Histoire de France dAncien régime Deuxième cours : Mérovingiens et Carolingiens (496-987)

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Histoire de France d’Ancien régime

Deuxième cours :

Mérovingiens et Carolingiens (496-987)

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7 — Clovis et la fondation de la France

• Même si le nom de Clovis reste attaché à la fondation de la France, le nom de la dynastie provient de son grand-père, Mérovée, grand conquérant aussi, comme l'ensemble des Francs, qui participa sans doute à la bataille des Champs Catalauniques.

• C’est probablement le rôle très important que jouèrent les Francs de Mérovée, aux côtés, entre autres, de Théodoric 1er, roi des Wisigoths, dans la victoire contre Attila, qui fit de lui fondateur théorique d’une dynastie dont il n’était pas le premier représentant.

• À la mort de Mérovée en 458, Childéric lui succède. Maître de de Tournai et d’une partie de la Belgique, il est contesté par son entourage pour son autoritarisme et chassé de son royaume, avant d’être rappelé en 461.

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• Son mariage avec Basine, épouse en fuite du roi de Thuringe Bassin, donnera trois fils, dont celui qui deviendra le fondateur de la France, Clovis, Chlod weg.

• En 481, Childéric décède et Clovis lui succède. Il n’a alors que quinze ans. Le royaume des Francs saliens est alors modeste (Belgique, Champagne et Picardie) et le reste du territoire de l’actuelle France est morcelé et dominé par d’autres populations : Armoricains en Bretagne, Alamans à l’est, Burgondes au sud-est, Wisigoths au sud-ouest. Des Romains, ou Gallo-Romains, continuent de contrôler le centre du territoire.

• En 486, Clovis entreprend les guerres de conquête qui, en l’espace d’une décennie, vont le rendre maître d’un immense territoire.

• Les deux principales forces à occuper alors le territoire de la France sont les Wisigoths d’Alaric, ainsi que le « roi des Romains » Syagrius. C’est par ce dernier que Clovis débute ses conquêtes.

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La France en 481

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• Après s’être assuré de la neutralité des autres tribus franques, il s’attaque à Syagrius qui, défait, s’enfuit auprès d’Alaric, qui décide néanmoins de le livrer à Clovis, lequel s’installe à Soissons.

• C’est lors de cette conquête que survient l’épisode dit du vase de Soissons : un vase d’argent que l’évêque de Soissons avait réclamé auprès de Clovis, qui le réclama au guerrier qui s’en était emparé, lequel refusa et en réponse à l’ordre de son chef, frappa le vase de sa hache et le cabossa.

• Un an plus tard, lors d’une revue de ses troupes, prétextant le désordre de la tenue du guerrier de Soissons, Clovis planta sa hache dans la tête de celui-ci, en lui disant : « Ainsi as-tu fait du vase de Soissons! ».

• D’apparence anecdotique, cet événement témoigne de deux choses : d’abord qu’en 486, l’autorité du chef des Francs est assez faible pour qu’un simple soldat puisse contester l’ordre d’un supérieur.

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• Mais surtout, que dès cette époque, Clovis s’emploie à ménager le clergé chrétien pour s’en faire un allié. C’est en quelque sorte le premier geste de Clovis vers le baptême, qui deviendra le deuxième acte de naissance de la France.

• Au cours des 10 années qui suivent, Clovis consolide son pouvoir auprès des Francs saliens et en 493, il épouse Clotilde, nièce du roi burgonde, qui s’est elle-même convertie au christianisme.

• En 496, alors qu’il s’est porté au secours des Francs ripuaires, Clovis fait le serment de se convertir au christianisme si le Dieu chrétien lui donne la victoire. Une fois la victoire remportée, il se convertira le 25 décembre (date contestée), devenant ainsi le « premier roi barbare chrétien ». La fille ainée de l’Église est née.

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• C’est le calcul politique qui pousse Clovis à ce baptême : ce faisant, il s’allie à l’Église catholique et se pose en adversaire des Wisigoths. La légitimité que ce geste lui donne auprès des populations gallo-romaines va grandement faciliter la poursuite de ses conquêtes.

• Du côté des élites gallo-romaines, le personnage central de cette conversion fut Saint-Rémi, évêque de Reims, qui comprenait qu’il n’y avait aucun intérêt à s’opposer à la puissance militaire des Francs et que ceux-ci pouvaient être utile dans la lutte contre l’arianisme

• Ainsi, l’épisode du vase de Soissons peut être vu comme un châtiment pour insubordination, mais aussi comme une punition pour un acte sacrilège.

• Après avoir neutralisé les Burgondes, Clovis parvient à défaire en 507 les Wisigoths d’Aquitaine d’Alaric, tué des mains mêmes de Clovis au cours de la bataille. Puis il s’empare de Bordeaux.

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• Son territoire ayant grandement grandi au sud-ouest, il décide de déplacer sa capitale plus au centre de son empire : Paris, ville de 30 000 habitants, prend alors le statut de capitale.

• Après avoir vaincu les Francs ripuaires, Clovis s’éteint en 511. Le territoire de l’empire de Clovis est alors divisé entre ses fils. Cette coutume garantira d’ailleurs au territoire de l’empire de longs siècles de chaos.

