Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

16
aves, 44/1 (2007) 13 aves, 44 (1) 2007 : 13 - 25 RSUM - Suite la dØcouverte d’une nouvelle colonie d’Hirondelles de rivage (Riparia ripa- ria) logØe dans une des tours du chteau de La Roche-en-Ardenne, dans la vallØe de l’Ourthe, l’auteur s’interroge sur la prØsence de nombreuses colonies qualifiØes de trLs artificielles le long de cette riviLre, alors que pratiquement aucun cas durable n’est connu sur les autres riviL- res wallonnes, hormis la basse AmblLve, affluent direct de l’Ourthe, et la Meuse liØgeoise, oø celle-ci se jette. Le phØnomLne est peut-Œtre mettre en relation avec la destruction systØma- tique, brutale et dØfinitive des berges naturelles de ces cours d’eau, dØj particuliLrement expo- sØs aux crues de printemps. L’Ourthe est aussi la seule riviLre wallonne avoir connu un net dØclin de ses populations naturelles d’hirondelles au cours des trente derniLres annØes. La mul- tiplication des cas de nidification trLs artificielle est peut-Œtre aussi due au caractLre hØrØdi- taire de ce mode de reproduction et aux conditions avantageuses qu’il offre. Les nids dans les murs sont notamment soustraits aux risques d’inondation et aux prØdateurs. Le baguage des oiseaux nØs ou nichant en dur a permis de constater que les colonies continuaient fonc- tionner en rØseau, de la mŒme faon que les colonies d’oiseaux nichant en berge naturelle ou celles nichant dans les sabliLres. Marc FASOL J.-M. Winants Cas d'adaptation de l'hirondelle de rivage (Riparia riparia). Une colonie s'installe dans une tour du château de La Roche-en-Ardenne. 1. Introduction Les berges argileuses de nos cours d’eau sont les sites de nidification naturels de l’Hirondelle de rivage. L’Øtablissement de ses colonies, toujours trLs localisØes, est soumis de constants changements dus l’Ørosion continue par le courant. Tandis qu’u- ne berge s’Ømousse, se couche peu peu et se laisse envahir par une vØgØtation hygrophile, plus loin, dans un mØandre, au rythme des crues et des dØcrues, d’autres berges s’effondrent ou se creusent, devenant ainsi propices l’installation de l’espLce. Contraints de rechercher rØguliLrement de nou- veaux sites, rarement fort distants, ces oiseaux ont une propension revenir nicher dans les environs de leur lieu de naissance. On leur connat une philopa- trie assez marquØe (MEAD, 1979; OLIOSO, 1991). Des changements sont cependant apparus quand l’homme a dØcidØ de modifier le tracØ des cours d’eau ou de les recalibrer pour consolider leurs ber- ges. Ces travaux sont souvent dramatiques pour la biologie des riviLres, responsables du dØclin des Hirondelles de rivage en sites naturels (LEDANT et al., 1983). La population naturelle en riviLre est nØanmoins restØe relativement stable ces dix der- niLres annØes en Wallonie : elle abritait, en 2001, encore 18,7 % des effectifs wallons (NOIRET & COPPE, 2004). Comme pour compenser ces pertes d’habitat, de nouveaux sites de nidification tout aussi temporaires, savoir les sabliLres et les argi- liLres ont vu le jour, principalement en Brabant et en Hainaut. Ces sites semi-naturels, dØcrits dLs Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 13

Transcript of Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

Page 1: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

aves, 44/1 (2007) 13

aves

, 44

(1)

2007

: 13

- 25

RÉSUMÉ - Suite à la découverte d'une nouvelle colonie d'Hirondelles de rivage (Riparia ripa-ria) logée dans une des tours du château de La Roche-en-Ardenne, dans la vallée de l'Ourthe,l'auteur s'interroge sur la présence de nombreuses colonies qualifiées de �très artificielles� lelong de cette rivière, alors que pratiquement aucun cas durable n'est connu sur les autres riviè-res wallonnes, hormis la basse Amblève, affluent direct de l'Ourthe, et la Meuse liégeoise, oùcelle-ci se jette. Le phénomène est peut-être à mettre en relation avec la destruction systéma-tique, brutale et définitive des berges naturelles de ces cours d'eau, déjà particulièrement expo-sés aux crues de printemps. L'Ourthe est aussi la seule rivière wallonne à avoir connu un netdéclin de ses populations naturelles d'hirondelles au cours des trente dernières années. La mul-tiplication des cas de nidification très artificielle est peut-être aussi due au caractère hérédi-taire de ce mode de reproduction et aux conditions avantageuses qu'il offre. Les nids dans lesmurs sont notamment soustraits aux risques d'inondation et aux prédateurs. Le baguage desoiseaux nés ou nichant �en dur� a permis de constater que les colonies continuaient à fonc-tionner en réseau, de la même façon que les colonies d'oiseaux nichant en berge naturelle oucelles nichant dans les sablières.

Marc FASOL J.-M. Winants

Cas d'adaptation de l'hirondelle derivage (Riparia riparia). Une colonies'installe dans une tour du châteaude La Roche-en-Ardenne.

1. Introduction

Les berges argileuses de nos cours d'eau sont lessites de nidification �naturels� de l'Hirondelle derivage. L'établissement de ses colonies, toujours trèslocalisées, est soumis à de constants changementsdus à l'érosion continue par le courant. Tandis qu'u-ne berge s'émousse, se couche peu à peu et se laisseenvahir par une végétation hygrophile, plus loin,dans un méandre, au rythme des crues et desdécrues, d'autres berges s'effondrent ou se creusent,devenant ainsi propices à l'installation de l'espèce.Contraints de rechercher régulièrement de nou-veaux sites, rarement fort distants, ces oiseaux ontune propension à revenir nicher dans les environs deleur lieu de naissance. On leur connaît une philopa-trie assez marquée (MEAD, 1979; OLIOSO, 1991).

Des changements sont cependant apparus quandl'homme a décidé de modifier le tracé des coursd'eau ou de les recalibrer pour consolider leurs ber-ges. Ces travaux sont souvent dramatiques pour labiologie des rivières, responsables du déclin desHirondelles de rivage en sites naturels (LEDANT etal., 1983). La population �naturelle� en rivière estnéanmoins restée relativement stable ces dix der-nières années en Wallonie : elle abritait, en 2001,encore 18,7 % des effectifs wallons (NOIRET &COPPÉE, 2004). Comme pour compenser ces pertesd'habitat, de nouveaux sites de nidification toutaussi temporaires, à savoir les sablières et les argi-lières ont vu le jour, principalement en Brabant eten Hainaut. Ces sites �semi-naturels�, décrits dès

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 13

Page 2: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

le XVIIIe siècle par Buffon et White (cités parMALHER, 2003) accueillent aujourd'hui la majoritédes cas de nidification en Wallonie. Les popula-tions d'hirondelles y restent très dynamiques. Bonan, mal an, les parois abruptes de ces chantierssont occupées au gré de leurs mises en exploita-tion. Les effectifs de l'Hirondelle de rivage ontcependant chuté ces dix dernières années, notam-ment en Brabant et en Hainaut (NOIRET & COPPÉE,

2004), où la majorité des petites carrières ont cesséleur activité. Parfois éloignées de l'eau, ces nou-velles falaises de sable ou d'argile conservent unemorphologie fort semblable aux berges abruptes etnaturelles des rivières. Leur texture oblige toujoursles oiseaux à creuser leurs galeries et l'occupationde ces sites peut être interprétée comme un pre-mier pas franchi par l'espèce en quête d'opportuni-tés nouvelles pour la nidification.

