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Gustave Flaubert Introduction Gustave Flaubert, né à Rouen le 12 décembre 1821[1] et mort à Canteleu, au hameau de Croisset, le 8 mai 1880, est un écrivain français. Prosateur de premier plan de la seconde moitié du XIXe siècle, Gustave Flaubert a marqué la littérature française par la profondeur de ses analyses psychologiques, son souci de réalisme, son regard lucide sur les comportements des individus et de la société, et par la force de son style dans de grands romans comme Madame Bovary (1857), Salammbô (1862), L'Éducation sentimentale (1869), ou le recueil de nouvelles Trois Contes (1877). Sommaire * 1 Biographie * 2 Les quatre piliers de l'œuvre flaubertienne o 2.1 Madame Bovary o 2.2 Salammbô o 2.3 L’Éducation sentimentale o 2.4 Bouvard et Pécuchet * 3 Œuvres * 4 Voir aussi Illustration 1: Gustave Flaubert

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Gustave Flaubert

Introduction

Gustave Flaubert, né à Rouen le 12 décembre 1821[1] et mort à Canteleu, au hameau de Croisset, le 8 mai 1880, est un écrivain français.

Prosateur de premier plan de la seconde moitié du XIXe siècle, Gustave Flaubert a marqué la littérature française par la profondeur de ses analyses psychologiques, son souci de réalisme, son regard lucide sur les comportements des individus et de la société, et par la force de son style dans de grands romans comme Madame Bovary (1857), Salammbô (1862), L'Éducation sentimentale (1869), ou le recueil de nouvelles Trois Contes (1877).

Sommaire

* 1 Biographie * 2 Les quatre piliers de l'œuvre flaubertienne o 2.1 Madame Bovary o 2.2 Salammbô o 2.3 L’Éducation sentimentale o 2.4 Bouvard et Pécuchet * 3 Œuvres * 4 Voir aussi

Illustration 1: Gustave Flaubert

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o 4.1 Bibliographie o 4.2 Lien interne o 4.3 Liens externes et sources * 5 Notes et références

Biographie

Né dans une famille de la petite bourgeoisie catholique et d'ancêtres protestants[2], Gustave Flaubert est le deuxième enfant d’Achille Cléophas Flaubert (1784-1846), chirurgien-chef très occupé à l'Hôtel Dieu (hôpital) de Rouen, et de son épouse, Anne Justine Caroline Fleuriot (1793-1872).

Il naît le 12 décembre 1821 après une sœur et deux frères décédés en bas âge[3], et sera délaissé en faveur de son frère aîné, brillant élève admiré par la famille (qui succèdera d'ailleurs à son père comme chirurgien chef de l'Hôtel-Dieu de Rouen). Gustave Flaubert passe une enfance sans joie, marquée par l'environnement sombre de l'appartement de fonction de son père à l'hôpital de Rouen (aujourd'hui musée Flaubert et d'histoire de la médecine[4]), mais adoucie par sa complicité avec sa sœur cadette, Caroline, née trois ans après lui[5].

Adolescent aux exaltations romantiques, il est déjà attiré par l'écriture au cours d'une scolarité vécue sans enthousiasme au Collège royal, puis au lycée de Rouen, à partir de l'année 1832. Il est renvoyé en décembre 1839 pour indiscipline et passe seul le baccalauréat en 1840. Le premier événement notable dans sa jeunesse est sa rencontre à Trouville-sur-Mer, durant l'été 1836, d'Élisa Schlésinger qui laissera une profonde empreinte en lui jusqu'à la fin de ses jours. Il transposera d'ailleurs cette passion, avec la charge émotionnelle qu'elle a développée chez lui, dans son roman L'Éducation sentimentale, en particulier dans la page célèbre de « l'apparition » de Madame Arnoux au regard du jeune Frédéric et dans leur dernière rencontre poignante.

Dispensé de service militaire grâce au tirage au sort qui lui est favorable (cela se pratiquait ainsi à l'époque), Flaubert entreprend sans conviction, en 1841, des études de Droit à Paris où il mène une vie agitée. Il y rencontre des personnalités dans les mondes des arts, comme le sculpteur James Pradier, et de la littérature, comme l'écrivain Maxime Du Camp qui deviendra son grand ami, le poète et auteur dramatique Victor Hugo. Il abandonne le droit, qu'il abhorre, en janvier 1844 après une première grave crise d'épilepsie. Il revient à Rouen, avant de s'installer en juin 1844 à Croisset, au bord de la Seine, à quelques kilomètres en aval de Rouen. Il y rédige quelques nouvelles et une première version de L'Éducation sentimentale. En début 1846 meurent à peu de semaines d'intervalle, son père, puis sa jeune sœur (deux mois après son accouchement — Gustave prendra la

Illustration 2: portrait par Eugène Giraud

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charge de sa nièce, Caroline). C'est également, au printemps de cette année que commence sa liaison houleuse et intermittente sur une dizaine d'années avec la poétesse Louise Colet. Jusqu'à leur rupture — sa dernière lettre à Louise Colet est datée du 6 mars 1855 —, il entretiendra avec elle une correspondance considérable dans laquelle il développera son point de vue sur le travail de l'écrivain, les subtilités de la langue française et ses vues sur les rapports entre hommes et femmes. Gustave Flaubert au physique de plus en plus massif est cependant un jeune homme sportif : il pratique la natation, l'escrime, l'équitation, la chasse…Acte de naissance de Gustave Flaubert en 1821

Il assiste à Paris à la Révolution de 1848 d'un regard très critique que l'on retrouve dans L'Éducation sentimentale. Poursuivant ses tentatives littéraires, il reprend entre mai 1848 et septembre 1849 la première version commencée en 1847 de La Tentation de saint Antoine inspirée par un tableau qu'il a vu à Gênes en 1843 au cours du voyage de noces de sa sœur que la famille accompagnait. Puis Gustave Flaubert organise, avec Maxime du Camp un long voyage en Orient qui se réalisera entre 1849 et 1852. Voyage qui le conduit en Égypte et à Jérusalem en passant, au retour, par Constantinople et l'Italie. Il nourrira ses écrits ultérieurs de ses observations, de ses expériences et de ses impressions, par exemple dans Hérodias.

Le 19 septembre 1851, Flaubert, poussé par ses amis Louis Bouilhet et Maxime Du Camp, commence la rédaction de Madame Bovary, en s'inspirant d'un fait divers normand. Il achèvera son roman réaliste et psychologique en mai 1856 après 56 mois de travail. Il fréquente épisodiquement les salons parisiens les plus influents du Second Empire, comme celui de Madame de Loynes dont il est très amoureux ; il y rencontre entre autres George Sand. À la fin de l'année 1856, Madame Bovary paraît en revue puis, en avril 1857, le roman sort en librairie et fait l’objet d’un procès retentissant pour atteinte aux bonnes mœurs : Flaubert est acquitté grâce à ses liens avec la société du Second Empire et avec l'impératrice, ainsi qu'à l'habileté de son avocat, tandis que Baudelaire, poursuivi par le même tribunal, pour les mêmes raisons, après publication de son recueil Les Fleurs du mal dans la même année 1857, est condamné. À partir de la parution de Madame Bovary Flaubert poursuit une correspondance avec Marie-Sophie Leroyer de Chantepie, femme de lettres vivant à Angers, et dévouée aux pauvres. Flaubert se partage dès 1855 entre Croisset et Paris où il fréquente les milieux littéraires et côtoie les frères Goncourt, Sainte-Beuve, Baudelaire, Théophile Gautier et un peu plus tard Tourgueniev et la Princesse Mathilde.

Le 1er septembre 1857, Flaubert entame la rédaction de Salammbô, roman historique qui évoque Carthage en révolte au troisième siècle avant J.-C., et pour cela, il voyage au cours des mois d'avril et juin 1858 en Tunisie afin de se documenter et de voir Carthage. Le roman paraît après une longue maturation en 1862.

Deux ans plus tard, le 1er septembre 1864, Flaubert entreprend la version définitive de L'Éducation sentimentale, roman de formation marqué par l'échec et l'ironie avec des éléments autobiographiques comme la première passion amoureuse ou les débordements des révolutionnaires de 1848. Le roman est publié en novembre 1869 : mal accueilli par la critique il ne s'en vend que quelques centaines d'exemplaires.

