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Reportage 156 habitants, 12 caméras Fitness Cuisses galbées, têtes voilées Européennes l’élection mal aimée Grogne sociale pourrissement ou printemps ? 2,80 63 mai 2009 www.leravi.org

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Reportage 156 habitants, 12 camérasFitness Cuisses galbées, têtes voiléesEuropéennes l’élection mal aimée

Grogne sociale pourrissement ou printemps ?

2,80

n° 63 mai 2009 www.leravi.org

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le Ravi n°63 mai 2009 5

au menu de la grosse enquete

Historique la mobilisation du 1er mai. C’est la première fois depuis la Libération que les syndicats s’accordent pour manifester de façon unitaire. Paradoxalement, leur convergence cache à peine une grosse faiblesse. Car après les mobilisations massives, elles aussi historiques, du 29 janvier et du 19 mars, les grandes confédérations syndicales ont eu bien du mal à répondre à la question du camarade Lénine : que faire ? Une grève générale interprofessionnelle reconductible comme en rêvent les militants les plus radicaux ? Peut-être, mais pour défendre quelle alternative politique ? « Il y a un risque révolutionnaire en France. » La formule n’est pas d’Olivier Besancenot, le jeune papa fondateur du NPA, mais de Dominique de Villepin, moins jeune ex-premier ministre UMP entré en dissidence.

Comment va évoluer la grogne sociale qui s’étend dans le pays ? Partout, l’heure est à la radicalisation. Aucun patron n’a encore été séquestré en Paca. Voire. Le 15 avril, une vingtaine de cadres d’Ascométal, le groupe métallurgique, ont été « gentiment » retenus à Fos-sur-Mer (13) jusqu’à une heure du matin par des salariés exaspérés suite à un chômage partiel mal rémunéré. Loin des hauts fourneaux, dans les écoles, l’ambiance est aussi chaud-bouillant. Un appel dit du « 21 avril des enseignants du primaire en résistance pédagogique » invite par exemple les instits, leurs syndicats, et les parents d’élèves « à l’insurrection non violente pour faire barrage à la destruction de l’école publique ». Une 3ème journée de « désobéissance dans l’Education nationale » est programmée le 6 mai.

Impossible de lister tous les symptômes, dans toutes les professions, qui attestent d’une poussée de fièvre. Dans leur diversité, les mouvements sociaux qui se multiplient ont un point commun : relayés, encadrés par les syndicats traditionnels, ils leurs échappent pour une grande part. Autre caractéristique : les conflits, d’une durée rarement égalée, sont aussi souvent l’occasion d’expérimenter sur la forme. Celui dans les universités est à ce titre exemplaire : banquets sur la place publique, randonnées pédagogiques, cours gratuits dans les rues… Depuis des mois, ceux qui se mobilisent pour les sans-papiers multiplient eux aussi les actions symboliques et concrètes comme les cercles de silence, les actions de « délinquants solidaires »…

Si l’absence de perspectives politiques mine à la longue le moral des militants, si l’inflexibilité du gouvernement, qui recule parfois mais ne change jamais de cap, fait craindre le pourrissement de certaines situations, la France qui revendique et se révolte le fait plutôt dans la bonne humeur. Entre les manifs de droite costumées de la Brigade opérationnelle utopique Marseille (Boum) et le collectif « Velorution » niçois invitant à une « action directe » dans une « ambiance amicale et contestataire », l’heure n’est heureusement pas toujours à la déprime. L’humour est la politesse du désespoir. Il peut être aussi une arme redoutable…

Michel Gairaud

Les manifestations unitaires battent des records d’affluence. Les conflits atteignent des durées rarement égalées. Oui, mais ensuite ? Le gouvernement recule sans changer de cap. Et le mouvement social – entre découragement, radicalisation, (re)invention de nouvelles formes – cherche toujours son horizon.

Grogne socialePourrissement ou printemps ?

Page 6 La manif à papa fait de la résistance Entretien : « Le militant nouveau est arrivé »

Page 7 L’humour, l’arme fatale « Ras-le-bol des manifs répétitives ! »

Page 8 J’aime mon patron : je le séquestre Tribune : « La crise oblige à être inventif »

Page 9 Agir & penser Silence, on manifeste ! Radicalement gentil

Michel Gairaud

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Pendant que patrons et CGTistes du port s’étripent à Marseille, Gêne, Barcelone et même Anvers se frottent les mains. « On a des clients

lyonnais qui font désormais arriver leur marchandise par la Mer du Nord, se plaint une entreprise marseillaise. C’est plus long mais au moins ils sont sûrs que ce sera livré dans les temps. » Depuis plus de 30 ans, en effet, le port de Marseille-Fos est réputé pour sa faible « fiabilité », c’est-à-dire, en mots crus : une grève peut éclater à tout moment et tout bloquer. Sur le papier, Marseille a tout pour réussir : situation idéale entre le Maghreb, en forte croissance, l’Europe du Sud et du Nord, une liaison fluviale via le Rhône, un réseau ferroviaire pas encore saturé pour le fret… Et pourtant, de 1997 à 2007, alors que le trafic augmente partout dans en Europe (+100 % à Barcelone, +60 % à Anvers, +40 % à Gênes), Marseille se traîne avec moins de 5 % de croissance.

14h à 28h de travail par semaineDans le contexte de crise mondiale et de ralentissement du commerce, le conflit larvé qui anime le port depuis janvier n’arrange pas les choses. Ultra-majoritaire sur le port, la CGT mène le combat contre la réforme votée l’an dernier par l’Assemblée. Celle-ci prévoit de privatiser toute la manutention sur les quais. Le patronat et la droite locale veulent rester fermes sur le principe : il s’agit de terrasser le dragon cégétiste, qui « prend en otage le port ». A la bataille idéologique s’ajoute une bataille pratique : aujourd’hui, pour rénover ses quais, le port fait appel aux investisseurs privés. « Puisqu’elles paient, les entreprises veulent avoir la gestion complète de l’outil, c’est assez logique », estimait Guy Janin, directeur général du port de 2005 à 2008. Difficulté : les « portiques », grues qui enjambent les quais et permettent de décharger très rapidement les bateaux, sont pilotés à Marseille et Fos par des agents publics, quasiment tous militants CGT. S’ils se mettent en grève, toutes les marchandises sont bloquées.

Et ces garçons sont chatouilleux : en 2006, la Cour des comptes dévoile leur rémunération : 2 900 Euros brut mensuel en moyenne, dont 1 000 Euros de « prime de rendement » versés par les armateurs. Le tout pour 14 à 28h de travail effectif par semaine. Deux ans auparavant, la direction du port avait lancé une « moralisation » de la rémunération avec un salaire unique, ce qui avait entraîné des menaces de grève.

Avec la privatisation, c’est un autre problème qui se pose. La loi de réforme

a posé des conditions a minima ultra-favorables : « Mon syndicat majoritaire a peut-être une certaine pudeur à le dire, mais la loi prévoit le maintien du salaire, de l’ancienneté, et une garantie de retour de 14 ans en cas de défaillance de l’entreprise, appuie Jean-Claude Terrier, actuel directeur général du port (1). Aujourd’hui, qui a une telle visibilité sur sa vie professionnelle ? » Et il ne s’agit là que de l’accord-cadre national, qui peut être rendu encore plus favorable dans le cadre de négociations locales...

Risque de plan social

Où est-ce que ça coince alors ? « Il y un risque de plan social, assure Pascal Galeote (2), secrétaire général de la CGT du port. Tous les agents de manutention pourraient ne pas être transférés au privé, et dans ce cas que font ceux qui restent ? Il faut appliquer le principe de précaution, pour ne pas créer de la précarité. » Le risque d’un plan social n’est pas une chimère : dans son rapport, la Cour des comptes relevait que l’exploitation des équipements de quais pour les conteneurs « était déficitaire en 2004, à plus de 12 millions d’Euros [pour un chiffre d’affaires total dépassant les 150 millions à l’époque] ». Dans le cadre du port public, le trou était comblé par les marges des quais pétroliers, fortement bénéficiaires. Un repreneur privé s’occupant uniquement des conteneurs serait forcément tenté de rationnaliser au maximum pour rentabiliser l’activité. Le syndicat brandit aussi la menace d’un monopole de fait des grands armateurs sur les quais marchandises. « Si on privatise, il y a un danger de voir la CMA-CGM tout posséder sur les bassins de Marseille, et déplacer d’un coup tout le trafic marchandises,

estime Pascal Galeote (3). Il y a deux ans, elle a essayé de transférer 50 000 conteneurs vers Fos, il a fallu se battre pour les garder. »

La CGT coupée en deux

Depuis le lancement de la réforme, la CGT réclame une privatisation via des filiales, dans laquelle le port resterait majoritaire. Le dispositif est prévu par la loi, mais seulement pour cas exceptionnel. Une filiale a ainsi été créée à Fos pour la manutention du pétrole, estampillé « produit stratégique d’intérêt national ». Quid du reste ? Après de longues tractations, la direction du port a choisi la fermeté en annonçant un transfert vers le privé de la manutention pour tous les quais marchandises, à Marseille comme à Fos. Le port a maintenant six mois pour trouver des entreprises

candidates. L’affaire ne devrait pas être trop compliquée à Fos, où plusieurs terminaux sont déjà construits par le privé. A Marseille, en revanche, cela pourrait être plus dur : depuis janvier, les terminaux marchandises sont minés par une grève perlée des portiqueurs et par la fermeture d’une escale de fruits et légumes. La CGT exige de la part des éventuels candidats « des garanties sur les trafics ». Les négociations s’annoncent longues et difficiles. Mais une mini-révolution pourrait changer la donne : fin mars, le sit web Econostrum révélait que les agents CGT de Fos ont voté à 98 % la création d’une section locale de leur syndicat, au sein du port. L’ère de la solidarité entre portuaires marseillais et fosséens pourrait être révolue. Et cette fois, c’est la direction du port qui se frotterait les mains.

Lutte finale sur le port

En bataillant contre la privatisation du port, la CGT mène-t-elle un combat d’arrière garde corporatiste ou bien une lutte salutaire contre une nouvelle déréglementation porteuse de précarité et contre la création de dangereux monopoles de quelques armateurs ? Peu à peu, les « réformes » s’appliquent et des divergences apparaissent entre Marseille et Fos au sein du syndicat majoritaire...

Par Cap’tain Némo

le Ravi n°63 mai 2009 17métropoles & trous jolis

1 Conférence de presse du 16 mars 2009 2 Conférence de presse du 11 mars 2009 3 Conférence de presse du 16 mars 2009

Marseille

La réparation navale touchée couléeD’un coup, 130 salariés au chômage, et Marseille privée de réparation navale lourde. La mise en liquidation de l’Union naval Marseille (UNM) place le port devant un nouveau dilemme : comment gérer ces bassins capables d’accueillir les plus grands navires ? En Méditerranée, seule Palerme dispose d’un outil équivalent. Jusqu’ici, le port déléguait la gestion des bassins à une entreprise privée. Souci : le dernier repreneur, l’espagnol Boluda, aurait tenté d’avoir massivement recours à des sous-traitants étrangers, déclenchant une grève de la CGT. Trouver un repreneur pourrait ne pas être facile. « Le président de Boluda est aussi président de l’association européenne de la réparation navale. Il va nous faire une bonne publicité… », regrette Jacques Truau, président du Club de la croisière Marseille-Provence (1). Aujourd’hui au chômage, les ex-salariés de l’UNM occupent toujours leur usine et menacent d’empêcher la tenue du festival de Marseille, dont une bonne partie doit se dérouler sur le port. Quand l’emploi disparaît, on a pas forcément envie d’aller au spectacle…

1 Conférence de presse du 9 mars 2009

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MAI !

26 RTT - le Ravi n°63 mai 2009 -

Associations ! Annoncez vos manifestations de juin, recherchez des bénévoles, faites connaître vos objectifs dans le Ravi.

Envoyez votre texte (40 mots maximum) en indiquant le nom de votre association, son objet social et ses

coordonnées complètes : la date, le lieu et l’horaire de votre événement… Par courriel : [email protected] ;

par courrier : le Ravi – 11 boulevard National 13001 Marseille ; par fax : 04 91 62 03 21.

Au plus tard le lundi 25 mai pour publication dans le Ravi n°64, en kiosque du vendredi 5 juin au jeudi 2 juillet.

Aix-en-Provence

Lundi 18 mai, Maison de la vie associative

Lou Ligourès (place Romée de Villeneuve,

Encagnane), l’Université populaire et

citoyenne du Pays d’Aix organise une projection-débat autour du film « The Take » (2005), sur une réquisition d’usine à la suite de la crise financière argentine de 2001. En présence du sociologue urugayen D. Merklen. Infos : http://sites.google.com/site/universitepopulaireaix.

ArlesSamedi 9 mai, amphithéâtre de l’espace Van Gogh (rue Félix-Rey), l’Université populaire du Pays d’Arles propose une conférence-débat de Bernard Picon (chercheur au CNRS) sur la notion d’environnement et les rapports que l’homme entretient avec la nature. Entrée libre. Infos : 06 16 89 46 41- www.upoparles.org.

ArlesLundi 11 mai, 20h-22h Maison de la vie associative (bd des Lices), réunion mensuelle Attac Pays d’Arles centrée sur l’Europe avec la restitution de travaux collectifs à partir notamment du livre l’Europe à quitte ou double. Entrée libre et ouverte à tous, adhérents ou pas de l’association. Infos : www.local.attac.org/13/arles.

MarseilleMardi 5 mai, 19h Espace accueil aux étrangers (22 rue Mathieu Stilatti, 2e arr.), la section Marseille Nord-Sud de la LDH propose la projection-débat autour de « Complicité de génocide », un film sur le génocide des Tutsis au Rwanda de 1994 réalisé par l’association Survie. Infos : 04 95 04 30 98/99 - www.espace.asso.fr.

PacaSamedi 9 mai, 14h-20h quai des Belges (Vieux Port), le Parlement Européen des Jeunes organise pour la fête de l’Europe une rencontre sur le thème : « Exprime ton Europe ». Infos : [email protected] ou 06 26 62 76 95.

MarseilleSamedi 23 mai, 15h bibliothèque municipale de Saint-André (4 rue Jean Salducci, 16e arr.), dans le cadre du lancement de son cinéclub l’association Images et paroles engagées propose le deuxième volet de ses rencontres « Films de femmes, femmes de films ». Projection de « Femmes précaires » de Marcel Trillat. Animation par Jean-François Debienne, auteur d’un mémoire de recherche universitaire sur le cinéma documentaire et animateur de l’association. Infos : 04 91 79 32 94 - www.ipeprod.org.

MarseilleMercredi 27 mai (horaire et lieu à préciser), Attac Marseille et le Snes Sup organisent une conférence-débat sur les élections européennes du 7 juin sur le thème : « Quel modèle de développement nous voulons pour l’U E ? » En présence de Michel Husson, du Conseil scientifique d’Attac France. Infos : www.local.attac.org/marseille.

NiceJeudi 30 avril, 20h au Rialto (4 rue Rivoli), l’Association pour la démocratie à Nice et Attac 06 proposent une projection-débat autour du film « Let’s make money » (E. Wagenhofer, 2009) sur le système financier mondial et ses conséquences humaines, démographiques et écologiques. Infos : 04 93

13 49 78 - www.adn-nice.org.

Port-de-BoucMardi 5 mai, 20h30 cinéma Le Méliès (12 rue Denis Papin), soirée-débat sur la prison animée par l’auteur de romans noirs et ancien taulard Abdel Hafed Benotman. Projection de « Ne me libérez pas je m’en charge » (F. Godet, 2009, 1h47) sur « le roi de la belle » Michel Vaujour. Infos : 04 42 06 29 77.

ToulonJeudi 14 mai, 18h salle Méditerranée (rue du commandant Infernet), l’association Avsane propose une conférence par Guy Herrouin (ancien directeur d’Ifremer) sur « Le télescope sous marin Antares ». Infos : 04 94 91 02 95 - [email protected].

RT T

ArlesDimanche 24 mai, Attac Pays d’Arles organise une alterrandonnée (3 heures maximum) à Puyricard. Au programme : visite d’une parcelle de forêt entretenue par une méthode respectueuse de l’écosystème (historique des lieux - comment la forêt s’est transformée ? - les alternatives possibles - la faune - visite de deux ruines). Rendez-vous à 9h30 place Lamartine à Arles pour des départs en covoiturage ou directement sur place à 10h30 au cimetière du Grand Saint-Jean à Puyricard. N’oubliez pas votre pique-nique ! Infos : www.local.attac.org/13/arles.

Beaumont-de-PertuisDimanche 17 mai, de 9h à minuit, l’association Arc en sol organise la 5e édition de sa Bourse aux instruments. Au programme : troc/achat/vente d’instruments, une vingtaine de concerts, ateliers musicaux, spectacles de rue, etc. Infos : 06 14 75 45 59 - http://arcensola.free.fr.

ChâteauvallonSamedi 16 mai, concert du mythique groupe de rap français Assassin (première partie : Oxmo Puccino) dans le cadre du festival Couleurs urbaines.

LubéronDu 18 au 24 mai, l’association Jazz Lubéron organise la 19e édition de son Lubéron jazz festival. Au programme : 28 concerts (Sarah Lazarus , Tomassenko, PipokaTony Malaby, Hélène Labarrière, Veli Kujola, Emile Parisien, Stephane Kerecki, Aymeric Avisse, Joachim Florent...), expositions, projections, etc. Infos : 04 90 74 55 98 - www.luberonjazz.net.

MarseilleJusqu’au 17 mai au Comptoir artistique phocéen Andiamo (30 cours Jospeh Thierry, 1er arr.), « Peintures, bronzes et autres sortilèges… », une exposition de Marika. Infos : 04 91 95 80 88 - [email protected].

MarseilleDu 15 au 30 mai, Cours Julien, Daki Ling (45A rue d’Aubagne, 1er arr.), Abattoirs St Louis (Chapiteau Gardens), le Daki Ling organise la 4e édition de son festival Tendance Clown. Au programme : spectacles, conférence, soirée… Infos et programme complet : 04 91 33 45 14 - www.dakiling.com.

MarseilleJusqu’au 17 mai à la galerie La Tangente (Hall des antiquaires du marché aux puces, 30 chemin de la Madrague-Ville, 15e arr.), « Die Erfindung der Malerei », exposition du peintre Martin Noll. Infos : 04 91 58 30 95

- http://la.tangente.free.fr.

MarseilleActualité de notre collaborateur émérite Benito Pelegrín. Jeudi 28 mai, de 11h à 12h sur les ondes de Radio Grenouille (88.8 FM) et à 19h librairie Païdos (54 cours Julien, 6e arr.), l’auteur de Marseille, quart nord donne rendez-vous pour une rencontre autour du livre.

MarseilleVendredi 29 mai, 20h30 à l’Affranchi (212 bd Saint-Marcel, 11e arr.), concert gratuit du groupe de rap marseillais La Méthode. Infos : 04 91 35 09 19 - www.l-affranchi.com.

Martigues- Port-de-BoucDu 12 au 20 mai, le Théâtre des Salins et le Théâtre du Sémaphore accueillent la seconde édition de Cirk en mai, festival de cirque. Au programme : Cirque Trottola, Thierry Thieu Niang-Patrice Chereau-Catherine Germain, Jerôme Thomas, Gilles Defacque et les Cousins. Mercredi 20 mai, de 14h à 17h, colloque et rencontre professionnelle sur « Le cirque au-delà des frontières ». Infos : 04 42 49 02 00 - www.theatre-des-salins.fr.

Saint-Laurent-du-VarSamedi 9 mai, 9h30-19h place de la Fontaine, le Comité de sauvergarde de la ville organise sa traditionnelle Fête de la littérature. Au programme : 80 auteurs, de 20 maisons d’édition, café littéraire, conférence, dégustations, visites, etc. Infos : www.villagesaintlaurentduvar.fr.

VerdonSamedi 16 et dimanche 17 mai, le Parc naturel régional du Verdon organsie ses 3e Caminades, un week-end de balades et sorties découvertes sur cinq communes de son territoire (Régusse, Aiguines, La Martre, Riez et St André-les-Alpes). Au programme : balades thématiques et animées (à pied, à cheval, en vélo, en kayak) sur la faune, la flore, l’histoire, la géologie, le paysage ; animations (expo. photo, projection, conférence-débat, spectacle, concert, etc.) ; dégustations, visites culturelles, etc. Infos : www.parcduverdon.fr.

VitrollesAu Moulin à Jazz (Domaine de Fontblanche) en mai : Ben Aronov trio (samedi 9 mai 21h) ; Francesco Bearzatti Tinissima Quartet (samedi 23 mai 21h). PAF : 10 euros. Infos : 04 42 79 63 60 - www.charliefree.com.

associat ions

Alpes-de-Haute ProvenceA l’occasion de son 60e anniversaire, le 19 juin, la Ligue de l’enseignement des Alpes de Haute-Provence (Fédération des Oeuvres Laïques - FOL 04) recherche des documents d’archives pour préparer une grande exposition rétrospective sur l’histoire de la Fédération et l’éducation populaire dans le département : photos, articles de presse, documents, logos, livrets pédagogiques, etc. Infos : 04.92.30.91.00 - [email protected].

