endettement public des États membres, procèdentde cette même inspiration.

Au plan théorique, le rejet du keynésianisme a engendré, sous de nouvelles appellations, le retourd'anciens courants d'inspiration libérale, à commencer par le monétarisme. L'économie de l'offre estégalement née de cette contestation des thèses keynésiennes. Elle privilégie l'approche par la fiscalité touten offrant un support théorique aux politiques économiques issues de la mouvance néoconservatrice aupouvoir aux États-Unis et en Grande-Bretagne au début des années 1980.

Finalement, ces bouleversements ont sorti la politique fiscale de l'indifférence dans laquelle lesconceptions traditionnelles de l'intervention publique la cantonnaient. Désormais, l'impôt n'est plus perçucomme un simple instrument de financement au service des activités publiques. Il occupe une placecroissante dans les autres domaines des politiques publiques et s'inscrit dans un cadre international où lesnations sont interdépendantes, et où de nouvelles institutions comme l'Union européenne exercent desfonctions de coordination.

I-Nature des prélèvements et techniques de la politique

fiscale

Double nature des prélèvements obligatoires

Éléments indispensables au bon fonctionnement démocratique des États modernes, les prélèvements

obligatoires (impositions de toute nature et cotisations sociales selon la distinction opérée par l'article 34 de

la Constitution de la Ve République) se caractérisent par leur double nature, juridique et économique. Au plan

 juridique et selon la formule de Michel Bouvier, ils procèdent du pouvoir de contrainte dont l'autorité étatique

est légalement détentrice. Ce pouvoir s'exprime dans le droit fiscal, qui s'articule autour d'un ensemble de

règles dont la combinaison détermine la portée des contributions et que la politique fiscale modifie afin de

donner une forme concrète aux options dont elle procède. Le champ d'application d'un prélèvement

s'apprécie à partir de trois éléments généraux : le redevable de l'impôt qui peut être une personne physique

ou une entreprise, le fait générateur qui est donné par l'élément ou l'évènement déclencheur de l'imposition

et la matière imposable qui est évaluée lors de l'établissement de l'assiette. Ensuite, la liquidation consiste à

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calculer la dette fiscale du redevable à partir d'un tarif constitué généralement d'un taux ou d'un barème de

taux, et le recouvrement comprend l'ensemble des opérations aboutissant au paiement de la contribution :

prélèvement à la source ou paiement spontané. Enfin, des règles de contrôle et de sanction viennent

compléter cet édifice.

D'un point de vue économique, il faut distinguer la nature macroéconomique des prélèvements de leur

incidence sur les variables microéconomiques. L'impôt soustrait du pouvoir d'achat aux agents privés de

sorte que d'un point de vue macroéconomique, il exerce une influence sur l'activité économique globale et

modifie la distribution des revenus, les choix d'épargne, d'investissement ou de consommation.

Quant à l'incidence des contributions sur les variables économiques, elle s'apprécie à deux niveaux. En

premier lieu, l'intervention d'un prélèvement dans une transaction marchande (relation client-fournisseur ou

relation salariale), provoque une disjonction entre le prix payé par l'acheteur (le client ou l'employeur) et le

prix encaissé par le vendeur (le fournisseur ou le salarié). Cette différence entre le prix toutes taxes et/ou

toutes charges sociales comprises est collectée par les administrations publiques et sociales. Dans la

littérature économique, elle est appelée « coin fiscal ». En second lieu, le redevable légal d'un prélèvement

doit être distingué de celui qui en supporte la charge effective. Les agents économiques disposent en effet

de la faculté de reporter sur d'autres la charge d'un impôt en manipulant les variables économiques (salaire

ou prix) qu'ils contrôlent. C'est le phénomène de la translation dont l'impact sur les prix ou les revenus se

diffuse progressivement dans l'économie. Au total, des distorsions apparaissent dans les mécanismes

économiques, et en particulier dans les choix des agents.

