Hj magazine magazine ISCPA Lyon décembre 2014

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H PORTRAIT J ANTHONY, LE COEUR EN BLEU HORS-JEU SPORT, OPINIONS & ENQUÊTES DECEMBRE 2014 #1 @HJ_MAGAZINE ECONOMIE LA FACE CACHÉE DE LA COMPÉTITION 3,40 DÉCINES DANS LES STARTING-BLOCKS DOSSIER TOURISME PRIORITÉ AUX SUPPORTERS SPÉCIAL EURO 2016 à Lyon

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Hors Jeu magazine un un travail peédagogique réalisé par 12 étudiants en dernière année du Bachelor journalisme de l'ISCPA. Le mag traite de l'Euro 2016 à Lyon. Il fait le tour du sujet en passant par les enjeux économiques, politiques ou encore sociaux. Il donne la parole à différents acteurs de la vie lyonnaise avec l'objectif d'éclairer au mieux le lecteur sur ce grand événement qui se déroulera exceptionnellement dans sa ville.

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HPORTRAIT

JANTHONY, LE COEUR EN BLEU

HORS-JEU

SPORT, OPINIONS & ENQUÊTES

DECEMBRE 2014 #1 @HJ_MAGAZINE

ECONOMIELA FACE CACHÉE DE LA COMPÉTITION

3,40

DÉCINES DANS LES STARTING-BLOCKSDO

SSIER

TOURISMEPRIORITÉ AUX SUPPORTERS

S P É C I A L EURO2016

à Lyon

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HJ Décembre 20142

HJ L’EDITODE GREGORY CHARIOT

HJ

Directeur de la Rédaction : Alexandre Buisine

Rédacteur en chef : Grégory Chariot Rédacteur en chef adjoint : Kévin Charnay

RÉDACTION EN CHEF

Maquettiste : Océane ChabardèsMaquettiste adjoint : Loïc Besson

Inspiré par GQ

CRÉATION ARTISTIQUE

Secrétaire de rédaction : Jérôme GalloSR adjoint : Corentin Vaissière

ÉDITION

Laura Hurissel, Irchade Kari, Louise Pezzoli, Elisa Bouvet

Corentin Vaissière, Loïc BessonSolène Paillard, Kévin Charnay

Déborah Zago, Jérôme GalloMartin Casamatta, Océane Chabardès

et Grégory Chariot

LA RÉDACTION

université professionnel internationale René Cassin

47, rue Sergent Michel Berthet 69009 LYON

Mail : [email protected]

Twitter: @HJ_Magazine

DISTRIBUTION

LA LANTERNE ROUGE

A un an et demi du début de l’Euro, Lyon est bon dernier de la classe. Sur les dix villes qui doivent accueillir la compétition, la capitale des Gaules est à la traîne. Si la construction du Grand Stade avance enfin, que ce

fut compliqué pour en arriver là. Entre les différents recours en justice et une mobilisation anti-stade importante, les travaux ont pris beaucoup de retard. Et le constat est le même concernant les voies d’accès à l'infrastructure. On pouvait même se demander si le Grand Stade serait prêt à temps, surtout quand on sait que chaque enceinte doit être mise à l’essai plusieurs mois avant le début de la compétition selon l’UEFA. En tout cas concernant Lyon, quatre mois semblent suffire. En même temps, tout a été mis en œuvre pour que l’ensemble soit prêt dans les délais.

La France candidate à l’Euro, il était impensable que Lyon n’accueille pas des matches de la compétition. En effet, comment en effet se priver de la troisième ville de France, du troisième plus grand stade ? Le championnat d’Europe est l’un des événements sportifs les plus médiatiques du monde. Gérard Collomb, qui ne cesse de vanter le rayonnement de Lyon à l’international, l’a très bien compris.

Au moins l’accueil de grands matches « rentabilisera-t-il » aux yeux des supporters les investissements publics dans cette opération. Car si le financement du Grand Stade est entièrement privé, celui des voies et des moyens d’accès est à la charge des contribuables. Malgré les centaines de millions d’euros dépensés, tout n’est pas parfait. Les jours de match, les routes risquent d’être engorgées et les trams pas assez nombreux. Il faudra être patient pour sortir ou se rendre jusqu’à l’enceinte sportive. Autre paradoxe : 1 700 places pour les vélos sont prévues... En sachant que le Grand Stade se situe à 15 kilomètres de la fan zone sur la place Bellecour, il va être difficile aux supporters de se rendre sur place en deux roues. En même temps, entre le tram T3 bondé et les embouteillages, le vélo sera peut-être le moyen le plus rapide pour y aller...

Directrice de la publication : Isabelle Dumas

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SOMMAIRE HJENQUÊTE / RENCONTRES / FOOTBALL / PASSION

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DOSSIER

La ville de Décines

est-elle prête à accueillir l’Euro?

#1 - DECEMBRE 2014

HJMAGAZINE

TOURISME Des hôtels aux particuliers : tous en ordre de marche

P. 8

PORTRAIT Anthony, passion Bleus

P. 30

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La formation lyonnaise en première ligne

SPORT32 De Peno à Driblou

INSOLITE

P. 12

18 Vigilance renforcéeSÉCURITÉ

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L’Euro : une histoire françaiseGrand Stade : des débuts difficilesQue reste-t-il de 84 & 98 ?

SOUVENIRS

19 La presse lyonnaise au diapasonMÉDIAS

20 Football et prostitutionSOCIÉTÉ

2224

UEFA-OL : la balle au centreQuelles retombées pour les clubs amateurs ?

ÉCONOMIE

2627

Des terrains de foot aux urnesDu rayonnement de Lyon

POLITIQUE

2829

Les Bleus font-ils encore rêver ?

L’Euro, un succès féminin

SPORT

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La France et l’Euro de football, c’est une vieille histoire. Dès la première édition en 1960, les Tricolores sont

prédestinés à briller. Normal diront certains, les Bleus évoluaient à domicile. Et puis on ne parle pas encore d’Euro, mais de la Coupe Henri-Delaunay, en hommage à l’an-cien président de la Fédération Française de Football (FFF), fervent défenseur d’une grande compétition européenne qu’il n’aura pas eu le temps de voir.

Partant de là, c’est sûr, les Bleus ont un avantage. Sauf qu’à cette période, le foot-ball n’est pas encore roi dans l’Hexagone, même si l’équipe de France vient de réali-ser une belle épopée en Coupe du monde, deux ans auparavant. Bref, ce n’est pas l’effervescence que l’on pourrait connaître aujourd’hui. En éliminatoires, les Bleus enchaînent les bonnes performances et infligent deux corrections : 7-1 à la Grèce et 5 - 2 à l’Autriche. Des scores d’un autre temps. Il faut dire qu’à cette période, les défenses ressemblent davantage à des pas-soires qu’à des murs infranchissables. Avec de tels résultats, la France du foot se met à rêver d’un sacre. Un rêve éphémère. Le 6 juillet 1960 devant 26 000 spectateurs au

Parc des Princes, les Tricolores tombent en demi-finale face à la Yougoslavie 5 buts à 4. Une rencontre épique dont les passionnés parlent encore. Mais bon, la presse relativise le parcours des Bleus. Seules 17 équipes participent à la compétition, contre 53 au-jourd’hui. Et puis, l’Italie et l’Angleterre ne sont pas là, tout comme la RFA. Une autre époque.

Platini et un gardien qui se « troue » : bienvenue en 1984

Puis plus rien pendant 20 ans. Mais après une Coupe du monde réussie en 1982, la France a la bonne idée d’organiser une se-conde fois l’Euro. Un choix judicieux tant la sélection française domine la compétition. Les Bleus ont même le loisir de se venger des Yougoslaves 3–2 après un récital de sa star Michel Platini, auteur des trois buts français. « Platoche » finit meilleur buteur de la compétition avec 9 buts en 5 matches (record toujours invaincu). En finale, l’équipe de France bat l’Espagne 2 à 0 devant 47 000 personnes, toujours au Parc des Princes. Les Bleus peuvent remercier le gardien es-pagnol, coupable d’une faute de main sur un coup-franc de l’inévitable Michel Platini. La

FLA

SH-B

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Demi-finaliste en 1960, vainqueur en 1984, la France à la maison est toujours un gage de réussite. Et on ne parle pas du mondial 98. Alors pourquoi ne pas rêver

d’un parcours similaire en 2016 ? Grégory ChariotHJ

EURO 2016

53 1024Comme le nombre de

pays qui participent aux éliminatoires afin de se

qualifier pour l’Euro.

6Pour la première fois depuis sa création, 24 équipes vont participer contre 16 lors des précédentes compétitions.

Dix villes ont été sélectionnées pour

accueillir l’Euro. Parmi elles : Lyon.

Six matches vont se jouer au Grand Stade de l’OL. Au

programme : quatre rencontres de poules et deux matches à

élimination directe.

LA FRANCE NE CONNAÎT PAS LA CRISE DE L’EURO

1960: Le Championnat d’Europe est créé et c’est la France qui l’organise. Pour cette première, les Bleus sont éliminés en demi-finale face à la Yougoslavie (5-4).

1984: Deuxième édition organisée par la France et premier titre majeur des Tricolores. La France remporte la compétition face à l’Espagne (2-0). A l’époque, l’équipe de France est portée par son joueur emblématique : Michel Platini.

2000: La France, championne du monde en 1998, enchaine en remportant une deuxième fois l’Euro. Un doublé champion du monde – champion d’Europe inédit à l’époque.

2016: Pour la troisième fois, la France organise l’Euro. Une première pour un pays européen.

L’EURO EN DATES

France est championne d’Europe pour la pre-mière fois et le niveau de la compétition était relevé. Bis repetita en 2016 ?

Michel Platini après la victoire de l’équipe de France en 1984.

©Equipe archives

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AU STADE DES EMBÛCHES

Grégory ChariotHJ

Comme le nombre d’années à entendre parler du Grand Stade. C’est en février 2007 que le projet fut initié par l’Olympique lyonnais et son président Jean-Michel Aulas. Mais c’est seulement en 2012 que l’ancien maire de Décines, Jérôme Sturla, a signé le permis de construire. La première pierre du Grand Stade a elle été posée le 12 novembre 2013.

L’Olympique lyonnais et la ville de Décines visent l’objectif de 1 000 emplois permanents (OL, bureaux, centre de loisirs, hôtels et restaurants) et 2 000 au moment des évènements (stadiers).

Si tout se passe bien l’enceinte devrait être livrée lors du premier trimestre de l’année à quelques mois de la compétition. Le temps de tester les infrastructures par l’Olympique lyonnais.

Soit le nombre d’expropriations qui ont déjà été effectuées pour permettre la construction de l’infrastructure. Reste le cas du « dernier des Mohicans » : l’irréductible Philippe Layat qui continue de résister au Grand Lyon.

En millions d’eu-ros. C’est ce qu’il a fallu à la construction de l’édifice à Décines. Un tiers du budget (135 M€) provient de fonds propres, 112 M€ sont des obligations (de Vinci et de la caisse des Dépôts) et le reste vient d’emprunts et de crédits.

Le nombre de places du futur Grand Stade de l’Olympique lyonnais. A titre comparatif, le stade de Gerland compte 41 842 places.

HJGR

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STAD

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Avoir sa propre enceinte qui génère des revenus, l’Olympique lyonnais en a rêvé pendant des années. Grâce à l’Euro qui se profile, le club de Jean-Michel Aulas va enfin pouvoir avoir son Grand Stade. Mais que ce fut compliqué. Retour en chiffres sur un stade qui cristallise les tensions.

20161 000

7 ans

450

80

58 215

©GC

Le Grand Stade est en construction depuis novembre 2013.

© Info-stade.com

© Sudarchitectes.com

© Info-stade.fr

© Skyscrapercity.com

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SOUVENIRS DE 8 4 & 9 8Mon plus

beau souvenir concerne la Coupe du monde 1998 mais ne concerne

pas l’évènement sportif en lui-même ou le résultat d’un match. C’est plutôt de voir comment chacun est ca-

pable de faire abstraction de l’aspect social, religieux. Ce sont des moments trop rares et quand je repense à cet évènement, je ne vois pas la France en train de lever le trophée. Je vois plutôt tout le monde dans la rue, en train de fêter un suc-cès partagé, sans aucun clivage. Pour moi, c’est la vraie vertu du

sport.

Je me souviens du ballon

qui passe sous le ventre du gardien espagnol et qui permet de se qualifier et de gagner le

championnat d’Europe de 84. En 98, c’est le 3 – 0 contre les

Danois. Mais ce qui m’a vraiment marqué, c’est de battre le Brésil 3

– 0 et de voir Zidane marquer deux merveilleux buts de la tête. Je crois que ça, ça a d’abord réconcilié la France entière dans toute sa dimension

ethnologique et dans toute sa dimension de

France multiculturelle. ROLAND BERNARD

Président du groupe Axotel

En 98, je couvrais le Mondial à Lyon pour Le Figaro. Le foot n’a jamais été ma spécialité. J’ai fait un papier d’anthologie sur le match Egypte-Zimbabwe, en sélection. A la base, le match ne devait pas se jouer à Lyon mais au Caire. Il y a eu des heurts violents pendant le match initial entre les supporters des deux pays. Du coup, tout avait été

annulé. Le comité organisateur du Mondial avait alors décidé de le rejouer à Gerland. 5 000 spectateurs étaient dans le stade mais ils faisaient autant de bruit que s’ils étaient 40 000 !

YANN CUCHERATAdjoint aux sportsà la mairie de Lyon

FRÉDÉRIC POIGNARDJournaliste lyonnais

Mon souvenir pour le Mondial

98, c’est la ferveur au moment de la finale, le côté oculaire de

masse dans les rues. Cela montrait que la France pouvait

être vraiment unie et faire la fête à certains moments, et je trouve que

depuis, tout est bien morose. Je pense que ça ferait beaucoup de bien au

pays, si on pouvait gagner à nouveau une finale, cela ressouderait les gens.

Je ne suis pas un grand fan de foot mais plutôt de rugby. Mais

je serai particulièrement attentif à l’Euro.

FRANÇOIS GAILLARDDirecteur général de l’Office du Tourisme

du Grand Lyon

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SOUVENIRS DE 8 4 & 9 8En 1998,

j’avais 10 ans. Je me souviens que lors de France-

Croatie, en demi-finale, lorsque les Croates ont marqué, je me suis mis à

pleurer et j’ai refusé de regarder la suite du match en m’enfermant

dans ma chambre. Puis, j’ai entendu les cris de mon frère et de mon père.

Je suis sorti en courant, Thuram venait de marquer... Et je n’avais même pas vu son but. Après, dans mon esprit, je me suis dit que c’est parce que je ne regardais pas que la France

avait marqué. Je me suis interdit de regarder la

suite de la compétition avec la fin que l’on

connait.

PIERRE RONDEAUÉconomiste

Je me souviendrai toujours du

23 juin 1984, quand il y a eu la demi-finale France-Portugal de l’Euro à Marseille.

A ce moment là, je vivais aux Comores et j’étais l’un des plus fervents supporters de Michel

Platini. Ce jour là, j’ai suivi le match à la radio. Au moment de l’égalisation du Portugal (2-2) je suis allé prier, quand, sur le chemin, un ami à moi m’a dit «

Platini ne reçoit plus le ballon ! ». Alors une fois arrivé à la mosquée du village, j’ai fait une prière

pour que Platini retrouve ses jambes.

