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AFDERS Confidences N°65, Janvier 1997 9 ______________________________________________________________________________________ HISTOIRE D'UNE REALISATION Préliminaires L'histoire commence en octobre 1990. La lecture de la revue "L'Audiophile" m'avait laissé penser beaucoup de bien du tweeter Technics 5HH10. Une réalisation décrite dans le N°6 de cette revue (Septembre 1989) mettant en oeuvre ce tweeter en liaison avec un large bande Triangle T17FX et un HP de grave Focal Audiom 12V avait attiré mon attention. En octobre 1990, donc, la Maison de l'Audiophile effectue une promotion sur ce tweeter. L'occasion faisant le larron, je m'en porte acquéreur. Ce même automne, au Salon du Kit, Davis Acoustics présente son kit Kristel, faisant appel au fameux large bande 20 TK8. Beaucoup de finesse et de clarté, comme l'indiquait le compte-rendu paru dans AFDERS Confidences N°29 (Janvier 1991). Je me suis dit que ce large bande se marierait très bien avec un tweeter à chambre de compression, avec certainement moins de rupture dans les diagrammes de directivité qu'avec un tweeter classique. En outre, le TW26K2F, qui était associé au 20TK8 dans l'enceinte Kristel, était réputé pour être plus performant dans le haut-médium que dans l'extrême-aigu (cf. N°9 du journal des Créations Acoustiques de France). En automne 1992, j'ai eu l'occasion de m'offrir ce haut-parleur 20 TK8, ainsi d'ailleurs que les HP de grave 20SCA8 à des conditions intéressantes. Ce choix me permettait, si mes développements aboutissaient à une impasse, de me replier sur un kit connu, et qui ne marchait pas si mal. Les risques étaient donc limités. Ce choix était également dicté par le bon sens: à moins de bénéficier d'une large expérience, il est préférable de débuter par une réalisation faisant appel à un large bande de haute qualité, qu'il suffit d'appuyer dans le bas et dans le haut, sans coupure dans la zone de sensibilité maximale de l'oreille. En janvier 1991, je m'offrais le logiciel Calsod, version 1.20 auprès de Euterpe Audio. Il tournait sur PC XT, mais à la fin de l'année 1991, le passage à un portable 286 avec Coprocesseur et disque dur permit une accélération significative des calculs (dans un rapport 15 à 20!). J'ai rendu compte dans le N°57 des simulations de filtrage réalisées avec ce logiciel. Au forum du kit d'octobre 1992, je découvrais le logiciel Boxcalc (cf. A.C. N°41, janvier 1993) que je m'empressais de commander auprès de Pink Noise, à Bruxelles. Ce logiciel a été présenté dans le N°44 de juillet 1993. Lors du Salon Son et Images 1994, un jeune importateur, D. Emonts, animateur de la société Euphonie Audiotechnic, nous rendait visite sur le stand de l'Afders, et devenait membre de notre association. Il voulut bien me faire parvenir pour évaluation une version de Netcalc, logiciel de filtrage (cf. N°57), et je me suis procuré par son intermédiaire un système de mesure Kemsonic piloté par ordinateur (cf. N°51, septembre 1994), dont le prix avait été significativement revu à la baisse depuis le salon du Kit 91. Ainsi équipé, il était possible de passer aux choses sérieuses. Premières interrogations C'est alors que les interrogations commencèrent. Une écoute de l'enceinte Kristel avec l'amplificateur JH30 lors du salon du Kit 92 avait mis en évidence un risque sérieux d'affolement du 20 TK8 dans l'extrême-grave, où il n'est pas filtré. Ce HP est en effet monté en Bass-Reflex dans ce kit, le constructeur indiquant avoir déterminé ce choix à l'écoute. Mais - on ne se refait pas - il n'était pas question pour moi de m'écarter des bons principes théoriques de base. Ce haut-parleur, dont le Q TS s'est avéré compris entre 0,8 et

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HISTOIRE D'UNE REALISATION

Préliminaires L'histoire commence en octobre 1990. La lecture de la revue "L'Audiophile" m'avait laissé penser beaucoup de bien du tweeter Technics 5HH10. Une réalisation décrite dans le N°6 de cette revue (Septembre 1989) mettant en oeuvre ce tweeter en liaison avec un large bande Triangle T17FX et un HP de grave Focal Audiom 12V avait attiré mon attention. En octobre 1990, donc, la Maison de l'Audiophile effectue une promotion sur ce tweeter. L'occasion faisant le larron, je m'en porte acquéreur. Ce même automne, au Salon du Kit, Davis Acoustics présente son kit Kristel, faisant appel au fameux large bande 20 TK8. Beaucoup de finesse et de clarté, comme l'indiquait le compte-rendu paru dans AFDERS Confidences N°29 (Janvier 1991). Je me suis dit que ce large bande se marierait très bien avec un tweeter à chambre de compression, avec certainement moins de rupture dans les diagrammes de directivité qu'avec un tweeter classique. En outre, le TW26K2F, qui était associé au 20TK8 dans l'enceinte Kristel, était réputé pour être plus performant dans le haut-médium que dans l'extrême-aigu (cf. N°9 du journal des Créations Acoustiques de France). En automne 1992, j'ai eu l'occasion de m'offrir ce haut-parleur 20 TK8, ainsi d'ailleurs que les HP de grave 20SCA8 à des conditions intéressantes. Ce choix me permettait, si mes développements aboutissaient à une impasse, de me replier sur un kit connu, et qui ne marchait pas si mal. Les risques étaient donc limités. Ce choix était également dicté par le bon sens: à moins de bénéficier d'une large expérience, il est préférable de débuter par une réalisation faisant appel à un large bande de haute qualité, qu'il suffit d'appuyer dans le bas et dans le haut, sans coupure dans la zone de sensibilité maximale de l'oreille. En janvier 1991, je m'offrais le logiciel Calsod, version 1.20 auprès de Euterpe Audio. Il tournait sur PC XT, mais à la fin de l'année 1991, le passage à un portable 286 avec Coprocesseur et disque dur permit une accélération significative des calculs (dans un rapport 15 à 20!). J'ai rendu compte dans le N°57 des simulations de filtrage réalisées avec ce logiciel. Au forum du kit d'octobre 1992, je découvrais le logiciel Boxcalc (cf. A.C. N°41, janvier 1993) que je m'empressais de commander auprès de Pink Noise, à Bruxelles. Ce logiciel a été présenté dans le N°44 de juillet 1993. Lors du Salon Son et Images 1994, un jeune importateur, D. Emonts, animateur de la société Euphonie Audiotechnic, nous rendait visite sur le stand de l'Afders, et devenait membre de notre association. Il voulut bien me faire parvenir pour évaluation une version de Netcalc, logiciel de filtrage (cf. N°57), et je me suis procuré par son intermédiaire un système de mesure Kemsonic piloté par ordinateur (cf. N°51, septembre 1994), dont le prix avait été significativement revu à la baisse depuis le salon du Kit 91. Ainsi équipé, il était possible de passer aux choses sérieuses.