 Techniques de la politique fiscale

La politique fiscale est le produit de choix explicites ou implicites des décideurs publics dans des

domaines économiques et extra-économiques, qui déterminent les caractéristiques générales des

prélèvements obligatoires. Elle articule donc concrètement les aspects économiques et juridiques des

prélèvements. Plus précisément, la politique fiscale regroupe soit des dispositifs structurants au sein de la

fiscalité, soit de simples dérogations par rapport à la norme fiscale. Les dispositifs structurants ont pour

objectif d'orienter de manière durable et stable le système fiscal. Par exemple, dans le cas français, le

quotient familial a été intégré à l'impôt sur le revenu en 1945 et a subsisté à deux profondes réformes de cetimpôt, en 1948 et 1959. Il vise à le « familialiser » et complète les prestations familiales dans le cadre d'une

politique familiale originale au plan international. De même, le « bouclier fiscal » mis en œuvre à compter de

2007 plafonne l'ensemble de la fiscalité directe acquittée par les ménages et en restreint la redistributivité.

Les dérogations à la règle fiscale procèdent plus simplement d'une manipulation, en principe plus

éphémère, des instruments fiscaux que l'on regroupe dans la catégorie des dépenses fiscales. Celles-ci sont

des renonciations à des recettes dont l'incidence pour le budget de l'État est comparable à celle des

dépenses directes. Selon l'O.C.D.E., il existe cinq catégories de dépenses fiscales : les exonérations,

constituées de revenus ou de sources de revenus non retenus dans l'assiette de l'impôt ; les réductions

fiscales, qui sont des sommes déductibles du revenu brut utilisé pour calculer le revenu imposable ; les

crédits de taxes, sommes déduites de l'impôt qui peuvent être récupérables (le crédit d'impôt peut excéderl'impôt théorique et être éventuellement remboursé) ou non récupérables dans le cas inverse ; les

allégements spéciaux de taux, qui sont des réductions de taux accordées à certains groupes de

contribuables ou à certaines activités ; les différés d'imposition, qui consistent à reporter la date du paiement

de l'impôt.

Le choix entre ces différentes formes de dispositifs dépend des objectifs et du ciblage de la politique

fiscale ainsi que de leur incidence présumée.

II-Les formes traditionnelles de la politique fiscale

Cadre théorique général

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Dans son ouvrage de 1959, Richard Musgrave distingue trois fonctions principales de l'État : l'allocation

des ressources, la redistribution des revenus et la stabilisation économique. La fonction d'allocation des

ressources naît du caractère socialement insatisfaisant et sous-optimal du fonctionnement des marchés.

C'est la raison pour laquelle l'État intervient afin de répondre aux besoins sociaux. La redistribution vise à

corriger les inégalités engendrées par la répartition primaire des revenus, dans le sens de la justice sociale.

Quant à la fonction de stabilisation, elle diffère des précédentes en ce qu'elle résulte des aléas de la

conjoncture qui risquent de provoquer inflation et chômage. Il revient donc à l'État de mener des politiques

conjoncturelles visant à assurer une croissance équilibrée, sans inflation et au voisinage du plein-emploi.

La division des tâches de l'État en trois fonctions visait à organiser conceptuellement l'étude desfinances publiques à partir d'une typologie simple. D'ailleurs, dans son ouvrage, Richard Musgrave souligne

que les budgets publics sont interdépendants de sorte que les trois fonctions elles-mêmes sont

interdépendantes. Par exemple, l'allocation de ressources pour pallier la présence d'effets externes négatifs

– la pollution notamment –, ou la stimulation de la demande dans le cadre de stratégies de croissance ne

sont pas sans conséquences sur la redistribution. Mais les bouleversements théoriques des années 1970 ont

provoqué une rupture entre la macroéconomie des financements publics et l'économie publique, dont la

méthode est issue de l'analyse microéconomique. Elles se sont développées de manière cloisonnée, comme

si les fonctions de l'État étaient séparables. Dans la période récente, certains économistes se sont attachés à

assurer une meilleure articulation de ces fonctions, tandis que l'émergence de nouveaux besoins de

politiques publiques incitait à les repenser.

L'impôt ou l'emprunt ?

L'introduction de critères contraignants en période de tensions sur les finances publiques a renforcé

l'acuité de la contrainte budgétaire. Or, pour financer les dépenses publiques, emprunts et prélèvements

obligatoires sont partiellement substituables, ce qui pose la question des déterminants de l'arbitrage entre

ces deux modes de financement. Dans les débats récents, la question de l'équité intergénérationnelle est

fréquemment mise en avant (la dette engendrée par les flux d'emprunts serait transférée sur les générations

futures) en défaveur de l'emprunt. Les réponses des économistes sont cependant plus nuancées.