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L’empire franc en 511

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Deuxième cours :

1 – Les Mérovingiens (496-750)

2 – Les Carolingiens (750-987)

3 – Le christianisme en France, de 496 à 986

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1 – Les Mérovingiens (496-750)

1.1 - De la mort de Clovis à Dagobert (511-639)

• Les successeurs de Clovis maintiennent l’unité du territoire et joignent leurs forces contre les Burgondes

• À la mort des fils de Clovis, les survivants récupèrent les territoires et en 558, Clothaire 1er réunifie le territoire. Il meurt en 561 et le territoire est à nouveau divisé.

• La période 561-600 est très chaotique et dominée par les figures de Brunehaut et Frédégonde, reines, compagnes, concubines et mères des différents maîtres du territoire, qui se vouent une haine mortelle.

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Le royaume franc en 561

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De Choldion à Childebert II

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• Dagobert 1er va apporter quelque temps de stabilité. Il devient roi d’Austrasie en 623, et parvient à s’imposer en Neustrie et en Bourgogne. À la mort de Charibert, il récupère l’Aquitaine, rétablissant l’unité de l’empire.

• Dagobert est un roi hyperactif et parcourt son territoire, rendant justice, écoutant les doléances, structurant les lois et les mœurs. Fin politicien plus que guerrier, c’est par les alliances et les compromis qu’il donne à son royaume quelques décennies de paix.

• Son administration repose sur sa capacité à s’entourer de conseillers compétents.

• L’autre garant de la stabilité du royaume au cours de cette période, c’est l’Église. Dagobert est pieux et ne regarde pas à la dépense, comblant les chefs religieux d’offrandes et de cadeaux, qui lui vouent une grande reconnaissance et l’appuient auprès de la population.

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De Dagobert à Thierry IV

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1.2 - L’ascension des maires du palais et les « rois fainéants »

• Dagobert meurt en 639, et avec lui, la paix et la stabilité. Il n’a à sa mort que deux fils vivants, ce qui limite les dommages causés par les traditions successorales.

• L’Austrasie revient à Sigebert III et la Neustrie-Bourgogne à Clovis II. C’est de cette époque que naît la fonction de « maire du palais ».

• À l’origine, cette fonction ne donne pas un très grand pouvoir à celui qui l’occupe. Le maire du palais est alors une sorte d’intendant, responsable de la cour 

• Mais les enfants de Dagobert étant mineurs, leurs maires du palais vont prendre de plus en plus d’importance, conseillant ces jeunes inexpérimentés et prenant des décisions économiques et politiques.

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• Ils deviennent peu à peu le 3e pouvoir entre le roi et la noblesse et d’une certaine façon, le trait d’union entre ces deux pouvoirs.

• Le développement de cette fonction témoigne d’un processus de désintégration de la structure centrale de l’État au profit des composantes régionales.

• Originellement nominative, la charge de maire du palais devient héréditaire, témoignant de l’accroissement de l’importance de la fonction et d’une diminution du pouvoir du roi. Cela donnera naissance à des dynasties parallèles aux Mérovingiens, ouvrant la porte à un remplacement de la dynastie régnante par une autre dynastie, issue de la fonction de maire du palais.

• Pépin de Landen (580-640) est le premier de ces puissants maires du palais, qui va donner naissance à la dynastie des Pépinides. Il est issu d’une riche famille de propriétaires terriens de la région du Rhin et de la Moselle.

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Les Pépinides

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• En 687, Pépin II de Herstal, fils de Pépin de Laden, maire du palais et autoproclamé duc d’Austrasie est devenu la principale figure politique du territoire.

• Le chaos politique étant provoqué par l’opposition entre la Neustrie et l’Austrasie, Pépin II s’attaque à Tierry III, roi de Neustrie, qui est défait.

• Pépin II le laisse remonter sur son trône, mais lui impose un maire du palais issu de ses proches : dès lors, les deux territoires du nord sont gouvernés par des Pépinides, sous le couvert légal de deux Mérovingiens.

• L’appellation de « rois fainéants » date de cette époque : Devenus inutiles, ces rois fantoches seront représentés par la postérité comme des parasites et des fainéants.

• Mais ils n’ont jamais existé : les maires du palais, soucieux de conserver la légitimité royale, s’employaient à tenir éloignés les héritiers, qui étaient envoyés dans les monastères et n’étaient sortis de ceux-ci que pour servir de fantoches sur les trônes.

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1.3 - Charles Martel et la fin des Mérovingiens

• Pépin II meurt en 715. Son épouse Plectrude assure la régence de la Neustrie et de l’Austrasie pendant la minorité de ses enfants.

• Mais Pépin II avait eu de l’une de ses concubines un fils bâtard, Charles. Craignant ce jeune homme, Plectrude le fit emprisonner, mais dès 715, il s’évade et se réfugie en Austrasie, où le pouvoir de Plectrude est théorique.

• Il s’impose en Austrasie et se lance en campagne contre la Neustrie, dont il s’empare, devenant ainsi maire du palais d’Austrasie et de Neustrie. Mais il ne règne pas, laissant ce soin à Clothaire IV.

• Charles deviendra dans l’histoire Charles Martel, ou Charles le Marteau, en référence à ses opérations militaires. Il sera en outre le fondateur de la dynastie suivante à régner en France, les Carolingiens.

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• Mais Charles est un personnage d’envergure européenne et ses exploits militaires ont peut-être changé le cours de l’histoire.

• Au début du VIIIe siècle, l’Europe est envahie par les Maures, lesquels s’avancent sans rencontrer de résistance : Carcassonne tombe en 724, puis c’est le tour de Bordeaux. Ils se dirigent ensuite vers Tours.