MarseilleOuverture de « Le seul problème » (46 rue Consolat, 1er arr.), lieu social et autogéré où il est possible et recommandé de se poser un peu, bouquiner, boire un café ou une mousse, discutailler du beau temps et du reste, essayer des fringues ridicules, etc. A disposition : une bibliothèque, une librairie (bon, qui va pas tarder à se mettre en place), des concerts acoustiques, un infokiosque, une distro pour la musique, des bouffes végétariennes, des projections, un magasin gratuit, des expos, des logiciels libres, les éditions et le label acratos, etc. Infos : 04 91 50 86 27.

Maison fondée en 2003 Adresse 11 boulevard national, 13001 Marseille. Site internet www.leravi.org Courriel <[email protected]> Téléphone 04 91 08 78 77 Fax 04 91 62 03 21 Dépôt légal 12-09-05 -ISSN : 1760-1754 Directeur de la publication Étienne Ballan Rédacteur en chef Michel Gairaud <[email protected]> Grand reporter Jean-François Poupelin <[email protected]> Développement Chloé Charlier <[email protected]> Ils ont écrit dans ce numéro Étienne Ballan -Didier Beau -Eric Besatti -Rébecca Blackfoot -Jean-Pierre Bonicco -Antoine Fontana -Michel Gairaud -Christophe Goby -Rafi Hamal -Rémi Leroux -Adèle Monlairjih -Cap’tain Némo -Pierrick & Sylvain -Antoine Pateffoz -Jean-François Poupelin -Rackham -Jean Tonnerre

Ils ont dessiné dans ce numéro Ben8 -Brock Olly -Charmag -Marie Chéné -Fathy -Christophe Lopez -Moix -Red -Tone/CDM -Trax -Yacine Secrétariat de rédaction Agnès Chapal -Zazimut Maquette et mise en page Marc Douguet <[email protected]>

N°CPPAP 1208G83983 Imprimé à IPS, Z.I des Iscles, 13160 Châteaurenard le Ravi est édité par l’association “la Tchatche”

n° 63 mai 2009

rencontres et débats

les rencards

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le Ravi n°63 mai 2009 - RTT 27poids lourd

Chanteur, supporter, comédien, écrivain,

héros de reality show, Francis Lalanne est désormais homme

politique. Tête de liste aux européennes dans le sud-est pour l’Union des

écologistes indépendants, conglomérat de

groupuscules, il a pour modeste ambition de

sauver la planète.

Par Didier Beau

Moi, Francis Lalanne

Le christ vert

1 Cette alliance regroupe divers groupuscules écologistes refusant de

s’afficher à la gauche de l’échiquier politique mais n’hésitant pas à s’allier à droite : le

Mouvement écologique indépendant (Antoine Waechter), France en action (Jean-

Marc Governatori), Génération écologie (Jean-Noël Debroise) 2 Citation authentique

de sa conférence de presse 3 Ibid. 4 La Provence, 7 avril. 5 Citation authentique

6 TF1, 2007, émission de Cauet 7 Ibid 8 En 2003, Lalanne a partagé avec

Joey Starr, la primeur d’une émission de téléréalité baptisée 60 jours et 60 nuits.

9 Citation authentique de sa conférence de presse 10 « On se retrouvera », chanson

du film Le Passage, coproduit par Francis Lalanne et réalisé par son frère. 11 Citation

authentique de sa conférence de presse 12 Vidéo-gag publiée le 7 avril sur

laprovence.com 13 Citation authentique de sa conférence de presse.

Il faut sauver notre mère, notre seule patrie, la teeEEERRrre. (Précédé par son chant, Francis Lalanne entre au

siège de la Société nautique de Marseille sur le Vieux-Port. Nous sommes le 6 avril, c’est la conférence de presse

de lancement de sa candidature comme tête de liste de l’Alliance des écologistes indépendants pour les élections

européennes (1). Il a son costume habituel : catogan rouge dans les cheveux, bomber noir de supporter et bottes

de cavalerie. Il envoie des baisers à la petite poignée de journalistes et à quelques fans –d’anciennes copines de

lycée– venus assister à ses débuts en politique. Il s’agenouille aussitôt et embrasse le sol). Chers amis, merci à tous

d’être venus me soutenir. En effet, j’ai préféré mener ma liste sur le territoire qui m’a fondé (2). Ah… Marseille…

Ville vermeille… Tu m’émerveilles… (A sa droite, le chercheur Michel Villeneuve, délégué régional de Génération

Ecologie tousse). J’ai grandi sur cette terre et même si je suis un arbre en voyage, vous savez, que c’est ici que

mes branches sont enracinées (3). C’est ici que je veux pousser mon cri : si on veut sauver la terre, il faut

commencer par l’étang de Berre (4).

Je ne l’ai jamais raconté mais c’est au bord de cette mer fragile, cette mère souillée par l’argile que j’ai écrit

mes premiers textes. Mes cheveux déjà longs et soyeux battaient dans le Mistral. Oui Denise, vous pouvez me

toucher les cheveux. Je pensais à mon premier amour, je pensais à l’humanité, je pensais aux mots que j’allais

forger, forts comme l’épée, pour conquérir la liberté. Et, dans l’eau moussante, les muges passaient, le ventre

au vent. Dans leurs yeux morts, j’ai vu le destin qui

m’attendait, j’ai pleuré mais je l’ai accepté. J’ai aussi

compris que mes mots ne suffiraient pas. Il fallait que

je m’engage corps et biens dans ce combat. (Il tente

de déchirer sa chemise mais le tissu résiste. Alors il la

déboutonne). Oui Monique vous pouvez m’embrasser

le torse...

Désormais, nous serons présents à toutes les

élections. Il faut mettre les mains dans le cambouis

et reprendre le pouvoir que l’on nous a confisqué

(5). (Un journaliste lève le doigt pour une question que

Francis Lalanne n’écoute pas : il est en train de caresser

le chihuahua de Monique). Comment ça, un problème

de crédibilité ? Mais pas du tout : je suis chanteur,

acteur, écrivain, supporter. Je touche tout le monde.

Tiens, est-ce que vous savez que je suis celui qui,

en France, a découvert le slam, qui lui a donné son

âme (6). (Il lève l’index et le pouce). En récompense,

le hip-hop a sauvé le hippie que je suis (7). Joey, si

tu m’entends de ta prison, courage, je t’ai écrit une

chanson (8). (Un autre journaliste tente une question

sur les précédentes élections perdues par le chanteur,

mais le chihuahua de Monique lui saute à la gorge).

Quoi ? Des échecs ? En 15 jours de campagne à

Strasbourg, on a fait 4e avec 4 % des voix. C’était un

galop d’essai. A Montauban, aux municipales, on a fait

7 %, mais il y avait une dissémination de l’opposition

(9). Là, je vise la victoire dès le premier tour. Les gens

ne m’ont pas oublié. Je suis quand même celui qui a

appris le mot anathème à des milliers de lycéennes.

Vous vous souvenez ? (Monique, Denise et Nicole se

lèvent et balancent les bras : Pense à moi comme je

t’aime et tu me délivreras, tu briseras l’anathème qui me tient loin de tes bras (10)). Alors ? Ah… Ah… Donnez-

moi ma guitare. (Un assistant se précipite et lui tend son instrument. Il s’ébroue et commence une chanson avec

un improbable accent anglais). Qu’est qu’on attend pour faire de l’énergie avec le vent ? Qu’est-ce qu’on attend

pour sauver faire place nette, pour sauver la planète ? Lala, lala… (A la fin du morceau, il salue bien bas les trois

fans éperdues qui l’applaudissent à tour de bras. France Gamerre, la présidente d’honneur de Génération Ecologie

les a rejointes, un briquet allumé au poing. Michel Villeneuve tente de disparaître en sortant à quatre pattes de la

salle).

Merci, merci… Le 24 avril je sors un livre, le 28 avril je sors un disque. On verra s’ils pâtissent de mon

engagement politique (11). On verra si la censure existe encore dans ce pays. Certains ne veulent pas entendre

les vérités que nous avons à dire. Par exemple sur l’incinérateur de Marseille. Il existe des solutions écologiques

pour faire face à ce problème : grâce à l’épuration biologique, on peut éduquer des micro-organismes à ingérer

les polluants (12). Moi-même, j’ai éduqué des micro-organismes pour faire face à un problème de pellicules qui

me poursuit depuis de longues années. (Il dénoue son catogan et un flot de cheveux lui tombe sur les épaules.

Monique s’évanouit). Je peux secouer la tête, il n’en reste rien. Vous voyez, les solutions existent.

Et n’allez pas croire que, pour moi l’écologie est une découverte récente. Déjà, dans les années 70, à Marseille,

j’avais créé un trio avec mes frères qui s’appelait Bib Folk. Et oui, bien avant, Brigitte Bardot, je me souciais

de l’avenir des animaux (Tonnerre d’applaudissements au premier rang). Et puis mes idées dépassent la seule

écologie : car le premier espace à dépolluer, c’est la République (13). (Il s’emporte et commence à crier). Il faut

bouter les tyrans hors de la France gouvernementale ! Il faut bouter les Soudanais hors du Darfour ! Il faut

imposer une langue unique à l’Europe ! Une seule armée, une seule équipe de foot ! Il faut un nouvel hymne !

Je l’ai composé. Si vous voulez, je le chante ?

(Trois journalistes se lèvent et font mine de sortir. Lalanne tente de retenir l’un d’eux par le bras). Attendez, j’allais

chanter… (Le journaliste tire le chanteur par la chemise qui finit par craquer. On entend des bruits étouffés de

bagarre puis un grand PLOUF !). Fin de la conférence de presse.

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24 RTT - le Ravi n°63 mai 2009 -

le Ravi monte sur Seynele Ravi est monté sur Seyne jeudi 16 avril dernier à l’espace expos-concerts-philo & citoyen « Les Chantiers de la Lune ». Et quel succès, mes Amis ! D’innombrables Seynois sont venus à notre rencontre et débattre sur le dossier spécial « le Ravi crèche à La Seyne-sur-Mer ». Mais voilà qu’au fur et à mesure de l’avancée des discussions, le propos s’est très vite concentré sur la question de la politique culturelle à La Seyne-sur-Mer. Les Seynois en avaient presque oublié notre présence ! C’est que la formule « débat citoyen » fonctionne plutôt bien et surtout que des espaces de parole sont nécessaires !

Pour conclure la rencontre, les deux frères Psaïla du groupe « Petite Musique » ont proposé un petit concert acoustique, empreint d’amour de la scène ! La soirée aurait pu finir sur ces notes musicales, mais certains dont l’équipe du Ravi et Petite Musique ont décidé de prolonger la fête au Damero, LE cyber-café-coiffure de la Seyne-Sur-Mer !

Découvrez Les Chantiers de la Lune : www.leschantiersdelalune.com

Ecoutez Petite Musique : www.petitemusique.net ou www.myspace.com/petitemusique

Semaine de la presse à l’écoleEt voilà, l’aventure pédagogique du Ravi est finie pour cette édition 2009.

Elle s’est terminée en caricatures avec les élèves du lycée professionnel Le Châtelier à Marseille le 17 avril dernier. Au total, ce sont 280 collégiens et lycéens de la région qui ont participé aux ateliers de sensibilisation à la presse indépendante et au dessin de presse animés par le Ravi.

Une centaine de dessins ont été produits par les élèves sur des sujets tels qu’Arkéma, le Pape et le sida ou encore l’anniversaire de Tchernobyl. Journalistes et dessinateurs ont dû user de ruses pour faire passer des messages aux jeunes. Rendez-vous l’an prochain ?

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les amis du Ravi

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le Ravi n°63 mai 2009 - reportage dessiné 15

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2

le Ravi n°63 mai 2009 Au sommaire du mensuel régional

qui garde le moral

Page 3Contrôle technique de la démocratie

Conseil municipal de Pertuis (84)

Page 4Marie-Arlette Carlotti nous quittePicasso revientLe quizz 5à9

La grosse enquêteGrogne sociale

pourrissement ou printemps ? Sommaire détaillé page 5

10à13Notre belle région(g) Page 11Européennes : l’élection mal aiméePage 12 Fitness : Bustes fermes, cuisses galbées et... têtes voiléesPage 13

Yapasquepaca

Pinochet n’en finit pas de mourir 14&15

Les européennes en dessins : Parachutages, vols relatifs

et chutes libres

16à20métropoles & trous jolisPage 17Marseille : Lutte finale sur le portPage 18Marseille : une partie de boules hors de prixDigne / Gap : accidentés de la carte judiciaireDocu friction : saisie Madoff à AntibesPage 19 Avignon : la justice conforte AmnestyCannes : une rumeur nommée MouillotPage 20 La grande Tchatche : Karim Zéribi

21à26RTT

Sommaire détaillé page 21Page 27

Poids lourd Moi, Francis Lalanne

Page 28Le reportage dessiné 156 habitants, 12 caméras

édito

Attention, trains à l’heure !On est d’accord. Tout va mal. C’est la crise. Le chômage est en hausse. Le mois d’avril a été pluvieux. La grippe porcine pointe son nez. Nicolas Sarkozy, l’omniprésident en lutte contre les bandes cagoulées, se caricature et ne nous fait même plus rire. Les grandes manifestations font le plein de mécontents mais le gouvernement fait le sourd et les syndicats peinent à rebondir. Les partis en campagne pour les élections européennes ont, eux aussi, du mal à se faire entendre. Et le phénomène ne concerne pas que la France : un Européen sur trois en moyenne envisage de s’abstenir le 7 juin prochain. La possibilité d’une alternative n’effleure quasiment plus les esprits. Pour la plupart des gens parce que la politique n’a plus de sens, pour d’autres encore parce que tout changement semble relever d’une chimère inaccessible.

Et pourtant. Nous le décrivons dans notre « grosse enquête » ce mois-ci : parallèlement à un durcissement souvent désespéré des conflits, un air de fête et d’inventivité égaye le mouvement social. Sous la lumière des projecteurs, parfois aussi en la fuyant, nombreux sont ceux qui expérimentent, cherchent et souvent trouvent. Et pourtant. Après l’hiver le printemps, ma bonne dame ! Une société est comme un corps vivant. Jamais figée contrairement aux apparences. Elle vieillit, bien sûr, mais elle se renouvelle. Demain ne sera jamais comme hier.

Alors, pour une fois, oublions un instant les trains qui déraillent pour parler de ceux qui arrivent à l’heure. Il peut s’agir des bus. Ceux d’Aubagne et de son agglomération dans les Bouches-du-Rhône seront désormais, dès le 15 mai, totalement gratuits. Une façon concrète de valoriser le pouvoir d’achat et de batailler contre le règne tout puissant de la voiture. Dans un autre registre, le Conseil général du Vaucluse a adopté, le 17 avril, une motion s’opposant à toute culture d’OGM sur son territoire. Deux exemples. Il y en a d’autres. Les collectivités locales ne sont pas condamnées à gérer la pénurie. Elles peuvent donc faire aussi – incroyable ! – de la politique.

le Ravi Infos & satire seront au rendez-vous du prochain numéro du Ravi chez les marchands de journaux dès le vendredi 5 juin. Ou chez vous, la veille, en remplissant le bulletin d’abonnement page 24.

le Ravi de plâtre

Marie-Josée RoigLe troisième mandat de la députée-maire UMP d’Avignon se transforme en chemin de croix. Abandonnée par les siens – mort de son élue à la Culture, démission de son premier adjoint -, Marie-Josée Roig vient d’être épinglée pour la deuxième fois en moins d’un an par la Cour régionale des comptes (CRC). Après son administration de la cité des papes (le Ravi n°55), l’instance de contrôle vient de fustiger sa cogestion avec Claude Haut, président socialiste du Conseil général du Vaucluse, de Citadis, une société d’économie mixte immobilière détenue majoritairement par la ville d’Avignon et le Département. Clou du rapport, les cadeaux de départ à la retraite de Michel-Jean Vève, directeur de la SEM jusqu’en 2006 : 588 895,34 euros de bonus, dont la moitié en « prime exceptionnelle » illégale selon la CRC, et le rachat de son appartement de fonction à un prix négocié en 2002. Soit 509 000 euros pour un « coquet 220 m2 en centre ville, avec ascenseur privé et piscine sur la terrasse » (Le Canard enchaîné, 08/04), la moitié de sa valeur de 2006… Coïncidence malheureuse : le 27 mars, quatre jours après la publication du rapport, la députée-maire déposait une proposition de loi « visant à exclure la résidence principale de l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune » pour aider « nombre de Français [qui] doivent aujourd’hui s’acquitter d’un impôt destiné selon eux aux « plus riches », simplement parce qu’ils ont travaillé afin de devenir propriétaire, ou encore tout simplement hérité ». Sans commentaire.

J-F. P.

Si elle était un animal : Une pieSi elle était une chanson : « Je te donne »Si elle était un objet : Une casseroleSi elle était une devise : « L’argent ne fait pas le bonheur »Si elle était un film : « Moi y’en a vouloir des sous »

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12 notre belle région - le Ravi n°63 mai 2009 -

Franchir la porte d’une salle de sport n’est pas évident pour tout le monde. Notamment pour certaines femmes pour lesquelles pratiquer un sport à côté d’un homme ne s’inscrit pas forcément dans leur culture. Afin d’amener ce nouveau public vers les joies de l’effort, des salles de fitness dédiées exclusivement au sexe féminin ont vu le jour et se multiplient dans la région (dix neuf en paca). La recette d’un tel succès ? La simplicité du programme : 3 séances de 30 minutes par semaine, une déco « girly » rose bonbon, des coach féminins, aucun chromosome mâle en vue, et des machines spécialement adaptées aux besoins des clientes femmes.

« Machines aux morphologies féminines »Lady Fitness, par exemple, à Toulon, est un centre de remise en forme réservé exclusivement aux femmes. « Les clientes qui viennent chez nous sont plus à l’aise parce qu’il n’y a pas d’hommes. C’est d’abord ce qu’elles recherchent, ça évite les regards qui peuvent être gênants ou équivoques, et de toute manière, nos machines sont adaptées uniquement aux morphologies féminines », explique Florence, gérante de la franchise. Mais un tel engouement suscite des questions ! En effet, nombre de salles de sport proposent déjà des cours qui, sans être explicitement interdits aux hommes, n’en sont pas moins fréquentés que par des femmes, ne serait-ce que parce qu’ils mettent l’accent sur le travail de certaines zones du corps qui posent manifestement plus de problèmes aux femmes qu’aux hommes. Alors pourquoi un tel succès ?

Ces salles de gym d’un nouveau genre, font aussi le bonheur de celles et ceux qui par une pratique rigoriste de la religion, refusent toute mixité. « Nous avons un certains nombre de clientes musulmanes et juives orthodoxes qui viennent chez nous, avoue Yannick Navarro, gérant d’un lady fitness à Marseille. Elles ne souhaitent pas être soumises aux regards masculins. Des maris nous téléphonent également, pour savoir si notre établissement est bien réservé uniquement aux femmes. Certains, accompagnent leurs épouses pour vérifier avant de les inscrire. On les rencontre, on leurs explique, mais ils n’ont pas le droit de dépasser l’accueil. » Nous voilà rassurés !

« Une communautarisation des salles de sport »Ce phénomène est bien entendu, diversement apprécié par les associations qui luttent pour l’égalité entre homme et femme, et qui voient là l’expression d’un repli identitaire. « Refuser la mixité, sous prétexte d’éviter les regards équivoques, n’est rien de plus qu’une régression, condamne Renée Clergue, militante féministe du MRAP

Marseille. Pour les femmes, il n’y a aucune émancipation à rester entre soi, c’est une communautarisation des salles de sport. » Même écho chez Michèle Vianès, présidente de l’association Regards de Femmes et tête de liste Debout la République, pour les européennes, dans le Sud-Est : « c’est un apartheid sexué qui est contraire aux principes républicains ».

Des salles de gym comme refuge de nouveaux archaïsmes ? « La grande majorité des femmes qui viennent là, le font volontairement, pour leur bien être personnel. Et le fait qu’elles gardent leurs foulards sur la tête, ne gêne, ni ne nuit à l’ambiance ou à l’activité », assure Yannick Navarro. Affiner sa silhouette sans dévoiler sa tête ? « On ne peut pas cautionner une servitude, même volontaire, dans la mesure où ça va à l’encontre des principes de la République. La mixité est un des fondements de notre société », rétorque Michèle Vianès.

« Attention à l’intégrisme laïc »Un débat qui énerve beaucoup Mouloud Aounit « Derrière les réactions inquiètes de certains, se cache, en fait, une

véritable islamophobie, explique le président national, souvent contesté, du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap). C’est un

choix délibéré, si elles se sentent mieux entre elles, pourquoi pas. Le débat sur la mixité

sous l’angle des salles de sport ou des piscines, ne prend pas en compte les libertés individuelles. Il faut prendre en considération l’identité des uns et des autres. » Avant de conclure : « il

faut faire attention à l’intégrisme laïc». « Au nom du relativisme culturel, on prive les gens de liberté, s’offusque Michèle Vianès. Mouloud Aounit utilise des arguments différentialistes,

pour enfermer les gens dans leurs origines. »

Cafés pour hommes, hôpitaux pour femmes et salles de sport non mixtes… Une vision qui à l’évidence ne séduit pas Zineb Doulfikar,

Fondatrice et présidente de l’Association « ni putes ni soumises » dans les Alpes-Maritimes. « Nous sommes pour la mixité en tout lieu, sauf au hammam, explique-t-elle.