14 aves, 44/1 (2007)

Photo 1 - Exemplede berges naturellescolonisées parl�Hirondelle derivage à Grandhan(Ourthe). - Anexample of naturalriver banks coloni-sed by SandMartins at Grand-han (Ourthe). (M. Fasol)

Photo 2 - Grâce àla bienveillancedes exploitants, lasablière de Mont-Saint-Guibert abri-te la plus grandecolonie semi-natu-relle d�Hirondellesde rivage deWallonie. - Thanksto the agreement ofthe firm workingthe Mont-Saint-Guibert sand pits,they have the lar-gest semi-naturalcolony of SandMartins in Wallonia.(M. Fasol)

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 14

Page 3: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

Photo 3 - Cas de nidification �très artificielle� dans un mur de soutènement à joints vifs, sur l�Amblève àRemouchamps. - An example of �very artificial� nesting in the retaining wall of the Ambleve at Remouchamps.(M. Fasol)

aves, 44/1 (2007) 15

Depuis longtemps décrits dans la littérature, vien-nent s'ajouter les sites dits �artificiels�. Leur tex-ture est toujours meuble, mais leur aspect est dif-férent : ils se présentent généralement sous formede tas isolés constitués de matériaux divers. Parmiles plus spectaculaires, citons le cas de ce poussiercalcaire sauvegardé un temps pour être ensuiteréaménagé en marge de la carrière de Frasnes-lez-Couvin. La colonie abritait, après dix ans d'occu-pation, quelque 260 couples nicheurs, ce qui enfaisait la plus grande de Wallonie en 2001(NOIRET & COPPÉE, 2004). Le poussier auxcimenteries d'Obourg, le terril de résidus de pâte àpapier à Mont-Saint-Guibert (JACOB, 1983), lestas de cendres volatiles humidifiées de la cimen-terie de Gaurain-Ramecroix (DEKELLE &WUELCHE, 2001), ou encore les cendrées de la

centrale thermique de Morlanwelz (Sedek, comm.pers.) illustrent la souplesse dont fait preuve notreplus petite espèce d'hirondelle pour profiter desoccasions créées par les activités industrielles.Hormis le cas exceptionnel de Frasnes-lez-Couvin, ces colonies sont toutefois souvent éphé-mères et leur succès dépend en grande partie de labonne volonté de l'exploitant.

Plus étonnants encore sont les sites de nidificationqualifiés de �très artificiels� (MALHER, 2003). Ilstémoignent de facultés adaptatives peut-être sous-estimées jusqu'ici. Ces sites présentent un aspect�falaise�, mais leur constituant, cette fois, est soli-de. Dans le cas d'un mur ou d'un rempart, la pré-sence de cavités préexistantes sous forme d'inter-stices, qu'ils soient vides ou comblés d'un joint

2. Sites “artificiels” et “très artificiels” en Wallonie

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 15

Page 4: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

16 aves, 44/1 (2007)

friable ou encore sous forme de trous ou detuyaux de drainage est déterminante (MALHER,2003). Ils exercent une forte attraction sur leshirondelles. Cet auteur précise que si ces cas sontrépandus en Europe, ils sont loin d'être communs.Plusieurs ont été rapportés chez nous, mais uni-quement en Wallonie, jamais en Flandre.

Quelques cas isolés ont été rapportés en provin-ce de Namur, dans les murs de soutènement de laBrouffe, affluent de l'Eau blanche àMariembourg (1 couple en 1984 et quelquescouples au début des années 90 - M. Lambert etV. Bulteau, comm. pers.) ainsi que sur l'Eaunoire à Couvin (1 couple en 1984 - M. Lambert,comm. pers.). C'est cependant dans le bassin del'Ourthe et de ses affluents que le phénomènesemble avoir pris ces dernières années le plusd'ampleur. Déjà en 1972, un couple s'était instal-lé dans une fissure d'un mur de soutènement duchemin de fer à Tilff (province de Liège) (BILLEN

& TRICOT, 1977). Un autre cas très ancien a étérapporté dans l'Aisne, petit affluent de l'Ourthe,où 5-6 couples nichaient sous un pont à la fin desannées 60 (J. Finck, comm. pers.). Par la suite,ce sont peu à peu de véritables petites coloniesqui se sont développées dans la région. AComblain-la-Tour (province de Liège), 4 coupless'étaient installés dans un mur de soutènementvers 1995; ils y sont restés jusqu'en 2002, date àlaquelle le mur fut rénové sans ménagement (R.Dumoulin, comm. pers.). Trois kilomètres enaval, à Comblain-au-Pont, la colonie, désormaissous étroite surveillance, a également élu domi-cile vers 1995 sous la pierre bleue coiffant unmur de soutènement en gros moellons, dansl'espace laissé par un joint délité. Pas moins de17 couples y ont nourri leurs jeunes en 2004. Surl'Amblève, principal affluent de l'Ourthe, unepetite colonie très ancienne (déjà signalée en1972 par BILLEN & TRICOT, 1977) s'est aussidéveloppée sous un pont, à Remouchamps (pro-vince de Liège), dans l'interstice entre le tablierdu pont et le pilier situé au bord de la rivière (12couples en 2004).

En 2004, au même endroit, deux couples, puis untroisième tardivement en juillet, se sont installés

juste en-dessous de la colonie du pont, au fondde trois tuyaux d'égout de 10 cm de diamètre etde 90 cm de profondeur, utilisés pour le draina-ge du pilier. Une première à notre connaissance.Un peu plus en aval, toujours le long des quaisde halage, des Hirondelles de rivage (2 couplesen 2004) se sont encore régulièrement installéesdepuis 1995, dans un mur de soutènement fait deblocs à joints vifs (M. Deroanne et R. Dumoulin,comm. pers.), où la présence de deux tuyaux d'é-gout, de part et d'autre du nid, a peut-être joué unrôle attractif (Photo 3).

Ce phénomène, qui semble prendre de l'ampleurces toutes dernières années, se rencontre encoreailleurs. Lors des inventaires spécifiques del'espèce en 2004, une petite colonie (12 couplesen 2004) est encore découverte dans les murs desoutènement des quais de halage de la Meuse lié-geoise, à une vingtaine de kilomètres en amontde la confluence de l'Ourthe. La façon dont leshirondelles y mettent à profit les joints friablessous la pierre bleue sommitale, rappelle étrange-ment la colonie de Comblain-au-Pont. Le murde soutènement se trouve face à la gravièred'Amay où une colonie �semi-naturelle� (81 nidsen 2004) connue depuis longtemps, opte alterna-tivement selon les années et le bon vouloir del'exploitant, pour un poussier ou pour une bergede terre le long du site d'exploitation (C.Farinelle, comm. pers.). En haute Meuse, deux-trois couples ont niché en 2003 sous l'arche dupont reliant Annevoie-Rouillon et Godinne, alorsque non loin de là, la colonie logée à la sablièrede Bioul vivait ses dernières heures (S. Finck etJ.-Y. Paquet, comm. pers.).

Enfin, le cas de Péruwelz (province du Hainaut) estun peu particulier. Les hirondelles (15 couples en1999) avaient profité de trous dans une plaque debéton pour creuser leur nid dans le tas de sablequ'elle retenait (B. Gauquie, comm. pers.). Ce sontde pareils cas de figure qui ont inspiré, en Hollande,la construction de dizaines de �nichoirs� dits �mursà hirondelles de rivage�. Les amorces des trousjouent le rôle de stimulus visuel, incitant lesoiseaux à venir y creuser leurs galeries (GLAS et al.,1987; JONCKERS, 1995).