Selon l'analyse keynésienne, financer aujourd'hui les dépenses publiques destinées à faire face ausous-emploi ou au besoin d'infrastructures par l'endettement est susceptible de créer, demain, une situation

meilleure ; de surcroît, l'amélioration de l'emploi et des infrastructures nouvelles permettraient d'accroître

mécaniquement les recettes publiques et donc de financer a posteriori les dépenses initiales. De ce point de

vue, les générations futures ne seraient pas créditrices mais plutôt débitrices des générations passées. On

peut enfin soutenir que l'emprunt permettrait de « lisser » l'évolution des taux d'imposition, et d'éviter

d'accroître la charge fiscale pesant sur les ménages dont la propension à consommer est élevée.

Les contradicteurs des keynésiens s'appuient sur le théorème d'équivalence de Ricardo-Barro, et

considèrent que l'émission d'emprunts ne procure aucune richesse supplémentaire dérivée des générations

futures, mais a un impact équivalent à celui de l'impôt. Les agents économiques sont en effet capables

d'anticiper le supplément d'impôt qui sera rendu nécessaire par le remboursement de la dette de sorte qu'ilsajustent leurs comportements d'épargne. Dans le cas des transmissions intergénérationnelles en particulier,

les individus savent qu'ils transmettent à la fois des actifs et une dette fiscale si bien qu'ils capitalisent le

remboursement de la dette et le paiement des intérêts par un legs supplémentaire. Il n'y aurait donc pas

transfert de richesses des générations futures vers les générations présentes et la politique d'emprunt public

serait inefficace.

Mais l'hypothèse d'équivalence elle-même a fait l'objet de nombreuses critiques. En effet,

l'argumentation développée à partir du théorème de Ricardo-Barro présume l'absence d'illusion fiscale, ne

prend pas en compte les effets démographiques et suppose que les transferts intergénérationnels sont régis

selon un modèle altruiste. Finalement on peut observer que l'emprunt provoque plutôt des transferts

intragénérationnels entre agents économiques. Le financement de la dépense publique par l'empruntengendre une redistribution des richesses au sein d'une même génération. De la même façon, le

remboursement de la dette s'effectue par l'impôt, ce qui provoque alors un autre transfert

intragénérationnel, en particulier entre les ménages à bas revenus dont l'épargne est faible et les ménages

propriétaires ou héritiers des titres de créance sur l'État, que celui-ci rembourse.

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horizontale tenant compte du niveau de vie des familles, et d'une politique de la famille fortement

redistributive qui mobilise une grande variété d'instruments.

On distingue habituellement la redistribution verticale de la redistribution horizontale. Par redistribution

verticale, on entend l'ensemble des opérations qui visent à améliorer la situation des ménages les plus

pauvres à partir de prélèvements opérés sur les plus riches. Quant à la redistribution horizontale, elle

comprend à la fois les opérations réalisées au sein d'une même couche sociale ou d'une même strate de

revenu, et celles qui ne sont pas motivées par la hiérarchie des revenus ou des richesses.

Dans le cas des revenus, l'objectif de la redistribution fiscale est le resserrement de l'éventail desrevenus. L'instrument alors utilisé est l'impôt progressif. Traditionnellement, on dit d'un prélèvement qu'il est

progressif lorsque le montant de l'impôt et, par conséquent, le taux moyen d'imposition, croît plus vite que le

revenu. Il s'ensuit que la progressivité peut être comprise comme une déviation positive par rapport à un

prélèvement proportionnel au revenu. Respectivement, on dit d'un prélèvement qu'il est régressif lorsque le

taux moyen d'imposition décroît quand le revenu augmente, ce qui constitue une déviation négative par

rapport à un prélèvement proportionnel. On ne peut cependant juger de l'impact redistributif d'un

prélèvement à partir de la seule nature de la déviation qu'il introduit. En effet, cet impact redistributif 

dépend également, de façon tout aussi importante, de l'ampleur du transfert engendré par l'impôt.