Quand on remet en cause la mixité, on remet en cause l’égalité et on réduit les femmes à l’état de mineures. Quand on regroupe des gens de même sexe et

de même ethnie dans une même structure, on obtient un ghetto. » Indignation plus

nuancée chez Isabelle Vassas, chef de file du mouvement des Chiennes de garde à Aix-en-Provence : « si la démarche de ces femmes est volontaire et dictée uniquement par un désir de se retrouver, pourquoi pas. Mais si leur conduite est dictée par une contrainte religieuse, ou d’ordre masculin en

général, là, ce n’est plus un choix réel, et il faut le dénoncer ». Après la guerre des

sexes, le cloisonnement des sexes…

Rafi Hamal

Des salles de sport d’un nouveau genre font leur apparition dans la région. Exclusivement réservées aux femmes, fréquentées par des clientes musulmanes ou juives orthodoxes, elles inquiètent les défenseurs de la mixité…

Bustes fermes, cuisses galbées et… têtes voilées !

É M I S S I O N S S P É C I A L E S

FESTIVAL LES MUSIQUESDu 6 au 26 maiOrganisé chaque année à Marseille par le GMEM, centre national de création musicale, «Les Musiques» permet aux Marseillais d’avoir accès à la création musicale contemporaine. La Grenouille se fait l’écho de ce festival depuis de nombreuses années, et cette année encore les compositeurs et interprètes présents à Marseille à cette occasion passeront par le studio de la radio, pour partager leurs musiques.

> ESPACE TEMPS Les mardi 19, jeudi 21 et samedi 23 mai à 14h30Trois rendez-vous pour explorer les relations de la musique contemporaine à l’espace et au temps, en compagnie des artistes invités du festival

> CHRONIQUES Tous les jours à 9h30A travers sa chronique tout au long du festival, Raphael de Vivo, directeur du Gmem, propose un éclairage sur les concerts des musiques 2009

Retrouver toute la programmation de Radio Grenouille sur le www.grenouille888.org

colonne Maurice

Lady Moving : Aix En Provence, Antibes, Cannes, Marseille, Nice. Lady Fitness : Marseille, Toulon. French Curves : Aix en Provence, Avignon Sud, Cagnes Sur Mer, Cannes Sud, Gemenos, La Seyne Sur Mer, Marseille 10ème, Marseille 7ème, Marseille 8ème, Marseille la Valentine, Plan De Cuques, Saint Raphaël

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Elections algériennes : 100 % bidonnéesQui dit mieux ? Abdelaziz Bouteflika, le chef de l’Etat algérien, s’est fait réélire à 90,24 % pour un troisième mandat le 10 avril dernier. Un chiffre astronomique qui n’est pas vraiment une surprise tant le scrutin n’était, une fois de plus, qu’un simulacre de démocratie. Mais si le pouvoir algérien n’a pas le sens de la mesure, il semble avoir gardé celui de l’humour : il affirme sans sourciller, prenant le contre-pied de tous les observateurs, que le taux de participation s’est élevé à 74,54 %. Programme de l’heureux élu ? « La continuité. » Tout est dit...

« Our body » disséquéeLors du passage à Marseille, en décembre dernier, de « Our body, à corps ouvert », l’exposition « anatomique » de cadavres, nous n’avons pas mâché nos mots. Dans un reportage dessiné, le Ravi a dénoncé une exhibition « de monstres de foire pour faire du fric », un spectacle sordide reposant sur la mise en scène des « opposants au régime dictatorial de Pékin ». 35 000 personnes s’y sont précipitées, 100 000 curieux l’avaient plébiscitée à Lyon début 2008, 120 000 visiteurs s’y sont rués à Paris ces dernières semaines. Mais le tribunal de grande instance de la capitale vient de conforter nos propos en interdisant l’expo. Motif ? Elle porte « une atteinte illicite au corps humain ». Une victoire pour les associations Ensemble contre la peine de mort et Solidarité Chine. Contrairement aux affirmations de la société privée commercialisant l’exposition, de sérieux doutes planent sur l’origine des corps. « De nombreux indices, nous laissent soupçonner qu’il s’agit de condamnés à mort chinois », affirme Hélène Labbouz, d’Ensemble contre la peine de mort (Le Monde 22/04). Quand on sait que le billet d’entrée coûte plus de 15 euros, on comprend que les organisateurs fassent appel...

« Allende, c’était la fête sur les épaules de mon père », raconte Rosamunda, la quarantaine passée et l’accent sud américain prononcé. La fête s’achève à la Moneda avec le bombardement du Palais en septembre 1973. Agée de huit ans, Rosamunda vivait avec sa famille dans le sud du Chili. Son père, cadre du parti communiste et syndicaliste à Endesa, la compagnie d’électricité du pays, retourne au travail défendre l’Unité Populaire. Sans armes puisque Allende avait réquisitionné les armes réclamées par une frange extrémiste mais clairvoyante de la gauche. « Toutes les personnes de son bus ont été arrêtées » : Cinq d’entre elles ont disparu, dont le père de Rosamunda.

Les jours suivants, la mère de Rosamunda ne désarme pas et cherche son époux. Elle essayera de le retrouver toute sa vie. « Elle est allée à la caserne, à la marine, partout. Elle a finalement découvert la voiture de mon père chez un capitaine de la marine, une 4 L : c’est la seule trace de mon père. » Comme le dénonce l’écrivain chilien Luis Sépulveda, « chaque soldat, chaque policier, chaque officier fit fortune sous la dictature en trafiquant avec l’effroi ». Enceinte d’un autre enfant, elle a traqué une trace, visitant les morgues, les commissariats qui en sont souvent l’anti-chambre. Elle l’a cru dans un camp au nord du Chili mais en vain. Ils seront au moins trois mille à “disparaître”, uniquement des hommes. « Trois ans plus tard en Argentine, des femmes et des enfants aussi seront “desaparecidos”. Pinochet avait du respect pour les femmes », plaisante Rosamunda.

« Les militaires l’ont tué »

Un jour où son frère demande où se trouve leur père, la famille répond qu’il est en voyage : Rosamunda, elle, éclate : « C’est les militaires qui l’ont tué ». En 1979, elle revient à Santiago où sa famille vit dans les quartiers sud, une zone où la police ne fait pas tout à fait la loi, comme

à la Victoria. Elle y retrouve “les rouges” qui organisent des anniversaires pour faire des réunions politiques interdites. « J’avais la rage, pas seulement de la jeunesse. » Elle en a assez du culte des disparus, de cette omerta sur le passé de leurs pères : « On disait, il travaille en Argentine, il est au Nord. Résultat ils m’ont virée parce que je ne supportais pas qu’on se batte pour la mémoire. »

Quand Pinochet voulait faire un tour, le couvre-feu était décrété. Cela n’empêche pas Rosamunda de sortir pour des concerts. Son adolescence est agitée malgré le couvre-feu, joyeuse et révoltée en dépit de la propagande de la télévision: “Mañanà mejor”; Le Chili va bien, qui contraste avec une réalité plus sombre pour ceux qui avaient connu l’enthousiasme du Chili d’Allende. Un jour, on l’invite à voir un film et on lui demande: « Tu veux faire quelque chose pour ton pays. » Elle acquiesce ; dès lors elle se retrouve engagée auprès du Mouvement de la jeunesse Lautaro, du nom d’un guerrier Mapuche, héros de la résistance. « Je me suis retrouvée avec une “Chapa” un surnom pour la clandestinité. »

« Y va caer »« Les protestations démarraient au son d’une cloche, puis les casseroles sortaient de toutes parts, las ollàs en chilien. On chantait : Lucia, Lucia, la ollà esta vacia (1). » Lucia était le nom de la femme de Pinochet. Ces formes de protestation venaient du Nicaragua. Comme ces rassemblements spontanés à l’image du Teatro del Silencio, « On se rassemblait, puis on sifflait Y va caer (2) et on se dispersait. »

Rapidement Rosamunda en aura assez de ces protestations trop inoffensives. Après la prise de conscience, commence l’action politique. Les Lautaro, membre du MAPU, ont pour mission autant de tuer “les pacos” les carabiniers comme on les appelle au Chili, que de jeter un cocktail Molotov sur une banque ou d’agir en direction du peuple : récupérer

des chaussures par exemple. « On entrait tous à la même heure dans les magasins Bata, et l’un de nous sifflait - c’était le signal que tout le monde reconnaissait - alors on lançait des palomitas, des tracts, et l’un de nous criait : On est pas des voleurs, on est une organisation politique. » Les camions de poulets ramenés à Victoria aussi subissaient les raids de ces encagoulés qui avaient pour armes, « des pistolets défectueux »…

Les derniers exilés

Un livre de Xavier Montanyà, Les derniers exilés de Pinochet, édité chez Agone, revient sur le spectaculaire attentat contre Augusto Pinochet initié par un groupe du même genre que celui de Rosamunda. Le 7 septembre 1986, un commando du Front Patriotique Manuel Rodriguez (FPMR), bombarde d’un feu nourri le cortège du dictateur chilien. En 1988, un plébiscite pro-Pinochet est repoussé par la population. Cette victoire du non au maintien du dictateur Pinochet amorce un simulacre de démocratie : les militants du FMPR comme les Lautaro restent en prison. Rosamunda s’est déjà exilée en France.

En 1990, 49 militants du FMPR s’échappent de la prison de Santiago. Xavier Montanyà retrace leur incroyable évasion par un tunnel creusé durant un an et demi. Rosamunda exulte à Toulouse avec d’autres exilés. Aujourd’hui encore, beaucoup craignent de rentrer dans le Chili « démocratique » de la présidente Michelle Bachelet. La transition démocratique, qu’ont bien connue les Espagnols après Franco, s’éternise. La mort de Pinochet en 2006 n’a pas rendu à Rosamunda son père. « Le coup d’état de 1973 a radicalement changé le cours de ma vie et de huit millions de Chiliens », souligne-t-elle. Aujourd’hui encore, les exilés de Pinochet attendent une véritable réhabilitation.

1 « La gamelle est vide » 2 « Il va tomber »

le Ravi n°63 mai 2009 - notre belle région 13

Pinochet n’en finit toujours pas de mourirPar Christophe Goby

Plus de deux ans après la mort d’Augusto Pinochet, la « transition démocratique » au Chili n’a pas créé les conditions favorables au retour de tous les exilés. Notamment ceux qui ont lutté jusqu’au bout, armes au poing, contre la dictacture. Un nouveau livre publié chez Agone retrace leur combat. Qu’évoque aussi Rosamunda, aujourd’hui expatriée à Marseille...

Suite à un problème technique, le texte « A Madagascar la paix, pas encore la démocratie »

(Ravi n°62, avril 2009) a été amputé de toutes ses citations. Retrouvez dans son intégralité cet article

de Benoît Gilles en ligne sur le www.leravi.org (page d’accueil, rubrique numéro en cours).

Madagascar

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« Je remercie Pellenc SA »

par Jean-François Poupelin

18h32 Une clochette carillonne pour la troisième fois. Caché par un écran qui ne laisse voir que le crâne chauve de sa tête ronde, Roger Pellenc, le maire UMP, gronde : « Mes chers collègues, nous allons commencer ! »

18h39 Roger Pellenc, PDG de Pellenc SA, leader mondial de la robotique agricole, a invité Jean-Claude Féraud, maire UMP de Trets et vice-président de la Communauté d’agglomération du Pays d’Aix, et Serge Lerda, directeur de l’habitat de la CPA, pour présenter la politique en matière de logement de l’intercommunalité. Leur retard l’impatiente : « Nous allons avancer. »

18h45 Un portable sonne ostensiblement. Elie Baudoin, délégué aux foires et marchés, pique un fard plein de dignité.

18h52 Pierre Féraud, adjoint à l’urbanisme, se précipite pour accueillir les retardataires. Lancé dans la lecture (soporifique) de son activité depuis le dernier conseil, le maire n’esquisse pas un geste. Ambiance...

19h00 Roger Pellenc, solennel : « Avant de donner la parole à Jean-Claude Féraud, permettez-moi de rendre hommage à son papa Jean, ancien maire de Trets, qui était aussi médecin et qui a œuvré dans de nombreuses associations viticoles (sic). » Minute de silence réglementaire. Le maire se met au garde-à-vous de circonstance : bras contre le corps et tête baissée.

19h18 Errare humanum est. Elie Baudoin affiche naturellement le teint rose-rouge de Michel Vauzelle, président socialiste de Paca.

19h25 Jean-Claude Féraud se veut didactique et assure : le logement est « un problème grave, ni de droite ni de gauche » mais il est « parfois difficile de construire des logements sociaux [parce que] chaque commune a ses spécificités ». Puis de se réjouir : « Un projet de loi prévoit de donner au maire le contingent préfectoral [car] c’est ingrat de lui imposer des gens d’ailleurs. » Un discours finalement très orienté politiquement.

19h34 Serge Lerda prend le relais. Pause cigarette.

19h48 Le technicien conclut face à une assemblée interdite. Noëlle Trinquier (DVD), petite quinqua aux cheveux courts, tacle le maire de sa petite voix : « En intervenant au dernier conseil, je voulais juste attirer votre attention sur le projet de villas que je ne trouve pas clair. » Roger Pellenc fait la moue.

19h55 Une jolie brochette de retraités se lève d’un seul homme et quitte la salle. A son rythme.

19h57 Christina Berard (PS) s’indigne du rachat par la Logirem, un bailleur social, de 16 des 18 villas dans le cadre du plan gouvernemental de sauvetage des promoteurs immobiliers : « Il faut qu’il arrête de laisser l’existant se dégrader ! » Chacun y va de sa réflexion. Finalement, Jean-Claude Féraud exulte : « On peut lui demander une contrepartie ! » Sourire gêné, Serge Lerda douche la liesse : « En quatre ans, ils n’ont pas répondu à un seul de mes courriers… »

20h05 Départ des intervenants et retour à l’ordre du jour. Un bon quart du public a déjà déserté.

20h20 Délibération 6, « Acquisition pour la réalisation d’un parking ». Noëlle Trinquier « s’interroge » : « En 2006, nous souhaitions acheter ce terrain pour en faire un jardin public. Il avait été estimé à 25 000 euros parce qu’en zone inondable. Finalement, un particulier l’a acheté 70 000 ! Et aujourd’hui, il vous le revend à 45 000 ? » Le PDG-maire louvoie : « Le parking est très urgent à faire. »

20h32 Délibération 8, « Modification du règlement intérieur du conseil municipal ». Très discret jusque-là, Fabien Perez, tête de file des socialistes, demande la parole. Cravate rose, blazer, jeans, le beau

gosse du PS local attaque drapé de sa robe d’avocat : « Nous sommes flattés que vous ayez pris en compte nos remarques dans la modification de l’article 21. Mais nous aurions été plus flattés si vous l’aviez retiré ! Si vous avez la police de l’assemblée, vous n’avez aucune possibilité d’expulser un conseiller comme vous vous en octroyez le droit ! » Et de s’emporter : « Vous rêvez d’une mairie sans opposition, sans élus, sans majorité ! » Conclusion tout en effets de manche : « J’appelle tous les conseillers à voter contre cette disposition illégale, pour que Pertuis

ne se ridiculise pas. On ira au tribunal administratif ! »

20h43 Fureur de Roger Pellenc, ancien soixante-huitard tendance anarchiste, selon sa bio officielle de La Provence reprise sur le site Internet de

la mairie : « Vous êtes à la limite de la diffamation. Vous me faites un procès d’intention en disant que je n’aime pas la démocratie et vous me qualifiez de fasciste quand vous affirmez que je ne veux pas de conseil ! »

21h00 Le conseil a retrouvé une certaine sérénité. La séance avance au rythme de rapports plus ou moins bien préparés. Noëlle Trinquier s’en délecte en multipliant les interventions.

21h16 Suite à l’annonce de l’augmentation des droits de place des foires et marchés par Elie Baudoin, Roger Pellenc explique : « Ca nous coûte 106 000 euros par an. » Rigolade d’un couple de jeunes retraités : « On va pouvoir racheter des caméras de vidéosurveillance ! »

21h25 Délibération 17, « Subvention FIPD pour extension de la vidéoprotection ». Plus 126 caméras sur trois ans. Préposé aux grandes causes, Fabien Perez se lance : « Nous y sommes évidemment favorables. » Puis d’attaquer : « Par contre, on se pose des questions sur les sept caméras posées en janvier : trois l’ont été au centre technique municipal, vous surveillez le personnel municipal ? Pourquoi n’y a-t-il pas eu de demande de subvention et de vote en conseil ? » Agacement de Roger Pellenc : « Ce matériel nous a été prêté pour résoudre un problème de transmission. »

21h48 Devant l’insistance du socialiste, le maire prévient : « Vous êtes en train de franchir la ligne blanche ! » Alain Manzoni, son conseiller à la Sécurité, vole à son secours : « Nous préparons la télé… gestion… urbaine que nous allons mettre en place avec le nouveau matériel ! » Fabien Perez n’en démord pas : « Il y a une législation ! Qui vous a prêté les caméras ? Quel

bilan ? » Excédé, Roger Pellenc tranche : « Monsieur Perez, le débat est clos ! » Une voix contre dans l’opposition, le reste s’abstient...

21h53 Le maire annonce les questions écrites. Lucette Reynaud (PS) attaque : « Comment expliquez-vous le départ de si nombreux cadres et fonctionnaires ? » Retranché derrière son écran, Roger Pellenc lit sa réponse d’une voix monocorde : « A notre arrivée, le dialogue social était horrible… » La fin se perd dans les rires du public.

22h05 Nouvel accrochage entre le maire et Fabien Perez. L’ambiance est électrique. Roger Pellenc fulmine : « Lisez votre question ! » L’avocat : « Je fais ce que je veux ! Des employés de SA Pellenc ont été vus en mairie… » Explosion du PDG-maire : « Une fois de plus, vous mettez en cause l’équipe municipale ! » Replongé dans ses notes, il lit, laconique et sans fausse pudeur : « Je remercie Pellenc SA pour ses interventions, le prêt des caméras et je m’élève contre ce procès d’intention mesquin à l’encontre d’élus à l’éthique des plus respectable... » La kermesse reprend.

22h17 « La section Sud Lubéron du PCF s’étonne de ne pas avoir reçu de réponse à sa demande de mise à disposition du boulodrome », interroge à son tour Jean-Jacques Dias, colistier de Noëlle Trinquier. Petite vengeance du maire : « Je leur ai dit dès le 28 octobre dernier que selon le cahier des charges de l’ancienne municipalité ça n’était pas possible… »

22h24 Toujours sous la protection de son écran, Roger Pellenc clos le conseil de son agressivité habituelle : « Voilà, la séance est terminée ! »

le Ravi n°63 mai 2009 3

P e r tu i s conseil municipal 24/04/2009

Pertuis (84) Aucune fleur au Concours des villes et villages fleuris.

Un projet de 42 caméras supplémentaires.

Le maire : Roger Pellenc (UMP) depuis 2008. Vice-président de la Communauté d’agglomération du Pays d’Aix. PDG de Pellenc SA. 65 ans.

La majorité :

L’opposition :

et un groupe de 2 conseillers de la liste « Agir pour Pertuis » (DVD).

Le conseil municipal soumis au test du Ravi :

f iche technique

Fabien Perez Conseiller PS d’opposition

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elle s'en va

1) « En 1929, c’est la seule industrie qui a été épargnée »

a Nicolas Sarkozy, omniprésident pédagogue, à propos des usines fabriquant la corde utilisée par les nombreux désespérés qui se sont pendus pendant la grande crise.

b François Fillon, 1er ministre discipliné, à propos des casinos et autres jeux de hasard qui ont toujours prospéré en période de dépression économique.

c René Kraus, directeur du nouveau multiplexe «Capitole studio» au Pontet (84), à propos du cinéma qui se porte actuellement à merveille.

2) « C’est un mélange paradoxal de glamour, de superficiel et de culture »

a Le rédacteur en chef de GQ, Gentlemen’s quarterly, à propos de ce nouveau magazine masculin français «haut de gamme» copie conforme d’un magazine américain.

b David Lisnard, président du Palais des festivals, 1er adjoint UMP de la ville, à propos... du festival de Cannes bien entendu !

c La rédactrice en chef de Elle, l’hebdo féminin de référence, à propos de sa ligne éditoriale qui assure, comme pour le Ravi, une augmentation constante de ses ventes.