• Le roi d’Aquitaine, ennemi de Charles, fait appel à lui et le 25 octobre 732 à Poitiers, les armées franques coalisées et dirigées par Charles Martel infligent une défaite historique aux Maures, mettant fin à leur élan et stoppant la pénétration de l’Islam en Europe occidentale.

• Fort du prestige que lui donnent cette victoire et son statut de sauveur de la chrétienté, Charles s’impose en Aquitaine, en Provence et en Bourgogne.

• De même, le pape Grégoire III lui octroi la tire de subregulus, de quasi-roi…

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• Le 22 octobre 741, Charles décède, laissant le territoire entre les mains de ses fils. Il avait lui-même décidé du partage : Carloman récupère l’est, Pépin le Bref, l’Ouest, alors que son fils bâtard Grifon obtient quelques territoires isolés.

• Les conflits ne vont bien sûr pas tarder, Grifon se sentant lésé. S’ensuivent plusieurs années de guerre. Les descendants de Charles Martel tentent de diriger sans roi mérovingien, mais sans succès, ce qui les contraint à recourir à un fantoche, Childéric III.

• En 746, Carloman abandonne la vie politique, laissant son territoire à son frère, qui réunifie l’ensemble en 747. Grâce à l’appui du pape Zacharie, Pépin le Bref est élu roi des Francs en 750 par une assemblée de princes. En 754, il se fait sacrer roi par Étienne.

• Pour sa part, Childéric se voit imposer la tonsure et est envoyé au monastère de Saint-Bertin, où il meurt en 755. La transition est achevée.

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1.4 - Organisation sociale et économique de la France mérovingienne

• Pour l’ensemble du territoire, l’arrivée des Francs et l’établissement du pouvoir de ceux-ci coïncident avec une importante régression économique et culturelle.

• Les épidémies (la peste frappe en 543, 571, 580, 588, 591 et 599) accentuent le recul démographique, ainsi que la désorganisation économique et sociale.

• Les ouvriers spécialisés, qui avaient contribués au rayonnement de l’Empire, disparaissent. Les techniques deviennent plus grossières, plus primitives, à l'exception de la métallurgie.

• La frappe de monnaie d'or s'arrête, tout comme le commerce lointain, encore animé aux Ve et VIe siècles par des Orientaux regroupés dans quelques villes des axes Rhin-Loire et Rhin-Saône-Meuse : Lyon, Orléans, Tours, Verdun.

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• Les routes terrestres s'effacent par manque d’entretien et insécurité, au profit d'une faible navigation fluviale.

• Les réseaux commerciaux se raréfient et l’économie commerçante périclite au profit d’une économie de subsistance basé sur l’exploitation terrienne locale. La population en général s’appauvrit.

• Les écoles se raréfient et la vie sociale se concentre dans des bourgades ruralisées et sur les domaines cultivés par des esclaves et des tenanciers, dont le nombre s'accroît.

• Pour survivre, les petits paysans propriétaires se « donnent » à des grands, souvent des églises ou des monastères, qui leur accordent en échange la protection et l'usufruit de leurs biens contre un cens. C’est la naissance du féodalisme.

• Au VIIe siècle, le terme de « franc » désigne tout homme libre, en dehors de toute origine ethnique, mais les « francs » ne sont plus qu'une minorité.

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• La régression est évidente en ce qui concerne l'État et le gouvernement. Les rois francs sont revêtus d'une autorité militaire et exercent un pouvoir absolu.

• Ils considèrent le royaume comme un patrimoine privé, gouvernent avec des dignitaires de cour, confondent les revenus du royaume avec leur fortune privée, se font représenter par des comtes ayant tout pouvoir, mais dont l'autorité se heurte à celle des évêques et des propriétaires bénéficiant de l'immunité.

• La notion de « capitale » existe, elle n’a pas un rôle très important : le pouvoir se trouve où se trouvent le roi, sa cour et ses collaborateurs. Ce changement important témoigne aussi de l’archaïsation de la chose publique.

• Mais la période n’est pas uniforme sur le plan du développement et la stabilisation politique qui prend place à partir du développement du rôle des maires du palais va permettre, dès le milieu du VIIe siècle une sorte de renaissance, manifeste dans tous les domaines.

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• L’accroissement des défrichements témoigne d’une amélioration de la situation démographique. L’activité portuaire reprend timidement au début du VIIIe siècle et le commerce international se développe, peut-être grâce aux contacts avec les musulmans.

• Mais c’est surtout sur le plan institutionnel et juridique que cette renaissance est manifeste, alors que Charles va s’employer à codifier les pratiques judiciaires.

• Le droit coutumier franc, ou « lois saliques », reçoit une première forme de codification. Sa principale application est de déterminer les peines encourues pour les différents délits.

• Le droit coutumier salique repose sur le principe de compensation financière et constitue une évolution importante par rapport au droit du sang, qui s’applique généralement chez les sociétés primitivement organisées sur le plan juridique.

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• Pour chacun des délits, une amende est fixée en fonction du préjudice : le meurtre d’un homme libre coûte 100 sous, de même qu’un membre arraché; une blessure à la tête avec écoulement de sang « jusqu’à terre » coûte 15 sous, mais 45 sous si le crâne est à découvert; étreindre la main, le doigt ou le bras d’une femme libre coûte 15 sous, etc.

