Hors série DÉCOUVRIR – S’INSPIRER – FAIRE ENSEMBLE · Hors série - septembre 2019 Hors...

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Hors série septembre 2019 DÉCOUVRIR – S’INSPIRER – FAIRE ENSEMBLE 1. Ecosystèmes & Climat Les grands enjeux environnementaux 2. Sens, éthique & Implication Un nouvel eldorado ? 3. Ancrage local & Valeur partagée Plus qu’un présence dans les territoires 4. Innovation & économie circulaire L’avenir de notre secteur 5. Gouvernance & Co-construction Laisser s’exprimer le bon sens

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    1. Ecosystèmes & Climat Les grands enjeux environnementaux

    2. Sens, éthique & Implication Un nouvel eldorado ?

    3. Ancrage local & Valeur partagée Plus qu’un présence dans les territoires

    4. Innovation & économie circulaire L’avenir de notre secteur

    5. Gouvernance & Co-construction Laisser s’exprimer le bon sens

  • Magazine imprimé sur papier PEFC.

  • Empreinte Hors série 1

    Roberto HUET, Président d’EQIOM

    Lorsque nous avons pris la plume pour rédiger la vision d’EQIOM en 2017, nous avons formulé notre préoccupation pour les bouleversements du monde : EQIOM est une entreprise qui souhaite « porter les enjeux de demain ». Certains nous affectent tout particulièrement, au premier lieu desquels l’environnement. Alors que les températures mondiales ont déjà augmenté de +1° C par rapport à l’ère préindustrielle, il devient urgent de réduire nos émissions de CO2 pour limiter cette hausse et surtout ses conséquences, graves, sur les écosystèmes et les sociétés. Nous assistons aussi à une dégradation insupportable de la biodiversité : 1 million d’espèces sont aujourd’hui menacées d’extinction. Si ces atteintes à l’environnement sont d’origine humaine, les solutions le seront également. Les entreprises se doivent de contribuer positivement à cet enjeu planétaire ; chez EQIOM, nous avons choisi de l’inscrire dans notre vision.

    D’autres enjeux ébranlent nos sociétés : la révolution numérique et l’émergence de l’intelligence artificielle réinventent les business models et les métiers ; la quête de sens et la place de l’éthique interrogent et bousculent beaucoup d’entre nous, en particulier les jeunes. EQIOM souhaite devenir le leader digital dans son secteur, ce qui veut dire proposer des solutions à nos clients pour les rendre plus performants, mais aussi se transformer en interne pour simplifier nos process. Nous devons aussi accompagner cette mutation, pour humaniser la technologie et la mettre au service de l’homme.

    Ce numéro d’Empreinte est un hors-série : il traduit, plus encore que les précédents, notre volonté d’ouverture à un monde qui change. Nous avons voulu donner la parole non seulement à nos équipes, mais aussi à des personnes qui nous interrogent et nous inspirent, pour qu’elles témoignent des révolutions en cours, et qu’elles nous décrivent des leviers pour agir. Cette envie d’être challengés et de réfléchir ensemble, de co-construire des solutions, est inscrite dans notre ADN et dans notre vision.

    Notre vision Nous voulons entreprendre et porter les enjeux de demain pour contribuer à construire les territoires avec des

    solutions durables.

    Édito

  • 2 Empreinte Hors série

    Toute crise est source d’opportunités et tout problème est

    FInalement source de

    solutions.

    P. 79

    Ultimement, si nous arrivons à réaligner ces notions de sens dans une entreprise, cela peut créer une dynamique capable de renverser tous les obstacles !

    P. 33

    Quand un industriel se lève le matin, il ne se demande pas comment il va pouvoir polluer aujourd’hui, mais au contraire, comment il peut faire mieux pour l’environnement.

    P. 24

    LE BÉTON EST LA DEUXIÈME MATIÈRE LA PLUS UTILISÉE AU MONDE DERRIÈRE L’EAU ET ON SE DOIT D’ENVISAGER QU’IL POURRAIT ÊTRE

    MOINS UTILISÉ, OU DIFFÉREMMENT.

    P. 28

    pour changer, il faut savoir vers quoi on veut tendre, sur quoi on peut s’appuyer et ce qui nous habite.P. 105

    Un monde où plus rien n’est jeté,

    nous pouvons y arriver.

    Il sufFIt d’y croire et d’y mettre de

    la volonté.

    P. 85

    Nous avons créé avec ce nouvel outil un véritable levier d’ancrage local.P. 73

    « Nous voulons entreprendre et porter les enjeux de demain pour contribuer à construire nos territoires avec des solutions durables ».

    P. 1

    Après le « green washing », on assite a un véritable « corruption washing ».P. 40

  • Empreinte Hors série 3

    Arrêtons de parler d’érosion, nous sommes

    au stade de

    l’effondrement.

    P. 18

    Nous avons assisté ces dernières années à un changement : de l’innovation pour les clients,

    nous sommes passés à l’innovation

    avec les clients.

    P. 76

    Il faut libérer la parole, se donner le droit à l’expérimentation, et s’inscrire dans une dynamique bienveillante. P. 98

    Les grands groupes doivent avoir conscience qu’ils peuvent être les leviers de croissance de jeunes entreprises innovantes

    qui feront leur croissance

    et leur innovation interne de demain.

    P.87

    Il y a cet instant magique au cours d’une réunion où s’opère comme une cristallisation autour de l’intérêt collectif.

    P. 66Lorsqu’un individu travaille sur un projet qui lui vient du cœur, et qui est aligné avec ses aspirations, il se sent vivre pleinement.P. 43il n’y a pas besoin d’être diplômé

    pour se sentir concerné, pour être ingénieux et pour faire en sorte que

    son expérience de vie puisse servir

    au bien collectif.

    P. 65

    Si l’information est accessible à tous, toute manipulation est impossible.

    P. 46

    Pas de performance sans une bonne ambiance de travail.

    P. 101

  • 4 Empreinte Hors série

    Écosystèmes & ClimatLes grands enjeux environnementaux 1 DÉCOUVRIR

    LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE, LE NOUVEAU DÉFI DE L’INDUSTRIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16LA CARRIÈRE, UN ACCÉLÉRATEUR DE BIODIVERSITÉ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

    S’INSPIRER

    ASSUMER SA CROISSANCE ET AGIR SUR SON IMPACT : LE DÉFI DE PAREXGROUP . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20VASCO 2 : QUAND LE CO2 DEVIENT RESSOURCE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22

    FAIRE ENSEMBLE

    L’ENJEU CO2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

    Sens, éthique & Implicationun nouvel eldorado ? 2 DÉCOUVRIR

    LES CHANGEMENTS D’ASPIRATIONS DE NOTRE SOCIÉTÉ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32ÉTHIQUE ET BIENVEILLANCE EN ENTREPRISE UNE MODE DE PLUS ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34NON, L’ÉTHIQUE N’EST PAS UN OUTIL MARKETING ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36ALLER JUSQU’AU BOUT POUR FAIRE PRIMER L’ÉTHIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

    S’INSPIRER

    LES PETITS RADIS, QUAND L’ENTREPRISE DEVIENT UN TERREAU POUR L’ENTREPRENEURIAT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42PAS DE NOUVELLES, BONNES NOUVELLES ? PAS CHEZ DASHLANE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

    FAIRE ENSEMBLE

    DIALOGUE + : LIBÉRER LA PAROLE POUR LIBÉRER L’INTELLIGENCE INDIVIDUELLE ET COLLECTIVE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47EQIOM VOUS CONNAISSEZ ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50L’ÉTHIQUE ET LA CONFORMITÉ AU SERVICE DES VALEURS DE L’ENTREPRISE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53QUAND EQIOM RIME AVEC FEMMES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56

    EMPREINTE, GENÈSE ET MODE D’EMPLOI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7DONNER LA PAROLE À NOS PARTIES PRENANTES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

  • Empreinte Hors série 5

    Ancrage local & Valeur partagéeplus qu’une présence dans les territoires

    3 DÉCOUVRIR

    L’ANCRAGE LOCAL DES ENTREPRISES : DU DEVOIR À L’OPPORTUNITÉ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60ESPRIT ENTREPRENEURIAL ET VALEUR PARTAGÉE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62

    S’INSPIRER

    START-UP DE TERRITOIRE : QUAND LES CITOYENS PASSENT À L’ACTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64LE CLUS’TER JURA, LA PUISSANCE DU COLLECTIF . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

    FAIRE ENSEMBLE

    L’ANCRAGE LOCAL, LA CLÉ DE VOÛTE DU RENOUVEAU D’UN SITE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68EXPÉDITION CARRIÈRE, QUAND L’ÉCOLE S’INVITE CHEZ EQIOM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71

    Innovation & économie circulairel’avenir de tout un secteur

    4 DÉCOUVRIR

    LE CLIENT AU CŒUR DU RÉACTEUR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76FAIRE ENSEMBLE … DURABLEMENT RENCONTRE AVEC ISABELLE DELANNOY . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78

    S’INSPIRER

    LE ZÉRO DÉCHET MADE IN ROUBAIX . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82DE DÉCHET À CARRELAGE, PARCOURS D’UNE COQUILLE DE MOULE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84UNE K-RYOLE SUR LES CHANTIERS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86

    FAIRE ENSEMBLE

    RIEN NE SE PERD, RIEN NE SE CRÉE, TOUT SE TRANSFORME . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89LA PLATEFORME DIVAL, POUR RÉDUIRE L’USAGE DES MATIÈRES PREMIÈRES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92SAPPHIRE, UNE PIERRE PRÉCIEUSE DANS LE TRAITEMENT DES DÉCHETS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94

  • 6 Empreinte Hors série

    Comité de rédaction : Kyomi Arrachea, Pierre Bultez, François Marois, Alexandre Montet, Sébastien Yafil

    Idée, conception graphique, écriture des contenus et coordination : EXAECOExaeco est une société lilloise spécialisée en stratégie des organisations et intelligence collective. Nous accom-pagnons nos clients dans leurs changements d’organisation, l’évolution de leurs modèles économiques, leur développement commercial et la mise en œuvre d’approches d’innovation ouverte. Notre mot d’ordre : seul on va plus vite, ensemble on va plus loin. www.exaeco.fr

    Crédits photos : Laure Genin (page 14), Jean Bruyères (page 19), Espace éthique région Île de France (page 38), Pascal Tanneur (page 80), Marvin Prod.