Flaubert continue sa vie mondaine : il rencontre l'empereur, reçoit la Légion d'honneur en 1866 et resserre ses liens avec George Sand qui le reçoit à Nohant. En juillet 1869, il est très affecté par la mort de son ami Louis Bouilhet. Il devient l'amant de la mère de Guy de Maupassant, se faisant passer auprès de ce dernier pour un simple ami. Il sera d'ailleurs très proche de ce jeune écrivain qui le considère comme un père spirituel.Médaille à l'effigie de Flaubert et le pavillon-musée à Croisset

Durant l'hiver 1870-1871, les Prussiens occupant une partie de la France dont la Normandie et

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Croisset, Flaubert se réfugie avec sa mère chez sa nièce, Caroline, à Rouen ; sa mère meurt le 6 avril 1872. À cette époque, il a des difficultés financières liées à la faillite de son neveu par alliance : il vend ses fermes et quitte par économie son appartement parisien alors que, touchée par des maladies nerveuses, sa santé devient délicate. Il achève et publie toutefois le 1er avril 1874 la troisième version de La Tentation de saint Antoine, juste après l'échec de sa pièce de théâtre Le Candidat en mars 1874. Sa production littéraire continue avec les Trois contes, volume qui comporte trois nouvelles : Un cœur simple, centré sur la figure de Félicité inspirée par Julie, nourrice puis domestique qui servira la famille Flaubert, puis Gustave seul jusqu'à la mort de ce dernier, - La Légende de saint Julien l'Hospitalier, conte hagiographique des temps médiévaux écrit en cinq mois en 1875, et Hérodias autour de la figure de saint Jean Baptiste, écrit dans l'hiver 1875-1876. La publication du volume le 24 avril 1877 est bien accueillie par la critique.

De 1877 à 1880, il poursuit la rédaction de Bouvard et Pécuchet, qu'il avait entamée en 1872-1874 : l'œuvre satirique pour laquelle il réunissait une documentation immense restera inachevée, elle sera publiée en l'état dans l'année 1881, un an après sa mort.

Ses dernières années sont assombries par la disparition de ses amis, les difficultés financières et par des problèmes de santé. Il meurt subitement le 8 mai 1880, à Canteleu, au hameau de Croisset, foudroyé par une hémorragie cérébrale. Son enterrement au cimetière monumental de Rouen se déroule le 11 mai 1880, en présence de nombreux écrivains importants qui le reconnaissent comme leur maître, qu'il s'agisse d'Émile Zola, d'Alphonse Daudet, d'Edmond de Goncourt, de Théodore de Banville ou de Guy de Maupassant, dont il avait encouragé la carrière depuis 1873[6].

La Bibliothèque historique de la Ville de Paris possède le manuscrit de l'Education sentimentale ainsi que 36 carnets de notes de voyages et de lectures écrites de la main de l'écrivain. Ce fonds a été légué par sa niéce en 1931.

Les quatre piliers de l'œuvre flaubertienne

Flaubert est le contemporain de Charles Baudelaire et il occupe, comme le poète des Fleurs du mal une position charnière dans la littérature du XIXe siècle. À la fois contesté (pour des raisons morales) et admiré de son temps (pour sa force littéraire), il apparaît aujourd'hui comme l'un des plus grands romanciers de son siècle avec en particulier Madame Bovary, roman qui fonde le bovarysme, puis L'Éducation sentimentale ; il se place entre le roman psychologique (Stendhal), et le mouvement naturaliste (Zola – Maupassant, ces derniers considérant Flaubert comme leur maître). Fortement marqué par l'œuvre d’Honoré de Balzac dont il reprendra les thèmes sous une forme très personnelle (L'Éducation sentimentale est une autre version du Lys dans la vallée, Madame Bovary s'inspire de La Femme de trente ans)[7], il s'inscrit dans sa lignée du roman réaliste. Il est aussi très préoccupé d'esthétisme, d'où son long travail d'élaboration pour chaque œuvre (il teste ses textes en les soumettant à la fameuse épreuve du « gueuloir[8] », qui consiste à les lire à pleine voix). Mais il est tellement obsédé par l'exemple d’Honoré de Balzac, son père littéraire, que l'on retrouvera dans ses notes cette injonction : « s'éloigner du Lys dans la vallée, se méfier du Lys dans la vallée[9] ».

On a également souvent souligné la volonté de Flaubert de s'opposer à l'esthétique du roman-feuilleton, en écrivant un « roman de la lenteur »[10].

Enfin, son regard ironique et pessimiste sur l'humanité fait de lui un grand moraliste. Son Dictionnaire des idées reçues donne un aperçu de ce talent.

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Sa vaste correspondance avec Louise Colet, George Sand et beaucoup d'autres a été publiée en cinq volumes dans la collection de la Pléiade.

Madame Bovary

Flaubert commence le roman en 1851 et y travaille pendant 5 ans, jusqu’en 1856. À partir d’octobre, le texte est publié dans la Revue de Paris sous la forme de feuilleton jusqu’au 15 décembre suivant. En février 1857, le gérant de la revue, Léon Laurent-Pichat, l’imprimeur et Gustave Flaubert sont jugés pour « outrage à la morale publique et religieuse et aux bonnes mœurs ». Défendu par l’avocat Jules Sénard, malgré le réquisitoire du procureur Ernest Pinard, Gustave Flaubert est blâmé pour « le réalisme vulgaire et souvent choquant de la peinture des caractères »[11] mais est finalement acquitté notamment grâce à à ses soutiens dans le milieu artistique et politique, la notoriété de sa famille et la plaidoirie de son avocat[12]. Le roman connaîtra un important succès en librairie.

Honoré de Balzac avait déjà abordé le même sujet dans La Femme de trente ans en 1831 sous forme de nouvelle-roman qui parut en 1842 dans l’édition Furne de La Comédie humaine, sans toutefois faire scandale.

Le récit débute ainsi. Après avoir suivi ses études dans un lycée de province, Charles Bovary s'établit comme officier de santé et se marie à une riche veuve. À la mort de celle-ci, Charles épouse une jeune femme, Emma Rouault, élevée dans un couvent, vivant à la ferme avec son père (un riche fermier, patient du jeune médecin). Emma se laisse séduire par Charles et se marie avec lui. Fascinée par ses lectures romantiques d'adolescence, elle rêve d’une nouvelle vie, méprisant son mari, délaissant son rôle maternel et elle fait la rencontre d'amants méprisables qui vont faire basculer sa famille.

Salammbô

Illustration 3: Salamnbô, peinture par Gaston Bussière, 1907

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Salammbô vient après Madame Bovary. Flaubert en commence les premières rédactions en septembre 1857. Quelques mois plus tôt, après avoir gagné le procès qui avait été intenté contre Madame Bovary, il avait fait part dans sa correspondance (lettre à Mlle Leroyer de Chantepie) de son désir de s’extirper littérairement du monde contemporain, et de travailler à un roman dont l’action se situe trois siècles avant Jésus-Christ. En avril-juin 1858, il séjourne à Tunis pour s’imprégner du cadre de son histoire. Si l’intrigue est une fiction, il se nourrit des textes de Polybe, Appien, Pline, Xénophon, Plutarque, et Hippocrate pour peindre le monde antique et bâtir la « couleur locale ». Dès sa parution en 1862, le roman connaît un succès immédiat, en dépit de quelques critiques réservées (Charles-Augustin Sainte-Beuve) mais avec d’appréciables encouragements (Victor Hugo, Jules Michelet, Hector Berlioz).

Le roman débute par le paragraphe intitulé « Le Festin ». Les mercenaires fêtent à Carthage la fin de la guerre dans les jardins d’Hamilcar, leur général. Échauffés par son absence et par le souvenir des injustices qu’ils ont subis de la part de Carthage, ils ravagent sa propriété ; Salammbô, sa fille, descend alors du palais pour les calmer. Mathô et Narr’havas, tous deux chefs dans le camp des mercenaires, en tombent amoureux. Spendius, un esclave libéré lors du saccage, se met au service de Mathô et lui conseille de prendre Carthage afin d’obtenir Salammbô.L’Éducation sentimentaleArticle détaillé : L'éducation sentimentale.

Le roman, rédigé à partir de septembre 1864 et achevé le 16 mai 1869 au matin, comporte de nombreux éléments autobiographiques (tels la rencontre de Madame Arnoux, inspirée de la rencontre de Flaubert avec Élisa Schlésinger). Il a pour personnage principal Frédéric Moreau, jeune provincial de dix-huit ans venant faire ses études à Paris. De 1840 à 1867, celui-ci connaîtra l’amitié indéfectible et la force de la bêtise, l’art, la politique, les révolutions d’un monde qui hésite entre la monarchie, la république et l’empire. Plusieurs femmes [Rosanette, Mme Dambreuse] traversent son existence, mais aucune ne peut se comparer à Marie Arnoux, épouse d’un riche marchand d’art, dont il est éperdument amoureux. C’est au contact de cette passion inactive et des contingences du monde qu’il fera son éducation sentimentale, qui se résumera pour l’essentiel à brûler, peu à peu, ses illusions.

