Hegel Science Logique

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Bernard Dantier(8 avril 2008) (docteur en sociologie de lcole des Hautes tudes en Sciences Sociales)

Textes de mthodologie en sciences sociales choisis et prsents par Bernard Dantier

Philosophie de la connaissance et connaissance de la philosophie: Hegel, La Science de la logique "G. W. F. Hegel, La science de la logique Encyclopdie des sciences philosophiques (ditions de 1827 et 1830), Paris, Librairie Philosophique Vrin, 1986, traduction de Bernard Bourgeois, pp. 163-184 et pp. 283-293.

Un document produit en version numrique par M. Bernard Dantier, bnvole, Docteur en sociologie de lcole des Hautes tudes en Sciences Sociales Courriel: [email protected] Dans le cadre de la collection: "Les classiques des sciences sociales" dirige et fonde par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie au Cgep de Chicoutimi Site web: http://classiques.uqac.ca/ Une collection dveloppe en collaboration avec la Bibliothque Paul-mile-Boulet de lUniversit du Qubec Chicoutimi Site web: Site web: http://bibliotheque.uqac.ca/

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Un document produit en version numrique par M. Bernard Dantier, bnvole, Docteur en sociologie de lcole des Hautes tudes en Sciences Sociales Courriel: [email protected]

Textes de mthodologie en sciences sociales choisis et prsents par Bernard Dantier:

Philosophie de la connaissance et connaissance de la philosophie: Hegel, La Science de la logique Extrait de: G. W. F. Hegel, La science de la logique Encyclopdie des sciences philosophiques (ditions de 1827 et 1830), Paris, Librairie Philosophique Vrin, 1986, traduction de Bernard Bourgeois, pp. 163-184 et pp. 283-293. Utilisation des fins non commerciales seulement. Polices de caractres utilise: Pour le texte: Times New Roman, 14 points. Pour les notes de bas de page: Times New Roman, 12 points. Citation: Times New Roman, 12 points. dition lectronique ralise avec le traitement de textes Microsoft Word 2004. Mise en page sur papier format: LETTRE (US letter, 8.5 x 11) dition complte Chicoutimi, Ville de Saguenay, Qubec, le 13 avril 2008.

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Textes de mthodologie en sciences sociales choisis et prsents par Bernard Dantier:

Philosophie de la connaissance etconnaissance de la philosophie: Hegel, La Science de la logique Extrait de: G. W. F. Hegel, La science de la logique Encyclopdie des sciences philosophiques (ditions de 1827 et 1830), Paris, Librairie Philosophique Vrin, 1986, traduction de Bernard Bourgeois, pp. 163-184 et pp. 283-293.

Par Bernard Dantier, sociologue (8 avril 2008)

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Philosophie de la connaissance et connaissance de la philosophie: Hegel, La Science de la logique

Sans prtendre puiser les enseignements contenus dans ce riche et complexe texte dont le commentaire rclamerait peut-tre tout un volume, dans cette prsentation nous nous bornerons quelques aspects intressant notre mthodologie des sciences sociales. Contentons-nous ainsi daborder ce texte comme une tude dpistmologie ou de philosophie de la connaissance. Dans le processus qui mne la connaissance vraie de ce qui est, quest-ce qui est et quest-ce qui permet de dire quil y a vrit, et dailleurs que signifie connaissance , qui connat et qui est connu ? On assiste ici une sorte de parcours par le philosophe du parcours de la raison dans son rapport au monde. Remarquons dabord que ce parcours est celui de l Esprit universel, et non pas de chacun des esprits individuels et mortels qui se nourrissent de lui et qui lui apportent en retour une contribution, esprits quil utilise au cours de lhistoire et de par le monde pour accomplir son uvre gnrale. Nous pouvons en dduire que la science laquelle nous participons, que nous pratiquons, nous forme et nous conduit et que tout ce que pouvons y apporter ne peut ltre quautant que cela sinsre dans son mouvement en correspondant au principe et au but de cette science. Il faut savoir que les premires tapes de la connaissance sont toujours destines tre dpasses vers les suivantes, progrs qui sopre par la suppression mais non pas par lanantissement de ce qui a t prcdemment conu comme su et vrai. Le principal nud traiter est la liaison et la non-liaison entre les perceptions immdiates des faits (sensations, motions, sentiments, volonts, reprsentations) et la pense mdiate de ces faits sous forme de

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catgories (ltre, le particulier, le gnral, etc.) et sous forme de structures relationnelles (lois de causalit par exemple). Il sagit dorganiser une relation ordonne entre les deux niveaux, lun ne pouvant tre indpendant de lautre, sous peine de tomber dans les erreurs de lempirisme ou celles du dogmatisme. Le danger qui guette la connaissance consiste sisoler dans le sensible ou dans lintelligible au lieu de les lier. Il y a dj changement la base du rapport: la pense qui prend pour objet un fait sensible le modifie invitablement en en faisant un contenu de pense. Ainsi, dune certaine faon Hegel prvient ici le lecteur des obstacles pistmologiques sur lesquels par exemple Gaston Bachelard prodiguera ses observations et ses conseils. Toutefois, il nest pas question de criticisme . Ltude critique des conditions de la connaissance, telle que Kant la initie, tude cense permettre ensuite un usage plus adapt, plus sr et plus efficace des instruments de la raison, constitue selon Hegel une illusion et une coquetterie manire. En effet, tenter de connatre la connaissance avant den faire usage revient dj commencer le travail de cette connaissance; autant vouloir apprendre nager avant de se risque dans leau . Prtendre prendre connaissance de limites au pouvoir de la raison, cest dj percevoir ce qui va au-del delles et les dpasser, cest nier ces limites tout en les affirmant. Hegel dit lui-mme, plus loin, dans la suite de lextrait que nous donnons, que la dsignation de quelque chose comme quelque chose de fini ou de born contient la preuve de la prsence effective de linfini, du non-born, que le savoir dune limite ne peut tre que dans la mesure o lillimit est de ce ct-ci dans la conscience ( 60). Le but est ici de montrer, lencontre de Kant, quil y a contradiction dune part affirmer quon ne connat que des phnomnes, affirmation dune limite, et dautre part, en consquence fallacieuse, affirmer aussi quon ne peut connatre rien au-del de ces phnomnes, affirmation de limpossibilit de dpasser ces limites. Il sagit donc de connatre la connaissance en connaissant, dans une connaissance totale. Or cest justement le propre de l esprit de se connatre en connaissant et dtre esprit en tant la totalit.

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Dans la dmarche de la science, il ne suffit pas de penser, mais par la rflexion de penser sur ce qui est pens. Lesprit doit produire des penses sur ses penses, dpasser les donnes de la conscience, les reprsentations mmes vers labstraction, vers le concept, le systme total de sens, concept qui correspond au moi en tant que pur sujet, que conscience abstraite de tout, et cela en sopposant ce quil est et ce quil vit immdiatement, dans un mouvement de ngation, afin datteindre, par del son contenu ou son contenant, par del ce quoi il est mlang, par del le relatif, ce quil est vraiment en lui-mme, la pense pure tant ltre luimme dans sa vrit universelle et absolue. Aussi le savoir nest-il pas un donn arrt, un immdiat , mais un construit, une production provenant sans cesse de la ngation dun savoir antrieur qui comporte lui-mme sa propre ngation et trouve sa vrit dans le savoir suivant, mdiatis , dont il permet le dveloppement en se donnant comme ce quil faut dpasser. Au surplus tout savoir dit immdiat, inn, pour peu quil existe vraiment, afin dtre conscient, doit devenir conscient, cest--dire se prendre comme objet, autrement dit se ddoubler et se dpasser en devenant le sujet de lui-mme. Il rclame la mdiatisation de la rflexion (une ducation, un dveloppement) qui toujours apporte une altrit. Tout savoir est ainsi processus de changement. Car il sagit bien dun travail de prise de conscience. La philosophie est conue ici comme une sorte de connaissance de la connaissance, jouant par l aussi le rle de synthse des sciences. D'abord, se refuser au prescriptif pour tre dans le descriptif, connaissance non pas du devant-tre mais de ltant, ltant accompli et en cours daccomplissement, connaissance dun monde , monde autant externe quinterne la conscience. Il ny a pas de vrai admis comme tel qui ne soit dans lexprience, cest-dire qui ne soit uni la certitude de lexistence personnelle du moi qui laccompagne. Cest ainsi que le vrai est li la vrit de la conscience de soi. Le critre de validit de la connaissance rside dans laccord entre ce quelle pense et ce qui est effectif, donn dans lexprience externe ou interne. Par cet accord la raison subjective se retrouve en fait elle-mme sous une forme objective dans

