Histoire Des Banques Centrales -Que Sais-je

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http://systemista.blogspot.com/QUE SAIS-JE?Histoiredes banques centralesNORBERT OLSZAKProfcssf'llr rLnj"ersit Robert-Schuman deStrasbourgDoyende la Facult de droit. ocsciences politiqlleset de gestionhttp://systemista.blogspot.com/DUMMEAUTEURHistoire des unions montaires, Paris, PUF, Que sais-je? ,n 3148, 1996.ISBN2130493262Dptlgal- 1re dition: 1998, aotcgPressesUniversitairesdeFrance, 1998108, boulevardSaint-Germain, 75006ParisINTRODUCTIONLa mise en place d'unebanque centrale europennecharge de grer ds le 1er janvier 1999la monnaieuniqueinstitueparletraitdeMaastricht provoqueun grand intrt pour ce type d'tablissement. Cet int-rtest encoreaccruparlefaitqueles diffrentesban-quescentralesnationalessontactuellement amenesaffirmer fortement leur prsence dans les conomiespour prparer l'unificationenrapprochant les politi-quesmontairesavecdescontraintesparfoisdoulou-reuses et contestes.Lesnombreux commentaires suscits par ces volu-tions tmoignent des espoirset descraintesqu'inspi-rent les banques centrales, ces banques au seconddegr (Rivoire, 1986, 5) charges del'missiondesbillets, de la garantie en dernier ressort du systmebancaireainsique, souvent, delastabilitde la mon-naie!. On pourrait illustrer ces attitudes opposes d'es-poirset decraintes avecdeuxcitationschresl'undes meilleurs connaisseurs de ces institutions, Jean-PierrePatat(1972, 1; Lvy-Leboyer, 1995, 239), et beaucoup d'autres auteurs. Elles sont si souvent rappe-les qu'elles paraissent incontournables et que nous nepouvons nous dispenser d'une rfrence ces apho-1. Pour Forrest Capieil est difficilededfinirlerledelabanquecentraled'unefaon qui soit lafois utileet capabledefaire l'unani-mit , mais il nous indique ensuite ces trois lments qui sont tour tourprivilgis par les auteurs et qui justifient les expressions quasi synonymesdebanquecentrale, institut d'missionoubanquederserve(inLvy-Leboyer, 1995, 297).3rismes. Il Ya tout d'abord la clbre sentence de l'am-ricain WilliamRogers: Il y a eu trois grandes inven-tions depuis le commencement des ges: le feu, laroue, labanquecentrale. Puis, encontrepoint, noustrouvonsl'affirmationduclbremontaristedeChi-cago, MiltonFriedman, quisemble paraphraser l'avisdeClemenceau surlaguerreet lesgnraux endisantquelamonnaieest unechosetropsrieusepourlaconfier aux banques centrales .Comme souvent, ces sentences peuvent paratred'autant plus excessives qu'elles sont sorties de leurcontextel. Pour le premier auteur, on ne connat d'ail-leurs pasdutout les rfrences scientifiquesqui per-mettraient d'tayer oudecomprendrelaplaceextra-ordinaire faite nos banques dans l'histoire del'humanit. Et en fait celui qui est parfois prsentcommeunconomisten'est autre, selonnous, queleclbre humoriste, comdien et chroniqueur amricainWill Rogers qui vcut de 1879 1935 et tait fortconnu pour ses caricatures verbales (Dictionary ofAmerican Biography, vol. XXI).Cependant ce qui n'est finalement qu'une belle bou-tade mrite tout de mme un commentaire linguis-.tique. En effet, dans les manuels rdigs en anglais (parexemple chez Paul Samuelson) la citation de WillRogers parle de Fire, Wheel and Central Banking . Silatraduction des deux premiers termesne pose pas deproblme, iln'enestpasdemmedecetteexpressionde Central Banking forge par les conomistesanglais et amricains dans les annes 1920 et quidsigne lemtier oul'activitdes banquescentrales.1. L'aphorismedeM. Friedmantrouveraitsonoriginedansuneopi-nionplusdtailledeFranoisPerroux: L'mission, lamonnaie, l'in-vestissement sont choses trop srieuses pour qu'ons'en remette en ce quilesconcerne a u ~ seulsbanquiers, fussent-ilssemi':'publics(Lesbanquesd'missionetl'Etat, Revued'conomie politique, dcembre1944, cit parA. Plessis, in Lvy-Leboyer, 1995, 277).4Un mtier consacr l'mission montaire, directe-ment, avec les billets, ou indirectement, quandil s'agitde surveiller la cration de monnaie de banque. Etc'est sans doute ce rle dans l'mission qui n'avait pasl'heur de plaire Milton Friedman, du moins s'il taitconfiauxbanquiers sans aucuncontrle. Car n'ou-blions pas quesi Clemenceauestimait que laguerretait une chose trop grave pour la laisser aux militairesc'tait seulement pour exclure le fait que le portefeuilleministriel correspondant puisse tre confi un gn-ral. Il s'agissait d'tablir unjuste partage entre lestechniciens et les politiques et surtout de conserver aupouvoir politique la plnitude de sa responsabilit.C'est bien l encore de nos jours tout le dbatautour des banques centrales et du grand problme deleurindpendanceet deleurplace danslespolitiquesconomiquesI. Cette intensit provient videmment deleurrelationtroiteavecla monnaie, c'est--dire avecuninstrument techniquevital pour l'conomie, aussiimportant que le feu ou bien la roue, mais aussi un ins-trument rgalien, un attribut du pouvoir politiqueprement disput au cours des ges et auquel lesdmocraties paraissent avoir autant de mal renoncerque les princes ou les rois d'autrefois.En fait, danstousles cas, nous avons une librationpar rapport lanature. Le feu permet de matriserl'nergie, laroueassureunaffranchissementrelatif delapesanteur et lamonnaiede banque, fiduciaire(lesbillets)ouscripturale(lescomptes crditeurs), permetde disposer de moyens de payement beaucoupplusabondants et fluides que ceux offerts par la nature avecdesrserves limitesdemtal. Grceauxbanques, le1. M. Dvoluy, L'euro et l'viction du politique, Le Monde.,24 avril 1997, p. 15 ; G. Quaden, Les banques centrales lacroisedes marchs et des politiques, Repres. Bulletin de la Banque inter-nationale Luxelnbourg, l / 1997, p. 10-14.5capitalisme a pu crer de l'argent, mais il lui fallait toutde mme disposer d'une garantie de bonne fin despayements quivalente celle offerte par la matrialitdelanatureetcesontlesbanquescentralesquivontavoir cerle. Cette substitution la nature est labase d'une mutation sociale et politiquefondamentaleengage auXVIIe sicle maispleinement sensible seule-ment au xxe siclel.Un regard sur l'histoire doit ainsi nous permettredemieuxcomprendreles enjeuxdes transformationsen cours2 Ce regard n'aura pas besoin d'tre troplointaincar il est inutilederemonterjusqu'laPr-histoireoummel'Antiquit, jusqu'aux originesdufeuet delaroue! L'histoiredesbanques centralesestrelativement rcenteet n'occupequelestroisdernierssicles de la grande histoire plurimillnaire de lamonnaie. Beaucoup pensent mme avec ForrestCapie qu'il ne s'agit que d'une invention de notresicle (Lvy-Leboyer, 1995, 297). C'est tout faitexact si l'onnes'intressequ'auxtablissements quisont placslafois aucentreet ausommet dusys-tmebancaire, avec les fonctionsmodernes deprteurendernier ressort. Maisbeaucoupdecesinstitutionsplongent leurs racines dans les sicles prcdents et1. Sur cepoint l'onconsultera lestudes remarquables deFranoisRachline sur cette alchimie de l'avenir mene par le capita-lisme. Cf. aussi son entretien avec Roger-Pol Droit, Le Monde,22 novembre1994: Onest passd'unestructureverticale, tabliesui-vant une chane qui relienature, mtal, souverainet socit, une orga-nisation horizontale, articule sur la communaut des intrts entreprince et collectivit.Dans ce dernier cas, c'est une institution humaine, labanque centrale, qui se substitue la nature pour garantir en dernier res-sort la bonne fin dupaiement. Dupoint de vue montaire, la socitpasse alors d'un ordre naturel unordrehistorique.}}2. Cetteapprocheafait l'objet d'unsminaired'Histoiredesunionsmontaireset desbanquescentrales danslecadre duDEA,Institutionspolitiqueset montaireset intgrationconomiqueenEurope , animpar lesprs A. Varoudakis et M. Dietsch l'Institut d'tudes politiques deStrasbourg. Nousremercions nos collgueset nostudiants pour leursexigences stimulantes.6dans des systmes diffrents et c'est au XVIIesiclequel'onvoit apparatre, aveclaBanqued'AngleterreoudansunemoindremesurelaBanque deSude, lespremiresformesdenostablissementsfinanciers. Cesont alors les banquiersdes souverainset cetteplaceminente auprs dupouvoir royal est une premiremanifestationde centralit.Ces origines historiques lointaines de certainesgrandesbanqueset leursvolutionsultrieuresexpli-quent les grandes diversits voire les bizarreries quenous pouvonsrencontrer dans cedomaineainsi quel'utilisationd'expressionsdiffrentespour dsignerlesmmeschoses, commeinstitut d'missionoubanquede rserve. D'ailleurs les dnominations elles-mmesne sont pas toujours trs clairantes sur la nature relled'un tablissement et sur son appartenance cettecatgoriedes banques centrales. Cetteexpressionestd'ailleurs trs rarement utilise dans la raison sociale etquandellel'est effectivement cela peut tretrompeur.Bien sr dans le cas de la Caisse centrale des banquespopulairesoudelaBanquecentraledescoopra-tives et des mutuelles en France,il n'y a pas vraimentde doute sur la nature de l'institution dont le rlelimitet lecadre ordinairesont indiqusdans l'inti-tul, mais on peut hsiter avec le Banco central enEspagne, qui est une banquecommercialeordinaire.Parailleurs, l'adjectif national , qui fait rfrenceuneplace politique minente, est utilis pour certainesbanques centrales (Belgique, Suisse, Autriche), mais cen'est pas uneindicationsresi l'onprendbeaucoupd'autresexemplesocet adjectif estemploypar desbanques commerciales pour dsigner leur champ d'ac-tivit, leur statut lgal (aux tats-Unis) ou bien lergime de leur proprit comme dans certains cas fran-ais. Enfin, la mentiondupaysdanslaraisonsocialepeut faire songer bienvidemment lacentralitdel'institution comme pour la Banque de France, mais il7yalaussi desexemples contraires: Bank of Ire/and,Banco doBrasil... (Rivoire, 1986, 9).Enfinde compte, onpourrait s'appuyer sur la pr-sence d'un Gouverneur la tte de l'institutionpouravoirunindicedesoncaractredebanque cen-trale. C'est effectivement unterme trssouvent utilis,mais pas ncessairement (parmi d'autres laDeutscheBundesbankaunprsident, commelaBanquenatio-nalesuisseoucommela futureBanque centrale euro-penne)ni exclusivement (leCrditfoncierdeFranceest galement dirig par un gouverneur). Toutefoiscette spcificit, qui remonte la cration de la Banqued'Angleterre, est intressante en ce qu'elle indique biencertains rapports particuliers avec le pouvoir politiqueainsi quedesmissionsminentesdedirectionmon-taireetfinancire. De plus, cetitre met l'accentsur laplace considrable qu'ont occup certaines personnali-ts dans cette histoire et,au-del des statuts de dpen-dance et d'indpendance trs variables,on trouve sou-vent l'intervention dcisive des caractres et de la forcemorale des uns et des autres dans l'orientation despolitiquesdesdiffrents tablissements (A. Plessis, inLvy-Leboyer, 1995,318).Des facteurs multiples ont orient l'histoire des ban-ques centrales. Chacune est intimement lieaux parti-cularits de l'histoire de son pays, qu'il s'agisse del'histoire conomique et financire ou de l'histoiregnrale enraisondes contacts troits entretenus aveclepouvoir. L'volutiondesdiffrentssystmesmon-taireset bancairesagalementdterminlerleetlestatut desbanquescentrales, tel point qu'ilest dou-teuxdepouvoir dgagerunehistoireuniqueouuni-forme. C'estd'ailleurslecasdel'histoirebancaireengnral o les systmes rsultent rarement d'uneconceptionabstraite oud'unprojet cohrent posapriori .