Bouvard et Pécuchet

Le projet de ce roman remonte à 1872[13], puisque l'auteur affirme son intention comique dans un courrier à George Sand. Dès cette époque, il songe à écrire une vaste raillerie sur la vanité de ses contemporains. Entre l'idée et la rédaction interrompue par sa mort, il a le temps de collecter une impressionnante documentation : on avance le chiffre de mille cinq cents livres[14]. Lors de l'écriture, Flaubert avait songé au sous-titre : « encyclopédie de la bêtise humaine » et c'est effectivement en raison du catalogue qu’il nous en propose que le roman est célèbre. Le comique vient de la frénésie des deux compères, à tout savoir, tout expérimenter, et surtout leur incapacité à comprendre correctement. Le roman est inachevé et ne constitue que la première partie du plan. L'accueil fut réservé, mais certains le considèrent comme un chef-d'œuvre[14].

Par une chaude journée d'été, à Paris, deux hommes, Bouvard et Pécuchet, se rencontrent par hasard sur un banc et font connaissance. Ils découvrent que, non seulement ils exercent le même métier (copiste), mais en plus qu'ils ont les mêmes centres d'intérêts. S'ils le pouvaient, ils aimeraient vivre à la campagne. Un héritage fort opportun va leur permettre de changer de vie. Ils reprennent une ferme dans le Calvados, non loin de Caen et se lancent dans l'agriculture. Leur inaptitude ne va engendrer que des désastres. Ils vont s'intéresser à la médecine, la chimie, la géologie, la politique

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avec les mêmes difficultés. Lassés par tant d'échecs, ils retournent à leur métier de copiste.

Critiquant les idées reçues, Flaubert montre que contrairement à ce que pense Hegel, l'Histoire n'a pas de fin, elle est un éternel recommencement. Les deux compères, qui étaient copistes au début du roman, retournent à leur état.

Œuvres

Romans

* Rêve d'enfer, 1837 * Mémoires d'un fou, 1838 * Madame Bovary, 1857 et 1930 (éd. suivie des actes du procès) * Salammbô, 1862 et 1874 (éd. définitive) * L'Éducation sentimentale, 1869 * Le Candidat (vaudeville), 1874 * La Tentation de saint Antoine, 1874 et 1903 (éd. définitive) * Trois Contes : Un cœur simple, La Légende de saint Julien l'Hospitalier, Hérodias, 1877 * Le Château des cœurs (théâtre), 1880 * Bouvard et Pécuchet (inachevé), 1881 * Par les champs et les grèves (Voyage en Bretagne), 1886 * Mémoires d'un fou, 1901 * À bord de la Cange, 1904 * Œuvres de jeunesse inédites, 1910 * Dictionnaire des idées reçues, 1913 * Premières œuvres, 4 vol., 1914-1920 * Novembre, 1928 (mais 1842) * Souvenirs, notes et pensées intimes (1838-1841), 1965 * Album, annoté par Jean Bruneau et Jean A. Ducourneau, 1972 * Bibliomanie et autres textes 1836-1839, 1982

Lettres

* Lettres à la municipalité de Rouen, 1872 * Lettres à George Sand, 1884 * Correspondance, 4 vol., 1887-1893 * Lettres à sa nièce Caroline, 1906 * Lettres inédites à Georges Charpentier, 1911 * Lettres inédites à la princesse Mathilde, 1927 * Correspondance, 9 vol. 1926-1933 et Supplément, 4 vol. 1954 * Lettres inédites à Tourgueneff, 1946 * Lettres inédites à Raoul Duval, 1950 * Lettres d'Orient, 1990 * Correspondance, annotée par Yvan Leclerc et Jean-Benoît Guinot, 6 vol. : tome I (1830-1851), 1973 ; t. II (1851-1858), 1980 ; t. III (1859-1868), 1991 ; t. IV (1869-1875), 1998 ; t. V (1875-1880), 2007 ; Index, 2007 (éd. Jean Bruneau)

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Recueils

* Œuvres complètes, 8 vol., 1885 (éd. Quantin) * Œuvres, 10 vol., 1874-1885 (éd. Lemerre) * Œuvres complètes, 13 vol., 1926-33 (éd. Conard) * Œuvres complètes illustrées, 10 vol., 1921-25 * Œuvres, 2 vol. 1951-1952 et 1989 (nouv. éd.), annotées par Albert Thibaudet et René Dumesnil (éd. Gallimard) * Œuvres complètes, 1940-1957 (éd. Les Belles Lettres) * Œuvres complètes, 2 voll. 1964 (éd. Seuil) * Œuvres complètes, 18 vol., 1965, annotées par Maurice Nadeau * Œuvres complètes, 16 vol., 1975 (éd. Études littéraires françaises) * Œuvres complètes, 16 vol., 1971-1975, annotées par Maurice Bardèche * Œuvres complètes, annotées par Claudine Gothot-Mersch et Guy Sagnes, 5 vol. : tome I : Œuvres de jeunesse, 2001 ; t. II-V : en préparation.

Bibliographie

* Paul Bourget, L'Œuvre de Gustave Flaubert, extr. des Annales, 13 octobre 1907, pp. 341-343. * Articles de Georges Dubosc (1854-1927) sur Gustave Flaubert : « Gustave Flaubert et les Caluyots » (1920), « Gustave Flaubert à Notre-Dame de la Délivrande » (1923), « Les Ancêtres paternels de Gustave Flaubert » (1924), « Salammbô au cinéma » (1925) * Henri Guillemin, Flaubert devant la vie et devant Dieu, Plon, 1939 * Jean de La Varende, Flaubert par lui-même, coll. « Écrivains de toujours », Seuil, Paris, 1951 * Jean-Pierre Richard, Littérature et Sensation (1953), coll. « Points », Seuil, 1970 * Jean-Paul Sartre, L'Idiot de la famille (1971-1972), Gallimard-NRF, Paris, 1988, (édition revue et augmentée) * Maurice Bardèche: L’Œuvre de Flaubert, Les Sept couleurs, 1974 * Colloque de Cerisy, La Production du sens chez Flaubert, Union générale d'éditions, 1975 * Maurice Nadeau, Gustave Flaubert, écrivain, éd. Maurice Nadeau, 1980 * Albert Thibaudet, Gustave Flaubert (1935), coll. « Tel », Gallimard, Paris, 1982 * Gérard Genette (sous dir.), Travail de Flaubert, coll. « Points », Seuil, 1983 * Michel Butor, Improvisations sur Flaubert, La Différence, 1984 * Julian Barnes, Le Perroquet de Flaubert, Stock, Paris, 1986 * Yvan Leclerc, La Spirale et le mouvement, essai sur Bouvard et Pécuchet, Sedes, Paris, 1988 * Herbert Lottman, Flaubert, Fayard, 1989 * Pierre Barillet, Gustave et Louise, Actes Sud, Paris, 1991 * Henri Raczymow, Pauvre Bouilhet, coll. « L'un et l'Autre », Gallimard, Paris, 1998 * Pierre-Marc de Biasi, Flaubert, l'homme-plume, collection « Découvertes », Gallimard, Paris, 2002

Un point sur l'Éducation Sentimentale

Résumé

1840. Fréderic Moreau, un bachelier de 18 ans, aperçoit sur le bateau, qui le mène à sa ville natale de Nogent sur Marne, Mme Arnoux. Elle est la femme de Jacques Arnoux, un spéculateur

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débonnaire . Il échange avec elle quelques mots et un regard : c'est le coup de foudre. Cet instant le marquera à jamais.

Elle lui avouera, très tard, qu'elle a partagé son amour, mais jamais ne lui cédera. Peut-être lors de leur ultime entrevue, 27 ans plus tard, a-t-elle un regret ?

Entre temps Frédéric Moreau, devra d'abord se résigner à retourner vivre en province, en raison de la précarité de sa situation, avant qu'un héritage inespéré ne lui permette de vivre à nouveau à Paris.

Il fréquentera ensuite Rosanette, une femme légère rencontrée lors d'un bal masqué . Ils auront un enfant qui mourra. Frédéric aura également une liaison avec Madame Dambreuse, veuve d'un banquier opportuniste.

Deslauriers, son meilleur ami, épousera Louise Roque, qui aurait tant aimé épouser Fréderic.

C'est pourtant avec Deslauriers, lui aussi accablé de désillusions, que Fréderic tirera "l'ultime leçon de leur éducation sentimentale : rien ne vaut les souvenirs et les illusions de l'adolescence".

Critique de l'Education sentimentale par George Sand

Gustave Flaubert est un grand chercheur, et ses tentatives sont de celles qui soulèvent de vives discussions dans le public, parce qu'elles étendent et font reculer devant elles les limites de la convention.