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le monde qui suit la mme raison. Par cette correspondance et cette rencontre la science conduit la pense, qui est lessence de notre tre, la prise de conscience delle-mme. Il sagit ici de parvenir une unit entre la connaissance et le connu, une fusion entre le sujet et lobjet. Le but des sciences, tout en sappuyant sur lexprience empirique, est de mettre jour des lois, des formules valables universellement, des conceptions thoriques qui finalement aboutissent aux penses de ce qui est donn l . Il y a ainsi complmentarit entre philosophie et sciences dites empiriques qui recueillent les faits et leurs relations. Celles-ci laborent la ralit pour la restituer sous diverses formes de comprhension et dexplication, la rendent pensable de la sorte, permettent ainsi au monde de se mettre en rapport avec la pense mais permettent aussi la pense de se mettre en rapport avec le monde, de ne pas rester initialement abstraite , immdiate , de se rendre concrte , de se dvelopper , de se connatre par ce quelle dcouvre, avant de revenir une abstraction cette fois-ci emplie par tout ce quelle a parcouru, assimil et dpass. Il ne faut en effet pas oublier que la pense a besoin de ce quelle dpasse afin davoir un contenu, une existence objective, une ralit, pour finalement se connatre comme objet autant que comme sujet. Le travail de la pense, dans la science, est de rendre lunit ce qui est parpill en multiplicits isoles, juxtaposes simplement dans le temps ou lespace, cest--dire tout ce qui est simplement sensible . Il y a dabord liminer ce qui nest que foncirement contingent, occasionnel effet des accidents, ne correspondant rien de permanent et de gnral, irrel en fait car non vraiment pensable selon les rgles de la pense. Le rel est rationnel comme le rationnel est rel. La pense, la science, instaure la ncessit l o il y a contingence, et cette instauration fait atteindre la libert par del les hasards qui simposent deux-mmes et soumettent la conscience leurs apparitions qui sont comme autant de dcisions indpendantes delle. Dpassant le particulier des faits donns par eux-mmes, la connaissance (scientifique) atteint luniversel, ce qui est partout et toujours. La pense est mme

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luniversel agissant . L, lesprit prend possession de sa libert en ne dpendant que de lui, de ses principes et de ses lois. Les sciences, autant dans leur droulement historique que, une mme poque, dans leur rpartition en diverses disciplines et spcialisations, participent toutes une profonde unit, quil faut reconnatre et utiliser; elles sont les moments complmentaires de la dmarche dune mme connaissance, dun mme esprit. Sous cet aspect, on peut reconnatre entre elles des oppositions, des contradictions qui ne constituent pas des checs sans issue, des apories, mais des tapes rclamant et prparant des tapes suivantes o la synthse se sera enrichie de la thse et de lantithse. De plus, un lment, une partie, que cela soit llment ou la partie dune science ou cette science elle-mme par rapport aux autres sciences, na de sens quen tant reli au Tout, en tant de la sorte un tout, condition qui seule le rend suffisant et vrai. Cest le systme global donc quil faut sans cesse concevoir et non pas la somme dune addition et dune juxtaposition. Aussi voit-on ici se profiler lencouragement, par del les sparations entre les multiples sciences, un ncessaire effort de pluridisciplinarit, puis dinterdisciplinarit et enfin de transdisciplinarit. La recherche en sciences sociales est invite ainsi entrer dans la particularit des faits quelle tudie et la particularit des mthodes et disciplines quelle emploie en reliant cela un tout o le chercheur se doit de tenter, en percevant les limites rciproques, de les dpasser et de les rutiliser par un effort de rassemblement et de conciliation. Nous pouvons, en regardant ce que nous enseigne lhistoire des sciences, voir le besoin et la ralisation de cette exigence dans ces complexes multidisciplinaires et interdisciplinaires qui se forment aprs une forte parcellisation des spcialits scientifiques et qui prennent par exemple les noms de sciences de lducation , sciences du langage , sciences de linformation . A partir dune mme problmatique et dun mme corps dhypothses, diversifier synchroniquement les objets dtude, les mthodes, les disciplines utilises (sociologie, et aussi histoire, anthropologie, linguistique, psychologie, etc.); mais aussi, diachroni-

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quement, ne pas sarrter un rsultat, une somme de savoir qui serait le produit fini et indpassable de la recherche commence, et, au contraire, reprendre ultrieurement cet effet cognitif comme ce qui doit prparer un nouvelle tape de travail de recherche, dpasser les limites, se ddoubler, se prendre comme objet, se faire sujet du sujet que nous tions, faire du savoir acquis lobjet dtude dun nouveau savoir slaborant sur lui. Bernard Dantier, sociologue 8 avril 2008

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G. W. F. Hegel:extrait de

G. W. F. Hegel, La science de la logique Encyclopdie des sciences philosophiques (ditions de 1827 et 1830), Paris, Librairie Philosophique Vrin, 1986, traduction de Bernard Bourgeois, pp. 163-184 et pp. 283293.

1 La philosophie est prive de l'avantage dont profitent les autres sciences, de pouvoir prsupposer ses objets, comme accords immdiatement par la reprsentation, ainsi que la mthode de la connaissance pour commencer et progresser , comme dj admise. Elle a, il est vrai, ses objets tout d'abord en commun avec la religion. Toutes deux ont pour objet la vrit, et cela dans le sens le plus lev, dans celui selon lequel Dieu est la vrit et lui seul est la vrit. Ensuite, toutes deux traitent en outre du domaine du fini, de la Nature et de l'esprit humain, de leur relation l'un l'autre et Dieu comme leur vrit. La philosophie peut bien, par suite, prsupposer une familiarit avec ses objets, et mme elle doit ncessairement en prsupposer une, comme en outre un intrt leur gard; dj pour cette raison que la conscience se fait, dans le temps, des reprsentations des objets avant de s'en faire des concepts, et que, mme, l'esprit pensant n'accde la connaissance et conception pensante qu' travers la reprsentation et en se tournant vers elle. Mais dans le cas de la manire pensante de considrer les choses, il se rvle bientt qu'elle inclut en elle l'exigence de montrer la ncessit de son contenu, de prouver aussi bien dj l'tre, que

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les dterminations de ses objets. Cette familiarit avec ceux-ci dont on vient de parler apparat ainsi comme insuffisante, et faire ou admettre des prsuppositions et des assurances, comme inadmissible. Mais la difficult d'instituer un commencement se prsente par l en mme temps, puisqu'un commencement, en tant qu'il est un immdiat, institue une prsupposition ou bien plutt en est lui-mme une. 2 La philosophie peut tout d'abord tre dtermine en gnral comme une manire pensante de considrer des objets. Mais s'il est exact (et ce sera bien exact) que l'homme se diffrencie de l'animal par la pense, tout ce qui est humain est humain en ce que, et seulement en ce qu'il est produit au moyen de la pense. En tant, cependant, que la philosophie est un mode propre de la pense, un mode par lequel celle-ci devient connaissance et connaissance qui conoit, la pense propre elle aura aussi un caractre diffrent de la pense agissant dans tout ce qui est humain et mme produisant l'humanit de ce qui est humain, tout autant qu'elle lui est identique, et qu'en soi il n'y a qu'une pense. Cette diffrence se rattache au fait que la teneur essentielle humaine fonde grce la pense de la conscience n'apparat pas tout d'abord dans la forme de la pense mais comme sentiment, intuition, reprsentation, formes qui sont diffrencier de la pense en tant que forme. C'est un prjug ancien, une proposition devenue triviale, que l'homme se diffrencie de l'animal par la pense ; cela peut paratre trivial, mais il devrait paratre aussi singulier, s'il tait besoin de rappeler une telle croyance ancienne. Or cela peut tre tenu pour un besoin, tant donn le prjug de l'poque actuelle qui spare l'un de l'autre sentiment et pense de telle sorte qu'ils seraient opposs entre eux, et mme si hostiles, que le sentiment, en particulier le sentiment religieux, serait souill, perverti et mme peut-tre entirement ananti par la pense, et que la religion et la religiosit n'auraient essentiellement pas dans la pense leur racine et leur lieu. Lorsqu'on opre une telle sparation, on oublie que l'homme seulement est capable de religion, mais que l'animal n'a aucune religion, pas plus que droit et moralit ne lui appartiennent.

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Lorsque cette sparation de la religion d'avec la pense est affirme, on voque habituellement la pense qui peut tre dsigne comme rflexion, la pense rflchissante qui a pour contenu et amne la conscience des penses en tant que telles. C'est la ngligence qu'on apporte prendre connaissance et tenir compte de la diffrence indique de faon dtermine par la philosophie concernant la pense, qui suscite les reprsentations et les reproches les plus grossiers contre la philosophie. En tant qu' l'homme seulement appartiennent la religion, le droit et la vie thique, et cela seulement pour cette raison qu'il est un tre pensant, dans ce qui relve de la religion, du droit, de l'thique que ce soit un sentiment et une croyance ou une reprsentation la pense en gnral n'a pas t inactive; son activit et ses productions y sont prsentes et contenues. Mais il y a une diffrence entre avoir de tels sentiments et reprsentations dtermins et pntrs par la pense, et avoir des penses sur eux. Les penses, engendres par le moyen de la rflexion, sur ces premires manires d'tre de la conscience, sont ce sous quoi l'on comprend la rflexion, le raisonnement et des choses de ce genre, ensuite aussi la philosophie. Il est ce sujet arriv, et cette mprise a prdomin encore assez souvent, qu'une telle rflexion a t affirme comme la condition, et mme comme l'unique chemin par lequel nous accderions la reprsentation et la certitude de ce qui est ternel et vrai. Ainsi, par exemple, on a donn les (maintenant plutt anciennes) preuves mtaphysiques de l'tre-l de Dieu en disant que ou en faisant comme si c'tait essentiellement et uniquement par leur connaissance et la conviction qu'on avait d'elles, que la croyance et la conviction de l'tre-l de Dieu pouvaient tre produites. Une telle affirmation s'accorderait avec celle selon laquelle nous ne pourrions pas manger avant d'avoir acquis la connaissance des dterminations chimiques, botaniques ou zoologiques des aliments, et selon laquelle nous devrions attendre de digrer que nous ayions achev l'tude de l'anatomie et de la physiologie. S'il en tait ainsi, ces sciences gagneraient en leur domaine, comme la philosophie dans le sien, vrai dire beaucoup en utilit, et mme, leur utilit serait leve l'indispensabilit absolue et universelle; mais bien plutt, elles toutes, au lieu d'tre indispensables, n'existeraient pas du tout.