    GOUVERNANCE & CO-CONSTRUCTIONlaisser s’exprimer le bon sens

    5 DÉCOUVRIR

    DIALOGUER POUR MIEUX CO-CONSTRUIRE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98

    LIBÉRONS LES ÉNERGIES ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100

    S’INSPIRER

    LIBÉRER LES ÉNERGIES DE L’ENTREPRISE POUR LA RENDRE PLUS SOUDÉE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102

    GT SOLUTIONS : EN ROUTE POUR LA TRANSFORMATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104

    QUAND LA SOCIOCRATIE S’INVITE DANS L’ENTREPRISE : L’HISTOIRE DE COOPCONNEXION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107

    LA FONCTION PUBLIQUE EN MODE START-UP ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109

    FAIRE ENSEMBLE

    UNE VISION PARTAGÉE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111

    RSE N.F. : RESPONSABILITÉ SOCIÉTALE SELON EQIOM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113

  • Empreinte Hors série 7

    EMPREINTE GENèSE ET MODE D’EMPLOICe numéro d’Empreinte est un hors-série : dans les deux premiers numéros (2016 et 2014), nous décrivions les ambitions et les (petites et grandes) réalisations d’EQIOM en matière

    de RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises). Cette fois-ci, nous avons voulu nous

    inscrire dans l’échange, faire témoigner des personnes inspirantes pour qu’elles nous

    interpellent et nous montrent l’exemple. Voici l’histoire de sa genèse.

    > L’histoire …

    Fin 2017, EQIOM initie une démarche de co-design appelée EQIOM 7+. Ce projet, à l’initiative de François Marois, secrétaire général de l’entreprise, cherche à répondre au besoin de clarifi-cation sur les actions d’EQIOM en termes de RSE. La volonté de la Direction était de mener une approche qui parte des équipes en y associant les partenaires et interlocuteurs de l’entreprise. Elle vise à « faire remonter » les informations afin de mieux com-prendre les attentes de l’ensemble des parties prenantes (quitte à ce qu’elles challengent l’entreprise), et d’adapter l’organisation en conséquence.

    Cela a amené dans un premier temps à conduire une réflexion avec quinze collaborateurs d’EQIOM dont les missions sont en lien avec les enjeux de RSE, dans le cadre d’un atelier qui s’est déroulé en novembre 2017. Cet atelier a été l’occasion d’échanger

    avec un groupe d’étudiants de l’Université Catholique de Lille sur leur perception d’une entreprise telle que la nôtre (Cf page 51). Ce temps d’échanges a permis d’identifier 4 grands axes sur les-quels le groupe souhaitait travailler. Ils ont ensuite été approfon-dis à l’occasion d’une table ronde menée avec des personnalités très impliquées dans l’innovation et le développement de nou-veaux modèles économiques et sociétaux, et dont vous retrou-verez une large partie des propos tout au long de ce magazine.

    En partant de ces 4 axes, un questionnaire a été construit afin de recueillir le point de vue des parties prenantes de l’entreprise (cf page 10). Ce sont ces grands axes qui constituent le squelette de ce magazine : nous avons souhaité poursuivre cet échange avec nos parties prenantes, au-delà du questionnaire, avec cette publication.

  • 8 Empreinte Hors série

    > 4 AXES ISSUS DE L’ATELIER CO-DESIGN

    > Le mode d’emploi

    Au fil de ces 5 parties, nous vous proposons un échange à plu-sieurs voix. Vous y retrouverez 3 catégories d’articles, qui font écho au sous-titre d’Empreinte :

    • Découvrir : ces articles ont été pour beaucoup rédigés à par-tir des échanges ayant eu lieu lors de la table ronde évoquée précédemment (cf. encart ci-contre). Nous sommes aussi allés interviewer d’autres personnes inspirantes, engagées, souvent très éloignées de notre secteur d’activités mais toutes nous permettant de prendre du recul ou d’adopter un autre point de vue sur les grandes transformations en cours ou à venir.

    • S’inspirer : nous sommes allés à la découverte d’actions exem-plaires qui nous ont interpellés, enthousiasmés. Nous avons voulu savoir comment ces initiatives étaient nées, qui étaient les organisations et les personnes qui les portaient. Ce qu’elles leur avaient apporté … Pour peut-être un jour les mettre en place chez EQIOM, qui sait ? Et quoi qu’il en soit : pour nous donner envie, nous aussi, de passer à l’action.

    • Faire ensemble : ces articles mettent en avant des actions menées au sein d’EQIOM et qui s’inscrivent dans chacun de ces 5 grands axes. Elles font partie des réalisations ou des projets dont nous sommes fiers ; nous voulions mettre un coup de pro-jecteur sur ces femmes et ces hommes qui œuvrent pour faire d’EQIOM une entreprise toujours plus responsable, durable, in-novante et porteuse de sens.

    Chacune des personnes interrogées a eu une totale liberté dans ses propos et nous avons cherché à rester les plus fidèles pos-sibles dans leur retranscription écrite. Nous remercions d’ailleurs tous les contributeurs et les contributrices : merci d’avoir accepté de prendre le temps de nous parler de vous, de vos actions, de vos convictions et de votre engagement. Nous tenions absolu-ment à ce que ce magazine « parle vrai » et nous espérons que c’est bien le cas. Si nous publions aujourd’hui Empreinte, c’est pour que se développe de plus en plus un dialogue ouvert et sin-cère aussi bien avec et entre les salariés de l’entreprise qu’avec nos parties prenantes externes. Nous vous proposons ce maga-zine en espérant qu’il vous fera réagir (que ce soit dans le bon ou dans le mauvais sens), qu’il vous inspirera, qu’il vous donnera envie d’agir et de nous contacter pour en discuter. Collègues, fournisseurs, sous-traitants, partenaires, membres de notre éco-système, nous vous incitons à prendre contact avec nous si ce magazine ne vous a pas laissés indifférents ou a éveillé quelque chose en vous.

    Nous vous souhaitons une bonne lecture !

    Le comité de rédactionKyomi ARRACHEA, Pierre BULTEZ, François MAROIS, Alexandre MONTET, Sébastien YAFIL

    Pour nous contacter : [email protected]

    L’innovation et l’économie

    circulaireLa gouvernance L’éthique

    L’ANCRAGE LOCAL ET CRÉATION

    DE VALEUR PARTAGÉE

    Au cours de son élaboration, nous avons estimé que cette structure en 4 axes ne nous permettait pas de mettre suffi-samment en avant un sujet que nous ne pouvons plus ignorer : l’urgence climatique. Nous avons donc décidé de créer une cinquième partie, placée en début de ce magazine, qui développe les grands enjeux environnementaux auxquels nous devons tous faire face.

  • Empreinte Hors série 9

    Christophe CHEVALIER PDG du groupe Archer et initiateur de la démarche « Start-up de territoire »

    Président du groupe Archer, il a une obses-sion : contribuer à redynamiser un territoire dévasté par la désindustrialisation. Basé

    dans la zone industrielle en déclin du bassin de Romans, son groupe œuvre avec succès pour le développement économique et solidaire du département drômois depuis plus de 25 ans. Lauréat du prix de l’entrepreneur social 2012 (Schwab – BCG), il promeut les « Pôle Territoriaux de Coopération Economiques » (PTCE) qui réunissent tous les acteurs locaux pour relancer des activités sur des territoires sinistrés.

    Isabelle DELANNOY Auteur de « L’économie symbiotique, un modèle écologique, citoyen et régénérant » - Actes sud, 2017

    Après des débuts dans la recherche, la régle-mentation et le lobby pour l’agriculture bio-logique, elle s’oriente vers la vulgarisation

    des enjeux écologiques, rejoint l’agence de Yann Arthus-Bertrand et collabore au livre « La Terre vue du ciel » et au film « Home ». Auteur largement diffusé depuis, son expertise dans le domaine du développement durable est à l’origine du premier observatoire de l’empreinte carbone des Français. Chroniqueuse dans « Com-ment ça va bien ! » sur France 2 de 2010 à 2012, elle fonde alors la structure « Do green » pour promouvoir le modèle de l’écono-mie symbiotique et publie un ouvrage sur le thème en 2017.

    Alexandre GARCINAdjoint au maire de Roubaix délégué au développement durable, architecte de « Zéro Déchet Roubaix » et Expert de la Ville Durable et Innovante en Hauts-de-France

    Après une formation d’Ingénieur en France (ENPC, Génie Civil et Bâtiment) et en Allemagne (Technische Uni-versität München), il œuvre 15 ans au sein d’entreprises du BTP (VINCI Construction France, Bouygues Bâtiment Nord-Est) dont 8 ans au service du développement durable et de l’innovation. Conseiller visionnaire délégué au développement durable de la Mairie de Roubaix, il est surnommé « Monsieur Zéro Déchet » et s’attache depuis 2013 à réduire considérablement le gaspillage dans la commune et à réinventer la ville grâce à la résilience.

    Pierre GOHAR PDG de WISIM SAS depuis octobre 2017, Directeur de l’Innovation et des Relations avec les Entreprises à l’Université Paris-Saclay de 2013 à 2017 (et au CNRS de précédemment)

    Pierre Gohar est un expert dans le transfert de technologies, le montage de dispositifs et d’écosystèmes dé-diés à l’innovation, la création et le développement de start-up. Après un début de carrière dans la recherche au CEA, il explore le monde de l’entrepreneuriat en fondant ou en accompagnant des startups technologiques. Il porte la conviction que notre société vit une profonde mutation de valeurs, que nos organisations, et notamment nos organisations éducatives, doivent impérati-vement intégrer dans leur fonctionnement. Il appréhende enfin cette mutation comme une crise spirituelle, et se tourne vers la longue histoire des civilisations pour proposer ce qui se veut une voie de sortie par le haut de cette crise.

