Histomag N°90

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  • 39-45Histomag LA SECONDE GUERRE MONDIALE PAR DES PASSIONNES POUR DES PASSIONNES - N90 JANVIER-FEVRIER-MARS 2015GRATUIT - ISSN 2267- 0785

    Francois Delpla, Daniel RuelensFrdric Bonnus, Alain Adam . . .

    NU

    MR

    O

    de la Seconde Guerre

    mondiale

    Les intox

  • Histomag est produit par unequipe de bnvoles passionnsdhistoire. ce titre, ce magazine est le premiertrimestriel historique imprimable etentirement gratuit. Nos colonnes sontouvertes toutes les personnes quisouhaitent y publier un article,communiquer des informations, faireune annonce

    Si vous souhaitez devenir partenairedHistomag, vous avez la possibilit decontacter notre rdacteur en chef.

    Responsable ddition : Prosper VandenbrouckeRdacteur en Chef : Vincent DupontConseillers de rdaction : Patrick Babelaere, AlexandreSanguedolce, Frdric BonnusResponsable communication et partenariats : Jean CotrezPremires Corrections : Pierre GuiraudRelecture et correction dfinitive : Vincent Dupont, FrdricBonnus, Pierre Guiraud, Patrick Babelaere, Marc TaffoureauInfographie et Mise en pages : Frdric BonnusRubrique Commmoration : Marc TaffoureauResponsable rubriques : Jean Cotrez

    Numro ISSN : 2267 - 0785

    Contacts :Forum : [email protected] : [email protected] :Forum : http://www.39-45.orgHistomag : http://www.39-45.org/histomag

    Histomag est une publication trimestrielle gratuite du Forum Le Monde en Guerre sous format pdf. Marque, logos, dsignet contenus dposs et protgs. Toute reproduction sousquelque support que ce soit est interdite sans notre autorisationet/ou celle de lauteur concern. Le format pdf est uneproprit dAdobe inc.

    3 Editorial (Vincent Dupont)

    4 Interview de Marie Nancy (Jean Cotrez)

    12 Les manipulations dAdolf Hitler (Franois Delpla)17 Alfred Naujocks une intox pour un prtexte

    (Prosper Vandenbroucke)20 Le guet-apens de Pearl Harbor (Frdric Bonnus)30 Les Panzer-Attrappen (Alain Adam)47 Lintox langlaise (Vincent Dupont)60 Les bombes en bois (Pierre-Antoine Courouble)74 Lopration Greif (Daniel Ruelens)78 Coin maquettiste : le Panther Ersatz M10 (Frdric Bailloeul)

    81 Roger Puybouffat (Xavier Riaud)85 Lunivers concentrationnaire 2eme partie (Lucile Gruwez)98 Coin Bton : lorganisation Todt (Jean Cotrez)107 Ceux qui restaurent : la tamarissire (Jean Cotrez)115 Le coin des lecteurs (Vincent Dupont)

    N 90 JANVIER - FEVRIER - MARS 2015

    Les intox de la seconde guerre mondiale

    La couvertureSur une ide originale de notrerdacteur en chef.Montage de diverses photos etillustrations

  • 3par Vincent DupontEnfin Daniel Ruelens nous prsentera lopration Greif ou com-ment les Allemands maquillrent une de leurs units durant labataille des Ardennes, opration que Frdric Bailloeul sestcharg de nous prsenter quant lui en nous proposant unemaquette du Panther Ersatz M10.

    Bien videmment, outre notre dossier spcial, vouspourrez trouver en deuxime partie, comme laccoutume, nosrubriques hors-dossier , pour continuer de vous faire dcouvrirlhistoire de la Seconde Guerre sous dautres angles thmati-ques. Vous retrouverez ainsi Xavier Riaud qui nous parlera deRoger Puybouffat avant que Lucile Gruwez ne nous prsente laseconde partie de son tude sur lunivers concentrationnaire.Puis Jean Cotrez se penchera sur lOrganisation Todt ainsi que surceux qui restaurent la batterie de la Tamarissire prs dAgde.Enfin nos lecteurs retrouveront, comme dhabitude, la prsenta-tion de quelques ouvrages que la rdaction a jugs bon de vousrecommander.

    Toute la rdaction de lHistomag 39-45vous souhaite une excellente lecture et uneBonne Anne 2015 ! Je rappelle que lHisto-mag 39-45, fier de compter dans ses contri-buteurs des historiens professionnels et despassionns avertis, ouvre ses colonnes tous, y compris et surtout aux historiens dedemain. Donc si vous avez une ide, unprojet, nhsitez pas ! Contactez la rdac-tion !

    Ces mots que je mets aujourdhui volontairement entre guille-mets, furent longtemps dans lesprit dun homme qui a faitbeaucoup pour ce magazine et qui nous a quitts cette anne :Daniel Laurent. Mes premiers articles cest lui qui les apublis, mexpliquant ses exigences et peu peu mapprenantles ficelles du mtier de rdacchef que jallais reprendre aprslui. On peut dire quil a lanc lHistomag au sens o ses efforts

    et ceux de ses "galriens" comme il aimait les appeler enont fait une publication rgu- lire et de qualit.

    Entre deux "coupsde gueule"nous lui de-

    vions beaucoup etnous honorons sa mmoire.

    Comme le vieux Sun Tzu lannon-ait dj il y a prs de 2500 ans,

    , et en effet lutilisationdu mensonge, de la dsinforma-tion, des leurres est encoreaujourdhui lapanage de nom-breuses guerres pour que des vieshumaines soient pargnes voirepour simplement induire en erreurun adversaire afin de le dominer

    dans un rapport de force militaire mais aussi politique oudiplomatique pour la petite histoire au moins jusquedans les annes 1990 on peut trouver ce genre depratiques puisque les troupes de la coalition dcouvrirenten Irak des chars gonflables recouvert dune feuille demtal afin quils soient visibles au radar . Et si les rusesdUlysse ou de Du Guesclin sont devenues clbres, cellesdployes par les belligrants durant la Seconde Guerremondiale le sont parfois moins. Aussi nous avons dcidde nous pencher sur quelques unes dentre elles.

    Voil pourquoi, aprs linterview de Mary Nancyque vous lirez en dbut de numro, vous pourrez dcou-vrir quelques exemples du sujet qui nous intresseaujourdhui : les intoxications, les manuvres de dsin-formation et de dception durant la Seconde Guerremondiale. En premier lieu, cest le cadre de la manipula-tion diplomatique qui sera abord avec les manuvresdHitler par Franois Delpla. Dans la continuit cest lepersonnage dAlfred Naujocks que Prosper Vandenbrouc-ke nous prsentera. Puis Frdric Bonnus nous parlera deMorimura Tadachi et de la prparation du guet-apens dePearl Harbour avant quAlain Adam ne nous livre lessecrets des Panzerattrapen allemands. . Votre ser-viteur tentera de vous rsumer les plansdintoxications britanniques puisPierre-Antoine Couroublenous parlera des bombes enbois sur lesquelles il a tra-vaill depuis longtemps d-

    j.

    Histomag - Numro 0

    Editorial

  • Nous sommes Charlie

    La rdaction de l'Histomag 39-45 rend hommage Charlie Hebdo et ses membres.Que jamais ne meure la libert.

  • La famille Nancy, comme toutes les familles dersistants, tait discrte, pudique et trs taiseusesur le pass de ses hros. Lors du second conflitmondial, ma grand-mre a eu ses trois fils enga-gs dans la Rsistance et la clandestinit(maquis FFI et Corps-Franc Pommis). Lesvaleurs de la Rsistance pour la dfense de laLibert ont accompagn toute mon enfance.Rsistance lenvahisseur pour prserver lasouverainet et lindpendance de son pays etdfendre les liberts citoyennes et individuelles.Du plus loin quil men souvienne, jai t bercepar ces mots, magiques et impressionnants pourune toute petite fille. Des mots prononcs parmes grands-parents, mes parents et leursproches, des mots qui raisonnent encore dansma mmoire et sont intimement lis messouvenirs denfance. Pour autant, lhrosme demon pre, de son frre cadet et surtout celui demon oncle, ntait pas mis en avant chez lesNancy. On disait quelquefois que Jacques avaitt un hros, quil avait fait sauter des ponts, desroutes, des trains

    arie Nancy, ralisatricede tlvision vientdachever le tournage dunfilm sur la vie de son oncleJacques Nancy, hros de la

    rsistance dans le grand sud-ouest.Alors que le film les saboteurs delombre et de la lumire vient justedtre prsent au festival du filmdhistoire de Pessac (33) et sur lescrans de France3 Aquitaine, Mariesest gentiment prte au jeu et a bienvoulu rpondre nos questions.Quelle en soit remercie.

    Histomag 39-45 : Bonjour Marie. Jepense que le mieux pour nos lect-eurs qui ne vous connaissent pasencore est que vous vous prsen-tiez nous. Vous tes ralisatricepour la tlvision, pouvez-vousnous parler de votre parcours etdes films ou documentaires quevous avez dj raliss ?

    Marie Nancy : Je suis en effet ralisatricede tlvision depuis plus de 20 ans. Jairalis de nombreux reportages sur la mer,les pcheurs, les marins, dont certains ontt diffuss dans lmission Thalassa. Je mesuis galement intresse larchologie etaux arts plastiques dans mes films.

    HM : Do vous vient le got pourles choses de la seconde guerremondiale ? Cest lhistoire de votreoncle, Jacques Nancy qui vous y aamen ?MN : La seconde guerre mondiale, la rsis-tance et les maquis mont toujours beau-coup intresse. Toutefois, le fait davoir unoncle qui fut un chef de maquis emblma-tique et un hros de la rsistance a comptdans ma dmarche pour raliser le film

    .

    4 Histomag - Numro 90

    MInterview Exclusive

    Marie Nancy

    MARIE NANCY

    par Jean COTREZ

    interview

  • tout de suite, dans un tat de proximit, decomplicit et mme dintimit avec les maqui-sards de mon oncle. Grce ce climat exception-nel de confiance et de gnrosit, jai pu recueillirdes tmoignages dune relle valeur historique,dune grande intensit et dune profonde mo-tion. Cest cette approche atypique, dintimitavec les acteurs de mon sujet, qui a sduit monproducteur Grand Angle et les responsables deFrance 3.

    Les hommes de la Section Spciale deSabotage, ces baroudeurs des forts dHorte, deBois-Blanc, de Chasseneuil en Charente, maisaussi de Puycharnaud, de Pigut, de Saint-Estpheen Dordogne, attendent depuis 70 ans quonreconnaisse leur rle dterminant de saboteurs deroutes, de ponts, de pylnes, de locomotives et dechemins de fer et surtout de combattants quiont sauv de nombreuses vies, notamment lorsde la Libration dAngoulme, de Saintes et deNiort, faits encore trop peu connus du grandpublic. La ralisation de ce film,

    , sera un vnementmajeur pour leurs familles* et loccasion uniquede rendre lhommage mrit au Capitaine JacquesNancy et tous ces rsistants venus de Poitou-Charentes, du Limousin et dAquitaine pour dfen-dre leur territoire et leur rgion, leur pays.

    5 Histomag - Numro 90

    interviewquil avait risqu sa vie pour librer la France. Onen parlait comme dune histoire vidente, pres-que banale ... Dans ma petite tte denfant, lehros tait la fois un tre normal mais aussimagique par sa force de caractre. Ctait toujoursla fte, lorsque Jacques Nancy et sa jeune femmeMaryse, rsistante elle aussi, venaient chez nous.Jadmirais la beaut de ce couple.