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3 Le contenu qui remplit notre conscience, de quelque espce qu'il soit, constitue la dterminit des sentiments, intuitions, images, des buts, devoirs, etc., et des penses et concepts. Sentiment, intuition, image, etc., sont dans cette mesure les formes d'un tel contenu qui reste un seul et mme contenu, qu'il soit senti, intuitionn, reprsent, voulu, et qu'il soit seulement senti, ou bien senti, intuitionn, etc., avec mlange de pense, ou pens totalement sans mlange. Dans une quelconque de ces formes ou dans le mlange de plusieurs, le contenu est objet de la conscience. Mais dans cette objectivit les dterminits de ces formes aussi se joignent au contenu; de sorte que suivant chacune de ces formes un objet particulier semble surgir et que ce qui est en soi la mme chose peut apparatre comme un contenu divers. En tant que les dterminits du sentiment, de l'intuition, de la facult de dsirer, de la volont, etc., dans la mesure o l'on en a un savoir, sont appeles en gnral reprsentations, on peut dire d'une faon gnrale que la philosophie pose la place des reprsentations des penses, des catgories, mais plus prcisment des concepts. Les reprsentations en gnral peuvent tre regardes comme des mtaphores des penses et des concepts. Mais de ce que l'on a des reprsentations, on ne connat pas encore leur signification pour la pense, c'est--dire pas encore leurs penses et leurs concepts. Inversement, ce sont aussi deux choses diffrentes, d'avoir des penses et des concepts, et de savoir quels sont les reprsentations, intuitions et sentiments qui leur correspondent. Un ct de ce que l'on appelle l'inintelligibilit de la philosophie se rapporte cela. La difficult rside pour une part dans une incapacit, qui en soi est seulement un manque d'habitude, de penser abstraitement, c'est--dire de maintenir ferme de pures penses et de se mouvoir en elles. Dans notre conscience habituelle, les penses sont revtues d'une matire courante sensible et spirituelle, et unies elle, et quand nous mditons, rflchissons et raisonnons, nous mlons les sentiments, intuitions et reprsentations avec des penses (dans toute proposition de contenu entirement sensible, comme : Cette feuille est verte , se sont dj immisces des catgories : l'tre, la singularit). Mais autre chose est de faire des penses elles-mmes, hors de tout mlange, l'objet. L'autre facteur

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de l'inintelligibilit est l'impatience que l'on met vouloir avoir devant soi sous le mode de la reprsentation ce qui est dans la conscience en tant que pense et concept. On rencontre l'expression, que l'on ne sait pas ce que l'on doit penser dans un concept qui a t saisi; dans un concept, il n'y a rien de plus penser que le concept lui-mme. Mais le sens de cette expression est une nostalgie d'une reprsentation dj bien connue, courante; il en est pour la conscience comme si avec le mode de la reprsentation lui tait retir le sol sur lequel elle a d'ordinaire son point de station fixe et constituant son chez-soi. Lorsqu'elle se trouve transporte dans la rgion pure des concepts, elle ne sait pas o dans le monde elle est. Ce qu'on trouve par consquent le plus intelligible, ce sont des crivains, des prdicateurs, des orateurs, etc., qui dbitent leurs lecteurs ou auditeurs des choses que ceux-ci savent dj par cur, qui leur sont familires et qui s'entendent d'elles-mmes. 4 Relativement notre conscience commune, la philosophie aurait tout d'abord tablir le besoin de son mode de connaissance propre, ou mme l'veiller. Mais relativement aux objets de la religion, la vrit en gnral, elle aurait dmontrer sa capacit de les connatre partir d'elle-mme; relativement une diversit se faisant jour par rapport aux reprsentations religieuses, elle aurait justifier ses dterminations s'cartant de celles-l. 5 En vue de faire entendre pralablement la diffrence indique et le discernement s'y rattachant que le contenu vrai de notre conscience est conserv dans la transposition de celle-ci dans la forme de la pense et du concept, et mme pos seulement alors dans sa lumire propre, on peut rappeler un autre ancien prjug, savoir que pour exprimenter ce qu'il y a de vrai dans les objets et vnements, et aussi dans les sentiments, intuitions, opinions, reprsentations, etc., une rflexion est requise. Mais la rflexion a au moins en tout cas pour effet de changer les sentiments, reprsentations, etc., en penses. Dans la mesure o c'est seulement la pense que la philosophie revendique pour la forme propre de son entreprise, et o tout homme par nature peut penser, il se prsente, en vertu de cette abstraction qui laisse de ct la diffrence indique au 3, le contraire

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de ce qui a t mentionn tout l'heure comme plainte au sujet de linintelligibilit de la philosophie. Cette science fait souvent l'exprience du mpris en ce sens que mme des gens qui ne se sont pas donn de la peine avec elle, expriment l'ide prsomptueuse qu'ils entendent d'emble ce qu'il en est de la philosophie et sont capables, tels qu'ils sont ainsi avec une culture ordinaire, en particulier en s'appuyant sur des sentiments religieux, de philosopher et de porter des jugements sur elle. On accorde qu'il faut avoir tudi les autres sciences pour les connatre, et que c'est seulement en vertu d'une telle connaissance que l'on est autoris avoir un jugement sur elles. On accorde que pour fabriquer un soulier, il faut l'avoir appris et s'y tre exerc, bien que chacun possde en son pied la mesure de rfrence pour cela, et possde des mains et, en elles, l'aptitude naturelle la tche exige. C'est seulement pour l'acte de philosopher lui-mme qu'une telle tude, un tel apprentissage et un tel effort ne seraient pas exigs. Cette opinion commode a, dans les tout derniers temps, reu sa confirmation avec la thorie du savoir immdiat, savoir par intuition. 6 De l'autre ct, il est aussi important que l'on comprenne au sujet de la philosophie, que son contenu n'est aucun autre que le contenu consistant originairement produit et se produisant dans le domaine de l'esprit vivant, et constitu en monde, monde extrieur et intrieur de la conscience, que son contenu est l'effectivit. La conscience la plus prochaine de ce contenu, nous la nommons exprience. Une considration sense du monde diffrencie dj ce qui du vaste empire de l'tre-l extrieur et intrieur n'est qu'apparition, passager et insignifiant, et ce qui mrite en soi-mme vritablement le nom d'effectivit. En tant que la philosophie ne diffre que suivant la forme d'une autre manire de prendre conscience de cet unique et mme contenu consistant, son accord avec l'effectivit et l'exprience est ncessaire. Et mme, cet accord peut tre regard comme une pierre de touche au moins extrieure de la vrit d'une philosophie, de mme que l'on regarde comme le but final suprme de la science, de susciter grce la connaissance de cet accord la rconciliation de la raison consciente de soi avec la raison qui est, avec l'effectivit.

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Dans la Prface de ma Philosophie du Droit, p. XIX, se trouvent les propositions: Ce qui est rationnel est effectif, et ce qui est effectif est rationnel. Ces propositions simples ont paru choquantes maints esprits et ont rencontr de l'hostilit, et cela mme de la part de gens qui ne veulent pas qu'il soit contest qu'ils possdent de la philosophie et bien sr en outre de la religion. Il est inutile de citer sous ce rapport la religion, car ses enseignements sur le gouvernement divin du monde expriment ces propositions de faon trop dtermine. Mais pour ce qui concerne le sens philosophique, il faut prsupposer assez de culture pour savoir non seulement que Dieu est effectif, qu'il est ce qu'il y a de plus effectif, que lui seul est vritablement effectif, mais encore, eu gard au ct formel, qu'en gnral l'tre-l est pour une part apparition et seulement pour une part effectivit. Dans la vie courante on en vient appeler tout ce dont on a incidemment l'ide, l'erreur, le mal et ce qui appartient ce ct des choses, ainsi que toute existence, quelque rabougrie et passagre qu'elle soit, de faon contingente, une effectivit. Mais mme dj pour une sensibilit ordinaire, une existence contingente ne va pas mriter le nom emphatique de quelque chose d'effectif; le contingent est une existence qui n'a pas une valeur plus grande que celle d'un possible, qui peut ne pas tre tout aussi bien qu'elle est. Mais si j'ai parl d'effectivit, on devrait penser de soimme en quel sens j'emploie ce terme, puisque dans une Logique dtaille j'ai trait aussi de rflectivit et l'ai diffrencie exactement non seulement aussitt du contingent, qui a bien aussi une existence, mais, pour plus de prcision, de l'tre-l, de l'existence et d'autres dterminations. A l'effectivit du rationnel s'opposent dj aussi bien la reprsentation selon laquelle les ides, les idaux ne seraient rien de plus que des chimres, et la philosophie un systme de tels fantmes, que celle selon laquelle inversement les ides et les idaux seraient quelque chose de beaucoup trop excellent pour avoir une effectivit, ou aussi bien quelque chose de trop impuissant pour s'en crer une. Mais la sparation de leffectivit d'avec l'ide est particulirement en faveur dans l'entendement, qui tient les songes de ses abstractions pour quelque chose de vritable et tire vanit du devoir-tre qu'il aime prescrire aussi et surtout