Ce qui nous a vivement frappée dans son nouveau livre, c'est un plan très original, et qui eût semblé irréalisable à tout autre. Il a voulu peindre un représentant de la plupart des types qui s'agitent dans le monde moderne. Le roman a pour habitude de n'en peindre que deux ou trois, de les destiner à certaines aventures, de ne mettre sur leur chemin que des personnages de second et de troisième ordre ; de composer l'action comme un peintre compose son tableau, laissant dans l'ombre ou dans le vague certaines parties dites sacrifiées, concentrant les effets de lumière, mettant ainsi en relief ce qu'il juge avoir l'importance principale. Ce procédé très connu et très répandu doit-il être arbitraire ? Nous ne le pensons pas ; du moins devant un tableau conçu autrement et magistralement réussi, il est permis d'en douter.

Et puis, nous l'avons déjà dit ailleurs, et nous croyons ne pas devoir changer d'avis, le roman, étant une conquête nouvelle de l'esprit, doit rester une conquête libre. Il perdrait sa raison d'être le jour où il ne suivrait pas le mouvement des époques qu'il est destiné à peindre ou à exprimer. Il doit se transformer sans cesse, forme et couleur. On en a fini avec les données classiques absolues ; le roman y a contribué autant que le théâtre ; il est le terrain neutre et indépendant par excellence.

Plus nous avançons dans l'histoire dont nous sommes les éléments vivants, plus la diversité de vues, qui n'est autre chose que la liberté de conscience, veut être et se manifester.

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Ce n'est donc pas au nom de théories rigides qui ont si longtemps tyrannisé la littérature qu'on peut avec équité et avec lumière juger les maîtres nouveaux. Vieux écoliers, je n'aime pas les pédagogues. Avant de comparer un ouvrage d'art à ceux qui ont pris place dans les panthéons, je me rappelle que les panthéons ne se sont jamais ouverts qu'avec regret aux novateurs ; et après des luttes obstinées. Je vois que les chefs-d'oeuvre ne se ressemblent pas, et que quand on dit avec emphase : le procédé des maîtres, on a dit une chose vide de sens. Chaque maître digne de ce titre a eu son procédé. Toutes les manifestations du beau et du vrai ont été bouleversées par le temps et le milieu qui ont produit les individualités puissantes.

Heureusement ! car s'il nous fallait rester pétrifiés dans l'admiration des premières révélations de l'art, nous n'aurions pas un portrait historique ressemblant. La figure léonine de Condé serait une reproduction du Jupiter antique. Nous n'aurions pas non plus l'expression historique de l'art. La Diane de Goujon ne nous eût pas transmis l'idéal si particulier de la Renaissance. Le maître nous eût donné une copie servile de l'art grec, c'est-à-dire qu'il n'êut pas été un maître.

Voilà bien des raisons qu'on ne conteste plus, et on s'étonne pourtant encore des choses nouvelles, on hésite avant de les admettre. Gustave Flaubert a du débuter par un ouvrage de premier ordre pour vaincre certains préjugés. Le plus curieux de ces préjugés, c'est celui qui consiste à vouloir que la morale d'un livre soit présentée de telle ou telle façon, consacrée par l'usage. Si elle se présente autrement, fût-ce d'une manière encore plus frappante et plus incisive, le livre est déclaré immoral. O rengaine ! que ton règne est difficile à détruire !

Après Madame Bovary, Gustave Flaubert a produit un terrible et magnifique poème, qui a été moins compris par tout le monde, mais que les lettrés ont apprécié à sa valeur. Salammbô est l'oeuvre d'une puissance énorme, effrayante. C'est un monde gigantesque qui se meut et rugit en masse autour de figures monumentales. L'auteur aime à manier des légions. Il joue avec les foules. Après s'être concentré dans l'étude d'une bourgeoise pervertie, il a mis en scène les nations, les races qui s'entre-dévorent. Nous avouons que notre admiration est surtout pour ce côté hardi et grandiose de son imagination ; mais quand, par un de ces contrastes qui lui sont propres, il redescend dans le monde de l'observation, nous le suivons avec la certitude qu'il ne s'y comportera pas comme le premier venu.

Le voici qui nous conduit dans la vie vulgaire et qui semble avoir résolu de nous la montrer si fidèlement que nous en soyons aussi effrayés que de la chute de madame Bovary ou du supplice de Matho. Il a réussi à produire une sensation nouvelle : le rire indigné contre la perversité et la lâcheté des choses humaines, quand, à des époques données, elles vont à la dérive toutes ensemble.

Epris de ces vues d'ensemble qui avaient éclairé si fortement l'histoire de Salammbô, il a exprimé cette fois l'état général qui marque les heures de transition sociale. Entre ce qui est épuisé et ce qui n'est pas encore développé, il y a un mal inconnu, qui pèse de diverses manières sur toutes les existences, qui détériore les aptitudes et fait tourner au mal ce qui eût pu être le bien ; qui fait avorter les grandes comme les petites ambitions, qui use, trahit, fait tout dévier, et finit par anéantir les moins mauvais dans l'égoïsme inoffensif. C'est la fin de l'aspiration romantique de 1840 se brisant aux réalités bourgeoises, aux roueries de la spéculation, aux facilités menteuses de la vie terre à terre, aux difficultés du travail et de la lutte. Enfin, comme le sous-titre du livre l'annonce, c'est l'histoire d'un jeune homme, d'un jeune homme qui, comme tant d'autres, eût volontiers contribué à l'histoire de son temps, mais qui a été condamné à en faire partie comme chaque flot qui

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enfle et s'écroule fait partie de l'Océan. Peu de ces lames sans nom ont la chance de porter un navire ou de déraciner un rocher : ainsi de la foule humaine : elle s'agite et retombe quand elle ne rencontre pas les grands courants, ou elle tourne sans but sur elle-même quand elle plie sous les vents contraires.

Le jeune homme dont nous suivons l'éducation sentimentale à travers les déceptions d'une triste expérience ne serait pas un type complet s'il n'échouait pas par sa faute. Il n'a pas l'énergique constance des exceptions, les circonstances ne l'aident point et il ne réagit pas sur elles. Le romancier dispose comme il l'entend des événements de son poème ; celui-ci ne veut rien demander à la fantaisie pure. Il peint le courant brutal, l'obstacle, la faiblesse ou l'inconstance des lutteurs, la vie comme elle est dans la plupart des cas, c'est-à-dire médiocre. Son héros est, par un point essentiel, semblable au milieu qu'il traverse ; il est tour à tour trop au-dessus ou trop au-dessous de son aspiration. Il la quitte et la reprend pour la perdre encore. Il conçoit un idéal et ne le saisit jamais ; la réalité l'empoigne et le roule sans pouvoir l'abrutir. Il ne trouve pas son courant, et s'épuise à ne pas agir. Vrai jusqu'au bout, il ne finit rien et ne finit pas. Il trouve que le meilleur de sa vie a été d'échapper à une première souillure, et il se demande s'il a échoué dans son rêve de bonheur par sa faute ou par celle des autres.

Ce type si frappant de vérité est le pivot sur lequel s'enroule le vaste plan que l'auteur s'est tracé ; et c'est ici que le dessin de l'action nous a paru ingénieux et neuf. Ce moi du personnage qui subit toutes les influences et traverse toutes les chances du non moi ne pouvait exister sans une corrélation continue avec de nombreux personnages. Il y a là l'étude approfondie de tous les types et de tous les actes bons et mauvais qui influent fatalement sur une situation particulière. Dès lors, le scénario du roman, multiple comme la réalité vivante, se croise et s'entrelace avec un art remarquable. Tout vient au premier plan, mais chacun y vient à son tour, et ce n'est pas une froide photographie que vous avez sous les yeux, c'est une représentation animée, changeante, où chaque type agit en passant avec son groupe de complices ou de dupes, avec le cortège de ses intérêts, de ses passions, de ses instincts. Ils traversent rapidement la scène, mais en accusant chaque fois un pas de plus dans la voie qu'ils suivent, et en jetant un résumé énergique, un court dialogue, parfois une phrase, un mot qui condense, avec une force de naïveté terrible, la préoccupation de leur cerveau.

Gustave Flaubert excelle dans ces détails, qu'on dirait saisis sur nature, dans ces mots que l'on croit avoir entendu, tant ils parlent juste du caractère et de la situation. Sous ce rapport, il est logicien comme Balzac, qui inventait des choses plus vraies que la vérité même.