Et deux secondes avant les tirs aux

buts, Platini a marqué et a sauvé le match. J’aime penser

que ma prière y est pour quelque chose.

A l’époque de 98, je

terminais juste ma scolarité à l’ENA à Strasbourg. J’avais des camarades qui

étaient des fans de football. D’ailleurs, si vous regardez la photo de la promotion Cyrano de Bergerac, vous verrez que certains portent l’écharpe bleu blanc rouge. Mais ça n’empêche pas qu’ils soient devenus très sérieux avec le temps !

Stéphane RouvéPréfét délégué à la Sécurité dans le Rhône

C ’ e s t l’engouement généralisé

autour de ce qui n’est qu’un exploit sportif. J’ai un père qui a toujours détesté le

football pour certaines raisons, et qui a été le premier à vouloir installer un écran géant pour pouvoir diffuser la finale chez des voisins. C’est un peu ça que je retiens. C’est-à-dire que ce sport, quand il est pratiqué avec humilité et passion, peut être extrêmement rassembleur autour de valeurs.

YVAN CLAUDEYDirecteur administratif FC Lyon

MOHAMED ALI YOUSSOUFRetraité

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INT

ER

VIE

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L’Euro 2016 est une véritable opportunité pour l’hôtellerie-restauration. Les professionnels se préparent à l’événement

comme le déclare Roland Bernard. Dirigeant du groupe hôtelier AXOTEL, il est également Président de la commission

Tourisme de la CCI, conseiller municipal et communautaire pour la ville et la future métropole.

Laura Hurissel & Elisa BouvetHJ

TOUR ISME

Hors-Jeu : Quels sont les enjeux au niveau du tourisme pour le Grand Lyon lors de l’Euro 2016 de football ?Roland Bernard : Cet événement sera une des manifestations footballistiques les plus importantes pour notre continent européen. Donc, il est vrai que Lyon, avec le nouveau stade, devrait avoir un rôle important pour l’économie locale, par exemple pour l’hôtellerie, la restauration ou encore les transports. Mais, ça sera également une valorisation pour la future métropole. Cela va apporter une forte médiatisation, puisque l’ensemble des télévisions européennes, voire mondiales vont, je pense, s’intéresser à ce championnat. Le sport amateur en général devrait aussi profiter de cette dynamique. Ces événements vont permettre à des supporters ou à d’autres personnes de s’intéresser à

une métropole pleine d’atouts, à l’image de son patrimoine historique ou de son domaine culturel. C’est comme cela que l’on vend une image et un dynamisme.

HJ : Qu’est-ce que cela peut apporter à la ville à court et à long terme ?R.B : Le court terme, c’est tout ce qui va dépendre des recettes liées à cet événement en particulier. A moyen terme, on retrouve l’utilisation de toutes les infrastructures qui ont été mises en place, comme le Grand Stade ou les nouvelles voies de transports en commun. Et à plus long terme, cela va permettre à

UNE VALORISATION POUR LA FUTURE MÉTROPOLE

HJ Décembre 2014

un territoire de l’Est lyonnais de gagner en termes d’aménagement et de valorisation. Le but est de redonner une image très positive d’une agglomération qui a été souvent porteuse de difficultés du fait de l'urbanisation des années 60. Cette dernière n’ayant pas toujours été à la hauteur des enjeux sociétaux.

HJ : Qu’est-ce qui va être prévu au niveau du Grand Lyon pour accueillir les supporters et les joueurs ?R.B : Je pense que le Grand Lyon va mettre en place tout un comité d’accueil, avec par exemple des réceptions. Dans ce genre d’événement, tout se crée, comme un club de relations publiques. Il va y avoir un bon nombre de sociétés, de partenaires industriels ou commerciaux qui vont profiter de cet événement pour faire venir leurs clients, afin de porter une image forte de leur entreprise. Pour ce qui est des joueurs, on ne sait encore pas trop. C’est la Fédération Française de Football et l’UEFA qui gèrent ça. Ils vont s’occuper de placer les joueurs dans les meilleures conditions possibles, pour que les matches soient le plus spectaculaire possible.

«La fête des Lumières a aujourd’hui pris une dimension que je qualifierais d’exceptionnelle et de référence. Aujourd’hui, la ville de Lyon vend son expérience, son savoir-faire à bon nombre de villes à l’étranger. L’Euro aura également une grande portée, et ça sera même au-delà. Le football est quelque chose qui rassemble des populations, des supporters et des touristes, qui ont envie de vivre un événement sportif pour en faire une période de prospérité pour Lyon et sa région.»

« LYON VEND SON EXPÉRIENCE À L’ÉTRANGER »

Roland Bernard, ponte du toursime lyonnais.

©EB

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HJ : L’Euro ne doit se dérouler qu’un mois sur Lyon. Comment faire pour que les supporters ne restent pas juste pour un match, mais pour qu’ils profitent également de la culture lyonnaise ?R.B : C’est aux professionnels que nous sommes de créer autour de cet événement sportif quelque chose qui soit « pré » et « post » matches. Il y a énormément de choses à découvrir à Lyon et dans ses environs. Il y a un patrimoine historique de grande qualité, un savoir-vivre à la lyonnaise, un modèle lyonnais. En Rhône-Alpes il y a également des atouts considérables, ne serait-ce qu’à quelques dizaines de kilomètres. On peut penser à Annecy, Chamonix, ou encore au Vercors… Tout cela doit déclencher des initiatives qui seront à la fois portées par les professionnels, mais aussi par des institutions comme l’Office du tourisme, Only Lyon, Rhône Alpes Tourisme. Il y a toute une dynamique, tout un collectif qui se doit de se mettre en mouvement de la manière la plus complice. Il ne faut pas que chacun fasse quelque chose de son côté. Il faut travailler ensemble.

HJ : Au niveau des hôtels, le Grand Lyon va-t-il les subventionner ?R.B : Je ne pense pas. Les hôteliers lyonnais sont en capacité de mesurer l’importance d’un tel événement et d’anticiper

en conséquence, au niveau de la

qualité de l’accueil et de l’hébergement. Il faut arrêter de croire que parce qu’on va donner des subventions, on va régler le problème. A Lyon, il y a des hébergements de grande qualité, des professionnels qui ont fait des efforts pour rénover leurs hôtels depuis un certain nombre d’années. Ces efforts vont porter leurs fruits avec l’Euro. Le contexte économique doit aussi nous permettre de croire en nous ! Un chef d’entreprise se doit d’être motivé, mobilisé, audacieux ! L’audace paye, l’audace a toujours payé. Je suis un chef d’entreprise qui, jusqu’alors,

n’a jamais regardé d’une manière mesquine un investissement. Je pense que tous les acteurs économiques lyonnais et rhônalpins vont s’approprier l’Euro. Je crois qu’il y a un moment où il faut arrêter de se plaindre, et qu’au contraire, quand on a la chance d’avoir des événements de cette qualité, il faut

savoir les accompagner. Quand on se l’approprie, il y a de grandes

chances pour que la réussite soit au bout.

HJ : Si la France ne joue pas à Lyon, cela sera-t-il préjudiciable à la ville puisque les supporters ne seront pas les mêmes ?R.B : Il est évident qu’il faut aussi faire très attention, parce qu’il y a supporters et supporters. C’est ça qui peut inquiéter les gens. Mais, je crois qu’aujourd’hui le hooliganisme est contrôlé. Je pense que même s’il n’y a pas la France et que ce sont d’autres nations qui viennent jouer au stade des Lumières, il y aura un engouement, y compris des spectateurs français. Un événement comme ça, quand vous l’avez dans votre ville, c’est une chance ! Combien aimeraient l’avoir ? On sait aussi que l’anticipation d’un événement comme ça permet aux gens de se remettre en cause et d’avoir envie d’accompagner. Je peux faire le pari qu’il serait étonnant qu’on n’ait pas un jour la France à Lyon…

«Lors du mondial 98, on était porté par la qualité de l’équipe de France. Il y avait donc effectivement autour de cette équipe et de cette Coupe du monde un engouement formidable. Les résultats aidant, ça a fait un buzz extraordinaire. Tout le monde en France, même ceux qui étaient les plus critiques à une certaine époque, se sont appropriés l’événement et l’ont magnifié.

On doit savoir être à la hauteur de l’événement et je souhaite de tout cœur que Lyon soit dans cette dynamique-là en 2016. Il n’y a aucune raison de ne pas y croire. On a bien vu comment les Lyonnais se sont comportés en 1998, et notamment les professionnels rhônalpins pour accueillir les différentes équipes, les centres d’entraînement, etc. Tout ça, c’est une dynamique qui crée l’événement et de la valeur ajoutée, au niveau économique et de l’image de la ville. C’est ça aussi qui prépare l’avenir de nos générations, de nos enfants. On ne peut pas rester recroquevillé sur soi-même quand on a un événement de cette ampleur, on doit aller au contraire dans la dynamique qui propulse les générations à venir.»

« ON DOIT SAVOIR ÊTRE À LA HAUTEUR DE L’ÉVÉNEMENT »

Grande roue de la place Bellecour, symbole de l’attrait touristique de Lyon

©JG

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IMPA

CT DE

L’EUR

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L’Euro 2016 n’est pas seulement synonyme de football. Certains particuliers attendent ces événements pour s’enrichir, en sous-louant leur appartement. Récemment, le boom

des sites d’hébergements comme Airbnb ou MorningCroissant rendent la visibilité des hôtels plus compliquée. Ainsi, par souci d’équité, le gouvernement a adopté un amendement

au projet de budget pour appliquer une taxe de séjour.

Laura Hurissel & Elisa Bouvet HJ

TOUR ISME

Pauline a 22 ans. Etudiante et sans revenu, elle met son appartement en location pour la somme de

35 euros par nuit, plusieurs fois par an. Son annonce est claire: « Appartement de charme entièrement rénové dans un quartier dynamique de Lyon. A seulement 10 min de la place Bellecour à pied. Proche gare et métro Perrache ».

Grands événements ou week-end pris au hasard, elle a bien compris le système et compte en profiter tant que la législation ne l’arrêtera pas. « Je loue mon appartement au prix que je souhaite, sans aller dans l’excès, mais pour que cela soit rentable ». Pourtant, la jeune femme est dans l’illégalité. Comme le stipule Clémence David, manager pour le site MorningCroissant : « Nous ne pouvons pas surveiller tous les utilisateurs, peut être que certains locataires sous-louent illégalement leur logement, sans en avoir averti leur propriétaire et donc sans contrat élaboré».

Malgré cela, Pauline prévoit déjà l’Euro 2016. Elle sait qu’il y aura des matches à Lyon, et son appartement, très bien placé dans le deuxième arrondissement, ravira sûrement les touristes venus spécialement pour l’occasion. « Je sais que je suis en quelque sorte hors-la-loi, mais je n’ai pas le choix, je fais ça pour l’argent ». Et comme de nombreux étudiants, elle préfère prendre des risques. Toutefois, la situation va changer. Bientôt, le prix des séjours qu’elle proposera sera soumis à une nouvelle taxe.

Les syndicats des hôteliers ont en effet obtenu gain de cause. Les sites d’hébergement, classés maintenant dans la catégorie des hébergements dit non-conventionnels, devront s’acquitter d’une nouvelle taxe de séjour. Elle s’élève de 40 à 75 centimes d’euro par nuit. Même si la somme semble dérisoire, certains hôteliers se disent « satisfaits de l’obligation de collecte faite aux sites d’hébergements ». Mauvaise surprise pour les touristes qui ne pourront plus échapper à ce nouveau supplément. Ces taxes seront, par la suite, reversées aux communes. Même si ces sites fourmillent de plus en plus, ils semblent avoir quelques failles.

Des prix parfois abusifs

800 euros pour une nuit, pour un quatre pièces en plein centre de Lyon ? Incroyable pour un certain nombre de Lyonnais et,

pourtant, des utilisateurs de ces sites ne se gênent pas pour duper les touristes. Les prix pourraient en refroidir plus d’un. Néanmoins, ce système est en

perpétuelle évolution. Convivialité et entraide sont pourtant les mots-clés mis en avant sur les sites. Les utilisateurs sont les seuls maîtres du prix qu’ils fixent. Comme l’explique Clémence David, « les particuliers se fixent souvent en fonction de la concurrence sur MorningCroissant ou sur les autres sites de location courte durée. Ils regardent quelles autres offres se rapprochent de leur logement et s’alignent en fonction de celles-ci».

Une réputation en perte de vitesse

Les sites qui proposent des locations d’appartements sont censés aider les touristes et voyageurs à économiser des frais, mais surtout à découvrir autre chose qu’un hôtel classique. Toutefois, que se passe-t-il lorsque le bien en question ne répond pas aux attentes du locataire ?Lyne est étudiante. Il y a quelques mois, elle se rend en week-end à Milan avec des amis. Sur un site d’hébergement, elle trouve un bon plan qu’elle ne peut pas refuser. 60 euros la nuit, dans un appartement en plein centre de la ville. Arrivée sur place, rien ne correspond au site. Ni les photos, ni le nombre de chambres prévues.

Après la bonne affaire, c’est la déconvenue. Et pour le remboursement ? Bien sûr, ce n’est pas possible. Mais ça, Lyne ne le sait pas car ce n’est pas vraiment stipulé sur le site. Pour les responsables des sites de location, leur responsabilité n’est pas engagée. « Il y a toujours un risque que l’erreur d’un locataire ou d’un propriétaire engendre une image négative du site. À cause du bouche à oreille et de la presse, les nouvelles se répandent vite. Il est néanmoins précisé dans nos conditions générales de ventes que le loueur est le seul responsable en cas de non-respect des présentes », déclare Clémence David. Alors, bon plan ou arnaque, les sites d’hébergements pour une courte durée ne cessent de s’accroître. Nul ne sait comment ceux-ci vont se développer pour le prochain Euro, mais certains s’attendent déjà à ce que ce rendez-vous soit incontournable.

LOCATION DES PARTICULIERS :DÉRIVES D’UN SYSTÈME POURTANT POPULAIRE

« MÊME SI CES SITES FOURMILLENT DE PLUS EN PLUS, ILS SEMBLENT

AVOIR QUELQUES FAILLES »

© LH

Salon de l’appartement mis en sous-location par Pauline.

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RAYONNEMENT DE LYON TOUR ISME

Après les particuliers et les hôteliers, pour qui l’événement est un tremplin, Lyon espère bien profiter elle-aussi du spectacle. L’Office du tourisme compte sur l’Euro 2016 pour faire rayonner la ville

au niveau international, du moins dans la sphère sportive.