En fait, la progressivité caractérise la structure d'un prélèvement, c'est-à-dire la façon dont un euro de

prélèvement se répartit entre les différents contribuables classés selon leur position dans l'éventail desrevenus, tandis que les effets redistributifs mesurent l'ampleur des variations introduites par ce prélèvement

dans la distribution des revenus. À distribution primaire des revenus donnée, l'ampleur de ces effets

redistributifs dépend à la fois du degré de progressivité et du taux moyen d'imposition, c'est-à-dire de la

masse des revenus effectivement prélevée. En d'autres termes, la variation d'inégalité résultant d'un

prélèvement peut être exprimée comme le produit de sa progressivité par le taux moyen d'imposition. Ce

lien entre le degré de progressivité et l'importance des effets redistributifs via le taux moyen d'imposition

explique pourquoi l'augmentation d'un impôt dans les mêmes proportions à tous les niveaux de revenu

accroît ses effets redistributifs sans affecter sa progressivité. De la même façon, lorsque la progressivité d'un

barème d'imposition est accentuée sans modification du rendement global de l'impôt, les effets sur les

inégalités de revenus sont néanmoins accrus.

Optimalité et sélection des prélèvements

Le concept d'optimalité fiscale relève du domaine de l'économie publique normative qui étudie à travers

la théorie de la taxation optimale, les conséquences sur le bien-être des agents économiques des arbitrages

entre plusieurs critères de choix des formes de prélèvements. Selon cette théorie, toute structure fiscale qui

maximise le bien-être collectif est dite optimale. Elle dépend des instruments budgétaires et fiscaux

disponibles. Trois critères de choix sont principalement retenus par l'économie publique contemporaine.

S'agissant en premier lieu du critère d'efficacité, une erreur fréquente consiste à l'assimiler à la

neutralité fiscale, et à s'attacher à réduire le nombre de distorsions induites par les prélèvements. Or lesystème fiscal est diversifié et entraîne nécessairement des distorsions qui peuvent se compenser

mutuellement. Réduire l'inefficacité du système fiscal ne signifie donc pas diminuer le nombre des

distorsions mais assurer leur compensation. C'est un problème global.

En second lieu, le critère d'équité se présente sous deux formes complémentaires :

– L'équité horizontale consiste à prélever un même montant aux contribuables dont les capacités

contributives sont identiques. C'est le traitement égal des égaux. En France, ce sont les facultés

contributives du foyer fiscal qui sont imposées dans le cadre de l'impôt sur le revenu des personnes

physiques (I.R.P.P.), alors que le plus souvent on prend en compte celles de l'individu ou du couple à

l'étranger.

– L'équité verticale correspond au traitement inégal des inégaux. Si l'on suppose que l'utilité marginale

du revenu décroît lorsque celui-ci augmente, la capacité contributive, c'est-à-dire le sacrifice que peut

consentir un individu, est inversement proportionnelle à son revenu. Si l'on ajoute qu'il existe un niveau de

revenu en deçà duquel la capacité contributive des individus est nulle, il s'ensuit que l'impôt lui-même ne

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peut être simplement proportionnel au revenu, ce qui introduit sur la progressivité.

Enfin le troisième critère est surtout étudié depuis le milieu des années 1980. Il s'agit de l'efficience qui

prend en compte le processus de taxation. L'analyse porte principalement sur les coûts spécifiques que ce

processus engendre. Dans ce cadre, le rôle de la politique fiscale est de réduire ou d'optimiser ces coûts, que

l'on décompose en trois catégories :

– Les coûts administratifs comprennent toutes les dépenses liées à la collecte de l'impôt : coûts de

collecte et de traitement des impôts ; coûts de réduction des activités d'optimisation fiscale ; coûts de

détection de la fraude.

– Les coûts de (non-) mise en conformité sont les coûts encourus par le redevable en raison de l'impôt

au-delà du montant de celui-ci : coûts liés à l'obligation de se conformer à la loi fiscale ; coûts imputables à

l'effort de réduction de la « facture » fiscale.

– Les coûts de renforcement légal sont engendrés par le risque associé aux stratégies d'évitement fiscal :

coûts liés à d'éventuelles sanctions pour les contribuables ; coûts de monitoring du côté de l'administration

fiscale.

