Histoire Des Saints d Alsace

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 HISTOIRE DES SAINTS D'ALSACE; PAR M. L'ABBÉ HIIVCKLER. PRÊTRE D U DIOCESE DE STRASBOURG, DOCTEUR U N THÉ OLOGI E, CH AN OI N E HONO RAIR E D E L A METROPOLE  PARIS• 1 1 .-—ari ^gUjUQQffl^^—— A STRASBOURG, CHEZ F . G.  LEVR AU LT, LIBRAIRE-ÉDITEUR, H U E DES JUIFS N ° 3 3 ;

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HISTOIREDES

SAINTS D'ALSACE;PAR

M. L'ABB HIIVCKLER.PRTRE DU DIOCESE DE STRASBOURG, DOCTEUR U THOLOGIE, CHANOINE HONORAIRE DE LA METROPOLE D PARIS N

11 . - a r i ^ g U j U Q Q f f l ^ ^

A STRASBOURG,CHEZ F . G. L E V R A U L T , LIBRAIRE-DITEUR,HUE DES JUIFS , N. 33 ;

M M E M A I S O N , HUE DE IA HARPE N. 8 J ,f

A PARIS.

1837.

Biblio!que Saint Librehttp://www.liberius.net Bibliothque Saint Libre 2011. Toute reproduction but non lucratif est autorise.

HISTOIREDES SAINTS D'ALSACE.

STRASBOURG de l'imprimerie de F, G. U m w .

APPROBATION.

Nous avons lu avec attention et examin l'ouvrageintitul : Histoire des Saints cPAlsace : non-seule-

ment nous n'y avons rien trouv qui ft contraire la saine doctrine de l'glise catholique; mais cet ouvrage nous a paru trs-propre nourrir la pit des fidles et a les difier. Nous en permettons donc l'impression, et le recommandons vivement par les prsentes, en applaudissant l'auteur d'avoir consacr son loisir un ouvrage aussi utile qu'intressant. Strasbourg, le 3o janvier i83o.L l E B E R M A N N , Vie. gn.

PREFACE.

Un diocse qui remonte jusqu'aux premiers sicles du christianisme, qui a t illustr par la saintet d'un grand nombre de pieux personnages des deux sexes ; un diocse autrefois si clbre par la haute naissance de ses vques, le nombre et la splendeur de ses maisons religieuses, la rgularit et l a science de son clerg ; un diocse enfin qui a toujours t un des plus florissants de la chrtient, prsente sans doute des titres prcieux la vnration publique. Rechercher les traces de ces gnreux athltes, de ces saints pontifes et prIres, de ces chastes vierges et de ces pieuses veuves, qui furent aux diffrentes poques o ils vcurent, la gloire et l'ornement de l'Eglise de Strasbourg et de l'Alsace; dcouvrir partout le souvenir de leurs vertus, les proposer c o m m e des m o dles l'imitation de ceux qui habitent encore aujourd'hui les mmes contres qu'ils illustrrent autrefois; c'est travailler au bien de la religion et a u bonheur des chrtiens, et tel est le but que nous nous sommes propos en entreprenant de donner aux fidles une histoire des saints d'Alsace; car, nous ne saurions en disconvenir, la vertu semble avoir plus de charmes et plus d'attraits pour n o u s , lorsque nous la voyons pratique par ceux qui ont t nos compatriotes, et dont le souvenir plane en quelque sorte sur nos ttes pour nous a p peler au combat. E l quelle province a plus de titres que l'Alsace, pour soulever Je voile des temps et interroger l'antiquit? A peine le flambeau de la vraie foi avait-il commenc de briller sur les

Vij

PRFACE.

bords du R h i n , que l'on vit un peuple bon et laborieux recevoir aveo joie la bonne nouvelle des vrits et des doctrines manes du Ciel, et faire depuis cette poque ses plus chres dlices de la religion et de ses saintes pratiques. Et si plus tard des orages politiques sont venus fondre sur l'hritage de Jsus-Christ, si surtout pendant les guerres sanglantes et les troubles funestes du moyen ge la face de l'Eglise fut souvent attriste, l'Alsacien, fidle son Dieu et sa foi, chercha aussitt rparer les maux de la religion et l'pouse du F i l s de Dieu continua rpandre ses bienfaits sur notre province. C'est ainsi que la religion catholique a travers en Alsace le cours des sicles, entoure de cette vnration et de cette majest auguste qui ne conviennent qu' e l l e , et enrichie d'innombrables conqutes qui sont autant de trophes d e gloire, et qui attestent sa puissance et son empire sur des. curs qui lui taient entirement soumis. C'est ainsi que d e nos jours encore, aprs les malheureuses temptes qui ont tout boulevers en F r a n c e , l'Alsace voit refleurir la religion et lui paye, comme autrefois, le tribut de ses hommages et de son amour. Dj plusieurs fois il avait t question de donner au publie une relation de la vie des bienheureux personnages qui se sont sanctifis en Alsace; m a i s . l e s malheurs des temps ou d'autres circonstances ont empch une entreprise qui aurait sans doute t excute par des mains plus habiles que les ntres, et oe n'est que d'aprs le conseil de plusieurs ecclsiastiques distingus par leur pit et leurs vastes connaissances, que nous avons pris la libert de faire part aux fidles, d u fruit de nos recherches et de nos travaux. Nous avons donc consult les divers auteurs qui ont p u nous guider dans ces intressantes matires, nous avons port dans l'investigation des faits une attention scrupuleuse, nous avons compar les opinions, rapproch les vnements, et aprs les avoir fait passer au creuset d'une saine critique, nous les offrons ici avec confiance au public. Nous n'avons rien nglig pour nous entourer de toutes les lumires ncessaires et nous p r o curer tous les renseignements possibles sur les saints dont il va tre question dans cet, ouvrage. La vrit seule a conduit9

PRFACE.

IX

noire plume. Nous avons cru devoir suivre pour le classement des jours et des matires, le Proprium sancin diceces* Argent., publi en 1822 p a r S . . E . Monseigneur le cardinal prince de Croy, alors voque de Strasbourg5 mais comme ce Proprium ne renferme pas tous les pieux personnages dont on pourrait faire l'office dans notre diocse, n o u s avons ajout lous ceux qui ne s'y rencontrent pas. O n trouvera donc dans noire ouvrage les vies de tous les saints personnages qui reoivent aujourd'hui un culte public en A l s a c e , d'aprs le mandement de Monseigneur de C r o y , dat du 28 dcembre 1821, ainsi que de ceux qui ont v c u , exerc des fonctions et se sont rendus clbres en Alsace, quoiqu'on n'en ait p a s fait l'office jusqu'ici; tels que S- P i r m i n , fondateur de la fameuse abbaye de Murbach et vque rgionnaire; S i m b e r t , a b b de la m m e a b b a y e , et plus tard vque d'Augsbourg; Dizier, vque de R e n n e s , et martyr dans un village du HautR h i n qui porte son n o m ; S . H u n n e , cousine de S . O d i l e , m o r t e Hunawihr prs de Ribeauvill, et canonise par L o n X ; L o b a r d e , fondateur de Maurmoutier; F r i d o l i n , distingue p a r ses travaux apostoliques en Alsace, et qui fonda une glise Strasbourg; le b . R e m i , vque de S t r a s b o u r g , etc.e

Les dtails dans lesquels le cours des matires nous obligera d'entrer souvent, nous amneront ncessairement entretenir nos lecteurs des diffrentes maisons religieuses qui couvrirent jadis en si grand nombre le sol de notre belle p r o v i n c e , et qui depuis en ont disparu et subi d'autres destinations. Nous avons donc pens qu'il tait de notre devoir de recueillir fidlement l'histoire de ces m a i s o n s , de remonter leur orig i n c , d'exposer leurs dveloppements, leurs vicissitudes, leurs franchises, leurs malheurs; de parler des h o m m e s distingus qui les ont habites, des ouvrages que ceux-ci ont laisss, et de donner quelquefois des extraits de leurs productions. Les vques les plus distingus trouveront aussi leur place dans ce recueil. Il y sera de mme question des principales glises qui subsistent encore, de leur fondation, cle leurs privilges, etc. L e t e m p s , qui use t o u t , dtruira bientt jusqu'aux derniers vestiges d'un grand nombre de monuments religieux levs autrefois par la pit de nos pres : il est bon d'en

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PRFACE.9

consigner le souvenir dans les archives de l'histoire afin de transmettre de gnration en gnration ces faits parlants du zle de nos anctres pour la religion; et tandis que les savants du monde font des efforts heureux pour drober l'oubli les magnifiques dbris qui couvrent nos montagnes la religion ne doit-elle pas s'empresser de mme de prserver d'un oubli total le nom et l'histoire de tant de pieuses institutions qui sont tombes sous le marteau rvolutionnaire? Nous prions tous nos compatriotes, et surtout nos confrres ecclsiastiques de nous adresser les observations qu'ils pourront faire en parcourant cet o u v r a g e , et nous accueillerons avec reconnaissance tout ce qui pourra contribuer le rendre plus intressant : nous nous empresserons de profiler de leurs lumires et de rectifier les fautes q u i , malgr nos efforts et les intentions qui nous a n i m e n t , ont p u chapper nos soins*

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AUX

SAINTS

DONT IL V A T R E PARL DANS C E T O U V R A G E

Je vous salue, o nobles habitants du ciel, gnreux triomphateurs du monde et de ses vanits ! Du haut de vos demeures bienheureuses, o vous gotez depuis si longtemps des dlices ineffables dans le sein de D i e u , jetez vos regards sur un faible mortel qui cherche partout les traces de vos vertus et de vos triomphes ! Soyezlui favorables et dirigez ses pas chancelants : qu'il puisse, guid par vous, dcouvrir les prcieux monuments des temps anciens, distinguer la vrit du mensonge, faire jaillir la lumire des tnbres, et porter la conviction dans les curs des chrtiens ! . Vous avez autrefois difi l'Alsace par l'hrosme de votre conduite en combattant en vrais disciples de l'vangile pour la belle cause de Jsus-Christ; vous avez lgu cette province le souvenir de vos vertus. Protgez-la toujours, et obtenez par votre intercession tous ceux de ses habitants qui liront ces pages, la grce d'imiter lesbeaux exemples que vous leur avez laisss, et d'apprendre combien il est doux et glorieux de marcher sur vos pas pour avoir un jour part votre gloire. Soutenez surtout par vos prires celui qui ose vous ddier cet ouvrage et qui implore avec une humble confiance votre puissante protection.

HISTOIREDES SAINTS D'ALSACE.

1 9 JANVIER.

S. D L E ,

ABB.

(Deicolus ou Deicola.)y

(Voyez les Bollandistes, tom. 2j]anuar. pag.TIUS B c l l o v a c . , fc'. 2 3 , cap. 2 et seq.;

1 0 3 ; VINCENnalaltbus,

PETRUS, De

/i. 2, cap. 9 8 ; TRITHEMIUS, De vins illuslr* ovdinis S. Bene dicti, lib. 3 ; DUNOD , Histoire d e l'glise d e Besanon, tom. 2 ; LACUIIXE Histoire d'Alsace, dit. in-fol. , tom. 1 l i v . 6 , p . G5.)?

VERS L'AN 02 5.

Lorsque Constantin le Grand eut embrasse le christianisme, il lit cesser partout les sanglantes perscutions qui avaient dchir si longtemps le sein de l'Eglise, et publia plusieurs dits en sa faveur. L'accueil gracieux qu'il lit aux vques catholiques, dont un grand nombre portaient encore les cicatrices des honorables blessures qu'ils avaient reues pour la foi de Jsus-Christ, les sommes d'argent qu'il accorda plusieurs villes pour faire construire des glises sur les ruines des temples du paganisme, l repos enfin dont jouissait l'empire sous lui : tout cela ne contribua pas peu faire fleurir la vraie religion. De nombreux prdicateurs de l'Evangile parcoururent les provinces pour tendre de plus en plus le rgne de la vrit. Les Gaules et la

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19 JANVIER.