Laura Hurissel & Elisa BouvetHJ

Contrairement aux préjugés, l’Euro ne devrait pas être l’enjeu principal pour le tourisme de l’agglomération

en 2016. François Gaillard, directeur général de l’Office du tourisme du Grand Lyon, compare cet événement au Tour de France : « Ce n’est pas forcément les flux que ça génère dans la ville qui sont importants, mais la visibilité qui est donnée à la ville, comme lorsqu’elle est traversée par le Tour de France. »

En effet, le championnat d’Europe ne devrait pas attirer une masse de touristes importante, puisque les matches ne sont que ponctuels. C’est sur l’ensemble du territoire que les supporters vont se répartir en établissant des « camps de base ». Certains vont tout de même choisir Lyon comme pied-à-terre, et c’est eux qui devraient faire vivre les commerçants, restaurateurs et les lieux touristiques pendant la manifestation. Toujours d’après François Gaillard, le nombre de supporters est « difficilement palpable (…) notre but en amont, c’est de faire en sorte que ces gens choisissent Lyon comme camp de base pour rayonner sur l’ensemble de la France ».

Un nouveau type de touristes à séduire

Pour attirer le maximum de personnes possible à Lyon, la ville compte bien jouer sur ses atouts naturels. Si le patrimoine, la gastronomie et la culture lyonnaise séduisent déjà, l’événement va attirer une nouvelle sorte de visiteurs : les fans de sport. Comme le dit François Gaillard: « ça va nous permettre d’attirer l’attention de personnes nouvelles, en l’occurrence des fans de sport, de foot, qui vont s’intéresser à Lyon par ce biais là. » En plus du sport, de nouveaux médias internationaux et spécialisés vont couvrir l’Euro. Une occasion pour la ville de se mettre en avant sous l’angle sportif. Mais c’est surtout une opportunité pour faire découvrir la capitale des Gaules. Principal challenge pour l’Office du tourisme du Grand Lyon ? Utiliser l’aspect sportif pour améliorer la notoriété et l’image de la ville, « c’est une

mise en lumière qui est particulièrement intéressante », déclare François Gaillard.

Reste à savoir si les hôtels profiteront de l’événement pour s’enrichir de manière abusive, comme on a pu le constater lors de l’Euro 2012 en Ukraine (les hôteliers avaient alors multiplié le prix des nuitées par dix). Toutefois, seuls les événements qui

amènent un taux de remplissage maximum dans les hôtels permettent d’augmenter les prix. Parfois trop, mais légalement.

«Quand la ville est vraiment pleine, comme pendant le Salon international de la restauration, de l’hôtellerie et de l’alimentation, on loge les gens en dehors de Lyon et dans ces cas-là, les hôtels en profitent», assure François Gaillard. La capitale de la gastronomie compte bien mettre les petits plats dans les grands pour accueillir les aficionados du ballon rond.

COUP DE PROJECTEUR SUR LA VILLE LUMIÈRE

François Gaillard, directeur général de l’Office du tourisme de Lyon.

Le Grand Lyon compte organiser une « fan zone ». Celle-ci se situera place Bellecour, selon nos informations. Le but ? Permettre aux supporters n’ayant pas forcement l’occasion de profiter des matches, de pouvoir les voir sur des écrans géants dans une ambiance festive. Un événement organisé en partenariat avec la Fédération et toutes les villes hôtes. Mais, Lyon ne pourra pas faire ce qu’elle veut. Selon François Gaillard, « tout est très cadré pour créer un esprit de fête, et pour créer des conditions de sécurité et d’accueil satisfaisantes, répondant aux critères des fédérations. »

LE RENDEZ-VOUS DES SUPPORTERS :

LA FAN ZONE

« ÇA VA NOUS PERMETTRE D’ATTIRER L’ATTENTION DE

PERSONNES NOUVELLES DANS LE MONDE, EN L’OCCURRENCE DES

FANS DE SPORT »

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ffice du tourism

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HJ Décembre 2014

D O S S I E RDÉCINES EST-ELLE PRÊTE ?

Décines, 25 000 habitants et un stade au cœur de toutes les attentions. C’est dans cette commune de l’Est lyonnais que le Grand Stade est actuellement en construction. Les travaux ont commencé en novembre 2013, après des débuts difficiles, notamment à cause de nombreux recours en justice et d’expropriations de Décinois. Isolée de Lyon, l'enceinte devrait être la locomotive pour développer toute cette partie de l'agglomération, avec la construction d'infrastructures, la création d'emplois et l'extension du réseau de transports en commun. Reste qu'à moins d'un an et demie du début de la compétition, le stade est loin d'être prêt ! Et au vu des oppositions, on peut se demander si Décines a réelement envie d'accueillir l'arène de l'Olympique lyonnais.

termine quatrième au second tour, alors que le maire socialiste sortant, Pierre Crédoz, se voit confier un nouveau mandat.

Les querelles autour du Grand Stade se poursuivent lorsque Jérôme Sturla, premier adjoint du maire démissionnaire, prend les rênes de la ville en mars 2012. Le socialiste témoigne d’un soutien sans faille. Soutien qui est toutefois mis à l’épreuve l’année suivante, lorsque Jean Murard, membre du collectif des Gones pour Gerland, déclare au sujet du Grand Stade : « C’est un projet privé et la commune de Décines engage des dépenses. Jérôme Sturla a engagé plus de 2 millions d’euros de dépenses. » Chose à laquelle Jérôme Sturla, très remonté, a répliqué : « On a voté une délibération d’un montant de 900 000 euros, dont 40% sont pris en charge par l’État ».

Malgré cette polémique et une opposition au stade croissante estimée à 64 %, Jérôme

12

accordée à Lyon Capitale. La nouvelle chef de file de la droite décinoise a également réclamé à Gérard Collomb qu’une partie de la somme versée par l’UEFA lui revienne pour « l’entretien de la pelouse, assurer l’éclairage et l’encadrement et la sécurité des supporters venus de toute l’Europe ». Face aux contestations d’élus de droite, le vice-président du comité de pilotage de l’Euro 2016 et premier adjoint de la ville de Lyon, Georges Képénékian a répondu : « Nous allons travailler un peu avec Décines aussi ». Un énième rebondissement qui s’ajoute aux nombreux autres ayant déjà ponctué l’histoire du Grand Stade.

De 2008 à 2014 : huit ans de tensions

Dès 2008, l’ombre de la nouvelle arène de l’OL plane sur les municipales qui approchent alors. Carton Rouge, une liste anti Grand Stade se monte, menée par Sandy Sagnard et l’actuelle maire Laurence Fautra. Comptant des élus de tous bords dans ses rangs, la liste

Je ne sais pas si c’est du mépris, de l’indifférence, ou un manque de considération, je ne sais pas à quel

titre ». Ces mots lancés par la maire de Décines, Laurence Fautra, sont une énième attaque contre les défenseurs de l’OL Land. C’est en octobre dernier que s’est joué le dernier acte des péripéties du Grand Stade, lorsque l’UEFA a attribué aux dix villes hôtes de l’Euro 2016 une enveloppe de 20 millions d’euros pour les aider à accueillir la compétition de football. Une compensation financière « exceptionnelle » contestée par les élus décinois déplorant que les deux millions d’euros de l’UEFA reviennent à Lyon et non à la municipalité qui abrite le stade dans lequel vont se jouer six matches. Taxant le Grand Stade de « jouet de Gérard Collomb et de Jean-Michel Aulas », et fustigeant l’héritage « catastrophique » de son prédécesseur socialiste Jérôme Sturla, la nouvelle maire UMP de Décines Laurence Fautra poursuit sa croisade contre le Grand Stade de l’OL débutée il y a huit ans, dans une interview

URBA

NISM

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Huit ans. Durant toutes ces années Décines est le théâtre d’un combat politique opposant anti et pro Grand Stade de l’OL. Depuis le lancement du projet de l’Olympique lyonnais de créer un stade 2.0 à Décines en 2007, les pontes décinois se mènent une guerre sans merci pour faire entendre leurs voix

dans ce dossier.

Irchade KariHJ

POLIT IQUEAU STADE DES TENSIONS POLITIQUES

«

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HJ Décembre 2014 13

DÉCINES EST-ELLE PRÊTE ?

Sturla martelait encore que « le Grand Stade génère un cercle vertueux », quelques mois avant sa défaite aux municipales. Une dévotion que les électeurs sanctionneront en votant à 43,20 % pour la candidate UMP Laurence Fautra dans une triangulaire. Désormais Jérôme Sturla reconnaît la responsabilité de ce soutien dans sa défaite, en déclarant « un des éléments qui a joué aux municipales est le Grand Stade évidemment. Il a été instrumentalisé par mes opposants et notamment Laurence Fautra ».

Quand les calculs politiques s’invitent sur le terrain

A présent, même si Laurence Fautra continue de clamer que « M. Collomb a imposé le projet en force, c’est un déni de démocratie », elle souhaite que la ville ait sa place à la table des organisateurs de l’Euro 2016. Surtout, la maire veut percevoir au moins 1 million d’euros de la somme versée par l’UEFA à la Ville de Lyon. Face à ce retournement de situation intervenu peu de temps avant que Nicolas Sarkozy, favorable au Grand Stade, convie les élus rhodaniens à déjeuner lors de son meeting lyonnais en novembre dernier, Georges Képénékian a déclaré :

POUR LAURENCE FAUTRA, LE GRAND STADE EST

LE « JOUET DE GÉRARD COLLOMB ET JEAN-MICHEL

AULAS »

JANVIER 2011 Pierre Crédoz, maire de Décines depuis 1991, annonce son retrait de la vie politique. Il le rendra effectif qu’une fois le permis de construire du Grand Stade sera signé.

JANVIER 2012Les associations Carton Rouge, Décines-moi et Energie citoyenne remettent à Jérôme Sturla premier adjoint à la mairie de Décines, une pétition pour réclamer un référendum sur la construction du Grand Stade. Pierre Crédoz refuse leur demande.

FÉVRIER 2012Pierre Crédoz signe le permis de construire du Grand Stade.

MARS 2014Laurence Fautra (UMP) remporte les élections municipales, notamment grâce à sa position anti-stade mettant fin à 45 ans de domination socialiste à Décines.

LES DATES CLÉS

© GC

Le Grand Stade en construction, novembre 2014.

« Personne ne cherche à appauvrir Décines. Tout est sur la table. On va discuter, voir ce que cela coûte à chacun. Mais il ne faut pas tout mélanger et attendre que le fonctionnement se mette en place ».Une déclaration soutenue par l’adjoint au maire de Lyon délégué aux sports Yann Cucherat : « Je sais que la ville de Lyon va accompagner Décines dans ce projet. Mais c’est Lyon qui organise, qui supporte depuis le début et négocie les aides pour cet événement, donc les choses ne bougeront pas ».

A peine l’adjoint au maire de Lyon délégué aux sports a eu le temps d’accorder à la maire

UMP ce qu’elle réclamait, que cette dernière changeait à nouveau de position, clamant : « Nous n’avons pas besoin d’être accompagnés. La réponse du jeune Yann Cucherat est légère et c’est un manque de respect contre

Décines. Ce n’est pas la somme qui compte. On veut être intégrés à cette organisation. Ça se voit qu’il n’a pas d’expérience le pauvre garçon ». Une position plus en adéquation avec celle de son parti au niveau national, représenté par le maire de Bordeaux, Alain Juppé qui est le Président du club des sites de l’Euro 2016 et l’instigateur des compensations financières demandées à l’UEFA pour les dix villes hôtes, excluant Décines.

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14

D REISSO INTERVIEW CROISÉE

VU

DE

LY

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Yann Cucherat est l’adjoint aux sports de la ville de Lyon depuis mars 2014. Il nous éclaire sur le choix de construire un nouveau stade à Décines et sur l’organisation de l’Euro 2016.

Lyon est la ville qui accueille le plus de matches,après Paris et Saint-Denis.

Corentin Vaissière

Hors-Jeu : Pourquoi avoir construit un nouveau stade plutôt que de rénover le stade de Gerland ? Yann Cucherat : Rénover le stade de Gerland aurait coûté très cher. Une opération de ce type avait déjà été effectuée pour la Coupe du monde 1998. Aujourd’hui, par rapport à ce business plan et à tout ce que l’Olympique lyonnais a mis en place, Gerland ne répond plus à la demande.

HJ : Comment expliquer que l’actuel stade de l’Olympique lyonnais ne réponde plus aux attentes ?Y.C : Tout cet environnement, cette vie autour du stade qui se déroulait en dehors des matches ne pouvait pas se faire à Gerland. L’investissement aurait été trop coûteux et il faut savoir que le stade est classé, avec une partie d’architecture sur laquelle on ne peut pas intervenir. Il fallait trouver un autre lieu, correspondant à ce modèle existant.

HJ : Ce lieu est finalement situé sur la commune de Décines. Qu’est-ce qui a motivé ce choix ?Y.C : Selon moi, ce choix a été motivé par le fait que c’est un accélérateur pour tout le développement de l’Est lyonnais. Cette zone souffrait d’une certaine pénurie dans les transports et il aurait fallu un jour ou l’autre que la future grande métropole s’y attèle très largement. Avec l’arrivée du Grand Stade, on a dû accélérer ce processus. Pour tout l’Est lyonnais, c’est une très bonne chose. Economiquement, un certain nombre d’emplois ont été créés ou pérennisés, avec les entreprises du bâtiment, grâce à cette infrastructure.

HJ : À l’occasion de l’Euro 2016, toutes les festivités autour de la compétition se dérouleront à Décines ou à Lyon ?Y.C : La ville de Décines fera ce qu’elle a envie de faire, mais je pense qu’elle a tout intérêt à se servir de l’Euro pour créer une

dynamique sur son territoire. En ce qui concerne Lyon, il y aura une fan zone, sur laquelle on développera un maximum d’activités. Le but étant de se servir de cet évènement très porteur qui va permettre à la ville de rayonner hors de nos frontières pour créer une dynamique.

HJ : Que pensez-vous de la demande de Laurence Fautra de recevoir une partie de la subvention de l’UEFA destinée à la ville de Lyon ?Y.C : Je sais que la ville de Lyon va accompagner Décines dans ce projet. Mais c’est Lyon qui organise, qui supporte depuis le début et négocie les aides pour cet évènement, donc les choses ne bougeront pas.

HJ : L’OL vous a demandé d’aider à financer le Grand Stade? Y.C : L’Olympique lyonnais n’a jamais demandé à ce qu’on les finance ou les soutienne. Depuis le début, ils avaient ce projet d’un stade exclusivement privé. La coopération avec l’OL, comme avec tous les autres clubs professionnels de la ville de Lyon, est plus que pertinente, plus qu’efficace et se réalise dans une atmosphère saine. Il y a un travail très sérieux, un respect mutuel entre nous. La relation avec l’OL fonctionne très bien. Et ça continuera comme cela car on a tous besoin des uns et des autres. Ceux qui ne l’ont pas compris, n’ont rien compris.

Le message de l’adjoint aux sports est clair, Lyon accompagnera Décines mais n’accèdera pas

à la requête de Laurence Fautra,

maire de la ville.

©Muriel Chaulet

HJ

« UN ACCÉLÉRATEUR POUR LE DÉVELOPPEMENT DE L’EST-LYONNAIS »

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HJ Décembre 2014 15

DOSSIER

VU

DE

DÉC

INES

Officiellement, Lyon fait partie des dix villes hôtes de l’Euro. Mais c’est bien à Décines que se disputeront les matches.

Laurence Fautra, nouvelle maire UMP, se désespère du manque de considération de l’UEFA pour sa ville.