Premières interrogations C'est alors que les interrogations commencèrent. Une écoute de l'enceinte Kristel avec l'amplificateur JH30 lors du salon du Kit 92 avait mis en évidence un risque sérieux d'affolement du 20 TK8 dans l'extrême-grave, où il n'est pas filtré. Ce HP est en effet monté en Bass-Reflex dans ce kit, le constructeur indiquant avoir déterminé ce choix à l'écoute. Mais - on ne se refait pas - il n'était pas question pour moi de m'écarter des bons principes théoriques de base. Ce haut-parleur, dont le QTS s'est avéré compris entre 0,8 et

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1 à la mesure, ne peut pas être chargé en Bass-Reflex sans de sérieuses perturbations dans la courbe de réponse et la réponse transitoire. C'est un HP pour charge close: cf. figures 1, 2 et 3 obtenues en supposant une résistance de filtre + câble de 0,5 Ω en série.

Figure 1: Réponse en fréquence du 20 TK8 en charge close et Bass-Reflex. Simulations effectuées avec les paramètres publiés et mesurés. Le caisson de basse a été simulé avec les paramètres publiés. Avec les paramètres mesurés, le logiciel "plante".

J'ai retenu pour charge de ce HP un volume clos de 45 l environ, comparée sur la figure 1 à la simulation de la charge Bass-Reflex retenue pour la Kristel (42 l, fb = 45 Hz). Noter qu'il est possible de transformer la charge de la Kristel en charge close, simplement en bouchant l'évent. La puissance admissible est supérieure en montage Bass-Reflex dans la bande utile, mais un filtrage de l'extrême-grave serait opportun (figure 3). La deuxième interrogation est venue du caisson de grave. Avant de disposer du logiciel Boxcalc, j'avais bien essayé d'appliquer les abaques publiées, mais les HP 20SCA8, qui plus est montés en Push-Pull, sortaient totalement de l'épure. La simulation obtenue par Boxcalc avec les valeurs publiées est donnée figure 1 (résistance de 0,7 Ω en série). Pour y comprendre quelque chose, il a fallu creuser le problème, et ceci a donné le numéro spécial N°47 de janvier 1994. On y lit une tentative d'élargir la bande passante vers le bas de ce caisson, qui, dans la configuration Kristel, se limite à ajouter 20 Hz à la bande passante du 20 TK8. Une autre tentative d'optimisation a conduit au N°48 de mars 1994, où l'enceinte à charge symétrique à double résonateur (brevetée par Bose) a été présentée. Souhaitant donner une allure affinée à cette enceinte (le Kit "Kristal" Focal est très joli), afin qu'elle s'intègre mieux dans le séjour, ainsi que des parois rigides à faces non parallèles, je me suis inspiré de la technique mise en oeuvre par les CAO (Caissons Acoustiques de l'Ouest), découverte au salon du Kit 1990 (cf. AC N°29, janvier 1991), qui fait appel à un empilage de planches, permettant en ouvre de réaliser des surfaces intérieures cassant les résonances internes (cf. figure 4).

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Figure 2: Réponse impulsionnelle du 20 TK8 en charge close et Bass-Reflex (paramètres mesurés)

Figure 3: Puissance admissible du 20 TK8 en charge close et Bass-Reflex.

Outre cet intérêt, cette technique m'a permis de faire divers essais de caisson de grave, les HP étant montés sur la cloison séparatrice horizontale, et les volumes et évents étant obtenus par un empilement plus ou moins important de planches évidées. Vu le poids

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important de l'ensemble (près de 50 kg pour le caisson de médium-aigu et plus de 120 kg au total), il est possible de faire des expérimentations sans assemblage par colle et vis.

Un essai en charge symétrique classi-que a été effectué, les haut-parleurs étant montés en parallèle et non en push-pull, afin d'accroître le VAS et obtenir une bande passante plus large. Les volumes respectifs du volume clos et du résonateur étaient de l'ordre de 55l, et le résonateur était accordé à 40 Hz environ (figure 5). On notera l'abais-sement du niveau à 90 dB, adapté au rendement effectif du 20 TK8, et l'extension de la réponse à 30 Hz.

Figure 4: Schéma de principe de la réalisation pratique des enceintes.