Germanie devinrent surtout le thtre de leur zle. Quoique le christianisme et dj jet de profondes racines en Alsace longtemps avant Favnement de Constantin au trne, puisque S. Irne parlait dj de la foi vive qui rgnait de son temps dans les Germanies, dont la hasse Alsace faisait partie; il est nanmoins constant qu'il n'y avait pas alors de sige piscopal dans cette province. Toute l'antiquit a toujours reconnu S. Amand comme le premier vque de Strasbourg; et sous ce vnrable prlat la religion chrtienne fit d'immenses progrs sur les bords du Rhin. II parat mme que 1 glise de Strasbourg offrit ds sa naissance une communaut florissante de chrtiens, et S. Hilaire adressant (du fond de l'exil o il gmissait alors cause de son attachement la vraie foi) son livre des synodes aux vques de la premire et de la seconde Germanie , de la premire et de la seconde Belgique, etc., flicite ces prlats d'avoir prserv leurs diocses des erreurs de l'arianisme et de s'tre montrs si sincrement attachs la vraie doctrine de l'glise. Avec la vraie foi, l'on vit aussi se rpandre de plus en plus l'amour des vertus que l'Evangile prescrit ses disciples, et Laguille nous apprend, dans son Histoire d'Al2

1 S* Hilarii Moguntiacensium

lib. de Synodis,

n> 1, p.

n5o.

a L a premire Germanie comprenait alors metropolisy

civitasy

civitas jfrgentoratensium,

civitas

Nemotum

civitas Vangionum} c'est--dire, May eu ce comme mtropole Strasbourg, Spire et Worms.

S. D E L E .1

5

s a c , que plusieurs chrtiens des deux sexes s efforaient, pendant le quatrime sicle, d'imiter la vie des pieux solitaires qui peuplaient cette poque les dserts de la Thbade. Il parat que ce dsir de parvenir une liaute perfection fut provoqu en Alsace par les exhortations pathtiques du grand Athanase, exil alors a Trves pour son imperturbable fermet dfendre la divinit du Verbe ; car ce saint homme avait dpeint avec une telle force l'innocence des murs et la conduite anglique de S. Antoine et de ses innombrables enfants, qu'un grand nombre d'Alsaciens renoncrent aux plaisirs du sicle et embrassrent les rigueurs de la pnitence. S. Jrme nous fournit une preuve de ce que nous avanons ici. Dvor de la soif d'apprendre, ce jeune athlte, qui prludait alors aux succs qu'il devait remporter plus tard sur les ennemis de la religion catholique, venait de quitter les riantes contres de l'Italie pour chercher partout la science. Autun, Besanon, Bordeaux et Trves renfermaient alors dans leurs murs des coles fort clbres, o la jeunesse venait affluer de toutes parts. Jrme alla vers Fan 571 s'tablir Trves, avec son ami Bonose. Dans les courses qu'il fit pour connatre le pays, il eut occasion d'observer la pit et la vivacit de la foi des habitants des rives encore demi sauvages du Rhin; l'aspect de leurs vertus fiti Tom. I . , liv. 5 , pag. 5 5 .c r

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ig

JANVIER.

une telle impression sur son noble coeur, qu'il tait sur le point de fixer son sjour dans ces p a y s - l . Mais ces beaux commencements ne furent pas de longue dure; car l'entre du cinquime sicle parurent les Vandales et d'autres peuples barbares, qui portrent des coups mortels la religion en Alsace, et ce qui chappa leur fureur fut dtruit plus tard par les H u n S j sous la conduite du sanguinaire Attila. L'abomination de la dsolation rpandit pendant plus d'un sicle son voile funbre sur notre province, et ce ne fut que sous Clovis I . que la religion commena respirer dans nos contres : elle ne se remit que lentement des plaies profondes qui lui avaient t faites : le sjour de plusieurs monarques d'Austrasie, qui tenaient leurs cours en Alsace, la saintet des prlats qui gouvernaient l'glise de Strasbourg, mais surtout l'tablissement de plusieurs abbayes, qui produisirent un grand nombre d'hommes zls et vertueux, rtablirent petit petit l'glise catholique sur des bases solides et lui procurrent cet clat que le cours des sicles n'a fait qu'augmenter. Les religieux de l'ordre de S. Benot, en s'tablissant dans nos valles paisibles, jetrent les fondements d'un grand nombre de bourgs, d e1 er

1 Scis, Domine Jesu*.., semi-barbaras

cum, post romana studia,

ad

Rheni ut ego

ripas eodem cibo, pari frueremur

hospitto,

prifftis c'perim velie le colere. Hieron. epist. ad Rufinum*

S. D L E .1

5

tilles et J e villages , et convertirent les peuples la foi de Jsus-Christ. S. Dle ou Dicole, dont nous allons parler ne vivait la vrit pas en Alsace, mais sur les frontires de notre province; il appartient donc en quelque sorte notre sujet, d'autant plus que l'abbaye de Lure, dont il avait t le fondateur, fut annexe plus tard celle de Murbach, et son culte fut ainsi transplant chez nous. Dle naquit en Irlande d'une famille distingue et fut disciple de S. Colomban, avec lequel il quitta sa patrie vers Tan 585 pour le suivre en France. Colomban fut reu avec distinction la cour de Bourgogne, et obtint du roi la permission de btir un monastre. Il choisit cet effet le chteau d'Anegrai, situ dans les Vosges, et qui tait presque tomb en ruines, et y tablit une communaut. L a rputation de saintet dont il jouissait, lui attira une foule de disciples; il se vit oblig de fonder une seconde maison, appele Luocovium, Luxeuil . Dle, qui tait attach son pieux matre, le suivit Luxeuil, et fit d'admirables progrs dans la voie de la perfection. Quoiqu'il ment une vie fort2

x C'est ainsi que Massevaux, Thann, Saint-Amarin, Guebwiller, Munster, Andlau, Marmouticr, bersmunster, Haslach, Altorf, Neuviller, Wissembourg, etc., doivent leur origine a des glises ou des maisons religieuses. a L'abbaye de Luxeuil a donn naissance une petite ville renomme par ses bains et situe dans une contre agrable

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ig

JANVIER.

austre, on voyait cependant empreinte sur sou visage une sainte joie, et cette joie avait son principe dans le calme et la srnit de son me. S. Colomban lui demanda un jour d'o provenait ce contentement et cette galit d a m e qu'on remarquait toujours en lui. Dle lui r-* pondit avec une nave candeur : < J e suis si content et si gai, parce que rien ne peut ja mais me ravir mon Dieu. C'est l le caractre de la vritable pit. Aprs avoir pass prs de vingt ans dans les exercices les plus austres de la pnitence, il se vit envelopp dans la disgrce de S. Colomban, qui fut banni Tan 610 par les intrigues de la fameuse Brunehaut, et par ordre de son petit-fils Thierry, roi de Bourgogne. Dle voulut suivre son matre dans son exil, comme firent S. Gall et plusieurs autres religieux 5 mais ses infirmits l'en empchrent II s'arrta donc quelque distance de Luxeuil, dans un endroit appel depuis Lure, et qui appartenait alors un seigneur de la cour de Thierry, nomm Weifhar, Il y avait prs de cet endroit, sur une colline, une petite chapelle ddie S. Martin, et situe dans un bois pais. Il crut que ce lieu retir conviendrait parfaitement au genre de vie qu'il voulait embrasser, et il y construisit une petite cellule avec des troncs d'arbres j mais la calomnie vint le perscuter, et il eut beaucoup souffrir de la part de Weifhar. Aprs la mort de ce seigneur, sa veuve, touche de la patience du( 55

S. D L E .

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saint, lui abandonna la proprit du lieu, et voulant rparer en quelque sorte l'injustice de son poux, elle lui fournit de quoi tablir un monastre, qui devint clbre par suite des temps, et dans lequel Dle avait introduit la rgle de son matre et ami Golomban. Lorsque Clotaire II eut runi, en 6 1 5 , le royaume de Bourgogne a ses Etats, dans une tourne qu'il fit, il alla chasser un jour dans la fort voisine de Lure. Il eut occasion de voir le saint abb, et apprenant qu'il tait disciple de S. Colomban, il fit de grandes donations son nouveau monastre, le combla de faveurs pour l'engager ne point quitter ses Etats. Dle continua de donner sa communaut l'exemple de toutes les vertus, surtout d'une profonde humilit, d'une douceur et d'une bont inaltrables : sa charit clata en mille occasions diverses. Le Seigneur lui avait accord le don des miracles et de la contemplation un trs-haut degr. Les mortifications qu'il avait pratiques altrrent insensiblement ses forces, et tout lui annona sa dissolution prochaine. II vit arriver la mort avec ce calme et cette tranquillit d'me qu'il avait fait paratre toute sa vie, et pour mourir plus content, il fit lire en sa place S. Colombin, son filleul, l'un des Irlandais qui taient passs en France avec lui. Pour se dtacher tout fait du monde et pe songer qu' la grande affaire de l'ternit, il se retira dans une cellule carte, prs de laquelle on lui

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JANVIER. S. D L E .

avait construit un petit oratoire en l'honneur de la trs-sainte Trinit. Voyant sa fin approcher, il assembla ses disciples, et aprs les avoir exhorts la pratique des vertus et des austrits prescrites par la rgle de S. Colomban, il reut en leur prsence le saint viatique et rendit h Uieu se belle me, entre les bras de S. Colombin, le 18 janvier vers Fan 625. Son corps fut enterr dans le petit oratoire de la trs-sainte Trinit. Son nom est inscrit dans plusieurs martyrologes. Il ne parat pas qu'on ait jamais fait la leve de son corps : on prtend mme que les efforts que fit, quelques sicles aprs, la comtesse Hildegarde pour trouver ce corps et en prendre quelques os, fureait inutiles et suivis d'une punition divine. L'histoire de la vie et des miracles de S. Dle a t crite vers Fan g65, par un religieux de l'abbaye de Lure : dans cette vie, l'auteur parle de plusieurs saints voques de Strasbourg, dont on faisait alors la fte dans noire diocse.

92 8 JANVIER.

SS. PRIX et MARIN, martyrs. (ProjectusPrjectus et Marinas.)cr

ou

(Voyez DUCHESNE, tom. l . , scriptur. franc., pa. 6 7 2 ; TUTHEMIUS, De vins illust. ord. S. Benedicli, lib. 3 p. 1 3 4 ; MABILLON, Scul. 2 ; LE COIN T E , Ad annum 6 5 6 , 3 4 ; LAGUILLE Hist. d'Alsace, t o m . l . , liv. 7 , p a g . 7 4 ; SCHPFLIN , AlsaL illw>tr* tom. 2 , ^ . 9 7 , 4 1 ; Basilea sacra, p. 9 7 . )? er 7 9

7.

e

SICLE.