Surtout, et elle l’assure, elle n’a pas le budget suffisant pour assumer l’Euro.

Louise Pezzoli & Irchade KariHJ

« JE N’AI PAS L’ARGENT POUR FAIRE FACE »

Hors-Jeu : Le 22 octobre dernier, l’UEFA a pris la décision de distribuer 20 millions d’euros aux dix villes hôtes. Sauf que Décines n’en verra pas la couleur. Pourtant votre ville va également devoir faire face à des coûts. Quels sont-ils ?Laurence Fautra : Décines va devoir supporter des coûts, comme la voirie, l’éclairage, l’entretien… Tout cela, ce sont les compétences du maire. Mais moi, je n’ai pas les sous pour y faire face. L’État va prendre à sa charge tout ce qui est sécurité, gestion des flux. Il va falloir sécuriser notre ville. Imaginez le Décinois ou la Décinoise qui veut rentrer chez lui un soir de match, comment fait-il ? Alors que le tram et les routes seront bondés. J’ai demandé au Grand Lyon comment je pourrais faire pour gérer cela et on m’a répondu que les Décinois pourraient poser un jour de congé ce jour-là. Vous vous rendez compte ? J’ai pas mal de questions au niveau de l’organisation mais pour l’instant, je n’ai pas de réponses du Grand Lyon.

HJ : Face aux lourdes factures liées à l’Euro, allez-vous demander une aide financière au Grand Lyon ?L.F : Je demande de la reconnaissance avant tout, mais effectivement cela passe par une aide financière. Je ne suis pas là pour faire du bénéfice mais qu’on commence déjà par nous intégrer dans la structure, car pour l’instant, on ne fait pas partie de la conférence des dix villes hôtes. Je ne sais pas comment on peut appeler cela, si ce n’est du mépris, de l’indifférence... Nous voulons participer à la fête et que le nom de Décines, en tant que ville partenaire, soit reconnu. Le stade est à Décines et non à Lyon, et ça il faut que ces messieurs le comprennent. Je ne vais pas mettre le peu de budget que j’ai pour ma

ville dans l’Euro, je m’occupe, avant tout, des écoles, des infrastructures de la ville. Je ne peux pas assumer un projet tel que ce stade, financièrement c’est impossible.

HJ : Ressentez-vous du mépris de la part de l’UEFA?L.F : Il faut voir ce que nous impose l’UEFA, ce sont des Suisses, ils ne rigolent pas ! Platini et Lambert (respectivement président de l’UEFA et patron du comité de pilotage de l’Euro, ndlr) arrivent avec leur cahier des charges et nous disent : « c’est comme ça et pas autrement, et gare à vous ! » Ma réaction est de dire qu’ils sont bien gentils de vouloir nous imposer leurs normes, mais dans ma commune, pendant deux mois, ça va être une agitation permanente. On sait pertinemment que Décines va accueillir beaucoup de monde. Pourtant, l’UEFA ne veut pas entendre parler d’argent pour la ville.

HJ : Comment le Grand Lyon compte-t-il vous aider financièrement ?L.F : Je ne sais pas, pour l’instant pas de sons, pas d’images. Je n’ai pas de nouvelles de Monsieur Collomb. En tout cas, mon combat reste le même : qu’on associe le nom de Décines à l’événement. L’Euro ce n’est pas que Lyon.

HJ : Voyez-vous tout de même des aspects positifs à l’Euro ?L.F : Le principal aspect positif, du fait que la compétition aura lieu à Décines, c’est le rayonnement pour la ville. J’espère qu’il y aura un peu de retombées économiques, que les commerces pourront en profiter. Toutefois, nous savons déjà que la « fan zone » sera à Bellecour. Et quant à la « fan walk », c’est à dire le mouvement des supporters sur une zone, le projet est tombé à l’eau.

©Muriel Chaulet

INTERVIEW CROISÉE

La maire de Décines espère que les commerces de sa ville pourront bénéficier de retombées économiques grâce à l’Euro.© DZ

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HJ Décembre 201416

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Dans moins de deux ans, le Grand Stade accueillera l’Euro 2016. Outre le côté sportif, sa venue implique de (re)penser les

aménagements autour de l'enceinte. Le but est de permettre aux spectateurs d’arriver dans les meilleures conditions au

Déborah Zago

D REISSO

Excusez-moi pour l’expression, mais je pense que ça va être le bordel et je me fais beau-coup de soucis. Si on écoute

les autres, c’est la petite maison dans la prairie : tout va bien ! », s’alarme la maire de Décines, Laurence Fautra. Le Grand Stade, construit sur sa commune, sera le deuxième pourvoyeur de matchs en 2016, après la région parisienne (Saint-De-nis et Paris).

« On a commencé à faire des études dès 2008 par rapport à l’accessi-bilité. On a travaillé avec différents partenaires, comme l’OL qui nous a indiqué d’où viennent les personnes qui vont voir un match de foot », explique Odile Pagani, chef de projet pour le Grand Lyon. Cette dernière s’occupe des aménagements liés au Grand Stade et précise avoir « étu-dié les moyens par lesquels les personnes se rendent au stade lors d’un match. » Et de poursuivre : « Nous avons déterminé que 9 000 personnes viennent en transports en commun. Des travaux sur la ligne T3, qui passe déjà par Décines, étaient donc obli-gatoires. Le Sytral a créé un débranche-ment de la ligne pour désservir des stations en plus, dont une au pied du Grand Stade.

De ce côté-là, les travaux sont terminés ou presque ». En ce qui concerne les personnes qui viennent à pied ou en vélo, des aménagements existent déjà puisqu’une piste cyclable longe la ligne de tram.

« Pour les personnes qui viennent en voi-ture, des études montrent qu’il y aura une moyenne de 2,8 personnes par véhicule. Le parking du stade à Décines ne contient

pas plus de 7 000 places, c’est un choix que nous avons fait pour ne pas bloquer la rocade. Les soirs de match,

Eurexpo nous prêtera 5 000 places de parking et il y aura également un parking aux Panettes à Meyzieu qui vient d’être construit ».

Lorsque les gens réserveront leur bil-let pour un match, ils devront renseigner l’endroit d’où ils viennent et en fonction de cela, le Grand Lyon leur donnera des billets pour aller se garer à tel ou tel endroit. Cela devrait permettre de limiter la circulation dans Décines.

Odile Pagani précise tout de même que

« pour l’Euro 2016, il ne s’agit pas des mêmes modes de déplacement. On va compter beaucoup plus d’étrangers et ils utiliseront moins la voiture. C’est pour-quoi on ne se servira probablement que d’un parking au niveau du Grand Stade, l’autre sera réservé aux partenaires, aux médias etc. Nous allons également mettre en place, sur les lignes de métro A et D, des navettes qui partiront de Parilly ou de Vaulx-en-Velin La Soie et qui arriveront di-rectement au Grand Stade. »

Malgré ces navettes, Laurence Fautra reste tout de même sceptique : « ça, c’est théo-rique. Vous n’empêcherez pas certaines personnes de venir sur Décines avec leur voiture ».

Des solutions pour une circulation fluide à Décines

Si la maire de Décines s’inquiète des conséquences des rencontres de l’Euro qui auront lieu sur sa commune, Odile Pa-gani se montre rassurante. Cette dernière explique : « les gens n’ont pas à passer par le centre de Décines, c’est ce que l’on veut éviter. A Gerland, rien n’est mis en place pour les spectateurs et les gens sont obligés de se garer n’importe où. Alors que là, nous mettons des solutions en œuvre pour éviter

« CE NE SONT PAS LES LYONNAIS QUI VONT ÊTRE DIRECTEMENT IMPACTÉS, CE SONT LES DÉCINOIS »

HJ

FACILITER L’ACCÈS AU GRAND STADESANS GÊNER LES RIVERAINS

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HJ Décembre 2014 17

Depuis la signature du permis de construire par l’ancien maire de Décines, Jérôme Sturla, en février 2012, le projet du Grand Stade de l’Olympique lyonnais a longtemps été

retardé par des recours en justice. Aujourd’hui, c’est la construction des voies d’accès qui pose problème.

Grégory ChariotHJ

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que le centre de Décines ne soit surchargé en circulation. Si trop de gens n’écoutent pas ce qu’on leur demande de faire, alors ça peut très vite engorger le système. Mais rapide-ment, les spectateurs vont se rendre compte que les décisions que nous mettons en place autour du Grand Stade sont beaucoup plus rentables pour eux ! »

Si le Grand Lyon s’occupe des travaux sur la voie publique, la mairie, et notamment la police municipale, s’occupe des stationne-ments sauvages. Pour limiter ces derniers, certaines rues seront fermées les soirs de match, excepté pour les riverains. La mairie de Décines devra également gé-rer tout ce qui concerne la voirie, l’éclai-rage, l’entretien de la voie publique et des espaces verts. L’OL Groupe s’occupe quant à lui de tout ce qui est privé, « par exemple, si des lo-tissements privés de Décines veulent faire construire une barrière à leur en-trée pour empêcher des gens de ve-nir se garer, c’est l’OL qui financera les travaux » précise Odile Pagani.

Même si tous les aménagements ne sont pas encore mis en place, pour accueillir les supporters des nations se rencontrant dans le Grand Stade, on peut espérer, comme Laurence Fautra, que « la fête sera belle ! »

Pas moins de 80 expropriations ont déjà été réalisées. Reste toujours l’irréductible Philippe

Layat qui résiste encore et toujours à " l’envahisseur " qu’est le Grand Lyon. Mais qui est-il et pourquoi s’oppose-t-il à l’Olym-pique lyonnais et à la communauté urbaine ? Depuis des années, cet éleveur de mou-tons à Décines se bat pour garder ses hec-tares de terrain que le Grand Lyon convoite pour y faire construire des voies d’accès. Le projet du Grand Stade de l’Olympique lyonnais implique que l'agriculteur soit ex-proprié d'une partie de ses terres, afin que la construction puisse être réa-lisée. Mais pas seulement selon Odile Pagani, chef de projet pour le Grand Lyon : « La route que l’on veut construire ne va pas seule-ment desservir le Grand Stade. Cela fait long-temps que l’on désire créer une déviation pour la ville de Décines. Même sans le stade, on l’aurait construite. »

Seulement voilà, on ne propose qu’un euro d’indemnisation par mètre carré au paysan pour une expropriation. Alors qu’autour du Grand Stade, le prix des terrains est déjà monté jusqu’à 400 euros le mètre carré.Le 14 mai, la cour administrative d’appel a annulé les déclarations d’utilité publique autorisant les expropriations. Pourtant, la communauté urbaine de Lyon a commen-cé les travaux sur la parcelle de Philippe Layat, au motif qu’un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat était déposé et que la décision n’était donc pas définitive. L’agriculteur exproprié devrait rencontrer

Gérard Collomb vendredi 28 novembre pour tenter une fois de plus de trouver un compromis avec le Grand Lyon.

Le T3 va perturber le trafic routier

Toutes ces expropriations ont pour but de développer le réseau de transports rou-tiers. Entre les voies d’accès au nord, au sud, l’échangeur sur la rocade ou encore l’extension du tram T3, il faut compter des centaines de millions d’euros. « L’Euro est

un bon moyen pour déve-lopper l’Est lyonnais. Cette zone souffrait d’une certaine pénurie dans les transports et il aurait fal-lu un jour ou l’autre, que la ville de Lyon et la future grande mé-tropole s’y at-tellent très lar-gement. Avec

l’arrivée du Grand Stade, on a dû accélérer ce processus et je pense que pour tout l’Est lyonnais, c’est une très bonne chose », ex-plique Yann Cucherat, adjoint au sport de la ville de Lyon.Un bon moyen donc pour améliorer les des-sertes à Décines. Cependant, l’association Carton Rouge pointe du doigt que les jours de matches, la plus grande fréquence des rames du T3 va perturber le trafic routier. « Ils vont multiplier le nombre de rames par deux et il y a 24 passages à niveau le long de la ligne qui vont bloquer la circulation ». Des problèmes qui pour le moment restent fictifs tant que les travaux ne sont pas ter-minés. Et puis l’Est lyonnais va finalement voir son réseau s’améliorer.

CES VOIES QUI FONT BEAUCOUP DE BRUIT

Les aménagements autour du Grand Stade sortent enfin du sol.

© Gautier Stangret

Le T3 va être prolongé à Décines jusqu’au Grand Stade. © DR

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S O C I É T É SÉCURITÉ

« Une compétition, ça se prépare. » Premier élément que Stéphane Rouvé tient à rappeler. Le préfet délégué à la sécurité et son équipe se rassemblent régulièrement depuis plus d’un an pour discuter

de la compétition européenne. Et ce n’est pas pour parler sport.

Loïc BessonHJ

La priorité, c’est l’enceinte même du stade », assure le préfet. Mais la tâche est loin d’être facile. Jusque-là, les autorités ne

connaissent que la configuration du stade de Gerland. « Pour nous, c’est un peu un pari car il ne va commencer à fonctionner réellement que début 2016 avec l’OL. On sera à trois-quatre mois de l’ouverture de l’Euro. On aura donc assez peu de recul », avoue-t-il. En théorie, la sécurité intérieure au stade est gérée par l’organisateur, ici c’est l’UEFA. Mais en pratique, « la force publique se tient évidemment toujours prête à intervenir en cas de débordement », explique Stéphane Rouvé. Il ajoute également que le niveau de risque d’incident

lors des rencontres sportives est apprécié en fonction des équipes reçues et des supporters qui les accompagnent. « C’est déjà le cas aujourd’hui dans les matchs du championnat de France ou quand l’OL est en coupe d’Europe. » Ça le sera donc encore lors de l’Euro 2016.

Gérer des flux

Autre particularité du stade : il est relativement excentré. « Si à Gerland, beaucoup y vont à pied depuis le centre-ville, ça sera un peu plus compliqué d’en faire autant à Décines puisqu’on est à 15 km », souligne le responsable de la sécurité publique dans le Rhône. La question de la sécurité dans les transports est dominante. Les forces de l’ordre doivent donc gérer « des flux de quelques 60 000 personnes (ndlr, la capacité d’accueil du Grand Stade). Et le déplacement d’une foule, c’est toujours un sujet de sécurité publique

», martèle le préfet délégué. Pour faire face à cela, il y a bien sûr des outils comme la vidéo protection. Du côté des forces de l’ordre, « il y a des unités spécialisées pour les transports en commun », détaille Stéphane Rouvé, mais aussi et surtout les transporteurs. Keolis, le délégataire des services publics de transport, va renforcer ses effectifs pour l’occasion. « Notre grande préoccupation, ce sont les plateformes de correspondance des différents transports. » Le transit doit être minutieusement régulé pour ne pas que les gens s’impatientent. Outre la satisfaction des usagers, le but est surtout d’éviter une hausse des tensions. Il ne faut pas oublier non plus les centaines de bénévoles recrutés spécialement pour la manifestation et dont une de leurs missions sera de veiller à ce que tout se passe bien.