L'analyse d'un ouvrage si complet est impossible. A la lecture, la complication disparaît, tant l'action de chacun est bien placée sur son rail. On s'inquiéterait à tort d'avoir à faire connaissance non avec cinq ou six personnages, mais avec un groupe nombreux, une petite foule. L'auteur vous présente et vous ramène adroitement tous ses types. Ils marchent sous la tourmente qui les pousse au dévouement, au mensonge, au mal, au ridicule, à l'impuissance ou au désenchantement. Il faudrait les citer tous, car tous ont valeur d'étude sérieuse. Tous représentent un souvenir frappant, qui, en réalité, l'a peut être navré ou obsédé, mais qui, refondu et remanié par une forte et habile main d'artiste, lui apparaît excusable ou comique. C'est ainsi que le théâtre nous fait rire des travers qui, dans la vie nous font bailler, et nous porte à juger philosophiquement les torts qui nous ont froissés.

Il n'y a pas de question morale comme on l'entend soulevée dans ce livre. Toutes les questions, solidaires les unes des autres, s'y présentent en bloc à l'esprit, et chaque opinion s'y juge d'elle-

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même. Quand il sait si bien faire vivre les figures de sa création, l'auteur n'a que faire de montrer la sienne. Chaque pensée, chaque parole, chaque geste de chaque rôle exprime clairement à chaque conscience l'erreur ou la vérité qu'il porte en soi. Dans un travail si bien fouillé, la lumière jaillit de partout et se passe d'un résumé dogmatique. Ce n'est pas être sceptique que de se dispenser d'être pédant.

Ce livre appartient-il au réalisme ? Nous confessons n'avoir jamais compris où commençait le réel, comparé au vrai. Le vrai n'est vrai qu'à la condition de s'appuyer sur la réalité. Celle-ci est la base, le vrai est la statue. On peut soigner les détails de cette base, c'est encore de l'art. Tout le monde sait que le piédestal du Persée de Benvenuto Cellini, à Florence, est un bijou ; on regrette que la statue ne soit pas un chef-d'oeuvre. On avait le droit de l'exiger. Nous donnerions volontiers au réalisme le simple nom de science des détails. Le vrai, dont il ne peut se passer, et dont il ne se passe pas quand il est manié avec talent, c'est la science de l'ensemble, c'est la synthèse de la vie, c'est le sentiment qui ressort de la recherche des faits. Nous ne savons donc pas du tout si Balzac était réaliste et si Flaubert est réaliste. On les a souvent comparés l'un à l'autre parce qu'ils ont le même procédé. Ils établissent leur fiction sur une grande étude de la vie réelle. Mais ils diffèrent par des qualités essentielles, et là s'arrête la comparaison. Flaubert est grand poète et excellent écrivain. Balzac, moins correct en fait de goût, a plus de feu et de fécondité.

Ce qui nous est arrivé en achevant la lecture de l'Education sentimentale arrive à quiconque ferme un livre lu avec plaisir ou avec émotion. Nous avons dit : qu'est-ce que cela prouve ? Cette réflexion est stupide quand elle s'applique à une étude simple, car il y a des études simples comme il y a des corps simples. Mais devant une étude de la vie multiple, de la combinaison, de la vie sociale en un mot, on a le droit de demander à l'auteur où il nous mène et ce que nous devons penser de cette vie qu'il met sous nos yeux, et qui est censée être la nôtre.

Ici l'auteur se tait-il ?

Il a mis devant nous yeux un miroir en disant : " Regardez-vous ; si votre image n'est pas ressemblante, celle de votre voisin le sera peut-être. " Et, en effet, nous avons tous trouvé le voisin ressemblant. C'est à nous de conclure et de nous demander si notre époque est effectivement médiocre, ridicule, et condamnée à l'éternel avortement de ses aspirations.

La majorité des opinions, qui a disposé de nos destinées jusqu'à ce jour, et qui n'a pas su nous donner un état social libre et logique, a été médiocre en effet, et c'est une douce punition que de la vouer au ridicule ; mais l'éternel avortement n'est pas dans la nature matérielle, il ne saurait être dans la nature pensante. Nous ne pouvons exiger qu'un artiste nous raconte l'avenir, mais nous pouvons le remercier de nous faire, d'une main ferme, la critique du passé. Donc, la réponse et simple et facile : Que prouve ton livre, écrivain humoristique, railleur sévère et profond ? - Ne dis rien. Je le sais, je le vois. Il prouve que cet état social est arrivé à sa décomposition et qu'il faudra le changer très radicalement. Il le prouve si bien qu'on ne te croirais pas si tu disais le contraire !

La Liberté. 21 décembre 1869

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L'Education sentimentale vue par Emile Zola

Il est certaines œuvres dont la publication est un événement parisien qui appartient à la chronique. C'est à ce titre que je m'empare de l'Education sentimentale, de Gustave Flaubert, ce livre jeté entre deux orages politiques : les élections d'hier et les séances législatives de demain.

J'ai des scrupules que je dois avouer avant tout. je n'ai mis qu'une journée à lire ce livre qui a coûté à l'auteur six ans de travail et de soins. J'ai bien reçu une impression vive, une sensation générale ; mais, à coup sûr, je n'ai pas pénétré toutes les intentions de l'oeuvre, je n'ai pu en étudier ni l'équilibre ni la portée. Gustave Flaubert est un artiste consciencieux qui ne se contente pas de construire solidement son oeuvre, pierre à pierre ; quand les pierres sont cimentées, il les sculpte, et il faut voir alors de quelles broderies il les fouille ; un livre de lui est tout un monde de détails, une nef ouvragée avec des finesses de ciseau merveilleuses. En fermant le second volume de l'Education sentimentale, j'étais en plein éblouissement. Les cinquante ou soixante personnages de l'oeuvre, dansaient, les épisodes si nombreux se mêlaient dans ma tête. Je confesse qu'aujourd'hui encore le calme ne s'est pas fait en moi. Et quand je songe aux six années laborieuses de l'auteur, je me sens pris d'une certaine honte à vouloir juger un tel effort en quelques heures. Je n'entends donc pas fait oeuvre de juge. Je m'en sens incapable pour le moment, et je crois qu'on ne dira la vérité vraie sur ce livre que l'année prochaine. Je veux seulement en parler en lecteur sympathique. De cette façon, ma conscience me laissera en paix.

J'entends, d'ailleurs, m'occuper beaucoup plus du talent de Gustave Flaubert que de son dernier roman. Il y a chez lui une étonnante dualité qui constitue tout son caractère d'écrivain, sa personnalité. Il est, par tempérament, attiré vers l'épopée. On le sent toujours prêt à bondir d'un élan lyrique, à se perdre dans les cieux agrandis de la poésie. Et il reste à terre ; sa raison d'homme, sa volonté d'analyste exact l'attache à l'étude des infiniment petits. C'est un Titan, plein d'haleines

Illustration 4: Emile Zola

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énormes, qui raconte les moeurs d'une fourmilière, en faisant des efforts pour ne pas céder à l'envie de souffler des chants héroïques dans sa grande trompette de bronze. Un poète changé en naturaliste, Homère devenu Cuvier, reconstruisant les êtres avec des fragments d'os, au lieu de les évoquer et de les créer de toutes pièces ; tel est Gustave Flaubert, l'esprit double qui a produit des oeuvres d'une réalité à la fois si minutieuse et si épique.

Il me serait aisé d'accumuler les exemples. On n'a qu'à relire Madame Bovary. Rien qui ne soit pris sur nature, et rien qui ne soit fatalement traversé d'un grand souffle. Les personnages, certes, vivent de la vie de tout le monde ; mais dans leurs paroles, dans leurs gestes, si soigneusement étudiés, il y a, par moments, de rapides frissons qui révèlent tout à coup des sensations, une existence nerveuse qu'aucun romancier n'avait notée jusqu'ici. Je ne parle pas de Salammbô, œuvre entièrement lyrique, qui montre combien Gustave Flaubert est un grand poète. Je me contente de ses œuvres de pure analyse, des livres où il a voulu faire général, étudier la foule, la bêtise commune, et où, malgré lui, il a tiré de la réalité une singulière musique, douce et gutturale, toute vibrante de ses propres nervosités.

Chaque écrivain apporte ainsi sa musique, que les lecteurs délicats entendent parfaitement sonner, de la première à la dernière page d'un livre. La musique de Gustave Flaubert est une sorte de basse continue, sur laquelle chantent, comme un sifflement aigu de petite flûte, des gammes soudaines de notes nerveuses. Un réaliste, soit ! mais un réaliste qui tire du réel d'étranges concerts. Chez lui, tout s'anime d'une vie particulière. D'un mot il fait vivre un arbre, une maison, un bout de ciel. Il met dans un simple rire de ses personnages des profondeurs incroyables de bêtise ou d'esprit ; il ne leur fait pas remuer le petit doigt sans que ce mouvement ne prenne une immense signification. Et toujours il ouvre ainsi sur la vie des trous inconnus, des échappées neuves. Ses romans, je le répète, sont comme une notation nouvelle de l'existence, notation des mille petits riens de la journée, qui paraît banale et qui finit par constituer un tout d'une étonnante vitalité. C'est qu'il a étudié ou deviné chaque être et chaque objet avec ses nerfs de poète, et qu'il nous donne la réalité vivante de l'intense vie nerveuse dont il l'anime.