(Rivoire, 1986, 3), etil est significatif de consta-ter que beaucoup d'ouvrages de rfrence doivent8combiner une partie synthtique et des chapitres ol'on dtaille diffrentes histoires nationales,pays aprspays (cf. par exemple: Pohl ou Goodhart).Dans le cadre de cet ouvrage il est difficilement envisa-geablededonner ce catalogue exhaustif deplusd'unecentaine d'histoires, banque aprs banque dont chacunemriteunvolumeparticulieretenbnficied'ailleurssouvent. Il nous parat prfrable de nous appuyer surquelques grands exemples et d'utiliser l'histoire de cer-taines banques aussi anciennes qu'importantes pourillustrer lesgrandestapes del'volutiondesbanquescentrales. A chaque tape sont apparues des caractristi-ques qui, combines aux autres, se retrouvent encore denos jours dans les structures ou bien dans les pratiquesde ces tablissements qui ont toujours su voluer la foistrsviteettrslentement, pours'adapterauxralitstout ennebouleversantpasleshabitudes, basedelaconfiance du public( R i v o i r e ~ 1986, 124).Onpeut, engros, reprer trois grandes tapes dedure peu prs gale dans les trois sicles d'extensionmaximale decette histoire. Bien sr, selon les pays leslimites chronologiques sont diffrentes, en fonction descirconstances nationaleset pour les banquesles plusrcentes, qui utilisent l'exprience des autres, il y a unecertaine concentration des phases sur des priodesbeaucoup plus courtes. Par ailleurs, comme souvent enhistoiredesinstitutions, certainesfonctionsouactivi-ts qui existaient dj dans une premire tape neseront significatives que dans une phase ultrieure.Cependant, onreprera presque toujours les mmessituations correspondant des demandes semblables.Au dpart, pour la fin du XVIIe et le XVIIIe sicle danslesexempleslesplusanciens, noustrouvonsquelquescas d'unnouveautype de banqueconsacresurtoutaux finances publiques, aux affaires du souverain(chap. 1). Il s'agit de mobiliser des ressources, de trou-ver de la monnaie, et cette proccupation conduira9notamment au dveloppement d'une ressource nou-velle avec la monnaie fiduciaire qui aura une placedterminante dans l'activit desbanquesl'tapesui-vante.En effet, au xoc sicle, avec l'usage croissant dubilletdebanquelestatsvonts'employercontrlercette nouvelle source de monnaie en vertu de leur droitrgalien. Laconcessiondeprivilgesd'missionfut lemoyengnralement employaveccommersultat laconcentrationet lemonopole d'uninstitut d'mis-sion. Ce crateur de monnaie tait souvent l'anciennebanque du souverain ou bien fut fondspcialement cette fin, parfois seulement assez tard d'ailleurs commeenSuisseen 1907 ouauxtats-Unis en 1913, doncdans l'extrme limite de ce Xlxe sicle prolong jusqu'la premire guerre mondiale (chap. II). Enfin, auXX sicle, quand cette institution futquasignralise l'chelle du globe, ses missions ont d voluer en rai-son des bouleversements conomiques et montairesapports notamment par cette Grande guerre. L'volu-tion du billet de banque, de plus en plus autonome parrapport lamonnaiemtalliquetraditionnelle, et ledveloppement de lamonnaie scripturale dont nousvoyonsseulementl'achvementaveclamonnaielec-tronique, ont rendu indispensable un contrle renforcdu systme dans la perspective d'une garantie despayements. A ct de fonctionsde gestion des rservesmontaires, accompagnes parfoisd'une interventiondans lecontrledeschanges, lerlede prteur endernier ressort sera ainsi de plus en plus nettement lamissionprincipaledes banquescentrales. Ce rledegardiende la monnaie a justifi parfois leurtutelle surlesautresbanquesmaisaaussiconduitleur propremise en tutelle par le pouvoirl. Ces banques qui taient1. Cettesituationplacel'Institut d'missionaurangdesinstitutionsadministratives tudies par le droit public. Cf. D. Triantafyllou, L'acti-vit administrative dela Banque centrale, Paris, Litec, 1992, 98p.10des socits prives vont tre nationalises ou bien sou-mises un contrle de plus en plus troit dans lalogiquedudroit rgaliendecrationmontairemaissurtout dans la perspective d'une meilleure rponseaux sollicitations des politiques conomiques trsgourmandes en financements. Cette priode de mise ensujtion fut toutefois relativement brve et ces der-niresannesont vU,leretouren grce desidesd'in-dpendancedesbanquescentrales, ncessairela sta-bilit des prix et de la monnaie (chap. III).Cesrlessuccessifsdechercheur, decrateuret degardien de la monnaie, ces trois tapes historiquesdbouchent ainsi surlagloiredesinstitutsd'missionqui sont enquelque sorte devenus des banquessou-veraines, indpendantes des actionnaires comme dupouvoir politique. Ce statut hors du commun doitleur offrir la forcencessaire pour dfendre la monnaiefaceausceptreinvisiblede celui quiserait le vritablesouverain du nouvelordre mondial libral : le march.Les garanties de stabilit que l'on. pouvait esprerautrefois de l'objectivit de la rfrence mtallique sontmaintenant recherches dans des amnagements statu-taires. Ceux-ci conduisent aussi des regroupementsoudes innovations au-deldes espacesnationaux.Lamiseenplacede nouvelles institutions politiqueset conomiques internationales doit s'accompagnerde l'indispensable institutionmontaire. Lacrationd'une banque centrale,europenne est un enjeu duproche a v e n i r ~ maiselles'appuiesurdesprojetsdjcentenaires et des ralisations partielles au niveaurgional ou international (chap. IV). Nous auronsdoncnousplongerpourfinir danscettehistoireenmarche, traduction d'espoirs anciens et constantsd'une richesse gnrale dont onpourrait jouir tran-quillement dans la stabilit rassurante d'un universmatris grce l'action bienveillante des institutsd'missionou banques centrales.IlChapitre1LESBANQUESDESSOUVERAINSAUCENTREDESFINANCESDUPOUVOIR(xvlr-xvlIIeSICLES)L'histoire de nombreuses banques centrales com-mencedansl'orbitedesmonarquesqui essayrent detrouver un accs supplmentaire des ressourcesfinancires, enplusdudomaineroyal etdesprtsdesmarchands. Cecicorrespondaitauxbesoins ordinairescroissants et insatiables de l'tat moderne, mais gale-mentauxcots extraordinaires desguerres livres parles tats-nations, et bien sr aussi aux principes dumercantilismel.Les banques publiques cres gnrale-ment dansuncadremunicipal etpourlesbesoinsducommerce avaient montr de grandes capacits. Surcesbases, desinstitutionsnouvellesfurent tabliesauniveaudel'tat. Cesont cesbesoinsstratgiquesquifurent l'originedelaBanqued'Angleterre, qui parsonsuccs servira ensuite de modle d'autres ralisa-tions, notammentauxtats-Unis. Mais dansla chro-nologie le prestigieux tablissement britannique estdevancparlaBanque deSude qui, unpeu acciden-tellement il est vrai, fut la toute premire banque ratta-che formellement l'tat.1. M. Bottin, Histoiredes finances publiques, Paris, Economica, 1997,p.19-27.13J. - LatraditiondesbanquespubliquesParmilespremierstablissementsbancairesonrencontre desbanques lies aux pouvoirs publics et charges de missions publi-ques, qu'il s'agisse de lagestiondeladetteoubiendecelledespayements sur les marchs. Ces banques apparurent ds lexvesicle dans certanes villes qui utilisrent leur autonomiepolitiquerelativeet l'inspirationbnfique desmarchandspourtablir ces innovations.Il convenait d'abordderpondreauxdifficults cres parlamultiplication des titres de la dette publique dans certaines villeset toutparticulirement Gnes. Beaucoupd'empruntsavaientt mis et le service de leurs intrts tait chaque fois gag pardes revenus municipauxoudes impts spcifiques. Aprs plu-sieursgnrations, cesystmeparaissait inextricableet il deve-nait indispensable d'assainirlesfinancesobresparl'excsdesmissions. Il fut ainsi dcid de consolider et de regrouper ladette et d'en confier la gestion un nouvel organe, laCasa di SanGiorgio, fondeen 1408. Cettenouvellecaissepubliqueeut ungrand succs et acquit progressivement une clientle prive pourdes oprations de dpt et de virement,mais ces ressources sup-plmentaires furent sollicites par la ville pour des avancesassezfrquentesce quisuscitavidenmlentune mfiance: ds1444 laCasa dut se borner sa mission municipale. Cependant enEspagnelammepoque, lacombinaisondesdeuxactivitspriveset publiquesrussirasemaintenir. En1401uneTaulade Can1bi y deComunsDepositsest tablie Barceloneet d'au-tres suivent Valence, Saragosse et Grone (Van der Wee, 1992,93-94). Cesinstitutionsautonomesassurentellesaussi unemis-siondegestiond'unedettepubliqueunifieet desavancesauxtrsors municipaux mais comme leur nom l'indique elles avaientpeut-tresurtout l'origine une fonction lieaux besoins ducommerce et des changes. Cesont cesbesoins quel'onretrou-vera au sicle suivant la base de nouvelles crations dans l'Eu-rope du Nord.En effet, les dsordres montaires provoqus par l'existence denombreuses espces diffrentes auxmutations frquentes vontpousser la fondationd'autres tablissements qui se chargerontdes virements et des changes. Ens'inspirant des monnaies defoire Indivales puis des nouvellespratiques financiresde vire-ment connues Anvers ds le XVICsiclecertainesvillesvontainsi crer des banquesqui tabliront leurscomptes dans uneunit propre correspondant un poids invariable de mtal.AprsleBancodellaPiazza di Rialto, fondVenise en1587, lepremier grand exemple est celui delaBanquede changed'Am-sterdam cre par la municipalit le 31 janvier 1609. Les comptes14sont libells enflorin-bancoet toutes les traites deplusde600florinssur Amsterdam devaienttreobligatoirement payesdans cette monnaie de banque: les marchands taient ainsi assu-rs de recevoir la valeur prvue, indpendamment des mutationsdes pices et cette innovationrencontra un trs grandsuccs.Hanlbourgadoptaunsystmeanaloguele2 mars 1619aveclemark-banco et sa banque utilisera cette monnaie jusqu'aulendemaindelacrationdumarken1873! Biend'autresvillesmarchandes allaient suivre ces beaux exemples: Rotterdam,Delft, Middelbourg, Nuremberg,Berlin et enfin Breslau, avec un thaler-banco .Mais si ces tablissements jouent un trs grand rle dans la cir-culation de la monnaie, ils n'interviennent pas en principe dans sacration: souvent leursstatutsinterdisent lescrditset lesvire-ments ou les billets doivent correspondre strictement aux dptsmtalliques. Cependant, vu l'importance des dpts qui ont afflugrce au dveloppement des affaires, la commodit du systmepour les marchandset aumonopole duchangeparfoisinstitucomme Amsterdam, il tait tentant de s'appuyer sur leur masserassurante pour faire quelques entorses ce principe. La Amster-damscheWisselbank resta relativement l'cart de ces excs, bienquecesoit discut(Kindleberger, 1990, 71). Ilsemblequ'ellesesoit limite des avances court terme la Compagnie des Indesorientales pour la constitution et l'entretien de sa flotte, ainsi qu'des prts au Trsor municipal. Il lui tait difficile de rsister sonpropritaire, mais en fait ces prts taient largement couverts parles rserves constitues grce aux bnfices confortables de laBanque et de ce fait il n'y avait pas de problme prvoir pour laconversion des billets (Van der Wee, 1992,214). Par contre, d'au-tres petitstablissementss'taient laisssaller desoprationsplus hasardeuses et eurent beaucoup de mal rsister des vaguesde retraits qui se dclenchrent lors de l'invasion des Pays-Bas parles armes franaises en1672. La plupart de ces banques munici-pales firent faillite mais malheureusement un peu trop tardpourque cela serve deleon aux financiersscandinaves engagsdepuis quelques annes dj dans des