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dans le champ de la politique, comme si le monde l'avait attendu pour apprendre comment il doit tre mais n'est pas; s'il tait comme il doit tre, que resterait-il de la sagesse en avance qu'il affirme avec son devoir-tre ? Lorsqu'il se tourne, avec le devoir-tre, contre des objets, des structures, des tats de choses, etc., pleins de trivialit, extrieurs et passagers, qui peuvent avoir aussi ventuellement pour une certaine poque, pour des cercles particuliers, une importance relative assez grande, il peut bien avoir raison et trouver dans un tel cas beaucoup de choses qui ne correspondent pas des dterminations universelles, justes; qui ne serait pas assez avis pour voir dans ce qui l'entoure beaucoup de choses qui en fait ne sont pas comme elles doivent tre ? Mais cette sagesse avise a tort de s'imaginer qu'avec de tels objets et leur devoir-tre elle se trouve l'intrieur de la science philosophique. Celle-ci a seulement affaire l'Ide, qui n'est pas assez impuissante pour devoir-tre seulement et ne pas tre effective, et par l une effectivit o ces objets, structures, tats de choses, etc., ne sont que le ct extrieur superficiel. 7 En tant que la rflexion en gnral contient tout d'abord le principe (aussi au sens de commencement) de la philosophie, et aprs qu'elle a refleuri en sa subsistance-par-soi dans les temps modernes (aprs l'poque de la rforme luthrienne), alors, en tant que ds le dbut elle ne s'est pas comporte simplement abstraitement, comme dans les dbuts philosophiques des Grecs, mais s'est en mme temps jete sur la matire paraissant sans mesure du monde des phnomnes, le nom de philosophie a t donn tout ce savoir qui s'est occup de la connaissance de la mesure fixe et de l'universel dans l'ocan des singularits empiriques, ainsi que du ncessaire, des lois, dans le dsordre apparent de la masse infinie du contingent, et avec cela en mme temps a emprunt son contenu l'intuition et perception propre de l'extrieur et de l'intrieur, la nature prsente comme l'esprit prsent et au cur de l'homme. Le principe de l'exprience contient la dtermination infiniment importante, que pour admettre et tenir pour vrai un contenu l'homme doit lui-mme y tre prsent, de faon plus prcise, qu'il a trouver un tel contenu en accord avec la certitude de lui-mme et runi avec elle. Il doit y tre prsent, soit seulement avec ses sens

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extrieurs, ou bien avec son esprit plus profond, sa conscience de soi essentielle. Ce principe est la mme chose que ce qui de nos jours a t appel croyance, savoir immdiat, la rvlation dans l'extrieur et surtout dans l'intrieur propre chacun. Nous appelons ces sciences qui ont t nommes philosophie, des sciences empiriques, d'aprs le point de dpart qu'elles adoptent. Mais l'essentiel qu'elles prennent pour but et amnent au jour, ce sont des lois, des propositions universelles, une thorie; les penses de ce qui est donn l. Ainsi la physique newtonienne a t appele Philosophie de la nature , tandis que par exemple Hugo Grotius, en rapprochant les attitudes historiques des peuples les uns vis-vis des autres, et en s'appuyant sur un raisonnement ordinaire, a tabli des principes gnraux, une thorie qui peut tre appele philosophie du droit public extrieur. Le nom de philosophie a encore chez les Anglais gnralement cette destination, Newton a de faon durable la rputation de plus grand philosophe; jusque dans les prix courants des fabricants d'instruments, on voit ces instruments qui ne sont pas placs sous une rubrique particulire d'appareils magntiques, lectriques, les thermomtres, baromtres, etc., appels instruments philosophiques; en vrit, ce n'est pas un assemblage de bois, de fer, etc., mais seulement la pense, que l'on devrait nommer l'instrument de la philosophie 1 . Ainsi en particulier la science que l'on doit aux tout derniers temps de l'conomie politique s'appelle aussi philosophie, ce que nous avons coutume de nommer conomie politique rationnelle ou ventuellement conomie politique de l'intelligence 2 .1 Lui aussi le Journal dit par Thomson porte le titre: Annales de la Philosophie ou magazine de la Chimie, Minralogie, Mcanique, Histoire naturelle, Economie rurale et Arts. On peut partir de l se reprsenter par soi-mme comment sont constitues les matires qui sont appeles ici philosophiques. Parmi les annonces de livres nouvellement parues, j'ai trouv rcemment dans un journal anglais la suivante : The Art of Preserving the Har, on Philosophical Principles, neatly printed in post 8, prie 7 sh. . Par principes philosophiques de la prservation des cheveux on se reprsente vraisemblablement des principes chimiques, physiologiques et autres semblables. 2 Dans la bouche d'hommes d'tat anglais, relativement aux principes gnraux de l'conomie politique, se rencontre souvent l'expression : principes philosophiques , mme dans des exposs publics. Dans la session

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8 Si satisfaisante que soit, tout d'abord, cette connaissance dans le champ qui est le sien, premirement il se rvle encore un autre cercle d'objets qui n'y sont pas compris, la libert, l'esprit, Dieu. On ne peut les trouver sur ce terrain, non pas parce qu'ils n'appartiendraient pas l'exprience ils ne sont pas, il est vrai, expriments de faon sensible, mais ce qui est dans la conscience en gnral, est expriment; c'est mme l une proposition tautologique , mais parce que ces objets se prsentent aussitt suivant leur contenu comme infinis. C'est une proposition ancienne, que l'on a coutume tort d'attribuer Aristote comme si par elle devait tre exprim le point de vue de sa philosophie, que celle-ci : Nihil est in intellectu quod non fuerit in sensu ; il n'y a rien dans la pense, qui n'ait t dans le sens, dans l'exprience. On ne pourrait considrer que comme une mprise le fait pour la philosophie spculative de ne pas vouloir accorder cette proposition. Mais, inversement, elle affirmera aussi bien : Nihil est in sensu, quod non fuerit in intellectu , dans ce sens tout fait gnral, que le Nous et, en une dtermination plus profonde, l'esprit sont la cause du monde, et dans ce sens plus prcis (v. 2), que le sentiment relevant du droit, de l'thique, de la religion, est un sentiment et par l une exprienceparlementaire de 1825 (2 fvrier), Brougham, l'occasion de l'Adresse par laquelle il devait tre rpondu au Discours du Trne, s'exprima ainsi : ...les principes dignes d'un homme d'tat et philosophiques du librechange, car sans aucun doute ils sont philosophiques dont l'adoption a fait fliciter aujourd'hui le Parlement par Sa Majest . Cependant, non seulement ce membre de l'opposition, mais lors du banquet annuel que tenait (le mme mois) la socit des armateurs, sous la prsidence du premier ministre Earl Liverpool, avec ses cts le secrtaire d'Etat Canning et le trsorier-payeur gnral de l'arme Sir Charles Long, le secrtaire d'Etat Canning dclara, en rpliquant au toast port sa sant: Une priode a rcemment commenc dans laquelle les ministres ont eu le pouvoir d'appliquer l'administration de ce pays les justes maximes d'une profonde philosophie. Quelque diffrente que la philosophie anglaise soit de l'allemande, si ailleurs le nom de philosophie n'est employ que comme un surnom et un sarcasme, ou comme quelque chose de hassable, il est toujours rjouissant de le voir encore honor dans la bouche de ministres anglais.

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d'un contenu tel qu'il a sa racine et son sige seulement dans la pense. 9 D'autre part, la raison subjective demande tre aussi satisfaite suivant la forme; cette forme est la ncessit en gnral (v. I). Dans ce type de science dont on a parl plus haut, pour une part l'universel qui s'y trouve contenu, le genre, etc., est pour lui-mme indtermin, non reli pour lui-mme avec le particulier, mais tous deux sont l'un pour l'autre extrieurs et contingents, de mme qu'aussi bien les particularits runies sont pour elles-mmes extrieures et contingentes les unes l'gard des autres. Pour une autre part, les commencements sont toutes sortes d'immdiatets, ltre-trouv , de prsuppositions. Dans les deux cas, satisfaction n'est pas donne la forme de la ncessit. La rflexion, pour autant qu'elle vise satisfaire ce besoin, est la pense proprement philosophique, la pense spculative. En tant qu'elle est en cela une rflexion qui, en sa communaut de nature avec cette premire rflexion dont on a parl, en est en mme temps diffrente, elle a, en dehors des formes qui leur sont communes, aussi des formes propres, dont la forme gnrale est le concept. Le rapport de la science spculative aux autres sciences est dans cette mesure seulement celui-ci, savoir que celle-l ne vient pas laisser de ct le contenu empirique des dernires, mais le reconnat et en fait usage, qu'elle reconnat de mme ce que ces sciences ont d'universel, les lois, les genres, etc., et les utilise pour son propre contenu, mais qu'aussi en outre, dans ces catgories, elle en introduit et fait valoir d'autres. La diffrence se rapporte dans cette mesure uniquement ce changement des catgories. La Logique spculative contient la prcdente Logique et Mtaphysique, conserve les mmes formes-de-pense, lois et objets, mais en mme temps en les formant plus avant et transformant avec d'autres catgories. Du concept au sens spculatif il faut distinguer ce qui est ordinairement nomm concept. C'est suivant le dernier sens, unilatral, qu'on a pos et mille et mille fois rpt, et qu'on a rig en prjug l'affirmation que l'infini ne peut tre saisi au moyen de concepts.