Premières écoutes Une première écoute du caisson médium-aigu seul avait produit une restitution extrêmement décortiquée, mais avec un déséquilibre dans le haut-médium auquel il avait été remédié par l'aménagement de filtrage commenté dans le N°47. Avec le caisson de grave, la restitution reste extrêmement dégraissée dans le bas-médium et est très étendue dans l'extrême-grave, le 30 Hz étant atteint sans atténuation (cf. figure 6). Ceci procure une assise impressionnante sur les notes basses de l'orgue de Guillou, mais aussi un certain manque de "punch" et une fusion perfectible avec le médium-aigu, également notée par nos amis D. Simon et G. Margueron. L'évent était placé au ras du sol. Une deuxième disposition renversant la disposition des éléments et plaçant l'évent au sommet du caisson de grave, juste sous le caisson de médium-aigu, conduisait à une meilleure fusion, mais toujours à une "pêche" perfectible. Il restait à essayer le double résonateur (cf. figure 4). La simulation était effectuée à l'aide d'un logiciel de calcul, Mathcad, et des formules obtenues dans le N°48 (mars 94), confrontées après coup dans le N°58 au logiciel BassBox 5.1. En accordant le 1er résonateur à environ 65 Hz et le second à 28 Hz, il fallait retenir un volume de 20 l pour le

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premier et de 90 l pour le second pour avoir une réponse simulée plate (ces valeurs avaient été retenues pour conserver le volume intérieur global initial de 110 l et réutiliser les profondeurs d'évent initiales).

Figure 5: Réponse simulée de la première charge symétrique réalisée.

Figure 6: Courbe de réponse en salle de séjour, à la distance d'écoute (la courbe en pointillés correspond à la correction apportée compte-tenu de la réponse du microphone de mesure). Noter le médium en avant, qui a été corrigé par filtrage.

La mesure de la réponse du caisson donne une courbe déséquilibrée vers le bas, compte-tenu de la position au ras du sol de l'évent du résonateur accordé le plus bas. En simulant un déséquilibre volontaire de 6 dB entre les deux résonateurs et par essais et erreurs, c'est à dire empilages-désempilages successifs, une courbe convenable a été obtenue

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avec deux résonateurs d'environ 80 l et 35 l, accordés respectivement à 30 Hz et 65 Hz. On note que la réponse globale à 1m présentée figure 6 est la combinaison, autour de 80 Hz, de la réponse du 20 TK8 et du résonateur accordé à 65 Hz, qui sont en phase, et, autour de 30-40 Hz, du résonateur accordé à 30 Hz, qui est hors phase avec le premier et avec le 20 TK8, ce qui conduit dans ce secteur à une réponse globale d'environ 2 dB inférieure à celle du résonateur seul.

Figure 6: Courbe de réponse à 1m en salle de séjour de la deuxième réalisation faisant appel à la charge symétrique à double résonateur.

La courbe de réponse au point d'écoute n'est pas très différente de celle obtenue avec la charge symétrique classique, compte-tenu de la réponse propre de la pièce (un niveau légèrement plus élevé entre 50 et 100 Hz, et une coupure un peu plus rapide dans l'extrême-grave), mais à l'écoute, l'énergie dans le grave est très sensiblement supérieure, conduisant à plus de dynamique et à un grave plus varié. On s'aperçoit que l'essentiel de l'énergie est émise par le petit résonateur, accordé à 65 Hz, et l'on retrouve une constatation effectuée à l'occasion du développement de l'enceinte Afders, à savoir que la recherche d'une plus grande extension dans l'extrême-grave ne doit pas être obtenue au détriment de la qualité de la restitution dans le haut-grave. L'intérêt du double résonateur est de charger le grave autour de 30 Hz, mais aussi autour de 60-70 Hz, et par conséquent de procurer un bon rendement en limitant l'excursion du haut-parleur dans une large plage de fréquence. Des essais effectués pour essayer de diminuer le volume du caisson de grave ne s'étant pas avérés concluants, l'enceinte est considérée optimisée de ce point de vue et a été démontée pour finition définitive. Les enceintes Audiotec E65N ont alors retrouvé leur place. Ces enceintes ne sont pas mauvaises, Gilles Poirier, dans le Guide de la Haute-Fidélité paru aux Editions de l'Homme, Montréal, 1973, estimait même que c'est ce qu'il avait "entendu de plus beau". Il n'empêche qu'en les réécoutant, j'ai presque eu l'impression d'avoir les oreilles bouchées. Réalisation définitive, écoutes et mesures dans le prochain numéro.

J.M. Grandemange.

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Histoire d'une réalisation (2) REALISATION DE L'EBENISTERIE Le schéma de la figure 4 du N°65 du Bulletin a présenté la structure retenue pour l'enceinte. Comme il a été dit, l'ébénisterie a été réalisée à l'aide d'un empilement de planches d'aggloméré évidées, en qualité "extérieur" pour une meilleure stabilité, et dont la découpe interne peut permettre l'obtention d'une surface irrégulière favorable à une meilleure diffusion des réflexions des ondes sonores. La géométrie retenue permet en outre d'éviter les ondes stationnaires internes. Des renforts peuvent également être pratiqués (voir figure 1) simplement en les prévoyant lors du découpage.

Il est évident que cette manière de procéder crée un certain "gâchis", mais rien n'empêche de récupérer les parties internes pour réaliser une colonne de section plus faible, à l'image des poupées russes.