innovations qui les placentaux origines des banques centrales.II. - LaBanque deSudeLabanque centraledeSude, laSverigesRiksbank,voit son histoire remonter l'anne 1656, en pleincurd'unsicledegrandeurpourleroyaume. Maiscette antriorit ne concerne que ses racines: en effet, 15cettedateest fondeStockholmunebanquepriveenvertu d'unecharteaccordeHans Wittmacher, qui l'on attribue la premire expression de l'ided'mettre des billets au-del de l'encaisse mtallique(Goodhart, 1988, 122-123). Une ide qui allait rapide-ment s'avrer trs dangereuse car en 1663 et 1664beaucoup de porteurs de billets demandrent leurconversion ce qui entrana videmment de graves diffi-cults et la disparition de notre tablissement. Maisheureusement certains membres du gouvernementavaient t convaincus del'intrt dela banque et ellefut reconstitue en 1668 sous la tutelle du Parlement cequi marque la vraie naissance de cette banquepublique.1. LaBanquedeStockholm. - Aprs laguerredeTrente ans, la puissance de la Sude tait affirme,mais cela causait de gros soucis financiers au royaume.Aux gots dispendieux de la Princesse baroqueChristine succdrent les dpenses guerrires de soncousin Charles XGustave. Celui-ci va couter avecattentionlespropositionsdufinancier HansWittma-cher, originairedeLivonie maisavecdesascendanceshollandaises. Enchange d'unprt, ilobtiendraainsiun privilge exclusif qui lui permettra de crer le30novembre 1656une banqueprivequi pourraselivrer auxoprations dechangeet devirement maisaussi au crdit.Wittmacher connaissait bien le modle d'Amster-damet vaainsi runir les activits pratiquespar laAmsterdamsche Wisselbank mais aussi celles d'uneautre institution,laBank van Lening, qui pratiquait leprt sur gages et nantissements. AStockholm, nousavons de ce fait deux tablissements distincts, laWexelbank et la Ltinebank mais la sparation n'est pastanchecar lapremire, qui ne peut faire ducrdit,met ses ressources la disposition de la seconde.16Outre les activits habituelles de virement et dechange, laBanquedeStockholmvaprogressivementselivrer l'mission de billets. D'abordsousla formede certificats de dpt portant intrt, qui circulentassez mal en raison notamment des difficults lies lancessit de calculer les intrts chaque transmission,puispartir de1661sousformedebilletsauporteurqui sont des promesses de payement mises dans lecadrede crdits, sansdptpralable d'espces. Cetteinvention majeure de Wittmacher, qui avait entretemps t anobli sous le nom de Johan Palmstruch, estsoutenue par un nouveau privilge exclusif pour trenteans qui a t obtenu grce de nouveaux prts au sou-verain. Mais ce billet correspondait aussi un vraibesoin pour la Sude en raison des particularits assezextraordinaires de sa monnaie.En effet en 1625 le roi Gustave II Adolf avait instituunsystme bimtallique reposant sur l'argent et sur lecuivre dans le but d'accrotre les ressources montairesde laSudequi disposait d'importants gisements demtal rouge. Il fit ainsi frapper une pice de cuivre d'undaler qui pesait 1 kg, mais ses successeurs iront jusqu'mettre en circulation des pices de dix dalers et comme lavaleur du cuivre avait baiss sur le march il faudra allerjusqu' des pices de 19,7 kg, en fait d'normes pla-ques ! Cette baisse du cours commercial du cuivre avaitvidemment entran la disparition du bon mtal blanc,selon la fameuseloi de Gresham car l'argent tait th-sauris ou export. Cependant on pouvait difficilementdire que la mauvaise monnaie chassait la bonne carla monnaie de cuivre trs malcommode ne circulait pasnon plus. On tait donc bien content de pouvoir trouverdesbilletsdebanque. Ceux-ci taient convertiblesencuivremaisfaisaient primesurlesespces mtalliquesgrce au service rendu.Aprs unengouement initial, lasituations'inversaen1663 et la Banque fut confronte des retraits mas-17sifs de cuivre, dont le cours s'tait amlior. La couver-ture .insuffisanteconduisit unesituationdepaniqueetune chuteducoursdubillet. Bienque celle-ciaitt finalement assez modre en ne dpassant pas10%car les difficultspratiques de la conversion entonnesde cuivrejouaient unrle amortisseur, le gouverne-ment royal dcida la fermeture prcipite de la Banqueen1664 (Lagerqvist, in North, 1995, 387). Par excs deprcaution l'exprience de Palmstruch fut brutalementinterrompue, mais sans que l'ide d'une banquemoderne soit condamne, car on va retrouver uneinstitution analogue quelques annes plus tard peine, sousl'gideduParlement qui craen1668cequi peut apparatrecommelaplus ancienne banqued'tat du monde.2. LaBanquedestats gnraux. - Cettenouvellebanque publique fut alors appele Riksens StandersBank ce quidsignaitson rattachement au Parlement,situationoriginalequi durera j u s q u ~ nosjourset setrouverabeaucoupplustardconfirme par la Consti-tution,autre originalit. Cependant elle va fonctionnerentant que banque commerciale, d'autant plus qu'elleserapendant plusd'unsicleet demi la seule banquedu pays: ce n'est qu'en1830 que l'on verra la crationdupremier d'unesried'autres tablissements (Ens-ki/dabanken).Jusque-l elle dtenait unmonopolede fait large-ment soutenu par le Parlement qui n'hsitait pas encourager l'utilisationde ses billets enfonctiondesbesoins publics. Pourtant lors de la nationalisation'de1668 l'onavait exclulapossibilit d'missionpourviter les problmes rencontrs auparavant:les crditsnedevaient pas conduirel'missiondebilletscircu-lant en tant que monnaie et l'on aura d'abord recoursauxordresdevirement ou de payement, aux chques,pour utiliser ces crdits. Par ailleurs, la banque va18mettre des certificats de dpt correspondant stric-tement auxversementsd'espces, car lemaintien jus-qu'en1772 de l'usage montaire du cuivre continuait provoquer un fort besoinde billets, plus commodespour lespayements.On avait galement pris soin,selonle modle initialmais avec plus derigueur encore, de diviser la banqueen deux dpartements, l'un tant charg des oprationsde change, c'est--dire durglement des effets de com-merce, l'autres'occupant des prtsaccordsenfonc-tion de dpts, denantissements et surtout d'hypoth-ques au profit de la noblesse qui tait le' principalclient. Cependant il semblequ'uneclausesecrteaitpermis des avances' court terme du premier ausecond. Cette facilit, inspire de l'exprience de Palm-struch,'va permettre de rpondre aux demandes dugouvernement qui vont conduire quelques excsd'missionet provoquer destensions, notamment lorsd'pisodes guerriers. Le cours du billet va ainsi devoirtre soutenu tout d'abord par la reconnaissance de sonpouvoir libratoireen1726, cequi estgalement uneantriorit sudoise (en dehors de l'exemple conjonctu-rel de la France en1720), puis plusieurs reprises parlasuspensiondesaconvertibilit, de 1745 1776etde1810 1834.Avec le dveloppement du systme bancaire, la posi-tion de la banque royale va ncessairement changer enraison delaconcurrence, et sonactivitbancaire seconcentrerasurledesactivitsdel'tat,selon une tendance entame ds le milieu duXVIIIe sicle(Houtman, vanderWee, inPohl, 1995,138). En 1867elleprendrad'ailleurs lenomde Sve-rigesRiksbank qui marqueplusnettementlapositionminente qu'elle vise conqurir en tant qu'institutd'mission. Elle a connu ainsi les problmes de concur-rence que la Banque d'Angleterre, pourtant cre plustard, avait dj rencontrs au dbut du sicle.19III. - LaBanqued'AngleterreLacrationdelaBank of England en1694sesitueaucurd'unelonguevolution. Aprsprs dedeuxsicles d'une histoire financire complexe, marquecomme partout enEurope par les exigences dusouve-rain, lenouvel tablissement allait inaugurer rapide-ment unerenouvelleet s'imposercommeunesolu-tion porteuse d'avenir (Houtman, van der Wee, inPohl, 1993, 149-166).1. Une rponse aux besoins de financement. -Depuis le XVIe sicle, la Couronne britannique taitconfronte une crise financire chronique, compli-que par desrelationsdifficilesavec le Parlement, peudisposaccorderdenouveaux moyens. Ilenrsultaune succession d'emprunts court terme auprs deprteurs divers, nobles oumarchands, parfois tran-gers, ainsi que des mises en vente de parties dudomaine ou bien la concession de monopoles fiscaux des financiers. Ces expdients taient trs onreuxetentretenaient uncertaindsordregnral desfinanceset lamonarchie s'est proccupe plusieurs reprisesd'une remise en ordre et d'une consolidation de ladette, notamment pour s'affranchir d'une prsencetrop forte des orfvres, ces banquiers de fait quis'taient rendusindispensablesenprtant directementet surtout en ngociant les titres de dette publiquedtenus par les particuliers. Ces titres avaient deschances souvent imprcises et les orfvres sechar-geaient d'obtenir leur remboursement ou bien lesescomptaient ce quifaisait qu'ilsen dtenaientparfoisla quasi-totalit.Cette tendance la rationalisation fut confirme,aprsla crisede1672, par la cration d'unerente per-ptuelle et surtout aprs l'instauration d'un rgimeparlementaire en 1689car le contrle srieuxexerc20par le Parlement sur les finances publiques allait abou-tir des rgles rigoureuses pour les emprunts gags surdes ressources prcises, tout en faisant rgner un climatrassurant pour les investisseurs. Deplus, lenouveauroi, GuillaumeIIId'Orange, tait aussiStathouder deHollandeet ceci favorisa lesrelationsaveclemondefinancier d'Amsterdam,' pas seulement pour en tirerdes ressourcesmontairesouplacerdesempruntsoudes actions, mais surtout pour yrecueillir des idesfavorables au dveloppement d'un systme bancairemoderne en Angleterre.En fait les marchands et financiers londonienscherchaient cettepoqueunmoyende quitter desstructuresrelativement archaqueset defonder unouplusieurs tablissements comparables aux grandesbanquesduContinent: lesorfvres-banquiersavaientrendu de grands services et plusieurs dizaines exer-aient toujoursLombard Street, maislecaractretrspersonnel de leur activit leur confrait une grandefragilit et les faillites taient frquentes. Lanouvelleambiance qui entourait les finances publiques et lesbesoins toujours trs importants duTrsor, sollicitpar les guerres europennes du tournant du sicle,ont alors favoris l'mergence de projets prparspar des hommes d'affaires qui entendaient ngocierl'acceptation royale contre des apports financiers.Charles Montagu, le chancelier de l'chiquier deGuillaume III, a pu examiner plus de 70 projetsfinanciers diffrents allant de lacration de loteries celle de compagnies de commerce, en passantbien entendu par les banques. Parmi ces projets,celui du financier cossais WilliamPatterson(1658-1719) allait aboutir la cration de la Banqued'Angleterre'.1. 