Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French...

194

Transcript of Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French...

Page 1: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et
Page 2: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et
Page 3: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et
Page 4: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

ÀMaman,pourm’avoirsuppliéd’écrire.

Page 5: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitreun

–Quellejournéeparfaite!dis-je.L’hivermarquaitlepasàBoston,etleprintempsapprochait.Lecampusavaitreprisvie

etgrouillaitd’étudiants,detouristesetd’autochtones.Beaucoup portaient toujours leur toge de la cérémonie de remise des diplômes de

l’après-midi que, pour ma part, je m’efforçais encore d’assimiler. Tout paraissait irréel,depuis les adieux doux-amers adressés aux amis jusqu’à l’anticipation des problèmes dumonderéelqu’ilallaitfalloiraffronterdanslesjoursàvenir.

Unemyriaded’émotionsmeparcourut.Fierté,soulagement,angoisse.Maissurtout, lebonheur.Devivrecetinstant.D’avoirMarieàmescôtés.

–Tul’asdécroché,etpersonnenelemériteplusquetoi,Erica.MarieMartelly,lameilleureamiedemamèreetmasauveuse,meserrabrièvementla

mainenglissantsonbrassouslemien.Grande et mince, Marie dominait ma silhouette menue. Sa peau douce était de la

couleurducacao,etsescheveuxbrunsétaientnouésenunemultitudedecourtesnattes;unstylequiexprimaitàlafoissonéternellejeunesseetuncertainéclectisme.Del’extérieur,personne ne pouvait imaginer qu’elle était devenue mamère de substitution depuis prèsd’unedécennie.

Au fil des années, jem’étais souvent dit que ne pas avoir de parents valait peut-êtremieux que d’en avoir du genre de ceux dont j’entendais parler, ou que je pouvaisrencontrer:lesparentsdemescamaradespouvaientêtretrèsautoritaires,ouphysiquementtropprésents,maisémotionnellementabsents,ouassezâgéspourêtremesgrands-parents,creusant un sérieux fossé générationnel. Exceller semblait infiniment plus facile en étantorpheline.

Marieétaitdifférente.Durant toutescesannées,ellem’avait toujoursapporté la justemesuredesonsoutien.Ellem’écoutaitraconterlespetitsdramesdelavie,melamentersurmontravailetmesexamens,maissansjamaismemettrelapression.Ellesavaitàquelpointjepouvaismelamettreseule.

Page 6: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

OndescenditlesalléesétroitesquisillonnaientlecampusdeHarvard.Unedoucebrisesoufflaitàtraverslesarbresfeuillus,quibruissaientau-dessusdenous.

–Mercid’êtrelà,avecmoi,aujourd’hui,dis-je.–Nesoispasridicule,Erica!Jen’auraisratécelapourrienaumonde.Tulesaisbien.Ellemesouritetm’adressaunclind’œil.– Et puis, j’ai toujours aimé revisitermon passé. Je ne saismême plus quand je suis

venuepourladernièrefoissurcecampus.Çamerajeunit!Jerisdesonenthousiasme.Iln’yavaitqueMariepourrevenirdanssonalmamateret

s’ensentirrajeunie,commesiletempsn’avaitpaspassé.–Tuesencorejeune,Marie.–Oh,sansdoute!Maislavievaquandmêmetropvite.Tut’enapercevrasbienassez

tôt.(Ellesoupiradoucement.)Tuesprêteàfairelafête?–Absolument.Allons-y,acquiesçai-je.On franchit les portes du campus pour héler un taxi qui nous mena au centre de

Boston,del’autrecôtédelarivièreCharles.Quelquesminutesplustard,nouspoussionsleslourdes portes de bois de l’un des meilleurs grils de la ville. Comparé aux rues encoreensoleillées, lerestaurantétaitsombreetfrais,uneimpressionderaffinementsedégageaitd’undiscretmurmureambiantdelaclientèledusoir.

Ons’installaavecnosmenusetonpassacommande.Leserveurnousapportavitedeuxverresdescotchfrappédeseizeansd’âge–boissonàlaquellej’avaisprisgoûtsuiteauxtrèsnombreuses invitationsàdînerdeMarie.Aprèsdes semainesà frôler l’overdosedecaféetde plats à emporter, rien ne valaitmieux qu’un verre dewhisky accompagné d’une bellepiècedeviande.

Jem’amusaià tracerdes lignesavec labuéedemonverre,enmedemandantàquoicettejournéeauraitressemblésimamèreavaitétéencoreenvie.Jeseraispeut-êtreencoreàChicago,jemèneraisuneexistencetotalementdifférente.

–Quelquechosetepréoccupe,monbébé?LavoixdeMariemeramenasurterre.–Rien.Jeregrettesimplementquemamannesoitpaslà,dis-jedoucement.Mariepritmamainposéesurlatable.–Nous savons toutes les deux à quel point Patricia aurait été fière de toi. Tellement

fière.Personne n’avait mieux connu ma mère que Marie. Même si la vie les avait

géographiquementséparéesàlafindeleursétudes,ellesétaientrestéesproches–jusqu’àlafin.

J’évitai son regard, refusant de succomber aux émotions qui tendaient à m’emportercomme une lame de fond à chaque événement important. Je ne voulais pas pleurer, pasaujourd’hui.C’étaitunjourheureux,quoiqu’iladvienne.Unjourquejen’oublieraijamais.

Page 7: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Marielâchaalorsmamainetlevasonverre,sesyeuxs’illuminant.–Etsil’onportaituntoastàcetteprochaineétapedetavie?Je levaimonverreàmon tour, et sourispar-delà la tristesse, laissant soulagementet

gratituderemplircevidedansmoncœur.–Àmanouvellevie!JetrinquaiavecMarieetprisunelonguegorgée,appréciantlabrûluredel’alcooldans

magorge.–Etpuisqu’onenparle,quelleestlaprochaineétape,Erica?Je laissai se rassembler mes pensées et les pressions auxquelles j’étais confrontée

m’apparurent.–Ehbien,cettesemainesonnel’heuredevéritéavecAngelcom,ensuiteilfaudraaussi

quejedécideoùm’installer…–Tupeuxtoujoursvenirvivrechezmoipouruntemps.–Jesais,maisj’aibesoind’organisermonpropreespace.Ilmetarde,enfait.–Desidées?–Pasvraiment,maisilfautquejem’éloignedeCambridge.Harvardresteraitunbonsouvenir,mais j’avaisbesoindevoirdenouvelles têtesaprès

cesannéesuniversitaires.J’avaispassécettedernièreannéeàmesurpasserenjonglantavecmathèse,lacréationd’uneentrepriseetleshabituelleslimitesd’unépuisementphysiqueetintellectuel. J’étaisdonc impatiented’entamer laprochainepartiedemavie, et elle seraittrèsloinducampus.

–Jen’aiaucuneenviedetevoirpartir,maises-tusûredevouloirresteràBoston?–Certaine,opinai-je.Lesaffairesm’entraînerontpeut-êtreàNewYorkouenCalifornie,

maispourl’instant,jesuisheureuseici.Bostonpouvaitêtreunevilledure.Leshiversyétaientlongsetrudes,mais lesgensy

étaientforts,courageuxetsouventd’unetotalefranchise.Aufildutemps,j’avaisfiniparenfaire partie. Ilm’était inconcevable de changer de ville d’adoption sur un simple coup detête.D’autantquesansparentschezquirentrer,Bostonétaitdevenumonportd’attache.

–Ilt’arrived’envisagerderepartiràChicago?–Non.Jemâchaimasaladeensilence,untemps,enm’efforçantdenepaspenseràceuxqui

auraientpuvenirmesouteniraujourd’hui.– Iln’yaplusréellementquiquecesoitpourmoi, là-bas.Elliots’estremariéetades

enfants,maintenant.EtlafamilledeMamanatoujoursété…ehbien,tusais,distante.Depuis le jouroùMamanétaitrevenuedelafacvingtetunansplustôt,fraîchement

enceinteetsansprojetdemariage,sesrelationsavecsesparentss’étaienttendues–pournepas dire plus. Mes rares souvenirs d’enfance avec mes grands-parents étaient eux aussiempreints de gêne, marqués par la façon dont j’étais entrée dans leur vie. Maman

Page 8: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

n’évoquait jamais mon père – si les circonstances avaient été suffisamment contrariantespourqu’ellegardelesilence,neriensavoirétaitprobablementpréférable.Dumoins,c’étaitcequejemedisaislorsquelacuriositéhantaittropmespensées.

LatristessedansleregardempathiquedeMariereflétaitlamienne.–Elliottedonnedesnouvelles?–Généralementpourlesfêtes.Lesdeuxpetitsmonopolisenttoutsontemps.Elliotétait leseulpèreque j’avais jamaiseu. Ilavaitépousémamèrealorsque j’étais

encoretoutepetite,etnousavionslongtempsforméunefamilleheureuse.Maisàpeineunanaprèsledécèsdemamère,ils’étaitsentidébordéparlaperspectived’élever,seul,uneadolescente, et m’avait inscrite dans un pensionnat de la côte est avec l’argent de monhéritage.

–Iltemanque,dit-elledoucement,commesiellelisaitdansmespensées.–Parfois,oui.Luietmoin’avons jamaiseu l’occasiond’êtreunevraie familleaprès la

disparitiondeMaman.Jemesouvenaistrèsbienàquelpointnousnousétionsretrouvésperdusetdésemparés

àsondécès.Aujourd’hui,nousn’étionsliésqueparlesouvenirdesonamour,unsouvenirquis’effaçaitunpeupluschaqueannée.

–Ilacrubienfaire,Erica.–Jesais,jenel’enblâmepas.Noussommestouslesdeuxheureux,etc’esttoutcequi

compte.Avecundiplômeetuneentrepriseàmonactif, jene regrettais riendu choixd’Elliot.

Celam’avaitaiguilléesurlecheminoùj’étaisaujourd’hui–maisriennepouvaitchangerlefaitquenousnousétionséloignésaufildesannées.

–Alors,parlonsplutôtde tavieamoureuse, tranchaMarieenm’adressantunsourirechaleureux,sesyeuxnoisettebrillantdanslalumièrediffusedurestaurant.

Je ris, sachant qu’elle aimerait connaître lemoindre détail si toutefois j’avais eu unebonnenouvelleàluiannoncer…

–Rienàsignaler,malheureusement.Etsinousparlionsplutôtdelatienne?Jesavaisqu’ellemordraitàl’hameçon.Son regard s’illuminaetelle se répandit sur sonnouveauchevalier servant :Richard,

ungrandreporterdeprèsdedixanssoncadet–cequinemesurpritpas.Marieétaitnonseulementenexcellenteformepoursonâge,maissurtouttrèsjeunedanssatête.J’oubliaisparfoisqu’elleavaitl’âgedemamère.

Pendant qu’elle papotait, je goûtai mon plat qui me transporta. Celui-ci étaitparfaitementpréparéetservidansunesauceauvinrouge, le filetsur l’os fondaitpresquedans ma bouche. Il contrebalançait en un sens mon abstinence sexuelle de ces derniersmois.Etàsupposerquecelasoitencorenécessaire,lesfraisesauchocolatsurlesquellesonterminalerepasétaientunpurdélice.

Page 9: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

La facm’avait offert de nombreuses opportunités de vivre de petites aventures,maiscontrairementàMarie, jenecherchaispas réellement legrandamour.Etmaintenantquej’avais la charge d’une entreprise, le temps manquait pour entretenir une vie sociale, etencore plus une vie sexuelle. Ainsi, je vivais par procuration à travers Marie, et j’étaissincèrementheureusequ’elle eûtunnouveau compagnonpourmettreunpeudepiquantdanssavie.

Àlafindurepas,ondécidades’attendreàl’extérieuraprèsqueMaries’étaitrafraîchie.Jemedirigeaiverslasortie,heureuseetunpeuémoustillée.Jedépassailemaîtred’hôteletmeretournailorsqu’ilmeremerciad’êtrevenue.

Uninstantaprès,jeheurtaidefrontl’hommequientraitparlagrandeporte.Il me rattrapa par la taille, me maintenant sur pied pendant que je reprenais mon

équilibre.–Désolée,je…Mes excuses tournèrent court lorsque nos regards se croisèrent : ses yeux d’un

hallucinant tourbillon de vert et de noisette me submergèrent, m’ôtant les mots de labouche.Sublime.Cethommeétaitbeauàtomber.

–Toutvabien?Savoixvibraenmoietparcouruttoutmoncorps.Mesgenouxmollirentsous lechoc.

Enréaction,sonbrasseraffermitcontremataille,rapprochantnoscorps.Cequinem’aidapasdu toutà retrouvermesesprits.Mon rythmecardiaque s’emballaalorsqu’ilme tenaittoujours, possessif et confiant, comme s’il s’était accordé le droit de me garder là aussilongtempsqu’illedésirait.

Une infime partie de moi, celle qui ne résonnait pas de désir pour cet hommemystérieux,voulaits’offusquerdesoneffronterie,maistoutepenséerationnellefutobscurcielorsque j’observai son visage. À l’exception de ses cheveux bruns indisciplinés, tout en luiévoquait l’homme d’affaires, avec son veston anthracite par-dessus une chemise blanchelégèrementdéboutonnée.Toutenluisentaitleluxe.Ilexhalaitleluxe.

Tropbienpour toi,Erica, chantonnaunepetitevoix,me rappelantquec’étaitàmontourdeparler.

–Toutvabien,oui,désolée.–Vousn’avezaucuneraisondel’être,murmura-t-ild’unevoixséduisante,enesquissant

unsourire.Ses lèvresétaient finementdessinéesetpleinesdepromesses, ilétait impossiblede les

ignorer alors que mon visage était à quelques centimètres du sien. Il humecta sa lèvreinférieureenfaisantglissersalangue,jerestaibouchebée,muette.Bonsang!Iltranspiraitd’unechargesexuellequimefitl’effetd’autantdelamesdefond!

–MonsieurLandon,votretableestprête.Pendantque lemaîtred’hôtelattendaitsaréponse, jereprissuffisammentmesesprits

Page 10: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

pourme redresser, certaine de pouvoir de nouveaume tenir debout. Jem’appuyai de lamain sur sa poitrine, ferme et puissante, et ce, même à travers sa veste. Il relâcha sonemprise,sesmains laissèrentunetraînéede feusurmesreinsenquittantdoucementmoncorps.

DouxJésus.Ledessertn’existaitdéjàplusfaceàcethomme.Ilfitunsignedetêteendirectiondumaîtred’hôtelendétournantàpeinesesyeuxde

moi,melaissantsubjuguéeparl’intensitédecelienentrenous.Demanièreirrationnelle,jedésiraisretrouverlecontactdesesmains,qu’ellesreprennentimmédiatementpossessiondemoncorps.

Siunsimplecontactmetroublaitàcepoint,queprésagerd’unmomentaulitaveclui?Uninstant,jemedemandais’ilyavaituncoinlibredansunearrière-salle,àproximité.Onpourraitavoirlaréponsetoutdesuite…

–Parici,monsieur,ditlemaîtred’hôteleninvitantmonsauveuràlesuivre.Il s’éloignadansunmouvementnaturellementélégant,provoquantenmoiun frisson

quimeparcourutdelatêteauxpieds.Marieme rejoignit alors que je le regardai s’éloigner, une image qui ne se dissiperait

pas de sitôt. Je voulus paraître embarrassée, mais j’étais en réalité satisfaite de moninaptitudeàmedéplacersurdestalonsdedouzecentimètres.

Enlieud’unevieamoureuse,cethommemystèreallaitêtrel’objetdemesfantasmesàvenir…

***

Jegrimpaileslargesmarchesdegranitdesescaliersdelabibliothèqueettraversailescouloirs jusqu’au bureau du professeur Quinlan. Il était concentré sur l’écran de sonordinateurlorsquejefrappaiàlaporte.

– Erica ! Ma créatrice de start-up préférée ! s’exclama-t-il en faisant tournoyer sonfauteuil.

Son accent irlandais s’était atténué au fil des années passées aux États-Unis. Jecontinuaid’enadorerlesnuancesetdégustaichaquemot.

–Raconte-moiàquoiressemblelaliberté.Je souris brièvement, rassérénée par sa joie sincère deme voir. Quinlan était un bel

hommed’unecinquantained’années,avecdescheveuxpoivreet seletdesyeuxbleupâlechaleureux.

–J’essaieencoredem’yhabituer,àvraidire.Etvous?Quandcommencevotrecongésabbatique?

– Je prends l’avion pourDublin dans quelques semaines. Il faudra que tume rendesvisitesituasletemps,cetteannée.

–J’adorerais,évidemment,répondis-je.

Page 11: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Àquoi allait pouvoir ressembler cette année?À l’évidence, j’allais être confrontéeaucap fatidique des premières douleurs de la croissance auxquelles mon entreprise seraitsujette,maisàpartcetteperspective,jenesavaisvraimentpasàquoim’attendre.

–Jenesaispastroppourquoi,maiscelameferasansdouteunedrôled’impressiondevousrevoirendehorsducampus,professeur.

– Je ne suis plus ton professeur, Erica. Appelle-moi Brendan, s’il te plaît. Je suismaintenant tonamiet tonmentor,et j’espèrequenousauronssouvent l’occasiondenousrencontrerhorsdecesmurs.

Les paroles du professeur furent un choc, et ma gorge se serra. Bon sang, lesévénementsàfortechargeémotionnellesesuccédaient,cettesemaine.

Quinlan avait été un soutien incroyable ces dernières années : ilm’avait guidée dansmes études et avait établi de nombreux contacts utiles au développement de monentreprise.Unferventsupporterinépuisablequiavaittoujoursétélàquandillefallait.

–Jenepourraijamaisassezvousremercier.Jeveuxquevouslesachiez.–Aiderdesgenscommetoiestcequimetiredulitlematin.Etpuis,c’estmieuxquele

pub,dit-ilavecunsourireespièglequirévélasafossette.–EtMax?– Eh bien, son goûtmarqué pour l’alcool et les femmes excèdemalheureusement de

beaucoupsonambitiondanslemondedesaffaires,maisilsembleraitqu’ilasureprendreledessus,enfindecompte.Jenesaispassij’yaiparticipé–peut-être.Ilsnepeuventpastousêtrecommetoi,machère.

–Jem’inquiètetellementdelapérennitédeceprojet,reconnus-je,espéranttimidementqu’ilauraitdesdonsdevoyancedontjenedisposaispas.

– Je ne doute pas un seul instant que tu trouveras le succès, d’une façon ou d’uneautre.Sicen’estpaslà,ceseraailleurs.Aucundenousnesaitoùlavievalemener,maistu fais des sacrifices et tu travailles dur à la réalisation de tes rêves. Tant que tu leurresterasdévouée,quetulesgarderasaupremierplandetespensées,tuirasdanslabonnedirection.Dumoins,c’estcequejemedis.

–Çameva.

J’étais tendueà causede laperspectivede la réunionprévue le lendemain,unquitteou double pour ma société, et pour moi. J’avais besoin de tous les encouragementspossibles.

–Jetepréviendraidèsquej’auraidunouveau,promit-il.J’oscillais entre soulagement etdécouragement, sachantqu’il pouvait se sentir parfois

aussidésarméquejel’étaisencetinstant.–Enattendant,voyonscequetuasprévupournotreamiMaxdemain.Il fitunsigneendirectiondudossierque j’avais sur lesgenouxetdégageaunespace

sursonbureau.

Page 12: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Jesortismonplandedéveloppementetmesnotes,etonsemitautravail.

Page 13: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitredeux

Laréceptionnisted’AngelcomVentureGroupm’adressaunregardinterrogateuravantdemeconduireà la salledeconférences,auboutducouloir. Jem’examinaiunedernièrefois,m’assurantqueriennedépasse.Jusque-là,toutsepassaitbien.

–Installez-vousconfortablement,mademoiselleHathaway.Lesautresnedevraientplustarder.

–Merci,répondis-jepoliment,heureusequelasallesoitencoredéserte.Je pris une profonde inspiration en laissant glissermes doigts le long de la table de

conférence, sous une rangée de fenêtres qui dominaient le port de Boston. Une certainefascination semêlait à une anxiété croissante. Sous peu, j’allaisme trouver face au gothades investisseurs les plus riches et les plus influents de la ville. J’avais l’impression d’êtretellementéloignéedemonuniversquecen’enétaitmêmeplusdrôle.Jereprisunelongueinspirationetagitainerveusementlesmains,espérantquemoncorpssedétendeunpeu.

–Erica?Je fis volte-face. Un jeune homme d’à peu près mon âge, les cheveux blonds

soigneusementcoiffésd’uneraiesurlecôté,lesyeuxbleusombre,vêtud’unimpressionnantcostumetrois-pièces,s’approchademoietmeserralamain.

–VousdevezêtreMaxwell.–S’ilvousplaît,appelez-moiMax.–LeprofesseurQuinlanestintarissableàvotresujet,Max.– N’en croyez pas un mot, répliqua-t-il dans un rire qui révéla ses dents

impeccablement blanches, enparfait contraste avecunbronzage quime fitmedemandercombiendetempsilpassaitréellementenNouvelle-Angleterre.

–Ilaétéélogieuxsurtoutelaligne,mentis-je.–C’estaimableàlui,jeluiensaisgré.Cedoitêtrevotrepremièreprésentation?–Eneffet.– Vous vous en sortirez bien.N’oubliez pas : la plupart d’entre nous ont été un jour

dansvotresituation.

Page 14: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Jesourisethochai la tête,medoutantque leschancesqueMaxwellPope,héritierdumagnat du transport Michael Pope, ait eu à faire une présentation pour obtenir deuxmillionsdedollarsdelapartdequelqu’und’autrequesonpèreétaientprochesdunéant.Néanmoins, il était à l’origine de ma présence ici ce matin-là, et je lui en étaisreconnaissante.Quinlansavaitquellevieractiverpourobtenirunetellefaveur.

–Servez-vous.Lesviennoiseriessontexcellentes,dit-ilenindiquantd’ungestel’opulentbuffetdepetitdéjeunerdressélelongd’unmur.

Maislenœuddansmonestomacavaitunetoutautreopinion.Jedevaiscontrôlermesnerfs:jen’avaismêmepaspuavaleruncafélematin.

–Merci,maisjen’aibesoinderien.Lesautresinvestisseursarrivèrentaucompte-gouttes.Maxmelesprésenta,etjefisde

monmieuxpourengagerlaconversation,enmaudissantensilenceAlli,mameilleureamieetassociée,actuellementencongé,responsabledelapartiecommerciale.Alliétaitcapabled’entretenir une conversation convaincante enmangeant unbol de soupe, quand,moi, jen’avaisentêtequefaitsetchiffresquejedevaisdéfendre;cequiétaitloind’êtreidéalpouréchangeravecdesgensquejen’avaisjamaisrencontrés.

Lorsquetouscommencèrentàs’installerautourdelatabledeconférence,jemeplaçaià l’autre bout, organisant et vérifiant mes papiers pour la énième fois. Je regardai lapendule sur le mur devant moi. J’avais moins de vingt minutes pour convaincre ce petitgrouped’étrangersquejeméritaisleursinvestissements.

Le brouhaha perdit de son intensité. Je regardai Max en quête d’un signe quim’indiqueraitquandcommencer. Ilmemontrad’unregardlachaiserestéevideaucentre,enfacedemoi.

–NousattendonsLandon.Landon?Laportes’ouvrit.Putaindemerde.Jeperdislegoûtdel’oxygène.Monhommemystère,unmètrequatre-vingt-troisdeperfectionmasculine,sansriende

commun avec ses collègues en costume. Son col ouvert soulignait des épaules et unepoitrine sculpturales, et son jean délavé s’accordait àmerveille avec son allure.Ma peaufrissonnaàl’idéed’êtredenouveauenlacéeparcesbras–accidentellementoupas.

Armé d’un café glacé géant, il se laissa tomber dans le siège en face de moi,apparemment indifférentd’êtreenretardetnesesouciantpasdesformalités. Ilm’adressaunrapidesourireentendu.Ilétaitcomplètementdifférentdufringanthommed’affairessurlequelj’avaiseulachancedetomberl’autresoir.Onavaitl’impressionqu’ilsortaitdulitvusacoiffure : lescheveuxbrunsombrerebiquantdans tous lessensetn’attendantplusquemesdoigtspourlesdompter.Jememordislalèvrepourtenterdemaîtriserl’élaninstinctifquimepoussaitàapprécierlecorpsdecethomme.

Page 15: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

– Voici Blake Landon, dit Max. Blake, Erica Hathaway. Elle est venue présenter sonréseausocialdemode,Clozpin.

Ilpritsontempsavantderépondre.–Unnomintéressant.C’esttoiquil’asamenée?–Oui,nousavonsunamicommunàHarvard.Blake hocha la tête, me happant d’un regard scrutateur qui me fit instantanément

fondre. Il s’humecta les lèvres, et ce geste eut exactement le même effet sur moi que lapremièrefois.

Je pris une profonde inspiration et croisai les jambes, parfaitement consciente dessensations qu’il provoquait entre celles-ci. Reprends-toi, Erica. Mon énergie liée ici à unefortenervositéformaitunebouledansmonestomacetvenaitd’imploserenunefulguranteardeur sexuelle dont les vibrations résonnaient du bout de mes doigts jusqu’à monentrejambe.

J’expirailentementetlissaid’ungestelesmanchesdemavestenoire,meréprimandantensilenced’êtretombéeainsienpâmoisonàunmomentsiinopportun.

J’entamai maladroitement ma présentation. Je partis du postulat de départ du siteWeb,puisdécrivissuccinctementlesgrandeslignesdenotrepolitiquecommercialedecettepremière année, poursuivis sur la croissance exponentielle qui en avait résulté, essayantdésespérément de rester concentrée. Chaque fois que je croisais le regard de Blake, moncerveausedéconnectait.

Auboutd’unmoment,ilm’interrompit.–Quiadéveloppélesite?–Moncofondateur,SidKumar.–Etoùest-il?–Malheureusement,mescofondateursn’ontpusejoindreànousaujourd’hui.–Doncvousêteslaseuledel’équipeàvousconcentrersurleprojetàcejour?Il fronça les sourcils et se laissa aller en arrière dans son fauteuil, m’offrant une

meilleurevuedesontorse.Jemeforçaisànepasmelaisserhypnotiser.–Euh…non!Jecherchaismesmotspourformuleruneréponsehonnête.–Nousvenonsd’achevernosétudes,notreengagementpourlesmoisàvenirdépend,

engrandepartie,delasoliditéfinancièredenotreprojet.–End’autrestermes,leurimplicationdépenddufinancement.–Enquelquesorte.–Ainsiquelavôtre?–Non,tranchai-jeaussitôt.Ce qu’il sous-entendaitme fit instantanément réagir : j’avais vouéma vie à ce projet

durantdesmois,ennepensantàriend’autre.

Page 16: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Poursuivez,reprit-ilenm’yinvitantd’unsigne.Jeprisuneprofondeinspirationenjetantuncoupd’œilàmesnotespourretrouverle

fil.– À ce stade de notre évolution, nous recherchons une injection de capitaux pour

développerlemarketingetaugmenterlacroissanceetlechiffred’affaires.–Quelestvotreratiodeconvertissement?–Devisiteuràutilisateurenregistré,environvingtpourcent.–D’accord,maispourlesclientspayants?m’interrompit-il.–Environcinqpourcentdenosutilisateursouvrentuncomptepro.–Commentprévoyez-vousd’améliorercela?Jetapotainerveusementduboutdesdoigtssur latable,m’efforçantderetrouvermes

moyens. Chaque question qu’il posait ressemblait à un test ou à une insulte, réduisant ànéant tous les encouragements que je venais dememarteler en tête pour préparer cetteréunion.Auborddelapanique,jetournaimonregardversMax,espéranttrouverunsignede réconfort. Il semblait légèrement amusé par ce que je supposais être l’ordinaire demonsieurLandon.Lesautresregardaientleursnotesd’unairabsent,sanstrahirlemoindresigned’uneopinion,bonneoumauvaise.

L’espaced’une seconde, jem’étaisdit quenotre rencontrede l’autre soir constitueraitunbonpoint pourmoi.Apparemment pas.Monhommemystère semblait finalement êtreunpauvretype.

– Tous nos efforts se sont concentrés sur le développement et le maintien de notrecommunauté d’utilisateurs de base qui, comme je l’ai dit, croît exponentiellement. Endisposant d’une clientèle potentielle solide, nous espérons attirer plus de vendeurs et demarquesdusecteur,etaugmenterainsilesadhésionspayantes.

Je marquai une pause, escomptant une nouvelle interruption, mais le téléphone deBlake Landon s’alluma en silence, provoquant une distraction bienvenue. Soulagée de neplus être sous son microscope, je conclus par une analyse de la concurrence et desprojectionsfinancièresavantlafindutempsimparti.

Un silence troublant s’abattit.Blakebutunegorgéede café,neutralisa l’écrande sontéléphonequ’ilreposasurlatable.

–Voussortezavecquelqu’un?Moncœurrésonnad’uncoupdansmapoitrineetmonvisagedevintécarlate,commesi

jevenaisd’êtreprisesurlevifenclasseenpleineinterrogation.Est-cequejesorsavecquelqu’un?Jeluiadressaiunregardabasourdi,incertained’avoir

compristouteslesimplicationsdesaquestion.–Pardon?– Les relations peuvent être des éléments perturbateurs. Si vous deviez obtenir de ce

groupedesfinancements,cepourraitêtreunfacteursusceptibled’affectervotrepotentielde

Page 17: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

croissance.Jen’avaispasmalentendu.Commesiêtrelaseulefemmedanslasalleneconstituait

pas déjà une pression suffisante, il fallait encore qu’il braque un projecteur sur ma vieamoureuse. Connard misogyne. Je serrai les dents pour me retenir de l’insulter. Je nepouvais pas perdre mon sang-froid, mais je n’allais pas non plus laisser passer uncomportementaussiinappropriéensouriant.

–Jepeuxvousgarantir,monsieurLandon,quejem’impliqueàcentpourcentdansceprojet, répondis-je d’une voix lente et posée. (Je soutins son regard, m’efforçant de luiexprimer mon mécontentement.) Avez-vous d’autres questions sur ma vie privée quiparticiperaientàvotredécisiondecejour?

–Non,jenecroispas.Max?–Hum…non.Jecroisquenousavonsfaitletour.Messieurs,êtes-vousprêtsàprendre

unedécision?ditMaxensouriantàl’assemblée.Lestroisautreshommesencostumehochèrentlatête,firentl’éloge,l’unaprèsl’autre,

demeseffortsetexprimèrentleurdécisiondenepasdonnersuite.Blakeme regarda dans les yeux,marqua une pause avant de livrer son verdict aussi

nonchalammentqu’ilvenaitdedévastermamatinée…–Sansmoi.Mes feux de panique s’éteignirent et les larmesmemontèrent aux yeux, rapidement

relayéesparmapetitevoixintérieure:celle-cipréparaitundiscoursd’adieupourmonsieurLandonquiluiindiquaitd’allersefairevoir!

JemetournaiversMax,dansl’attenteducoupdegrâce.– Eh bien, Erica, j’ai l’impression que vous avez créé là une superbe communauté, et

j’aimeraisensavoirplus.Entendons-nouspourunrendez-vousdesuividansquinzejours;nouspourronsnousintéresserdeplusprèsàlalogistique.Aprèscela,nousverronssinousdésironsvousfaireuneoffre.Qu’enpensez-vous?

Quelsoulagement!Jevoulaissauterpar-dessuslatableetprendreMaxdansmesbras.–Ceseraitmerveilleux!J’aihâtedevousrevoir.–Parfait.Jecroisquenousavonsfini.Maxselevapourallerdiscuteraveclesautreshommespendantqu’ilss’enallaient,me

laissant seuleavecBlake,quime regardait avecunpetit sourirenarquois sur son superbevisage, d’un air suffisant. Je ne savais pas si je devais le gifler ou discipliner ses cheveux.J’avais également quelques autres possibilités en tête. Ressentir tant de sentimentsantagonistes envers la même personne, en si peu de temps, me fit douter dema proprelucidité.

–Vousvousenêtesbiensortie,dit-ilensepenchantversmoi.Savoixétaitrauqueetsuave,cequimefitfrissonner.–Vraiment?répondis-jed’untonhésitant.

Page 18: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Vraiment,affirma-t-il.Puis-jevousinviterpourunpetitdéjeuner?Ses yeux s’étaient adoucis, comme si ces vingt dernières minutes à nous affronter

n’avaientpasexisté.Perplexe,jefourraimesnotesdansmonsac.Blake était beau,mais il surestimait ses atouts s’il pensait qu’il allaitm’inviter à sortir

aprèsuntelnuméro.– Il y a un petit pub très sympa juste en face. On y sert un petit déjeuner irlandais

typique.Jemelevaietleregardaidroitdanslesyeux,raviedecetteopportunitédeluirendre

quelquepeulamonnaiedesapièce.–Cefutunplaisir,monsieurLandon,maiscertainsd’entrenousdoiventtravailler.

***

– Il t’a proposé de sortir ? s’extasia Alli au téléphone, tandis que tout New Yorkbruissaitets’agitaitderrièreelle.

–J’enaibienl’impression.J’étaisencoresouslechocdesévénementsdelamatinée.–Tuportaistonensembledefemmed’affaires,celuiaveclechemisierbleu?–Oui,évidemment,répondis-jealorsmêmequejel’ôtaispourmelaissertombersurle

futondelachambreuniversitairequenouspartagions.–Riend’étonnant,alors.Tuesunevraiebombe,avec.Etlui,ilétaitcomment?BlakeLandonétait l’undeshommes lesplus sexyavec lesquels j’avais jamaispartagé

mon espace, mais il ne semblait avoir aucun respect pour les femmes dans la sphèreprofessionnelle, et cela tempérait sérieusement mon attirance envers lui. En plus, il étaitdangereusementproched’entrerdanslalistedesdixpersonnesquejeméprisaisleplus.

–Aucuneimportance,Alli.Jenemesuisjamaissentieaussihumiliée.J’accusailecoup,meremémorantsesprovocationsjusqu’àsonrejetfinal.–Tuasraison,jesuisdésolée.J’auraisaiméêtrelàpourt’aider.–Moiaussi.Enfin…Etcomments’estpassétonentretien?Allimarquaunepause.–Bien.–Vraiment?– Très bien, en fait. Je ne voudrais pas me porter la poisse, mais c’est plutôt

prometteur.–Excellent.Je m’efforçai de dissimuler ma déception, bien consciente que cette perspective

l’enthousiasmait.Unposteauniveaudeladirectioncommercialedel’unedesplusgrandesmarquesdumondede lamode. Je savaisdepuisdesmoisqu’Alli chercheraitunemploi à

Page 19: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

plein temps dès l’obtention de son diplôme, mais l’idée de gérer le site sans elle medéprimait. Sans lesmoyens d’embaucher un nouveau directeur commercial, j’allais devoirdevenirlanouvellevoixdel’entreprise,etlacommunicationn’avaitjamaisétémonfort.

–Maisrienn’estacquis.Nousverronsbien.–Ehbien,ilesttempsdefêtertoutcela,dis-je.Dieusavaitquej’avaisbienméritéunerécompensepouravoirsurvécuàcettematinée

infernale.–Nousdevonscélébrernotrenouveaumeilleurami,Max!piailla-t-elle.Je m’esclaffai, sachant que Max serait son genre, si elle le rencontrait. Elle fondait

devantlesmecsencostumetrois-pièces.–Parbonheur,j’espèrequecen’estpasuniquementpourrendreserviceàQuinlanqu’il

m’aaccordécerendez-vouscomplémentaire.– On n’agite pas des carottes à deux millions de dollars devant les gens juste pour

rendreservice.– C’est vrai, mais je ne veux pas non plus qu’il investisse s’il n’est pas réellement

intéressé.–Erica,turéfléchistrop,commed’habitude.–Peut-être,lâchais-jeensoupirant.J’espérais qu’elle avait raison, mais je ne pouvais m’empêcher d’envisager tous les

scénarios possibles afin deme préparer à chacun d’entre eux.Mon cerveau ne décéléraitpluscesdernierstemps,avecdetelsenjeuxentête.

– Je prends le train dans une heure. Je serai rentrée avant dîner, et nous pourronsallerprendreunverre.

–OK,àtoutàl’heure.Je raccrochai et me forçai à me lever pour attraper mon pantalon de survêtement

favori – celui que je réservais aux ruptures et aux gueules de bois. Cette journéem’avaitépuiséeau-delàduconcevable.

Jem’arrêtaipourmetoiserdans lemiroirenpieddenotrechambre.Jedégrafaimonchignonbanane,laissantainsiretombermescheveuxblondsondulésdansmondos.J’étaisplusmincequ’àl’habitude,àcausedecesdernièressemainesdestress,maismonensembledesous-vêtementssoulignaitencoremesformessubtiles.

Je passai mes doigts sur la douce dentelle qui ceignait mes hanches, regrettant qued’autresmainsnemefassentoubliercettejournée.Sijenem’étaispasattendueàmepâmerpour un investisseur d’une telle arrogance alors que je présentais, pour la première fois,monprojetd’entreprise, ceque j’avais ressenti faceà cethommedevaitm’alerter surmonactuelmanquedeviesociale.Ilfallaitquejesorteplusetquejerencontredesgens,quejem’éloignedemonordinateur,aumoins lessamedissoir.C’étaithabituellementcessoirs-là

Page 20: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

quenousassurionslamaintenancedusite,parcequelesvisitesyétaientmoinsdenses,maisàcerythme,jerisquaisdeneplusavoirdenouvellerelationavantmestrenteans.

Jechassaicespréoccupationsd’unmouvementdetête,m’habillai,etenvoyaiunmailàSidpourleteniraucourant.Ilneseraitpasdeboutavantplusieursheures.Enplusdevivrela nuit, comme beaucoup de programmateurs, il avait attrapé la grippe la veille de laprésentation. Lui non plus n’était pas un grand orateur, mais la force résidant dans lenombre,j’entendaisprofiterdesonsoutien.

La société nousmaintenait la tête hors de l’eau, àAlli, Sid etmoi : elle couvrait nosmodestesdépensesd’étudiants–maisnosattentessurnotreavenirà lasortiedel’unedesuniversités les plus cotées du pays étaient d’un tout autre ordre. Pendant que Sid et Allicherchaientunemploicommetoutétudiantdedernièreannéequiserespecte, j’avais toutmisésurClozpin,convaincuedepuissonsuccèsinitialqueceprojetserait,pournoustrois,bienplusintéressantqu’unsimpletravaildebureau.

Maintenant,convaincreMaxd’investirétaitpeut-êtreladernièrechancequ’ilmerestaitavantdedevoirmettrecerêvedecôtéetmerésoudreàtrouverunemploinormal.Etparailleurs,j’avaismoinsd’unesemainepourquitterledortoirettrouveroùhabiter.

***

Je fus réveillée par l’odeur du café, immédiatement suivie par unmartèlement dansmoncrâne.Mauditvin!Jememassailestempes,m’efforçantd’oublierladouleur.

Jem’assis sur le futon,m’enveloppaidansma couette, et remerciai lesdieuxdenousavoir offert le café, tandis qu’Alli m’en tendait une tasse fumante accompagnéed’ibuprofène.

–Entoutcas,ons’estbienéclatées.Elles’assitàcôtédemoiavecsatasse.Elleavaitramenéseslongscheveuxbrunsenun

chignonapproximatif,elleétaitnaturellement jolieavecsonhautampleauxépaulesnuesetsesjambièresnoires.

–Jenet’avaispasvuet’amuserautantdepuisuneéternité.Tuméritaisbienunepetitepause.

–Cetteprésentationm’amislesnerfsàvif,dis-je,heureusemalgrélemaldetêtequ’ilsnefussentplusaussitendusquelaveille.

–Alors,dis-m’enplussurMax,etquandjevaislerencontrer?SelonlaEricapompetted’hiersoir,noussommesdesâmessœurs.

Je ris à mesure que les détails de la nuit précédente me revenaient. Aucune soiréearroséen’étaitcomplètesansdebriefentrefilles.

– Je n’en sais pas plus que ce queQuinlanm’a dit de lui. Il est intelligent,mais il apassélaplusgrandepartiedesesétudesàsetirerinextremisd’unproblèmeaprèsl’autre.Jenecroispasqu’ilauraitpuobtenirsondiplômesansl’aidedeQuinlan,laseulechoseque

Page 21: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

son père ne pouvait pas acheter. (Je haussai les épaules, désireuse de laisser à Max lebénéfice du doute,maintenant qu’ilm’avait évité l’humiliation totale.) D’un autre côté, jesuppose qu’il n’est pas facile de filer droit quand ton père est milliardaire. Il peut êtredifficiled’assumerunetelleliberté.

–Ehbien,ilsetrouvequejesuissurlemarché,spécialistedansl’artdedomestiquerlesplay-boys milliardaires, renchérit-elle en m’adressant par-dessus son épaule un sourirenarquoisetcomplice.

–Ça,jen’endoutepasunseulinstant,rétorquai-jeenlevantlesyeuxauciel.–Alorsilnefaitplusquedel’investissement,maintenant?– Je ne sais pas ce qu’il fait en dehors d’Angelcom.Avec autant d’argent, il doit être

impliquédanspleindetrucs.–OK,c’estlàquelarechercheInternetprendtoutsonsens.Elle se redressa d’un bond, attrapa son ordinateur portable, se rassit et se mit à

énuméreràhautevoixlesassociationscaritativesetlesinvestissementsInternetdeMax.–Voyonscequel’onpeuttrouversurBlakeLandon.Jeserrailepoingautourdel’ansedematasse,aveclevaguesouvenird’unmonologue

alcoolisésurlesombrecrétinqueBlakes’étaitrévéléêtrependantlaréunion.Lafaçondontil avait cru pouvoir saboter ma présentation et m’emmener ensuite au restaurant étaitinvraisemblable, mais vu son charme, la plupart des femmes devaient lui succomberfacilement. Malheureusement pour lui, je n’étais pas la plupart des femmes. La ragebouillonnante que je ressentais envers lui n’était tempérée que par les émotions contrenaturequim’animaientlorsqu’ilmeregardait.

–Parpitié,celanem’intéressevraimentpas.Decessentimentscontradictoires,jem’efforçaideneretenirquelacolère,maisenfait,

j’étais secrètement curieuse de ce qu’Alli allait trouver. Jusqu’à hier, je n’avais jamaisentendu parler de ce Blake, mais vu la façon dont les autres l’avaient laissé mener lesdiscussionschezAngelcom,ildevaitêtreinfluent.Alliregardaitfixementl’écran,lisantavecunintérêtévident.

–Ehbien,qu’est-cequeçaraconte?lâchai-jelorsquejefinisparcéder.–C’estunhacker.–Quoi?Elle avait dû tomber sur le mauvais Blake Landon, encore qu’il n’eût pas vraiment

ressembléàunnotable,cematin-là.– En tout cas, il l’a été. On lui prête des liens avec le M89, un groupe de hackers

américainquiapiratéplusdedeuxcentscomptesenbanquesensibles,ilyaunequinzained’années.Ilsnedonnentpasd’autresdétails.Officiellement,ilestlefondateurdeBanksoft,qui a été vendu pour douze milliards de dollars. Il est administrateur d’Angelcom, et ainvestidanslecapitald’unnombreimpressionnantdestart-up.

Page 22: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Ilafaitfortune,alors.–Ondirait.Iln’aquevingt-septans.Sesparentssontprofesseurs,semble-t-il.Ces informations n’influaient pas réellement sur la colère qu’il m’inspirait pour avoir

saboté ma présentation, mais elles remplissaient les blancs. Je devais avouer que je lerespectais un peu plus, de savoir qu’il n’avait pas hérité de sa fortune ;mais entre lui etMax,c’étaitbienluiquiagissaitcommeunsalegosseprivilégié.

–Ehbien, je supposequecelan’aplusaucune importance,maintenant.Avecunpeudechance,noscheminsnesecroiserontjamaisplus.

Page 23: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitretrois

Ilpleuvaitdepuisdesheures.Des filetsd’eaucoulaientsur la fenêtredemonbureau,qui donnait sur l’un des nombreux espaces verts du campus. Le dortoir était paisible, laplupartdesétudiantsl’avaientdéjàquitté;jedécidaid’enprofiterpouravancerdansmontravail. J’étudiais les données statistiques de Clozpin lorsque la notification d’un mailprovenantd’uneadresseque jeneconnaissaispass’affichasurmonécran.L’objetdumailindiquait « Intervenants des débats Techlabs ». Je fus parcourue d’un frisson en le lisant.C’était une proposition de remplacement, suite à une annulation de dernière minute, auplusgrandcongrèstechnologiquedel’année.

–Alli…Ellegrommelaquelquechosedepuislefonddesacouette,oùellefaisaitlasieste.–TuveuxalleràVegas?–Jecroyaisquetuavaislagueuledebois.–Effectivement,maisjeviensd’êtreinvitéeàinterveniràTechlabsceweek-end.Ellefitvolerlacouetteets’assit.–Tuplaisantes?– Non, c’est sérieux. Quelqu’un s’est décommandé pour le débat des dirigeants de

réseauxsociaux,etilsvoudraientquejeleremplace.–Ilfautqu’onyaille.Laquestionneseposemêmepas.Cepourraitêtreuneincroyable

opportunitécommerciale,dit-elleenbattantdesmains.Le déplacement allait coûter cher, mais comment laisser passer une telle occasion

d’êtrepotentiellement sous les feuxdesprojecteurs ?Etpuis, de toute façon, aupointoùj’enétais,toutétaitbonàprendre.

–Onyva,m’exclamai-je,ennetenantdéjàplusenplace.À l’évidence, nous allions pouvoir développer nos contacts,mais la seule perspective

d’aller à Vegas était déjà excitante en soi. Si je me tenais à l’écart des casinos, tout sepasseraitbien.

–Génial.Onfaitnosvalisestoutdesuite,tranchaAlli.

Page 24: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Tuplaisantes?– Erica Hathaway, tu es la présidente fondatrice d’un réseau social de mode,

représentant son entreprise à Las Vegas, la capitale de l’opulence et des paillettes. Nousallonsdevoirsérieusementnousmettreauboulot.

Je m’esclaffai pendant qu’Alli entrait en action, se perdant dans notre minusculeplacard,lançanttoutessesminijupessurlelit.

–Tusais, jevaisessayerde ressembleràune femmed’affairesplusqu’àunecall-girl,Alli.

–Tun’esjamaisalléeàVegas,mabelle.Fais-moiconfiance.Onconsacralesheuressuivantesàdiscuterdenostenuespendantquejeréservaisles

vols et préparaismes dossiers pour le congrès.Dans un peu plus de vingt-quatre heures,nousserionsàLasVegas.

Le lendemain,versmidi, je traversai lecampuspouraller retrouverSid.L’heureétaitvenuedeleréveiller.

Chosequinesurprendrapersonne,SidetmoinousétionsrencontréssurleNet.J’avaisleconcept,ledesignetlamisedefondsnécessaireauxpremiersinvestissements.Aprèsavoiraffiné mon idée de base pendant quelque temps, j’avais posté une annonce parmi lesétudiantsdel’universitéàlarecherched’unprogrammateurpouraideràconstruirecesite.Sidavaitété lepremieràyrépondre.Aprèsdeuxoutroisréunions,nousavionsdécidédenousassociersurceprojet.

Jemartelaisaportequelquesminutesavantqu’ilnesedécideàouvrir.Sidétaitgrand,plusd’unmètrequatre-vingt-cinq, et c’était littéralement l’homme leplusmaigreque j’aiejamais rencontré. Avec sa peau brune et ses grands yeux noirs de chien battu, il étaitadorableàsafaçon,maisjenel’avaisjamaisconnuautrementquetristementcélibataire.Àl’évidence,jen’étaispaslaseulequiavaitbesoindesortirplussouvent.

Cematin,sesyeuxétaientcernésetinjectésdesang,jemedemandaiaufonddemoisiun nouveau jeu vidéo ne venait pas de sortir ; cela affectait généralement ses heures desommeil,déjàinstables.

–Tiens,j’aiapportélepetitdéjeuner.Je lui lançai une boisson énergétique. Il grommela quelque chose avant de retourner

danssacave–unesuitebordéliquequ’ilpartageaitavecunepoignéed’autresermites.Jelesuivisàl’intérieuretm’assissurlecanapé.

–Quoideneuf?Il se posa devant son bureau, déjà recouvert de canettes vides et d’emballages de

tartelettes.Jeréprimaiuneenviepressantedetoutnettoyer.–JevaisàVegas,participeràundesdébatsdeTechlabs,alorsjevoulaisqu’onfassele

point avant de prendre l’avion ce soir. Cette publicité pourrait nous valoir une hausse devisites,alorsj’aimeraisêtrecertainequenousysoyonspréparés.

Page 25: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Quelgenredehausse?–Aucuneidée,maisquarante-cinqmillepersonnesassistentaucongrès.Allivientaussi,

pourlesrelationspubliques.– D’accord, je surveillerai les statistiques et je préparerai quelques serveurs demasse

pourréagirfaceàuneéventuellesurcharge.Ilinscrivitquelquechosedanssoncarnetetallumasonordi.–Ondisposedumatériel,ouest-cequ’ilvafalloirenacheter?demandai-jeenespérant

évitertouteindisponibilitépouruninvestissementminimal.–Ceseratoujoursutile.C’estdanslebudget?–Euh…pasvraiment.Cevoyagen’étaitpasprévu.–Combiendetempsavantquelesfondsd’Angelcomn’arrivent?–Dans l’hypothèseoùilsarrivent, jen’enaiaucuneidée.J’espèreavoirunemeilleure

visibilité lorsque j’aurai revuMax,d’ici quinze jours. Je crois que celaprendgénéralementquelques mois, mais j’ai l’impression qu’il pourrait accélérer les choses s’il est réellementintéressé.

–Bon,onvasedébrouiller, je suppose.J’aiquelquesvieillesmachines icique jepeuxremettre en service enun riende temps. Espérons simplement que le réseaude la fac nenouslâchepas!

–Jevaisfaireconfianceàtespouvoirsmagiques.Je ne comprenais réellement qu’environ vingt pour cent de ce que Sidme racontait,

maisjenedoutaispasunseulinstantdesongénie,alorsjemedisqu’iltrouveraitbienunesolution. S’il n’était pas capable de se lever avant midi, il était capable de tirer unordinateurd’unepiledebarrettesmémoiresetdecartesmèresenquelquesheures.D’autantqueClozpinétaitégalementdevenusonbébé,etque,commemoi,ilnetravaillaitplussurgrand-chosed’autre.Jeluiétaisreconnaissantedesonengagement,mêmesicelaimpliquaitdes’adapteràsesexcentricités.

–Etcommentsepassetarecherched’emploi?demandai-jeenespérantqu’ilétaitaussipeupresséquemoiderejoindrelemonderéel.

–Rienàsignaler.Jen’yaipasconsacrébeaucoupdetemps.Secrètementsoulagée,jen’endispasplusetcommençaiàranger.–Erica,tun’aspasbesoindelefaire.Jenettoieraicetaprès-midi,jetelepromets.–Net’inquiètepas.Assure-toijustequelesitenedécrochepaspendantlesprochaines

quarante-huitheures,etonseraquitte.–Topelà!

***

Dèsque l’onpénétradans lehallduWynn, jesusqu’Alliavait raison. Ilétaitàpeine22 heures, un vendredi soir, et le casino débordait de femmes sexy vêtues des tenues les

Page 26: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

pluscourtesjamaisvues.Encomparaison,j’avaislelookd’unenonne.Dans la chambre, Allim’avait apprêtée comme une poupée avant que nous n’allions

explorerl’hôtel.J’avaischoisiunerobefourreaunoireavecdesescarpinsouverts,etunpeurelâchémescheveuxlongsetbouclés.

–Lesfillesd’icimettentprobablementcegenrederobepouralleràlamesse,Alli.–Tum’étonnes.Remonte-lajusteunpoil!Elle fit un peu ressortir ses seins dans sa minirobe fluo. Les miens emplissaient déjà

mondécolleté.Lestressnelesavaitapparemmentpasrétrécis.–Non,merci.J’aimelaissercertaineschosesàl’imagination.Ettudevraisfairepareil.– Comme tu veux. Mais personne ne nous connaît ici, de toute façon, dit-elle en

haussantlesépaules.Ce n’était pas faux.Nous avions l’occasion de nous laisser aller,mais cela pouvait se

révélerrisqué.GrâceàBlake,mapeautremblaitdéjàd’undésirpresquedouloureuxd’êtrecaressée,partout.Monvibromasseurn’étanchaitpas l’appétitqu’ilm’avait inspiré,et jemesentais dangereusement proche de ramener dans ma chambre le premier vague sosie deBlakequimetomberaitsouslamain.

Chaque fois que je repensais à ma présentation, mes pensées dérivaient vers desversions alternatives de la façon dont cette matinée aurait pu se dérouler, toutes seterminant avec l’imagedemoi allongée sur la tablede conférenceàhurler sonnom.Bonsang.Jedevaislechasserdemespensées.Ilétaitsurmalisted’indésirables,passurmalistedecourses!

Alli détourna mon attention en discourant de façon volubile de mes accessoires.Personnen’aimaitautantlamodequ’elle.

Audébut,jenecomprenaispascommentAllipouvaitconsacrerautantd’énergieàsonapparence,maisj’avaisréaliséqu’elleenvisageaitpluslamodecommeunefaçondebiensesentiraufonddesoiqued’impressionnerquiquecesoit,mêmesicelaaidaitégalementsurceplan-là.

Ilétaitminuitpassélorsquel’ons’engageadanslasalleducasinopourrejoindrenotredestination, un bar à l’autre bout de l’hôtel. L’endroit était bondé, et Alli me prit par lamainpournavigueràtraverslafoulebruyanteetturbulente.

–Erica!Jeralentis,certained’avoirentendumonprénomdansletumulte.Jenedevaispasêtre

laseuleEricadel’endroit,maislorsquejel’entendisdenouveau,jemetournaietreconnusunvisagefamilier:Blakeétaitdeboutprèsd’unetablederouletteetmeregardait.

–Merde!Filonsd’ici.Jetournailatêteetpassaidevant,entraînantAllidansmonsillage.–Attends,quiest-ce?Allimeretint,provoquantunebousculadederrièrenous.

Page 27: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–C’estBlakeLandon.–Ouah!Maisquefait-ildoncici?–Rienàfaire.Jeveuxjustemetrouveraussiloindeluiquepossible.–Ilregardedroitverstoi,Erica.Vatoutdemêmelesaluer.Alli lui fitsignedelamainetmetiravers latableoùil jouait.Parquelquemiracle, il

étaitencoreplusbeauquedansmonsouvenir.Avecsachemisenoireetsoncostumegris,ilétaitparfait.Intimidant.Diaboliquementsexy.Jeprisuneprofondeinspirationetrepoussainerveusementunemèchedemescheveuxderrièremonoreille,enespérantque la tensionsexuelle,devenuepalpable,neseraitpasperceptible.

J’allaisfaireaussivitequepossibleetrepartiraussitôt.–Erica,m’accueillit-ilavecsonregardpénétrant.Quellesurprise.Je fis de mon mieux pour paraître indifférente, mais m’aperçus que je retenais ma

respiration.Jecroisai lesbras, regrettant immédiatementmonchoixvestimentaire,maiscegestepourdissimulermondécolletén’eutpourseuleffetquedelefaireressortir.

Ses lèvres s’entrouvrirent lorsque son regard s’y attarda une seconde de trop. Jemeraidis, détournai les yeux et remarquai alors l’homme presque aussi beau à ses côtés. Ilaurait pu être le jumeau de Blake : un peu plus petit, les cheveux plus clairs, des yeuxnoisetteplussombres,presquebruns.Ilnousfitunpetitsignedelamain.

–Erica,jem’appelleHeath,jesuislefrèredeBlake.IladressaàAlliunsourirefoudroyant.Elleserradiscrètementmamain.– Heureuse de vous rencontrer, Heath. Je vous présente Alli Malloy, l’une de mes

partenaires,dis-jeenespérantsecrètementquecesprésentationsnemèneraientabsolumentnullepart.

Leregardd’AllipassadeHeathàBlake.–J’aibeaucoupentenduparlerdevous,monsieurLandon.Elleluisourit,puismesouritetsourcilla.Maintenantqu’ellel’avaitvuenchairetenos,ellesavaitàquoij’avaisétéconfrontée,

mais je ne vis pas la moindre trace de compassion dans son expression. Il était évidentqu’ellecraquaitdéjàpoursonfrère,ettoutesleschancesquej’avaiseuesdelavoirprendremonpartivenaientdes’évanouir.

–Faitesvosjeux!clamalecroupierenlançantlabille.–Vousjouezàlaroulette?demandaBlake.–Parfois,maispascesoir.C’étaithorsdequestiondurantcevoyage,sansmêmeparlerdesmilledollarsdemise

minimumàcettetable.–Ehbien,moisi.Quelssontvosnuméros?Labilleralentitdanslecylindre,etjeressentisuneétrangeurgenceàlelaissermiserà

temps.

Page 28: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

– Hum… le 9 et le 1, répondis-je à brûle-pourpoint. Ma date d’anniversaire, desnumérosquim’avaientbienserviedanslepassé.

Blakeposadesjetonsde10000$surcesdeuxchiffresetplusieursautres,etquelquessecondes plus tard, la bille retomba dans la case 9. Alli et moi criâmes à l’unisson.Moncœurbattitlachamadetandisquejem’efforçaisdefairelecalcul.

–Le9!annonçalecroupierenfaisantpasseràBlakecinqjetonscolorés.Blake lui en retourna un commepourboire, et jeta le reste dans sa poche. Il pritma

main, ce quim’électrifia. Entre cela et le résultat de la roulette, mon corps vibrait d’uneénergie contenue. Je retiraimamain, abasourdiede réaliser àquelpoint j’enavais si peuenvie.

Monregardseposasurle jetonde10000$quireposaitdanslapaumedemamain,plusquelasommedetoutcequej’avaisjamaispugagnerdansmavieàlaroulette.

–Pourquoi?–Pouravoirétémonporte-bonheur.Jen’auraispasgagnésansvous.Ilm’adressaunsourirefacétieuxqui,s’ajoutantàl’excitationdel’avoirvugagner,mefit

presque oublier à quel point j’étais encore furieuse. Cela fonctionnait peut-être avec lesautres,maisjen’allaispasmelaisseracheter.

–Jenepeuxpaslegarder.Jeleluitendis.–J’insiste.Venez,partonsd’iciavantqu’unautrenuméronesorte.Demauvaisgré,jemislejetondansmapochette,etons’éloignasansseretourner.

***

– Vous êtes transformée. J’ai failli ne pas vous reconnaître, dit Blake en se penchantsuffisammentversmoipourquejesoislaseuleàl’entendre.

Alli et Heath choisissaient les tapas pendant que nous attendions notre bordée detequilas.NousétionsdansunecantinatypiquedeVegas,àproximitéducasino,pouryfêterl’événement, et Heath charmait déjà Alli, me laissant aux prises avec Blake. Son soufflechaud courut surmoncou,provoquant instantanémentdes frissons enmoi. Jem’efforçaisde ne pas imaginer ce que feraient ses lèvres au même endroit. Sa proximité frôlaitl’inacceptable,etilexhalaituneodeurincroyablementpure,épicée,provocante,masculine.Onauraitpuenfaireunparfumetgagnerdesmillions.