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 16

Page 5: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

Le 15 avril 2003, lors de prospections réaliséesdans le cadre de �l'Atlas des Oiseaux Nicheurs deWallonie� (Aves - Région wallonne), notre atten-tion est attirée par la présence permanente d'hi-rondelles de rivage chassant sur l'Ourthe moyen-ne à hauteur de la petite ville de La Roche-en-Ardenne (province du Luxembourg). Nous obser-vons que les oiseaux, tel un essaim, vont se per-cher à une trentaine de mètres de hauteur, sur lesparties saillantes des ruines médiévales surplom-bant la ville, blottie dans un large méandre. L'étatd'agitation fébrile dont elles font preuve là-hautfait penser à l'investissement d'un site de nidifica-tion, mais l'absence de berges adéquates au bordde la rivière a de quoi laisser perplexe. Comme lesoiseaux sont toujours présents en pleine saison denidification, intrigués, nous revenons sur le site le5 juin. Les oiseaux suivis au vol finissent par nousdonner l'explication de leur cantonnement : desoisillons prêts à l'envol pointent leur bec au tra-vers des interstices de l'épaisse muraille du châ-teau. Une colonie s'est royalement installée là-haut, dans une des tours !

La forteresse de La Roche-en-Ardenne a étéconstruite sur un promontoire rocheux, du XIe auXIVe siècle, à l'aide de lourdes dalles de schiste,bloquées par un mortier de chaux et de sable par-ticulièrement friable. Au toucher, la similitude dece substrat avec celui des poussiers de la carrièrede dolomie à Merlemont (province de Namur),où une colonie (65 couples en 2004) s'est parailleurs récemment installée, est saisissante. Unéchantillon de mortier de la forteresse de LaRoche a donc été prélevé et nous attendons tou-jours les résultats de l'étude granulométriquecomparative. Cette étude consiste à classer leséléments du substrat d'après leur diamètre et àdéterminer le pourcentage de chaque fraction.Elle devrait idéalement pouvoir être appuyée parune autre étude axée sur la cohésion de cesmêmes matériaux, afin de voir si celui-ci a unimpact sur la longueur des galeries creusées parles oiseaux. En site �artificiel� carrier, où le sub-strat est obtenu à partir d'un broyage et d'un cri-

blage de la roche, il est quasi certain qu'une rela-tion étroite existe entre les deux (NOIRET &COPPÉE, 2004). Jusqu'ici, seul le site �très artifi-ciel� de Comblain-au-Pont (R. Dumoulin, comm.pers.), plus accessible, a pu faire l'objet d'unemesure de la longueur des galeries. Elle donne 40cm, soit exactement la longueur moyenne enberge naturelle (NOIRET & COPPÉE, 2004). A titrede comparaison, les mesures moyennes de la lon-gueur des galeries effectuées en argilières et ensablières donnent respectivement 47 cm et 55 cm(NOIRET & COPPÉE, 2004).

Chez l'Hirondelle de rivage, l'orientation desparois occupées par les colonies ne semble pasavoir d'importance, les oiseaux étant générale-ment plus préoccupés par des facteurs comme lahauteur et l'homogénéité du substrat (NOIRET &COPPÉE, 2004). Semi-circulaire, la �tour auPilier� de La Roche, la première et la seule jus-qu'ici à avoir été adoptée par les oiseaux, échap-pe cependant de manière idéale aux intempériespuisqu'elle est orientée à l'est. C'est surtout latour la plus massive, avec un diamètre de 14mètres : ses murs atteignent 2 et même 3 mètresd'épaisseur du côté est. Par ailleurs, contraire-ment aux autres parties de l'ensemble, la tourinvestie n'a jusqu'ici jamais fait l'objet de travauxde restauration au ciment moderne. Une démar-che réalisée auprès de l'Office du Tourisme locala d'ailleurs permis d'éviter que les nichées soientemmurées ou même dérangées lors de banals tra-vaux de nettoyage. Il est à signaler qu'un travailde nettoyage hivernal serait néanmoins bienvenuafin d'éviter l'envahissement de la paroi par lesherbes xérophiles.

L'observation de cette colonie urbaine se fait aisé-ment depuis l'autre rive. Les entrées des couloirssont réparties de manière hétérogène sur tout lepourtour de la construction, face à la rivière. Lestrois quarts d'entre eux sont cependant concentréssur la partie sommitale de la tour, avec une zonenoyau en son milieu, juste sous les anciens cré-neaux, à environ une trentaine de mètres de hau-teur au-dessus de l'Ourthe. Il est souvent malaisé

aves, 44/1 (2007) 17

3. Description de la colonie rochoise

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 17

Page 6: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

de quantifier avec exactitude une colonie d'hiron-delles de rivage, quand bien même les entrées desnids sont visibles. En raison du type de �falaise�,en partie recouverte par une flore rupicole, lecomptage précis du nombre de nids occupés n'aété possible que grâce à une observation répétée ettrès attentive lors des va-et-vient du nourrissage etce, à l'aide d'un schéma minutieux de la muraille.Par ailleurs, comme cela a déjà été signalé dansles colonies dites �classiques� (VERHEYEN, 1947),plusieurs entrées, très élargies, étaient manifeste-ment doubles, voire multiples.

Le 15 avril 2004, avec une étonnante ponctualité,les vingt premières �pionnières� investissaient ànouveau la paroi. Estimant qu'un tiers des effectifsrejoint le site le premier jour (NOIRET & COPPÉE,2004), le cap des 30 couples devait pouvoir êtrefranchi. Le 8 juin, les comptages donnèrent eneffet un minimum de 32 couples nicheurs. Notonsaussi que les parois est de la forteresse ont étéoccupées cette année-là par un couple de

Mésanges bleues (Parus caeruleus), un couple deBergeronnettes grises (Motacilla alba) et un cou-ple de Rougequeues noirs (Phoenicurus ochru-ros).

Le 24 mai 2004, plusieurs individus ont commen-cé en outre à explorer de nouvelles possibilités denidification dans un autre secteur de l'édifice for-tifié, connu sous le nom de "bâtisses de l'est".Cette partie est également caractérisée par l'épais-seur de ses murs (3 mètres). Si les blocs de schis-te sont assemblés à joints vifs, en revanche denombreux boulins bien apparents, trous carrésprévus pour supporter les échafaudages, semblentexercer, une fois de plus, une forte attraction surles hirondelles.

18 aves, 44/1 (2007)

Photo 4. La ville de La Roche-en-Ardenne sur l�Ourthe, dominée par son château médiéval. - The town of LaRoche-en-Ardenne on the Ourthe River, dominated by its medieval castle. (M. Fasol)

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 18

Page 7: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

1. Forte de ses 32 couples, la colonie �très artifi-cielle� de La Roche est considérée comme trèsimportante. Contrairement aux colonies �natu-relles� ou �semi-naturelles� en carrières, quipeuvent compter plusieurs centaines de couples,les colonies �très artificielles� ne dépassent eneffet que très exceptionnellement la vingtaine decouples (MALHER, 2003). La littérature ne men-tionne que deux cas, dont un en Suisse et unautre au Québec (HOLLOM, 1943; GÉROUDET,1956). Le nombre de couples généralement res-treint de ce genre de colonie pourrait s'expliquerparfois par le manque de cavités disponibles,mais cela ne semble guère être le cas à La Roche.La superficie de la �falaise� devrait logiquementpermettre à la colonie de s'étendre.

Durant nos recherches, un quatrième cas de grossecolonie �très artificielle� nous a été renseigné,cette fois en France, le long de la frontière belge,en face de Péruwelz. Il concerne une colonie d'unequarantaine de couples (R. Tonnel, comm. pers.).Les oiseaux ont investi, une fois de plus, les jointsdélités d'un mur de soutènement, et ce, en pleineville de Condé-sur-l'Escaut. Il est intéressant denoter qu'en 1994, cette colonie s'est déplacée nonloin de là sur les berges du canal de Mons à Saint-Aybert, en raison de travaux réalisés aux berges,avant d'y revenir l'année suivante.