Figure 1: Caisson médium avant remplissage

Le caisson aigu est massif. Seule une découpe à la scie cloche a été réalisée, afin d'intégrer le haut-parleur d'aigus Technics 5 HH 10. Son indépendance par rapport aux autres sections permet un réglage fin de la mise en phase. Il est également possible de faire "loucher" les HP d'aigus vers l'intérieur, afin d'élargir la zone d'écoute. Le caisson médium est un caisson clos, avec compartiment filtre séparé, auquel il peut être accédé par la base du caisson (figure 2). L'assemblage a été réalisé par collage/vissage de l'ensemble des planches, avant la phase des essais décrite dans le précédent numéro. Lors de la finition définitive, il a simplement été réalisé un encastrement du haut-parleur Davis 20 TK 8, à l'aide d'une défonceuse, afin de permettre un appui du saladier sur un raidisseur assurant la liaison avec la face arrière du caisson.

L'amortissement interne est assuré à l'aide d'une feuille d'emballage "bulles d'air", selon la formule chère à C. Yvon, et utilisation de laine de mouton, dont D. Emonts m'avait vanté les qualités dans le médium. Dans le grave, des panneaux synthétiques "Sonofil" sont utilisés. Le caisson de basses n'a pas été réalisé strictement avec les paramètres obtenus à l'issue de la phase d'optimisation: - pour des raisons "idéologiques" tout d'abord: je n'arrivais pas à me décider à réaliser quelque chose qui ne puisse faire l'objet d'une "belle" modélisation. En outre, l'optimisation expérimentale est tributaire de la pièce et du placement dans celle-ci. Enfin, réaliser le caisson de grave en fonction du renforcement apporté dans le haut grave par le 20 TK8 interdisait de lui substituer ultérieurement un autre haut-parleur.

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- d'autre part, il n'était pas évident que l'absence de collage des différentes planches du caisson de grave au cours de l'optimisation soit sans effet.

- Enfin, l'optimisation avait été faite pour des raisons pratiques avec des sections d'évent de 20 cm x 4,4 cm (2 épaisseurs de planches) et je souhaitais passer à 20 cm x 6,6 cm (3 épaisseurs) pour satisfaire aux conditions liant surfaces et débattements des haut-parleurs et surfaces d'évents, visant à limiter les bruits d'écoulement. La formule approchée recommandée est la suivante:

Figure 2: Caisson médium à l'envers, montrant le filtre en cours de finition

dV ≥ (4 Vd / √ fb ) 1/2, où: fb = fréquence d'accord, en Hz, Vd = volume d'air déplacé par le haut-parleur (en cm3) dV = le diamètre de l'évent, en cm Si la surface active du haut-parleur de basses est de 210 cm2, et son débattement Xmax de 6 mm, le volume déplacé pour deux HP est: Vd = 252 cm3. Si fb est égal à 30 Hz, on obtient dV = 13,5 cm, et donc une surface SV mini de 145 cm2, valeur limite correspondant aux indications du logiciel Boxcalc. Une formule simplifiée donnée par Small donnerait une surface mini de 60 cm2. En choisissant une section d'évent de 20 x 6,6 = 132 cm2, la condition peut donc être considérée comme vérifiée.

Il en résulte toutefois que les profondeurs d'évent doivent être augmentées. Ce fut fait pour l'évent supérieur, mais pas pour l'évent inférieur, dont la profondeur était déjà importante (30 cm). Il en résulte un accord placé vers 62 Hz pour le résonateur supérieur et un peu supérieur à 30 Hz pour le résonateur inférieur (cf. simulation des figures 4 et 5).

Figure 3: Les enceintes dans leur milieu. Sur le pied, le microphone de mesure, au centre, le système de mesure Kemsonic piloté par l'ordinateur portable.

Lors de la réalisation pratique, des plaques bitumées ont été fixées sur la face intérieure des surfaces horizontales

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planes des caissons, et des plaques de mousse de même nature que celles qui ornent l'enceinte de référence de l'Afders (mais d'épaisseur plus faible) ont été disposées autour du caisson aigu, afin de limiter les réflexions parasites, entre les caissons, ainsi que pour tapisser l'intérieur des évents, ce qui, en réduisant légèrement leur section, a légèrement abaissé la fréquence de résonance des deux résonateurs (cf. mesures de la figure 6).

Figure 4. Simulation du caisson de grave (sans amortissement) Après mise en peinture définitive, de la mousse sera disposée sur l'ensemble de la face avant du caisson de médium. L'ensemble s'intègre assez bien dans le séjour, en procurant une impression de volume inférieur au volume réel: figure 3.

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Figure 5. Simulation du caisson de grave (avec amortissement), selon la formule parue dans AFDERS Confidences N°48 (mars 94) Noter les coupures voisines et l'arrondi apporté par l'amortissement.

Figure 6. Courbe d'impédance et réponse des deux résonateurs (mesure effectuée à l'embouchure de chaque évent). C'est la combinaison de ces deux réponses (compte-tenu de leurs déphasages) qui conduit aux courbes théoriques des figures 4 et 5.

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ECOUTES ET EXPERIMENTATIONS ULTERIEURES Après collage, séchage, ponçage et enduit, puis montage des haut-parleurs et filtres, passons aux écoutes. Les premières impressions furent un peu décevantes: après toutes les précautions d'amortissement prises, j'avais l'impression d'avoir "tué" ces enceintes, impression partagée par mon épouse. Ce n'est pas que ce soit mauvais, c'est même neutre et équilibré, mais la présence n'y est plus. Courte réflexion: qu'ai-je donc changé? Ce n'est tout de même pas le préampli Audiolab 8000 C, substitué au Rotel RC 850 ?, Eh bien, si! Après avoir remis en place le Rotel1, nous avons retrouvé nos impressions de la phase d'optimisation, avec toutefois un bas médium un peu plus en retrait, et un grave significativement plus ferme. L'ensemble n'est pas particulièrement confortable: une main de fer, sans gants... Une écoute effectuée en présence de D. Morel a confirmé l'inadaptation du préampli Audiolab, une bonne réussite du grave, particulièrement étendu et contrôlé (cf. mesures effectuées au point d'écoute, figure 4), mais aussi un bas médium trop maigre et un haut-médium un peu "typé", que l'on peut imputer pour une part au 20 TK8, dont la courbe est montante, malgré les corrections apportées au filtrage, et pour une part au tweeter, vraisemblablement coupé trop bas.