–Oui,cen’estpasexactementunetenuepourunconseild’administration…Jetiraisurl’ourletdemarobe,quipeinaitàsimplementcouvrirl’essentiel,maintenant

que j’étais assise. S’ilme parcourait encore une fois du regard, je prendrais peut-être feu,justelà.

–Jepréfèrecelle-ci.

Page 29: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Ilyavaitdescentainesdejoliesfemmesdanslebar,etnombred’entreellesdévoraientBlakeduregard.Quellecoïncidence,nonseulementd’êtretombéesurlui,maisenplusdemeretrouverdanssalignedemirependantqu’Alliflirtaitouvertementavecsonfrère.

–Vousêtesicipourlecongrès?demandai-je,soucieusedechangerdesujet.–Principalement,répondit-il.–Blakeestlàpouraffaires,etmoi,pourleplaisir,ajoutaHeathenfaisantunclind’œil

àAlli.Ilenrajoutait,etAllienredemandait.Jen’arrivaispasàsavoirsielleétaitréellement

intéresséeousiellefaisaitsimplementuntrèsbontravailderelationspubliques.J’espéraisquelasecondehypothèsesoitlabonne.

– En fait, Heath est mon vice-président chargé du développement commercial. Enthéorie,ilvientluiaussipourlecongrès.

–ÀchaquefoisqueletravaildeBlakel’amèneàVegas,s’esclaffaHeath,monrôledansl’entreprise devient soudain très important. Nous avons des titres pompeux,mais pour laplupart,nousorbitonssurtoutautourdeBlake.Ilfaittoutletravail.

Je m’attendais à ce que Blake réponde, mais il ne fit que contracter la mâchoire. Ilparut un peu différent, plus posé que je ne l’avais vu. Il semblait détendu,maître de lui,mêmesijepercevaisunecertainetensionsouscettecontenanceplacide.

Allibrisalesilence.–OndiraitErica.C’estnotreintrépidesouveraine.Blakeallaitdirequelquechoselorsqueleserveurarrivaavecsuffisammentdeverresde

tequilapourlaisserprésagerquedetrèsmauvaisesdécisionsseraientprisesplustarddanslasoirée.Jeprislemien,enconcluantunpacteaveclatequilaquigarantissaitqueceseraitle premier et le dernier. J’avais déjà du mal à garder la tête froide avec Blake dans lesparages,etlatequilamefaisaitfairedesfolies.

Heathlevasonverrepourporteruntoast.–Àquoiallons-nousboire?demandai-je.–Àlavictoire,répondit-il,etnosverress’entrechoquèrent.Jepouvaisboireàcela.Jevidaimonverred’untrait,prisunquartierdecitronvert,en

aspirairapidementlejuspouratténuerlabrûluredel’alcool.Durantl’heurequisuivit,Heathnousrégaladesrécitsdesesaventuresdanslavilledu

péché, de ses pérégrinations à travers l’Europe, de l’opulence de la vie à Dubaï.Charismatique et drôle, Heath dégageait, lui aussi, du magnétisme. Alli lui posait desquestions et entretenait la discussion, ce qui était presque un soulagement. Je restaisremontée contre Blake et n’avais pas la moindre envie de partager avec lui l’once d’uneanecdotepersonnelle.

–Puis-jevousoffrirunautreverre?Quelquechosededifférent?

Page 30: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

La profondeur de la voix de Blake me fit frissonner, détournant mon attention duspectacledeséductiond’AllietdeHeath.

–Jedoisparticiperàundébatdemain,répondis-je.Ilseraitplussaged’enresterlà.(Ilétait presque deux heures du matin, plus les trois heures de décalage horaire, et lalongueurde la journéecommençaità se faire sentir,mais jenesavaispascequ’ilenétaitpourAlli.)Tuveuxyaller,Alli?

–Euh…fit-elleensetournantversHeath.–Restezencoreunmomentavecnous,luidit-ild’unevoixdouce.Ellesetournaversmoi,disantouiavecsesyeux,quis’étaientilluminéscommeunsapin

deNoël.–Tuessûre,Alli?–Oui,jevaisremonterdanspastrèslongtemps.Net’inquiètepaspourmoi.Allirayonnait.Latequilaprenaitl’ascendant.–Onferaensortequ’ellerentrebienenunseulmorceau,promitHeath.Je le crus presque. Normalement, je l’aurais culpabilisée jusqu’à ce qu’elle remonte

poursonproprebien,maisjen’avaispasenviedeluigâchersonplaisir,cesoir.Blakeselevaenmêmetempsquemoi.–Permettez-moidevousraccompagner.–Non,merci.Ceneserapasnécessaire.–Jerentreaussi.Nouspouvonsmarcherensemble.Jecédai,fermementpersuadéequejesauraissurvivredixminutesseuleaveclui.On arriva aux ascenseurs, Blake m’entraîna dans une cabine vide, en me posant la

main au milieu du dos. Ce contact inattendu me réchauffa jusqu’au plus profond. Nousétionscôteàcôtetandisquelaporteserefermait.Mesdoigtstapotèrentnerveusementsurlarampemurale.

–Ilsontl’airdebiens’entendre,dit-ilenbrisantlesilence.–J’avaisremarqué.Votrefrèreestcharmant.–Ilestimprévisible.Ilsecoualatêteetpassalesdoigtsdanssescheveux.–Allil’esttoutautant.Peut-êtrequ’ilss’éviterontlesennuisl’unl’autre.Blakefronçalessourcils,semblantendouter.Le silence s’imposadenouveau. Lebourdonnementde l’ascenseur amplifiait l’énergie

qui nous liait, comme si mon attraction pour Blake était devenue perceptible et irradiaitdanslesilence.J’avais,àl’évidence,sous-estimécequereprésentaientdixminutesaveclui.

Lorsquel’ascenseurs’arrêtaàmonétage,Blakeensortitavecmoietm’escortadanslecouloirjusqu’àmaporte.

–Nousysommes,dis-jeenespérantquenosadieuxseraientbrefs.

Page 31: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Maissamaintraversamondosjusqu’àmoncoudepourrejoindrelelongdemonbras,jusqu’àquenoussoyonsmaindanslamain.Iltraçadepetitscerclesdesondoigtdansmapaume,etjenesuspas,surl’instant,sicettesensationavaitétéagréable.Ilavaitprovoquécommeunchocdanstoutmonsystème,presqueélectrique,courantduboutdemesdoigtsversd’autrespartiesdemoncorps.

–Blake,je…Moncorpsserebellaitcontrelesappréhensionstyranniquesdemonesprit.Sonvisage

n’était qu’à quelques centimètres du mien, me grisant de nouveau de ses effluves, merappelantl’instantdenotrepremièrerencontre.

–Vousnem’invitezpasàprendreundernierverre?murmura-t-il.Sa langueparcourut sa lèvre inférieure. La façondont ilme regardait était tout sauf

innocente.Maisquipouvaitluirésister?J’avalai laborieusementma saliveet reculaiunpeu,medéconnectantde sonemprise

électrique. J’agitai négativement la tête et triturai nerveusement mes cheveux, enm’efforçantdemeconcentrersurn’importequoiquineseraitpasseslèvres.

–Jedoismeleverdansquelquesheures.–Moiaussi.Il s’agissait du même Blake Landon qui avait presque anéanti les chances de

financementdemonentreprisequelquesjoursplustôtseulement.Jen’allaistoutdemêmepascoucheraveccethomme,n’est-cepas?

Jeprisuneprofondeinspirationetleregardaidroitdanslesyeux.–Blake,jepensequevousn’avezpasl’habituded’entendreunetellechose,maisjene

suisvraimentpasintéressée.Nousavonspasséunmomentagréable,maisjesuisicipourletravail.

–Vousn’avezpasl’aird’êtrevenuepourtravailler.Jeplissailefront,maisilnefitquesourire.–Sérieusement,Erica,vousallezvraimentmedirequejenevousplaispas?Sonbrasglissaplushautsurlemur,soncorpstoutentiermecernantlentement.Déterminéeàmaintenirunedistanceentrenous,jem’adossaiàlaporte.Danslemême

temps, mon cœur menaçait de jaillir de ma poitrine. Ces quelques centimètres qui nousséparaientencoreétaient-ilslesderniersbastionsentremoietlanuitultime?

Non.Entremoietunetrèsgrosseerreur.–Si vous cherchezuncompliment, ilneviendrapasdemoi, rétorquai-je.Etmême si

vousm’attiriez,jen’agiraistoutdemêmepasainsi,pourplusieursraisons,dontmavolontédemainteniravecAngelcomunerelationlamoinsconfusepossible.

–Jen’investispasdansvotreentreprise,iln’yariendecompliqué.–Jenelevoispasainsi.

Page 32: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Commentpourrais-jevouspersuader?demanda-t-ilenmedéfiant.Le tissudesoncostumese tenditunpeuauniveaudesesbrasetdesescuisses.Bon

sang, les hommes d’affaires ne sont pas censés être aussi sexy. Je n’avais qu’une envie, ledéballer comme un paquet-cadeau. Comment résister s’ilme touchait encore une fois ou,Dieum’engarde,s’ilm’embrassait?

Jenedésirairienplusqued’entraînerBlakedansmachambreetlebaiserjusqu’àl’os,maisjen’allaispasfairecela.

–C’estbiensimple,vousnepouvezpas.Jemetournaiencherchantmaclefdansmapochette.L’instantaprès,soncorpsétait

derrièremoietunbraschaudetpossessifmeceignaitlataille.Jefermailesyeuxetprisunebrusqueinspiration,ébranléeparcecontactsoudain.

–Vousenêtessûre?Lesoufflecourt,j’essayaidésespérémentd’ignorercequeprovoquaitlapressiondeson

corpscontremondos.Meslèvresrefusaientdenommerlesmotsquejevoulaisprononcer,alorsjemecontentaideconfirmerd’unhochementdetête,enespérantqu’ilenresteraitlà.

Sonbrasrecula,puisglissapourvenirserrerfermementmahanche.Denouveau,ilmetouchait comme s’il me possédait. L’excitation était manifestement bien plus intense quel’affrontquej’auraisdûressentir,maisjenepouvaispaspourautantm’engagerdanscettevoie-làaveclui.

–Certaine,répondis-jed’unevoixtremblantequitrahissaitledoutequimetaraudait.Samaincoula le longdemonbras jusqu’àmonépaule,d’où il écarta les cheveuxde

moncou.Ilydéposaundouxbaiser,seslèvress’attardantsurmapeaujusqu’àprovoquerunfrisson.Jeressentiscommeunéblouissement,etappuyaimesmainscontrelaportepourconservermonéquilibre.

–Àdemain,chuchota-t-il.Lorsque je me retournai, il avait disparu. Il avait redescendu le couloir et pris

l’ascenseur.Jemereposaicontrelaporteenmemaudissant,enregrettantqu’ilnefûtpasresté,toutensachantqu’ilfallaitqu’ils’enaille.

Mesdoigtstremblaient,jetrouvaifinalementmaclef,etlejeton.

Page 33: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitrequatre

Le loquet de la porte se déverrouilla, et mes yeux s’écarquillèrent. La pièce étaitobscure,mais legrandréveilnumériquesur latablebasseaffichait8heures.Lasilhouetteindistincte d’une femme s’approchait silencieusement du lit à côté du mien. Sa robe fluobrillaitpresquedanslenoir.

–Alli?–Oui,c’estmoi.Jemefrottailesyeux,etlesdétailsdemaréalitéàcetinstantm’apparurentlentement.–Turentresjustemaintenant?–Oui,maman,chuchota-t-elled’untonsarcastique.J’allumailalampeposéesurlatabledechevet,éclairantAlli.–Ehbien,voyonscequelechatnousarapporté.Jemehissai surmescoudesetsouris.Elledonnait l’impressiondenepasavoirdormi

depuisdesjours–cequiétaitpresquevrai.Sonmascaraavaitcouléetsacoiffureétaitdansunétatjamaisvuchezelleenpublic–quelquescransendessousdelaperfection.

–Ah,j’ail’impressionquetumejuges!Elle se débarrassa de ses chaussures à talons et se laissa tomber sur le lit, encore

habillée.–Tuvasmeracontercequ’ils’estpassé?J’étais maintenant complètement réveillée, ce qui me surprit, paradoxalement, étant

donnél’heureetlepeudesommeildontj’avaispudisposer.–Queveux-tusavoir?maugréa-t-elleenseglissantsouslecouvre-lit.–L’intégralitédesdétailssordides,évidemment.Alliseretournaetcontemplaleplafondd’unairapathique.–Ilmeplaîtvraimentbeaucoup.Jecrusentendreunsoupir.Ohnon…–Bonsang,Alli,dis-moiquetun’aspascouchéaveclui!–Qu’est-cequeçapeuttefaire?

Page 34: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Ellelaissaretombersesmainssurlescôtés.Jejaillisdulitetlaregardaienface.–Çapeutmefaire,Alli,quejem’efforcedeprojeteruneimageprofessionnelledenotre

entreprise,etquejenem’attendaispasàcequetutetapeslefrèredeBlake.Maintenant,ilvaledireàBlakeet…oh,merde…

J’envisageaitouteslesimplicationspossiblesdecetterévélation.Elleseredressad’unbond.– Je t’arrête toutde suite. Je lui aiditque tupiqueraisunecrise siBlake l’apprenait,

alorsilm’adonnésaparole.–Incroyable.J’allaijusqu’àlafenêtrereleverlesstoresdelachambre.Alligrimaçalorsquelalumièreentra.–Ettoi,alors?Enrentrant,jem’attendaisàmoitiéàvoustrouveraulit,vucommentil

t’abaiséedesyeuxtoutelasoirée.–Alli,sérieusement.Iln’yaabsolumentrienentreBlakeetmoi.–C’estdesconneries!–Jesuissérieuse.Jenepeuxpasfoutreenl’aircetteopportunité.Jeluiaidithiersoir

quejen’étaispasintéressée.Findel’histoire.–Blaken’apasl’aird’êtrelegenredetypequis’entendrépondre«non»fréquemment.

Ettuavaisomisdemedirequ’ilétaitbeauàtomber.–Beauoupas,jesuisicipourletravail.–Erica,tum’enveuxvraiment?Ellefitunpeulamoue.La culpabilité n’était pas loin, mais je ne pouvais pas la laisser s’en tirer aussi

facilement.–Çavaaller.Dorsunpeu.Maisceseraitbienquetupuisses toutdemêmetravailler

audéveloppementdetesréseauxaujourd’hui,vuquenousrepartonsdemain.Jem’enfuis dans la salle de bains, où je fulminai en silence sous le jet régulier de la

douche.JevoulaisêtreencolèrecontreAlli,maisenfait, j’étaissurtout inquiètepourelle.C’était ma faute si elle s’était retrouvée en situation de vulnérabilité auprès de Heath, àl’évidenceuncoureurchevronné.J’étaisautantresponsablequ’elle.

Lorsque je retournai dans la chambre, Alli dormait à poings fermés sur sa couette.J’enfilaiunedestenuesapprouvéeslaveilleavecelle:uncorsagestylénoiràmotifsetunevested’unblancéclatantsurunjeandroitsombre.Jemeglissaidansleschaussuresnoiresàtalonsqu’Alliavaitlaisséesaupieddulitetprismonsac.Ilétaittempsdetravailler.Sansrenfort, une fois encore, pensai-je. Je pouvais tout aussi bien commencer à en prendrel’habitude.

Quinze minutes plus tard, j’avais trouvé la salle de conférences dans laquelle j’étaiscenséeparler.Enmontantsur l’estradeencoredéserte, je lus lesnomssur lesplaquesdes

Page 35: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

intervenants.Tu n’as rien à faire ici, Erica. Parfois, je haïssais vraiment cette petite voix intérieure,

maislà,monanxiétépassaitenmodeextrême.J’allaismetrouveràcôtédegrandspontesdel’Internet,devéritablescélébritésdanslemondedunumérique.

Souslechoc,jemelaissaitomberdanslesiègequim’étaitassigné,etregardailasalleseremplirdéjàdecentainesdeparticipantsimpatients.

Mes pensées s’emballèrent tandis que je rassemblais mes notes, en souhaitant metrouveràpeuprèsn’importeoùailleurs.Justequandlapaniquemegagna,Blakes’assitàcôtédemoi,exquisdanssachemisegriseouverteetsonjean.

–Qu’est-cequevousfaiteslà?dis-jed’untonplusexaspéréquejenel’avaisvoulu.–Bonjouràvousaussi.Ilmesouritetjemedétendisunpeu,peut-êtrelesimplesoulagementdevoirunvisage

familierdanscettefoule.Etlecontactdesabouchelanuitprécédenten’étaitpasencoreunsouvenirlointain.

Jusqu’ici,toutdanscevoyageavaitétéinattendu:larencontreavecBlakelaveille,lafascinationcompréhensibleetproblématiqued’Allipoursonfrère.EtjeretrouvaisBlakeici,enprésencedel’aristocratieduWeb.

Aprèsm’avoirlaisségambergeruntemps,ilfinitparrépondre.–J’encadrecedébat.J’enrestaibouchebée,lesquestionsducommentetdupourquoinequittèrentpasma

gorge.Ilnepouvaityavoirqu’uneseuleexplicationlogique.–Vousavezarrangétoutça?–Toutquoi?Jeledévisageai,rêvantdepouvoirl’écraserdemonregard.–Vousm’avezinvitéeici,pourparticiperàcedébat.Ilaffichaunsouriresournois.–Jenecroispaspouvoirm’enaccordertoutlecrédit.Vousêtesunacteurmajeurdela

sphèresociale.C’estbiencequevousnousavezditdurantvotreprésentation,n’est-cepas?Il s’adossa à son siège de la même façon qu’il l’avait fait durant la réunion, en me

dévisageantattentivement.–Oui,c’estcequej’aidit.Jerespiraidifficilement,trèsénervée.–Ehbienalors,iln’yariend’inquiétantàvousasseoiriciaveclescadors.Vousvousen

sortireztrèsbien.Ilsetournaverssontéléphone.Merde.J’étaisentréedanslasphèred’influencedeBlake,etmaintenantilm’entraînait

danscetteversionprofessionnelledujeuduchatetdelasouris.Combiendetempsçaallait

Page 36: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

durer ? Jusqu’à ce que je couche avec lui ? Et d’ici là, comment allais-jeme sortir de cedébatpourlequeljen’étaismanifestementpasdetaille?

La salle se remplit et les autres intervenants s’assirent autour de nous. Je fermai lesyeux,memassailestempespouréchapperaumaldecrânenerveuxquimemenaçait.

–Vousn’aimezpaslesdéfis?Jerouvris lespaupières,pourledécouvrirfaceàmoi,metoisantattentivementdeses

magnifiquesyeuxverts.Ilmepoussaitàbout,etquelquechosecéda.–J’aimelesdéfis,Blake.Maispaslesabotage.Jem’efforçaisdeneresteraudiblequedelui.Peut-êtredanssonesprits’agissait-ild’un

simpledéfi,maisjenevoyaispasleschosesdelamêmefaçon.J’avaisbeauêtrerongéeparledoute,jepouvaissortirdemesgondslorsquequelqu’unmesous-estimaitdemanièretropflagrante. J’avais travaillé avec acharnement, et je ne lui avais donné aucune raison dedouterdemoioudemescapacités.

–Croyez-moi,sijevoulaisvoushumilier,vousneseriezpaslà.–Vousavezunputaindeculot!Mavoixrésonnadanslasalle.L’animateuravaitbranchélesmicros,ettouslesregards

étaient braqués surmoi.Merde. Jem’enfonçaidansmon siège, avec l’enviededisparaîtresous terre. Apparemment, je n’avais pas besoin de Blake pourm’humilier. J’y arrivais trèsbientouteseule.

L’animateur reprit immédiatement la main et présenta les intervenants et lemodérateur, l’éminent Blake Landon. Je serrai les dents à l’annonce de son nom et à lasalve d’applaudissements qui s’ensuivit,mais il fallait que jeme reprenne. Tirer à bouletsrouges surBlakenemèneraità riendurant cedébat. Il allaitguider la conversation,et jevenaisdelemaudirepubliquement.

Je me redressai dans mon siège et m’armai de courage en quelques profondesinspirations,me forçant àmedétendre et àme concentrer.Chacun fit sa présentation, lamiennesepassabienparcequejel’avaisrépétéepasmoinsdecinquantefoisdansl’avion.Ensuite, Blake posa une série de questions qui étaient au programme aux intervenantsconcernés.Riendetoutcelan’était,etdeloin,horsdemaportée,etmonanxiétédisparutbientôt.Jem’enhardismêmeàintervenirsurdespoints laissésensuspenspard’autres,enévitant tout demême soigneusement de croiser le regard de Blake. Il pouvait brisermonélan d’un simple sourire sardonique. Son visage s’était déjà révélé dangereusementdéconcertantdansuncadreprofessionnel.

Aprèsune courte voléedequestionsdupublic, ce fut terminé. Je laissai échapperunsoupir de soulagement, heureuse d’avoir survécu. Je me maudissais d’avoir autantappréhendé ce qui s’était révélé n’être qu’une simple occasion de parler en public,totalementgérable.Criseévitée.

–Pasmaldutout,lâchaBlake.

Page 37: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Devenue totalement paranoïaque à cause des micros, je ne lui répondis que d’unregard.Jeramassaimesaffairesetmelevai,soudainimpatientedepartiretdemeretrouverloindelui.

Ilselevaaussi.–Eh,nevousenfuyezpastoutdesuite!Ilinterceptal’undesintervenantsquiquittaitl’estrade.–Alex!s’exclama-t-il.Ilsetournaetmepritparlecoude.Jerésistai,puisréalisaisoudainqu’ilmeprésentait

àAlexHutchinson,PDGdel’undesplusgrossitesdee-commercedesÉtats-Unis.–Erica,Alex.NousavonstravailléavecEricachezAngelcom,etj’aipenséqueceserait

une bonne chose que vous fassiez connaissance. Vous pourriez avoir des intérêtsconvergentsvusonpositionnementdanslamodeféminine.

–Heureuxdevousrencontrer,Erica.Jenemanqueraipasdevisitervotresite.Cet homme avait au moins quinze ans de plus que moi et ressemblait plutôt aux

costumes-cravates de mes recherches de financement à Boston, mais j’avais toute sonattention.

–Merci.Jeseraisflattéedeconnaîtrevoscommentaires.–Trèsbien.Quandl’avez-vousmisenligne?–Ilyaàpeuprèsunan.–Excellent.Jeregarderai.Voicimacarte,monnumérodeportableestaudos.Restons

encontact,etdites-moisijepeuxvousaiderd’unequelconquefaçon,d’accord?–Jen’ymanqueraipas.Mercibeaucoup.Alors qu’Alex Hutchinson s’éloignait, deux hommes approchèrent, d’à peu près notre

âge. Le premier dirigeait un atelier de conception de jeux virtuels à succès, l’autre avaitlancéunsitemusicalenpleinessorvouéàladécouvertedejeunesartistes,lancépeuavantClozpin.Jemesentismoinsgênéed’êtrelà.

On échangea quelques propos de circonstance, et Blake amena gracieusement laconversationsurmoi.

Un sentiment d’excitation enivrant s’empara de moi. J’aurais été trop pétrifiée pourchercheràrencontrercesgensparmoi-même.Maisleurattitude,dansl’ensemble,étaittrèspositive, et jeme sentais légitiméedansmaposture.Nousdéveloppionsquelque chosedeproductifquiméritaitd’êtrepousséplusavant.

Bientôt,participantsetintervenantseurenttousquittélasalle,melaissantdenouveauseuleavecBlake.

–Ouah!laissai-jeéchapperdansunsouffle,encoresouslechocdesévénements.–C’étaitsiterrible?–Non,c’étaitgénial,enfait.Jenem’attendaisàriendetoutcela.–Cen’étaitpeut-êtrepasplusmal.

Page 38: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Ilavaitraison.Sij’avaissuàl’avancelecalibredesgensavecquijedébattraisetàquije serais présentée, cela aurait été insoutenable. Mon accès de panique, ce matin, avaitheureusementétédecourtedurée,etsil’onexceptaitl’incidentdumicro,touts’étaitpasséàmerveille.Maisjen’allaispaspourautantluioffrirlasatisfactiondel’admettre.

–C’étaittrèsbien,maisjen’aipasbesoindevotrecharité,Blake.Cesingérencesdevaientcesser.Ilfronçalégèrementlessourcils.–Vouspensezqu’ils’agitdecharité?– Eh bien, c’est soit cela, soit vous cherchez àm’emberlificoter pourmemettre dans

votrelit…L’esquissed’unsourireapparutsurseslèvrestandisqu’ilmêlaitsesdoigtsauxmiens.–Jementiraissicen’étaitpaslecas.Son autre bras glissa sousma veste etm’attira vers lui. Son étreinte étaitmesurée et

ferme, me donnant un avant-goût de sa force physique. Je soupirai doucement, medélectantdelachaleurdesoncorpscontrelemien,etdel’apaisementquisemblaittoujourss’ensuivre.

–Celan’arriverapas.Maprotestation parut aussi fragile quema résolution.Mamain libre trouva sa place

sur sa poitrine, parcourut la courbe de son torse. Les battements de son cœur forts etréguliers sousmapaume faisaientéchoauxmiensalorsquemoncorps se fondaitdans lesien.Toutcequenouspourrionsfaire…

Ilme tiraplusprès, laparfaitemaîtrisequ’affichait sonvisage contreditepar l’ardeurdanssesyeux.

–Surcepoint,jenepartagepasvotreopinion.Ilinclinalatête,seslèvresàuncheveudesmiennes.Jeposaimesdoigtssursanuque,

lesglissai à travers sesmèches soyeuses.Moncœurbattait follement, réduisant au silencetoutevelléitédeprotestation.Jenepouvaiséchapperàsondésir.

Oui.En réponse, je me hissai sur la pointe des pieds. Nos lèvres se trouvèrent, chaudes,

humides. Parfait. Je me gorgeai de ses effluves. Sa main s’insinua aussitôt dans machevelure, me maintenant dans ce baiser que je n’avais aucune intention d’esquiver. Jem’accolai à lui, gémissant doucement,m’abandonnant au tourbillon de sensations que sabouchedéclenchaitenmoi.

Le boutde sa langue effleurames lèvres, les forçant à s’ouvrir. Je les écartai sous sapression, impatiente de découvrir si le goût valait l’odeur. Sa langue trouva la mienne,m’aguichantdecourtespointesqui firentplaceàdescaressesplusamples. Ilabsorbamespetitssoupirs,m’embrassaplusfort,meserraplusfort.

Page 39: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Lamainquineguidaitpasnotrebaisertaquinalapeaunueentremoncorsageetmonjean,s’attardantsurlasailliedemahanche.Lesmiennesnebougeaientpasdesachevelureetdesapoitrine.J’étaispétrifiéeàl’idéeque,sijem’autorisaislemoindregeste,jeperdraistoutcontrôleetl’enjamberaislà,surl’estrade.

La réalité commença à reprendre ses droits lorsque des chuchotements et le cliquetisd’appareils photo se firent entendre depuis la salle. Quelques participants étaient réunisprès de l’autre porte, leurs visages partiellement masqués par leurs téléphones, lesquelsétaientdirigésversnous.PutaindeDieu.

Je m’écartai de Blake qui ne semblait nullement impressionné par l’escouade depaparazzisboutonneux.Mortifiéeetpaniquée,j’attrapaimesaffairesetmeprécipitaiaubasde l’estrade,me frayant un chemin jusqu’à l’ascenseur le plus proche.Malgré toutesmesrésolutions,j’avaisperdulecontrôleavecBlake,etjenousavaishumiliéstouslesdeux.

–Erica!(Blakemerattrapa.)Attendez!Toutvabien?Ses cheveux étaient tout emmêlés,mais je résistai à l’envie de les remettre en place.

J’étaistropgravementtroublée,etlemoindrecontact,aussiinnocentsoit-il,annihileraitmarésolution,déjàdangereusementlaminée,denepascoucheraveclui.

–Évidemmentquetoutvabien!Jerêvaisjustementdedevenirlariséeducongrès!J’agitailatête,incrédule,memaudissantd’avoiragidefaçonsiirresponsable.–Eh!Toutepublicitéestunebonnepublicité,non?Ilsouritettenditsesbrasversmoi,maisjereculaihorsdesaportée.–Blake,vousnecomprenezpas!Jejouemonavenir,moi,rétorquai-je.J’en tremblais, maintenant. Trop d’émotions fortes se mêlaient – l’euphorie, la

concupiscence,lahonte.–Chut…Détendez-vous.(Ilposasamainsurmonépaule.)Ilestplusqueprobableque

cesgossesnevousconnaissentpas,etmêmesic’étaitlecas,celaneferaitpasgrandbruit.Cesgosses,quiavaientnotreâge,avaientpeut-être fortpeudechancesdesavoirqui

j’étais,maisilenallaittoutautrementdeBlake.Jehaussailesépaules.L’épuisementmetombadessusd’uncoup.Jem’adossaiaumur,

vidée.–Detoutefaçon,jesupposequejenepeuxplusyfairegrand-chosemaintenant.Blake s’approcha d’un tout petit pas et replaça unemèche de cheveux derrièremon

oreille.– Écoutez, j’ai plusieurs rendez-vous, cet après-midi, mais je vous emmène dîner, ce

soir.Jesoupirai.Ilétaittenace.–Entoutbientouthonneur,promit-il–undangereuxéclairtraversasonregard.–Vousavezl’habitudedem’humiliersansretenue,alorsnefaitespasdepromessesque

vousnesaurezpastenir.

Page 40: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Laclochetintaetlaportes’ouvrit.Jemeglissaidanslacabined’ascenseurdéserteet,miraculeusement,Blakenemesuivitpas.

Justeavantquelesportesnesereferment,ilajouta:–Jepassevousprendreà20heures.

***

JesirotaisunverredevinetAllientamaitsondeuxièmeespressoMartinidansl’undesrestaurants italienshuppésducasino.Je lamisaucourantdesévénementsde lamatinée,depuislabonnenouvelledescontactsprisavecplusieursgrandsnomsdumétier,jusqu’àlamauvaisedemondiscréditpotentielpourm’être faitphotographierdans lesbrasdeBlakequelquesinstantsplustard.

–Ilesttenace,maiscelanemesurprendpasvraiment,renchéritAlli.–Jen’arrivepasàmedébarrasserdecetteimpressionquejeperdslaguerrecontrelui.Je repris un peu de mes linguine fra diavolo, déchirée par ce que je ressentais pour

Blake.Uninstantjelemaudissais,l’instantd’aprèsjedevaisfaireappelàtoutemavolontépournepasm’offriràlui.

– Erica, je sais bien que tu es totalement concentrée sur les affaires pour lemoment,mais si ce mec te plaît, et comme il est évident que toi, tu lui plais, pourquoi ne passimplementtenterlecoup?

– J’ai traversé l’enfer, Alli. Tu le sais. Cette société est la première chose qui mepassionnedepuisbienlongtemps.Ellem’adonnéunancrage,etsijefoiretoutmaintenantparcequejen’arrivepasàcontrôlermespulsions,jenesaispascequejedeviendrai.

Si trouver un emploi plus traditionnel restait une lointaine possibilité, je refusais deconsidérercelledel’échec.Évidemment,j’étaisrégulièrementsujetteauxcrisesgenrele-ciel-est-en-train-de-me-tomber-sur-la-tête, mais j’en sortais toujours renforcée, m’impliquantplus encoreetnouspoussantplus loinque jene l’avais escompté.Enpériodenormale, jesavais jongleravec le sexeet le travailou la fac,maiscen’étaitpasunepériodenormale.J’avaisbesoinderesterconcentrée,oujerisquaisdetoutperdre.

–Tuluiasdéjàprouvétonprofessionnalisme.Tucroisvraimentqu’ilneterespecteraplussitucouchesaveclui?

–Passûr.Cen’estpasunrisquequej’aienviedeprendre.Blake était imprévisible. Il s’était montré à la fois dévastateur et extrêmement

protecteur, jenesavaisplusquoiattendredelui,enparticuliersinouscompliquionsnotrerelationenymêlantlesexe.

–Lorsque l’on suitde telles règles,Erica,on les crédibilise. Lesmecs tirentdes coupsdans tous les coins, et celane choquepersonne.Le fait que tu soisune femmene signifiepasquetun’aspasdroitàunebonnepartiedejambesenl’air.

Page 41: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–…dit la fille qui est rentrée à8heures cematin. (Je tendisma fourchettedans sadirection.) Plus sérieusement, le regard de la société est plus important pour moi quen’importequelcoupd’unsoir.

Allimarquaunepause.–Peut-êtrequeBlaken’estpasqu’unboncoup.–J’endoutefort.–Blaken’estpasjusteunpetitcondel’équipedefoot.Tudevraispeut-êtrelui laisser

unechance.Jecillai.–Tuasraison.C’estunpetitcondemilliardaire.Jenesaispascequiestlepire…Alli laissa retomber ses épaules, une lueur triste traversant son regard. Nous savions

touteslesdeuxcequiétaitlepire.– Tu as eu des nouvelles de Heath depuis ? demandai-je, espérant détourner la

conversationdeBlakeetdecetépisodepassé.–Oui,ilm’aenvoyéuntextocematin.Unlentsouriresedessinasursonvisage.Elleétaitdéjàaccro.QueDieunousaide.–Merci pour tout ? plaisantai-je, et on s’esclaffa. Tu crois que cela vamener quelque

part?–Aucuneidée.IlvitàNewYork,alors,quisait?Nousdînonsensemble,cesoir.(Elle

releva les yeux.) Enfin, si cela ne t’embête pas.On peut sortir toutes les deux, si tu veuxvraimentjeterBlake.

Jesavaisqu’ellementait,commetoutebonneamieleferait.

Page 42: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitrecinq

Sans surprise, Alli etmoi nous disputions surma tenue. On semit d’accord sur unerobebustierasymétriquepêche,digned’unrendez-voussanspourautanthurler«Sautonsle dessert. » Je recyclai mes escarpins ouverts, et ébouriffai nerveusement mes cheveuxdevantlemiroir.

Blakefrappaàlaporteà20heurespile.–Bonsoir.Jem’accrochaiàmapochettecommeàunebouée.–Erica.Unlégersouriresedessinasurseslèvres.Ilétaitvêtud’unesimplechemiseauxmanchesrelevéesjusqu’auxcoudes,etd’unjean

bleumarine.Sescheveuxhabituellementrebellesétaientsoigneusementcoifféssur lecôté,maisserebiffaienttoutdemêmeicietlà,d’unefaçonàlafoissexyetseyante.J’avaispassécesdernièresheuresàessayerdeprédire ledéroulementde la soirée,mais jen’avaisdéjàpluslesidéesclaires.

Après ces quelques instants à l’apprécier de haut en bas de façon peu discrète, jem’aperçusquesonregardétaittoutautantbraquésurmoi.Unflotd’émotionsm’envahit–vertige,désircharneletlaprémonitioninquiétantequejem’attaquaispeut-êtreàbeaucoupplus gros que moi, avec Blake Landon. Il était sexy, riche et plein d’aplomb, et meshormonesannihilaienttoutevolontéensaprésence.

–Blake!(Allimerejoignitàlaporte,letoisantd’uncoupd’œil.)Vousêtesparfaitstouslesdeux!

–Nousn’allonspasaubaldefind’année,Alli,maugréai-je.Quoiquecelayressemblaitunpeu.Saufquec’étaitleplusbeaudesmecsquivenaitme

chercher,etcelaneparaissaitpastoutàfaitnormal.Biensûr,jeprésentaisbienetj’avaiseumon lot de super coups, mais je m’étais retirée des affaires pendant des mois pour meconcentrersurmonentreprise.J’avaisoubliécequel’onressentaitquandonétaitàcepoint

Page 43: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

désirée. En fait, je n’étais pas certaine d’avoir jamais connu cela, et Blake etmoi n’avionséchangéqu’unbaiser.

Blakemetenditsonbrasetm’indiqualechemin.J’yglissai lemien,et ilnousmenaàtraverslecouloir.

–Amusez-vousbien,lesenfants!criaAlliderrièrenous.–Jem’assureraiqu’ellesoitrevenueaumatin,réponditBlakeen luiadressantunclin

d’œil.J’écarquillai lesyeux, sentantmonvisage s’empourprerà l’idéedepasser lanuitavec

lui.Étais-jeréellemententraindefaireça?Unefoisdansl’ascenseur,Blakeappuyasurlenuméro45,leplusélevédetous.–Oùallons-nous?demandai-je,surprise.–Audernierétage.–Oùilyaquoi?–Machambre,enfait.Monexcitationinitialeseflétrit.–Commec’estsubtil,Blake.Jem’écartaide luiet croisai lesbras.En toutbien touthonneur,pour sûr.Bonsang,

quellenaïveté!Blakes’esclaffa.–Cen’estpascequevouscroyez.Faites-moiconfiance.Jefronçailessourcils.–Vousnem’avezjamaisdonnéderaisondevousfaireconfiance.–J’aientendudirequ’ilfallaitdutemps,alorsilyapeut-êtreencoredel’espoir.Lesportesdel’ascenseurs’ouvrirent,et ilmemenaauboutd’unlongcouloir,oùilfit

glisser sa clef dans la porte de sa chambre. Je le suivis à l’intérieur, et fus éberluée parl’immensesuite.

Onpénétradansune luxueuseentrée, etdevantnous s’ouvraitunebaievitréeallantdusolauplafond,quioffraitunevuepanoramiquedetoutlecœurdeLasVegas.Lesoleils’était couché quelques instants plus tôt derrière la ligne de crête des montagnes arides,baignant le cielde teintesd’oretd’ambre, tandisquedevantnous sedressaituneavenueimmense forgée par l’hommequi répondait à lamagnificencede la nature.Unmilliondelumièresdonnaientvieàlanuitdanscettevillesauvage.

–J’aipenséquelavueétaitpeut-êtreplusbellequ’aurestaurant,dit-ildoucement.–C’estimpressionnant.Mesyeuxparcoururentl’horizon,ravisdesonchoix.Pourladeuxièmefoisaujourd’hui,

une excitation enivrante bouillonna au fond de moi qui était attribuable à Blake. Jetempérai néanmoins ce que j’en laissais paraître pourne pas lui donner la satisfactiondem’avoiraussiaisémentéblouie.

Page 44: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Jesuisheureuxquevouspensiezcela.Ilmeguidaverslatabledresséepourdeuxprèsdelabaievitrée.La suite en duplex baignait dans le luxe et l’élégance. La décorationmêlait diverses

matièresauxtonspastelchaleureux,depuislesmurstapissésdeveloursjusqu’auxsurfacesde marbre crème rafraîchissantes, qui contrastaient avec l’aménagement moderne chicintégréavecgoût.

Jevisitaistranquillementleséquipementsdelasuitequandunserveurapportaunseauàchampagne.

–Madame?LeserveurprésentaunebouteilledeCristalroséfrappé.–S’ilvousplaît,répondis-je.Ilremplithabilementnosdeuxflûtesàrasbord.–Jemesuispermisdepassercommande,ditBlakeentendantsacoupepourtrinquer

avecmoi.J’espèrequecelanevousdérangepas.–Celairapourcettefois.Jeplaisantais,mais en réalité, j’étais soulagée. Jen’arrivais déjàpas à réfléchir en sa

présence, il aurait été encore plus difficile de choisir ce qui pouvait être mangé avecéléganceensacompagnie.

–Ehbien,parlez-moid’EricaHathaway.–Quevoulez-voussavoir?–Quefaites-vousdevotretempslibre?La question semblait innocente, mais ses yeux trahissaient une signification plus

profonde.Mon corps se tendit,mesdoigts se resserrant sur le borddemon siège.Mesdéfenses

s’amoindrissaient dangereusement auprès deBlake. Pourquoi avais-je accepté ? En fait, jen’avais pas accepté, mais je n’avais pas vraiment refusé non plus. De toute façon, nousétionslà,etjusqu’icichacunsetenaitparfaitementbien,àl’exceptiondemalibido.

–Pourêtrehonnête,pasgrand-chose.Dumoinspascestemps-ci.–Alorsvousêtesunbourreaudetravail?–Onpourraitdireça.–Ehbien,nousavonscelaencommun.Ilsepenchaenarrièredanssonsiègeetregardal’horizon.– Il semblequevousayez lesmoyens ces temps-cid’envisager lavied’une façonplus

détendue.–Mavieestloind’êtreunevillégiature,sic’estcequevousvoulezdire.–Jenevoispascequis’yopposerait.–C’estquevousnemeconnaissezpastrèsbien.–Éclairez-moi,rétorquai-je.Unpetitoiseaum’aditquevousétiezunancienhacker.

Page 45: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Par-dessusleborddemaflûtedechampagnepresquevide,jevisunegrimacetraversersonvisage,etdisparaître.

–Ilnefautpascroiretoutcequ’onlitsurleNet.–Non?Leserveurapportanosplats,deuxfaux-filetscuitsàlaperfection,surunlitd’asperges

etdechampignonssautés.Moncœurentonnadescantiques,etjeremerciaileserveur,quidisparutaussiprestementqu’ilétaitarrivé,nouslaissantdenouveauseuls.

Affaméepar l’intensitédecette journée, jemangeaienappréciantchaquebouchéedeceplatdivin.

–L’idéedeparlerdevotrepassénevousenchanteguère,semble-t-il?Ilmarquaunepauseavantde répondre, seconcentrant sur sonassietteetévitantde

croisermonregard.–Vousavezdéjàlulerésumé,qu’ya-t-ildeplusàdire?–Quelmoyenaurais-jedesavoircommentl’onarriveàuneréussitedémentiellesivous

nemeconfiezpasvossecrets?Jefouillaisesyeux,espérantqu’ilm’endiseplus,qu’ilmeparledechosesquin’étaient

passurleNet.Ilsoupiraetsepassalamaindanslescheveux.– J’ai développé un logiciel de banque, je l’ai vendu, et maintenant j’investis dans

d’autressociétés,généralementàsuccès,pourtuerletemps.Satisfaite?–Pasvraiment,répondis-jesincèrement.–Alors,quelleestl’implicationd’Allidansvotreaffaire?Je voulais en savoir plus sur la part d’ombre de la vie de Blake, mais je décidai d’y

revenirplustard,parcequelesujetparaissaitsensible,etqueluin’avaitpasétéintrusifsurmavie.

–Elleaétémon inspirationpourcesite,en fait.Depuis troisans, jecroisavoir fait letourenmatièredemodegrâceàelle,mêmesielleinsistetoujourspourm’habillerlamoitiédutemps.Quoiqu’ilensoit,elles’occupedelapartiecommerciale.C’estellequiadénichélescontactsàl’originedelaplupartdenoscomptespayants.

–Vousavezditquesonimplicationdépendaitdufinancement,néanmoins.– Les parents d’Alli s’attendent à ce qu’elle trouveun emploimieux payé que ce que

nouspouvonsnouspermettrepourl’instant,alorsellen’aurapasvraimentlechoixtantquenous n’aurons pas de financements, ou une croissance plus importante. Elle a passé desentretiensàNewYork,doncjesupposequec’est làqu’elle irasi leschosesnes’améliorentpasici.

–Commentfinancez-vouslesitepourl’instant?–Honnêtement?Ilhochalégèrementlatête.

Page 46: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Cen’estpasuneprésentation,jesuisjustecurieux.–Nouscomplétonslesrecettesdusiteavecmonhéritagequi,grâceàcettemerveilleuse

aventureuniversitaire,s’estgrandementamenuisé.–Jesuisconvaincuquevousn’êtespaslapremièreàpuiserdansvotrepatrimoinepour

financerunrêve.Lechampagnemeragaillardit,unedétentebienvenueenlaprésencedequelqu’unqui

avait coutumedemeperturber. Il semontrait étonnammentplaisant,pourtant.Dumoinstantquenousneparlionspasdelui.

Après avoir terminé, Blake jeta sa serviette sur la table et remplit nos verres, vidantcettebouteillehorsdeprix.Ilpritsonverre,selevaetmetenditlamain.

–Suivez-moi.Jelaprisavechésitation,etilm’entraînajusqu’aucanapédecuirblancàl’autrebout

de l’immense salleprincipale. Jem’assiset il s’installaà côtédemoi, frôlantma jambedesongenouensetournantpourmefaireface.

– Donc, vous avez votre diplôme en poche, et maintenant vous parlez à Max. Etensuite?

–C’estlaquestionàunmilliondedollars.–Ouplusexactementàdeuxmillionsdanscecasprécis,renchérit-il.– C’est vrai. Je ne sais pas vraiment. Je dois quitter ma chambre sur le campus la

semaineprochaine,alorsjesupposequejevaisdevoirmedéciderrapidement.–Vousmedonnezl’impressiond’êtrequelqu’unquivaréussir,d’unemanièreoud’une

autre.Ilreplaçaunemèchedecheveuxderrièremonoreilleetfitbalancermaboucled’oreille

dudoigt,avantdereposersamainsurledossierducanapé.Moninspirationsuivantefutsaccadée,etilmeparutévidentqu’illeremarqua.–Quevoulez-vousfairecesoir?demanda-t-ildoucement,enm’observant.Commesi son regardavaitune influencedirecte sur la températuredemoncorps, je

rougis, toute ma peau s’échauffant insupportablement. Je n’étais pas naïve au point decroirequelasoiréenesetermineraitpasdansle litdeBlake,mais jerendais lesarmesunpeuplusvitequejenel’auraisvoulu.J’avaisdésiréd’autreshommesavant,etlesavaiseus.Détachéeetconcentréesurl’aspectpurementphysique,jeréussissaisgénéralementàgarderlecontrôle.MaisavecBlake,iln’étaitplusquestiondumoindredétachement.

–Pourquoipasunautreverre?Ilhésita,leboutdesesdoigtseffleurantmonépaulenue.–Biensûr,maissivousnemarchezplusdroitaumatin, jepréféreraisquecesoitpar

mafaute.Bon sang. Les images qu’évoquèrent ses mots anéantirent ma volonté. Je fermai les

yeuxuninstant,acceptantaufonddemoil’issuedelasoirée.

Page 47: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Ehbien,unevisite,alors,repris-je,àpeinecapabled’articulercesmots.Ilhaussalessourcils.–DeLasVegas?Jem’esclaffai.–Commençonsplutôtparlasuite.Ses yeux s’assombrirent, unenuancede vert intense, et parcoururent toutmon corps

avantdereveniràmesyeux.Sesdentspincèrentbrièvementsalèvreavantdelalibérer.–C’estcequevousvoulez?Quelquechosechangeadans l’airentrenous.Magorgeseserra lorsque jevis ledésir

brûler dans ses yeux. Mon besoin de sentir ses mains et sa bouche sur mon corps étaitdevenu crucial et urgent. Les répercussions possibles de mes actes en réponse à cettepressionperdaientdeleurpoidsàchaqueseconde.

Jehochaisilencieusementlatête.Ilseleva,etjefisdemêmelorsqu’ilmepritlamain.–Unevisite,alors.Il me guida à travers la salle de massage, l’office, les salles de bains annexes.

L’opulence de chaque pièce était aussi obscène que le prix qu’il devait payer pourl’ensemble.

Onempruntaunescalieràlarampedoréejusqu’àl’étageetlachambreprincipale,uneautresalledisposantd’unegrandebaievitréesurdeuxdesesmurs.Ils’arrêtasurleseuil.Jelelaissailàetm’avançaiverscepanoramaquimefascinaittoujoursautant.

–Unevueàlaquellejepourraisprendregoût.–Moiaussi,murmura-t-il.Ilétaitmaintenantassezprèspourmetoucher,maisnelefitpas,peut-êtrepourrester

fidèle de façon affolante à sa promesse de se conduire en gentleman. En cet instant deflottement, je l’attendais, impatiente de le voir prendre l’initiative, la tension et l’énergiesexuelledanslaquellenousbaignionssefaisantàchaquesecondepluspalpable.

Jelaissaiéchapperl’airquej’avaistroplongtempsretenu.Etmerde.Enhardieparlechampagne,j’attrapail’ourletdemarobeetlafispasserpar-dessusma

tête. Je restai là, poitrine nue, uniquement vêtuedema culotte, demes chaussures et demonassuranceéthylique.Lemurdeverremerenvoyamonreflet,etBlakeapparutderrièremoi.Lachaleurdesoncorpsm’irradiaitquandmapeauétaitdéjàbrûlantedegêneetdedésir.

Ilmetoucha,sonpouce traçantune lignede feu le longdemacolonnevertébraleetjusqu’auborddemaculotte. Ilparcourut labordurededentelle jusqu’àma tailleet saisitfermementmahanche,pouraccolersoudainnoscorps.Jegémisdececontactbrusque,unenotedepaniquevenantajouteràlafièvre.

Page 48: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Ma tête se lova contre son épaule, et je perçus la victoire du désir. Ses lèvresentamèrentunparcoursdedélicieux tourment,goûtant et titillantmapeauhypersensibledepuis l’oreille jusqu’àmon épaule. Unemain tenait ma hanche, tandis que l’autre saisitmon sein. Ma chair céda à son emprise, et mon téton se durcit à son toucher. Je meconsumai.Touslessensincendiés,j’étaispossédéededésiràenêtrepresqueaveuglée.

–Dis-moicequetuveux,Erica,chuchota-t-ilcontremanuque.Mentalement, j’énuméraiunesériedesuppliquessilencieuses.Jem’arquai légèrement,

et sentis sa queue se tendredans son jean et contremondos. Jeposaimesmains sur lessiennes et me retournai pour lui faire face, honteuse et vulnérable sous son regard.Maintenantd’unvertpur,sesyeuxflamboyaient,mefaisantfondredel’intérieur.Noscorpssetouchaientàpeine,mamaindescenditlelongdesapoitrine,pourralentiràl’approchedesaceinture.Bonsang,ilétait incroyable,solideetchaud.Jemehissaisurlapointedespiedsetdéposaiunbaisertremblantsurseslèvres,mabouches’ouvrantcontrelasienne.

–Jeteveux,Blake,murmurai-je.Il me rendit avidement mon baiser. Son corps se tendit dans une retenue à peine

maîtrisée.–Tun’imaginesmêmepasàquelpointjetedésire,souffla-t-il.Mes genouxmollirent légèrement. Il me serra contre lui, me coupant le souffle d’un

autre baiser pressant. Me délectant des caresses veloutées de sa langue, mes mainsdescendirent aveuglément le long des boutons de sa chemise, les courbes solides de sonventresecontractantsousmesdoigts.Jetrouvailesboutonsdesabraguetteetlesdégrafai.

–J’enaienvieaussi,murmurai-je.LesyeuxdeBlakes’écarquillèrentunefractiondeseconde.Jemordillaimalicieusement

salèvreinférieureavantdedescendrelelongdesontorse,baiserparbaiser.Sapeaumateétait tenduesur sesmuscles.Despoilsbrunsparsemaient sapoitrineet le filde sesabdossuperbementdessinés.

Agenouillée, je relevai les yeux vers lui. Il était tout ce que j’avais imaginé le premiersoir,etbienplus.Beau.Unsuperbespécimendemasculinité.

Je caressai le profil impressionnant de son érection avant de baisser son jean et soncaleçon, juste assez pour la dégager. Lorsqu’elle se libéra, je la pris dansmesmains. Seschairsétaientchaudescontrelamienne,brûlantesd’undésiranimal.Il inspiraviolemmentpendantquejel’enveloppai.

J’étais déjà toute humide par anticipation,mais si je le désirais avec force, je voulaisd’abord le goûter. Me délecter d’un instant de contrôle sur cet homme qui avait, enquelquesjours,mismonmondesensdessusdessous.

Encommençantdefaçonsuperficielleetlégère,jememisàl’œuvre.Puisjel’entraînaiplusloinenaugmentantunpeulapression.Iljura,enfonçantsesdoigtsdansmescheveux.

Page 49: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Jelecaressaisd’unemainpendantquel’autre,àplatsursonestomac,tournaitensuivantsarespiration.

–Erica,bonDieu,vienslà,attends…Il gagnait inexorablement en dureté, en épaisseur. Après quelques mouvements

profondsquitouchèrentlefonddemagorge,jesusqu’iln’étaitplustrèsloin.Avantquejepuissel’achever,ilmeremitsurpied.

Sonregardétait sauvageet intense, commes’il avait franchi les limitesde samaîtrisedelui-même.

–Àmontour,dit-ild’unevoixrudeetrauquequiressemblaitpresqueàunemenace.Ilmesoulevadanssesbrasetmejetasanseffortsurlelit.

Ilmedébarrassademaculottededentelleetposasesmainssurmesgenouxpourlesécarter. Gênée et excitée en même temps, je sentis mes joues s’empourprer. J’étaistotalement à sa merci, mais lorsqu’il vint sur moi, la sensation de sa bouche entre mescuissessubmergeatout.

J’inspiraiviolemment,sonprénomsurmeslèvres.Il fourra sa langue dansmon sexe tremblant et humide avec lamême expertise que

lorsqu’il m’avait embrassée un peu plus tôt, me flattant, me titillant et me léchant. Bonsang,saboucheétaitundondeDieu.

Il gémit, électrisant mon clito tout en me suçant. Mes parois se tendaientdélicieusementtandisquej’agrippaislesdrapsdesoiesurlesquelsj’étaisétendue.L’énergieenmontréfondss’accumulaitdangereusement.

–Tuasungoûtdivin.La sensation de son souffle sur les parties les plus sensibles combinée aux caresses

déterminées de sa langue sur cet entrelacs de nerfs serré dépassa lamesure. Je cessai depenser.

–BonDieu!Jejouisviolemment,laissantl’orgasmeparcourirtoutmoncorps.Je haletais tout enm’efforçant de retrouvermes esprits. Les paupières lourdes, je le

regardais ôter ses derniers vêtements devant moi. Malgré mon orgasme, mon désir pourBlake ne s’était pas tari. J’avais physiquement besoin de le posséder, de le sentir enmoi,d’achevercequenousvenionsdecommencer.

Ilmeredressaavecunregardsiintenseetdéterminéquejemanquaijouiraussitôt.Sabitesebalançaitdoucement,longue,épaisseetdurecommelapierre,tandisqu’ilenfilaitunpréservatif.

–Tuesprête,mabelle?J’acquiesçairapidement.Aussiprêtequejeleseraijamais.–Heureusement,parcequejenesuispascertainquejepourraism’arrêtersij’essayais.

Page 50: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Il grimpa sur le litpar-dessusmoiet je soufflaidoucement, ardemment conscientedeson approche. Les épais muscles tendus de ses cuisses lui ouvrirent un chemin entre lesmiennes. Je déployai mes jambes haut autour de ses reins et m’arc-boutai, l’entraînantfébrilementauplusprofonddemoi.

Il me saisit par les hanches et contrôla mes mouvements. Nous étions à peineconnectés,songlandlovéàmonentrée.

–Blake…gémis-jed’unevoixpantelanteetdésespérée.Ilsepenchapourtrouvermabouche,etnoslanguesmêlèrentnosgoûtsauxodeursde

nosémois.C’étaitpeut-êtretropintime,sivite,maiscelanefitqu’augmentermondésirdéjàfulgurant.

Je résistai à sa pression, avide de l’avoir tout à moi. Il relâcha son emprise et mepénétraunpeuplus. Je laissaiéchapperunpetit cridans sabouche,éberluéede sentiràquelpointilm’emplissait.Jemerégalaidesdélicesdecettesensation.Riennesemblaitplusnaturelquelemouvementimplacablementlentdesoncorpsdanslemien.Toutenmoisedétenditpourmieux l’accueillir,et l’euphoriedesapénétration fitbientôtplaceàunesoifencoreplusprofonde.

–Parfait,dit-ilenpoursuivantsonmouvement.Je fermai les yeux et le serrai contre moi. Il procédait par mouvements mesurés et

volontaires, m’emplissant et refluant en un va-et-vient marqué de pauses lancinantes,alternantsatisfactionetattenteimpossible.Chaquefluctuationmerapprochaitdelalimite.

La promesse de libération se faisait toujours plus pressante, mais il continuait dem’inciter à en attendre toujours plus, tout en couvrant ma bouche de longs baisersprofonds.Lacadencemerendaitfolle,j’avaisbesoindejouir.

–Blake,parpitié…Mavoixsebrisa.Ilralentitlerythmejusqu’àmenacerdemefairemourirdefrustration.–Fais-moiconfiance,mechuchota-t-ilàl’oreille.Soudain,sansm’avertir, ilmesaisit les fessesets’enfonçaauplusprofondenmoi.Au

deuxièmecoupdeboutoir,jeretrouvaimavoix,maislareconnusàpeinelorsquejehurlai.Implacablement, il envahitdenouvellesprofondeurs,m’offrant tout ceque j’avaispresqueimplorédelui;etjepristout.

–Putain…Dieu…Blake!Une tempête sedéchaînaitenmoi,moncorps répondantausiende façon instinctive.

J’attrapaisescheveuxparlesracinesetmecramponnaiàlui.–C’estbien,mabelle.Maintenant,jouispourmoi,gronda-t-ild’unevoixrauque.Mon orgasme me convulsa. Je m’agrippai à son torse de mes quatre membres, mon

corpsentier vibrait, tandisqu’il gagnait encoreenvolume,martelant sapropre libération,pourjouiravecmoi.

Page 51: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Ilgémit,s’arrêtaenmoi,frémissantviolemment.Lesyeuxfermés,ilselaissatombersurlescoudesau-dessusdemoi.Peu à peu, nos souffles s’apaisèrent, nos corps se calmèrent, et on commença à

redevenirnous-mêmes.Ildéposadedouxbaiserssurmesjouesetmoncoutandisquemesbrasetmesjambess’enroulaientautourdelui.

–Jenesavaispas…,soupirai-je.Ilsouritetm’embrassa.–Tunesavaispasquoi?–Que…celapouvaitêtrecommeça.Sonsourires’effaçaetses lèvress’ouvrirent légèrementtandisqu’ilparcouraitdubout

dupoucelacourbedemonmenton.Jepercevaiscommeunedouleurdanslapoitrinefaceàsaproximitéetàcetémerveillementquej’avaiscruliredanssesyeuxmi-clos.

Ilmedonnaunchastebaiserets’écarta.–Jevaismedoucher.Jerevienstoutdesuite,saufsitupréfèrestejoindreàmoi.Jesecouailatête.–Jenecroispasquemesjambesfonctionnent,là.Ilritunpeuenselevant.–Jetel’avaisbiendit.Tandis qu’il s’éloignait vers la salle de bains, je m’émoustillai une nouvelle fois en

contemplant sondos. Son cul était parfaitement sculpté, à l’instarde tout le restede soncorps.ToutenBlakeétaitdevenusuperlatif,unassautdessens,untrainquiemportaitdanssalancéetoutesmesrésolutions.

Etj’enadoraischaqueseconde.

***

Jem’éveillaibrusquement,perdue,jusqu’aumomentoùjereconnuslespapillonsdoréspeints à la main au plafond. Blake était étendu sur le ventre à côté de moi, ronflantpaisiblementdanssonoreiller.Soncorpsétait lâcheetdétendu,unevisionbiendifférentede l’animal musculeux qui m’avait rendue dingue peu de temps auparavant. J’avais dûm’assoupirpendant sadouche. Il n’avait paspris lapeinedeme réveillerpourme laisserpartir.