1. Clapham, The Bankof England. A History, Cambridge, 1944,2 vol.212. Lafondation. - Pattersons'tait enfait pris trois fois pour formuler des propositions en compagniedeplusieurscollgueslondoniens. Latroisimetenta-tivefut la bonnesans doute parce qu'elleconcidaitaveclarsolutiongouvernementaledelancer unnou-vel emprunt de 1 millionet demi delivres, alors quedes sommes presqueaussi levesvenaient toutjusted'trerclamesen 1693et en1694, maisles besoinsde laguerreavec la France taient une fois de plusnormes. Pattersonproposade lancer unemprunt long terme de1 200000 f et de trouver lereste en pla-ant des rentes viagres.Les taux envisags taient trslevs et il est surprenant de voir le Gouvernementaccueillir favorablementcetteoffre. Maisleplancom-prenait un autre volet riche de promesses: les souscrip-teurs l'emprunt pourraient ensuite apporter leurstitres pour former le capital d'une nouvelle banque quise livrerait toutes les oprations habituelles mais s'in-tresserait aussi tout l'escompte d'effetspublics. Cet tablissement serait ainsi la toute premirepublicbankanglaise, en .raison de cette structure desocit par actions, par opposition aux entreprises per-sonnelles des private bankers.Enavril 1694, ceplanrencontraunchotrsfavo-rable au Parlement qui vota le Tunnage Act et autorisala cration de la Banque d'Angleterre. Un curieux nompour cet acte fondateur,mais cette loi tablissait avanttout un nouvel impt sur la jauge des navires affect la charge du nouvel emprunt, selon les principes finan-ciersdsormais envigueur. Les basestant fixes, lasouscriptionput commencerle21juin. Lesuccsfutimmense et la souscriptionclose enonzejours avec1272 participants, dont le roi et la reine. En dehors deces augustes personnages, on trouvait surtout desmembres de la bourgeoisie londonienne et de lanoblesse deprovince. Parmiles marchands, beaucouptaient des rfugis protestants, proccups d'assurer22laprennit delaMaisond'Orange et du parlementa-rismedans laguerrecontrelesStuartset LouisXIV(Pose, 1942, 66). Mais si ces motivations politiquesont pu faciliterleschoses, ilestplutt croire quelessouscripteurs taient trs intressspar lesavantagesconomiques et financiers du lancement de cettegrande banquenationale.Celle-ci obtint sonprivilgeroyal le27 juillet 1694,pour une priode allant jusqu'en 1706, et put commen-cersesoprations. Dslafindel'anne, elleremet augouvernement unmontant de 1200 000f, sousformedebons ou billets transfrbles et ngociables: les sea-led bills qui portaient son sceau. En change,! elle reoitle mme montant enreconnaissances de dettes, les tal-lies, galement transfrables. L'emprunt initial s'taitainsi largement multipli.3. Un dveloppement remarquable. - La croissance dela Banque d'Angleterre bnficia constamment de la sol-licitude du Gouvernement quiluiaccordasa clientle,mais les pouvoirs publics surent aussi ngocier favora-blement le renouvellement des privilges contre d'autresprts long terme et ce ds 1707 grce une augmenta-tion de capital. Cette liaison entre la forme socitaire etlecrditpublic fut d'ailleurs conforte par leprivilgede1707 qui rserva laBanque le statut de socit decapitaux oujoint-stocks bank, toutes les autres banquesdevant rester des socitsdepersonneslimites sixassocis. Mais son .monopole sur cette formemodernen'tait valable que pour l'Angleterre et elle dut souffrirla concurrence dans leur rgion de la Bank of Scotland,cre ds 1695, puis de la Royal Bank ofScotland (1727)et de la British Line.n-Bank (1747).Cependant ce lien avec le pouvoir royal n'entranaitnullement une exclusivitet la Banqueacceptaaussil'escomptedelettres de changeoudes dpts privspour lesquels des techniques sophistiques furent mises23aupoint, paralllement celles dveloppes pour lecrdit public. Toutes sortes debillets, auxrgimesdif-frents, portant intrt ou non, furentmismais gn-ralement on proposait aux dposants des reus sur desformules imprimes, des running cash notes ou cashier'snotes, avec des montants en chiffres ronds (parexemple 50 ou 100f). Ces reus comportaient uneclauseauporteur et pouvaient ainsi circuler commemonnaie. Ilscorrespondaient aux certificats dedptsdes orfvres auxquels ils firentune concurrence accruejusqu'les supplanter entirement vers le milieu duXVIIIe sicle. A cette poque les billets avaient d'ailleurspris laforme de promesses de payement, promissorynotes, et s'loignaient ducaractreprimitif decertifi-catsdedpt, cequi permettait doncdemieuxs'abs-traire de la stricte couverture mtallique.L'importancedesonactivitdecaissierdel'tatetdegestionnairedela dette favorisait videmment la circulationde cesbillets.Ce succs commercial restait toutefois limit lacapitale, selonune politiqueprudente de la Banqued'Angleterre qui tait de fait surtout la Banque deLondres, sanssuccursale. Elle s'est notamment limite des coupuresd'unmontant assezlevpour slec-tionner les porteurs deses billets. Jusqu'en 1759ellen'mettait pas en dessous de 20 f, ce qui correspondait cinq mois de salaire d'un de ses employs. Ens'adressant aux gros clients etnonaupublic elle pou-vait trerelativementl'abri demouvementsmassifsde demandes de remboursements enespces. Cepen-dant elleabaisseraceseuil jusqu'5 f en1793pourrpondre la crise des banques provinciales.Eneffet, ct des tablissements londoniens quioutre laBanque d'Angleterre comprenaient encore lesbanquiers duWest-End, dont la clientle tait l'aristo-cratie,et ceux de laCity, on voyait se crer de plus enplus de banques en province: en 1750, il y avait une dou- .24zaine de Country banks, en 1784 on en comptait dj 120et elles seront 650 en 1810. Ces banques se livrent l'es-compte, acceptent des dpts et mettent leurs propresbillets. Fondes par des marchands ou des industriels etinsres dans ledveloppement conomiquedes pr-mices de la rvolution industrielle elles connaissent unecertaine fragilit d'autant plus sensible que leur surfaceest assez limite. Mais ces banques provinciales vont uti-liserlerelaisdesbanquiersdeLondreset unsystmenational seconstitueraprogressivementolaBanqued'Angleterreoccuperauneplaceessentiellegrcelaconfiance qu'elleinspire. Enfait ellevajouer ds lemilieu du sicle un rle de banque de dernier ressortsous deux formes, pour les marchands et pour les ban-quiers. Quand un marchand ne trouvait pas d'escompteauprs de son banquier, fautede disponibilits, il pou-vait toujours essayer de s'adresser la Banque d'Angle-terre. Et un banquier pouvait aussi prsenter les effets deson portefeuille au rescompte.D'ailleurs les banquiersavaient pris l'habitude d'ouvrir des comptes auprs de laBanque d'Angleterre et d'y transfrer leurs rserves d'or,assurs qu'ils taient de pouvoir compter sur des billetsconvertibles en cas de besoin. Ce systme avait russi franchir plusieurs crises et dmontr de ce fait sa soliditacquisedansuneformationprogressiveetempirique.Celle-ci contraste fortement avec la construction ration-nelletente au dbut du sicle par John Law qui mar-quera malheureusement l'histoire franaise de la mon-naie de banque de l'empreinte d'un chec retentissant.IV. - Le Systme deLawLaFrancedeLouisXIVconnaissait largement lesmmes problmes financiers que son adversaireanglais, peut-tre mme avec une ampleur plus grande la mesurede la dimensiondel'absolutisme, et lesfinances royales se trouvaient obres par une dette25considrable. Jean-Baptiste Colbert avait bien tenten1674 de matriser ce fluxde l'endettement avec uneCaisse des emprunts mais sans succs durable face auxbesoins toujours renouvels. L'argent faisait dfaut,malgr les acquis de la politique mercantiliste, et man-quaitsansdouteaussi unsystmefiscal capabledeledrainer efficacement.Ces dfauts ont t pris en considration par unfinancier cossais, John Law(1671-1729), qui dve-loppa un projet complet que l'on peut qualifier de mer-cantilismefiduciairel. Il demeurait mercantilistedansla mesure o la puissance conomique dpendait de laquantit de monnaie, mais,bien que fils d'orfvre-ban-quier, il n'avait pas l'obsession du mtal prcieux:l'activit sera stimule par l'mission de papier, dont lavaleur sera auto-entretenue par l'expansion cono-mique, et notamment parledveloppement descolo-nies, cequi serattachait d'ailleursaussi aumercanti-lisme. Law avait essay plusieurs reprisesdepuis 1701 deconvaincrele pouvoir royal decrerunebanqued'missionet il revint encorelachargeenjuillet 1715avecunMmoiresur les banques ,toujours sanssuccs. Maislamort deLouisXIVenseptembreallaitluipermettred'obtenir enfinl'autori-sation de crer sa Banque qui sera la base d'un systmecomplexe dirig quelques annes plus tard par uneBanque royale21. La Banquegnrale. - Lescirconstancestaientfavorables au projet de John Law car le duc d'Orlans,1. Surla sempiternellequestion de la prononciation correcte dunomde J. Law(Lasse), cf. L'Intermdiaire des chercheurs et des curieux,octobre1995, 1036.2. E. Faure, La banqueroute de Law. 17juillet 1720, Paris, Gallimard,1977,742p.; J. Cellard, John Lawet la Rgence (1715-1729), Paris,Plon, 1996, 456p. Cf. aussi uneexcellentesynthse chezHoutman, vander Wee, in Pohl, 1993, 139-149.26qui exerait la rgence pendant la minorit deLouis XV, avait trouv unesituationcatastrophiqueo les recettes fiscales des deux annes suivantestaient dj engages. En dehors de mesures drastiquescontrelescranciers, peuintressantespour lecrditpublic,il fallait absolument trouver des solutions nou-velles. Orlefinancier cossaisavaitmodifisonplanen proposant maintenant la crationd'un tablisse-ment privaucapital de6 millionsdelivrestournoisdivisenl 200actionsde5000livres. Le quart seule-mentdevaittreverslasouscriptiondont25% aumoinsenespces, lerestepouvanttrereprsentpardestitres de la dette publique.On retrouve l le mca-nisme de consolidation de la dette utilis pour laBanque d'Angleterre, mais la ressemblance s'arrtait lcarnotrebanque taitloin d'tregnralemalgr sontitre. En effet, elle ne pouvait pas faire d'oprations decrdit et selimitait des oprationsdedpts, vire-ments, changeet missioncar il s'agissait surtout defavoriser ladisponibilitmontaireparunaccroisse-ment de la circulation.Lawobtint l'autorisationdecrersaBanquegn-rale le 2mai 1716, avec un privilge d'mission devingt ans. Ces billets taient mis exclusivement encontrepartie dedptsd'espces etse trouvaient libel-ls encus debanque et non en livrestournois. Cenominal enmonnaierelle, selonlepoidsau jourduprivilge, offrait une garantie contre les variations de lamonnaie de compte, comme on le pratiquait dj dansles banques publiques hollandaises. Cet avantageconsidrable, car les stipulations en espces rellestaient jusqu'alors rigoureusement interdites, devaitfavoriser la demande de billets, bien qu'ils ne portaientpasintrtet qu'ilsn'avaientpas cours lgal. Deplusle 10avril 1717, leRgent ordonnaauxofficiersdesfinancesderecevoir lesbilletsenpayementdestaxes,ce qui tait un soutienpuissant l'acceptation desbil-27lets dans tout le Royaume alors que la Banque n'avaitqu'un tablissement Paris.L'activit dmarra de faon assez modre et progres-;,sive, mais aprs unanLawvadployer unenergieextraordinairepourmettreenplacesonsystmedefinance et bousculer l'organisation tablie. Ds le5 septembre 1717 il obtient le privilge lui permettant decrer la pice matresse de ce systme: la Compagnie deCommerced'Occident avecunmonopolesurletraficcolonial duC'l-nadaet delaLouisiane. Cettesocitavait un capital de100 millions de livres que l'on pou-vait souscrireenbilletsd'tatc'est--direavecunpapier qui avait t mis lors des crises financires prc-dentespourrembourserdesporteursdetitresd'tat,parexemplelesdposantsdelaCaissedesempruntsen1709ou bienen1716 l'occasiond'oprationsdevisa de la dette. Ces billets taient trs dprcis, 30 0A>du nominal environ, mais Law les acceptait au pair cequi ne pouvait qu'attirer les victimes des spoliations pr-cdentes. De toute faon le coinmerce colonial tait trsattractif et promettait des dividendes trs levs, large-ment plus intressants que les rentes d'tat. On pouvaitdonc imaginer que, selon le plan de Law, toute la detteserait convertie un jour en actions et que la Compa,gnied'Occidentserait termel'uniquecrancierdel'Etat.Enattendant, dsl'achvement rapidedelasouscrip-tion, laCompagnietransfraauTrsortouslestitrespublicsqu'elleavait