Histoire des Arts Art et société de...

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Histoire des Arts Art et société de consommation

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Histoire des Arts

Art et société de consommation

Pochette de Damien SaezAlbum J'accuse

Présentation de l'œuvre

1. Qu'est-ce que c'est ?

2. Par qui cette œuvre a-t-elle été réalisée ?

3. De quand date-t-elle ?

4. Où peut-on la voir ?

1. Une photographie pour une affiche promotionnelle et

une pochette d'album.

1. Une photographie pour une affiche promotionnelle et

une pochette d'album.

2. Photographie réalisée par Jean-Baptiste Mondino

pour Damien Saez, chanteur.

1. Une photographie pour une affiche promotionnelle et

une pochette d'album.

2. Photographie réalisée par Jean-Baptiste Mondino

pour Damien Saez, chanteur.

3. Mars 2010

1. Une photographie pour une affiche promotionnelle et

une pochette d'album.

2. Photographie réalisée par Jean-Baptiste Mondino

pour Damien Saez, chanteur.

3. Mars 2010

4. Le 5 mars 2010, l'annonce de la censure de

l'affiche promotionnelle est proclamée

par l'Autorité de Régulation

Professionnelle de la Publicité. En effet l'affiche doit être retirée de toutes les stations de

métro parisiennes et des affichages

publics

Damien Saez● Damien Saez, né le 1er août 1977 à Saint-Jean-de-Maurienne en Savoie,

est un auteur-compositeur-interprète français. Damien Saez est un OVNI dans le paysage musical français. Eternel adolescent, c’est un écorché vif. Le 21 avril 2002 déjà, au lendemain de l’accession du Front National au second tour des élections présidentielles, il signe « Fils de France », un titre appelant la jeunesse française à faire barrage à l’extrême droite. C’est son premier fait d’arme, celui qui lui vaudra une image de rockeur engagé.

● Dès les premiers albums, Damien Saez a fait part dans ses textes de ses engagements (comme dans les chansons Jeune et con, Sauver cette étoile ou Solution). Il exprime un très fort rejet de la société marchande et de la politique occidentale en général. Il écrira dans une lettre postée sur son site à la suite de la censure de l'affiche de son dernier album J'accuse : « J'ai honte pour ces gens, honte pour mon pays, honte pour ce qu'il est devenu, honte pour cette auto-censure que la société s'inflige à chaque fois qu'elle ouvre sa bouche ». Lors d'une interview sur la radio France Inter, le 15 octobre 2012, il exprime clairement ne pas se considérer comme un artiste engagé, il débute d'ailleurs ses propos par « Déjà un artiste engagé je ne sais même pas ce que c'est, finalement ne pas l'être voudrait surtout dire que je ne suis pas un artiste ». Il se considère non pas comme un artiste engagé mais révolté.

Jean-Baptiste Mondino

● Jean-Baptiste Mondino (né le 21 juillet 1949 à Aubervilliers) est un réalisateur de clips et un photographe français.

● Il a dès 1974 renoué avec un principe de mise en images utilisé par le chanteur Antoine dans son clip Les élucubrations d'Antoine : ne plus faire de la simple chanson filmée, mais enchaîner des plans inattendus dans un mini-film dont la chanson ne constitue plus qu'une bande-son. Il a réalisé en 1983 La Danse des mots.

● Il est connu pour ses fréquentes collaborations avec Madonna et ses réalisations et photos pour Les Rita Mitsouko, Thomas Fersen, Prince, Alain Bashung, Étienne Daho, Vanessa Paradis, Alain Chamfort, Björk, Texas et bien d'autres.

● Il a également réalisé de nombreux films publicitaires, notamment pour les parfums Jean Paul Gaultier ou des photos pour le sac Lady Dior.

● Il a fondé la société de production Bandits en 1989.

Le titre de l'album rappelle le titre de l'article rédigé par Emile Zola lors de l'affaire Dreyfus et publié sous la forme d'une lettre ouverte au président de la république le 13 janvier 1898. En 1894, le capitaine Dreyfus est accusé d'avoir trahi la France et condamné au bagne. En 1898, alors que les soupçons pèsent sur un autre officier, ce dernier est acquitté. Zola, à travers sa lettre « J'accuse ! » publiée dans le journal l'Aurore, se fait le porte parole des « dreyfusards », qui souhaitent la révision du procès. Il s'insurge contre le camp des « antidreyfusards », issus de la France conservatrice, antisémite et nationaliste, et qui préfèrent croire à la culpabilité de Dreyfus parce qu'il est juif. Zola est condamné pour diffamation. Dreyfus est réhabilité en 1906. L'affiche est donc clairement un pamphlet accusateur destiné à dénoncer.

Qu'est-ce que je vois ?

Un chariot de supermarché.

Le titre : blanc sur fond gris.

Photo en noir et blanc. Fond

dégradé de gris, vide. Une femme dans le

chariot.

Qu'est-ce que je peux en déduire ?

Le chariot de supermarché représente la société de

consommation.