À côté des préceptes issus de l'analyse économique, les praticiens des finances publiques insistent pour

leur part sur trois objectifs complémentaires : le rendement – l'impôt doit procurer le niveau de recettes

budgétaires désiré – ; la flexibilité – la fiscalité doit s'adapter aux besoins de la politique conjoncturelle du

gouvernement – ; la stabilité – l'impôt doit garantir un flux de recettes relativement constant.

III-Applications et développements de la politique fiscale

La politique fiscale dans les pays industrialisés

Depuis la fin des années 1970, les pays industrialisés ont tous mis en œuvre des politiques fiscales

actives visant à aboutir à une réforme profonde de leur système de prélèvements. De manière générale, ils

se sont fixé pour objectif la réduction de la charge fiscale globale. Pourtant, en dépit des réformes, le poids

global des prélèvements obligatoires exprimés en pourcentage du P.I.B. n'a pas décru, bien au contraire.

Ainsi, en moyenne (non pondérée) au sein de l'O.C.D.E., ce poids est passé de 32,9 p. 100 en 1985 à 35,9 p.

100 en 2004. Au sein de l'Union européenne (à 15) il est passé de 37,7 p. 100 à 39,7 p. 100. Même dans les

pays affichant une politique fiscale très libérale, États-Unis ou Royaume-Uni par exemple, le poids des

prélèvements obligatoires en pourcentage du P.I.B. n'a pas diminué. Plusieurs explications peuvent être

avancées. En premier lieu, il convient sans doute d'observer que la mauvaise qualité de l'indicateur lui-même

(le taux global de prélèvements obligatoires est calculé en faisant le rapport entre deux grandeurs non

homogènes) induit sans doute des erreurs purement « statistiques ». Surtout, deux facteurs ont joué

conjointement : d'une part l'accroissement des besoins, en particulier des besoins de protection sociale, ont

favorisé la hausse des dépenses qu'il a fallu financer ; d'autre part, des réformes de grande ampleur ont été

engagées, mais elles ont eu tendance à déplacer la charge fiscale entre les agents économiques, non de la

réduire. Ainsi, la recherche d'une plus grande efficacité et l'élimination des distorsions ont eu pour

conséquences, du côté de la fiscalité directe des bénéfices des entreprises, d'une part, l'élargissement de

l'assiette imposable souvent favorisé par la réduction des incitations (en particulier les incitations à

l'investissement), et d'autre part, l'abaissement des taux d'imposition. Il en est résulté une relative

convergence des taux légaux d'imposition au sein de l'O.C.D.E. S'agissant de la fiscalité directe du revenu

des ménages, une nette diminution des taux marginaux du barème de l'impôt sur le revenu des personnes

physiques peut être observée, ainsi que la résorption des « niches » fiscales. Celles-ci sont le produit d'un

usage intensif des dépenses fiscales, si bien que leur réduction a permis un élargissement de l'assiette, et

l'accroissement des taux effectifs d'imposition. Enfin, on observe au sein de l'O.C.D.E. une nette

augmentation du poids de la fiscalité indirecte, en particulier de la T.V.A. que de nombreux pays développés

ont adoptée depuis le début des années 1980.

L'évolution de la politique fiscale française présente certaines similitudes mais également de fortes

discordances en raison des spécificités du système de prélèvements en France. Les principales modifications

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sont intervenues à partir de la fin des années 1980. Comme dans les autres pays de l'O.C.D.E., le poids

global des prélèvements obligatoires exprimé en pourcentage du P.I.B. n'a pas diminué puisqu'il est passé de

42,4 p. 100 en 1985 à 44,3 p. 100 en 2005. De la même façon, les taux marginaux du barème de l'I.R.P.P.

ont très fortement baissé, le taux le plus élevé passant de 65 p. 100 en 1985 à 40 p. 100 en 2007. De

manière générale, l'I.R.P.P. a été fortement allégé de sorte que son poids relatif dans les prélèvements

obligatoires est passé de 11 p. 100 au début des années 1980, à 6,5 p. 100 en 2005.