Les fans zones

Après les expériences du dernier Euro en Ukraine et en Pologne, l’UEFA a développé le concept de fans zones. « Chaque ville d’accueil s’est engagée à en accueillir une. Chez nous, ce sera à Bellecour », affirme le préfet délégué à la sécurité et à la défense. C’est comme d'habitude sur la place que seront projetés les matches sur grand écran. Ces zones quadrillées sont « une réponse directe au problème de l’insécurité », estime Stéphane Rouvé. Cela permet d’éviter la dispersion et les forces de l’ordre peuvent canaliser les flux des supporters, et ainsi assurer plus facilement le maintien de l’ordre. Une autre menace bien connue des responsables de la sûreté : les ultras. « S’ils se trouvent au milieu d’une foule, ça peut partir dans tous les sens. Notre but est donc de les identifier pour pouvoir les encadrer », concède-t-il.

La menace terroriste toujours très élevée

Le risque terroriste pour la France existe de longue date. Il est encore « plus prégnant en ce moment et particulièrement dans les grandes villes comme Lyon », confesse le préfet délégué du Rhône. Et d’ajouter : « Aux

« LE RISQUE TERRORISTE S’ACCENTUE »

Dans chaque département, la sécurité relève de la responsabilité du préfet, représentant de l’État. ©LB

La préfecture échange avec l’UEFA pour gérer au mieux le dossier sécurité. L’organisation explique par exemple que les supporters européens sont « plutôt disciplinés » et que « par expérience, les gens ne restent jamais longtemps dans la ville. » Le séjour moyen dure deux jours.

PLUSIEURS MILLIONS DE SUPPORTERS

SONT ATTENDUS EN FRANCE, DE TOUTES LES NATIONS EUROPÉENNES

REPRÉSENTÉES

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PRESSE LOCALE

Les journalistes sont les principaux relais d’influence. Ils sont sur place et doivent fournir un maximum de

matière pour rentabiliser le déplacement, surtout à l’heure d’Internet où le nombre de signes n’est plus un souci. Ils réalisent des reportages d’ambiance d’avant-match, sur les à-côtés, mais toujours dans la ville hôte.

Le rituel est à chaque fois le même : « que font les joueurs pendant leur temps libre ? Où mangent et dorment les équipes ? Où les joueurs fêtent-ils leur victoire ? C’est à toutes ces questions auxquelles s’intéressent les journalistes », explique Frédéric Poignard, journaliste lyonnais. Il se souvient notamment du Mondial 98 où Lyon avait, entre autres, accueilli un quart de finale au stade de Gerland. Et d’ajouter : « c’est comme pour le Tour de France. À chaque étape, l’hélicoptère survole la ville et montre les curiosités géographiques et culturelles. Là, c’est la même chose ! » Le rôle des journalistes est alors également celui d’envoyer des cartes postales.

« En presse locale, on peut et on doit faire la différence avec les éditions magazines notamment. En 98, plusieurs sélections avaient un camp de base dans la région et j’ai suivi pendant plusieurs jours l’équipe des États-Unis. Ils s’entraînaient au château de

Pizay dans le Beaujolais. C’est sur ces détails que l’on peut apporter de la plus-value car concrètement, ça n’a aucun intérêt d’écrire qui va jouer contre qui, car tous les autres médias le font déjà », explique Jacques Eloi, chef des sports du Progrès. D’autant plus que le quotidien privilégie toujours la proximité vis-à-vis de ses lecteurs. « L’Euro est évidemment très important pour nous. C’est un événement rare qui va attirer énormément de monde dans l’agglomération », prévoit-il. Une autre époque « En 98, l’approche était complètement différente, se souvient Jacques Eloi. On devait être au moins 25 personnes pour couvrir l’équipe de France et toutes les équipes qui jouaient à Lyon ou à Saint-Etienne. » Mais les temps ont changé. La politique du journal est aujourd’hui celle d’un groupe. Les titres du groupe Ebra rationalisent les coûts et mettent leur travail en commun. Les tâches sont réparties et forcément les effectifs diminuent. Un journaliste du Dauphiné Libéré peut très bien couvrir les rencontres à Saint-Etienne, tout comme un reporter des Dernières Nouvelles d’Alsace. Le même article est ensuite imprimé et distribué quasiment à l’identique dans les différents titres du groupe.

LA PRESSE LOCALE A SA CARTE À JOUER

Pendant un mois, Lyon sera prise d’assaut par les médias venus du monde entier pour couvrir l’Euro. Face à la forte concurrence, les journaux locaux, comme Le Progrès, devront sortir leur

épingle du jeu. Loïc Besson HJ

MEDIASyeux des terroristes, Lyon fait déjà partie de ces villes-symboles qui marquent forcément davantage les esprits. D’autant plus qu’ils ne négligent pas leur communication. » C’est une menace qui existe en permanence, particulièrement en ce moment au vu du contexte international. Mais l’Euro 2016 rend évidemment ce risque plus fort du fait de sa couverture médiatique importante. « Ça marque encore plus les esprits pour une personne mal-intentionnée, estime-t-il. Il faut s’attendre à tout : du colis piégé à la bombe artisanale avec projection de clous par exemple, en passant par des produits chimiques de type gaz sarin. »

Des services spécialisés s’entraînent à gérer le risque d’un attentat. Il y a régulièrement des entrainements avec des exercices de sécurité civile suivant différents scénarios pour voir comment on gère une situation de crise. Leur fréquence s’accélère cinq mois avant le début de la compétition. Mieux vaut prévenir que guérir. Pour faire face à ce risque, le travail se fait surtout en amont. « On ne va pas attendre le début de la compétition. » Les brigades spécialisées de la DGSE (Direction Générale de la Sécurité Extérieure) et DGSI (Direction Générale de la Sécurité Intérieure) se renseignent pour anticiper au mieux la survenue d’un attentat. Un travail qui a lieu tout au long de l’année et sur tout le territoire national. Enfin, il y a tout le travail pendant la compétition avec des contrôles renforcés des supporters, notamment au stade et dans les transports, et des contrôles de déminage.

« LA MENACE EST FORTE ET RÉELLE »

QUE DIT LA LOI ?

Sur la sécurité, c’est l’État qui a la main, et donc le préfet, son représentant dans le département. Il mobilise tous les services sur ces opérations de sécurité. Les pompiers sont aussi des acteurs de la sécurité. Au quotidien, le service départemental d’incendie et de secours est financé par les collectivités locales. Mais dès lors qu’il est engagé dans le cadre de manifestations d’importance, il passe sous l’autorité du préfet.

Unes du Progrès pendant le mondial de 98. ©LB

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20 HJ Décembre 2014

ENQUÊTETOURISME SEXUEL, ENTRE MYTHES

ET REALITÉS

Solène PaillardHJ

Une idée préconçue veut que les compétitions de football internationales augmentent de façon significative le nombre de prostituées dans les villes organisatrices.

Qu’en est-il vraiment ? Tour d’horizon des précédentes Coupes du monde allemande et sud-africaine.

Acheter du sexe n’est pas un sport. » Tel était le slogan de la campagne internationale lancée en janvier 2006,

à l’aube du Mondial, en Allemagne. A l’époque, Berlin avait, en effet, provoqué la colère des associations de défense des droits des femmes en annonçant la construction de bordels, près des stades. Selon l’Office central pour la répression de la traite des êtres humains aux fins d’exploitation sexuelle, plus de 300 000 personnes se prostitueraient en Allemagne. Car le pays figure parmi les plus permissifs au monde, en matière de commerce du sexe. Depuis 2002, la loi allemande accorde une couverture sociale (assurance-maladie, chômage) aux personnes qui se prostituent. Ces dernières ont également le droit de porter plainte contre un employeur ou un client.

Un phénomène qui inquiète les uns...

La prostitution s’est-elle invitée en Afrique du Sud lors du mondial 2010 ? En prévision d’une augmentation, le pays réclamait en effet un milliard de préservatifs. Bien que le chiffre semble disproportionné, le Sud-africain David Bayever, vice-président du Central Drug Autorities, avait estimé à 40 000 le nombre de prostituées qui se rendraient dans le pays pour « profiter » du rendez-vous sportif. Un chiffre qui vient s’ajouter aux 30 à 50 000 personnes enrôlées dans le système prostitutionnel, en Afrique du Sud en temps normal. Cette demande d’un milliard de préservatifs est à comparer, aux 100 000

dont avaient disposé les athlètes, lors des Jeux Olympiques de Vancouver en 2010, tous écoulés en quelques jours. Enfin, la prostitution y est toujours considérée comme une activité illégale. Et ce malgré le débat engagé à ce propos, peu avant le début du Mondial. Un débat qui avait suscité beaucoup de passion.

...un « mythe » relayé pour les autres

« Les événements sportifs ne favorisent pas particulièrement le tourisme sexuel. Il faut arrêter de relayer ces mythes créés par les associations abolitionnistes », s’agace Jérôme Expuesto, éducateur au sein de l’association lyonnaise Cabiria, chargée de mener des actions de santé et de prévention auprès des prostituées. « Non, la Coupe du monde n’attire pas les prostituées », titrait encore un article paru en décembre 2013 dans Líbero, un magazine madrilène consacré au football. Alors que la polémique allemande s’estompait, un rapport émis par l’Organisation internationale des migrations sur le trafic d’êtres humains à l’occasion du mondial indiquait que « l’estimation de 40 000 prostituées était dénuée de fondement et peu réaliste. » Notamment car notre voisin outre-Rhin a légalisé la prostitution en 2001 et que les stéréotypes présentant les supporters comme de grossiers personnages à la recherche de services de prostituées semble appartenir à une autre époque : « D’après de nombreux spécialistes, ce tournoi n’est pas un événement majoritairement masculin. Le public est mixte et composé de couples et de familles », pouvait-on lire dans le rapport.

«LES LIEUX DE PROSTITUTION SONT LES

DERNIERS REFUGES OÙ LA SOLIDARITÉ MASCULINE

PEUT S’EXPRIMER.»

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les organisateurs de ces événements pour endiguer le tourisme sexuel. Mais ça ne se fait pas. La lutte contre le tourisme sexuel n’est pas dans le viseur des organisateurs des gros rendez-vous sportifs. Ça ne fait pas partie de leurs objectifs.

HJ : Quelles sont les régions d’Europe particulièrement touchées par le tourisme sexuel ? Quelles en sont les raisons ? H.DR : Le tourisme sexuel frappe particulièrement en Grèce, en Allemagne et en Suisse en raison de leur régime réglementariste. La prostitution y est encadrée par des maisons closes officielles. Il y aussi La Jonquera, réputée pour être une plaque tournante de la prostitution. Elle a la particularité d’être une sorte d’immense « supermarché du sexe » sous forme de traite, c’est-à-dire à travers le maillage de réseaux puissants qui organisent le recrutement, le déplacement et l’embrigadement des femmes. De plus, au niveau de la frontière franco-suisse, en Haute-Savoie, une prostitution « low-cost » s’est développée au cours de ces dernières années.

HJ : Quelles ont été les mesures engagées par les municipalités ou les États européens pour lutter contre ce phénomène ?H.DR : Les mesures concrètes entreprises sont minces. Des pays comme la Suède, la

France, la Finlande et l’Islande pénalisent l’achat d’un acte sexuel, bien que la loi soit rarement appliquée. Il en va de même pour la Norvège, y compris si le client a recours aux services d’une prostituée à l’étranger. La Belgique, quant à elle, pénalise le proxénétisme et a mis en place des structures afin d’accompagner les victimes et de les aider à sortir de cet engrenage. Or, il s’agit d’une grande hypocrisie puisque les maisons closes y sont tolérées et que l’État ne semble pas se sentir concerné par les violences que subissent régulièrement les prostituées.

HJ : En fonction des pays et des régions, certaines personnes prostituées sont-elles plus vulnérables que d’autres ? H.DR : C’est une violence à l’égard des femmes, évidemment contraire aux valeurs d’émancipation féminine. Il y a également des facteurs aggravants, issus d’un vécu souvent chaotique qui les rendent plus vulnérables face aux actions des proxénètes. Nous rencontrons régulièrement des femmes fragilisées par des violences sexuelles qu’elles ont subies durant l’enfance. Elles sont repérées puis récupérées par les réseaux mafieux. Au cours du trajet pour venir en France, certains proxénètes n’hésitent pas à recourir au viol afin de casser les personnes, de briser leur dignité. Ils leur font également contracter des dettes qui peuvent s’élever jusqu’à 60 000 €.

Hors-Jeu : Les grands événements sportifs génèrent-ils une organisation particulière en matière de tourisme sexuel ? Hélène de Rugy : Oui. Les lieux de prostitution sont beaucoup plus nombreux qu’en période normale. La Coupe du monde de 2006 en Allemagne en a été un exemple. De toute évidence, on est toujours face à un marché. Les réseaux doivent s’organiser pour répondre à la demande. Les événements sportifs sont en effet un lieu privilégié où les hommes peuvent y exercer les codes sociaux de la virilité à l’abri des femmes, excepté, bien sûr, des prostituées. Ce sont les derniers refuges où la solidarité masculine peut s’exprimer. Le bordel de la Jonquera, à la frontière franco-espagnole, par exemple, accueille souvent des bandes de copains qui viennent profiter des services des prostituées avant ou après un match.

HJ : Comment les réseaux s’organisent-ils pour faire face à la demande lors de ces événements ? H.DR : Les réseaux de proxénètes déplacent les filles d’une ville à l’autre. Nous avons souvent rencontré des prostituées issues des villes voisines. Elles sont rapprochées des grands événements sportifs pour que les clients puissent y avoir accès rapidement, sans tourner pendant des heures. On pourrait envisager une coopération avec

« LES ORGANISATEURS NE LUTTENT PAS CONTRE LE TOURISME SEXUEL »

Inscrit dans la continuité du système prostitutionnel, le tourisme sexuel est un fléau recensé à l’échelle mondiale. Pour Hélène de Rugy, déléguée générale de l’association de lutte contre

la prostitution l’Amicale du Nid, les lois prétendument protectrices ne protègent pasles prostituées des violences auxquelles elles sont régulièrement confrontées.

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HJ : Est-ce bénéfique d’organiser un événement sportif international ?Pierre Rondeau : C’est toujours le même débat. Il faut bien connaître les coûts de l’organisation, mais surtout savoir comment on a obtenu cette organisation. En effet, les retombées économiques pour les villes et le pays ne sont que théoriques. Ces chiffres resteront toujours des estimations, car de nombreux paramètres différents sont à prendre en compte pour avoir ne serait-ce qu’un ordre d’idée. Mais cela reste très variable. Par exemple, lors des Jeux Olympiques de Londres en 2012, les études menées ont donné diverses conclusions. Pour l’une, l’organisation de cet événement va rapporter plus que les dépenses tandis qu’une autre va prévoir le contraire.

HJ : Mais justement, ce dont on est sûr, c’est le coût des stades qui pour la plupart, ont été payés avec l’argent public. P.R : Il ne doit pas y avoir d’amalgame. La rénovation des stades est prévue pour la Coupe d’Europe, mais cette rénovation est le fruit d’un partenariat, entre les clubs, qui disposent des enceintes, et les villes, qui en sont propriétaires. Les clubs et les mairies qui font rénover leur stade avec l’argent privé-public, le font aussi dans un intérêt à très long terme. Mais surtout, le stade conservera une activité en produisant des richesses, entre la billetterie et toutes les consommations aux alentours. Alors que si on prend l’exemple des Jeux Olympiques, à Athènes et à Sotchi par exemple, la majorité des infrastructures sportives sont désormais abandonnées. Pour l’Euro et la rénovation des stades, il y aura encore des répercussions dans 20, 30 ou 40 ans.