3) « Je n’ai jamais dit que le russe était la langue des porcs »

a Jean-Michel André, le père de la petite Elise, enlevée par sa mère à Arles (13).

b Nicolas Sarkozy, après la lettre d’excuses que Ségolène Royal a adressée à Vladimir Poutine, le 1er ministre de la fédération de Russie.

c Mahmoud Ahmadinejad, le président iranien, lors d’un discours fleuve prononcé pendant la conférence mondiale contre le racisme Durban II.

4) « Je n’ai pas changé d’un iota »

a Julio Iglésias, célèbre Andalous qui justement n’a pas changé, qui est toujours ce jeune homme étranger, qui te chantait des romances...

b Jean-Marie Le Pen, vieil homme politique d’extrême droite aux provocations défraîchies, pour rassurer ses adeptes dépités par sa terne campagne aux élections européennes.

c Nicolas Sarkozy, en visite à Nice pour y vendre ses dernières mesures sécuritaires (interdiction de la cagoule dans les manifs...) affirmant que cela n’a rien à voir avec la période électorale qui s’ouvre.

Réponses : 1 : c (La Provence le 19 avril) ; 2 : b (Studio Ciné live de mai) ; 3 : a (le JDD, le 19 avril) ; 4 : c (AFP le 21 avril).

Ci-gît Marie-Arlette Carlotti (1952-2009),

victime d’un suicide politique à la sauce marseillaise.

A la manière de ses illustres homonymes, Jean-Noël Guérini,

l’homme fort du PS des Bouches-du-Rhône, a décidé du sort

de sa conseillère générale (depuis 1998)

et députée européenne (depuis 1996).

Une sentence qui a moins à voir avec la désinvolture politique

de l’ancienne DRH dans l’aéronautique (gamelles aux législatives

de 2002 et 2007 et faible présence à Strasbourg)

qu’avec ses crimes de lèse-majesté. Première faute aux yeux de

Jean-Nono : le manque de travail de Marie-Arlette

dans son canton (une partie des 1er et 4e arrondissements)

lors des dernières municipales, secteur dans lequel s’est joué

le scrutin. Deuxième péché : son soutien à Bertrand Delanoë

puis à Martine Aubry, la future lauréate au poste de Premier

secrétaire, lors du congrès du PS de Reims plutôt qu’à

la « ligne claire » et royaliste de son patron. Troisième hérésie :

mise en doute devant les caméras de France 3 de la régularité

du vote interne dans les Bouches-du-Rhône. Le seul véritable

acte politique de la députée européenne…

Le contrat a été exécuté sans bavure :

privation de vice-présidence au conseil général,

amputation de la moitié de sa section, non renouvellement

de son investiture pour les européennes de juin. Le coup

de grâce devrait intervenir l’année prochaine, lors du

renouvellement du canton de l’ex-future conseillère générale.

En 2008, Marie-Arlette Carlotti titrait ses cartes de vœux :

« Tournons une page… » Prémonition ?

Jean-Noël Guérini a fini par l’exaucer.

J-F. P.

Marie-Arlette

Carlotti

« Nos morts continuent de vieillir avec nous. »

Enfin, c’est ce que je disais de mon vivant. J’en ai fait

de belles déclarations, presque autant que des peintures.

C’est dire ! « Un tableau ne vit que par celui qui le regarde. »

Je vais donc, une fois de plus, par œuvres interposées, ressusciter du

25 mai au 27 septembre. À Aix-en-Provence,

ils ont été grisés par le succès de l’exposition Cézanne en 2006 : une

affluence record de 450 000 visiteurs.

Ils adorent l’art dans cette ville. Surtout lorsqu’il est synonyme

d’hôtels et de tiroirs caisses bien remplis, ceux des commerçants qui

règnent en maîtres sur la cité du Roy René.

« L’art est dangereux, que je disais.

La peinture n’est pas faite pour décorer les appartements. C’est un instrument de guerre offensive contre l’ennemi. »

Tu parles ! L’ennemi a fait de moi un milliardaire

et de mes idéaux communistes, une plus value.

Après Cézanne, le musée Granet va donc tenter

de doubler la mise avec une exposition « Cézanne-Picasso ».

Qui dit mieux ? Je propose pour 2013,

l’année Marseille-Provence capitale européenne de la culture,

une exposition « Cézanne-Picasso-Van Gogh ».

Pour fuir le bling-bling et l’agitation de la Côte d’Azur -

pas trop longtemps quand même ! - je m’étais offert le château de

Vauvenargues au pied de la Sainte Victoire que l’autre fada n’arrêtait

pas de représenter. J’y suis enterré, sous l’escalier principal. Et bien

cet été, les portes du château seront exceptionnellement ouvertes : 40

000 personnes, par petits groupes, pourront s’y ruer, en frémissant à

l’idée de frôler ma tombe. Faut que je leur dise : y’a plus rien du tout

là dedans ! Mais bon, après tout : « tout ce qui peut-être imaginé est réel »...

M. G.

il revient

Q U I Z Z par Rackham

Qui a dit ?

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le Ravi n°63 mai 2009

Pablo

Picasso

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le Ravi n°63 mai 2009 - RTT 25navet par Brock Holly

tv Plasma et vieilles antennes

Pelage bleu contre pelage rouge : 2-1Par Rébecca Blackfoot

Année : 2009. Jour : dimanche 19 avril. Heure : 17h00. Terrain d’affût : Snack-bar du Camas à Marseille, lieu dit L’Estaminet. Sujet d’observation : troupeau d’individus d’âges hétéroclites, majoritairement de sexe masculin, venu s’abreuver à la fontaine lumineuse et rectangulaire qui trône au centre de la tanière. Technique d’approche : toute en douceur et en discrétion, à la fois se fondre dans le groupe et demeurer en retrait, sur ses gardes. Poste d’observation : la table de zinc posée sur le bitume sur laquelle on s’accoude pour consommer et fumer beaucoup. Nous sommes au cœur du parc urbain national de Massilia et l’enjeu est de taille. Les mammifères se retrouvent, poussés par la force d’un même instinct grégaire qui génère les migrations des oies sauvages. Un événement se prépare. La tension est palpable.

Le groupe est tout entier tourné vers la fontaine à images. Cette dernière inspire puis expire les âmes. Une intense attention succède à des temps de dissipation, et l’écran perd par intermittence de son pouvoir d’attraction. On note alors la diversité des échanges : les femelles, la progéniture, le travail et les licenciements économiques. Chaque petit groupe retrouve pour un temps son identité propre avant de se fondre à nouveau dans une unique conscience tribale.

Fascinant : sur l’écran, une mise en abîme vertigineuse. Les mammifères scrutent les mouvements d’un autre troupeau - une autre espèce ? - qui s’agite sur fond de pelouse chlorophylle. Pelage rouge contre pelage bleu. Le poil vif, le muscle ample, la crinière au vent et le mollet agile. On se rend d’emblée compte que l’on se trouve, là, face à des spécimens de haute qualité, des mâles dominants sans aucun doute. Le chef de meute adulé de l’espèce des Gerets, aussi appelé Lion de Rekem, pose son regard d’acier sur les combats des plus jeunes qui s’entrechoquent dans l’air en bombant le torse, et retombent au ralenti dans d’acrobatiques arabesques sur le lourd terrain de la steppe verte. Parfois une bête se retrouve à terre et hurle à la mort, elle présente les stigmates d’une insoutenable douleur avant de retourner dans la course. Une rixe éclate : les fauves immatures s’intimident et mesurent leur virilité dans un combat improvisé vite régulé par les anciens qui agitent de petits cartons rouges.

Les mammifères spectateurs communient avec les images qui se reflètent sur les parois de l’antre dans une gestuelle étrange et codifiée. Bras au ciel qui interrogent les astres, mains croisées sur le crâne en signe de profond désespoir, série de petits sauts en cascade accompagnés de cris stridents et de rauques râles traduisant une joie intense, larges embrassades viriles incontrôlables et incontrôlées... Une explosion de rugissements, en apothéose, clôture le rassemblement avant que la dispersion s’organise lentement sous la pluie. « Oh, putain ! J’ai souffert ! », stridule un mâle grisonnant en s’éloignant du groupe. Nous aussi.

net Sur la toile

My blog is beautiful (3/3)Par Rémi Leroux

Traversons la plaine virtuelle de la Crau pour rejoindre Arles (13) et faisons halte sur la toile locale. Là-bas, sur les berges du Rhône, sévit un redoutable blogueur. Appelez-le Rimbus (http://rimbusblog.blogspot.com). L’objet de la présente étude se présente comme « social-créatif arlésien, serial blogueur et voyageur ». Il assure que, collectivement, nous (« vous ») sommes son principal centre d’intérêt. A la lecture de son profil sur Blogger, l’on apprend également que Rimbus, la quarantaine, apprécie le cinéma de Tarantino et Terry Gilliam, les romans d’Alphonse Allais ou encore les chroniques de Stéphane Guillon sur Inter (dont il poste les vidéos).

On constate encore que le « social-créatif » compte pas moins de trente-quatre abonné-e-s fidèles à son blog et qu’il a des centres d’intérêts aussi variés que l’Afghanistan, la bande dessinée, l’Islam, Arles, les médias, la tauromachie et bien sûr… la politique. Il a également suivi de très près l’enlèvement d’Elise survenu à Arles – la petite fille a depuis été retrouvée – mettant à jour son site chaque fois que l’affaire faisait un pas en avant.

Rimbus sait aussi parler de lui – art que tout bon blogueur doit savoir maîtriser –, et c’est sans doute-là qu’il est le plus subtil. Discrètement, il vous fait avaler son dimanche pascal en famille sans que vous y voyez à redire. Entre un billet sur Pierre Etaix, « cinéaste qui ne peut plus montrer ses films » et une critique de la loi Adopi, vous reprendrez bien un peu de gigot ? Il illustre également certains billets de remarquables portraits dessinés…

Repéré par Vendredi, le seul journal à coucher sur papier le meilleur du web, son blog a été présenté mi-février dans l’hebdomadaire, à la rubrique « L’Invité ». « Rimbus, pouvait-on lire en accroche, est le diminutif d’un directeur de création d’une agence de pub, père de famille honorablement connu des services de police de la ville d’Arles et néanmoins laïcard de conviction. » Sic.

Dans le fond, Rimbus est bien de son temps, bien de son époque. Les blogueurs comme lui ne sont pas légion dans la région. Son mérite est d’autant plus grand qu’il vit dans une ville où les traditions sont parfois si prégnantes qu’elles ont tendance à provoquer des failles spatio-temporelles et à vous éloigner d’une certaine idée que l’on se ferait du présent. Rimbus, lui, a su s’en accommoder et jongle à merveille avec ces différentes temporalités. Serait-ce donc ça, le double effet internet ?

A noter enfin – et même si cela n’a rien à voir avec tout ce qui précède – la naissance d’un nouveau blog d’info marseillais animé par les étudiants de l’Atelier-journalisme Marseille : http://cestquoilhistoire.wordpress.com. Dans son édito, Emmanuel Riondé, journaliste à l’origine du projet, présente « C’est quoi l’histoire » comme un blog qui « ne s’inscrit ni dans la case du « journalisme participatif » (autre air du temps), ni dans celle du « témoignage citoyen », mais entend pleinement donner à lire des reportages, entretiens, portraits, billets d’humeur, chroniques, etc. » Une belle histoire…

Tous les mois dans le Ravi, l’animateur de Rue89 Marseille

surfe dans notre région virtuelle…

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Mauvaise chute d’un échafaudage, intoxication à l’amiante ? Le tout agrémenté d’un litige avec la Sécu ou un employeur peu compatissant ? Si vous habitez du côté de Gap (05), vous serez bientôt prié d’aller vous faire voir à Valence (26), et tant pis si vous avez du mal à vous déplacer. Et si vous créchez à Digne (04), direction Nice (06). Car vous relevez du Tass, tribunal des affaires de la Sécurité sociale, amené à déménager – le projet de décret est en tout cas rédigé – pour cause de « rationalisation » : le gouvernement envisage de fermer 44 de ces tribunaux en France – ceux qui traitent moins de 550 affaires par an. Des cas « insignifiants » : les conflits entre les organismes d’assurance-maladie, les assurés et les employeurs portant sur les accidents du travail, les maladies professionnelles, les indemnités journalières, les retraites... Ces litiges concernent donc souvent des grincheux à faibles mobilité et ressources.

Si ce projet est confirmé, adieu donc la salle de Gap, située pour l’heure au tribunal de grande instance. Le justiciable devra parcourir 170 bornes, par le col de Cabre (parfois fermé), pour rallier Valence. De Briançon (05), le voyage sera encore plus longuet. Si on emprunte le TER, prévoir des sandwiches en sus de la paperasse. D’ailleurs, pour le justiciable de Digne, la Drass (direction régionale des affaires de sanitaires et sociales) note, pince-sans-rire, que le train des Pignes dessert Nice, raconte Agnès Vibert-Guigue, le bâtonnier de l’ordre des avocats des Hautes-Alpes.

« Cette très mauvaise mesure va pénaliser des personnes en situations de précarité et de fragilité, s’indigne-t-elle. Le Tass gère des contentieux liés à la vie quotidienne, des situations graves, des fautes inexcusables de l’employeur, ce doit donc être un tribunal de proximité. » Car dans les Tass, on croise peu de patrons privés de golden parachutes : s’y tiennent

plutôt des « audiences sacs plastiques », explique sans mépris l’avocate pour, souvent, « des petites gens » qui amènent ainsi

les affaires dont ils ont besoin.

Le gouvernement est une fois de plus parvenu à faire l’unanimité contre lui, des magistrats aux avocats, en passant par les politiques de tous

bords (le député PRG Joël Giraud, le sénateur UMP Pierre Bernard-Reymond, le président PS du conseil général des Alpes-de-Haute-Provence Jean-Louis

Bianco…). La CGT et des organisations patronales ont également donné de la voix. La Fnath (association des accidentés de la vie) et l’Andeva ne s’y sont

pas trompées non plus. Cette dernière relève que les victimes de l’amiante, qu’elle défend, « ont engagé à ce jour près de 15000 actions judicaires devant les Tass ». On voudrait s’épargner des recours devant ces tribunaux et, partant, permettre à la Sécu d’économiser quelques deniers qu’on ne s’y prendrait pas autrement. Et certains perfides de s’interroger : qui est à l’origine de la réforme ? Le ministère de la Justice ou celui de la Santé ?

Antoine Pateffoz

Digne / Gap

Accidentés de la carte judiciaireLe gouvernement supprime des tribunaux des affaires de la Sécurité sociale. Façon d’économiser sur le dos des petites gens et de la justice de proximité.

Marseille

Une partie de boules hors de prixL’Immobilière des chemins de fer (ICF) réhabilite le terrain de boules de l’association de la cité de Saint Barthélemy. Problème : le local de 35 m2 et l’aménagement autour coûte 240 000 Euros, dont 80 % est subventionné par le Conseil régional.

18 Métropoles & trous jolis - le Ravi n°63 mai 2009 -

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Avec ses 672 logements, la cité de Saint Barthélémy (14e arrondissement de Marseille) est l’une des plus importantes de l’Immobilière des chemins de Fer (ICF), bailleur HLM rattaché à la SNCF qui consacre la moitié de ses appartements aux salariés de l’entreprise publique. Une population vieillissante qui n’a pas beaucoup de distractions accessibles dans le quartier. Aussi, quand Georges d’Urso décide, voici 5 ans, de créer une association bouliste, il se retrouve rapidement avec 90 adhérents. « On l’a créée pour que les anciens ne s’emmerdent pas toute la journée dans la cité, explique ce Napolitain de souche. Rapidement, on a demandé à avoir un local pour que l’on puisse mieux organiser nos tournois, avoir des toilettes pour les dames et puis une petite salle de réunion. » L’ICF demande alors au Conseil général 13 qui refuse, puis au Conseil régional qui accepte. Mais le dossier est repoussé durant 3 ans. « Le premier chiffre que j’ai vu, c’était 80 000 Euros pour le local, se souvient Georges d’Urso. Puis, à chaque fois qu’on retardait le chantier, ICF me présentait un nouveau dossier et les coûts montaient, montaient. »

Aujourd’hui, le terrain de boules est en plein chantier. Le local tant attendu est sorti de terre et le terrain occupé par des matériaux de construction, ce qui oblige les retraités à taper la boule sur le parking à côté. A l’entrée, un panneau indique que le local (35 m2) et l’aménagement de ses alentours sur une surface de 100 m2 coûte au total 240 000 Euros, dont 190 000

financés par le Conseil régional. « Le local ne coûte que 153 000 Euros, rectifie Bernardette Moutte, l’architecte et maître d’œuvre

du Chantier. Le reste de l’enveloppe est consacré à l’aménagement paysagier. » Le petit bâtiment des boulistes revient quand même à

lui seul à 4 500 Euros le m2. « Nous avons dû creuser profondément pour les fondations car le terrain est constitué de remblais, se justifie Bernadette Moutte. Nous avons également dû tirer des tuyaux pour

raccorder les sanitaires au réseau. Nous avons prévu des fenêtres en alu sur mesure et la rampe handicapée obligatoire est très chère. » Il n’empêche : le prix du local est au minimum deux fois plus cher que ceux pratiqués sur ce genre de chantier. Plus surprenant encore, le projet a fait l’objet de deux subventions : 108 089 Euros en 2007, puis un complément de 82 445,76 Euros. « Le projet a été modifié en cours de route, ce qui justifie cette seconde subvention, précise-t-on à ICF. Nous avons dû déplacer le local à cause des règles d’urbanisme, ce qui a fait grimper les honoraires. Nous trouvons également que le prix est très élevé, mais le Conseil régional a accédé à chaque fois à nos demandes de subventions. » Le terrain de boules devrait être opérationnel début juillet. Quant à l’aménagement paysagier, ce sera pour la rentrée...

Jean Tonnerre

Visionnez notre vidéo en complément de cet article sur le www.leravi.org

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le Ravi n°63 mai 2009 - RTT 23

Indéfendable rosé par Etienne Ballan

La controverse. Il n’y a pas si longtemps, le 6 décembre 2006 précisément, la France autorisait l’irrigation de la vigne. Qui s’en est soucié ? Avant cette date, dans les basses plaines du Languedoc et du Roussillon, on faisait déjà pisser la vigne en la noyant, sous prétexte de la dessaler. Là-bas, les plus grandes maisons gardent leurs terres au bord de l’eau (douce ou salée), histoire de faire monter les rendements globaux. Dans les Côtes du Rhône, on envoyait déjà la flotte au secours des sécheresses pour atténuer le stress hydrique du pauvre petit cep payé par les emprunts au Crédit Agricole... Bref, pour « sauver » la tête de quelques vignerons, on a bien admis qu’ils pouvaient mettre de l’eau dans leur vin. Alors quoi ? Maintenant que l’Europe veut fabriquer du Rosé en coupant du Blanc avec du Rouge, on crie au scandale ? La Provence se soulève pour défendre son patrimoine culturel, son cher Rosé obtenu par macération ? Rectification : les vignerons provençaux ont tout misé sur ce Rosé, seul vin dont la consommation augmente, et qui s’exporte bien (les Japonaises en raffolent, paraît-il). Il représente plus de 80 % de leur production, et les autres régions viticoles en crise voudraient bien jouer sur ce filon pour écouler leurs stocks de Rouge et de Blanc. A vrai dire, les Ricains le font déjà et l’Union européenne voudrait donner leur chance aux Européens de jouer à armes égales sur le marché juteux des gosiers chinois. Mais de quoi on parle, au juste ? Ce Rosé de Provence apparemment si savoureux, mais qu’on a vomi tous les samedis soirs de son adolescence, il est temps d’y regoûter.

Le vin. Pour cela, on tape dans le classique, un Château Bas, a priori bonne adresse du pays d’Aix, dans la cuvée de base (1). Et là, René est d’accord avec moi sur la discrétion de ce liquide « passe-partout », presque fade. Ginette le dit avec ses mots : « Il n’éclate pas dans la première bouche. » Alors on cherche l’arôme dans le nez, le goût de retour, mais la surprise ne vient pas. La couleur, elle, est au rendez-vous, subtile, ensoleillée. Bref, un teint de pêche, mais un goût de pêche pas mûre. René lui cherche des excuses : « Au moins, il n’a pas l’acidité du Rosé du bord de la nationale, servi dans une carafe bien fraîche, avec la sieste derrière. » De la finesse, certes, mais à force de se resservir, on hésite : « Il ne serait pas déjà coupé ce Rosé-là ? », demande Ginette. A l’eau alors, histoire de pouvoir le servir aux enfants, ou de l’emmener en randonnée dans un thermos bien frais. Comme si l’eau qui perlait sur la bouteille froide s’était glissée à l’intérieur. En Provence, on n’irrigue plus la vigne, on irrigue directement le vin, c’est plus rentable… Y’a plus qu’à espérer que l’Europe soit d’accord !

Château Bas, L’Alvernègue 2008, 5,40 €.

(1) Dans ces châteaux qui exportent, la segmentation du marché est une histoire ancienne : à chaque clientèle et à chaque bourse son vin. N’espérez plus acheter du bon vin pour pas cher : la devise du vigneron est dorénavant de vous en donner juste assez pour votre argent, mais jamais plus.