recueillisenchanged'unerenteannuelle de 4 millions de livres garantie par la ferme del'imptsur le tabac. L'opration tait ainsi nonseule-ment sre mais pouvait aussi devenir particulirementlucrative car la Compagnie envisageait de devenir pro-ducteur de tabac en Louisiane et dejouer grce cela surdeux tableaux.Aprs ce succs, Laws'employa dvelopper saCompagnieet rachetaendcembre 1718laCompa-gnie du Sngal, dj trs active dans le commerce28colonial. Par contraste, la Banque gnrale paratmoins intressante, d'autant plus que l'hostilit de cer-tainsfinancierscomme les frresPrisobligeait unegrande prudence dans l'mission:en tant que fermiersgnraux ilsdtenaient degrandes quantits de billetsqu'ilstaientobligs, leurgranddam, d'accepterenpayement des impts et ilspouvaient gner la Banqueendemandant brutalement leur conversion. Ce mmemois de dcembre 1718il fut doncconvenuavec leRgent qu'il serait prfrable, vusesmissionsmon-taires, que la Banque soit aux mains du gouvernementroyal. Lecapital fut donc rachet, enespces, et laBanquedevint royale compter du 1erjanvier1719.Mais elle ne sort pas compltement du Systme carsonactiftait enfait reprsentpresqueentirementpar des actions de la Compagnie d'Occident et elleaura une place de choix dans le tourbillon financier quiva se lancer dans le courant de cette nouvelle anne.2. LaBanque royale. - Le changement de propri-taire de la Banque ne va pas tre sans consquence surlesbillets. Ceux-ci portent dsormaislesceau royal etsontmisau choixen cusdebanqueou enmonnaiede compte, selon des contingents fixs par le conseil dergence, mais avec l'exigence d'une couverture enespces dans la ligne de la politique prudente engageauparavant. Cependant leur circulation va tre favori-se par l'ouverture de succursales en province. ,Cetteanne 1719vasurtout 'tremarqueparuneformidable expansion de la Compagnie d'Occident quireprend les privilges d'autres compagnies de com-merce etsetransforme enCompagnie desIndes. Acemonopoleducommercecolonial trslucratif, lanou-velleCompagnievatrs rapidement ajouterquantitd'activits publiques et se transformer en unesorte deconcessionnairegnral des servicesdel'tat, malgrl'hostilitdecertainsdignitairescontresondirecteur,29cet tranger non catholique. Aprs le tabac, djacquis en1718, Lawobtient lafrappedes monnaiespuis la fermegnrale des droits indirects et enfin celledes impts directs! Cette expansion se fait des condi-tions financires onreuses pour la Compagnie qui,outreunfermagelevdoit accorderunprt normede 1,2 milliard de livres affect au remboursementd'une partie de la rente et de certains offices quiavaient t vendus auparavant dans les priodes dedtressefinancire. Maisl'opration est en conformitaveclesystmeet depluselleprsentel'avantagededbarrasser la Compagnie de la concurrence definan-ciers rivaux. Il n'est dsormaisplus craindre devoirces percepteurs d'impts agiter la menace d'unedemande massive de conversion des billets!Cettecroissancesetraduit aussi par desaugmenta-tions de capitalqui vont multiplier celui-ci par quinzepour offrir les moyens de la prise en charge du rembour-sement des rentes et offices. Plusieurs missions ont lieuet pour les dernires, l'automne, les souscripteurs doi-vent s'acquitter d'uneprime de4 500 livres en plus dunominalde500. Cependant lesnouveauxactionnairesaffluent, allchs par la perspective de profits et de plus-values confortables dans une ambiance trs spculativeet tout tait fait pour favoriser les souscriptions car onpouvait se librer en dix voire en vingt mensualits selonles cas et en billets de la Banque royale. Or cesbilletstaient dtenus par les anciens titulaires de rentes rem-bourses qui pouvaient ainsi leur trouver unemploid'autant plus lucratif que les actions taient disponiblespour la spculation ds le premier versement!Ce dveloppement de l'actionnariat, avec 624000 ti-tres mis au total, se faisait alors qu'il n'existait aucunmarch organis,niaucune connaissance financire engnral. Cette libert, tout fait inusite dans une co-nomie o tous les changes taient rglements,abienentendufavorislaspculationet portassezrapide-30mentle cours des actions 10000, voire18 000 livres!On connat bien l'image de la folle ambiance quirgnait rueQuincampoixolemarchimprovisdesactions s'tait dvelopp proximit du sige de laBanque. Cependant laCompagniesoutenait lemain--tienducours des actions unhaut niveauavecunBureau d'achat et devente quiles rachetait contre desbillets quandellestombaient sousles 10000livres etaussi grce une politique systmatiquement favorableau billet de banque.Eneffet, toutes ces souscriptions ncessitaient unequantitnormede billets et lacirculationavait tmultiplie par prsdevingt au coursdel'anne1719,surtoutausecondsemestre, et l'onavaitendcembre1 milliard delivres en monnaiepapier, soit peu prsautant que le budget royal. Pour viter la dprciationdu papier, Law va alorsutiliser deuxtechniques com-plmentaires : discrditer les espces et renforcer le cr-dit de la Banque royale.Plusieurs mesures sont diriges contrela monnaiemtallique: desmanipulations diminuent fortement lecours des pices, leur pouvoir libratoireest svre-ment restreint 600livrespour l'or et 10 livresseule-ment pour l'argent et au-del de ces montants il fallaitrecourir au billet et enfin, puisqueces dcisions ris-quaient d'encourager la thsaurisation,la dtention deplusde500livresdemtauxprcieuxtaitinterdite!Cette dernire mesure avait aussi l'avantage de dispen-serlaBanque d'unremboursementdesbilletsau-delde500livresparpersonne, ce qui limitaitla converti-bilit. Surces bases, l'missionpouvait sepoursuivresans inquitudeet fin mai 1720onentait 3mil-liards en circulation, couverts par 21 millions enespces et 28 millions en lingots, soit peine 2% selonlesestimationslesplusdfavorables tandisqued'au-tres taient plus leves mais sans dpasser 300mil-lions de couverture.31Encontraste aveccette politique autoritaire voiredictatoriale, qui allaitjusqu'lapossibilitdevisitesdomiciliaires par les agents de la Compagnie poursaisir des espces, le renforcement du crdit de laBanque emprunta des voies plus subtiles. On s'ap-puyasur l'imagetoujourstrsallchantedelaCom-pagniedes Indeset onfusionnalaBanqueavecelle,le 23fvrier 1720, mais enmme temps ondployaunepropagandesurlesrichessesduMississippi avecdesprospectus dcrivantdesconditions paradisiaqueset des montagnes de pierres prcieuses. Le sort desdeuxinstitutionstait tout fait liet laBanquevaservirconstamment laCompagnieneserait-cequepar les prts consentis sur actions, autre faon desoutenir lescours.Comme Lawavait t nomm contrleur gnraldes finances le 5janvier et qu'il dtenait ainsi lesfinances royales, la Banque devenait l'instrument privi-lgid'un nouveaupouvoir conomique trs centra-lis, voiredupouvoir politique. Etcette confusionvaluitre fatale. D'unepart ellerencontrerala mfiancedes classes dirigeantes quand Law mettra des ides derforme de l'tat avec la suppression des offices et sur-tout avecuneprofonderformefiscale. D'autrepart,elle subira la crise de confiance provoque par unepolitique dflationniste lance par Law partir duprintemps. Lefinancieravoulu matriser cetteexpan-sionspculativequi avait des effets inflationnistesetqui tait troprapide par rapport audveloppementrel desactivitsdelaCompagniequi aurait eubiendu maldistribuer les dividendes mirifiques attendus.Ds le mois de mars le rachat des actions 9 000 livresdiminue fortement le montant en circulation, maisaugmente bien sr celui des billets. Ensuite, le21mai,Lawprsenta unplandestin ramener le cours 5000 livres jusqu'en dcembre et diminuer de moitilecoursdes billetssousprtextedemaintenirleprix32des biensrelsqui risquait debaisserfacelavaleurleve de la monnaie papier.Ces perspectives dclenchrent la panique dont lesignal fut donn par des princes du sang qui demand-rent la conversion de monceaux de billets. Les rservestant trs vite puises le remboursement fut suspendule17 juillet. Maislecoursforcdubillet etlaraffir-mationdes mesures autoritairesprcdentesnesuffi-rent pas pour le sauver et il connatra un dclin rapideaucours del'tdeconserveavecl'actiontombe200 livres. Comme le billet n'tait plus accept, sadmontisationdefait prcdacellededroit pronon-ce par le rgent le 10 octobre. La liquidation futmeneen 1721 et 1722par unecommissionsous ladirection des frresPris, les grands rivaux deLaw,etaprs contrles et rductions, lesbillets furent conver-tis en rente perptuelle. A la findes oprations,tout lepapier, placdansunecagedefer, fut brlenplacepubliqueet aprscetteliminationdestmoinsdelasorcellerie financire que l'on avait vcu, la Franceretrouva son organisation traditionnelle, avec un mau-vais systme financier et une monnaie mtallique insuf-fisante, maisquel'onseproccupatout demmedemettre l'cart des manipulations, inaugurant ainsiunestabilitquidurera jusqu'en1928. La foliespcu-lative avait compltement occult dans l'opinionleseffetsbnfiquesdel'accroissementdelamonnaiesurl'conomie: il n'en resta que des prjugs durablescontre la banque et le billet.Aprs avoir essay de se maintenir le plus longtempspossible, John Law a d s'enfuir le 9 dcembre1720 etse rfugier Venise o il terminera sa vie dans un cer-tain oubli. Ses cendres y reposent dans la nef de l'gliseSan Mois, non loin du lieu o avait t fond en1587leBancodellaPiazzadi Rialto, modledes banquespubliques urbainesorientes vers la stabilisation de lamonnaie.33N.OLSZAK - 2Pendant que le systme de Law s'effondrait, l'Angleterresubissaitelleaussi unegigantesque crisefinancireconnuesousle nom de SouthSeaBubble car il s'agissait de l'clatement d'unenorme bulle spculative qui s'tait constitue autour des actionsdedeuxcompagniesdecommercecolonial, laSouthSeaCom-pany et la UnitedEast Indian Company. Ces socits s'taientdveloppes depuis 1711 pour absorber les titres de la dettepubliquequel'onpouvait apporterensouscriptionaucapital.C'tait le mme principe que celui mis en uvre par John Law etl'on avait d'ailleurs connu une situation de concurrence qui avaitpouss la surenchre: en1719, quand les financiers anglais ontpu constater que des capitaux fuyaient vers Paris pour participerlafoliedelarueQuincampoix, ilsont dciddemarquerungrand coup en reprenant la totalit de la dette publique de l'An-gleterreconvertieen actions de la South Sea Company. Cetteopration dclencha elle aussi une fivre spculative extra-ordinaire avec des hausses normes et des rues sur les missions.Maislachutenefut pasla mmequ'PariscarlaCompagnieput comptersurlesoutien delaBanque d'Angleterreet sur desdcisions nergiques dupremier ministre Robert Walpole quirduisit et divisa lecapital (Houtman, vander Wee, in Pohl,1993, 167-169). Cela tait bienentendupossible parce que laBanque n'avait pas t intgre dans un systme unique et qu'ellen'tait donc pas entrane par l'clatement de la bulle. Cettehautestature, au-dessusdelamle, lui permettraderenforcersoncaractreexemplairequi serviramaintes fois, par exempleencore la finduXVIIIesicle quandd'anciennes coloniesacc-deront leur indpendance etquelenouveausouverainse pr-occupera aussi d'avoir sabanque.v. - LaBanque destats-UnisL'histoire bancaire amricaine est troitement lie la construction de la Fdration et des dbatspoliti-ques o la question de la monnaie prendra parfois desallures dramatiques commelors de l'intensequerelledubimtallismedans lescampagneslectoralesdelafinduXIX: sicle1 Cependant de1776 1789, pendantlaGuerred'indpendancepuis dans laformation du1. R. H. Timberlake, The Origins ofCentral Banking in the UnitedStates, Cambridge, HarvardUP, 1978, XI + 272 p.; H. Intrator, Lesys-tme bancaire amricain, Paris, Que sais-je?, n 3171,1996.34nouvel tat les choses se prsentaient plus simplement.La Constitutionde1787 avait confirm les Articles deConfdration de1779 en accordantle pouvoir mon-taire au Congrs des tats-Unis: celui-ci pouvaitbattre monnaie et fixer la valeur des espces nationalesettrangres, aummetitrequelespoidset mesures,tandisquelestatsfdrs sevoyaient expressmentcarts deces attributions (art. 1er, sect. 8 et 10). Maiscetteuniformitmontairetaitconueparrapportla monnaie mtallique et on ne trouve pas de rf-rences lamonnaiefiduciairedans ces textes. Pour-tant certains tats avaient dj accord des privilges desbanquesqui fonctionnaient surleurterritoiresui-vant l'exemple de la Bank of Philadelphia fondeen1780et qui avait rendudegrandsservicesdanslefinancement delaguerre. Cet exempletait aussi trsconvaincant pourlesfdralistes, partisansdurenfor-cement de l'Etatfdral, quivontse proccuper d'ob-tenir leur banque mais avec tant de difficults que cetteinstitution n'aura qu'une vie phmre en deux phases,de 1791 1811 et de 1816 1836(Rockoff, in Pal-grave, 1992, 2, 106).1. Lapremire Banque destats-Unis. - Un projetde Banque nationale est prsent ds 1790 par le Secr-taireauTrsor, Hamilton, qui s'inspirait directementdecequeAdamSmith avait dit des avantagesdelaBanque d'Angleterre: une grande machine d'tat,capable d'accrotrele capital du pays en mobilisant etendmultipliant les ressourcesmtalliques. Certes, ilpouvait yavoir des dangers dans l'excs d'mission,mais ceux-ci sont carts tant quel'onmaintient laconvertibilitet tant quel'tat n'aqu'uneparticipa-tionlimiteaucapital et ladirectiondelabanque,participationqueHamiltonvoyait del'ordreducin-quime seulement. La banque devait tre prive etfonctionnercommeunebanque commerciale, maissa35fonctionprincipaleseraittout de mme desoutenir lecrdit public car lestroisquarts du capitalpourraienttre reprsents par des titres de rente et les billetsseraient garantis partiellement par la dette flottantesous forme de bons du Trsor. Cette opration, o l'onretrouve ~ a l e m e n t l'influenceanglaise, paraissaitfortutile car l'Etat fdral avait repris son compte toutesles dettes de guerre et que le capital de la banque pour-rait en absorber environ 8 %, ce qui allgerait ce poids.Cependant ces ides se sont heurtes une fortersistance au Congrs et surtout la Chambre desreprsentantsol'onpouvaitvoirunclivageentrelenord-estet lesud. Pratiquement tousleslusdusud,de tendance dmocrate, taient contre. L'oppositiontait mene par James Madison dans un long dbat olesargumentsconomiquestaient assezabsentsfaceaux lments politiques et constitutionnels. Si l'onavait quelques doutes quant l'accroissement du capi-tal national procur par la banque, on s'inquitait sur-tout de deux choses: le rapport entre la Fdration etles tats car la premire allait faire concurrence ceuxqui avaient dj tabli leur banque; le pouvoir duCongrs qui ne paraissait pas tre comptent pours'occuper d'autre chose que des espces. Sur ce dernierpoint, la discussion fut complexe et pleine de subtilits,montrant la pntrationdanslesespritsdesfonctionsdesbanques. Ainsi pour certains comme le Congrsalepouvoir d'emprunter, il aurait aussi celui decrerdes tablissements prteurs et comme il a le pouvoir detaxer, il peut crer les moyens de rgler ces taxes. Pourd'autresilfaut surtout considrerqueleCongrsalepouvoir d'organiser le commerceentre tats et ceciconduitncessairements'occuper desbanqueset delamonnaiefiduciaire. Cependant, decetteapprocheplusintressantesurleplanduraisonnement cono-mique dcoule une autre question fort complexe:l'missiondoit-elledpendredesbesoinsdecrditdu36commerceet reposer sur l'escompteoubiens'agit-ilseulement d'une contrepartie de dpts d'espces etdonc une simple commodit pour les changes?La premire conception l'emportera pour l'mission,maisenconcurrenceaveclesbanqueslocales (state-chartered banks). Il n'est pas question pour le gouver-nement d'tablir un monopole au profit de cettebanquenationalequi, outre sonactivitcommerciale,aurasurtout lerledecaissierduTrsor. Aveccetteapproche rassurante le projet put tre adopt par deuxtiersdes voix et le privilge futaccord pour vingt anscompterde1791cettenouvellenational-charteredbank tablie Philadelphie.L'activit delapremireBanquedestats-Unis estassez mal connue car la plupart des archives ont disparudans des incendies, mais il semble qu'elle fut assez pru-dentedansl'ensembletantdupointdevuedel'mis-sion, biencouvertepar des espces, quedel'activitcommerciale, pourtant soumise une concurrencecroissante avec ledveloppement du systme bancaire(3 banques en 1791, 88 en 1811). Dans cette concurrencela Banque est nettement avantage en raison de son acti-vitnationaleavecdessuccursales, cequi est unique,mais surtout grce ses fonctions de caissier du Trsor.Celles-cifavorisent l'acceptationdesesbilletsdanslecommerce car on pourra toujoursles utiliser pour despayements publics et de plus elles lui permettent d'exer-cer son contrle de fait sur l'activit des banques locales.En effet elle voit passer une grande part de la circulationmontaire et dtient des billets qu'elle peut toujours pr-senter la conversion si elle estime que leur metteur estunpeutropgnreuxdans l'octroi decrdits. Cetteconversion peut diminuer fortement l'encaisse d'unebanque locale et l'obliger restreindre son activit(Timberlake, in Palgrave, 1992, 1, 328).Cettesituationvapeser dans le dbat qui s'ouvreen1810 proposdu renouvellement du privilge. Les37directeursdela Banque plaident en faveurd'unchan-gement destatut versunereconnaissance juridique dece rle minent dans le systme bancaire. Le gouverne-ment est relativement favorable ce qui serait l'tablis-sement formel d'unebanquecentralecar laBanqueat un agent trs correct et trs efficace du Trsor.Maisc'est prcismentcequi vadclencherl'opposi-tion au Snat o les reprsentants des tats aimeraientbien que leurs banques profitent aussi de cette clientledu Trsor fdral et le dbat constitutionnel vareprendre. Madison qui avait men l'oppositionen 1790est maintenant prsident des tats-Unis. Sapositionest unpeudiffrentedecefait,' maiscelanesuffirapas dsarmer lescritiquescar denombreuxarguments s'ajoutent aux lments politiques. Ainsi onpeut faire valoir que la Banque n'arien fait pour car-ter unefaillitedansla premire crisebancaireen1809et surtout on doit constater que la dette publique a tfortement rduitedepuis vingt ans et quelamissioninitiale de la Banque avait par consquent disparu. Deplus des tensions avec la Grande-Bretagne entranaientun prjug dfavorable envers l'actionnariat anglais dela Banque. Pour toutes ces raisons sa charte ne fut pasrenouvele, une voix prs, et elle dut cesser ses activi-ts en1811 mais pour peu de temps car elle fut recons-titue cinq ans plus tard.2. LasecondeBanquedestats-Unis. - LeTrsorfdral s'est retrouv seul, sans sa banque, au plusmauvais moment car partir de 1812 et jus-qu'en 1814 il a d s'occuper du financement de laSecondeguerred'indpendancecontrel'Angleterre proposdudroit desneutresdansleconflit europen.Ces problmes de financement, d'autant plus gravesquel'tatfdral nedisposaitquedelaressourcefis-cale des droits de douanes videmment peu levsdans ce contexte, ont t rsolus par diffrents38moyens. On fit largement appel aux banques destatsqui avaient d'ailleurspousscommedescham-pignons (de 88en 1811, onpassera250en 1816).Oneut aussi recoursl'missiondebonsduTrsorcar lesempruntsseplaaient mal: les Treasurynotestaient des bons unan, portant intrt mais pou-vant treutilisspour lespayementspublicset decefait, commeles assignats delaRvolutionfranaise,ils vont circuler comme monnaie.Entrois ans la massede papier encirculationvapresque quadrupler tandis queles espces disparais-sent aveclathsaurisation. Lesrservesdebeaucoupdebanquesavaient d'ailleursdjbaissparsuitederetraits anglais et la convertibilit des billets s'estretrouve suspendue par la plupart des tats. Il enrsulte une certaine anarchie dans la monnaie fidu-ciaire, avec desbilletschangsen dessous dupair, etsurtoutuneforteinflationcar lacourbedesprixsuitfidlement celledel'mission. Pour sesortir decettemauvaise situation aprs la guerre, le secrtaire au Tr-sor Dallas reprend l'ide d'une Banque des tats-Unisqui pourrait absorber les bons duTrsor dans soncapital et rduire leur circulation. Par ailleurs, laBanqueaura galement surveiller les banques destats pour les faire revenir laconvertibilit: Elledevratrelebergerdansson champ, gardant le trou-peaudisciplinet biennourri. )} Pourcela, elletirerason autorit du Congrs tout en tant indpendante.Les dbats parlementaires montreront la persistanced'opinionsopposes, entreles dmocratesquineveu-lent pas de ce renforcement de la Fdration et lesfdralistes, w h i ~ s , favorablesaucontraireunevri-table banque d'Etat. Le prsident Madison est d'abordhostile au projet mais face l'ampleur de la crise il s'yrallieraenratifiantlaloi du10 avril 1816 quiaccordeunprivilgedevingt anscettesecondeBanquedestats-Unis.39Ses activitscommencent en 1817sous unetutelleasseztroiteduTrsorenraisonducaractreunpeueffac deson prsident maisaussi cause del'objectifprincipal de la politique montaire oriente vers leretrait rapide desTreasury notes. Cette dflation fut unpeu trop brutale car conjugue la chute des prix agri-coles elle contribua une srieuse crise bancaireen1819. La responsabilit en fut attribue la Banquemais elle russit surmonter ces critiques et dveloppases activits dans les annes1820 sous l'impulsion d'unprsident nergique, NicholasBiddle. Elleparvient concentrerla moitidesdptsenespces etsonrlede caissier du gouvernement lui procure toujoursl'avantagededtenirdesbilletsdetouteslesbanqueslocales et de pouvoir ainsisurveiller leur activit tra-vers les demandesde conversion. Deplus ses contactsavecl'trangerlui permettentgalementdergulerlacirculation enfonctiondu commerce extrieur grcedes crdits sur Londres.Ainsi en dcembre1828 le secrtaire au Trsor Rushpeut dresser un bilan tout faitlouangeur de l'activitde la Banque. Mais il le fait par prcaution car certainstats avaient engagunmouvement enfaveur d'unelibert de l'activit bancaire, le freebanking, et de plusennovembreAndrewJacksonavait tluprsidentdestats-Uniset ce dmocrate, agrarien et sudistenepouvait tre que menayant pour l'avenir de la Banquerputefavorable l'Etat fdral et auxintrts desindustriels de l'Est.Et effectivement dssondiscours inaugural de1829Jackson poserala questiondurenouvellement de lacharte dela Banque dont, selon lui, la constitutionna-lit et l'utilit sont contestes par une grande partie descitoyens. Cette charge, renouvele en1832 par un pr-sident qui accuse la Banque d'avoir outrepass sesattributionssurleplanlocal, provoqueradesdiscus-sionsauCongrset inaugureainsi unlongdbat de40cinqans particulirement houleuxet qui se trouveraqualifi dans l'histoire de(( Bankwar .Ces dbats se focalisent sur des aspects ,constitution-nels et celavaut sans doutemieuxcar beaucoupdereprsentantsn'ont quedesconnaissancesfinanciresassez vagues. C'est ainsi que de longues discussionssont consacres la notion de banque centrale dans unsens purement