Le blanc des lettres, de même

que le vide du fond, représente

le vide de la société de

consommation.La femme dans le

chariot : métaphore du propos : tout s'achète, tout se

jette, même l'amour.

Qu'est-ce que je vois ?Une femme nue

dont la nudité n'est pas

réellement montrée.

Elle porte des talons aiguilles, symboles de la

femme fatale.

Cheveux blond platine : symboles de la femme fatale, évoque le sex-symbol Marilyn

Monroe, idéal féminin.

Position des membres étrange.

Maquillage très sombre. Cheveux décoiffés.

Regard dans le vide.Bouche triste.

Qu'est-ce que je peux en déduire ?

● La femme tient davantage de la poupée désarticulée, devenue hors d'usage. Elle est sombre et triste, plus morte que vivante.

● Le responsable de cette déchéance est la société de consommation : elle porte encore les vestiges de cette société de consommation qui l'obligeait à se présenter comme un idéal féminin : maquillage, chaussures, cheveux.

● Cette femme évoque également une prostituée : elle est dans un chariot comme si elle pouvait être achetée. Dans son regard vide, Damien Saez dénonce la « prostitution (…) de nos âmes et de nos cerveaux » par la société de consommation, « cette société qui voudrait que l’Homme ne soit rien de plus que de la viande dans un caddie. » La publicité est considérée comme un lavage de cerveau. L'homme est le pantin, le jouet de la société de consommation.

● Damien Saez explique d'ailleurs en parlant de ceux qui ont censuré son affiche :

Avis du jour, puisqu’il faut du surlignage à cette société : « OUI CETTE PHOTO EST UNE LUTTE CONTRE LA PROSTITUTION LÉGALISÉE DE L’ÊTRE HUMAIN DONT LES PUBLICITAIRES SONT LES MAQUEREAUX. »

ALLO CERVEAU J’APPELLE NEURONES !!!!

Premièrement :

Je pense que seul un illettré ne comprendrait pas cette affiche et qu’elle n’est que le miroir de ce que les publicitaires et par extension les médias dans leur immense majorité (puisqu’ils sont tous les salariés indirects des spots de pub passés sur leurs supports) veulent faire de nous et de nos enfants et que, par conséquent, cette affiche n’avait pour but que de réveiller quelques consciences et quelques féminismes bien éteints de nos jours ; je suis néanmoins heureux qu’elle suscite une telle réaction chez certaines associations même si je trouve tellement triste qu’on ne les entende jamais concernant les 99% des publicités qu’on inflige à leurs enfants.

Vous comprendrez également mon étonnement de savoir que certaines de ces associations décident d’être du côté du macro plutôt que de celui de la prostituée, quel paradoxe d’être taxé de sexiste et de proxénète quand on dénonce la prostitution même, et bien plus que celle des corps de nos frères et de nos frangines, celle de nos âmes et de nos cerveaux, tout ceci est décidément un bien triste bilan de santé de notre société.

Bientôt ceux-là même que tu défends vont t’attaquer en justice, c’est pas beau ça !

Oui bientôt la photo d’un oiseau dans le mazout sera interdite car elle sera suspectée d’être propagande, non pas contre mais pour les sociétés pétrolifères... tout ça me fait rire et c’est pas peu dire de nos jours.

Utiliser l’image de la femme à tort et à travers pour vendre tout ce qu’on peut : des soutifs au fromage, des magazines pour illettrés ou du showtime à la télé, non ça, ça n’est en rien dégradant, mais la prendre en photo pour dénoncer cette société qui voudrait que l’Homme ne soit rien de plus que de la viande dans un caddie, halte là !

Cachez ce sein que je ne saurais voir !

Deuxièmement :

Et si elle était habillée ?Et si c’était un homme ?Et si c’était une femme libre sur un parking, magnifique au soleil que j’avais prise en photo et qui aurait accepté d’être l’icône photographique de mon album ?Et si c’était ma sœur ?Ou ma femme peut-être voulant elle aussi lutter à sa manière ?Bien des questions qui ne mènent qu’à une seule réponse : liberté.Le reste n’est que tartufferie et intégrisme économique.A l’image de ce que cette société devient, un cul perdu entre des millions de chaises, ces gens-là même qui ont détruit depuis des décennies l’image de la femme donc celle de l’humain tout entier, ces gens-là vont me donner la leçon au nom de l’Homme, ah... si j’avais vendu des strings au lieu de critiquer Dieu consommation...Moi, j’ai depuis plus de dix ans combattu ma propre publicité, et je n’ai pas besoin de censure comme publicité n’en déplaise à certains, je ne suis jamais allé me vendre à la criée sur les canaux à merde qui vous assiègent secondes après secondes sur tous les écrans, et plus important je n’ai jamais mis une gamine de 14 ans pour vendre un cornet d’glace, à la vanille bien sûr....Ne voyez pas dans cet écrit une justification à ma liberté qui n’en nécessite aucune mais juste une dernière mise au point sur ce sujet, le pouvoir n’est plus dans les mains du peuple il est dans les câbles et les concubinages consanguins de tout ce joli monde qui fait la merde qu’on achète.Après tout qu’importe, qu’elle soit interdite ne m’étonne pas tant que ça, ça fait longtemps qu’ils ont gagné et qu’on leur a donné notre cul, à croire qu’on aime tellement ça.Quelle tristesse !Définitivement, J’ACCUSE !Je vous souhaite une bonne journée mesdames.