• Si le coupable n’est pas solvable, il doit abandonner ses biens par un rituel : jurer ne plus rien posséder, rentrer chez lui, ramasser de la terre dans les quatre angles de sa maison et la jeter sur les membres de sa famille proche, avant de sortir de la maison en chemise et sauter par-dessus la haie de son enclos.

• La base du processus judiciaire est l’Ordalie, qui deviendra assez connue à l’époque de l’inquisition et qui s’applique aux crimes graves. Si le suspect parvient à obtenir de témoins l’affirmation de son innocence, il est relâché. Sinon, il doit se soumettre à l’Ordalie.

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2 – Les Carolingiens (750-987)

2.1 – Charlemagne

• Lorsqu’en 754, Pépin le Bref, sa femme Berthe et ses fils Carloman et Charles se font sacrer, ils donnent naissance à la monarchie de droit divin, le roi étant reconnu comme tel par Dieu.

• C’est la première pierre d’un processus qui, jusqu’à Bossuet, va transformer le roi de France en une incarnation de la puissance divine.

• À partir de 755, Pépin s’emploie à consolider son territoire. Il se tourne vers l’Italie, contre les Lombards, puis en 768, il s’empare de l’Aquitaine, complétant ainsi la réunification, avant de mourir et de laisser son royaume entre les mains de ses deux fils.

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« L’empereur à la barbe fleurie »

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• Charles obtint l’Austrasie et le nord de la Neustrie; son frère aîné reçut le sud de la Neustrie, la Bourgogne et la Provence. Les deux frères ne s’entendent guère, cependant, et le royaume se trouve de facto divisé.

• Mais cela ne dura pas, car dès 771, Carloman meurt et son cadet reprend sa part d’héritage. C’est ainsi que Charles monte sur le trône de toutes les Frances.

• Ayant en main l’ensemble du territoire franc, Charles s’emploie à sécuriser ses frontières et à accroître ses territoires.

• L’ensemble des guerres qu’il va mener jusqu’au début du IXe siècle répond également à un autre objectif, celui de réformer (ou plutôt de « former ») un État réel, avec une administration et des structures plus efficaces.

• Cela réclame des moyens financiers considérables, et alors que les formes d’imposition sont très limitées, le pillage des voisins constitue un moyen efficace de remplir les coffres.

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• Dès 774, après avoir « répondu » à l’appel du pape Adrien 1er, Charles s’empare de Pavie et prend le titre de roi de Lombardie.

• Ce sont surtout les Saxons qui vont faire les frais de l’impérialisme du roi des Francs. Ce sont des adversaires commodes d’un point de vue religieux, puisqu’ils sont encore païens. C’est une des raisons qui lui permettra de prendre le titre d’Empereur.

• Ce n’est pas la seule : malgré la défaite infligée par Charles Martel, les Maures continuent de faire pression.

• En 778, poussé par le Pape, il envahit la Catalogne et s’empare de Pampelune. Mais une révolte des Saxons le pousse à replier le gros de ses forces vers le nord et le 15 août 778, l’arrière-garde franque fut culbutée et massacrée par les Gascons dans le col de Roncevaux.

• Cette défaite mit fin aux velléités espagnoles de Charlemagne et constitue le fait militaire le plus célèbre de l’époque et le thème de la « Chanson de Roland ».

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Empire franc (481-814)

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• Puis Charlemagne se tourne à nouveau en direction est. Le roi de Bavière, refusant de reconnaître la suzeraineté de Charles, initia de ce fait une décennie de guerre qui se solda par l’annexion des territoires bavarois en 788 et la confiscation de la richesse personnelle de Tassilon III, réputé homme le plus riche d’Europe.

• Puis ce fut au tout des Avars, d’origine mongole, installés dans les plaines de Pannonie.

• La poussée vers l’est se poursuivit avec la soumission et la christianisation des Slaves de Bohème, ainsi que de ceux du nord des Balkans.

• Ainsi vers 800, Charlemagne s’était rendu maître d’un immense empire. Avant de recevoir le titre d’empereur, il l’était déjà dans les faits.

• L’ensemble de son œuvre « pacificatrice », ajoutée au rôle qu’il joua dans la défense de Léon III, conduisit celui-ci à lui offrir en 800 le titre d’empereur, permettant ainsi de faire le lien avec l’ancien Empire romain.

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• Cependant, l’œuvre de Charlemagne ne se limite pas à ses exploits militaires et ses réformes administratives ont pavé la voie à divers phénomènes qui vont se manifester à partir de son règne, certes, mais surtout au cours des deux siècles suivants.

• C’est surtout dans les 15 dernières années de son règne que l’aspect militaire perd de son importance au profit de la gestion du territoire.

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2.2 – La mort de Charlemagne et la 3e naissance de la France

• Charlemagne a eu de nombreux enfants, mais à sa mort en 814, un seul de ses fils légitimes est encore vivant. De sorte que la transmission du pouvoir se fait facilement, Louis le Pieux lui succédant à la tête de l’ensemble impérial.

• Mais Louis, faible de caractère, est très différent de son père et ne sera pas en mesure de maintenir longtemps l’unité.

• Des luttes sourdes l’opposent à ses trois fils (Pépin, Louis et Lothaire), lesquels sont aussi en conflit avec leur demi-frère Charles. Qui plus est, la faiblesse de l’empereur permet au pape de prendre ses distances et le lien avec Rome perd de son importance.