    Jean KASPAR Consultant en stratégies sociales, membre du panel Parties Prenantes EQIOM et du conseil d’administration de notre Fondation d’Entreprise Energies Croisées

    Formé à l’école des Mines de potasse d’Al-sace, l’ancien secrétaire général de la CFDT

    est à la tête de JK Consultant, sa société spécialisée en straté-gie sociale créée en 1997 : « Le dialogue social en France reste marqué par la culture de la confrontation plutôt que par celle de la coopération. Or, celle-ci consiste à chercher les moyens de transcender les divergences d’opinions, pour essayer de répondre aux questions de fond. J’essaie toujours d’être un constructeur de passerelles, en formant les encadrants et les représentants des salariés sur la problématique du dialogue social. Je fais ce que j’ai toujours fait dans mon activité syndicale : travailler pour une société plus humaine. »

    Jean-Michel LECUYER DG d’INCO « Le catalyseur dédié aux start-up de la nouvelle économie » et ancien Directeur du Comptoir de l’innovation

    Ingénieur de formation (École polytechnique, École des Mines), il consacre plusieurs an-nées au conseil des collectivités sur leurs

    programmes de développement durable (traitement de l’eau, ges-tion des déchets, …) puis aux activités d’accompagnement et de financement des entreprises sociales du réseau France Active. En 2014, il rejoint le Comptoir de l’Innovation, qui finance, développe et promeut l’entrepreneuriat social en France et dans le monde. Il est aujourd’hui Directeur Général d’INCO, consortium mondial d’une nouvelle économie inclusive et durable agissant sur 4 plans principaux : investissement, incubation, formation et média.

    table ronde

    Le 26 juin 2018, 15 collaborateurs d’EQIOM ainsi que la Direction se sont réunis au ministère de la Transition Ecologique et Solidaire pour une table ronde inspirante. Lors de celle-ci, 6 intervenants sont venus débattre avec eux autour des sujets « Innovation et économie circulaire » et « Ancrage territorial et valeur partagée ».

    Empreinte Hors série 9

  • 10 Empreinte Hors série

    En moyenne, les taux de réponse pour une première enquête de matérialité impliquant des

    parties prenantes externes oscillent entre 5 et 15 %. Ce pourcentage témoigne de l’intérêt

    élevé que suscite cette sollicitation chez nos parties prenantes. Par contre, ce chiffre

    global cache des disparités régionales : cela nous questionne localement sur notre capacité

    à mobiliser, notre niveau d’ancrage et sur la vitalité du lien avec nos parties prenantes.

    DONNER LA PAROLE

    à NOS PARTIES PRENANTES

    ENQUÊTEDE SEPTEMBRE À DÉCEMBRE 2018

    NOMBRE D’ENVOIS

    376NOMBRE DE RÉPONSES

    83TAUX DE RÉPONSE

    22%

    DEPUIS QUELQUES MOIS, EQIOM MÈNE UNE RÉFLEXION SUR LE SENS ET LES ENJEUX DE SON ENGAGEMENT SOCIÉTAL ET ENVIRONNEMENTAL AU CŒUR DES TERRITOIRES OÙ NOUS SOMMES IMPLANTÉS. CONVAINCUS QUE CETTE RÉFLEXION N’A DE SENS QUE SI NOUS LA PARTAGEONS AVEC NOS PARTIES PRENANTES, NOUS AVONS LANCÉ UNE ENQUÊTE EN SEPTEMBRE 2018 POUR ENGAGER UN DIALOGUE AVEC ELLES.

    10 Empreinte Hors série

  • Empreinte Hors série 11

    Synthèse Tous les enjeux sont considérés comme importants par nos parties prenantes, ce qui valide le choix initial des enjeux que nous leur avons soumis ; cependant, les enjeux liés à l’innovation dans le développement durable et à l’ancrage territorial sont largement perçus comme prioritaires.

    Le développement durable est considéré comme très important, l’efficacité énergétique et l’innovation durable comme des cibles ambitieuses à prioriser, d’autant plus que leurs performances sont perçues comme nettement améliorables.

    La biodiversité est perçue comme un sujet qui pourrait servir de vecteur à l’ancrage local.

    La posture d’ouverture d’EQIOM au dialogue, sa volonté de créer de la valeur sur les territoires et la loyauté de ses pratiques sont particulièrement bien notées, en cohérence avec leur importance. Toutefois, un manque de dialogue en interne transparaît dans l’analyse des résultats en contraste avec les collaborations existantes, et plus nombreuses, avec des partenaires extérieurs.

    Nous mesurons l’importance de la richesse du dialogue engagé avec toutes les personnes

    qui ont répondu à notre enquête et nous les en remercions vivement.

    Nous nous engageons à communiquer les premières actions mises en place et à informer de

    leurs résultats.

    Empreinte Hors série 11

  • 12 Empreinte Hors série

    Co-construction et gouvernance

    partagéeSens,

    implication et éthique

    Innovation et économie circulaire

    Ancrage territorial et valeur

    partagée

    Pour initier ce dialogue, nous avons classé les enjeux majeurs de notre temps en 4 catégories et formulé ainsi le sens de notre démarche :

    « EQIOM et ses collaborateurs inventent ensemble une entreprise au cœur de la société de demain… pour vivre pleinement notre engagement et mériter la conFIance de nos partenaires … en innovant pour améliorer notre empreinte environnementale et préserver durablement les écosystèmes … et en nous engageant dans des projets qui créent de la valeur sur nos territoires. »

    Point de départ de notre enquête, cette proposition nous a permis d’offrir à nos parties prenantes l’opportunité de challenger, de prioriser et d’évaluer notre performance sur les enjeux évoqués.

    Résultats

    de l’enquête

  • Empreinte Hors série 13

    1• Intégrer l’efficacité énergétique et les principes de l’économie circulaire à l’ensemble de nos opérations

    2• Communiquer sur nos initiatives et leurs évolutions

    3• Construire notre gouvernance ensemble

    LES PRINCIPAUX ENJEUX POUR LESQUELS NOS PARTIES PRENANTES PERÇOIVENT UNE MOINDRE PERFORMANCE DE NOTRE ENTREPRISE

    1• Mériter la confiance de nos partenaires commerciaux

    2• Être ouvert et accessible

    3• Créer de la valeur sur nos territoires

    4• Favoriser le dialogue et les synergies

    5• Garantir la qualité de vie au travail et l’équilibre vie professionnelle/personnelle

    DES ENJEUX POUR LESQUELS NOS PARTIES PRENANTES SOULIGNENT LA PERFORMANCE D’EQIOM

    TOP 5

    1• Intégrer l’efficacité énergétique et les principes de l’économie circulaire à l’ensemble de nos opérations

    2• Créer de la valeur sur nos territoires

    3• Promouvoir une innovation et une offre durables et responsables

    4• Intensifier nos efforts dans la protection de la biodiversité

    LES ENJEUX PRIORITAIRES IDENTIFIÉS PAR NOS PARTIES PRENANTES

  • 14 Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat

    Écosystèmes & ClimatLes grands enjeux environnementaux 1 La lutte contre le réchauffement climatique est l’un des enjeux majeurs de nos générations ; elle est aujourd’hui inscrite dans de nombreux programmes politiques, dans les stratégies de la plupart des entreprises, dans les comportements de beaucoup de citoyens. Pourtant, le défi que représente le simple respect des objectifs de l’accord de Paris (viser « seulement » + 1,5°C d’ici 2100) semble immense. Dans son dernier rapport, le GIEC nous alerte sur les conséquences dramatiques d’un réchauffement de 2°C. Comment faire davantage ? Quand Greta Thunberg interpelait les grands dirigeants à Davos au début de l’année 2019, elle s’insurgeait contre ceux qui – alors que « notre maison brûle » - regardent ailleurs. Ici, nous avons choisi d’interviewer ceux qui font face, ceux qui combattent l’incendie, à leur manière et à leur échelle : par la sensibilisation du grand public, la compensation de leurs émissions, ou même la valorisation du CO2 émis par l’industrie. Prévenir la hausse des températures ne sert à rien si, par ailleurs, nous détruisons les écosystèmes. Dans son rapport de mai 2019, la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) explique que la nature connait un déclin sans précédent. Le réchauffement climatique et les activités humaines en général sont en cause. Quelles réponses peut-on apporter à cet enjeu, a fortiori dans une industrie extractive ?

  • Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat 15

  • 16 Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat

    La transition énergétique le nouveau déFI de l’industrieIl y a 10 ans, Cédric Ringenbach a décidé de travailler au service d’une cause qui lui semble essentielle : le climat.

    Cet ingénieur de formation, qui ne sait travailler que

    par passion, a d’abord été lobbyiste d’intérêt général au

    sein du Shift Project (1) au côté de Jean-Marc Jancovici,

    avant de FInalement se consacrer à la Fresque, un outil

    de sensibilisation au changement climatique qu’il a créé

    et amélioré au FIl des années. Son objectif :

    sensibiliser 1 million de personnes d’ici 2022.

    Comment en êtes-vous arrivé à vous engager pour le climat ?

    J’ai commencé à vraiment m’intéresser au climat en 2009 et j’ai pris conscience de la gravité du sujet. Pendant 6 mois, je me suis autoformé en lisant les rapports du GIEC (2) et j’ai ensuite eu la chance de démarrer l’aventure du Shift Project. Pendant 6 ans, j’ai ainsi fait du lobbying (3) d’intérêt général sur les questions du changement climatique. Le Shift Project excelle pour trouver des solutions techniques pour décarboner l’économie. Malheureuse-ment, nous étions sans cesse confrontés au même discours : « Vous avez raison, mais politiquement nous n’arriverons jamais à faire accepter de telles solutions. » Ma frustration est devenue de plus en plus forte et j’ai alors décidé de travailler sur des di-mensions complémentaires à celles du Shift : je voulais travailler sur le côté humain, la psychologie des individus pour réussir à les engager dans des mécanismes de transition. Je veux réussir à faire prendre conscience au plus grand nombre que des efforts sont nécessaires pour engager une transition. La sensibilisation joue un rôle majeur dans ce processus et j’ai donc décidé d’y consacrer mon action.

    Comment agissez-vous pour sensibiliser les gens au changement climatique ?