gographique et que d'autres s'en pren-nent au profit que laBanque raliserait sur des opra-tions publiques. Cependant les aspects juridiques etpolitiques se rejoignent quandonexaminelefait desavoir si le Congrs ale pouvoir de crer cette banquenationale. Pour ses partisans ce serait tout fait le cascar le Congrs peut battre monnaie, or celle-ci neconsiste pas seulement en des pices. Et l'on cite StuartMill pourmontrerquelamonnaieest unemesuredelavaleur etqueleCongrsqui peutfixerlespoidsetmesures est donc comptent pour tous leurs aspects.Finalement en juillet1832 le renouvellement du pri-vilgeest votunelargemajorit. MaisJackson vamettresonvetocetteloi avectrois arguments: lespouvoirs de la Banque des tats-Unis ne sont pas clai-rement dlimits par rapport auxautres banques etc'est laporteouverte uncontrledefait; ladettepublique a t trs rduite et l'tat n'a plus participer une entreprise qui doit tre purement prive; leCongrsacertes lepouvoir montairemaisilne peutle dlguer un tablissement financier.Ces arguments fort srieuxsont ensuitelargementdbattusdanslacampagnelectoraleet larlectionde Jacksonserainterprtecommeuneapprobationde sa position anti-banque. Mais d'autres lmentspouvaient avoir jou, outre le charme personnel ducandidat. Il faut songer notamment ausuccs de lapolitique de dmocratisation des institutions quemenait Jackson, nonsans uncertain populisme. Orune banque centrale pouvait passer comme l'instru-41mentdesgrandsfinanciersetdesgros cranciers hos-tiles aux faibles dbiteurs.Maistout n'tait pas jou carauCongrslamajo-ritpro-banquerestait inchange. LeBankwarpou-vait donc continuer mais en utilisant d'autres moyens.En 1833 et 1834, Jackson s'emploiera affaiblir laBanque des tats-Unis en retirant les dpts gouverne-mentaux, cequiprovoquera de multiples conflits aveclessecrtairesduTrsorsuccessifsetleCongrs. Il yrussira partiellement en avantageant certaines ban-ques qui deviendront des pet banks , les banqueschries du prsident, mais devront alors subir uncontrle de leur ratio de couverture par le Trsor fd-ral, cequi est unrsultat paradoxal d"unepolitiquehostile une banque centrale. Par ailleurs des mesuresfavorables l'utilisation des espces seront prises,comme la dvaluation du dollar qui, selon un nomina-lisme assez simpliste, permettrait de se passer de billetsen accroissant les ressources en numraire, ou bienl'exigence du payement en espces pour les terres ven-dues par le gouvernement.Cettecirculairesur les espces de 1836marquelafin de la prsidence de Jackson qui avait russi maintenir son veto au renouvellement du privilgegrce cette tactique qui compliquait les dbats etobscurcissait le vritable enjeu. Il est remplac parVanBuren quipartage en gros son point de vueet nefera rienenfaveur duvoted'unenouvellechartedela seconde Banque des tats-Unis qui s'tait transfor-me en United States Bank of Pennsylvania dsfvrier 1836. Malgrunecriseprovenant deladfla-tionet unepanique. bancaire sensibles ds la premireanne de la nouvelle administration en 1837, il neserapasquestiond'yrevenir.Cettebanquecentralepouvait passer pour inutile,unefoislesgrosbesoinsdefinancement publicscar-ts, carl'conomieamricainen'tait encorequepeu42dveloppe, avecuncloisonnement gographiquedesmarchs qui s'ajoutait aux complications politiques dufdralisme. La croissance avait certes commenc etpoussla crationdebanques(quisont maintenantprsde600)maissans que cela agisse immdiatementsur les mentalits politiques. Ontait entr dans leXlxesicleavecuncadreconceptuel qui continuaitlapriode initiale de l'histoire des banques centrales.Maiscemoment, enEurope, larecherchedemon-naieindispensablel'industrialisationplacelesinsti-tuts d'mission au premier plan des proccupations.43ChapitreIILESINSTITUTSD'MISSIONALASOURCEDELAMONNAIE(XIXeSICLE)Ledbutdusicle, marquparlesgrandesguerreseuropennes, voit encore dominer les besoins classi-quesdefinancement publicqui ont t l'originedesbanquesdessouverainsetsur cem.odleapparatrontd'ailleurs des banques nationales enAutriche(1811)ou au Danemark(1818) pour rsorber la masse depapier public quiavait cond'uit devritables faillitesd'Etat(Born, inPohl, 1993, 184). Cependant d'autresdemandes prives et publiques vont trs rapidementprendrelerelais. Ellesproviennent del'industrialisa-tionavec les grands investissements, le dveloppementdes changes et la divisiondu travail qui augmenteconsidrablement le capital circulant des entreprisestandis que les travaux publics d'infrastructure, la cons-tructionderoutes, decanauxetd'unepartiedesche-mins de ferrenouvellent les besoins de l'tatl.En consquence, les conomies nationales se monta-risent dans le cadre de marchs unifis et mme dans lescampagnes on quitte les habitudes de troc ou de rgle-ments par tailles. La circulation montaire augmente etla ressource des dcouvertes d'or et d'argent du milieu1. L. Meignen, Histoire de la rvolution industrielle et du dveloppement(1776-1914J, P a r i s ~ PUF, conomie , 1996, 286 p.44du sicle sera la bienvenue pour alimenter cettedemandedenumraire1 Maislesespcesnesuffirontpas, neserait-cequepour desraisonsdecommoditmalgr la disponibilit de grosses pices d'or. LeXIxe sicle verrale dveloppement dubillet debanquequi aprs avoir largement circul de manire purementvolontaireobtiendralecourslgal permettantdes'enservir pour se librer d'une dette quelle que soit lavolontdu crancier. Ensuite nous verrons galement,malgr les difficults de mesure, le dveloppement de lamonnaie scripturale des comptes en banque, desrythmesvariablesselonlespaysmaisinexorablement(Saint-Marc, 1983, 7-43). Ainsi, enGrande-Bretagnenous avons en 1850 pour une masse montaire de255 millions de livres: 24 % d'espces, 13 % de billets et63% de dpts bancaires. En 1900, pour 1003 millions,la part des pices est descendue 12 0/0, celles de billets 4 % seulement tandis que les dpts reprsentent 84% Polir laFrance, en1850, les4,6 milliardsde francsdemonnaiecomprennentencore77 % d'espceset 13 %de billets, avecseulement 10%dedpts bancaires.En 1900, pour 15,4 milliards, ces chiffres seront respecti-vement de 33 0/0,23 % et 44 % (North, 1994,168).Quoi qu'il ensoit, lapart delamonnaiedans safonne rgalienne traditionnelle -les pices avec l'effigiedusouverain- diminue, cequi poseleproblmeducontrle de cette nouvelle monnaie de papier et spcia-lement de celui des billets qui se substituent aux pices,les dpts bancaires quant eux se mobilisant enpices et surtout en billets quand ils ne sont pas utilissparlebiaisdechquesoudevirements. Cen'est quetrs rarement que l'tat va assurer directement l'mis-sion de ces billets, ceci en raison d'expriences fort1. La production d'or est multiplie par dix et celle d'argent parquatre, avant les nouvelles dcouvertes d'AfriqueduSudde la fin du. sicle (North, 1994, 146).45malheureuses de la priode prcdente, qui serontd'ailleurs confirmes par de nouvelles drives (Lvy,1912).Mais mme sous le rgime ancien de la monnaiemtallique, lafrappetait leplussouventconcdedes entrepreneurs privs, qui agissaient bienentendudanslecadrederglesstrictes. C'est ainsi quel'mis-siondes billets seraelle aussi, commepour les pre-mires banques duXVIIe sicle, soumise le plus gnra-lement un rgime de privilge concd par la loi pourune dure limite des banques constitues sous formedesocitsdecapitauxet selivrantparailleursdesactivits commerciales ordinaires.Ces chartes de privilge ou, dfaut, les normes surles rserves et la convertibilit doivent garantir laconfiance indispensable la valeur et elles rglent ga-lement, chose importante, lepartagedes profits quel'on peut tii-er de l'mission car avec le seigneuriage lamonnaie tait aussiun revenu que le souverain n'envi-sage pas aisment de perdre!La doctrine conomique,en pleine formation, va d'ailleurs se proccuper decettequestiondesnormesd'missionet fixercertainsprincipes de base au cours d'un long dbat marqu parde vives controverses.Ce rgimeaboutit une multiplication des banquesd'missionet dans certains cas nous avons des-cen-tainesde billetsdiffrents dans unmmepays. C'estlunechosequi peut nous paratretrange, notrepoque o les exemples de pluralit d'metteurs,d'ailleurs restreints deux ou trois pour un mmepays, sont trs rares et ne concernent gnralementque des montants limits comme en cosse ou auLuxembourgl. Maisil suffitdecomparercesbilletsnos chques actuels, avec leurs multiples formules,1. BanqueinternationaleLuxembourg, LaBILet samonnaiedansl'conomie luxembourgeoise depuis 1856. 140 ans de droit d'mission,Luxembourg, 1997,60 p.46pour comprendreque ceci tait praticable,en tout castantquelebilletn'taitqu'uninstrument decommo-dit. Avecle cours lgal, il enva biendiffremmentcar lesexigences degarantie sont alorsbeaucoup plusstricteset lexocsicleconnatraunetendancegn-ralel'unificationdel'missionauprofit d'uninsti-tutquidominera ainsi lesautresbanques et disposerades moyens de contrler ou de garantir en dernierressort leur activit par la fourniture de billets. Ceprocessus d'unification suivra des voies diffrentes,plus oumoinssystmatiques ourapides, selon lescir-constances et les structures politiques des paysconcerns. Curieusement dans les vieux tats uni-taires, commelaFranceoulaGrande-Bretagne, quenouspouvons considrer comme telle malgr le main-tien de particularismes rgionaux, l'unit du billetn'intervient que progressivement et elle est favoriseparcertainescrises. Dans lestatsqui ralisent leurunit politique, commel'Allemagneoul'Italie, l'ta-blissement d'une banque centrale parat un objectifplus important, unvrai symbole de l'unificationg ~ n raIe. Enfin, dans les tats fdraux, le partage desattributions entrel'chelonfdral et le niveaulocalcompliqueet retardelessolutionsqui serontrelative-ment tardiveset qu'onnerencontreraqu'l'extrmefindecexocsiclequi nes'achverahistoriquementqu'avecla premire guerre mondiale.1. - Lesdoctrinesrelatives l'missionAvec une place de plus en plus importante du billet de banque,un certain nombre d'interrogations dj anciennes prennent uneampleur nouvelleet occupent lesdbats parlementairesoulestravauxdes conomistes et la priode est un moment importantdel'histoiredelapenseconomiquesurlamonnaieet surlaformationdes prix. C'est surtout le cas en Grande-Bretagne carle pays avait connuune longue priode de suspension de laconvertibilit dubillet, de1797 1821, et l'on s'y inquitait deseffetsdececours forc. Mme si ces dbats sesont propags47ensuitesur lecontinent, lesprincipesqui ont tdgags vonttre connus sous leurs noms anglais \.C'estainsiqu'unepremire controverse oppose uneCurrencySchool et une Banking School. Les membres de la premirecoles'appuient sur les travauxdeRicardopourconsidrerlebillet comme une monnaie ce qui impose, selonles principes bullionistes , qu'il soit nonseulement convertiblemaisqu'ilcorrespondeexactement undpt d'espcesafind'viterl'ex-csdemonnaie. Pourlespartisansdelasecondecole, commeJohnStuart Mill ou ThomasTooke, lebillet estuninstrumentdecrdit etl'missiondoit rpondreauxbesoinsdupublicquiapportedeseffetsencouverture. Grceauxeffetsdecommercelebilletdebanque aunequivalence relle, selon lathoriedesreal bills qui remonte John Lawet AdamSmith, car cestraites correspondent des oprations de production etd'change en coursqui dboucherontsur desrichessesassurantlacontrepartiedelavaleurdubillet et desintrts. Encasdecrise, il nefaut pasrestreindreautoritairement l'missioncar lasituationexige justement unapport auxtrsoreriesqui sesontcontractes, mais onpeut bienentendulever letauxdel'es-comptecequi dcaleles d e m a n d e s ~ debilletspastropurgenteset attire des fonds trangers. Cependant, malgr cette basecommerciale, les billets doivent demeurer librement converti-bles en espces, ce qui exige une couverture mais celle-ci n'apasbesoind'treintgrale. Laconvertibilitassureunergula-tionet vite les excs d'mission: si les billets paraissent tropnombreux, il yauradesdemandesdeconversionqui diminue-ront la circulation.Les deuxcourants doctrinauxsont cependant d'accordsurl'intrt d'une banque centrale disposant du monopole de l'mis-sionpourassurerlastabilitdusystme. Contrecetteopinioncommune, untroisime courant, la FreeBankingSchool, dfendleprincipedeli,bertbancaireens'appuyant enparticuliersurl'exemple de l'Ecosse o les privilges en matire d'missionn'existentplus depuis 1719. Ces auteursprconisent unsystmeautorgulateur avec quelques normes minimales, dont lalibre convertibilit et une organisation spontane reposant sur la1. J. de Boyer des Roches, Les dbats montaires et le dveloppementdelathoriemontaire enGrande-Bretagnedansla premire moiti duXlxesicle, Nouvellehistoiredelapenseco,nomique, Paris, LaDcou-verte, 1992, t. 1, p. 554-577; D. Ricardo, Ecrits montaires 1809-1811(dits par B. Courbis et J.