Pas contre mais pour...Par Sylvain, futur paysan

Tout petit déjà, j’étais contre... Contre les courgettes juste bouillies dans leur jus, contre mon père (que j’aime beaucoup), contre le gratin dauphinois trop liquide, contre l’école et les 4 directeurs(trices) qui m’ont congédié, contre la soupe à la betterave non aromatisée, contre l’autorité, contre le néo-esclavagisme, contre la tartine au beurre de cacahuète sans rien dessus. Plus je grandissais, plus j’étais contre, même le fait de grandir me déplaisait assez... Mais maintenant, je ne suis plus contre mais pour !

Je ne suis plus contre le clergé, mais pour la désacralisation de ses représentants. Je sais maintenant que même le pape a dû connaître les plaisirs de l’éjaculation (avec ou sans préservatifs) et que même les nonnes pètent !

Les pets de nonnesIngrédients : 10 cl d’eau - 20 g de sucre semoule - 40 g de beurre - 65 g de farine de blé - 2 oeufs.

Portez à ébullition l’eau avec le sucre et le beurre coupé en morceaux. Hors du feu, versez la farine en pluie grâce à une passoire et mélangez lentement à l’aide d’une spatule en bois pour obtenir une pâte un peu collante. Ajoutez les œufs et mélangez. Plongez des petites boules de cette préparation dans de l’huile bouillante et faites refroidir sur du papier absorbant. Accompagnés de coulis de fruit ou de chocolat fondu, c’est divin, et sachez-le !! Les pets de nonnes, ça sent bon !!!

Je ne suis plus contre les Américains mais pour qu’on arrête de laisser les Bush s’amuser.

Un petit amuse-bushFaites fondre le beurre, coupez les feuilles de bricks en 4, vous avez 4 formes camembert que vous badigeonnez de beurre, roulez-les en cornet, placez de l’aluminium dans vos cornets, pour maintenir la forme, déposez-les sur une plaque à four recouverte de papier sulfu côté jointure et passez au

mélangé à tous les ingrédients dosés à votre convenance, c’est super beau et bon, et ce petit cornet simple et magique permet aussi de stimuler votre créativité quant à la farce pour les remplir...

Je ne suis plus contre le fascisme, mais pour qu’on arrête de lui donner de la matière au travers de lois « démocratiques » à la façon Sarkozy.

Le sar cosy(sur son lit de fenouil sauvage beurré à l’ail)

Mixez ensemble du beurre, de l’ail et du persil, de façon à avoir une noisette par filet. Préparez des feuilles de papier alu que vous recouvrez de jeunes pousses de fenouil sauvage que vous trouverez partout en ce moment, dans nos vertes collines bien arrosées de pluie printanière. Posez vos filets de poisson sur le fenouil, saupoudrez d’aiguilles de romarin, d’une rondelle de citron,de quelques câpres, d’olives et de la noisette de beurre mixé. Fermez la papillote, et mettez au four ! heure th.7... puis dégustez avec des tagliatelles fraîches.

Je ne suis plus contre la violence, mais pour que l’école arrête de fourrer dans la tête de nos enfants les histoires et héros de la guerre, au détriment des histoires et héros de la paix...

Tiramisu à la mandella cocoIngrédients :

Tapissez le fond du plat de 2 couches de spéculos auparavant imbibés de café (si vous avez de l’amaretto rajoutez-en au café, ou de l’eau de fleurs d’oranger), réservez au frigo. Séparez les blancs des jaunes d’oeufs. Dans un bol, mélangez le jaune, le sucre et le sucre vanillé jusqu’à ce que ça mousse un peu, puis rajoutez le mascarpone, l’amande, amalgamez bien tout ça et incorporez doucement vos blancs montés en neige. Versez cette préparation sur vos biscuits. Passez votre coco sous le gril du four 2 mn, puis disposez-la sur votre tiramisu, mettez au moins 10h au frigo et avant de servir, saupoudrez de cacao...

Je ne suis plus contre le capitalisme, ses barons et ses multinationales, mais pour ses alternatives. Je ne suis plus contre la malbouffe, mais pour acheter de bons produits, le plus directement possible du producteur au consommateur, pour cuisiner... Un système ne marche que lorsqu’on le finance, alors à nous de financer le système qui nous va. Les alternatives existent, encore faut-il qu’elles puissent se développer...

picoler... c'est déjà cuisiner

supporter... c'est déjà picoler

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Ah, cette bonne cité militaire au passé glorieux (six ans de FN aux manettes), où creuser un tunnel sous la ville (dans un seul sens) prend une décennie… Trêve de railleries faciles, aujourd’hui Toulon est gouvernée par un UMP bon teint, Hubert Falco, et la ville et sa communauté d’agglomérations (Toulon Provence Méditerranée – TPM) participent à Marseille Provence 2013. La « cité phocéenne » a un rôle

prééminent, mais l’association Marseille Provence 2013 (MP 2013 pour faire court), qui porte le projet, insiste : la capitale culturelle est un territoire (de Arles à Hyères, en passant par Aix). Alors et Toulon, « sa rade, son port » ?

Justement, ça devrait servir, la rade est un des « sites incomparables » dudit territoire mis en avant par MP 2013. Et la Grande Muette sera également de la fête pour la cérémonie d’ouverture, qui aura lieu en mer, à Marseille : elle y enverra quelques rafiots armés de canons.

Question artillerie, TPM c’est aussi onze communes (dont Hyères et La Seyne) et 403 743 habitants. TPM et la Ville de Toulon (qui font partie du conseil d’administration de MP 2013) apportent 7,35 millions sur cinq ans, participant au budget à hauteur de 7,5 % (22,5 % pour la communauté urbaine marseillaise et la Ville).

Afin de toucher l’ensemble du territoire, MP 2013 entend faire tourner au maximum expos, spectacles, œuvres, etc. De plus, affirmait récemment Bertrand Colette, le bras droit de Latarjet à la tête de l’association, « il y a des lieux emblématiques sur TPM dans lesquels notre programmation s’inscrit très bien, comme l’Opéra [de Toulon], Châteauvallon [Ollioules] ou la Villa Noailles [Hyères] »*. Mais aussi : le Conservatoire national, le futur théâtre de la Liberté à Toulon, le pôle jeune public du Revest, la Villa Tamaris à la Seyne... La Seyne qui, au passage, s’est fait souffler le projet de théâtre de la Liberté par Toulon (Cf le Ravi d’avril)…

Il reste encore de nombreux lieux à définir, mais d’ores et déjà le Festival international de mode et de photographie d’Hyères, à la Villa Noailles, « s’ouvrira aux rencontres méditerranéennes particulièrement avec la ville de Tanger » à partir de 2009. Dans les tuyaux également, les « Ateliers de l’Euroméditerranée » en entreprises avec Optis ou le programme Science et Méditerranée (La Seyne et Toulon). Et le Musée de Toulon devrait accueillir des œuvres dans le cadre de l’exposition « Les peintres et la Méditerranée ».

Reste à faire entendre sa voix au sein du conseil d’administration de MP 2013. Pour TPM, c’est Jean-Sébastien Vialatte qui représente Falco. Question culture, le député-maire UMP de Six-Fours s’était fait remarquer en 2002 en coupant le courant lors de la prestation de Mass Hysteria au festival du Gaou, sur sa commune, puis en poussant le chanteur dans la fosse. Espérons qu’il garde son flegme aujourd’hui car chaque collectivité essaie de tirer la couverture à elle, la Ville de Marseille en tête, avec l’inusable Renaud Muselier qui a provoqué un sacré barouf en tant que délégué spécial de la ville pour 2013 (son credo : « faire de Marseille la star ») Ce dernier a proposé de créer un « guichet unique » pour présélectionner les projets. Il en a retiré quelques mises au point, notamment de la part de l’organisation.

Bref, Marseille a un peu de mal à partager avec le reste du territoire. Faudra bien : sans Toulon, pas de jolis bateaux militaires pour la cérémonie d’ouverture, méfi ! Et gare à Vialatte !*Toulon Provence Méditerranée Magazine n°19.

le Ravi n°63 mai 2009 21

Toulon prépare ses munitionsPar Antoine Fontana

Toulon capitale européenne de la culture. Évidemment ça peut prêter à sourire. Mais la communauté d’agglomérations toulonnaise est bel et bien embarquée sur le porte-avions Marseille Provence 2013. Et la capitale (du Var) a quelques armes, au sens propre notamment.

crash-test de la culture

Page 22 Copinage Les mots ravis Revue de presse de Marie

Page 23 Cuisiner, c'est déjà résister Picoler, c'est déjà cuisiner Supporter, c'est déjà picoler

Page 24 Les amis du Ravi Abonnez-vous

Page 25 Plasma et vieilles antennes Sur la toile Le navet La famille nucléaire

Page 26 Les rencards Nounours

au menu de RTT

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Reportage 156 habitants, 12 camérasFitness Cuisses galbées, têtes voiléesEuropéennes l’élection mal aimée

Grogne sociale pourrissement ou printemps ?

2,80

n° 63 mai 2009 www.leravi.org

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Agir en chantantParmi les heureuses initiatives : La Chorale des Mille Colombes de Christophe Alévêque. « Elle est née d’une réaction épidermique le 6 mai 2007 à 23h17mn, à Paris, suite à l’apparition de l’icône des Japonais, Mireille Mathieu, sur scène, pendant le raout «musical» de la droite décomplexée place de la Concorde », explique l’humoriste sur son blog (http://millecolombes.blogspace.fr). Son idée est de « mettre en avant, de façon humoristique, les errances et les carences de ce pouvoir et de son idéologie, dans la joie et la bonne humeur moqueuse ». S’il est inutile de savoir chanter, Ray-Ban et colombes en papier sont par contre très appréciées ! Prochain concert : mercredi 6 mai, pour les deux ans de présidence de « Zébulon », comme l’appelle Christophe Alévêque. Après onze mois de répétitions, le chœur marseillais propose un rassemblement à 20h devant le Fouquet’s de la ville (18 rue Beauvau, 1er arr.). Mireille Mathieu himself est attendue, accompagnée d’une surprise… Infos et paroles : www.levillagedesfacteursdimages.org.

J.F. P.

Penser global, manger localSi le mouvement social se montre parfois capable d’inventer de nouvelles formes de protestations sociales, il laisse à d’autres le soin de mettre en pratique des alternatives concrètes parfois… révolutionnaires. Exemple : les « Amap » (association pour le maintien de l’agriculture paysanne). Nées au Japon dans les années 60, exportées aux USA, il a fallu attendre 2000 pour les voir débarquer en France, plus précisément lors d’une réunion « malbouffe » du Comité Attac d’Aubagne (13). A la question « comment faire pour manger mieux et moins fréquenter les supermarchés ? », Denise et Daniel Vuillon, agriculteurs à Olioulles (83) ont juste raconté ce qu’ils avaient découvert à New-York lors d’un voyage pour aller rendre visite à leur fille : des consommateurs réunis en association qui achètent directement les légumes à un producteur qui pratique l’agriculture raisonnée. La première Amap a été créée sur ce modèle à Aubagne en avril 2001. Depuis, c’est la déferlante avec plus d’une centaine d’Amap en PACA et plus de 1 000 en France…

J.T.

« Gigi », c’est « un vieux de la vieille » explique Marie-Christine, sa femme. Depuis son adolescence soixante-huitarde, Gilbert Khoupiguian a toujours été engagé. Aujourd’hui quinquagénaire, délégué syndical, il est respecté dans l’entreprise. « Il en connaît un rayon et il est pas con », lance Gérard au poste de garde. Dès son entrée comme ouvrier à Ascometal, le groupe métallurgique, il adhère à la CGT. Depuis 1973, il a occupé et bloqué son entreprise de Fos-sur-Mer (13) à plusieurs reprises. Le 15 avril dernier, il fait naturellement partie de ceux qui retiennent vingt cadres, jusqu’à une heure du matin, pour exiger une meilleure rémunération du chômage partiel. Une simple « retenue gentille » selon lui. Les éphémères séquestrés ont même pu jouer aux boules...

Au Tribunal de grande instance (TGI) d’Aix-en-Provence, le 20 avril, cette action a été qualifiée « d’entrave à la bonne circulation des personnes et des véhicules ». Mais à la sortie de l’audience, « Gigi », bon vivant, ne se laisse pas abattre : « On va boire un coup ? ». « Dans les années 70, les séquestrations c’était un style d’intervention régulièrement employé, explique-t-il. On sort de l’apathie des années 80 durant lesquelles les mouvements étaient consensuels. Aujourd’hui, tout le monde est surpris parce qu’on avait perdu l’habitude de voir ça. » Explication de ce soudain durcissement ? « Au bout d’un moment, les gens, ils l’ont à la gorge ! ». Avec le chômage partiel - « un jour tu travailles, un jour tu travailles pas » - les ouvriers vivent sous pression constamment. Alors, forcément, les réactions sont plus radicales.

Les mecs, ils en ont marre, ils explosent. Si on met le couvercle, ils le font sauter !

En tant que délégué syndical CGT, Gilbert Khoupiguian n’est « ni pour ni contre » un blocage. Le 15 avril, il a suivi l’initiative des plus virulents tout en pensant qu’une autre action aurait été plus efficace. Les syndicats se sont fait « déborder » sans trop le regretter... « Les mecs, ils en ont marre, ils explosent. Et tant mieux qu’ils explosent ! On va pas les retenir ! On peut pas empêcher l’explosion ! Si on met le couvercle, ils le font sauter ! » D’autant que les plus énervés pensent que les organisations syndicales freinent parfois. « Sans mouvement, il n’y a rien ! », botte en touche Gilbert Khoupiguian, flegmatique.

Sans médias, pas de mouvement non plus. C’est le délégué syndical qui a suggéré à sa direction de faire venir les Compagnies républicaines de sécurité le 15 avril. « Se faire dégager par des CRS, ça a plus de classe et ça fait venir les journalistes ». L’ambiance est restée bon enfant : « on a bien rigolé ». Quand « Gigi » reparle de la nuit avec ses collègues, c’est avec les yeux pétillants des enfants qui reviennent de colonie de vacances. Tous regrettent toutefois les commentaires des médias sur les séquestrations victimisant les patrons et transformant les ouvriers en terroristes.

In fine, le TGI d’Aix-en-Provence a déclaré « illicite » l’action des salariés d’Ascometal mais les peines financières ont été retirées. Malgré cet avertissement, pas de résignation même si Gilbert Khoupiguian n’est pas dupe : attention à toute récidive, y compris si elle se déroule à nouveau dans la bonne humeur. « Le mouvement va continuer. Forcément. Mais sous quelle forme ? ».

Eric Besatti

le Ravi n°63 mai 2009 9

En face de la rotonde, juste à l’entrée des allées provençales, le mail commercial du quartier sextius Mirabeau, ils sont plus de cinquante à se mettre en place ce samedi 11 avril. A 11h30 précises, sur un simple geste de Benoit Dosquet, les manifestants, en grande majorité des personnes qui ont atteint l’âge de la retraite, se placent pour former un cercle. Sept pancartes sont brandies où l’on peut lire « Sans papiers mais pas sans droit », « La dignité de chaque personne ne se discute pas, elle se respecte », « Le silence pour crier notre indignation », « la solidarité n’est pas un délit ».

Durant une demi-heure, le cercle grossit progressivement d’une trentaine de passants qui se joignent spontanément au cercle. A midi, le maître du temps, comme se définit Benoît Dosquet, rompt le cercle d’un geste anodin. Même durant la dispersion, on entendrait une mouche voler. Un travail finalement pépère pour les deux motards de la police nationale chargés de la surveillance de cette manifestation de protestation.

Faire changer cette loi qui fait honte à la France

« Nous reprenons l’initiative des frères franciscains de Toulouse qui ont inventé cette forme de manifestation en octobre 2007, précise Benoit Dosquet, religieux belge arrivé voici quatre ans dans la cité du Roi René chez les missionnaires oblats, un ordre fondé à Aix-en-Provence par Eugène de Mazenod en 1816. Le silence nous permet d’entrer en communion avec ceux qui œuvrent au quotidien avec les sans-papiers. Mais attention ! Notre mouvement n’est pas religieux, il est ouvert à tous. » Joignant le geste à la parole, Benoit Dosquet tend le tract qu’il a distribué aux passants et liste les associations qui participent au mouvement des cercles de silence : le réseau d’éducation sans frontières, la ligue des droits de l’homme, Amnesty International, Attac, la Cimade se retrouvent aux côtés du Secours catholique, d’Emmaus Plan de Campagne, la pastorale des Migrants, l’Eglise réformée de France, Aix solidarité.

De fait, les mouvements chrétiens sont bels et bien majoritaires dans ces manifestations d’un genre nouveau qui se sont répandues comme une traînée de poudre dans toute la France. On compte aujourd’hui des cercles de silence dans plus de 100 villes France. En Paca, outre Aix, on en retrouve, à date fixe, à Marseille (13), Salon-de-Provence (13), Avignon (83), Toulon (83), Draguignan (83), Manosque (04), Forcalquier (04), Digne (05), Gap (05), Nice (06) et même à Cannes (06) !

« Ils font un travail de sensibilisation de la population sur le sort des sans-papiers, estime Nathalie Crubezy, qui travaille à la Cimade à Marseille. Et vu la situation dans laquelle nous sommes, on a besoin de tout le monde pour faire évoluer les mentalités et faire changer cette loi qui fait honte à la France. » Message entendu par Delphine, une passante aixoise qui s’est arrêtée 10 minutes au cercle. « Je ne connaissais pas ce genre de manifestation, mais quand j’ai vu la pancarte « allez voir Welcome », j’ai décidé de m’arrêter ». Le cinéma, aussi, peut transcender les âmes.

Jean Tonnerre

Silence, on manifeste !Un étrange rituel s’est mis en place dans 12 villes en Paca : les cercles de silence. Ce sont des manifestations silencieuses pour protester contre la politique menée par le gouvernement contre les sans-papiers. Reportage à Aix-en-Provence (13).

Radicalement gentilVingt cadres d’Ascometal « séquestrés » à Fos-sur-Mer le 15 avril. Gilbert Khoupiguian était de la fête. Mais pour lui la radicalisation des mouvements sociaux dans son entreprise, c’est plutôt « gentil ».

Grogne sociale : pourrrissement ou printemps ?

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16 brèves - le Ravi n°63 mai 2009

Le Milieu toulonnais tres coté en Chine. La justice enquête

sur un trafic présumé de diplômes à l’université de Toulon, au bénéfice de centaines d’étudiants chinois

qui auraient versé des pots-de-vin. Selon Le Monde, les Chinois venaient acheter dans la capitale varoise

un diplôme français pour embellir leur CV. D’autres universités pourraient être concernées.

A Toulon, Pierre Gensse, président du jury pour l’obtention des diplômes, affirme avoir reçu une offre

de 100 000 euros pour 60 à 80 diplômes de la part de quelques étudiants chinois. Mais il martèle

que la corruption est restée à l’état de « tentative ». La rencontre entre l’empire du milieu et la capitale

varoise du Milieu a-t-elle vraiment eu lieu ?

Marre du crucifix. Trop vu et revu depuis 2000 ans. Un Jésus sur la croix, c’est comme une virgule sur une casquette, on ne le remarque même plus. « On n’éprouve plus de réelles émotions face à quelque chose de véritablement scandaleux », déplore l’évêque de Gap (05) Jean-Michel di Falco a donc trouvé une nouvelle idée géniale : exposer dans la cathédrale de la ville un Jésus taille réelle assis sur une chaise électrique. Une oeuvre hyper réaliste de l’artiste contemporain britannique Paul Fryer. Les réactions ont été vives. Mais miracle ! L’électrocuté a réussi à attirer de nombreux profanes dans une église...

Toulon : le FN bouge encore. Sonnée par une série de défaites électorales,

à l’approche des européennes, à Toulon l’extrême droite fait preuve d’un inattendu regain d’activité.

Après avoir perturbé à plusieurs reprises les Cercles du silence de soutien aux sans-papiers, de jeunes

militants du Font National ont récemment tenté d’exploiter, sur le marché du Mourillon, l’émotion soulevée

par l’agression à son domicile d’une mère de famille enceinte. Curieusement, Me Bouguereau, secrétaire

départemental et membre du conseil municipal, ne semble guère apprécier ces initiatives.

Il boude ostensiblement ces manifestations d’activisme venues de la base.

Mais la nature ayant horreur du vide, ses absences répétées ne sont pas pour déplaire à l’amiral Waquet,

ex-responsable MNR ou encore à Dominique Michel, ancien conseiller général frontiste.

Bientot La Provence dans un Happy meal.

Le quotidien régional préféré des lecteurs dans les Bouches-du-Rhône s’allie avec Mc Do pour lancer « la formule de l’actu ». Pour 1 euro, il est désormais possible de se procurer dans certains restaurants un café et un journal. Objectif pour la Provence : rajeunir son lectorat. Nous proposons au quotidien d’approfondir sa démarche commerciale en incluant le journal dans les menus enfants « Happy meal ». Une presse sans saveur au royaume de la malbouffe…

Michel Drucker se loge dans les Alpilles. « Je suis

réellement abasourdi, déçu, blessé. » Michel Drucker a été accusé par le Canard Enchaîné d’avoir bénéficié

d’un passe droit pour construire une villa de 300 m2 en plein massif des Alpilles, zone pourtant protégée.