Les spécificités de la politique fiscale française résident de manière conjointe dans son annexion partielle

à la politique de l'emploi et dans son utilisation comme instrument de la réforme du financement de la

protection sociale. Pour ce faire, un même mécanisme, les exonérations partielles ou totales de cotisationssociales (part employeur ou, part salariale) compensées par le budget de l'État, a été mis en œuvre. Les

exonérations de la part employeur des cotisations sociales ont été mobilisées pour réduire le coût du travail

selon deux stratégies : les allégements généraux ont visé à réduire le coût moyen du travail afin d'enrichir le

contenu en emploi de la croissance ; les allégements ciblés ont cherché à alléger le coût marginal du travail

afin de modifier la structure du chômage en faveur de populations à l'encontre desquelles le marché du

travail se montre particulièrement sélectif. Quant aux compensations, elles ont la forme de dotations

budgétaires, et surtout de l'affectation aux budgets sociaux d'impôts anciens ou nouveaux. Dans le même

temps, les pouvoirs publics ont cherché à élargir l'assiette du financement de la protection sociale par de

nouvelles ressources de nature fiscale, susceptibles non seulement d'être mobilisées en substitution des

cotisations sociales mais également comme complément pour répondre aux nouveaux besoins. La

contribution sociale généralisée (C.S.G.) et la contribution au remboursement de la dette sociale (C.R.D.S.)sont issues de ce processus. De la sorte, si la part des cotisations sociales représentait environ 90 p. 100 des

ressources de la sécurité sociale au milieu des années 1980, elle ne s'élève plus qu'à 60 p. 100 vingt ans

plus tard.

La politique fiscale européenne

Les politiques fiscales nationales sont, à l'heure de la mondialisation, confrontées à un défi nouveau,

celui de l'évasion et de la fraude fiscales internationales. Les délocalisations, et plus généralement la

mobilité géographique des bases d'imposition suscitent l'érosion des assiettes imposables nationales. Il en

résulte un fort besoin de coordination internationale des politiques fiscales.

 Très tôt, la Communauté européenne s'est efforcée de construire un socle fiscal commun. La sixième

directive du 17 mai 1977 est ainsi à la base de la généralisation de la T.V.A. au sein des États membres. À la

fin des années 1980, la question de la coordination s'est cristallisée autour de la problématique de

l'harmonisation des fiscalités.

L'harmonisation des fiscalités est apparue dans le vocabulaire européen avec la signature en 1987 de

l'Acte unique prévoyant pour 1993 l'ouverture du marché unique européen, qui devint par la suite la

première étape vers l'Union économique et monétaire (U.E.M.). Le marché unique visait la mise en œuvre

des quatre libertés de base : liberté de circulation des marchandises, des personnes, des capitaux et libre

prestation de services. Il avait en conséquence un fort contenu fiscal puisque les entraves aux échangesétaient matérialisées par les barrières douanières où étaient perçues les taxes. La problématique de

l'harmonisation ne consistait pas à supprimer les inefficacités contenues dans les systèmes fiscaux

nationaux, mais, considérant que les échanges intraeuropéens devaient être traités comme des flux au sein

d'un même pays, il s'agissait de corriger les dispositions fiscales pouvant constituer des entraves aux

échanges, induire des distorsions dans les conditions de la concurrence ou entraîner des détournements de

trafics. En conséquence, l'harmonisation n'est pas l'uniformisation. Car, dans un vaste espace où les

spécialisations économiques et les niveaux de développements (donc les niveaux de coûts) sont

hétérogènes, l'unification fiscale est paradoxalement susceptible d'accentuer la concurrence sur les

marchés. Or si certains décideurs réclament l'unification, croyant y trouver une protection contre les

pratiques abusives de quelques États membres, d'autres aspirent au contraire à une amplification de la

concurrence fiscale dont ils espèrent une amélioration de la compétitivité des entreprises européennes,quitte à sacrifier une partie du modèle social européen. C'est pourquoi l'harmonisation représente une forme

d'équilibre entre des aspirations divergentes, d'autant plus difficile à atteindre qu'elle nécessite l'intégration

de règles communes dans des codes fiscaux nationaux parfois très dissemblables. Sans doute est-ce la

raison pour laquelle les objectifs d'harmonisation initialement retenus par les États membres n'ont pu être

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atteints.