-M. Servet), Lyon, 1991, 252p. Cf. aussiGoodhart, 1988, 13-46et lesnombreusesnoticeshistoriquesconsacrespar ledictionnairePalgrave cesprincipeset notamment cellerdigepar A. J. Schwartz, 1, 148-151.48cration de chambres de compensation entre banques pour favo-riser la circulation1L'cole libre-banquiste conteste l'intrt d'une banque privil-giequi aurait unemissionparticulirededisciplineducrdit.Cependantl'utilit d'unebanque centrale est apparuedans plu-sieurscrisesolaBanqued'Angleterreasoutenu destablisse-mentsmenacsenagissantenqualitde prteur endernier res-sort. Si ce principe dulender of last resort a dj t voqu parFrancis Baring ds1797 et Henry Thomton en1802, sa popula-risationproviendraduclbreouvragedeWalter Bagehot surLombard Street, publi en1873.IlYsoutient que le devoir de laBanqued'Angleterreest deconserver delamonnaiedisponiblepour approvisionner n'importe quel moment les banquiers quin'auraient plusd'actifsliquides. Biensrletauxdecescrditspeut tre trs lev, mais la banque centrale doit toujours prter.Toutefois, si cette garantie dusystme de payement est globale-ment intressante, elle peut conduire les banquiers prendre desrisquesinconsidrs et pour l'viter il faut ncessairement dve-lopper des rgles prudentielles assez prcises et assurer uncontrle desbanques. Ce principe va par consquent conduire unevolutiondustatutdecettebanque centralequine pourraplus agir comme une banque commerciale ordinaire. D'une partla logique de cette activit n'est pas aisment compatible avec lamission d'intrt gnral de banque de rserve et d'autre part il yaurait quelqueillgitimitexercer unesorte detutellesur desconcurrents.L'volutiondes structuresbancairesauX!xesicleva consa-crer assez gnralement le banking principle, l'exception notabledel'AngleterrequiadopteralesthoriesdelaCurrencySchool.Cependant l'instauration du monopole et l'diction de rglesd'missionneseferont queprogressivement, avecbeaucoupdenuances selonles pays, cequi laisse s o u v ~ n t uneplaceencoreimportante aufree banking, mme dans les Etats qui connaissentdes principes politiques unitaires.II. - L'missiondans les tatsunitairesLesdeuxgrands payseuropens dudbutdu sicleavaient une longueexprience de l'mission. Elle taitpluttpositive enAngleterre, ce qui va conduire un1. On constate actuellement un regain d'intrt pour ce courant, li auretourdesideslibralesetles effetsbnfiques du freebanking surl'in-dustrialisation sont souligns. Cf. G. Selgin, La thorie de la banque libre,Paris,Belles Lettres, Laissez faire , 1991, XXII + 415 p.49renforcement delaBanque d'Angleterre dj plusquecentenaire, et trs ngative en France qui avec laRvolution et ses assignats avait achev le cycle detoutes les erreurs possibles en matire d'mission(Pose, 1942, 112) et devait donc tablir un nouvelinstitut, la Banquede Francequi sauraaffirmer trsvitesaprimaut.1. La confIrmation de l'minence de la Banqued'Angleterre. - La longue priode de cours forcinaugure par le Restriction Act de 1797avait favo-ris la multiplication des banques d'mission pro-vinciales qui taient prs de 800. Mais cause desdispositions de 1707, qui limitaient strictement lenombre d'associs six, ces banques taient bienfragiles: lacrisede 1816-1817connutprsde90fail-lites et aprs le retour la convertibilit 70 autresfurent touches dans la crise commerciale de 1825-1826olaBanqued'Angleterresedistinguaheureu-sement par sasoliditenassurant leprt endernierressort, mme si c'tait de mauvaise grce (Kindle-berger, 1994, 213).Pourcarter cettefragilituneloi du26mai 1826autorisa la constitution de joint-stocks banks mais pro-tgea le m'onopole dela Banque d'Angleterre sur cetteforme socitaire dans un rayon de 65 miles autourde l'glise Saint-Paul. Cette restriction fut abrogeen 1833mais cette mme anne, avec le renouvelle-ment desonprivilge, laBanqueobtintlareconnais-sance du cours lgal de ses billets tant qu'elle maintien-drait leur convertibilit. Ceci fut assez difficile quelquesannesplus tard, l'occasion dela crise de1838-1839ola Banque nerussit maintenirsespayements enespces que grce un emprunt auprs de banques deHambourget deParis, avecl'appui delaBanquedeFrance. Lacriseet sesprolongementsentranrent nouveaudesdizaines dedfaillancesbancairescequi50renfora la position des doctrines restrictives de laCurrencySchoofl.Unerorganisationcompltefut instaurepar uneloi de 1844connuesouslenomdupremierministre( Peel's Act). Cette loi distingue deux dpartements auseinde la Banqued'Angleterre pour sparer stricte-ment l'missiondesautresactivitsbancaires. L'mis-sionse ferapratiquementsuivantlecurrency principlepuisqu'ellesetrouvelimiteaumontant del'encaissed'or et d'argent, avecun cinquime d'argent au maxi-mum, compltpar unesommefixede14 millionsdelivres garantiepar des titres d'tat. Ledpartementbancaire pratiquera de son ct l'escompte en fonctiondes billets mis sa disposition parle dpartementd'missionet rguleralademandeavecletauxd'es-compte. La publication obligatoire d'une situationhebdomadaire permettradevrifierletout. Pour lesautresbanques d'mission, la loi tablit desrglesquiallaient consacrertermelemonopoledelaBanqued'Angleterre. Dsormais aucune banque d'missionnouvellenepourratreautoriseetlesbanquesexis-tantes voient leur mission plafonne au montantmoyendesdouzesemainesprcdentes; deplusellesperdront ce droit si elles procdent certaines modifi-cations de leurs structures sociales ainsi qu'en cas d'in-terruption. Decefait les banquesconcurrentesdelaBanqued'Angleterredisparatront progressivementetassez lentement jusqu'en 1921, et chaque fois lecontingentfixedelabanq"ije centralesetrouvait aug-ment des deux tiers de la circulation supprime (Born,in Pohl, 1995, 189).L'ensemble reprsente un cadre tout fait draconienqui aurapour premiereffetdefavoriser ledveloppe-ment delamonnaiescripturalepour compenser cette1. J. Clapham, TheBank of England, Cambridge, 1944, vol. II,p. 155-18951forte restrictionde l'missiondebillets. L'autreeffetconcerne les possibilits d'interventiondelaBanqued'Angleterre en cas decrise. Comme celles-ci sont for-tement limites par le currency principle, il faut recourir des astuces pour rgler la situation et mettre malgrtout. Lemoyenleplusextrmedu pointdevuedelargularit fut utilislors des grandes crises de 1847,1857et 1866quand legouvernementaccordadeslet-ters of indemnity parlesquelles ils'engageait ddom-mager laBanquedes sanctionsqu'ellepourrait subirencas dedpassement des plafonds! Dans unautrecas comme celui de la banque Baring en1890, la solu-tion consista organiser une garantie de passif avec unfonds constitu par les grandes banques de la place(Kindleberger, 1994, 195). Dans d'autrescas enfin, lesemprunts l'tranger permettaient d'accrotre l'en-caisse et laBanque d'Angleterre dut plus d'unefoiscompter sur laBanquedeFrance. Decettefaonlarigidit du currency principle put rester intacte jus-qu'en 1914grce la participation d'tablissementsfonctionnant selon le banking principle !2. L'affirmation de la puissance de la Banque deFrance. - En1800, la France va se doter d'unnouveltablissement dont la mission sera trs prcismentoriente vers l'mission de la monnaie fiduciaire. Cettequestionest aussi importantequedouloureusecar lepaysvientdevivrel'expriencedesassignatsqui s'estsolde par une vritable banqueroutel. Alors que lemauvaissouvenir dusystme deLaw tait encoretrsprsent, cette nouvelle catastrophe condamne le papier-monnaie. Pourtant il paraissait indispensable et le1. Il s'agissait de l'missiondirecte pour les besoins duTrsor dep,!pier-monnaie gag sur les biens nationaux, anciennes proprits del'Eglise et de la noblessequi devaient tre vendues. Des missions exces-sives provoqurent une dprciation considrable. Cf. F. Aftalion, L'co-nomie de la Rvolutionfranaise, Paris,Hachette, Pluriel , 1987, 394 p.52Conseil des Cinq-CentsdemanderaauDirectoiredesmesuresdanscesens. Maissous cergimetroubllaseule ralisation sera la cration en juin1796 par quel-ques banquiers parisiens de la Caisse des comptes cou-rants1 Cet tablissement d'escompte trs modeste saurace1?endant profiter du changement de rgime par le coupd'Etat du18 brumaire an VIII (9 novembre 1799) pourprendreuneexpansioninattendueenreprsentant labase de la Banque de France. Cette apparition presqueimpromptuevalaisserensuspensquelquesquestionsimportantes qui ne seront rgles que progressivement:les rapports avec le gouvernement et le monopoled'mission2A)Une indpendance contrle. - Dans le cadre de larorganisationgnraleentreprise par leConsulat, lesfinances tiennent une placeElles sontconfiesGaudin, unhommed'expriencequi avaitcon1ll1encsacarriresousl'AncienRgimeet qui lapoursuivra pendant plusdetrente ans encore, notam-ment la tte de la Banque de France. En matire mon-taire, le nouveau rgime va mettre en uvre la nouvelleunit, le franc,dj adopte par la Convention et exau-ceragalementcertainsvux fonnulssousleDirec-toire. C'est ainsi que Gaudin va soutenir un projet pr-sent par les dirigeants de la Caisse des comptescourants et undcret du28nivseanVIII (18jan-vier 1800) autorisera la cration de la Banque de France.1. G.Jacoud, Le billet debanque enFrance(1796-1803): de la diver-sit au monopole, Paris,L'Harmattan, 1996,320 p.2. M. Redon, D. Besnard, LaBanquede France, Paris, 1996,3ed., Que sais-je? , n 2462 ; B. Gille, La banque et le crdit en Francede18151848, Paris, PUF, 1959, 380p.; La banque en France au sicle, Genve, Droz, 1970, 286p.;A. Prate, LaFranceetsamon-naie: essai sur les relations entre la Banque de France et les gouvernements,Paris, Julliard,298p.; A. Plessis, DelaCaissed'escompte laBanque deFrance, Etat, financeset conomie pendant laRvolution fran-aise (Colloque de Bercy, 1989), Paris, Comit pour l'histoire cono-mique et financire dela France, 1991, p. 253-260.53Il s'agissait d'unesocitparactionsaucapital de30 millions de francs en espces qui absorbe la Caisse descomptes courants et s'installe d'ailleurs dans un premiertemps sonsige, l'htel deMassiac, placedesVic-toires, o la Compagnie des Indes tait l