Le gentil animateur affirme avoir toujours respecté la marche à suivre. Alors comment a-t-il obtenu un

permis à Eygalières, là où seuls les agriculteurs peuvent bâtir ? Ce serait en fait l’oeuvre d’une mauvaise

communication entre la direction départementale de l’équipement (DDE) et l’architecte des Bâtiments de

France suite à une lettre perdue par la poste… Bien entendu ! C’est donc cette dernière qui est coupable de

dégrader le parc naturel régional…

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Le maire de Vence en prison. Christian Iacono, 74 ans, a été condamné

à 9 ans d’emprisonnement pour le viol de son petit-fils. Des faits qui se sont produits entre 1996 et

1998 quand l’enfant était à peine âgé de 5 ans. Durant le procès, le maire de Vence (06) a toujours nié

« complètement l’ensemble des faits ». Fin avril, ses avocats ont fait appel et demandé une remise en liberté

provisoire. En attendant, le premier adjoint assure l’intérim...

les vieux

Marseille Provence 2009. Le chemin risque d’être long et douloureux pour que Marseille et la Provence soient à la hauteur du label Capitale européenne de la Culture en 2013. Après les querelles politiques sur la gouvernance, l’installation de l’exposition itinérante de l’Institut du monde arabe « L’âge d’or des sciences arabes », première à être labellisée « Marseille Provence 2013 », laisse plus que perplexe sur le projet culturel. Alors qu’elle a été conçue pour une pièce sombre et confinée pour cause de vidéos et d’images de synthèse, les Archives départementales des Bouches-du-Rhône l’accueillent dans trois lieux, sans logique, dont son très lumineux hall. Autre aberration : pour raisons budgétaires, les quartels n’ont pas été traduits en arabe. Espérons que l’ensemble du projet ne subira pas le même sort...

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le Ravi n°63 7Grogne sociale : pourrrissement ou printemps ?

L’humour, l’arme fatale… Des intermittents ont marqué de leur empreinte les dernières grandes manifestations marseillaises en mettant en scène « la France rêvée de Sarko 1er ». Grâce à la brigade opérationnelle utopique marseillaise (Boum), les saltimbanques retrouvent le mordant contestataire des origines du théâtre de rue.

Ils ont eu droit au JT de TF1 et à une belle photo du Journal du Dimanche. Normal quand on s’appelle Carla et Nicolas Sarkozy. Sauf que là, c’était des masques portés par des intermittents du spectacle, juchés à l’arrière d’une décapotable, entourés de gardes du corps de Wall Street fumant des cigares et de médias enchaînés. Derrière eux, d’autres masques : les membres du gouvernement Fillon et, plus en arrière encore, des moutons symbolisant le peuple français. Le 29 janvier, lors de la première grande manifestation unitaire marseillaise en 2009, on n’a vu qu’eux : des intermittents du spectacle à l’initiative de ce carnaval politique.

« En décembre dernier, nous étions quelques dizaines, sous la pluie, à manifester en face des locaux marseillais du Medef où se déroulait une nouvelle négociation sur la réforme des annexes 8 et 10 visant une fois de plus à durcir les procédures pour accéder au statut d’intermittent, se souvient Perrine de la compagnie Sud Side. Et là, d’un coup, je me suis dit : « ça n’est plus possible, il faut qu’on invente d’autres formes de contestation «. » Un mois plus tard, Perrine se retrouve la tête dans une télé en carton, enchaînée à la voiture présidentielle dans ce qui ressemble bien à un spectacle. « L’idée est de sortir des « Tous ensemble, tous ensemble » pour faire réagir la population. Nous voulons montrer par le pastiche ce que nous pensons de la politique de Sarkozy : du spectacle, des médias à la botte, un gouvernement réactionnaire. Et tout cela n’est possible qu’à condition que les Français se comportent comme des moutons… »

Nous ne nous retrouvons pas dans les structures traditionnelles, les partis ou les syndicats

Le 29 janvier, à Nantes, Lyon, Toulouse le même pastiche était à l’œuvre. Car le défilé marseillais a, en fait, été scénarisé par un collectif nantais au doux nom de choucroute garnie. C’est la brigade opérationnelle utopiste marseillaise (le Boum) qui a fait le relais jusqu’aux compagnies des arts de la rue. « Nous existons depuis 4 ans autour d’un constat simple, explique le photographe Vincent Lucas, membre du collectif. Nous ne nous retrouvons pas dans les structures traditionnelles, que ce soit les partis ou les syndicats. Nous sommes simplement des citoyens actifs, pas des professionnels de la revendication. » Le Boum relaye également à Marseille la chorale des mille colombes créée par l’humoriste Christophe Alévèque (Cf notre reportage dessiné, le Ravi n°59). « Nous serons devant l’Opéra le 6 mai pour commémorer les 2 ans de la fête de la Concorde où Sarkozy a été célébré par Mireille Mathieu et Enrico Macias », poursuit Vincent Lucas.

Pour les arts de la rue, cette forme de contestation par l’humour est un peu un retour aux sources. Créés en réaction au « théâtre bourgeois payant », ils sont parfois guettés aujourd’hui par une certaine institutionnalisation. Marseille Provence 2013 « capitale européenne de la culture », mise d’ailleurs sur quatre défilés monstres pour remplir son quota « fête populaire ». Sarkozy et la crise économique arrivent à point nommé pour réveiller chez une partie des saltimbanques des velléités de contestation qui dépassent largement, pour une fois, leur corporation. « C’est dur de mobiliser les artistes dans le temps, avoue Perrine. C’est quand même un monde fortement individuel ». Avec le Boum, elle devait défiler à nouveau dans le cortège du 1er mai à Marseille. Une fois encore la Choucroute garnie de Nantes livre sur un plateau le scénario : un Sarkozy enfermé dans une cage dorée, protégé par une armée de patrons de la world compagnie sur lesquels on peut balancer des chaussures. Mais en raison d’un trop grand nombre d’absents, la choucroute marseillaise a été reportée à une date ultérieure. Militer, oui, mais d’abord profiter du week-end du 1er mai !

Jean Tonnerre

« Ras-le-bol des manifs répétitives! »Lassés des manifestations et déçus de leurs résultats, des militants et de simples citoyens cherchent d’autres voies. Panaché.

Christophe Massot (Marseille)Parent d’élève, retraite aux flambeaux des écoles

« Lors de la première retraite, on a été surpris du nombre de participants et des gens qui se joignaient au cortège […] L’intérêt de ce genre d’action est de se faire en-dehors d’un cadre syndical souvent mollasson. C’est une forme d’action plus fraîche, plus visible, qui réunit parents d’élèves et enseignants. C’est joli et ça répond à un vrai ras-le-bol des manifs répétitives. »

Patrice Soreil (Romette, 05)Délégué régional de la CGT Energie, « sabotages » des agents EDF

« Début avril, 400 agents ont pris le poste de transformation de Roquerousse et huit postes sources ont été basculés en heures creuses à Avignon. Ces interventions sur l’outil de travail se sont toujours faites lorsque la direction fait la sourde oreille sur les revendications. Elles expriment l’exaspération des personnels et leur radicalisation. Malgré les risques de débordements, elles sont aujourd’hui décidées en assemblée générale intersyndicale, dans l’idée de populariser le mouvement. Et si on peut rendre service aux particuliers... »

Communiquer, gagner le combat de l’information

Claire Le Monnier (Marseille)Parent d’élève, collectif Stop fichage contre la « base élèves » (Marseille)

« Notre décision de porter plainte contre X est intervenue après des actions peu suivies : pétitions, affichages… On a cherché un nouveau moyen d’informer de l’existence de ce fichier et de ses dangers. Personnellement, je me suis aussi lancée dans cette lutte parce que les gens qui la portent sont des humanistes et de vrais résistants : ils n’attendent pas une majorité pour agir […] Je ne crois pas à la supression du fichier, mais on a cette fois, eu des surpises : 36 dépôts de plainte alors qu’on est quatre dans le collectif, les medias, y compris nationaux, ont relayé l’action et la directrice de la maternelle de ma fille, qui avait abandonné le combat, m’a recontactée. Ce qui est fou, c’est qu’en portant plainte on a l’impression de désobéir, alors qu’on ne fait qu’appel à la justice. »

Franck Gaye (Nice)Enseignant, syndicaliste Sud, collectif altermondialiste les Désobéissants

« Après nos actions à Cannes et Monaco en 2008 contre l’Europe Bunker et les paradis fiscaux, on pense à occuper le rectorat ou l’inspection académique. Il existe aussi des désobéissances moins spectaculaires : des instits qui refusent les aides personnalisées, des directeurs d’école, le fichier « base élèves », les enseignants chercheurs d’être jury pour le bac, etc. C’est une forme d’action qui inquiète le gouvernement car elle permet de recréer un rapport de force et de communiquer, de gagner le combat de l’information. C’est pourquoi, il sanctionne des personnes visibles. Mais si on veut intéresser les jeunes, on a pas le choix ! »

Luc-Laurent Salvador (Montpellier)Psychologue scolaire, syndicaliste SE Unsa, cyber manifestant (http//cybermanif.ning.com)

« Comme l’a montré la cyber manif victorieuse des employés d’IBM sur Second Life en 2007, dont je me suis inspiré, cette nouvelle forme de rassemblement est l’avenir : le coût en temps et en argent est nul, la durée est illimitée et il y a une possibilité de rassembler une masse démesurée par rapport à la rue ! Il y a aussi la même dynamique de groupe, de rencontres, de liens que dans les foules. Et c’est un moyen de faire comprendre aux citoyens qu’ils ne sont pas seuls […] Pour l’instant, mon projet commence avec les mouvements dans l’éducation nationale, avec le soutien de l’intersyndicale de l’Hérault et la promesse d’un appui des Verts locaux et de mon syndicat à son lancement. »

Propos recueillis par J-F P.

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22 RTT le Ravi n°63 mai 2009

Un polar à TéhéranBeige ou noir, court ou long ? En Iran aussi, le diable se cache dans les détails. Drapée dans un tchador clair, Leila Tabihi fait passer deux messages : elle marque sa foi puisqu’elle ne se contente pas du simple foulard exigé par le régime des mollahs mais elle exprime aussi « sa modération en évitant le noir ». Le personnage de cette « féministe islamique » donne la couleur du roman que publie Naïri Nahapétian, journaliste à Alternatives économiques : une fiction toute en nuances qui permet même à d’ignorants occidentaux d’approcher la complexité d’une société où la dissimulation est devenue un art de vivre. Question de survie... L’action s’y déroule en 2005, peu avant les élections présidentielles remportées, contre toute attente, par l’ultra conservateur Mahmoud Ahmadinejad. Une histoire proche qui éclaire les enjeux du scrutin du 12 juin prochain, lourd de conséquences à l’heure où Barak Obama semble vouloir reprendre le dialogue avec « l’Etat terroriste ». Qui a tué l’ayatollah Kanuni ? est aussi un polar. Dans les sphères à la fois privilégiées et opprimées de la haute société, sur les pas de Narek Djamshid, journaliste franco-iranien de retour dans son pays natal, on y croise de fortes personnalités : Soraya, femme fatale drapée dans son long fourreau lamé or ; Mirza Mozaffar, son mari volage mais impuissant à assumer pleinement son statut d’opposant laïque ; la tribu arménienne envahissante mais maternante qui héberge Narek, notre apprenti reporter... Au fait ! Qui a bien pu prendre le risque de tuer le redouté, l’inamovible, le corrompu mais inflexible ayatollah Kanuni ? L’histoire débute dans un taxi collectif à Téhéran...

Qui a tué l’ayatollah Kanuni M.G.

Vive la grève générale !Voilà un petit ouvrage dans lequel plusieurs dirigeants (sinon tous) des huit grandes organisations de l’intersyndicale organisatrice

des festivités du 1er mai devraient se plonger : L’action directe d’Emile Pouget. Publié par la toute nouvelle et indépendante maison

d’édition marseillaise Le Flibustier - qui s’est donnée pour mission de rééditer « des textes contestataires à tendance libertaire

aujourd’hui introuvables mais qui, malheureusement, demeurent toujours autant d’actualité » -, ce texte est un petit bonheur de

manifeste de l’anarchosyndicalisme (1904). Son auteur, figure du mouvement ouvrier français de la fin du 19e et du début 20e

siècle, y plaide donc pour l’action directe, « la manifestation de la force et de la volonté des ouvriers ». Mais il défend également les

« améliorations partielles » - « importantes car elles libèrent le temps préalable à la grève générale » - et, surtout, « le sabotage ».

Développée dans le second texte du recueil, cette méthode de résistance est résumée d’une formule simplissime par Emise Pouget :

« A mauvaise paye, mauvais travail ! » Son objectif : toucher le patronat là où ça fait mal, ses bénéfices. Moult exemples prouvent

qu’il ne s’agit pas d’une lubie. Un joli livre de recettes pour rééquilibrer le rapport de force entre salariés et employeurs.

L’action directe J.F P.

Parrains et caïdsAvec « Parrains et caïds », Frédéric Ploquin avait signé un véritable Who’s who du crime organisé à la française. Il poursuit cette exploration du milieu hexagonal avec une anthologie des principales vendettas de ces dernières années. « Le sang des caïds » fait la part belle aux innombrables règlements de comptes qui ont ensanglanté le littoral méditerranéen. Ce n’est que justice : Paca est infiniment plus criminogène que la Corse ou Paris. Selon les statistiques du SRPJ de Marseille, en dix ans le nombre des règlements de comptes impliquant « parrains », « beaux mecs », porte-flingues, demi-sels et « balances » supposées ou réelles s’est, en effet, élevé à 280 ! Contre 171 dans l’Ile de Beauté et 109 à Paris. Au fil des pages, on croise des figures mythiques : Tany Zampa, Francis le Belge, Jacky le Mat ou encore le Vauclusien Marc Monge. Les appétits aixois du milieu corse ne sont pas oubliés, ni les tueries du bar du Téléphone ou, plus près de nous, du bar des Marronniers, un soir d’avril 2006. En reconnaissance de sa spécificité, le milieu varois a droit à un chapitre spécial avec le caïd Jean-Louis Fargette dit Le Grand mais le mystère de sa mort reste entier. Tout comme celui de Michel Regnier, fils du Seigneur des Sablettes. Seule certitude: à Paris comme à Marseille, le combat n’est pas près de cesser faute de combattants : dans les cités, le milieu maghrébin fourbit ses armes pour le contrôle du juteux marché de la drogue. La relève ne manquera pas de bras : dans un monde dominé par l’individualisme et la mondialisation, les gangsters d’aujourd’hui ne contestent pas la société. A leur manière, ils sont, eux aussi, des libéraux obsédés par la réussite, l’argent et l’accumulation du capital.

Le sang des caïds. Les règlements de comptes dans l’oeil de la PJ, Jean-Pierre Bonnico

copinages

les mots ravis par Djibril

Couleurs Pinard Qui n’a pas mis d’eau dans son vin ? On se gargarise du rosé de Provence qu’on préfère vendre aux Chinois, et du bon terroir où pousseraient bien d’autres choses. Ce qu’on aime dans le vin c’est d’être né quelque part, avec sa couleur. Au diable les coupeurs et les défenseurs du Rosé ; du blanc ou du rouge, et que ça bouge !

HorizontalementI Dessinent la carte des goûts.II Le fond du verre. Après l’avoir cherché. Un millésime.III Donnent l’épaisseur. Pays de la soif. Vont bien avec les coutumes.IV Celle de la semaine est appréciée. S’attaque aux boyaux. Veille les morts.V A pris toute la couleur des peaux. N’a pas pris toute la couleur des peaux.VI Reproche facile aux Côtes du Rhône. VII N’a pas vu venir. Avec espoir de retour.VIII Dégustation pour choisir. Manie du coupeur.IX Lui-même. Remué au plus profond. Type dangereux dans l’Histoire.X Mieux qu’aperçus. Début sans consonne. Situe dedans.XI Pauvres grappes à l’entrée du chai. XII Qui se suivent et se ressemblent. Autre liquide stupéfiant.

Verticalement1 Méthodes biologiques ou raisonnées.2 Va doucement en Italie. Reste du fruit.3 Comptent les heures. Poisson de Méditerranée.4 Il faut le faire avant d’acheter. Néglige totalement.5 Ajoute au bonheur de savourer. A priori viril.6 Vu sur papier. Les peaux au fond de la cuve.7 Entamée par les éléments. Pour être plus précis.8 L’heure des boissons. Celle qui désigne. Tout bien réfléchi.9 Anglais en action. A été publié.10 Indéterminé. Sont dans l’alchimie. Grande pomme en réduction. Ebahissement.11 « Qui sortent de l’œuf, du cocon ». A beaucoup vécu.12 Appartenances. Essayer pour la première fois.

Solutions n°62, avrilHorizontalement : I Risorgimento. / II Enée. Uniques. / III Nature. But. / IV Ac. Furia. If. / V Ita. Iran. / VI Sienne. Ainée. / VII Sf. Ue. Fit. Ri. / VIII Assise. Sabin. / IX N. Ot. P. Eloge / X Crue. In. Ote. / XI Empereur. Tel. / XII Sieste. Etes

Verticalement : 1 Renaissances. / 2 Inactifs. Rmi. / 3 Sept. Ae. Soupe. / 4 Oeuf. Nuitée. / 5 R. Ruines. Rt. / 6 Guerre. Epie. / 7 In. Ia. F. Nu. / 8 Milanaise. Re. / 9 Eq. Italo. T. / 10 Nubien. Bote. / 11 Teuf. Erigées. / 12 Ost. Seine.

Grande petite musiqueIl y a de la générosité chez les frères Psaïla. Faut les voir interpréter quelques chansons, version acoustique, devant un public clairsemé avec la même énergie que sur la scène d’un palais des congrès. C’était le cas, le mois dernier à la Seyne-sur-Mer, à l’occasion de l’apéro débat pour la sortie du « Ravi crèche » consacré à la ville. Leur ville. Pas de demi-mesure, donc, pour « Petite musique ». Un goût permanent et communicatif pour la scène, les mots, les chansons. Un violon, une guitare, trois albums. Le dernier, « Marche ou crève », est sorti en 2008. Hier autant dire. L’écouter aujourd’hui, c’est l’adopter.

Marche ou crève, Petite musique, par et de Cédric et Sébastien Psaïla. Mosaix Music

M.G.

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Les syndicats et les partis portent un regard parfois sceptique mais bienveillant sur les nouvelles formes de mobilisation. Tout en les jugeant incapables de remplacer les anciennes. Et se méfient, surtout pour les plus réformistes, de leur radicalité.

La manif à papa fait de la résistance

la grosse enquête

« Il faut faire le lien entre les quelques milliers de radicaux et les 3,5 millions de personnes qui ont manifesté le 19 mars », lance Hendrick Davy, militant au NPA Vaucluse. « S’il y avait 7 ou 8 millions de personnes dans les rues, le rapport de force ne serait pas le même », est persuadé Sylvain Brossaud, secrétaire général de la CGT du Var. « On a comme ambition d’entraîner dans nos actions ceux qui sont dans l’entre-deux », explique Emmanuel Trigo, secrétaire général adjoint du SNUipp varois (Syndicat national unitaire des instituteurs et professeurs des écoles)…

Le Figaro, qui ne parle jamais de nous, a consacré un papier sur notre blog satirique

Pour les syndicalistes ou les partis de gauche, le constat est simple : seules les mobilisations massives peuvent faire pencher la balance en faveur du mouvement social. Pourtant, les uns comme les autres, sont loin d’être insensibles aux nouvelles pratiques qui émergent depuis quelques années. En dehors de la désobéissance contre la suppression des Rased (Réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté), que son organisation « soutien sans y appeler », Emmanuel Trigo a d’ailleurs expérimenté plusieurs de ces nouvelles façons de faire : nuit des écoles, cours dans la rue, sittings, etc. Sans être véritablement convaincu de leur efficacité. « On a multiplié les formes d’actions, mais ce sont toujours les plus militants qui viennent. La méthode qui rassemble le plus de monde, c’est la journée de grève », déplore-t-il.

« Paradoxalement, ce sont les manifestations classiques qui mobilisent le plus », acquiesce « Bob » Injey, secrétaire du PCF des Alpes-Maritimes. En mal de militants et d’électeurs, les communistes observent avec sympathie les manifs de droite et n’hésitent plus, à leur façon, à manipuler à grande échelle la dérision. Le 25 avril, le Front de gauche niçois s’est ainsi offert un happening devant un Leclerc : présentation d’un chèque géant de 368 261 euros, montant « moyen payé par l’Etat à 834 contribuables fortunés grâce au bouclier fiscal ».