    Jai donc grandi avec lide davoir un oncle qui seconduisit en hros entre 1939 et 1945, jusqu cejour de mai 2007, o son fils adoptif me fitrencontrer en Charente, les anciens maquisardsde la Section Spciale de Sabotage de JacquesNancy. Lorsque ces hommes gs mont racontde manire passionne, drle et tendre - leslarmes au bord des yeux - leurs souvenirs desabotages et de combats sous les ordres de leurcapitaine, dit le Pitaine, le choc motionnel futtrs fort. Jai alors dcid de les revoir pourenregistrer leurs tmoignages et raliser un filmen hommage tous ces maquisards, saboteurscombattants et leur chef. Un hommage prser-vant la plus grande rigueur historique etlindpendance desprit qui me garderont dis-tance dune hagiographie familiale. Le fait dtrela nice de Jacques Nancy ma permis de rentrer,

    Nancy (charpe rouge) et ses adjoints de la section spciale de sabotage

  • De retour Pau, il rentre en contact avec unrseau dpendant du SOE, Section Franaise desservices secrets anglais du Colonel Maurice Buck-master. Ce rseau, tant infiltr par lennemiJacques est recherch, il dcide alors de quitter laFrance par lEspagne afin de rejoindre les ForcesFranaises Libres Londres. Un peu aprs lafrontire espagnole, il est arrt et se retrouvedurant 6 mois au tristement clbre campdenfermement de Miranda. Malgr la faim, lefroid et la vermine, il tient bon et une interventiondiplomatique canadienne, le fait librer. Il peut

    alors regagner Londres, passer les difficiles testsdes FFL Patriotic School et suivre lentranementdans les camps anglais (close-combat, parachut-isme, techniques de sabotages, maniement desarmes, codages dcodages radio ), afin derepartir en mission en France. Les archives desservices secrets anglais tmoignent des interroga-toires et du passage de Jacques Nancy dans leursrigoureux camps dentranement. Nancy est enga-g au BCRA (Bureau Central de Renseignement etdAction) cr par le Gnral de Gaulle et leColonel Passy. En tant quofficier parachutiste etchef saboteur, il est envoy en France en novem-bre 1943 aux cts de Claude Bonnier, DlguMilitaire Rgional de la Rgion B (Aquitaine lar-gie aux deux Charentes et aux Deux-Svres).

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    interviewCertains dentre eux, ont fait le sacrifice hroquede leur vie pour nous pargner la barbarie nazieafin que nous puissions, aujourdhui, vivre libresdans une France souveraine. En tant que ralisa-trice, passeur de mmoire et nice de Jacques,jai le devoir de faire ce film pour sortir ces hrosde lombre et les mettre en Lumire

    HM : Parlez-nous de votre oncle, de sonparcours pendant la guerre et de sonmaquis spcialis dans le sabotage enCharente.

    : Jacques Nancy nat le 12 septembre 1912 Carthage, en Tunisie.Sa famille rentre en France assez vite aprs sanaissance et sinstalle Pau, en Barn.Ingnieur lectricien de formation, trs sportif,Jacques est mobilis le 26 Aot 1940.Envoy sur le front de lAisne, il est fait prisonnier Germonville en Juin 1940. Il connat la duretdes stalags allemands, fait trois tentatives dva-sion. La troisime sera la bonne

    J.Nancy et son quipe en Dordogne

  • En moins de 3 mois, Claude Bonnier et JaquesNancy forment et structurent 70 groupes de com-battants en Rgion B (Deux-Svres, Charente,Charente-Maritime, Gironde, Landes, Pyrnes-Atlantiques). Bonnier et Nancy se sont tout desuite entendus et estims.Dmouvants crits de lun et de lautre en tmoi-gnent dans les archives des services secrets an-glais ainsi que dans les archives franaises duBCRA.

    Mais Claude Bonnier est victime de la trahison deGrandclment et de la jalousie de certains petitschefs de lOCM qui prennent ombrage de sonarrive en Rgion B. Le 9 fvrier 44, Bonnier se

    rend chez son radio Bordeaux pour passer desmessages Londres. Il ne sait pas que celui-ci at retourn par lennemi et quil va le trahir.Bonnier est arrt par la police de Vichy allie laGestapo de Bordeaux. Ne voulant pas prendre lerisque de parler sous la torture, il avale sa pilulede cyanure dans les geles de la gestapo duBouscat, avant mme son interrogatoire parDhose.

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    interview laquelle sont destins Claude Bon-

    nier et Jacques Nancy est infecte par la collu-sion dAndr Grandclment, chef du mouvementrsistant de lOrganisation Civile et Militaire enAquitaine, avec la Gestapo et le pacte signavec le redoutable chef de section de la GestapoBordeaux, Friedrich Wilhelm Dhose.

    Ce pacte consiste en la livraison de cachesdarmes du rseau OCM contre la libration decertains rsistants arrts par la Gestapo et lapolice de Vichy, dirige Bordeaux par NapolonPoinsot.

    Certaines des armes livres par Grandclment laGestapo seront retrouves entre les mains dessoldats de la Division Das Reich qui opra lemassacre dOradour-sur-Glane Dans ce contexte de rgion pourrie, Bonnier etNancy ont pour mission de rassurer, de restructur-er et darmer les diffrents mouvements et r-seaux de rsistance de cette rgion,afin de prparer militairement le dbarquementalli de juin 44.

    maquis reconstitu pour le tournage

  • Le 24 juillet 44, la SSS vient en renfort dun groupede lArme Secrte de Dordogne Nord,la Brigade RAC (mene par Rodolphe Czard, ditRAC), qui rencontre des difficults aux portes dela ville de Nontron, au lieu-dit Javerlhac.

    Les hommes de Nancy se retrouvent face unecolonne de 500 soldats allemands et miliciens,lourdement quips dautomitrailleuses, qui re-montent vers le front de lEst.La colonne se veut punitive, elle a fait savoir saferme intention de faire de Nontron une nouvellecit martyre, car la ville est rpute tre un refugede rsistants.

    A un contre dix les hommes de Jacques Nancylivrent bataille et barrent la route lennemi.Durant cette longue journe de combat, sansperdre un seul de ses hommes, la SSS libre lesmaquisards de la Brigade RAC, empche Alle-mands et miliciens daller plus avant et vite lemassacre de la population de Nontron. Les survi-vants de Javerlhac, rendent unanimement hom-mage au courage, la tnacit et aux qualits destratge du Capitaine Jacques, en ce jour. Labataille de Javerlhac eut lieu un mois et demiaprs le massacre dOradour-sur-Glane Cest un pisode peu connu du public qui comptepourtant parmi les hroques combats de la rsis-tance en Aquitaine.

    8 Histomag - Numro 90

    interview

    Jacques Nancy est recherch (sa tte est mise prix pour 4 millions de francs). Bien plus, il a perduson chef et ses bases. Il rentre alors dans unetotale clandestinit, il cre son propre maquis,une unit de saboteurs et de combattants :

    qui appliquera lalettre les plans militaires de Londres pour accom-pagner le dbarquement des allis (sabotage detrains, de voies ferres, de dpts de locomotives,de pylnes lectriques et tlphoniques, dusinesde cuir, de rsine, destructionsdautomitrailleuses, de vhicules blinds). Maisbien plus important encore que ses spectaculairesactions de sabotage, la Section Spciale de Sabo-tage (SSS) devient lt 44, une unit de com-battants.

    Claude Bonnier, Dlgu MilitaireRgional de la Rgion B

    Jacques Nancy en dcembre 44qui a rejoint le 50me RI

  • HM : Parlez-nous des coulisses du tour-nage de votre film les saboteurs delombre et de la lumire . Vous avez tsoutenue par des entits locales ? Aidepar des associations ?

    : Pour linstant, jai plus reu laide du milieuprofessionnel et celui du milieu associatif que desterritoires Jacques Nancy se battait et rvaitdune France souveraine et solidaire. Il serait dude la voir aujourdhui.

    HM : Sur le blog consacr votre film,on voit pas mal de matriels (armes,quipements, outils ). Comment voustes-vous procur tout ce matriel ?

    : J'ai eu la chance de travailler avec troisassociations de collectionneurs qui interviennentavec leurs propres armes, quipements, vhi-cules, uniformes et vtements de l'poque.

    Ces trois associations sont :

    - Le MVCG Dordogne

    - Le 32nd Field Artillery Battalion and Co

    - Les Oies Sauvages

    Ils sont formidables et sont capables de recon-stituer des accrochages, des combats et la vie desmaquis en clandestinit dans les forts. Ce sont devrais comdiens. De plus, ils connaissent trs bienl'histoire, la vie dans les maquis, les armes utili-ses et les techniques de combats. Je les salue ici,car sans eux et les scnes fictionnelles ralisesgrce leur concours, mon film ne serait pas cequ'il est ...

    9 Histomag - Numro 90

    interviewLe Capitaine Jacques et sesmaquisards ont stopp la colonneavant quelle nexcute son sinis-tre plan. Ils lobligent regagnerAngoulme o ils la traquentjusqu la Libration de la ville, le31 Aot 44. Associe RAC et des maquis FTP, la SSS dlogealors Allemands et miliciens de lacapitale charentaise. Albert Gin,lun des hommes de la SSS, ar-rache le drapeau rouge croixgamme qui flotte sur le toit dela mairie dAngoulme pour yplanter le drapeau tricolore Enfin danne 1944 la SSS rentredans larme rgulire, au

    50me RI.En uniforme de capitaine, Jacques Nancy dirigetoujours ses maquisards devenus des soldats.Ensemble, ils participent au sige et aux longscombats de la poche de Royan, ils librent ainsiles deux Charentes. Puis, intgrs dans larmeRhin et Danube, ils partent pour le front de lEst,poursuivre les Allemands jusqu larmistice demai 1945.

    HM : Quel angle avez-vous adopt pourmettre en image lhistoire de votreoncle et de son maquis ?

    : Jai choisi de raconter la petite histoire

    HM : Est-ce que la mise sur pied devotre projet sest ralise facilement ?En cette anne de commmoration dudbarquement la chose militaire marche bien sur les antennes. Avez-vous bnfici de cette vague dintrt ?

    : La production de ce film a t trs difficile monter. Le film lui-mme a connu des momentstrs durs dans sa ralisation technique et du pointde vue de son criture et de son contenu cratif.Jai serr les dents et les poings car je suis auteuret ralisateur (jcris mes scnarii et je ralise) etheureusement le film existe aujourdhui. Il est trsbien reu par les professionnels (producteurs,diffuseurs, festivals) grce mon quipe et beaucoup de bnvolat et une norme chanesolidaire et amicale Un film, cest toujours uneaventure humaine avec des dsirs, des frustra-tions, des dceptions mais aussi des miracles etdes grands moments de bonheur, de joie etdamiti.

    autre scne de tournage du film

  • .Les missions de Londres doivent redonner espoiren la victoire, la libert et la souverainet de laFrance.Michel Roger Augeard, dans son excellent livre surle rle essentiel de la BBC,

    , estime plus decinquante mille, les messages qui furent ainsienvoys par Londres entre fin 1940 et fin 1944.Depuis que je me suis lance dans des recherchessur la Rsistance en Aquitaine et en Rgion B,Jean-Louis Crmieux-Brilhac a guid, accompagnet orient mon travail de ralisatrice documenta-riste de tlvision.Toujours bienveillant, disponible et lcoute, ilma apport sa connaissance et ses conseils avi-ss avec lgance et gnrosit.

    HM : Au tlphone vous m'avez dit tretrs concerne par le devoir de m-moire. Votre film en est une pour vousune faon de s'y consacrer?

    : Oui, compltement. La rsistance franaiseest un fait unique dans lhistoire du monde. Unpays qui a deux gouvernements : un qui r-siste depuis son exil de Londres et lautre, sur leterritoire national, qui pactise et collaboreoutrancirement avec loccupant. Et entre lesdeux, un peuple de clandestins arms qui dci-dent de ne pas se rsigner, de rsister, de harcel-er lennemi, de soutenir et daccompagner lalibration du pays larrive des allis. Il ne fautjamais oublier ce fait historique unique qui est unesorte de miracle franais !Ce nest pas un hasard si cette configurationpolitique et guerrire trs complexe sestdroule et a russi en France.