Le domaine de la fiscalité indirecte est le plus achevé : le nombre des taux et leurs marges de variation

ainsi que la nomenclature des produits ont été fixés aussi bien pour la T.V.A. que pour les autres droits

indirects (sur les alcools, le pétrole et le tabac) que l'on appelle « accises ». Toutefois, le passage de la

taxation du pays de destination vers celui d'origine n'a pas été accompli. Dans les autres domaines par

contre, l'harmonisation négociée a été minimale. Un régime des sociétés « mères et filiales », des fusions,

des prix de cession interne, visant à éviter les doubles impositions, a été instauré pour la fiscalité des

entreprises. Faute d'accord sur la fiscalité de l'épargne, les États membres ont d'abord laissé jouer la

concurrence fiscale, puis entre 1997 et 2003 des éléments d'harmonisation ont été négociés. En outre, uncode de bonne conduite visant à éliminer les pratiques dommageables a été adopté. Enfin, depuis 2003, des

règles généralisant l'échange des renseignements ont été adoptées. Il reste que la concurrence fiscale est

encore trop souvent la règle dans la mesure où, dans les discussions entre États membres, la fiscalité fait

partie du domaine où l'unanimité est requise. Le besoin de coordination est donc toujours vivace.

Nouvelles perspectives

Même si l'aspiration à la stabilité et à la prévisibilité des règles fiscales est une donnée importante, la

politique fiscale doit s'adapter aux transformations économiques et sociales. De nouveaux domaines

s'ouvrent donc, mais ils présentent désormais la caractéristique commune de ne pouvoir être appréhendés

autrement que dans un cadre international, où les pays sont interdépendants. Cela renforce les tendances à

la coordination par des organismes internationaux. Deux exemples en sont de bonnes illustrations.

L'une des évolutions importantes des années 1990 est l'irruption de la préoccupation écologique dans les

débats publics, mais également dans les systèmes fiscaux. Les activités humaines produisent des

externalités, que l'on peut définir de la façon suivante : il y a externalité lorsque l'action d'un agent

économique influe positivement ou négativement sur l'utilité d'au moins un autre agent, sans que cette

interaction transite par le mécanisme des prix. La pollution peut être considérée comme une externalité

négative que les économistes proposent habituellement d'internaliser depuis la publication en 1920 de

l'ouvrage The Economics of Welfare (Économie du bien-être) par Arthur Cecil Pigou, afin que les acteurs

économiques prennent en charge tous les coûts engendrés par leurs activités. Dans ce cadre, la créationd'un marché international des droits à polluer (droits à émettre du CO2) est une proposition mise en œuvre

afin de donner un prix à ce qui n'en a pas. Surtout, dans la tradition de Pigou, le recours à la fiscalité doit

permettre l'internalisation du coût de la pollution car elle corrige la perception qu'ont les agents

économiques du prix ou du coût de leurs activités.

L'une des missions de l'Union européenne est précisément l'intervention dans le domaine

environnemental. Après la ratification en 2000 du protocole de Kyōto, plusieurs directives ont été adoptées.

L'accent a initialement été mis sur l'approche réglementaire, en particulier sous la forme de normes

techniques visant à éliminer ou limiter des émissions polluantes. Cette approche a permis de réduire les

pollutions d'origine industrielle, mais elle ne permet pas la transmission d'un signal-prix. C'est pourquoi

l'Union européenne insiste sur l'utilisation des instruments fiscaux et sur l'émergence de prix d'usagedavantage en rapport avec les coûts des externalités subies par la société. Les coûts environnementaux

restent toutefois sous-évalués.

Selon la définition commune à l'O.C.D.E. et à l'Union européenne, les taxes environnementales sont

celles dont l'assiette est constituée d'une unité physique de quelque chose dont il a été démontré qu'elle a

un impact spécifique négatif sur l'environnement. La T.V.A. est exclue de cet ensemble car elle n'est pas

directement reliée à la problématique environnementale. Trois catégories de taxes environnementales sont

distinguées :

– Les taxes sur l'énergie comprennent les taxes sur les produits énergétiques utilisés ou non pour le

transport. Les taxes sur le CO2 sont conventionnellement comprises dans cette catégorie.

– Les taxes sur les transports comprennent celles qui sont liées à la propriété ou à l'utilisation de

véhicules à moteur.

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– Le dernier groupe, intitulé « taxes pollution/ressources naturelles », comprend les prélèvements en

relation avec les émissions polluantes dans l'air, l'eau, la gestion des déchets, le bruit, à l'exception des

taxes sur le CO2.