2. Les colonies �très artificielles� peuvent connaî-tre une longévité étonnante. Un cas documentéautour d'Areuse, en Suisse, dépasse même ledemi-siècle (ROUX, 1952; MULHAUSER & ROULET,1999). A Remouchamps, la petite colonie existeau moins depuis l'inventaire réalisé par Aves en1972 (BILLEN & TRICOT, 1977), soit une trentained'années mais avec peut-être une ou plusieurspériodes d'interruption. En ce qui concerne le casrochois, il est difficile de se prononcer. Habitéepar une colonie d'Hirondelles de fenêtre(Delichon urbica), de nombreuses Hirondelles decheminée (Hirundo rustica) et de Martinets noirs(Apus apus), la ville a pu abriter une petite, maisdiscrète population d'Hirondelles de rivage depuislongtemps. Curieusement, alors que l'espèce estsignalée �totalement absente du Plateau arden-nais� (BILLEN & TRICOT, 1977), �l'Atlas desOiseaux nicheurs de Belgique� réalisé à la mêmeépoque, de 1973 à 1978, (DEVILLERS et al., 1988)mentionne l'espèce dans la catégorie �nicheurpossible� à cet endroit précis. En 2004, les colo-nies �naturelles� de Riparia riparia les plus pro-ches se situaient respectivement à 5 km (Jupille-Marcourt) et 8 km (Rendeux-Bas) à vol d'oiseau.Elles n'abritaient cette année-là que 4 et 5 couplesrespectivement.

aves, 44/1 (2007) 19

4. Originalité de la colonie rochoise

5. Discussion

5.1. Réponse à une nécessité biologique ?

Le cas de La Roche est actuellement le seul casconnu de nidification de l'espèce en Ardenne, unerégion peu propice à l'installation de l'Hirondelle derivage. Ses vallées encaissées et ses rivières rapidesne se prêtent guère aux dépôts d'alluvions et doncaux berges abruptes et hautes recherchées pour lanidification. L'implantation de la colonie au châteaude La Roche remet donc à jour une question déjàmaintes fois formulée : l'occupation d'un site de

nidification �très artificiel� pourrait-elle être prisecomme une sorte de �réponse à une nécessité biolo-gique dans une région peu favorable à son établis-sement�? (HEYLLAR, 1927 cité par MALHER, 2003).En considérant le cas cité, on serait tenté de pencherpour cette hypothèse, mais alors, pourquoi les hiron-delles ne s'y sont-elles pas installées depuis beaucoupplus longtemps, puisque le château existe depuis leXIe siècle ? A notre connaissance, cela n'a jamais étéle cas. Pourquoi aussi ce genre de cas n'est-il pas alorsplus fréquemment rencontré en Ardenne ?

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 19

Page 8: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

On constate a contrario que les colonies �très arti-ficielles� de Comblain-la-Tour, Comblain-au-Pontet Remouchamps se sont installées dans unerégion (le Condroz) où les sites naturels ne fontpas défaut. Du moins en principe, car il y a un fac-teur peu évoqué jusqu'ici mais qui semble entrerdéfinitivement en jeu : les destructions brutales etirrémédiables des sites de nidification. Qu'ellessoient d'origine naturelle ou artificielle, ces des-tructions se sont multipliées surtout au cours desannées 80. A cinq kilomètres en aval de la nouvel-le colonie de La Roche-en-Ardenne, l'Ourthemoyenne débouche progressivement sur les présde la Famenne, riche en berges abruptes creuséesdans ses alluvions. Ces rivages paisibles sont,depuis quelques décennies, convoités par de trèsnombreux campings et secondes résidences.Guerre a été aussitôt déclarée à l'érosion des ber-ges. Enrochement, gabionnage et bétonnage sontaussitôt devenus la norme. Sur la basse Ourthe, ilne reste même pratiquement plus aucune bergenaturelle. Entre Petit-Han et Durbuy, alors que dessolutions alternatives existent (VERNIERS, 1995;NOIRET & COPPÉE, 2004), toutes les rives propicesont été systématiquement bétonnées, notammentlors de la construction d'un immense parking etl'extension d'un camping (A. Baccaert, comm.pers.). Ailleurs, en face du camping communal deHamoir, même gâchis, même constat : les coloniesont systématiquement été détruites. Le dépôt d'é-normes blocs de pierre y rend désormais toutenidification impossible (G. Denis, comm. pers.).

A ces actes peu réfléchis, il faut aussi ajouter la trèsgrande vulnérabilité des berges restantes en pério-de de crue. Elles sont en moyenne bien plus bassesque celles des autres rivières wallonnes. Desmesures effectuées sur 4 berges encore colonisées(Petite et Grande Eneille, Grandhan et Noiseux)ont donné seulement 1,48 m de hauteur moyenne,avec des entrées de nid situées en moyenne à 1,16m seulement (min.: 0,41 m et max.: 1,96 m) parrapport au niveau bas des eaux (NOIRET & COPPÉE,2004). Comme il a pu être constaté début mai2004, un débit de 70 m3/sec mesuré à Tabreux(Hamoir) est suffisant pour noyer la majorité descolonies de cette rivière, sans pour autant en inon-

der le lit majeur. En se basant sur les données four-nies par la �Direction des Etudes hydrologiques etdes Statistiques�, entre 1970 et 2004, 12 crues deprintemps au moins ont dévasté les galeries desoiseaux, soit en moyenne une fois tous les 3 ans.En outre, on constate que ce sont encore une foisles années 80 qui ont connu la série la plus noire.De 1983 à 1986, le lit mineur de la rivière a étéinondé chaque printemps et, fait exceptionnel encette période de l'année, le lit majeur a même étéinondé à deux reprises (1983 et 1986).

L'Ourthe est aussi la seule rivière où le nombrede couples nichant en site naturel a chuté demanière significative. Les 14 colonies �naturel-les� citées lors de l'enquête Aves de 1972, abri-taient alors un strict minimum (probablementsous-estimé) de 242 nids occupés (sur 318 trousrecensés) (BILLEN & TRICOT, 1977). En 2001, lenombre de ces colonies était tombé à 5 avec seu-lement 52 nids occupés (NOIRET & COPPÉE,2004). En 2004, suite à une année particulière-ment favorable, les effectifs sont remontésquelque peu et 9 colonies �naturelles� furentlocalisées au cours d'un recensement particuliè-rement exhaustif. Elles abritaient 157 nids occu-pés (sur 371 trous recensés).

Disparitions brutales ou fragilisation des colo-nies �naturelles� à la fin des années 80 et multi-plication de cas de nidification �très artificiels�au début des années 90, semblent bel et bienliées dans le bassin de l'Ourthe. Tout se passecomme si, de retour de migration, certains indi-vidus subitement forcés de faire face à une situa-tion à laquelle ils ne s'attendaient pas, pousséspar l'instinct de reproduction, optaient pour desalternatives d'autant plus audacieuses que lespossibilités de réinstallation s'amenuisaient.

5.2. Innover, affaire d’un individuisolé ou d’une colonie ?

En les reportant sur carte, il est surprenant de remar-quer à quel point les colonies �artificielles� de typepoussier industriel côtoient étroitement les colonies�très artificielles�. Toutes les deux ont très proba-

20 aves, 44/1 (2007)

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 20

Page 9: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

blement une origine commune : la destruction deleur habitat naturel en rivière. A un détail prèscependant : si les occupations de poussiers indus-triels semblent également résulter de relocalisations"en catastrophe", elles se font généralement beau-coup plus massivement. Un peu comme si, de retourde migration, le leader de la colonie, le mâle le plusâgé du groupe (Noiret, comm. pers.) confronté à laperte de son site de nidification, entraînait assezaisément toute sa colonie dans une expérience alter-native. A la carrière d'Aisne, selon les dires des car-riers, la colonie, forte de 96 nids, s'était installée dujour au lendemain, en mai 2000, dans un tas depoussier (min. 48 nids en 2004). A 4 km de là àpeine, à Bomal-sur-Ourthe, des berges naturellesabritant deux colonies très importantes venaient unefois de plus d'être saccagées... (J.-M. Daulne,comm. pers.).