    J’utilise un format d’atelier que j’ai conçu : la Fresque du climat. Depuis 2009, je donne des cours sur le climat et lors d’un de mes cours, j’ai fait travailler les étudiants sur des courbes du GIEC et je leur ai demandé de les remettre dans l’ordre de causes à effets. J’ai constaté que cette méthode permettait de bien expliquer le phénomène de changement climatique et aux participants de s’approprier le sujet. J’ai continué à la perfectionner pour arriver à la version actuelle de la Fresque. L’enjeu est aujourd’hui de la

    diffuser le plus largement possible pour sensibiliser en masse. Il est donc primordial que l’atelier soit ludique, collaboratif et créatif. Pour assurer un rythme élevé de diffusion, je propose aux personnes d’être formées. Elles deviennent ainsi des anima-teurs qui pourront à leur tour sensibiliser d’autres personnes. Pour cela, pas besoin d’être un expert. Il est primordial pour la diffusion rapide de la Fresque que les gens puissent facilement se l’approprier. Je suis très heureux de la véritable dynamique qui s’est amorcée autour de cet atelier. Nous avons même dû créer une association pour canaliser toutes ces énergies. Notre objectif est de sensibiliser 1 million de personnes en 5 ans, soit d’ici 2022. La Fresque du climat a également été traduite dans de nombreuses langues pour favoriser sa diffusion.

    La prise de conscience du changement climatique est en effet indispensable, mais quelles sont ensuite les actions prioritaires à enclencher ?

    Les énergies fossiles étant au cœur du problème, le premier ré-flexe a été de développer les énergies renouvelables. Malheureu-sement, le résultat n’est pas au rendez-vous. Pour donner un ordre d’idée, toute la production annuelle des énergies renouve-lables qui ont été installées depuis le début de l’ère industrielle équivaut seulement à l’augmentation de la production d’énergies fossiles sur 18 mois.

    Le deuxième réflexe a donc été de chercher à réduire globa-lement la consommation d’énergie en agissant sur l’efficacité énergétique : l’isolation des bâtiments est améliorée, les pro-cess industriels optimisés. Chaque année, depuis des décennies, l’efficacité énergétique gagne 1 %. Mais cela n’empêche pas l’augmentation globale de la consommation. Ce phénomène est

    Cédric Ringenbach, Conférencier et enseignant sur le changement climatique, auteur de la Fresque du climat

    Découvrir

  • Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat 17

    naturel : quand un système est plus efficace, il a tendance à se développer. La nature fonctionne ainsi : quand une espèce animale ou végétale est plus efficace qu’une autre, elle se développe de plus en plus, à l’image du développement de l’espère humaine sur la Terre. Tant que l’effica-cité énergétique est utilisée comme levier prin-cipal, notre schéma traditionnel est conservé et les choses ne font que s’accélérer.

    Quelle est alors la solution ?

    Il faut aller vers un processus qui est malheu-reusement contre nature : la sobriété énergé-tique. Cela implique d’accepter collectivement des contraintes très fortes. Ce mouvement de-vra venir des citoyens. Il ne faut pas attendre des politiques qu’ils se saisissent du sujet à la place des citoyens. Les politiques ne font que suivre les citoyens avec quelques années de retard. Nous, citoyens, allons donc devoir de-mander aux pouvoirs politiques d’imposer des contraintes énergétiques de la même manière que nous nous sommes fixés des contraintes en termes de vitesse de circulation routière. Cela peut se traduire par un quota d’émission de CO2 par personne ou même d’une surface maximale de logement par personne. Très vite, des conséquences vont apparaître : un ralentis-sement de certains secteurs économiques, des destructions d’emplois … Le monde économique est donc très concerné par cette transition.

    À votre sens, quel doit être le rôle des entreprises dans cette question du changement climatique ?

    Le sujet est très compliqué pour elles car le revenu financier est leur raison d’être. Cela passe généralement par l’augmentation de leur volume de ventes et donc une production grandissante avec un impact écologique tou-jours plus grand. Le développement est dans l’ADN de l’entreprise. Depuis quelques années, les entreprises ont compris que le changement climatique est un enjeu pour leurs clients. Nous sommes alors passés par une phase de greenwashing (4) intense, très souvent couplé à des actions de lobbying dans le sens opposé. Aujourd’hui, le consommateur et le citoyen ont un regard de plus en plus averti et se laissent de moins en moins berner par ces pratiques.

    De plus en plus d’entreprises acceptent le sens de l’histoire : elles payent la taxe carbone mais cessent également de faire du lobbying à l’op-posé des intérêts environnementaux. Certaines, comme celles impliquées dans the Shift Project, font même du lobbying dans le bon sens.

    Mais elles vont devoir aller encore plus loin. De nombreuses entreprises vont devoir faire évo-luer leur business model : leur activité princi-pale est amenée à disparaître dans ce monde en transition. EQIOM est de celle-ci. Si la tran-sition s’opère dans les temps, d’ici quelques dizaines d’années, la production de béton et de ciment aura drastiquement chuté. Il faut se poser, dès maintenant, la question du dé-veloppement de nouvelles filières comme celle du bois ou d’autres matériaux. EQIOM pourrait également devenir un expert de la construction à haute efficacité énergétique ou encore de la rénovation de l’existant. La transition énergé-tique va être source de création d’activités : le chantier est gigantesque. Certaines entreprises vont difficilement se projeter dans ce monde d’après, mais leur survie en dépend. Elles vont devoir fondamentalement se transformer pour ne pas disparaître. Tel est l’enjeu.

    Pour en savoir plus sur la Fresque du climat : https://fresqueduclimat.org/

    (1) Shift Project : The Shift Project est un think tank (2) qui œuvre en faveur d’une économie libérée de la contrainte carbone. Association loi 1901 reconnue d’intérêt général et guidée par l’exigence de la rigueur scientifique, sa mission est d’éclairer et influencer le débat sur la transition énergétique, en France et en Europe.

    (2) GIEC : Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat. Ce sont des chercheurs du monde entier qui font une synthèse des connaissances scientifiques sur le changement climatique.

    (3) Lobbying : Ensemble d’actions d’influence et de pression menées par un lobby pour défendre ses intérêts face à des institutions ou individus pouvant prendre des décisions qui pourraient l’affecter.

    (4) Greenwashing ou blanchiment écologique : mot utilisé communément lorsqu’un message de communication abuse ou utilise à mauvais escient l’argument écologique.

    Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat 17

    Aujourd’hui, le consommateur et le citoyen ont un regard de plus en plus averti.

  • 18 Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat

    La carrière, un accélérateur de biodiversité (1)Depuis 8 ans, Guillaume Lemoine est écologue en charge des problématiques de biodiversité et d’ingénierie écologique à l’Etablissement public foncier (EPF) Nord-Pas de

    Calais. Il a auparavant travaillé 21 ans dans la gestion et la restauration d’écosystèmes

    naturels ou très anthropiques (terrils miniers, carrières, sablières) pour le Département

    du Nord et pour l’EPF. Il a acquis une expérience certaine avec les carriers (2) (secteur privé

    et UNICEM) à qui il offre un service de conseil et d’accompagnement depuis une quinzaine

    d’années. La biodiversité étant malheureusement devenu un sujet hautement d’actualité, il

    est important de connaître sa position sur la situation actuelle.

    Quel est votre constat sur la biodiversité ?

    On parle beaucoup d’érosion de la biodiversité actuellement. À mon sens, c’est un euphémisme. Aux premières assises régionales de la biodiver-sité de la région Nouvelle-Aquitaine, on pouvait entendre : « Arrêtons de parler d’érosion, nous sommes au stade de l’effondrement ! » (Propos de Gilles Bœuf président du MNHN et ancien conseiller spécial de Ségolène Royal) et c’est une réalité. Dans de très nombreux endroits les populations d’oiseaux ont diminué de moitié, même chose pour les chauves-souris. Quant aux insectes leur disparition s’élève à 70 %, voire 80 % ... De nombreuses plantes sont aussi en situation défavorable de conservation. Sans faire du catastrophisme, la biodiversité va mal.

    En tant qu’êtres humains, nous sommes pro-fondément liés au monde du vivant, que ce soit pour notre alimentation, notre bien-être ou même pour la production de l’oxygène. La nature nous rend une multitude de services, elle a une multitude de fonctionnalités. Mais la vision du monde dans lequel nous vivons est très anthropocentrée (3). Nous ne faisons que nous servir de la nature : quand nous en avons besoin, nous la protégeons. Quand elle ne nous intéresse pas, nous la détruisons ; et ce triste constat ne date pas d’hier. Jacques Chi-rac le disait déjà il y a longtemps (au Sommet de la Terre de Johannesbourg) : « La maison brûle et nous, nous regardons à côté ». Nous ne sommes plus au stade de l’érosion, mais bien à celui de l’effondrement. Et cela ne concerne

    pas uniquement les pays tropicaux. C’est pareil chez nous ! Il est temps de protéger la nature, de protéger notre biodiversité comme nous pro-tégeons notre patrimoine historique, naturel et culturel.

    Quel lien existe-t-il entre les carriers et la biodiversité ?

    Les carriers sont historiquement très impliqués dans les questions de biodiversité. La règlementa-tion les y a toujours contraints de par leur impact direct sur la géologie, les paysages, les milieux naturels. L’attention à porter à la biodiversité fait désormais pleinement partie de leur ADN, d’autant plus qu’ils sont à la fois générateurs et consommateurs de biodiversité. Les carrières créent des bouleversements, des perturbations utiles à la création de nouveaux écosystèmes. La biodiversité a ses propres dynamiques depuis toujours et nous ne cessons d’empêcher ces mé-canismes de régénération spontanés en bloquant les processus naturels, en plantant et fixant les dunes, luttant contre les inondations et incen-dies, ou en rectifiant les rivières par exemple … Pourtant, ces perturbations naturelles, ce « sain chaos », que nous empêchons sont utiles à la bio-diversité et notamment aux espèces pionnières. À leur échelle, les carriers remplacent ce que la Terre ou le climat faisaient, ils récréent des bou-leversements et appliquent ainsi un régime de perturbations (effets de rupture). L’activité des carriers peut détruire des écosystèmes matures mais elle favorise aussi de nouveaux écosys-tèmes. C’est un véritable rôle stratégique : on recrée des bouleversements pour refaire du neuf.

    Guillaume Lemoine, écologue à l’Etablissement public foncier (EPF) Nord-Pas de Calais.