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10 Cette pense qui est celle du mode de connaissance philosophique a besoin elle-mme, et d'tre saisie suivant sa ncessit, et aussi d'tre justifie quant sa capacit de connatre les objets absolus. Mais un tel discernement est lui-mme une connaissance philosophique, qui par suite tombe seulement l'intrieur de la philosophie. Une explication pralable devrait par l tre une explication non philosophique et ne pourrait tre plus qu'un tissu de prsuppositions, assurances et raisonnements, c'est--dire d'affirmations contingentes face auxquelles on pourrait avec le mme droit assurer les affirmations opposes. Un thme principal de la philosophie critique est qu'avant d'entreprendre de connatre Dieu, l'essence des choses, etc., il y aurait examiner pralablement la facult de connatre elle-mme, pour savoir si elle est capable de s'acquitter d'une telle tche; on devrait pralablement apprendre connatre l'instrument, avant d'entreprendre le travail qui doit tre ralis par le moyen de ce dernier; sinon, au cas o il serait insuffisant, toute la peine prise serait dpense en pure perte. Cette pense a paru si plausible qu'elle a suscit la plus grande admiration et approbation, et a ramen la connaissance, de son intrt pour les objets et de son occupation avec eux, elle-mme, l'lment formel. Si pourtant l'on ne veut pas s'illusionner avec des mots, il est facile de voir que l'on peut bien ventuellement examiner et apprcier d'autres instruments d'une autre manire qu'en entreprenant le travail propre auquel ils sont destins. Mais l'examen de la connaissance ne peut se faire autrement qu'en connaissant; dans le cas de ce prtendu instrument, l'examiner ne signifie rien d'autre que le connatre. Mais vouloir connatre avant de connatre est aussi absurde que le sage projet qu'avait ce scolastique, d'apprendre nager avant de se risquer dans l'eau. Reinhold, qui a reconnu la confusion qui rgne dans une telle faon de commencer, a propos comme remde, de commencer provisoirement en philosophant sur le mode hypothtique et problmatique, et de poursuivre ainsi, on ne sait comment, jusqu' ce que plus loin il vienne se produire que l'on ait sur ce chemin atteint le Vrai originaire. Considr de plus prs, ce chemin se ramnerait ce qui est courant, savoir l'analyse d'une assise fon-

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damentale empirique ou d'une supposition provisoire mise en une dfinition. On ne peut mconnatre qu'une conscience juste soit implique dans le fait de qualifier la dmarche courante des prsuppositions et affirmations provisoires, de procd hypothtique et problmatique. Seulement ce discernement juste ne change pas la nature d'un tel procd, mais exprime aussitt ce qu'il a d'insuffisant. 11 On peut plus prcisment dterminer le besoin de la philosophie en disant que, tandis que l'esprit a pour objets, en tant que sentant et intuitionnant : du sensible, en tant que fantaisie cratrice: des images, en tant que volont: des buts, etc., en s'opposant ces formes de son tre-l et de ses objets ou simplement en se diffrenciant d'elles, il donne satisfaction aussi son intriorit la plus haute, la pense, et fait de la pense son objet. Il vient ainsi luimme, au sens le plus profond du terme, car son principe, son treen-Soi pur de tout mlange est la pense. Mais dans cette entreprise, il arrive que la pense s'embrouille dans des contradictions, c'est--dire se perde dans la non-identit fixe des penses, par consquent ne s'atteigne pas elle-mme, et bien plutt reste prise dans son contraire. Le besoin plus lev va contre ce rsultat de la pense qui relve seulement de l'entendement, et il est fond en ce que la pense ne se dlaisse pas, reste fidle elle-mme dans cette perte consciente de son tre-chez-soi, afin qu'elle vainque , accomplisse dans la pense elle-mme la rsolution de ses propres contradictions. Le discernement que la nature de la pense elle-mme est la dialectique consistant en ce qu'elle doit ncessairement en tant qu'entendement tomber dans le ngatif d'elle-mme, dans la contradiction, constitue un ct capital de la Logique. La pense dsesprant de pouvoir partir d'elle-mme effectuer aussi la rsolution de la contradiction dans laquelle elle s'est pose elle-mme, revient aux solutions et apaisements qui ont chu en partage l'esprit dans certaines autres de ses manires d'tre et de ses formes. La pense, toutefois, n'aurait pas besoin, lors de ce retour, de sombrer dans la misologie, dont Platon a dj eu l'exprience sous les yeux, et de se conduire de faon polmique lencontre de soimme, ainsi que cela se produit dans l'affirmation de ce que l'on

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appelle le savoir immdiat comme de la forme exclusive de la conscience de la vrit. 12 La naissance de la philosophie, qui procde du besoin cit, a l'exprience, la conscience immdiate et raisonnante pour point de dpart. Stimule par elle comme par un excitant, la pense se conduit essentiellement de telle sorte qu'elle s'lve au-dessus de la conscience naturelle, sensible et raisonnante, dans l'lment sans mlange qui est le sien, et se donne ainsi tout d'abord un Rapport d'loignement, de ngation, avec ce commencement. Elle trouve ainsi en elle, dans l'ide de l'essence universelle de ces phnomnes, tout d'abord sa satisfaction ; cette ide (l'Absolu, Dieu) peut tre plus ou moins abstraite. Inversement, les sciences de l'exprience apportent avec elles la stimulation vaincre la forme dans laquelle la richesse de leur contenu est offerte comme quelque chose qui est seulement immdiat et trouv, fait d'une multiplicit d'lments placs les uns ct des autres, par suite d'une faon gnrale contingent, et lever ce contenu la ncessit, cette stimulation arrache la pense cette universalit-l, ainsi qu' la satisfaction procure seulement en soi, et la pousse au dveloppement partir de soi. Celui-ci est d'une part seulement un accueil du contenu et de ses dterminations offertes la vue, et d'autre part il donne ce contenu la figure consistant pour lui venir au jour librement au sens de la pense originaire, seulement suivant la ncessit de la Chose mme. Du rapport de l'immdiatet et de la mdiation dans la conscience, on aura parler plus bas expressment et avec plus de dtails. En attendant, il n'y a ici qu' appeler l'attention sur ce pointci, savoir que si les deux moments apparaissent aussi comme diffrents, aucun des deux ne peut faire dfaut, et qu'ils sont dans une liaison indissociable. Ainsi, le savoir de Dieu, comme de tout supra-sensible en gnral, renferme essentiellement une lvation au-dessus de l'impression ou intuition sensible; il renferme par l un comportement ngatif l'gard de ce premier terme, et en cela la mdiation. Car la mdiation est un acte consistant commencer et avoir progress jusqu' un deuxime terme, de telle sorte que ce deuxime terme n'est que dans la mesure o l'on est parvenu lui partir d'un terme autre par rapport lui. Mais en

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cela, le savoir de Dieu n'est pas moins subsistant-par-soi vis--vis de ce ct empirique dont on vient de parler, et mme il se donne sa subsistance-par-soi essentiellement par le moyen de cette ngation et lvation. Si l'on fait de la mdiation la conditionnante et si on la fait ressortir unilatralement, on peut dire mais il n'est pas dit grand-chose par l que la philosophie doit l'exprience ( l'a posteriori) sa premire origine en fait la pense est essentiellement la ngation de quelque chose d'immdiatement prsent , tout autant que l'on doit le manger aux aliments, car sans ceuxci l'on ne pourrait pas manger; le manger est, vrai dire, sous ce rapport, reprsent comme ingrat, car il est l'acte de consommer ce quoi il doit tre redevable de lui-mme. La pense est en ce sens non moins ingrate. Mais l'immdiatet propre, rflchie en elle-mme, par suite mdiatise en elle-mme, de la pense (l'a priori) est l'universalit, son tre-chez-soi en gnral ; en celle-ci elle est satisfaite en ellemme, et dans cette mesure l'indiffrence l'gard de la particularisation, et par l l'gard de son dveloppement, lui est congnitale. De mme que la religion, qu'elle soit plus dveloppe ou plus inculte, acheve en conscience scientifique ou maintenue dans la navet de la croyance et du cur, possde la mme nature intensive de la satisfaction et de l'enivrement qui rend bienheureux. Lorsque la pense s'en tient l'universalit des Ides comme c'est ncessairement le cas dans les premires philosophies (par exemple, l'tre de l'cole d'EIe, au devenir d'Heraclite, etc.) , il lui est reproch bon droit du formalisme; mme dans le cas d'une philosophie dveloppe, il peut arriver que l'on apprhende seulement les propositions ou dterminations abstraites, par exemple que dans l'absolu tout est un, l'identit du subjectif et de l'objectif, et qu'au niveau du particulier on rpte seulement celles-l. Par rapport la premire universalit abstraite de la pense, c'est en un sens juste et plus profond, que la philosophie est redevable de son dveloppement l'exprience. Les sciences empiriques, d'une part, n'en restent pas la perception des singularits du phnomne, mais, en pensant, elles ont labor la matire pour la philosophie en venant au-devant d'elle, en tant qu'elles trouvent les dterminations universelles, les genres et les lois; elles prparent ainsi ce premier contenu du particulier pouvoir tre accueilli dans la phi-