S. Prix, que l'glise a mis au nombre des martyrs qui ont souffert pour la justice plutt que pour la dfense de la foi, naquit en Auvergne de parents nobles et pieux, au commencement du septime sicle. Les dispositions qu'il ft paratre engagrent ses parents le confier de bonne heure aux religieux du monastre de S. Austremoine, tabli Issoire, sur l'Allier. Il fit de rapides progrs dans les sciences et fut mis plus tard sous la direction de S. Gens, alors archidiacre et, depuis, vque de Clermont . Les rares qualits qu'on remarqua dans le jeune Prix le rendirent cher tout le monde : chacun admirait les austrits qu'il pratiquait, ainsi que sa puret, sa modestie, sa pit et sa charit. Il avait fait ses dlices de la lecture de la Vie des saints, et il1

i C'est ainsi que nous appellerons la -ville episcopale d'Auvergne, quoique Clcrmont ne devnt le sige de Fvcquc que vers le huitime sicle, aprs la destruction de la ville d'Auvergne, capitale de la province du mmo nom,

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28

JANVIER.

composa lui-mme la vie de plusieurs martyrs du pays, tels que des saints Cassais, Victorin, Antholin, etc. L tude de l'criture sainte et de l'histoire ecclsiastique avait aussi un grand attrait pour lui. S. Gens, qui connaissait tout le mrite de son disciple, l'leva au diaconat et le consulta quelquefois dans les affaires d'administration de son diocse. Aprs la mort de S. Gens, Flix, son successeur, confia Prix la direction d'un monastre de filles, appel Candedin ou Champdain, et qui devint plus tard un couvent de Carmes dchausss. Dieu fit connatre dans cette maison la saintet de son serviteur par un miracle qu'il accorda ses prires pour sauver la vie un ouvrier qu'on croyait cras par la chute d'un pan de muraille* L'clat de cette action, joint celui de ses vertus, portrent l'vque l'ordonner prtre, malgr lui. Ce prlat tant mort, le peuple voulut lire pour lui succder le vertueux Prix; mais l'archidiacre Gayroal l'emporta par ses intrigues. Celui-ci ne put cependant jouir longtemps du fruit de son ambition; car il mourut quarante jours aprs son lection. Alors le comte d'Auvergne proposa aux fidles de nommer Prix, et celui-ci fut lev sur le sige episcopal de Clermont. Le saint pasteur gouverna son diocse avec un zle et une prudence admirables. Il tablit prs de la ville piscopale un couvent de religieuses et im grand hpital, qu'il dota magnifiquement, faisant ainsi le plus noble usage des biens que ses

SS. PRIX ET MARIN.

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parents lui avaient laisss- Ses prdications et l'exemple de ses largesses firent une vive impression sur l'esprit de ses diocsains, et plusieurs personnes d'une haute pit lui offrirent des secours pour l'aider dans ses charits. On compte parmi ces dernires une dame de qualit, nomme Claude, qui, n'ayant qu'une fille unique, avait donn quelques fonds pour l'entretien de l'hpital de Clermont et des pauvres du diocse. Aprs la mort de Claude, Hector, comte e t p a trice de Marseille, homme dbauch et violent, enleva la fille, au grand scandale de la province. Craignant les reproches de Prix, il se retira la cour de Childric I I , et pour donner le change cette affaire et cacher son crime, il accusa le saint vque de s'tre injustement empar des biens de la dame dfunte, qui appartenaient de droit sa fille, qu'il disait avoir pouse. Cette accusation obligea Prix d'aller la cour pour se justifier : il n'eut pas de peine confondre la calomnie d'Hector, et celui-ci, qui parat avoir encore t accus de conspirer contre la vie du roi, fut condamn mort et excut presque aussitt. Les parents d'Hector furent pousss au dsespoir par ce chtiment terrible, et rsolurent aussitt d'en tirer une vengeance clatante. Ayant appris que Prix revenait de la cour combl d'honneurs et charg d'assez fortes sommes d'argent pour les besoins de son diocse, ils apostrent quelques sclrats pour l'assassiner. Prix s'tait dtourn de sa route pour aller vi-

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JANVIER.

siter dans les Vosges un saint abb nomm Marin ou Amarin, et qui habitait un petit monastre construit dans un lieu appel Doroangus*> au milieu d'une des plus belles valles de l'Alsace. Marin tait retenu dans sa cellule par une livre pnible, lorsque Prix se prsenta et le gurit en faisant sur lui le signe de la croix. Marin, se voyant rtabli, en remercia vivement le Seigneur, et s'offrit, par reconnaissance, pour accompagner son bienfaiteur jusque dans son diocse : ils taient dj arrivs ensemble Vol vie, en Auvergne, lorsque les assassins aposts par les ennemis de Prix se prsentrent : comme ils ne connaissaient point celui qu'ils cherchaient, ils se jetrent d'abord sur Marin et l'assommrent. Prix, jaloux de se voir ainsi arracher la palme du martyre, rappela les lches sicaires, et leur dit : Vous vous tes tromps; c'est moi que vous cherchez, faites ce que vous jugez a propos. A ces mots, le plus dtermin d e l troupe, nomm Radbert, le pera de son pe. Le saint, se sentant frapp mort, dit Dieu : Seigneur, ne leur imputez pas ce pch, car ils ne savent ce qu'ils font. * Il reut aussitt un autre coup et tomba mort irre. On massacra en mme temps un acolyte nomm lide, qui tait seul rest avec lui. Ceci arriva le 25 janvier 674 Les reliques de S. Prix>}

1 Laguille prtend que le nom de Doroangus vient de la rivire de Tliur ou D u r , el du mont Rangen, si fameux par ses vins exquis.

SS. PRIX ET MARIN,

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demeurrent 'Volvic jusqu'au temps du roi Ppin, et furent alors transportes 1 abbaye de Flavigny, en Bourgogne, au diocse d'Autun, d'o on en transfra plus tard une partie dans une autre abbaye, prs de Saint-Quentin en Vermandois. Quant aux reliques de S. Marin, elles furent apportes en grande partie au monastre de Doroangus, qui fut nomm depuis cette poque monastre de Saint-Amarin. Ce monastre, ainsi que toute la valle, ad vinrent plus tard l'abbaye de Murbach; mais les abbs de celte dernire abbaye scularisrent les moines d Saint-Amarin, et le couvent devint ainsi une maison de chanoines, qui vivaient sous la protection des abbs de Murbach. Ce monastre si modeste donna naissance une petite ville, qui se forma autour de lui et qui est l'endroit principal de la valle. Le chapitre de Saint-Amarin fut transfr Thann en i44 9 P ordre des Pres du concile de Baie, et tabli dans l'glise de Saint-Thihaut On voyait encore autrefois dans la mme valle, Goldbach, un couvent construit en 1135 par un prtre nomm Berner, pour des ermites de l'ordre de S. Augustin. Ce monastre fut habit en i33o par des religieuses du mme ordre, et dirig par les moines de Murbach ; mais peu1 J a r

fut sans doute faite du consentement de l'autorit ecclsiastique, et si les abbs de Murbach l'oprrent, cela tenait un usage du sicle o la scularisation eut lieu,i

Celle scularisa lion

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dant le quinzime sicle il fut runi l'abbaye deMarbach, prs d'Eguisheim. l'entre de la valle de Saint-Amarin est situe la ville de Thann, dont la fondation, d'aprs le rcit.de l'auteur de la Chronique de T h a n n , tient du merveilleux. Plusieurs auteurs veulent y voir le Diatannium de Ptolme. Jrme de Guebwiller appelle Thann Pinetum* s a n 9 doute parce que cette ville porte dans ses armes un sapin : son origine remonte au douzime sicle. S. Thibaut, vque de Gubio (Egubium), en Ombrie, s'tait fait remarquer par ses immenses charits . Sur le point de mourir et n'ayant pas de quoi payer son fidle domestique, il dit ce dernier de prendre, aprs sa mort, l'anneau d'or qu'il portait au pouce. Le domestique excute Tordre de son matre, mais le pouce du saint vque suit l'anneau qu'il s'effojrce d'enlever. Le domestique inquiet s'enfuit avec son trsor, et de crainte de perdre cet objet si prcieux, il l'enferme dans le pommeau de sa canp.e, et prend le chemin des Pays-Bas, sa patrie. A la fin de juin de l'an 1161 il traverse l'Alsace, s'arrte au Vieux-Thann, et ,de l se prpare passer les Vosges par la valle de Saint-Amarin; mais oblig de se reposer sous un sapin cause, des fortesJ f 2 5

1 Chronikvon illustr., 2 Panegyr*

Thann, 4iCareL,

Colmar,

13665 et Schoepflin,

AlsaU

tom. 2 , pag.

pag, 2 1 .

' 3 S . Thibaut est le mme que S. Ubaltl, dont on fait la fte le 1 6 mai.

SS. PRIX ET MARIN.

5

chaleurs, il place son bton contre un arbre et s'endort/ Bientt aprs, voulant continuer sa route, il reprend son bton; mais tous ses efforts sont inutiles, le bton ne peut tre enlev et oppose la rsistance la plus opinitre- Le voyageur stupfait rclame le secours de la multitude; mais c'est en vain : alors il prend le parti de passer la nuit sous le sapin et de diffrer son dpart jusqu'au lendemain. Cependant les miracles Continuent, car le comte Frdric de Ferrette voit, du haut de son chteau d'Engelbourg, au pied duquel est situe la ville de Thann, au milieu des ombres*de la nuit, trois flammes s'lancer de la cime d l'arbre contre lequel est appuy le btoil en question. Le lendemain, ce seigneur* accompagn d'une suite nombreuse, se rend l'endroit indiqu pour vrifier la merveille qu'il avait vue pendant la nuit. Il apprend de la bouche mme du domestique tout ce qui s'tait pass au sujet du bton, et fit vu de construire une chapelle l'endroit o s'tait opr le miracle de la veille. Cette chapelle est aussitt visite par de nombreux plerins, on construit des auberges dans le voisinage, et c'est l l'origine de Thann. Nous livrons sans rflexions ce rcit au jugement de nos lecteurs . Thann possdel

i Pour perptuer le souvenir de ce fait, on place encore tous les a n s , le jour de la fte de S. Thibaut, trois troncs d'arbres devant l'glise, t le cur, aprs les avoir bnis, y met le feu. Ces troncs reprsentent les trois flammes sorties du sapin que le comte de Ferrette aperut.

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28

JANVIER.

une des pltis belles glises d'architecture gothique. Sa tour, dont la flche, lgamment cisele* a quelque ressemblance avec celles de Strasbourg et de Fribourg, fut commence en i35i et acheve en i 5 i 6 par l'architecte Remi "Walch. Le chur et la nef paraissent avoir t construits des poques diffrentes. En 1297 le comte Thibaut de Ferrette appela de Bitschwiller les religieux mineurs conventuels de l'ordre de S. Franois et leur cda son parc et sa maison de chasse.1

1 Un des ordres religieux les plus rpandus dans l'glise, c'est celui de S. Franois, dont nous allons tablir ici l'histoire. S. Franois, se voyant la tte de plusieurs disciples et dsirant leur donner une rgle, se rendit Home en 1 2 0 9 , et t part de son dessein au pape Innocent I I I , qui approuva verbalement son institut. Quelque temps aprs, le pieux fondateur assembla ses disciples, dont le nombre s'tait augment jusqu' cent vingt-sept, et leur adressa un discours fort pathtique sur le mpris du monde, la mortification des sens, etc.\ il leur composa une rgle, qui n'tait qu'un recueil des maximes traces par l'vangile pour parvenir la perfection en pratiquant les conseils. Il y ajouta quelques observations particulires. Cette rgle est base sur une pauvret exclusive. L e s cardinaux auxquels cette rgle fut soumise, pensaient d'abord que la pauvret porte si loin tait impossible, et ne furent pas d'avis de la faire approuver. L e pape, aprs avoir consult Dieu, l'approuva cependant, et leva S. Franois au diaconat. Cette premire rgle, qui tait fort courte, fut suivie d'une seconde ou d'une troisime un peu plus longue. L e pape Honorius III l'approuva solennellement par une bulle du 20 novembre 1223. Les Franciscains regardent comme chef-lieu de leur ordre la chapelle de Porlioncule, ainsi nomme parce qu'elle tait sur une petite portion de terrain appartenant a l'abbaye bndictine du mont Souhase, et dans laquelle leur ordre fut tabli. Cet ordre reut de grands privilges de plu-

SS. P R I X E T M A R I N .