Qu'on ne s'y trompe pas, là est sont talent, son génie particulier. D'autres regarderont les infiniments petits avec des loupes plus grossissantes, étudieront le réel de plus près ; d'autres auront une patience égale, une vue aussi nette, une méthode aussi puissante. Mais ce qui lui appartient, ce qui est lui, c'est cette pénétration nerveuse des moindres faits, cette notation à la fois méticuleuse et vivante de la vie. Nous ne reverrons sans doute pas un poète analyste, un lyrique qui consente à piquer dans un cadre les insectes humains. La est le miracle. Lorsque j'entends la critique reprocher à Gustave Flaubert de ne rien apporter, de ne rien pénétrer, je suis tenté de crier à mes confrères : " Tant pis pour vous, si les sens manquent. Ce que l'auteur apporte, ce sont les profondeurs inconnues de l'être, les sourds désirs, les violences, les lâchetés, toutes les impuissances et toutes les énergies traduites par les niaiseries de la vie journalière. Et ce n'est pas un simple greffier. C'est un musicien doué dont les poèmes sont faits pour des oreilles sympathiques. Si vous n'entendez pas, c'est que le sang ou la bile vous étouffent. Soyez nerveux, vous comprendrez. "

Pour moi, l'Education sentimentale, comme Madame Bovary, est une pure symphonie. N'oubliez pas que je n'ai point voulu juger l'oeuvre et j'en cause ici en simple artiste ; je conte mes sensations, rien de plus. Dans son nouveau roman, Gustave Flaubert a élargi son thème ; mais les variations sont aussi nombreuses et aussi délicatement travaillées. Son intention première a certainement été de résumer tout un âge, les années troubles allant de 1840 à 1851, et il a pris pour motif principal l'agonie lente et inquiète de la monarchie, coupée par les coups de feu de février, de juin à décembre. Dans ce cadre, il a fait revivre la génération du temps, pour laquelle l'histoire aura de

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grandes sévérités ! Son héros, Frédéric, est un impuissant ambitieux, un esprit indécis et faible qui a d'immenses appétits et qui est incapable de les satisfaire. Quatre femmes travaillent à son éducation sentimentale : une femme honnête qu'il n'aime pas assez pour en faire la force de sa vie ; une grande dame, un rêve de vanité dont il se réveille avec dégoût et mépris ; une provinciale, une petite sauvage précoce, la fantaisie du livre, qu'un de ses amis lui prend presque dans les bras. Et quand les quatre amours, le vrai, le sensuel, le vaniteux, le naïf, ont essayé de faire de lui un homme, il se trouve un soir, vieilli, assis au coin de son feu avec son camarade d'enfance Deslauriers, qui a ambitionné le pouvoir, sans plus le conquérir que lui n'a conquis une tendresse heureuse, et tous deux ils pleurent leur jeunesse envolée, ils se souviennent comme du meilleur de leurs jours, d'une après-midi où, partis pour voir des filles, ils n'ont point osé passer le seuil de la porte. Le regret du désir et des pudeurs de la seizième année : telle est la morale, la dernière note du poème.

Tout un monde, d'ailleurs, s'agite autour de Frédéric et de Deslauriers. Je ne puis même marquer d'un trait chaque personnage. Et les scènes sont si multipliées : soirées dans le grand monde et dans le demi-monde, déjeuners d'amis, un duel, une promenade aux courses, un club de 1848, les barricades, la lutte dans les rues, etc. L'auteur a fait tenir l'âge entier dans son œuvre, avec son art, sa politique, ses mœurs, ses plaisirs, ses hontes et ses grandeurs. Tous ses efforts ont tendu à s'effacer, à écrire le livre comme un procès-verbal et complet. Il a essayé même de se désintéresser plus encore que dans Madame Bovary,. Mais il a eu beau faire, ce n'est pas là la vérité nue, c'est toujours la vie interprétée par le poète que vous savez.

Moi, j'entends le champ large qui monte de l'Education sentimentale. Lisez avec soin, vous saisirez toutes les harmonies des quatre amours de Frédéric. La chair et l'esprit ont leurs phrases musicales. Et, en dessous, entendez le grondement social qui ronfle comme une voix d'ophicléide. A chaque chapitre, les motifs se détachent, s'opposent avec un relief magistral : c'est Frédéric allant causer d'amour avec sa maîtresse sous les futaies de Fontainebleau, tandis que l'insurrection hurle à Paris ; c'est la continuelle tension des volontés échouant misérablement contre les moindres obstacles. Tout, dans l'oeuvre, est une floraison de l'art, bien que l'auteur ne peigne que le vrai. Avec une habileté immense, il reste à terre et donne à chacun des mots qu'il emploie une telle vibration, qu'ils semblent tomber d'une trompette du ciel.

On accuse Gustave Flaubert d'abuser des paysages. Eh ! oui, il les prodigue : j'avoue même que ses livres ne sont fait que de paysages. Mais il faut s'entendre. Sa méthode est essentiellement descriptive ; il n'admet que le fait, la parole et le geste ; ses personnages se font connaître eux-mêmes en parlant et en agissant ; point d'analyses raisonnées comme dans Balzac ; mais une série de courtes scènes mettant en jeu les caractères et les tempéraments. De là forcément des descriptions, puisque c'est par le dehors qu'il nous fait connaître le dedans. Il veut nous donner, dans ses romans, la vie telle qu'elle est ; il cherche à disparaître ; il ne prend point le scalpel pour nous faire assister à une séance d'anatomie morale ; il ne dissèque pas devant nous la cervelle ou le coeur d'un patient, comptant sur le patient lui même pour révéler son être par une parole, par un acte. Dès qu'il a poussé sur la scène un personnage, il lui laisse le soin de se présenter au public, de vivre au grand jour, naturellement, et il évite de jamais montrer ses doigts d'auteur qui tiennent les ficelles. Méthode excellente, seule manière d'être exact, de reproduire la vie jusque dans son cadre naturel.

Et, d'ailleurs, les paysages proprement dits, dans Gustave Flaubert, ne sont-ils pas nécessaires aux personnages ? Si l'on veut faire connaître un homme, il faut le montrer dans l'air qu'il respire. Les milieux font les êtres, les choses ajoutent à la vie humaine. Le romancier poète l'a bien compris ; toujours, chez lui, la nature accompagne l'humanité, toujours elle est là, triste ou joyeuse, ajoutant à la joie des hommes ou coupant leurs sanglots de ses rires. Les moindres objets prennent ainsi des

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voix ; ils vivent, ils parlent et se meuvent presque. Il y a dans Madame Bovary un exemple bien curieux de cette vie donnée aux choses. Léon, le clerc amoureux, fait, le soir, chez M. Homais, une cour muette à la femme du médecin. Il regarde la robe d'Emma, traînant à terre autour de son siège. Et l'auteur ajoute : " Quand Léon, parfois, sentait la semelle de sa botte se poser dessus, il s'écartait, comme s'il eût marché sur quelqu'un. " C'est là une de ces notations de la vie nerveuse qui constituent, selon moi, un des traits les plus remarquables sans doute, du talent de Gustave Flaubert. La robe d'Emma vit pour son amoureux. Tout l'art moderne, si secoué, si curieux de physiologie, est dans cette ligne.

La Tribune. 28 novembre 1869.