Pierre Rondeau est spécialiste de l’économie et de la sociologie sportive, en particulier

du football. Il revient sur la politique de la France vis-à-vis de l’UEFA pour décrocher

l’organisation de l’Euro 2016.

Martin Casamatta HJ

HJ : Une fois les rénovations ou les constructions terminées, à qui appartiennent les stades ?P.R : La problématique des stades est l’un des soucis majeurs des clubs de foot français. Prenons le cas de l’Allemagne. Les clubs allemands sont autorisés à devenir propriétaires de leurs stades et vont donc véritablement le gérer comme un bien économique, de spectacle. Cela leur permet de pouvoir faire de gros bénéfices.

En France, les clubs sont toujours dépendants des mairies, qui restent propriétaires des stades. Un début de solution a peut-être été trouvé, avec l’exemple du Paris-Saint-Germain.

Le club a passé un accord avec la mairie concernant le Parc de Princes qui permet au club de la capitale de gérer de manière autonome l’enceinte. Cette dernière restant toutefois propriété de la ville. C’est un transfert de compétences. Si la pelouse du PSG est aussi réputée, c’est parce que ce ne sont pas les jardiniers municipaux qui s’en occupent. Mais un employé du club, en l’occurrence un Anglais recruté à prix d’or par le PSG. Le cas de Lyon se rapproche du cas du PSG, car le stade sera la propriété du club. L’Olympique lyonnais louera donc directement l’enceinte à l’UEFA, comme n’importe quel bien.

HJ : L’UEFA aura donc les pleins pouvoirs financiers dans les stades accueillant des rencontres durant la compétition ? P.R : En effet, l’UEFA est totalement propriétaire d’une zone géographique, qui comprend le stade, plus les 500 mètres autour de l’enceinte. C’est en quelque sorte, une zone franche où l’UEFA prend en charge toutes les recettes et les dépenses. Depuis 2008, l’instance dirigée par Michel Platini est aussi propriétaire des droits à l’image de la compétition, auparavant détenus par les chaînes de télévision. C’est-à-dire que l’organisation, basée en Suisse, produit les images avant de les revendre aux télés d’Europe les plus offrantes. L’UEFA organise donc tout ce qui se passe dans les stades et en récolte tous les bénéfices.

HJ : La France a mis en place une exonération d’impôts pour les sociétés partenaires de l’UEFA. Pourquoi une telle mesure ?P.R : On peut la lier à une théorie assez célèbre en économie : la Winner Curse (la malédiction du gagnant, NDLR). Prenons l’exemple de l’Euro 2016. L’UEFA a proposé l’événement à tous les pays membres. Les nations intéressées vont donc, chacune à leur tour, proposer leurs projets. Pour l’emporter, il va falloir être le plus convaincant. C’est pourquoi les pays vont jouer à un jeu de surenchère, où chacun va proposer de plus en plus de choses, afin de rafler la mise. Le problème est que, généralement, on se retrouve avec plus de dépenses que ce que l’on espérait gagner. Pour l’Euro, la France, qui voulait à tout prix remporter l’organisation après les échecs de Jeux Olympiques de 2008 et 2012 a promis à l’UEFA une exonération d’impôts pour ses sociétés partenaires. Une mesure qui a sans doute fait pencher la balance dans le sens de la France.

ECONOMIE« TOUS LES BÉNÉFICES DU

STADE REVIENNENT À L’UEFA »

©Stéphane Guiochon/ Le Progrès

« LA FRANCE QUI VOULAIT ORGANISER L’EURO A PROMIS UNE

ÉXONÉRATION D’IMPÔT À L’UEFA »

Jean-Michel Aulas et Michel Platini à Munich

en mai 2012. IN

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HJ Décembre 2014 23

La nouvelle enceinte lyonnaise est financée exclusivement par un organisme privé, OL Groupe, ce qui en fait un cas unique

en France. Ce n’est plus la ville de Lyon qui louera le stade au club, donc tous les bénéfices tomberont dans la poche de l’OL pour les

matches de championnat. Mais qu’en sera-t-il pendant l’Euro 2016 ?

Kévin CharnayHJ

En ayant été désignée ville hôte par le comité d’organisation de l’Euro 2016, Lyon accueillera six rencontres dans

le Grand Stade, dont un potentiel huitième de finale de l’équipe de France et une demi-finale. Alors que le stade appartiendra totalement à l’OL Groupe, une question se pose : dans quelle caisse seront versés les bénéfices de la billetterie ? Comme l’UEFA l’a indiqué à Hors Jeu, l’instance « louera les stades et paiera donc un loyer aux propriétaires ». C’est elle qui touchera l’argent de la billetterie lors des matches au Grand Stade. Pour les autres villes, c’est la mairie qui a géré le contrat de location.

L’UEFA assure que « le montant de ces loyers n’a pas été rendu public pour l’instant ». Du côté de l’Olympique lyonnais,

Xavier Pierrot, responsable de la billetterie, affirme que les rentes de la location sont déjà fixées mais le prix reste « confidentiel ». Reste à savoir qui va gagner le plus, l’OL avec le loyer ou l’UEFA avec les tickets.

L’OL : distributeur officiel d’hospitalité

Le flou semble être le maître mot dans l’organisation des rencontres dans le Grand Stade, comme le souligne Pierre Rondeau : « Il y a une nouvelle règle dans l’UEFA qui stipule qu’un stade peut être utilisé dans une compétition internationale seulement s’il a déjà 6 mois d’utilisation. C’est pour ça que l’OL se presse pour terminer dans les délais. Mais j’ai eu des échos comme quoi Lyon arrivera à passer outre cette règle.

QUE GAGNERA L’OL LORS DE L’EURO 2016 ?

Des mugs, écharpes, t-shirts, montres ou autres préservatifs customisés. Les accessoires pour supporters de football ont toujours autant le vent en poupe. Davantage encore à l’approche de grands événements sportifs. L’Euro 2016 n’échappe pas à la règle. En revanche, la vente de tels produits est strictement règlementée.

Tout objet à l’effigie de l’Euro doit provenir de la société organisatrice, l’UEFA. Même chose pour ce qui concerne les buvettes, sandwicheries et autres équipements aux alentours du stade. S’ils représentent une grande source de recettes en « jour de match », ces services ne rapporteront rien à l’OL pendant l’Euro.

Le club est le seul propriétaire de son stade résident en France. Il le loue à l’UEFA durant la compétition. « Pendant un mois, on est complètement dépossédé de tout ce qui concerne l’OL », explique une responsable de la boutique OL, rue Edouard Herriot. Par conséquent, il faudra repérer les bons plans pour acheter un peignoir ou un simple porte-clés lumineux spécial Euro 2016.

Hormis les boutiques éphémères installées pendant les matches au Grand Stade, seules certaines grandes surfaces partenaires de l’UEFA consacreront leurs rayons aux accessoires à l’effigie de l’Euro 2016.

Comment ?

En métro : Ligne A direction Vaulx-en-Velin-la-Soie, descendre au

terminus puis prendre Tram T3 direction Meyzieu zi.

En voiture : Depuis Lyon centre, prendre le périphérique Nord, puis le boulevard

périphérique Laurent Bonnevay, puis prendre la sortie A42 Rocade Est en direction de

Genève et enfin emprunter la sortie N346 direction

Marseille/Grenoble. (Grand Stade Décines : Chemin du Montout

69150 Décines-Charpieu)

INFOS PRATIQUESLE GUIDE DU SUPPORTER

En effet, le futur Stade des Lumières, qui sera le troisième stade avec la plus grande capacité d’accueil de spectateurs, est capital pour la réussite de la compétition en termes de recette d’entrées. Il n’aura pourtant que 3 mois d’utilisation avant le début de l’Euro. »

L’OL a également trouvé un autre moyen de rentabiliser l’accueil de la compétition. En effet, il y a un mois, le président du club Jean-Michel Aulas et Jacques Lambert, qui préside l’organisation de l’Euro 2016, ont annoncé que l’Olympique lyonnais devenait « Distributeur officiel Hospitalité UEFA Euro 2016 ». Ce statut permet donc à l’OL de vendre des prestations en loges à des entreprises lors des matches de la compétition.

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HJ Décembre 201424

L’EURO 2016, C’EST AUSSI POUR LES AMATEURS

Océane ChabardèsHJ

CLUB

SSPORT

Le 23 octobre dernier, le sixième comité de direction de l’Euro s’est tenu à Bordeaux. Les villes

partenaires ont sauté sur l’occasion pour taper du poing sur la table : elles veulent un retour sur investissement. Un discours plus tard, c’est officiel : deux millions d’euros sont accordés aux clubs amateurs de chaque ville hôte, grâce à l’Euro 2016, soit vingt millions d’euros pour le monde amateur français. Une première partie sera rétribuée avant la compétition et pourrait être inscrite dans le budget 2015 de l’Etat, la seconde partie, étant distribuée une fois l’Euro terminé. Si les hauts dignitaires de l’Euro 2016 ont du mal à mettre un chiffre sur les « rétributions de la richesse et la valeur ajoutée grâce à l’Euro », comme le dit Yvan Claudey, directeur administratif du club amateur FC Lyon, c’est bien parce que les études ont généralement du mal à imaginer les retombées économiques de grands évènements.

Une fois le chèque rédigé, l’argent n’arrivera pas directement sur les comptes des clubs, ce sont les villes hôtes qui se chargeront de la construction d’équipements sportifs. Comme l’explique Yann Cucherat, adjoint au maire de Lyon délégué au sport : « Cela pourra concerner des pelouses, des vestiaires, des sanitaires, des clubs houses … Ce sera fait en fonction des différents clubs et de ce que nous avons déjà imaginé comme investissement pour des équipements de la ville de Lyon ». Pour certains clubs, cet argent bénéficiera aussi à « l’achat de minibus pour le transport des licenciés », explique Yvan Claudey.

Au niveau des infrastructures, il y aura un avant et un après. Comme le rappelait Alain Juppé, le 23 octobre, « 1,7 million d’euros a pour l’instant été investi pour la rénovation des stades ».

Des retombées pas toujours roses

Pourtant, ce bonus ne permettrait pas d’augmenter le nombre d’inscrits dans des clubs de la région. Quand les statistiques de la ligue Rhône-Alpes connaissent une baisse depuis deux ou trois ans, seuls quelques clubs, comme le FC Lyon, enregistrent toujours plus de demandes. Si l’engouement pour le football ne cesse de croître, les places en club sont limitées.

En effet, pour pouvoir accueillir plus d’inscrits, il faut des terrains à disposition, des vestiaires pour accueillir les joueurs et un nombre suffisant d’entraîneurs.

Pourtant, la réalité est toute autre. Selon Yvan Claudey, si la rénovation des vestiaires et des terrains sont au programme, ils sont « limités par le nombre de terrains disponibles sur Lyon et le Grand Lyon, et puis au niveau foncier, c’est très coûteux ». De même, la plupart des entraîneurs étant bénévoles, les clubs ont de plus en plus de mal à recruter. « Dans ce sens, on ne pense pas avoir nécessairement

Karim Benzema, Alexandre Lacazette ou Loïc Rémy… Ces noms connus dans le monde du football professionnelont tous débuté leur carrière dans des petits clubs. Comme leurs idoles avant eux, les footballeurs amateurs vont à nouveau pouvoir bénéficier des retombées de l’Euro 2016.

©Stéphane G

uiochon

2 MILLIONS D’EUROS SONT ACCORDÉS

AUX CLUBS AMATEURS DE CHAQUE VILLE HÔTE,

GRÂCE À L’EURO 2016

plus d’inscrits et plus d’adhérents », confie le directeur administratif du FC Lyon.

Des conséquences financières indirectes

Un chèque, c’est bien, encore faut-il savoir l’investir. L’argent apporté par l’UEFA ne sera pas le seul à combler les caisses des clubs lyonnais. Comme pour n’importe quel évènement, si la ville fournit une partie de l’aide financière pour les rénovations et autres aménagements, « les aides financières supplémentaires viendront de l’intérêt que vont porter le grand public, les entreprises et tous les acteurs du football, à l’Euro », explique Yvan Claudey. Si tous les clubs espèrent obtenir de quoi grossir leurs effectifs, il faudra attendre l’horizon 2016 pour en avoir le cœur net.

Les retombées économiques des derniers grands évènements, comme l’Euro 84 ou la Coupe du monde 98, auront permis la mise en place de nombreux projets. 111 associations avaient été retenus dont 44 pour le développement du football comme la formation des footballeurs et des entraîneurs, la lutte contre la violence ou encore le développement du football féminin.

Depuis 1998...

Les jeunes du FC Lyon répètent leurs gammes.

©OCJT

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Age : 25 ansPoste : milieu défensifClub : Olympique lyonnaisProbabilité de participer à l’Euro : 25%

Osana : « Il y a vraiment embouteillage à son poste ! Après, il a fait une saison remarquable et est devenu un bon capitaine à l’OL. C’est quelqu’un qui ne posera pas de problème au sein d’un vestiaire ».Brikh : « C’est un joueur de devoir, discret, précieux au sein d’une équipe. C’est important pour un sélectionneur d’avoir des joueurs qui répondent présent comme Gonalons et qui ne font jamais de vagues même s’ils ne jouent pas. »

HJ Décembre 2014 25

Age : 23 ansPoste : attaquantClub : Olympique lyonnaisProbabilité de participer à l’Euro : 60%Osana : « Cette saison, il explose au niveau des statistiques et a tous les atouts pour devenir un très grand attaquant. Après, ils sont quatre

pour une place de titulaire derrière Benzema. Mais Lacazette semble complémentaire avec ce dernier. »Brikh : « C’est un joueur timide. A l’OL, il est dans un cocon. Alors c’est sûr qu’il doit trouver ses marques chez les Bleus. Mais s’il parvient à s’affirmer comme Benzema, je signe tout de suite : Lacazette deviendrait un élément essentiel. »

L’alternative, Alexandre Lacazette

Vingt-trois. Ils ne seront que 23 joueurs français à pouvoir réaliser le rêve de tout footballeur : disputer une compétition internationale sur ses terres. Les places pour jouer l’Euro 2016 seront donc chères dans la sélection de Didier Deschamps. Toutefois, beaucoup de joueurs issus du centre de formation de l’OL, réputé grand pourvoyeur de talents (meilleure académie de France, quatrième en Europe), peuvent légitimement prétendre à une place chez les Bleus. Actuellement, ils sont cinq : Karim Benzema, Alexandre Lacazette, Loïc Rémy, Clément Grenier et Maxime Gonalons.Alors bien sûr, l’Euro est encore loin. En deux ans, tant de choses peuvent se passer. Surtout dans le foot. Toutefois, Antoine Osana (Le Progrès) et

Razik Brikh (Lyon Capitale), qui suivent l’actualité de l’OL depuis de nombreuses années, enfilent le costume de Madame Irma et lisent dans leur boule de cristal, les chances de ces cinq Lyonnais de disputer l’Euro.