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Les carolingiens

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• En 833, un complot des trois frères conduit à la destitution de Louis et le territoire est partagé. Deux ans plus tard, les deux plus jeunes fils restaurent leur père dans sa dignité, afin d’affaiblir Lothaire, devenu trop puissant. Finalement, Louis décède en 840, laissant une situation politique très difficile.

• Pépin étant mort avant son père, le territoire est partagé entre Lothaire, Louis et Charles. Revendiquant son droit d’ainesse, Lothaire cherche à s’emparer de l’ensemble, provoquant une série de guerres, d’où il sort perdant.

• En 843, à Verdun, est signé un traité qui officialise la répartition du territoire : la Francia Orientalis revient à Louis, la Francia Occidentalis à Charles et Lothaire reçoit la Francia Media, en plus de conserver le titre d’empereur. À la mort de Lothaire, les deux frères survivants se partageront la Lotharingie.

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• Ce traité de Verdun est en quelque sorte la 3e naissance de la France, Charles le Chauve devenant d’une certaine manière le premier roi de France.

• À noter que le traité donne du même souffle naissance aux États allemands et conséquemment, à la longue rivalité franco-allemande.

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Le traité de Verdun (843)

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2.3 – Carolingiens contre Robertiens

• La souveraineté de Charles sur la Francia Occidentalis n’est pas acceptée par tous. Dès 846, Nominoë, duc de Bretagne, parvient à défaire les troupes de Charles, permettant l’indépendance de son territoire.

• Au sud, les Aquitains refusent la domination de Charles et proclament roi Pépin II, le fils de Pépin d’Aquitaine. Cependant, l’arrivée des Normands contraint la noblesse d’Aquitaine à destituer Pépin II au profit de Charles.

• Les Normands se font de plus en plus agressif, revenant chaque année et s’enfonçant de plus en plus. Charles est ainsi contraint à donner de plus en plus de pouvoir à ses chefs militaires.

• L’un de ces chefs militaires va prendre une importance considérable. Issue de la famille de la première épouse de Louis le Pieux, Robert dit le Fort est nommé missi dominici (envoyé du seigneur) par Charles dès 853.

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• Cela ne suffit pas à Robert qui en 855 mène une fronde contre son roi et parvient à s’imposer duc dans la région de la Loire. Malgré cela, Charles a grand besoin de lui face aux Normands, qu’il parvient à vaincre en 864 et 865. Il meurt cependant au combat en 866.

• Les enfants de Robert étant mineurs, son frère Hugues l’Abbé, assure la tutelle et accroît considérablement le pouvoir de la famille.

• À la mort de Charles, on verra se reproduire le processus observé à l’époque mérovingienne : la noblesse prend de l’importance et la monarchie décline, devenant dépendante des décisions de la première. La faiblesse de Louis II accentue ce phénomène, même si à la mort de ce dernier, la dynastie légitime se poursuit.

• Louis III et Carloman, les deux ainés de Louis II meurent prématurément, laissant la couronne au dernier fils de celui-ci, qui n’a que cinq ans.

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• Dans ce contexte (les Normands constituent toujours une grave menace), la noblesse décide de confier la couronne à Charles le Gros, fils de Louis le Germanique, permettant une brève reconstitution de l’empire.

• Mais Charles le Gros s’avère incapable de diriger alors que Eudes, fils de Robert le Fort, fait montre de grandes capacités dans la défense de Paris en 886. La noblesse décide en 888 de renverser Charles le Gros et de nommer Eudes roi de France. C’est lui qui sera à l’origine de la dynastie capétienne.

• Ce n’est pas encore la fin des Carolingiens, Eudes faisant de Charles III son héritier. Mais le temps du pouvoir absolu est passé et le pouvoir réel est désormais entre les mains des Grands du royaume. La monarchie française est alors élective.

• Dans la lutte contre les Normands, cette transformation de la France va avoir des effets positifs, les décisions étant prises localement, la lutte en sera plus efficace.

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• En 911, après avoir à nouveau été défaits, les Normands sont contraints à la paix et signent le traité de Saint-Clair-sur-Epte, qui leur concède la Normandie contre la promesse de cesser les raids et de se faire baptiser. Les Normands se sédentarisent alors.

• Une fois le péril extérieur écarté, la lutte des grands contre la monarchie reprend. À la mort d’Eudes, son frère Robert lui succède et après s’être brouillé avec le roi Charles III, il parvient à former une coalition qui renverse le roi. Robert est tué au cours d’une bataille à Soissons, mais les Carolingiens sont néanmoins défaits.

• C’est alors un Robertien, Raoul de Bourgogne, qui reçoit l’appui de la noblesse et devient roi. Il n’est cependant pas très puissant, détenant son pouvoir de la bonne volonté de la noblesse, et le processus de féodalisation du territoire se développe rapidement. Il meurt en 936.

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• Et la couronne passe à nouveau entre les mains des Carolingiens : Louis IV d’Outremer, fils de Charles le Simple, élevé en Angleterre, est nommé roi sous la pression de l’homme le plus fort du Royaume, Hugues le Grand, fils de Robert de France et petit fils de Robert le Fort, ce qui témoigne de la perte de prestige de la fonction royale.

• Loin de se soumettre à la volonté d’Hugues, le carolingien entre en lutte armée, en s’appuyant sur les Germains.

• La guerre civile se poursuit jusqu’en 954, année de la mort de Louis, alors que son fils Lothaire monte sur le trône. Hugues le Grand meurt en 956, ce qui permettra une stabilisation de la situation politique.