    Arrêtons de

    parler d’érosion,

    nous sommes au stade de l’effondrement.

    Découvrir

  • Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat 19

    Évidemment, il serait erroné de mettre toutes les carrières et tous les carriers dans le même sac, car si certains favorisent la biodiversité, il arrive parfois que ce soit mal fait. Dans cer-tains cas les espaces initiaux sont de faible va-leur (espaces agricoles intensifs en plaine) et les gains sont très importants, dans d’autres cas les sites d’exploitation sont situés dans des espaces de valeurs et le bénéfice apporté par le carrier est plus réduit. Sur certains terri-toires, les carriers assument pleinement leurs responsabilités sur ce sujet. Par exemple, dans les Hauts-de-France et en Belgique, le nombre de rapaces (Grand-Duc d’Europe) et d’Hiron-delles de rivage qui nichent dans les carrières est impressionnant en comparaison du reste du territoire. La carrière d’EQIOM de Presles et Boves en vallée de l’Aisne accueille une colonie exceptionnelle de Guêpiers d’Europe ! On peut vraiment parler d’une cohabitation entre ces espèces et les employés des carrières, dans un cadre où la protection de chacun est réfléchie et surtout assurée. J’ai d’ailleurs une anecdote à ce sujet. Dans l’une des carrières que j’étudie, un groupe de naturalistes est venu étudier les hiboux qui nichent à cet endroit. Ils étaient vê-tus de kaki, la tenue classique des naturalistes pour passer les plus inaperçus possible. Mais les Grands-ducs les repéraient automatiquement et changeaient de comportement (stress). Par contre, ils se sont rendu compte que les oiseaux ne réagissaient pas à l’approche des ouvriers de la carrière pourtant vêtus de tenues orange et jaunes fluorescents. Les naturalistes portent donc désormais les tenues des carriers quand ils veulent suivre les Grands-ducs.

    Cela prouve bien que pour cette espèce, les êtres humains habillés en jaune et orange qui sont situés en contrebas de leur habitat ne sont pas considérés comme étrangers ou dangereux et qu’il existe une vraie cohabitation pacifique entre les carriers et les espèces sauvages, qui ont été favorisées ici, rappelons-le, grâce à l’ac-tivité extractive. Pas de carrière, ce n’est pas de falaise artificielle donc pas d’oiseau rupestre (Faucon pèlerin ou Grand-duc) en plaine.

    Les carriers les plus à la pointe sur le sujet considèrent même qu’il faut dépasser cette pos-ture passive de « co-existence sur un même es-pace » pour aller plus loin dans la démarche en étant pro-actif et en créant ou maintenant de vrais lieux favorables à la biodiversité. EQIOM est de ceux-là et cherche à dépasser le « simple » cadre réglementaire pour en faire davantage. Il y a le terreau dans cette entreprise pour aller plus loin que le simple respect de la réglementation. L’entreprise fait d’ailleurs partie d’un groupe de travail au sein de l’UNICEM (4) sur des probléma-tiques de biodiversité dynamique. Ce groupe ne

    se contente pas de réfléchir à la manière dont les carrières en fin de vie vont pouvoir être de nouveaux lieux favorables à la biodiversité mais comment une carrière encore en activité peut être un véritable accélérateur de biodiversi-té. Et même si les engins de chantier risquent d’écraser quelques Crapauds calamite, il ne faut pas en avoir peur si une bonne gestion de la carrière (création volontaire de dépressions hu-mides) a permis à des centaines d’individus de se développer, là où avant l’espèce ne trouvait pas de lieux de reproduction adaptés. C’est une approche totalement nouvelle. Les carriers ont donc une forte responsabilité pour le maintien et le développement d’espèces particulières et il y a matière à innover.

    Les carriers se distinguent-ils à ce point d’autres professions dans leur prise en compte de la biodiversité ?

    Sincèrement, ce secteur d’activité est le plus au fait et le plus instruit sur ces problématiques de biodiversité, tout simplement parce qu’il est dépendant d’un biotope (5) à 100 %. Ça fait plus de 20 ans que ces questions de biodiversités sont évidentes dans le secteur et que les car-riers ont un « coup d’avance » sur les autres. Par exemple, aucun carrier ne fait l’impasse sur un inventaire naturaliste sur leurs sites alors que c’est loin d’être le cas dans les autres secteurs industriels ou d’aménagement. Ils ont été les premiers à écrire des guides de procédure sur la biodiversité, sur les remises en état, ou encore à travailler sur un guide de l’application de la séquence ERC (éviter – réduire – compenser) : où il est question d’éviter au maximum d’avoir un impact, si c’est impossible tout faire pour le réduire et si une fois encore c’est compliqué, veiller à compenser cet impact. D’une situation subie, les carriers glissent progressivement vers une cohabitation pacifique, puis vers une dé-marche proactive pour créer de la biodiversité. C’est bon signe !

    Il existe une vraie cohabitation paciFIque entre les carriers et les

    espèces.

    (1) Biodiversité : Diversité des espèces vivantes (micro-organismes, végétaux, animaux) présentes dans un milieu.

    (2) Carrier : Personne qui exploite une carrière comme entrepreneur ou comme ouvrier.

    (3) Anthropocentrée : Qui considère l’homme comme le centre du monde.

    (4) UNICEM (Union nationale des industries de carrières et matériaux de construction) : Fédération qui regroupe les industries extractives et les fabricants de la construction comme EQIOM.

    (5) Biotope : Milieu défini par des caractéristiques physicochimiques stables et abritant une communauté d’êtres vivants. Le biotope et les êtres qu’il abrite constituent un écosystème.

    Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat 19

    Guêpier sur le site d’EQIOM Presles-et-Boves

  • 20 Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat

    Assumer sa croissance et agir sur son impact :

    le déFI de ParexgroupEn 2017, Parexgroup, groupe international de chimie de la construction, a lancé son Climate

    Program. Encore un grand groupe qui communique sur sa démarche développement durable,

    penserez-vous. Mais au contraire, c’est la première fois qu’éric Bergé, CEO de Parexgroup, accepte de communiquer sur le sujet. Loin du greenwashing (1) ambiant, l’entreprise souhaite

    assumer ses responsabilités face au déFI imposé par l’urgence climatique.

    ➤ Comment est né ce Climate Program ?

    Tout est parti d’un constat et d’une conviction personnelle. En 2016, nous faisions le constat que notre entreprise était parmi les grands gagnants de la mondialisation et de l’urbanisation du monde. Peu de temps avant avait eu lieu la COP 21. Nous nous sommes alors demandé en quoi nous agissions pour être acteurs du changement. Clairement, ce n’était pas en recyclant nos gobe-lets et en triant le papier que nous pouvions estimer faire notre part. Nous avons donc décidé d’agir. Afin de structurer notre ac-tion, nous nous sommes faits accompagner par PUR projet, une entreprise sociale qui accompagne les entreprises dans l’intégra-tion de la problématique du climat au cœur de leur chaîne de valeur. Ils nous ont aidés à structurer notre démarche et nous ont proposé une approche en 3 axes : la mesure de notre impact carbone, un plan d’actions précis et directement lié à notre métier pour réduire notre impact, et enfin de la remédiation (2).

    ➤ Votre Climate Program ne comporte donc pas qu’un volet environnemental. Il est aussi social.

    Tout à fait mais cela semble logique car nous n’avons pas qu’un impact environnemental : nous avons aussi un impact social. En participant à l’urbanisation du monde, nous sommes impliqués dans la désertification des zones rurales. PUR projet nous a pro-posé un programme d’actions d’agroforesterie dans la quasi-to-talité des 23 pays dans lesquels nous sommes implantés. C’était vraiment important pour nous d’agir dans chaque pays pour que cela soit concret pour tous les collaborateurs. D’autant plus que

    chaque projet carbone forestier est utilisé comme un moyen de favoriser le développement socio-économique des communautés locales défavorisées. Mais cette partie de notre action n’est que la cerise sur le gâteau : la remédiation nous permet de compen-ser l’impact carbone de nos déplacements et du commuting (3), mais ces derniers ne représentent que 2 % de nos émissions de CO2. Nous sommes fiers de compenser les émissions liées à nos déplacements par l’agroforesterie mais nous savons que l’enjeu n’est pas là.

    ➤ Quels sont les objectifs que vous vous êtes FIxés ?

    Après avoir tâtonné pendant deux ans, nous pensons qu’un par-cours du type de celui préconisé par la COP 21 est envisageable : une baisse de 20 % de nos émissions sur 5 ans. Cela ne va pas forcément être facile mais c’est jouable et cela nous oblige à ne pas se contenter d’actions symboliques. Nous devons avant tout baisser les émissions directes de notre process industriel (4 % du total) et plus encore trouver le moyen de réduire les émis-sions indirectes qui sont liées à nos fournisseurs : le transport et les matières premières Si nous devions avoir la même stratégie de compensation pour ces émissions, nous serions purement et simplement ruinés. Pourtant, en termes d’image de l’entreprise, nous pourrions très bien nous limiter à nos actions actuelles d’agroforesterie et faire croire que cela suffit à être un acteur responsable. Tout comme passer notre flotte de véhicules en hy-bride : cela pourrait sembler être une bonne idée mais resterait toujours epsilon par rapport à notre impact global. Pour éviter de tomber dans le travers du greenwashing et du marketing débridé

    Ce n’était pas en recyclant nos gobelets et en triant le papier que nous pouvions estimer faire notre part.

    s’Inspirer

  • Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat 21

    Une baisse de 20 % de nos émissions sur 5 ans. Cela ne va pas

    être facile mais

    c’est jouable.

    autour du développement durable, nous avons aussi pris le parti de ne pas communiquer sur nos actions tant que nous n’aurons pas de ré-sultats concrets à présenter. Nous avons dérogé à la règle pour Empreinte car EQIOM est un de nos fournisseurs et une grande partie de notre programme va reposer sur ces derniers.

    ➤ Quelles sont vos attentes vis-à-vis de vos fournisseurs ?