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losophie. D'autre part, elles contiennent par l l'obligation pour la pense, de progresser elle-mme jusqu' ces dterminations concrtes. L'accueil de ce contenu dans lequel, grce la pense, l'immdiatet encore adhrente et l'tre-donn sont supprims, est en mme temps un dveloppement de la pense partir d'ellemme. Tandis que la philosophie doit ainsi son dveloppement aux sciences empiriques, elle donne leur contenu la figure plus essentielle de la libert (de l'a priori) de la pense et la vrification de la ncessit, au lieu de l'attestation du trouver-l et du fait d'exprience, de faon que le fait devienne la prsentation et la reproduction de l'activit originaire et parfaitement subsistante-par-soi de la pense. 13 C'est sous la figure propre d'une histoire extrieure que la naissance et le dveloppement de la philosophie sont reprsents comme histoire de cette science. Cette figure donne aux degrs du dveloppement de l'Ide la forme d'une succession contingente et ventuellement d'une simple diversit des principes et de leurs ralisations dans les philosophies qu'ils rgissent. Mais le matre d'uvre de ce travail millnaire est l'Esprit vivant un dont la nature pensante consiste amener sa conscience ce qu'il est, et, en tant que cet tre est ainsi devenu objet, tre en soi-mme du mme coup dj lev au-dessus de celui-ci et tre en soi-mme un degr suprieur. L'histoire de la philosophie fait voir dans les philosophies qui apparaissent diverses, pour une part, seulement une philosophie une des degrs divers de son dveloppement, pour une autre part, que les principes particuliers dont chacun fut au fondement d'un systme ne sont que des rameaux d'un seul et mme Tout. La philosophie la dernire dans le temps est le rsultat de toutes les philosophies prcdentes et doit par consquent ncessairement contenir les principes de toutes; c'est pourquoi elle est, si toutefois elle est de la philosophie, la plus dveloppe, la plus riche et la plus concrte. tant donn l'apparence des si nombreuses, si diverses philosophies, il faut diffrencier l'universel et le particulier suivant leur dtermination propre. L'universel, pris formellement et pos ct du particulier, devient lui-mme aussi quelque chose de particulier. Une telle position, dans le cas d'objets de la vie courante, frapperait

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d'elle-mme comme inadquate et maladroite, comme si par exemple quelqu'un qui rclamait des fruits, repoussait cerises, poires, raisins, etc., sous prtexte que ce seraient l des cerises, des poires, des raisins, mais non pas des fruits. Mais eu gard la philosophie, on se permet de justifier le ddain o on la tient, par la raison qu'il y a de si diverses philosophies et que chacune n'est qu'une philosophie, non la philosophie, comme si les cerises elles aussi n'taient pas des fruits. Il arrive aussi qu'on place une philosophie dont le principe est l'universel ct de philosophies dont le principe est un principe particulier, voire mme ct de doctrines qui assurent qu'il n'y a pas du tout de philosophie, au sens o les deux cts seraient seulement des visions diverses de la philosophie, peu prs comme si la lumire et l'obscurit taient appeles deux espces diverses de la lumire. 14 Le mme dveloppement de la pense, qui est expos dans l'histoire de la philosophie, est expos dans la philosophie ellemme, mais libr de cette extriorit historique, purement dans l'lment de la pense. La pense libre et vraie est en elle-mme concrte, et ainsi elle est Ide, et, en son universalit totale, l'Ide ou l'absolu. La science de ce dernier est essentiellement systme, parce que le vrai en tant que concret est seulement en tant qu'il se dploie en lui-mme et se recueille et retient dans l'unit, c'est-dire en tant que totalit, et c'est seulement par la diffrenciation et la dtermination de ses diffrences que peuvent exister la ncessit de ces dernires et la libert du Tout. Une dmarche philosophique sans systme ne peut rien tre de scientifique; outre que pour elle-mme une telle dmarche philosophique exprime davantage une manire de penser subjective, elle est, suivant son contenu, contingente. Un contenu a seulement comme moment du Tout sa justification, mais, en dehors de ce dernier, a une prsupposition non fonde ou une certitude subjective; de nombreux crits philosophiques se bornent exprimer d'une telle faon seulement des manires de voir et des opinions. Par systme on entend faussement une philosophie ayant un principe born, diffrent d'autres principes; c'est au contraire le principe d'une philosophie vraie, que de contenir en soi tous les principes particuliers.

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15 Chacune des parties de la philosophie est un Tout philosophique, un cercle se fermant en lui-mme, mais l'Ide philosophique y est dans une dterminit ou un lment particuliers. Le cercle singulier, parce qu'il est en lui-mme totalit, rompt aussi la borne de son lment et fonde une sphre ultrieure; le Tout se prsente par suite comme un cercle de cercles, dont chacun est un moment ncessaire, de telle sorte que le systme de leurs lments propres constitue l'Ide tout entire, qui apparat aussi bien en chaque lment singulier. 16 En tant qu'encyclopdie, la science n'est pas expose dans le dveloppement dtaill de sa particularisation, mais doit tre borne aux lments initiaux et aux concepts fondamentaux des sciences particulires. Combien de parties spciales il faut pour constituer une science particulire, c'est indtermin pour autant que la partie ne peut absolument pas tre un moment isol en sa singularit, mais doit ncessairement tre elle-mme une totalit, pour tre quelque chose de vrai. Le Tout de la philosophie constitue par suite vritablement une science une, mais elle peut tre regarde aussi comme un Tout de plusieurs sciences particulires. L'encyclopdie philosophique se diffrencie d'une autre, ordinaire, encyclopdie, en ce que celleci doit tre peu de choses prs un agrgat des sciences, qui sont accueillies de faon contingente et empirique, et parmi lesquelles il y en a aussi qui ne font que porter le nom de sciences, mais sont elles-mmes par ailleurs une simple collection de connaissances. L'unit en laquelle, dans un tel agrgat, les sciences sont rassembles, est, parce qu'elles sont accueillies de faon extrieure, pareillement une unit extrieure, un ordre. Celui-ci doit ncessairement, pour la mme raison et en outre parce que les matriaux eux aussi sont de nature contingente, rester un essai et montrer toujours des cts inadquats. Car outre que l'encyclopdie philosophique 1) exclut de simples agrgats de connaissances comme par exemple la philologie apparat tout d'abord , elle exclut de mme aussi indpendamment de cela 2) des agrgats de connaissances qui ont leur fondement le simple arbitraire, comme par exemple l'hraldique; des sciences de la dernire espce sont

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les sciences de part en part positives. 3) On nomme aussi positives d'autres sciences qui, pourtant, ont un fondement et commencement rationnel. Cette partie constitutive appartient la philosophie, mais le ct positif leur reste propre. Ce qu'il y a de positif dans les sciences est d'espce diverse. 1) Leur commencement en soi rationnel passe dans le contingent, pour autant qu'elles ont faire descendre l'universel dans la singularit et effectivit empirique. Dans ce champ de la variabilit et de la contingence on ne peut faire valoir le concept, mais seulement des raisons. La science du droit, par exemple, ou le systme des impts directs et indirects exigent des dcisions ultimes dtailles qui ont leur lieu en dehors de l'tre-dtermin-en-et-pour-soi du concept, et par suite permettent une latitude pour la dtermination, qui peut tre saisie, suivant une raison, de telle faon, et, suivant une autre, de telle autre, et ne peut comporter aucun caractre ultime assur. De mme l'Ide de la Nature se perd dans sa singularisation en des contingences, et l'histoire naturelle, la gographie, la mdecine, etc. tombent dans des dterminations de l'existence, dans des espces et des diffrences qui sont dtermines par un hasard extrieur et par le jeu [des choses], non par le moyen de la raison. L'histoire aussi rentre dans ce cas pour autant que, si l'Ide est son essence, son apparition est nanmoins dans la contingence et dans le champ de l'arbitraire. 2) De telles sciences sont positives aussi dans la mesure o elles ne reconnaissent pas leurs dterminations pour -finies et ne montrent pas le passage de ces dernires et de leur sphre tout entire dans une sphre plus haute, mais les admettent comme absolument valables. A cette finit de la forme comme la premire tait la finit de la matire , se rattache 3) celle du fondement de la connaissance, qui est pour une part le raisonnement, pour une autre part le sentiment, la croyance, l'autorit d'autres instances, d'une faon gnrale l'autorit de l'intuition intrieure ou extrieure. La philosophie aussi qui veut se fonder sur l'anthropologie, les faits de la conscience, l'intuition intrieure ou l'exprience extrieure, rentre dans ce cas. 4) II peut, encore se faire que c'est simplement la forme de l'exposition scientifique qui est empirique, mais que l'intuition pleine de sens ordonne ce qui n'est que phnomnes d'une manire conforme ce qu'est la suite intrieure du concept. Il appartient une telle empirie, que du fait de l'opposition et de la multiplicit varie des phnomnes rapprochs, les dtails extrieurs,

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contingents, des conditions se suppriment, ce qui permet alors l'universel de se prsenter devant le sens. Une physique exprimentale, une histoire, etc., faite avec sens, exposera de cette manire la science rationnelle de la nature ainsi que des vnements et actes humains dans une image extrieure, refltant le concept. 17 Pour ce qui est du commencement que la philosophie a instaurer, elle semble en gnral commencer avec une prsupposition subjective, comme les autres sciences, c'est--dire tre contrainte de faire d'un objet particulier tout comme c'est ailleurs l'espace, le nombre, etc., ici c'est la pense l'objet de la pense. Mais c'est l'acte libre de la pense que de se placer au point de vue o elle est pour elle-mme et en cela se cre et se donne elle-mme son objet. Ensuite, ce point de vue qui apparat comme point de vue immdiat doit ncessairement l'intrieur de la science se faire le rsultat et, en vrit, le rsultat ultime de celle-ci, dans lequel elle atteint nouveau son commencement et retourne en elle-mme. De cette manire la philosophie se montre comme un cercle revenant en lui-mme, qui n'a aucun commencement au sens des autres sciences, de telle sorte que le commencement est seulement une relation au sujet, en tant que celui-ci veut se dcider philosopher, mais non la science comme telle. Ou, ce qui est la mme chose, le concept de la science, et par consquent le premier concept et parce qu'il est le premier, il contient la sparation consistant en ce que la pense est objet pour un sujet philosophant (en quelque sorte extrieur) doit ncessairement tre saisi par la science elle-mme. C'est mme l'unique fin, opration et vise de celle-ci, que de parvenir au concept de son concept, et ainsi son retour en elle-mme et sa satisfaction. 18 De mme que d'une philosophie on ne peut donner une reprsentation prliminaire, gnrale, car c'est seulement le Tout de la science qui est l'exposition de l'Ide, de mme aussi sa division ne peut tre conue qu' partir de celle-ci; elle est comme celle-ci, d'o elle est tirer, quelque chose d'anticip. Mais l'Ide s'avre comme la pense absolument identique soi, et celle-ci en mme temps comme l'activit de s'opposer soi-mme soi pour tre pour soi, et d'tre, dans cet Autre, seulement auprs de soi-mme. Ainsi, la science se dcompose dans les trois parties que sont:

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1" La Logique, la science de l'Ide en et pour soi; 2 La Philosophie de la Nature, en tant qu'elle est la science de l'Ide en son tre-autre; 3 La Philosophie de l'Esprit, en tant que l'Ide qui, de son treautre, fait retour en soi-mme. Il a t remarqu plus haut, au 15, que les diffrences des sciences philosophiques particulires ne sont que des dterminations de l'Ide elle-mme, et c'est seulement celle-ci qui s'expose en ces lments divers. Dans la nature, ce n'est pas quelque chose d'autre que l'Ide qui serait connu, mais elle y est dans la forme de l'alination, tout comme dans l'Esprit c'est la mme Ide qui est en tant qu'tant pour soi et que devenant en et pour soi. Une telle dtermination dans laquelle l'Ide apparat, est en mme temps un moment qui s'coule; c'est pourquoi la science singulire consiste, tout autant que dans le fait de connatre son contenu comme objet qui est, aussi dans le fait de connatre immdiatement en lui son passage dans sa sphre suprieure. C'est pourquoi la reprsentation de la division a ceci d'incorrect, qu'elle place les parties ou sciences particulires les unes ct des autres, comme si elles taient seulement des parties immobiles et, dans leur diffrenciation, substantielles, telles des espces.

CONCEPT PRLIMINAIRE 19 La Logique est la science de lide pure, c'est--dire de l'Ide dans l'lment abstrait de la pense. Pour cette dtermination, comme pour d'autres dterminations contenues dans ce Concept prliminaire, est valable la mme chose qui est valable pour les concepts avancs au pralable concernant la philosophie en gnral, savoir qu'ils sont des dterminations puises partir de et la suite de la vue d'ensemble du tout. On peut bien dire que la Logique est la science de la pense, de ses dterminations et lois, mais la pense comme telle constitue seulement la dterminit universelle ou l'lment dans laquelle est l'Ide en tant que logique. L'Ide est la pense, non pas

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en tant que pense formelle mais en tant qu'elle est la totalit en dveloppement de ses dterminations et lois propres, qu'elle se donne elle-mme, qu'elle n'a pas et ne trouve pas dj l en ellemme. La Logique est la science la plus difficile dans la mesure o elle n'a pas affaire des intuitions, pas mme comme la gomtrie des reprsentations sensibles abstraites, mais des abstractions pures, et o elle exige une force et pratique experte qui permette de se retirer dans la pense pure, de la maintenir ferme et de se mouvoir en une telle pense. De l'autre ct, elle pourrait tre regarde comme la plus facile, parce que le contenu n'est rien d'autre que la pense propre [de chacun] et ses dterminations courantes, et que celles-ci sont en mme temps les plus simples et ce qu'il y a d'lmentaire. Elles sont aussi ce qu'il y a de mieux connu : l'tre, le nant, etc., la dterminit, la grandeur, etc., l'tre-en-soi, l'trepour-soi, l'un, le multiple, etc. Pourtant, ce fait d'tre bien connue rend plutt plus difficile l'tude de la Logique; pour une part, on considre aisment qu'il ne vaut pas la peine de s'occuper encore d'une telle chose bien connue; pour une autre part, il s'agit de se la rendre bien connue d'une manire tout autre qu'on ne l'a dj fait, et mme d'une manire oppose. L'utilit de la Logique concerne le rapport au sujet, pour autant qu'il se donne une certaine formation en vue d'autres buts. La formation de ce sujet au moyen de la Logique consiste en ce qu'il devient expert dans la pratique de la pense, parce que cette science est la pense de la pense, et en ce qu'il reoit en sa tte les penses, et encore en tant que penses. Mais dans la mesure o le logique est la forme absolue de la vrit et, plus encore que cela, aussi la vrit pure elle-mme, il est tout fait autre chose que simplement quelque chose d'utile. Mais comme ce qui est le plus excellent, le plus libre et le plus indpendant est aussi ce qui est le plus utile, le logique lui aussi peut tre saisi ainsi. Son utilit est alors estimer encore en un autre sens que celui d'tre simplement l'exercice formel de la pense. 20 Si nous prenons la pense selon la reprsentation immdiate que l'on s'en fait, elle apparat ) tout d'abord dans sa significa-

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tion habituelle, subjective, comme l'une des activits ou facults de l'esprit, ct d'autres: la sensibilit, l'intuition, l'imagination, etc., la facult de dsirer, le vouloir, etc. Son produit, la dterminit ou forme de la pense, est l'universel, l'abstrait en gnral. La pense, en tant qu'elle est l'activit, est par consquent l'universel agissant, et, vrai dire, l'universel se produisant en son action, en tant que l'effet, ce qui est produit, est prcisment l'universel. La pense, reprsente comme sujet, est un tre pensant, et l'expression simple du sujet existant, comme tre pensant, est: Moi. Les dterminations indiques ici et dans les paragraphes suivants ne peuvent tre prises comme des affirmations et comme mes opinions sur la pense; toutefois, puisque, dans cette manire d'en parler au pralable, aucune dduction ou preuve ne peut trouver place, elles peuvent tre regardes comme des Faits, de telle sorte que dans la conscience d'un chacun, pour peu qu'il ait des penses et qu'il les considre, il se trouve dj l empiriquement que le caractre de l'universalit et de mme pareillement les dterminations qui suivent, y sont prsentes. Une culture dj prsente de l'attention et de l'abstraction est assurment requise pour l'observation [par chacun] de Faits de sa conscience et de ses reprsentations. Dj dans cette exposition prliminaire, on vient parler de la diffrence entre [donne] sensible, reprsentation et pense; elle est dcisive pour la saisie de la nature et des modes de la connaissance; il servira donc l'claircissement [des choses], de rendre ici aussi dj perceptible cette diffrence. Pour le sensible, c'est tout d'abord son origine extrieure les sens ou organes des sens qui est prise pour l'expliquer. Seulement, la dnomination de l'organe ne donne aucune dtermination pour ce qui est saisi par l. La diffrence du sensible d'avec la pense est placer en ce que la dtermination | de celui-l est la singularit, et, en tant que le singulier (de faon tout fait abstraite: l'atome) est pris aussi dans la connexion, le sensible est un tre-l'un-hors-de-l'autre dont les formes abstraites plus prcises sont l'tre-l'un--ct-de-l'autre et ltre-l'un--la-suite-de-lautre. L'acte de la reprsentation a une telle matire sensible pour contenu, mais pose dans la dtermination du Mien , en ce sens qu'un tel contenu est en Moi, et de l'universalit, de la relation--soi, de la simplicit. Outre le

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sensible, la reprsentation a toutefois aussi pour contenu une matire qui [est] issue de la pense consciente de soi, comme les reprsentations de ce qui appartient au droit, l'thique, la religion, et aussi de la pense elle-mme, et il n'est pas si facile de saisir o il faut situer la diffrence entre de telles reprsentations et les penses d'un tel contenu. Ici, le contenu est une pense tout autant qu'est aussi prsente la forme de l'universalit, qui est requise dj pour qu'un contenu soit en Moi, d'une faon gnrale pour qu'il soit une reprsentation. Mais le caractre propre de la reprsentation est placer en gnral, sous cet aspect aussi, dans ce fait qu'en elle un tel contenu se tient pareillement isol en sa singularit. Le droit, les dterminations du droit et de ralits du mme genre ne se tiennent pas, il est vrai, dans l'extriorit sensible rciproque [des parties] de l'espace. Selon le temps elles apparaissent bien peut-tre les unes aprs les autres, toutefois leur contenu lui-mme n'est pas reprsent comme affect par le temps, s'coulant en lui et changeant. Mais de telles dterminations en soi spirituelles se tiennent galement isoles en leur singularit dans le vaste champ de l'universalit intrieure, abstraite, de l'acte de la reprsentation en gnral. Elles sont, en cette singularisation isolante, simples; le droit, le devoir, Dieu. Or, la reprsentation, ou bien s'en tient ce que le droit est le droit, Dieu est Dieu, ou bien, plus cultive, avance des dterminations, par exemple que Dieu est le crateur du monde, qu'il est souverainement sage, tout-puissant, etc.; ici sont mises aussi les unes la suite des autres plusieurs dterminations simples isoles en leur singularit, qui, en dpit de la liaison qui leur est assigne d?,ns le sujet qui est le leur, restent extrieures les unes aux autres. La reprsentation se rencontre ici avec l'entendement, qui ne se diffrencie de celle-l qu'en ce qu'il pose des Rapports d'universel particulier ou de cause effet, etc., et par l des relations de ncessit entre les dterminations isoles de la reprsentation, alors que celle-ci les laisse dans son espace indtermin les unes ct des autres, lies par le simple aussi . La diffrence entre reprsentation et pense a l'importance la plus immdiate, puisqu'on peut dire d'une faon gnrale que la philosophie ne fait rien d'autre que changer les reprsentations en penses, mais, il est vrai, ultrieurement, la simple pense en concept.