17

Ces frres y tablirent une maison de leur ordre, qui subsista jusqu' la suppression des monastres en France, et produisit plusieurs bons thologiens; c'est un de ces pres qu'on doit la chronique cite ci-dessus. Les capucins s'tablirent aussi Thann en 1622 : 011 leur donna le terrain dit Baumgarten. E n 1627 furent dposs dans leur glise les chefs des SS. vierges et martyres Amiliana, Maria et Candida, que Henri de Reinach-Foussemagne, le mme qui en i638CS

sieurs papes, notamment de Sixte IV et de Lon X . Il a donn a Tglise prs de cinquante cardinaux et cinq papes. Cet ordre est divis en trois branches : le premier comprend les conventuels (ainsi nommes parce qu'ils vivent dans de grands couvents, et ont la permission de recevoir des rentes), et les observantins (ainsi appels parce qu'ils observent la plus strictepauvret). L e s obser van tins de France ont t appels corde-

iiers, parce qu'ils portaient une corde en place de ceinture. Parmi ceux-ci il y en a qu'on nomme de Vlroite observance, et on distingue parmi eux les franciscains dchausss d^Espagne^ qui suivent la rforme de S . Pierre d'lcantara. L e s rcollets furent tablis en Espagne en i5oo par Jean de Guadalupc, et ainsi nomms, parce qu'ils habitaient des couvents solitaires et faisaient plus particulirement profession de pratiquer la retraite. L e s capucins furent tablis en Toscane en i 5 2 5 par Mathieu Basclie d'Urbin. Leur habit est de couleur brune, et ils portent la barbe longue. L e s rcollets portent de mme l'habit brun, tandis que celui des cordeliers conventuels est noir. L e second ordre de S . Franois est celui des pauvres C l a risses, dont il sera parl plus bas. S . Colette Boilet a tabli "une rforme austre dans cet ordre. L a rforme des capucines, institue en i558 kNaples, et celle de l'Immacule Conception, fonde en 14^4 * Tolde, font partie de cet ordre. L e troisime ordre de S. Franois fut institu en 1221 ene1

Toscane, pour des personnes de l'un et de l'autre sexe, en-

2

l8

28 JANVIER.

s'tait illustr par la belle dfense du Vieux-Brisacli, avait rapports d'Allemagne, o il les avait trouvs dans l'glise du mont Saint-Nicolas, prs de Gttingue, et soustraits la fureur et la profanation de la populace protestante. L'glise du Vieux-Tliann, qui fut construite au commencement du quinzime sicle, renferme un trs-beau monument : c'est un tombeau de Jsus-Christ qui est regard par les architectes comme un chef-d'oeuvre : il fut pos dans cette glise en i5i6 et parat tre du aux soins des artistes qui ont achev la tour deThann. Il y avait aussi dans ce mme village un couvent de religieuses, qui y fut tabli, selon toute apparence, au douzime sicle et qui, en i44*> ^ cd une sainte fille nomme Hildegarde. Ajirs sa mort, on y tablit des chanoinesses rgulires de l'ordre de S. Augustin; mais en i534 il passa aux religieuses dominicaines, qui en furent en possession depuis.u t

gages dans le monde et le mariage, et qui l'assujettissaient k certaines pratiques compatibles avec leur tat, mais qui ne les obligeaient pas sons peine de pch. Ce n'est qu'aprs l a mort de S. Franois que les personnes de ce tiers ordre se sont runies en communaut, et ont fait les vux solennels de religion. S." Elisabeth tablit cet ordre en Hongrie Fan i a 3 i - Cet ordre se divise en diverses branches : plusieurs de ses membres se consacrent au service des fous et des malades. On les appelle en Espagne minimes infirmiers; d'autres portent le nom de pnitents et de pnitentes; d'autres enfin s'occupent de l'instruction des fidles et des fonctions du ministre, comme les frres mineurs.

SS. P R I X E T M A R I N .

ig

Cernay renfermait de mme dans ses murs un couvent de dominicaines, mais qui n'y subsista pas longtemps : les religieuses passrent Guebwiller vers la fin du treizime sicle. On voyait de mme prs de Cernay la prvt de Birlingen, qui est dmolie depuis longtemps; il n'en reste plus qu'une chapelle. A trois lieues de Thann, dans une charmanle valle, on voit la petite ville de Massevattx, qui doit son origine un monastre de chanoinesses nobles, fond sous Thierry IV, par Mason, fils d'Adelbert et petit-fils d'Elticon, duc d'Alsace, pre de S. Odile. La fondation de ce monastre est rappele dans un diplme de Louis le Dbonnaire, dat de 823. Mason avait fait construire sur une roche isole, dite Ringelstein, un chteau, o il venaiksouvent se distraire avec sa famille. Son fils unique eut le malheur de se noyer dans la Doller, et le pre afflig chercha quelque consolation dans la religion. De concert avec son pouse, il tablit dans la valle solitaire un monastre qui devait rappeler aux sicles futurs sa profonde douleur, et devenir un asile pour des vierges nobles dont la fortune ne rpondait pas la naissance. Il ft don cette abbaye de toute la valle circonvoisine et la mit sous la protection des vques de Ble. Ceux-ci, en qualit de suzerains, eurent la dfendre souvent contre les prtentions des comtes de Ferrette, qui exeraient les droits d'advocatie sur ce chapitre, surtout depuis le mariage du duc Albert d'Autrichec

20

28

JANVIER.1

avec Jeanne de Ferrette . Les contestations qui s'ensuivirent furent presque toujours prjudiciables l'abbaye, et les chanoinesses perdirent de fcette manire plusieurs privilges, que s'arrogea la maison d'Autriche. L'esprit de pit se conserva toujours dans ce monastre par les soins des abbesses, dont plusieurs taient distingues par leurs connaissances. Les chanoinesses, toujours tires des premires familles de la haute Alsace, ne faisaient point de vux solennels, l'abbesse excepte : elles suivaient peu prs les mmes statuts que celles de Remiremont et d'Andlau.

i Comme, d'aprs la dfense des canons de l'glise, il n'tait p i s permis au clerg et aux personnes consacres Dieu par les vux de religion, de se prsenter aux tribunaux sculiers , ni de faire les serments que les laques y prtaient, les abbayes y supplaient par le moyen des avous qu'elles se donnaient. Ceux-ci dfendaient leurs glises respectives par les armes, et au besoin se battaient en duel pour prouver le bon droit de leurs proLgcs. Mais les avous, devenus puissants par les biens que leur donnaient les maisons religieuses, firent h celles-ci souvent plus de mal que ne leur auraient fait des trangers. L e plus ancien exemple d'avou plaidant en Alsace pour une abbaye , est celui de 775 sous Cbarlemagne. Il s'agissait d'une discussion entre les monastres de Honau et de Corbie. L a manire de vider le diffrend et de connatre le bon droit, tait alors d'obliger les deux avous des parties opposes de tenir les bras tendus le plus longtemps possible* L'avou de Honau, qui tait sans doute plus robuste que celui de Corbie, gagna la cause en faveur de son abbaye, parce qu'il tint ses bras plus longtemps tendus que son adversaire.

SS. P R I X E T M A R I N ,

Non loin de l'ancien chteau de Rougemont on voit encore les restes d'un prieur appel Saint-Nicolas-des-bois, dans la valle de Belval, et fond en i ig3 par Raymond, comte de Barr, et Frdric, comte de Ferrette. Il fut d'abord soumis l'abbaye de Molesme, du diocse de Langres, en Champagne, berceau de l'ordre de Citeaux fond par S. Robert- Lopold, archiduc d'Autriche, le donna, en i 6 3 o , avec tous ses biens, ainsi que la chapelle de la Magdeleine, aux jsuites d'Ensisheim; mais les btiments furent dtruits pendant la guerre de trente ans. Celte chapelle servait autrefois d'glise un prieur de bndictines, appel le Val des Anges.31 JANVIER.

S. NICET,

ARCHEVQUE D E BESANON

(Nicellis).

(Voyez les Bollandistes, t. 2 , feb., p. de B e s a n o n . )7c

1 6 8 , et le Brviaire

SICLE.

En ce jour l'glise de Strasbourg fait commmoraison de S. Nicet, archevque de Besanon; il est juste d'en entretenir un instant nos lecteurs. Pendant le rgne de Thierry II, roi de Bourgogne et d'Austrasie, le clerg et le peuple levrent sur le sige mtropolitain de Besanon S. Nicet, homme distingu par sa sagesse et sa pit. Il dfendit avec beaucoup de zle la foi

22

5l

JANVIER.

S. N I C E T .

catholique contre les erreurs des hrtiques du temps, et fut en grande relation avec S. Grgoire Je Grand. Il tait trs-li avec S. Colomban et consacra les glises que ce digne abb avait fait construire dans les Vosges. A la demande de ce dernier, Nicet alla visiter les monastres d'Anegrai, de Luxeuil et de Fontaines, et adressa en diffreptes circonstances de touchantes exhortations aux nombreux religieux qui habitaient alors ces maisons. Lorsque S. Colomban fut oblig de quitter Luxeuil, Nicet lui offrit l'hospitalit la plus gnreuse et le reut dans sa ville pisco-r pale. Il lit tous ses efforts pour adoucir le sort de son ami, de sorte que Colomban nous apprend que son sjour Besanon tait pour lui plutt un sjour de dlices que de peine et d'exil, Nicet apprit par une inspiration particulire le jour de son trpas. Il convoqua son clerg, lui recommanda la fidlit la vraie doctrine de l'Eglise, l'assiduit aux devoirs du saint ministre, et s'endormit paisiblement dans le Seigneur le 20 janvier, aprs avoir gouvern le diocse de Besanon depuis 5go jusqu'en 611. Ses restes prcieux furent dposs prs de l'glise de SaintPierre, Besanon, et le ciel attesta sa saintet par plusieurs miracles.

231." FEVRIER.

S. BRIGIDE,pag.

e

V I E R G E E T ABBESSE.

(Brigida.)Chron.,l. ,er

(Voyez les Bollandistcs, t. i,feb.;liv. 8 , p a g . 9 0 , 9 1 ; Gcbwillcr, Pan.

KNIGSUO YEN ,Carol., pag.

2 3 9 , 2 7 8 , 4 2 7 ; LAGUILLE, Histoire d'Alsace, tom.er

3 3 ; GRAR-

DIDIER, Histoire de l'Eglise d e S t r a s b o u r g , t o m . l . , liv. 4, pag. 3 9 8 et suiv.)6/ SICLE.

Cette sainte abbesse est honore en Alsace depuis le huitime sicle : elle naquit Fochard, en Irlande. Elle reut, tant encore fort jeune, le voile des mains de S. Mel, disciple de S. Patrice, aptre de l'Irlande. S'tant construit une petite cellule sous un gros chne, elle s'y tablit et pratiqua toutes les austrits que l'esprit de pnitence pouvait lui suggrer : mais bientt elle se vit entoure de plusieurs jeunes vierges qui demandaient suivre son exemple et ses conseils. Brigide les runit en corps de communaut, car telle fut l'origine des maisons religieuses en Irlande. Nous n'avons presque point de dtails sur la vie de cette sainte, et quoique cinq auteurs en parlent, il est plus question dans leurs histoires des miracles de Brigide que de ses vertus : elle florissait au commencement du sixime sicle, et son nom est inscrit dans presque tous les martyrologes. On en a toujours fait la fte en France, en Allemagne, en Angleterre et en Ecosse. Au commencement du huitime sicle plusieurs

^4

1.

FVRIER.

missionnaires cossais et irlandais s taient labiis en Alsace dans une le dserte forme par le Rhin deux lieues au-dessous de Strasbourg, o est.situ de nos jours le gros village de la Wantzenau. Ils btirent, sous la direction de Benot, leur abb, une glise en l'honneur de l'archange S. Michel, et plusieurs petites cellules. Ils ne vivaient d'abord que du travail de leurs mains, annonaient la parole de Dieu aux peuples des contres voisines, et s'attiraient ainsi la bndiction du ciel et les faveurs des hommes. Un des premiers qui leur accordrent des bienfaits, fut Adelbert, duc d'Alsace, frre de S. Odile, pareillement fondateur de l'abbaye de S. Etienne, Strasbourg. Il existe encore un fragment d'un diplme en faveur de Honau, dat de Strasbourg du mois de juin 722. Les fils de ce seigneur imitrent la gnrosit de leur pre et cdrent au monastre de SaintMichel tout ce que leur famille possdait dans l'le o Honau tait situ. L'abb Benot ne pouvant plus, raison de son grand ge, s'occuper de la direction de l'abbaye, choisit un successeur, nomm Tuban, qu'il fit confirmer par le roi Thierri IV. Pendant l'administration de Tub a n , Honau vit ses biens s'augmenter tous les jours par la libralit des ducs et seigneurs de la province, et Ppin, maire du palais pendant le rgne de Childric I I I , lui accorda aussi ses faveurs. A la prire de Tuban, Ppin confirma toutes les donations qui avaient t faites au monastre jusqu' ce jour, et exempta Honau duc

S.