L'Education sentimentale vue par Henry James

L'Education me fait sentir combien un écrivain est parfois plus passionnant par un échec que par un succès (...) . Dans la mesure même où c'est l'oeuvre d'un " grand écrivain ", L'Education, livre si vaste, si travaillé, si hautement " écrit ", avec ses merveilleux passages inscrits sur le vide, où s'emmagasine une tristesse à travers laquelle une sorte de fente laisse fuir toute grandeur morale, - brille d'un éclat malade et se range ainsi parmi les curiosités du musée de la littérature. (...) Flaubert, par malheur, n'a pas su ne pas discréditer fondamentalement ce regard que Frédéric porte sans cesse sur tout et sur tous, et en particulier sur sa propre existence, de manière à faire de lui un médiateur propre à nous transmettre de grandes impressions. Bien sûr Mme Arnoux constitue le meilleure de sa vie - et c'est peu dire ; mais cette vie est faite d'une manière si pauvre qu'il nous est déplaisant de voir Mme Arnoux " en " être sous quelque forme que ce soit, d'autant plus qu'elle affecte, améliore, détermine cette existence de manière insignifiante. En somme, son créateur ne fut jamais si mal inspiré qu'en voulant illustrer un tel dessein par de semblables moyens. (...) Est par contre irrémédiable - nous voilà au point capital, car cette fois les effets persistent, que rien n'est venu neutraliser - l'inconscience de l'erreur par rapport à la plus heureuse des occasions qui pouvaient échoir à Flaubert. Qu'il l'ait manquée, nous le supporterions encore. Mais qu'il n'ait pas vu qu'il la manquait, voilà la grosse faute indélébile. Nous ne prétendons pas dire par quel moyen il pouvait mieux rendre Mme Arnoux - c'était son affaire. La nôtre, c'est qu'il ait vraiment pensé qu'il la rendait du mieux qu'il pouvait, ou qu'elle pouvait l'être ; ici nous nous voilons la face. Dès l'instant qu'il la concevait d'une façon toute particulière, je veux dire très distincte de ses autres créations, et qu'il la voulait la plus délicatement tracée, il y est " allé ", comme nous disons, et il l'a gâchée.

Illustration 5: Henry James

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Laissez-moi ajouter en toute tendresse, et pour amender une sévérité peut-être exagérée, que c'est l'unique tache sur son blason ; laissez-moi même avouer que je ne m'etonnerai pas si, en fin de compte, le défaut reste inaperçu.

Extraits de "Gustave Flaubert". Editions de l'Herne

Un point sur Madame Bovary

Résumé du roman

Première Partie

"Nous étions à l'Etude, quand le Proviseur entra suivi d'un nouveau habillé en bourgeois et d'un garçon de classe qui portait un grand pupitre. Ceux qui dormaient se réveillèrent, et chacun se leva comme surpris dans son travail".

Ainsi débute Madame Bovary : Ce nouvel élève, âgé d'une quinzaine d'années, qui entre en 5ème au Collège de Rouen n'est autre que Charles Bovary. Il a l'air un peu ridicule, ce "gars de la campagne". Son attitude un peu gauche déchaîne le rire de ses camarades. Il arrive d'un village situé entre le pays de Caux et la Normandie où ses parents, qui ne s'entendent pas, se sont retirés. Son père est un médiocre qui a accumulé de nombreux échecs. Sa mère, frustrée et aigrie, a reporté tous ses espoirs sur ce fils qu'elle a couvé.

Charles Bovary s'installe à Tostes et épouse sous l'influence de sa mère une veuve de quarante-cinq ans, riche, laide et tyrannique, Mme Dubuc. Elle aime Charles avec passion mais exerce à son égard une surveillance despotique. Le jeune Charles connaît ainsi une vie de couple qui ressemble à un cauchemar.

Une nuit d'hiver, Charles se rend à la ferme des Bertaux. Le père Rouault, son propriétaire, "un cultivateur des plus aisés" vient de se casser la jambe. Charles soigne le maître des lieux et est sensible au charme d'Emma, sa fille. Les jours suivants, il revient aux Bertaux, jusqu'à ce que son épouse, jalouse, lui interdise d'y retourner. Au début du printemps, le notaire de Mme Bovary commet une malversation qui laisse cette dernière à demi ruinée. Elle meurt brusquement une semaine plus tard.

Peu après, sur l'invitation du père Rouault, Charles retourne aux Bertaux. Il revoit Emma. Il est amoureux de la jeune fille, mais n'ose se déclarer. "À l'époque de la Saint Michel" il se décide à la demander en mariage. La noce est fixée au printemps suivant, l'hiver sera occupé par les préparatifs. Emma rêvait de "se marier à minuit, aux flambeaux". La noce, campagnarde, sera beaucoup moins féerique. Charles ne brille guère durant la noce, ne répondant que médiocrement aux calembours ou compliments que lui adressent les invités.

Mais le lendemain des noces Charles semble découvrir le bonheur près d'Emma. Il laisse éclater sa

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joie et se réjouit de trouver en elle une épouse parfaite. Emma commence par apporter des changements dans l'aménagement de la maison et Charles est tout à sa joie de la voir aussi bien conduire son ménage, dessiner, jouer du piano, ou recevoir avec élégance. Mais la jeune femme, elle, est distante. La réalité ne correspond pas à ce qui lui avait paru si beau dans les livres de son enfance. Elle avait tant rêvée de ce mari qui devait lui procurer une vie plus passionnante. Elle souhaitait tant oublier celle monotone, qu'elle avait passée avec son veuf de père, depuis sa sortie du couvent. Or ce mari, tant idéalisé, se révèle bien décevant.

Elevée au couvent, parmi des jeunes filles du monde, Emma y a reçu une parfaite éducation. Elle a lu Paul et Virginie, a rêvé en lisant des romans sentimentaux et historiques, ou des poèmes romantiques. Elle a admiré des gravures représentant de jeunes hommes serrant dans leurs bras des ladies anglaises à boucles blondes. Toute cette éducation a nourri son "tempérament sentimental" et ses songes romanesques.

Aux antipodes de l'homme rêvé, Charles déçoit Emma. Son manque de mystère et de raffinement désappointe la jeune femme. La vie humble et sans surprise qu'il lui offre lasse Emma. Heureusement, une invitation du Marquis d'Andervilliers à un bal au château de la Vaubyessard vient rompre la monotonie de son existence.

Emma, émerveillée, découvre le luxe et l'élégance du monde aristocratique. Ce monde enchanté auquel elle a tant rêvé lui fait oublier un instant ses origines paysannes. Hélas , le rêve est éphémère et le retour à Tostes, silencieux et triste. Dès le lendemain, il lui faut subir les conversations banales de Charles. " Son voyage à la Vaubyessard avait fait un trou dans sa vie, à la manière de ces grandes crevasses qu'un orage, en une seule nuit, creuse quelquefois dans les montagnes". Emma se réfugie dans "le souvenir de ce bal".

Emma rêve devant le " porte-cigares tout bordé de soie verte" que Charles a ramassé sur le chemin du retour. Elle imagine que cet objet appartient au "Vicomte". Emma rêve aussi de Paris et se met à lire Balzac, George Sand et Eugène Sue. Mais à Tostes, l'ennui s'accroît et la jeune femme est de plus en plus irritée par le manque d'ambition et le laisser-aller de son mari. Les saisons se succèdent. Elle vit pourtant dans l'espoir d'une nouvelle invitation, mais en vain. Un an et demi après le bal de la Vaubyessard, sa santé s'altère et Emma laisse tout aller dans son ménage . Charles, qui est resté quatre ans à Tostes, décide alors de déménager et de s'installer à Yonville . Emma est enceinte. Il espère que ce déménagement lui sera bénéfique.

Deuxième Partie

Les époux Bovary arrivent à Yonville. A l'auberge du Lion d'Or. Madame veuve Lefrançois, la maîtresse de l'auberge, prépare le dîner. Il y a là , pour accueillir les Bovary, Monsieur Homais, le pharmacien, le percepteur Binet, et le curé Bournisien. Pendant que Homais et Charles Bovary devisent sur la médecine, Emma sympathise avec Léon Dupuis, clerc de notaire et habitué de l'auberge, qui dîne avec eux. Ils se découvrent des goûts communs. Puis les Bovary s'installent dans leur maison : " C'était la quatrième fois qu'elle ( Emma) couchait dans un endroit inconnu. La première avait été le jour de son entrée au couvent, la seconde celle de son arrivée à Tostes, la troisième à la Vaubyessard, la quatrième était celle-ci ; et chacune s'était trouvée faire dans sa vie comme l'inauguration d'une phase nouvelle." La jeune femme se prend à rêver à des jours meilleurs.

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Homais, le pharmacien, se montre, avec les Bovary, le meilleur des voisins. Il essaye, en fait, de s'attirer la sympathie de Charles Bovary, au cas où ce dernier apprendrait qu'il exerce de façon illicite la médecine. Charles, lui, est maussade car la clientèle "n'arrive pas" . Heureusement cette déception professionnelle est compensée par la naissance de sa fille. Emma donne naissance à Berthe. La jeune femme eût préféré un fils. Après le baptême, la petite est mise en nourrice, chez Mme Rollet. Un jour, Léon accompagne Emma et sa fille chez la nourrice. Sur le chemin, Emma et Léon se donnent la main. Cette complicité ne passe pas inaperçue : " Dès le soir, cela fut connu dans Yonville, et madame Tuvache, la femme du maire, déclara devant sa servante que madame Bovary se compromettait" .