    1 0 Histomag - Numro 90

    interviewHM : Cest Jean-Louis Crmieux-Brilhacqui est votre conseiller historique sur letournage de votre film. Vous pouveznous dire quelques mots sur cette per-sonnalit historique ?

    : Jean-Louis Crmieux-Brilhac, est un historienreconnu, rsistant de la France Libre, il a rejointLondres le 9 Septembre 1941. Au printemps 1942,le Gnral de Gaulle le nomme Secrtaire duComit de la Propagande Clandestine. Ses livresdhistorien, notamment sur la France Libre, lesFranais de lAn 40 ou encore les Anglais dans larsistance, sont des ouvrages de rfrence sur lesecond conflit mondial.

    Pour Jean-Louis Crmieux-Brilhac, communiqueravec la France et lEurope grce la BBC, cestrsister. Par la radio, Londres envoie des ordresmilitaires et des missions aux mouvements armsde la Rsistance et des messages de motivationet despoir la population franaise. Les messa-ges secrets et cods, transmis par la BBC larsistance intrieure sont essentiels. Les mis-sions et messages en clair sont tout aussi impor-tants pour la population civile, car ils permettentde la guider, de la mettre en garde en rtablissantla vrit, face aux mensonges de la radio duMarchal :

    Jean-Louis Crmieux-Brilhac

    autre scne de tournage dansles rues de Bordeaux

  • HM : Avez-vous dautres projets de tour-nage en relation avec la seconde guerremondiale ?

    : Oui, jai trois projets en cours, mon prfrserait de raliser une fiction de la vie de JacquesNancy.

    Ci-dessous les dcorations de JacquesNancy :

    - Commandeur de la Lgion dhonneur- Mdaille militaire- Croix de guerre avec 7 citations- Mdaille de la rsistance- Mdaille des vads- Military cross

    1 1 Histomag - Numro 90

    interviewHM : Des fora tels que le ntre font dece devoir de mmoire une de leur pierreangulaire. Quel est votre avis sur lanotion de devoir de mmoire et Internet?

    : Votre travail est superbe et indispensablepour protger, garder et transmettre la mmoirede lHistoire et des histoires humaines justement.Afin de montrer aux jeunes daujourdhui que leshros, les modles, les belles personnalits, lesbeaux destins existent au sein mme de lhistoirede notre pays, la France. De plus la rsistance estune histoire trs proche de nous, moderne etcontemporaine. Nous vivons aujourdhui sur sesacquis fondamentaux, ceux du CNR (Conseil Na-tional de la Rsistance) avec la Scurit Socialepour tous, notre systme de retraite et les valeursdgalit et de solidarit. Il suffit de sy replongerun peu pour le constater Alors pourquoi allerchercher des modles ailleurs ?

    autre scne du tournage au mmorial de Chasseneuil o est inhum Jacques Nancy

  • Alors, cest la guerre ? . Les simples citoyens, dans le monde entier, se sontsouvent pos la question depuis 1933, loccasion de la venue de Hitler au pouvoirpuis dun certain nombre de ses initiatives. Au point que, quand le loup finit parpointer son museau, on ne lattendait plus tout fait. Tmoin lditorial du Figarodu 19 aot 1939, intitul Croquemitaine se dgonflera et sign dun certain PaulClaudel. Dailleurs le conflit devait mettre du temps se dclencher vraiment : drle de guerre , dira-t-on bientt. Cet article vise dgager les mcanismes dela drle de paix qui lavait prcde.

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    Les manipulationsdAdolf Hitler

  • Deux imprvus, encadrant le mois de fvrier, vont

    changer la donne du tout au tout. Le 1er, Hitlerarrache au marchal-prsident von Hindenburg ladissolution du Reichstag, ce qui dcuple limpor-tance et les moyens daction du ministre nazi delIntrieur, tant au plan du Reich (Frick) qu celuide la Prusse (Gring). Surtout, le 27, un incendiecriminel ravage la salle des sances dudit Reichs-tag et Gring en tire prtexte pour mettre lesdirigeants communistes en prison, cependant queHitler obtient de Hindenburg et de Papen mdussun dcret suspendant toutes les liberts. Un dcretprovisoire, bien sr, le temps dcraser le com-plot . Il sera prolong sous diverses formes jus-quen 1945. La dictature a jet le masque sansquon ait eu le temps de la voir venir et encoremoins de sinterroger sur sa politique extrieure,jusque l placide.

    Elle ltait encore laube du 14 octobre suivant.Cest alors que, sous un prtexte lger, Hitlerclaque la porte de la Socit des Nations tout ensoumettant cette dcision au corps lectoral. Ilobtient par l un premier succs dans son ambitionla plus chre : la conversion du peuple allemanden une , une communaut na-tionale. Certes elle nintgre pas encore tous les Aryens et ne sest pas compltement lave deson impuret juive, mais tout cela est en bonnevoie et la priode choisie pour le rfrendum lesouligne : cest celle du quinzime anniversaire dela dfaite de 1918 et du dixime dune tentativeprmature et avorte de revanche, celle duputsch de Munich, brutalement interrompu quandla police avait tir sur un cortge nazi. Les 8 et 9novembre deviennent, partir de 1933, une ftenationale ritualise avec discours de Hitler le 8 ausoir dans la brasserie o tout avait commenc, etcrmonie funbre le 9 devant les tombeaux desmartyrs. Comme les scrutins ont lieu le dimancheet que le rfrendum est organis le 12, linterval-le est marqu le 11, anniversaire du honteux armistice, par un rassemblement des professeursduniversit Leipzig, qui confre au nazisme uneaura de scientificit et une apparence dadhsiondes lites. Le discours le plus clbre est, justetitre, celui de Martin Heidegger, recteur de luni-versit de Fribourg depuis mars et adhrent notoi-re du parti nazi depuis mai. Doctement il expliqueque la sortie de la SDN, loin de signifier la guerre,est le plus sr chemin vers la fraternit des peuples :

    1 3 Histomag - Numro 89

    1) Les premiers leurres

    Lorsque Hitler arrive au pouvoir, il est connucomme le chef dun parti violent et lauteur dunlivre-manifeste plus violent encore, contenant desmenaces prcises contre lURSS, la Pologne et laFrance, assorties dimprcations lgard des lesdirigeants allemands qui avaient reconnu la dfai-te de 1918 et sign, lanne suivante, le trait deVersailles. Oui mais Son gouvernement ne res-semble gure celui que son livre annonait. Sespartisans sont trs minoritaires et tous les porte-feuilles, sauf lIntrieur, sont tenus par des conser-vateurs gs, souvent ministres dans les cabinetsprcdents. La continuit parat lemporter sur lechangement, et le vin nouveau de limptueuxnazisme tre noy sous des trombes deau. Bni-te, qui plus est : le trs catholique Franz vonPapen, vice-chancelier, merge comme le vraipatron et le respectable baron von Neurath seporte, en toute sincrit, garant de la continuitde la politique trangre. Quant larme, quipassait pour ruminer un coup dEtat, voil quellerenonce tout rle politique sous la conduite, enlieu et place dun gnral politicien nomm Kurtvon Schleicher, dun nouveau chef, lui aussi unconservateur dge mr, le ministre de la GuerreWerner von Blomberg.

    Werner von Blomberg

  • Voici donc lAllemagne sortie par surprise de laSDN et son peuple apparemment uni dans cechoix le score de 98% au rfrendum tanttempr par celui de llection du Reichstag,aprs une nouvelle dissolution, sur une liste uni-que qui ne recueille que 90%. Relevons ici unefois pour toutes, dans le cadre de cet article, ladiffrence fondamentale entre le doigt nazi et lalourdeur stalinienne qui, la mme poque, semet en place et ne sait voir en tout citoyen votantcontre le gouvernement quun ennemi irrducti-ble du peuple, traquer comme tel.Un alors cest la guerre ? pourrait suivre, ltranger, ce scrutin. Dautant qu la mmepoque se tient le procs des prtendus incendiai-res du Reichstag et quil semble accentuer lisole-ment du Reich. Ainsi les trois communistesbulgares qui figurent parmi les accuss, dont lefutur prsident Dimitrov, sont acquitts faute depreuves sans tre pour autant librs : le bruitcourt de leur prochain assassinat, qui mettraitlAllemagne au ban des nations civilises ou sevoulant telles. Mais soudain, coup de thtre : le26 janvier 1934, lAllemagne signe un pacte denon-agression avec la Pologne son ennemi leplus vident et, pouvait-on penser, le plus imm-diat. Cest aussi le pays qui la spare de lURSS,quainsi elle ne peut plus attaquer. La sortie de laSDN semble dboucher, comme sous linspirationdu professeur Heidegger, sur la coexistence har-monieuse didentits nationales ! Et le racismeantislave, poutre matresse de aveclanticommunisme et lantismitisme, semblefrapp dobsolescence.

    2) Les manipulations ultimes

    Mais jarrive en vue de la limite du nombre designes impose par Vincent, et il est dj presquetemps de conclure. Je traverse donc dun bond lesannes suivantes, et retombe sur mes pieds dans

    la crise finale de 19392. Elle est symtrique etinverse : une rupture progressive avec la Polognesaccompagne brusquement dun pacte aveclURSS. En vertu dune clause secrte, qui ne lerestera pas longtemps, la croisade anti-slave des-tine assurer au peuple allemand son espacevital sarrtera au beau milieu du territoirepolonais, toutes les contres situes plus lesttant laisses en pture au ci-devant diable sovi-tique, apparemment pour longtemps.

    1 4 Histomag - Numro 90

    Notre volont de responsabilitpopulaire veut que chaque peu-ple trouve et conserve la gran-deur et la vrit de son destin.Cette volont est la plus hautegarantie de la paix entre les peu-ples, car elle se relie elle-mme la loi fondamentale de lattentioncourageuse et de lhonneur abso-lu. Cette volont, le Fhrer lapleinement veille dans tout lepeuple.

    Un dbat binaire sur Heidegger, qui se rveillepriodiquement depuis les annes 1960 et batson plein de nos jours aprs la dcouverte dcrits

    clairement antismites1, voudrait quil ait t nazisoit par accident, soit par la pente naturelle de saphilosophie. Il faudrait dabord se demander ceque cest qutre nazi. Ce nest pas tre linspira-teur du rgime, moins de sappeler Adolf Hitler.Cest, dans tous les autres cas, tre un suiveur,quelquun qui se prte plus ou moins consciem-ment et docilement aux impulsions de celui quidirige en autocrate le mouvement et le pays.

    Martin Heidegger

  • Avant de signer le pacte germano-sovitique, le23 aot, Hitler prend une prcaution remarquable: il fait au ministre anglais Halifax, par le truche-ment du diplomate suisse Carl Burckhardt, com-missaire de la SDN Dantzig, la dclarationsuivante :

    Tout ce que jentreprends estdirig contre la Russie et si lOc-cident est trop bte ou aveuglepour le comprendre, je serai for-c de mentendre avec les Russespour battre lOccident et ensuite,aprs lavoir vaincu, de me tour-ner contre les Sovitiques avectoutes mes forces rassembles4.