• L’influence de sa famille en France est si grande qu’en 987, lorsque le fils de Lothaire, Louis V le fainéant, meurt sans enfants, son fils Hugues Capet est élu roi de France.

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Les Robertiens

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2.4 – Administration et économie sous les Carolingiens

• L’empire carolingien est un ensemble territorial immense, alors que les moyens de communication sont lents. On trouve sur ce territoire 200 palais, 500 abbayes (dont 200 directement soumises au roi) et 200 évêchés.

• La division territoriale de base est le pagus (comté), mais certains domaines dépendent directement du roi (les fiscs). Pour gérer l’ensemble de ses possessions, le roi à recours à des vassi dominici, des « vassaux du seigneur », dont le pouvoir est fondé sur le principe de dépendance personnelle.

• Chaque année au printemps, avant les opérations militaires, se tient un palais général. Les capitulaires sont élaborés à cette occasion, puis distribués sur le territoire, ce qui rend nécessaire le développement d’écoles, mais aussi d’un réseau administratif.

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• La fonction de maire du palais est abolie, remplacée par celle de comte du palais. La majorité des responsables politiques sont des clercs, entendu que ce sont les seuls à connaître l’écriture. La cour est itinérante longtemps, de sorte que le centre politique du territoire est mouvant.

• Les comtés près des frontières sont gérés par des responsables des marches, que l’on nomme « marquis », dont le pouvoir est de même nature que celui du comte, tout en étant plus étendu. En période de guerre, des chefs régionaux, des ducs, sont nommés pour la durée du conflit.

• L’origine de ces officiers évolue dans le temps. Sous Charlemagne, ils sont nommés temporairement par le roi sur des territoires dont ils ne sont pas originaires, mais avec le temps, les nominations deviennent locales et à vie (éventuellement, elles deviendront même héréditaires). Ces officiers régionaux sont rétribués en terres pour la durée de leur office.

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• Les régions demeurent sous le contrôle de l’autorité grâce aux missi dominici. Créés en 802 et composés à l’origine d’un clerc et d’un laïc (un comte et un évêque d’une autre région), ces envoyés sont chargés de superviser et de contrôler les actions des chefs locaux.

• On assiste à une régionalisation, alors que de plus en plus, ce sont des notables de la circonscription à contrôler qui se chargent de cette tâche.

• Le roi peut compter sur l’appui d’une Église qui devient impériale, alors que les évêques et les abbés sont intégrés dans la structure politique. À partir du 825, ils sont considérés comme des officiers et comme tous les autres officiers, ils participent à la guerre.

• Tout comme pour les laïcs, au fil du temps se renforce la territorialité de leurs charges et ils ont recours de plus en plus à l’immunité, le pouvoir de refuser l’entrée sur leur territoire aux officiers royaux, qui deviendra avec le temps le pouvoir d’administrer directement les terres.

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• Ces diverses formes de territorialisation vont donner naissance peu à peu aux seigneuries, sur lesquelles le contrôle royal devient de plus en plus faible.

• La base des liens entre le roi et les seigneurs est le principe de vassalité, par laquelle le vassal demande protection au senior. Dans cette relation inégalitaire, chacune des parties à des devoirs : protection pour le seigneur, service militaire pour le vassal.

• Le vassal offre ses services et le seigneur concède des bénéfices, généralement sous forme de terres, lesquelles deviendront à partir de 877 héréditaires.

• Il y existe donc à l’origine deux statuts aristocratiques : les officiers (liens administratifs) et les vassaux (liens militaires). Ces fonctions sont distinctes, mais avec le temps, elles vont avoir tendance à se fondre et les distinctions vont s’effacer.

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• L’aristocratie est d’abord personnellement liée au roi : ce qui compte, c’est d’être près de lui, mais avec le temps, c’est l’aristocratie locale qui devient dépositaire du pouvoir. 

• Au plan économique, la société carolingienne demeure assez primitive, surtout si on la compare à la société romaine. Les industries sont peu nombreuses et la richesse s’exprime avant tout par la propriété terrienne.

• Les domaines changent souvent de propriétaire, du moins jusqu’à la fin du IXe siècle, compte tenu du système des bénéfices. Les grandes propriétés terriennes appartiennent soit au roi (le fisc), aux comtes (l’alleu) ou aux abbés (abbaye).

• Les terres sont divisées en deux parties, l’une contrôlée directement par le propriétaire (la réserve), l’autre cédée à bail à des exploitants (les tenures). Sur ces dernières, le seigneur perçoit une redevance, en plus d’exiger de la part des paysans un travail sur la réserve (la corvée).

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• Plus le temps passe, plus les tenures s’accroissent au détriment de la réserve.

• Cette mutation est due à plusieurs facteurs : accroissement des terres cultivables, progrès techniques, mais aussi instabilité et insécurité, qui incitent les paysans libres à céder leurs terres au seigneur pour devenir serfs, en échange d’une sécurité.

• On constate tout de même un accroissement des échanges commerciaux par rapport à la période précédente, grâce à l’expansion de l’État.

• Lorsque s’enclenche le processus inverse à partir du XIe siècle, les choses vont se détériorer : le denier d’argent, monnaie officielle d’un système économique homogène est alors remplacé par une multitude de monnaies, à partir du moment où les pouvoirs locaux s’octroient le droit de frapper leur propre monnaie.