Jenepouvaispasdemeurerlààsonréveil.J’étaissurunpetitnuage,maisl’idéed’unembarrassant trajet post-coïtal dans les couloirs à la levée du jour me fit suffisammentredescendrepourmedécideràbouger.

Une lumièreambiantevenuedes frénétiqueséclairagesurbainsemplissait lachambre,maislecieldudésertdevantnousétaitd’unnoird’encre.

Je me glissai doucement hors du lit et m’habillai ; malgré tous mes efforts, je neretrouvaipasmaculotte.Jemismeschaussures,puism’arrêtaidevantlatabledubureau.

Page 52: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Jegriffonnaiunenote,etdéposailejetonde10000$par-dessus.CequisepasseàVegasresteàVegas…Affectueusement,Erica.

Jem’imprégnai de l’imagedes gratte-ciel uneminutede plus, puis quittai la suite de

Blakesansunbruit.Quelquesinstantsplustard,jemefaufilaidansmachambred’hôtelavecunediscrétion

impressionnante.Alliétaitcaléecontreunoreilleretregardaitlatélévisionquandj’entrai.–Eh,qu’est-cequetufaisencoredebout?Ilétaitprèsde2heuresdumatin.–Eh,qu’est-cequetufaisencoredebout?merenvoya-t-elleenpinçantleslèvres.–Euh…Rien.–Petitedévergondée!Raconte-moitout!Ellecoupalesondelatéléets’assitentailleursursonlit.–Pasgrand-choseàdire.Jehaussailesépaulesetquittaimarobepourunpeignoir.–N’essaiemêmepas,Erica.Crachelemorceau.Maintenant.Ellepointasonpetitdoigtmanucuréversmoi.Je soupirai etm’assis sur le reborddemon lit, face à elle. Je lui avais fait une scène

identiquelematinmême.Quellehypocrite!– Jedirai justeque siHeath ressemblene serait-cequ’unpeuà son frère au lit…(Je

butaissurlesmots.)…alorsjetepardonne.Çateva?–Laissetomber.C’étaitsensationnel?– Iln’yapasdemots.Maintenant, il fautque je trouve lemoyendeme tenir leplus

possibleàl’écartdelui.Elleplissalefront.–Pourquoi?Qu’est-cequetuveuxdire?–Onaeunotreaventure,maisj’espèrevraimentqu’ils’entiendralà,parceque…Jelaissaitombermonvisagedansmesmains,quiportaientencoresonodeur.Jem’en

imprégnai,etlessouvenirsdenotrenuitm’envahirent.–Erica,qu’est-cequisepasse?Jemeredressaibrusquement,commesij’avaisétépriseenfaute.–Tuétaisentraindemedirequetuvoulaisquevotreaventurerestesanslendemain,

merappela-t-elle.–Jenesaispas…(Jemetortillailesdoigtssurlescuisses.)J’aijustel’impressionqueje

pourraisviteneplusmepasserdeça.Nidelui.Jesuislàpourletravail,etdéjàjenepensequ’àlui.

Jefisunsigneapproximatifversleplafond.Jechassaicessouvenirssirécents,sachantqueBlakeétaitencorenu,endormiquelquesétagesplushaut.

–Jenesaisvraimentpas.Jen’arriveplusàpenser.Ilfautquejedorme.

Page 53: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Alli acquiesça,mais je saisis un léger sourire avant qu’elle éteigne la télé et retournesoussacouette.

Soulagéeparcerépit,jemeretiraidanslasalledebainspourprendreunedouche.L’exaltationdecette intimitéavecBlakes’amenuisaàmesureque l’eaumartelaitmon

corpsexténué,épuisantcequ’ilmerestaitd’énergie.Ilavaitdéjàpristropd’importance.

Page 54: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitresix

Plusieurs jours s’étaient écoulésdepuisnotre retourdeVegas. Jem’efforçaisde croirequemonexistenceallaitrevenirà lanormale,maisrienn’étaitplusstabledansmavie.Jedevaistrouverunapparttoutengérantmonentrepriseàpleintemps,etjen’arrivaispasàmesortirBlakedelatête.

Malgré tout cequi enmoi souhaitait qu’onen reste à cette seulenuit,mapetite voixintérieure continuait d’espérer qu’il trouve unmoyendeme contacter. Jem’en voulais deressentircedésirfoudequelquechose–dequelqu’un–quejen’auraisjamais.

À l’instar de notre baiser public durant la conférence, je n’étais qu’une anomalietemporaire. Une passade pour un milliardaire arrogant qui n’avait aucune raison des’attardersurquiconque.

Je survolai mes mails et remarquai que j’avais obtenu exactement ce que j’avaisdemandé.

Lorsque je quittai le campus, j’entendis quelqu’un m’appeler. Une fille aux cheveuxblonds coupés court montait les marches dans ma direction. Elle avait l’air d’une jeunemannequin.Grande,bronzée,impeccablementvêtued’undébardeuretd’unejupeenlin.

–Liz,dis-je.Commentvas-tu?Ellem’adressaunlargesourire.–Trèsbien.Jen’arrivepasàcroirequecesoitfait.–Oui,letempspassevite.Jehochailatête,renchérissantsursonincrédulité.–Tuveuxqu’onprenneuncafé?J’aimeraissavoircequetudeviens.Lachaleurdesesyeuxbrunssemblaitsincère,maisj’aitoujoursessayéd’évitercegenre

desituation.Notreamitiés’étaitestompéelorsquej’avaischangédechambresurlecampusaprès notre première année commune, et nous n’avions jamais vraiment pris le temps denous revoir. J’hésitai.Pasde cours,pasdedevoirs,pasde rendez-vous. Jen’avaisaucuneexcuse.

Page 55: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Biensûr,répondis-jedansunhaussementd’épaules.Onparcourutlacourtedistancequinousséparaitducaféleplusproche,oùquelques

mecs branchés et ténébreux servaient de délicieux cappuccinos à des prix prohibitifs. Ons’assit à une table pour deux, le tumulte du café emplissant le silence entre nous. J’avaiscroiséLizsurlecampus,detempsentemps,maisnousn’avionsplusvraimentparlédepuisdesannées.Nousnousconnaissionsàpeinefinalement.

–Tuasdesprojetspourcetété?demandai-je.–JeparsquelquessemainesàBarceloneavecmesparents,etjecommenceàtravailler

enjuillet.–Oùça?–Dansunesociétéd’investissement,ici,àBoston,àalignerdeschiffres,quelquechose

danslegenre.(Ellesoufflasurlafuméedesatasse.)Ettoi?–Enfait,j’ailancéunréseausocialdemodel’étédernier,etjevaism’yconsacrerpour

untemps.Jevaisvoiroùcelapeutmemener.–Incroyable.Jen’auraisjamaisimaginé!Je haussai les sourcils. Tu imaginais quoi, me demandai-je en grignotant la croûte

feuilletéedemoncroissantauchocolat.– Comment vont Lauren et les autres ? demandai-je en évoquant les filles avec

lesquellesnousavionspartagéunétagedenotresororité.– Elles vont bien. (Elle marqua une pause avant de reprendre.) Mais tu nous as

manqué.Jebusunelonguegorgéedemoncappuccino,pressentantoùcetteconversationnous

conduirait. J’en avais fini avec la fac, et un nouveau chapitre débutait. Il était peut-êtretempsdefaireunpeuleménage,surtoutsijedevaiscontinuerdelacroiserenville.Bostonn’étaitpassigrandequeça.

–Jesuisdésoléedenepast’avoirprévenueàl’avancedemadécisiondedéménageràlafindel’année.Maisj’avaisd’autreschosesentête,àl’époque.

C’étaituneuphémisme,maisjen’allaispasm’étendresurlesujetavecelle.Ressasserdevieuxsouvenirsdouloureuxétaitbienladernièrechosedontj’avaisbesoin.

–Jelesaisbien.Jecroyaisjustequenousétionsamies,tusais?– Nous l’étions, répondis-je. Nous pouvons toujours l’être. J’avais juste besoin d’un

nouveaudépartaprèscequ’ils’étaitpassé.Elleacquiesçaetm’adressaunlégersourire.Jesoupirai,résignéedevoirquemalgrémesefforts,onnemelaisseraitpasesquiverle

sujet.–Riennefutpluscommeavant,aprèscettenuit-là.Toiet lesautresétiez lesmêmes,

maismoipas.Jenepouvaisplussortirfairelafêteavecvouscommesiderienn’était.

Page 56: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Je pris une longue inspiration, m’efforçant de refouler les souvenirs douloureux. Jerepoussaimonassiette,unpincementnauséeuxaufonddestripes.

–Celan’avaitrienàvoiravecnotreamitiéniavectoi.C’est justequejenesupportaispluscesexpressionssur tous lesvisages.Etpuis, si j’étais retombéesur lui, tuvois?Jenesaispascequej’auraisfait.

Composer avec ce qui m’était arrivé avait déjà été bien assez difficile. À l’époque, lamoindre éventualitéde le revivred’unequelconque façonme terrifiait. La seule chosequim’empêchait de regarder constamment par-dessus mon épaule aujourd’hui était d’avoirenfoui ces souvenirs si profondément que j’arrivais à peine à imaginer que l’homme quim’avaitblesséeexistaitencore.

Lorsque je relevai les yeux vers elle, la pitiédans son regardme soulevaplus encorel’estomac.Jeregardaimapochetteetcherchaiuneexcuseplausiblepourpartir.

–J’aivouluenparleravectoi,maistunem’enasjamaislaissél’occasion,dit-elle.–Crois-moisituveux,maisjen’aimepasenparler.Jepinçai fermement les lèvres.Jenevoulaisplus jamaisendiscuterniyrepenser.Ce

n’étaitpaslafautedeLiz.Ellen’étaitresponsablederiendetoutcela.Ses yeux étaient brillants et innocents, etme rappelaient toutes ces soirées passées à

piller les sucreries des colis de ravitaillement envoyés par ses parents, à partager noshistoiresetnosrêvesavecnaïveté.

Jemerenfonçaidansmonsiège,inspirantprofondément.–J’avaisbesoinderéglercertaineschosesparmoi-même,etàlafac,jen’yarrivaispas.–Jecomprends,opina-t-elle.Ce n’était pas le cas,mais je lui reconnaissais d’avoir essayé,même si elleme faisait

revivredesévénementsdontlesouveniravaitétéenterrédepuislongtemps.–Peut-êtrequ’onpourraitserevoiràmonretourd’Espagne,renouerunpeu,dit-elle.

Sansreparlerdecettehistoire,évidemment.–Biensûr.Jemeforçaiàsourire.Jenepouvaispaschanger lepassé,maisnouspourrionspeut-

êtrerattraperunpeudecequiavaitétéperdu.–Restonsencontact.On parla un peu des professeurs et des appartements en ville pendant que Liz

terminaitsonmuffin.Puisonéchangeanosnumérosdetéléphoneetonsefitnosadieux.Alors que je retournais vers le campus,mon portableme signala l’arrivée d’un texto.

C’étaitAlli:Besoindeteparler.J’aidesnouvelles.Monestomacseserra.Jelarappelaienmarchant.–Quesepasse-t-il?–J’aidesnouvelles.–Oui,j’aicompris.Lesquelles?

Page 57: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Ellemarquaunepause.–J’aidécrochéleposte.–Génial,bafouillai-je.Ma déception était évidente au son de ma voix. Je n’avais pas pu m’en empêcher.

C’étaituneterriblenouvelle.–Erica?–Queveux-tuquejetedise?Jememis un peu à l’écart des piétons quime dépassaient sur le trottoir. Revoir Liz

m’avait troublée,etmaintenant, jeperdaisAlli–mameilleureamie,macolocataireetmapartenaireenaffaires.Iln’yavaitpasdemeilleurscénarioàcettejournée.

–Toutesmesfélicitations,Alli.Jesaisquetul’espérais.Malheureusement,pasmoi.Àl’autreboutdelaligne,Allirestasilencieuseplusieurssecondes.–Nousenavonsparlé,etmaintenanttuparaissurprise.Elleavaitraison,maiscelan’atténuaitpaslechoc.Leschosessemettaientenbranle,à

quelquesjoursseulementdeladécisionqueprendraitMaxdenousfinancerounon.–Quandpars-tuàNewYork?–Dansquelques jours.J’aiquelqu’unchezquihabiterenattendantdemetrouverun

logement.Montéléphonemesignalaundoubleappel.Jenereconnuspaslenuméro,maisj’avais

besoin d’une excuse pour mettre fin à cette discussion avant de dire des choses que jeregretterais.

–J’aiunautreappel,Alli.Ilfautquejeleprenne.Ellesoupira.–D’accord,àplustard.Jeremarquaiunenotedeculpabilitétoutenpassantsurl’autreligne.–Allô!–Erica?C’estBlake.Jejuraiensilencepourtouteslesfoisoùj’auraisétéraviedeluiparler…–Cen’estpaslemeilleurmoment.–Tuvasbien?–Jevaisbien.Mavoixlaissaitentendreexactementlecontraire.–Oùes-tu?Jesuisenville.Jeregardaialentour,cherchantunpointderepèreévident.–PrèsdeCampbellSquare.–Jepasseteprendredanscinqminutes.Ilraccrochaavantquejen’aiepuréagir.

Page 58: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Jem’assissurunbancduparc,jevérifiaiparesseusementmesmailssurmontéléphone,essayantdemedistrairedelabombequ’Allivenaitdelarguer.Dansl’undesmails,Sidmesignalaitunapportconvenabledenouveauxutilisateursdepuislaconférence,unenouvellebienvenue, parce que je commençais à me demander si cet aller-retour de cinq millekilomètresn’allaitpasse réduireàuncoûteuxplanculpourBlake.Mespenséesrevinrentd’elles-mêmesàAllietàLiz,àlafaçondontjem’étaisretrouvéesisoudainementseulecettedernièreheure.Mesyeuxmebrûlaient,etjechassaiunelarmequicoulait.

Uncoupdeklaxonme ramenaà la réalité.Blakeétait assisdans le siège conducteurd’une élégante voiture de sport noire arrêtée au coin de la rue. Je m’approchai et fusdéconcertéepar l’absencedepoignée sur la portière, jusqu’à ce qu’elle jaillissehorsde sacacheducôtépassager.Jemontaietfusimmédiatementfascinéeparl’immenseécranLCDsituéentrelessiègesconducteuretpassager.

–Qu’est-cequec’est?demandai-je,ébahiepartouscesaccessoiresetgadgets.–C’estuneTesla.Jefixailaroutedevantnous,attendantquelavoituredémarre.–Hey,dit-ildoucementenpassantsonpoucesurmonmenton.Ilavaitl’airfraisetenthousiaste,maissonsouriredisparutbienvite.Magorgeseserra

commesij’allaismeremettreàpleurer.Jeravalaimonchagrin,moncorpsseraidissantenungested’autodéfense.

–Jevaisbien,vraiment.Jedétournailatêteeteffaçaitoutetracepossibledemascaraquipouvaitindiquermon

récentembarras.Jenevoyaispascommentj’auraispum’afficherdevantcethommeencoreplusvulnérablequejenel’étaisdéjàetmaintenirunsemblantd’intégritéprofessionnelle.

–Qu’est-cequetuveux?repris-je.–Jevoulaistevoir.Tuasfaim?–Biensûr.Ce n’était pas le cas, mais je voulais être n’importe où sauf là. Je laissai Blake nous

conduiredanssavoiturehigh-techdontleconstructeurvenaitdevoirmontersesactionsenflèche.

–Combiend’actionsas-tuchezTesla?demandai-je,alorsque lesbâtimentsdéfilaientautourdenous.

–Jesuisentréaudeuxièmetourdefinancement,alorsunassezbonnombre.–Évidemment,maugréai-je.Blake nous amena en ville en un temps record, sans trop se soucier du code de la

route,maisenmelaissantuneimpressiondesécurité,etsurtoutlesoulagementdelaisserlecampusderrièremoi.On fit le resteducheminensilence jusqu’àcequeBlakesegaresuruneplaceréservéedansunparkingprivé,enfacedelaCustomHouseTower.

Page 59: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

LeBlackRose étaitunpub irlandais au cœurdeBoston, àquelquespasdes célèbresFaneuilHall etQuincyMarket.À l’intérieur,unbardebois sombre s’étendait sur toute lalongueurd’unmur,etdesblasonsdelamèrepatriecouvraientlesmurs.Blakeetmoinousinstallâmes dans un coin tranquille d’où nous pouvions voir les passants vaquer à leursoccupations:destouristes,desbanquiers,desconducteursdecalèches.

La jeuneet jolie serveuseétaitpimpanteetnousdemandacequenousvoulionsavecunaccentirlandaisquimefitpenseràmonprofesseurpréféré,quis’apprêtaitégalementàquitterBostonquelquessemainesplustard.

– Deux petits-déjeuners irlandais complets et deux Guinness, demanda Blake en luirendantnosmenussansmeconsulter.

–Tucommandestoujourspourlesautres?–Jenevoulaispasquetutefassesviolencepourcommanderunepintesi tôtdans la

journée.Il se pencha en avant, son geste faisant saillir ses biceps qui paraissaient sous les

manchesdesontee-shirt,ornédulogoInitechinspirédufilm35heures,c’estdéjàtrop.Ilnedevaitpasavoirderendez-vouspourêtrehabillécommeçaunjourdesemaine.

–Pourquoitupleuraistoutàl’heure?Jesecouai latête,épuiséeetdésarméeparcetête-à-tête inopinéavecBlakeauquel je

n’étaispaspréparée.–Cen’étaitpeut-êtrepasunetrèsbonneidée.Blakepritmamainalorsquej’allaisattrapermonsac.–Eh,jesuisdésolé.Je fermai les yeux, aspirant désespérément à m’effondrer quelque part où Blake ne

seraitpaslàpourlevoir.–Reste,dit-ildoucement.Jeme rassis, laissantmamain dans la sienne,ma colère retombant doucement. Son

contactavaituneffetapaisantquim’agaçait,maisquejecommençaisàapprécier.–Pourquoivoulais-tumevoir?– Eh bien, déjà, parce que tu ne m’as pas laissé l’occasion de te dire au revoir. Tu

t’enfuistoujours?– Je ne pensais pas que cela te manquerait, répondis-je, embarrassée par toute

l’histoire,alorsmêmequejenepensaisqu’àceladepuisquej’avaisquittésasuitedeuxjoursplustôt.Detoutefaçon,monvolretourpartaitauxaurores.

–TuaseudesnouvellesdeMax?J’inspiraiprofondément,heureusedereveniràunediscussiond’affaires.–Oui,nousavonsrendez-vouslasemaineprochaine.–Ettarecherched’appart?J’ouvrisdegrandsyeuxetgémis.

Page 60: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Maintenant qu’Alli est officiellement en route pourNewYork, je suppose qu’elle sesimplifie.

–Celan’apasl’aird’êtreunebonnenouvelle.–Effectivement,jevaisêtreobligéederéapprendreàm’habillertouteseule,celaneva

pasêtresimple,plaisantai-je.Jenementaispas,maissongoûtenmatièrevestimentaireneseraitpaslaseulechose

qui allaitmemanquer. Alli étaitmameilleure amie,ma confidente,ma sœur d’armes. Jen’arrivais toujours pas à croire quema coloc allait disparaître. Nous ne serions qu’à uneheure de vol,mais je ressentais une peur irrationnelle que nos vies allaient commencer àévoluer dans des directions différentes, et que cela finirait par affecter l’amitié que nousavionssipatiemmentconstruite.Seulletempsledirait.

–Jeconnaisunbonagent.Blaketiraunecartedevisitedesonportefeuilleetmelatendit.FionaLandon,courtier

etagentimmobilierpatenté.–Sielleestdetafamille,jecrainsqu’ellen’aitrienquisoitdansmesmoyens.– C’est ma petite sœur, on ne sait jamais. Elle a la réputation de faire de véritables

trouvailles.Dis-luijustequetuviensdemapart.Jesoupirai.– Je ne t’ai parlé dema situation qu’au détour de la conversation. Ce n’était pas un

appelàl’aide.Jesuistoutàfaitcapabledetrouverquelquechoseparmoi-même.–Je lesaisbien,dit-ilgentiment,encaressantmesdoigtsduboutdesonpouce.Mais

appelle-la,insista-t-il.Jeretiraimamainetglissailacartedansmonsac,ensachantquejel’appellerais,pour

lasimpleraisonqueBlakelevoulaitetqu’ilnelâcheraitpastantquejenel’auraispasfait.La serveuse apporta notre petit-déjeuner, aussi riche en goût qu’en cholestérol, les

deux caractéristiques essentielles d’une nourriture régressive dont j’avais bien besoin à cemoment-là. La faire passer avec quelques gorgées de Guinness n’était pas mal non plus.Blakeetmoipoursuivionsnotreconversation,parlantdechosesdiverses,desport,unsujetsur lequeldeuxoriginairesdeBostonpouvaient toujours s’accorder. Lorsque jen’étaispasen pleine tourmente émotionnelle et qu’il ne me jetait pas la tête la première sur desmontagnesrussesprofessionnelles,jeletrouvaisplutôtdebonnecompagnie.Petitàpetit,ilmedébarrassademonhumeurmaussade.

Dehors,lesoleilréchauffaitlesruespavéesalorsqu’onsedirigeaitverslavoiture.Aprèstoutescesannées,Bostonme fascinaitencore.Les ruesavaientunehistoireet lesgensuncaractèrequimefaisaienttoujoursm’ysentirchezmoi.

Blakenouasesdoigtsdanslesmiens,etlesbattementsdemoncœurs’accélérèrent.–Oùva-t-onmaintenant?demanda-t-il.

Page 61: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Jevoulaismeconvaincrequelaquestionétaitinnocente,maisjevisl’interrogationdansson regard. J’aurais bien répondu « Chez toi »,mais je n’allais pas prendre l’habitude decoucheravecBlakeàchaquefoisqu’ilmeregardaitdecettefaçon-là.

Jebaissailesyeux,m’efforçantdefaireabstractiondemondésir.–Jedevraisrentrer,j’aiencorebeaucoupdetravail,dis-jeenespérantqu’ilmecroirait.Ilmedévisageauntemps,silencieux.–D’accord.Jeteramène.Sur lecheminduretour, leportabledeBlakesonna.Laphotod’unesplendidebrune

s’affichasurl’écranLCDàcôtéduprénomSophia.Il ignoral’appeletgardalesyeuxrivéssur la route, sans trahir lamoindre émotion. Jen’avais aucundroitdedemanderqui elleétait.Nousn’avionspasuneréellerelation,et ilétait irréalisted’imaginerunhommeaussiricheetbeauvivrecommeunmoine.Néanmoins, l’idéed’uneautrefemmedanssaviemepiquaauvif.

On s’arrêta devantmon bâtiment, et Blake fit le tour de la voiture pourm’ouvrir laportière.

Enmontant lesmarches, je trituraimes clefs. Jeme retournai pourdire au revoir, etBlakem’attiratoutcontrelui.J’eneuslesoufflecoupé.

–Jen’aipaseumonbaiserd’adieuladernièrefois,mademoiselleHathaway.Avant que j’aie pu répondre, il couvritma bouche avec la sienne. Je fondis dans son

baiseretdanslachaleurdesoncorps.Bonsang,seslèvres.Lesnuagesnoirsdelamatinéedevinrent un lointain souvenir, remplacés par un feu qu’aucun d’entre nous ne pouvaitcalmer.

–Invite-moiàmonter.Jereculai,haletante,etsecouailatête.–Alors,vienschezmoi,reprit-ild’unevoixrauque.Quelque part, très loin, je commençai à analyser tout cela, me retirant de l’instant

présent.–Jenepeuxpas.Techniquement, jepouvais.En fait, jenevoulais rienplusqu’unenouvelleversionde

manuitàVegasdanslelitdeBlake,maisjeredoutaiscequecelaentraînerait.Unesériedecoups d’un soir ?Ma place parmi celles qui ont réussi à attirer son regard ? Par ailleurs,j’avaisplusquejamaisbesoindemeconsacreràmontravail.MefairerégulièrementbaiserparBlaken’allaitcertainementpasm’yaider.

–Undîner,alors.–Non, insistai-je.D’autant que le dernier ne s’est pas vraiment fait en tout bien tout

honneur.–Vraiment?Dansmonsouvenir,c’esttoiquiasdemandéàfaireletourdeschambres.

Page 62: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Ilpressasonérectionnaissantecontremoi,metirantungémissement.Jem’efforçaidem’inquiéterdufaitquenousnousoffrionsàlavuedespassants,maisjecraignaissurtoutdeperdre le contrôle et dem’enfoncer un peu plus dans une attirance dangereuse qui avaitdéjàuntropfortascendantsurmoi.

– Blake, sérieusement, Vegas c’était vraiment bien. (Je marquai une pause, tentantdésespérément de me ressaisir.) Ce n’est juste pas le bon endroit pour poursuivre entrenous.

Jel’embrassaiaffectueusement,lerespirantunedernièrefoisavantdemesoustraireàsonétreinte.Ilmerelâcha,maisaudésirdanssesyeux,jevisqu’iln’enétaitpassatisfait.

–Aurevoir,Blake.

Page 63: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitresept

Nousn’étionsplusqu’àquelques joursde la fermeturedesdortoirs, et jen’avais plusbeaucoupdetempsnid’optionspourtrouverunendroitoùvivre.Jen’arrivaispasàcroirequej’avaislaisséfilerceproblème,maislaviemultipliaitlesembûchescestemps-ci,alorsjedécidaidecontacterlasœurdeBlakeenespérantunrésultatrapide.

FionaLandonétaitéblouissante.Sescheveuxbrunclairbouclaientsousunbobsimpleet stylé. Jeune, professionnelle et élégante, elle était vêtue d’une robe à pois bleumarinelorsquejelarencontraipournousmettreenquêtedemonpremierappartement.

Les premiers qu’ellemeprésenta correspondaient àmes attentes : dansmonbudget,plutôt petits, bien situés, à bonne distance des transports en commun. Je réalisairapidementquej’allaisdevoirfairequelquesconcessions,ouprévoirunbudgetplusréaliste.

Ondéjeunasurlepoucedansunpetitrestaurantprèsdujardinpublicendressantunbilanrapidedesvisites.

Aprèsavoirpasséquelques coupsde fil pourorganiserunevisitededernièreminute,Fionamerejoignitànotretable.

–Alors,d’oùconnais-tuBlake?Jem’étouffaiquelquepeuavecmalimonade.Bonsang,siseulementellesavait!–JesuisenpourparlersavecAngelcompourqu’ilsinvestissentdansmonentreprise.–Oh,c’estgénial!J’espèrequeçavamarcher.–Moiaussi.– Blake s’implique énormément dans ses investissements. J’ai vu certaines de ces

sociétésvraimentdécoller.J’acquiesçai et me dispensai de lui dire qu’il avait passé sur moi ; enfin, sur

l’investissementdansmonentreprise.Ilmepoursuivaitphysiquementavecladéterminationobstinéequel’onpeutattendred’unimpitoyablehommed’affaires.

–Ettoi?Tufaiscelaàpleintemps?–Blakedétientplusieurssociétés immobilières, jemeconsacreengrandepartieà leur

gestion,maisj’aiaussid’autrescontactsdanslemétier.

Page 64: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Jesupposequec’estunebonnechosequedetravaillerenfamille.–Absolument.Blakenousatousralliésàsesprojets.–J’airécemmentrencontréHeath,enfait,dis-jeendélaissantcommodémentlesdétails

denotresoiréeàLasVegas.–Ahoui?–C’estunpersonnage,poursuivis-je,enespérantenapprendreunpeuplussurcefrère

charismatiqueettoutcequ’ilpouvaityavoirentreBlakeetlui,aumoinspourlebiend’Alli.–Onpeutledire.JenesaispascommentBlakefaitaveclui.(Sonregardseperditdans

levide,sonvisagetotalementinexpressif.)Tuasdesfrèresetsœurs?–Non,iln’yaquemoi.Durantdesannées,iln’yavaitlittéralementeuquemoi.J’avaissouventimaginéceque

la vie aurait pu être avec un frère ou une sœur. Quelqu’un avec qui partager le fardeauémotionnelde lamortdemamère, allégernospeines, s’entraider. Lapersonne laplus àmême de savoir ce que j’avais vécu était Elliott mais, comme moi, il était passé à autrechose.

Onterminanotredéjeuner,puisFionanousconduisitjusqu’audernierappartementdelajournée,qui,selonsesdires,devaitbeaucoupplusressembleràcequejecherchais.Elles’arrêta devant une maison urbaine en grès rouge, une brownstone pittoresque surCommonwealthAvenue.Larueétaitbordéed’arbresd’unboutàl’autre,etunepromenadeet des espaces verts impeccablement entretenus séparaient les deux côtés de la rue. Lequartier abritait de nombreux membres du Who’s Who de Boston, et si j’appréciais lechangementdedécor par rapport auxmornes endroits visités jusque-là, jemedemandaisjusqu’àquelpointnousallionsdépassermonbudget.

Néanmoins, je la suivis dans les escaliers. On entra dans un trois pièces lumineux etspacieux.

–Ouah!–Ilvientd’êtremissurlemarché,ditFiona.Les prises étaient neuves, les murs venaient d’être repeints, et le parquet de bois

sombreétaitimpeccable.–C’estparfait,Fiona,maisjenepeuxpasmepermettrequelquechosed’aussibien.–Lepropriétaire leproposeavecun loyeradaptableau locataire. Il est au-dessusde

tonbudget,maisc’estunetelletrouvaillequ’ilfallaitquejetelemontre.Ellemetenditledescriptifprécisantleloyerdemandé,bienau-dessusdemonbudget,

maistoutàfaitjustifiéétantdonnélestandingqu’iloffrait.J’expirailentementetfisunpeudecalculmental.–Tupeuxtoujours trouverunecolocataire,avec ladeuxièmechambre. Ilneserapas

disponiblelongtemps,Erica,alorssitupenseslevouloir,ilfautquej’appellemaintenant.

Page 65: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

J’auraisunebaievitrée,unebaignoireetunepiècesupplémentairepouryfairecequeveux.Mavienageaitdansungrandn’importequoicestemps-ci,alorspourquois’arrêter?

–Oùest-cequejesigne?

***

Celaressemblaitétonnammentàuneruptureet,àpeuprèsdelamêmefaçon,fitdesravagessurmesnerfsdéjàéprouvés.Toutesdeuxprêtes,ons’installasur lesmatelassansdrapsdudortoir,enfaisantgémirlesressorts–euxn’allaientpasmemanquer.

– Tu as eu des nouvelles deHeath ? demandai-je, anxieuse de briser ce silence et latensionquis’étaitinstalléeentrenous.

Ellehaussanotablementlessourcilsethochalatête.Bien,j’avaisdroitàsonsilence.–Et?–Etquoi?lâcha-t-elled’untontranchant.Cen’estpascommesiçat’intéressait,Erica.–Écoute, jesuisdésolée.Tum’aspriseaumauvaismoment,et je…(Une larmeroula

surmonvisagequej’essuyaiimmédiatement.)Jepréféreraisquetunet’enaillespas,maisjeveuxquetusachesquejecomprendspourquoitupars.Je…

Ellefranchitl’espacequinousséparaitetmeserrafortdanssesbras.–Jeveuxquetusoisheureuse,etjesaisquetuleseras,murmurai-je.Elleseredressaetpritmonvisagedanssesmains.–Tuesmameilleureamie,Erica.Troiscentskilomètresnechangerontrienàcela.Et

necroispasunesecondequetunepeuxpasgérercetteentreprisesansmoi.C’esttonbébé.Iln’yaplusrienpourteretenir,maintenant.

–Toutparaîtfacileàt’écouter.– C’est toi qui as tout rendu facile depuis le premier jour. Je n’ai aucune idée de

commentnousavons réussià le lancer,mais je saisquenousne l’aurionspas fait sans toipourouvrirlavoie.

Jevoulais lacroire,maismaintenantquesondépartétaituneréalité, lepoidsdemesresponsabilitésm’écrasait. Heureusement, j’avais plus de temps pour les assumer, mais jecommençais à m’interroger sur ma décision de rester à Boston quand tous ceux quicomptaientpourmoisemblaientquittercetteville.

Tôt le lendemain, jerejoignisFionadevant laporte,aussiélégantedanssarobed’étécoloréequedanssatenuedelaveille.

–Félicitations!Ellemesouritetmeserrabrièvementdanssesbras.–Mercidem’avoirtrouvéunappartementaussiincroyable.–C’estbiennormal.

Page 66: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Lorsqu’ellejetauncoupd’œilverslavoituredesportdanslaquellej’étaisarrivée,sonsourire s’amenuisa quelque peu. Brad en sortit et me rejoignit sur le trottoir devantl’immeuble. Brad était un ami d’un ami. Je ne le connaissais pas très bien, mais il étaitplutôt cordial et passait visiblement du temps à soulever de la fonte, alors je n’avais pastrophésitéàluidemanderdedéménagermonfutondansmonnouvelappart.Illefitavecgrâceetavecsoin,sansheurterlesmursimmaculésdelacaged’escalier.

Fiona semblait nerveuse lorsqu’elle me tendit les clefs pour ouvrir la porte. Bradfranchitleseuiletsedirigeaverslapiècequiallaitêtremachambre.Avantmêmequejelesuive,quelqu’undescenditlesescaliers.

– Oh, un voisin ! pensai-je avec excitation, avant que ce putain de Blake Landonn’apparaisseaucoindel’escalieravecunsourireàfairefondre.

–Qu’est-cequetufaislà?Letondemavoixlaissatransparaîtremapaniqueplusfortementquejel’auraisvoulu.

Jevenais justedepassertrois lamentables journéesàmedirequejepouvaismepasserdelui,toutenmedemandantpourquoij’avaisfaitunecroixsurlemeilleurcoupdemavie.

–J’habiteici.Jeme tournai vers Fiona qui eut un geste de recul embarrassé – preuve qu’elle était

danslecoupdepuisledébut.–Désolée,murmura-t-elle,avantdetournerlestalonsetdenouslaisser.–Tuvisici.Cen’étaitpasunequestion,justelaconfirmationdupiredesscénariospossibles.–Ehbien,enfait,jesuislepropriétairedel’immeuble,etoui,jevisaussiici.Je croisai les bras et memis à taper du pied. Comment pouvais-je exprimer la rage

absoluequejeressentaisenverscethommeatrocementsexyquinepouvaitpass’empêcherdesemêlerdemavie?

–Tuasl’airfâchée.Qu’est-cequejepeuxfaire?Ileut ladécencedeparaîtresincère,cequiétaitunebonnechose,parce j’envisageais

sérieusementlaviolencephysiquecommemoyend’expression.Parlerneservaitàrienaveclui.

–Pourcommencer,tupourraiscesserdet’immiscerdansmaputaindevie,Blake!(Jetapai du doigt sur ses pectoraux durcis.) Qu’est-ce qui te permet de croire que tu peuxarriver comme ça,m’installer dans ton putain d’appartement du bas, et trouver que c’esttoutàfaitnormal?

–Drôledelangagepourunediplôméed’Harvard.–Arrêtetesconneries,Blake!–Tuvoulaisvraimentvivredansundecesappartementsmiteux?–Tuescomplètementàcôtédelaplaque.

Page 67: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Exaspérée,jerentraidansl’appartementetclaquailaportederrièremoi.Ilmesuivit,seretrouva face à face avec Brad, qui parut surpris, pour ne pas dire plus. Blake était plusminceetmoinscostaud,maisilétaitplusgrandqueBrad.LesyeuxécarquillésdeBlakeserétrécirentàsavue,etsespoingsseserrèrent.

–Euh…oui?Bradn’avaitpasl’airàl’aise.Je prismonporte-monnaie dansmon sac et en sortis les cinquante dollars que je lui

devais.–Merci beaucoup, Brad. Je crois que c’est bon. Balance juste les autres sacs dans le

hall,jelesmonterai.–Tuessûre?–Oui!Blakeetmoiavionsréponduàl’unisson.

Dieu sait comment, durant la discussion qui s’ensuivit sur le privilège qui pouvait ou

non luiêtreaccordédemontermes sacs jusqu’à l’appartement,Blake réussitàm’inviteràdîner chez lui le soir même. J’étais affamée et émotionnellement vidée, j’avais accepté àcontrecœur.

On traversait une entrée puis on pénétrait dans un espace ouvert composé d’unecuisinedesignàdroiteetdedeuxgrandsespacessalonetsalleàmanger.Dansl’ensemble,l’appartement était exactement ce à quoi je m’étais attendue. Lumineuse et moderne, lasalleprincipaleétaitaménagéedemeublescontemporains,decanapésmicrofibrecrème,deparquetbrutfoncé,etdenotesbleumarinedanslespeinturesetlesgarnitures.Jesupposaiquequelqu’und’autre,probablementunefemme,l’avaitaidéàdécorercetintérieur.

Cequimesurpritleplus,toutparticulièrementaprèsavoirgoûtéàsaTeslahigh-tech,était l’absence totale d’éléments électroniques,mais peut-être que la pièce était tellementperfectionnéequetoutyétaitentièrementcamouflé.

–Pasdemachinesnidegadgets?demandai-je.–Pasvraiment.Quandj’aibesoindemeconnecter,jevaisaubureau.–C’estsurprenant.–Pourquoi?–Ehbien,tupeuxprobablementorganiserunetéléconférenceàpartirdel’écrantactile

detavoiture.Alorsjen’imaginaispasquetonespacedevieseraitdifférent.–Jesuisdevantdesécransdepuisquinzeans.J’aifiniparréaliserquecertainesdemes

meilleuresidéesmeviennentquandjerestelongtempsdéconnecté.– Je le vois bien, renchéris-je, bien incapable pour ma part d’assumer ma propre

obsession technologique. J’avais besoin d’être joignable à tout moment, juste au cas où.L’idéequel’onpuisseêtrecoupéd’Internetplusd’uneheure,enparticulierpourquelqu’unquidevaitêtreaussisollicitéqueBlake,m’étaitinconcevable.

Page 68: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Duvin?La journée avait été chaude, épuisante et stressante. J’avais terriblement envie d’un

verredevinblancfrais,maisc’étaitunallersimplepourlachambredeBlake–unendroitque j’étais déterminée à éviter, en particulier en ces circonstances. Maintenant que nousétions voisins, grâce au bail d’un an que je venais de signer, je devais m’imposer denouvellesrègles.

–Del’eau,dis-je.Alors,qu’ya-t-ilpourdîner?Est-cequejepeuxmerendreutile?–Euh…(Ilhésita,puisouvrituntiroiretentiraunepoignéedemenusdetraiteurs.)

Choisis.Jerecommandevivementlethaïjusteenbas.Tun’entrouveraspasdemeilleur.J’agitailatête,unpeuéberluéequ’ilaitautantinsistépourm’inviteràdînersansavoir

un plan derrière la tête. De sa part, cela semblait inhabituel. Il avait toujours cinq coupsd’avancesurmoi,unecaractéristiquequejen’avaisplusl’intentiondesous-estimer.

–Laisse-moideviner.Tunefaispaslacuisine.–J’aidenombreuxtalents,maispascelui-ci,non.–Tuasdéjàessayé?–Pasvraiment,répondit-ilenhaussantlesépaules.–D’accord.Oùestlesupermarchéleplusproche?Ilsourcilla.–Àdeuxpâtésdemaisonsd’ici.–Bon.Monfrigoestvideetjesupposequeletienaussi.Alorsquedirais-tud’allerfaire

quelquescourses,etensuitejetemontreraicommentpréparerundîner,pourlaprochainefoisoùtuinviterasunefillecheztoi?

Ilmarquaunepause.Jen’arrivaispasàvoirs’ilétaitulcéréous’ilréfléchissaitvraimentà mon offre. De toute façon, il avait déjà trop souvent dépassé les limites avec moi. JerefusaisdemarchersurdesœufsavecBlake,milliardaireoupas.

–Bien,allons-y,finit-ilpardire.Blake était complètementhorsde son élément au supermarché. Je le sondaisunpeu

sur ce qu’il aimait ou pas, puis pris tous les ingrédients de l’une de mes spécialités, leslinguineauxpalourdes,l’undespremiersplatsquemamèrem’avaitapprisàpréparer.

N’ayantpasencorechezmoisuffisammentd’ustensilesgenrepoêlesetcasseroles,jememisau travaildans la cuisinedeBlake,pendantqu’il restait sur la touche. J’avaisunpeuperdu l’habitude, mais tout me revint petit à petit. Après quatre années de viecommunautaireautourdekitchenettesréduitesàleurplussimpleexpression,j’avaisoubliéàquoiressemblaitunevraiecuisine,etcelledeBlakenemanquaitderien.

– Tu vas juste rester là à regarder, ou est-ce que tu vas m’aider ? demandai-je enplaisantantàmoitié.

Ilvintmerejoindreautourdel’îlotcentraletjeluiconfiaisapremièretâche.–Tiens,émince-le.

Page 69: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Je lui tendisunoignon.Je leregardaiducoinde l’œil,enfaisantsemblantdenepasremarquerqu’ilcontenaitseslarmes.

Jememisàl’aise,expliquantlarecetteaufuretàmesure.Quoiqueplutôtsilencieux,Blakeétaitunélèveattentif.Unpeutropattentif,parfois– je lesurprisàmatermesfessespendant que je cherchais une passoire dans ses placards. Je profitai pleinement del’inversion des rôles, lui faisant la leçon sur les fondamentaux de la cuisson des pâtes,comment reconnaître les pâtes al dente, et la différence capitale entre le parmesanfraîchementrâpéetlefromageconditionné.

Unefois larecetteterminée, jeservisdeuxassiettesqueBlakeemportadans lasalleàmanger et qu’il déposa sur la table de bois vieilli – unmeublemagnifique et sans douteonéreux.Jedoisadmettrequ’enprésencedeBlake, jecommençaisàm’habituerauxbelleschoses.

Onentamaledînerensilence.– J’approuve, dit-il en hochant la tête, avant d’enrouler d’autres pâtes sur sa

fourchette.–Merci.Labonnenouvelle,c’estquelesrestesserontencoremeilleurs.–Commentpourraient-ilsêtremeilleursquecela?–Lespâtesabsorbentlejusdespalourdes.C’estdivin.Ilmarmonnasonapprobationenfinissantuneautrebouchée.Jesouris,satisfaiteetfièredemoi.–Es-tuprêtepourtonrendez-vousavecMax?medemanda-t-il.Sonassietteétaitpresquevide,alorsquej’avaisàpeinegoûtélamienne.– Pas complètement. J’ai travaillé et réglé les derniers problèmes. Mais je compte

encorerevoirlesdétailscettesemaine.–Ilvoudraensavoirplussurtestauxdeconversion.–OK,acquiesçai-jeennotantmentalementd’étayercepoint-là.– Et tu auras besoin d’une ventilation spécifique de tes coûts actuels et de leur

évolutionaprèslefinancement.Avecledépartd’Allietl’évolutiondetespropresdépenses,il faut que tu commences à réfléchir à ce que sera ta structure financière si tu obtiens lesfonds.

–D’accord,merci.– Tu as des données sur tes actions commerciales ? Ce qui fonctionne, ce qui ne

fonctionnepas?– Hum… un peu, répondis-je. J’ai les statistiques, mais je n’ai pas planché sur ces

chiffresdepuisunmoment.Ilsepenchaenavantetposasescoudessurlatable.–Quefais-tudemain?–D’aprèscequej’entends,jevaisfairemesdevoirs.

Page 70: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Tupourraispasseraubureau,jet’aideraiàmettretoutcelaenforme.Tuobtiendrasunfinancementplusrapidementsitupeuxrépondreinstantanémentsurcespoints.Sinon,celanemèneraqu’àd’autres réunions. Ladécisionnedépendquedequelquesquestions,maiscelles-là,ilfautlesmaîtrisersurleboutdesdoigts.

Si quelqu’un pouvait m’épauler dans ce processus, c’était bien Blake. Refuser seraitmalpolietdéraisonnable.Pourtant,jerestaissceptiquequantàl’impliquerplusencoredansmesaffaires,mêmes’ilnem’avaitjamaisvraimentlaissélechoix.

– Il n’y a pas de conflit d’intérêts ? demandai-je, tout en cherchant n’importe quelleraisonlégitimederefusersonaide.L’idéequejepouvaisavoirbesoindeluimehérissait.

–Non,Erica.Jetel’aidéjàdit,jen’investispasdanstonprojet.–J’apprécietaproposition,Blake.Vraiment.Maisjenevoudraispastedéranger.–Ceneserapaslecas.MonbureauestjusteenfacedelaCustomHouseTower.(Iltira

unecartedesonportefeuille.)Retrouve-moilà-basaprèsledéjeuner,etnousreverronstesdonnées.

Ilpritsonassiettevideetsedirigeaverslacuisine.–Quandas-tumangépourladernièrefois?demandai-jealorsqu’ilrevenaitavecune

assiettepleineetunebouteillegivréed’unebièrelocale.–J’adorelespetitsplatsmaison.(Ilsouritetbutunegorgéeaugoulot.)Qu’ya-t-ilau

menupourdemainsoir?Dis-moicequ’iltefautetjeferailescourses.J’écarquillailesyeux.–Jen’avaispasréaliséquejedevaiscomplétermonloyerpardesservicesculinaires.–Jecroisquejepourraisêtreheureuxdetelaisservivreicigratuitementsij’étaisaussi

biennourritouslessoirs.–C’esttentant,plaisantai-je,mêmesijenel’avaispasenvisagésérieusement.Blakeétaitàl’évidenceintervenudefaçondéterminantepourquejemeretrouvedans

sonimmeuble,disponibleàloisir,enapparence.Arrondir les angles avec un fin dîner était probablement contre-productif.Mais peut-

êtrequelanourritureseraitunmoyendepressionplusefficacequelesexe.Detoutefaçon,j’avaisunbienmeilleurplan.

Page 71: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitrehuit

Nousétionsassiscôteàcôtesurlecanapéfaceauxbaiesvitrées,unpeucommeàLasVegas.Jenefuspastrèssubtileenm’écartantquelquepeudelui,pourrendresaproximitéphysiqueplussupportable.

–Oùas-tuapprisàcuisiner?demandaBlake.Je marquai une pause avant de répondre, afin de soigneusement soupeser ce que

j’acceptais de partager de ma vie privée. Parler de ma mère menait invariablement àl’énigmedemonpère,unconceptdifficileàsaisirpourlaplupartdesgens.Lefaitquejeneconnaissaispassonidentitéprovoquaittoutunéventailderéactions,allantdelasurpriseàladésapprobationenpassantpar l’apitoiement.Malgré lesscrupulesque j’avaisàtropmeconfieràBlake,esquiver sesquestionsne feraitque retarder lavérité. Il était évidentqu’ilmeharcèleraitetmel’arracherait,petitàpetit.

–Mamèreétaitunecuisinièrehorsnorme.Ellem’aappristoutcequejesaisdecetart.–Était?reprit-ilgentiment.–Elleestmortequandj’avaisdouzeans.(Jedéglutis,ravalantlepincementdetristesse

quiapparaissaitdèsquejeparlaisd’elle.)Elleacommencéàêtremalade,etletempsqu’ilsdécouvrentcequec’était,lecancers’étaitrépandu.Elleestpartieenquelquesmois.

–Jesuisdésolé,dit-il.–Merci.(Rembrunieparcetteévocation,jememisàjoueravecl’ourletdemonjean.)

C’étaitilyasilongtemps,j’aidumalàmesouvenird’elle.Jecroisquelacuisineestl’unedemesfaçonsd’honorersamémoire.C’estbizarre,non?

–Jenecroispas.(Ilsetournaversmoietpritmamain.)Alorstuasétéélevéepartonpère?

Il dessinait de lents cercles sur ledosdemamain,medistrayant etme calmant à lafois.

–Parmonbeau-père,pendantunan.Àtreizeans,jesuispartiepourlacôteest,dansuninternat.JesuisretournéelepremierétéàChicago,puisj’aipassélesautresannéesavec

Page 72: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

lameilleureamiedemamère,Marie,quinevitpasloind’ici.Jemedébrouilletouteseuledepuistrèslongtemps.

–Celasemblebienlong.J’acquiesçailentement.–C’estvrai,maisjen’airienpourcomparer.C’estcommeça,jesuppose.–Ilsdoiventtemanquer.Jesavaisàpeinecequ’unpèrereprésentait,mais jesuisconvaincueque j’auraisaimé

enavoirun,souscertainesconditions.–Mamèrememanquetouslesjours,maisc’estmavieetcequim’afaitdevenirquije

suis,alorsjenevaispasmeprojeterdanscequiauraitpuêtre.Jem’étaistoujourssentieendécalageaveclaplupartdesgensdemonâge,quiavaient

eubienplus d’occasions de réussir, dont les parents étaient présents pour les soutenir, etpourleurindiquerlabonnedirectionlorsqu’ilshésitaient.

J’avais très tôt compris que mon filet de protection était troué, ce qui expliquaitprobablementpourquoi j’avais l’impression ces temps-ci d’être en pleinemer sans gilet desauvetage.Maintenant,marécenteattirancepourBlakeajoutaitunniveaudedifficultéauchoixdéjàrisquédemeconsacreràmonentrepriseàpleintemps.Etpourtant j’étais là,àluioffrirunenouvelleopportunitédemedémoraliser.

–Ilesttard.Jedevraisyaller.–Tun’espasobligée.Sontonétaitposé,sanssous-entendu.Jefouillaisonregard,enquêted’unindice,espérantquecequej’yvoyaisn’étaitpasde

lacommisération.Monhistoiren’étaitpasdesplusheureuses,maism’apitoyersurmonsortnem’avaitjamaismenéenullepart.

–Jesais,maisj’aiunmilliondechosesàfaireavantquel’onneserevoie,demain.(Jemelevai.)Profitedesrestes.

Ilseleva.– J’attends impatiemment l’heure à laquelle ils pourront être considérés comme des

restes.Il était assez proche demoi pour que je sente son souffle surmes lèvres. La tension

sexuelle entre nous faisait des étincelles. Deux heures plus tôt, j’étais folle de rage, maisdepuisilavaitdévorémespâtesfavoritesets’étaitmontréadorable.Néanmoins,êtrevoisinsimposait de mieux réfléchir à mes actes. Cela dit, il ne m’en avait pas beaucoup laissél’occasion,etmesémotionsrestaientcontradictoiresetconfuses.

J’enfonçaimesmainsdansmespoches,enrésistantàl’enviedeletoucher.Jebaissailesyeux,medemandantsil’instantétaitbienchoisipourenparler.

–Ilyaunproblème?

Page 73: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

L’inquiétude se dessina sur son visage, et il prit mon menton dans la paume de samain.Jemelaissaiporterparcegeste.

–Ehbien,d’abord,jesuisfuraxcontretoi.Un début de sourire incurva sa bouche, et il parcourut ma lèvre de son pouce. Il

s’humecta les lèvres, et les miennes s’ouvrirent devant ce geste, tremblantes de cettepromessedebaiser.

–J’aimebienquandtuesfurax,murmura-t-il.–Tuestoujoursaussitêtu?–Seulementquandjevoisquelquechosequejeveux.–Commentai-jepuavoirunetellechance?dis-jesanspouvoirdissimulermonsourire.–Tuveuxdescompliments?–Non,maisj’espèrequetuasunebonneraisonpouravoirbouleversémavie.Il recula et passa la main dans ses cheveux, la perte de contact me prenant au

dépourvu.Jevoulaisqu’ilrevienne,qu’ilmetouche.–Tuesdifférente.Jefronçaiunpeulessourcils.–OK…–J’avaisenviedeterevoir,ettunemelaissaispasfaire.(Ilplissalefront.)Çasuffit?Jesoupiraietm’avançaiverslui.–Onverra.Jedéposai un rapide baiser sur sa joue et le quittai avant d’avoir eu le tempsdeme

convaincrederester.Je revins àmon appartement, trop lumineux et trop vide comparé à celui de Blake.

J’étaislàchezmoi,maisilallaitmefalloirencoredutempsavantquejem’yhabitue.Jejetaiun coup d’œil auxmonceaux de sacs et de caisses que je devais réorganiser avant demeremettreautravaillelendemain.Puisjemesouvinsd’unechose.

J’attrapai mon téléphone et composai le numéro de Sid. Il répondit à la deuxièmesonnerie.

–Quoideneuf?demanda-t-il.–Plusieurschoses.AlliatrouvéunboulotàNewYork.–Lapoisse!dit-ilsansmontrerd’émotion.–Ensuite,quelqu’undechezAngelcomvamefileruncoupdemainpourpréparermon

prochainrendez-vousavecMax,cequiestplutôtbonsignepourlefinancement.–Génial.–Et,dernièrechose,oùcomptes-tuvivreaprèslafermeturedetesdortoirs?–Ehbien,jeprévoyaisdesquattericietlàenattendantquequelquechoseseprésente.–J’aiunechambreenplusdansmonnouvelappart,etunpeudecompagniemeferait

dubien.Çat’intéresse?

Page 74: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Ilmarquaunepause.–Tuessûre?–Certaine.–Trèsbien,jesuispartant.Jesourisetluidonnail’adresseavantderaccrocher.

***

L’inscription sur les doubles portes en verre dépoli indiquait « Landon Group » encaractères gras. Je franchis le seuil et découvris un panorama de bureaux high-tech. Jerepérai Blake appuyé sur le rebord d’une fenêtre parlant à un jeune homme dont lesécouteurspendaientautourducou.QuelquesfigurinesStarTrekdécoraientlebureau.Sidadoreraitcetendroit,medis-je.Blake leva lesyeuxetmaugréaquelquechoseavantdesedirigerversmoi.

–Hey!Il m’adressa un sourire juvénile et prit ma main pour m’entraîner à travers la large

alléecentralejusqu’àunbureauprivatifàl’autrebout.Cegestem’avaitpriseàl’improviste,maisàmagrandesurprise,toutlemondesemblait

totalement concentré, comme si aucune vie n’existait en dehors des écrans. Je n’étaisabsolumentpashabillée comme il le fallait :une jupedroiteblancheetun chemisiernoirsansmanches,deschaussuresnoiressobres;jejuraisdanscettemerdetee-shirts,sweatsetchemiseshawaïennes.J’avaisapparemmentbeaucoupàapprendresurlaculturedesstart-uptechnologiques.

DanscequisemblaitêtrelebureaudeBlake,unepetitepunketteétaitassisedevantunbureauenL,leregardfixésursonordi.Ellerelevalesyeuxànotreapproche.

–Erica,voiciCady.Elle se leva aussitôt etme serra lamain. Elle était vêtuede façon aussi décontractée

que les autres, avec un jean et un tee-shirt blanc. Son bras gauche était couvert detatouages colorés qui formaient une grande œuvre d’art vivante, mais le plus frappantrestaitsacoupeiroquoiseraseetpéroxydée,hérisséedemèchesrosevif.Sesoreillesétaientdécoréesdepiercingsbrillantsassortisàsaceintureàclous.

–Bonjour,Erica.Jesuisheureusedevousrencontrer.Ellem’adressa dans lemême temps unmagnifique sourire qui illumina ses yeux gris.

Mêmeavectoussesornements,elleétaitjolie.–Moiaussi.–Erica,Cadyestmonassistante.C’estégalementtavoisine.Mesyeuxluijetèrentdeséclairs.Jen’avaispasréaliséqu’ilvivaitavecquelqu’un.–J’habiteà l’étageendessousduvôtre.Jecroisquenousnoussommesmanquéesde

peuàplusieursreprises,dit-elle.

Page 75: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Jesoufflaidesoulagement,surprisedemapropreréaction.–Oh!D’accord.Quelle idée ? Je n’avais rien à dire sur qui partageait son appartement. Après tout,

j’allaisbientôtpartagerlemien.–N’hésitezpasàmedemandersivousavezdesquestionssurl’immeubleoulequartier.

JefaisunpeuofficedesyndicofficieuxpourBlake.–Entendu,merci.Elle fit un petit signe de lamain tandis que Blake nous entraînait dans son bureau,

fermantlaportederrièrelui.La pièce ressemblait beaucoup plus à ce que j’avais imaginé pour son appartement,

mais elle m’impressionna tout de même. Trois écrans géants étaient alignés sur l’un desdeuxbureaux.Deuxd’entre eux affichaientdesdizainesde lignesde code, et le troisièmeétait remplide feuillesdecalculetdedonnéeschiffrées.L’affirmationdeHeath,quidisaitque Blake faisait tout le travail, semblait avérée. Même moi, je n’étais pas certaine depouvoirporterautantdechapeauxàlafois.

Dans un coin de la salle, un énorme poste de télévision était suspendu au mur,connectéàcequisemblaitêtrel’ensembledesconsolesdejeuexistantes.Ilm’entraînaversunegrandetabledeconférencefaisantfaceàuntableaudeprésentationenverre.

–C’est trèsMissionimpossible,dis-jeenespérant secrètement trouveruneexcusepourécriredessus.

Ils’esclaffaets’assitàlatable,àcôtédemoi.–Trèsbien.Montre-moicequetuas.Jepassai aussitôt enmodebusiness, réorganisantmespriorités etmes capacités pour

lesdeuxheuresàvenir,durantlesquellesontravaillaàdéfinirlastructuredeladeuxièmephasedelaprésentationàMax.Onexaminaminutieusementleschiffres,etj’expliquaimondomaineendétail.Jeprisdesnotes,préparanttoutcequej’allaisdevoirretravaillerlesoirmême,enm’efforçantdenepasmelaisserdistraireparsaproximité.

Même en parlant boulot, je ne pouvais m’empêcher de penser à notre folle nuit depassion.C’étaitpourcette raisonpréciseque lesgensévitaient les liaisons sur leur lieudetravail.Quandjeneleregardaispasdirectement,jepouvaisàpeinefairecommesijen’étaispasattiréeparlui.

–Ai-jegagnémondîner?Il était enfoncédans son fauteuil, un stylo sur l’oreille etun souriremalicieux sur les

lèvres. Les femmes devaient fournir d’énormes efforts pour afficher une beauté naturelle,alorsqueBlakepouvaitstoppermoncœurgrâceàunsimplesourireaumomentopportunetunjeanusé.

–Tumetstoujoursdestee-shirtsaubureau?demandai-jesansrépondreàsaquestion.–Généralement.(Ilhaussalesépaules.)

Page 76: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Maistumetsuncostumeaucasino?–Jenesuispasautravail.–Tavisiondescodesvestimentairesmesembleunpeufaussée,Blake.Jerevinsàmesnotes,quandbienmêmej’avaistotalementperdulefildemespensées.

L’imagedeluidanssoncostumeanthraciteappuyécontrelaportedemachambred’hôtelmehantait encore. Il devrait porterdes costumesplus souvent,medis-je.Non,non, il nedevraitpas.Jehochailatêtedevantmesnotes,heureusequeBlakenesoitpastélépathe.

–Sijemettaisuncostumeici,ilyauraitunemutinerie.J’aiuneréputationàtenir,minederien.

Sidauraitpréférémourirquemettreunecravate,alorsilavaitpeut-êtreraison.Onpassalerestedel’après-mididanssonbureau.Jem’escrimaissurmaprésentation,

pendant qu’il tapait sur son clavier, jouant avecmagie sur les troismoniteurs. J’avais pasmalprogressé,et j’étaismaintenantconvaincuedepouvoirrépondreàtoutes lesquestionsque Max poserait durant notre rendez-vous. Je refermai mon ordinateur portable et melevaipourpartirlorsqueBlaketournadanssonfauteuil.