    Lauteur de cette dclaration capitale va doncensuite ngocier au pas de course son pacte avecStaline, puis avancer la date de loffensive contre

    la Pologne (primitivement prvue le 1er septem-bre) au 26, puis adresser un contrordre lanouvelle, le 25, de labstention italienne et dun

    trait anglo-polonais, puis rtablir la date du 1er etsy tenir. Pendant la dernire semaine, il a amusla galerie par des amorces de ngociations avecla Pologne (il fait mme courir le bruit quil secontenterait dun couloir ferroviaire et routier travers le corridor !), tout son comportementmontrant quil voulait bel et bien la guerre, et quilsavait parfaitement que tout rglement de laquestion de Dantzig par les armes lui vaudraitune dclaration de guerre franco-britannique.Aujourdhui encore, un grand nombre dhistorienscrivent que Hitler esprait que les dmocratiesoccidentales molliraient au dernier moment, com-me lpoque de Munich, bref quil avait encore de la marge avant de les fcher srieusement.Cest tout fait exclu car il les avait triplement etsciemment exaspres, par loccupation de laTchcoslovaquie le 15 mars 1939 en violation desaccords de Munich, puis par le pacte germano-sovitique, enfin par une agression contre toute laPologne au lieu davancer uniquement sur Dant-zig.

    1 5 Histomag - Numro 90

    Cest un affrontement avec lOuest franco-britan-nique qui semble se dessiner alors que depuis1933 le Reich faisait la cour lAngleterre tout enignorant la France mais en jurant que les passa-ges antifranais de taient le fruitdune ancienne colre, oublie depuis des lustres,et en proclamant que la question de la Sarre,rgle en 1935, marquait la fin de tout conten-tieux territorial avec Paris.

    Quelle impression Hitler cherche-t-il alors don-ner ? Celle dun pacifiste, encore et toujours. Il nerevendique que Dantzig et son corridor, vieillesterres allemandes arraches la chair de la patrieen 1919 pour donner un dbouch maritime aunouvel Etat polonais. Or il a dclar ses gn-raux le 11 avril quil les lancerait contre la Pologne

    le 1er septembre, moins que ce pays lui ait cd

    Dantzig et le corridor3. On peut remarquer ici unecontradiction : il devrait suffire doccuper ce terri-toire, frontalier et de faible tendue, et dattendrede pied ferme une tentative de reconqute. Pour-quoi sen prendre lensemble de la Polognesinon dans une logique tout autre, celle de lespa-ce vital et du ? Les gnraux,rompus la pdagogie nazie, peuvent aismentle comprendre mais ce nest pas dit. Ils restentlibres de croire que la guerre naura pas lieu, ouaura des objectifs trs limits. Le camouflage nazi,cest aussi cela : lintoxication des ministres et desdirigeants, civils et militaires.

    Carl Burckhardt

  • NOTES :1 Cf. Trawny (Peter), , Paris,Seuil, 2014.

    2 titre de prface, et de lien avec le forumhttp://www.39-45.org/viewtopic.php?f=42&t=40654&p=522061#p522061dont ce magazine est le prolongement, un mot sur la crisede Munich en septembre 1938. Le journal de lAmricainWilliam Shirer, et son livre sur le Troisime Reich paru vingtans plus tard, apportent une grande lumire sur un bruit quicourait au sujet de Hitler : il se serait mis, devant la conduitedu prsident tchcoslovaque Bens, dans de tels tats decolre quil aurait mordu les tapis. Or lorigine de ce bruit esttrs prcisment localisable et datable : ce sont des journa-listes nazis qui Godesberg, le 21 septembre au soir, sesont mis traiter devant Shirer le Fhrer de Teppichfres-ser (bouffeur de tapis) et un rdacteur en chef soi-disantantinazi qui lui a expliqu ce terme. Le lendemain, dans lasalle manger de leur commun htel, Hitler en personneest pass deux fois devant Shirer en faisant montre dungrand tat de nervosit. Le coup, qui a bien lair davoir tmont par quelque quipe occulte, tait fort utile poursuggrer que Hitler ne faisait pas monter avec matrise unetension pour se faire attribuer les Sudtes sans guerre, maistait dpass par la situation et avait grand besoin dtrecalm par la sagesse de Chamberlain.3 Cf. Hubatsch (Walther),

    (Directives dHitler pour la conduite dela guerre), Francfort-sur-le-Main, Bernard & Graefe, 1962, p.19-22.4 Ce propos est tenu la fin dune longue conversationHitler-Burckhardt, le 11 aot. Le Suisse en fait un compterendu oral dtaill, le 13, des reprsentants diplomatiquesde la France et de lAngleterre, en omettant cette dernireet surprenante communication du chancelier . Il donne decette omission, dans ses mmoires, la raison suivante,cousue de fil blanc : Elle semblait aussi irrelle quunehallucination. Ce qui ne la pas empch davoir quel-ques jours plus tard loccasion de transmettre ce surprenantpropos lord Halifax directement . Cf. Burckhardt (Carl),

    , Paris, Fayard, 1961, p. 388-389.

    1 6 Histomag - Numro 90

    Sil voulait se faire dclarer la guerre par la Franceet lAngleterre, ctait pour craser la premire. Ildevrait le faire vite, pour provoquer le retraitanglais de la guerre et pouvoir, enfin, se tournervers lest. Cest ce mode demploi quil donne Londres, et seulement Londres, par linterm-diaire de Burckhardt. Mais il le fait sa manire :il se fait fort de battre lOccident , cest--direla France et lAngleterre ensemble. Ainsi le mes-sage ne sera pas pris au srieux et ne gnera paslentre en guerre. Mais un rendez-vous est prispour la chute de la France. LAngleterre aura puconstater pendant toute la drle de guerre etencore pendant les combats en France que lAlle-magne la mnageait, ne la bombardait pas, negnait gure sa marine etc. Ainsi rassure elledevrait, devant des conditions gnreuses , sersigner la perte de son alli franais et mettrefin une guerre sans espoir.Cest ainsi quAdolf Hitler, aprs avoir rvl sesintentions dans , est parvenu lesmasquer et faire croire quil improvisait enpermanence, sous leffet de ses nerfs et destiraillements de son entourage. Et cest ainsi quilentre en guerre au moment choisi par lui contredes adversaires mal prpars qui, de surcrot, vontsimaginer que lAllemagne ne lest pas mieux,na pas de plans et va se trouver en mauvaiseposture du seul fait de leur dclaration de guerre.

    Chamberlain dup par Hitler

  • 1 7 Histomag - Numro 90

    Alfred NaujocksUne intox pour un prtexte

    Station Radio Gleywitz

    ard dans la soire du mardi 31 aot 1939, les auditeurs tant lcoute de Radio Gleiwitz,une station-radio situe la frontire germano-polonaise (ct allemand) entendirent que leprogramme musical fut interrompu et que des voix allemandes annoncrent que le territoireallemand tait envahi par des forces polonaises.Aprs une brve coupure, la station reprit les missions mais en langue polonaise, tout en

    exhortant la minorit polonaise de Silsie de prendre les armes contre Adolf Hitler.Pendant ce temps, radio Kln (Cologne) annona que des attaquants polonais taient repousss par lapolice allemande.Il nen fallut pas plus Adolf Hitler, qui cherchait une excuse, pour faire envahir la Pologne par ses

    troupes, le lendemain 1er septembre 1939.

    T

  • Simultanment, des ordres furent transmis Nau-jocks. Ses hommes devaient attaquer la station-radio, dtruire le btiment de douane allemandeet, le plus important, occuper brivement lastation et diffuser des slogans anti-allemands.

    Aprs avoir fait cela, les Polonais devaient seretirer non sans avoir laiss quelques morts surplace.Pour faire plus vrai les corps de prisonnierspolitiques allemands (tus auparavant par desinjections) furent laisss aux alentours, cribls deballes et revtus de luniforme polonais.Il est un fait certain quHeinrich Mller, le chef dela Gestapo, avait contribu cette mascarade.Aprs cette opration les Allemands menrentdes membres des corps diplomatiques et desjournalistes sur les lieux afin de pouvoir fournir lapreuve dune agression polonaise.Quant Naujocks, il fut galement impliqu danslaffaire de Venlo (une autre excuse pour justifierlattaque des Pays-Bas) et il fut galement impli-qu dans lopration Bernhard laquelle consis-tait faire fabriquer par des prisonniers politiquesdu camp de Sachenhausen de fausses coupuresdargent anglais.Aprs avoir t ject du S.D. pour dsobis-sance, il rejoignit les rangs de la Waffen-SS. En1943, il fut envoy sur le front de lEst et en 1944il se trouvait en Belgique comme administrateurconomique.

    1 8 Histomag - Numro 90

    Que stait-il donc droul ?Il a fallut attendre le procs de Nuremberg pouravoir des claircissements prcis de la part duStrmbannfhrer Alfred Naujocks.

    En fait, toute laffaire avait t monte par laGestapo (Geheime Staats Polizei) et le S.D. (Siche-rheitsdienst) afin de fournir une excuse AdolfHitler au sujet du climat de suspicion quant auxrelles intentions de la Pologne.

    Naujocks, n le 20 septembre 1911, devint unmembre officiel du Amt IV (Sicherheitsdienst -service de scurit) et un proche de ReinhardtHeydrich. (Il aida dailleurs ce dernier fabriquer,de toutes pices, des preuves compromettantesdmontrant la trahison du marchal sovitiqueTukhachevski, lequel fut jug et excut lors desterribles purges staliniennes davant guerre.

    Seulement, revenons-en laffaire de la stationde radio de Gleiwitz.Ds juillet-dbut aot 1939, Naujocks reu de lapart de Heydrich des informations concernant leplan dnomm Operation Himmler et ds le 10aot des hommes de Naujocks taient piedduvre prs de la frontire germano-polonaiseafin de monter une attaque bidon contre lastation allemande.A 04h00 du matin, en ce 31 aot, lordre dinva-sion fut donn et les troupes allemandes firentmouvement en direction de la frontire polonaise.

    Naujocks et Heydrich (assis)

    Intrieur de la Station de radio

  • http://info-poland.buffalo.edu/web/history/WWII/1939/Gleiwitz.shtmlhttp://www.origo.hu/tudomany/tortenelem/20140831-masodik-vilaghaboru-kezdete-nemetorszag-lengyelorszag-gleiwitz-radioallomas.htmlhttp://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Naujocks#mediaviewer/File:Alfred_Naujocks.jpghttp://www.findagrave.com/cgi-bin/fg.cgi?page=pv&GRid=67047739&PIpi=51361446

    1 9 Histomag - Numro 90

    Il dserta et se rendit aux amricains en octobre1944 mais parvint schapper du camp deprisonniers de guerre. Aprs la guerre il stablicomme homme daffaire Hamburg et fut sus-pect davoir collabor avec Otto Skorzny etlorganisation ODESSA afin de collecter des fondset de faux papiers pour permettre danciens SSde senfuir vers lAmrique du Sud.La station-radio de Gleywitz (actuellement Gliwi-ze en Pologne) comportait deux metteurs longues ondes et tait situe dans la Funkstrasse(actuellement rue Radiowa)

    Alfred Naujocks

  • i un jeune officier Japonais, devenu espion, n'avait pas observ avec soin lesbases d'Hawa, le dsastre de Pearl Harbour aurait-il eu lieu ? On peutpiloguer sans fin sur ce problme et reconstruire l'histoire en imagination. Entout cas, le point de dpart certain de l'offensive qui fit basculer les tats-Unisdans la guerre se trouve bien dans les renseignements que ce japonais rcolta

    et transmit ses chefs. Voici la longue et secrte prparation du raid qui fit entrerbrutalement les tats-Unis dans la seconde guerre mondiale.