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2.5 – La Renaissance carolingienne

• Le concept d’une « renaissance » sous Charlemagne est contesté, mais il n’en demeure pas moins que, par rapport à la période romaine, la période mérovingienne fut plus sombre du point de vue culturel et que le renouveau culturel qui se manifeste à partir de Charlemagne s’apparente à une « renaissance ».

• La langue romane, ancêtre du français, devient la langue officielle de l’État par un capitulaire de 813 qui ordonne que les lois soient écrites dans la langue vulgaire. Le latin demeure la langue liturgique et littéraire.

• Charlemagne n’a pas « inventé » l’école, mais lui a donné une base organisationnelle qui va permettre un réel essor culturel. Celui-ci concerne avant tout la religion, mais pas exclusivement, car le projet impérial réclame des fonctionnaires des capacités et des connaissances que seule l’école peut fournir.

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• Il devient nécessaire de renforcer les connaissances des clercs. La lecture concerne d’abord la connaissance des textes latins indispensables à la pratique religieuse. La grammaire est nécessaire pour comprendre, et non seulement apprendre, les textes liturgiques ; l’astronomie et l’arithmétique servent entre autres à calculer les fêtes mobiles, comme Pâques.

• Les textes de l’antiquité romaine sont aussi pris en compte, ce qui s’explique par le désir de renouer avec une certaine culture administrative. L’ensemble de ces mesures est mis en place par un capitulaire de 789 que l’on nomme l’Admonition.

• Le travail d’écriture est essentiellement un travail de copie des textes religieux, et non un travail de création.

• On assiste à la multiplication de centre de copies, dont la production s’accroit : pour le VIIe et le VIIIe siècle, 1 800 manuscrits nous sont parvenus, alors que 7 000 du IXe siècle sont arrivés jusqu’à nous.

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• Sur cette base, les écoles vont se développer. Elles sont de trois types différents, mais elles sont toutes religieuses : écoles monastiques, épiscopales et paroissiales.

• L’éducation est donc religieuse, mais il ne faut pas oublier qu’une grande partie des fonctionnaires sont justement des religieux.

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3 – Le christianisme en France de 496 à 986

3.1 – Sous les Mérovingiens

• À partir du Ve siècle, une organisation territoriale de l'Église se met en place, comblant une absence de structure politique définie. L’Église occupera de même des fonctions économiques et sociales importantes.

• Les évêques prennent naturellement des fonctions politiques et constituent le relais des pouvoirs locaux et royaux. Ils sont d’ailleurs nommés par le roi.

• La base de la division territoriale est le diocèse, déjà depuis l’antiquité tardive : de cette façon, l’Église implante sa propre administration, en copiant les circonscriptions romaines.

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• La ville constitue le centre du diocèse (avec à sa tête un évêque), lesquels sont réunis en province, dirigée par un métropolitain (puis un archevêque).

• Lorsque l’administration romaine se disloque, le vide est naturellement comblé par les structures religieuses.

• Un peu comme un seigneur, l’évêque jouit d’une grande autonomie sur son territoire. Il est responsable des nominations du bas clergé, contrôle le territoire par le biais de conciles ou de synodes, aidé en cela par un archidiacre qu’il nomme lui-même.

• L’absence d’influence du pape romain est notable. Celui-ci n’a qu’un rôle honorifique et le fait que le pouvoir politique soit responsable des nominations rend le rôle de l’évêque bien plus politique que religieux.

• À partir de 511, à Orléans, les évêques se réunissent en conciles nationaux. Ces conciles se tiennent plus ou moins régulièrement : lorsque l’unité nationale est fragilisée, ceux-ci deviennent moins fréquents.

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• Les autres royaumes barbares ont aussi leurs conciles. Par exemple, les Wisigoths se réunissent à Tolède. Il n’y a pas à cette époque de conciles multinationaux, ce qui, encore une fois, met en exergue les fonctions avant tout politique de ces assemblées et de la religion en général.

• Ainsi, à Rome, l’évêque (le pape) dirige un territoire limité à l’Italie centrale et méridionale. Ce sont les menaces que font peser les Lombards sur les territoires de la papauté qui vont inciter celle-ci à se tourner du côté des Francs et ainsi débuter une sorte d’internationalisation de l’Église chrétienne.

• Qu’en est-il de la population? L’adoption du christianisme par les élites franques n’a pas entraîné la christianisation automatique de la population et les campagnes, devenues le centre de l’activité économique avec la régression que connaît ces territoires, reste dans un premier temps à l’écart de ce mouvement.

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• Avant le sac de Rome, la christianisation des populations avait connu une accélération, lorsqu’en 402, un concile avait octroyé aux prêtres le droit de baptiser

• Le premier concile de la Gaule en 511 réitère cette disposition et en 529, la décentralisation se poursuit, alors qu’est octroyé aux prêtres le droit de prêcher et d’enseigner. À partir du VIe siècle, la vie religieuse des campagnes se développe significativement.

• La multiplication des centres religieux favorise un essor économique, en améliorant les communications. La christianisation a joué un rôle important dans l’amélioration des conditions économiques et sociales.

• Ce mouvement permettra aussi aux prêtres de survivre, en comptant sur les offrandes des fidèles, à une époque où la dîme n’existe pas encore.

• Cela étant, l’essor du christianisme tient au moins autant à l’apparition du monachisme.

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• Celui-ci est né en orient (en Égypte et en Palestine) et à son origine, a pour but la purification de celui qui le pratique par l’application de diverses pénitences.