    70 % de nos émissions sont indirectes car nous sommes une industrie de mélange. Nous vou-lons engager un dialogue de vérité avec nos fournisseurs, principalement ceux de matières premières (sable, ciment, additifs, polymères …). Comme tous les industriels, nous évaluons nos fournisseurs mais nous attendons désormais d’eux des données très spécifiques. Ce qui nous intéresse, ce n’est pas juste de savoir qu’elle est leur émission moyenne de C02 en Europe ou de leur filière. Quand nous achetons un ci-ment donné, nous voulons connaître les perfor-mances de l’usine qui produit ce ciment. Entre deux types de ciment de prix et de qualité équi-valents, il y en a peut-être un qui est produit de manière beaucoup plus éco-responsable. Nous voulons pouvoir faire cet arbitrage. Mais ces données sont très difficiles à obtenir : en moyenne, seul 1 fournisseur sur 5 est capable ou disposé à nous les transmettre. Mais ils vont devoir passer par là : le monde bouge et au-de-là d’un aspect purement moral, nous finirons tous par payer le fait que nous sommes de très gros émetteurs de CO2. Autant s’y mettre tout de suite et travailler ensemble à cette réduction. C’est le message que nous envoyons à nos four-nisseurs et donc à EQIOM. D’autant plus que le domaine des liants, parmi lesquels le ciment, est le domaine dans lequel nous attendons le plus de progrès dans les 5 années à venir.

    ➤ Ce programme a-t-il eu un impact fort au sein de l’entreprise, ou est-ce un programme parallèle à vos activités ?

    Un peu partout dans le monde, des salariés se sont portés volontaires pour rendre notre en-treprise écologiquement plus vertueuse. Des groupes de travail se sont montés de manière informelle, parfois sans pilotage hiérarchique. En tant que CEO, je sponsorise leurs actions et ils n’ont pas toujours attendus le feu vert de leur patron direct pour se lancer. Grâce à cette agilité et à cette énergie, nous avons baissé de plus de 20 % la consommation de nos sécheurs de sable en un temps record. De plus, nous bénéficions de l’échange de bonnes pratiques entre nos différents sites à travers le monde. Le principal levier ne vient pas tant de l’argent que

    nous devons mettre dans les actions mais sur-tout du transfert de technologies plus propres entre nos différentes implantations et de la transmission de savoir-faire. Sans compter que notre impact ne s’arrête pas aux portes de notre entreprise : nos salariés sont aussi des citoyens, des membres d’une famille. Ils parlent autour d’eux et font évoluer les mentalités dans leur entourage, surtout dans les zones où l’urgence climatique n’est pas autant prise en compte qu’en Europe, comme en Amérique du Sud par exemple.

    ➤ Avez-vous l’impression que nous assistons actuellement à une véritable mobilisation autour du changement climatique ?

    Malheureusement, nous nous sentons un peu seuls. Nous sommes sans doute tous dans un déni collectif. Sans contraintes, sommes-nous capables de faire vraiment mieux que de la simple communication ? Paradoxalement, c’est en Chine que nous voyons les choses changer le plus vite avec une pression aussi soudaine que forte des autorités. Mais nous ne devons pas juste attendre la Chine fasse le boulot. Chacun doit faire sa part.

    (1) Greenwashing ou “ blanchiment écologique ” : mot utilisé communément lorsqu’un message de communication abuse ou utilise à mauvais escient l’argument écologique.

    (2) Remédiation : Mise en œuvre de moyens permettant de résoudre des problèmes environnementaux.

    (3) Commuting : Forme de mobilité dans un contexte professionnel. La personne travaille pendant la semaine dans un autre pays et revient le week-end dans son pays d’origine.

    éric Bergé, CEO de Parexgroup

  • 22 Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat

    Vasco 2 : quand le CO2 devient ressourceSous l’impulsion du port de Marseille-Fos, 12 partenaires - industriels de la zone industrialo-

    portuaire de Fos, centres de recherche, start-up, institutionnels – ont décidé de s’investir dans

    un projet commun de recherche appliquée pour valoriser le CO2 émis par les industriels. Leur

    ambition : contribuer à la transition énergétique par l’innovation en testant une solution inédite

    de production de biomasse basée sur le recyclage biologique du CO2 industriel.

    Michael Parra, coordinateur du projet Vasco 2 pour le Port de Marseille-Fos, nous raconte l’histoire de ce projet ambitieux et collaboratif.

    ➤ Comment est né le projet Vasco 2 ?

    L’histoire commence en 2008. À l’époque, les médias parlent beaucoup de la possible utilisation du CO2 émis par les industriels mais peu de solutions concrètes émergent. Le port de Marseille-Fos décide alors d’impulser une dynamique avec une somme d’acteurs publics et privés pour étudier les solutions possibles et définir celles qui pourraient être mises en pratique et adaptées à notre territoire. Tous ces acteurs se sont investis humainement et

    financièrement dans le projet avec un co-financement de l’Ade-me. Nous avons commencé par explorer une multitude de pos-sibilités : l’enfouissement géologique, des solutions industrielles comme l’exportation vers des puits de pétrole libyens pour pous-ser les nappes en fin de vie ou encore la production d’hydro-gène bas carbone, et enfin la bioremédiation. La bioremédiation consiste en la décontamination de milieux pollués au moyen de

    s’Inspirer

  • Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat 23

    techniques issues de la dégradation chimique ou d’autres activités d’organismes vivants. Nous avons ainsi décidé de faire pousser des microalgues avec du CO2. Comme ce projet se veut ambitieux et innovant, nous décidons de faire la démonstration de l’ensemble d’une fi-lière. Il faut donc trouver une utilisation à ces micro-algues. Nous choisissons d’ainsi alimenter la filière biocarburant.

    ➤ Quelles sont les contraintes liées à ce choix de la FILIÈRE biocarburant ?

    Il y en a une principale : le coût. Cette filière pré-sente de faibles marges comparées au secteur de la cosmétique ou encore de la chimie verte. Nous devons donc mettre au point une solution très efficace et peu coûteuse. Nous prenons le parti d’utiliser des bassins ouverts et non des photo-bioréacteurs (1) fermés qui coûtent beau-coup plus chers. L’eau de mer a été privilégiée à l’eau douce pour ne pas concurrencer d’autres besoins comme les besoins agricoles. Toujours dans cette optique de frugalité, le CO2 n’est pas extrait des fumées : l’intégralité des fumées est directement amenée dans les bassins. Les in-terventions sur les bassins sont également limi-tées au possible. Quand il pleut, nous regardons ce qu’il se passe quand les bassins débordent. Quand il fait chaud, l’évaporation est un peu gé-rée mais le moins possible. Comme le milieu est ouvert, nous ne faisons pas de la monoculture : nous obtenons des prairies dans lesquelles des centaines de milliers de microalgues différentes se développent, un peu comme pour une piscine dont on ne s’occupe pas et dans laquelle se dé-veloppent des microalgues.

    ➤ Comment les microalgues sont-elles ensuite transformées en biocarburant ?

    Cette transformation se fait par liquéfaction hy-drothermale. Pour faire simple, c’est de la cha-leur et de la pression, et c’est la technique utili-sée par la planète pendant des millions d’années pour produire du pétrole. Cette technologie est utilisée par le CEA de Grenoble qui fait partie des partenaires du projet et qui réussit à faire cette transformation de biomasse en biobrut (2) en quelques heures. Ce biobrut est ensuite pris en charge par Total qui caractérise le produit et fait des tests de distillation pour évaluer ce qui peut être obtenu comme biocarburant.

    ➤ De quels types d’industrie proviennent les fumées utilisées ?

    Comme nous utilisons les fumées dans leur intégralité, il était important d’avoir différents types de fumées. Nous avons un premier bas-sin alimenté par les fumées de la société Kem One. Cette société produit du PVC et les fumées libérées sont assez propres. Un autre bassin est à proximité de la société Solamat-Merex. Leur métier est de gérer des déchets industriels : ils valorisent les déchets au maximum et tout ce qui ne peut pas être valorisé est incinéré. Les fumées sont donc très changeantes et leur composition variée. Pour finir, le 3e site est chez ArcelorMittal, le n°1 mondial de la sidérurgie. Les fumées sont extrêmement riches, d’autant plus qu’il est arrivé pendant le projet que le four soit alimenté par du gaz de coke. Notre but est vraiment que la filière s’adapte à l’industrie et non l’inverse.

    ➤ En parlant des industriels, quelle est leur motivation à s’investir et investir dans un tel projet ?

    Les 3 industriels impliqués dans le projet ont plus ou moins les mêmes objectifs. Quand un industriel se lève le matin, il ne se demande pas comment il va pouvoir polluer la planète aujourd’hui, mais au contraire, comment il peut faire mieux pour l’environnement. Ils cherchent tous à moins émettre de polluants, la taxe car-bone aidant tout de même dans cette démarche. Mais nous avons eu de la chance d’avoir des partenaires industriels qui acceptent de mettre du temps et de l’argent dans un projet dont le seul but est de produire du savoir. Nous savions dès le début que nous n’aurions pas un pro-duit fini à commercialiser à l’issue du projet : la technologie n’était pas assez mature.

    ➤ Qu’avez-vous appris de cette première phase d’expérimentation ?

    Un de nos premiers apprentissages est que cela fonctionne ! Nous avons démontré que des fu-mées de process industriels, même complexes, pouvaient directement être utilisées. Les algues se développent et ne sont pas freinées par les autres composants. Quand nous avons démarré l’expérimentation, nous n’en étions pas du tout convaincus et étions plutôt stressés. Par contre,

    Michael Parra, coordinateur du projet Vasco 2 pour le Port de Marseille-Fos

    Nous sommes aujourd’hui FIERS

    de pouvoir dire qu’il existe des équipes

    françaises capables de cultiver

    des microalgues à partir de fumées

    industrielles

    et de produire du

    biobrut à partir de

    ces microalgues.

  • 24 Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat

    nous sommes arrivés à la conclusion qu’il fallait sortir de l’eau de mer pour cultiver les algues. L’un des inconvénients de l’utilisation de l’eau de mer est la présence de sel tout au long du processus. Une fois les microalgues récoltées, elles sont centrifugées et entrent dans le pro-cess pour donner du biobrut puis du biocarbu-rant. Mais il n’y a pas de débouchées pour le sel qui devient alors une contrainte et un coût puisqu’il faudra ajouter une étape technique-ment compliquée pour le retirer.