    2 0 Histomag - Numro 90

    Le guet-apensde Pearl Harbour

    S

  • Il tait sorti de l'Acadmie navale en 1936 et avaitt nomm enseigne de vaisseau de 2 classe.Peu aprs, malade, il avait d demander un conget passer sa convalescence dans son village deShikoku. Pour s'occuper, il fit la connaissance d'unmissionnaire amricain qui vivait prs de sonvillage et il apprit l'anglais. Rtabli, il reprit duservice. Il fut bien not, si bien mme qu'un jour,le contre-amiral Saki le fit appeler et lui conseillade passer le concours du ministre des Affairestrangres.Il russit, et, par accord de la marine et desAffaires trangres, il fut dcid que, dornavant,il sappellerait Morimura Tadashi. Cette prise d'unpseudo, lui expliqua-t-on, tait

    . C'estainsi qu'aprs trois ans passs au ministre desAffaires trangres Tokyo, il avait t envoy Hawa.Les randonnes en voiture autour de l'le donn-rent peu de rsultats, car les bases amricainestaient gnralement assez loignes des gran-des routes.Le flirt avec la petite bonne fut un peu plusprofitable car, il s'avra trs vite que le F.B.I. avaitmoins de soupons en face d'un couple d'amou-reux se promenant l'entre de la rade de PearlHarbour que lorsqu'il rencontrait un diplomatejaponais pchant la ligne en face de navires deguerre.Mais ce furent surtout les geishas qui lui servirent,car Morimura prit l'habitude de prouver ses inten-tions l'gard de ces demoiselles en leur faisantfaire, dans des avions de tourisme, un circuitautour de l'le.Aprs trois mois de ces promenades galantes, ilse faisait une ide nette de la configuration d'Oa-hu et de Pearl Harbour, et, un jour de juillet, unpeu prtentieusement, il mit dans la valise diplo-matique un rapport sur la nationalit des et qui tait, en fait, une bauche de plan d'atta-que de Pearl Harbour.

    Possible, mais risqu C'est ce rapport qu'attendait Tokyo le vice-ami-ral Onishi, chef d'tat major de la 11 escadrenavale. Depuis la fin de fvrier, Onishi avait tcharg secrtement par l'amiral Yamamoto, chefde l'escadre navale, de prparer un projet d'atta-que aronavale de Pearl Harbour.C'est pour la prparation de ce projet que levice-amiral Onishi avait fait envoyer Morimura Hawa. Pour l'aider sur place, il avait fait gale-ment verser secrtement son service le capitai-ne de corvette Genda, un jeune, mais un as del'aviation maritime japonaise.

    2 1 Histomag - Numro 90

    Le 26 mars 1941, un jeune japonais dbarquait Hawa. Il s'appelait ; Morimura Tadashi, il tait gde vingt-huit ans. Aprs avoir jet un coup dilsur son passeport diplomatique, l'officier de scu-rit amricain qui canalisait les arrivants le laissaimmdiatement passer. Dehors, une voiture duconsulat gnral japonais de Honolulu l'attendait.Morimura tait un nouvel attach que Tokyo avaitdpch pour faire une tude juridique sur lanationalit des enfants japonais ns Hawa (onles appelle des ). Il y avait trois ans qu'ilappartenait au ministre des Affaires trangres,et il apprit langlais.Le chef de poste, le consul gnral Minami, lereut et le prsenta officiellement tous lesmembres du consulat. Puis Morimura effectua satourne de visites dans quelques consulats desautres nations. Il ne s'inscrivit aucun club, et,comme il paraissait peu enclin la vie de socit,on l'oublia.

    Promenades GalantesQuelques temps plus tard, ceux mmes de sescollgues qui le connaissaient le mieux ne sa-vaient de lui que ceci : il tait travailleur et il avaittrois habitudes : il faisait des randonnes enautomobile rapide autour de l'le d'Oahu, il nour-rissait un faible pour une jeune bonne nisei de dixneuf ans qu'il avait prise son service, et ilfrquentait les geishas d'un restaurant japonaisinstall mi-hauteur de la colline dominant l'en-tre de la rade de Pearl Harbour.A ce moment l, les relations diplomatiques entrele Japon et les tats-Unis n'taient plus ce que l'onappelle courtoises. Des deux cts, on se sur-veillait, on s'espionnait. Le consulat gnral japo-nais de Honolulu tait on le savait le centred'activits du Renseignement japonais Hawa.Il avait de l'argent, le dpensait largement, et,cependant, l'exception de quelques racontars demarins et de vagues informations achetes, iln'avait jamais recueilli grand-chose.Pourtant, pour Tokyo, le temps commenait presser. C'tait justement pour cela que Morimuraavait t envoy Honolulu. C'tait lui quel'Histoire destinait le surnom de l'

    .En ralit, Morimura ntait qu'un de ces militairesfaux diplomates que le gouvernement japonaisplantait depuis des annes dans tous les postesdiplomatiques trangers. Son vrai nom taitYoshikawa Shigeru.

  • Depuis que l'on avait rorganis la marine japo-naise en crant notamment une premire escadrearonavale que l'on prvoyait devoir tre dotede quatre porte-avions, Fukudome assurait unedes principales directions de l'tat-major de lamarine.En fait, depuis deux ans, l'escadre japonaise taittransforme de fond en comble. Entre la concep-tion classique d'une escadre comptant surtout surses cuirasss et ses gros canons et une Task Forcearonavale dont la force tiendrait surtout sesavions embarqus, le Japon venait de choisir.Aprs des annes de discussions techniques, Ya-mamoto avait gagn. Il avait impos la formule l'amricaine : des avions plutt que des groscanons et, dans son tat-major, il avait peu peu remplac tous les classiques par deschampions de l'aronavale.

    2 2 Histomag - Numro 90

    Quand Genda vit le rapport de Morimura, il l'tu-dia soigneusement. Cela prit quelques jours. Aprsquoi, il donna son avis : possible, mais risqu .

    Aussitt, Onishi et Genda rdigrent un projet l'intention de l'amiral Yamamoto. Dix jours aprs,quand il fut termin, on l'imprima quelquesexemplaires et il fut broch sous une couverturebleue et intitul

    .Parmi les destinataires, outre l'amiral Yamamotoet son chef d'tat-major le vice-amiral Ugaki, setrouvait le chef du service stratgique de la mari-ne, le contre-amiral Fukudome. Celui-ci en reutmme deux exemplaires.

    Carte des vagues aeriennes

  • Dans les plans classiques, on n'avait jamais envi-sag une attaque contre Pearl Harbour. Cela nevoulait cependant pas dire qu'on n'y avait jamaispens. Les jeunes Turcs, Fukudome et Kusaka enparticulier, s'y attachaient, mais l'opposition s'ac-crochait quatre arguments principaux qui pour lemoment taient rests sans rplique :

    1 Pareille attaque au dbut d'une guerrereprsentait un trop gros risque ; 2 La distance entre le Japon et Hawa est vol d'oiseau de 3000 miles ; 3 L'opration exigeait d'tre couverte parle secret le plus absolu ; 4 Toute l'lite de la marine japonaise

    devait risquer dans cette seule aventure lesort de toute la marine japonaise.

    C'tait contre cet ensemble d'ides reues queKusaka avait lutter.Le problme qui se posait n'tait pas simple, bienque son principe reposa sur la thorie de laconcentration des forces, qui lui tait chre depuisson enfance. Dans un rapport qu'il avait fait dutemps o il tait l'Acadmie navale, Kusaka sesouvenait d'avoir crit :

    Le Japon tant un petit pays, pauvre en matirespremires, ne peut envisager une guerre longue.Pour ces raisons et aussi pour rpondre lamentalit profonde de son peuple, le Japon nepeut concevoir qu'une attaque-surprise effectueavec le maximum de forces de destruction avantmme que l'ennemi soit prt

    2 3 Histomag - Numro 90

    C'est ainsi que le contre-amiral Kusaka avait tnomm chef d'tat major de cette premire esca-dre aronavale qui, pour beaucoup de pontifes,constituait encore l'lphant blanc de l'escadre.Nomm, Kusaka rentra au Japon pour faire sesvisites aux diffrents membres de l'tat major.Et quand Kusaka, au cours de ses visites, pntradans le bureau de Fukudome, il vint en ami.Kusaka et Fukudome avaient toujours marchcte cte. Camarades de promotion l'Acad-mie navale, ils taient, vingt cinq ans plus tard,tous deux contre-amiraux et faisaient partie decette quipe de jeunes Turcs des Task Forces.Pendant qu'ils parlaient, Fukudome ouvrit un ti-roir, en retira quelques papiers et il plaa devantKusaka un exemplaire de la fameuse petite bro-chure bleue.Kusaka n'y fit pas attention tout de suite. Puis, la faveur d'un silence, il se pencha sur la brochurepour lui donner un coup d'il. Le titre en grosseslettres le fit sursauter. Fukudome le regardaitfixement.Lisez-donc cela soigneusement, dit-il. Rentr son bord, sur le porte-avions Akagi, Kusaka seplongea dans sa lecture. Il fut du. Vraiment, onne pouvait estimer que le contenu de la brochurejustifit son titre.C'est tout au plus un tat des forces amricaines Hawa, dit-il Fukudome lorsqu'il le revit. On nepeut vraiment pas dire que c'est l un plan d'atta-que.Fukudome sourit et Kusaka reprit : Avec cettebrochure, on est incapable de rien faire.Justement, dit doucement Fukudome, vous allezprparer vous-mme un plan d'attaque. C'est toutce que l'on voulait vous demander.

    Un plan rvolutionnaireLa mission de Kusaka tait un sacr casse tte.Jusque l, il tait de tradition qu'en temps de paix,chaque anne, la marine japonaise prpart unplan stratgique. Rgulirement, ce plan taitprsent l'Empereur, qui s'en dclarait satis-fait ; puis, il tait class aux archives et, tous lesans, la chose se rptait. Quelques mois plus tt,le plan de l'anne courante avait subi le sorthabituel.

    MINI SOUS-MARIN

  • On demanda Morimura de serrer ses renseigne-ments. Pour Morimura, l'ordre arrivait un mau-vais moment, car le gouvernement amricain

    venait, depuis le 1er aot, d'interdire les relationsentre Hawa et le Japon ; d'autre part, depuisquelques temps, les cbles du ministre des Affai-res trangres de Tokyo semblaient peu srs et lasurveillance du F.B.I. s'tait intensifie.La promenade avec la petite bonne nisei le longde la plage, les baignades pour reprer laprofondeur des fonds n'taient plus des sourcesde renseignements suffisantes ; surtout depuis lejour o, ayant travers la nage un bras de mer,Morimura tait venu atterrir en face de trois F.B.I.qui pique-niquaient avec leurs familles. De cetemps-l, il avait mme eu des doutes sur lafidlit

    2 4 Histomag - Numro 90

    Cela, c'tait la thorie, c'tait aussi la tradition dePort-Arthur et d'un certain nombre d'assautsmoins fameux. Kusaka tait certain que l'amiralYamamoto tait favorable au projet. Mais, commeYamamoto, titre d'ancien attach naval Washington, connaissait bien les Etats-Unis, nour-rissait un grand respect pour la puissance amri-caine et se montrait trs rticent l'ide de selancer dans une guerre du pacifique, il fallait pourque l'amiral Yamamoto le considre, que le planprpar par Kusaka soit absolument sans fissure.

    L'espion fanatique de pcheIl importait d'abord de complter les informationssur Hawa.

    SOUS-MARIN DE POCHE

  • - o serait l'escadre ennemie au moment del'attaque ? A Pearl Harbour ou au mouillage deWaianae ou mme en manuvres dans le sud ?D'aprs Morimura, l'escadre rentrait gnrale-ment Pearl Harbour le samedi soir pour laisserle dimanche libre aux quipages.

    - Comment pourrait-on entraner des quipagesd'avions torpilleurs qui auraient attaquer dansune baie entoure de hautes chemines ?

    Quand son projet fut achev, Kusaka en discutaavec le contre-amiral Onishi, qui, lui aussi, tait unde ses amis depuis qu'il avait t son ancien l'Acadmie navale. Entre Onishi et Kusaka, il yavait, de plus, la solidarit des commandantsd'aronavale. Pour la discussion du projet Kusaka,Onishi joua le rle de l'opposition, une oppositionqui prvoyait toujours le pire. Pourtant, aprsquelques heures, Kusaka parvenait le convaincre.A la condition d'en accepter le risque, le projet neme parat pas prsenter de faiblesses, dit enfinOnishi. Tout ce qui vous reste faire est del'exposer devant l'amiral Yamamoto.