BRJGIDE.

droit de page dans tout le royaume de France. Cette abbaye fut mme soustraite par lui la juridiction des juges royaux, et il lui assura sa protection. A Tu ban succdrent Etienne et Bealus, tous deux hommes distingus par leur pit et leur zle pour la discipline monastique j mais les guerres civiles qui ravagrent la France vers la fin de la premire race de nos rois, devinrent funestes Honau; plusieurs de ses domaines furent alins : cependant Charlemagne, tant mont sur le trne, lui fit restituer tous ses biens. Sous la direction de Beatus le nombre des religieux de Honau devint si considrable, que, le monastre ne pouvant plus les contenir, l'abb en envoya un grand nombre dans d'autres contres fonder de nouvelles abbayes : de ce nombre furent les collgiales de Lutenbach, dans la valle de Guebwiller, Munster, en Suisse, et Aschalenbourg-sur-le-Mein, en Franconie, dans le diocse de Mayence. Beatus eut pour successeur Egidan. Ces cinq premiers abbs sont qualifis de saints dans le calendrier de l'ancien chapitre de SaintPierre le vieux, qui prtendait mme en possder les corps, ainsi que plusieurs reliques et le chef de S. Brigide, dont il est parl dans cet article. On montre encore de nos jours la tte qu'on suppose tre celle de S. Brigide, et que Ion dit avoir t apporte en Alsace par les Irlandais fondateurs de Honau ; mais Bollandus, dans son premier volume de fvrier, nous apprend que l'on vnre aussi Lisbonne, dansc e

1.*' FVRIER

l'ancienne glise des j s u i t e s u n e tle que l'on prtend tre celle de S. Brigide. Les anciens catalogues des abbs de Honau disent, que les six premiers religieux qui gouvernrent l'abbaye taient en mme temps vques. Il est vrai qu'on trouve dans quelques diplmes le nom d'vques donn aux abbs de Honau; ce qui fit croire quelques historiens que le diocse de Strasbourg avait eu deux vques pendant le huitime sicle, dont l'un gouvernait l'Alsace, et l'autre la partie du diocse situe au del du Rhin : mais rien ne justifie cette opinion. Ces vques de Honau taient peut-tre des vcpies lgionnaires sans sige fixe, ou des prlats qui avaient quitte leurs siges pour vivre dans des0

i L a socit des jsuites doit son tablissement S. Ignace de Loyola, qui en jeta les fondements dans l'glise de Montmartre Paris, et l'institua Rome en i538. Aux trois vux de chastet, de pauvret et d'obissance perptuelle, ils ajoutent un quatrime, par lequel les membres s'engagent aller partout o le souverain pontife les enverrait pour travailler au salut des mes. Le pape Paul I I I approuva cette socit par sa bulle date du 27 septembre i 5 4 o . Tout le monde connat les immenses services qu'elle a rendus a la religion et l'humanit par son zle rpandre la religion dans les paya les plus loigns, et par ses soins faire fleurir les sciences et les lettres. Personne n'ignore non plus les vexations qu'elle eut essuyer par une faction impie et jalouse de son mrite et do ses titres de gloire. Supprime d'abord par Clment X I V en 1 7 6 5 , cette socit fut rtablie en 1 8 1 4 P 1 pape Pie V I I . Elle compte aussi des maisons en Amrique, en Espagne, en Portugal, en Irlande, en Suisse, en Italie et en Gallicie, paya de Pologne soumis a l'Autriche,a r e

S.* D R I G I D E .

27

monastres, ou des abbs ordonns sans titre pour faire les fonctions episcopales dans leur abbaye. XI n'est pas constant quelle ft dans l'origine la rgle que suivirent les religieux de Honau. Plusieurs privilges dont jouissaient les abbs prouvent que ce n'tait pas celle de S. Benot, et d'ailleurs cette abbaye n'est cite nulle part avec celles qui, la mme poque, avaient embrass les constitutions de S. Benot en Alsace. Honau fut scularise, selon toute apparence, vers la fin du onzime sicle. Devenus chanoines, les religieux vcurent d'abord en commun avec leur prvt; mais ne se trouvant pas assez bien partags dans Jes biens et revenus du chapitre, que le prvt accumulait sur sa tte, ils s'en plaignirent l'vque de Strasbourg. Henri de Staleck, qui occupait alors le sige episcopal, couta leurs plaintes, lit faire une recherche exacte des revenus et en ordonna le partage d'une manire plus convenable. Les chanoines de Honau ne vivaient cependant pas sans inquitude; depuis longtemps le Rhin, toujours inconstait dans son cours, me-r iaait d'engloutir toute l'le, et on se voyait la veille dune catastrophe. Alors l'vque de Strasbourg , Conrad de Lichtemberg , transfra le chapitre de Honau Rhinau, petite ville situe sept lieues au-dessus de Strasbourg: cette translation eut lieu le 7 septembre 1290. Mais les chanoines y furent encore incommods, et craignant le mme malheur qu' Honau, ils demandrent s'tablir Strasbourg, et l'vque, G11-

28

l.* FVRIER.

1

laume de Dietsch, leur permit de faire l'office canonial dans l'glise de Saint-Pierre le vieux : l'acte de cette seconde translation est dat du 22 mai 1398. Le chapitre de Saint-Pierre le vieux tait alors compos de vingt chanoines j mais plus lard ce nombre fut rduit dix-huit Les prvts de ce chapitre taient presque toujours tirs de la haute noblesse de la province.l.w

FVRIER.

S. SIGEBERT III,

R O I D'AUSTRASIE.

(Sigbertus)e r

(Voyez FRKDGAIRE et son continuateur SIGEBERT DE GEMBLOURS; DOM CALMET, Histoire d e L o r r a i n e , t. l . ; SCHPFMN, Akat. itiustr.; GRANDIDIB , Hist. d e l'glise d e S t r a s b o u r g . )L'AN

656.er

Le saint monarque dont nous donnons ici la vie, tait fils de Dagobert I. , roi de France, et d'une jeune Austrasienne nomme Ragnetrude. Dagobert avait depuis longtemps scandalis son royaume, soit par son libertinage, soit par ses violences contre ceux qui avaient eu le courage de reprendre ses dsordres. G'est ainsi qu'il envoya en exil S. Amand, vque de Maastricht, et d'aprs Grandidier vque de Strasbourg, parce que ce prlat s'tait permis de lui reprocher ses murs dissolues. La naissance de Sigebert, que Dagobert eut de Ragnetrude, fut un coup de grce pour ce dernier, et voyant dans ce bienfait une marque visible de la protection du Ciel, il rsolut de rentrer en lui-mme et de changer

S. S G E B E R T III.

29

totalement de conduite. Il voulut en mme temps donner la France l'exemple de la rparation dune grande injustice, en rappelant de l'exil S. Amand et en le priant de se rendre la cour pour confrer le baptme son fils. S. Amand se rendit aux vux du roi et partit aussitt pour Clichi, o tait alors la cour. Dagobert se jeta ses pieds, lui demanda pardon de l'injustice qu'il avait commise son gard, et lui promit de faire lever son fils selon les maximes de l'vangile et de veiller ce qu'il ne suivt pas un jour les voies auxquelles il s'tait livr prcdemment. La crmonie du baptme se fit avec une grande pompe Orlans, et Charibert, frre de Dagobert, roi d'une partie de l'Aquitaine, j tait venu pour tre le parrain de son neveu. Dagobert fut au comble de la joie d'avoir un successeur de son trne et confia l'ducation de Sigebert au vertueux Ppin de Landen, maire du palais, qui joignait alors aux plus rares qualits du coeur et de l'esprit un talent particulier pour rendre la vertu facile et aimable. Il s'appliqua avec zle former son royal lve, et Dagobert lui tmoigna une entire confiance. A peine Sigebert eut-il atteint l'ge de trois ans que son pre le nomma roi d'Austrasie et lui donna pour ministres S. Cu1

1 L'Austrasie formait alors un royaume considrable, et comprenait la Provence, la Suisse, l'Albigeois, l'Auvergne, le Querci, les Cvennes, le Rouergue, la Champagne, la haute Picardie, la Lorraine, l'Alsace, le pays de Trves, le Palatinat, la Thuringe, la Franconie, la Souabe et le pays qui formrent depuis le cercle du Bas-Rhin. L a capitale du royaume tait Metz.

3o

l.

W

FVRIER.

nibert archevque de Cologne, et le duc Adelgise; mais l'administration du royaume fut confie Ppin: ceci eut lieu en 633. Il naquit un second fils Dagobert en 654, nomm Govis II, et le roi, craignant que la division n'clatt un jour entre ces deux princes au sujet des Etats du royaume, confirma Sigebert dans son partage et donna a Clovis Je royaume de Neustrie et une partie des tats de celui de Bourgogne. Aprs la mort de Dagobert, arrive en 658, les deux frres vcurent dans une union parfaite, et Sigebert, aid des lumires et des conseils de Ppin, qui continua ses services auprs de lui, montra, mesure qu'il avana en ge, les plus heureuses dispositions et promit un grand roi son royaume. Ppin avait su lui inspirer les sentiments d'une tendre pit. Sa prudence et sa valeur lui acquirent l'amour et le respect de ses sujets, et son nom devint redoutable ses ennemis. Les peuples de la Thuringe prirent les armes contre lui, mais il les fit rentrer dans le devoir et eut le bonheur de conserver la paix ses Etats. Les sages conomies qu'il introduisit dans les finances lui fournirent les moyens de faire d'abondantes aumnes et de verser de grandes sommes dans le sein des pauvres. Il fonda douze monastres et dota richement plusieurs glises, entre autres la cathdrale de Metz. Il se montra aussi trs-gnreux envers la cathdrale de Strasbourg et plusieurs autres glises de notre province.

S. SIGEBERT I I I .

5l

Ppin de Landen tant mort en 64, Sigebert donna la charge de maire du palais son fils Grimoald, et continua gouverner sagement ses tats jusqu' sa bienheureuse mort, arrive trop tt pour un royaume dont il faisait les dlices, et une famille dont il tait le modle et le soutien. Sigebert mourut le i. fvrier 656, lage de vingt-cinq ans. Ses peuples le pleurrent et l'invoqurent aussitt comme un saint. II fut enterr dans l'glise de l'abbaye de Saint-Martin, prs de Metz. En io65 on ouvrit son tombeau et le corps fut trouv sans corruption, et plac a ct du matre-autel. En 1 1 7 0 on le mit dans une chsse d'argent et il resta dans cet tat jusqu'en i553, qu'il fut transfr Nancy, lors du sige de la ville de Metz par Charles-Quint On invoque principalement S. Sigebert dans les calamits publiques : il est le patron de la ville de Nancy. Heureux le monarque qui, au lieu de se laisser blouir par le faste des grandeurs de la terre, sait au contraire mpriser un diadme fragile pour ceindre un jour son front d'une couronne imprissable. Les sicles les plus reculs rediront son nom avec admiration et reconnaissance, les peuples bniront sa mmoire, et la religion le montrera aux gnrations comme un de ses enfants chris, qui a foul aux pieds les charmes d'un monde trompeur, et amass des biens que rien ne pourra jamais lui enlever.cr

3a12 FVRIER.

S. LUDAN,

CONFESSEUR.

(Ludanus.)

(Voyez les Bollandistes, tom. 2 , feb., pag. 6 2 8 ; le Proprium dicesis Argent.; WIMPIIEMNG, De episcopis Argent.,pag. 2 5 ; KNGSHOVEN , Chronicon ,pag. 2 8 6 , 3 9 2 ; LAGUILI.K,

Histoire d'Alsace, tom. 1.*% liv. 1 0 , p a g . 1 1 7 . )L'AN

1202.