En revanche, et jusqu'à preuve du contraire, les sites�très artificiels� trouvés dans les murs, ne sont occu-pés qu'à l'initiative d'un très petit nombre d'indivi-dus, du moins au début. Comme si le fait d'innover,de sauter le pas comportemental, n'était réservé qu'àquelques couples, voire un seul particulièrementaudacieux. Comme ces premiers cas passent sou-vent inaperçus, il est très difficile d'établir avec pré-cision l'ancienneté des colonies qui s'y développentpar la suite.

Un autre facteur est encore susceptible d'influen-cer le changement comportemental de l'oiseau :les colonies en poussier industriel sont très éphé-mères. Bien plus qu'en sablières, ces colonies nepeuvent se développer ou se réinstaller d'uneannée à l'autre qu'en fonction du bon vouloir desexploitants. Dans le meilleur des cas, on espèreune non-destruction en période de nidification.Elles sont aussi soumises à une relocalisationd'autant plus problématique et à un stress d'autantplus important que le site industriel est souventisolé dans un environnement peu propice à leurréinstallation. Le développement d'une colonie àla gravière d'Amay, où les tas de poussiers sontparfois détruits malgré les promesses des indus-triels, a peut-être plus souvent qu'ailleurs pousséles oiseaux à se fixer dans les joints friables desanciens quais de la Meuse, juste en face du site�

5.3. Y a-t-il un avantage sélectif ànicher en dur ?

Il est une constatation à l'échelle de la Wallonie : lescas de nidification très artificiels se sont multipliésces dernières années et concernaient pas moins de2,5 % des effectifs wallons, en 2004.

A La Roche, les conditions de nidification semblenten tout cas particulièrement favorables. Les nidsrestent tout d'abord hors de portée des sources dedérangement (défilé de kayaks et de canoës, présen-ce statique de pêcheurs à la ligne, de baigneurs�)ainsi que du bétail qui, à certains endroits, détruit lesberges en allant s'abreuver. Les oiseaux sont égale-ment à l'abri de leurs principaux prédateurs, dont lespetits mustélidés et surtout le renard (Vulpes vul-pes), à qui on attribue la fâcheuse habitude d'élargirl'entrée des nids avec une redoutable efficacité. Enparticulier là où, faute d'alternative, les oiseaux sesont installés dans les dernières berges disponiblesfortement exposées à la prédation (cas de la petitecolonie d'Esneux). Les nichées du château de LaRoche sont aussi et surtout hors de portée des inon-dations de printemps. En 2004, les nichées des colo-nies naturelles situées en aval ont accusé un retardde trois semaines par rapport celles de la colonierochoise : début mai, la montée subite des eauxavait compromis leur première ponte�

En revanche, l'utilisation répétée des mêmes cavi-tés, à l'instar de ce qui se passe avec les �murs àhirondelles�, peut entraîner une prolifération deparasites, notamment différentes espèces d'acarienset de diptères (JONCKERS, 1995). A la longue, ceux-ci pourraient être préjudiciables à l'espèce. Seul unsuivi de la colonie rochoise sur plusieurs annéespermettrait d'apporter des précisions sur ce point.

Dans les murs à joints vifs, le problème survientaussi lors de l'envol des jeunes. Trois semainesaprès éclosion, ceux-ci se précipitent à la sortie desgaleries pour être aux premières loges lors du nour-rissage. Dans une paroi meuble, l'entrée de la gale-rie s'ovalise rapidement et laisse apparaître plusieurspetites têtes. A Remouchamps, le trou d'envol dumur de soutènement à joints vifs était tellementexigu qu'un seul individu à la fois pouvait passer sa

aves, 44/1 (2007) 21

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 21

Page 10: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

tête à l'entrée. A l'évidence, l'un d'eux a dû se fairepousser par derrière car nous l'avons retrouvé aupied du mur, incapable de voler. Il n'est pas impos-sible dans ces conditions, qu'un ou deux jeunes seu-lement aient pu prendre leur envol.

5.4. Héritabilité du comportementLa présence d'une demi-douzaine de petites colo-nies très artificielles sur l'Ourthe, dans la régioncondruzienne (Tilff, Comblain-au-Pont, Comblain-la-Tour) et sur la basse Amblève, son affluent direct

(Remouchamps), soulève une troisième question :�La faculté d'adopter un site très artificiel pour lanidification serait-elle transmise aux jeunes ? �(HEYLLAR, 1927; MALHER, 2003). Ces petites colo-nies très artificielles sont situées à quelques kilomè-tres seulement l'une de l'autre (voir carte). Or lesétudes sur la philopatrie des hirondelles de rivagenous apprennent que la quasi-totalité des jeunes sefixent dans un rayon inférieur à 12 kilomètres deleur lieu de naissance (MEAD, 1979; OLIOSO, 1991).Cette étonnante proximité dans le bassin, cautionnecette hypothèse.

22 aves, 44/1 (2007)

Fig. 1 - Les colonies citées dans le texte plus leurs voisines. Les colonies "naturelles"de la vallée de l'Ourthesont illustrées par les pastilles vertes, les colonies "semi-naturelles" (sablières) par des pastilles jaune, lescolonies "artificielles" par des pastilles oranges et les colonies "très artificielles" par des pastilles rouges.On remarquera que les pastilles rouges (colonies très artificielles) sont implantées à chaque fois, sauf à LaRoche-en-Ardenne, dans des zones très perturbées ayant déjà connu par le passé des relocalisations "en cata-strophe" (pastilles orange et jaunes) et des destructions de colonies naturelles (anneaux verts). - The colo-nies cited in the text as well as their neighbours : the "natural" colonies along the Ourthe are illustrated bythe green marks, the semi-natural colony (sand pits) by the yellow, the "artificial" colonies by orange and the"very artificial" colonies by red. Notice that the red marks are found, each time except La Roche-en-Ardenne,in very disturbed zones having suffered forced relocation in catastrophic conditions (orange and yellowmarks) or destruction of natural colonies (green squares).

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 22

Page 11: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

Dans le bassin de la basse Ourthe, étendu à celui dela basse Amblève et de la Meuse liégeoise, toutesles conditions pour l'étude comportementale de l'a-daptation à la perte d'habitat semblent réunies.Après avoir dressé un inventaire international descolonies très artificielles, F. MALHER (2003) regret-tait l'absence d'opérations de baguage ciblées. Avecla collaboration de S. Finck, bagueur agréé, nousavons donc entrepris de suivre trois colonies �en tri-angle�, distantes entre elles de maximum 12 km.Deux des colonies sont considérées comme très arti-ficielles : celles situées sous l'assiette du pont àRemouchamps et dans le mur de soutènement deComblain-au-Pont distantes l'une de l'autre de 10km. La troisième est située le long de l'Ourthe àEsneux, à 6 km en aval de Comblain-au-Pont et à 12km de Remouchamps : installée en berge terreuse,elle est tout à fait naturelle. Mais, moribonde lors del'été 2004, elle s'avérait particulièrement intéressan-te à étudier dans le cadre de notre sujet. L'érosionprovoquée par le bétail l'avait rendue particulière-ment vulnérable à la prédation du renard (Vulpesvulpes). Il est important de préciser ici qu'en raisonde l'aménagement généralisé des berges de la basseOurthe, à notre connaissance, aucune possibilité derelocalisation en site naturel ne s'offrait aux oiseauxdans un rayon de 12 km.