Figure 7. Courbe de réponse mesurée au point d'écoute, en salle de séjour (cf. figure 3). Courbe mesurée avec un microphone de prise de son Primo EMU 4520 (capsule omni), en l'absence de micro de mesure, en cours de ré-étalonnage. D'où la chute dans l'extrême-aigu. Le niveau dans l'extrême grave devrait être également légèrement plus élevé, compte-tenu de la légère chute de niveau du micro dans ce secteur.

1: Le préampli Rotel procure, avec ces enceintes, plus de présence, plus de cohérence des différents registres, un grave plus tendu, moins boursouflé, un médium et bas-médium plus présent et moins terne et plus de pêche. Il faut toutefois reconnaître au préampli Audiolab un aigu plus fin, quoiqu'un peu détaché du médium, un peu plus de neutralité dans le haut médium, des timbres un peu moins "simplifiés". Mais la musique est moins "évidente", ça manque de swing. Ce préampli ira accompagner les enceintes Audiotec à la campagne.

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Cette courbe un peu "physiologique", alliée à une restitution sans traînage, procure sur l'orgue (Guillou, Tableaux pour une exposition, disque Dorian DOR 90117), une restitution réellement impressionnante, sans lourdeur ni confusion. Sur des disques de variété, c'est étonnant: les voix sont plutôt "petites" et bien localisées au centre, l'accompagnement "tapant" comme un sourd à droite et à gauche, avec un indicateur de puissance crête ne dépassant pas 10-20W. Les effets artificiels d'"acutance" visant à donner du contraste local aux percussions sont restitués bruts de fonderie: le court espace de silence précédent l'impact est parfaitement ressenti. Cet absence de traînage et la rigidité de la caisse conduisent sur certains disques à un son très "cru" semblant manquer de grave. Quand celui-ci apparaît, il passe comme une lettre à la poste et disparaît aussitôt. On note que le disque d'opéra si critiqué lors des séances Afders est restitué sans confort particulier, mais sans distorsion. Il faut préciser que cette maîtrise est également due aux options retenues: bi-amplification passive, l'amplificateur "Plénitude" (conception YBA) ne s'occupe que du caisson de grave. Dans ce secteur, il est particulièrement "tenu", l'Hexo 4 apparaissant presque rond à côté. Le caisson médium-aigu est alimenté en bicâblage par l'amplificateur Hexo 4. Il a été vérifié par la comparaison de mesures effectuées en mono et bi-amplification, que les sensibilités des deux amplificateurs sont parfaitement accordées: les bandes passantes sont superposables. En résumé, cette enceinte n'a pas vraiment le son de la Kristel: il y a un "plus" au niveau de la fermeté du grave et un "moins" au niveau de la qualité du bas-médium: les voix sont plus hautes, plus maigres, moins charnelles. Rigidité et bafflage des deux réalisations ne sont pas les mêmes. L'aigu non plus. D'excellentes potentialités sont donc obtenues, mais des progrès sont encore possibles au niveau du médium-aigu, soit par filtrage, soit par substitution de haut-parleurs. Nous parlerons dans le prochain numéro des résultats obtenus en substituant au 20 TK8 un HP de médium développé par C. Yvon sur la base du chassis du 20 TK8: aimant ticonal, membrane en Kevlar sablée, bobine courte et suspension plus raide, permettant de gagner 3 à 4 dB dans le bas-médium. Nous essaierons également un haut-parleur d'aigu descendant plus bas, le Fostex T 945, à aimant Alnico (le grand frère du T 925, mais avec bobine de diamètre double). Il restera enfin à substituer aux préamplificateurs actuels, de grande diffusion, deux préamplificateurs de niveau plus approprié: un petit préampli "audiophile" de réalisation amateur et le préamplificateur YBA 2α. On verra que transparence, dynamique, finesse et neutralité peuvent être obtenus avec cette réalisation. A suivre...

J.M. Grandemange.

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14 AFDERS Confidences N°68, Juillet 1997 ______________________________________________________________________________________

HISTOIRE D'UNE REALISATION (3) Dans le N°66 (mars 1997) de Afders Confidences, je vous promettais une suite sur l'optimisation du système qui y était décrit. Ce système était initialement inspiré de l'enceinte Kristel de Davis Acoustics, avec plusieurs différences significatives: - dans le grave, les HP sont en parallèle (VAS multiplié par deux) et non en push-pull (VAS

divisé par deux), et la charge n'est pas une charge symétrique classique, mais un double résonateur, selon une solution brevetée par Bose et JBL et dont l'expression mathématique a été donnée dans A.C. N°48.

- dans le médium, le 20 TK8 a été chargé en charge close et non en bass-reflex, pour éviter le traînage dans le grave, compte-tenu du QTS de ce HP qui est voisin de 1.

- dans l'aigu, le tweeter à chambre de compression Technics 5 HH10 est utilisé, le filtrage étant bien entendu adapté à cette combinaison, compte-tenu de mesures effectuées in-situ et des simulations permises par le logiciel Netcalc.