Damien Saez, Lettre, 8 mars 2010

Extrait de la chanson :J'accuse

« Faut dépenser les p’tits sous

Faut du réseau pour les enfants

Faut ressembler à des guignols

Faut que tu passes à la télé

Pour rentrer dans les farandoles de ceux qui ont le blé »

« J’me ballade dans les grandes surfaces

J’ai pas assez mais faut payer

Je cours au gré des accessoires et des conneries illimitées »

De conclure : « Oh l’homme ne descend pas du singe il descend plutôt du mouton ».

Faut : faut faire ce que la société de consommation commande...

Objets inutiles mais indispensables puisque la société de consommation le commande.

Ne réfléchit pas, fait ce qu'on lui dit, suit ce que les autres font.

La grande surface est devenu un lieu de promenade, l'achat est devenu un loisir.

Analyse● Critique virulente de la société de consommation : l'homme n'est plus libre

de penser comme il n'est plus libre de ses mouvements.

« Faut » repris en début de vers dans la chanson indique un impératif qui détruit toute volonté : l'homme est assujetti à cet impératif. C'est la société de consommation qui le conduit.

● Il se promène dans les grandes surfaces comme hypnotisé par la publicité. La société de consommation le pousse à l'achat frénétique d'objets inutiles et ridicules devenus indispensables. Il est abreuvé de publicités dès son plus jeune âge : conditionné à consommer. Cela devient son seul loisir.

Cela n'est pas sans rappeler le roman Le Meilleur des mondes de Aldous Huxley dans lequel le conditionnement dirige les goûts des membres de la société vers des loisirs nécessitant l'achat d'équipements spécialisés au lieu de l'appréciation des passe-temps gratuits ou bon marché. On les conditionne, par exemple, à ne pas aimer la nature, au motif que ce goût n'engendre pas assez d'activité économique. Les enfants sont conditionnés à coup de secousses électriques.

● L'homme ne se définit plus dans sa pensée mais dans la possession. Pour exister aux yeux des autres, il doit posséder ce que ses congénères possèdent : il est un mouton.

Aldous HuxleyLe meilleur des mondes

Au cours de la visite du Centre d’Incubation et de Conditionnement de Londres Central, le Directeur de l’Incubation et du Conditionnement entraîne ses nouveaux étudiants vers les «salles de Conditionnement Néo-Pavlovien» des pouponnières. La leçon du jour consiste à provoquer chez les nourrissons une association entre les livres et les bruits intenses ainsi qu’entre les fleurs et les secousses électriques.

L'un des étudiants leva la main - et, bien qu'il comprît fort bien pourquoi l'on ne pouvait pas tolérer que des gens de caste inférieure gaspillassent le temps de la communauté avec des livres, et qu'il y avait toujours le danger qu'ils lussent quelque chose qui fit indésirablement "déconditionner" un de leurs réflexes, cependant... en somme, il ne concevait pas ce qui avait trait aux fleurs. Pourquoi se donner la peine de rendre psychologiquement impossible aux Deltas l'amour des fleurs ?

Patiemment, le D.I.C. donna des explications. Si l'on faisait en sorte que les enfants se missent à hurler à la vue d'une rose, c'était pour des raisons de haute politique économique. Il n'y a pas si longtemps (voilà un siècle environ), on avait conditionné les Gammas, les Deltas, voire les Epsilons, à aimer les fleurs - les fleurs en particulier et la nature sauvage en général. Le but visé, c'était de faire naître en eux le désir d'aller à la campagne chaque fois que l'occasion s'en présentait, et de les obliger ainsi à consommer du transport.

- Et ne consommaient-ils pas de transport ? demanda l'étudiant.- Si, et même en assez grande quantité, répondit le D.I.C., mais rien de plus. Les primevères et les paysages, fit-il observer, ont un défaut grave : ils sont gratuits. L'amour de la nature ne fournit du travail à nulle usine. On décida d'abolir l'amour de la nature, du moins parmi les basses classes ; d'abolir l'amour de la nature, mais non point la tendance à consommer du transport. Car il était essentiel, bien entendu, qu'on continuât à aller à la campagne, même si l'on avait cela en horreur. Le problème consistait à trouver à la consommation du transport une raison économiquement mieux fondée qu'une simple affection pour les primevères et les paysages. Elle fut dûment découverte. - Nous conditionnons les masses à détester la campagne, dit le Directeur pour conclure, mais simultanément nous les conditionnons à raffoler de tous les sports en plein air. En même temps, nous faisons le nécessaire pour que tous les sports de plein air entraînent l'emploi d'appareils compliqués. De sorte qu'on consomme des articles manufacturés, aussi bien que du transport. D'où ces secousses électriques.- Je comprends, dit l'étudiant ; et il resta silencieux, éperdu d'admiration.

Lien possible : Duane Hanson, Supermarket lady