Grâce au contrôle des oiseaux sur ces trois mêmessites, de précieuses informations, quoique encoretrès fragmentaires, pouvaient déjà être engrangéesdès juin 2005 :

1) Fidélité des adultes au site de nidification �en dur�

A Comblain-au-Pont, sur 20 adultes (5 mâles,11femelles et 4 individus de sexe indéterminé)bagués à la sortie des nids en juillet 2004, 5oiseaux (2 mâles et 3 femelles) ont été contrôlésnicheurs au même endroit en juin 2005. ARemouchamps, sur 15 adultes (5 mâles, 7 femel-les, 3 individus de sexe indéterminé) bagués à lasortie des nids sous le pont en juillet 2004, 3oiseaux (2 mâles et 1 femelle) ont été contrôlésnicheurs au même endroit en juin 2005.

Même si la différence n'est pas significative (χ2=

0,635), les mâles font ici preuve d'une plus gran-de fidélité au site de nidification que les femel-les. Cela correspond à ce qui a déjà été constatédans d'autres colonies, qu'elles soient localiséesen berge de rivière (SERIOT & ALVES, 2002) ouen poussier industriel (NOIRET & COPPÉE, 2004).

2) Hérédité comportementale chez les juvénilesnés �en dur�

Sur 8 juvéniles capturés à la sortie du nid enjuillet 2004 sous le pont de Remouchamps, unseul a été contrôlé en juin 2005. Comme site denidification, cet oiseau femelle avait opté pourun autre site de nidification très artificiel : le murde soutènement de Comblain-au-Pont, situé à 10km de là.

3) Adaptation à la perte d'habitat

Sur 8 adultes bagués en juillet 2004 dans la colo-nie naturelle d'Esneux, un seul oiseau, unefemelle, fut contrôlée en juin 2005. Elle avaitdélaissé la colonie naturelle moribonde pourrejoindre et nicher dans la colonie très artificiel-le de Comblain-au-Pont.

4) Fonctionnement des colonies �en réseau�

A contrario, il faut mentionner qu'une femelle aété contrôlée nicheuse en juin 2005 à la colonienaturelle d'Esneux, alors qu'elle avait été baguéeen juillet 2004 à la sortie du nid sous le pont deRemouchamps, donc en site très artificiel.

Ce dernier résultat est assez surprenant et démon-trerait que le phénomène d'adaptation est aussiréversible. Une chose est cependant acquise. Pourautant que les colonies d'hirondelles de rivagesoient situées dans un rayon de 12 km maximum,elles fonctionnent entre elles en réseau et s'ali-mentent en effectifs les unes les autres. Et ce, quelque soit leur type : �naturelles� et �très artificiel-les� en rivière, �artificielles� en poussier indus-triel (NOIRET & COPPÉE, 2004) ou encore �semi-naturelles� en sablière (O. Poncin, comm. pers).

aves, 44/1 (2007) 23

6. Suivi des colonies “trèsartificielles” par baguage spécifique

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 23

Page 12: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

24 aves, 44/1 (2007)

Photo 5 - Les jeunes, qui se précipitent à la sortie dunid, finissent pas élérgir le trou d�envol. - The youngrushing to the nest exit, end up enlarging the hole.Mont-Saint-Guibert, août 2001 (M. Fasol)

SUMMARY - A Case of Adaptation of the Sand Martin (Riparia riparia). A colony nests in atower of the castle at La Roche-en-Ardenne.

Following the discovery of a new colony ofSand Martins (Riparia riparia) in one of thetowers of the castle at La Roche-en-Ardenne, inthe Ourthe valley, the author wondered aboutthe presence of many colonies described as"very artificial" along this river, whereas vir-tually no other durable cases are known onother Walloon rivers, outside the lowerAmbleve, draining into the Ourthe, and theLiege Meuse into which the Ourthe flows. Thephenomenon is perhaps related to the systema-tic destruction of the natural banks of theserivers, already extremely exposed to spring

floods. Thus, the Ourthe is the only Walloonriver with a net decline in its natural populationof Martins during the last thirty years. Theincrease in artificial nesting colonies is perhapsalso due to the hereditary character of thismeans of reproduction and to the advantagesthat it offers. Nests in the walls are protectedfrom risks of flooding and predation. Ringingthe birds born or nesting in such locations hasallowed us to see that the colonies continue tofunction in a network, in the same way as colo-nies of nesting birds on natural banks or thosein sand pits.

Key words : Sand Martin, artificial nesting

REMERCIEMENTS - Nous tenons à remercier tous lesobservateurs qui nous ont communiqué des donnéesde terrain relatives aux Hirondelles de rivage; en l'oc-currence : Alain Baccaert, Jacques Berteau, PhilippeBucquoye, Vincent Bulteau, Michel Cantraine, Jean-Luc Coppée, Jean-Marie Daulne, Guy Denis, MarcDeroanne, Pierre Desablens, Gérard Duhayon, RudiDujardin, René Dumoulin, Yves Fanon, CharlyFarinelle, José Finck, Jules Fouarge, Benoît Gauquie,Richard Gillon, Tristan Guillosson, Paul Halen, LéonJacoby, Christine Keulen, Marc Lambert, PierreLeprince, Marcel Moncousin, Claudy Noiret, Jean-Yves Paquet, Pierre Plichon, Olivier Poncin, JacquesSedek, Roger Tonnel, John Van Volsem et DidierVieuxtemps.

Nos remerciements tout particuliers aussi à JeanDelarue et Sébastien Finck pour les séances de bagua-ge ciblées, menées avec brio; A Marina Thunus, de laDirection des Etudes hydrologiques et desStatistiques. MET - Direction générale des Voieshydrauliques; A Thierry Kinet et à André Monmartpour m'avoir aidé dans les recherches bibliogra-phiques; A Olivier Lefèvre, président du S.I. de LaRoche-en-Ardenne, pour l'accès permanent aux ruinesdu château médiéval et à Louis Bronne, EmileClotuche, Jean-Paul Jacob et Frédéric Malher pour larelecture du présent article et leurs conseils judicieux.

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 24

Page 13: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

aves, 44/1 (2007) 25

ANONYME : Le château féodal de La Roche-en-Ardenne. Brochure et dépliant du Syndicatd'Initiative de La Roche.

BILLEN, G. & TRICOT, J. (1977) : Recensement deshirondelles de rivage (Riparia riparia) dans la partiesud de la Belgique en 1972 et 1973. Aves, 14 : 101 -113.

DEKELLE, C. & WUELCHE, J. (2001) : Hirondelles derivage sur le site de CCB. Le Guignard, 2001 : 92.

DEVILLERS, P. et al. (1988) : Atlas des Oiseauxnicheurs de Belgique. Institut Royal des SciencesNaturelles de Belgique, Bruxelles.

GÉROUDET, P. (1956) : Les passereaux d'Europe. Tome1. Delachaux et Niestlé.

GLAS, J., HERMANS, J.W & MARECHAL, P. (1987) :Hulp geboden : argumenten, ervaringen, en praktis-che wenken bij het scheppen van nestgelegenheidvoor de oeverzwaluw Riparia riparia. HetVogeljaar, 35 : 163 - 171.

HEYLLAR, H. (1927) : Notes on the nesting of SandMartin. British Birds, 21 : 166 - 171.

HOLLOM, P.A.D. (1943) : Bank Swallows nesting inartificial holes. Auk, 60 : 270 - 271.

JACOB, J.-P. (1983) : Chronique ornithologique. Aves,21 : 90 - 104.

JONCKERS, D. (1995) : Kunstwanden voor oeverzwa-luwen in Nederland. Het Vogeljaar, 43 : 15 - 16.

LAUDELOUT, A. & LIBOIS, R. (2003) : Rapport sur lesespèces macro-indicatrices de la qualité des coursd'eau. Répartition, habitats, mesures de protection etde restauration des populations. Université deLiège.