    Il faut convaincre le grand chef de laflottePour cela, Kusaka dut passer par la voie hirarchi-que et obtenir au pralable un certain nombred'autorisations.Ces autorisations obtenues, Kusaka alla voir Ya-mamoto, accompagn d'Onishi. Kusaka, son opus-cule bleu ses cts et son plan personnel devantlui, commena parler. Sur le bureau de Yama-moto, il y avait une grande carte du Nord-Pacifi-que et une autre des les Hawa.2 5 Histomag - Numro 90

    de la petite bonne.Aprs quelques jours de repos, il se dcida prendre des risques. On tait au moment de larcolte des cannes sucre ; il se dguisa enouvrier philippin et se fit embaucher par un fer-mier habitant non loin de Pearl Harbour. De l,tout en coupant les cannes, il put reprer lespostes de mouillage des navires. Aot fut em-ploy ce travail.En septembre, il devint fanatique de la pche prsde Diamond Head, juste en face de Pearl Harbour ;puis il fit la connaissance d'un nisei qui le fitembaucher comme plongeur dans les cuisinesd'un torpilleur amricain, avec lequel il partit enmanoeuvres dans le sud.Pendant ce temps, Kusaka ne chmait ps. Il avaitpos son problme mthodiquement en classantles difficults. Trois apparaissaient comme majeu-res. En quelques jours il avait dj mis en placedes lments de rponse :

    1 Le secret il fallait prvoir une croisire de3000 miles sans rencontrer de navire ennemi, oumme alli. La difficult devait naturellementcrotre au fur et mesure que l'escadre d'attaqueapprocherait d'Hawa, o, sans doute, les hydra-vions amricains patrouilleraient dans une zonede 600 miles autour des les.Les services spcialiss avaient fait des tudes surles diffrentes zones maritimes du pacifique etavaient dcouvert qu'aux environs du 40 parall-le nord, aucun navire n'avait t signal pendantla saison d'hiver des quinze dernires annes.Il devenait donc possible d'envisager une appro-che le long du 40 parallle nord jusqu' 800miles de Hawa, avec, ensuite, en profitant de lanuit et en marchant toute vitesse, la possibilitd'arriver jusqu' 200 miles d'Oahu, d'o l'on lan-cerait l'attaque arienne.

    2 le ravitaillement en haute mer. Enhiver et dans ces conditions atmosphriques diffi-ciles, il ne fallait pas prvoir plus de dix pour centde chances de ravitaillement, mais le problmene lui paraissait pas insoluble.

    3 L'utilisation des effectifs. Morimuraavait estim que les Amricains devaient avoirentre 500 et 1000 appareils sur l'le d'Oahu. Ilfallait donc que l'attaque dispose d'au moins 350avions, c'est dire que la Task Force devait comp-ter 6 porte avions. C'tait l les difficults essen-tielles ; mais il y en avait d'autres :

    Takeo Yoshikawa alias

    Morimura Tadashi

  • La discussion se poursuivit encore un moment surun certain nombre de points techniques. PuisYamamoto se tut. Il se leva, fit quelques pas. Pasun trait de sa figure ne bougeait.Les membres muets de cet entretien regardaientson visage clbre par son flegme. N'tait-ce pascelui du meilleur joueur de poker et de bridge detoute la marine ?Yamamoto arriva derrire Kusaka. Et, tout d'uncoup, il le prit aux paules.- Kusaka, j'ai bien compris. A partir de maintenant,je n'aurai pas d'autre souci que de faire aboutir ceprojet.Les risques taient accepts. On tait la fin Aot.

    Le curieux paquebotL'entretien termin, Kusaka rentra son bord surl'Akagi. Son expos souleva l'enthousiasme. Dslors, la Premire Escadre aronavale avait unsecret : prparer le plus gigantesque guet-apensde l'Histoire. Son action serait la clef de toutes lesoprations.Le 13 septembre, on apporta sur l'Akagi unemaquette en relief de cinq mtres carrs de l'led'Oahu. Immdiatement, Genda l'tudia avecsoin. La Premire Escadre aronavale allait grossirde semaine en semaine.Des mutations se produisant tous les chelonspeu de temps aprs, on y retrouvait tous lesbottiers des diffrentes promotions de l'cole na-vale.Soudain, Yamamoto convoqua Tokyo tous lescommandants d'escadres et les principaux mem-bres de leurs tats-majors. La runion eut lieudans la salle de stratgie de l'cole navale. Yama-moto leur soumit une srie doprations effec-tuer sur carte. Le thme de la manuvre taitune attaque aronavale japonaise contre les for-ces anglo-amricaines du Pacifique et du sud-estasiatique.Le dbut des oprations fictives eut lieu avec tousles officiers convoqus comme participants, mais,pour l'attaque de Pearl Harbour, on ne retint queles officiers dj mis dans le secret.Yamamoto tait joueur. Mais, dans la circonstan-ce, il voulait laisser au hasard le moins de chancespossible. C'est pour cela qu' la mi-octobre, lecapitaine de vaisseau Suzuki, le plus jeune detoute la marine japonaise, fut mis en cong etmut sur un paquebot, le Taiyo Maru, qui devaitse rendre Honolulu, non pas en empruntant laroute ordinaire, mais en suivant le 40 parallle des vitesses donnes, en faisant des contrles devents, de pression atmosphrique, de roulis et detangages, des possibilits de lancements d'avionset d'hydravions, de celles de mazoutages en mer pour finalement arriver Hawa en y redescen-dant par le nord.

    2 6 Histomag - Numro 90

    Pour pouvoir russir une attaque de Pearl Harbourpar action aronavale, commena Kusaka, il fautYamamoto l'interrompit :- Kusaka, faites attention, vous n'tes ni unepartie de poker, ni un championnat de bridge.Souvenez-vous que vous vous trouvez devant uneaffaire extraordinairement srieuse.Kusaka reprit son expos qui dura prs de deuxheures.Quand il eut termin, il y eut quelques minutes desilence. Yamamoto griffonnait quelques notes. Ilpassa ensuite aux questions :

    - D'o partira l'escadre ?Kusaka tourna un feuillet de son rapport.- Il me parat trop risqu de concentrer la flottedans un port militaire. Or, comme la croisire doits'effectuer le long du 40 parallle, le meilleurlieu de rendez-vous me semble devoir tre la baiede Tankan, dans l'le d'Eterofou. L'endroit, peufrquent, est une grande baie peu favorable aumouillage pendant l't, mais qui, en hiver, profi-te d'une mer calme. Je le connais pour y tre alllorsqu'avec mon escadrille nous avons effectudes manuvres dans les Kouriles.

    - Comment la flotte pourra-t-elle s'yrendre ?L'escadre qui pour le moment est disperse travers tous les ports militaires du Japon, devra yprocder secrtement en lanant de faux messa-ges radio.

    - O et comment s'effectueront les exer-cices ariens ?Jusqu'ici Genda s'en occupe, mais je propose quel'on fasse rappeler sur l'Akagi le capitaine defrgate Fuchida, qui fut mon chef d'aviation em-barque lorsque je commandais l'Akagi... Lesexercices pourront avoir lieu dans la rgion deKagoshima, o l'on dispose d'une rade troiteborde de hautes constructions, qui reproduitassez exactement les conditions de Pearl Harbour.Il est d'ailleurs ncessaire que cet entranementsoit men de la faon la plus intensive.

  • Au cours de sa premire visite, Minami reut duchef steward Nakajima une enveloppe destine Morimura seul de tout le consulat japonais,Minami connaissait la vrit sur son subordonn.Cette enveloppe contenait une liste de 97 ques-tions, dont les deux premires taient :

    - O l'escadre amricaine manuvre-t-elle ?Rponse : A 500 milles au sud, car, au nord, la merest trs souvent dmonte et les manuvres ysont difficiles.

    - Quels sont les mouvements des avions pa-trouilleurs amricains pendant la journe et pen-dant la nuit ?

    - Existe t-il des filets anti-sous-marins ?A cette question, Morimura rpondit non . Cefut sa seule erreur.

    Le lendemain, lenveloppe contenant les rponsestait remise. Deux heures plus tard, le Taiyo Marulevait l'ancre.

    2 7 Histomag - Numro 90

    C'est un bien curieux navire que touchait le com-mandant Suzuki ; ses passagers et son quipagetaient tous des officiers d'tat major dguiss. Lechef steward, un capitaine de corvette, n'taitautre que l'as du renseignement de la marine etl'un de ses seconds, le capitaine Iwasa, allait, unmois et demi plus tard, conduire la flottille dessous marins de poche.La venue du Taiyo Maru tait une grande affairepour Morimura. Les semaines qui la prcdrentfurent pour lui des semaines d'activit fbrile etd'autant plus difficile que les rapports nippo-am-ricains taient tendus l'extrme.Le Taiyo Maru arriva Honolulu le 4 novembre.L, les autorits amricaines en interdirent tousles dbarquements et ne permirent de monter bord qu'au consul gnral Minami. Le navire nedevait demeurer en rade que deux jours.

    LE USS Shaw GRAVEMENT ENDOMMAGE

  • - Il n'existe pas de filets anti sous-marins !Alors Yamamoto accepta en disant :- Les avions seront la lance de l'attaque et lessous-marins en seront le poignard.

    A la mi-novembre, tout tait par. Le contreamiral Nagumo, le timide, qui n'avait aucuneexprience de l'aronavale, ni mme de l'aviati-on, se trouvait avec six porte avions et leur escor-te d'une cinquantaine de btiments, la tte dela plus puissante Task Force qui et jamais trassemble jusque l. Il ne restait plus qu' appa-reiller.Le 18 novembre, presque tous les sous-marinsquittrent le Japon.

    Le dpart de l'aventureLe 1er novembre, tous les commandants d'unitsde la premire escadre aronavale taient runisdans un des btiments de la base arienned'Iwakuni, prs d'Hiroshima. Le vice-amiral Ugaki,chef d'tat major de l'escadre, qui prsidait larunion, expliqua ce que le Japon attendait del'action de la premire escadre.- Une flotte gigantesque, dit-il, est concentre Pearl Harbour. Celle-ci sera anantie d'un seulcoup ds le dbut de la guerre. Si nos planschouaient, notre marine devrait subir la honte dene plus jamais se relever. Pour nos ennemis, PearlHarbour doit tre le Waterloo de la prochaineguerre C'est pour ces raisons que la marineimpriale a runi l'lite de ses btiments et de sesavions dans la premire escadre aronavale. Nousvoulons tre srs du succs. Il tombe sous le sens que, mme si l'normemachine industrielle amricaine se met immdia-tement construire des navires, des avions et dumatriel de guerre, il lui faudra plusieurs moispour mobiliser contre nous toutes ses forces.Donc, si nous nous assurons de la suprioritstratgique ds l'aube des hostilits, en attaquantet en nous emparant immdiatement de toutesles positions importantes avant que les Amri-cains ne soient prts, nous pourrons, par la suite,faire pencher le destin en notre faveur. Le cielsera le tmoin de notre combat.