- enfin, la forme a été redéfinie pour des raisons esthétiques, afin que le volume perçu du point d'écoute paraisse très inférieur au volume réel.

Pour les optimisations, je suis parti du principe que si les qualités frappent en premier lieu, ce qui fatigue à long terme ce sont les défauts. J'attendais par conséquent environ une semaine avant de procéder à une nouvelle optimisation. J'ai fait état dans le numéro 66 de quelques insatisfactions. Il convenait donc d'essayer de progresser.

REMISE EN CAUSE DU MEDIUM Le 20 TK8 est certainement l'un des meilleurs grave-médium, mais il résonne assez bas, environ 50 Hz, et s'il présente un bon rendement dans le médium, sa courbe est plutôt montante et son rendement dans le bas-médium est insuffisant. Par contre, il descend dans le grave et vient ainsi s'exprimer inutilement en parallèle avec le caisson de grave, conduisant par ailleurs à une puissance admissible limitée dans ce secteur (grands débattements très visibles), cf. figure 1. Je me suis dit que ce grave-médium pourrait constituer la base d'une excellente deux voies et que dans le présent système un HP un peu plus raide et coupant naturellement à 100 Hz serait plus approprié. Notre ami D. Morel mettant en vente ses deux HP de médium, initialement développés par Davis pour AESD, l'occasion fit le larron. Ces HP, que nous nommerons 20 TK8CY, sont constitués autour du châssis du 20 TK8: même saladier, même aimant Ticonal. Ils sont donc parfaitement interchangeables géométriquement avec les premiers. Trois différences ont toutefois été apportées: - membrane Kevlar "grattée" ou plutôt sablée, afin de casser les fibres superficielles de la

couche externe, et de conduire à un meilleur amortissement de la membrane et à une plus grande insensibilité aux ondes sonores du milieu environnant. C. Yvon qui est à l'origine de cette idée pourrait développer de manière plus scientifique le procédé mis en oeuvre qui a été appliqué récemment dans une enceinte Apertura de haut de gamme.

- bobine plus courte, - suspension plus raide, conduisant à une fréquence de résonance d'environ 100 Hz, et

donc à une tenue en puissance plus élevée dans le grave (figure 1), ainsi qu'à un rendement plus élevé (figure 3) et une réponse impulsionnelle plus franche (figure 2). Le

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AFDERS Confidences N°68, Juillet 1997 15 ______________________________________________________________________________________

VAS passe à une valeur plus faible (environ 8 l). Le HP s'exprime donc à son aise dans la charge de 46 l, sans augmentation significative de sa fréquence de résonance (figure 4).

Figure 1: Comparaison des puissances admissibles (limitation du débattement) dans le grave des haut-parleurs 20 TK8 et 20 TK8CY.

Figure 2: Comparaison des réponses impulsionnelles simulées des haut-parleurs 20 TK8 et 20 TK8CY

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16 AFDERS Confidences N°68, Juillet 1997 ______________________________________________________________________________________

La courbe d'impédance, HP chargé, du 20 TK8CY, ainsi que les courbes de réponse mesurées à proximité immédiate de la membrane sont données figure 4. On notera la confirmation d'une différence de rendement de 3 à 4 dB entre les deux HP, ainsi que la grande similarité des courbes avec celles, simulées, de la figure 3.

Figure 3: Réponse simulée dans le grave avec les paramètres mesurés des haut-parleurs 20 TK8 et 20 TK8CY.

Figure 4: Courbe d'impédance du 20TK8CY et comparaison des courbes mesurées à proximité de la membrane des haut-parleurs 20 TK8 et 20 TK8CY.

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AFDERS Confidences N°68, Juillet 1997 17 ______________________________________________________________________________________

On retrouve ces tendances sur les courbes mesurées à 1m, figure 5. On note sur ces courbes que les irrégularités obtenues sont manifestement dues à l'environnement: elles apparaissent en effet exactement aux mêmes endroits, pour des haut-parleurs différents par ailleurs.

Figure 5: Courbes de réponse à 1m en salle de séjour des HP 20 TK8 et 20 TK8CY, charge close de 46 litres.

Les écoutes effectuées après substitution du médium sans révision du filtrage révélèrent un équilibre très sensiblement différent: un médium rutilant, un bas médium mieux en place, un grave et un aigu en retrait. Il fallut filtrer le médium un peu différemment en abaissant son niveau au-delà de 1000Hz, et remonter légèrement le niveau d'aigu pour retrouver un équilibre linéaire. Les voix sont alors mieux équilibrées, et l'équilibre plus tendu. Il n'y a plus de recouvrement des réponses des deux caissons. Après une semaine, toutefois, je retrouvais en moins marqué le petit désagrément dans le haut-médium qui m'empêchait depuis quelque temps de convoquer les oreilles d'or de l'Afders pour évaluation de cet ouvrage.

ESSAI DU PREAMPLIFICATEUR YBA 2α Notre ami Loïc me proposa alors le prêt de son préampli YBA 2α. Je devais le lui rapporter la semaine suivante. Deux heures plus tard, je le rappelais pour lui proposer de venir le rechercher et d'en profiter pour faire une petite écoute, tant ce préamplificateur me réconcilia avec ces enceintes. Un grave profond et tendu, mais qui reste doux, un aigu qui va très loin, et qui reste ouvert, un équilibre très clair. J'ai noté les impressions suivantes à l'écoute de la sélection des disque de l'Afders et de quelques autres:

Quatuor de Dvorak: Dégraissé, fin et sans agressivité. Toutes les lignes mélodiques peuvent être suivies sans effort. Aigu précis, dont le niveau est légèrement trop élevé.