Jérôme GalloHJ

CES LYONNAIS QUI RÊVENT EN BLEU

L’énigme Loïc Rémy

Age : 26 ansPoste : attaquant

Club actuel : Real MadridProbabilité de participer à l’Euro :

90%

Osana : « Il y a toujours des joueurs plus indispensables que d’autres, mais lui c’est vraiment le grand attaquant français, de dimension mondiale. Ce n’est pas par

hasard qu’il soit à la pointe de l’attaque du Real Madrid. »

Brikh : « Il a enfin trouvé sa place au sein de cette équipe de France. On le sent à l’aise dans le groupe. Il marque

les esprits par ses performances et ses statistiques. Pour Benzema, c’est

désormais l’heure de la maturité. »

L’indispensable Karim Benzema

1. Selon la dernière étude de l’observatoire du football du CIES.

L’académie de l’OL fourmille d’espoirs de talent. Mais il est encore bien tôt pour prévoir si l’un d’entre eux arrivera à maturité pour l’Euro. Mais nos deux spécialistes se rejoignent : s’ils devaient mettre une pièce, ce serait sur Nabil Fekir, jeune milieu de 21 ans. « La révélation lyonnaise du début de saison », dixit Razik Brikh, « le plus gros potentiel de l’OL », pour Antoine Osana, pourrait apporter toute sa fraîcheur aux Bleus. Encore faut-il qu’il fasse son choix entre les sélections française et algérienne, lui qui a la double nationalité.

Age : 27 ansPoste : attaquantClub : ChelseaProbabilité de participer à l’Euro : 50%

Osana : « Il a cette polyvalence de pouvoir jouer

Le fragile Clément GrenierAge : 23 ansPoste : milieu de terrainClub : Olympique lyonnaisProbabilité de participer à l’Euro : 45%

Osana : « Il peut être plus qu’un simple complément au sein du milieu de terrain français. Sa mentalité passe très bien avec le staff, il est très bon techniquement et peut assurer le rôle de relayeur, comme il l’a déjà fait à l’OL ».Brikh : « La problématique de Grenier se situe au niveau de ses blessures. C’est un joueur doué, ambitieux, qui a des sollicitations. Mais il se blesse souvent. Alors sera-t-il au point physiquement pour l’Euro ? Personne ne le sait vraiment. »

L’EURO 2016, C’EST AUSSI POUR LES AMATEURS

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dans l’axe ou sur un côté. Il a choisi de relancer sa carrière en partant dans un très grand club, Chelsea (Londres). Il ne pourra que progresser. Mais attention, il est souvent blessé. Sur ce point, c’est une énigme. »Brikh : « Le problème, c’est qu’il ne joue pas en club face à la forte concurrence. Cela risque d’être compliqué pour lui chez les Bleus, comparé à un Lacazette indispensable à l’OL par exemple. »

FEKIR LA SURPRISE

©Stéphane G

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©Stéphane G

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Stéphane Guiochon

©Stéphane G

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Stéphane Guiochon

Maxime Gonalons, le parfait remplaçant

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HJ Décembre 201426

DES TERRAINS AU BUREAU DE VOTELimogeage, plainte et conflits. C’est le lot de la vie politique lorsqu’il est

question du ballon rond. Mais quand les pontes de la République trouvent dans le football le moyen d’augmenter leur nombre d’électeurs,

la récupération politique devient un sport national. Focus sur ces instants où les tactiques footballistiques laissent place aux calculs politiques.

Irchade KariHJ

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En 2011, durant le mandat de Nicolas Sarkozy, le Grand Lyon et l’État s’accusaient mutuellement de freiner la construction du Grand Stade. Dans une interview accordée au Parisien en avril 2011, le maire de Lyon, Gérard Collomb, accusait le gouvernement Fillon de vouloir saboter le projet : « sans doute parce que Lyon a un maire de gauche. Je constate qu’on est aujourd’hui dans une république bananière ».

L’AVIS DE L’EXPERTPIM VERSCHUUREN

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De 2001 à 2009, Étienne Tête était adjoint EELV de Gérard Collomb. Il a été renvoyé car il s’opposait au maire socialiste au sujet du Grand Stade. Lors des dernières municipales, l’élu écologiste a déclaré : « Évidemment, le stade se construit, évidemment il faut le raccorder au réseau de transports en commun pour alimenter une opération lucrative pour les investisseurs privés, mais coûteuse pour les finances publiques. Pendant ce temps, les usagers du C3 s’entassent dans des bus bondés et attendent un tramway pour la ligne la plus saturée de Lyon. Évidemment, les seuls qui continuent de lutter pour utiliser l’argent public à bon escient sont les écologistes ». L’élu Verts a également intenté une action en justice contre Jean-Michel Aulas pour avoir « sciemment sous-estimé les difficultés de réalisation du Grand Stade, pour favoriser l’entrée en Bourse de l’OL ». Il a été condamné à 3 000 euros d’amende et à verser un euro de dommages et intérêts à l’OL Groupe ainsi qu’à Jean-Michel Aulas, et à payer 5 000 euros aux parties civiles au titre des frais de justice, en octobre dernier pour dénonciation

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Dans une vidéo postée sur YouTube en octobre dernier, Dieudonné a soutenu Philippe Layat en déclarant : « les sans-dents ont de la voix, à l’image de Philippe Layat, l’agriculteur lyonnais qui s’est fait voler toutes ses terres ». Un soutien suivi par Alain Soral, qui dénonçait la façon dont le Grand Lyon a, selon lui, ignoré la loi, en poursuivant les travaux sur le domaine de l’agriculteur alors que ce dernier s’était pourvu en cassation et que le jugement définitif n’avait été prononcé.

Chercheur à l’IRIS depuis 5 ans, Pim Verschuuren est un politologue spécialisé dans le « diplosport » (l’impact du sport sur les relations internationales). Il a signé

plusieurs articles sur le football, dont « Matches truqués en Ligue 2 ? On est loin d’un vaste système de corruption », le 18 novembre dernier dans Le Plus de l’Obs.

Pim Verschuuren revient pour nous sur la récupération politique des événements sportifs.

« Le foot est le sport le plus populaire en France. Il constitue donc naturellement une tribune pour les politiciens qui ont besoin des retombées positives de ce sport. Lorsque les hommes politiques s’affichent dans ces événements qui véhiculent une image positive et universelle, ils bénéficient automatiquement de cette aura suscitant l’adhésion. En plus en se montrant lors d’événements ultra médiatisés tel que l’Euro, les politiciens apparaissent comme les garants de ces festivités sportives. Pour un politicien, accueillir l’Euro montre qu’il cherche à dynamiser son territoire, car ces événements dynamisent l’économie, créent des emplois et apportent de la joie dans la population. C’est comme lors de l’Empire romain avec le dicton « du pain et des jeux ». Les remous politiques actuels concernant le Grand Stade de l’OL témoignent que cette infrastructure synonyme d’emploi et de réussite, est récupérée par les élus locaux, qui souhaitent que rejaillissent sur eux, l’image positive qu’elle véhiculera ».

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Il existe peu de manifestations comparables à l’Euro en termes de visibilité pour une ville. Le football produit un engouement

médiatique sans pareil. Ça l’est davantage encore lorsqu’il s’agit de compétition internationale. Pendant ces quelques semaines, tous les pays du monde vont avoir au moins une chaîne de télévision diffusant le championnat européen. Ça ne peut que faire venir du monde et accroître la notoriété des spécificités lyonnaises. Mais pour que tout fonctionne à merveille, les autorités donnent leur coup de pouce.

« À chaque fois, quelques semaines avant une manifestation internationale, tout le monde se redynamise et la ville se remet en question », explique Frédéric Poignard. Les services de contrôles d’hygiène se multiplient dans les restaurants et les hôtels. Le journaliste lyonnais couvrait le G7 en 1996 : « Le Sofitel en a profité pour se remettre aux normes. Il fallait bien un coup de peinture pour accueillir le couple Clinton. Les services municipaux ont aussi refait la voirie devant l’hôtel. La mairie a abattu plusieurs arbres pour des questions de sécurité. Au final, c’est l’occasion de remettre la ville à niveau. »

Sortir les beaux couverts pour recevoir du monde

Du sommier du lit d’hôtel, au métro, en passant par l’assiette, l’événement, dans son intégralité, est associé à la ville hôte. « Si leur séjour se passe bien, les gens sont contents. Dans le cas inverse, ils gardent une mauvaise image de la ville », estime le reporter lyonnais. La ville mise beaucoup sur un stade flambant neuf. Les autorités ont activement soutenu le

dossier, bien qu’il s’agisse d’un établissement privé. Tout a été fait dans le but d’accueillir l’Euro 2016. Sans avoir financé l’édifice, Lyon bénéficie des retombées médiatiques. En 1998 déjà, le stade de Gerland se met aux normes. Il est agrandi pour accueillir le mondial. La mairie installe une immense tribune de presse et rallonge le métro jusqu’à Gerland. Avec le nouveau stade, la démarche est identique. L’établissement a beau être privé, la puissance publique est responsable de gérer et financer les abords et les moyens d’acheminement du public jusqu’à l’enceinte sportive.

Un rayonnement biaisé ?

Ce qui intéresse les médias, c’est avant tout de valoriser l’épreuve sportive. « Si l’image est bonne, elle est donc montrée de façon très positive. Dans le cas où l’image est mauvaise, on n’en parle généralement pas, affirme l’ancien journaliste du Figaro-Lyon. Le problème est toujours le même, il faut que ça parle à la cible, c’est-à-dire les amateurs

de foot et de compétitions internationales. Il n’est donc pas question de décrier quoi que ce s oit au niveau de la ville et du pays hôte ». Seule l’affaire Layat a quelque peu entaché le dossier du Grand Stade au-delà du niveau local. Son expropriation a été reprise par les médias nationaux. « Ça présente forcément un peu l’administration lyonnaise comme étant tentaculaire et ne s’occupant pas des gens. Mais en 2016, tout le monde aura oublié le paysan », assure Frédéric Poignard.

Un coup de com’ pour la future métropole

Au niveau de la répartition des compétences, c’est la métropole qui est chargée du sport. Mais les gens ne s’occupent guère de savoir ce que chacun gère dans ce millefeuille administratif. À l’étranger, personne ne fait la nuance entre Lyon et sa banlieue. À l’échelle du rayonnement, il ne peut y avoir de différence entre conseil municipal, conseil général et Grand Lyon. Les différentes instances sont donc obligées de communiquer ensemble pour gérer leur image commune.

Gérer l’image d’une ville reste un art à manier avec beaucoup de minutie. Pour les communicants, la tâche peut parfois s’avérer risquée. En 1998, le service de presse de la mairie négocie une inter-view de Raymond Barre, alors maire de la ville, avec la chaîne américaine CNN International. Le plateau est tourné en di-rect de la place Bellecour où la ville doit inaugurer en fin d’interview un éclairage spécial, présenté comme génial car beau-coup plus doux. Tous les journalistes sont présents à cette occasion, notamment l’équipe de CNN. 3-2-1-0 : Raymond Barre déclenche l’interrupteur puis s’ex-clame : « Ça ne marche pas ? » L’éclai-rage marchait bel et bien mais le maire lui-même n’avait pas vu la différence tel-lement il était imperceptible.

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L’Euro 2016 va braquer les projecteurs sur la ville à travers les quelques rencontres qui vont se jouer

dans l'agglomération. L’occasion pour la métropole d’attirer

la lumière et d’être au cœur du rayonnement

Loïc BessonHJ

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Frédéric Poignard, journaliste, fin observateur de la vie lyonnaise depuis 1987. ©LB

LYON DOIT GÉRER UN VECTEUR DE NOTORIÉTÉ

Only Lyon, la marque de Lyon à l’étranger

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Tout change à Confluence. Les immeubles bigarrés viennent remplacer les entrepôts en friche. Le quartier, autrefois désert, attire désormais les touristes parisiens et les fêtards. Le vieux

terrain de foot en gore s’est noyé dans la darse. Seul reste, dans cet immense chantier à ciel ouvert, l’A.S. Bellecour-Perrache.

L’idole Benzema

Ce club amateur en a vu passer des gamins fanas de football. Avec les idoles propres à chaque génération. Zidane, après le triomphe de 98, Trézéguet et Henry, après le sacre de l’Euro 2000, Ribéry, après la formidable épopée du Mondial 2006 (finale perdue contre l’Italie). Et, désormais ? « Karim Benzema ! Karim Benzema ! », vous répondent en chœur les jeunes de l’école du foot de l’A.S. Bellecour. « Je l’ai en poster dans ma chambre ! C’est mon modèle sur le terrain ! Plus tard, je serai à sa place ! », s’enflamme même Adlene, devant ses coéquipiers rieurs de l’équipe des moins de 11 ans (U11), ayant peine à le prendre au sérieux.

Avec leur naturelle insouciance, ils sont beaucoup, comme Adlene, à espérer percer en tant que foot-balleur professionnel. Alors, en ce mercredi de no-vembre enfin ensoleillé, c’est consciencieusement que les U11 et les U13 répètent leurs gammes, sur la pelouse synthétique du stade Sonny Anderson. Certains travaillent leur contrôle du ballon à l’atelier jongles, d’autres leur qualité de tir, tan-dis que les gardiens perfectionnent leur détente. Les éducateurs, qui portent le survêtement rouge du club, mènent les ateliers comme ils l’entendent. Certains se prêtent une allure quasi martiale, afin d’incul-quer rigueur et discipline (« On ne se connaît pas, alors appelle-moi monsieur ! »), d’autres sont un peu plus décontractés (« Bon, on va se ménager les enfants, je me suis fait une mauvaise blessure au dos ! »).

« L’OL avant tout ! »

Toutefois, en observant cette tranquille séance d’entraînement, une

AMBIANCE

« Depuis la dernière Coupe du monde, on

reçoit tous les jours des appels de parents voulant

inscrire leurs enfants, même deux mois après la rentrée.

Et avec l’Euro, ce sera pareil ! »

Jean-Michel Gay

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©JGAL

L’EURO, L’ESPOIR D’UNE GÉNÉRATION

chose frappe : où sont passés les maillots des Bleus ? Sur la quaran-taine d’enfants présents, un seul ose porter le maillot de l’équipe de France, floqué au nom de Pogba. Pour la grande majorité, c’est avec la tunique de l’OL qu’ils s’entraînent. Preuve cruelle d’un désamour total des jeunes pour la sélection nationale ? « Non, pas du tout ! C’est juste que les maillots de la France sont trop chers, alors que dans n’importe quelle braderie, vous trouvez ceux de l’OL, du Barça ou du Bayern

Munich à moins de 50 euros », relativise Jean-Michel Gay, pré-sident d’honneur de l’A.S. Bellecour, 42 ans au club.

L’autre raison, c’est les enfants eux-mêmes qui la donnent. « On préfère l’OL à l’équipe de France. Lyon, c’est notre ville, notre région ! Un derby contre Saint-Etienne, c’est quasi plus important que n’im-porte quel gros match des Bleus. Mais bon, on sup-porte la France aussi ! », assurent Valentin, Hugo

et Killian.