    2 8 Histomag - Numro 90

    Derniers prparatifsA Tokyo, depuis la veille, le haut commandementde la marine avait pris la dcision d'attaquer PearlHarbour. On avait fix l'attaque au 8 dcembre.Pour Kusaka, il restait bien des problmes r-soudre.Il avait fait tous ses plans en comptant sur 350avions d'attaque, c'est dire sur six porte-avions.Or, voil que l'arme le chipotait sur ses porte-avions.- La premire escadre aronavale ne comporteraque 4 porte-avions, dcrtait l'arme de terre.Kusaka eut beaucoup de mal la convaincre.Puis, pour ses six porte-avions et leur escorte,Kusaka rclamait de six huit ptroliers de grostonnage. L encore, il se heurta aux pires difficul-ts. Alors que la date de l'attaque tait djdcide, on n'arrivait pas trouver les ptroliers.Or, il fallait encore les modifier et leur faire proc-der une ou deux manuvres.Puis, il y avait la double question des sous-marins.Pour les sous-marins de types normaux, on d-membra la sixime escadre, opration qui enfournit une trentaine.En ce qui concerne les sous-marins de poche, leproblme se compliquait beaucoup.Ces sous-marins de poche taient la marotte decertains marins.Depuis 1940, un groupe d'lite d'une dizained'hommes faisaient, sous le commandement ducapitaine Iwasa, des manuvres prs de l'leShikoku bord de ces bateaux et, pleins denthou-siasme, avaient dress des plans d'attaque desprincipales bases trangres, et notamment dePearl Harbour.Kusaka n'aimait pas cette ide d'attaque par sous-marins de poche. Yamamoto non plus d'ailleurs.Lorsqu'il avait vu, pour la premire fois, le planpropos par Iwasa, il l'avait refus. Puis, sur l'insis-tance d'Iwasa, il l'avait accept, la condition queles sous-marins n'entrassent pas dans le port etque l'on pt les rcuprer.Plus tard encore, comme Iwasa revenait lacharge en demandant l'amiral que sa flottillepntrt dans Pearl Harbour, Yamamoto refusa nouveau. Et on en tait rest l jusqu'au dbut denovembre, jusqu' ce que le Taiyo Maru eutregagn le Japon avec, son bord, Iwasa quibrandissait la rponse de Morimura la 97question :

  • Sources :

    2 9 Histomag - Numro 90

    Le 17 novembre, il y avait eu rcidive, mais, cettefois, la runion avait lieu au cercle naval de Kur.L'assistance tait un peu plus nombreuse. Lescommandants des torpilleurs et des sous-marinsy assistaient.On remarquait surtout cinq jeunes officiers accom-pagns de cinq sous-officiers, que l'on prsentacomme les membres de la mission spciale dessous-marins de poche chargs de pntrer jus-qu'au cur de Pearl Harbour.A la fin de la runion, on cria les trois traditionnels Banza - Vive L'Empereur

    Le lendemain, l'aventure commenait, on en con-nat la suite !

    yamamoto

  • 3 0 Histomag - Numro 90

    Les Panzer-Attrappen

    ous ne reviendrons pas ici lorigine des chars factices, qui se situe en faitquelques mois aprs lapparition des rels chars lors de la premire guerremondiale, ni ne nous intresserons aux modles dentranement produits parlAllemagne, mais nous allons nous concentrer ici sur les circonstances quiont amen les forces Allemandes user de matriel de dception sous forme

    de Panzer-Attrappen, au sein de leurs units. Bien loin de lutilisation allie de charsSherman gonflables lors de lopration Fortitude, et dans une vise de dsinforma-tion stratgique (mais ce ne sont en fait pas les premiers le faire comme vous le lirezplus loin), les Allemands avaient opt pour une utilisation tactique de ces matriels, envue dintimider lennemi ou, en les positionnant judicieusement, forcer les forcesblindes ennemies sexposer un feu antichar trs bien dissimul. Il sagit ici dundtail de lhistoire des blinds, qui trouve ses origines sur le front Est durant lanne1943

    N

    Achtung Panzer !!! (Photo prise dans les Steppes Russes enneiges.Il sagit en fait dune structure en bois sur laquelle est pose une toile peinte. Source NARA)

  • - Avec toile tresse et tendue sur des struc-tures en bois. Une peinture de char ralis-te, et lchelle, tait effectue sur latoile. Les structures taient prpares etles toiles taient peintes sur les arrires, etle tout tait transport par camion jus-quau front, qui venait dposer le tout, etce dernier tait alors assembl sur place.

    De la dsinformation Lutilisation pouvait tre sur les arrires et dans unbut stratgique, au sein de grandes formations dedsinformation, destins tromper les units dereconnaissance de la Luftwaffe, comme parexemple sur des trains complets, o les faux charsntaient pas dissimuls. Ces trains se trouvaientparfois en gare sur les arrires des armes, pourtromper les forces allemandes sur le potentielmilitaire des forces sovitiques. Ces forces taient dplaces dans la nuit dans le milieuenvironnant, afin de simuler le dbut dun dbar-quement de forces blindes.

    Par exemple, en dcembre 1942, un train de fauxchars, situ dans la gare de Tscherwlennaja (nordCaucase), a t dbarqu et les faux chars ont tpositionns au nord-ouest de la gare, lgrementdissimuls avec des arbres et arbustes ou posi-tionns dans des clairires (afin de rester visiblespar reconnaissance arienne).

    3 1 Histomag - Numro 90

    A lEst du nouveau

    Lutilisation de faux chars sovitiques ont tobservs depuis lt jusqu lautomne 1943, etensuite plus intensment en dcembre 1943 etjanvier 1944.

    Ils ont t utiliss au sein du 4e front ukrainien

    (secteur de Nikopol), du 2e front Ukrainien (sec-

    teur de Kirowograd) et du 1e front Ukrainien(secteur de Perejasslaw-Winniza).Des chars sovitiques factices seront capturs lorsdoprations dinfanterie utilisant les techniques Tuschung und Tarnung (1)

    .

    Plusieurs types de faux chars auront t ainsitrouvs :

    - structures de contreplaqu ou de cartonpais avec les cotes de blinds rels.Cependant recrer un vritable char est ladifficult, mais les structures de contrepla-qu taient bien camoufles. On retrouve-ra des systmes de roues sur certainsexemplaires afin de pouvoir mieux lesdplacer.

    Du bois sous le T34 ! Source NARA

  • Et de lattaque Dans un but offensif, les sovitiques utilisaient lesfaux chars de trois faons diffrentes :

    La premire consistait attirer les forces de d-fense et de colmatage Allemandes, tout commele support arien ou dartillerie, dans une zone one se trouvait aucune force vive. Un grand nom-bre de faux chars ont t construits dans ce rlepar le gnie sovitique, qui avait pour rle degarder et dplacer ces matriels vers les endroitsqui le ncessitaient. Par exemple, en janvier1944, dans le secteur de Bjelaja-Zerkoff laube,des faux chars ont t dplacs sur des carriolestractes par des chevaux et positionns. Ce nestque du fait que le commandement sovitique napas termin son installation et camouflage que lasupercherie a t dcouverte.

    Autre exemple, lest de Winniza, la reconnais-sance arienne allemande a localis une forteconcentration de blinds Russes. Une attaque parStuka a t mene et ce seront finalement 30camions portant de faux chars qui seront dtruits.

    3 2 Histomag - Numro 90

    De la dfense Les sovitiques utilisaient galement ces fauxchars dans un but dfensif, sur les fronts statiques.

    - Pour simuler une occupation plus puissan-te dun secteur.

    - Attraction de troupes Allemandes dans unpige.

    En gnral ces units taient positionnes lgre-ment en retrait de la ligne de front (3 km) etdisposes comme lauraient t de vritableschars.Dans certains cas, dfaut de carton et de bois,les russes utilisaient parfois des bottes de paillequils amnageaient sous forme de blind russe.Par exemple, en novembre 1942, les sovitiquesont simul une concentration blinde au suddIscheskaja (Caucase du sud), du jour au lende-main, en utilisant de la paille. Ces units ont tidentifies en tant que chars par la reconnaissan-ce de la Luftwaffe, avant que des units dereconnaissance terrestre ne dvoilent la super-cherie.

    T34 en bois et paille/herbe source NARA

    KV1 sur camion Source NARA

  • Une nouvelle arme secrte pourcombler les dficits de production.

    Ltat major Allemand dcide donc en avril 1944de distribuer des instructions et mode demploi ses units, qui fabriqueront elles-mmes les pan-zer-attrappen.En fonction du temps et des troupes disponibles,ainsi que du matriel, peuvent tre construits 8modles diffrents, du plus primitif jusqu unmodle trs perfectionn. La simplicit des mat-riaux et des instructions taient cependant demise. Chacun des modles finis taient visibles lcole dinstruction des troupes blindes de Ber-gen.Lutilisation de panzer-attrappen effectue par lessovitiques ayant eu plusieurs fois du succs (ycompris dans des rles majeurs de dsinforma-tion) un court manuel sur les utilisations possiblesest joint aux instructions de fabrication. Le groupedarmes centre effectue alors des essais, et doitrendre compte de cette premire exprience auxautres groupes darmes par la suite. Les premiersmanuels de montage sont donc transmis vers lesunits. Une centaine de manuels sont ainsi distri-bus sur toutes les units du front Est, maisgalement sur le front Ouest et en Norvge (voirannexe 1).

    3 3 Histomag - Numro 90

    La seconde utilisation tait de dissimuler lespoints de ruptures viss lors dassauts blinds, etdattirer les forces Allemandes au mauvais en-droit. Par exemple, en dcembre 1943, une re-connaissance arienne Allemande a identifi uneforte concentration de blinds dans la tte depont de Perejasslaw. Lors dune attaque effectuepar Stuka, les pilotes se sont rendus compte queles blinds volaient littralement en lair outaient plis du fait de la pression de lairdgage par les explosions de bombes. Par lasuite, les restes de 45 50 faux chars ont tidentifis, les vritables blinds stant engagsdans le secteur de Kiev.

    La troisime utilisation tait de faire croire unassaut blind sur un point donn (alors quilnaurait pas lieu), en fabriquant sur place un grandnombre de faux chars. Par exemple, le 26 janvier1944, une unit du gnie sovitique a fabriqu 80attrappen, spars en 4 groupes, dont les posi-tions semblaient dterminer une attaque trsprochaine.

    Pour identifier les faux chars Russes, les Alle-mands avaient finalement dtermin plusieursindices :

    - Pas de traces de chenilles proximit deschars, ou des pistes de camions unique-ment.

    - Les blinds sovitiques taient pratique-ment toujours protgs par des units deDCA, ce qui ntait pas le cas des faux chars.

    - Les faux chars taient le plus souvent noncamoufls et en terrain ouvert.

    - Les faux chars taient en position station-naire de jour et neffectuaient de mouve-ments quau crpuscule.

    La Russie a donc travaill de plus en plus avec desfaux chars, dissimulant ainsi ses vritables inten-tions. Une analyse Allemande de mars 1944concluait, quen tenant compte des points per-mettant lidentification des panzer-attrappen (ci-dessus), il convenait den user afin de tromper son tour lennemi.

    Crdit photo NARA Le matriel prsent sur cette pho-to nest pas dcrit dans le prsent article et correspond lautre grande utilisation des chars factices. Il sagitdun faux T-34 motoris par une chenillette Renault dis-pose lavant, et reposant sur des roues davions lar-rire. Dcouvert dans un centre dinstruction, il semblequil fut utilis pour lentranement au tir avec Panzer-faust, de nombreux lance-roquettes de ce type ayant ttrouvs au mme endroit. Ce type de char factice seraabondamment photographi, que cela soit par les Allisou par les Allemands eux-mmes lors dexercices das-sauts de chars par linfanterie.

  • 3 4 Histomag - Numro 90

    Panther-Attrappen IV dcouvert en France, visible dans lIn-telligence bulletin Vol III n04 de decembre 1944. Pour lesdeux photos, droits rservs.

  • 3 5 Histomag - Numro 90

    Instructions dutilisation des Panzer-Attrappen- La gamme de Panzer-Attrappen actuelle est un excellent moyen de tromper lennemi sur nos forces et

    pouvant le mener raliser des oprations totalement inutiles.

    - Lutilisation peut tout aussi bien tre grande envergure pour tromper la reconnaissance arienne,tout comme trs limit, dans un rle tactique.