–Quelestleprogramme?demanda-t-il.Ilmetoisaavecunsourireanimal.–Jenesuispastonchefattitré,tusais?–Ilestpeut-êtrepossibledenégocier.(Ilselevaetvints’appuyersurlebureaudevant

moi.)Quepuis-jefairepourtoi?Jefrissonnaiautonrauquedesavoix.Pourquoifallait-ilqu’ilsoitaussidiaboliquement

sexy?Onpouvaitpeut-êtresauterledîneretpasserdirectementaudessert.Unemousseauchocolat serait une bonne idée. L’idée de lécher de la mousse au chocolat sur ses abdosd’acierme vint à l’esprit.Chaque creuxdélicieux, jusqu’enbas.MonDieu. J’humectaimeslèvressèches.Jen’avaispaspasséassezdetempsàadmirersoncorpsladernièreetuniquefoisquejel’avaisvunu.

–Tuasquelquechoseentête,Erica?Ilserapprocha.J’avais atteint la limite du temps que je pouvais passer sans risque seule avec lui.

Commeunedrogue,saprésenceétaitaddictive.Jememordislalèvreàl’idéedefairedeluimondessertvivant.

Reprends-toi,Erica.Jerevinsàlaréalitéetmeredressai.–Tuastoujourstadrôledevoiture?–Oui.Etnon,tunepeuxpaslaconduire,plaisanta-t-il.–J’aibesoindefairedescourses.Situmeconduis,jetefaisunpouletauparmesance

soir.–Jesuisprêtquandtuveux.

Page 77: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

L’heurequisuivitsedérouladansungrandmagasinàremplirlecaddied’ustensilesdecuisine,deserviettesetde lingede lit.Jepris lesdraps lesmoinschersque jepus trouverdansunecouleurquimeplaisait,maisBlakelesreposadiscrètementetlesremplaçaparunensembleluxueuxquivalaittroisfoisplus.

–Jeneroulepassurl’or,tusais.Ilsourit.–C’estmoiquilesprends.Etjetelepromets,plustard,tumeremercieras.Jesentismonvisagerougirenpensantàcequecettepromesseimpliquait.Pourautant,

jenediscutaipas,puisquejedépendaisdeluipourletransport.À la caisse, j’étais tellementoccupéeàorganiser les sacsdans le chariotque jenevis

quetroptardBlakeutilisersacartedecrédit.–Qu’est-cequiteprend,Blake?protestai-je.–Disonsqueceseratoncadeaudebienvenue.–Absolumentpas.C’estridicule.– C’est le moins que je puisse faire. Après tout, je t’ai tout de même forcée à venir

t’installerprèsdechezmoi.–Endessous,précisai-je.–C’estbiencequimeplaît,murmura-t-il,sesyeuxs’assombrissant.Cesquelquesmotsmecoupèrent le souffle, etma températuremontad’uncran.Mes

mainstremblaientunpeulorsquejerangeaisleticketdecaisse.Blakeinsistapourquej’attendedanslavoiturependantqu’ilchargeaitlessacsdansle

coffre.Onrentradansunrelatifsilence.Jeregardail’écrantactileentrenousetmesouvinsdel’appelqu’ilavaitreçuladernièrefoisdanssavoiture.

–Qui est Sophia ? demandai-je d’un ton faussement anodin, en regardant défiler lesimmeublesparlafenêtre.

–Elledétientunesociétédanslaquellej’investis,répondit-il.Pourquoi?–Justeparcuriosité.Jemerenfrognaietaperçusauloinnotrebrownstone.Jusqu’ici,Blakenem’avaitjamais

ouvertementmenti.Laconcernant,jedécidaidelecroireetdelachasserdemonesprit.Blakesechargeadetoutpourmoi.Ilmontalesescalierslesbraschargésd’unedizaine

desacs,pendantquejemepressaid’ouvrirlaporte.Alorsquenous commencionsàdéballer, Sid entra.Blake se raidit, délaissant aussitôt

lesserviettesqu’ilpliait–absolumentpascommeillefallait,maisjen’avaispaseulecœurdeluidire.

–Salut,Sid.JeteprésenteBlake.Blake,tutesouviensquejet’avaisparlédeSid,notreprogrammeur.

Blake se détendit visiblement, et la tension dans samâchoire disparut. Qu’avait-il, àmarquer son territoire dans mon appartement ? Sid était assez émotif, alors je n’avais

Page 78: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

vraimentpasbesoinqueBlakelemettemalàl’aisedèslepremierjour.–Biensûr,dit-ilenallantserrerlamaindeSid.Enchanté.Sidlesurplombait,sesbrasfaisaientlamoitiédudiamètredeceuxdeBlake.Lesdeux

hommes n’auraient pas pu être plus différents, sur le plan physique comme sur celui ducaractère.

–Moiaussi.Etvousêtes?–Jesuislevoisind’Erica,rétorqua-t-ilaussitôt.Ladéceptionmepinçalecœur.Àquelleréponsem’étais-jeattendue?–Alorsjesupposequevousêtesmonvoisinaussi.Sidposaàterresongigantesquesacàdos.LamâchoireserréedeBlakemefitdouterdeceplanmagistral.–Génial,dit-il.Je m’empressai d’intervenir, espérant neutraliser la situation qui échappait

complètementàSid.– Oui, Sid va squatter ici jusqu’à ce que nous ayons mené à bien cette histoire de

financement.Lesdortoirsuniversitairesfermentcettesemaine,tusais.–Oui,ditBlakeensepassantlamaindanslescheveux.J’expliqueraiàSidleliendeBlakeavecAngelcomplustard.Pourl’instant,j’avaisune

cuisineàagencer,unrepasàcuisineretundînerépineuxàanimer.JemontraisachambreàSid.Iln’yavaitencorequ’unmatelasgonflableetdesdraps,

quiallaientdevoir suffire jusqu’àcequenous récupérionsdevraismeubles.Celaneparutpaslegêner,alorsjeretournaiàlacuisineetcommençaiàpréparerlerepas.

Enuninstant,Blakeétaitderrièremoi.Ilmefitfairevolte-face.–Tunem’asjamaisparléd’uncolocataire.Sa voix était grave et d’un ton suffisamment austère pour quemon cœur semette à

battrelachamade.L’avais-jemisencolère?Jen’arrivaispasvraimentàledire,maisj’avaisl’impressiond’êtreuneenfantqu’onallaitenvoyeraucoin.

InviterSidàvivre ici avait étéunedécisionprécipitée, c’estvrai. Je savais comment ilvivait, engoncé dans un monceau d’emballages usagés de tartelettes aux fruits, et celam’inquiétaitunpeu.Enréalité,jen’étaispasprêteàvivreseule,etjepouvaisaussimeservirde saprésencedans l’appartementpourm’aiderà contenir les ardeursdeBlake,même sicelanefonctionnaitpaspourl’instant.

Jedéglutisavantderépondre.–Tun’aspasnonplusétéd’uneparfaitefranchiseavecmoi,Blake.Jenesaispastrop

ceàquoitut’attends.–C’estunecomplication.Jesupposequenousallonsdevoirlacontourner.–Plusprécisément?–Nousallonsdevoirpasserplusdetempsenhaut,c’esttout.

Page 79: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Il se glissa entremes jambes et plaçamon genou au-dessus de sa cuisse en un seulmouvementfluide.J’eneuslesoufflecoupé,m’agrippantauborddumeublecontrelequelilmepressait. Il imprimaunbaiserbrûlantdansmoncouavantdeprendre le lobedemonoreilleentresesdents.

J’eneusunsursautetmetendis.Lesyeux fermés, jemeremémorai toutes lesbonnesraisonsque j’avaisdenepasm’abandonnerà lui.Maisuneligne jauneexistaitavecBlake.D’un côté, je le désirais ardemment, et je parvenais à plus oumoins lui résister.Mais là,nous étions de l’autre côté de la ligne où j’étais à sa merci, impuissante face à sadéterminationàmeposséder.

Sesmainsglissèrentsousmonchemisier,etcaressèrentlapeaunuedemondos,cequime mit en orbite. Mes mamelons se durcirent et frottèrent contre sa poitrine lorsque jem’arquaicontrelui.

–J’aibesoindetoi,Erica.Cesoir.Ilpressacontremoilapreuvedesondésir.Sabouchefutsurlamienneavantquej’aiepum’yrefuser,incapabledelerepousser.Il

m’embrassapassionnément,jouantdeseslèvresetdesalangueavecuneurgencequejeluirendis.Jefinisparlâcheretpassaimesdoigtsdanssescheveux,letirantversmoi.Ileutungestedereculpourrespirer,etjeleserraiplusfort,ledésirantenmoi.

Nous en étions là, les mains de Blake remontant ma jupe, tous deux enflammés,lorsqueSidsortitdesachambreets’immobilisadanslesalon.

Jemepétrifiai,prisesurlefait.AvecSidtotalementhorsdesonchampdevision,Blakebattitlentementenretraite.Ilm’adressaunpetitsourire,mefaisantsavoirquenotrepetitescènes’étaitbiendérouléeselonsavolonté.Ilsetournapourfairesemblantdes’occuper.

Troublée par mon désir et la gêne ambiante, je canalisai mes émotions vers lanourriture,feignantdenepasdétecterlesappelsàl’aidedeBlake.Ils’agissaitàl’évidenced’unjeu,maisj’enétaisdéjàlasse.Leseulcoupquejepouvaisenvisagerétaitdel’ignorer,de lui dénier ce que nous voulions tous les deux, même si je n’allais pas tarder à meconsumer de frustration sexuelle. Si j’arrivais à surmonter cela, il comprendrait peut-êtrequ’ilnefallaitpasjoueravecmoi.

Je ne sais comment, on survécut au dîner. Je mangeai au comptoir. Sid et Blakedévorèrent le poulet au parmesan, à la façon demamère, assis tous les deux au bar. Ilallait vraimentnous falloirdevraismeubles.Meublerun tel espaceavecunbudget limitéseraitunvéritabledéfi,maispasimpossible.Jerésolusdefaireletourdesmagasinsàprixcassésaprèsavoirtravaillésurmesnotesdeprésentationlelendemainmatin.

Maintenant plus que jamais, j’avais besoin de me sentir quelque part chez moi, dedisposerd’unendroitsûr,imperméableaurestedumonde.Pourlemoment,l’appartementétait encore vide et impersonnel. Entre ça, le départ d’Alli et lamission que Blake s’était

Page 80: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

donnéedemettremaviesensdessusdessous,j’avaisl’impressiondemarchersurunfil,encherchantàmeraccrocheràtoutcequipouvaitressembleràunevienormale.

Blake avait dû percevoirmon embarras, parce que le repas terminé et débarrassé, ilm’annonçaqu’ilpartait.Jel’accompagnaiàlaporte,etSiddisparutàpointnommé.

–Tuvasbien?Les yeux de Blake, brûlants de convoitise peu de temps avant, étaient maintenant

pleinsd’inquiétude.–Oui,jesuisjustefatiguée.Lajournéeaétélongue.Ce n’était qu’àmoitié vrai,mais je n’avais plus assez d’énergie pour lui expliquer ou

pourmedisputeraveclui.–Tuveuxquejet’emmèneaubureaudemain?–Non,merci.Jevaisplutôtfinirici.J’aidescoursesàfaire.Il acquiesça, et lorsqu’il se pencha pour un baiser, je tournai la tête, mes lèvres

échappantdepeuauxsiennes.Je fermai lesyeuxautantpourmarquer lecoupqueparcequejecraignaisl’expressiondanssonregard.Lorsquejelesrouvris,ilavaitdisparudanslesescaliers.

Je fermai la porte et m’y adossai, le visage dans les mains. Comment m’étais-jeretrouvéedansuntelpétrin?

Page 81: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitreneuf

Jepassailajournéeàacheterenligne.Jechoisisunechambreàcoucherenmedisantque je donnerais mon futon à Sid. Je commandai également une petite table de salle àmangeravecseschaisesassorties,etquelquesautresbricoles.J’écumailespetitesannoncesetfinispartrouveruncanapéd’occasiondécentquipouvaitêtrelivrépourquelquesdollarsdeplus.Sidavaitdéjàapportésatélévisionetsesconsolesdejeu,uniquemobilierducoinsalon.

Cet appartement était peut-être ce qui ressemblait le plus à un chez-moi depuis ledécèsdemamère.Évidemment, j’allais lepartager avecSid,mais sans savoir combiendetempscelaallaitdurer.Jemeraccrochaiàl’idéequej’étaischezmoi,merépétantcesmots,leur donnant un sens différent dans ce nouveau chapitre de ma vie dont tant d’aspectsrestaientencoreobscurs.

Cesquatredernièresannées,etplus tôtencore, toutavaitétéplanifié.Maintenant, jenesavaisplusquoiattendredel’avenir.Jen’avaisplusquemonintuitionpourmeguider.Malheureusement,Blakeannulaitcette intuition.Jenem’attendaispasàcequ’unhommecommelui–ettoutcequiallaitavec–entredansmavie.

Incapable de me concentrer sur mon travail, je refermai vivement mon ordinateurportable.J’avaisbesoind’air.AvecBlakepourchauffeuretmesnouvellesconditionsdevie,j’étaisrestéeàl’intérieurpresquetoutelajournée.

Je sortis et descendis la rue. Je m’installai sur un banc vide et laissai le soleil meréchauffer lapeau.Letempsétaitdoux,encoretropfraispour laplage,maisparfaitpourpasserunmomentagréabledehors.

Je décidai d’appeler Alli. Ellememanquait déjà trop. Après plusieurs sonneries, elledécrocha.

–Allô!répondit-elled’unevoixrauque.–Tuvasbien?Tuasl’airmalade.–Çava.Lanuitaétécourte.–Quisontcesamischezquitusquattes?demandai-je,soudaininquiète.

Page 82: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–J’étaisavecHeath.–Oh…– Que veux-tu que je te dise ? Il fait la fête comme une star du rock. (Elle laissa

échapperunpetitgloussement.)–Lejeudisoir?Tucommencesàtravaillerquand?– Lundi, et tu peux cesser de t’inquiéter,maintenant.On s’amuse juste unpeu. Et je

rencontrebeaucoupdemonde,ici.Jeprendsdescontactspournous.–OK.(Euh…quelgenredecontactprometteurfaisaitlafêtelejeudisoir?)–Etcommentsepassentleschosespourtoi?–Plutôtbien.Lenouvelappartementestgénial.–Ah!Jesuisjalouse.Lesappartementsicisontridicules.J’ail’impressiondevisiterdes

placards.– Si cela peut te consoler, je vais peut-être finir d’ici quelques mois dans un de ces

reportagesconsacrésauxamasseursfous.J’aiinvitéSidàvenirvivrechezmoi.Lacollectiondecanettesvidesacommencé.

Elles’esclaffa.– Oh, merde. Du coup, je ne suis plus du tout jalouse. Au moins, je n’aurai pas à

partagermonplacard,sij’aidelachance.Jerisetelleajouta:–EtquoideneufavecBlake?Jeluiracontaimasituation,cequinelasurpritpasautantquejel’avaisimaginé.Peut-

être que Heath lui avait déjà touché un mot sur les tendances de Blake à tout vouloircontrôler. Heureusement, elle ne me soumit pas à la question pour savoir si j’avaisl’intention que notre nuit de folie en reste là, parce que jeme le demandais encoremoi-même.

–Alors,quandviens-tumerendrevisite?demanda-t-elle.–Quandnousseronstouteslesdeuxinstallées,jesuppose.Ilfautd’abordvoircequ’il

vasepasseravecMax.Jedevraispouvoirvenirtevoir,après.Allimedécrivit tous lesendroitséblouissantsqu’elledécouvraitàNewYorketoùelle

m’emmènerait. Au milieu de notre conversation, je reçus un double appel de Blake. Jepromisdelarappelerplustardetrépondis.

–Salut,lesiteesthorslignedepuisquelquesminutes.Monestomacseserra.–Quoi?Commenttulesais?Le site avait déjà décroché auparavant, ce qui n’était à l’évidence pas une bonne

nouvelle, or j’avais besoin que tout soit parfait pour mon rendez-vous avec Max lelendemain.

–J’aiparamétréunesurveillancepourm’envoyerunealertesilesitedécroche.

Page 83: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Pourquoi?–Erica,peut-onseconcentrer sur leproblème?(Il semblaitplus irritéquemoi,alors

qu’ils’agissaitdemonsite.)TupeuxmepasserSid?Jen’aimaispasêtremiseàl’écart,maiscen’étaitpasmonrayon.–Jesuisdehors,pourl’instant,maisjepeuxêtrederetourenquelquesminutes.–Donne-moisonnuméro,jevaisl’appeler.–Net’embêtepas.Jeterappelletrèsvite.De retour à l’appartement, je frappai doucement à la porte de Sid, puis plus fort. Il

n’était jamaisdeboutàune telleheure.Finalement, j’entrai,déterminéeà le sortirde sonsommeilcomateux.

Ilétaittouthabilléeteffondrésurleventresurlematelasgonflablesansdraps.–Sid!glapis-je,brisantlesilenced’unematinéeparailleurscalmeetpaisible.Ilgrommelaetroulasurledos.–Quoi?–Lesiteesthorsligne.–Oh!dit-ilsansbouger.–Blakeaappelé.Ilveutteparler.–J’aibesoindecaféine,maugréa-t-il.Jerenâclai,n’étantpasd’humeurpoursaroutinematinaleminable.–Jereviensavecdesboissonsénergisantes.Lève-toiettrouvelasolution,s’ilteplaît.JelaissaimontéléphonesursonbureauaveclenumérodeBlakeaffiché,etredescendis

danslaruejusqu’àl’épicerie.Quelquesminutesplustard,j’étaisderetour,etdécouvrisSidlefrontplissédevantson

écran d’ordinateur, analysant ce qui, de par mes expériences passées, ressemblait auxjournaux du serveur. Ils contenaient des informations sur l’activité du site que j’étais bienincapabled’interpréter. J’entendis des cliquetis provenantdemon téléphone, qui était surhaut-parleur.

–Ondirait qu’ils attaquent le log avec des scripts et qu’ils bombardent le serveur derequêtes,sibienquel’hébergeurnousdéconnecte,ditSid.

–Ceneseraitquedesscriptkiddies,alors,réponditlavoixdeBlake.–C’estquoi,desscriptkiddies?demandai-jeàvoixbasse,pournepasêtrelaseuleàne

pascomprendre.Etpuisj’avaisbesoind’êtretenueaucourant.–Deshackersdébutantsavectropdetempslibre,réponditSid.–Oh…Paroppositionauxhackersaguerrisàl’emploidutempschargé?Unhackerrestaitun

hacker,pourcequej’ensavais.Unennemiquimenaçaitmesaffaires.Heureusement,SidetBlakeallaientétablirunelignededéfense.

–Vousavezunserveurredondant?demandaBlake.

Page 84: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Évidemment,réponditSidd’unevoiximpersonnelle.– Lance-le, et on va voir à quel point ils sont tenaces. Tu peuxme donner accès au

serveur?Sidsetournaversmoipourobtenirmonapprobation,jehochailatête.–Jepassedessusmaintenant.– Jepeuxmonterunbloqueurd’IP, si tuveux t’occuperdepatcher les vulnérabilités,

ditBlake.–Çameva.–Est-cequ’ilfautquej’appellel’hébergeur?chuchotai-jeàSid.– Non, je vais relancer le serveur, et nous serons de retour en ligne dans quelques

minutes.Jeprisuneprofondeinspiration.–Est-cequejepeuxaider?Sid tourna la tête, les yeux fixés sur le sac de canettes que je tenais à lamain. J’en

attrapaiunepourlui,etmislerestedansleréfrigérateur,mesentantunpeuinutile.J’ouvrismonordinateurportablesurl’îlotcentraldelacuisineetrafraîchisl’adressedu

site jusqu’à ce qu’il réapparaisse, tandis que Sid et Blake poursuivaient leur indéchiffrabledialoguetechnologiquedansl’autrepièce.

Lefaitquenousayonsétéhackésm’inquiétait,d’autantquej’espéraisfinaliser l’accordavecMax dans les semaines à venir. Blake et Sid ne semblaient pas trop alarmés par lanature de la menace, mais j’avais un mauvais pressentiment. Pourquoi une telle attaquemaintenant?Quihaïssaitlamodeaupointdevouloirnousmettrehorsjeu?

Une fois l’épreuve derrière nous, j’espérais que Sid pourrait m’en apprendre un peuplus.

JepassailerestedelajournéeàsurveillerlesiteetàtesterlescorrectifsdeSidaufuret àmesure qu’il les appliquait. Le soir venu, je restai sansnouvelles deBlake. Jem’étaisattendueàcequ’ilvienneaumoinspillerleréfrigérateur.Aprèstout,nousnousétionsvustouslesjoursdepuismonarrivée,etilsemblaitdévelopperunedépendancecroissanteàmacuisineitalienne.

Jejetaiuncoupd’œildanslarue,cherchantsavoiture.Nelavoyantpas,j’envisageaideluienvoyeruntexto,maisqueluidire?Ilmemanquait,maisjen’allaispasleluiavouer.

***

J’arrivaichezAngelcomavecquelquesminutesd’avance.J’entraidanslehall,oùlamêmebrunettem’accueillitavecunsourirepincé,avantde

m’entraîner jusqu’aubureaudeMax.Àl’instardelasalledeconférences, lapiècearboraitun immensemurvitrédonnantsur leportet lesgratte-cielduNorddeBoston.Vêtud’un

Page 85: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

costume noir impeccable, Max était penché sur divers papiers. Il se leva lorsqu’il me vit,faisantletourdesonbureaupourvenirmeserrerlamain.

–Erica,vousêtessplendide.–Merci.Je ne savais que dire d’autre, et lissai timidement mes cheveux, déjà noués en un

chignon.J’affectaidenepasremarquerlaconfiancenouvelledontMaxfaisaitpreuveavecmoi.Ilm’indiquad’unsigneunepetitetableronde.

Il posa toutes les bonnes questions auxquelles j’étais préparée, grâce à Blake. Jerépondisprécisément,dressantun tableauexact,maisaccrocheurde l’entreprise.Auboutdeprèsd’uneheure,ilmarquaunepauseetmedévisagea.

–Oui?Était-celafindelaréunion?Unebouleseformadansmonestomac.–Jesuistrèsimpressionné,Erica.Vousavezréponseàtout.Jecroisquenousavonsfait

letour.Je jouai nerveusement avecmon stylo.Reconnaîtremaintenant l’implicationdeBlake

valaitmieuxquelaisserMaxenavoirventplustard.–Blakem’abienaidée,enfait.Ilaretravailléunegrandepartiedetoutcelaavecmoi,

alorsjesupposequejenepeuxpasm’attribuertoutesleslouanges.Ilrestauntempssilencieuxetmedévisagea.–Vraiment.–Jecomprendspourquoisesaffairessontsiflorissantes.Ilestextrêmementminutieux.LefrontdeMaxseplissa.–Iln’estpasaussiparfaitquevouspourriezlepenser.–Biensûr,personnen’estparfait.–C’estvrai,maisBlakeabiendelachancedenepaspourrirenprisonencet instant

même.Touslessuccèsqu’ilaconnusdécoulentdesopportunitésoffertesparmonpère,etilseraitbonpourluidenepasl’oublier.

Uneautre formed’inquiétudem’envahit enentendant cela.Quelsproblèmesauraientpu conduire Blake en prison ? J’envisageai diverses possibilités. À l’évidence, il y avait unsérieuxcontentieuxentreeux,etBlake,commeàsonhabitude,n’avaitpascrubondem’eninformermalgrétoutesnosdiscussionssurlesnégociationsencours.

J’avais toujours considéréMax commeun égal deBlake.Mais pourquoi siégeaient-ils,ensemble,aumêmeconseild’administrationsiMaxledétestait?

–Detoutefaçon,ilaratélecochesurcecoup-là,jecrois,dit-ilenredevenantleMaxcalmeetcharmant.

Cechangementm’inspiraunsentimentbizarrequejem’efforçaid’ignorer.–Oui.

Page 86: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

C’estvraiquejerestaiperplexedevantl’intérêtqueBlakeportaitnonseulementàmapersonne,maisaussi àmonentreprise, toutparticulièrementaprès les frictionset l’affrontthéâtrauxdupremierjour.

– Faisons-le, Erica, dit brusquement Max. Je crois qu’il y a un vrai potentiel, etj’aimeraisyparticiper.

Labouled’angoissedisparutdemonestomactandisquej’étaisenvahieparlajoieetlesoulagement.

–Merveilleux.Commentfait-on,àpartirdelà?–Laissez-moimechargerdesformalités.Ilyauradespointsjuridiquesàrevoir,maisje

pensepouvoirpréparerune listedesmodalitésenune semaineoudeux. Ilnedevraitpasêtre trop difficile de tout mettre en place rapidement. Et si cela prend un peu plus detemps,jem’arrangeraipourquevousdisposiezdefondspourévitertoutproblème.

J’eusunlargesourire.–Celameparaîttrèsbien.Jevouslaissefaire.–Parfait.Nechangezriendevotrecôté.Jevoustiensaucourant.Onse levapourseserrer lamain,puis jequittai lebâtimentavec l’enviedehurler la

bonne nouvelle sur tous les toits. Nous avions réussi ! Tout ce travail et ce stress, et lemultitâche!Bonsang,lemultitâche!RéussirmesétudestoutencontinuantdedévelopperClozpinavaitdéjàconstituéunmiracleensoi.

Je pris mon téléphone et fis défiler la liste des numéros, m’efforçant de décider quij’allaisappelerenpremier.

Unnoms’imposa.J’avais été dure avec Blake. Est-ce que tout se serait passé aussi bien sans lui ? Je

l’appelaiettombaisursamessagerie.–Hey,Blake,jevoulaisjustequetusoislepremieràsavoirquej’avaisl’accorddeMax.

Ilrédigelespapierslasemaineprochaine.Unebonnenouvelle,donc.Merci.Pourtout.JeraccrochaietappelaiAlli,maispassaiégalementenmessagerie.Jeregardail’heure.

Ilétaitpresque11heuresdumatin,et jenepusm’empêcherdepenserqueHeathn’avaitpas la plus salutaire des influences sur ma meilleure amie. Il y avait quelque chose detroublechezlui,maisj’avaisbesoind’ensavoirplusavantdemefaireuneopinion.D’icilà,jetrouveraisunmoyendeluirendrevisite,sanstroptarder.

J’échangeaimeschaussuresà talonspourmesballerineset rentraiàpied,histoiredefaire un peu d’exercice et de profiter de la douceur de lamatinée, quand la températureaugmentaitd’heureenheure.L’étéavaitfinipararriver.

***

Le lendemain, l’appartement resta silencieux toute la matinée. Peut-être que cettecohabitation avec Sid allait fonctionner, après tout. Nous avions des horaires totalement

Page 87: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

différents,j’avaisl’impressiondevivretouteseulelamajeurepartiedutemps.Jedéfinisunorganigrammedescréationsdepostesquenouspourrionsenvisagerdans

les six mois à venir. Le plus urgent était de trouver un directeur commercial. Il étaitimportant de sortir dema coquille et développer le relationnel. J’avais bien l’intention decontinuer,mais jedevaisaussidiriger le siteet superviser l’ensembledesopérations.Jenepouvaispas,enplus,mechargerd’attirerlesnouveauxcomptespayants,gérerlesfinanceset la maintenance, et dorénavant rendre à Max des rapports périodiques sur notreprogression. Perdre Alli avait constitué un sérieux revers, mais il y avait en ville descentainesdeprofessionnelsàlarecherched’unetelleopportunité.JecommençaisàdéfinirplusendétaillesrôlesetlesresponsabilitésdecesposteslorsquejereçusuntextodeBlake.

Félicitations.OnfêtecelacesoirauTopoftheHub.Soisprêteà19heures.Sonmessagemefitgamberger.Pourquoinem’avait-ilpastoutsimplementappelée?Il

devaitavoiruneraisondesemontrerdistant,quoique,apparemment,ilétaittoutdemêmed’humeur à célébrer l’événement – et, en plus, dans l’un des meilleurs restaurants de laville.Restertroplongtempssanslevoirm’inquiétait.Était-cepourcebaisermanquél’autresoir ? Me prenait-il pour une allumeuse parce que je ne pouvais m’empêcher de fondredevantluipuisdelerepousser?

Onsevoità19heures,répondis-je.Mespenséesdérivèrentinstantanémentdesqualitésdudirecteurcommercialidéalàce

quej’allaisporterpourledîner.JefusfrappéeenrepensantauxparolesironiquesdeBlakelorsdemapremièreprésentationqui impliquaientquesortiravecquelqu’unmedistrairaitdemon entreprise alors qu’il était aujourd’hui précisément cette distraction.Mais cela nem’empêcha pas de fouiller tout mon placard, en quête de quelque chose de convenable.J’étaisàboutdenerfs,etdésemparée.Legoûtvestimentaired’Allietsagarde-robefourniem’auraientétéd’ungrandsecours.

J’appelaiMarie,enespérantqu’elleseraitenville.–Àl’aide,gémis-je,faussementpaniquée.–Quesepasse-t-il,monbébé?–J’aimonfinancement,etjesorscesoirpourfêterça.–Jelesavais!Félicitations!–Maisjen’airienàmemettre…Elles’esclaffad’unriregutturalquimefitsourire.–Machère, c’est làunproblèmequenouspouvons résoudre.Tuveuxqu’ondéjeune

avantdefaireletourdesboutiques?–Génial.Merci.Après plusieurs jours passés entre financiers et informaticiens, j’avais besoin d’un

momententre filles.Deuxheuresplus tard,nousétionsassisesauVine–unsuperbepetitrestaurantméditerranéen,enpleinair,enbordurederez-de-chausséed’unebrownstonede

Page 88: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

NewburyStreet,l’undesquartierscommerçantslespluschicsetlesplusinabordablesdelaville. Il n’était donc pas surprenant qu’il ne soit qu’à quelques pâtés demaisons demonnouvelappartement.

Marieetmoisirotionsduthéglacéenmangeantdescalamarsetennousracontantlesnouveauxpotins.

–Alors,parle-moidecerendez-vous,ditMarie.Jemarquai une pause, réfléchissant à lameilleure façon de lamettre au courant de

toutcequeBlakem’avaitfaitcesdernierstemps.–Tutesouviens,parhasard,decetypequej’avaisheurtéaurestaurantl’autresoir?J’eusdespalpitationsausouvenirdecettepremièrerencontreavecBlake.Elles’immobilisa,etsesmagnifiquesyeuxbrunss’écarquillèrent.–Tuplaisantes?– Pas le moins du monde. C’est le directeur général du fonds d’investissements

providentielquinousaaccordénotrefinancement.Jesautail’épisodedelanuitàLasVegasetceluioùilm’attirasansquejem’enrende

compte dans son immeuble. Marie n’était pas ma mère, mais elle pouvait néanmoins semontrerparfoisexagérémentprotectrice.

–Dingue!Çaal’aird’êtreexactementcequ’iltefaut.–Pasvraiment.Ilestvraimenttropbienpourmoi.C’enestintimidant.–Jenepeuxmêmepasimaginerqu’untypeaussioccupéqueluiteconsacreautantde

tempss’ilpensequetun’espasassezbienpourlui.Je soupirai. J’auraisbienaimésavoircequeBlakepensait,mais j’étais tropoccupéeà

retrouvermesespritsquand il parlaitpouravoir le tempsde spéculer sur cequ’il pouvaitavoirentête.

–Jesupposequenon.Maisj’aiétéentraînéedansunteltourbillonquejenesaisplusquoi penser. (Je jouai avec ma salade.) Pour être honnête, Marie, je suis complètementperdue.

–Ainsival’amour,monbébé.Elle hocha la tête en souriant. L’amour ? Il n’y avait qu’une incurable romantique

commeMariepourypenser.Blakeétaitunemagnifiquedistraction,maiscelan’avaitrienàvoiravecl’amour.

–Jenecroispasquenousensoyonslàniquenousyseronsjamais.Elleinclinalatête,untimidesourireincurvantseslèvres.–Onnesait jamais.L’amourpeuttetomberdessusletempsd’unbattementdecœur,

mêmequandtunelecherchespas.J’acquiesçaiavecunsourirecrispé.–Jesuppose.EtcommentsepassentleschosesavecRichard?

Page 89: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Sonlégersouriresefitresplendissanttandisqu’elleentamaitlesdétailsdesondernierrendez-vousaveclui.Jem’enfonçaidansmonsiège,m’efforçantd’écouter,maisjen’avaisentêtequecemotobscène.

Saufqu’àcetinstant,iln’yavaitpasdeplacedansmaviepourl’amour.

Page 90: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitredix

Je fis semblant de travailler le reste de l’après-midi, mais en fait je décomptais lesminutes qui me séparaient du moment où j’allais retrouver Blake. J’étais impatiente decélébrer l’accord avecMax, etBlakem’avait beaucoupmanqué ces derniers temps. J’avaisl’impressiondeluidevoircesuccèsengrandepartie.Malgrélatensionsexuelleentrenous,jeneluienétaispasmoinsreconnaissante.

Commel’heureapprochait,jemeglissaidanslarobedecocktailsexyqueMariem’avaitaidéeàchoisir.Noireavecunefinebandeblanchelelongdel’ourlettulipe,elleétaitclasse,mais restait adaptéeà la chaleurde cette journée, avecde finesbretelles et son jupondemousseline.J’enfilaidessandalesàtalonsetlacets,misdesbouclesd’oreillespendantesenargentetnouaimescheveuxenchignon.

J’étaiscurieusedevoircequeBlakeendirait.Jeretouchaimonombreàpaupièresgriscendré.Avecousans lui, j’avais lapêcheet jevoulaisêtrebellece soir.Alli serait fièredemoi.

Sid fouillait dans le frigo lorsque j’émergeai de ma chambre, mes talons cliquetantbruyamment sur le plancher. Je m’arrêtai au bar pour attendre Blake. Sid se tourna etécarquillalesyeux.

–Quoi?demandai-je,soudaininquiètedenepasêtreaussibellequejelecroyais.–Euh…(Ilcilla.)Rien.Tuesvraimentsuperbe.Ilsouritetdisparutdanssachambre,justeavantqueBlakenefrappeàlaporte.Ilportaitlemêmecostumeanthracitequ’àLasVegasassortid’unechemiseblanche.Sa

barbedetroisjourscompensaitl’élégancedesatenue.Malédiction.Jem’approchaid’unpasnonchalant, m’efforçant de rester droite sur mes talons, en savourant son expressionpurementcharnelle.

–Bonsoir,dis-je.–Tumetuesdanscetterobe.Je me mordis la lèvre, curieuse de savoir ce qu’il allait faire. Avec la légèreté d’une

plume, il traçauntraitdemajoueàmonmenton, inclinantmonvisagevers lesienavant

Page 91: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

demedonnerunlongetdouxbaiserquimecoupalesouffle.

Onentradanslerestaurantbondéetlemaîtred’hôtelnousmenaaussitôtàunetablepour deux isolée du reste de la salle par un mur de bouteilles de vin. Sous les largesfenêtress’étendaitBoston.Encontrebas,desdizainesdepetitesvoilesblanchesparsemaientla rivière Charles, et le coucher de soleil se reflétait sur les méandres qu’elle dessinait àtraverstoutelaville.

– Tu sais combien j’aime les panoramas, murmurai-je. J’appréciai de terminer cettejournéeparfaiteici,etjecroisquecelasevoyait.

–Jesais,etmaintenantquejesaisaussiquetuesunefinebouche,jevaischangerunpeuettelaissercommanderpournous.

Jem’esclaffai.–Quelleévolution!–Touticiestextraordinaire,alorstunepeuxpastetromper.–Jen’endoutepas.Jeparcouruslemenu.Lorsqueleserveurarriva,jecommandai.Confitdecanardpourlui,églefinpourmoi.Leserveurparti,jeluidemandai:–Çat’estdifficiledenepastoutcontrôler?Ilmarquaunepause.–Oui.Jemesuisefforcéd’essayer,cestemps-ci,àpetitesdoses.–Etalors?–Ce…n’estpastoujourssimple.– Je pense que parfois c’est bon de faire une pause, d’être capable de s’en remettre

totalementàquelqu’und’autre.Neserait-cequ’uncourtinstant.–Tupeuxt’enremettreàmoiquandtuveux.Ilpinçasalèvreinférieureentresesdents,enunsouriremalicieux.Jeplissai lesyeux,

sentant un frisson parcourirma peau. Jem’amusais plus que je ne croyais de nos petitesallusionssexuelles,maisj’avaisbesoinderamenerlaconversationsurunautresujet.Blakeétaitcapabledechangermespensées lespluschastesenquelquechosed’obscènegrâceàsesmotsbienchoisis.

–Tut’esfaitbienrare,cesdernierstemps.Ils’estpasséquelquechose?Ilplongeadansmesyeuxsonregardpénétrant.–J’éteinsjustedesincendiesaubureau.–Tunem’asriendemandésurmaréunionavecMax.–Pourquoifaire?JesavaisqueMaxallaitinvestirdepuisl’instantoùjet’aivueentrer

danscellesalle.J’auraisaimé le savoiraussi,pensai-je,ne serait-cequepourm’éviterunebonnedose

destressetd’anxiété.

Page 92: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Commentlesavais-tu?–Ehbien,d’abordparcequetuesbelle.Le compliment me fit chaud au cœur, même si j’eus du mal à le croire, venant de

quelqu’unquiincarnaitlaperfectionphysique.– Je ne vois pas bien ce que la beauté a à voir avec ça, dis-je en jouant avec ma

serviette.– La beauté peut être un argument, surtout avec quelqu’un comme Max. Et

deuxièmement,tuasunbonconcept.Je me renfrognai. Son opinion contrastait tellement avec la violence de son

interrogatoirelorsdelaprésentation.–Situpensaisquejetenaisunbonconcept,alorsjenecomprendspasbienpourquoi

tuaseubesoindem’humilieretdemedescendrependantcetteprésentation.J’avais appris à connaître Blake ces dernières semaines,mais les émotions que j’avais

ressenties ce jour-là ne s’oubliaient pas facilement.Mon poing se serra à ce souvenir, sonrejetsimpleet immédiatétait imprimédansmamémoire.J’enbouillonnaidenouveau,mapeauparcourued’unfrissondefureur.

–Jevoulaisvoircommenttusupportaislapression.Etpuis,quelautremoyenavais-jedesavoirsituétaislibre?J’aifaitd’unepierredeuxcoups.

Ileutunlégerhaussementd’épaules,commesicen’étaitrien.Leconcernant, c’étaitprobablement le cas.Pourmoi, c’étaitunévénement capital, le

point d’orgue demois de travail intense. Si nous voulions aller plus loin, il fallait qu’il lesache.

–Blake,j’aiénormémenttravaillépourobtenirl’opportunitédefaireuneprésentationdevantvotregroupe,ettum’astraitéeavecleplusparfaitmépris.J’aidumalàimaginercequej’auraisressentisi,partafaute,jen’avaispasobtenucedeuxièmerendez-vous.Jecroisquej’auraisétédévastée.

Je me tournai vers les gratte-ciel pour éviter son regard, de peur que ma colère nes’effacequandj’avaisvraimentbesoinqu’ilcomprenneàquelpointilavaitéténulcejour-là.Cette pensée me taraudait depuis des semaines, et j’eus soudain un peu honte d’avoircouché avec lui sans lui avoir d’abord avoué ce que je pensais de son comportement. Jen’étaispasvraimentuneicôneduféminisme.

–Tuasraison,dit-ildoucement.Macolères’effaçadevantlasurprisequeprovoquèrentcesmots.–Tuneleméritaispas,ajouta-t-il.Sonregarddemeurad’unsérieuxdésarmantpendantquejedigéraissesquasi-excuses.

Leserveurapportanosplats.–Maxavaitl’airfâchéquetum’aiesaidée.Samains’abattitsurlatableassezfortpourmefairetressaillir.

Page 93: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Tuluiasdit?Mesyeuxs’écarquillèrent.–J’aisupposéqu’ilfiniraitparl’apprendre.Jepensaisquevousétiezamis.–Noussommescollègues,Erica.Pasamis.Il enfonçaviolemment sa fourchettedans son canard, en coupaunmorceauqu’ilmit

danssaboucheparfaite.–D’oùconnais-tusonpère?Il fronça les sourcils, sapatience s’épuisant visiblement.Ma journée idéale risquaitde

tournercourt,maislesujetétaitdéjàsurlatable.–Blake,tuconnaistoutessortesdechosessurmoi,etj’ail’impressiondeneriensavoir

surtoi.Dis-moiquelquechose,n’importequoi!J’agitailamaind’ungestedefrustration.Samâchoiresetenditalorsqu’ilcontinuaitdemanger.Monappétits’évanouitmalgré

lesdélicieuxfiletsdisposésdevantmoi.Onnepouvaitpasgâcherunplataussidivin.Jemeservisunpeuducouscousépicéquiaccompagnaitlepoisson,tandisqueBlakereprenaitlaparole.

–Àquinzeans,j’aieudesproblèmes.–Quelgenredeproblèmes?–Deshistoiresdehacker.–Quelgenred’histoiresdehacker?insistai-je.–Peuimporte.Jemerenfonçaidansmonsiège,faisantunpeulamoue.–Àl’époque,Michael, lepèredeMax,voulaitsediversifier, ilavaitalorsénormément

misé sur les logiciels. Il avait entendu parler demon histoire, et il est venume chercher.J’étaisauquarantièmedessous,maisilm’adonnémachance.J’aipuconcevoircelogicieldebanqueàmamanière,commeilfallaitqu’illesoit.Àl’évidence,nousenavonstouslesdeuxbientiréprofit,luidoublantlavaleurdesonportefeuille,etmoimedonnantlesmoyensdefairecequejefaisaujourd’hui.

–EtquelestlerôledeMaxdanstoutcela?–Maxaquelques annéesdemoinsquemoi. Il a vu la façondontMichael croyait en

moi, non seulement professionnellement,mais aussi en tant quementor et ami. Ilm’en avoulu,etlorsqueleprogrammeaétévendu,ilasuqu’ilneferaitjamaisaussibien.Çan’ajamaiscessédel’emmerder.

–Oh.–J’aibienrépondu,chef?demanda-t-ilenpointantsafourchetteversmoi.Ilétaitplutôtmignonquandilétaitfâchéetd’humeurbavarde.–Pastrèsheureusedecequetuasraconté,maisheureusequetumel’aiesconfié,oui.

Page 94: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Jemerepassaienmémoire lesdeuxréunionschezAngelcomà la lumièredu faitqueMax était constamment en compétition avec Blake. Mon entreprise s’apprêtait à se lierirrévocablement àMax. J’éprouvaismaintenantune crainte tout à fait rationnelle quemarelationavecBlakepuissedevenirunjourproblématique,quandMaxn’enauraitriensusijeneleluiavaispasdit.

Lorsquel’onapportal’addition,Blaketenditsacarteauserveuravantquejen’atteignemonsac.Jelelaissaifaireetm’excusaipourallermerafraîchir.

Enrevenant,jemedirigeaiversBlakequiattendaitprèsdesascenseurs.Ildébordaitdesagrâcedésinvolte, lesmainsdans lespoches, le costume tenduà tous lesbonsendroits,me rappelant son corps sculpté en dessous. Je ne pouvaisme concentrer sur rien d’autrealors que je longeais le grand bar et ses clients, mais un visage capta mon attention aupassage.

Je me pétrifiai, soudain saisie d’une panique totale qui noya tous les bruits durestaurantbondé.Moncœurbattitlachamade.Unedouleurglacéemeparcourut,courantdemespoumonsjusqu’auboutdemesdoigts.

Je m’appuyai au mur, apparemment incapable de bouger, tandis que le visage del’hommequej’avaisreconnusetournaitversmoi,commes’ilavaitperçumonregard.

Vêtud’un costume surmesure à fines rayures, il ressemblait à tous ceux qui, au bar,prenaientunverreaprèsunelonguejournéedetravail,maismoi,jesavais.Aprèsquelquessecondes,sonvisagedessinaunsourirelorsqu’ilmereconnut.

Ilsesouvenaitdemoi.Après trois années à regarder par-dessus mon épaule, sans jamais savoir si je le

reverrais, j’avaisfiniparmedirequecelan’arriveraitplus.Iln’avaitpasdenom,c’étaitunfantôme, un souvenir tellement atroce que j’avais passé des années àme convaincre qu’iln’avait jamais existé. Mais il était là, cauchemar vivant revenume hanter. Jememaudislorsque me vint l’idée irrationnelle qu’en avoir parlé à Liz l’avait d’une certaine façonramenéàlavie.

J’entendisvaguementBlakem’appeleravantdemerejoindreetdem’entraînerpar lebraspourmesortirdematranse.J’essayaienvaindemasquerlapeurquim’avaitenvahie.

–Quesepasse-t-il?demanda-t-il,lestraitsdéformésparl’inquiétude.–Rien.Jeprissamainetl’entraînaiverslesascenseurs.Après plusieurs tentatives deme faire parler dans la voiture, Blake ne dit plus rien.

Dansl’airfraisdesonappartement,j’allaimeserviraubar.Jeremplisàrasbordunverreàwhiskydeglaçons,etyversaiunalcoolambrétirédel’unedesnombreusesbouteillesdesacollection.

Je m’enfonçai dans le canapé en pressant le verre froid contre mon front. J’espéraischasser ces pensées. Je voulais les bannir une par une, les évacuer jusqu’à ce qu’elles ne

Page 95: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

paraissentplusêtrelesmiennes,oumieuxencore,lesoubliertotalement.Jebusunebonnegorgée.

Jen’auraispasdûêtrelà,maisjenepouvaispasresterseule,etl’arrangementavecSidne comptait pas. J’avais besoin que l’on me change les idées, et Blake avait toujours étéextrêmement doué pour ça. Il était assis sur la table basse en face de moi, tenant mesjambesentrelessiennes.Ilcaressaitlapartiesensibleau-dessusdugenou,maismoncorpsétaitanesthésié,incapablederépondreàsatendresse.

–Parle-moi,s’ilteplaît,ditBlaked’unevoixposée.Je détournai le regard. Partager ce passé avec Blake semblait impossible, mais une

étincellenaquit.Unepetitepartiedemoivoulaitbriserlemuraveuglequiséparaitcepasséduprésent.

–Iln’yarienàraconter,dis-je,peuconvaincuedesavoircommentl’exprimer,mêmesijelevoulais.Jemaîtrisaisàpeinelemaelströmdesémotionsquimeterrorisaientdepuisquenousavionsquittélerestaurant.

–Tudéconnes,onauraitditquetuétaissurunescènedecrime,là-bas.–Justement.Je regrettai ce mot dès que je le prononçai. Mon corps se tendit. Blake n’allait plus

jamaismeregarderdelamêmefaçon.Il saurait quequelqu’unm’avait volé sonplaisir, et quedans la stupide ignorancede

majeunesse,jel’avaislaisséfaire.Silencieux, il attendit que je poursuive. Je me forçai à boire le reste de mon verre,

espérantqueçamesoulagerait.Si j’enparlaisàBlake, ilprendrait laclefdeschamps,oupeut-être qu’il compatirait – encoreque jediscernaismal pourquoi. Jemedis que si nousavionslamoindrechanced’unavenir,ilfallaitqu’ilsache.

– Nous étions en première année. Nous sommes sorties entre amies faire la fête unweek-end, et nous nous sommes retrouvées dans lamaison d’une fraternité. Il y avait unmonde fou. Nous avons dansé, et bu beaucoup trop de punch. Je n’avais pas l’habitude,alorsj’aieulatêteàl’enversdèslepremierverre.Jemesuisécartéedugroupe.Etcetype,là,il…

Jen’achevaipasmaphrase,perduedanscesouvenirsiprofondémentenfoui.Commentpouvais-jeexpliqueràquelpointj’avaiséténaïve,desuivreunétrangervers

le bar que nous n’avons jamais rejoint, commeun enfant attiré par des sucreries ?D’êtretellementsaoulequejepouvaisàpeineluirésister,mesrefusnoyésparlechaosdelafêteàl’intérieur?

L’homme que j’avais vu ce soir m’avait volé mon innocence, m’avait abandonnée,violentée, laissée pourmalade dans les buissons où Lizm’avait finalement retrouvée. Desannéesàmepréserverpourunpremieramourpourenarriver là, et ensuite lahontequim’avaitclouéeausilence.

Page 96: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–J’aiessayédelerepousser,murmurai-je.Cettefois,jenepusretenirmeslarmes,quicoulèrent le longdemonvisage.Mesmembresétaient faibleset lourds, j’étaispaniquéeàl’idéedeperdrecequ’ilyavaitentreBlakeetmoi.

LamâchoiredeBlakeseserra. Il recula,passantsesdoigtsdanssescheveux.Neplussentircelienphysiqueentrenousmeblessa.J’avaisbesoindesoncontactpourmerassurersursessentiments.Unenauséem’envahitàl’idéequ’ilmerepousse.

–Tuescontent,maintenant?Jerisfaiblementàtraversmessanglots,espérantqueBlakeallaitrépondre.Sonvisages’étaitfigédansuneexpressionindéchiffrable.–Jesuissouillée.–Arrête.Letonautoritairedesavoixmefittressauter.–Arrêtequoi?–Tun’espassouillée,Erica.Jerespiraisdifficilement.J’avaistellementenviedelecroire.–Jenefaisqu’énonceruneévidence. Ilest idiotdet’imagineravecquelqu’undemon

genre,de toute façon.Tues faitpoursortiravecdes femmesdumonde,desmannequins,pasquelqu’uncommemoi.

Mavoixs’étranglasurcesderniersmots.–Jen’aipasenviedesortiravecdesmannequins.–Tuterendscomptedesconneriesqueturacontes,j’espère?Jesuisnulle.C’estvrai,

regarde-moi.–C’estcequejefais.Souvent,enfait.Tumerendsfou.Jepeuxàpeinedormirlanuit.–Etmaintenant?– Maintenant, je t’ai pour moi. Plus de colocataire, plus de foule autour, et toi tu

essaies de trouver toutes les raisons de me faire fuir. Si tu crois que cela va y changerquelquechose,tutetrompes.

Je détournai les yeux, repoussant les larmes quimontaient encore. Lorsqu’il s’assit àcôtédemoi etm’attira contre lui, jem’y abandonnai volontiers, désireusede retrouver sachaleur. Comment pouvait-il encore vouloir de moi – c’était un mystère. Il me serra fortcontresapoitrine,m’abritadanssesbrasjusqu’àl’extinctiondemonderniersanglot.

–Tuessuperbe,dit-il.Pelotonnéecontresonépaule,jesecouailatête.–Commentpeux-tudirecelaaprèscequejet’airaconté?– Parce que c’est vrai, Erica. Ce qui t’est arrivé n’est pas toi. Si c’était le cas, tu ne

voudraisprobablementpasnonplusêtreavecmoi.–Maisc’estcequejeveux.

Page 97: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Mamaincourutsursapoitrine,jesentissoncœurbattreàunrythmelentetrégulier.Je ne savais rien de son cœur, mais quelque chose en moi voulait le mériter. Commentserait-ce que d’avoir son désir, son amour ? Mes sentiments pour Blake commencèrentsoudain à étouffer les souvenirs douloureux que je venais d’avouer quelques instants plustôt.

Ilpritmamainetparcourutdoucementleboutdemesdoigtsavecseslèvres.–Moiaussi,jeveuxêtreavectoi,mabelle.Encet instant, tout futcommesinousétionsensembleetquenousnousconnaissions

depuis longtemps. Je lui avais révéléunepartiedemoi, et il était encore là,malgré tout.Centimètreparcentimètre,ilmecaressa,s’appropriantchaqueespacedemapeaunueavecunetendressequejeneluiavaisjamaisconnue,m’apaisantavecsesmainsetseslèvres.Ladouleur et l’hébétude cédèrent le pas au soulagement, puis à une chaleur familière quicouvaitsouslasurface.

Je penchai la tête en arrière, une supplique muette pour qu’il m’embrasse. Il avaitpénétrémesdéfenses,submergeantmessensdubesoinpressantd’êtrepossédée.Sonodeur,songoût,sonappétitprimal.Jevoulaistout.Seslèvressejoignirentauxmiennes.D’abordincertaines,puisplusassurées.J’explorailesprofondeursdesabouche,mêlantmalangueàlasienne,avidedelui.Ilmeréponditaveclamêmeintensité.Ilmefitpivoterdefaçonàceque je l’enfourche. Un gémissement m’échappa. Puis il s’arrêta, les poings serrés sur sescôtés.

–Quesepasse-t-il?–Jesuisangoissé,Erica.Satêteretombaenarrièresurlecanapé.Je voulais le dévorer de baisers,mais j’avais d’abord besoin de savoir où ses pensées

étaient.Ilfermalesyeuxetjesentissoncorpssetendresousmesdoigts.–Touche-moi,lesuppliai-je.Jemedébattisaveclesboutonsdesachemise,incapabledemepasserpluslongtemps

ducontactdesapeaucontre lamienne.Passantmesdoigtssursapoitrine, jemepenchaipourgoûtersagorge,medélectantdesonodeuretdesapeausalée.

–Attends,dit-ilenserrantlesdents.Jereculaidocilement.–Pourquoi?Moncœurseserrade tristesse tandisque lesilences’immisçaitentrenous.Après tout

ce que je lui avais avoué ce soir, j’aurais été idiote de penser que nous pourrions fairecommesiriennes’étaitpassé.

Je fouillaissesyeux.Une lueurd’émotiontraversasonvisage,avantqu’ilnedétournelatête.Était-cedel’appréhension?

Page 98: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Jeteveux,Blake.Bonsang,c’étaitpeudeledire.Jechangeaideposition,incapabledenepaspenserau

tiraillementdéplaisantentremescuisses.– Je te veux aussi. Je vais endevenir cinglé si je ne te prends pas ce soir. (Il expira

nerveusement.)C’estjustequejeneveuxpaste…t’étouffer.– Jene suis pasunepoupéedeporcelaine. Je te promets que tuneme feras pasde

mal.Il fermadenouveau lesyeux,sesmains immobilesdesdeuxcôtés,commes’il résistait

ainsiàlatentationdemetoucher.Appréciant chaque muscle de son abdomen, je fis descendre mes doigts depuis sa

poitrine,ensuivantlespoilssoyeuxquidisparaissaientsousleborddesonpantalon.J’allaisledégrafer,maisBlakemepritparlespoignetsetm’immobilisa,toutenrespirantfort.

–Jeveuxtesentirperdrelecontrôle,Blake.Mon corps vibrait, le peu de maîtrise qu’il me restait ne tenant plus qu’à un fil. Je

voulaisqu’ilmeprennecommeill’entendait,commetoutmonêtrel’exigeait.Il me saisit par la taille et se leva, me soulevant sans effort. J’enroulai mes jambes

autourdeluitandisqu’ilnousentraînaitverssachambre.Lapièceétaitfaiblementéclairéepardeuxappliquesmurales.Lapénombrem’enveloppa,ainsiquelachaleurdesoncorps.

Il referma la porte derrière nous et me cloua contre elle en grondant. J’inspirai enhoquetant lorsque mon dos heurta le bois dur. Je me mordis la lèvre et resserrai monemprise,prêteàprendretoutcequ’ilmedonnait.Lesfinesbretellesdemarobetombèrentsur mes épaules. Blake libéra mes seins l’un après l’autre, et en flatta les pointes de salanguepuisdesesdents.Lavirulencedelasensationmetransperça.Jegémissonnomenlaréclamantplus.

Il reposa mes pieds sur le sol et me libéra de ma robe, me laissant nue tandis qu’ils’agenouillaitdevantmoi,remontantparchaudsbaisersdemacheville jusqu’auxlèvresdemonsexehumide tenduvers lui. Je faillism’évanouir lorsque sabarbe frotta l’intérieurdemacuisse.

J’enfonçaimesdoigtsdanssescheveuxetresserraimonemprisealorsqu’ilmeprenaitdans sa bouche. Un feu grandit enmoi après seulement quelques coups de langue.MonDieu,sa langueavaitdestalents insoupçonnés. Ilseconcentrasur lapetitebouledenerfsquibandaitmoncorpsentier,approchantlalibération.Sescaressessefirentplusâpres,etilsuçamonclitoavecuneferveurquimecoupalesouffle.

Ma vision vira au blanc comme je succombais, plongeant en chute libre vers unorgasmeconvulsifquimefitpresquedéfaillirdanssesbras.

Avant que mes genoux ne me trahissent, Blake me rattrapa, mon corps inertes’abandonnant contre lui. Il m’embrassa, de longs baisers profonds qui dissipèrent lesfrissonsdemonrécentorgasme.Mesmainss’étalèrentsursapoitrineofferteetécartèrentsa

Page 99: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

chemise,exultantdecetteopportunitédeletoucherlibrement,commejeledésiraisdepuisdesjours.Sapeauétaitenfeu,tenduesurautantdemusclesnoueuxquisemblaientvibrerd’une impressionnante retenue.J’étais rongéepar ledésirde leposséder totalement.Sansentrave.Brut.

–Blake,situnemebaisespastrèsvite,jevaiscraquer,jetejure.Ses lèvres s’incurvèrent sous les miennes et il nous mena vers le lit. Il se dévêtit

rapidement,sesmusclesraidissaientàchaqueeffort,chaquemouvementétaitunepromessedelapuissancequ’ilpouvaitlibérer.J’attendis,folled’impatience,qu’iltireunpréservatifdesapocheetl’enfilesursonimposanteverge.Jememaudisdenousavoirretardés,denousavoirmaintenushorsdecetendroitoùnousdésirionstousdeuxférocementnousretrouver.

Pile aumoment où jem’y attendais, il serrama taille etme tira vers le bord du lit,déployantmes jambes autourde ses reins et se calant entremes cuisses. Son regard étaitsombre. Son souffle bruissa lorsqu’il me pénétra d’un unique mouvement puissant etrégulier,enenfonçantsesdoigtsdansmeshanches.

Jegémiscommeunedamnée, laissantmoncorpss’acclimateraufaitd’êtreàcepointdominé par le sien. Je fermai les yeux une minute, le temps de tout absorber, dem’imprégnerdelaperfectiondesaprésenceenmoi.

Comme il ne bougeait pas, j’ouvris les yeux. Son visage était tendu, le contour de samâchoirerigide.Ilfitcourirsamaindemahancheàmongenou,etseretiraunpeu.

Jelaissaiéchapperunpetitcouinementdeprotestation.Jeresserraimeschevillesetletiraiplusprès,plusprofond.

–C’estcommeçaquejeteveux.–Erica…–Jeneveuxpasquetuteretiennes.Jeteveuxtoutentier,Blake.D’ungestedésespéré,jem’arquaiviolemment.Lebesoindelesentirbougerenmoi,me

ravager, était irrécusable. Ce qu’il croyait être trop pour moi était précisément ce dontj’avaisenvie.

–S’ilteplaît,suppliai-je.Il laissaéchapperunsoufflerauqueettremblant,seretiralentement.Puisils’enfonça

enmoi,puissammentetprofondément.Jecriai.Mondossetorditsurlelit.Là.Justecommeça.J’accueillais sesmouvements rapides, devenus féroces, commema chatte se resserrait

sur lui.Moncorps toutentier tremblait,plongédansune jouissance ininterrompue. Jemedélectaisdelesentirs’enfoncertoujoursplusprofond,touchantquelquechoseenmoidontje n’avais pas soupçonné l’existence jusqu’à ce jour. Je m’agrippais aux bords du lit,accentuantlapuissancedesesefforts.