LEDANT, J.-P., JACOB, J.-P. & DEVILLERS, P. (1983) :Protégeons nos oiseaux. Région wallonne - Duculot.

LIPPENS, L. & WILLE, H. (1972) : Atlas des Oiseaux deBelgique et d'Europe occidentale. Lannoo, Tielt.

MALHER, F. (2003) : Adaptation de l'hirondelle derivage Riparia riparia à des sites �très artificiels�.Alauda, 71 : 243 - 252.

MEAD, C. (1979) : Mortallity and causes of death in

British Sand Martins. Birds Study, 26 : 107 - 112.

MULHAUSER, B. & ROULET, S. (1999) : Une colonied'Hirondelles de rivage Riparia riparia dans un murde soutènement à Areuse NE. Nos Oiseaux, 46 : 41 -43.

NOIRET, C. & COPPÉE, J.L. (2004) : Contribution à l'é-tude de l'hirondelle de rivage (Riparia riparia ripa-ria) Répartition, habitats et mesures de sauvegardeen Wallonie. Les Bocages - Région Wallonne. 80pages.

OLIOSO, G. (1991) : L'hirondelle de rivage dans le sud-est de la France et plus particulièrement dans la val-lée de la Durance. L'oiseau et la Revue Françaised'Ornithologie, 61 : 185 - 201.

ROUX, G. (1952) : Sur la nidification de l'Hirondellede rivage dans les murailles. Nos Oiseaux, 21 : 171.

SERIOT, J. & ALVES, D., 2002 : Les hirondelles.Biologie, m�urs, mythologie, cohabitation, protec-tion� Les sentiers du naturaliste. EditionsDelachaux et Niestlé, Paris et Lausanne.

VERHEYEN, R. (1947) : Les passereaux de Belgique, 2epartie. Editions Patrimoine de l'Institut Royal desSciences Naturelles de Belgique, Bruxelles.

VERNIERS, G. (1995) : Aménagement écologique desberges des cours d'eau - Techniques de stabilisation.Editions Presses universitaires de Namur. Eco-tech-nologie des eaux continentales..

WALDON J. (2004) : Sand Martins and House Martinsnesting in a wall. British Birds, 97 : 352 - 353.

Marc FASOL

“La Houlette”, 1B - 1470 Baisy-Thy

[email protected]

Bibliographie

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 25

Page 14: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

GRIHAUT, A. (2005) : DODO. The bird behind thelegend. IPC Ltd, Mauritius, 170 pp.

Moins de cent ans de présence humaine sur l'îleMaurice (1598- 1680) ont suffit à provoquer l'ex-tinction du Dodo, qui y a régné durant des siècles loindes voies fréquentées par les bateaux. En 1598,Mauritz von Nassau, prince d'Orange, envoie 8 navi-res dans l'océan Indien pour un voyage d'explorationau cours duquel l'île Maurice (rebaptisée en l'honneurdu Prince) est visitée. Le récit de ce voyage, publié ennéerlandais en 1601 (" Tvveede Boeck "), mentionnepour la première fois la présence de grands oiseaux "répugnants ", deux fois plus grands que des cygnes,qu'il faut cuire des heures et dont le goût est huileux.Au début des années 1600, Hollandais, Anglais,Français et Espagnols s'y approvisionnent en eau fraî-che, en fruits, en oiseaux et en bois d'ébène sur laroute des comptoirs des Indes. Des marins déserteurss'y cachent dans les forêts, tout comme les esclaves etles condamnés échappés, amenés de Madagascar pourcultiver le riz, la canne à sucre, les citronniers. Si ledodo n'a pas bon goût, c'est une nourriture qui leur estaccessible. Les bateaux abandonnent sur l'île quantitéde rats noirs, mais aussi de la " nourriture " : singes,chevreuils, chèvres, porcs� qui prolifèrent rapide-ment, une plaie pour les oiseaux nichant au sol comme

le Dodo. En 1680, arrivée de nouveaux planteurs surl'île, déforestation accrue, dernières mentions duDodo.

1862 : les Britanniques construisent un chemin defer sur l'île, et on trouve des ossements de l'oiseau, quisont envoyés dans divers musées anglais.

Au XVIIèmè siècle, des dodos vivants furentembarqués vers l'Europe, l'Inde et le Japon, mais peusurvécurent au voyage. Par ailleurs, la taxidermieétait peu développée et les spécimens naturalisés n'ontpas résisté au temps. Très gros ou élancé, noir, blanc,ou brun, bec droit ou courbé, sorte de pigeon frugivo-re ou de casoar... les premières descriptions sontcontradictoires, et les peintures s'inspirant de croquisexistants reproduisent ou amplifient les inexactitudesphysiques. Cet ouvrage passionnant très illustré, rédi-gé dans un anglais très accessible, procède par recou-pements et éliminations et mène une véritable enquê-te, à partir de récits de voyage, de dessins, de peintu-res et de l'analyse de quelques squelettes retrouvésdans la Mare aux Songes, afin de définir le plus exac-tement possible l'allure, les m�urs et la combinaisondes facteurs qui ont causé la disparition d'un oiseaudevenu mythique, dont l'ancêtre est le pigeon deNicobar. CP

26 aves, 44/1 (2007)

nous avons reçuaves 44 (1) 2007 : 26 - 28

Cette rubrique présente les recensions, c'est-à-dire les comptes rendus de lecture des livres,rapports et autres publications, y compris électroniques (CD), reçus par la bibliothèqueAves. Celle-ci est intégrée à la bibliothèque universitaire Moretus Plantin (B.U.M.P.) desFacultés Notre-Dame de la Paix à Namur (19 rue Grandgagnage, 5000 Namur). Les ouvra-ges commentés ici y sont déposés et consultables. La plupart peuvent aussi être commandésà la librairie Aves : 3 rue Fusch, B - 4000 Liège, tél. (00-32-) 04/250 95 92, fax 04/222 1689, [email protected]; des commandes en ligne se font via www.aves.be.

Les recensions publiées dans ce fascicule ont été réalisées par E. Clotuche (EC), C. Pirson(CP), V. Schollaert (VSc) et X. Vandevyvre (XV).

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 26

Page 15: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

CARSWELL, M., POMEROY, D., REYNOLDS, J. &TUSHABE, H. (2005) : The Birds Atlas of Uganda.British Ornithologists' Union, Oxford.

L'ornithologue qui a voyagé un peu en Afriquecomprend aisément qu'il ne peut attendre d'un atlasornithologique local, la même information que cellequ'il trouve dans les atlas européens, car le nombred'observateurs et les surfaces à prospecter y sont à peuprès dans des rapports inverses dans ces deux conti-nents En réalité, dans la plupart des pays d'Afrique, lenombre d'observateurs ayant publiés leurs données esttellement faible que, dans les grandes lignes, l'essen-tiel de ce qui est connu sur le pays en terme de fau-nistique peut être publié dans un seul livre. Et c'estbien l'objectif du Birds Atlas of Uganda. Il s'agit derassembler dans un volume accessible à tous les obs-ervateurs, amateurs ou professionnels, les informa-tions déjà connues sur le pays aujourd'hui, pour per-mettre aux futurs observateurs d'avoir une base de tra-vail qu'il s'agisse d'organiser un voyage de prospectionou de mettre en place des études plus approfondies.

Il me semble que le résultat soit totalementconvainquant. Bien entendu, il y a visiblement deslacunes à propos de certaines régions sous-prospec-tées et d'espèces trop peu connues. Mais même uneéquipe de passionnés comme sont manifestement lesquatre auteurs de l'atlas ne peuvent pas, à eux seuls,combler les lacunes en questions à moins d'y investirde nombreuses années supplémentaires

L'ouvrage est présentée de façon classique et effi-cace. Tout d'abord, l'introduction permet de se faireune idée concrète de la géographie, des zones d'endé-mismes, du climat, de la protection des sites et de l'é-tat actuel de l'environnement du pays. Une analyse del'avifaune, notamment les proportions d'espèces endé-miques, de migrateurs, de nicheurs et de la répartitiondes espèces par habitat est également proposée avecdes notions sur le comportement, notamment de lanidification, des oiseaux en Ouganda. Un historiquede l'ornithologie ougandaise permet de remettre toutesses données dans leur contexte.