Au sein de l'Union européenne, la France s'illustre par la faiblesse de sa fiscalité écologique. En 2005,

elle se situait au 25e rang sur 25 des pays de l'Union, avec une part des taxes environnementales

représentant 5,4 p. 100 des prélèvements obligatoires en diminution de 1,2 point depuis 1995, alors que la

moyenne de l'Union s'établissait à 7,6 p. 100, et au 19e rang si l'on considère le poids des taxes

environnementales en pourcentage du P.I.B. (2,4 p. 100). On peut en outre observer que l'essentiel des taxes

environnementales provient en France des taxes sur l'énergie (3,7 p. 100 des prélèvements obligatoires) enraison de la place de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (T.I.P.P.). Selon nombre de spécialistes, la

refonte et l'alourdissement de la taxe générale sur les activités polluantes (T.G.A.P.) semblent une priorité

découlant de l'application du principe « pollueur-payeur ».

Le second exemple est celui de la fiscalité que l'on peut qualifier de « solidaire » car elle aurait pour

objectif d'assurer le financement du développement des régions en difficulté, ou d'actions spécifiques telles

que l'achat de médicaments coûteux. La proposition la plus connue est la taxe suggérée en 1972 par James

 Tobin dont l'objectif principal est de lutter contre la spéculation internationale sur les transactions de change.

Cette taxe frapperait celles-ci à un taux très faible (entre 0,01 p. 100 et 0,2 p. 100) de sorte qu'elle ne

pénaliserait pas les opérations courantes, mais découragerait les mouvements spéculatifs. Complémentaire

à la taxe Tobin, la taxe Keynes serait appliquée aux transactions boursières. Mais pour être efficace, la taxe Tobin nécessite une application internationale, ce qui suppose au minimum un accord au sein de l'Union

européenne.

Un tel accord a été obtenu en 2005 en faveur notamment d'une taxe sur les billets d'avion, entre 79 pays

du nord et du sud qui ont signé une déclaration sur les sources innovantes de financement du

développement. En France, la contribution de solidarité sur les billets d'avion est entrée en vigueur le

1er juillet 2006 et s'inspire dans son esprit, comme dans ses modalités d'application, de la taxe Tobin. Son

objectif est de collecter des ressources nouvelles, destinées à pallier l'insuffisance de l'aide publique au

développement. Les sommes ainsi recueillies doivent en priorité être affectées à la lutte contre les trois

pandémies majeures frappant le tiers-monde : le sida, le paludisme et la tuberculose.

Par rapport à la période des Trente Glorieuses, le contexte de la politique économique est beaucoup plus

contraint pour les nations européennes. La politique monétaire relève de la Banque centrale européenne, et

la politique budgétaire est enfermée dans les critères du Pacte de stabilité du traité d'Amsterdam (1997).

Paradoxalement, cela donne plus de place à des politiques fiscales actives. Or de nouveaux domaines

s'ouvrent, auxquels la technologie de l'impôt s'adapte. Mais ces nouveaux horizons de la politique fiscale

s'inscrivent dans un cadre international où les pays sont interdépendants. Certains gouvernements ont choisi

de profiter de cette interdépendance pour se livrer à la concurrence fiscale. Ces choix font peser des risques

importants sur le modèle social et la cohésion démocratique européens. C'est pourquoi la coordination des

politiques fiscales est un enjeu majeur de la période contemporaine.

 Jean-Marie MONNIER

Bibliographie

• M. BOUVIER, Introduction au droit fiscal et à la théorie de l'impôt , L.G.D.J., Paris, 1998

• C. HECKLY, La Politique fiscale dans les pays industrialisés, Dunod, Paris, 1999

• M. LAURE, Science fiscale, P.U.F., Paris, 1993

• J.-M. MONNIER, Les Prélèvements obligatoires, Economica, Paris, 1998

• R. MUSGRAVE, The Theory of public finance, McGraw-Hill, New York, 1959

• G. ORSONI, L'Interventionnisme fiscal, P.U.F., 1995/ R. SOLOW, « Peut-on recourir à la politique budgétaire ? Est-ce souhaitable ? », in

Revue de l'OFCE, no 83, 2002

• J. TOBIN, Retour sur la taxe Tobin (textes choisis), éd. Confluences, 2000.