    ➤ Mais n’aviez-vous pas choisi l’eau de mer pour ne pas entrer en compétition avec d’autres besoins en eau douce ?

    Nous nous sommes finalement rendu compte que dans le cas spécifique du site de Fos, il n’y a pas de problème de compétitivité autour de l’eau douce : le Rhône est à proximité, sans compter le port de Marseille qui produit de l’eau brute (non potable) pour fournir les industriels pour leur réseau incendie et pour leurs pro-cess. De plus, quand il y a un crash (mort de toutes les algues) dans un bassin d’eau douce, la culture repart beaucoup plus vite qu’avec de l’eau de mer, en 24 à 48 heures. Cela nous a permis d’augmenter nos rendements en algues et donc en biobrut.

    ➤ Quelle va être la suite du projet ?

    Vasco 2 arrive à son terme et nous préparons la suite. Nous sommes en train de faire le bilan et l’évaluation du programme. Nous avons donc validé la phase de culture des microalgues et de leur transformation en biobrut. Nous sommes aujourd’hui fiers de pouvoir dire qu’il existe des équipes françaises capable de cultiver des mi-croalgues à partir de fumées industrielles et de produire du biobrut à partir de ces microalgues. Nous avons tiré d’autres enseignements que nous gardons pour l’instant confidentiels mais, sans trahir de secrets, il y a peu de chances que la suite de notre projet, qui ambitionnera d’être la dernière étape avant l’industrialisation d’une solution, se fasse en conservant la fabrication de biocarburant comme débouchés. Nous avons

    (1) Photo-bioréacteur : système assurant la production de micro-organismes photosynthétiques en suspension dans l’eau.

    (2) Biobrut : pétrole « biosourcé », c’est-à-dire entièrement ou partiellement fabriqué à partir de matières d’origine biologique.

    Quand un industriel se lève le matin, il ne se demande pas comment il va pouvoir polluer aujourd’hui, mais au contraire, comment il peut faire mieux pour l’environnement.

    finalisé l’étude technico-économique et la ma-turité de cette filière sera plutôt à long terme. Les sidérurgistes sont comme les cimentiers : ils payent une taxe carbone qui ne cesse d’aug-menter et veulent trouver des solutions rapides et fiables. La rentabilité de cette filière est prin-cipalement impactée par le besoin en foncier. Les quantités de biobrut obtenu, et donc de bio-carburant, lors de nos expérimentations nous font conclure que la demande d’espace pour la culture est trop importante pour être acceptable sur un territoire qui jongle en permanence entre le développement industriel et logistique et la préservation des espaces naturels. Toutefois, de nouveaux débouchés, prometteurs, ont d’ores et déjà été identifiés.

  • Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat 25

    40 % des émissions proviennent de l’utilisation de combustibles pour chauffer la matière. Depuis de nombreuses années, EQIOM agit pour remplacer progressivement les combustibles fossiles par des déchets : aujourd’hui, le taux d’utilisation de ces combustibles dits « de substitution » est de 60 % quand l’industrie cimentière française se trouve à 44 %. « La branche ciment d’EQIOM a même pour ambition de passer à 100 % (avec un premier palier à 80 % en 2025), alors que la profession se fixe un objectif de 50 % » précise Pierre Bultez. Une autre piste mise en œuvre pour réduire les com-bustibles fossiles : le recours croissant à la biomasse (1).

    60 % des émissions de CO2 proviennent ensuite d’une réaction chimique qui se produit lors de la cuisson du clinker (le princi-pal composé du ciment) : la décarbonatation du CaCO3 libère en moyenne 850 kg de CO2 à chaque tonne de clinker produite. L’uti-lisation du clinker induit donc une libération de CO2 quelles que soient les optimisations apportées au process industriel. EQIOM a, depuis de nombreuses années pour stratégie de remplacer le clinker par des produits de substitution, dont le bilan carbone est moindre comme du laitier (coproduit de la fabrication de fonte), du calcaire, des cendres volantes … Aujourd’hui, EQIOM est le leader français de ces ciments dits « alternatifs » avec une moyenne de 65 % de clinker dans ses ciments, contre 78 % en Europe. Sylvain Codron insiste sur le fait que « chaque diminution de 1 % est un véritable défi à relever. Ce chiffre n’est pas du tout anodin. ».

    NOUS SOMMES AUJOURD’HUI FACE À UNE URGENCE CLIMATIQUE QUI OBLIGE CHAQUE INDIVIDU ET CHAQUE ORGANISATION À RÉFLÉCHIR À SON IMPACT ENVIRONNEMENTAL. AVEC PRÈS DE 5 % DES ÉMISSIONS DE L’UNION EUROPÉENNE, L’INDUSTRIE CIMENTIÈRE EST UNE FILIÈRE TRÈS ÉMETTRICE DE CO2. COMME TOUTES LES INDUSTRIES, ELLE EST AUJOURD’HUI DANS L’OBLIGATION DE DIMINUER SES ÉMISSIONS, MAIS LA MANIÈRE DONT LE CO2 EST PRODUIT AU COURS DE LA FABRICATION DU CIMENT L’OBLIGE À RELEVER DES DÉFIS ENCORE PLUS IMPORTANTS.

    L’ENJEU CO2Faire ensemble

  • 26 Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat

    Décryptage du marché des quotas de CO2

    Pour réduire de 30 % les émissions de carbone d’ici 2030, l’Union Européenne a mis en place un marché du carbone en 2005 pour contrôler et réduire les émissions de CO2 des industries. Chaque industrie bénéficie de quotas gratuits à hauteur d’un niveau de référence d’excellence (la moyenne des émissions des usines les plus performantes) et dégressif annuellement. Les entreprises qui émettent davantage que le niveau de référence doivent racheter des quotas pour combler la différence. Celles qui émettent moins que ce niveau de référence peuvent vendre leurs quotas excédentaires. On parle alors de régulation du marché : quand ceux qui vendent sont plus nombreux que ceux qui achètent, la valeur du quota baisse et inversement s’il augmente. Avec la baisse régulière du niveau de référence, de moins en moins d’entreprises ont des quotas excédentaires, donc la valeur des quotas disponibles sur le marché augmente.

    L’année 2018 a semble-t-il été une année char-nière pour l’industrie cimentière dans la prise de conscience de sa responsabilité environnemen-tale. « Cette préoccupation est présente depuis de nombreuses années à l’échelle individuelle et collective mais le message n’était pas audible car il ne correspondait pas à une réalité écono-mique sous-jacente pour notre industrie » nous explique Pierre Bultez. « La hausse des quotas sur le marché carbone en avril 2018 et les prévisions de hausse pour les années à venir ont été un véritable électrochoc global de l’industrie de la construction. Les fédérations européennes, natio-nales et les syndicats au premier rang desquels le syndicat de l’industrie cimentière française se sont emparés du sujet et entraînent avec eux les entreprises dans des engagements de réduction d’émissions de CO2. La hausse du prix du CO2

    mêlée aux ambitions de chaque pays européens en la matière ont ainsi donné un vrai coup de fouet aux stratégies carbone des industriels. »

    EQIOM mène depuis de nombreuses années des projets en adéquation avec l’objectif de ré-duction des émissions de CO2. « Mais ces so-lutions n’avaient pas été poussées à l’époque car la pression sur le CO2 n’était pas la même, explique Pierre Bultez. La stratégie globale d’EQIOM, sa trajectoire carbone, donne un fil rouge, une cohérence et une nouvelle ambition à ces projets ».

    Pour Sylvain Codron, « cet intérêt économique à être plus vertueux est une véritable opportu-nité pour booster l’innovation du secteur, pour faire différemment et s’ouvrir à de nouveaux

    Pierre Bultez, Responsable Affaires Publiques

    cet intérêt économique à être plus vertueux est une véritable

    opportunité

    pour booster

    l’innovation du

    secteur.

  • Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat 27

    partenariats, de nouveaux métiers et mettre en place des synergies que nous n’aurions jamais imaginées il y a quelques années. Nous sommes par exemple en cours d’étude de faisabilité sur un projet de récupération de la chaleur fatale d’une de nos usines pour que la vapeur puisse être utilisée dans un autre process industriel et pour chauffer des équipements collectifs. Cela nous permet de renforcer notre ancrage lo-cal, de travailler sur des projets territoriaux et de faire d’une cimenterie un lieu de partage, d’échanges sur l’économie circulaire (2) et l’écolo-gie industrielle. Nous avons également à l’étude un projet de valorisation de bois déchet pour permettre la production de charbon de bois (un combustible 100 % biomasse), et de syngaz (3)

    biosourcé (4) qui pourrait être utilisé pour pro-duire de la chaleur, de l’électricité, du froid, voire même de l’hydrogène. Nous travaillons de plus en plus avec des startups qui nous apportent leur agilité et leur innovation. EQIOM apporte la force d’un groupe : du foncier, des équipements lourds comme des centrales électriques, des liaisons ferrées, des accès routiers mais aussi des autorisations comme celle de traiter des dé-chets. La cimenterie change alors complètement de statut et devient une plateforme centrale où se mettent en place des solutions gagnant-ga-gnant avec nos partenaires, qu’ils soient des startups, des collectivités, des universités ou des petites entreprises. Nous assumons de plus en plus un statut d’« usine d’utilité publique » ».