« On travaille d’autant plus pour avoir des initiatives fortes en permanence qu’on est occultés », explique Robert Injey. Les communistes nationaux ont même lancé « sortir de la crise », un blog satirique (1) « Le Figaro, qui ne parle jamais de nous, lui a consacré un papier », s’amuse Robert Injey. « Je fais partie de ceux qui pensent que les évolutions du salariat imposent une réflexion sur le syndicalisme », complète Sylvain Brossaud. En 2004, la CGT Energie a d’ailleurs ag- en précurseur en lançant ses « Robins des bois », un collectif d’agents qui rétablissent le courant chez les particuliers privés d’électricité pour impayés.

Le PS ne peut pas être dans la radicalité et la démagogie

Pour le nouveau parti d’Olivier Besancenot, l’implication dans les formes émergentes du mouvement social est plus systématique. Les militants du NPA se retrouvent fréquemment dans les collectifs qui sont récemment apparus. Ce n’est pas l’effet d’un hasard. « Ni celui d’une volonté d’entrisme, assure Henrick Davy à Avignon. C’est parce

que nous sommes dans toutes les luttes que certains de nos adhérents sont à RESF (Réseau éducation sans frontière), participent aux manifs de droite, animent « l’Appel à la pioche » qui organise des pique-niques dans les supermarchés. Il ne faut plus penser seulement à la grève générale. Les pratiques émergentes marquent l’engagement de nouvelles professions et de classes sociales, comme les avocats ou les profs de fac. Elles nous permettent d’aller sur d’autres fronts, d’attaquer le système de plusieurs façons. »

Une position à des années lumières de celle des organisations syndicales ou politiques réformistes. « Notre priorité est l’amélioration des droits des travailleurs et de leur environnement de travail selon l’évolution sociale », souligne Charles Pellotieri. Le délégué régional de l’Union interprofessionnelle Paca de la CFDT prête peu d’intérêt à l’émergence des nouvelles contestations : « Ce sont des acteurs sociaux qui agissent sur des domaines sociétaux, de la vie quotidienne. En tant que syndicalistes, nous ne sommes pas du tout sur le même registre. »

Une méfiance vis-à-vis de la radicalité s’exprimant dans les conflits sociaux que l’on retrouve assez logiquement dans les rangs du Parti socialiste. Le 9 avril, Jean-David Ciot, premier secrétaire fédéral délégué du PS des Bouches-du-Rhône et candidat aux élections européennes dans le sud-est, a précisé sa pensée lors d’une conférence de presse consacrée au chômage : « Le PS est un parti politique qui aspire à gouverner. On ne peux pas être dans la radicalité et tomber dans la démagogie comme l’extrême gauche. Les parlementaires socialistes sont les seuls qui se font entendre au sein de l’assemblée, là où les choses peuvent être changées. » Henri Jibrayel, député marseillais, a tout de même précisé : « Le PS puise ses racines dans le mouvement ouvrier. Sa place est naturellement dans le mouvement social. » Si naturelle ?

Jean-François Poupelin

entretien

Le journaliste Laurent Jeanneau décrypte, dans Les Nouveaux militants, la place et le rôle des formes d’actions émergentes au sein du mouvement social actuel.

« Le militant nouveau est arrivé »Certaines « nouvelles » mobilisations que vous décrivez dans votre ouvrage datent déjà d’une vingtaine d’année. Où est la nouveauté ?

Il y a un travers des journalistes à parler de nouvelles formes de mobilisation. Au début, on voulait appeler notre livre « Le militant nouveau est arrivé », pour montrer comment on fait du neuf avec du vieux, à l’image du Beaujolais nouveau. Historiquement, la dérision remonte à 68 et aux Situationnistes. Aujourd’hui, elle est plus systématique, elle est devenue une caractéristique assez forte des nouveaux militants. Ils sont également beaucoup moins idéologues.

Dans l’entretien qu’il vous accorde, Miguel Benasayag évoque pourtant leur contestation du système...

Ils ne le sont pas tous. Les Déboulonneurs ont un discours radical, y compris par rapport aux médias, mais d’autres sont assez réformistes. Pour citer Miguel Benasayag, ils sont plutôt « la turbulence des soubassements

La véritable rupture vient de la mobilisation des précaires

Quelles sont leurs spécificités dans le mouvement social actuel ?

Sur la forme, ces groupes proposent de la convivialité, de la dérision, des coups d’éclat et ont un rapport décomplexé à la presse. Ils recherchent des modes d’actions originaux pour intégrer le haut de l’agenda médiatique. Sur le fond, ce sont des groupes informels, d’inspiration libertaire : refus des associations avec statuts, de la hiérarchie. Ils sont également plus pragmatiques que les organisations traditionnelles, ont des objectifs très ciblés, sans discours globalisateur. Ça leur permet de mettre en sourdine les idéologies et de rechercher l’efficacité. Mais la véritable rupture vient de leur mobilisation, de RESF à Jeudi noir, des précaires. Bourdieu parlait de « miracle social » à propos du mouvement des chômeurs.

Certains sociologues contestent votre terme de « nouveaux militants. » Qu’est-ce qui les distingue des organisations traditionnelles.

Le terme est ambigu. Il n’y a pas la même lourdeur. Mais il me paraît important de ne pas opposer nouveaux et anciens, de parler de nouvelles formes de militantisme qui émergent ou réémergent par complémentarité et de voir les convergences. Elles ne peuvent pas se substituer au mouvement syndical. On ne peut pas se passer de mouvements structurés, ayant une assise dans les entreprises, une capacité d’expertise, capables de faire contrepoids dans le rapport de force qui oppose salariés et patrons. Les organisations structurées, hiérarchisées, ont leur utilité, notamment pour organiser des mouvements de masse.

Un discours complémentaire des organisations traditionnelles

Quelle est l’influence de ces mobilisations sur le mouvement social ?

Elles investissent des sujets qui n’existaient pas dans l’agenda militant et commencent à faire bouger les pratiques des partis et des syndicats. Les MJS tentent de développer des coups d’éclat et la situation des précaires est de plus en plus prise en compte par les syndicats. Dans les faits, elles apportent de la fraîcheur. De plus, leur discours est complémentaire de celui des organisations traditionnelles, qu’elles n’hésitent pas à rencontrer, y compris pour travailler à l’image de Jeudi noir avec le DAL.

Et concernant les résultats ?

C’est difficile à évaluer. Dans le cas de Génération précaire, faire du statut des stagiaires un vrai sujet a déjà été une réussite. Il n’est même pas impossible qu’ils arrivent à leur but : le décret obtenu étant insuffisant, certains de ses membres ont rejoint la Commission Hirsch pour la jeunesse. L’exemple des Don Quichotte montre aussi que ces groupes font face à des professionnels de la communication : la loi Dalo est très forte, mais prend les apparences d’une coquille vide. Autre problème, les médias se lassent très vite. Il y a donc une obligation de surenchère et un risque d’explosion s’ils se désintéressent du mouvement.

Propos recueillis par J-F P.

Laurent Jeanneau est coauteur avec Sébastien Lernould des Nouveaux militants (Ed. Les petits matins, 2008).1 http://sortirdelacrise.blogspot.com. Preuve que le PCF en est encore aux balbutiements sur ce registre, le blog est en sommeil depuis fin 2008…

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1 L’abstention fait l’union

En 2004, L’abstention s’est élevée à 59,63 % dans le Sud-Est. En France, elle était de 57,2 %, en hausse de 4 points par rapport aux élections de 1999. Et le 7 juin 2009 ? Des sondages prédisent des records de désertion avec des taux avoisinant en moyenne les 66 % en Europe. Depuis 1979 (37 % d’abstention), la première élection du parlement européen au suffrage universel, ce chiffre a sans cesse progressé…

2. Sud-Est, quésaco ?

Elle regroupe les régions Rhône-Alpes, Paca et la Corse. Depuis 2004, on vote en France dans huit grandes circonscriptions. Idée : éviter que le scrutin n’apparaisse trop comme un « test » national. Résultat : personne ne comprend rien à ce découpage qui mixe le proche et le lointain…

3. L’UMP vise la 1er place

En théorie, cette élection intermédiaire est défavorable aux partis au gouvernement. En dépit de l’impopularité de Nicolas Sarkozy, l’UMP menait la course en tête dans les sondages en avril. Un effet de la présidence française de l’Union européenne où l’activisme médiatique de l’omniprésident a fait vibrer la flamme cocardière dans l’Hexagone ? Le Sud-Est, affiche trois députés UMP sortants (17,71 % en 2004). Un 4ème est envisageable le mois prochain. La constitution des listes a été un véritable casse-tête pour Jean-Claude Gaudin, en charge des investitures au niveau national. N°1 : Françoise Grossetête, députée lyonnaise sortante. N°2 : Gaston Franco, maire de Saint-Martin-de-Vésubie (06). Il est ainsi récompensé pour avoir démissionné du Conseil général des Alpes Maritimes afin de laisser sa place à Eric Ciotti, bras droit d’Estrosi, devenu depuis le président du CG... N°3 : Dominique Vlasto, députée sortante, adjointe au maire de Marseille…

3. Le PS craint le bonnet d’âne

Avec presque 29 % en 2004, le PS avait réalisé un score historique. Il risque de battre les records inverses, miné par ses divisions internes, par la concurrence sur sa droite du Modem, sur sa gauche des écologistes, du NPA, du Front de gauche… Le parachutage dans le Sud Est du « ségolèniste » Vincent Peillon, tête de liste, a fait grincer des dents. N°2 : la lyonnaise Sylvie Guillaume.

Si le PS obtient un 3ème député, ce qui est probable, ce sera un candidat d’ouverture : Karim Zéribi (Cf page 20). Paca n’aura donc plus de député européen socialiste. Marie-Arlette Carlotti, députée sortante, a été débarquée pour dissidence (Cf page 4).

4. Le NPA sort du bois

C’est le baptème du feu électoral pour le Nouveau parti anticapitaliste d’Olivier Besancenot né sur les cendres de la LCR. Le NPA affirme que les résultats de ce scrutin ne seront pas déterminants pour son avenir politique qui se jouerait plus sur le terrain des luttes sociales. C’est à voir ! Il renvoie au Front de gauche (PCF…), qui fait de même, la responsabilité d’un nouvel échec d’une union des partisans du « non » de gauche à la constitution européenne. Tête de liste dans le Sud-Est : Raoul-Marc Jennar, théoricien du « non » justement. En 3ème position : Alain Mosconi, nationaliste Corse qui avait « piraté » le Pascal-Paoli, en 2005, détournant le navire pour protester contre la privatisation de la SNCM.

5. Le Modem veut se connecter

François Bayrou espère se refaire une santé, et celle de son mouvement sorti affaibli des législatives et des municipales, avec les élections européennes. Dans le Sud-Est, Jean-Luc Bennahmias est tête de liste. En 2004, il avait été élu député avec l’étiquette Verte. Il le sera probablement cette fois-ci sous la bannière orange. Alors qu’on lui a longtemps reproché d’être un parachuté dans la région, il est ce coup-ci l’une des têtes de liste les plus ancrées localement ! Au mieux le Modem aura un 2ème député : Fabienne Faure (Ain, Rhône Alpes).

6. Europe écologie fait de la biosynthèse

C’est la liste des Verts conduite par Daniel Cohn Bendit, rejoint par José Bové, des proches de Nicolas Hulot et des personnalités comme l’ex-juge anti-corruption Eva Joly. Dans le Sud Est, Michèle Rivasi, occupe la 1er place. Peu connue du grand public, cette valentinoise (Drôme) est respectée chez les écolos car elle a fondé la Criirad (commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité). Les électeurs vont-ils suivre ? En 2ème position, éligible si la mayonnaise bio prend : François Alfonsi, autonomiste Corse. Europe écologie a réussi la synthèse entre les tenants du « oui » et du « non ».

7. Le Front national broie du noir

Jean-Marie Le Pen,qui aura 81 ans quinze jours après le scrutin, a donc choisi le Sud Est pour ce qui ressemble à un dernier tour de piste même s’il a déjà annoncé sa volonté d’être candidat en Paca aux régionales de 2010. Les européennes de 2004 avaient été un bon cru pour le FN : près de 10 % des suffrages, 12 % dans le Sud Est (2 élus). En juin, ce sera probablement moins. Beaucoup moins ? Le FN, endetté, divisé, est au bord de l’explosion…

8. Le (rouge) Front de gauche

C’est la liste qui rassemble le PCF, le parti de gauche créé par Jean-Luc Mélanchon, ex-sénateur socialiste, la gauche unitaire de Christian Picquet, ex-LCR, en désaccord avec l’aventure solitaire du NPA. Principale différence avec ce dernier : la coalition du Front de gauche cherche elle aussi à refonder une gauche anti-capitaliste mais ne veut pas renoncer à gouverner, à l’échelon local ou national, à la place de la droite. Quitte à s’allier parfois avec le PS... Tête de liste : Marie-Christine Vergiat, parachutée parisienne, militante associative. N°2 : le conseiller régional communiste Karim Ghendouf.

9. Les « petits » trépignent

Parmi les « petits » candidats, Libertas pourrait faire un score relativement important. La liste rassemble deux formations qui font de beaux scores aux Européennes : le « mouvement pour la France » de Philippe de Villiers et Chasse pêche nature et tradition (CPNT) de Frédéric Nihous.

Dans le Sud Est, Patrick Louis, député sortant MPF occupe la 1er place. En 2ème position, une certaine Marie-Claude Bompard, maire de Bollène et conseillère générale du Vaucluse : ex-Front national et épouse de Jacques, le maire d’extrême droite d’Orange.

Sinon, en stock également : l’indémodable Lutte Ouvrière avec dans le Sud Est la lyonnaise Nathalie Arthaud, la nouvelle « Arlette » ; Debout la République ! (« gaullistes » de Nicolas Dupont Aignan) et d’autres sous réserve…

10. Francis Lalanne nous enchante

C’est un programme à lui tout seul (Cf page 27). Et la tête de liste dans le Sud-Est de l’Alliance écologiste indépendante. Drôle d’assemblage de chapelles écolos, souvent alliées à droite, et où réapparait l’improbable niçois Jean-Marc Governatori « La France en action » qui avait tenté d’être candidat aux Présidentielles…

11. L’absentéisme fait débat

Au fait, une fois élus, ils bossent les députés européens français ? Un palmarès signé par un ancien assistant parlementaire, Flavien Deltort, a fait du bruit. Les notes des sortants à nouveau candidats ne sont pas brillantes : Vincent Peillon, Jean-Marie Le Pen : 1/10 ; Patrick Louis : 3/10 ; Jean-Luc Bennhamias : 4/10 ; Françoise Grossetête : 5/10… Bien entendu les interessés, contestent la méthode et les critères (présence en commission, en sessions)…

12. Et l’Europe dans tout ça ?Excellente question.

Européennes : l’élection mal aiméeLe scrutin en 12 étoiles

le Ravi n°63 mai 2009 11

Il y a 12 étoiles sur le drapeau de l’Europe des 27. La France va élire, le 7 juin, ses représentants au parlement européen. Petit mode d’emploi pour mieux cerner les enjeux d’un scrutin boudé par une majorité de médias et d’électeurs.Par Michel Gairaud

notre belle région

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Karim Zéribi

La grande gueule pragmatiquePropos recueillis par Rafi Hamal, Michel Gairaud. Retranscris par Eric Besatti.

20 Métropoles & trous jolis - le Ravi n°63 mai 2009 -

la grande tchatche

Karim Zéribi est l’un des piliers des Grandes gueules, les « GG », l’émission « café de commerce » de Radio Monte-Carlo qui séduit tous les matins un million de passionnés. Comme Luis Fernandez, qui officie l’après-midi sur RMC, Zéribi a débuté dans le football. Mais à 21 ans, ses ligaments croisés le lâchent et il doit renoncer à une carrière professionnelle.

Comme papa, il intègre donc, à 24 ans, l’équipe de la SNCF à Marseille. Il y est question de trains et de la CGT, bien entendu, dont il devient délégué du personnel. Il se détourne pourtant assez vite du syndicalisme pour investir la vie associative. A Avignon, où il est né, et à Marseille, il s’engage pour l’accès à l’emploi et la prévention de la délinquance dans les quartiers populaires.

De gauche mais pragmatique, républicain mais partisan de la fermeté, une rencontre est déterminante : celle de Jean-Pierre Chevènement. Il devient ainsi, à 36 ans, conseiller du ministre de l’Intérieur. Il est promu expert es police de proximité et comités départementaux d’accès à la citoyenneté. Il fonde en 2001 l’association « agir pour la citoyenneté » puis, en 2005, un cabinet de recrutement spécialisé dans la promotion de la diversité : « APC », agir pour la compétence...

Avec un pareil sens de la formule, difficile de résister à l’appel des urnes. Par deux fois, face au PS et au PC, il tente sa chance aux législatives dans les quartiers nord de Marseille. En 2002 – 4 % - et en 2007 – 11 %.

Toujours très pragmatique, il hésite entre Gaudin et Guérini lors des dernières municipales marseillaise. Il choisit in fine le deuxième. Qui perd la mairie mais gagne la communauté urbaine et lui offre la présidence de la RTM, la régie des transports.

Conseiller municipal, conseiller communautaire, conseiller du président de la SNCF sur les questions de sûreté et d’égalité des chances, il a bien compris l’un des principes majeurs de la vie politique française : le cumul. Le voilà donc, à 42 ans, en position éligible sur la liste socialiste du Sud Est aux Européennes. Sans avoir pris sa carte, Il risque donc d’être le seul élu apparenté « PS » à porter les couleurs de Paca à Bruxelles.

Certains socialistes font la gueule. La grande gueule ! Va falloir qu’ils s’habituent à la sienne...

M.G.

Après avoir hésité entre Gaudin et Guérini aux municipales marseillaises, après avoir fondé Nouvelle France, un club « indépendant », vous voilà apparenté au parti socialiste. Où êtes-vous vraiment sur l’échiquier politique ?

« Dans mon esprit je suis un homme de gauche, je l’ai toujours été. Je crois que mon parcours est cohérent depuis mon engagement syndical, associatif, et aujourd’hui politique. Quand Jean-Noël Guerini (Ndlr: président socialiste du Conseil général des Bouches du Rhône et ex-candidat à la mairie de Marseille) m’a proposé d’être le porte parole de sa candidature sur la base d’un projet ça m’a séduit. »

Dans le « projet », il y avait la promesse de vous placer 3ème sur la liste Sud-Est aux Européenne ?

« Il y a des échanges entre les hommes, évidemment. Quand depuis 10 ans vous faites de la politique, vous discutez avec Jean-Noël Guerini et vous lui dites : « Moi je m’inscris dans la durée ». C’est évident, je ne viens pas faire du « one shot ». Ce voyage avec le parti socialiste ne m’empêche pas d’avoir ma liberté. Je suis avec lui parce que je m’en sens le plus proche. Je peux aussi émettre des critiques à son encontre. »

Vous dites aimer le collectif mais on voit partout votre photo sur toutes les plaquettes, sur votre site, votre blog...

« Ca vous gêne ? »

Votre club c’est avant tout la Nouvelle France de Karim Zéribi, un peu mégalo non ?

« Il faut un leader. Il faut arrêter de se raconter des histoires et il y a des gens qui ont capacité à porter un leadership et d’autres moins. Mais ceux qui n’ont pas capacité à la porter ne sont pas

moins importants dans un mouvement. C’est souvent dans la cuisine qu’on fait les meilleurs plats. Et je peux vous dire que Nouvelle France n’irait pas très loin si Karim Zéribi était tout seul. »

Vous êtes contre la discrimination positive mais vous avez porté le projet « le train pour l’emploi et l’égalité des chances »

n’est ce pas paradoxal ?

« Pas du tout, j’ai une approche territoriale et sociale. Je crois qu’il nous faut aujourd’hui

travailler sur l’égalité des chances. On a 30 % de chômage dans certains quartiers et il ne faut pas essayer de le résoudre sur

une base ethnique. Quand on est fils d’ouvrier, qu’on s’appelle Mohamed

ou David ce n’est pas le problème. On est avant tout fils d’ouvrier.

L’approche des statistiques ethniques me semble gravissime

parce qu’on va déterminer nos citoyens par leurs origines. »

Pourtant, on vous présente souvent comme un candidat

issu des diversités...

« Ca c’est les journalistes ! Moi je sais pourquoi je suis 3ème sur la liste. Karim

Zéribi s’est présenté aux élections législatives, il a fait 4 % en 2002 et

11 % en 2007. La politique, c’est un rapport de force et quand vous

faîtes un score honorable, vous êtes pris en considération. Je suis plus

qu’un casting sur une liste électorale. Si vous voulez me réduire à ça, c’est votre

droit. »

Quelles Europe défendez vous ?

« Quand j’entends dire que les travailleurs français sont trop chers, qu’ils ne travaillent pas assez,

qu’il va falloir remettre en cause un

certain nombre d’acquis, je dis qu’il faut raison garder. Par ces temps de crise, ce qui a servi d’amortisseur c’est quand même notre service public, notre système de santé, c’est tout ce qu’ont apporté les combats durant les décennies passées. Donc est-ce qui faut faire partager ça à l’Europe ? Moi je dis oui. Faut-il déshabiller les Français de leurs acquis ? Moi je dis non ! A la base, l’Europe est un projet extraordinaire qui a été détourné à des fins essentiellement de profit économique. Il va falloir qu’elle devienne citoyenne cette Europe ! »

Quelle était votre position sur le traité constitutionnel européen ?