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Du reste, si pour le sensible les dterminations de la singularit et de l'tre-l'un-hors-de-l'autre ont t avances, on peut encore ajouter que celles-ci aussi elles-mmes sont leur tour des penses et des universels; dans la Logique il se rvlera que la pense et l'universalit est prcisment ceci, savoir qu'elle est elle-mme et son Autre, a prise sur celui-ci, et que rien ne lui chappe. En tant que le langage est l'uvre de la pense, en lui aussi rien ne peut tre dit, qui ne soit universel. Ce que je ne fais que viser est mien, m'appartient en tant que je suis cet individu particulier ; mais si le langage n'exprime que de l'universel, je ne puis dire ce que je ne fais que viser. Et l'indicible sentiment, sensation n'est pas ce qu'il y a de plus excellent, de plus vrai, mais ce qu'il y a de plus insignifiant, de moins vrai. Quand je dis: le singulier , ce singulier-ci , ici , maintenant , ce ne sont l que des universels; tout tre et chaque tre est un singulier, un ceci, et aussi, s'il est sensible, un ici, un maintenant. De mme, quand je dis : Moi , je me vise comme celui-ci qui exclut tous les autres, mais ce que je dis: Moi, chacun prcisment l'est; un Moi qui exclut de lui tous les autres. Kant s'est servi de l'expression maladroite, que le Moi accompagne toutes mes reprsentations, galement mes sensations, dsirs, actions, etc. Le Moi est ce qui est en et pour soi universel, et la communaut est aussi une forme, mais une forme extrieure, de l'universalit. Tous les autres hommes ont en commun avec moi, d'tre un Moi, de mme qu'il appartient en commun toutes mes sensations, reprsentations, etc., d'tre les miennes. Mais le Moi, pris abstraitement en tant que tel, est la pure relation soi-mme, dans laquelle il est fait abstraction de la reprsentation, du sentir, de tout tat comme de toute particularit de la nature, du talent, de l'exprience, etc. Le Moi est dans cette mesure l'existence de l'universalit totalement abstraite, ce qui est abstraitement libre. C'est pourquoi le Moi est la pense en tant que sujet, et, en tant que Moi, je suis la fois dans toutes mes sensations, reprsentations, tous mes tats, etc., la pense est partout prsente et traverse en tant que catgorie toutes ces dterminations. 21 ) En tant que la pense est prise comme active relativement des objets la rflexion sur quelque chose , l'universel,

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en tant qu'il est un tel produit de son activit, contient la valeur de la Chose, l'essentiel, l'intrieur, le vrai. On a cit dans le 5 la vieille croyance considrant que ce qu'il y a de vrai dans des objets, des manires d'tre constitu, des vnements, l'intrieur, l'essentiel, la Chose qui importe ne se trouve pas immdiatement dans la conscience, n'est pas dj ce qu'offre la premire apparence et ide venue, mais qu'il faut pralablement rflchir l-dessus pour accder la constitution vritable de l'objet, et que ce but est atteint au moyen de la rflexion. 22 ) Du fait de la rflexion, quelque chose est chang dans la manire selon laquelle le contenu est tout d'abord dans la sensation, l'intuition, la reprsentation; c'est par consquent seulement par l'intermdiaire d'un changement, que la nature vraie de l'objet parvient la conscience. 23 ) En tant que, dans la pense rflchissante, la nature vraie vient au jour tout autant que cette pense est mon activit, cette nature vraie est tout autant le produit de mon esprit et cela en tant qu'il est sujet pensant , de moi selon mon universalit simple en tant que Moi qui est chez soi absolument , ou de ma libert. On peut entendre souvent l'expression: penser par soi-mme, comme si par l tait dit quelque chose d'important. En ralit, personne ne p"eut penser pour autrui, pas plus que manger et boire [pour lui]; cette expression est par consquent un plonasme. Dans la pense rside immdiatement la libert, parce qu'elle est l'activit de l'universel, un se-rapporter--soi en cela abstrait, un tre-chez-soi dpourvu de dtermination selon la subjectivit, [et] qui, selon le contenu, est en mme temps seulement dans la Chose et ses dterminations. Si donc il est question d'humilit ou modestie et d'orgueil, relativement l'acte de philosopher, et si l'humilit ou modestie consiste ne rien attribuer de particulier, en fait de proprit et d'activit, sa subjectivit [propre], l'acte de philosopher sera pour le moins dclarer exempt d'orgueil, en tant que la pense, suivant le contenu, n'est vraie que dans la mesure o elle est plonge dans la Chose, et, suivant la forme, n'est pas un tre ou

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agir particulier du sujet, mais prcisment ceci, savoir que la conscience se comporte comme Moi abstrait, comme libre de toute particularit appartenant des proprits, tats, etc. donns par ailleurs, et n'accomplit que l'universel, dans lequel elle est identique toutes les consciences individuelles . Si Aristote invite se maintenir digne d'un tel comportement, la dignit que se donne la conscience consiste prcisment laisser se dissiper l'opinion et l'avis particuliers et laisser rgner la Chose en soimme. 24 Les penses peuvent, suivant ces dterminations, tre appeles des penses objectives, parmi lesquelles on a compter aussi les formes qui habituellement sont tout d'abord tudies dans la Logique ordinaire et prises seulement pour des formes de la pense consciente. La Logique concide par consquent avec la Mtaphysique, la science des choses, saisies en des penses qui passaient pour exprimer les essentialits des choses. Le rapport de formes telles que le concept, le jugement et le syllogisme, d'autres [formes], comme la causalit, etc., ne peut se dgager qu' l'intrieur de la Logique elle-mme. Mais ce qu'il faut bien discerner aussi pralablement, c'est qu'en tant que la pense cherche se faire des choses un concept, ce concept (et avec lui aussi ses formes les plus immdiates, le jugement et le syllogisme) ne peut consister en des dterminations et rapports qui soient trangers et extrieurs aux choses. La rflexion, a-t-il t dit plus haut, conduit l'tre universel des choses; mais celui-ci est luimme un des moments du concept. Qu'il y a de l'entendement, de la raison dans le monde, cela veut dire la mme chose que ce que contient l'expression : pense objective . Mais cette expression n'est pas commode, prcisment parce que le terme de pense n'est employ trop couramment que comme renvoyant l'esprit, la conscience, et que celui d' objectif , de mme, n'est employ avant tout qu' propos de ce qui ne relve pas de l'esprit. 25 L'expression de penses objectives dsigne la vrit, qui doit tre l'objet absolu de la philosophie, non pas simplement le but vis par elle. Mais elle indique de faon gnrale aussitt une opposition, et en vrit celle dont la dtermination et la validit

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constituent ce autour de quoi tournent l'intrt du point de vue philosophique propre l'poque prsente et la question de la vrit et de sa connaissance. Si les dterminations-de-pense sont entaches d'une opposition fixe, c'est--dire sont seulement de nature finie, elles sont inadquates la vrit, qui est absolument en et pour soi, la vrit ne peut entrer dans la pense. La pense qui n'amne au jour que des dterminations finies et se meut dans de telles dterminations, s'appelle entendement (au sens plus troit du terme). Plus prcisment, la finit des dterminations-de-pense est apprhender de deux manires, suivant l'une, en ce sens qu'elles sont seulement subjectives et comportent l'opposition permanente ce qui est objectif, suivant l'autre, en ce sens qu'tant d'un contenu born en gnral, elles persistent dans leur opposition, d'une part, les unes aux autres, d'autre part, et plus encore, l'absolu. Les positions donnes la pense relativement l'objectivit doivent maintenant tre considres comme une introduction plus prcise, en vue d'claircir et de dgager la signification et le point de vue qu'on attribue ici la Logique. Dans ma Phnomnologie de l'esprit, qui pour cette raison a t dsigne lors de son dition comme la premire partie du Systme de la science, a t pris le chemin consistant commencer par la premire, la plus simple apparition de l'esprit, la conscience immdiate, et dvelopper sa dialectique jusqu'au point de vue de la science philosophique, dont la ncessit est montre par cette progression. Mais pour cela, on ne pouvait en rester l'tre formel de la simple conscience; car le point de vue du savoir philosophique est en mme temps en lui-mme le plus riche en teneur essentielle et le plus concret; par consquent, mergeant comme rsultat, il prsupposait aussi les figures concrtes de la conscience, comme par exemple [celles] de la morale, de la vie thique, de l'art, de la religion. Le dveloppement de la teneur essentielle, des objets des parties propres de la science philosophique, tombe donc en mme temps dans ce dveloppement de la conscience, qui semblait tout d'abord seulement born l'tre formel [de celle-ci]; c'est derrire son dos pour ainsi dire que ce dveloppement doit ncessairement avancer, dans la mesure o le contenu se rapporte la conscience comme l'en-soi. L'exposition devient par l plus complique, et ce qui appartient aux parties concrtes tombe en partie dj aussi dans

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cette introduction-l. L'examen entreprendre ici a plus encore l'inconvnient de ne pouvoir procder que de faon historique et en raisonnant; mais il doit principalement contribuer faire discerner que les questions que l'on rencontre dans la reprsentation au sujet de la nature de la connaissance, au sujet de la croyance et ainsi de suite, et que l'on tient pour tout fait concrtes, se ramnent en ralit des dterminations-de-pense simples, mais qui reoivent seulement dans la Logique la solution vraie par laquelle on en vient bout.

Fin de lextrait