    « La clarification des ambitions d’EQIOM en termes de diminution des émissions de CO2 a permis de lancer de nombreux sujets », in-dique Sylvain Codron. « Ils doivent cependant être menés en parallèle car tous ne pourront pas aboutir pour des raisons économiques ou techniques. De plus, même si tous ces projets aboutissaient favorablement, cela ne suffirait pas à envisager une diminution des émissions de 80 % d’ici 2050 comme s’y est engagé le syndicat français de l’industrie cimentière. »

    « Nous sommes dans une logique où les leviers classiques doivent être poussés à leur maximum. C’est ainsi qu’EQIOM s’est fixé 3 axes prioritaires que sont la modernisation de l’outil industriel pour qu’il soit moins consommateur d’énergie,

    la substitution des combustibles fossiles et la diminution de l’utilisation du clinker », explique Pierre Bultez « Mais cela ne nous permettra pas de faire mieux que d’atteindre un facteur 4, c’est-à-dire une diminution par 4 des émissions de CO2. L’objectif de 80 % du syndicat français pour 2050 n’est atteignable qu’avec des techno-logies beaucoup plus disruptives qui permettront la captation, le stockage, la condensation et la réutilisation du CO2. Si le CO2 devenait une ma-tière première industrielle, ce serait une véritable révolution pour notre secteur d’activité. De nom-breux projets européens sont en cours (comme le projet Vasco 2 présenté en page 22) et le groupe CRH s’y implique fortement, mais les technolo-gies au niveau mondial sont encore loin d’être au point et réclament des millions d’investisse-ments. La technologie est encore très loin des ambitions, Il faudrait alors envisager une 3e voie qui semble la plus crédible pour les cimentiers : qu’ils élargissent leur champ de vision, que leur stratégie dépasse leur seule industrie. Nous sommes aujourd’hui face à une crise climatique

    CETTE PRÉOCCUPATION ENVIRONNEMENTALE EST PRÉSENTE DEPUIS DE NOMBREUSES ANNÉES À L’ÉCHELLE INDIVIDUELLE ET COLLECTIVE MAIS LE MESSAGE N’ÉTAIT PAS AUDIBLE CAR IL NE CORRESPONDAIT PAS À UNE RÉALITÉ ÉCONOMIQUE SOUS-JACENTE POUR NOTRE INDUSTRIE.

    EQIOM S’EST FIXÉ 3 AXES PRIORITAIRES QUE SONT LA

    MODERNISATION

    DE L’OUTIL

    INDUSTRIEL POUR

    QU’IL SOIT MOINS

    CONSOMMATEUR

    D’ÉNERGIE,

    LA SUBSTITUTION

    DES COMBUSTIBLES

    FOSSILES ET LA

    DIMINUTION DE

    L’UTILISATION DU

    CLINKER.

    Sylvain Codron, Responsable environnement (Ciment)

  • 28 Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat

    LE BÉTON EST LA DEUXIÈME MATIÈRE LA PLUS UTILISÉE AU MONDE DERRIÈRE L’EAU ET ON SE DOIT D’ENVISAGER QU’IL POURRAIT ÊTRE MOINS UTILISÉ, OU DIFFÉREMMENT.

    marquée qui menace notre planète. Il y a en Europe une prise de conscience des populations inégalée dans le reste du monde. Mais parallèlement, la demande en matériaux de construction est stable ou en nette hausse selon les régions du globe, notam-ment du fait de l’accroissement de la population mondiale, de modifications dans la structure des ménages et de l’urbanisation croissante. Pour y répondre de manière responsable, nous nous devons de questionner la quantité de ciment à fort taux de clinker intégrée dans le béton, ou même de la quantité de béton utilisée dans une construction. La vraie question est : comment générer de la valeur tout en construisant différemment ? »

    Sylvain Codron s’exprime également dans ce sens : « Le béton est la deuxième matière la plus utilisée au monde derrière l’eau et on se doit d’envisager qu’il pourrait être moins utilisé, ou d’une autre manière. » Cela passe par exemple par de meilleures techniques de construction, le recours à la mixité des matériaux, et surtout leur recyclage en fin de vie : le béton a des atouts pour répondre à ces enjeux, si la manière de le produire et de le mettre en œuvre est repensée. Ce qui est sûr, c’est que la fi-lière construction va au-devant de profondes mutations. « Notre secteur industriel est en train de se rendre compte qu’il pourrait

    disparaître. Ceux qui survivront seront ceux qui anticiperont (quitte à passer pour des pessimistes), et EQIOM souhaite en faire partie : pour cela, il faudra relever des challenges tech-niques, économiques, environnementaux … et surtout faire col-lectif. En tant que cimentier, comme tout acteur de la filière construction, nous ne pouvons pas nous épargner de changer ; notre rôle est aussi celui d’accompagner nos clients dans cette transformation, en leur proposant des solutions qui répondent aux enjeux carbone. »

  • Empreinte Hors série 1. Écosystèmes & Climat 29

    NOTRE RÔLE EST AUSSI CELUI D’ACCOMPAGNER NOS CLIENTS DANS CETTE TRANSFORMATION, EN LEUR PROPOSANT DES SOLUTIONS QUI RÉPONDENT AUX ENJEUX CARBONE.

    (1) Biomasse : Ensemble de la matière organique d’origine végétale ou animale, cette biomasse étant utilisée pour produite de l’énergie.

    (2) Économie circulaire : Modèle économique dont l’objectif est de produire des biens et des services de manière durable, en limitant la consommation et les gaspillages de ressources (matières premières, eau, énergie) ainsi que la production des déchets. Il s’agit de rompre avec le modèle de l’économie linéaire (extraire, fabriquer, consommer, jeter) pour un modèle économique « circulaire ».

    (3) Syngaz : Gaz de synthèse produit par thermochimie. Il peut être utilisé directement comme carburant gazeux ou bien être transformé en carburant liquide.

    (4) Biosourcé : Se dit d’un produit ou d’un matériau entièrement ou partiellement fabriqué à partir de matières d’origine biologique.

    Le label E+C-

    E+C- est un plan d’action et d’expérimentation qui s’inscrit dans le cadre de la loi de la transition énergétique pour la croissance verte. E+C- est un nouveau référentiel pour apprécier les bâtiments non pas uniquement en exploitation mais en cycle de vie (de-puis sa construction jusqu’à sa démolition, en prenant en compte toutes les consommations induites pendant une durée de vie conventionnelle de 50 ans). Il se focalise sur 2 principales grandeurs : l’énergie et le CO2. L’ambition est de les réduire en allant jusqu’à des bâtiments à énergie positive et à faible empreinte carbone. Ce plan E+C- vise à alimenter une nouvelle réglementa-tion environnementale qui verra le jour en 2020 : la RE2020 (RE pour Réglementation Environnementale), qui viendra remplacer la RT 2012 en vigueur. Elle proposera notamment des nouvelles exigences renforcées dans la consommation d’énergie, soutenant le déploiement des EnR (Energies Renouvelables). Dans ce cadre, E+C- restera un label pour évaluer les constructions neuves (résidentielles, non résidentielles et tertiaires). Depuis 2 ans un laboratoire d’observations des chantiers a été mis en place afin de s’appuyer sur des projets existants, les « qualifier » en regard du label E+C-, et créer une base de données indicatrice pour l’établissement de seuils dans la nouvelle réglementation. Sans nul doute, la RE2020 marquera un virage dans la conception des ouvrages, le choix des modes constructifs et des matériaux.

    D’après Pierre Bultez, « il y a actuellement une mobilisation sans précédent autour du sujet mais tout le monde n’est pas encore autour de la même table. Les différents métiers travaillent en-core dans des bulles, de manière trop silotée. Les architectes portent depuis longtemps des idées de bâtiments modulables, réversibles (comme le sont à leur manière les bâtiments haussman-niens), qui limiteraient le besoin de construc-tions neuves. Il faudrait également repenser le bâtiment et ses usages pour arrêter d’être dans une logique de privatisation systématique et promouvoir des formes d’habitat partagé encore trop peu répandues. Les lignes sont en train de bouger. Nous sommes face à un mouvement de

    fond que les industriels ne peuvent pas ignorer et qui demande un changement de modèle. Pour atteindre une réduction de 80 % de nos émis-sions de CO2 à horizon 2050 tout en préservant notre capacité à générer de la valeur (humaine ou financière), EQIOM n’aura d’autre choix que de faire évoluer son modèle en donnant une part croissante à des métiers, des matériaux et des activités que nous n’avons pas encore pleinement investi. Nos objectifs CO2 ne sont pas des freins à la production de valeur, ils nous permettent au contraire d’appréhender et de nous préparer à ce qui générera cette dernière dans les années à venir ».

    150 308 476 731 881

    Kg éq. CO2 / Tonne produite

    EQIOM est le leader en France des ciments au laitier (CEM III), qui contiennent moins de clinker, et donc présentent un meilleur bilan carbone que d’autres ciments, notamment le CEM I. Pour réduire nos émissions de CO2, une des stratégies est le développement et la promotion de ciments composés, comme ces CEM III.

    CEM III/CCEM III/A PM-ES CEM III/A CEM II/A CEM I

    Sources : CEM I - En conformité avec la norme NF EN 15804+A1 et son complément national NF EN 15804/CN, valeurs ATILH de Mars 2017.

  • 30 Empreinte Hors série 2. Sens, éthique & Implication

    Sens, éthique & Implicationun nouvel eldorado ?2

    Les nouvelles technologies et la révolution numérique ont apporté d’immenses bouleversements dans les façons de travailler ; certains métiers disparaissent, de nombreux autres émergent (selon Pôle Emploi, 85 % des métiers de 2030 n’existeraient pas encore !). Les modes d’organisation en entreprise, eux, évoluent plus lentement. D’un côté, la fluidité de l’information à l’ère digitale … de l’autre, la rigidité de certaines organisations qui n’ont pas bougé depuis 50 ans. Il n’est pas étonnant que des tensions puissent surgir !Même si les nouvelles générations ont tendance à le clamer un peu plus fort que leurs aînées, tout le monde a besoin de trouver du sens dans ce qu’il fait. Les entreprises l’ont compris : réussir à impliquer les collaborateurs dans un projet commun, c’est pour elles un enjeu d’attractivité des talents, d’engagement des équipes, et donc de performance. Ce discours trouve un écho également dans les attentes croissantes des clients et autres parties prenantes en matière d’éthique. Dans cette rubrique, nous donnons la parole à des personnes qui s’interrogent sur les nouvelles aspirations de la société, qui questionnent la place de l’éthique et de la bienveillance dans l’entreprise, ou présentent des actions qui permettent à chacun de s’épanouir davantage au sein de ce corps social qu’est l’entreprise.

  • Empreinte Hors série 2. Sens, éthique & Implication 31

  • 32 Empreinte Hors série 2. Sens, éthique & Implication

    LES CHANGEMENTS D’ASPIRATIONS DE NOTRE SOCIéTéDans cet article, Pierre Gohar, participant de la table ronde organisée par EQIOM, nous aide à prendre de la hauteur et nous incite à continuellement chercher le sens de nos actions.

    Il nous parle de la