Lorsque je crus impossible d’aller plus loin, il souleva mes hanches, ajoutant unenouvelledimensionànotrecontact.Jeplongeaimespoingsdanslesdraps.

Page 100: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Blake,ohmonDieu,oui!Descrisinintelligiblesm’échappèrenttandisquejefondaissurlui,monplaisirruisselant

duplusprofonddemonêtre.Blake se tendit. Chaque partie de son corps se fit pierre, il exhala furieusement en

jouissantenrafale.–Ohputain,Erica.Ilbalançalatêteenarrière,sesdoigtss’imprimantsurmapeau.Ils’immobilisaenmoialorsquemoncorpsvibraitdecontrecoups.J’étaisagrippéeaux

draps.Épuisée par cet orgasme, je restai là, amorphe et satisfaite. Après un temps, Blake

s’étendit,metiracontrelui.Ilenroulasonbrasautourdemoi,mitsatêtedansmoncou.–Erica?Jeronronnai,pelotonnéecontresapoitrine.–Tuvasbien?murmura-t-il.Je regardai ses yeux, dilatés par la passion,mais préoccupés.Mon cœur se serra, et

j’eusdumalàprendreunenouvelleinspiration.– Je vais mieux que bien. (Je déglutis par-dessus le nœud dans ma gorge.) Je n’ai

jamaisconnupersonnecommetoi,Blake.Je…Lesmotsmemanquèrent. Il touchames lèvres du bout de ses doigts et y déposa un

douxbaiser,volantlapartiedemaphrasedemeuréeinexprimée.J’étaisentraindetomberamoureuse,plusfortetplusvitequejenel’avaisjamaisété.Il parsemamonmenton de baisers, trouvama bouche, m’apaisa avec les longues et

profondes caresses de sa langue. Toute sa douceur ralluma le feu en moi. Mes mainsparcoururent son corps, profitant de chaquemagnifique courbe de son anatomie. Je n’enavais jamais assez de lui, que ce soit à l’admirer ou à coucher avec lui. Le besoin de leposséderme consumait.Mes caresses se firent plus empressées. Je l’attirai et il se décala,plaçanttoutlepoidsdesoncorpsau-dessusdemoi.

–Tuesinsatiable,murmura-t-ilentresesbaisers,titillantmalèvreinférieureentresesdents.

–Désolée,jenesaispascequej’ai.Jem’arquaipourtrouversoncorps.Plusilmedonnait,plusjeledésirais.–Pourquoienserais-tudésolée?–Ilestencoretroptôt,dis-je,lesentantdurciralorsmêmequejeparlais.–Jepeuxcontinuertoutelanuit,situlepeux.Écartantmesbras,ilentrelaçanosdoigts.Ilmetintcaptive,unétatquiexacerbames

sensetmefitvibrerdelatêteauxpieds.ÊtreavecBlakem’enivrait,etmonaddictionserenforçaitàmesurequ’ilm’offraitdesi

puissantsorgasmes.J’enroulaimesjambesautourdelui,lesbrasimpuissants,etl’entraînai

Page 101: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

versmoi.–C’estundéfi?lenarguai-je,brûlantdelemettreàl’épreuve.–Oui,répondit-il.Savoixétaitrauquededésiretseslèvresseplaquèrentsurmoi.

Page 102: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitreonze

Jem’éveillai aumatin, enveloppée du doux édredon de Blake et des souvenirs de lanuit.Jem’étendisversl’autrecôtédulit,celuideBlake,vide.Lesoleildéversaitsalumièredanslachambre,etjesentisl’odeurducafé.Jemelevaietprisuntee-shirtblancdanslesplacardsdeBlake.Danslasalledebains,Blakeavaitpréparédesproduitsdetoilettepourmoi.Jesouris.Laplupartdesfillesn’avaientjamaisceprivilège.

Jeterminaimatoiletteettraversail’appartementensuivantlesbruitsdelacuisine.Jetrouvai Blake alors qu’il cassait desœufs dans un bol. Il était torse nu, uniquement vêtud’un pantalon de pyjama en flanelle qui lui moulait les fesses. Ses cheveux étaientébouriffés, ilportaitunepairede lunettesàmonturesombrequiamplifiait sonalluresexydu matin. Elles le faisaient paraître plus vieux et en quelque sorte plus humain – l’effetClarkKent.

Jem’appuyaià l’îlotdegranitetconsidéraisesprogrèsencuisine. Ilavaitdéjàcoupédesfruitsetmisdubacondansunepoêle.Monestomacfitunpetitbondàl’idéequ’ilfaisaittoutcelapourmoi.

Ilabandonnacequ’il faisaitpour se laver lesmainset se tournaversmoi. Il souritetpassaledoigtsurl’échancruredemontee-shirt.

–J’aimebien.– Je n’essaie pas de lancer une mode, mais je suis contente que ça te plaise. (Je

m’adossaiàl’îlotetpenchailatêtesurlecôté.)Jenesavaispasquetuportaisdeslunettes.–Normalementnon,maistum’asoccupétoutl’espritcettenuit,etj’aioubliéd’enlever

meslentilles.–Désolée.–Pasmoi.Alorsnelesoispasnonplus.Ilmehissasur lecomptoiretsepenchaentremes jambes.Sesmainsremontèrentsur

mescuissespuissousletee-shirt jusqu’àmondosoùilcaressamapeau, laissantdestraitsde chaleur partout dans leur sillage. Je gémis lorsqu’il trouva mes seins et malaxa mesmamelons jusqu’à les faire durcir. Enm’embrassant, les douxmouvementsmesurés de sa

Page 103: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

langueme rappelèrent les élancements engourdis et plaisants demon entrejambe durantnotremarathondelanuitprécédente.

–Tume rendsdingue,dis-je en sentantmoncorps toutentierprendrevie,dansuneformetoutedifférented’éveil.

–Mmm…J’aimeentendreça.Ilgrognaendéposantdesbaisersetenléchantmoncou,faisantvibrertoutmoncorps.

D’unemain, il pritma cheville pour enroulerma jambe autour de sa taille, et de l’autremassalachairtendreentremescuisses.

–Bonsang,tuesdéjàtrempée.–Jenepeuxpasm’enempêcher,Blake,c’estl’effetquetumefais.Jemeconcentraisurlescaressesdesamain.–Jenefaisquecommencer,mabelle.Ilpritmabouchetoutenenfonçantdeuxdoigtsenmoi,reproduisantlesmouvements

desesdoigtsavecsa langue.Moncorpsfrémit.Jemeraccrochaidésespérémentà lui,mesongless’enfonçantdanssonépaule.Monsoufflesefitrauqueetmoncœursemitàbattrefollement,jemeretinsetl’orgasmemeparcourut.

Sesdoigtsglissèrenthorsdemoi,etilajustal’érectionmaintenantmanifestequitendaitsonpantalon.

– Je vais chercher un préservatif. Je ne m’attendais pas à te baiser avant le petit-déjeuner.

Jegloussailégèrementauchoixdestermes,toutàlafoisrêveuseetassoiffée.–Cen’estpasobligatoire,situneveuxpas.–Crois-moi,j’aienviedetebaiseravantlepetit-déjeuner.–Non,jevoulaisdire,lepréservatif.Jeprendslapilule.SonsilencemefitredescendresurTerre.Jevoulusfairemarchearrière.–Désolée,çameva.C’étaitjusteuneremarque.Merde,j’avaisbienréussiàplomberl’ambiance.Ilagitanégativementlatête.–Non,cen’estpascela.Jetefaisconfiance.Maisj’enaitoujoursutilisé.–Oublionstoutcela,jesuisdésolée.La plupart des hommes se plaignaient de devoir enmettre ; jeme sentaismieux de

savoirqu’illefaisaittoujours.–Arrêtedet’excusertoutletemps,Erica,medit-ild’untonsévère.Jememordislalèvre,attendantdevoiroùtoutcelanousmènerait.–Bonnefille,reprit-ild’unevoixrauquedeprédateur.Ilmedébarrassadesontee-shirt,dénudantmapoitrine.Sesyeuxs’assombrirent.En un rien de temps, nous étions dans le salon, où il me prit sur ses genoux, je le

chevauchai nue sur le canapé crème. Je lui offris un long baiser langoureux, en profitantpourluiôterseslunettesetlesdéposerensécuritésurlatablebassederrièrenous.

Page 104: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Blakebaissaàpeinesonpantalon,libérantjustesonmembrequi,danscettepièceàlalumièredujour,apparaissaitplusimpressionnantquejamais,épaisetviril,n’attendantquemoi.

Désireusede legoûter, jetombaiàgenouxetrefermaimes lèvressursongland.Je leflattaidepetitscoupsdelanguesursonsommetsensibleavantdeleprendreplusdansmabouche.Jelesuçaiavidement,m’abandonnantàmonadoration,jusqu’àcequesonemprisesurmescheveuxseresserre,m’immobilisant.

–Montesurmoi,m’ordonna-t-il.Jefrissonnai,etmapeaus’enflamma.Jeréagisphysiquementàsonexigencedefaçon

notable.Humideàl’avance,j’obéisetremontai.–Maintenant,glisse-toisurmaqueue,doucementetlentement.Brûlant d’anticipation, je descendis sur lui avec une retenue qui m’était presque

douloureuse, afin d’apprécier pleinement ma position. Aucun espace entre nous – ils’enfonçadélicieusementcentimètreparcentimètre, jusqu’àêtre totalementà l’intérieurdemoi.

Jefermailesyeux,etunpetitmiaulementfranchitmeslèvres.–Regarde-moi,murmura-t-il.J’ouvrislesyeuxpourdécouvrirtoutelafaimanimalequianimaitlessiens.Ilpritmon

visage dans sesmains etm’embrassa passionnément. Je gémis, posantmesmains sur sesépaulesafind’assurermonéquilibre.Ils’endétourna,lesoufflecourt.Ilfitglisserundoigtle long de mon menton et de ma clavicule, effleura mon mamelon hypersensible pourfinalement s’arrêter surmahancheetm’agripperde façonpossessive. Il releva lesyeuxetmecontempla.

–Tuesmagnifique.L’intensité de son regardm’écrasa.Ma poitrine se serra. J’allais trop loin avec Blake,

mais jem’en foutais, tant qu’il était enmoi, qu’ilme touchait, qu’ilme regardait de cettefaçon.Jenepouvaiséchapperàcequ’ilsuscitaitenmoi.

Je répondis d’un mouvement subtil des hanches. D’un bras, il les enlaça, memaintenant en place tandis qu’il changeait de position et donnait un puissant coup deboutoirverslehaut,m’offrantplusencoredelui-même.J’eusunhoquetlorsquejelesentisme heurter au plus profond, mais cet inconfort passager fit rapidement place au plaisirquandilsemitàmemasserleclitoenpetitscercles.

Unefinebrumerecouvritmapeaulorsqu’ilsemitàbouger,depuissantsmouvementsréguliers en moi qui me firent temporairement oublier l’avantage que j’avais dans cetteposition.J’accompagnaisesmouvements,roulaiaveceuxjusqu’àcequeBlakedesserresonemprise et m’abandonne peu à peu le contrôle. Sesmains se serrèrent anxieusement surmeshanches.

Page 105: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

– Fais-moi confiance, chuchotai-je. Me contractant sur lui, je griffai légèrement sapoitrineetl’embrassaifiévreusement,partageantchaquesoufflequinousmenaitàl’extase,ensemble,sansjamaisnousquitterdesyeux.

***

Jem’étais endormie sur le canapéaprès lepetit-déjeunerquenousavions finalementmangé.Entreleseffortsintensesdelanuitetceuxdumatin,j’étaisépuisée.Lorsquejemeréveillai, quelques heures plus tard, Blake était assis sur l’autre canapé, son ordinateurportablenoirbrillantposésurlesgenoux.

C’étaitunBlakedifférentdeceluidupetit-déjeuner,entièrementhabillé,lesyeuxfixésavecintensitésurl’écran,sesdoigtscourantsurleclavieràunevitesseimpressionnante.

–Jecroyaisquetunetravaillaispasàlamaison,dis-jeenm’étirant.–Jefaisjustequelquesrecherches.(Ilnerelevapaslesyeux.)–Quelgenre?Il referma le portable et le posa à l’écart, son expression s’adoucissant lorsque nos

regardsserejoignirent.–Jecroisquejel’airetrouvé,dit-ildoucement.–Quiça?Ilcroisalesmainssursesgenoux.Mon Dieu. Mon estomac se noua, menaçant de restituer mon petit-déjeuner. Mes

pensées étaient encore embruméespar le sommeil et semirent à tourbillonner tandis quej’assimilaiscequeBlakevenaitdemedire.

–Comment?Jemeredressaietm’assis,enagitantlatêtepourm’éclaircirlesidées.– J’ai accédé aux relevés des cartes de crédit du restaurant, et en particulier du bar.

Puisj’airéduitlespossibilitésenfonctiondesonâgeetdesonuniversité.–Jeneveuxmêmepassavoircommenttuasfaitça.Non.Ilétaitallétroploin.– Eh bien, je ne comptais pas te le dire, de toute façon. La façon dont j’ai obtenu

l’informationestbienmoinsimportantequel’informationelle-même,tunecroispas?–Pourquoitufaisça?Cen’estmêmepasimportant.– Tu ne crois pas qu’identifier l’homme qui t’a violée est important ? (Son front se

plissa.)–Àcetinstantdemavie,non.Pourquoimettreunnomsurunvisagequejechercheà

oublier?–Tupeuxencoreporterplainte.Tuesencorelargementdansledélaideprescription.–Pourdirequoi?Bonjour,monsieurl’officierdepolice,j’avaisdix-huitansetj’étaisivre

dans lamaisond’une fraternitéquandcetteenflureaprofitédemoi.Jesuissûrequ’ilsne

Page 106: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

l’ontjamaisentendueavant,celle-là.–Ets’ilcontinuedelefaire?Magorgeseserradouloureusementàcetteidée.Etsijen’étaispaslaseule?Autantje

m’envoulaisdem’êtremisedansunetellesituation,autantjesavaisauplusprofonddemoique personne ne méritait de vivre ce que j’avais vécu. J’aurais fait n’importe quoi poureffacercesouvenircrueldemamémoire.

Je n’étais pas encore prête àm’y confronter, ni au souvenir, ni à lui. À l’homme quim’avait fait cela. Et là, Blake m’y forçait, braquant les projecteurs sur des détails quej’espérais oublier. Maintenant, je n’avais plus envie de les connaître. Je voulais rester endehorsdetoutcela.

Je me levai d’un bond, mais la soudaineté de ce mouvement me monta à la tête,manquantmedéséquilibreralorsquejemedirigeaisverslachambre.

–Oùvas-tu?L’ignorant, je disparus dans la chambre. Une robe bain-de-soleil bleue était disposée

surlelit.Blakeavaitdûpasserlaprendrechezmoipendantquejedormais.Ettrônaitau-dessusmapetiteculotteblancheendentellequiavaitdisparudans lachambred’hôteldeBlakeàLasVegas.

Bon sang. Je fermais les yeux, dépassée par tous ces événements. Lemoment que jevenais de passer avec Blake avait été incroyable et intense. Être avec lui exacerbait dessentiments dont le sensm’était encore difficile à interpréter. Je ne voulais pas le blesser,maisjen’arrivaisplusàréfléchir,là.

Jeme vêtis rapidement et attrapai le reste demes affaires. Ilme rejoignit à la ported’entrée,dontilmebarraitl’accès.

–Erica,neparspas.–Tun’avaispasledroit.Ilfronçalessourcils,écartantsesmainsdelaporte.–Tuveuxdirequejen’avaispasledroitderetrouverl’hommequit’afaitdumal?–Jeneveuxpassavoirquic’est.Tucomprends?Jeserrailesdents,chassantleslarmesquimemontaientauxyeux.J’auraisvoulurester

furieusecontrelui.Maislorsquejeleregardaidanslesyeux,jen’yvisquedelaconfusion,jenepouvaispasm’attendreàcequ’ilcomprenne.

Les mains tremblantes, je forçai mon chemin en me précipitant dans les escaliers.Devant ma porte, je m’arrêtai, tendant l’oreille à la recherche d’éventuels bruits de pas,mais je n’entendis rien. J’entrai chezmoi et allumai la chaîne hi-fi. Je fermai les yeux etrespiraiàlahâte,maisrienneputarrêterlamontéedemessanglotsetdecessouvenirs.Jemelaissaiglisseràterreetpleuraijusqu’àqueladouleurs’apaiseunpeu.

***

Page 107: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

J’arrivaiàNewYorkunpeuplustarddanslasemaine.D’unemanièreoud’uneautre,j’avais réussi à éviter Blake, et je lui étais reconnaissante de ne pas avoir cherché às’imposer.Étantdonnénotresituationimmobilière,lesavoiraussiprèsétaitdéjàgênant,etj’avaisbesoindeprendreletempsderéfléchir.Cesderniersjoursavaientétéintenses.

Jem’étaisditquecen’étaitpasleplusmauvaismomentpourallervoirAllietmeviderlatête.

Je pris un taxi de l’aéroport Kennedy jusqu’à l’adresse qu’Alli m’avait donnée dansBrooklynHeights.

Lechauffeurs’arrêtadevantunbâtimentdepierredeplusieursétagesauporte-à-fauxstylisé.J’entraidansl’immensehallensaluantleportierquimesouritpoliment.

–JesuisEricaHathaway.JeviensvoirAlliMalloy.–Certainement.Vousêtesattendue.AppartementdeM.Landon,numéro42.–Merci,dis-jeenm’efforçantdedissimulermasurprise.C’étaitmalbarrépourpasser

quelquesjoursincognitoàNewYork.Jefrappaiàlaporteetattendisquelquessecondes.Jefrappaidenouveau,unpeuplus

fort – toujours rien. Je posai lamain sur la poignée de la porte et Alli ouvrit juste à cetinstant-là, lesyeuxbrillantset lapeauempourprée, l’airde…–oh, jeconnaissaisbiencetair.

Elles’avançaetmeserrafortdanssesbras.–Tueslà!Jeparticipai à sonétreinte.Ellem’avait terriblementmanquée.Elle semblaitpetite et

chaudedansmesbras.Avait-elleperdudupoids?Avantquej’aiepudirequoiquecesoit,elle recula et me toisa. New York était d’une chaleur étouffante aujourd’hui, alors j’étaisvêtued’unshorttaillédansunjeanetd’undébardeur,etcoifféed’unchapeaublanc,justepourleplaisir.

–Tuesresplendissante,dit-elle.–Oui,hum…toiaussi.J’auraisaimélepenser.–Oh,monDieunon!Jeneressembleàrien.Jesorsjusted’unesieste.– Une sacrée sieste, soulignai-je en remarquant la coiffure sortie-de-baise qu’elle

s’efforçaitdelisserpendantquenoustraversionsl’immenseopenspacedel’appartementàlavueimprenablesurlaligned’horizondeManhattan.

Elle gloussa et rougit. Je regardai alentour,m’attendant àmoitié à voirHeath entrerdanslapièce,maisiln’étaitnullepart.

–Belendroit,dis-je.–Jesais.L’appartement était rien moins qu’impressionnant, exactement ce que l’on pouvait

attendre d’un membre de la famille Landon, et plus encore. Les plafonds étaient hauts,

Page 108: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

striésdepoutresapparentesenboissombre,etunparquetdeboisdurassortirecouvraitlesol.Lemobilieretladécorationrehaussaientl’ensemblepardespointesdecouleuricietlà.Ledécormerappelaitl’appartementdeBlakeàBoston.

–Jepeuxt’offriràboire?demandaAlli.–Biensûr.N’importequoiavecdelaglace.Elles’affairadanslacuisinependantquejem’installaisurl’undestabouretsdel’îlot.–Alors,quandallais-tumedirequetuvivaischezHeath?Elles’appuyasurlecomptoir.– Je suis désolée, Erica. Jeme suis juste dit que ce serait plus facile de te l’annoncer

faceàface.–Tupeuxhabiteroù tuveux,Alli.Mais j’auraispréféré le savoiravant.Blakene sait

pasquejesuisici.Ellefronçalessourcils,etj’entendisuneportes’ouvrirdanslecouloir.Heathapparut,

douchéetfraîchementvêtu,unsouriresatisfaitsurlevisage.IlressemblaitplusàBlakequedans mon souvenir. Par contre, je ne pouvais me défaire de l’impression que tout soncharme dissimulait quelque chose. Bien sûr, Blake aussi avait sesmystères.Nombreux, enfait.Maisilnelescachaitpasdefaçonaussiéquivoque.

–Erica!Çafaisaitlongtemps.IlmedonnaunerapideaccoladeavantderejoindreAllidanslacuisine.Ill’embrassaet

jedétournaileregard.HeathetAlliallaientbienensemble,uneénergietoutàfaitfamilièreirradiaitd’eux:je

n’étaislàquedepuisdixminutesetj’avaisdéjàlesentimentd’empiétersurleurintimité.Ma poitrine se serra, et mes pensées revinrent à Blake. Étais-je prête à me laisser

embrasserainsi?Qu’ill’admetteounon,j’avaisbesoind’airpourcomprendrecequ’ils’étaitpassé.LafaçondontBlakes’étaitimmiscédansmavieétaittotalementinacceptable.Cetteintrusionm’avaitlaisséetendueetvulnérable.

Je pivotai sur le tabouret, me levai et marchai jusqu’aux immenses fenêtres quidominaient leparc en contrebas. Jemedemandaisquellepartiede tout ceci étaitdueausoutiendeBlake,ousiHeathfinançaitsonmodedevied’unequelconquefaçon.Peut-êtreétais-je trop sévèreavec lui. Il était évidentquegrâceà lui,Alline touchaitplus terre, ceque je n’avais jamais vu arriver depuis trois ans que je la connaissais. J’espérais que cen’étaitpastropbeaupourêtrevrai,danssonintérêt.

–Tuasfaim?Jemedisaisqu’onpourraitallerdéjeuner,proposaAlli.–Ceseraitgénial.–Jevaistemontrertachambre.Alli attrapamon sac de voyage.Heath s’empressade le lui prendre et nous entraîna

dansuncouloiràl’opposédeceluidontilavaitémergé.

Page 109: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Je jetai un rapide coup d’œil dans une chambre de bonne taille décorée desmêmestonsblancsetd’unépaisdessus-de-litrouge.JeregrettaidenepaslapartageravecBlake.L’idée de le sentir étendu sous moi, ou inversement, était alléchante. Le souvenir de ladernièrefoiss’imposaàmoi,etmesyeuxs’embrumèrent.

J’agitailatête.J’avaisvraimentbesoindemesortirBlakeducrâne.

Page 110: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitredouze

Allietmoidévorâmesdesamuse-gueuleensirotantduprosecco,dansl’attentedenosplats–despâtes,meconcernant.MapériodedesevragedeBlakes’étaitaccompagnéed’unsérieuxmanqued’appétit,maisretrouverAllim’apaisaitvraiment.

–Alors,commenttrouves-tutonnouveauboulot?–Jel’adore,dumoinslaplupartdutemps.C’estdelafolie,toujoursàcentàl’heure,

et c’est assez stressant de devoir tout le temps courir après tout le monde. Mais j’ail’impressionquec’estungrandpasverslàoùjeveuxêtre.

–C’estpassionnant,soulignai-jeensouriant.–Oui, vraiment. Et je n’arrête pas de trouver des contacts pour toi, d’ailleurs.Heath

m’a branchée avec quelqu’un qui nous a conviés à un vernissage dans une galerie d’artdemainsoir.

– Une exposition ? repris-je, me demandant quel rapport cela pouvait avoir avec lamodeetmoi.

–Oui.Ceseratrèschic,etpleindegenssuperimportantsserontlà.–Chic,hein?Oui,jesuppose.Jedévorai des yeux l’assiettedepâtes que le serveurdéposadevantmoi. Jepris une

première bouchée. C’est divin, pensai-je. À l’évidence, je pouvais remplacer le sexe par lanourriture.

–Etquesepasse-t-il,avecBlake?Une vague d’émotion inattendue me traversa. Je lui racontai ma dernière journée

passéeavecBlake,depuislerendez-vousavecMaxjusqu’aumomentoùjemefaisaisclouercontrelaporte.Leglorieuxcommel’inavouable.

–Tul’aimes?demanda-t-elle.–Tuplaisantes?Ma voix avait été stridente, la seule mention de ce mot qui commençait par A

éradiquaittoutesérénitéetmeplongeaitdanslapaniqueetlapeur.–C’estsiaberrantdeledemander?

Page 111: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

– Es-tu amoureuse de Heath ? répliquai-je, désespérée de changer de sujet, tout encraignantsaréponse.

Elleseconcentrasursonassiettesansplusdireunmot.–Tuvois?ajoutai-je,rassérénée.–Jelesuis,oui,murmura-t-elle,presquetropbaspourquejel’entende.Onmangeaun temps en silence. Je ne savais pas troppourquoi,mais cette nouvelle

m’attristait. J’avais euAlli tout àmoi pendant trois ans.Nous partagions tout, nous nousoccupions l’une de l’autre, et construisions ensemble cette entreprise sur laquelle je meconcentraisaujourd’hui.Etenquelquessemaines,ellen’avaitplusd’yeuxquepourHeath.Mais toute jalousie était irrationnelle, parce que, par-dessus tout, je voulais qu’elle soitheureuse,mêmesiceladevaitnouscoûternotreamitié.

–Iltefaitdubien?– Nous allons bien ensemble, se contenta-t-elle de répondre. Tout n’est pas toujours

parfait,maisleschosess’arrangenttoujours.Nousapprenonsànousconnaître.–Ehbien,jesuisheureusepourtoi.Jeveuxquetulesaches.Ses traits se détendirent, et elle avança le bras pour prendremamain par-dessus la

table.–Merci.Jesusalorsqu’elleattendaitmonapprobationdepuisledébut.–Jesuisheureusequetusoislà.Tumemanques.– Toi aussi. Parfois, j’ai l’impression que nous sommes à des années-lumière l’une de

l’autre.–Nousnesommespasfâchées.Jeseraitoujourslàpourtoi.Je souris et acquiesçai, en évitant toutdemêmede lui rappeler qu’elle avait presque

toujoursété injoignabledepuis sondépartpourNewYork.Néanmoins, jemesentismieuxdel’avoirentenduedirecela.AvecBlakeàdistancepourl’instant,ravivermonamitiéavecAlliétaitplusquebienvenu,mêmesijedevaislapartageravecHeath.

***

Alli étant au bureau, je passai la plus grande partie de la journée suivante àmettremonpropretravailàjour.Jefisquelquespausesenallantmepromenerdansleparcpourréfléchiretregarderlesgens.CommedesdizainesdepetitessilhouettestraversaientlepontendirectiondeManhattan,jem’efforçaid’imaginercequecelafaisaitd’êtrenew-yorkais.

L’heure était peut-être venue de bouger. Alli était visiblement ravie de vivre là, engrandepartiegrâceàHeathquisemblaitlafairereluiresouventetbien,àencroire lepeude sommeil que j’avais pu voler la nuit précédente. Pourrais-je être heureuse, ici, moiaussi…

Page 112: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Je parcourus à plusieurs reprises surmon téléphone le fil demes textos avec Blake,tentéede lui écrire. Ilmemanquait, et aprèsdes joursde silence, j’avaispeut-être raté lecoche.Àl’évidence,êtreavecmoinedevaitpasêtrefacile.Jel’avaisquittédanslafièvredel’instant,nesachantpascommentréagirà labombequ’ilavait lâchéesurmoi,et jeneluiavaismêmepas laisséuneoccasiondes’expliqueroud’enparler.Jegrommelai, frustréeàplusd’un titre.Merde,peut-êtreque je l’aimais,mêmesi jene savaispasvraiment cequec’était.

J’aimais Marie. J’aimais Alli. Dans ma jeunesse, avant de savoir rien sur rien, j’avaisprofondément aimémamère, au plus haut point. Et pourtant, je ne savais pas commentaimerquelqu’unavecquijecouchais.Aveclaplupartdesmecsaveclesquelsj’étaissortie,ilm’avaitétéfaciledemaintenirunedistance.C’étaitmêmeidéal.Lorsqu’ilspassaientàautrechose, je me sentais surtout soulagée de ne pas avoir à envisager un engagement plussérieuxquejen’auraispassutenir.

En réalité, aucunhommeneme connaissait ; en tout cas, ils ignoraient tout demonpassé.

Blake, lui, me faisait non seulement perdre la tête au lit, mais il renversait aussisystématiquementtouteslesbarrièresémotionnellesquejem’étaisemployéeàérigerautourdemoiaufildesannées.Àcerythme, iln’enresteraitbientôtplus.Jem’étaisenorgueilliede l’image de réussite sans faille que je projetais, de totale maîtrise, mais en quelquesclaquementsdedoigts,ilavaittouteffacéparsapersévérance.Saputaindepersévérance,àlaquellejedevaismasituationactuelle.

Tumemanques.J’avais tapé ce texto, et regretté de l’avoir envoyé dès l’instant où il était parti.

Maintenant,jemedemandaisàchaqueinstants’ill’avaitreçu.SansréponsedeBlake,j’achevaimontravail,puism’habillaipourlevernissage.Jeme

figurai devoir memêler à une foule de snobs en col roulé, glosant à voix basse sur unecollectiond’œuvresd’artquej’aurais,moi,dumalàapprécier.Jememorigénaiaussitôtdecettevisionnégative,mereprochantd’avoirenvoyécetextoàBlakequimedéstabilisait.

J’écumais le placard d’Alli, identifiant au passage certaines de ses nouvelles pièces.Finalement,jechoisisunpantaloncourtnoirslimetunetuniquededentellenoiretfuchsia,puis nouai mes cheveux en un chignon serré. Malheureusement, je découvris en arrivantque le thème de la soirée était le noir et blanc, visant à souligner l’austérité desphotographiesdel’artiste.

JerepéraiAlliquidiscutaitavecunefemmeàl’autreboutdelagalerie.Jetraversailafoule,attirantpartoutl’attentionaupassage.Jechassaitoutsentimentdegêne.Sij’étaislàpourdéveloppermonréseau,ladernièrechoseàfaireétaitdem’enfuir.Jerejoignislesdeuxfemmes,saluaiAllid’unsignedetête,etmeprésentaiàsonamieauxlonguesjambes.Elle

Page 113: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

me parut étrangement familière. Elle était peut-être mannequin : elle était grande etincroyablementbelle,avecdelongscheveuxchâtainfoncé.

–Erica,jeteprésenteSophiaDevereaux.C’estuneamiedeBlake,etdeHeathaussi,enfait.

EntendreprononcerlenomdeBlakeenprésencedecetteamazonemeserralagorge.Ainsi,voicilafameuseSophia…

AllipoursuivitenprésentantClozpinetnosrôlesrespectifs,m’évitantdedevoirtressermespropreslauriers.Sophiaparutassezintéressée,maisAllines’arrêtapaslà.

– Sophia dirige sa propre agence de mannequins ici à New York. (Elle fronça lessourcils dansma direction.) Elle travaille avec des tonnes demarques pour leurs séancesphoto,poursuivit-elle,anticipantainsilessujetsdeconversation.

–Impressionnant,dis-jeenlepensantsincèrement,mêmes’ilm’étaitdifficiledenepassongeràcequ’ilyavaitentreelleetBlake.Lesgensaimant toujoursparlerd’eux-mêmes,j’appris en quelquesminutes la remarquable étendue de ses relations d’affaires. Elle avaittravaillé avec tous les grands créateurs, avecdesdouzainesd’autresque jene connaissaispas,etlesappelaittousparleurprénom.Pourtant,jecontinuaisdetrouverétrangequ’unesi jeune personne dirige une agence demannequins plutôt que d’être employée par elle.Cettefilleétaitl’imagedelaperfection–pointdevuehautecouture.

Aumilieu de notre papotage,Alli s’excusa,me faisant un clin d’œil pourme signifierqu’ellereviendraitbienvitemesauver.Dumoins,c’estcequej’espérais.

–Alors,d’oùconnais-tuBlake?demandaSophiad’unevoixbasse,affirméeet teintéed’unetoutenouvelletouchedevacherie.

Je la toisai durement, m’efforçant de jauger ses intentions, mon taux d’adrénalineexplosant.

–Nousnousvoyons,dis-jed’unevoixégale.D’accord, nous avions passé ces derniers jours à vivre ce qui ressemblait

dangereusement à une séparation dévastatrice, aumoins demon point de vue,mais ellen’avaitpasbesoindelesavoir.

Ellepenchalatête.–Intéressant.–Ettoi,d’oùleconnais-tu?demandai-je,brûlantdecuriosité.Elle sourit en attrapant de ses doigts quelques mèches de ses cheveux parfaitement

brillants.–Nousnouscroisonsdetempsentemps.– Intéressant, rétorquai-jeen reproduisant samoueetenespérantqu’ellebluffait.Au

tondesavoix,ilétaitclairdansmonespritquesecroisersignifiaitbaiser.Etl’imagedeBlakelasautantm’emplissaitd’unejalousieaveugle.Jedusfaireappelàtoutemamaîtrisepournerienlaissertransparaîtreàcemoment-là.

Page 114: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Unpetitconseild’unefemmeàuneautre.Sic’estsonargentquit’intéresse,oumêmesoncarnetd’adresses,ilnevapastegarderlongtemps.Ilsaitprotégercequiluiappartient.

–Tulesaisd’expérience,jesuppose?Je grinçai des dents. Cette femme avait visiblement un côté sombre, presque perfide.

Elle s’était transformée à l’instant où Alli nous avait quittées, et tout aussi vite, sonexpressionchangeadenouveaulorsqu’unjeunehommequitenaitdeuxverresdevinnousrejoignit.

–Vousm’avez l’air bien trop sobres toutes lesdeuxpour cegenred’événement,dit-ilavecdesyeuxrieurs.

– Chéri, ronronna Sophia en prenant un verre et en feignant de l’embrasser sur lesdeuxjoues.

Je pris le verre de vin qu’ilm’offrait sansm’inquiéter de son cru ni de sonmillésime.Cettegarcemetapaitvraimentsurlesnerfs.

– Isaac, je teprésenteEricaHathaway.Elledirigeunsitedemode.Jeneconnaispasbienlesdétails,dit-elled’ungestenégligentdelamain.Voudrez-vousbienm’excuser,touslesdeux?Jesuisdéjàenretardpourunautreévénement.J’aiété raviede te rencontrer,Erica.Onresteencontact.

Jeme forçai à sourire et lui tendis lamain. Jeme fis une joie de la lui écraser. Ellegrimaça.Malgrésataille,ellen’avaitaucunepoigne.

–Jem’appelleIsaacPerry,dit-ildèsqu’ellefutpartie.–Qu’est-cequivousamèneicicesoir,Isaac?demandai-jed’untonléger.–L’art,jesuppose.Entoutcaspaslesgens,dumoinsceuxquinesontpasvous.Ilsourit.Isaacétaitnonseulementdebonnehumeur,maisparailleurs loind’êtredéplaisantà

regarder.Grandetmince,avecdesyeuxbleupâleetunetignasseblond-roux,ilétaitvêtud’un pantalon noir et d’un pull col en V. Tout en lui respirait la décontraction et unecertaineinsouciance,lefaisantparaîtremoinsprétentieuxquelaplupartdesgensprésents.

– Et que pensez-vous de l’exposition ? demandai-je en laissant passer l’occasion deparlerdemoi.Blakememanquait,etcelacommençaitàmecrisper.Jen’étaispasvraimentdisposéeàflirter.

Isaaclaissaéchapperunpetitsifflementetconsidéral’œuvredevantlaquellenousnoustrouvions.

– Je crois que celameplaît, ce qui n’est pas plusmal, puisquenous allons écrire unarticledessus.

–Vousêtesjournaliste?–Éditeur.JesuislepropriétaireduPerryMediaGroup.Je reconnus ce nomqui avait réussi à intégrerma bulle technologique à unmoment

quelconquedemesétudes.L’articledontilparlaitpouvaitêtredestinéàunbonnombrede

Page 115: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

publications internationalesdequalité. Jem’étranglaiunpeuavecmadernièregorgéedevinetsaisissamouelorsqu’ilparcourutlasalleduregard.

–Dites-m’enplussurcequevousfaites.Jedoisavouernepasm’êtresuffisammenttenuaucourantdel’actualitédesréseauxsociaux,cesdernierstemps,maisc’estfascinant,n’est-cepas?

–Oui,vraiment,acquiesçai-je.Iln’yariendecomparable.Jesuiscertainequel’éditionbougevite,maislemondedunumériquefaitparfoisfroiddansledos.C’estundéfiquedes’yteniràjour,maisc’estcequimeplaît.

–Vousêtesbienjeunepourcela.Ilmeflattaitunpeu,maisaprèsSophia,jen’allaispasrefuserquelqueslouangesetune

saineappréciation.–Jelesuppose,oui.–Enplusd’êtreunefemme,cequisemblerare.–C’estvrai.Jefaisunpeufigured’exceptiondansl’universd’Internet.J’aurais souhaité un peu plus de diversité chezmes pairs,mais je supposais que cela

finiraitparchanger.Toutvientàpointàquisaitattendre.–Jesuisdanslasituationinverse.Dansl’édition,jesuisentourédefemmes.Ellesysont

incroyablementefficaces.Ilm’adressaunsouriredésarmant.Jedécidaisofficiellementqu’ilétaitcharmant,même

si jenecomprenaispaspourquelle raison ilavaitaccepté,publiquement, les faussesbisesdeladiaboliqueSophia.

– Lemonde de la mode, alors ? Vous devez être connectée à tous les blogueurs demodedelaville,jesuppose?reprit-il.

–Pasassez,non.–Oh,vousdevriez.Cesontunpeuceuxquimènentlacrèmeausommet.Sivousvous

attirezleursbonnesgrâces,vousserezpartout.–Jevaiscreuserdavantage.Mercipourletuyau,dis-jeenentrechoquantnosgobelets

enplastique,monhumeursefaisantaussijovialequelasienne.Jenesavaispassic’étaitlevinou la seule forcedesonénergiepositive,mais jenem’étaispas sentieaussibiende lajournée.

– Seriez-vous libre pour dîner samedi ? demanda-t-il, d’une voix notablement plusbasse.

Jemeglaçaiauximplicationsdesonton.Jenecherchaispasàêtredésirée,maisilnelesavaitpasencore.

–Désolée,jenepeuxpas.– Un brunch dimanche, alors. J’adorerais en apprendre plus sur ce que vous faites.

Noustrouveronspeut-êtreunmoyendetravaillerensemble.

Page 116: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

J’hésitai. Le propriétaire duPerryMediaGroup voulait parler travail avecmoi. Je nepouvaispasrefusercela,quellequesoit la façondont ilmeregardait.Undîner impliquaitunetropforteconnotation,maisunbrunchpouvaitpasser.

–Celamesemblefaisable,répondis-je.Onéchangeaetenregistranoscoordonnéessurnosportables.Peuaprès,Allisejoignitànous,etnousfitprendrecongé,pourdîneravecHeath.On

décidad’yalleràpied,etAllisemitaussitôtàmecuisiner.–Quiétait-ce?–IsaacPerry.–Putain,bonnepêche,Erica.Iln’arrivaitpasàdétachersesyeuxdetoi.–Ouais,bon.(Jehaussailesépaules.)JesupposequeSophialeconnaîtaussi,ajoutai-

je,espérantrelancerAlli.J’étaisimpatiented’ensavoirplussurelle,mêmesielleavaitdéjàcassél’ambianceunepremièrefois.

Onarrivaàdestination,unrestaurantfusionquiexhaladefantastiqueseffluveslorsquenous en franchîmes les portes. Alli repéra Heath et se transforma immédiatement : sonexpression, son langage corporel, toute son énergie se concentrèrent sur lui. Je gémisdoucement,sachantquenil’unnil’autrenes’enapercevraient.

Ons’assitpourcommander.–Allim’aditquetuconnaissaisSophia,lançai-je,interrompantleursépanchements.Heathseredressa,commesoudainrevenutotalementaumondedesaffaires.–Effectivement.Nousavonsinvestidanssonagence,enfait.–Blakeaussi?–Oui,Blakelaconnaîtaussi.Je me tournai vers Alli, qui paraissait opportunément intriguée par quelque chose à

l’autreboutdurestaurant.–J’ail’impressionqu’illaconnaîttrèsbien.Jebusunpeud’eau.HeathregardaAlli,entapotantdesdoigtssurlatable.CommeBlake, ilétaittoujours

calme et posé avec, en plus, un certain charme nonchalant qui les différenciait. Pourquoiparler de Sophia l’agaçait-il ? Elle devait compter pour Blake. C’était la seule explicationlogique, si l’onconsidéraitqu’il en savaitprobablementplusque jene l’aurais souhaitédemarelationavecBlake.

– Je crois qu’ils se sont vus de temps en temps, quand il passait à New York, à uneépoque.Maisçafaitdesannéesqu’ilsnesontplusqu’amis.

J’eus l’impression d’avoir reçu un coup de poing dans le ventre. La jalousie rayonnadans toutmon corps tandis que j’absorbais sesmots. Il avait lourdement insisté sur « desannées »,mais rienn’aurait puamoindrir l’effet dévastateurd’une liaison entre eux, aussianciennesoit-elle.

Page 117: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Maintenant, la question était de savoir s’ils n’avaient qu’un passé, ou également unprésentetunavenir. Jevérifiaimon téléphone.Toujours rien.Le rejetque sous-entendaitsonsilencemedéchiralecœur,etleslarmesmemontèrentsoudainauxyeux.Reprends-toi,medis-je.

LetéléphonedeHeathsonna,ilécarquillalesyeuxpuismelançaunregardavantdereveniràcelui-ci.

–Excusez-moi,ilfautquejeprennecetappel,annonça-t-ilavantdenouslaissertouteslesdeuxàlatable.

–C’estbizarre,dis-je.–Quoi?– Je déteste avoir à te le dire, mais tu as changé du tout au tout depuis que tu as

déménagé ici. D’abord tu t’installes chez Heath sans prendre la peine de me le dire, etmaintenant tu me présentes les ex de Blake sans me prévenir ? J’aurais préféré être aucourant,tusais.

–Désolée. Je n’avais pas réalisé ce qui allait se passer. Comme l’a ditHeath, ils sontjusteamis.

– C’est une excuse pourrie, et tu le sais bien. Qu’est-ce qu’il se passe, Alli ? Jecomprendsbienquepourtoi,avecHeath,c’estdusérieux,maisçaneteressemblepas.

– Je suis lamême personne qu’il y a quelques semaines. C’est juste que… les chosessontpluscompliquéesquetunel’imagines.

–Évidemment,puisquetunemedisrien.Ellesoupiraetjouaavecsescheveux.–Jet’aiditquej’étaisdésolée,d’accord?Jelereconnais.J’auraisdûteprévenirpour

Sophia. Si tu me présentais quelqu’un avec qui Heath avait eu une histoire, j’aimerais lesavoir.

Jemedétendis unpeu.Alli nem’aidait pas enmeprotégeant de la vérité. Blakemeplaisait vraiment, et j’avais besoin de savoir si j’allais dans le mur avec lui. Sa loyautérevenait àHeath,maintenant,mais leprotéger etprotéger son frèreàmesdépensn’étaitpasunebonneidée.

Page 118: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitretreize

Jemeréveillaitardlelendemainmatin,presqueaussiépuiséeetconfusequelorsquejem’étais couchée. Je regardai l’heure,me forçant àme lever. Je supposai qu’Alli était déjàpartie au travail. Elle et Heath avaient pris un dernier verre ailleurs, après le dîner,pendantquejerentraisàl’appartement.Nousavionsdécidéderessortirlelendemainsoir,maispeut-êtrequ’ilsavaientbesoindetempsensemble.

Agitée,j’avaistournédansmonlitsanstrouverlesommeildurantdesheuresavantdefinalement m’endormir, sans les avoir entendus rentrer. Je ne savais pas comment ellepouvaitteniruntelrythme.

Je fis comme chez moi dans la cuisine, me préparant du café et une omelette. Jeconsultai les pages des salles de yogaduquartier surmon téléphone, trouvai une séancejusteavantmidiassezprochepourpouvoirm’yrendreàpied.Pendantquejedévoraismonpetit-déjeuner, Heath fit son entrée depuis sa chambre, l’air plus que fatigué. La nuit luiavait laissédesvalises sous lesyeux,etpour lapremière fois, je remarquaiqu’ilparaissaitplusâgéquesonfrère,definesridesbordantsessombresyeuxnoisette.

IlavaitlamêmepoitrinetoniqueetlemêmeregardintensequeBlake,maismêmesijepouvais apprécier son évidente beauté, il ne m’attirait pas. La beauté de Blake m’avaitséduitedès lepremier instant,mais la flammeétaitmaintenueau-delàdecela.Lesautreshommesétaientdevenusinvisibles.

Torse nu, Heath se dirigea vers lamachine à café. Il remplit une tasse géante à rasbordetenvidalamoitiéavantdemesaluerd’unsignedetête.

–Bonjour,dit-ilenregardantsoncafé.–Lanuitaétécourte?–Oui.(Ilsefrottalesyeuxetsoupira.)–CommentétaitAlli,cematin?–Euh…Bien.Elle…(Ilmarquaunepause.)Elleestrentréeplustôtquemoi.Quelquechosen’allaitpas.

Page 119: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Toutvabien?demandai-jeavecprudence,sachantquejemarchaissurdesœufsenabordant sa vie privée, même si tout le monde semblait trouver cela normal tant qu’ils’agissaitdelamienne.

–Oui,vraiment.Tusaiscommentçasepasse.Ilhaussalesépaules.Sonvisageaffichauneexpressionfatiguéeetuséejusqu’àlacorde,quejecommençaisà

considérercommedufoutagedegueule.Ils’efforçaitàl’évidencedeminimiserl’importancedequelquechose.

– Tu l’aimes ? bafouillai-je soudain, me surprenant moi-même. C’était une questionosée,surtoutlorsqu’onlaposaitàquelqu’unenaussimauvaiseforme.

Son regard devint incisif, brûlant d’une émotion que je ne savais pas nommer, toutetracedesonfauxsouriredisparue.

–Évidemment.Ilreposasèchementsatassesurlecomptoir.Savoixétaitteintéed’amertume,commesi

la réalité de ce fait le piquait au vif. Le ton de sa voixme fit réagir, aiguisantmon côtéprotecteur.

–Jel’espère,parcequ’elleestfolledetoi.Jenel’aijamaisvuecommeça.Sa mâchoire se contracta de façon révélatrice, le même signe qui m’indiquait quand

Blakeétaittendu.–Situluifaisdumal,Heath…Jerelevailementon,prêteàuneaffirmationdéfinitive,maismamenaceretombaaussi

vite.Commentpouvais-je l’atteindre?Protégéparunfrèremilliardaire, ilétaità l’abri.Lemenacerétaittoutàfaitinutile.

–Jeneluienferaipas,répondit-ild’unevoixépuiséeetirritée.Lorsquenosyeuxsecroisèrentbrièvement,jereconnusunelueurdedouleurdansson

regard, avant qu’il ne se détourne pour s’en aller. Je terminai mon petit-déjeuner et meretirai dans ma chambre pour me changer tandis que Heath était reparti se coucher ettrouverainsidanslesommeilunmoyendesedébarrasserdecequisemblaitlehanter.

Quelquesheuresplustard,lasalledeyogas’étaitremplierapidement.Lemoniteurneperditpasdetempsànouséchauffer,physiquementetmentalement.Jenedemandaisqueça!J’avaisbienbesoindebrûlertouteslestoxinesdecesrepasnew-yorkaisquel’onm’avaitofferts, et surtout, un peu de clarté m’était nécessaire pour me concentrer. Je n’arrivaistoujourspasàmeviderl’espritduchaosconstantqueBlakeprovoquaitenmoi.

À la finde la séance, je cherchai laperfectiondans laposturede la roue, lapoitrinetendueversleciel.Jesoufflaisdansl’inconfortdelaposition.Jemanquaisd’entraînement.Lesmouvements difficilesm’épuisaient,me donnant de l’énergie enmême temps, chaquemuscle œuvrait pour me remettre en forme. Devant un public d’une douzaine d’autresparticipants,jerefusaisdecraquer.

Page 120: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Lecoursseterminaalorsquej’étaisprèsdecéder.Ons’étenditpourserelaxer,etmespensées dérivèrent vers Blake. Au temps pourmon envie de faire le vide dansmes idées.Lorsque la séance se finit, je lui vouai amour et lumière. Il memanquait terriblement. Àpeineavais-jeroulémontapisquemontéléphonevibraàcôtédemoi,unelégèreintrusiondanscetétatdecalmesidurementgagné.Jel’attrapaiimpatiemment,etallaichercherunpeud’intimitédanslecouloir.

–Erica?C’estMax.–Bonjour,commentallez-vous?–Bien.–Toutvabien?Jeveuxdire,pournosaffaires.–Absolument.C’estpourcelaquej’appelle,enfait.Jevoulaisvousdirequelejuridique

prendunpeuplusdetempsqueprévu,maistoutsepassesansproblème.J’expiraialorsquej’avaisretenumarespirationsansleréaliser.–C’estexcellent.Mercidem’avoirprévenue.–Aucunsouci.Desnouvellesdusite?–Excellentes.D’ailleurs, jesuisencemomentmêmeàNewYork,pourdévelopper les

contacts.Toutsepassetrèsbien.– C’est ce que j’aime entendre. (Quelqu’un lui parla, en arrière-plan.) Je dois

raccrocher,Erica,maisjevoustiensaucourant.D’accord?–Parfait.Merciencore.–Àbientôt.Ilraccrocha.Nous approchions du but, je le sentais, mais malgré les propos rassurants de Max,

j’allaiscontinueràm’inquiéterjusqu’àcequetoutsoitdéfinitivementfinalisé.Jem’efforçaisdenepaspenserà tout cequipouvaitmal sepasser, et connaître la rivalitéquiopposaitMaxetBlakeallongeaitdémesurémentlaliste.

***

Ce soir-là,deboutauborddu toit-terrassedunight-club, je savourais la chaudebrisequi caressait ma peau nue. Alli avait insisté pour que nous sortions ensemble. La robe àdécoupesurlaquellenousnousétionsmisesd’accordn’étaitpasfaitedebeaucoupdetissu,maislessoiréesétaientchaudesetleclubplusencore.

Leslumièresdelavilledécoraientuncielténébreux,merappelantladernièrefoisquej’avaisprofitéd’untelpanorama.Jefermailesyeux,l’imagedeBlakeapparaissantaussitôt.Un sourire qui ne laissait aucun doute sur le fait qu’il obtiendrait toujours de moiexactementcequ’ilvoulait.Uncorpsquimerendaitfolledèsqu’illedécidait.

Derrièremoi,AllietHeathriaientdoucement,assis,lesmembresemmêlés,surl’undescanapésd’extérieurquidécoraientcettepartieexclusiveduclub.Jesoupiraiintérieurement

Page 121: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

etsirotaimontroisièmeMartini,enespérantqu’ils’agissaitdeceluiquimeferaitoublierlesilencedeBlakeaujourd’hui.

Montextoétaitpeut-êtrearrivétroptard.Avait-iltiréuntraitsurmoi,enconsidérantque je posais trop de problèmes. Peut-être avait-il raison. Je n’avais pas cherché cetterelation,maismaintenantqu’elleétaitmenacée,jen’arrivaispasàchasserl’impressionquejeperdaisquelquechosedeprécieux.Jen’avaisjamaisrencontréunhommecommeBlake,jamaiséprouvécequ’ilmefaisaitressentir.

Lespulsationsintensesdelamusiqueélectroretentissaientselonquelaportes’ouvraitetsefermaitderrièremoi.Jemepenchaienavantcontrelabalustradequimeséparaitdelacirculationencontrebas.Lesklaxonsrésonnaientdanslelointain,semêlantaubrouhahaquibourdonnaitautourdemoi.

J’avaisbesoindemesortirBlakedelatêteetdeprofiterdutempspasséici,malgrétoutle chagrin ressenti ces derniers jours. Je finis mon verre et décidai d’aller retrouver Alli.Peut-être pourrait-elle se détacher de Heath assez longtemps pour que nous puissionspartagerunmomentsurlapistededanse.

Jemeretournaietmepétrifiai, incapablede faireunpasdeplus.Jeclignaidesyeuxpour m’assurer que Blake était bien devant moi, et non pas simplement le souvenir del’hommequiavaitoccupétoutesmespenséescesdernièresheures.

–Erica.LavoixdeBlakemerecouvrit, confianteetpéremptoire.L’intensitéde son regardme

paralysa. J’absorbai cette sensation lentement,mesdoigts serrant la balustradedansmondoscommepourm’ancrerlà,quandjenedésiraisquevolerverslui.

Je fis appel à toutemavolontépournepas céder.À sa seule vue,mon cœurbattaitdéjàfollement.Unelentechaleurrecouvritmonépiderme,enflammantmessenstandisqueje le fixais. Il était vêtu d’un costume noir, une chemise sombre nonchalammentdéboutonnée au col. Bon sang, pourquoi ne pouvait-il pas porter un de ces stupides tee-shirts?Blakeétaitunepuremerveille,etautantjel’aimaisvêtuainsi,autantjenepensaisqu’àledéshabillerimmédiatement.

–Quefais-tuici?Mavoixétaitvoiléeetmalassurée,trahissantlesémotionsviolentesquimedévastaient

en cet instant. Peut-être Alli ou Heath l’avaient-ils prévenu. J’aurais voulu m’en soucier,maisjenelepouvaispas.Moncorpsentiers’animaitdesavoirqu’ilétaitassezprèspourmetoucher,pourm’enflammercommepersonned’autrenel’avaitjamaisfait.

Lecoindesabouchesetorditetilpenchalégèrementlatête.–Jecroyaisquejetemanquais?–Oui,admis-je.(Ilauraitétédéraisonnabledelenier.)C’estjustequejenem’attendais

pasàtevoirici.

Page 122: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Il approchad’unpas, effaçant ladistancequinous séparait. Il sortit lesmainsde sespochesetlesposasurlabalustrade,autourdemoi.

– Tu as de la chance que je sois là. Si j’avais su que tu portais cela seule en public,j’auraisdûtepunir.

Samainbougea, touchantmapeau làoù la robene la recouvraitpas. Je serraiplusfort la balustrade, etma poitrine se souleva commema respiration accélérait. Une bouled’angoisseseformadansmonventre.

–Elleteplaît?Sonsouriredisparuttandisqu’ilsepenchaitpourdéposerdesbaiserssurmonmenton.– Si nous avions un peu d’intimité, je te montrerais à quel point, murmura-t-il en

léchantleborddemonoreilleavantd’enmordillergentimentlelobe.J’exhalai labouche sèche,enm’efforçantdenepasgémir lorsqu’unélancementvif et

douxmetransperçalebas-ventre.–Jebandedepuisquejet’aivue.Jesoupiraietm’abandonnaicontrelui,lapreuvedesondésirdurecontremonventre.

J’adorais luiprovoquerceteffet-là.Jeressentisunprofondsoulagementdesavoirqu’ilmedésiraitautantquejeledésirais.

–Blake…Jesuisdésolée,murmurai-je.Ilseredressasansdireunmot,sesyeuxfixéssurlesmiens.–Jesuisdésoléepourl’autrejour.Jen’auraispasdûpartircommeça.Je pris une profonde inspiration, regrettant de ne pas pouvoir effacer cet épisode du

passé,etsachantquej’allaisdevoirm’yconfronter,etleluifairecomprendredumieuxquejepouvais.

–J’étais…terrifiée.Ilfronçalessourcils.–Parmoi?– Non, par lui… sa réalité soudaine. Et par le fait que tu aies pu le trouver aussi

facilement.Jenepeuxpasl’expliquer.Jesupposequ’unepartiedemoiauraitaiméquetumedemandesd’abord.

–Jelevoulais,maisunepartiebienplusprotectriceavaitbesoindesavoir,quoiquetuaiespuendire.(Ilparcourutmonmentonduboutdudoigt.)Jenepouvaispasresterassislàetnerienfaire.Jenepouvaispassupporterl’idéequequelqu’unt’aitblessée.

–Savoirquiilestnechangerien.–Peut-êtrepas.Lafaçondonttuutilisescetteinformationdépenddetoi,maintenant.

Neveux-tupassavoirqui…–Non,lecoupai-je.S’ilteplaît,non.Tunepeuxpascomprendre,Blake.–D’accord.(Ilmefitsignedemetaireetpassadoucementseslèvressurlesmiennes.)

Jen’aipasfaittoutcecheminpourtecontrarier.

Page 123: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Je lui rendis sonbaiseretpassaimesbrasautourde lui,désireusede le sentir contremoi.

–Jesuisheureusequetusoisvenu.Ils’enfonçadansmoncou,parcourantdeseslèvreslesendroitslesplussensibles.–J’allaisrevenir,tusais.Tun’avaispasbesoindevenirjusqu’àNewYorkpourmoi,dis-

je,heureusequ’ill’aitfait.–Jesavaisquetureviendrais,mais jedoisdetoutefaçonypasserdetempsentemps

pouraffaires,alorsjesuisvenu.C’estpeut-êtreidiot,maistumemanquaisaussi.Je fondis un peu plus, et une pensée déplaisante vint gâcher cet instant. Sophia.

Pouvait-elleêtrel’affaireenquestion?Jemeglaçaiàl’idéedelesimaginerensemble,quellequesoitlaraison,platoniqueoupas.Elleétaittoxiqueetmalveillante.

– J’ai rencontréSophia,dis-jeenaffectantun tondésinvolte. Je levai lementonpourobserversaréaction,lesyeuxfixéssurlui.Qu’était-ellepourlui?S’ilprojetaitdelavoiriciou, Dieum’en garde, si c’était déjà fait, je ne le supporterais pas. Il fallait qu’il soit venupourmoi.

–C’estunevraieperle,ajoutai-je,incapablededissimulerl’aversionqu’ellem’inspirait.Jemedemandaiss’ilpouvaitvoirau-delàdesaperfectionphysique.Samâchoireseserraet ildétournaleregardvers l’horizon,sansrépondre.Mestripes

senouèrentdejalousie.LafaçondontelleavaitfaitallusionàsarelationavecBlakedevantmoi,etceputaindesourirenarquois.JevoulaiscroirelaversiondeHeath,maisjen’arrivaispas à me défaire de l’idée qu’elle pouvait avoir plus d’importance pour Blake qu’il ne leprétendait.

Jem’écartai,mesentantpiégéeentreluietlabalustrade,àlamercidesesmainsetdecirconstancesbienau-delàdemoncontrôle.Avantque jene l’aiedépassé, il attrapamonpoignet.

–Oùvas-tu?Son tonétait sévèreetme fit frissonner. Jedéglutis. Je levoulaisardemment,mais je

medemandais si j’étais capablede lepartageravecuneautre. Je fermai lesyeux, sentantl’alcoolinfluencermesréflexions.

Aucuneimportance.Pascesoir.J’avaispassédesheuresàsouhaitersaprésence,et ilétaitlà.Ilseraitbientempsdevoirtoutcelaplustard.