« J’ai voté oui. Pourquoi je crois qu’il faut adopter Lisbonne au plus vite ? Tout simplement parce que si on veut que le politique reprenne la main, ce traité nous le permet. »

Est ce que vous allez réussir à tout faire ? Votre mandat à communauté urbaine, présider la RTM, les missions à la SNCF, vos émissions radio...

« Il faut manger Monsieur ! Vous savez que président de la RTM, c’est une fonction sans indemnité ? Zéro euro par mois ! Je ne vis pas d’amour et d’eau fraîche moi. J’ai 42 ans, vous ne voulez pas me mettre à la retraite aujourd’hui quand même ! »

Donc vous ne serez pas à plein temps à Bruxelles…

« Plein temps à Bruxelles ça veut dire quoi ? Du lundi au vendredi ? Je ne serais pas un fonctionnaire à Bruxelles. Je serais un homme politique qui fait son travail en étant présent trois jours par semaine et le reste du temps dans sa circonscription. »

Vous qui vous réclamez avant tout « pragmatique », qu’avez vous réalisé depuis votre arrivée à la Régie des transports marseillais (RTM) où vous êtes en responsabilité ?

« J’initie une politique pour désenclaver les quartiers Nord, pour faire en sorte que des bus neufs soient affectés sur ces territoires dit difficiles. Jusqu’à présent, ce n’était pas le cas. A la RTM aujourd’hui, il y a une posture d’équité territoriale qui a été prise en compte. »

Vous dites être un homme de dialogue mais pourtant à votre arrivée à la RTM il y a eu une grève interminable ?

« Il y a eu une grève perlée dans le métro. Elle a provoqué des désagréments intolérables aujourd’hui auprès de ceux qui empruntent les transports en commun. A son origine, on trouve un attelage peu commun : la CFDT avec SUD. Par ailleurs, un accord salarial a été trouvé avec la CGT, Force Ouvrière et l’UNSA, les syndicats majoritaires. Dire qu’à la RTM on ne discute pas, moi ça me fait marrer et ça me met en colère. »

Vous avez communiqué sur la baisse du prix du ticket solo alors que tous les abonnements augmentent. Pas très honnête, non ?

« L’abonnement travail est à 17 euros par mois grâce à la prime transport payé par les entreprises par mois. Vous savez qu’on a l’abonnement mensuel le moins cher de France ? Faut quand même dire la vérité ! Nous vendons13 millions de tickets vendus à l’unité majoritairement achetés par les populations les plus paupérisées. Nous détenions le record du titre le plus cher de France. J’ai demandé à le faire passer à 1,50 euros. »

Que pensez vous de la construction de la 3ème ligne de tramway, vers la place Castellane, qui va à nouveau favoriser l’hyper centre ville ?

« Je crois sincèrement qu’on ferait mieux d’avoir un bus à haut niveau de service dans un autre secteur. Après je donne mon avis, le président de la RTM donne son avis. A un moment donné, il y a une autorité organisatrice qui est la communauté d’agglomération. La RTM est l’exploitant. »

Alors pourquoi cette ligne ?« Parce qu’on est en accord de gouvernance avec Jean-Claude Gaudin. Le maire de Marseille a souhaité que soit intégré ce tronçon de tramway. Nous avons accepté pour ne pas bloquer tous les projets de le communauté urbaine et de la ville, pour ne pas s’engager dans six ans d’immobilisme. Faut être dans l’action pour permettre à Marseille de devenir cette capitale de la Méditerranée que l’on souhaite. Il adonc fallu accepter ce tronçon. J’espère que les études vont révéler que ce n’est pas pertinent et que Jean-Claude Gaudin est capable de changer d’avis. »

Ecoutez en permanence l’intégralité de cet entretien avec Karim Zéribi, enregistré le 24/04/2009, sur le www.leravi.org. Et retrouvez en direct la Grande Tchatche sur le 88.8 FM, tous les 4èmes samedis du mois à 11 heures. Prochain rendez-vous : samedi 23 mai.

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Atterrissage forcé pour les gros.

Facturer deux places d’avion aux personnes obèses ! Valérie Boyer dit non !

Pour la députée UMP marseillaise, spécialiste es obésité et anorexie, la bouchée

est dure à avaler. Elle s’insurge contre un projet de Ryanair. La compagnie

irlandaise réfléchit en effet à différents critères pour motiver ses tarifs. Les femmes

devraient payer plus au-delà de 100 kilos et 104 cm de tour de taille, 130 kilos et

112 cm pour les hommes. Ryanair menace sans rire de refuser l’embarquement

« pour des raisons de sécurité » si un « gros » voyageur ne réserve pas deux

places. Valérie Boyer riposte en proposant d’aménager « des rangées de sièges

élargis ». L’UMP a donc changé de slogan : manger plus sans payer plus !

Hubert, tu veux ou tu veux pas ? Tu peux ou tu peux pas ? Hubert Falco, secrétaire d’état et maire de Toulon, fait durer le suspense sur son éventuelle candidature aux élections régionales de 2010. Sa décision est-elle liée à l’obtention d’un ministère plein ? Ce n’est pas impossible. Mais l’intéressé qui ne cachait pas ses ambitions observe désormais un silence sépulcral. Il est vrai que Nicolas Sarkozy a rappelé ses ministres à l’ordre. « Le prochain qui fait ça, on s’en séparera », a sifflé l’omniprésident à l’adresse des ministres qui s’étalent dans la presse. En fait, Hubert Falco est confronté à un dilemme : s’il a très envie d’être ministre, l’idée de devoir affronter le socialiste Michel Vauzelle n’est pas faite pour l’emballer. On le comprend : une défaite mettrait un terme à une impressionnante série de victoires. Quatorze fois candidat, Hubert Falco n’a encore jamais perdu une élection ! Du coup, il estime qu’il est urgent d’attendre et réserve sa réponse après cet été. Sans doute a-t-il déjà pris sa décision mais cette valse hésitation n’en aiguise pas moins les appétits. Dans les Bouches-du-Rhône certains amis de Bernard Deflesselles estiment déjà que le président du groupe UMP à la Région ferait un très bon candidat. Et d’ajouter avec un zeste de perfidie : « Si Falco a tout à perdre, Bernard a, lui, tout à gagner ».

Sarko show à Venelles. De drôles de bornes

kilométriques ont poussé aux alentours de la petite commune de Venelles (13)

le 7 avril dernier, jour de visite du président Sarkozy en terre aixoise !

CRS par-cì, gendarmes par-là et agents de la police nationale par là-bas, chaque

chemin menant au complexe sportif du village était cerné dès le matin.

Pour cause : le chef de l’Etat devait y tenir une table ronde à midi. Les lieux

avaient tout l’air d’un état de siège. Ambiance : un hélico survole la zone.

Les journalistes souhaitant couvrir l’événement sont « invités » à rejoindre le

site en empruntant un « bus obligatoire » (sic) affrété par la préfecture. Leurs

propres véhicules resteront dans un parking situé à quelques kilomètres de là.

Une fois sur place, une heure avant l’événement, ils seront parqués en attendant

l’arrivée des autres invités (parlementaires, élus locaux et entrepreneurs

dépêchés pour l’occasion). A l’entrée de la salle, les forces de l’ordre ont sorti

la panoplie complète de l’antiterrorisme : portique antivol, fouille des sacs

(jusqu’aux paquets de cigarettes) et détecteur de métaux. Midi passé d’une

minute, Nico déboule en grande pompe, suivi de quatre de ses ministres

(Lagarde, Pécresse, Chatel et Falco). Assis face à eux, six experts régionaux

issus du monde de la recherche et de l’université prendront chacun la parole…

une vingtaine de minutes au total ! Les quelque 45 minutes restantes

reviendront au président. A croire que l’Elysée organise désormais ses

conférences de presse en région. De préférence avec des figurants…

10 brèves - le Ravi n°63 mai 2009

no

tre

bel

le r

égio

nLes femmes SDF meurent plus vite. Les femmes vivent moins longtemps que les hommes !? C’est la révélation que font Médecins du Monde, l’Assistance publique de Marseille et l’association « les morts de la rue ». Une enquête sur la mortalité des sans abris à Marseille bouleverse les normes du monde abrité. Dans la rue, l’âge moyen de décès est de 41 ans pour les femmes quand les hommes vivent 15 ans de plus. Sous les toits, c’est l’inverse : les femmes atteignent 84 ans quand les hommes s’éteignent à l’âge de 77 ans. Une explication : les hommes peuvent mieux se défendre physiquement. Et les lois sur la parité n’y change rien.

Amnesty matraque la police. Amnesty International publie « Des policiers au dessus des lois », un rapport sur la violence policière en France. L’ONG tire la sonnette d’alarme en recueillant de nombreux témoignages et prescrit des recommandations. Amnesty International recommande par exemple aux forces de l’ordre de se sensibiliser aux relations interculturelles. Les témoignages prouvent en effet que « les minorités visibles » sont souvent les victimes des débordements policiers. Etonnant, non ?

Députés : trois cancres en Paca. Sur les bancs de

l’assemblée nationale, c’est comme à l’école : il y a des bons élèves, des mauvais et des

absents. Le site lesinfos.com a établi un classement selon leurs interventions en séance ou en

commissions. Le bonnet d’âne en Paca est décerné à Mme le maire d’Aix-en-Provence (13) :

Maryse Joissains, n°6 sur 577 députés. L’élue UMP ne compte aucune intervention depuis sa

réélection en juillet 2007. Deuxième cancre : Jean-Michel Couve, n°11. L’ancien maire de Saint

Tropez (83), aujourd’hui député UMP de la 4ème circonscription du Var, n’est intervenu qu’une

fois en presque deux années. En 3ème place sur ce podium des fantômes de l’assemblée

nationale : Marie-Josée Roig, n°40. Mme le maire UMP d’Avignon peut se vanter de deux

petites interventions. Au total, 142 députés ayant réalisé moins de 10 interventions sont ainsi

pointés du doigt pour leur inactivité. Mais à l’Assemblée, ni de redoublement ni de mauvaise

note pour les mauvais élèves ! Tout le monde est récompensé de 5 178 euros net.

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Affirmations « très exagérées » (Unsa Police), « aucune tolérance sur le sujet des violences policières » (ministère de la Justice)... Dans la pure tradition française, syndicats de policiers et gouverment ont fait bloc à la publication, le 2 avril, du dernier rapport d’Amnesty international sur la violence et l’impunité des forces de l’ordre françaises.

Les faits sont pourtant têtus. Six jours plus tard, la condamnation du metteur en scène suisse Patrick Mohr par le tribunal de grand instance d’Avignon pour « rébellion initiale » confirme en tous points les accusations du mouvement de défense des droits de l’homme : Interpellation musclée (œdème au visage, douleurs aux cervicales et au poignet), garde-à-vue arbitraire (douze heures), plainte pour outrage, incitation à l’émeute et rébellion, clémence de la justice : le directeur artistique du Théâtre Spirale de Genève a eu droit à toute la panoplie (policière) depuis son audace du 21 juillet dernier à Avignon, en plein festival. Il s’était s’offusqué auprès de trois CRS du contrôle d’identité de deux musiciens français d’origine africaine, les seuls interpellés sur une place du Palais des papes bondée (1).

Le verdict rendu le 8 avril est également un cas d’école (2). Le juge Marc Jean-Talon a balayé les charges faute de preuves, selon lui les policiers se contredisent et des témoins « sincères et de bonne foi » confirment la version de Patrick Mohr. Mais le magistrat estime que le metteur en scène s’est rendu fautif d’un « refus

d’interpellation ». D’où la sanction : 500 euros d’amende avec sursis pour « rébellion initiale » et un euro de dommages et intérêts à deux CRS, qui en

demandaient 800, pour « préjudice moral ». Selon le juge, les policiers sont victimes, défense de rire, d’une « souffrance mentale ».

Patrick Mohr appréciera… Selon son père, venu le représenter à l’audience, le metteur en scène « va s’abstenir de venir en France ».

Au moment du bouclage du Ravi, il hésitait également à faire appel de sa condamnation et à poursuivre ses « agresseurs ». Ses soutiens

sont eux « écœurés » par le verdict. « Je m’y attendais et je suis déçue. Le juge avait l’occasion de mettre un frein à des dérives. Patrick Mohr est condamné pour avoir assisté à une discrimination sans fermer sa gueule ! », peste ainsi Chantal Mainguy, de la Commission nationale Citoyen/Justice/Police.

Les milliers de Français rassemblés le même jour pour dénoncer le délit de solidarité vis-à-vis des sans-papiers sont désormais prévenus. Le soutien aux étrangers provoque des « souffrances mentales » à la police. Et quand un CRS a mal à la tête…

Jean-François Poupelin

le Ravi n°63 mai 2009 - Métropoles & trous jolis 19

Cannes, son festival, ses casinos… et l’ombre de Michel Mouillot. L’ex-maire UDF-PR (1989-1996), qui avait « plongé » en juillet 1996 pour une affaire de machines à sous et de pots-de-vin lors d’une opération immobilière sur la Croisette, a passé trois années en prison. Libre depuis août 2007, mais privé de ses droits civiques jusqu’en février 2010, la rumeur circule pourtant de son possible retour aux « affaires ». Cet homme qui aimait le pouvoir, l’argent et le luxe, continue de hanter la ville, et les réseaux qu’il a tissés sont encore en place.

« Michel Mouillot reste populaire, c’est quelqu’un qui a toujours été proche des gens », affirme Alain Demaret, ex-journaliste et propriétaire du café-théâtre la Comédia. Il y a un an, celui que l’on surnommait au temps de sa splendeur le Kennedy de la Croisette s’est offert un retour remarqué en jouant les parrains lors des municipales. Michel Mouillot a appelé à voter pour deux candidats de droite tentant en vain de déboulonner Bernard Brochand, maire UMP élu pour tourner la page « Mouillot » justement : Jean Martinez, au 1er tour, puis Philippe Tabarot au 2ème, conseiller général UMP de Cannes Centre.

« L’Après Mouillot, c’est les rivalités claniques et c’est cela qui pourrait favoriser son retour », analyse Michel Emeriau, ancien collaborateur de Michel Mouillot et rédacteur en chef du journal en ligne le Cannois déchaîné. « Monsieur Mouillot, appartient au passé, les électeurs d’aujourd’hui ne l’ont pas connu. Moi, je représente l’avenir. Je suis

le plus légitime », rétorque Philippe Tabarot. Le jeune vice-président du Conseil général 06 incarne aujourd’hui

l’opposition au maire et à son ambitieux 1er adjoint, David Lisnard. Occuperait-il cette position sans

l’onction du parrain Mouillot auprès duquel il a débuté en politique ?

« Quand Mouillot était là, il faisait l’unanimité, même l’opposition avait du respect pour lui », glisse nostalgique Michel Emeriau. « Il faut sortir Cannes de l’immobilisme où elle s’est enferrée », s’agace Jean-Marc Chiappini, ex adjoint de Mouillot.

« A l’époque, argumente Michel Emeriau, la ville bougeait, l’équipe de foot de Cannes était dans les dix

meilleures. Michel Mouillot a payé lourdement pour ses fautes, aujourd’hui c’est une victime aux yeux des

Cannois. C’est un peu comme Jacques Médecin, s’il sortait de la tombe, les Niçois le rééliraient. »

Du côté de La Bocca, banlieue plus populaire, on ne tient pas vraiment le même discours. « Michel Mouillot est un escroc,

s’étrangle M.Caglieris, président de l’Association des vieilles familles boccassiennes. C’est vrai qu’il était populaire ici. Et pour cause, il embrassait les mamies, et offrait des congélateurs aux gens. » Et de conclure par ce verdict : « Pas de retour possible pour Mouillot à la

Bocca ». Les couteaux sont sortis jusqu’en 2014...

Rafi Hamal

Cannes

Une rumeur nommée MouillotEn 2010, Michel Mouillot, ex-maire de Cannes tombé pour corruption, sera à nouveau éligible. Reviendra-t-il, ne reviendra-t-il pas ? Sur la Croisette, la rumeur enfle…

Avignon

La justice conforte AmnestyLe 8 avril, un metteur en scène suisse a été condamné pour « rébellion initiale ». Un cas d’école à la lecture du rapport d’Amnesty international « France : des policiers au-dessus des lois ».

1 Intégralité du récit de Patrick Mohr sur www.educationsansfrontieres.org. 2 Le procès s’est déroulé le 3 mars. Etudiée dans la foulée, la plainte de Patrick Mohr pour « violences

policières » a été classée par le Parquet.

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le Ravi n°63 mai 2009

tribune

Par Boris Grésillon

Face à une situation intenable à l’intérieur des murs de l’université, enseignants et étudiants en lutte expérimentent de nouvelles formes d’action au cœur de la cité. Analyse et récit de Boris Grésillon, maître de conférence en géographie à l’Université de Provence.

La crise oblige à être inventifLes enseignants-chercheurs ne désarment pas. Il faut dire que leurs revendications sont aussi légitimes que le malaise universitaire est profond. Ils sont opposés à la fois à la réforme de leur statut, à la « mastérisation des concours » incluant la fin de l’année de stage obligatoire, à la suppression des postes annoncée pour la rentrée 2009, au démantèlement du CNRS. Au-delà de ces mouvements conjoncturels de protestation, la colère monte depuis des années face à des conditions de travail indignes - il suffit de visiter la faculté de lettres et sciences humaines d’Aix-en-Provence pour s’en rendre compte, et Aix n’est pas un cas isolé -, à la précarisation des doctorants ou à la suppression massive et systématique de postes aux concours de recrutement.

Sur ce terreau propice à la contestation, le tristement fameux discours du 22 janvier prononcé par Nicolas Sarkozy a mis le feu aux poudres. Jamais un président français en exercice ne s’était exprimé avec une telle violence contre la communauté des chercheurs. De même que les mots de « Kärcher » et de « racaille » employés par le ministre de l’Intérieur de l’époque avaient enflammé les banlieues françaises en 2005, de même, toutes proportions gardées, le discours du 22 janvier 2009 a-t-il jeté dans la rue l’ensemble des enseignants-chercheurs.

Trois mois plus tard, non seulement l’opposition aux différents projets de réforme du gouvernement reste d’actualité, mais on constate que les universitaires et chercheurs ont inventé de nouvelles formes, parfois ludiques, de contestation. La raison en est simple : les moyens classiques d’action - grèves, manifestations, blocages, lettres ouvertes, pétitions - s’avérant inefficaces, il a bien fallu faire preuve d’inventivité pour tenter de mobiliser l’opinion et les médias en espérant ainsi interpeller le gouvernement.

Une transformation des codes pédagogiques,

contestataires et géographiques

Ainsi, les enseignants se sont aventurés hors des murs de leurs amphis pour proposer des cours « hors les murs », comme lors de l’opération « cours sur le cours Mirabeau ». Dans un climat bon enfant, des mini-cours d’histoire, d’anglais ou de musique se sont tenus en différents endroits du Cours Mirabeau, devant un parterre assidu d’étudiants mais aussi de curieux ou de badauds. Le plus sérieusement du monde, des étudiants de géographie ont fait réaliser des « cartes mentales » par de simples passants qui se sont pris au jeu. Etudiants transformés en professeurs, professeurs en auditeurs, et habitants en étudiants : le mélange des gens et des genres n’a choqué personne. Et surtout, ce type de formule expérimentale a permis aux enseignants en grève de ne pas se couper de leurs étudiants.

Autre exemple de transformation des codes pédagogiques, contestataires et géographiques : pendant que les professeurs de lettres organisaient des lectures publiques de La Princesse de Clêves chère au président Sarkozy, les enseignants de géographie et d’histoire mettaient en place, pour leurs étudiants, des « marches urbaines et didactiques » dans la ville de Marseille. Enfin, début avril, à l’initiative des germanistes, de nombreux départements de la faculté des Lettres d’Aix participèrent à « l’Université hors d’elle », nouvelle et heureuse formule pour dire que la situation étant intenable à l’intérieur des murs de l’université, les cours se tiendraient hors des murs, en ville. De ce fait, comme l’ont souligné de nombreux journalistes qui ont rendu compte du mouvement, l’université retrouvait sa place : au coeur de la cité.

Jointes aux nouveaux usages d’Internet (cours mis en ligne, contacts permanents avec les étudiants, pétition circulant d’une université à l’autre…) et du téléphone portable (organisation rapide et spontanée de sit-in…), ces formes de contestation d’un genre nouveau, relayées par les medias, interpellant les habitants qui sont aussi des parents d’élèves, ont, à tout le moins, gêné Pécresse et le gouvernement. Cela dit, elles ne peuvent être que temporaires et ne sauraient en aucun cas se substituer ni aux modes classiques d’expression du mécontentement ni aux formes normales de tenue des cours. Mais l’inventivité a toujours du bon. Elle transcende les habitudes corporatistes, apporte du tonus aux enseignants amers et donne du fil à retordre aux ministres de tutelle.

la grosse enquête

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le Ravi n°63 mai 2009