    - Pour bien tromper lennemi, on doit veiller sapprocher au plus prs de la ralit telle quelle auraitt, si le blind ntait pas factice. Par exemple le camouflage vis vis des oprations ariennes doitrester plausible, afin que les Panzer-Attrapen ne soient pas identifis comme tels. Plus la prcisionapporte sera minutieuse, plus les chances de succs seront grandes.

    - Pour parvenir une reprsentation raliste, il convient de prter attention :

    1) Le positionnement de troupes blindes relles sur un site de Panzer-Attrape complique la recon-naissance et la distinction ennemie, condition de ne pas ngliger de crer de fausses traces demouvement pour les blinds qui ne sont pas rels. Une attention particulire doit tre mene pourcrer ou modifier les traces de blinds. On creusera ces dernires ou lon utilisera un vhicule. Lesdimensions respecter sont, pour un Panzer V (Panther), de 1.90m de large pour une largeur dechane de 66 cm et de 2.00 m de large et 38cm de largeur de chaine pour un Panzer IV. Toutes lespistes doivent tre parallles et il faut faire attention les mener jusqu' un point sortant du champde vision (entre en fort, sur une route, dans une ville). Il convient, lorsque les traces traversentdes broussailles ou un champ de crales, de les coucher dans le sens de circulation du faux blind.

    2) Les Panzer-Attrapen doivent tre positionns en plein air, comme le seraient de vritables chars.On doit faire en sorte que lexposition soit suffisante pour identifier le matriel, mais pas sensible-ment diffrente de ce qui se ferait habituellement. La mthode dinstallation dans la dfense de 2 5 Km en arrire de la ligne de front, doit seffectuer sur des positions de rsistance possible(forts clairsemes, buissons, champs de bls ou villages). Il ne faut pas positionner un blindfactice devant une rivire sil ny a pas de pont sur son arrire, et il faut prendre garde ne pas leplacer sur un terrain meuble qui ne pourrait supporter sa masse. Les panzer-attrappen doiventtous tre en direction de lennemi. Distances et espaces entre chacun doivent se situer entre 25 et50 mtres.

    3) On ne doit pas hsiter utiliser des estafettes pour simuler un trafic, et ventuellement positionnerdes troupes en uniforme noir pour simuler une activit.

    4) Les faux groupements peuvent inclure des variables, comme des dtachements de Flak, pourfavoriser le bluff. Des sacs de sable et autres positions protges amliorent encore la situation.

    5) Il faut utiliser les camouflages de vgtation comme on le ferait sur de vritables chars pourdissimuler le tube du canon et la superstructure du char, tout comme utiliser les marqueshabituelles de blinds avec la peinture blanche adquate.

    6) Lorsque des chars ennemis sont reprs, il faut dissimuler les panzer-attrappen en lisire de fort/ de champs (espace entre 30 et 50m). Des faux tubes de canons (de 75mm) mobiles et rsistantsau feu sont pratiques dans cette situation, si les panzer-attrappen sont dtects tt.

    7) On utilisera des barils dhuiles uses auquel on mettra le feu pour simuler les gaz dchappement.La modification des positions est effectuer dans la nuit (avec un bruit de moteur), le jour enutilisant un brouillard artificiel. Il ne faut pas que les panzer-attrappen tombent trop rapidementdans les mains de lennemi.

    8) La reprsentation acoustique de bruits de blinds via des haut-parleurs a augment limpressiondauthenticit chez ladversaire. Le temps de marche doit tre denviron 4 minutes par blind,pour simuler un mouvement.

  • 3 6 Histomag - Numro 90

    Les Diffrents modles

    Pas moins de huit modles diffrents seront vali-ds par ltat-major Allemand. Quatre modles (I IV) seront bass sur le char moyen Panther(Panzer V), deux sur le char Panzer IV (V et VI), etdeux sur lautomoteur casemate Stu.Gesch. 40(VII et VIII).Pour chacun des types de blinds, la moiti desmodles seront prvus pour tre statiques ( MlesII , III , VI et VIII ) et lautre moiti auront lapossibilit dtre dplacs ( Mles I , IV , V, VII ). Lesmodles mobiles sont en gnral tracts par uncamion, deux chevaux, ou vingt-cinq hommes, surde courtes distances, afin de les repositionner ensuivant lvolution du front, ou les instructionsdemploi. On adoptera, dans certains cas et pourdes distances un peu plus longues, des roues enbois ou en mtal venant se placer sous le charfactice.

    Crdit photo NARA. Panzer-Attrappen dcouvertpar la 9th US Army a proximit dun aroport,en 1945. Il sagit selon toute vraisemblance dunmodle V sur lequel ont t places des roues enmtal.

    Le Panther-Attrappen nI tait fabriqu en plan-ches de bois (2 mtres cubes de planches) cloueset boulonnes. Dune nature trs perfectionne, ilncessitait 40 heures de travail, pour une quipede six personnes, dont trois charpentiers, ainsi quedu matriel de charpentier (scie ruban par exem-ple)

    Mobile. 240 heures/hommes.

  • 3 7 Histomag - Numro 90

    Le Panther-Attrappen nII tait constitu detiges de bois, de feuilles de carton et de plan-ches, coules et attaches avec du cble. Ilncessitait une quipe plus nombreuse que lepremier modle (12 personnes pendant 26 heu-res), pour rcolter et tailler le bois.

    Statique. 312 heures/hommes.Le Panther-Attrappen nIII, est dun typebeaucoup plus basique et se constitue debranches et troncs darbres taills, clous etmaintenus avec du cble. 2 charpentiers et 4assistants taient employs sa constructionpendant une dure de 15 heures. Sa particula-rit est de ne prsenter que lavant et le hautde caisse du char.

    Statique. 90 heures/hommes.

  • 3 8 Histomag - Numro 90

    Le Panther-Attrappen nIV est constitu deplanches et tiges de bois de diffrentes tailles,qui seront clous, agrafs et maintenus par descbles. Ce modle sera peint et on utilisera lavgtation proche pour constituer un camoufla-ge raliste. Sa ralisation ncessite 15 person-nes pendant 13 heures.

    Mobile. 195 heures/hommes. Le Panzer-Attrappen n V (type Panzer IV) estdune facture assez simple et est constitu detiges et planches de bois cloues, agrafes etmaintenues par des cbles. 5 hommes serontncessaires sa fabrication pendant 15 heu-res.

    Mobile. 75 heures/hommes.

  • 3 9 Histomag - Numro 90

    Le Panzer-Attrappen n VI (type Panzer IV) estplus perfectionn que le modle prcdent, etncessite des tiges de bois, de la toile, ducarton, la partie infrieure dun vieux barildessence, des traverses de chemin de fer, et dela vgtation environnante pour constituer soncamouflage. Le tout sera clou et maintenu pardes cbles. 1 charpentier et 7 assistants serontncessaires sa ralisation, pendant 14 heures.

    Statique. 112 heures/hommes.

    Le Panzer-Attrappen n VII (type StuG. 40) estconstitu de bois et de carton, agrafs, clouset maintenus par du cble. 1 charpentier et 6assistants sont ncessaires sa ralisation,pendant une dure de 26 heures.

    Mobile. 182 heures/hommes.

  • Et quand on na pas le temps On neconstruit quune tourelle !De multiples exemples existent ou les Allis ontt confronts de fausses tourelles, la structuredu char ayant peine t bauche, et parfoismme pas du tout. Dans lIntelligencebulletin davril 1944 (n8 de lanne 1944), lesAllis dcrivent un emploi de fausses tourelles,positionnes de faon simuler la prsence dunblind. On peut supposer aussi que certaines deces tourelles furent dposes mme le sol, afinde simuler un blind enterr ou une tourelledfensive, ainsi que les Allemands en em-ployaient. (Voir page suivante)

    4 0 Histomag - Numro 90

    Le Panzer-Attrappen n VIII (type StuG. 40) estconstitu de tiges de bois, de vieilles planches,de cartons et est assembl laide de clous etde cbles.2 charpentiers et 5 assistants doivent travailler28 heures pour sa ralisation.

    Statique . 196 heures/hommes .

    Droits rservs. Panzer IVAttrapen particuli-rement travaill au niveau des dtails, selontoute vraisemblance du modle VI statique.

  • 4 1 Histomag - Numro 90

    Extrait de lIntelligence Bulletin dAvril 1944

    Droits rservs. Fausses tourelles et faux canons anti-chars en bois dcouverts, par larme Britannique, dansla cour dune ferme le 21 aout 1944, proximit de Liva-rot (Normandie).

  • Le Panzer-Attrappen sera de tous les fronts, et parexemple dbut juin 1944, les forces Allies trou-veront un groupe de 8 Panzer-Attrappen statiquesderrire la ligne Adolf Hitler, en Italie.Alors que les Allis auront plutt vou leurs charsfactices une stratgie de dsinformation strat-gique, et quen gnral ils tenteront de dissimulerles chars par tous les artifices possibles plutt quede montrer une formation de chars, fusse-t-ellefactice, lAllemagne a quant elle pens unemploi tacti-que de cesmatriels.

    Si Rommelavait bientent cegenre de d-sinformationdans le sec-teur de To-brouk , en plaant des superstructures de char enbois sur des Kubelwagen , on retiendra cependantque lide initiale dun emploi en tactique decombat tait Russe, pas Allemande, mais que cesderniers ont apport toute une srie de consigneset recommandations , afin de rendre le blindplus raliste et ainsi mieux tromper lennemi .Enfin, mme si les piges tendus ont certaine-ment fonctionn quelquefois, les Panzer-Attrap-pen nauront t, finalement, quun dtailmconnu et sans grande consquence sur lissuede la seconde guerre mondiale.

    4 2 Histomag - Numro 90

    Un emploi limit, avec quelques rsul-tats

    Peu de documentation synthtique a t trouvesur les fabrications de chars factices. On saitcependant que le 6 juin 1944, 200 structures dePanzer-Attrappen ont t commandes, sur destypes Sturmgeschutz, Panzer IV et Panther (le

    rapport parle ausside modle Tiger ,or aucun plan duntel type de char fac-tice na t retrou-v). Chaque groupedarmes sur le frontEst devait recevoir11 exemplaires (soitun total de 44), tout

    comme le groupe D situ en France. Lachve-ment tait prvu en 3 semaines, mais aucuneinformation na t trouve sur la livraison relleou non de ces matriels, et ce quil advint des 145exemplaires placs en rserve. Au lendemain dudbarquement en Normandie, et du fait des car-nages effectus par les Jabos , les Allemandscommencent connatre une pnurie de matrielblind sur le front occidental.Les troupes Allemandes emploient alors les Pan-

    zer-Attrappen, etde rels matrielsantichars, de fa-on, en utilisantjudicieusement leterrain, forcerles blinds Allis(qui cherchent atteindre leschars factices) se positionnerdans une situa-

    tion pige que les canons antichars Allemandsexploiteront.De multiples escarmouches, bases sur la ruse etaboutissant la destruction de quelques blindsallis auront lieu durant les deux premiers moisde combats en Normandie. Suite loprationCobra, le recul des forces Allemandes vers lestsera trop rapide pour que de tels stratagmespuissent seffectuer nouveau, jusqu' la stabili-sation du front, aux portes de LAllemagne, ou unnouvel emploi a certainement t effectu sur leslignes dfensives.

    Photos : Deux exemplaires de Panther-Attrap-pen, en vue de face et de ct, dcouverts parles britanniques en France en 1944. Probable-ment Modle IV gauche et Modle II droite.Droits rservs

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    Annexe1 - Distribution des manuels de Pz-Attrappen

  • 4 4 Histomag - Numro 90

    Annexe 2 - Extraits de plans de Panzer-Attrapen.

    Plan de tourelle du Panzer-Attrappen no I Source NARA

    Plan de structure du Panzer-Attrappen no VIII Source NARA

  • 4 5 Histomag - Numro 90

    Annexe 2 - Extraits de plans de Panzer-Attrapen.

    Plan de structure du Panzer-Attrappen no V Source NARA