• L’une de deux formes du monachisme (le cénobitisme, qui prône l’éloignement de la communauté loin de la vie urbaine – l’autre étant l’érémitisme) va trouver en Gaule un terrain très favorable.

• Dès le IVe siècle, les communautés cénobitiques se donnent des règles de fonctionnement, avec un abbé et une organisation de la vie en commun.

• Apparaissent alors des communautés à Marseille et Poitiers. La règle de Benoît de Nursie (480 ou 490 — 547) apparaît à cette époque, mais cohabite avec d’autres, avant de s’imposer sous les Carolingiens.

• Elle s’appuie sur une attention portée à la continuité de la communauté (les novices) et sur le principe de l’alternance du travail, de la prière et des études.

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Saint-Benoît de Nursie

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• Au VIe siècle, on compte en Gaule environ 200 monastères fonctionnant sous des règles très variées : par exemple, la règle de Saint-Colomban, importée par des moines irlandais à la toute fin du VIe siècle.

• Moines et évêques agissent en commun pour favoriser la pénétration du christianisme dans les campagnes.

• Dans leur grande majorité, ils sont recrutés parmi les élites gallo-romaines ou germaniques. Grâce aux terres qui leur sont distribuées par le pouvoir politique, les évêchés et les monastères peuvent être considérés comme des structures domaniales à part entière. Certains sont fort riches.

• S’établit avec le temps un lien entre les monastères et la hiérarchie religieuse, les premiers fournissant de plus en plus de membres à la seconde. Ce qui n’exclut pas des conflits, les monastères cherchant à s’affranchir de la domination des évêchés locaux.

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• Même si le pape n’a pas encore beaucoup de pouvoir, certains événements commencent à lui conférer le statut qui sera le sien.

• C’est le cas de la christianisation de la Germanie, pour laquelle un moine du nom de Wynfrith-Boniface demandera et obtiendra l’accord du pape, ainsi que le titre d’évêque, alors qu’habituellement à cette époque ce sont les rois qui nomment les hiérarques religieux.

• Les monastères fondés par Boniface en Germanie ne dépendront pas des évêques locaux, mais bien du pape directement.

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3.2 – Sous les Carolingiens

• Sous Charlemagne, on constate une volonté de mettre de l’ordre dans les structures religieuses, ce qui va dans le sens d’un accroissement du rôle du pape, mais aussi de l’empereur.

• Des synodes sont créés afin d’accroître la discipline. À plus d’un titre, à la hiérarchisation de l’Église correspond la hiérarchisation de l’empire.

• Une grande majorité des curés, et même des évêques, sont à l’époque analphabète d’où la nécessité de combler cette lacune pour favoriser la pénétration de l’Église. L’intérêt bien connu que porte Charlemagne à l’institution scolaire vient précisément de cette nécessité.

• Certains évêchés deviennent des métropoles ecclésiastiques, ce qui augmente l’encadrement régional et répond à une volonté politique.

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• La création de synodes épiscopaux et le recours au droit canon répondent aussi à ce désir d’encadrement.

• Le niveau intellectuel de l’Église s’accroit, comme en témoigne l’essor des débats théologiques au sein de la hiérarchie, sur la prédestination, par exemple.

• En ce qui concerne le monachisme, le pouvoir impérial s’empare du mouvement pour imposer la règle de Saint-Benoît, ce qui aboutira à une série de réformes qui définiront un cadre général à la pratique monastique.

• En 817, la règle de Saint-Benoît prend une valeur universelle. Celle-ci est cependant revisitée pour être adaptée aux conditions contemporaines : le travail des moines est par exemple redéfini, une place plus grande est donnée aux travaux manuels et liturgiques, etc.;

• Surtout, on crée une nouvelle structure, l’abbé laïc, responsable des problèmes temporels du monastère et des liens de la communauté avec les pouvoirs politiques.

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• En ce qui concerne les rapports avec la population, entre 765 et 779 se généralise la pratique de la dîme, impôt religieux, en faveur de l’Église paroissiale.

• Un effort important est fait pour accroître le niveau intellectuel du bas clergé, que l’on évalue par des questionnaires, mais les exigences sont peu élevées.

• La renaissance culturelle concerne les élites. Pour le peuple, on assiste à des changements importants, mais ils touchent pour l’essentiel la pratique religieuse.

• La religiosité de la population est importante aux yeux du clergé, qui impose des pratiques rituelles. Se généralisent le repos et la messe du dimanche. Malgré tous les efforts, les masses paysannes se contentent souvent des pratiques minimales.

• Le culte des reliques et les fêtes religieuses participent aussi à ce désir d’évangéliser plus profondément les masses rurales.

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• Comme il n’y existe pas encore de processus de canonisation défini par l’Église, le concile de 794 interdit la vénération de nouveaux saints, afin de limiter l’anarchie et d’accroître le respect envers les saints « officiels ».

• Les rites liturgiques (baptême, derniers sacrements, etc.) sont mis de l’avant. La pratique du pèlerinage à Saint-Jacques-de-Compostelle date aussi de cette époque.

• C’est probablement en ce qui concerne la sacralisation de la mort que l’évangélisation de la population est le plus évident : la pratique consistant à ensevelir les morts au village se généralise et les églises paroissiales se retrouvent entourées des dépouilles des défunts.

• Une place particulière est accordée aux morts importants, qui peuvent reposer dans l’enceinte de l’église.