Piano (Brendel): Ample et précis. Médium très clair. Grande aération, bruits de climatisation audibles, mais non gênants. Bonne différentiation des timbres.

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18 AFDERS Confidences N°68, Juillet 1997 ______________________________________________________________________________________

Orgue: Aigu précis, grave ample et tenu. Bonne réverbération et restitution naturelle de l'ambiance. Les timbres restent toutefois un peu "crus".

Opéra: Voix féminine plutôt "jeune", assez jolie, sans distorsion. La voix masculine "claironne" un peu, mais c'est normal.

Alborada: Bonne profondeur, aigus à leur place. Baguettes précises, final sans bavure. Projette un peu dans l'aigu.

Magical trio: Ferme et aéré. Bon positionnement dans l'espace, pas de lourdeur. Aigu un peu trop présent.

O. Peterson: Souffle discret. Médium, contrebasse, balais, chuchotements: OK. Grand sentiment de présence. Ca swingue.

Cabrel: Très aéré, précis sans sécheresse, dynamique. Voix naturelle, rien à dire. Plus de caractère métallique ni de surcaractérisation dans le haut-médium.

Guillou (Tableaux d'une exposition): Bande passante très large, grande transparence. Bonne réverbération.

The Sheffield drum record: Excellente présence. Aucune agressivité, même sur les forte. Réalisme des balais assez surprenante. Grande variété des timbres. Plus de questions: même la toux du batteur, à la fin du morceau, est réaliste.

Ein Straussfest (Telarc): Ca déménage, avec douceur et fermeté. Impacts sans traînage. C'est le jour et la nuit avec les préamplificateurs précédents.

Rebecca Pidgeon (Grandmother): Clair, un peu "cru", aigu un peu en avant, sinon, c'est parfait.

M. Jonasz (Le temps passé): La basse est à un niveau (trop) élevé, mais c'est normal. Voix OK, timbres un peu aigus.

The Wild Ones (Grasshopper rocks): Ca pousse un max avec un niveau crête de... 10W.

Guitare: Ca coule... avec une foultitude de détails.

Cantate domino: Parfait. Bonne réverbération. Voix précise, douce. Un peu claironnant dans les forte. En résumé, un préampli doux, précis, ample, tenu et cependant "libre" et surtout... naturel. Il restait simplement un aigu qui se faisait un peu trop remarquer et une tendance à "claironner" un peu à haut niveau. Des essais de filtrage du médium n'ont pas conduit à amélioration significative.

REMISE EN CAUSE DE L'AIGU Le 5 HH10 a un rendement de 100 dB/1W/1m. On pouvait donc penser qu'en abaissant son niveau de 8 dB et en le coupant à 18 dB/octave à 4500 Hz, on ne lui en demandait pas trop. L'incapacité de remédier aux problèmes rencontrés dans le haut-médium incitait cependant à penser que c'était peut-être lui le coupable et que le filtrage était peut-être effectué trop bas. Mais enfin, couper un 20 cm au delà de 4500 Hz, c'était trop haut... Je m'en ouvris à un collègue audiophile, grand amateur de chambres de compression, et qui n'appartient malheureusement pas à l'Afders. Il me proposa de faire un essai avec le T945 de Fostex. Il s'agit d'un HP de 2 kg, avec un aimant Alnico, une membrane annulaire de 40 mm de diamètre, et un rendement de... 110 dB/1W/1m. Ce HP descend plus bas que le T 925, plus connu, dont la membrane fait seulement 20 mm. L'inconvénient est qu'il

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AFDERS Confidences N°68, Juillet 1997 19 ______________________________________________________________________________________

monte un peu moins haut. Il présente l'avantage d'avoir plus de "patate" pour être couplé avec un 20 cm. Premiers essais le matin même de la visite de Loïc (il me fallait en effet profiter jusqu'à la dernière minute de son excellent préampli). Pas le temps de revoir le filtrage. Je me suis contenté de le substituer au 5 HH10 en mettant un réseau de résistances supplémentaire aux bornes du HP. Premiers essais: c'est presque frustrant, on "n'entend plus" l'aigu. Il est vrai que ce HP coupe un peu plus bas que le 5 HH10 (figure 6), et au premier abord ça parait moins "piqué", mais en fait, les détails y sont: ils sont simplement plus à leur place. En poussant le niveau (sans exagération, bouton de niveau à 3/10), le confort reste total, on perd cette impression de crispation et de surcaractérisation apportée par le Technics.

Figure 6: Courbes de réponse à 1m des tweeters 5 HH10 et T945. Courbe d'impédance du T 945.

Moralité: quand un défaut apparaît dans une bande de fréquences, avant de faire des reproches au haut-parleur théoriquement chargé de ce secteur, il convient de voir si le mal ne vient pas du haut-parleur chargé du secteur d'à côté. Notre ami Loïc a écouté l'ensemble ainsi constitué. Ses commentaires furent cohérents avec le souci manifesté lors de ce développement: un aigu qui ne se fait pas remarquer et qui a beaucoup de "matière", un grave à filtrage passif qui sonne comme un "actif", sans trace de traînage. Il m'a conseillé de ne plus toucher à l'équilibre ainsi obtenu. Je ne sais pas si je suivrai son conseil, mais deux mois d'écoute à ce jour ne m'incitent pas particulièrement à revoir cette optimisation. A suivre, ou Fin ?

J.M. Grandemange.

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20 AFDERS Confidences N°68, Juillet 1997 ______________________________________________________________________________________

Figure 7: Courbes de réponse de l'aigu, du médium et de l'ensemble + caisson de grave, à 1m en salle de séjour (la remontée dans l'aigu est imputable au microphone de mesure).