– Allons danser, dis-je en ouvrant les yeux, pour m’apercevoir que les siens étaientpleinsd’inquiétude.

Assezparlé.Jevoulaism’abandonnerà lamusiqueetàsesbras.Jevoulaisprétendrequ’ilétaitàmoiavantdedécouvrirqu’ilnel’étaitpas.

Son expression s’adoucit une seconde, ainsi que son emprise. Ilm’attrapa lamain etm’emmenaenbas.

Page 124: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitrequatorze

Ons’enfonçadans lapénombrenébuleusedusous-solduclub.J’accueillis lamusiqueavecplaisir,espérantynoyerlespenséesquitourbillonnaientdansmonesprit.

Jenousentraînaisur lapiste,aucœurd’unefouleserréequi tournoyaitsurunremixde Rihanna particulièrement populaire. Je m’arrêtai et tournai la tête vers lui, mais ilm’immobilisa.Samainpuissantemepritparlahancheetmerapprochajusqu’àêtreserrésl’un contre l’autre. Sonmouvement avait été fluide et naturel, comme s’il nous réunissaittoutsimplementcommenousaurionsdûl’êtretoutelasoirée.

Instantanément,moncorpsse fonditdans lesien.Toutétaitparfaitdanssesbras.Lerythmeguidamesmouvements,jecommençaisàmebalancersurlamusiquequirésonnaitàtraverstoutmoncorps.Mesmusclessedétendirentetjem’abandonnaiàBlake.

La foule des danseurs était compacte,mais cela neme gênait pas. Je ne sentais riend’autreque lesmainsdeBlake surmoi.Enphaseavec lamusique, jeme serraidosà lui,prised’unefrénésied’êtrecontrelui:sentirmaintenantcecontactphysiquequejedésiraisirrésistiblement depuis des jours. La chanson s’acheva et se mêla à la suivante, affectantlégèrement notre rythme et nous rapprochant plus encore. Son érection se fit plusprononcée,pressantcontremesfesses,exigeantsilencieusementcequenousdésirionstousles deux. L’excitation me donnait des frissons et ma tête retomba en arrière. Ses brasenlacèrent ma taille, et il m’embrassa dans le cou. Un baiser chaud et goulu qui me fittournerlatête.L’alcool,peut-être,ouplusprobablementcettedroguequ’étaitBlakeetquiprenaitledessus.

Ilme retourna pour lui faire face. Avant qu’il ait pu dire unmot, je l’attrapai par laveste et le tirai àmoi. Forçantmabouche contre la sienne, je l’embrassai avecunappétitvorace.Ilmelerenditavecintensité.Noslanguessemêlèrentetjelerapprochaiencore.Ilglissalamainsousl’élastiqueserrédemarobe,enveloppantunefesseeteffleurantleborddemaculotte.Jegémisdanssabouche,oubliantoùjemetrouvais.Jevoulaislemonterlà,aumilieudecescentainesd’autrespersonnesbrûlantes,moitesetexcitées.

Page 125: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Il gronda un peu en s’écartant. La perte de contact fut abrupte, me prenant audépourvu,etilm’entraînahorsdelapiste,lelongd’uncouloiràl’écartduchaosquinousavaitentourés.

Onarrivaenunpointoùlecouloirsescindait.Àgauche,unhommegrandetpuissantmontaitlagardedevantuneporte.Blakes’approchaduvideuretluiglissaquelquesbilletsdanslamain;l’hommefitunsigned’acquiescementdelatête,endirectiondelaporte.Onentra dans ce qui semblait être une zone VIP. Une lumière d’ambiance baignait la pièce,plutôt grande et complètement inoccupée. Des canapés de cuir rouge sombre étaientadossésàdeuxdesmurs,letroisièmeétantoccupéparunbarprivé,chargédetoutcequipouvaitêtrenécessairepourarroserunebonnesoirée.

–Qu’est-cequec’est?Blakerefermalaporteetneperditpasdetempsavantdem’yclouer.–C’estl’endroitoùjevaispouvoirtebaisersansêtreinterrompu.Ilpassama jambepar-dessussahancheetsecollaàmoi.J’eusunhoquet lorsqu’ilse

pressacontremoi,s’unissantàmonclitoàtraversmaculottejustecommeillefallait.J’enfonçai mes mains dans ses cheveux et le ramenai vers moi, l’embrassant

puissamment.Sesmainsétaientpartout,massantmesseinsàtraversletissumoulantavantdeleslibéreraisémentdemonbustiersansbretelles.Jefisdescendrelehautdemarobe,etilpritunmamelondanslabouche,malaxantl’autreseindelamain.Undésirviolentbrûlaitaufonddemoi,sipuissantquej’auraisfaitàpeuprèsn’importequoiavecluiencetinstant–àpartcepetitdoutequimetaraudaitencore.

Pourladernièrefois,pensais-je.Mais…–Attends.Nousnedevrionspasfaireça.LamaindeBlakes’abattitsurlaporteàcôtédemoi.–Bonsang,Erica,quej’attendequoi?Jemecouvrisdemesbras,mesentantsoudaintropdécouverte.Sacolère,combinéeà

lapuissancesexuellequ’ildégageait,m’effrayait.Jel’avaisvutenduauparavant,maispasàcepoint.

–Jetedésire,Blake.Plusquetout,encetinstant,etpeut-êtremêmedetoutemavie.Maisjenepeuxpastepartageravecuneautrefemme.

–Quoi?(Ilsepassalesmainsdanslescheveuxetrecula.)–Jenesaispascequ’ilyaentreSophiaettoi,etjenevaispastedirecommentvivreta

vie.Jesaisquetudoisconnaîtrebiendesfemmes.Je lecomprends…maisétantdonnécequejeressenspourtoi,jenecroispaspouvoirm’yfaire.

Blaken’étaitpascommelesautreshommes.Enfait,iln’avaitmêmerienencommun,etêtreavec luiavaitdynamité tousmesprincipessur le sexeet les relationsamoureuses.Auvu de ce que j’éprouvais pour lui, l’imaginer avec Sophia était plus que je ne pouvaissupporter.Soninfidélitémebriserait.

Page 126: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–TucroisquejesauteSophia?Jeledévisageai.–Ellem’alaisséentendrequec’étaitlecas.J’aijustesupposé…Ilgrimaça,commes’ilvenaitdegoûterquelquechosededéplaisant.–Alors jevais luien toucherunmot.Tudois savoirqu’iln’yaabsolument rienentre

nous.Etce,depuisdesannées.–Oui,Heathadéjàcorroborétonhistoire,l’interrompis-je.–Cen’estpasunehistoire,c’estlavérité.Bonsang,qu’est-cequ’ilfautquejefassepour

quetumecroies?–Jenesaispas,répondis-je,m’étiolantcontrelaporte,etregrettantquemaconscience

nepuissepaslafermeretmelaisserenpaix.Blake se rapprocha,me prit par les épaules, caressant le haut demes bras avec ses

pouces,provoquantenmoidesvaguesdesoulagementapaisantes.–Erica…Il releva mon visage pour que je lui fasse face. Nos yeux se croisèrent et mon cœur

s’arrêta.–C’estpourtoiquejesuisici.Il m’embrassa lentement et profondément, explorant chaque possibilité deme titiller

avecsalangue,ôtantabsolumenttouterésistance.Ils’interrompitetnosregardsplongèrentl’undansl’autre.

–Pourtoiseule.–Tum’appartiens,luisoufflai-je,ivredesongoûtetdesasenteur.–Situnet’étaispasenfuiesivite,j’auraisputeledire.Mes lèvres se relevèrent et je l’embrassaidenouveau, avecdepetits coupsde langue

humidesetpolissons.Enréponseàquoiilgrogna,mesoulevaetpassamesjambesautourdesataille.

–Maintenant,laisse-moitemontrer!J’acquiesçai. Jene savaispas cequedemainnous réservait,mais ce soir,plus rienne

viendraitsemettreentrenous.Ilglissasesmainssousmajupe,etd’uncoupsec,déchiralefin tissudemaculotte. Il en jeta lesmorceauxà terre,m’emporta jusqu’à l’undesgrandscanapésdecuir,etm’étendit.Ilsepenchasurmoi,m’enfermantentresesavant-bras.Jemecambrai vers lui, sachant qu’il serait bientôt en moi, comme je l’attendais depuis que jel’avais quitté plusieurs jours plus tôt. Il m’immobilisa avec ses reins, louvoyant entremesjambes,commeunepromessedecequiallaitbientôtvenir.Jedéboutonnai rapidementsachemise,etmesmamelonseffleurèrentlespoilsdouxdesapoitrine.

Il me masturba gentiment, son doigt glissant à travers mes lèvres humides ets’incurvantà l’intérieurpouratteindrelepointsensible,toutenpétrissant lenœuddurde

Page 127: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

monclitoavecletalondesamain.Jefrémis,auborddel’orgasme.Ilralentitetdescendit,encouvrantdebaisersl’intérieurdemacuisse.

J’essayaidelefaireremonter,sanssuccès.–S’ilteplaît,Blake,nemefaispasattendre.–Jeveuxtesavourer,mabelle,dit-ilenunva-et-vientavecsesdoigts.Jecriai,quasifollededésir.–J’aibesoindetesentirenmoi,maintenant!J'avaislesnerfsàvif,etlapromessedesafaçondemebaiserimplacablementnefaisait

qu’ajouteràmondésir.Sesdoigtss’échappèrent,etildégrafasonpantalon,l’abaissantjusteassez pour en libérer sa queue. J’en saisis toute la dure longueur, enveloppant sa peauchaude dans la mienne et appréciant ce qui allait advenir tandis que je le mettais enposition sur mon sexe et le guidais à l’intérieur. Lentement et profondément, il pritpleinementplace.Lasensationétaitardenteetintense.Parfaite.

Jerepoussai lavagued’émotionsquim’envahitalors.Mapoitrineétait lourde,commesimoncœurallaitimploser.Jel’embrassaifrénétiquement,noslanguess’emmêlantdanslachaleurdel’action.J’avaisbesoindecela.J’avaisbesoindelui.

Jem’agitai fébrilement, folle de la frictionde son sexe enmouvement à l’intérieurdemoi. Je voulais leposséder et êtrepossédée, et c’était la seule façondem’assurerqu’il nepenseraitàpersonned’autre.

–Baise-moi,Blake!–Àvosordres.Il s’enfonça en moi, puissamment et profondément, encore et encore. Je jouis

rapidementavec sonprénomsur les lèvres,des larmes roulant surmonvisage tandisqueles vagues déferlaient en moi. J’essayai de les essuyer avant qu’il ne les voie, mais il lesinterceptaavec sabouche. Il lesabsorbade sesbaisers telunbaumesur l’intensitédemajouissance et sur la tristesse de notre séparation de ces derniers jours. Il ralentitmomentanément avant de changer d’angle et d’augmenter l’amplitude de ses coups deboutoir.J’étaissuspendueaubordduprécipiced’unnouvelorgasme.

–Donne-m’enplus,gémis-je, rejetant la têteenarrière, submergéepar lessensations,maisenendésirantplusencore.

–Plus?–Vaplusloin.Ils’arrêtasoudainetj’eusunhoquet.Ilmeretournasurleventreetmemitàgenoux,

megiflant la fessesidurementque j’englapis, ladouleurmeramenantà laréalité.Avantque jen’aiepuprotester, il renfonçasonsexeenmoiavecunepuissancequimecoupa lesouffle.

Ilseretiracomplètement,etsepenchasurmoi,melaissantvideetendolorie.–Tunet’enfuirasplus,Erica.Jeneplaisantepas.

Page 128: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Savoixétaitrauque,etsonsoufflechaudsurmanuque.–Blake,s’ilteplaît,gémis-jeenreculantverslui.–Promets-le-moi.–Oui,jetelepromets.Ilseredressaetsapaumes’abattitaumêmeendroit,labrûlureeffacéeparlasensation

desaqueueau fonddemoi. Il se retiradenouveau.Jemerenfonçai sur lui, lebesoindejouiravecluidétruisantmesinhibitions.Ilréponditàmarequêtemuette,reprenantsonva-et-vient régulier, et lorsque sa main retomba sur ma fesse, je me refermai sur luiinstantanément,écrasantsonsexeaveclesparoisdumien.

–Encoreplus,criai-je.Il reprit sonrythme,sansplusbriser laconnexion,etmeravageantdechaqueclaque

mesurée.Moncorpsfrémissait,chaquemusclesetendantdesapropreinitiative,tandisquej’approchaisdugouffre.Jegeignaisdanslecanapé,mesongless’enfonçantdansleluxueuxmatériau,etjejouisdansunhurlementquelevideurentenditprobablement.Blakeatteignitsonpropreorgasme,sevidantenmoidansunsoupirtrépidant,sonsoufflechauddansmoncou.Ils’apaisa,puismepritparlatailleetmeretournafaceàlui,m’accueillantd’undouxbaiserhaletant.

–C’étaitdifférent,murmurai-je,amorpheetapathique,dépassée.–Çat’aplu,rétorqua-t-il.Jegémisetserraimesjambesautourdelui.Ilsourit.–Pourunepetitecoquinedirigiste,tufaisunesacréedominée.Mesyeuxs’écarquillèrent.–Jenemedécriraiscertainementpascommedominée.Ils’esclaffa.–Tudisçacommesic’étaitungrosmot.–Çal’est,pourmoi.Jene…– Attends avant de poursuivre. Laisse-moi juste te poser une question. Est-ce que tu

veuxquejerecommence,detempsentemps?Jecillai,soudainembarrasséeparcequ’ilallaitmefaireadmettre.Sefairefesserdans

lefeudel’actionetlenégocierfaceàfaceétaientdeuxchosesdifférentes.–Jenesaispas.Peut-être.–Tantmieux,parcequej’enaibienl’intention.Son expression ne laissait aucun doute sur son sérieux, sa voix plus dure

qu’auparavant.Toutmoncorpsfrissonnadenouveaudechaleuretd’anxiété.Jevouluspinailler,luidiredelaissertomberetd’allersefairefoutre,maisjem’aperçus

quel’idéem’excitait.–Tumefaisdésirerdeschosesquejenesuispascertainedevouloir.

Page 129: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Iln’estpasinterditdevouloiraulitdeschosesquel’onnevoudraitpasdanslaviedetous les jours. Je te promets de ne pas te fesser en public. (Un sourire vint adoucir sonvisage,tandisqu’ilcaressaitmoncorps.)Saufsituasététrèsméchante.

Ilpritmonseindanssaboucheetenserralemamelonraidientresesdents.Oh,j’adoreça.Jemetendisàcettesensationethaletaidoucement.–Jeseraigentille,promis-je.Ilgloussa.–J’endoute.–Suis-jesiméchante?Ses yeux s’assombrirent, la légère incurvation de sa lèvre adoucissant une expression

quisanscelaauraitétéquelquepeumenaçante.–Tupourraisvouloirt’accoutumeràl’idéedepunition.Blake suçadenouveau fortementmonmamelon, et fit rouler l’autre entre sesdoigts,

pinçantjusteassezlachairpourinfligerunedouleurparfaitementmesurée.Jetressaillai,maisilnelâchapasprise.–Comment savoir si cen’estpas laphase suivantede tonplandedominationdema

vie?D’abordl’appartement,puisça…Jesoufflai,àpeinecapabled’organisermespensées.–C’estuneidéeintéressante,maisjenecroispasquetumelaisseraisfaire.Il remontaunpeu, fit courir ses lèvres surmaclavicule.Toutenme suçant le cou, il

continuadetitillermesmamelons.J’abandonnaimesseinsàsesmains,etunsouriresatisfaits’affichasursonvisagealors

qu’il s’écartait et se relevait. Il bandait encore, une démonstration spectaculaire de sonendurance.Jegrimaçailorsqu’ilremitsonpantalon.

– Ne boude pas, laisse-moi te ramener à ta chambre, dit-il, la promesse d’une suitebrillantdanssesyeux.

Moins de vingt minutes plus tard, nous franchissions les portes de l’appartement.QuelquessecondesetBlakeétaitsousmoi,surledessus-de-litcramoisidelachambred’ami,exactement là où je l’avais voulu des jours entiers. Après ses punitions et notre petiteconversationsurmonrôlededominée,jerestaisdévoréededésirpourlui.Déchaînée,j’ôtaisachemise,léchaietbécotailapeauquimenaitàsonpantalon,lelibérai.Ils’assitetenlevamarobe.Nueetéperduededésir, je laissaimesmainscourirsursapeauenfiévrée,tandisqu’il longeait les contours de ma poitrine avec sa bouche, m’adorant centimètre parcentimètre.Sonsouffledouxréchauffaitmapeauhypersensibleetaccroissaitmondésir.

–Erica,bonDieu,toncorpsestfascinant,murmura-t-ilàvoixbasse.Je pouvais presque sentir sa ferveur, sa détermination à me posséder de toutes les

façons possibles. Sesmains glissèrent demes épaules jusqu’àmes poignets, qu’ilmaintintd’une seulemain derrièremon dos. Jememordis la lèvre et gémis,me branlant dans la

Page 130: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

limitedesmouvementsqu’ilm’autorisait,enmefrottantcontresonsexe,d’avantenarrièresurmonclito,stimulantmondésir.

Il resserra son emprise sur mes poignets, et une peur irrationnelle m’envahit. Jem’immobilisai,messeinsdresséssanspudeurverslui.Moncœurbattaitlachamade,tandisque je luttais contre des instincts qui nem’auraient jamais permis dem’abandonner à unhommeayantuntelpouvoirsurmoi.

–Blake,jenesaispas,mavoixtremblantd’unmélangedéroutantdepeuretdedésir,tandisqu’ilmemaintenaitcaptive.

Ilmefittaired’untendrebaiser.–Jevaisprendresoindetoi,mabelle.Sa voix ne laissait aucuneplace audoute, son visage était calme et rassurant,mieux

maîtriséquejenepourraisjamaislefaireendetellescirconstances.Jeleregardaidanslesyeux,etmoncœurseserradessentimentsquem’inspiraitcethomme.

–Jeneteferaijamaisdemal.Ilparcourutmeslèvresdesonpouce.Je confiai mon corps à Blake. Je ne m’étais jamais sentie plus en sécurité, ni plus

vulnérable,qu’aveclui.Latensiondansmesmuscles,quimemaintenaitsurlefil,prêteàmebattre,serelâcha.Surlepointdem’abandonneràtoutcequ’ilpouvaitavoirprémédité,jeluirendisson

baiser.Moncœurs’accéléra,l’anticipationprenantlepassurlapeur.Blakepassaunbrasautourdemeshanches,qu’ilsoulevalégèrementavantlecontact,

et je me glissai précautionneusement sur la chaleur torride de son érection. Il prit monmamelonturgescentdanssabouche,enflattalapointedesalangueetdesesdentscommeil l’avait fait au club. La sensation ambivalente me submergea, tout en me maintenantcaptive. Je ne pouvais pas arrêter l’énergie qui courait en moi en le touchant ou enaccélérantnosmouvements.Enlieudecela,ellerestaitenmoi,croissaitcommeunebouledefeuenmanqued’oxygène,attendantd’exploseretdetoutconsumerautourdemoi.

Il arqua sonbassin, pompant toujoursplus enmoi, rendantmespropres ondulationsinutiles.Ilfittournoyermonclitodesonpouce,prenantlecontrôledumoindremouvementavec habileté, jusqu’à ce que je sois périlleusement proche de l’extase. Mes muscles setendaientcontrelesentravesqu’étaientsesmainspuissantesquimepliaientàsavolonté.

–Tupeuxtoutressentirpleinement,maintenant;n’est-cepas,mabelle?En entendant ces mots, une conscience aiguë de tous les points où nos corps se

rejoignaient m’apparut. Son gros vit enfoncé enmoi, ses doigts qui jouaient les notes demondésircommeunechansonqu’ilmaîtrisaitparcœur.Jetremblais,perdantunpeuplusl’espritchaqueseconde.

–Oui,c’est…incroyable.

Page 131: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Tuavaisraison,Erica.Jevaistefairedésirerdeschosesquetunesavaispasquetuvoulais.

Il abandonnamon clito pour redresser mes hanches, s’enfonçant plus profondémentencore.Unpetitcriéperdum’échappa,commejemesentaismedécomposerautourdelui.

–Tuvas vouloir que je t’immobilise et que je tebaise furieusement.Que jeprenne lecontrôledetoncorps.

–Blake,s’ilteplaît…Oh,monDieu!–C’estcequetuveuxlà,n’est-cepas?–Oui,maintenant.Toitoutentier.Jefusprisedespasmesincontrôlables,sesparolesstimulantmonappétitvorace.Ilme lâchaalorsetm’étenditsur ledos,recouvrantmoncorpsdusien. Ilplongeaen

moipardepuissantsà-coupsquinousfirentremonterdanslelitetmemenèrentdroitàunorgasmeexplosifquime frappacomme la foudre,unéclairaveuglantde lumièreblanche.Jehoquetaisonprénometenfonçaimesdoigtsdanssondos,meraccrochantàsonépauletandisquelefeuenmoiexplosaitetconsumaittoutalentour.

–Blake!–Jesuisàtoi,Erica,dit-il,savoixlourdededésirtandisqu’ilclouaitmeshanchesaulit

aveclaforcedesonderniercoupdereins.Onrestaétenduslàplusieursminutes,entrelacés,liésparcequenousvenionsdevivre,

tandisque l’apaisementetdesvaguesdepur ravissement couraientenmoi. Jeglissaiunemainentrelesmèchespoisseusesdesescheveux,tandisqu’ilparcouraitmonvisageduboutdes doigts. Ses yeux n’avaient pas quitté les miens, figés dans une intensité presquerévérencieuse.

Physiquement et émotionnellement, je n’avais jamais partagé un tel lien avecquelqu’un. Personne nem’avait jamais fait ressentir une telle sensation. Tellement brute,tellementcrue.

Mon vertige s’atténua lorsqu’il imprima des baisers doux comme des pétales surmeslèvres,memurmurantdesparolesd’adorationàl’oreille,jusqu’àm’endormirdanssesbras.

Je m’éveillai quelques heures plus tard. L’aube pointait, et les bras de Blakem’enserraient fermement contre lui, déniant toute velléité de fuite. Je me tournailégèrement pour le regarder,mais lorsque je bougeai, son bras se resserra autour demataille.Sonvisageétaitdétenduetpaisible.Jesouris.Jemetrouvaisexactementoùjevoulaisêtre. Je passai mon bras par-dessus le sien, me resserrant tout en m’efforçant de merendormir.

Soudain,letéléphonedeBlakesonnadanslapochedesonpantalonparterre.Aprèsquelquessonneries,ils’étiraetroulahorsdulitpourl’atteindre.

–Qu’est-cequinevapas?demanda-t-il.Unebienétrangefaçond’entameruneconversation.

Page 132: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Oùêtes-vous?poursuivit-il,en tenant le téléphonecontresonépaulepourpouvoirramassersesvêtementssurlesol.D’accord,jesuislàdansdixminutes.

Ilmitfinàl’appeletachevades’habiller,ayantapparemmentoubliéquej’étaislà.–Quesepasse-t-il?demandai-je.Ilmarqua une pause et se tourna versmoi, le visage rongé par l’inquiétude. Que se

passait-ild’aussigravepourpartircommecela,àlaseconde?–Je suisdésolé. Il fautque jem’occupedequelquechose.Çanedevraitpasprendre

troplongtemps.–Jepeuxveniravectoi?–Non,faisplutôttesbagages.JeteramèneàBostondèsquejereviens.– Je ne peux pas partir, j’ai un rendez-vous demain, dis-je, en regardant l’heure.

Aujourd’hui,enfait.–Avecqui?–Unbrunch,avecIsaacPerry.–Reprogramme-le,ordonna-t-ilsanshésiter.Jet’emmèneloind’ici.–Blake,putain,qu’est-cequ’ilsepasse?Jecroisailesbrasdefaçondéfensive,unpeumalàl’aised’êtrenuequandluinel’était

plus.Ilsoupiralourdement.–Jenepeuxpastel’expliquerpourl’instant.–Laissetomber.Jeresteici.JeviendraiteretrouveràBostonunpeuplustarddansla

journée,quandj’auraifini.Jemedirigeaiversmesaffaires,vêtued’undrap.– Crois-moi, nous partons d’ici. (Sa mâchoire avait cet air d’intransigeance si

coutumier.)Jet’expliqueraitoutdèsmonretour,c’estpromis.Je jaugeai son expression avec l’envie de le croire. Il franchit la distance qui nous

séparaitetpritladécisionpourmoiavecunbaiserquimefitregretterdenepasdisposerdedixminutesdeplusaveclui.

–Jerevienstrèsvite,dit-ilavantdeseprécipiterverslaporte.Douchéeetbagagesfaits,jememaudisd’avoirlaisséBlakemeconvaincrederepousser

mon rendez-vous. Je finis parme rendormir en l’attendant.Quelques heures plus tard, ilétaitassisàcôtédemoietmetapotaitlebraspourmeréveiller.

–C’estl’heuredepartir,mabelle,dit-ild’unevoixdouceettendre.–Toutvabien?demandai-jeenchassantlesdernièresbrumes.–Viens,nousenparleronsdanslavoiture.Ilselevaetattrapamesbagages.Jefisunrapideinventairedemesaffairesetlesuivis.JefissilencieusementmesadieuxàNewYorklorsquel’onquittalavilleverslenord,en

réalisant que je n’avais pas eu le temps de dire au revoir à Alli. Je l’appellerai plus tard,

Page 133: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

beaucoupplus tard–quandelle etHeathauraient eu le tempsdedormir aprèsunenuitprobablementtropcourte.

–Vas-tuenfinm’expliquer?finis-jepardemander.Blakeresserrasaprisesurlevolant.–Quit’aappelé,àl’aube?–Alli.Je fronçai les sourcils, curieuse de savoir pourquoi elle avait le numéro de Blake.

J’envisageai diverses possibilités, mais je n’en savais tout simplement pas assez pourpoursuivre.

–Pourquoi?– J’imagine qu’Alli ne te l’a pas dit, pour des raisons évidentes, mais Heath a un

problèmededrogue.Jepensaisqu’ils’enétaitsorti,maisilareplongé.J’expirai puissamment, pris le temps d’absorber l’information. Mon esprit s’accéléra,

reliatouslespoints.Toutconcordait.Sonairravagél’autrematin,lesnuitsdehors,etuneformedeméfiancesous-jacentedontjen’arrivaispasàmedébarrasserquandj’étaisprèsdelui.

–Quelgenrededrogue?–Principalementdelacocaïne.–Alli…murmurai-jeenmecouvrantlabouched’unemaintremblante.Commentpouvait-elleresteravecluiendetellescirconstances?C’étaitgrave.EtsiAlli

se droguait aussi, à causede lui ?Cela expliquerait lemanquede contact, et la perte depoidsqui,quoiquesubtile,m’avaitparuévidente.

–Allin’enprendpasaveclui,dit-il,commes’illisaitmespensées.Jemerembrunis.–Commentlesais-tu?–Jelacrois.Pouravoirpassétantd’annéesavecHeath,jepensequemondétecteurde

mensongesestplutôtbienaffûté.Elleestclean.Jehochai la tête, soulagée, et soudaindésoléepourBlake.Depuis combiende temps

devait-ilassumercefardeau?NettoyerderrièreHeath?–Ques’est-ilpassécettenuit?–Ilaétéimpliquédansunebagarreauclub.Ilsontappelélesflicsquionttrouvédela

droguesurlui.Toujourslamêmehistoire.–Etmaintenantquoi?–Ilsl’ontgardépourlanuit.Jel’aidéjàfaitlibérersouscaution,etmaintenantjevais

devoirl’envoyerendésintoxpourluiéviterlaprisonferme,encore.Encore?–Etoùva-t-ilaller?

Page 134: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–J’envisagede lui fairequitterNewYork.Cocaïne,mannequinsetnight-clubs.Onnepeutpasavoirl’unsanslesdeuxautresapparemment,etilestincapabled’abandonnerlesclubs.

Jem’efforçaisdedigérertoutcela,d’assemblerlespiècescommecellesd’unpuzzle.Jedétestais avoir étémaintenuedans l’ignorance aussi longtemps.Depuis combiende tempsAlli avait-elle su sans me le dire ? D’abord Sophia, et maintenant cela. En l’espace dequelques semaines, il y avait eu tant de secrets entre nous. Peut-être nem’avait-elle pasmentisciemment,maisellemecachaitlavérité,cequirevenaitunpeuaumême.

– Est-ce comme cela que tu as rencontré Sophia ? demandai-je, un peu hésitante àsuggérersonimplication,maisincapabled’yrésister.

Ilrestasilencieuxunlongmoment.–C’estHeathquimel’aprésentée,oui.Jeledévisageai,leregardantdéciders’ildevaitm’endireplus.–Jesupposequel’onpeutdirequ’ellefaisaitpartiedesonentourage,ouluidusien.Je

ne sais pas.Nous avons commencé à nous voir de temps à autre, jusqu’à ce qu’elle sorteavecHeathquandjen’étaispaslà.

–Elleacouchéaveclui?– Ni lui ni elle ne l’ont admis. Je n’avaismême pas réalisé qu’ils pouvaient avoir un

problème jusqu’à ce que j’atterrisse dans l’une de leurs fêtes à l’appartement. Ils étaientdanslesbrasl’undel’autre.J’aidécidédenepasposerdequestionsetj’aijustesupposélepire.

–Qu’as-tufait?– Je les ai envoyés en désintox. En lesmenaçant de leur couper les vivres à tous les

deuxs’ilsnedécrochaientpas.QuandSophiaaachevéleprogramme,j’airompuavecelle.Ellenel’apasbienpris,maisj’aiacceptédel’aideràrepartirdezéro.

–C’estpourcelaquetuasinvestidanssonentreprise.Une expression de surprise apparut brièvement sur son visage. Il avait probablement

étéprêt à toutpourqu’ellene retombepas, tout en sachantque la ruptureallait la fairepartirenvrille.Était-ilamoureux,alors?

–Oui,maislarelations’arrêtelà.Ilquittauninstantlaroutedesyeuxpourmeregarder.–Jetecrois,dis-je.Autantj’aimaisleregarderdanslesyeux,autantjepréféraisqu’ilse

concentresurlaroute,enl’instant.–Bien.–Qu’est-cequ’Alliestcenséefaire,maintenant?–Ellepeutresterdansl’appartementaussilongtempsquenécessaire,évidemment.–Mais,leurrelation?Jeveuxdire…

Page 135: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Jen’avaisjamaisvuAllicommecela,amoureuseàcepoint.Maispouvais-jeapprouverune relation avec Heath quand il avait tant de problèmes ? Tant de sérieux problèmes.Frèremilliardaireoupas, c’étaitune sourced’ennuis, et l’idéequ’ellepuisseêtre liéeà luiétaittroublante.

–Elleabesoindeprendreunedécision,mais jepréfèreque tunesoispas impliquée,ditBlaked’untonplutôtrésolu.

Jemerenfrognai.–Queveux-tudireexactement?–Jeneveuxpasque tu t’approchesdeHeathoudesoncerclede relations tantqu’il

n’aurapasétéirréprochabledepuisuntrèslongmoment.EtcelainclutAlli.–Tumedemandesdenepluslavoir?Cettesuggestionmehérissait.– Si Alli décide de rester avec lui, c’est son choix, mais je ne veux pas que tu t’en

approches.Macolèreremontaàlasurfaceetjebouillis,cherchantdesargumentspourl’emporter

dansladiscussion.J’avaisbesoindemoncafé.Je boudais à l’extrémité de mon siège, m’efforçant de m’écarter de lui autant que

l’espacerestreintdelavoiturelepermettait.–Petit-déjeuner?proposa-t-il.Jeregardaisparlafenêtre,refusantderépondre.Après plusieursminutes de tension, il sortit de l’autoroute et se garadevant unpetit

restaurant pittoresque en bord de route. Il coupa le contact, descendit et fit le tour pourm’ouvrirlaportière.

Lorsquejemisunpiedausol,ilm’enfermaentresesbras,sepenchaversl’intérieurdela voiture, rapprochant nos corps de façon incompatible avec la colère que je ressentaisenverslui.

–J’aibesoinquetucomprennes,dit-il.– Que je comprenne quoi ? Ton besoin maladif de contrôler tout et tout le monde

autourdetoi?–Tuasdéjàconnuquelqu’unavecuneaddiction?Je serrai les bras sur ma poitrine et regardai vers l’autoroute et les voitures qui

passaient. Il allait essayer deme convaincre que contrôlerma vie était de quelque façonacceptable,jelesavais.

–Non,admis-je.–Bien.Jeneveuxpasquecesoitlecas.–Tunepeuxpasdéciderquipeutfairepartiedemavie.Tuasditquetun’avaispas

enviedemedominerdecettefaçon.–D’abordjenel’aijamaisdit,etensuitec’estdifférent.

Page 136: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Génial…Jefrissonnai,glacéeàl’idéequ’aufonddelui,Blakevoulaitréellement,avaitpeut-être

même besoin de me contrôler – une sensation qui ne faisait que s’enraciner plusprofondémentdansnotrerelationchaquesecondequipassait.

–Erica,arrête.–Que j’arrêtequoi?Jen’ai jamaiseuàobéiràquiconque,et jenevaiscertainement

past’obéiràtoi.Alorsenfonce-toiçadanstonputaindecrâne,etfous-moilapaix!Jefisminedesortir,maisilnebougeapas,m’acculant.–Erica…–Nemeparlepascommeça.Il gronda et sepassa lesmainsdans les cheveux, s’écartantunpeu. Je ledévisageai,

mais lorsque je vis ses yeux, ils étaient épuisés, bouillonnants d’émotion, remplis d’unesuppliquemuette.

–Jem’inquiètepourtoi.Jesuisentraindetomberamoureuxdetoi,etjeferaitoutcequiestenmonpouvoirpourteprotéger.Tucomprends?

Moncœurfitunbonddansmapoitrine.Merde.Merde.Merde.Sesparolesn’auraientpas pu frapper plus fort. Les paumes demesmains picotèrent et devinrentmoites. Je lesfrottainerveusementsurmonjeantandisquelesilences’installaitentrenous.

–Heatharavagénotrefamilleavecça.Mesparentssedemandentchaquejourquelleserreurs ils ont pu commettre, et j’essaie par tous les moyens de le remettre sur le droitchemin,enpriantpourquequelquechosefonctionneavantqu’ilnesetue.

Jemedétendisunpeu,heureusequ’ilparle.J’étaisencorebienloind’avoirassimilélesémotionsquisedéchaînaientenmoi.

J’avais besoin de café, ou de sommeil. J’avais surtout envie deme retrouver hors decette bulle de sexe ravageur et d’intensité émotionnelle que formait Blake. J’étais déjàsuffisammentpauméecommecela.

J’agitai la tête, m’efforçant de me concentrer sur la discussion que j’avais décidé deremporter.

Ilm’avaitprisedecourt,maisnousavionsbesoindetrouverunterraind’entente,mêmesi jemedoutaisqueBlaken’avaitpasvraiment l’habitudedenégocierunterraind’ententeavec quiconque. Je pris uneprofonde inspiration et plaçaimesmains sur sa poitrine. Soncœurs’accéléra,imitantlemien.

–Blake,Alliestmameilleureamie.SielleveuttrouverunesolutionavecHeath,ilfautquejesoislàpourlasoutenir,toutcommejetesoutiendraistoi.

L’espace d’une seconde, il parut perdu. Son expression changea de nouveau et il seredressa.

–Jen’aipasbesoindesoutien,Erica.J’ail’habitudedem’occuperdeça.Jeveuxjustequ’ilnet’arriverien.Jenelesupporteraispas.

Page 137: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Macolèrefitplaceàuneirrésistibleenviedechasserladouleur,del’aideràarrangerlasituation.

– Écoute-moi. Tu ne peux pas jouer aumaître de l’univers et refuser l’aide des genspourquitucomptes.

Blakerecouvritmesmainsaveclessiennes,lesserralégèrement.–Lanuitaétélongue.Reparlons-enplustard,quandnousseronsmoinscrevés.Je soupirai et acquiesçai, reconnaissant que nous étions aumoins d’accord sur le fait

quenousétionsendésaccord,pourl’instant.

Page 138: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitrequinze

La sonneriene cessait pas. Jeme cachai sous les couvertures,me raccrochant àmonsommeil,espérantqu’Allirépondeàcetteputaindeporte.

Oh,merde!Mesyeuxs’ouvrirentd’uncoupetjem’assisd’unbond.J’étaisdansmonappartement.Jemeprécipitaipourrépondreàl’interphoneprèsdela

porte,sansvoirlemoindresignedeSid.–Oui?–Bonjour,monbébé,chantonnaunevoixdanslehaut-parleur.Jesouris.–Monte,Marie.Je luiouvris laportede l’immeuble,puis lamienne.J’allai faireducafé,en jetantun

coup d’œil à la pendule du four. J’avais raté le déjeuner, ainsi qu’une grande partie del’après-midi.Monestomacgargouilla.Lecaféd’abord.Mariemerejoignitpeuaprès, toutefraîchedanssarobeflorale,lescouleursvivescontrastantavecsonteintadmirable.

–Ouah,belendroit!Elleparcourutduregard l’espacedevieprincipal,quiavait l’airbeaucoupmoinsvide

maintenantque lesmeublesétaientarrivés.Sidavait toutassemblépendantque j’étaisenvoyage – ce pour quoi je n’avais pas encore eu l’occasion de le remercier. Bientôt. Nousvivionsprobablementauxmêmesheures,pourunefois.

–Merci,jel’adore.Café?–Non,del’eau.Elles’installasuruntabouretdebaretposasonsacàmainetsesachatsparterre.Elleparutm’étudieruntemps,lefrontplissé.–Tuasl’aird’uneruine,Erica.Toutvabien?Jesoupirai,probablementaussihagardequej’enavaisl’air.– Une longue nuit, et une longue histoire. Je vais t’épargner les détails, dis-je en

regrettantquelecafénecoulepasplusvite.

Page 139: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

J’avaisbesoindequelquesminutesdepluspourmeréveilleretmefigurerl’étatactueldemaréalitéavantmêmedepouvoirenvisagerd’enparler.

–Quoideneuf?DesavancéesavecRichard?–Oh,jenesaispas…Ellehaussalesépaules,pritleverred’eauquejeluitendais.–Ilasavie,j’ailamienne.Nousverronsoùcelapeutmener,jesuppose.–Jen’entendspluslesclochesd’unmariage!Je m’adossai au comptoir pour lui faire face. Marie avait passé des années dans le

circuit des célibataires, et j’avais l’habitude de l’écouter décrire le potentiel conjugal dechaquenouveaurendez-vous.Elleavaitboncœur,maisnesemblaitpouvoirjamaistrouverl’âmesœur.Pourtant,c’étaituneromantiqueéperdue,etelleméritaitunerelationidylliqueplusquequiconque.

–C’estpeuprobable.Nousavonstouslesdeuxl’habitudedenotreliberté.Jesupposequeplusonvieillit,plusildevientdifficiledechangersaviepourquelqu’und’autre.

Ellesoupiraunpeuetjouaavecsonverresurlecomptoir.–Parfois, je regrette l’époqueoù jepouvais complètementm’abandonneràquelqu’un

quienfaisaitdemême.–Cen’estpasvraimentsain.– Peut-être pas toujours,mais c’est enivrant. Il n’y a rien de comparable. Tu devrais

essayer,unefois.(Ellemefitunclind’œil.)–Malheureusement,jecroisquejesuisenpleindedans,justement.–L’hommemystère?Je laissai échapper une longue expiration, en réalisant qu’elle ne connaissait pas la

moitiédemonhistoireavecBlake.–Oui,l’hommemystère.Ils’appelleBlake.Ilvitau-dessus,enfait.Ellehaussalessourcils.–J’airatéquelquechose?–C’est compliqué,mais il semble vouloir être avecmoi. C’est ce que je veux aussi, je

crois.–Alorsquelestleproblème?J’attrapai une tasse, la remplis avant que tout le café ne soit passé, et sirotai

précautionneusement.Ellemarquaitunpoint.Mêmemoi,jem’interrogeaisurlesraisonsquim’avaientpousséeàcombattresiviolemmentmessentimentspourBlake.

–C’est…effrayant,expliquai-je.D’abord,ilestextrêmementintense,etjen’aijamaiseubesoin de personne, mais plus nous sommes ensemble… Ensuite, c’est comme si je nepouvaispluspenseràriend’autre.C’estobnubilant.

Je fermai les yeux et essayai de le chasser demes pensées – une tâche impossible. Ilétait partout, même quand nous n’étions pas ensemble. Et lorsque nous n’étions pas

Page 140: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

ensemble,jemelanguissaisdeleretrouver.Àl’évidence,lesexeétaithorspair.Quandnousnenousravagionspasl’unl’autre,êtreavecluiétaittoujoursbien.

Maisjen’avaisaucunélémentdecomparaison,sinonmonchapeletdeternesaventuresavecdestypesquituaientletempsjusqu’àcequeleursparentslesforcentàépouserlafilled’unsénateur,oul’équivalent.Rienquis’enapproche…

–Tuesbienaccrochée,monbébé,ditMarie.–Jesais,maisjeneveuxpasm’yperdre,Marie.Jesuisarrivéejusque-là,etc’estceque

je suis. J’aime ma vie et mon indépendance, tout comme toi. Pourquoi devrais-je toutchangeretperdrecequejesuispourquelqu’unquejeconnaisàpeine?

–Onseperd,Erica,parcequ’aveclabonnepersonne,cequel’ondevientensembleesttellementplusgrandiose,plusquetunepeuxleréaliserpourl’instant.

Sesparolesrésonnèrentenmoi,m’affectantjusqu’auplusprofond.Malèvretremblaunpeu,etjerepoussaileslarmesquimepiquaientlesyeux.

–Jecroisquejel’aime,murmurai-je.Etjeflippe.Marieselaissaglisserdutabouretetvintmeserrerfortdanssesbras.Jeluirendisson

étreinte,profondémentreconnaissantequ’ellefassepartiedemavie.Mais comment pouvais-je abandonnermon cœur à quelqu’un commeBlake ? Il avait

tellement de secrets, sans compter son inquiétant besoin de contrôle. Je ne voyais pascommentnouspouvionsréussirà longtermeavectouscesfardeaux.Etsinouséchouions,commentysurvivre,enplusdetoutcequej’avaisvécud’autre?

–J’aiquelquechosepourtoi.Elle interrompit le sombre fil demespensées et ramassa le sacqu’elle avait posépar

terre.Elleentiraunevieilleboîteàchaussuresqu’ellemetendit.Jelaposaisurlecomptoir

et l’ouvris.À l’intérieur se trouvaientdes liassesdeclichésdemamèreà l’époqueoùellesétaientétudiantes,quandMarieavaitcommencéàs’intéresseràlaphotographie.

–J’aifaitunpeuderangementet je lesairetrouvées.Jemesuisditquetudevais lesavoir.

Je sortis les liasses et regardai les photos une à une. Le visage de ma mère et sonsouriremeréchauffèrentlecœur.Dansdetelsmoments,ellememanquaitplusquejamais.Jem’efforçais deme souvenir de sa voix, de son rire. Il s’était écoulé tellement de temps,mais le souvenir de son amour résonnait enmoi, unemélodie sans paroles qui sustentaitmoncœuràtraversletempsetl’espace.

Marie se pencha par-dessus mon épaule comme si elle voyait les photos pour lapremièrefoisdepuislongtemps,commentantl’endroitoùilssetrouvaientdanslecampusàcet instant-là. Jem’arrêtai surunclichéquimontraitungroupedecinqamisbrasdessus,bras dessous, vêtus de blousons légers pour une fraîche journée automnale, si l’on encroyait les feuillages derrière eux. Quelque chose dans la photo m’interpellait. Ma mère

Page 141: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

riait. Ses longs cheveux blonds voletaient autour de son visage. Elle était tournée versl’hommeàcôtéd’elle.Contrairementauxautres,leurexpressionrévélaitplusquelafrivolitédel’instant–unaird’adorationfugacequejen’avaisapprisquerécemmentàreconnaître.

–Quiest-ce?J’indiquail’hommeauxcheveuxchâtainclairetauxyeuxbleusreconnaissables.Comme Marie restait muette, je me tournai vers elle pour voir qu’elle agitait

négativementlatête.–Unvieilami,jesuppose.Jenemesouvienspas.–Maisondiraitbienquemamèreleconnaissait.–Pattyavaitbeaucoupd’amis.Elleétaittrèscharismatique.Lamoitiéducampusétait

amoureuxd’elle,jetejure.–Marie…–Erica,jenesaispasquiestcethomme.J’aimeraispouvoirteledire.Elleattrapasonsacàmainetretouchasonmaquillageavecsonmiroirdepoche.Marie était insouciante et énergique, parfoismême un peu immature,mais ce n’était

pas une bonne menteuse. Elle me cachait quelque chose. J’avais une petite idée dupourquoi,maisjen’insistaipas.

–Jefile,madouce.Tiens-moiaucourantpourtonBlakemystère,d’accord?Ellesouritcommesilescinqdernièresminutesn’avaientpaseulieu.–Onfaitcommeça.Etbonnechanceàtoiaussi,avecRichard.Elle répondit d’un petit rire bien terne qui ne me laissa pas grand espoir pour sa

relationavecRichard.Elleouvritlaporteetpoussauncriperçant,interloquéedesetrouverfaceàBlake.Ilparutaussisurprisqu’elle.

Jem’esclaffaietallailesrejoindreàl’entrée.–Marie,jeteprésenteBlake.Blake,voicimonamie,Marie.–Enchanté,Marie,dit-ilenl’accueillantd’unsourireàcouperlesouffle.Ellemaugréaquelquechosed’inintelligibleavantdepartir,mesaluantd’ungestedela

mainaccompagnéd’unpetitsourirecomplice.Blake s’étaitappuyéauchambranlede laporte, fraîchementdouchéetpiedsnus, les

mainsdans lespochesdesonbermudacomplétéparunsimpletee-shirtblanc. Iln’yavaitqueluipourrendreunetenuedécontractéeaussiincroyablementsexy.

–Est-cequ’unplatàemporterpourraittetenter?demanda-t-il.–Enfait,celameparaîtparfait.Jenesuispasencorebienremise.–Moinonplus.Lethaï?–D’accord.Jeteretrouveenhaut.Ilfautquejemechange.J’indiquaimonpyjamad’ungestedumenton.–Cen’estpasnécessaire.Lesvêtementssontoptionnels,tusais.

Page 142: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Il me fit un clin d’œil, et je lui fis les gros yeux, lui donnant un coup de poing surl’épauleetm’efforçantdedissimulermonsourire,avantdemedirigerversmachambre.

***

–Oh,monDieu!gémis-je.Jecroisquejeneferaiplusjamaislacuisine.–Jecrainsdenepouvoirautorisercela,commentaBlakeentredeuxbouchéesdepâtes

qu’ilpuisaitdansunemballagealimentaire.Il pensait que je plaisantais,mais c’était probablement lameilleure cuisine thaïe que

j’aiejamaismangée.Onretournas’asseoirdanslecanapé,épuisésetrassasiés.–Tuveuxvoirunfilm?demanda-t-il.–Tuveuxdire,sortir?–Non,onpeutresterici,àmoinsquetuneveuillessortir.–Etlebannissementdutoutélectronique?–C’estplutôtuneoptionfacultative!Ilouvrituntiroirdelatablebassedevantnousetattrapal’unedestélécommandes.La

touche qu’il pressa fit s’élever un grand écran plat d’une cache dans le manteau de lacheminée.

–Çameva.Choisisquelquechosependantquejerange.Je débarrassai la table et emportai tout dans la cuisine. Une boîte carrée de velours

noir attiramon regardaupassage,ne serait-ce queparcequ’elle était le seul objet sur lecomptoir.Jem’efforçaidel’ignoreretmepréoccupaidemettredecôtélesrestes.

–C’estpourtoi,ditBlakeenappuyantsahanchesurlecomptoir,àl’autreboutdelacuisine.

Mesyeuxs’écarquillèrentdesurprise.–Ça?demandai-jeenindiquantlaboîte.–Oui, je voulais te l’offrir àNewYork,mais nous avons filé avant que je n’en aie eu

l’occasion.Oh.–Ouvre-la,dit-ilaveccefeulementsexyquimefaisaitperdrelatête.Jeprislaboîteaveccirconspectiontandisqu’ilfranchissaitl’espacequinousséparait.Je

la tins dansmesmains, incapable de l’ouvrir. Après quelques secondes embarrassantes, ilouvrit le couvercle, faisant apparaître deux bracelets, chacun avec un petit pendentifsuspenduaufermoir.J’ensortisundontlabreloqueétaitunerouletteminiatureenplatinemassifassorti.

–Pouravoirétémonporte-bonheur,murmura-t-il.Jesourisàcesouvenir.Celaavaitétéuncoupdechance,effectivement.Jesoulevail’autre.Ilétaitornéd’uncœurdélicatementciselé.Moncœursemitàbattre

lachamade,mesnerfssoudainàvif.

Page 143: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Chaquebreloqueaunesignification,dit-ildoucementenreposant laboîteetenmepassant les deux bracelets au poignet gauche, avant de déposer un doux baiser dans lapaumedemamain.

–Merci,dis-jed’unevoixvacillante.J’admirailesbracelets,ilsétaientsimplesetélégants.ConnaissantBlake,ilsavaientdû

coûter une petite fortune, mais leur signification était ce qui m’avait coupé le souffle. Jem’étais repassé ses paroles du matin en mémoire tout l’après-midi, me demandant s’ilm’avaitditqu’ilm’aimaitsuruncoupdetête,oujustepourmarquerunpointdanslefeudeladispute.Maiscecadeauconcrétisaitsonsentiment:ilexistaitdéjàlorsqu’ilavaitparlé.

Lesmotsrestèrentbloquésdansmagorge.Jecherchaisàendireplus.Jel’aimaisaussi.Essayerdemeconvaincrequecen’étaitpaslecasétaitau-delàduridicule.Lesmotsetleursensme déchiraient à l’intérieur. Je voulais qu’il le sache aussi,mais quelque chosem’enempêchait.

Je jouai avec les bracelets – le métal frais sur ma peau et le léger tintement desbreloquesmeferaient toujourspenserà lui,mêmequandnousserions loin l’unde l’autre.Avantquejen’essaiededirequelquechose,ilpritmonmentondanslapaumedesamainet se pencha pour m’embrasser. Je glissai mes doigts dans ses cheveux et lui rendis sonbaiser avec toute la passion qui était en moi, l’exprimant de la seule façon que jeconnaissais.Ilpartageacetteintensité,m’étreignitetmesoulevadesesbraspuissants.

–Erica…–Chut.Jeposaimondoigtsurseslèvresavantqu’iln’endiseplus.Jenepouvaisentendreces

motsunenouvellefois, tantque jen’étaispascapablede les luidireenretour.Enlieudecela,jel’embrassaidoucement,fermantlesyeuxpourévitersonregard.

Ilreculaavantquenousn’allionsplusloin,mepritparlamainetmeramenadanslesalon. Soulagée, jem’installai confortablement au creux de son épaule tandis que le filmcommençait. On se détendit et je savourai l’instant. Je n’avais pas le souvenir de m’êtrejamaissentieaussibienavecquelqu’un.Aucuneparole,aucuneattente–onpassalesdeuxheures suivantes à nous relaxer ensemble, oubliant les drames dans lesquels nous avionsbaignécesderniersjours,jusqu’àcequejem’endormedanssesbras.

L’appartementétait silencieuxetenténébré lorsque jem’éveillai.Blakemeportadanslachambrecommesi jenepesais rien. Ilm’assit sur le litetm’aidaàôtermesvêtements.Rassérénéeparmonsomme,jesentispoindreenmoiuneénergienouvelle.Mapeaupritvieàsoncontact.

–Jecroyaisquetuétaisfatiguée.– Ce n’est plus le cas, murmurai-je. J’ôtai mon débardeur et mon soutien-gorge,

poursuivantdemedéshabillerlàoùils’étaitarrêté.Jereculaisurlelitetl’attendis.Ilenlevasontee-shirt,révélantsontorsenu.

Page 144: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Jevoisquetupensespouvoirm’occuper.Jesouris.–C’esttoiquiavaisditquelesrelationspouvaientêtreunedistraction.–Parcequej’espéraisêtrecettedistraction.Lorsqu’ilbaissasonbermuda,ilrévélasonépaisseturgescence.Danslalumièretamisée

delapièce, ilétaitsplendide.Desombres jouaientsur lesanglessculpturauxdesoncorpstonique.Jemordisviolemmentmalèvreenleregardant.

–Alors,jet’enprie,distrais-moi.Ils’avançaàquatrepattessurlelit,lematelass’enfonçantalorsqu’ilserapprochait.–Étends-toi,etjevaisfaireplusquetedistraire.Jemelaissaiallerenarrière.Ilfitglissermaculotteetseconcentradirectementsurla

chairtendreentremescuisses,meléchantavecunefinessed’expert.Ilgémit,faisantvibrerlestissussensiblesqu’ilflattaitaveclégèretéduboutdelalangue.

– J’adore être là, dit-il, son souffle chaud tourbillonnant sur ma chair humide. Jepourraissucertadoucepetitechattelajournéeentière.

Ses paroles m’excitèrent. Je me tendis, la promesse de jouissance couvant en moicomme un orage. Il enfonça ses doigts dans mes hanches pour me maintenir en place,comme jeme cambrai contre lui. Je tins bon,m’agrippant aux draps sousmoi, l’orgasmeapprochant.Jehurlai,moncorpsréagissanthorsdetoutcontrôle,maisavantquej’aiepume délecter du dernier tremblement, il avait calé ses hanches entre mes cuisses ets’enfonçait enmoi, inclinantmon bassin de façon à pouvoir aller au plus profond dès lepremiercoupdeboutoir.Jeretinsmarespirationenmepréparantàlerecevoir,moncorpsdélicieusementtendu.

–C’esttellementbon,soufflai-je.Il se mut lentement, choisissant une cadence que j’accompagnai avidement. Lent et

intense. Il n’y avait rien demieux. Comme rentrer chez soi. C’était là que je voulais êtrechaque nuit, dans ses bras, là où je pouvais savourer la pression de son corps sur moi,autourdemoi,enmoi,m’emplissantcomplètementetmebaisantinlassablementjusqu’àsefondrel’undansl’autre–jusqu’àressentircettemagieensemble.

– Bon sang, Erica, tu serres juste comme il faut, memurmura-t-il dans le cou. C’estparfait.

Jeprisunebruyanteinspiration,etelles’accompagnad’unamouraveuglant.Mapeaufutparcouruedefrissons.J’étaisfolledecroirequejepouvaisvivresanslui,sanscela.Jeluiappartenais,detouteslesfaçonsconcevables.Jenel’avaisjamaisdésiréautant,etjevoulaisquecetinstantnefinissejamais.

On fit l’amour lentement, et l’absencede fioritures ne rendit pas celamoins profond.Enveloppéedesonodeuretdesescaressespersistantes,jem’accrochaisauxcourbesrigidesde son corps musculeux et à la promesse qu’il allait assouvir l’appétit dévorant qui me

Page 145: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

consumaità chaque foisquenos corps se retrouvaient. Ilme serra fort tandisqu’unautreorgasme montait en moi, lent et régulier, m’emplissant de plaisir. Submergée par lesémotionsquimedéchiraient,jefermailesyeux,etBlakes’immobilisa.

–Regarde-moi,chuchota-t-il.Moncorpsobéissaitaumoindredesesordres.J’ouvris les yeux, vis les siens, et la passion et l’amour que j’y découvris me

comprimèrentlapoitrine.Ilétaitindéniablequej’aimaiscethomme.

Page 146: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitreseize

Lorsque jem’éveillai, le soleil s’était levé. Blake avait disparu,mais il avait laissé unmessage:Bonjourchef,jet’aipréparéunesaladedefruitspourlepetit-déjeuner,danslefrigo.Onsevoitcesoir.Jet’aime,B.

Monestomacfitunsalto,commedansuntourdemontagnesrusses.Jefuretaidanslacuisineet trouvaiunbolde fruits tranchésdans le réfrigérateur.Jesouriset l’emportaienbas avec moi, ainsi que la petite note que je punaisai sur le panneau en liège de machambre.Jeprisunedoucheetm’habillai,enessayantdemeconcentrersur lamontagnedetravailquim’attendait.

Quelques heures passèrent et je commençais enfin à progresser lorsque Sid entrainopinémentdansl’appartement.Ils’immobilisaenmevoyant.

–Tuesrevenue.–Oui.Tuétaisoù?Je le regardai par-dessus l’écran de mon ordinateur portable. Ses cheveux étaient

ébouriffésetsesgrandsyeuxbrunssemblaientfatigués.–Ilyacettefille,Cady.Ellehabiteplusbas.–Nedisplusrien!–Bon,d’accord,dit-ilenserembrunissant.–Désolée,c’estuncodepourdire:«Continue,s’ilteplaît.»–EllealenouveauCallofDuty,alorsonajouéasseztard.J’aidormisurplace.–Elle teplaît ?demandai-je, sansm’inquiéterde savoir si j’étais indiscrète.C’étaitun

véritableprogrès, etCady semblait suffisammentexcentriqueet technophilepourquecelapuissemarcherentreeux.

–Elleestbien,oui,dit-ilenenfonçantnerveusementsesmainsdanssespoches.–Cool.J’essayaidetempérermonenthousiasme.–Eh,mercid’avoirmontélesmeubles!

Page 147: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Pasdesouci.C’étaitplutôtamusant,enfait.–Iln’yaquetoipourpenserunetellechose,dis-jeensouriant.Ilhaussalesépaules.–Probablement.Etcomments’estpassétonvoyage?J’hésitaiun instant.Comment censurer la suited’événementsqui composait ce rapide

aller-retour?UneexdeBlakequimemenace,desretrouvailles inattenduesavecBlake, lecrescendodeladécouverteduproblèmededroguedeHeathetsesconséquencesinconnuessurAlli.Ellen’avaittoujoursréponduniàmesappels,niàmestextos.

–J’aifaitquelquesrencontres,dis-je,sansallerplusloin.AllietSidn’avaientjamaisétéréellementproches,etSidavaitmieuxàfairedansl’entreprisequespéculersursasituationoumêmesimplementécouterlerécitdesesproblèmes.

–Trèsbien.Ilsignalaqu’ilseretiraitdanssacaverneensetapotantlefront.Jel’arrêtai.–Eh,jepourraisbienavoirbesoindetonaidepourquelquechose.Ilfitvolte-face,revintversmoi.–Quoi?–Attendslà.Je retournai dansma chambre et pris la photodans la boîte. Lorsque je revins, je la

plaçaidevantlui,surlecomptoir.–Quiest-ce?–C’estmamère.Et là,dis-jeen indiquantdudoigt l’hommeàcôtéd’elle,cepourrait

bienêtremonpère.Sonregards’alluma,courutàplusieursreprisesentrelaphotoetmoi.–Qu’est-cequecelaaàvoiravecmoi?–J’aibesoinquetum’aidesàdécouvrirquiilest.–D’aprèscettephoto?–IlétaitàHarvardavecmamèreen1991.Cefaitetcettephotosonttoutcequej’ai.Sidpritlecliché.Ilplissalefrontetpinçaleslèvres,uneexpressioncourantequandil

réfléchissait,etunebonneindicationqu’ilpouvaitetallaitm’aider.–Tuasuneidée?demandai-jetimidement.–Àmoins qu’Harvard nemaintienne une quelconque version publique de la base de

donnéesnumériquedesesanciensélèves,cedont jedoute, jevaisavoirbesoinde trouverunmoyen d’y accéder autrement. Puis faire tourner un logiciel de reconnaissance facialedécent,ettravailleràpartirdelà.