Nous sommes tous appels la saintet- ce doit tre notre seul soin en ce monde. C'est l l'affaire principale qui doit nous occuper sans cesse, et laquelle toutes les autres doivent tre subordonnes : la perdre de vue, c'est s'exposer des regrets ternels et la perte d'un bien dont rien ne peut compenser la valeur. Il est vrai que nous rencontrons dans ce monde mille obstacles qui semblent nous en loigner jamais. Obstacles de la part de nous-mmes; car nous portons en nous des ennemis perfides, qui pient tous les moments pour nous surprendre et nous rduire en servitude : ce sont nos passions, nos habitudes drgles, les penchants de notre nature corrompue, qui exercent si souvent un empire tyrannique sur nous. Obstacles de la part du monde; car nous vivons dans des temps difficiles, o le monde emploie toutes sortes d'artifices pour nous entraner dans des voies dont le terme est la perdition. Mais que ne peut une foi vive, soutenue par la grce du Seigneur? et quels obstacles sont assez puissants pour qu'elle n'en puisse triompher, l'exemple de tant de hros du christia-

S. L U D A N .

55

nisme? Celui dont nous allons ici retracer la vie, a eu sans doute de nombreux combats livrer, avant d'arriver la perfection chrtienne; mais il a su mourir aux inclinations de la nature, fouler aux pieds les appas sducteurs de la terre, et tout quitter pour conqurir le ciel. Ludan naquit en Ecosse et tait fils du duc Hildebold. L'histoire ne cite rien de son jeune ge; il parat cependant qu'il le passa dans la pratique des devoirs et des vertus du christianisme, puisque aprs la mort de son pre il distribua aux pauvres et aux glises son riche patrimoine, et fonda un hospice pour les trangers et les malheureux de toute espce. Pour fortifier davantage l'esprit de religion qui dominait en lui, il rsolut de faire le voyage de Rome et d'aller visiter les tombeaux des aptres SS. Pierre et Paul. A son retour de Rome, il passa par la Suisse et vint en Alsace. Il s'arrta dans les environs d'Erstein et s'endormit sous un arbre du sommeil des justes, le i. fvrier 120.2. Son corps fut transport dans l'glise paroissiale de Hipsheim, situe prs de la grande route de Strasbourg Colmar, et son tombeau devint ds lors clbre par l'afluence des fidles qui venaient de toutes parts rclamer sa puissante intercession auprs de Dieu. Cette dvotion S. Ludan s'est maintenue depuis cette poque, et les chrtiens ont reconnu le crdit dont jouit au ciel ce serviteur de Dieu, par une infinit de grces et de gurisons dans diverses maladies.cr

3

34

12

FVRIER.

On avait trouv dans la valise que portait sur lui le pieux plerin, un crit qui faisait connatre son nom, celui de son pre, sa qualit de chrtien , et que c tait par esprit de religion qu'il avait entrepris son voyage. Les Sudois dtruisirent son tombeau pendant qu'ils assigeaient Benfeld, en i632; mais il a t rtabli depuis, et on le voit encore de nos jours dans l'glise qui porte le nom du saint. Son culte est trs-ancien dans la basse Alsace. L'impratrice Ermengarde, pouse de Lothaire IL, fonda Erstein, vers l'an 8/j.o, du consentement de l'empereur, et dota richement un monastre pour des clianoinesses qui taient tires de la noblesse alsacienne. Le pape Lon IV confirma cette fondation et, outre de grands privilges qu'il accorda cette maison, il l'enrichit encore de plusieurs prcieuses reliques, entre lesquelles taient le chef de S. Ccile et quelques parties des corps des SS. martyrs Flix et Adaucte. K O E N I G S H O V E N (Chrome., p. 106) rapporte que le corps du pape S. Urbain II y fut aussi transfr. W I M P H E L I N G nous dit ( CalaLog. episcopor. argentin., p. 24) qu'une des abbesses d'Erstein, ayant t lue d-une manire irrgulire, envoya l'archevque de Mayence le chef de S. Ccile pour l'engager confirmer son lection. Les religieuses n'taient point soumises la rgle de S. Benot, comme Font pens quelques auteurs ; car l'vque de Strasbourg, Berthold, reconnut, en i 3 4 5 , que depuis un temps immmorial ellese

S. L U D A N .

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avaient t, comme les dames d'Andlau, chanoinesses sculires. L'impratrice S. Adlade, mre dode l'empereur Otlion I I , ajouta, en 974* maines du monastre d'Erstein, le village d'Eberstein, dans le pays de Bade, et S. Cungonde lui donna, en 1 2 2 3 , le village de Kuenheim. L'empereur Otlion L , se trouvant en Alsace en g53, fit don du monastre et de toutes ses dpendances la reine Berthe, mre de son pouse Adlade. Bertbe conserva cette donation jusqu' sa mort. Il ne faut pas confondre Berthe, mre de S. Adlade, avec S. Berthe, abbesse de Blangy en Artois, dont les reliques furent apportes Erstein en 895, par l'abbesse Hersende, qui vint habiter ce monastre avec ses religieuses, parce que celui quelles occupaient avait t brl et dtruit par les Normands. La translation de ces reliques fut signale par plusieurs miraclesj ces reliques furent rapportes Blangy dans le onzime sicle (voyez G R A N D I D I E R , manuscrits du tome 3. ). La rgularit et la pit, aprs avoir longtemps fleuri Erstein, mritrent sans doute aux chanoinesses l'affection et les libralits des princes; mais celles-ci ayant dgnr de leur ancienne ferveur, un affreux dsordre se glissa parmi elles. W I M P H E L I N G en fait une peinture horrible, ce qui prouve que ce n'est pas sans raison que cea u x c 1 er e e e

1 pouse de l'empereur Henri I I , mis comme elle au nombre des saints.

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12 FVRIER.

monastre a t supprim dans la suite, et que ses biens ont t runis l'Eglise de Strasbourg. Il n'y a que quelques annes qu'on en a dmoli l'glise.1 2 FEVRIER.

S. BENOIT D'AJNIANE, R F O R M A T E U RD'ALSACE, ABB D E M A U R M O U T I E R .1

DES ABBAYES

(Benedictus

nianensis)(Voyez MABILLON, Aela S. ord. Bened., tom* 5 , pag. 1 9 1 , 2 1 7 ; HMOT, Histoire d e s ordres religieux, tom. 5 , p . 1 3 9 ; BULTEAU, Histoire de l'ordre d e S . Benoit, liv. 5 , c h a p . 2 , pag. 3 4 2 ; GRANDIDIER, Histoire de l'glise d e S t r a s b o u r g , liv. 4 , p . 3 2 9 , 3 3 5 . )L'AN

821.

S. Benot, fils d'igulfe, comte de Maguelone, naquit en Languedoc vers l'an 760. Sa naissance et les heureuses qualits qu'on dcouvrit en lui,1 Benoit d'Aniane est clbre dans l'Eglise pour avoir introduit la rforme dans un grand nombre de monastres, en y faisant revivre l'esprit de S. Benoit. L'ordre des bndictins a t fond au mont Cassin, par S. Benot, pendant le sixime sicle. L a rgle que ce saint patriarche donna ses disciples roule principalement sur le silence, la solitude, la prire, l'humilit et l'obissance. Elle fut adopte successivement par tous les moines d'Occident. On comptait, pendant le dernier sicle, plus de trente mille maisons o elle rgnait, y compris les diffrentes congrgations, qui n'en sont que des modifications plus ou moins conformes la rgle primitive. Depuis l'an 900 Tordre de S. Benot s'est divis en plusieurs rformes ou congrgations. L a premire fut celle de Cluni, qui reut ce nom d'une abbaye situe dans l'ancien diocse de Mcon, et fonde vers l'an 9 1 0 par Guillaume le Pieux, duc d'Aquitaine. Elle a produit plusieurs saints et un grand nombre d'hommes savants. L a congrgation de Cava a pris son nom d'un grand monas-

S.

BENOIT

D'NIANE,

Z*]

lui frayrent le chemin des dignits, et il occupa, sous Ppin et Charemagne, la place d'chanson de la cour. Mais au fate des honneurs il n'oublia jamais qu'il est d'autres biens que ceux de ce monde, aprs lesquels le chrtien doit soupirer, et plus il apprit connatre la vanit et le nant des choses de la terre, et plus il les mprisa. Ne pouvant pas quitter selon son dsir remploi qu'il occupait la cour, il se dtacha cependant si sensiblement du monde, qu'il menait la vie la plus mortifie au milieu du tumulte de la terre, soupirant sans cesse aprs le moment de se consacrer entirement Dieu et de s'ensevelir dans la solitude. Il se prsenta enfin une occasion et Benot en profita pour son salut. Son frre se noya dans le Tessin, prs de Paviej S. Benot,tre situe dans la province de Salcrne, fonde en 980 sous l observance de Cluni. Cette congrgation comprenait vingt-neuf abbayes et quatre-vingt-onze prieurs. L a congrgation de S . J u s t i n e , institue en i49 P Louis Barbo, fut adopte par un grand nombre de monastres d'Italie. Celle du mont Cassin, s'y tant unie en i < 4 lui donna son 5 >> nom. L a congrgation de Savigny,. fonde en 11*3 par S. Vital, disciple du bienh. Robert d'Arbrissclles, fut unie l'ordre de Citeaux en 1153. L a congrgation de Tirou, fonde en 1 1 0 9 par le bienh. Robert d'Arbrissclles, passa dans celle de S. Maur en 1639. L a congrgation de Bursfeld fut tablie en 1461. L e s abbayes du diocse de Strasbourg lui furent soumises jusqu'en 1617, que Lopold d'Autriche, vque de Strasbourg, forma une congrgation particulire, compose des abbayes de Maurnxoutier, bersmunstcr, Altorff, Schuttcrcn, Gcngenbach, Schwartzache a r 1

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12

FVRIER.

qui voulait le sauver, fut sur le point de se noyer lui-mme, et depuis ce moment il ne songea plus qu' se donner Dieu. Il fit part de son projet un vertueux solitaire, qui le fortifia dans son dessein, et il partit aussitt de chez lui pour se rendre Aix-la-Chapelle; mais s'tant arrt en chemin l'abbaye de S. Seine, cinq lieues de Dijon, il y prit l'habit religieux en 774 Il vcut dans cette maison pendant deux ans dans la pratique de la plus rigoureuse pnitence, rduisant son corps en esclavage, ne mangeant que du pain, qu'il arrosait souvent de ses larmes, s'interdisant l'usage du vin, n'accordant que quelques heures de repos son corps, couchant sur la dure, et passant quelquefois toute la nuit en prires, nu-pieds sur le pav de sa cellule, mme au plus fort de l'hiver. Ainsi, nonet Ettenbeimmunster, ainsi que des abbayes de religieuses de Saint-Jean-des-Choux et de Eiblisheim. L a congrgation de Monte-Virgine fut institue par S . Guillaume en 1 1 1 9 . L a rforme de la congrgation de S. Vannes et S. Hidulphe, tablie en Lorraine en 1604 par Dora Didier de la Cour, donna lieu celle de S. Maur, qu'embrassrent les bndictins franais en 1 6 2 1 . Cette dernire congrgation a rendu les plus grands services a la religion et aux lettres. Elle a t approuve par les papes Grgoire X V et Urbain V I I I . Sa principale maison tait l'abbaye de Saint-Germain-des-Prs Paris. Elle tait particulirement le sjour de la pit et des lettres. Nommer d'Achry, R u i n a r t M a b i l l o n , Flibicn, Bouillard , Tuillier, Martne , Maur, Montfaucon , Vaisselle , Lcccrf, Bouquet, Martin, etc., c'est nommer des savants du premier mrite, et dont les ouvrages immortels attestent la plus vaste rudition, etc.