Figure 8: Comparaison de la courbe globale mesurée à 1m (en bas) et au point d'écoute (en haut). De la difficulté de faire des courbes de réponse en salle de séjour. Dirait-on que notre ami Loïc a qualifié l'équilibre de cette enceinte de "légèrement descendant"?

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14 AFDERS Confidences N°72, Mars 1998 ______________________________________________________________________________________

Histoire d’une réalisation (4) Dans les numéros 65, 66, et 68 de cette revue, j’ai décrit l’évolution d’une réalisation personnelle, application pratique des réflexions théoriques publiées dans la série d’articles consacrée à l’électroacoustique. Dans le prochain numéro, nous reprendrons cette Saga en abordant la modélisation de l’enceinte « Isobarik » chère à Linn et P.E. Léon. Nous mettrons en œuvre ce principe dans une seconde réalisation. Avant de quitter la présente réalisation, je voudrais préciser les dernières optimisations qui lui ont été apportées. En premier lieu, le filtre a fait l’objet de quelques modifications. On se souvient que la substitution du tweeter T945 Fostex au Technics 5 HH10 s’était effectuée en se limitant à placer un réseau de résistances atténuatrices aux bornes du premier pour retrouver le rendement du second. Une mesure des courbes de réponse et d’impédance effectuées avec le processeur Kemsonic et leur exportation dans le logiciel Netcalc précédemment décrits dans cette revue, ont permis d’affiner le filtrage. Les détails de cette optimisation ont certainement peu d’intérêt pour les lecteurs, car ils sont très dépendants de la mise en œuvre des différents haut-parleurs. Si j’en parle toutefois, c’est pour souligner la grande sensibilité du résultat final à de légères évolutions de filtrage, ainsi que l’importance du câblage et de la technologie des condensateurs employés. Optimisation du filtrage : les haut-parleurs sont mesurés montés en position définitive dans l’enceinte, cette dernière étant placée dans la position d’écoute prévue. Le filtrage tient donc compte de l’ensemble des éléments. En particulier, la grande rigidité de l’ébénisterie conduit à un bas-médium dégraissé et sensiblement en retrait. La remontée du médium au-delà d’environ 1000 Hz est compensée par la mise en parallèle d’une résistance et d’une self. L’optimisation consiste à jouer sur la valeur de cette résistance. Le passage d’une valeur de 2,8 ohms (2 résistances de 5,6 ohms en parallèle, figure 1) à une valeur de 5 ohms (2 résistances de 10 ohms en parallèle, figure 2) change très significativement l’équilibre global, malgré une différence de niveau moyen qui n’excède pas 2 dB (à chaque fois, le niveau du tweeter est accordé à celui du haut-médium). Dans le premier cas, le médium-aigu est en avant, le grave apparaissant presque trop léger. Dans le deuxième cas, l’équilibre est plus confortable et plus doux. On souhaiterait presque plus de détails sur certains disques. De l’importance de l’électronique, lecteur CD et amplificateur : Un essai avec l’Hiraga 20 W classe A dans le médium-aigu en lieu et place de l’Hexo 4 change significativement l’équilibre : plus de détails dans l’aigu, mais moins de vie et d’ambiance. En ce qui concerne le lecteur (Microméga Stage 3), je dois avouer que lors de la phase d’optimisation, il était au bord de la panne et présentait des difficultés de suivi de piste. La durée de garantie étant significativement dépassée, j’ai attendu la fin de ces travaux pour le rapporter au revendeur (Audio Synthèse). Si je cite ce dernier, c’est pour le remercier du geste commercial qu’il a effectué à cette occasion, la remise en état ayant été effectuée gratuitement, malgré le dépassement de la limite de garantie. A la remise en service, curieusement, l’aigu est apparu plus fin, mais plus en retrait, ce qui a nécessité une légère correction du filtrage aigu. De l’influence des composants et câbles : ayant lu et entendu beaucoup de bien des condensateurs à armature étain, j’ai procédé à la substitution de ceux utilisés dans le filtrage du tweeter. Est-ce la diminution de la résistance série, ou est-ce purement subjectif, dans tous les cas, il est possible de dire que l’effet est significatif, suffisamment en tous cas pour m’amener à retoucher le niveau du tweeter, qui présentait cette fois une finesse supérieure, mais aussi un niveau excessif. En effet, l’idéal recherché est un aigu qui doit être suffisamment intégré au reste du spectre pour ne pas se faire remarquer. En matière de câbles, j’avais tout d’abord retenu un tricâblage utilisant le câble QED Qudos,

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AFDERS Confidences N°72, Mars 1998 15 ______________________________________________________________________________________

qui apporte une bonne clarté, mais aussi un haut-médium un peu surcaractérisé. La récente utilisation d’un câble Qudos « Silver » a totalement fait disparaître cette petite surcaractérisation.

Figure 1. Réponse du caisson médium-aigu seul.

Figure 2. Abaissement du niveau du haut-médium aigu. En conclusion, l’optimisation de cette réalisation peut être considérée comme terminée. Les différences d’équilibre qu’il est possible d’obtenir en raffinant les réglages de niveaux, si elles permettent d’améliorer l’écoute de certains CD entraînent immanquablement des pertes sur d’autres. Car c’est le revers de la médaille : au-delà d’une certaine qualité d’optimisation, ce ne sont plus les enceintes que l’on juge, mais les CD. La seule solution est alors d’écouter des disques aussi variés que possible et de juger sur le moyen terme si l’équilibre reste acceptable.

J.M. Grandemange.