Le corps de l'ouvrage est constitué par les cartesde répartition de quasiment chaque espèce observéedu pays, divisée en carrés de demi-degré de côté, cequi est évidemment ce qu'on attend pour un tel atlas.Le texte accompagnant est clair mais il pourrait êtreun peu plus fouillé. Il résume néanmoins chaque foistrès bien la connaissance actuelle de l'espèce concer-née. Dans certains cas, il semble que les répartitionsrespectives des sous-espèces (parfois devenues allo-

espèces selon d'autres auteurs) n'est pas suffisaem-ment explicite. Cet inconvénient vient surtout de lataxonomie des oiseaux africains, encore très instable.

On trouve à la fin du livre une liste des lieux citésavec leurs coordonnéess (gazeteer) et une bibliogra-phie bien fournie, ce qui est absolument indispensablepour pouvoir utiliser les informations correctement.

L'Ouganda est de plus en plus prisé par les orni-thologues, ce qui normal pour un "petit" pays aussiriche en diversité et à la politique d'écotourisme enplein développement. Pour que ces ornithologues reti-rent un maximum de leurs visites, ils sont besoin d'uneréférence claire et cohérente en plus des traditionnelsguides de terrain, et cette base c'est The Bird Atlas ofUganda. Ce livre à été conçu pour être indispensableau "simple" voyageur qui va en Ouganda comme pourle spécialiste qui étudie l'avifaune ougandaise, et l'ob-jectif est atteint. VSc

GROUPE DES JEUNES DE NOS OISEAUX (2005) : Lesbons coins ornithologiques de Suisse romande. NosOiseaux. 304 pages.

Ce livre est la synthèse de textes descriptifs desites parus dans " Le Héron ", la revue du GdJ deNos Oiseaux. Pas moins de 119 sites y sont passés enrevue; pour chacun, le texte comporte une brève des-cription des biotopes ainsi qu'une une liste des espè-ces pouvant s'y rencontrer au fil des saisons. Desplans précis et le numéro de la carte 1/25.000 com-plètent utilement l'information. L'accès est biendécrit et, petite originalité, met l'accent sur lestransports en commun chaque fois que cela est possi-ble. Le tout est agrémenté d'illustrations dont le stylevarié est dû au nombre de dessinateurs investis dansce projet. Seul petit bémol, une liste synthétique dessites par espèce aurait été la bienvenue, permettantainsi une recherche plus rapide.

Un livre à posséder pour tout qui souhaite se ren-dre dans ce petit pays à l'avifaune contrastée, depuisles anatidés et laridés visibles sur la " mer intérieure" qu'est le Lac Léman jusqu'au Gypaète barbu etautre Tichodrome échelette typiquement monta-gnards. XV

aves, 44/1 (2007) 27

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 27

Page 16: Hiron de rivage 44 1-revu-parLB - Aves

HANACHE, A. & OTTAVIANI, M. (2005 ET 2006) :Monographie des Faisans. 2 vol., 358 et 492 ppW.P.A. France, Clères, France.

L'intérêt porté par l'homme aux gallinacés remon-te sans doute à la nuit des temps, lorsque les premiershominiens se sont mis à chasser. Bien plus tard vint ladomestication, du Coq (rouge / bankiva) tout d'abord,il y a au moins 10.000 ans, puis du Paon, sans doutedeux fois moins ancienne. L'utilisation commeoiseaux "d'ornement" n'a concerné que les plus colo-rés et plus "extravagants" d'entre eux, les faisans et lepaon. Bien que très ancien aussi (au moins 4.000 anspour certains), et souvent lié aussi, autrefois, à despratiques religieuses, cet intérêt ornemental s'est enoutre largement développé au cours des derniers siè-cles. On comprend aisément, dès lors, qu'il soit impos-sible de concevoir un ouvrage sur cette famille remar-quable sans faire largement références aux donnéesobtenues sur les oiseaux en captivité. Certaines espè-ces à l'aire de répartition est réduite ou vivant dans desrégions peu accessibles ne sont d'ailleurs parfoisconnues, sous certains aspects (alimentation, repro-duction�) que grâce aux données de captivité.

L'ouvrage que voici utilise donc largement desinformations, incluant souvent dans le traitement desespèces, un historique et un état de la population cap-tive, et même, plus rarement, quelques conseils pourl'élevage. Un gros chapitre (40 pages) est consacré àla pathologie et un autre (30 p.) à la détention et à l'é-levage. L'ouvrage intéressera donc certainement lesamateurs d'oiseaux d'ornement.

Mais son intérêt ne s'arrête pas là, loin s'en faut.Les auteurs sont en effet respectivement maître deconférence et ancien attaché au Muséum d'HistoireNaturelle de Paris, et par ailleurs directeur du parcscientifique de Clères pour le premier. Les donnéesscientifiques obtenues sur le terrain - personnellementou grâce à de très nombreux collaborateurs - consti-tuent donc la matière de base de leur monographie; etles chapitres sur le statut des populations naturelles etleur conservation sont traités sans ambiguïté. Elle estd'ailleurs publiée par la World Pheasant AssociationFrance, dont les auteurs sont Président et membre, etles produits de sa vente sont destinés à soutenir desprojets de conservation des galliformes.

Le premier chapitre du livre, rédigé par l'italien E.Randi (Instituto Nazionale per la Fauna Selvatica deBologne), présente les relations phylogénétiques et lataxonomie des Phasianidés. Faisant très largementappel aux recherches les plus récentes en biologiemoléculaire (séquençage d'ADN, etc.), il n'est certespas très accessible mais il montre bien la complexitéde cette nouvelle approche de la systématique et desavancées incontestables qu'elle permet. La phylogé-nie est outre traitée séparément au début de chaquesection "genre".

Outre les chapitres évoqués ci-dessus, le traite-ment des espèces (une cinquantaine) constitue le corpsde l'ouvrage (en général une dizaine de pages parespèce : description, distribution, sous-espèces, habi-tat, alimentation, comportement non social puissocial, parade nuptiale, nidification, statut, conserva-tion, statut légal, le cas échéant population captive etélevage. Le Genre Gallus est traité de la même façonmais en annexe car considéré comme bien séparé, surle plan phylogénique, des vrais faisans.

Publié près de trente ans après ses prédécesseurs(Pheasants of the World, de Howman - 1977-1993 - etsa traduction adaptée de Delacour, en 1983), cetouvrage constitue donc une référence inévitable pourla connaissance de cet extraordinaire famille d'oi-seaux, ne fût-ce que pour le traitement systématique,forcément entièrement révisé. Il est en outre en fran-çais, et écrit dans un style simple et agréable, ce qui negâche rien. Mon principal regret concerne l'iconogra-phie. Elle est certes abondante mais elle se base troplargement sur des sujets captifs, y compris pour desespèces relativement abondantes dans la nature. Etmalgré cela, certains clichés d'oiseaux captifs sontencore médiocres� Avec d'aussi beaux sujets, c'estvraiment dommage.

Afin de conserver un maximum de bénéfice àconsacrer aux projets de conservation l�ouvrage estdsitribué directement par la WPA France. (D. Stréhlé,33/(0)4 73 93 46 07, [email protected]).

EC

28 aves, 44/1 (2007)

Hiron de rivage 44 1-revu-parLB.qxp 11/04/2007 14:27 Page 28