–Tucroisquec’estfaisable?Ce que je lui demandais impliquait probablement un accès franchement illégal. J’en

étais déjà rongée de culpabilité. J’aurais tout aussi bien pu consulter les annuaires de la

Page 148: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

bibliothèque et trouver lamême information,mais laméthode de Sid était probablementplusrapideetplusprécise.

Ilinclinalatête.–Cetypeestvraimenttonpère?–J’aimeraislesavoir.–D’accord,jetetiendraiaucourantdecequejetrouverai.Ilretournadanssachambre,emportantlaphotoaveclui.Je ramenai mon attention à mon ordinateur. J’avais encore cent choses à faire, y

comprisépluchertouslesCVquej’avaisreçusdepuisl’annoncepubliéepourlepostevacantd’AlliavantmonséjouràNewYork.Saufquej’étaistotalementincapabledemeconcentrer.Combien de temps sa recherche allait-elle prendre ? Et si Sid le trouvait en seulementquelquesheures?Ous’ilneletrouvaitpasdutout?Jemerongeailesongles.

Mon téléphone sonna, me faisant presque jaillir de mon siège. Le numéro étaitsauvegardéetjelereconnusimmédiatement.

Jeprisuneprofondeinspirationetrépondisavecentrain.–Bonjour,Isaac.J’étaisheureusedecettedistractionfortbienvenue.–Êtes-vouslibrepourdînercesoir?demanda-t-ild’unevoixplaisante,quimerappela

àquelpointilétaitcharmant.J’hésitai.–Jen’ensuispascertaine.Pourquoi?–Jeprendsl’avionpourBostoncetaprès-midi.Jemesuisditquenouspourrionsnous

voirpendantquej’étaisenville.–Oh,biensûr!Je culpabilisais encore d’avoir annulé à la dernière minute, sans excuse réellement

crédible. Pour ce qu’il en savait, il s’était passé quelque chose dans mes affaires quim’imposaitderepartirprécipitamment,àl’aube,undimanchematin.

–Génial.Pouvez-vousmeretrouverauParkPlaza,vers18heures?–Parfait,onsevoitlà-bas.Je raccrochai. L’enthousiasme de revoir Isaac retomba, de savoir que je raterai un

simpledîneravecBlake,chezlui.Ilmemanquaitdéjàtrop.J’étaisvraimentdésespérémentamoureuse de lui. Et alors ? J’allais cesser de battre ma coulpe à chaque pas quim’entraînaitplusloindansnotrerelation.Sijedevaistomberéperdumentamoureuse,alorsjeleseraissansréserveetsansregret.

Je jetai un coup d’œil à la pendule, ne réfléchissant guère qu’une seconde avantd’envoyeruntextoàBlake.

E:Puis-jepassertevoiraubureau?

Page 149: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

B:Jet’enprie.

Je me changeai pour une jupe droite beige et un chemisier blanc à boutons, unecoiffure lisse et élégante. Je me regardai dans le miroir, satisfaite d’avoir l’air assezprofessionnellepourdîneravecIsaacetassezsexypourdonneràréfléchiràBlakependantquej’étaispartie.

Blaken’étaitpasdans l’open space lorsque j’arrivai. Personneneparutme remarquer,alorsjeretournaiverssonbureau.Ilétaitinstallédevantsonsystèmeàtroismoniteurs.Lesécrans télé diffusaient les valeurs boursières et les chaînes d’info, le son coupé, de l’autrecôtédelapièce,merappelantpourquoil’électroniqueétaitbanniedesonappartement.

Jerefermailaportederrièremoi.Ilsetournadanssonfauteuil.–Etàquoidois-jeceplaisir?Ilselaissaallerenarrièreavecunsouriremalicieux.–J’aiundînerprofessionnel,cesoir.Jem’avançaijusqu’aubureausymétriquesurlequelilétaitparfoisforcédetravaillerde

façonindigneavecdupapieretdel’encre,etm’assisdessus.–Alorsjemesuisditquej’allaispassertevoiravant.–Avecqui,lerendez-vous?–Perry.Ilserembrunit.–Cesalopardestunacharné.–Tuleconnais?–Jeleconnaisassezbienpoursavoirquetuluiplais.Je risde saprésomption flagrante.Mêmes’ilpouvaitnepasavoirentièrement tort, il

n’avaitaucunepossibilitédelesavoir.–Tusaisàquelpointtupeuxavoirl’airdingue?Il ignoramaremarqueetpassasesmainsderrièremesgenoux,et les tirapourrouler

versmoi.–Tuneveuxpasquejevienneavectoi?Jepeuxêtretonassocié.Monsourires’évanouit.–Jenecroispasquecesoitunebonneidée,Blake.–Pourquoi?Ilseconcentrerasurlesaffaires,etjen’auraipasàm’inquiéterpourtoi.–D’abord, tun’es pasmonassocié, et ensuite, je ne crois pas que tu aies lamoindre

raison de t’inquiéter. Il a l’air tout à fait professionnel, et je préférerais pouvoir parlerlibrement.Tusais,faceàface.

Ilmedévisageadurement.–Tuessûredecela?

Page 150: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

D’uncoupdereins,jeglissaidubureau,etallailechevauchersursonfauteuil.– Tu dramatises, murmurai-je. Je l’embrassai dans le cou, déjà ivre de son odeur. Il

sentait lepropreet leBlake,unesenteurunique.Jesaisis le lobedesonoreilleentremesdentsetlemordillaidoucement.

Ilprituneinspirationrauque.J’accrochaimes doigts aux passants de son pantalon etme tirai plus près, avant de

glissermesmainssoussachemise.Sesmusclesétaientdursetimpitoyables,unpeucommesonhumeurdumoment.

– Que puis-je faire pour te rendre le sourire, Blake ? demandai-je en jouant avec leboutondesonpantalon.

Ilattrapamamainavantquejenepuisseallerplusloin.–Riendetoutcela.Je croisai son regard. Il était sérieux, mais j’avais l’impression de pouvoir remporter

cettebataille.–Oh, j’oubliais. Tu as une réputation àmaintenir. Pas de baise au bureau, sinon tes

sous-fifresvontsemutiner,c’estça?Jem’efforçaidechassersonhumeurmaussadeenrestantbadine.Undébutdesourirepassasursonvisage.–Quevais-jebienpouvoirfaired’unelangueaussibienpendue?Jecouvrissonmentondepetitsbaisers.–J’auraisbienquelquessuggestions.Je passai mes lèvres sur les siennes tandis qu’il remontait ma jupe le long de mes

cuisses. Jememis à haleter,mondésir pour lui déjà enfiévré. Il glissa samain entremesjambesetmetitillaàtraversmaculotte.

Jegémis,mecollantàsamain,monclitodéjàavidedesoncontact. Ilécarta le tissu,m’ouvritetglissaentremeslèvres.

–Tuesprêtepourmoi,murmura-t-il.–Toujours.Jetournailégèrementlebassin,anticipantsesmouvements.Ilavançadeuxdoigts,effleuramonclito,puislesplongeadansmachatteetcaressade

nouveaumonclitodupouce.Ilrefitlemêmeparcoursencoreetencore,jusqu’àcequemoncorpsentiersetendesouslapression,sebalançantdangereusementauborddugouffredel’extase.

–Jouis,Erica.Maintenant.Jeveuxsentirtapetitechatteavidesefairetoutedouceetserrée.

Jem’agrippai à ses épaules. Je ravalai un cri etme convulsai contre son corps,monsexe se contractant presque douloureusement. De mes mains tremblantes, je me débattisavecsabraguette,déterminéeàchangercetétatdefait.Sonérectiontendaitsonjean,seule

Page 151: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

barrière entre nous. Ilm’attrapa de nouveau par les poignets,me retournant les paumesverslecielpourdéposerunlentbaiserhumidedanschacune.

–Blake,gémis-je.–Ilfautquetuaillesàtonrendez-vous.Sa voix était mesurée lorsqu’il lâchamesmains. Il soutintmon regard et plongea le

boutdesesdoigtsdanssabouche,suçantlespartieshumidesquejechevauchaisquelquesinstantsplustôt.

Putaindemerde.Moncœurseserra.–Nous avons le temps, dis-je enme redirigeant vers sa braguette. Après tout, j’avais

prévumesdéplacementsenprenantcelaencompte.–Lève-toi,ordonna-t-ilenmedonnantunepetiteclaquesurlesfesses.Àcontrecœur,jemeredressaietm’appuyaiàsonbureautandisqu’ildisparaissaitdans

la salle de bains attenante. Il revint avec un gant humide etme lava, un geste à la foistendreetexcitant.

–Suis-jepunie?demandai-je,perplexedevantsarésolution,d’autantqu’ilétaitévidentqu’ilenavaitautantenviequemoi.

–Non.–Tuasenviedemoi.Jemassaisonsexeàtraverssonpantalon.Ils’écarta.–Oui. Tu vas juste devoir te presser de rentrer de ton rendez-vous pour voir à quel

point.Ilfitvolte-faceetretournadanslasalledebains.Résignée face à la fin de notre tête-à-tête, je me redressai. Je défroissai ma jupe et

m’efforçaidemeremettre–physiquementetémotionnellement.Passerdumode-baise-Blakeaumode-travailétaitunetransitiondifficile,quandlaseulechoseàlaquellej’étaiscapabledepenserétaitcequej’auraisressentis’ilm’avaittringléesurlebureau.

Jepassaimesdoigts sur la surfacedumeuble, faisant tintinnabuler les pendentifs demesbracelets.

Blake revintderrièremoietpressa soncorps chaudcontre lemien. Ilm’embrassa surl’épaule.

–Ilfautquej’yaille,dis-je,monaffirmationrésonnantquelquepartentrefrustrationetdésespoir.

–Reviensvite.Laprofondeurdesavoixvibraenmoi.–Plusj’attendrai,plusjetebaiseraifort.J’eneuslesoufflecoupé.Messeinsétaientgonflésetlourds,avidesdesesmains.Jeme

pressaicontreluiàmontour, laissantéchapperungrognementrauque.Puisilnefutplus

Page 152: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

là.Jemeretournaipourledécouvrirdevantleminibar.Ilseservaitunscotchenregardantparlafenêtre.

J’étais trop fière pour le supplier, et je n’avais pas envie d’analyser les raisons pourlesquellesil insistaitpournoustorturer.Nousfinirionsplustard,maisenl’instantj’avaislefeu. J’allais compter lesminutes jusqu’à la findu rendez-vous.Évidemment, c’était ce queBlakevoulait.Quepouvais-jeattendred’autred’unhackerautoritaireetobsessionnel?Touslescoupsluiétaientpermis.

***

Entre les antiquités restaurées de l’hôtel, les chandeliers, les moulures couronnéesdoréesetlamusiquedeSinatraquisedéversaitdanslehall,j’auraistoutaussibienpumetrouverdansunfilmduRatPack.

Isaac se leva d’un fauteuil club à l’autre bout de la pièce. J’allai à sa rencontre,mestalonsclaquant sur le soldemarbre. Ilportaituncostumeonéreux,mais sachemiseétaitdéboutonnée au col. Cela et son sourire conquérant lui donnaient un air décontracté etaccessible.

Lorsqu’onfutfaceàface,ilsepenchapoursimulerunebisesurlajoue–ungestequimerappelaunpeutropSophia.

–Oùallons-nous?demandai-je,impatientededébuterlaréunion.–AllonschezMaggiano’s.C’estjusteàcôté.Ontraversalaruepourentrerdanslespacieuxrestaurantitalien.S’installantdansun

boxetfaceàmoi,Isaaccommandaunebouteilledevinàlaserveusequinousaccueillait.–Comments’estpasséelajournée?demandai-jeaprèsqu’elleeutdisparu.– Plutôt bien, rien de remarquable. Pour être honnête, je n’aurais probablement pas

faitlevoyagesanscetteoccasiondevousretrouver.–Oh!Alors,jesupposequetouts’estbienpassé.J’étalai ma serviette sur mes genoux, lissant distraitement des doigts les plis de ma

jupe,encoreunpeufroissée.–Alors,dites-moi.Pourquoidirigez-vousvotreentreprisedepuisBoston?Jeplissailefrontetcherchaiunebonneréponse.–Celafaitmaintenantdesannéesquejevisici.Jen’aipasvraimentenviedepartirtant

quecen’estpasnécessaire.–Ilyauraitbienplusd’opportunitéspourvousàNewYork.–Passuffisammentpourmefairepartir,jesuppose.Ilmeregardaavecunsourireoblique.–Alorsildoityavoirquelqu’unquivousretientici.Jemereculaiettapotaidesdoigtssurlanappeàcarreaux.J’essayaideconserverune

expression affable. Pourquoi insistait-il autant pour que la conversation prenne un tour

Page 153: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

personnel?Je n’avais jamais été très à l’aise dans ce genre de conversations. J’avais peut-être

besoin de partager un peu avant de plonger dans la logistique de la façon dont nouspourrionstravaillerensemble.

–Ilyaquelqu’unquimeretientici,oui.Lesprémicesd’uneidéeseformèrentalorsquejeprononçaiscesmots.–Etc’estluiquivouslesaofferts.Ileffleuramonavant-brasdesdoigtspourallertoucherlesbraceletsdontlesdiamants

étincelaientdemanièreimpressionnantedanslalumièretamiséedurestaurant.–Magnifique.Cecontact futunchoc–etpasenbien.Jerelevai lebraset remisnerveusementmes

cheveuxenplacederrièremonoreille.Jefrissonnai,regrettantdenepasavoirapportéunpull, quelque chose pour me réchauffer et me soustraire à ses regards aguicheurs. Jeregrettaisaussilechoixduchemisier,maintenant.J’avaisouvertunboutonpourBlake,etjenepouvaisplusrevenirenarrièresansquecelasoitembarrassant.

–Merci.Jegardaimonregardbasetmeconcentraisurlanourriturequivenaitd’arriver.–Quiestl’heureuxélu?–BlakeLandon.Vousleconnaissezpeut-être.Blakeavaitsapropreréputation,alorscelaallaitpeut-êtreledissuader.Ilgrimaçalégèrement.–Sansblague.JesupposequeSophiavousaavertie.Ilalaréputationdeviteselasser

desesjouets.Je laissai le commentaire glisser sur moi. La version de Blake des événements avec

Sophia était compatible avec ce que l’on pouvait attendre de ce genre de relation et desituation.Ilnemedisaitpastoujourstoutelavérité,maisjenel’avaispasencoreprisàmementir.Parailleurs,j’avaisdumalàimaginerunepersonneaussifroideetcalculatricequeSophiavolantlecœurdequiquecesoit.

–D’oùconnaissez-vousSophia?demandai-je,mefigurantquej’allaisprofiterdecetteopportunitépourenapprendreunpeuplussurelle.

–Nousutilisons régulièrement sesmodèlespour les séancesphotodebonnombredenospublications,etparailleurs, c’estune femmed’affairesavisée,commevous.Vousavezraisonderesterencontactavecelle.

Je me hérissai, et les couleurs de la salle me parurent temporairement plus viveslorsque je me la représentai mentalement. Si jamais elle touchait Blake, j’entreraislourdementencontactavecelle.

Isaacme lassait avec toutes ceshistoirespersonnelles. J’avais besoindeme recentrer.Peut-êtrequeBlakeavaiteuraison.S’ilavaitétélà,Isaacauraitétéplusconcentré,encore

Page 154: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

quelaconversationauraittoutaussibienpuprendreunedirectionfortembarrassante.Jeprisunelongueinspirationettentaideramenerlaconversationànosaffaires.–Vousm’aviezditquenouspourrionstrouverdiversesfaçonsdetravaillerensemble.Je

medemandecequevousaviezentête?Ilsourit.–C’estvouslaspécialistedesréseauxsociaux.Qu’aviez-vousentête?Latensionretombaunpeu,commej’avaisl’occasiondemeconcentrersurlesaffaires.

Je lui posai des questions sur lamécanique de sa stratégie commerciale. Il en connaissaitmal les détails, mais je finis par me faire une bien meilleure idée de la façon dont sesdépartementsétaient structuréspourchaquepublication.J’entrevoyaisplusieurs façonsdetravaillerensemble.

On passa l’heure suivante à discuter des aspects d’une promotion croisée de sespublications, et des outils utilisés par Clozpin. Le projet semblait prometteur et Isaacréceptif.J’acceptaiderédigerunepropositiondéveloppantlesoptionsdontnousvenionsdediscuter.

Une fois ma vie privée hors champ, la conversation devint productive, et mêmeagréable.OnterminalePinotgris,etjeluirecommandaid’autresadressesàBostonpourlesprochainesfoisoùilseraitenville.Lesilenceretombaalorsquenousattendionsl’addition.Jeregardail’heuresurmontéléphone.Ils’étaitécoulépresquetroisheures.Blakeallaitêtrefurieux.

Lorsqu’onquittalerestaurant,lesoleils’étaitcouchéetj’étaisplusdétendue,grâceauvin.L’airétaitchaudlorsquejem’engageaidanslarue.JemeretournaiversIsaacpourluidemander dans quelle direction il partait. Dans le mouvement, je perdis l’équilibre etbasculai.Isaacmerattrapaetmeserracontresapoitrine.

–J’aipasséuntrèsbonmomentavecvouscesoir,Erica.Savoixétaitbasseetrauque.Sontonauraitfaitfondren’importequellefemme,maisil

futpourmoicommelecrissementd’unonglesuruntableaunoir.Celan’avaitriendebon,mêmeaprèsavoirachevéledînersurunenoteaussipositive.

–Merci,Isaac,maisje…Ilétouffamonobjectionenimprimantunbaiserinopinésurmeslèvres.Jemepétrifiai

lorsqu’ilplongeasalanguedansmaboucheetsaisitmesfesses,serrantsonbassincontrelemien.

Jecriaidanssaboucheenessayantdereprendremesappuispourlerepousser,maisilme maintint fermement en place. J’essayai de me débattre, toutes alarmes hurlantes.L’adrénalinemonta puissamment enmoi.Mon corps vibrait du besoin de se battre, de lechasserdemoiaussivitequepossible.Moncerveauhurlaitdesordres,maisà l’opposédetousmesinstincts,j’hésitai,espérantqu’ilallaitsimplementmerelâcher.

–Pourquoinepasretourneràl’hôtel?

Page 155: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Lâchez-moi,Isaac.S’ilvousplaît.Celanepeutpassereproduire.S’ilvousplaît.Ilrit,unbruitmalsainquimetransperça.–TucroisvraimentqueLandonenaquelquechoseàfoutredetoi?Jebouillonnaidefureuretmepréparaiàlefrapperdugenoudanslescouillesquandil

s’immobilisa.–Perry!Lavoixgraveprovenaitdederrièremoi. Isaacmelâcha,s’écartant immédiatementde

moi. Il reculavers lemurdepierredubâtiment.Enunéclair,Blakefutsur lui, leclouantparlagorgeàl’immeuble.

Isaacbafouillaunesuited’excuses.–Elleesttombée,jen’aifaitquelarattraper.Cen’étaitrien,jetejure.–Çan’avaitpasl’aird’êtrerien.Jeregardaidesdeuxcôtésdelarue.Lanuitétaittombéeetnousétionsseuls.Encore

sous lecoupde lapanique, jem’efforçaidereprendremarespiration,mais jenecessaidemerépéterquej’étaisensécurité.Blakeétaitlà,etapparemment,Isaacn’avaitpasl’ombred’unechance.Enquelquessecondes, ilavaitétéréduitàunpathétiqueramassisd’excusestandisqueBlakecontinuaitdel’étrangler,lemenaçantdupire.

–Elleestàmoi,Perry.Etsituposeslamainencoreunefoissurelle,tun’aurasplusdemains.C’estclair?

–Oui.Oui,absolument.Il desserra juste assez son étreinte pour le plaquer une nouvelle fois contre le mur.

Isaactoussait,agrippantlamaindeBlakesursagorge.Jenel’avaisjamaisvuàcepointencolère.Pascommecela.Blakefinitparlerelâcher.–Dégage,ordonna-t-il.Isaacdisparutdanslarue,endirectionduParkPlaza.Blakesetournaversmoi,levisagedurcommelapierre.

Page 156: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitredix-sept

JesuivisBlakelelongdelaruejusqu’àl’endroitoùsonélégantevoituredesportétaitgarée.Combiendetempsm’avait-ilespionnée?Commentavait-ilmêmesuoùnousdevionsnous retrouver ? Son étrange connaissancedemesdéplacements était troublante,mais jen’allaispasenparlermaintenant.

Ilouvritlaportièrepourmoi,parsimplegalanterie,jesuppose,puisqu’ilneditpasunmot lorsqu’il me rejoignit dans la voiture et roula à bonne vitesse les quelques pâtés demaisonsquinousséparaientdel’appartement.Ondescenditetjem’arrêtaidevantl’entrée.

–Tuesfâchécontremoi?– Je ne suis pas heureux de t’avoir trouvée en train d’échanger un baiser avec ce

salopard,sic’estcequetuveuxdire.–Ilajuste–jenevoulaispas.– Je le sais, mais tu ne te serais pas retrouvée dans une telle situation si tum’avais

écouté.Je grinçai des dents, reconnaissant qu’il avait raison. Tout dans cette situation me

gênait.–Ilm’apriseparsurprise.J’auraispum’enchargersitum’avaislaisséletemps.–Serais-tualléedîneravecMaxentantqu’investisseur?Jetapaidupiedsurletrottoir.C’étaitunequestionpiège.–Blake,tunepeuxpasm’accompagneràchaquerendez-vousprofessionnel.C’estune

impasse.–Réponds-moi.J’hésitai.–Peut-être.–C’estcequejepensais.Jevaisfinancertonentreprise.J’appelleraiMaxetjeluidirai

quel’affairenesefaitplus.Ilfouilladanssapoche.–Non,arrête-toitoutdesuite.C’estmonentreprise.Cesdécisionsm’appartiennent.

Page 157: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Je venais à peine de cesser de trembler suite aux avances d’Isaac. Maintenant, lamenace de Blake appelant Max dans des circonstances aussi extrêmes augmentait mapaniqueàunniveauautrementplusélevé.Monesprits’emballa,cherchantfrénétiquementànepasperdrepiedlàoùBlakenousentraînait.

–Effectivement.Ettuasbesoindedeuxmillionsdedollarspourcontinuerdeladirigeretconservercestyledeviequetuappréciestant,rétorqua-t-il.

Jem’immobilisai.– Est-ce que tumemenaces avec l’appartement ? Un seulmot, et je faismes valises

maintenant.C’esttoiquim’asforcéeàm’yinstaller.Il passa ses mains dans ses cheveux déjà ébouriffés, son souffle sifflant à travers ses

dentsserrées.–Prendsjustel’argentetonpourraoubliertoutcela.–Blake,nousavonsunerelation–dumoinsnousenavionsuneilyavingtminutes–,

ettuesd’accordpourdirequ’elleestdéjàcompliquée.Jeneprendraispastonargent.Ilmarquaunepause,mefixantdesonregardpénétrant.–Tunemefaispasconfiance.Ses paroles furent comme un coup de poignard. Non pas parce qu’il avait cette

impression,maisparcequec’étaitvrai.JefaisaisconfianceàBlakesurcertainspoints,maisgarderlamaîtrisedemonentrepriseétaitimpératif.

Incapablede formuleruneréponseconvaincante, jepoussai laportede l’immeubleetmanquaideheurterCadyetSidquientraientdansl’appartementdecettedernière.Blakeseprécipita à ma poursuite. Je plaçai un rapide bonsoir et au revoir avant de monter lesescaliersversmonappartement.Blakemesuivitjusqu’àlachambre.Jenem’yopposaipas.

–Ôtetesvêtements,ordonnai-je,enledirigeantdel’index.Mon esprit n’était plus qu’un fatras épique. Je ne voyais pasmeilleur remède que de

baiserBlakejusqu’àl’os.Detoutefaçon,jen’avaispaspenséàgrand-chosed’autrelaplusgrandepartiedelajournée.

Sessourcilssefroncèrent.–Ondevraitpeut-êtreenparler?–Est-cequej’aibégayé?Ôtetesvêtements!J’inclinailatête,ledéfiantd’osercontester.Il hésita encore une minute, puis il se dévêtit complètement. Son dernier vêtement

tombaparterre, je toisaiavecfascination lespécimenquiétaitdevantmoiàmamerci.Sachairtenduesurdesmusclessculpturaux.Mesdoigtsmedémangeaientdelescaresser,delessentirsetendresousmoi,surmoi,enmoi.Macolères’évanouit,rapidementremplacéeparledésirquej’avaiscombattudesheuresdurant.

Plusjeleregardai,plusilbandait.Sonvisageétaitcalme,maisledésirquibrillaitdanssesyeuxreflétaitlemien.Jem’approchaietlefistomberd’uncoupsecsurlelit.Iltenditles

Page 158: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

brasversmoi,mais jemereculai. Jemedéshabillai,pris toutparticulièrementmon tempsavecmonensembledelingerieblancendentellechoisijustepourlui.

Je le montai à mon rythme, embrassant méthodiquement son cou, sa poitrine,mordillantlesdisquessombresdesesmamelonsquidurcissaientàmoncontact.Jefinisparme tournervers sonmembre, le léchant sur toute sa longueuretaspirant lagoutteletteàson sommet, en savourant le goût avant de le glisser progressivement dans ma bouche,jusqu’àcequ’iltouchelefonddemagorge.

–BonDieu,Erica!Ilinspirabruyamment.Jeme délectai de cette petite victoire. Il était bienmeilleur quemoi au jeu du sang-

froid, il n’avait jamais laissé paraître que je le torturais à petites touches jusqu’alors. Sescuissesétaienttenduesparlaretenuelorsquejelelibérai,lelaissantlentementglisserhorsdemabouche.

–Commenttesens-tu?demandai-je.–Vienslà,etjetemontrerai.Sesyeuxétaientmi-closetsombresdedésir.Moncorpsvibrait.Jememisenpositionau-dessusdesonsexeetdescendislentement,

laissantmoncorpss’ajusteràsonformat.Unevaguedechaleurmeparcourutlorsquejel’engloutiscomplètement.Jemerelevai

etilmesaisitparleshanches,meramenad’uncoupsurlui,merappelantl’espaceenmoiqueluiseulpouvaitsatisfaire.Jerejetailatêteenarrièreetjurai.Jem’immobilisai,fascinéede voir à quel point nous nous complétions, à quel point personne d’autre ne s’en étaitmêmeapproché.

Ilpritmeshanchesetvoulutmeretourner,maisjel’enempêchai.–Non,dis-jed’untonferme.Ils’arrêtaetrelâchasonemprise.–Ilestpeut-êtretempsdeparlerd’uncodedesécurité.–C’estmoncodedesécurité.Quandjedis«non»,crois-moi,celaveutdirenon.–D’accord,dit-ildoucement.–Jevaistebaiserjusqu’àquelesjambesm’entombentetquejenemesouvienneplus

demonnom.Etensuite,tupourrasêtreauxcommandes.D’accord?–Toutcequetuveux,chef.Il déglutit et entrelaça ses doigts derrière sa tête – une contrainte additionnelle

librementchoisie.Je fis tourner mes hanches, m’élevant et retombant avec une force mesurée jusqu’à

trouver le bon rythme. Je pinçaimesmamelons pour satisfaire leur profond besoin d’êtretouchés.LesmainsdeBlakenes’écartèrentjamais,etilnemequittapasdesyeux.Sesreinssesoulevèrent,accompagnantmesmouvementsetmefrappantplusfortàchaquefois.La

Page 159: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

jouissancemontaitenmoi.Jetremblai,memordis la lèvre jusqu’à l’anesthésier,prisedansunorgasmequicontinuaitdecroîtrejusqu’àsonpointculminant.

–Jeveuxt’entendre,dit-il.Maintenant,Erica.Ladiguecédaetuncriétranglém’échappalorsquejejouis.Sanssouffleetsansforce,

jetombaienavant,liaimesdoigtsauxsiensetl’embrassai.Blake s’assit surmoi, prit unmamelon dans la bouche puis l’autre, et s’enfonça plus

loin en moi. Je gémis. Il prit mon visage d’une main et enlaça ma taille de l’autre, meserrantfortcontreluietm’embrassant–unbaiserlongetpénétrantquivoulaittoutdire.Jepouvaissentirsondésirjusquedansseslèvres.J’étaisplusqueprêteàlelaisserprendrelecontrôle.

–C’estbon,dis-je.Ilnousretournad’ungestemesuré,couvrantmoncorpsaveclesienavantdes’élancer

violemment.Jemecambrai,accueillanttoutcequ’ilavaitàmedonner.Jemedécomposaiàchaquecoupdeboutoir, toutescesheuresà ledésirermenantàcetapex,àcepinacledel’instantoùjepouvaismeperdreenlui.

Je l’embrassai avec frénésie, prise entre colère, amour et passion. Mes ongles luigriffèrentledosalorsquel’onjouitensemble,luisantsdesueur.

Blakeenfonçasonvisagedansmoncou.–Tum’appartiens,chuchota-t-il.Jefermailesyeuxetleserraicontremoi.Ilnesavaitpasàquelpointc’étaitvrai.On resta étendus sur le lit, essoufflés et rassasiés, côte à côte. J’admirai son corps

incroyable étalé à côté de moi. Je passai doucement le bout des doigts sur les chairssaillantesdesondos,làoùjevenaisdelegrifferplusprofondémentquejenel’avaisvoulu.

–Jet’aieu,murmurai-je.–Situcontinuesdemetouchercommeça,c’estmoiquit’aurai!Je gloussai et roulai sur le dos, fascinée par l’instant, et incapable de détachermon

regarddecethommesplendidedansmonlit.Ilseredressaetmedévisagea.– Au fait, c’était incroyable, dit-il. (Il repoussa mes cheveux derrière mon oreille,

dessina mes courbes comme s’il les mémorisait.) Comment se fait-il que tu me fassesconfianceàcepointavectoncorps,aprèstoutcequetuasvécu,etquetunemefassespasconfiancepourlagestiondetonentreprisealorsquej’enaicrééetvendudesdizaines?

Jegrommelaiet fermai lesyeux. Iln’allaitpas laisserunepetitebaise l’interrompre. Ill’utiliseraitplutôtàsonavantage.

–Monentrepriseesttoutpourmoi.(Jegrinçaidesdentsenl’avouant,maisc’étaitvraiàplusieurségards.)Jeveuxdire,cetteboîtereprésentedesannéesd’efforts.Passeulementparletempspasséàlacréer,maisaussiparlesannéesconsacréesàmesétudesetàdevenirquijesuis.

–Oui,et…

Page 160: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Quandnous sommesensemble, cela veutdirequelque chosepournousdeux. Je tefaisconfiance,plusqu’àn’importequi.Maiss’ilsepassaitquelquechoseentrenous,ousitutelassaisdemapetiteaffaire?Ousielledevenaitungouffrefinancierouqu’ellecapotait?

–Lemontantquetudemandesestsansconséquencepourmoi.Ilestfortpeuprobable,voireimpossible,queceladevienneungouffre.Et jenelaisserai jamaisunesociétéquej’aifinancées’effondrer.

– Alors pourquoi n’as-tu pas tout simplement investi quand tu en avais l’occasion ?Quelleestladifférenceparrapportàmaintenant,sinonquetudeviensfoufurieuxdèsquej’approcheunautrehommeàmoinsdetroismètres?

–J’avaisplusenviedeteconnaîtrequedetefaireunchèque.Et jesavaisquesi jenem’engageaispas,Maxleferait.J’avaisraison.Maintenant…leschosesontchangé.Jetiensàtoi,etjeveuxprotégercequiadel’importancepourtoi.

La proclamation s’imprima en moi, et une infime partie de moi voulut même céder.J’avais passé des semaines à douter du potentiel de ma société parce qu’il avait aussifacilement refusé, alors il était rassurant de savoir qu’il y avait vu une valeur depuis ledébut.Maiscelanechangeaitrienaufaitquemélangeramouretaffaires,aumoinsàuntelpoint,étaitunetrèsmauvaiseidée.

– J’apprécie tout ça, mais ce n’est pas une bonne raison d’investir. Il est déjàproblématiquequetoietMaxayezdesdifférends,etjeneveuxpasquemonentreprisesoitendifficultésidestensionsdevaientexisterentretoietmoi.Ceseraitterrible.

Ilrestasilencieux,maisjesentisquecetteconversationétaitloind’êtreterminée.Ilmerapprochadeluietmeserracontresapoitrineoùjem’endormis,auchaudetensécurité.

***

Je vérifiai mes mails au réveil, encore épuisée par la nuit. Blake m’avait réveillée àplusieurs reprises, peut-être avec l’idée de me baiser jusqu’à ce que je cède, pourl’investissement. Jenem’yétaispasopposée,mais jen’avaispascédé,dumoinsencequiconcernaitl’investissement.

Je survolaimesmails jusqu’aumoment où j’en vis un de Sid titré « Résultats ».Monestomacseserraquandjelelusetlerelus.

Erica,

Moins difficile que j’avais cru. Daniel Fitzgerald, diplômé en 1992, économie.Lanceunerecherchesur«DanielFitzgeraldBoston».Sid.

Page 161: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

J’ouvris un nouvel onglet et lançai ma requête. Le premier résultat affichait des

biographiesd’avocatspouruncabinetd’avocatsdans lequel ilapparaissaitd’abordcommeassocié. Le deuxième résultat était le site officiel de la campagne électorale de DanielFitzgerald pour le poste de gouverneur du Massachusetts, orné d’un logo stylisé rouge,blancetbleu,etd’unslogandecampagneaccrocheur.Endessouss’affichait l’imaged’uneversionplusâgéedel’hommedelaphoto.

MonDieu.JemeprécipitaisurmontéléphoneetappelaiMarie.–Monbébé,répondit-elled’unevoixenjouée.–DanielFitzgerald,dis-je.–Quoi?–C’estl’hommesurlaphoto.–Oh.(Elleparutplusrésignéequesurprise.)–JesaisqueMamanavaituneraisondenepasmeledire,maisj’aibesoindesavoir.–Erica,je…–Marie,j’ailedroitdesavoir.Tuétaissameilleureamie.Siquelqu’unsaitquiestmon

père,c’esttoi.Ellerestasilencieuseunlongmomentavantderépondre.–Oui.–Ouiquoi?–C’esttonpère.–MonDieu!Mon visage tomba dansmamain, la têteme tournant soudain. J’avais des soupçons

jusque-là,évidemment,maisjem’étaispréparéeàuneréponsenégative.Qu’ellemente,ouqu’elleme dise que j’étais folle de croire en quelque chose d’aussi saugrenu.Maintenant,confrontéeàlavérité,jenesavaisplusqueressentir.

J’avais vécuma vie entière en acceptant l’ombre de son absence, en ignorant l’autremoitié de qui j’étais. Mais l’avais-je jamais réellement accepté ? J’étais aujourd’hui assezmûrepourvéritablementexigerdesavoir lavérité,etmamèreétaitdécédée.Sachantquepersonne ne la remplacerait jamais dans mon cœur, je ne m’étais jamais sérieusementdemandéquiilpouvaitêtre.

Maintenant, j’avaisunmillierdequestionsetaucuneréponse.Savait-ilque j’existais?Aimait-ilmamère?Quelgenred’hommeétait-il?

Marieinterrompitleflotdemespensées.–Tuvasbien,monbébé?–Tusaisqu’ilseprésentepourlepostedegouverneur?La seule chose que je connaissais de lui était ce qui pouvait nous séparer. Je n’avais

aucuneidéedelafaçondontjepouvaism’introduireàtraversl’aréopagequil’entourait.Elleritdoucement.

Page 162: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Non,jenelesavaispas,maisjenesuispasvraimentsurprise.–Ilnevapasêtrefaciled’entrerencontactaveclui.–Faisbienattention,monbébé.Jefronçailessourcils.–Qu’est-cequetuveuxdire?–Tunesaispasdansquoitut’engages,aveclui.–Dois-jem’inquiéter?Tuensaisvisiblementplusquemoisurlui.–Tues intelligente.Contente-toide faireattention, etnebaisse jamais tagardeavec

lui,dit-elled’unevoixcalme.–OK.Jemarquaiunepause,m’efforçantderéfléchir.–Merci.–Pourquoi?–Pourm’avoirditlavérité.Mêmeavecunpeuderetard.Ellesoupira.–J’espèrequetun’auraspasàleregretter.J’agitainégativementlatête,incapabled’imaginercommentcelaseraitpossible.–Jenesauraispasdirecequecelasignifiepourmoi…desavoirfinalementqui ilest.

AvecMamandisparue…– Je sais,mon bébé, dit-elle doucement. Je suis désolée. Je n’ai fait que respecter sa

volonté.J’expirai longuement, surprise de ne pas ressentir un plus grand soulagement. Je

n’aimaispas l’idéequeMariem’avaitsi longtempscaché l’identitédemonpère,niquemamèreavaitvouluqu’ilensoitainsi.Mais jen’étaisplusunepetite fille.Aussieffrayantquecela puisse paraître, j’avais besoin d’en apprendre plus sur cet homme et sur ce qu’ilreprésentaitpourmamère.

–Ilfautquejetelaisse.J’aibesoinderéfléchir.Jeterappelletrèsbientôt.–Biensûr.Appellequandtuveux.Et,Erica…–Oui?–Faisbienattention.D’accord?–Oui,jetelepromets.JeraccrochaietgardailesyeuxfixéssurlaphotodelapageWeb.Jevoulaissavoirqui

étaitcethomme.Nonpasl’avocatoulepoliticien,maisl’homme.J’explorai le Net et appris tout ce que je pus sur lui – ce qui ne fit que renforcer

l’impression qu’il allait être difficile de le rencontrer. Je ne pouvais pas me contenterd’entrerdans sonbureauetdemeprésenter. L’idéede faireappel aux relationsdeBlakeme traversa l’esprit,mais je la rejetai aussitôt. Jen’avais aucuneenviede l’associer à toutcela,autantpourmonbienquepourlesien.

Page 163: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

JeparcourusmonrépertoireetappelaiAlli.Nousnenousétionstoujourspasparlé,etjefussurpriselorsqu’elledécroche.

– J’essaiede te contacterdepuisunmoment,dis-je enm’efforçantdenepasparaîtreaussiinquiètequejel’étais.

–Jesais,jesuisvraimentdésolée.J’aiétédébordéedetravail,ettoutecettemerdeavecHeathn’aidepasnonplus.

–Tuvasbien?Letéléphonerestauntempssilencieux.–Oui,jecrois.–EtHeath?– Il semble aller mieux. Il est à Los Angeles, et je ne peux pas aller le voir pour

l’instant,avectoutceboulot.–Oui…Jenepeuxmêmepasimaginertoutcequetuasdûaffronter.Ellerittristement.–J’imaginequej’auraismieuxfaitd’étudierlapsychologie,parcequ’êtreaveclui,c’est

commesortiravecdeuxhommescomplètementdifférents.–Saufquetuesamoureusedel’undesdeux.Ellesoupiraàl’autreboutdufil.–Crois-moi,jelesaisbien.–Alli, je sais que je n’ai pas été tonmeilleur soutien en ce qui concerneHeath,mais

j’espèrequetusaisquetupeuxm’enparler.Çaaétéunchocpourmoi,maisjeveuxêtrelàpourtoi.Tuestoujoursmameilleureamie.Jeneveuxpasquecelanoussépare.

–Merci.C’estimportant,pourmoi.Àl’évidence,jenepeuxriendiredetoutcelaàmesparents.Ilsdeviendraientfous.

–EspéronsqueHeaths’ensorteavantquetun’ysoisforcée.–Espérons…Jetapotaidesdoigtssurlecomptoir.–J’aidesnouvellesintéressantes.–Oui?–Jecroisquej’aitrouvémonpère.–Quoi?Tuessérieuse?–Parcontre,j’aibesoindetonaide.C’estunavocatimportant,etenplus,ilseprésente

pourlepostedegouverneur,alors jen’aipaslamoindreidéedelafaçondontjepourraisentrerencontactaveclui,tuvois,discrètement.J’espéraisquetuauraisquelquechoseàmesuggérer.

–OK.Voyonscequejepeuxfaire.JeconnaisdesgensauHarvardReview.Onpourraitproposeretorganiseruneinterview.

Page 164: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

L’humeurd’Alliavaitchangé.Elleavaitretrouvétoutsonentraind’avoirunenouvellemission.C’étaitvraimentunecommercialenée.

–Merci.–Pasdequoi.Maiscommentvas-tut’yprendre?Jememordillai la lèvre,etmonregardseperditdans levague.Commentallai-jem’y

prendre?–Difficileàdire.Jesuisexcitée, jesuppose,etnerveuse.Jen’aiaucuneidéedugenre

d’hommequ’ilpeutêtre.Maisj’aitoutdemêmel’impressionqu’ilfautquej’entreencontactavec lui. Jenepeuxpas resterassise làen sachantqui il est sansessayerdedécouvrir s’ilpeutavoirenvie,luiaussi,demeconnaître.

–Jesuissûrequec’estlecas.Jehaussailesépaules.–Peut-être.Jesupposequenousallonsfinirparlesavoir.– Je vais voir ce que je peux faire pour l’interview. Préviens-moi s’il se passe quelque

chose.–Jen’ymanqueraipas.Merci,Alli.–Derien.Jeterappelle.

Page 165: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitredix-huit

Nerveuse, je feuilletais unmagazine lorsque la splendide secrétaire blonde deDanielFitzgeraldmedonnalefeuvert.LesbureauxdeFitzgerald&Quinnétaientnichésaucœurduquartier financierdeBoston, et legrandbureaud’angledans lequel j’entraine laissaitpasplanerlemoindredoutesurlefaitquel’hommequisetrouvaitdevantmoiétaitl’undesresponsables les plus influents du paysage institutionnel de la ville. Vêtu d’un imposantcostumetrois-pièces,ilcompulsaitdesdossierssursonbureauàdoublecaisson,seslunettesdevueposéesauboutdesonnez.Iln’étaitpluslejeunehommeinsouciantdelaphoto.

–MonsieurFitzgerald,lesaluai-jed’unevoixhésitante.Il releva les yeux vers moi – miroir de mes grands yeux bleus. Ses cheveux étaient

grisonnants et son visage ridé,mais il demeurait bel homme. L’essence de l’homme de laphotorestaitreconnaissable.

–Jem’appelleEricaHathaway.Jeluitendislamain.Ilse levapour laserreret fitunsigneendirectiondessiègesdevantsonbureauavec

unsourireplaisant.–Erica.Asseyez-vous.Jeprisl’undesfauteuils,respirailerichearômeducuirbienentretenu.–Voyons.VoustravaillezpourleHarvardReview?Ilinclinaunsourcildansmadirection.–Ehbien,justement,àcesujet…Alli m’avait obtenu l’interview sous le couvert du célèbre magazine, et si cela ne se

passaitpasbien,quelqu’unallaitprobablementêtreviréàcausede la faveurqu’elleavaitdemandée.

Ilmeregardad’unairinterrogateur.J’avalaipéniblementmasaliveetprisunelongueinspiration.Adviennequepourra.–Est-cequelenomdePatriciaHathawaysignifiequelquechosepourvous?demandai-

jefinalement,enlefixantintensémentdesyeux.

Page 166: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Si lamention de ce nom avait un sens pour lui, il n’en laissa rien paraître, le visageferméetdénuéd’émotion.Sesyeuxbleusm’examinèrentsansrientrahir.

Ilregardanonchalammentsamontre.–Jen’ensuispascertain.Enquoiest-celiéàcetteinterview,jeunefemme?Savoixétaitposéeetincroyablementmaîtrisée.Je respirai difficilement en combattant une envie soudaine de vomir. Étais-je folle de

fairecela?Etsijemetrompais?SilesprésomptionsdeMarieétaientavérées?J’écartaimesdoutesetmeconcentraisurleprésent.Jeregardaimesmains,quiétaient

anxieusementnouéessurmesgenoux.–JesuislafilledePatriciaHathaway.J’espéraispouvoirvousenparler.Un long silence s’instaura entrenous,durant lequel la vérité s’imposaàmoi. J’en fus

transie.Se levant soudain, il traversa la pièce avec une aisance gracieuse, ferma la porte et

revints’installerdanssonfauteuil.Ilôtaseslunettesetlesjetasursonbureau,révélantunregardplusdur.

–Oùcelanousmène-t-il?Mon Dieu. Mes doutes firent place au fait indubitable que cet homme était

véritablementmon père. Je pouvais le sentir. Jem’agrippai au bord demon fauteuil, lespaumesdemesmainssuaientàprofusion.Ensilence,jepriaibrièvementlescieuxpourqu’ilnememettepasimmédiatementàlaporteaprèsavoirentenducequejem’apprêtaisàluidire.

–Jesuis…J’essayaidem’imaginerprononçantcesmots,maisilsrestèrentbloquésdansmagorge.

C’était fou et présomptueux. Mais c’était vrai. Je le savais. Et s’il ne me croyait pas ? Jefermailesyeuxetmelançaiavantdeperdretoutmoncourage.

–MonsieurFitzgerald,jecroisquejesuisvotrefille.Ilsereculadanssonfauteuil,mâchoireserrée,sonregardpénétrantlemien.Onresta

ainsipourcequimeparutêtreuneéternité.Moncœurbattaitdansmapoitrine.Toutétaiten suspensdans l’air à cemoment-là alors que je tentaisd’anticiper cequ’il allait direoufaire.

Ilexpiralentementetsepenchaenavantsursonbureau.–Bon,allons-y.S’agit-ild’argent?Sic’estlecas,decombienparlons-nous?J’essayaideparler,mais sesparolesm’avaient crucifiée. Il croyaitque j’essayaisde lui

extorquerdel’argent?Non.Non.Non.Merde.J’agitai frénétiquementlatêteenmemassant lebasdufront.

Leschosestournaientvraimentmal.–Cen’estpasdutoutça.Jevoulaisjustevousrencontrer,c’esttout.Jen’avaisbesoinderiendesapart.Dumoinspascommecela.

Page 167: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Ilhésitauninstantavantdes’inclinerdenouveauenavantpar-dessussonbureau.Ilsepinçalehautdel’arêtedunezensoupirant.

–Jenepeuxpasdirequejem’attendaisàcela.–Moinonplus,pourêtrehonnête.Jen’avaisjamaiscruquejevousrencontrerais.–Mêmechose.Écoutez,Erica. (Il s’éclaircit lagorgeet réorganisadespapierssurson

bureau.)Cen’estvraimentnilemomentnil’endroit,jelecrains.J’acquiesçai.–Jelesais.Jesuisdésolée…–Jesuisaubeaumilieud’unecampagneélectorale.Onorganisemontempsparquarts

d’heure,doncj’aiunautrerendez-vousquis’annonce.Jem’immobilisai quand je compris ce qu’il voulait dire. Si je n’étais pas unemenace,

alorsiln’avaitpasdetempsàmeconsacrer.Magorgeseserraetmesyeuxmepiquèrentdelarmesretenues.Quellepertedetemps.Unepartiedemoiavaitmistantd’espoirdanscetterencontre et se noyait maintenant dans de douloureux regrets. J’aurais dû m’en douter.C’étaitstupide,irréaliste.SiseulementMarienem’avaitpasmontrécetteputaindephoto…

–Jecomprends.(J’attrapaimapochette,espérantnepasparaîtreaussiblesséequejel’étais.)Çaaétéunplaisirdevousrencontrer,entoutcas.Bonnechancepourl’élection.

Jemelevaipour luiserrer lamainetbaissai lesyeuxenévitantsonregard.Jen’allaipas lui donner la satisfaction de voir combien j’avais mal. Il prit ma main et la tint uninstantdeplus.

–TransmettezmonbonjouràPatty,d’accord?–Elleestmorte.Mavoixétaitposée, sansémotion. Iln’yavait riend’étrangeàcequ’il lacroieencore

vivante.Ellem’avaitétéenlevéesitôt.Ilexhalaviolemment,laissanttombermamain.Uneémotiontraversasonregard.Ilse

frottalapoitrineengrimaçant.–Jenesavaispas.Jehochailatête.–Elleestdécédéequandj’avaisdouzeans.Cancerdupancréas.Etellen’apassouffert

longtemps.Mavoixétaitcalmetandisquejeprononçaiscesmots,neutreetobjective.Commesije

parlaisdequelqu’unque j’avais àpeine connu. Jemedétachaisdes émotionsdèsqu’ellesmenaçaient de se révéler. Ce n’était pas lemoment deme replonger dansmon deuil. Lachargeémotionnelledecettejournéeétaitdéjàbienassezintense.

–Jesuisdésolé.–Merci.Vousnepouviezpassavoir.N’est-ce pas ? Je tournai les talons pour partir, mais il m’arrêta, posant une main

puissantesurmonépaule.

Page 168: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Erica,attendez.Je fronçai les sourcils, mon cœur naviguant toujours sur les montagnes russes

émotionnellesdecesderniersinstants.–MafamilleetmoiallonsnousreposerunpeuàCapCodceweek-end.Nouspourrions

peut-êtreyfaireconnaissance?Parlerunpeuplusdetoutcela…–Biensûr,m’empressai-jederépondre.Jeprisuneprofondeinspiration,sentantcetteoffredéchargermesépaulesd’unlourd

fardeau.Parlait-ilsincèrement?–Excellent.Sonsourirecroisaceluiquis’étaitformésurmeslèvres.–MonsieurFitzgerald…–Vouspouvezm’appelerDaniel,jesuppose.Il haussa nerveusement les épaules. Il avait l’air plus humain, moins puissant que

précédemment.Jemedétendis,etunelueurd’espoirnaquitenmoi.– Daniel, je suis désolée pour mon approche. Je suppose qu’il n’y a pas de bonne

manièredefairecela.–Probablementpas.Ilretournaverssonbureau,inscrivituneadressesurunbloc-notesàsonen-tête,etme

tenditlafeuilledepapier.– Voici l’adresse de lamaison. Prévoyons d’y dîner vendredi soir. Vous pouvez rester

aussilongtempsquevouslesouhaitez.–Jesuisimpatiented’yêtre.Ilmeraccompagnaàlaporte.–Moiaussi.Jelesaluaid’unpetitsigne.Nousn’étionspasassezprochespournousétreindre.

Deretouràl’appartement,unverredevinenmain,jefiscoulerunlongbaindansla

baignoire sur pieds qui trônait au centre dema salle de bains. Évidemment, c’était lami-journée, mais ce n’était pas un jour ordinaire. C’était peut-être le jour le plus intense,émotionnellement,demavied’adulte,etilauraitcertainementpuêtrepire.

Letéléphonesonnaàcôtédemoi,mettantfinàcetinstantdebéatitude.–Allô!–Erica?C’estMax.–Oh,bonjour!Je me redressai dans la baignoire et cherchai du regard s’il y avait de quoi écrire

alentouraucasoùceseraitnécessaire.–Lemomentn’estpasmalchoisi?–Non,mentis-je, embarrassée de devoirmener une conversation d’affaires dansmon

Page 169: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

bain.–Ehbien, bonnenouvelle. Tout est prêt. Je relis les papiers en cet instantmême, et

nousdevrionspouvoirsignerdèsdemain.–C’estparfait.Jepeuxpasseraubureaudemainmatin,sicelavousconvient.Mesnerfsnesupporteraientpasd’attendrepluslongtemps.–Excellent.Jesuisvraimentimpatientdetravailleravecvous,Erica.–Jenevousremercieraijamaisassez.–Enfait,si.Remerciez-moiavecunretoursurinvestissement.J’eusunpetitpincementaucœur.–Jeferaidemonmieux,promis-je.–Oh,etd’undîner,cesoir?Jeveuxfêtercelaavecmanouvelleassociée.Jesouris,maismonentrainfuttempéréparlesouvenirdemondernierdînerd’affaires

quiavaitviréaucauchemar.Quellesétaientmeschancesd’enmenerunautreàbiensansqueBlakeneprofèredemenacesdemortnin’étranglequiquecesoit?

– J’ai déjà des engagements pour ce soir, mais que diriez-vous d’un déjeuner decélébration?C’estmoiquiinvite.

–Celameparaîtbien.Onsevoitdemain.On raccrocha, je me renfonçai dans l’eau chaude de mon bain, revigorée par cette

nouvelle soudaine que grâce à ces fonds,mon existence entière allait changer. J’avais faitprofil bas ces dernières semaines, dans l’attente de ce grand moment. Maintenant, d’iciquelquesheures,nousallionsavoirnotrefinancement,etallionspouvoiropéreràbienplusgrandeéchelle.J’auraidesemployés,unemassesalariale,delapaperasse,etdesproblèmesquejenepouvaismêmepascommenceràimaginer.

L’avenirétaitincertaineteffrayant,maisunepetitelueurd’excitationnaquitenmoi.Jenem’étaisjamaissentieaussiprêteàaffronterunteldéfi.Jepriaibrièvementl’universdenepasmeplanter.

J’étaistoutàfaitdétendueetunpeuémoustilléelorsqueBlakeentra.–Durejournéeaubureau?Ils’assitauborddelabaignoire,làoùmespiedsdépassaientdelamousse.–J’aibesoind’unejournéededétenteavantquemavienes’emballe.–Demainpassé,jesuissûrqueceseralecas.–Queveux-tudire?demandai-je,espérantendépitdetoutque,pourquelqueraison,

iln’étaitpasinforméd’uneaffairequiseconcluaitdanssapropresociété.–Oui,jesaisquetufinalisestoutdemainavecMax.Peut-onparlerdesalternatives?– Non, ce n’est pas possible, Blake, parce que nous en avons déjà parlé et que la

réponseestnon.(J’avaisemployémontonleplusrésolu.)– Tu ne connais même pas Max, et tu es prête à lui transférer la propriété de ton

entreprise,poursuivit-il.Onvoyaitbienqu’ilallaitchercherloinpourl’emporter.

Page 170: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Merde.–Ceseraitlamêmechoseavectoi.Quelleestladifférence?–Jen’ai jamaisditque jevoulais l’acheter.Jepourraisêtreunsimpleactionnaire,ou

considérercelacommeunprêt.Celan’aaucuneimportance,pourmoi.–Exactement.Ilouvritgrandlesyeux.–Cen’estpascequejevoulaisdire.Jesortisdubain,trempéeetcouvertedemousse.–Tupeuxmepasseruneserviette?–Pastantqu’onn’enaurapasparlé.Il ne bougea pas d’un pouce. Il me dévisagea, les bras résolument croisés sur sa

poitrine,nesemblantqu’àpeinedistraitparmanudité.Heureusement, jepouvaissurvivresansserviette.

–Ilfautquetuarrêtesça,lâchai-jed’untoncassant.–Ilfautquetumefassesconfiance,répondit-ildoucement.Quelque chose dans la façon dont il avait parlé me fit réfléchir. Pourquoi était-ce

devenuaussi importantpourlui?Qu’est-cequiavaittantchangéentrenouscesdernièressemaines que l’éventualité d’un investissement de Max lui était devenue à ce pointintolérable ? Je le lui aurais demandé si j’avais eu l’impression qu’il me répondraitclairement. Quoi qu’il en soit, rien de ce qu’il pouvait dire ne me ferait changer d’avis.J’avaisprismadécision.Ilallaitdevoircomprendrequ’ilnepouvaitpasmepossédernimecontrôler.

Je m’avançai sur le carrelage, manquant glisser dans l’eau savonneuse que j’avaisamenéeavecmoiensortantdubain.Ilfitminedemerattraper,maisjebondishorsdesaportée.

–Cette conversation est terminée, dis-je. Tu as un grave problèmede besoin de toutmaîtriseretjetesuggèred’enparleràunpsy,parcequevisiblement,jenepeuxpast’aider.

–D’accord,j’aipeut-êtreunproblèmeaveclecontrôle,maistoituasunproblèmeavecla confiance, Erica. Nous pourrions probablement tous les deux faire bon usage d’unethérapie.

Je ledévisageai.Aumoins,mesproblèmesde confianceétaient liésàdesexpériencesbien réelles. Les problèmes de contrôle de Blake remontaient, eux, indubitablement à sessuccès qui, pour autant que je le sache, pouvaient difficilement être considérés commetraumatisants.Endehorsdecela,j’avaistoujoursdétestélapsychanalyse.Insinuerquej’enavaisbesoin,enretournantmespropresparolescontremoi,m’avaitfaitmesentirrabaissée.Souillée.

Jeserrailesdentsetm’enroulaidansuneserviette.–Vatefairefoutre!

Page 171: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

– Erica, c’est ce que je suis. Je suis conçu de cette façon. Et si j’essaie de prendre lecontrôledecettesituation,c’estparcequej’aidetrèsbonnesraisonsàcela.

Je pris une profonde inspiration, déterminée à ne pas laisser ce désastre empirerdavantage.

– C’est très simple, Blake. J’ai besoin de contrepoids dans ma vie. Je ne vais pasm’abandonnercomplètementàtoi,corpsetâme,etentreprise,puistelaissermemanipulercommeunemarionnettesoumise.Celamebriserait.Celanousbriserait.

–Alorstadécisionestprise?Aucalmedesavoix,jefusparcourued’unfrissond’angoisseinopiné.–Elleestdéfinitive.Tuvasdevoirvivreavec.Jemeréfugiaidansmachambrepourycherchermonsurvêtementderéconfort.Blakerestaétonnammentsilencieuxet,lorsquejeressortisduplacard,ilétaitparti.Je

soupiraide soulagement,puisunevaguede tristessem’envahit,mecoupant les jambes. Ilétaitparti.Jem’effondraisurlelit.Lafrontièreentrelasolitudeetlacolèredevintdeplusen plus floue alors que je fixais le plafond des yeux. Ce n’était qu’une dispute. Tous lescouplessedisputaient.Nousallionsbiensurmontercela.

Mais qu’est-ce que cela signifiait pour notre relation ? Et si c’était fini ? Commentpourrais-jevivresanslui?Unepetitepartiedemoiavaitvouluqu’ils’enaille,ouaumoinsqu’ilcessedeparlerdecetinvestissement.Maintenantqu’iln’étaitpluslà,jenepouvaispasm’expliquerl’étrangesentimentdevidequejeressentais.

Jefermai lesyeuxetessayaidemeconvaincrequ’unefois toutterminé, le lendemain,noustrouverionsunmoyenderebondir.J’enimplorailescieux.

Jepassaiunemauvaisenuit.Jem’éveillaiavecdessueursfroides,désorientée,lorsqueje réalisai que Blake ne dormait pas avec moi. J’avais hâte qu’il revienne, que toutes cesdisputesnesoientplusquedupassé.

Je fantasmaimefaufilerdanssonappartementavec laclefqu’ilm’avaitdonnée,et leséduire.Admettre que je l’aimais. Tout prenait sens quand il était enmoi, qu’ilme faisaitl’amour, qu’il nous entraînait là où plus rien d’autre ne comptait. Maintenant, plus rienn’avaitdesens.Jepassaimesmainssurmapeaumoite,souhaitantquecesoitlessiennes.Si je pouvais le sentir là, avec moi, je saurais peut-être que tout n’était pas fini. Qu’ilm’aimaitencoreautantquejel’aimais,malgrésesdispositionsexaspérantes.