S. B E N O I T D ' N I N E .

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content de suivre la rgle de S. Benot, il pratiquait encore les austrits que prescrivent celles de S. Pacme et de S. Basile. Le Seigneur rcompensa la vertu de son serviteur et versa sur lui d'abondantes grces. Devenu cellerier de l'abbaye, il montra dans cet emploi toute l'tendue de ses vertus et les grandes capacits que Dieu lui avait donnes pour le gouvernement d'une communaut. Les religieux, qui en furent tmoins, le choisirent, aprs la mort de leur abb, pour les diriger; mais Benot, qui songeait depuis longtemps rtablir la rgle de S. Benot dans toute sa puret, et qui connaissait l'aversion des religieux ses frres pour la rforme projete, refusa la charge qu'on lui proposait; il quitta mme ce monastre en 780 et retourna en Languedoc, o il se lit construire une espce d'ermitage dans une terre de sa famille, quelque distance d'une chapelle ddie S. Saturnin, et sur les bords d'un petit ruisseau nomm Aniane. Sa vie, dans cette solitude, fut plutt celle d'un ange que d'un mortel; il ne faisait pour ainsi dire que prier et demander Dieu de connatre sa sainte volont pour y correspondre fidlement. La rputation de saintet qu'il s'tait acquise, lui attira en peu de temps plusieurs disciples, qu'il ne voulut pas admettre d'abord; mais press par de continuelles sollicitations, il en reut quelques-uns. Ces pieux solitaires ne vivaient que du produit de leurs travaux, 11e mangeaient ordinairement que du pain, et, aux jours de grandes

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12

FVRIER.

ftes, ils y ajoutaient un peu de vin et de lait, que la charit des fidles leur offrait. Benot leur donnait en tout l'exemple et tait la rgle vivante qu'ils observaient. Il n'tait distingu d'eux que par sa vertu et la vnration qu'il leur inspirait. Cependant le nombre de Ses disciples augmentait de jour en jour, et Benot vit avec peine qu'il ne pouvait les loger tous; alors il btit dans Je voisinage un monastre plus spacieux et plus commode. Il avait une si haute ide de la pauvret que doivent pratiquer les moines, qu'il ne se servait l'autel que de calices de bois, de verre ou d'tain, et quand on lui ft don de quelques ornements prcieux, il les envoya d'autres glises; mais plus tard il changea de conduite cet gard, et fit btir une magnifique glise, n'pargnant rien de ce qui pouvait contribuer son embellissement. Benot se vit en peu de temps la tete de trois cents disciples, qui marchaient tous d'un pas gal dans la voie de la vertu. Les soins qu'il donna son monastre ne l'empchaient pas d'exercer encore une espce d'inspection sur les monastres de Provence, de Languedoc et de Gascogne. Il tablit partout une rforme svre; mais il y apporta plus tard quelques adoucissements, par condescendance pour la faiblesse humaine. Le saint abb ne borna pas ses soins faire fleurir partout la discipline monastique; il montra le mme zle maintenir dans ioule son intgrit la puret de la foi. Il assista en 794 au

S. B E N O I T D ' N I N E .

4

l

concile de Francfort, o furent condamnes les erreurs de Flix d'Urgel, qui avait attaqu la lliation divine de Jsus-Christ; il composa mme plusieurs traits pour dfendre la doctrine de l'Eglise catholique. Benot tait alors regard comme l'oracle de la France, et jouissait de la plus haute considration. Le relchement s'tait introduit insensiblement dans les monastres des Gaules, et les laques avaient dj commenc sous CharlesMartel les piller et s'en faire nommer abbs. Ceux d'Alsace avaient t prservs de ces dplorables abus par le zle de S. Pirmin, vque rgionnaire, qui profita de son crdit auprs de Charles-Martel pour rformer quelques dsordres qui s'y taient glisss. La discipline se rtablit sous Charlemagne, mais ce pieux ouvrage fut entirement consomm par les soins infatigables de S. Benot d'Aniane, que Louis le Dbonnaire mit la tte de tous les monastres, et qui gouverna prs d'une anne (en 816) l'abbaye de Maurmoutier, la plus ancienne d'Alsace. Dix mois suffirent cet illustre restaurateur de la discipline monastique, pour rtablir dans cette maison la rgle de S. Benot, par les moyens des religieux d'Aniane qu'il avait amens avec lui. Benot comptait terminer ses jours Maurmoutier, mais Louis le Dbonnaire, voulant le rapprocher de sa personne pour le consulter plus icilement, fonda pour lui le monastre d'Inde, deux lieues d'Aix-la-Chapelle, sjour ordinaire de l'empereur.

/ p

12

FVRIER.

S. B E N O I T

DIMANE.

Le saint homme prsida, en 817, une assemble d'abbs, tenue pour le rtablissement de la discipline monastique, et c'est lui en grande partie que sont dus les canons que le coricile d'Aix-la-Chapelle publia la mme anne pour la rformation des moines et des autres ecclsiastiques qui avaient des bnfices. Les travaux continuels auxquels s'tait livr le vertueux abb, les austrits, les jenes et les veilles, avaient altr sa sant au point que ses dernires annes n'taient qu'une maladie continue. Aprs s'tre prpar la mort, il vit arriver avec une grande joie son dernier moment et rendit son me son crateur le 1 . fvrier 821, lage d'environ soixante-dix ans. Il fut enterr dans l'glise du monastre d'Inde, appele depuis du nom de S. Corneille, parce qu'elle est ddie au saint pape de ce nom. Nous devons S. Benot d'Aniane : 1. un recueil de rgles, qu'il rdigea tant encore simple religieux, et qui a t imprim Rome en 1661, sous le titre : Codex regularan a S. Benedictoer

Ariian, auctus a Luc HolsteiniOj etc.; 2. un

0

livre d'homlies l'usage des moines; 3. un Pnitentiel; 4- *e Concordance des rgles monastiques. Ce grand homme avait fortement cur d'tablir partout des bibliothques dans les abbayes : son nom approche en France et en Allemagne de la mme clbrit que celui du patriarche S. Benot en Italie.UI

452 FVRIER.

S. GERMAIN, A B B D E G R A N F E L S , etS. RANDAUT, martyrs. {Germanus et Kandoaldus.)(Voyez les Bollandistes, tom. %,feb.,pag. 2 6 5 ; MABIIXON, In aclis*S. ord. S. Bened. loin. 2, pag, 4 9 0 ; LECOINTE, Ann. cccls. franc. tom. 3 , p . 5 4 2 ; LAGUILLE, Histoire d'Alsace, lom. l.* , liv. 1 0 , p a g . 1 1 8 ; GRANDIDIER, Histoire d e l'Eglise de S t r a s b o u r g , liv. 3 , p a g . 3 0 6 . )> ? r

V E R S L ' A N 662.

Germain tait fils d'un riche snateur de Trves , et fut lev sous les yeux de S. Modoald, vque de la mme ville . Form l'cole de la sagesse chrtienne, il apprit de honne heure mpriser les biens fragiles de ce monde, et il avait peine atteint l'ge de dix-sept ans qu'il distribua son patrimoine aux pauvres, renona toutes les esprances qui l'attendaient, et alla vivre sous la conduite de S. Arnoul : celui-ci venait de quitter le sige episcopal de Metz et la charge de ministre d'tat qu'il avait exerce la cour du roi Dagobert, et s'tait retir dans une solitude de Lorraine, appele depuis Remiremonl. Germain avait pass sa jeunesse dans l'innocence; son cur n'avait pas t amolli par les plaisirs de la terre, son me tait pure et recevait d'autant plus facilement les impressions de la grce et des beaux exemples d'Arnoul. Aprs quelques mois de sjour avec ce vertueux matre, Germain,1

1 S. Modoald est honor a Trves le 11 mai.

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21

FVRIER.

gotant de plus en plus combien le joug du Seigneur est doux, crivit son frre Numrien et lui fit part du bonheur qu'il avait trouv dans la solitude. Numrien accourut pour partager cette flicit avec son frre, et ils se retirrent aussitt ensemble dans le monastre que S. Romaric venait de fonder par le conseil de S. rnoul. On suivait d'abord dans cette maison la rgle de S. Colomban, Les deux frres furent en peu de temps le sujet de l'admiration et de l'dification de cette communaut naissante; mais ils n'y restrent pas longtemps, car le Seigneur les appela au monastre de Luxeuil, alors gouvern par S. Walbert. Germain s'y distingua, et le saint abb, connaissant son mrite, l'envoya au monastre de Granfels ou Granval, qui venait d'tre fond dans une valle du diocse de Baie, mais qui faisait alors partie du duch d'Alsace. Le duc Gondon avait demand Walbert un homme capable d'asseoir sur des bases solides la discipline dans ce nouveau monastre, et cet homme1

i S. Romarc tait issu du sang royal de France, et avait exerc plusieurs charges publiques k la cour de Clotaire I I . Ayant vendu ses biens et renonc ses dignits, il fonda uo monastre d'hommes et de filles dans son chteau de Habend, situe dans les Vosges en Lorraine, alors du diocse de Tout. Ce monastre, habit par des moines et des religieuses qui suivaient la rgle de S. Colomban, fut dtruit par les Huns dans le dixime sicle. Il fut rebti plus tard, non plus la meme place, mais dans une plaine au del, de la Moselle. On a depuis substitue aux religieuses un chapitre noble de chanoinesses.

S. G E R M A I N E T S. R A N D A U T .

4^

on croyait Tavoir trouv dans Germain. Celui-ci partit donc la tte de quelques religieux, et se chargea de la direction de Granfels. Il gouverna cette maison avec tant de sagesse et de pit, qu'on l'obligea encore de se charger de la conduite des deux monastres de Werd et de Saint-Ursanne , probablement cause de la distance de ces deux monastres de l'abbaye de Luxeuil, dont ils paraissent avoir dpendu auparavant. Germain gouvernait en paix les trois monastres dont il tait abb, et ce calme fut trs-favorable l'tablissement de la discipline : il sut en profiter pour l'avancement de ses religieux dans la perfection de leur tat, lorsqu'il s'leva un orage qui servit porter sa vertu au degr le plus minent et lui fit mriter ]a couronne du martyre. Comme il prenait aussi soin du salut des peuples de la valle et des environs, il-fut extrmement touch des violences qu'exerait sur eux le duc Boniface, successeur de Gondon , et il se permit d'en faire des remontrances ce seigneur. Celuici , qui tait d'un caractre farouche, se mit ravager la valle la tte d'une troupe de soldats. Germain, l'ayant appris, alla au-devant de lui avec le prieur de son monastre, nomm Ran1 a 3

i Voyez, au ao mars, la vie du bienh. Remi, yque de Strasbourg. at Voyez, au 16 dcembre, la vie de S. Ursanne. 3 Schpflin et Grandidier prtendent que le duc Boniface tait dj mort vers Pan 6 6 2 , et que le meurtre des S S . Germain et Randaut doit tre imput thicon, pre de S . Odile.e

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21

FVRIER.

daut, et ft porter avec lui des reliques et le livre des vangiles, esprant arrter sa fureur par le respect qu'il aurait pour ces^ objets sacrs. Il lui adressa de nouveau dans l'glise de S. Maurice de sages remontrances. L e duc feignit d'abord d'en tre touch et promit de laisser en paix les habitants de la valle- Le saint, qui n'tait pas fort convaincu de sa sincrit, voulut demeurer en prires dans l'glise du saint martyr, ne sachant pas qu'il allait lui-mme obtenir sous peu le mme bonheur de mourir pour Jsus-Christ, lorsqu'il apprit que les soldats continuaient leur pillage et leurs atrocits. Il se mit donc en route pour gagner son monastre avec Randaut ; mais bientt ils furent arrts en chemin par les gens du duc, qui les dpouillrent d'abord de leurs robes, et Germain, voyant qu'on allait leur donner la mort, fit Dieu le sacrifice de sa vie et exhorta son compagnon l'imiter. Quelques instants aprs on les pera de coups de lance, pendant qu'ils priaient Dieu pour leurs bourreaux. Leur mort arriva le 21 fvrier vers l'an 662. Les religieux de Granfels taient l'office lorsqu'on vint leur en apporter la nouvelle : ils passrent toute la nuit faire la recherche des deux corps, qu'ils portrent d'abord dans l'glise de Saint-Ursanne, puis en celle de Saint-Pierre de Granfels. La ceinture de S. Germain, qu'un frre avait ramasse sous les pieds des assassins, fut suspendue au-dessus de l'autel comme une prcieuse relique, et on rapporte que Dieu, en considration de son ser-

S. GERMAIN ET S. RANDAUT.

47

vileur, la fit servir rendre la sant un malade. Il se fit encore d'autres miracles qui contriburent rtablissement de*son culte dans le diocse de Baie et dans la province ecclsiastique de Besanon. Le tombeau de S. Germain devint dans la suite un plerinage clbre, et on en fit l'ouverture en 14-77* ^ furent trouvs entiers, sans qu'il part qu'on y et touch depuis la spulture du saint, c'est--dire depuis environ huit cents ans. Le monastre de Granfels resta sous la dpendance de l'abbaye de Luxeuil jusqu' sa scularisation, arrive dans le douzime sicle. Il se forma l'entour une petite ville,, qui porte encore le nom de Moutier-Granval. Lorsqu'en i53o toute la valle, ainsi que Granval, embrassrent la prtendue rforme de Calvin, les chanoines se retirrent Delmont et y tablirent leur chapitre, qui s'y maintint jusqu' la rvolution franaise. Ce petit pays ayant alors t incorpor la France, le chapitre fut supprim.e s o s

482 5 FVRIER.