Si le chauvinisme de clocher a donc encore de beaux jours devant lui, les jeunes de l’A.S. Bellecour seront bien à fond

derrière les Bleus pendant l’Euro. « On ira tous au stade voir la France jouer », prévoit déjà Nessime. Un enthousiasme pour l’équipe natio-nale qui pourrait surprendre de prime abord. Parmi ses 120 joueurs, l’école de foot du club lyonnais ne compte pas moins d’une quarantaine d’enfants de nationalités étrangères. « Cela fait partie de notre projet de vie pour le club. Bien que les enfants viennent de milieux sociaux totalement différents, bien qu’ils soient Français, Angolais, Japonais ou Portugais, ils apprennent à vivre ensemble. Et c’est naturellement qu’ils en viennent à soutenir la France lorsqu’elle joue. Même si pour eux, c’est l’OL avant tout ! », analyse Karim Heloula, responsable de l’école du foot. Bien heureusement pour les Bleus, l’Olympique lyon-nais ne disputera pas l’Euro.

A l’école du foot, la jeunesse règne. ©JGAL

Atelier pour les gardiens, conduite de balle, à l’A.S. Bellecour-Perrache, les enfants

s’entraînent comme les grands..

Dans la France du foot, il existe une génération maudite : celle née juste après le triomphe de 1998. Mais bientôt, ces jeunes

enfants vont enfin vivre, avec l’Euro, leur première compétition de grande envergure sur le sol français.

L’attendent-ils avec ferveur ou froideur ? Jérôme Gallo HJ

Page 29: Hj magazine magazine ISCPA Lyon décembre 2014

HJ Décembre 201429

Inconnues il y n’y a même pas cinq ans, leur nom est désormais familier à n’importe quel fan de football : Louisa

Necib, Camille Abily ou Wendy Renard... Elles, ce sont les stars de l’OL et de l’équipe de France. Loin encore de la popularité (et des revenus) de leurs pendants masculins, mais leur notoriété croissante demeure la preuve, simple et concrète, de la volonté de la FFF de féminiser un sport trop longtemps réservé aux hommes. La révolution est déjà bien entamée, mais loin d’être aboutie.

L’Euro tombe à point nommé

Le football féminin demeure un sport de niche : à peine plus de 60 000 licenciées dans toute la France, alors qu’à titre de comparaison, l’Allemagne a dépassé le cap du million de licenciées. Ambitieuses, les têtes dirigeantes du foot français aspirent à atteindre très rapidement la barre symbo-lique des 100 000 licenciées.

Dans ce contexte, l’Euro 2016 tombe à point nommé. Chaque ville hôte va rece-voir une enveloppe rondelette de deux millions d’euros, destinée à soutenir les clubs amateurs (voir page 24). Or, l’essor et le futur du foot féminin passe forcément par ces structures non-professionnelles, où les sections féminines sont encore balbu-tiantes. Reste à savoir si ces sections vont en profiter ou non. Une chose est sûre tou-

tefois : le foot féminin va pleinement profiter de l’euphorie qui entoure un Euro. Assister aux matches internationaux et goûter à sa dose quotidienne de foot donneront sûre-ment des idées à certaines. La Coupe du monde 1998 l’illustre bien. Le FC Lyon, surfant sur la vague de la victoire des Bleus, lança en 1999 sa section sport-étude entière-ment dédiée aux féminines, struc-ture bien rare à cette époque.

Les débuts étaient poussifs, mais le succès se fit finalement connaître. Une réussite qui a attiré l’appétit de l’ogre qu’est l’Olympique lyonnais qui a récupéré la section féminine du FC Lyon dans sa globalité, à partir de 2004, pour le succès que l’on connaît (voir encadré).

Une finale de Coupe du monde à Lyon ?

Mais la FFF voit déjà plus loin que l’horizon 2016. Caché par le tumulte de la Coupe d’Europe, se profile déjà l’Euro 2017 et la Coupe du monde 2019 des féminines, que la France aspire à organiser. Une belle

Jérôme Gallo HJ

preuve d’amour pour nos footballeuses. Toutefois, les chances françaises semblent bien maigres. L’UEFA organise à la fois la Coupe d’Europe masculine et féminine. Et il est bien rare de voir l’instance européenne

gâter un pays au point de lui confier l ’ o r g a -n i s a t i o n

de deux Euros successifs. Concernant la Coupe du monde, Noël Le Graët, président de la FFF, peut croiser les doigts. Jean-Mi-chel Aulas également, qui pourrait voir la finale se disputer dans son Grand Stade.

Mais la Corée du Sud, unique concurrent de la France, part favori dans les pronostics : le Mondial a été organisé en Europe (Alle-magne), il y a à peine trois ans.Le foot féminin français semble donc placé sous les meilleurs auspices grâce aux ef-forts entrepris par la fédération pour rattra-per son retard. Mais les clichés liés à l’image des footballeuses persistent. Et changer les mentalités semble aussi dur que remporter un Euro.

L’EURO AURA UNE TOUCHE FÉMININE

« LE FOOT FÉMININ VA PLEINEMENT PROFITER DE

L’EUPHORIE DE L’EURO »

Depuis que la section féminine du FC Lyon a rejoint le giron de l’OL, la capitale des Gaules écrase le foot féminin. Huit titres de championnes de France et les joueuses de l’Olympique lyonnais ont même remporté deux Ligues des champions (coupe d’Europe), tant espérées par Jean-Michel Aulas. Si les succès de l’OL ont fait beaucoup de bien au foot féminin (au niveau de la médiatisation), un nouvel acteur risque bien de mettre à mal l’hégémonie lyonnaise : le PSG. Le nouveau riche, dans sa stratégie de bâtir un club omnisport solide, mise également sur le foot féminin.

Et les résultats sont là. En championnat, les Parisiennes sont sur les talons des Lyon-naises et, en coupe d’Europe, elle sont même parvenue à les éliminer. Un duel au sommet qui ne présage que du bon pour les prochaines années.

LA LOCOMOTIVE OL RATTRAPÉE PAR LE BOLIDE PSG

La Fédération Française de Football (FFF) vend l’Euro comme la fête de tous

les footballs. L’année 2016 se pose donc comme un nouveau jalon dans

le développement, en mode accéléré, du foot féminin. L’OL, précurseur en

la matière, a bien misé sur le bon cheval.

Les féminines de l’OL, ici à l’entraînement, font partie des rares joueuses à être professionnelles dans le championnat français.

©Gautier Stangret

Page 30: Hj magazine magazine ISCPA Lyon décembre 2014

HJ Décembre 2014

©KC

SOCI

ÉTE Lors de l’Euro 2016 de football, Anthony

Bezombes fera partie de ces supporters qui assisteront à tous les matchs de l’équipe

de France, que ce soit à Paris, Lyon, Marseille, Nice ou Lille. Il n’a que 19 ans et va au stade régulièrement depuis neuf ans. Rencontre.

Kévin CharnayHJ

PORTRAIT

Lundi 17 septembre, veille de match. Karim Benzema, Paul Pogba, Mathieu Valbuena et tous les joueurs

de l’équipe de France s’en vont défier les Suédois en match amical à Marseille. « Ce match a une valeur symbolique pour moi », sourit Anthony Bezombes. En effet, la première fois que ce footballeur du dimanche, la crête fièrement dressée sur le crâne à la manière de ses idoles, est allé au Stade de France pour voir ses héros, c’était lors d’un France-Suède le 9 février 2005. « Je n’avais que 10 ans, c’est mon père qui m’avait emmené. C’était dingue pour moi. Je ne me souviens plus qui avait marqué pour la Suède, un joueur d’Arsenal (Fredrik Ljungberg, ndlr). Pour l’équipe de France je me souviens comme si c’était hier. Un but de Trézéguet sur une passe d’Henry ! », se remémore le jeune homme.

Seulement voilà, cette fois-ci Anthony ne sera pas de la partie malheureusement. « Ce sont les finances qui bloquent en ce moment », confie-t-il. Le passionné travaille actuellement dans une chaîne de restauration rapide pour mettre de l’argent de côté, en attendant de trouver « un vrai métier ».

Son premier terrain de jeu : le Stade de Gerland

Lors de ce fameux match France-Suède, Anthony se souvient aussi d’un homme, « Greg Coupet, le gardien de Lyon, il était titulaire, alors j’étais encore plus impressionné ». Parce qu’avant d’être supporter de l’équipe de France, Anthony est un Lyonnais, un Gone. Son premier match au stade, en 2004, c’était à Gerland pour un Lyon - Le Mans : le score 2-0. Même si le supporter habite à Paris, toute sa famille est lyonnaise. S’en est suivi une passion pour l’OL transmise par son père. « Pour l’instant je ne suis allé au stade qu’en

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IRRÉSISTIBLEMENT SUPPORTER

Anthony n’hésite pas à donner de la voix pour supporter les Bleus.

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Objectif : les déplacements à l’étranger

Au-delà du football, c’est une nouvelle famille que le jeune supporter a trouvée chez les

Irrésistibles Français. Dans les bons ou les mauvais résultats. « C’est là qu’on reconnaît les vrais supporters ». Ce qui est beau avec l’équipe de France c’est l’attente qu’elle procure avec des rendez-vous ponctuels. La différence avec un club est là. « C’est vraiment le groupe qui me fait aimer ce moment au stade ». A chaque match, les membres du groupe peuvent emmener un ami pour lui faire découvrir le kop, et ainsi agrandir la famille.

Seul ombre au tableau, Anthony n’a toujours pas pu faire de déplacement à l’étranger, faute d’argent. « Mais j’économise à fond pour ça. Mon objectif actuel est de mettre de côté pour aller voir Portugal - France le 4 septembre 2015 et Danemark-France. Une amie qui a fait le déplacement en Serbie n’en a eu que pour 150 euros hors billet. Alors ça devrait être abordable. Je ne suis pas prêt de lâcher ». En tout cas, pendant l’Euro 2016, Anthony ira partout où il faudra aller pour soutenir Karim Benzema, Paul Pogba, Mathieu Valbuena et consorts. Quel qu’en soit le prix. « Il y a même un match de l’équipe de France organisé au Vélodrome, je ferai le déplacement, dans n’importe quel stade d’ailleurs, c’est une occasion unique ». Allez les Bleus, on est tous ensemble, la France est debout.

HJ Décembre 2014 31

simple spectateur, mais je rêve d’y aller avec les Bad Gones (les ultras lyonnais, ndlr), pour retrouver encore plus de ferveur, c’est ce sentiment que je veux connaître », explique-t-il.Depuis, Anthony est donc passé au niveau supérieur. Il a assisté à tous les matchs de l’équipe de France qui ont eu lieu à Paris depuis fin 2011 avec un ami à lui. « C’est encore plus fort d’être au stade pour l’équipe de France, de chanter pour son pays. Je suis fan de football et depuis tout petit, c’est une réelle passion. Je me sens Français, alors pour moi ça paraît normal de supporter son pays. C’est logique », explique-t-il.

La rencontre avec Irrésistibles Français

Il y a un peu plus d’un an, Anthony était entraîné par un ami dans une nouvelle aventure : I r r é s i s t i b l e s f r a n ç a i s . Le 11 octobre 2013, il assiste, dans le kop du plus grand club de supporters français, à la démonstration des Bleus face à l’Australie en amical : 6-0. « C’était une ambiance particulière puisque le match avait lieu au Parc des Princes et les supporters parisiens étaient venus pour chanter “Liberté pour les ultras parisiens“ alors que c’était un match de l'équipe de France. Voir cette ferveur bleue et tous ces chants malgré l’ambiance pesante,

c’était exceptionnel. Je n’ai plus jamais décroché ». Grâce à l’association, l’accès au stade est facilité financièrement. Pour s’abonner aux Irrésistibles Français, il faut payer 17 euros par an et ensuite les prix des places sont réduits (15 euros pour le dernier

France - Espagne par exemple, alors qu’il faut débourser minimum 30 euros pour un France Suède moins attractif sans faire parti du groupe). « Mais attention, même s’il y a des avantages financiers, il ne faut pas s’y inscrire pour cela, mais pour chanter !

», précise Anthony. Le plus beau souvenir de sa vie : le fameux France - Ukraine. Le 3-0. Le retournement de situation qui a envoyé

les Bleus au Mondial brésilien. Le doublé improbable du défenseur central Mamadou Sakho. Le 19 novembre 2013. « Un souvenir mémorable. Le plus beau match de ma vie. Je suis tellement fier d’avoir cru en eux et d’avoir assisté à ça dans le kop français. L’ambiance était dingue. Des anciens m’ont dit que c’était encore plus la folie que lors de la Coupe du monde 1998 », se souvient-il, le sourire aux lèvres.

« LA RENCONTRE FRANCE-UKRAINE RESTE LE PLUS

BEAU MATCH DE MA VIE. »

Anthony et ses camarades de l’association supportent l’équipe de France. ©IF

2002 : Le mouvement naît officieu-sement en février lors d’un France-Rou-manie dénué d’ambiance. Deux amis, Fabien et Loïc lancent l’initiative. A l’époque, l’EdF est au sommet, cham-pionne du monde et d’Europe en titre. Irrésistibles Français.

2006 : La première série d’étendard et la première écharpe sont créées juste avant le Mondial. Les Irrésistibles

Français parcourent 11 000 km en car, en 3 semaines, pour voir les 7 matchs des Bleus.

Depuis, les Irrésistibles Français ont participé à tous les matchs des Bleus en France ainsi qu’en Allemagne, Bosnie, Écosse, Lituanie, Slovaquie, Iles Fé-roé, Italie, Ukraine, Espagne, Rouma-nie, Suisse, Autriche, Serbie, Irlande, Afrique du Sud, Angleterre. Seules la

Géorgie et la Réunion ont été manquées pour cause de trop grande proximité avec les Coupes du monde.

2010 : Création officielle de l’asso-ciation le 10 octobre. 10/10/10. Zinédine Zidane aime ça.

Aujourd’hui l’association compte 1 039 adhérents et espère atteindre les 2 000 d’ici l’Euro 2016.

LE GROUPE LE PLUS INFLUENT DE FRANCE

IRRÉSISTIBLEMENT SUPPORTER

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fHJ sur les réseaux sociaux [email protected]!

Driblou/Goalix/Super Victor. Euro 2016 (Le nom définitif sera dévoilé le 30 novembre) Ce sont d’ailleurs deux boîtes lyonnaises qui

ont imaginé le design de cette mascotte. Cette an-née l’UEFA a fait très fort. Les têtes pensantes du football

européen ont inventé une histoire toute mignonne à Driblou. Fils d’un ancien footballeur, Goalix n’a pas le talent de son père. Mais il s’en fiche, ce qu’il veut, c’est « s’amuser et être correct avec son adversaire ». Youpi ! Et ce n’est pas tout, Super Victor a trouvé « un coffret magique très ancien » contenant une cape rouge, des chaussures de foot flambant neuves et le ballon de l’UEFA Euro 2016.

A la clé, des superpouvoirs : voler, inventer des dribbles, et faire jouer au football le monde entier. Didier Deschamps, il nous faut ce mec en équipe de France.

Footix. Coupe du monde 1998. Et toute l’histoire qu’on lui connaît. Une mascotte qui rentre autant dans la légende que le titre de champion. « Sale Footix ! »

Peno. Euro 1984. La première volaille.

LES MASCOTTES DE LA FRANCEKévin CharnayHJ