Jecombattisl’enviedecourirversluitandisquelejourselevait.Jefussoudainprisedecolère, qu’il puisse me faire une telle chose. Il m’avait possédée comme personneauparavant. Épuisée et à fleur de peau, je le convoitaismaintenant si fortement que j’enperdaislesommeil,parcequejenepouvaispas,nevoulaispasluioffrircequ’ilexigeait.

Jerêvaisdeluidonnercequ’ildésirait,maisàquelprix?Aumatin,jejetaiunœildanslachambredeSid,oùilronflaitbruyamment.Jenepris

paslapeinedechuchoter,sachantqu’ilneseréveilleraitpasfacilement.

Page 172: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Sid,j’aibesoind’unefaveur.Ilseretournaetgrommela:–Quoi?–J’ai rencontrémonpère,hier,et ilm’a invitéedanssamaisondeCapCodceweek-

end. Je ne sais pas combien de temps je vais rester, mais je me demandais si je pouvaisempruntertavoiturepouryaller?

Ilseleva,encorehabillédesvêtementsdelaveille.–Tiens,dit-ilenmetendantlesclefsdepuissonbureau.Tuneleconnaispasencoresi

bienqueça.Tuessûrequec’estunebonneidée?– Il se présente aux élections. Je ne pense pas qu’il s’agisse d’un tueur en série, Sid.

Maisc’estgentildet’inquiéter.Ilhochalatêteetretombasurlefuton,disparaissantsouslescouvertures.Jejetaimonsacdevoyagedansl’Audigrismétalliséetajustailesiègeàmataille.Sid

vivait avec presque rien, mais il ne regardait pas à la dépense quand il s’agissait desvoitures. Je sortis doucement de l’emplacement où il était garé. Si je rayais ou quej’enfonçaislacarrosserie,ilselamenteraitpendantdessemaines.

JetrouvaiuneplaceprèsdubureaudeMax.Jem’inspectaidanslemiroir.Lasignaturenedépendaitplusdemonapparence,maisjemevoulaissuperbepourl’occasion.Jeportaisune robe fourreau blanche moulante, accessoirisée d’une fine ceinture et d’escarpinsouverts.

J’entraidans lehalld’Angelcom,avec l’apparenceet l’aisanced’unePDGd’entrepriseentièrementcapitalisée–cellequej’allaisdevenir.Laréceptionnistem’accompagnadanslasallederéuniondanslaquellej’avaisfaitmapremièreprésentation.

Jeme retrouvaidenouveau seuledans lapièce,me remémorant la façondontBlakem’avait rendue folle ce jour-là. Je me tendis à l’idée que ce qui se passait aujourd’huipouvaitnousaffecteràjamais.

Maxentra,etsongrandsourirebalayamesdoutes.–C’estlegrandjour!dit-il.Un petit rire nerveux m’échappa. L’enthousiasme de Max était communicatif. On

s’étreignit poliment et ilm’embrassa sur la joue,mais j’étais d’humeur si joviale que jen’yprêtaimêmepasattention.

–Alors,oùcommençons-nous?Je tapai desmains, impatiente de signer quelque chose, puis je vis la pile de papiers

qu’il déposa sur le bureau – plus épaisse qu’un numéro du Vogue italien. Des dizainesd’ongletsmulticoloresdépassaientdelapile,signalantlesendroitsoùlessignaturesétaientrequises.Unevagued’anxiétés’emparademoi.

–Toutcela?demandai-je.

Page 173: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

– Malheureusement, oui. C’est la raison pour laquelle la rédaction prend aussilongtemps.

–Jen’abandonnepasmonpremiernouveau-né,n’est-cepas?Jem’installaisurunsiègeenfacedelui,inquiètemaintenantdenepasavoirletemps

deréellementtoutrelire.Etsijetrouvaisquelquechosequifaisaitcapoterl’affaire?Ousijen’avaispaslamoindreidéedecequejesignais?

–Çanem’étonneraitpas,ditunevoixderrièremoi.Jeme tournai surmonsiègequandBlakeentradans lapièce.Vêtud’un jeanetd’un

tee-shirtbleumarineàcolV,ilavaitl’airimpitoyablemalgrésatenuedécontractée.–Quepuis-jefairepourtoi,Landon?LetondeMaxétaitsecetseslèvresseréduisirentàuneligneétroite.–Tupeuxm’accorderunmomentavecMlleHathaway.–Biensûr.Nousavonsbientôtfini.–Maintenant.–Ilyaunproblème?demandaMaxenserrantlesdents.–C’esttoi,leproblème.À ces mots, Max se leva d’un bond. Son fauteuil roula en arrière et alla heurter la

fenêtredansunbruitsourd.–Prenezvotretemps,Erica.IllançaàBlakeunregardfurieux,puisnousquittaetrefermalaportederrièrelui.Moncœurbattait frénétiquement, sous ladouble influencedusimple soulagementde

voirBlakeetd’unepeurdévoranteque l’accordavecMax soitmaintenantmis enpéril. SiBlake allait se montrer à ce point difficile avec mes affaires, quelle raison avait Max devouloirperdresontempsavecmoi?Ceseraitsignerpourdesmoisdecontrariétésfutiles.

–Qu’est-cequetufaisici?demandai-jed’untonbrusque.–Jenevoulaispasenarriverlà,maistunem’aspasvraimentlaissélechoix.–Jetel’aidit,j’aiprismadécision.C’estpourainsidirefait.–Pasvraiment.Tun’asencoreriensigné.– J’en ai pleinement l’intention, alors je te suggère de mettre de côté tes tendances

obsessionnellesetdenouslaissertranquilles.–Ilesttroptardpourcela,enfait.Ohnon.J’hésitai.Moncœurseserrad’effroi.–Troptardpourquoi?– Je viens de virer le double du montant dont tu as besoin sur ton compte

professionnel.Jem’efforçaideformulerdesmots,desquestionsquiavaientbesoind’êtreposées,mais

jerestailà,bouchebée,incréduledevantsonaudacequi,commeàl’accoutumée,n’avaitdecessedemestupéfier.

Page 174: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Neperdspastontempsàchercherdesmoyensdemelesretourner,parcequejevaistemettre dans l’impossibilité de trouver un quelconque autre investisseur dans cette ville,poursuivit-il.Tusaisquejepeuxlefaire.

–EtsiMaxveuttoujoursinvestir?–Impossible,répondit-ild’untoncatégorique.Riennesefaiticisansmonautorisation,

etilnel’obtiendrapas.–Pourquoifais-tucela?Ma voix vacilla. Il m’avait indiscutablement acculée. Je voyais encore quelques

alternativespossibles,maisjesavaisqu’illesavaitdéjàcontrées.–JetiensplusàtoiqueMaxneleferajamais,mêmesiDieusaitqu’ilvaessayerdete

fairecroirelecontraire.–Iln’estpasquestionicidetaputainderivalitédepseudo-jumeauavecMax.Tujoues

avecmavie.Avectoutcequej’aiconstruitetquetudétruis!(Jefrappaidespoingssurlebureauavantdemelever, lui faisantface.)Cen’estpasdutoutcequetuvasrécolter.Lefaitquetuimaginesquejevaistoutbousillerpourtoimontreàquelpointtuesnaïf.

Je le giflai, fort, le bruit résonnant à travers la pièce alors que ses paroles metransperçaient.Mamainmechauffa,etjen’arrivaiplusàreprendremonsouffle.

Ilparutuninstantchoqué,maisiln’hésitaqu’unesecondeavantdemeprendreparlanuque et m’embrasser, écrasant mes lèvres sous les siennes. Je serrai les poings. Non, iln’allaitpasm’avoiràl’usure.Pascettefois.Jen’allaispaslelaisserfaire.

Jepartisenguerrecontremoi-même,combattantcequejeressentaissouslepoidsdeseslèvresquimepossédaientunpeuplusàchaquelongbaiser.Tum’appartiens,entendis-jesavoixénonceraufonddemoi.

Ungémissementm’échappa,etjeréalisaiquejeluirendaissesbaisers,quemoncorpsréagissait hors de mon contrôle. Je tremblai de tout l’amour et de toute la haine quej’éprouvaispourcethomme.Jemedétestaipourcela.Deledésireràcepoint.

Ilm’avaiteuàl’usure.Ilavaitgagné.

Page 175: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitredix-neuf

Àpeinesortiedelaville,jefusprisedanslesencombrementsdesvoituresquipartaientvers le sud, emplie d’une rage qui me poussait à rouler à cent trente, plutôt qu’à vingtcomme l’indiquait le compteur. Des centaines de gens allaient à Cap Cod en ce vendrediaprès-midi.Jen’étaispasd’humeuràmejoindreàcetteréuniondefamilleimproviséeavecuntoutnouveaupère,maisjevoulaismetrouveraussiloindeBlakequepossible.

Dieu sait comment, j’avais trouvé la force de laisser Blake dans la salle de réunion.J’avais présenté de brèves excuses àMax, en lui épargnant les détails, sachant que Blakeallaitlemettreaucourant.

Bon débarras à tous les deux. Ils pouvaient bien entretenir leur rivalité inepte en sedétruisantl’unl’autrejusqu’àsefinirdansunputaindeglorieuxbouquetfinal,pourcequej’enavaisàfaire.

Blake ne m’avait professionnellement laissé aucune autre option, et je n’allaiscertainementpas l’enrécompenserà traversnotrerelation.Je l’aimais, follement,etd’unepassion que je ne retrouverais sans doute jamais,mais je n’allais pas pour autant devenirune femme entretenue. L’appartement, et maintenant l’entreprise. Il n’avait cesséd’interférer, jusqu’àceque je sois complètement sous sonemprise, soumiseaumoindredeses souhaitsetdesesdésirs.Au lit, jevoulaiscela, je le réclamais,maisdans lavie réelle,nousavionsbesoindelimites,etquoiquejefasse,jen’avaispasencoreréussiàlesluifaireaccepter.Macolèrerefitsurface,etjedonnaiuncoupdepoingsurlevolant.

Deuxheuresplus tard, l’embouteillage sedébloqua. Je repris de la vitesse, slalomantentrelesfilescommeunpilotedecourse,jusqu’àcequeleGPSm’indiqueunesortie.

J’abordaislespetitesroutessinueusesquimenaientàmadestinationavecunpeuplusdeprécautions.Lacôteétaitparseméederésidencesluxueuses,chaquepropriété jouissantd’unevuemagnifiquesur l’océan.Hormisunrapidevoyageentre fillesavecAlli, jen’avaispassé que très peu de temps dans cette région huppée du bord de mer durant les huitannéespasséesenNouvelle-Angleterre.

Page 176: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Jem’arrêtaidansl’alléed’unemonstrueusevilladetroisétages,àcôtéd’unSUVLexus.C’était là. Je pris plusieurs longues inspirations et desserrai mon étreinte sur le volant,m’efforçantdepurgermonespritdemacolèreenversBlake.Cettejournéeétaitcenséeêtreheureuse.Peut-êtrequ’iln’étaitpasencoretroptardpourcela.

Jedescendiset jetaiuncoupd’œilpar-dessus labarrièrequiséparait l’alléedu jardinde laplageencontrebas.Lamaisonétait construite surune falaiseabruptequi laplaçaitbienau-dessusdesesvoisines,offrantunevueimpressionnantedel’océansurtroiscôtés.

–Erica!La voix de Daniel résonna depuis la porte de derrière. Il n’était plus le même.

Décontracté,enpantalonkakietchemisedelin,ilsouritàmonapproche.–Jesuiscontentquetusoisvenue.Situpermetsquejetetutoie.Ilm’étreignitamicalement.Songestemepritparsurprise,maisfutlebienvenu.–Moiaussi,répondis-je,d’unevoixétoufféeparsonépaule.Jeluirendissonétreinte,regrettantd’êtreaussitendueencetinstant.Sijen’yprenais

garde, j’allais pleurer à lamoindre occasion. Il ne penserait plus que j’en avais après sonargent,maismeprendraitpouruncasdésespéré.

–Entre,jeveuxteprésenterMargo.J’acquiesçai.Ilpritmonsacet leposadansl’entrée.Onpénétradansuneimmenseet

superbepièce:unesalleàmangeraumobilierpatinéetblanchi faisaitofficedesalon.Degigantesquescanapéstendusdehoussesdetoileblancheetcouvertsdecoussinsbleupastel–toutdanscettemaisonrappelaitl’ambiancedeborddemer.

Ilmemenadanslacuisineoùunegrandefemmeauxcheveuxauburnétaitoccupéeàtournerunesalade.

–Erica,voiciMargo.Margoôtasontablieretvintversmoilesbrastendus.Elleavaitunesilhouetteélancée,

etdestachesderousseursursapeaubronzée.Delourdesbouclesd’oreillesàperlesétaientassortiesausimplerangd’uncollierdeperlesautourdesoncou.Malgrésataille,elleparutfrêledansmesbras.Lorsqu’ellerecula,jemeréjouisdemonchoixvestimentaire.

–N’est-ellepassuperbe?Jesuisraviedevousrencontrer,machère.Avez-vousfaim?Jen’avaispaspenséàmangerdelajournée.J’avaisétébeaucouptropnerveusedepuis

lematin,etaprèslaréunion,mangeravaitétéladernièrechoseàlaquellej’avaispensé.–Jesuisaffamée,enfait.– Accordez-moi encore quelques minutes, et nous pourrons passer à table. Chéri, tu

peuxsortirlepoisson,maintenant.EllefitunsigneàDanielendirectionduréfrigérateur.Ilacquiesçaetm’abandonnapourallerchercherunplat.–Tuveuxunebière?

Page 177: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

– Oui, d’accord, répondis-je, encore que j’allais être ivre en un clin d’œil si je nemangeaispasrapidementquelquechose.Si je finissaiscettebouteille, ilsensauraientplussurmoiqu’ilsn’avaientenvied’endécouvrir.Danielattrapadeuxcanettesdesamainlibreetmefitsignedelesuivre.

On sortit sur la terrasse, et pendant qu’il se concentrait sur le grill, je regardais lepaysage.J’avaispassétout levoyageàfulminercontreBlakeaulieudepenserauxchosesdont Daniel et moi pourrions parler pour apprendre à mieux nous connaître. Je voulaisvraimentqu’ilmeconnaisse,qu’ilaitenviedemeconnaître.

Je regardais vers l’horizon et l’océan paisible devant nous. Au loin, une poignée demassesnoiressedéplaçaientlelongdesrochersaupieddelafalaise.

–Qu’est-cequec’est?demandai-je.Danielregardadansladirectionquej’avaisindiquée.–Desphoques.Ilstraînentlàtoutelajournée.Desbestiauxbienbruyants.Lapremière

chosequel’onentendlematin.Jerisunpeuàl’idéequelesphoquesétaientlescoqsdelarégion.–Vousavezunemaisonmagnifique.–Merci.Nousl’adorons.C’estnotreoasis.Il fermalecouvercledugrilletvintmerejoindreà labalustradequinousséparaitde

l’à-pic,àunoudeuxmètresdenous.Unepetiteéchelle rétractablemenaitdubordde lapropriété à la plage. Les falaises étaient magnifiques mais dangereuses, toutparticulièrementsiquelqu’unseretrouvaitbloquésurlaplageàmaréehaute.

Danielinterrompitlefildemespensées.–J’ai faitunerechercheInternet,mais jedoisadmettreque jenecomprendspasbien

cequetufais.Qu’est-cequeClozpin?Jesouris, réjouiedesacuriositéàmonégard.Leminusculeespoirque j’avais ressenti

enfutconforté.–C’estune start-upparmi les réseaux sociaux,axée sur lamode.Elleaide lesgensà

trouverdesvêtementsetcréedesliensaveclesmarquesetlescréateurs,cegenredechoses.–Donctuasfondécelaalorsquetuétaisencoreétudiante?–Avecdeuxamis.Unefoisdiplômée,j’aicommencéàchercherunfinancement,que…

(Jemarquaiunepause,m’interrogeantsur lesmotsmêmesque jeprononçai.)Nousavonsobtenunotrefinancementaujourd’hui,alorscelalaisseprésagerdegrandeschosesàvenir.

–C’estfantastique,Erica!Ilsouritetinclinasabièredansmadirection.–Etvous?Vousaveztoujoursvoulufairedelapolitique?demandai-je.Son nez se plissa alors que son regard se portait vers l’océan et l’horizon qui

s’enténébrait.

Page 178: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

– Si l’on peut dire, oui. Ma famille est impliquée dans la politique locale depuisplusieurs générations, alors je suppose qu’y entrer était une étape inévitable dans macarrière.

–Êtes-vousoptimistepourl’élection?–Oui,vraiment.Nousavonsdepuissantssoutiens,etjecroisquenousfaisonsunetrès

bonnecampagne.Lapartiequiconcernelesmédiassociaux,dontjenesaisàpeuprèsriendesdétails,sembleégalementtrèsproductive.Tupourraisprobablementm’apprendreunechoseoudeux.

Je hochai la tête etm’esclaffai. Il paraissait évident que nous parlions deux langagesprofessionnelsfortdifférents.

–Pour lacampagne…(Ilhésita,commes’il réfléchissaitàcequ’ilallaitdire.)Celavaparaître étrange,mais il y a une chose que je dois te demander. (Il frotta sa barbe d’unjour.) Comme je te l’ai dit, tu sais, faire ta connaissance était inattendu. Une très bonnesurprise,biensûr.

–Biensûr,acquiesçai-je.– J'ai beaucoupmisé sur cette campagne, Erica, et je ne sais pas trop comment te le

diresansquecelaneparaissetotalement,jenesaispas,horrible,jesuppose.–Vouspréféreriezquejen’apparaissepaspubliquementcommevotrefilleillégitime.Je lâchai le morceau. Connaissant les hommes politiques, il aurait pu continuer de

tournerautourdusujetunbonmomentavantd’enveniraufait.Ses traitss’adoucirentetune lueurdeculpabilitépassasursonvisage; jecomprenais

d’oùilvenait.Ladernièrechosequejevoulaisétaitdedevenirunfardeauouunesourcedestresspourlui.

–Cen’estvraimentpasunproblème,repris-je.Jevoulaisjusteunechanced’apprendreà vous connaître, et j’espère que c’est encore possible. J’aimoi aussi àm’occuper demespropresaffairesetmespropresrelationspubliques.Jenecherchesurtoutpasàcompliquercequevousavezconstruit.Sincèrement,jen’airienàgagneravecvosattachespolitiques.

Ilhochalatêteetbutunelonguegorgéedebière.– Je suppose que c’est logique. À l’évidence, nous savons ce que nous savons, et je

supposequec’estleplusimportant,n’est-cepas?J’acquiesçaietpassai lamainsurlabalustrade,soupesantunequestionquejevoulais

luiposer.–Peut-êtrequec’estàcausedemonâge,j’étaistellementjeunequandelleadisparu.

Maisjemedemandetoujourspourquoimamèreneparlaitjamaisdevous?Ilseredressaetplissalefront.–Nousavionsunerelationcompliquée.Dumoins,cefutlecasàpartirdumomentoù

nous avons appris qu’elle était enceinte. Aucune de nos familles n’allait être heureuse decettenouvelle.

Page 179: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–J’imagine.La famille de ma mère était toujours restée distante. Vu les origines de Daniel, je

pouvais imaginer que les circonstances n’auraient pas été bien différentes. Une famille ausangbleucommelasiennen’auraitpasbienréagiàl’idéequ’ilavaitengrosséunefillehorsdesliensdumariage,quellesquesoientsesorigines.

– Après son retour à Chicago, j’ai supposé qu’elle allait s’en occuper. Je n’ai plusentenduparlerd’elle,etjen’aipasvoulutenterdelajoindreetéveillerdessoupçonsdanssafamille.

–Alorsvousnevousêtesplusparléaprèslaremisedesdiplômes?Ilagitanégativementlatêteetregardaversl’océan,commesilesréponsessurlafaçon

dontsavieavaitchangéétaientlà-bas,quelquepart,justehorsdesavue.Une portière de voiture claqua et je tournai la tête, n’apercevant qu’une chevelure

bruneetfriséequifranchissaitlabarrièreetentraitdanslamaison.–Cedoitêtremonbeau-fils.Ilaàpeuprèstonâge,d’ailleurs.Daniel me fit signe de revenir à l’intérieur, et je me préparai à une nouvelle

présentation.Margoposaitsurlatablelasaladeetungrandbolderizfumant.Lesarômesdesplats

semêlaientdansl’air,etj’étaisimpatientedecesserdeparleretdecommenceràmanger.Lejeunehommefranchitlaporteetsedirigeaverselle,maisils’immobilisalorsqu’ilme

vit.Tout se pétrifia. La pièce devint froide et silencieuse. J’entendismon cœur battre, un

martèlement irrégulier et assourdissant, qui instillait une douleur froide dansmes veines,meglaçantjusqu’àl’os.Danscettepièceremplie,j’étaisseule.Seuleavecmessouvenirsetlahonte de ce qu’il m’avait laissé. Une répulsion abjecte se noua en moi tandis que jem’efforçaidecomprendreleterriblecauchemarquis’imposaitdevantmoi.

J’agrippai le bras de Daniel, doutant que mes jambes puissent encore me porter. Jelevai lesyeuxvers lui,commes’ilpouvaitdequelquemanièresavoir.Mais ilne fitquemeregarderàsontouretm’indiquerd’ungestelenouvelarrivant.

–Erica,voicimonbeau-fils,Mark.Mark.Aprèsquatreans,j’apprenaisfinalementsonnom.

***

Jem’excusaiimmédiatementpourtrouverlasalledebainslaplusproche.Jeverrouillaila porte derrière moi, me faisant violence pour y parvenir, mes mains prises detremblementsincontrôlables.Jem’aspergeailevisageetcherchaidel’aidedanslerefletdumiroir.J’étaisaussipâlequ’unfantôme.Lesnauséesétaientautantdevaguesimplacables,etjeluttaicontrecetteenviedevomir,depurgermoncorpsdesonsouvenirempoisonné.

Page 180: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

J’avaisbesoindereprendrelecontrôle.Etj’avaisbesoind’unplan.Montéléphoneétaitdansmapochettequisetrouvaittoujoursdanslesalon.

Maisquiappeler?Etparailleurs,quedire?L’hommequim’avioléeàlafacestmonputaindebeau-frère.Bonsang,commentm’ensortir?Jepouvaisàpeineleregardersansfaireunevéritablecrisedenerfs.Maintenantj’étaiscenséepartagerundînerentieraveclui,commesiriennes’étaitpassé,commesiunpanentierdemavien’existaitpas.

C’était uneurgence sur le planpersonnel,mais pas une véritable urgence,medis-je.Nousallionsdîner,puisj’inventeraisuneexcusepourpartir.Ilfaudraitensuitequejetrouveune façon de composer avec Daniel, même si la perspective de développer une véritablerelationavecluiétaitprobablementdevenuetotalementimpossible.

Jem’essuyai levisageententantdemeressaisir,avantderessortirdans lecouloir.Jepouvaislefaire.

Jesortis,etàlasecondeoùjerefermailaportederrièremoi,Markétaitlà.–Toutvabien?chuchota-t-il.Ses yeux étaient sombres, presque noirs, lorsqu’il s’avança. Je reculai, pressant mes

paumescontrelemurderrièremoi.Touslesnerfsàvif,prêteàmebattre.–Net’approchepasdemoi.Ma voix était hésitante, trahissant la peur quimenaçait deme submerger. Je n’étais

plus qu’unemasse d’angoisses, et pas la femme féroce et intimidante qu’il me fallait êtrepourlerepousser.

–Sinonquoi?Ilvintassezprèspourquejepuissesentirsonsouffle.–C’estvraimentparfait.J’aitoujoursvouluavoirunesœur.Il fit courir son doigt de mon genou au bord de ma robe, qu’il souleva légèrement.

Chaquecelluledemoncorpspritvie,et l’adrénalinemeparcourutcommeunéclair.Dieumevienneenaide, jeneseraipasdenouveausavictime.Je le repoussaiavec ladernièreénergie,leprojetantcontrelemuropposéducouloir.

–Nemetoucheplusjamais,tuentends?Un sourire amusé apparut sur son visage. Jeme pressai vers la salle àmanger, pas

moinstroubléequejenel’avaisétélorsquejel’avaisquittée.ArrivalemomentoùjedevaisréussiràconvaincreDanielquej’étaisuncasdésespéré.–Erica, tuessûrequetoutvabien?demandaDanielalorsque jeprenaisunsiègeà

côtédelui.–Désolée,jen’aipasmangédelajournée.Jenemesenspastrèsbien.–Ohnon,mapetite!Mangez,s’ilvousplaît!Margo me prépara une assiette avec tous les merveilleux mets qui parfumaient

l’atmosphèreplustôt.

Page 181: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Mark se joignit à nous, s’asseyant face à moi avec le même sourire suffisant, l’airdéterminé. Je pris un peu de laitue et me forçai à la mâcher. Mon corps était en modepanique,toutappétitavaitdisparu.

–Mark,Ericadirigesaproprecyber-entreprise.N’est-cepasimpressionnant?demandaDaniel.

Il régurgita les détails de notre discussion précédente pour Margo et Mark, révélantsans que je n’y puisse rien un nombre de détails importants qui pourraient aiderMark àm’atteindre de nouveau. Son identité révélée.Mon propre anonymat – peut-être la seulechosequim’avaitprotégéedelui–s’étaitenvolé.

–Etvous,quefaites-vous,Mark?demandai-je.Onpouvaitêtredeuxàjoueràcejeu,encorequejemevoyaismalessayerdeletrouverpourautrechosequelefrapper.

–JetravaillepourlafirmeavecDaniel.– Évidemment, dis-je avec un sourire poli. Quelle chance pour lui, que de pouvoir

passersesannéesdefacàmarauderetvioler,avantdesevoiroffrirunpostederêvedansl’unedesplusgrandesfirmesdelaville.Jelehaïssaisencoreplusqueprécédemment.

–Dansquellepartiedelavillehabitez-vous?demanda-t-il.Je fixai mon assiette des yeux, prenant une bouchée d’églefin légèrement assaisonné

toutenenvisageantlesdiversesfaussesréponsesquejepouvaisluidonner.Soudain,on sonnaà laporte, le carillon résonnantà travers lamaison. Je sursautai,

manquantmesouleverdemachaise.– Je vais répondre, chéri, ditMargo alors queDaniel faisaitmine de se lever. Elle se

mutavecunegrâceéconomeetdisparutdansl’entréequinouscachaitlaporte.–Vousdevriezvousrevoirtouslesdeux,suggéraDaniel.Jeme retinsd’écarquiller lesyeux. Il étaitbienpromptà ramenermonattentionvers

Mark, pensai-je. Je continuai de manger pour éviter de parler, et pour organiser monévasionensilence. Ilsallaientessayerdemegarderplus longtemps,soupçonnai-je,mais ilfallaitquejerentrechezmoi.Dansunendroitsûr.

Chezmoi,oui.J’avaisenfinuntelendroit,etjen’avaisenvied’êtrenullepartailleurs.JefermailesyeuxetmefigurailevisagedeBlake.J’auraisdonnén’importequoipour

êtreavecBlakeencetinstant,maisjenepouvaispasmeprécipiterdanssesbrasàchaquefoisquejemesentaisvulnérable.Jepouvaispeut-êtreallerchezMarie.

–Erica. (LavoixmusicaledeMargo flottadans lesairs.)Vousavezde lavisite.Votreinvitévousattendàlaporte.

Matêtesetournad’uncoup.Uneseulepersonnepouvaitmetrouverici.Blake se tenait dans l’embrasure de la porte, décontracté et parfait, comme à

l’accoutumée.J’essayaideconjurerunpeulacolèrenourrieprécédemment.Maisjeneressentaisque

soulagement,gratitude,amour.Jecombattismonenviedeme jeterdans sesbrasetde le

Page 182: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

laisserm’emmenerloindecettehorriblesituation.–Blake…Il entra etmeprit dans ses bras,me serrant si fort que c’en fut presque douloureux.

J’enfonçaimonvisagedanssoncou,respirantsonodeur.Moncorpssedétendit.Toutallaitbiensepasser,maintenantqu’ilétaitlà.J’étaisensécurité.

–Ilestlà?Ilpritmonvisagedanssamainetfouillamonregard.–Qui?–Mark.–Oui.Attends,commentlesais-tu?–Oubliecelapourl’instant.Sortonsd’ici.Ilmepritparlamainettournalestalonspourpartir.–Non,jenepeuxpas.Jeletiraiversmoi,gardantsamainserréedanslamienne.–Erica,jet’emmèneloind’ici.Nouspartonsmaintenant.–Attends.Ilfautjustequejediseaurevoir.ÀDaniel.Ilserembrunit.–C’estmonpère,Blake.Nousessayonsd’apprendreànousconnaître.Jeneveuxpas

abandonnercela.Nous n’avions rien qui s’approchait d’une relation normale père-fille, mais je venais

justedeletrouver.Jenepouvaispasleperdredenouveau,pasaussivite.–Bien.Présente-nous,puisnouspartirons.–Soisgentil,dis-jedoucement,avantdelemenerdanslagrandesalleoùcettefamille

attendaitnotreretour.Dès notre arrivée, son regard se fixa sur Mark. Sa posture changea, et une certaine

tensionparutémanerdelui.Jeresserraiunpeumonemprisesursamain,pourluirappelerdenepaspéteruncâble.

–Daniel,Margo,Mark,jevousprésenteBlake.Jejouainerveusementavecmescheveux.Quelle ironie, présentermon partenaire àmon seul parent quelques jours seulement

après notre première rencontre. Et parmi toutes les émotions qui se mêlaient en moi, jepercevaisencorecefrissond’anticipation,j’espéraisl’approbationdeDaniel.Ilavaitsemblétirerunecertainefiertédemaréussite,unpeuplustôt.Blakeallaitcertainementluiplaire.

– Blake Landon. Vous êtes chez Angelcom, n’est-ce pas ? (Daniel se leva et vint luiserrerlamain.)

–Exact.Jecroisquevousnégociezbeaucoupdemodalitéspournous,réponditBlake.–Oui.Lemondeestbienpetit.

Page 183: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Il marqua une pause, son regard courant entre nous deux, puis se portant vers nosdoigts entrelacés. Son visage se décomposa. Ses yeux revinrent sur moi, comme si unepenséeterriblevenaitdelesaisiràl’instant.

Mark savait que Blake savait.Malgré toute samaîtrise de soi, je pouvais lire sur sonvisage comme dans un livre. Notre petit secret embarrassant s’étendait à des cercles qu’iln’avaitpasanticipés.

MargoselevaetvintembrasserBlakesurlajoue.–Blake,laissez-moivousapporteruneassiette.Asseyez-vousetjoignez-vousànous.–Enfait, ilvientdesepasserquelquechoseavec l’accordsur lequelnoustravaillons.

Malheureusement, il est impératif que nous retournions résoudre le problème.Maismercibeaucouppourvotrehospitalité.

–Oh!Margo fitunpeu lamoue.Onvoyaitbienqu’elleétait impatientedemieuxconnaître

Blake.JedonnaiàDaniel,puisàMargo,unrapidebaisersurlajoue,etleurfitaurevoirdela

main.Blakeattrapamonsacenpartant.BlakemetenditlamainetfitunsignedetêteendirectiondelaTesla.–Allons-y.Jeledévisageai,lesdétailsdelamatinéemerevenantàl’esprit.–Blake,jenerentrepasàlamaisonavectoi.– Non, effectivement. Nous allons là où nous pourrons parler, et si ensuite tu veux

rentrer,oualleroùtuveux,tulepourras.–Oùallons-nous?Ilneréponditpas.

Page 184: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Chapitrevingt

–Jenesuisvraimentpasd’humeuràêtrebloquéesuruneîleavectoiencemoment,Blake.

Nousétionsàl’embarcadèredesferriesduportdeBoston,etBlakemesuppliaitdenepaspartir.Ilavaitverrouillélesportièresetmenélavoituresurlebateau,etmaintenantilfaisaittoutcequ’ilpouvaitpourmegarderici.

–Jetelepromets,nousferonsdemi-touretnouspourronsprendrelepremierferrysicequej’aiàtedireneteplaîtpas.

–Tuagisdefaçontotalementinsensée,tut’enrendsbiencompte?C’estquasimentunenlèvement.

–Promets-moiquetunevaspasquitterlenavire.Jegémis.–Jetelepromets.Maintenant,laisse-moidescendre.Ildéverrouillalesportières,etjeremontailarampeverslepontsupérieurduferry,où

onpassa le restede la traversée jusqu’àMartha’sVineyard.SiBlakepensaitqu’unpeuderomantismeluipermettraitd’échapperàsadisgrâce,ilsetrompaitdutoutautout.

Jetraversailenavirejusqu’àl’avant,etsortissurlepont.Jechoisisunetablepourdeuxprèsdu fond, sachantqueBlake était surmes talons. Jem’assis et ilme rejoignit presqueaussitôt. Je finis par croiser son regard. Ses yeux brillaient du reflet dans l’eau du soleilcouchant. Que les cieuxme protègent, il était aussi beau qu’il était exaspérant. On restaassisensilencequelquetemps,tandisquecertainesdestablesalentourseremplissaient.

–Vas-tumedirecommenttum’asretrouvée?Tun’astoutdemêmepasimplantéundispositifdelocalisationdansmesaffaires,si?

Sijedevaismevoirimposercetteodyssée,ilallaitfalloirqu’ilcommencerapidementàmefournirdesréponses.

–Sidm’aditquetuallaisrendrevisiteàtonpère.–Tuluiasdemandé,ouiltel’ajustedit?

Page 185: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

J’espéraisincèrementqueBlaken’avaitpasterroriséSidcommeilavaitpris l’habitudedelefaireavecquasimenttousceuxqu’ilavaitrencontréscesdernierstemps.

–Oui,enfait.Iln’étaitpasvraimentemballé,luinonplus,àl’idéequetuailleschezdeparfaitsétrangers.

–Bien.EtpourMark?Commentsavais-tuqu’ilseraitlà?– J’ai exploré toutes ses connexions possibles lorsque j’ai retrouvé son identité. J’ai

remarquécelledesonbeau-pèreetdesonemployeur.Lorsquej’aiapprisoùtuallais,jemesuisditqu’ilyavaitdebonneschancesqueMarksoitlàaussi.

Évidemment.Blakeconnaissait l’identitédeMarkdepuisunequinzainede jours.Dieuseulsavaitcequ’ilavaitpréparéd’autre.Maiss’ilavaitfaitquelquechose,Marknesemblaitpass’enêtreaperçu.

–EttuasréussiàtrouversamaisonàCapCod.–Erica,nem’insultepas,s’ilteplaît.(Iltapotaduboutdesdoigtssurlatable.)–Commentas-tuapprisàfairetoutcela?–Qu’est-cequetuveuxdire?– Tu es un hacker. C’est un bien étrange qualificatif pour quelqu’un qui a autant

d’argentetderessourcesquetoi,maistulefaisvisiblementencore.Ilm’adressaunsouriremalicieux.–Jen’utilisemespouvoirsquepourlebien.–Etcelaatoujoursétélecas?Sonsouriredisparut.–Écoute,parlonsdel’accordavecMax.J’aibesoindet’expliquercertaineschoses.–Nousyviendrons.Raconte-moicommenttuesdevenuunhacker.Ilouvritdegrandsyeux.–D’innombrablesheurespasséessurunordinateur,etungoûtmarquépourlesmaths.

Satisfaite?–Écoute.Situneveuxpasêtrehonnêteavecmoi,jen’aipasbesoind’êtrelà.Jemelevaipourpartir.Ilpritmamain.–S’ilteplaît,neparspas.L’expressiondesonvisagemeserralapoitrine,maisj’étaisdéterminéeànepluscéder

unpoucedeterrain.Jemerassis.–Parle.Ilsoupira.– J’étais un adolescent blasé et antisocial. J’en voulais à la société. Le piratage

informatique est devenu un exutoire créatif, cela m’a donné des opportunités, m’a faitparaîtrelavieunpeumoinsinsignifiante.

Page 186: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

J’essayaidemefigurerl’hommesplendidequej’avaisdevantmoienadolescentrebelle,menaçantlemondedupoingpourquelqueraison.

– Comment la société t’avait-elle maltraité à ce point ? Tes parents n’étaient pasprofesseurs?

–Si, et gravement sous-payés.Quoi qu’il en soit, ils n’avaient rien à voir avec ce quej’étais, crois-moi. Ils ont fait de leur mieux pour que je sorte de la maison, que je soisnormal… Je pense. Je suppose que j’étais juste trop… intellectuel, peut-être, pour monproprebien.L’information,lapolitique,l’économie.Enfait,toutcequivatoujoursaussimaldans la sociétéaujourd’huim’était totalement insupportableàcetâge-là. J’avaisdumalàjustifier pouvoir vivre une vie normale et heureuse et à me cacher la tête dans le sablequanddesatrocitésétaientcommisespartoutailleurs.

–Alorstuaspenséquetupouvaissauverlemondeavectonordinateur.–Pasvraiment,jenesaispas…–Commentas-tufinipartravailleraveclepèredeMax?Ilsoupira.Jeregardaipar-dessusmonépaule.Ilscommençaientàpeineàdénouerles

amarressurlequai.J’avaisencoreletemps.–C’estmaintenantoujamais,Blake.–Merde,d’accord.(Ilsepenchaentraversdelatableetbaissalavoixpourquejesois

laseuleà l’entendre.)J’aicommencéà fréquenterungroupedehackersappeléM89.Unepoignéed’adosencolère,commemoi.NousavonséchafaudéleprojetdeviderlescomptesenbanquedesmagnatsdeWallStreet.

–Pourquoi?– Ils s’enrichissaient grâce au système de Ponzi et s’efforçaient de faire tomber les

lanceursd’alertequimenaçaientdelesdémasquer.–Etques’est-ilpassé?–Nousnoussommesfaitprendre,répondit-il.J’aiéchappédejustesseàlaprison,etce

faisant,j’ai,onnesaittropcomment,attirél’attentiondeMichael.Ilm’aprissoussonaile,atrouvé lemoyen deme faire entendre raison. Je suppose qu’il faut un capitaliste endurcipourdépeindredumondeuntableauquiadusens.

Ehbien!Blakeétait tellementmesuré, tellementmaîtredumoindreaspectdesavie,maintenant.Sedirequ’ilavaitétéàcepoint irresponsablem’effrayait.Lafaçondontnousétionstousdeuxarrivésàcepointdenotrevien’auraitpaspuêtreplusdifférente.

– Nous voulions tous les deux faire quelque chose d’important. J’ai bossé des nuitsentières pour décrocher mon diplôme avec mention, et toi, tu as piraté des comptes enbanque.

–Etnoussommeslà,ensemble.Ilpressaseslèvrescontremesphalanges,leseffleurantàpeinedelalangue.Monbas-ventres’anima,maisjemeforçaiàmeconcentrersurnotresujet.

Page 187: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Commentas-tuévitélaprison?Ilselaissaallerenarrière,seslèvress’ouvrantmalicieusement.–Quoi?–Tontempsestécoulé.Jemetournaisurmonsiègeetvisquenousétionsdéjààplusieursmètresduquai,en

routepournotredestination.

Prèsd’uneheureplustard,Blakenousconduisitàtraversl’île,passantd’unquartieràunautre, jusqu’àcequenousnousenfoncionsàgrandevitessedansunpaysagedésertoùlesmaisons étaient rares. Jem’accrochai au siège, certaine que nous allions bientôt nousfairearrêter,uneconclusionparfaitepourunejournéeaussiincroyable.

D’un autre côté, l’île n’avait probablement qu’une poignée de policiers, et noussemblionssurtoutnouséloignerencoreplusdelacivilisation,sicelaétaitmêmepossible.

On s’arrêta devant une grande résidence familiale qui ne se distinguait des autresmaisonsauxtoitsenbardeauxdecèdrequeparsatailleetparlefaitqu’ellesemblaitêtreladernière sur cette partie de l’île.Onpénétra sous le porche enveloppant,mais au lieudenous faire entrer à l’intérieur, Blakeme fit faire le tour etmemena jusqu’à la plage. Ontraversalesdunesjusqu’àunendroitoùdeuxfauteuilsAdirondackblanchisétaientperchéssurlaplagedesablefaceauxvagueslégèresdel’océan.

J’ôtaimeschaussuresetm’assis.Aprèsunenuitquasimentsanssommeilettoutcequis’étaitpasséprécédemment, jenepouvaisplus tenir.Blake tiraunebouteilledevinblancfrappéd’unseauàglaceenfoncédanslesable.

–Commentorganises-tuceschoses,Blake,honnêtement?Ilsourit.–Nevapast’imaginerquejevaistelivrertousmessecretscettenuit.– Je pourrais t’y forcer, menaçai-je. J’avais un sens de plus en plus aiguisé de ses

faiblesses,cesdernierstemps.Sesyeuxs’assombrirent.–C’estbiententant,dit-ilenratantleverredanslequelilversait.Ilcorrigeasongesteetmetendit leverre.Jeprisunegorgéefortbienvenuedecevin

fraisetfruité.–N’ensoispassisûr.Jesuistoujoursencolèrecontretoi.Genresuper-hyper-furieuse.–Laproverbialedisgrâce?–Ladisgrâcelittérale,etcen’estmêmepasledébutdetoutcequetuvasdevoirfaire

pourterattraper.–J’adoremerattraper.Paroùdois-jecommencer?Ilvintseplaceràmespieds,traçadespetitscerclessurmesgenoux,remontasurmes

cuisses, déposa de doux baisers chauds dans leur sillage. J’essayai en vain de réprimer laréactionphysiquequ’ilsuscitait.

Page 188: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Tunepeuxpasarrangerçaparlesexe,dis-je–et,putaindeDieu,jelepensais!–Non?Dis-moi,alors,commentpuis-jearrangerça?Ilcontinuaitsespetitescaresseslégèrescommeuneplume.–Honnêtement,jenesaispas.Jecroyaisquetuavaisquelquechoseentêtequandj’ai

acceptédeveniriciavectoi.Je n’allais pas lui faciliter la tâche. J’étais au-delà de l’épuisement,mais ilme restait

assezdefeupourbienmefairecomprendre.Ilralentitsescaressesetseremitàgenoux.–Jet’aime,Erica.Merde,pensai-je.Ilcroyaits’ensortircommeça?Jeravalaideslarmes.–Celanechangerienàcequetum’asfait.–Jesaisquecelanecomptepasbeaucoup,mais jene levoulaispas.Tunem’aspas

vraimentlaissélechoix.–Ehbien,cen’estpasuneraisonsuffisante,dis-jeendétournantmonregarddelui.– Faire entrer des investisseurs est comme coucher avec quelqu’un, Erica. Cela ne

fonctionnepastoujourset,pourêtrehonnête,tun’espasvraimentletypequ’ilfautpourcegenre de partenariat. Je comprends réellement ce que tu ressens envers ton entreprise.L’une des raisons pour lesquelles je n’ai pasmisé tout de suite, c’est parce que tu as unevolonté de fer. Je savais que travailler avec toi ne serait pas facile, et que tu te battraiscontinuellement. Je n’avais pas complètement réalisé les conséquences d’un accord avecMaxjusquerécemment,etjenepouvaispassupporterdeteperdre.

–Cen’estpascequ’ilveutdemoi,insistai-je,ennelecroyantqu’àmoitié.Max,commebeaucoupd’autres,nerespectaitpastotalementmonespacevital,maisil

n’avait jamais fait lemoindre commentaire explicite quime ferait penser qu’ilme désiraitcharnellement.Etmêmesic’étaitlecas,jepouvaismedéfendre.

–Ohsi, fais-moiconfiance.Quetuveuilles lecroireoupas, ilnereculeradevantrienpourt’avoirsicela luipermetdesevengerdemoi.Aprèsavoirvucequ’il s’estpasséavecIsaac,jenepouvaisplusprendrecerisque.

J’agitainégativement la tête. Isaacm’avaitpriseparsurprise,etsiBlakem’avait laisséuneminutedeplus,jel’auraisrepoussésanssonaide.

– Je ne peux dire comment ou quandMax aurait avancé ses pions, mais je peux tepromettrequ’ilauraitagi.Ilt’auraitpousséàfairedeschosesquetuneveuxpas,justepourconserver l’entreprise,parcequ’il saitàquelpointelleest importantepour toi,parcequ’ilsaitàquelpointtuesimportantepourmoi.

–Commentpeux-tulesavoir?–Bonsang,Erica, jesuisalléau feupour teprotéger.Tunepeuxpas toutbêtement

mecroire,réaliserquejel’avaisvuvenir,quejenelaisseraijamaisrient’arriver?

Page 189: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Je fermai les yeux. Les vagues s’écrasaient sur la plage, et une brise légère nouscaressait.JesentisBlake,sonattractionanimalequim’appelait.C’était leseulhommequej’avais jamais aimé, et il était là, exprimant son amour pour moi, promettant de meprotéger, presque trop chevaleresque pour être pris au sérieux. Lorsque je les rouvris etregardaidanslessiens,sesintentionsnelaissaientpasplanerlemoindredoute.

Tout était devenu excessif. Mes yeux s’embrumèrent, mais je refusai de capituler.J’enroulaimesbrasautourdemapoitrine,meserrantfort.

–Tumetues,Blake.–Sais-tucombiendefemmesm’ontprésentéunprojetdanscettesallederéunion?me

demanda-t-il.–Combien?–Une.Sesparolesrestèrentsuspenduesdansl’air,unevéritéincroyablequiexprimaitcombien

mapositiondanscette industriepouvaitêtrepérilleuse.Sic’étaitvrai,êtrearrivée jusqu’icitenait du miracle. Cela expliquait également pourquoi leur réceptionniste me regardaitcommesij’avaistroistêtesàchaquefoisquejevenaisàunrendez-vous.

–Ouah…J’agitailatête.– Max et moi te voulions tous les deux ce jour-là, pour des raisons différentes. Je

n’allaispastelaisserpartirsansmebattre.Même avec les risques concomitants au fait de travailler avec Blake, mon entreprise

étaitprobablementmieuxprotégéequ’ellenel’avaitjamaisété.Maintenant,ilnousrestaitànousfigurercommenttravaillerensemblesansserendremutuellementfous.

–Alors,quefait-onmaintenant?demandai-je,enespérantqu’ilavaitdesidées.–Toutcequetuveux,tantquecelan’impliquepasMax.NiIsaac.–Alorsnoussommesassociés.Ilacquiesça.–Jesuisauxcommandes,Blake.Tumedisunefoiscommentdirigermonentreprise,et

c’estterminé.Je lepensais.Jenecéderaispassurcepoint,etheureusement, iln’étaitpasvraiment

enpositiondediscuter,parcequ’ilavaitfinancéleprojetsansgarantiejuridique.Ilserelevaetpritmonverre,enfonçantlesienetlemiendanslesableàcôtédenous.–C’esttoilechef,mabelle.Il me repoussa dans le fauteuil, releva ma robe, et imprima d’ardents baisers sur

l’intérieur demes cuisses. Il ôtama culotte avec une facilité experte, et couvritma chatteavecsabouche.

–MonDieu.Jem’agrippaiaufauteuil.

Page 190: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Il m’ouvrit avec ses doigts et sa langue de velours suivit. La double pression me fitfrémiravecviolence.Ilglissaundoigtfinementenmoietsuçaplusfort,papillonnantdelalanguedanslemêmetemps.Matêteretombaenarrière.Oui!

Jemecambrai,mepressantcontresabouche,etildélivralecoupfinal,m’étirantavecun deuxième doigt. Ses dents broutèrent mon clito, me titillant avec toute la retenuenécessaireetjusteassezdepressionpourmefairebasculer.

–Blake!criai-jedansl’airenténébré,enluttantpourreprendremonsouffle.Labriserafraîchissaitmapeau,chassantlafinebrumedesueurquimerecouvrait,mais

Blakecontinuait.Jejouisencoreetencore,meserrantsursesdoigtsjusqu’àêtreinerteetnepluspouvoirpenserqu’àmonbesoindesentirsonsexemepilonner.

Jegémissonprénometlesuppliaid’arrêter,nesachantpluscequejepourraisencoresupporter.

Il se releva, etmes lèvres s’ouvrirent lorsque jedistinguai ladure silhouettedans sonjean.Ilmesoulevaetm’enlaça.

–Allons à l’intérieur,murmura-t-il avant que jene commenceà ledéshabiller sur-le-champ.

Je retrouvai mon propre goût dans son baiser, son érection comprimée contre monventre. Toujours trop et pourtant jamais assez, la férocité de mon appétit pour luicontinuaitdemecouperlesouffle.

Je suivisBlakeà l’intérieurde lamaison,et ilnousmenadans lachambre,unepiècegigantesque au plafond voûté et aux murs blancs. À côté de cette maison immense etélégante, le pavillon d’été des Fitzgerald ressemblait à une cabane en bois. C’était unevieillefortune,maisenréalité,BlakepouvaitacheterDanieln’importequand.

Le lit, recouvertd’unédredonblancmoelleux,était lapiècemaîtressede lachambre,et devint mon unique centre d’intérêt tandis que je décomptais les secondes qui nousséparaientde l’instantoùnousy serionsétendusnus.Blakeouvrit lentement la fermetureÉclairdemarobe,prenantsontempsetmetitillantdegesteslégers.Jeglissaihorsdemarobeetm’avançaiverslelit.Jem’yinstallaiàgenouxetattendispatiemmentqueBlakesedéshabille. Il s’avança à quatre pattes, avec la grâce preste d’un prédateur traquant saproie,quandj’étaisd’humeuràêtredébusquée.

Ilme tourna jusqu’àque je sois endessousde lui, écarta ses jambesquiouvrirent lesmiennes.Prenantunseindanslaboucheenlesuçantfort,ilenexcitalapointeduboutdela langue. Je me cambrai contre lui et enroulai ma jambe sur la sienne dans une piètretentativedelerapprocherdemoi.Ilnebougeapasd’unpouce.

–Tuesuneadorablepetitechose,metaquina-t-ilenlaissantcourirsamainlelongdel’intérieurdemacuisse,àquelquescentimètresde l’endroitoù j’avais tellementplusenviequ’ilmetouche.

–Touche-moi,s’ilteplaît,Blake.

Page 191: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Seslèvressecourbèrent.–Lèvelesbras.Impatientede lesatisfairesicelasignifiaitqu’ilallaitcesserdemetitiller, j’obéis. Il les

tiraplushautencore,etouvrit l’undemesbracelets,qu’il refermasurmonautrepoignet,enlesliantensemble,créantunepairedemenottespourlemoinsonéreuse.

–Blake,non,tuvaslescasser.–Passitunebougespas.–Commentsuis-jecenséefairecela?Tumerendsfolle!Mecontrôlerquandilmetenaitétaitunechose,maisjen’avaisaucuneidéedecequi

allaitsepassersijedevaislefaireseuleetsansaide.–Lamaîtrisedesoi,secontenta-t-ilderépondre.Tiens-toilà.Ilguidamesmainsverslatêtedelit.Jedéglutisetenroulaimesdoigtsautourdestiges

demétal,avecsoudainuneconscienceexacerbéedetoutes lessensationsquiparcouraientmoncorpsetdesréactionsphysiquesquejedevaismaintenantcontrôlersijenevoulaispasdétruire lesplendidecadeaudeBlake. Ilnemetouchaitencorequ’àpeine,et je frémissaisdéjàd’anticipation.

Ilcommençatoutenbas,pinçantleboutdemesorteils.Unéclairdedésirs’abattitsurmachatte.Bonsang,ilconnaissaittouslestrucs.Jemecontractai,sachantqu’ilétaitencoreloin d’arriver là, à ce rythme. Il parsema l’intérieur de mes cuisses de baisers humides,poursuivitsurmonventreavantdeplongerdansmonnombrilavecsa langue. Il s’attardasurmesseinsetmaclavicule,soufflasonairchauddansmoncou,provoquantenmoiunechairdepouledesplusagréables.

–Commenttesens-tu?Ilbroutameslèvresaveclessiennes,unsourireentendulessoulevantlégèrement.Tousmesnerfsétaientenéveil,touteslescellulesdemoncorpstendaientverslui,pour

autantquemeslienslepermettaient.–Vivante,murmurai-je,ennetenantplusqu’àunfil.–Bien.Ilsoulevasaqueue,melubrifiantavecmespropreshumidités,glissantentremeslèvres.

Je resserrai mon emprise sur la tête de lit, à cette friction sur mon clito. Puis il fut àl’intérieur demoi en un seulmouvement agile. Je hurlai, serrant les poings sur lemétalpournepasabîmercesliens.

Ses lèvres furent sur les miennes, m’embrassant frénétiquement. Je gémis dans sabouchecommeilmepénétraitencoreetencore,avecuneprofondeurquidéclenchaenmoides spasmes incontrôlables. Je pouvais à peine respirer, anticipant la promesse de cetteextase.J’enfonçaimestalonsdanssescuisses,pourlepropulserencoreplusavant.

Mesémotionsétaientàvif,etjelevoulaisdésespérément.Blakelevalebrasetreplaçale secondbraceletà saplacehabituelle.Libéréedemes liens, jeplongeaimesmainsdans

Page 192: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

ses cheveux et l’embrassai goulûment. J’avais besoin de plus que cela, de lui tout entier.Qu’ilsoitaucourantoupas,jenelelâcherais.

Jesoutinssonsombreregard.– Je t’aime,murmurai-je. J’avais besoin qu’il le sache, après tout ce que nous avions

traversé.Ileutunlégermouvementderecul,sonexpressionpresquedouloureuse,commesimes

motsl’avaienttranspercé.–Fais-moil’amour,s’ilteplaît,Blake.Jeneveuxsentirriend’autrequetoi.Etpourlerestedelanuit,illefit.Ilm’aimadechaquecoupdeboutoirmagistral,me

rappelantquenoscorpsétaientfaitspourcela,etfaitsl’unpourl’autre.Nous étions épuisés, physiquement et émotionnellement, mais Blake ne se relâcha

jamais.Lorsquenousralentîmes,mestendrescaressesredevinrentdesexigencesavides,etilmepritencore,aussistupéfiantàchaquefois,jusqu’àcequenousnouseffondrionsdanslesbrasl’undel’autre.

***

Je m’éveillai au matin au bruit de l’océan. Des mouettes volaient juste derrière lafenêtredelachambre.JemeglissaidiscrètementhorsdulitpourlaisserBlakedormir.

Vêtuedesontee-shirt,jelaissaisonodeurm’envelopper.Jetraversailamaisonetprisune banane dans la corbeille de fruits de la cuisine. Je sortismon ordinateur portable etm’installaisurlatabledelasalleàmangerquidonnaitsurl’océan.JecommençaiàécrireunmailauprofesseurQuinlan,auqueljem’adressaidecettefaçon.Quelquesoitletempsquis’écoulerait,jeneseraisprobablementjamaiscapabledel’appelerBrendan.

Je cherchai les mots justes pour décrire la situation. Il connaissait l’histoire de Maxmieuxque la plupart des gens,mais j’espérais que les événements récentsne feraient pastropmauvaiseimpressionauprofesseur.Jemesentaisobligéedeleteniraucourantaucasoù ce serait ce qui sepasserait. J’achevaimonmessage et le relus, denouveau subjuguéeparl’incroyablevitesseàlaquellemavieavaitchangécesquarante-huitdernièresheures.

Etmoiquipensaisavoirconnulestressàlafac.J’envoyai lemail et visitai quelques sites, avant de revenir à Clozpin. La roulette du

navigateurtournaitindéfiniment.Lesiteétaitdenouveauhorsligne.Merde.J’appelaiSid.Pasderéponse.Jerappelai,maisilnedécrochapas.Jeretournai

enhâtedanslachambre.Jen’avaispasenviederéveillerBlake,maisjen’arrivaispasàmedébarrasserdecetteangoisse.

Jemeglissaiprèsdelui,passaimajambesurlasienne,etleparsemaidepetitsbaisersdoux.Si jedevais leréveiller,autantquecesoitagréablement. Il finitpars’étirer,ouvrantlesyeuxavecunsourireetunefantastiquedémonstrationdetriquematinale.Aussitentantquecesoit,j’avaisbesoindeluipourautrechose.

Page 193: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

–Monchou,lesiteestencorehorsligne,etjen’arrivepasàjoindreSid.Ilseleva,enfilasonjeanetmesuivitjusqu’àlasalleàmanger.Iljetauncoupd’œilà

l’écran et sortit son propre portable de son sac de voyage, s’installa sur le canapé et ledémarra.

–Café?demandai-je.–S’ilteplaît.Ilsemblaitdéjàincroyablementconcentré,alorsqu’ilétaitàpeineréveillé,sescheveux

adorablementébouriffés.Jepréparai lecafé,etpendantqu’ilpassait, jerafraîchis lapage.Cette fois, elle apparut instantanémentavecungrand logo recouvrant l’imagedu site. Lenomreprésentéétaitclairementlisible:M89.

Blake tapait furieusement. Je n’osais demander, mais j’avais le sentiment angoissantquel’attaquen’étaitplusaléatoire.Jeremplisunetasseetlaluiapportai.Illapritsansdireun mot, travaillant comme si je n’étais pas là. Je l’observai patiemment, attendant qu’ilrevienneversmoi.

–Peux-tumedirecequ’ilsepasse?Envrai,cettefois?demandai-jed’unevoixposée.Ilrelevaversmoidesyeuxfatigués.–Laphotodenousdeux,àlaconférence.Elleestdevenuevirale.Tuasprobablement

vuunepointedefréquentation.C’étaitprincipalementlégitime,maisilsl’ontremarqué.–Ils?Ilhésita.–Alorscen’estpasuneattaquealéatoire.–Plusmaintenant,dit-il,sesyeuxsombrespleinsderegret.–Pourquoisont-ilsaprèstoi,Blake?Ilagitalatêteetpassasesmainsdanssescheveux.–Jesuisdésolé,Erica.Maisjevaisréglercela.Jetelepromets.Jehochailatête,certainequeceseraitlecas.

Page 194: Hacker Acte 1 Dangereuses affinités (French Edition)ekladata.com/9BK7nKyFX_YMwgnZoweYobRMtGY.pdf · Marie lâcha alors ma main et leva son verre, ses yeux s’illuminant. – Et

Àparaîtredanslamêmesérie:FatalesAttractions,tome2(septembre2015)

Titreoriginal:Hardwired(TheHackerSeries,book1)

©2013,MeredithWild©ÉditionsMichelLafon,2015,pourlatraductionfrançaise

118,avenueAchille-PerettiCS70024–92521Neuilly-sur-Seine

www.michel-lafon.com

Photodecouverture:©MayerGeorge/Shutterstock

ISBN:978-2-7499-2682-7

Cetteœuvreestprotégéeparledroitd’auteuretstrictementréservéeàl’usageprivéduclient.Toutereproductionoudiffusionauprofitdetiers,àtitregratuitouonéreux,detoutoupartiedecetteœuvre,eststrictementinterditeetconstitueunecontrefaçonprévueparlesarticlesL335-2etsuivantsduCodedelaPropriétéIntellectuelle.L’éditeurseréserveledroitdepoursuivretouteatteinteàsesdroitsdepropriétéintellectuelledevantlesjuridictionscivilesoupénales