S. LOBARDE,

ABB, FONDATEUR DE

L ' a b b a y e

DE

MAURMOUTIER.

(Leobardus.)pag. 5 1 ; MAEILLON , in

(Voyez Coccius in rege Dagoberto, Annal, ordinis S. Bened., tom. l . ; CRUSIUS, Annal,cr e r

tom. 1 ; LECOINTE, Ann. ecclsiast., suev., tom. 1 ; LAGUILLE, Histoire

d'Alsace, tom. l . , liv. 6 ; SCHPFUN, Ah. ill.> t. 2 , p . 2 1 3 ; GRANDIDIER, Histoire de l'glise de Strasbourg, liv. 4 . ) VERS L'AN 6l8.

Rien ne prouve mieux combien la religion tait florissante en Alsace pendant les septime' et huitime sicles, que l'tablissement des nombreuses maisons religieuses qui furent fondes cette poque dans cette province. Plusieurs pieux solitaires, accourus des pays trangers, s'tablirent au pied des Vosges, dans des valles incultes, couvertes de bois pais ou d'eaux stagnantes, et hrisses de rochers. La rputation de saintet dont jouissaient ces hommes vertueux, qui avaient quitt le monde pour s'attacher plus fortement Dieu, leur attira en peu de temps un grand nombre de fervents disciples qui dsiraient marcher sur leurs traces. Ds lors les rois, les vques, les seigneurs et les citoyens aiss du pays consacrrent de fortes sommes d'argent la construction de plusieurs monastres pour servir de retraites ces solitaires, et telle est l'origine de ces clbres abbayes, dont l'impit du dernier sicle a mconnu l'utilit et le but. Par les travaux de ces saints anachortes, l'Alsace changea

S. LKOBARDE.

49

en quelque sorte de face. Les princes leur avaient cd de vastes terrains; mais ce n'taient que des dserts. Les religieux dfrichrent les terres, desschrent les marais, transformrent en jardins fertiles ces champs frapps jusqu'alors d une ternelle strilit, et par l ils favorisrent les progrs de l'agriculture et de la population. C'est ainsi qu'ils jetrent les fondements de cette prosprit qui s'est dveloppe plus tard avec tant de succs, et qui fait de nos jours de l'Alsace un des plus beaux fleurons de la couronne de France. Mais ces bienfaits, dj si grands en eux-mmes, ne sont que le prlude de beaucoup d'autres que notre province doit aux institutions religieuses. En arrachant d'abord la terre une fcondit si admirable, les moines pourvurent leur existence; mais, anims d'un saint zle pour le salut de leurs. frres, ils prchrent aux peuples encore plongs dans les tnbres de l'idoltrie la connaissance du vrai Dieu, et leurs exhortations, jointes l force des beaux exemples de vertu qu'ils donnrent, firent de ce peuple, grossier et barbare, une nation polie et bienfaisante : les religieux ont donc commenc la civilisation chez nous. Ils ont renvers ce mur de sparation qui existait entre les peuples, en runissant les hommes sous les lois d'un mme Dieu, sous les bannires d'une mme religion , et en cimentant cette union par une charit commune. Ils ont appris aux riches et aux grands voir des frres dans tous les hom4

5o

2L> f v r i e r .

mes, soulager la misre des malheitreux; euxmmes en donnaient l'exemple et versaient de grandes aumnes dans le sein de l'indigence. Bientt les peuples, frapps de tant de bienfaits et attirs par la saintet de ces hommes apostoliques, cherchrent profiler davantage des lumires et des vertus de leurs picuk matres et s'tablirent aux environs de ces sanctuaires de la religion. L'Etat recueillit peu aprs les fruits de ces heureux dveloppements de l'industrie et de la civilisation; car les maisons religieuses devinrent presque autant de sources de richesses nationales, qui contribuaient par toutes sortes de moyens aux besoins *et aux charges publics. Mais il est un autre genre de gloire et de mrite qui rehausse infiniment les socits monastiques. Tout le monde sait combien la retraite du clotre est favorable au dveloppement du talent et aux succs des tudes. La Providence s'est servie des institutions religieuses pour conserver la religion et les sciences des poques o l'ignorance, la barbarie et le vice avaient presque inond la face de la terre. Dans ces nobles asiles de la pit, les moines vouaient leur temps la prire, l'tude et au travail des mains. C'est eux que nous devons le peu que nous savons de l'histoire des premiers sicles du christianisme. En composant leurs chroniques, ils nous ont conserv soit les traditions qui leur avaient t transmises, soit les faits qui se passrent sous leurs yeux; bien plus, ils se sont ensevelis dans

S. LO BARDE.

la poussire des coles pour sauver du naufrage les chefs-d'uvre de la Grce et de Rome, qui, sans eux, eussent infailliblement pri, soit par la main du temps, soit par l'invasion des barbares : le bndictin qui n'avait plus de terres dfricher, copiait les manuscrits des anciens; service immense et inapprciable rendu la postrit, avant l'invention de l'imprimerie. L'Europe savante doit donc aux moines une reconnaissance infinie pour nous avoir conserv de cette manire les plus beaux monuments du gnie des peuples, puisque c'est dans ces crits que nous avons form notre got et puis jusqu'aux connaissances qu'on tourne si souvent contre eux. Tel fut en Alsace le commencement d'une institution sainte et vnrable, qui a donn celte province tant d'illustres prlats, de vertueux prtres et de respectables moines. Mais il faut le dire ici : mesure que les m a i sons religieuses s'loignrent de leur origine, il s'y est gliss des abus plus ou moins graves, qui provoqurent souvent le zle de l'autorit ecclsiastique et ncessitrent des rformes. Ces rformes s'oprrent avec succs; le bien continua se faire, et le mal disparut. Ce serait cependant une prtention exagre que d'exiger que les institutions religieuses dussent toujours se soutenir dans un tat de haute perfection et ne jamais donner lieu la critique. Ces institutions taient sous l'influence de circonstances et de temps conlre lesquels elles ne pouvaient pas lutter;

52

a5

FVRIER.

si elles ont donc partag quelquefois les erreurs du moment, ces carts doivent tre attribus au mouvement gnral imprim aux diffrents sicles, et qu'il n'tait pas en leur pouvoir de comprimer; d'ailleurs les monastres taient habits par des hommes, et tant qu'il y aura des hommes, il y aura des abus. Laissons donc aux sophistes du sicle, laissons une basse ignorance, laissons aux gens qui ne veulent pas rflchir et qui ne voient partout que des abus, le privilge d'accabler de dclamations , aussi frivoles qu'outres, l'institution des socits monastiques; laissons des hommes gars par des prjugs le triste plaisir de verser le mpris et le ridicule sur les ordres rqligieux : ce sont des ingrats qui mconnaissent des bienfaits dont ils abusent en mme temps. Pour nous, gmissons en secret de la destruction de ces institutions vnrables, payons-leur le tribut de.notre reconnaissance et de notre admiration, et apprenons, par l'exemple des bienheureux personnages qui ont autrefois fond et habit les maisons religieuses de l'Alsace, mpriser les frivolits du monde pour nous occuper davantage de nos destines ternelles. L'abbaye de Maurmoutier tait la plus ancienne de l'Alsace. Elle tait situe au pied des Vosges, sept lieues de Strasbourg, dans un bourg du mme nom, auquel elle donna naissance. Les historiens s'accordent reconnatre pour son fondateur S. Lobarde, qui l'tablit en

S. LOBARDE.

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l'honneur des SS. aptres Pierre et Paul et de S. Martin, vque de Tours. Childebert I I , roi d'Austrasie, accorda au fondateur, vers la fin du sixime sicle, le vallon dans lequel il s'tait fix. Ce vallon, ainsi que ses environs, taient du domaine royal, connu alors sous le nom demarche cVAquile.

Le territoire de l'abbaye s'tendait, dans son origine, bien plus loin que dans les derniers temps et comprenait une grande quantit de villages et hameaux , mais dont on alina un grand nombre par la suite. Le jsuite Coccius prtend que Maurmoutier fut fond sous le rgne de Childebert L , roi de Paris, et fils du grand Clovis, et que S. Lobarde avait t disciple de S. Benot; qu'il tait venu en Alsace le 7 avril 5 5 5 , et avait jet les fondements de son abbaye en 557 5 donnant son nom. Il ajoute que, plusiem^s religieux du mont Cassin tant venus en Alsace pour se joindre Lobarde, Childebert L enrichit le monastre naissant de plusieurs domaines, et donna en 5 5 8 , dans son palais de Marlenheim, une charte en faveur de celte modeste maison, qui devint si fameuse par suite des temps. Mais Coccius s'est3 er e n c r

1 L e domaine' de l'abbaye s'tendait depuis le pont de Scliwenheim jusqu' la route de Saverne et celle de Marlenheim; depuis le ruisseau dit Griesbach jusqu' la Zinsel; depuis le village de Kugelberg, prs Neuwiller, jusqu' Ottersthal prs Saverne; depuis Ottersthal, par la Sorr, jusqu' une petite distance de Hegenheim et de l aux murs de Tabbaye.?

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25 FVRIER.r

trangement tromp; car Childebert I.* n'a jamais rgn en uslrasie ni demeur en Alsace, et pendant son rgne l'histoire ne fait aucune mention du chteau royal de Marlenheim . Laguille et Grandider l'ont compltement rfut. Coccius avait puis ces renseignements dans les Annales de l'abbaye de Maurmoutier, qui sont fort suspectes pour les commencements. Lobarde n'a jamais t disciple de S. Benot, mais de S. Colomban, comme le prouve trs-bien Lecointe. Il avait t form la vie religieuse dans le monastre de Luxeuil, et introduisit les deux rgles de S. Benot et de S. Colomban dans son abbaye, qui n'a par consquent pu tre fonde que vers l'an 5go, Colomban n tant venu s'tablir dans les Vosges que quelques annes avant cette poque. Lobarde gouverna sa maison jusque vers l'an 618. Sa vie ne nous a t transmise par aucun historien; sans doute qu'on s'est content d'admirer ses vertus sans les crire. Son nom se lit dans le martyrologe de Mnard, qui place sa mort au 25 fvrier vers l'an 6x8.1

Il fut remplac dans l'administra tion de l'abbaye par Anastase, Godefroi et Lobarde II. Cesi Ce chteau est nomm pour la premire fois par les historiens sous le rgne de Childebert I I , petit-neveu de Childebert I . : Childebert II demeurait, en 589, a Strasbourg avec les deux, reines, son pouse et sa mre Brun chaut, lorsqu'il apprit la conspiration trame contre lui par Septimine, gouvernante de ses enfants, et c'est au palais de Marlenheim que furent dcouverts les assassins apostc's par la reine Frdcgondc,e r

S. LO BARDE.

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hommes avaient gagn