La vie, se poursuit, monotone. Emma guette chaque jour, de sa maison, le passage de Léon. Les Bovary sont invités régulièrement, le dimanche, avec Léon, chez Homais, le pharmacien : On y joue au trente et un, et aux dominos. Puis Homais et Bovary s'endorment. Léon et Emma feuillettent alors ensemble L'illustration et goûtent cette "solitude" :" Ils se parlaient à voix basse, et la conversation qu'ils avaient leur semblait plus douce, parce qu'elle n'était pas entendue". Les jeunes gens s'échangent des cadeaux. Léon fait la cour à Emma mais ne se déclare pas . En février, lors d'une promenade dominicale aux environs d'Yonville, en compagnie des Homais et de Léon, Emma prend conscience de la banalité de Charles face au charme du jeune homme. Elle réalise aussi que Léon est amoureux d'elle. Elle décide de ne pas céder à la tentation et s'efforce de rester une maîtresse de maison modèle et une mère irréprochable. Sa maîtrise apparente cache pourtant un douloureux conflit intérieur : amour pour Léon et volonté de rester vertueuse. C'est Charles qui sera le bouc émissaire de ce malheur : elle le méprisait, elle se met à le haïr.

Un soir d'avril, elle entend l'angélus. "Ce tintement répété" rappelle à Emma le souvenir du couvent. La religion peut l'aider , peut-être, à affronter cette crise qu'elle traverse : elle se rend à l'église afin de confier son trouble à Bournisien, le curé. Mais le dialogue entre l'homme d'église et la jeune femme n'est qu'une suite de malentendus. Pour lui, ces souffrances sont purement physiques. Cette incompréhension laisse Emma désemparée. De retour chez elle, Emma repousse sèchement sa fille Berthe, qui tombe et se blesse. Charles, qui rentre pour le dîner, soigne cette blessure sans gravité. La jeune mère , se reprochant son attitude, reste pour veiller sur sa fille endormie. Elle est effrayée de la laideur de son enfant.

Quant à Léon, il désespère de l'inaccessibilité d'Emma et se lasse de cet amour sans espoir. Il décide alors de partir à Paris terminer son droit . Il vient faire ses adieux à Emma. L'émotion est grande mais le jeune homme ne parvient pas à trouver les mots pour l'exprimer. Au cours de la soirée qui suit son départ, Homais évoque les réjouissances de la capitale; il annonce aussi que des Comices agricoles auront lieu cette année à Yonville.

Suite au départ de Léon, Madame Bovary sombre à nouveau dans la mélancolie : " le chagrin s'engouffrait dans son âme avec des hurlements doux, comme fait le vent d'hiver dans les châteaux abandonnés". La visite du sieur Lheureux, marchand de nouveautés, lui donne l'occasion de faire des dépenses déraisonnables. Emma se lance aussi dans des lectures ambitieuses : " Elle voulut apprendre l'italien : elle acheta des dictionnaires, une grammaire, une provision de papier blanc. Elle essaya des lectures sérieuses, de l'histoire et de la philosophie". Charles sombre dans l'inquiétude. Il fait appel à sa mère :"Alors il écrivit à sa mère pour la prier de venir, et ils eurent ensemble de longues conférences au sujet d'Emma". Mme Bovary mère ne trouve guère de solutions miracles. Il faut, selon elle, "empêcher Emma de lire des romans".

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Un jour de marché, Rodolphe Boulanger, le nouveau châtelain de la Huchette, rend visite à Charles Bovary, avec un de ses fermiers à qui il faut faire une saignée. Durant l'intervention de l'officier de santé, il regarde Emma et la trouve très jolie. Aristocrate libertin, "de tempérament brutal et d'intelligence perspicace", il devine le fossé qui s'est creusé entre les deux époux, il décèle aussi les frustrations et les rêves inassouvis d'Emma. C'est décidé, lors des prochains comices agricoles, il fera tout pour la séduire.

Le jour des comices est arrivé, tout le village est en fête. Rodolphe profite de cette occasion pour faire sa cour à la jeune femme. Il va à sa rencontre, et parvient à fausser compagnie à M. Lheureux et au pharmacien. Rodolphe et Emma assistent tous les deux à l'examen des bêtes, à l'arrivée des notables. Du premier étage de la mairie, ils entendent, par bribes, les discours officiels, car Rodolphe met à profit la situation pour tenir à Emma des propos séducteurs. Emma se laisse prendre au jeu et n'émet qu'une faible résistance. Les discours sont suivis de la remise de médailles : une servante reçoit cette décoration en récompense de ses cinquante ans de labeur. La fête se termine par un feu d'artifice raté. M. Homais rédige un article dithyrambique pour le Fanal de Rouen, dont il est le correspondant.

Rodolphe attend six semaines avant de rendre visite à Emma. Il joue d'abord la comédie puis simule la mélancolie. Charles survient, Rodolphe feint alors de s'inquiéter de la santé d'Emma. Il lui conseille une promenade à cheval. Charles donne son aval. La jeune femme part donc pour une balade à cheval en compagnie de Rodolphe. Ils pénètrent dans une forêt. C'est là qu'Emma se donne à son compagnon. " Elle se répétait : " J'ai un amant ! un amant ! " se délectant à cette idée comme à celle d'une autre puberté qui lui serait survenue. Elle allait donc posséder enfin ces joies de l'amour, cette fièvre du bonheur dont elle avait désespéré." Elle rencontre alors Rodolphe tous les jours, dans la forêt, puis elle n'hésite pas à se rendre jusqu'au château de Rodolphe. Ce dernier commence à trouver ces visites imprudentes.

Un jour, lors d'une de ses escapades matinales, Emma rencontre le percepteur Binet. Elle se montre peu convaincante quant à la justification de cette promenade. Toute la journée, elle s'angoisse des commérages que pourrait colporter Binet. Le soir, elle rencontre à nouveau le percepteur chez Homais, le pharmacien. Binet ne peut s'empêcher de faire allusion à leur rencontre matinale. Heureusement les invités ne réagissent pas. C'est donc le soir, sous la tonnelle de leur jardin, ou par temps de pluie dans le cabinet de consultations de son mari, qu'Emma donne maintenant rendez-vous à son amant. Mais Rodolphe commence à s'ennuyer de cette liaison. A l'approche du printemps, Emma, bien que toujours amoureuse de cet amant, éprouve des remords en lisant une lettre naïve et touchante de son père. Elle dresse un bilan amer de son existence et regrette la candeur de son enfance. Elle redécouvre auprès de sa fille la tendresse maternelle et souhaiterait se rapprocher de son mari.

Homais et Emma œuvrent auprès de Charles pour le convaincre d'opérer Hippolyte, le garçon d'écurie du Lion d'Or, de son pied-bot. Charles accepte. L'opération semble un succès et Emma éprouve une tendresse admirative pour son mari. Homais montre aux Bovary l'article qu'il a préparé pour le Fanal de Rouen. Malheureusement des complications surviennent vite, et la jambe du malheureux Hippolyte se gangrène. Il faut faire appel au docteur Canivet, célèbre médecin de Neuchâtel. Il doit procéder à l'amputation de la cuisse. Cet échec anéantit les espoirs professionnels de Charles. La déception est également immense pour Mme Bovary qui se sent humiliée d'avoir fondé en vain des espoirs dans son mari. Ses dernières résolutions vertueuses disparaissent : Emma se détache irrémédiablement de Charles et s'abandonne à nouveau dans les bras de Rodolphe.

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Emma s'enflamme de nouveau pour son amant. Elle lui suggére même de tout abandonner pour partir ensemble : "Nous irions vivre ailleurs". Elle offre beaucoup de cadeaux à son amant, et dérobe de l'argent à son mari pour payer ses dettes auprès de Lheureux. Elle met ainsi en péril les finances de son couple. Elle n'hésite plus à s'afficher avec son amant dans un attitude provocante : " Par l'effet seul de ses habitudes amoureuses, madame Bovary changea d'allures. Ses regards devinrent plus hardis, ses discours plus libres ; elle eut même l'inconvenance de se promener avec M. Rodolphe, une cigarette à la bouche, comme pour narguer le monde". Rodolphe, lui, n'est pas à la hauteur de cette passion, il se lasse de sa maîtresse et la traite avec peu de ménagement. Il finit pourtant sur insistance d'Emma par accepter de "l'enlever". Leur fuite est prévue pour début septembre. Charles, lui, rêve encore de beaux projets pour son épouse et sa fille. Tout est prêt pour la fuite des amants. Lheureux une nouvelle fois procure le nécessaire : "un grand manteau et une caisse pas trop lourde...". L'avant-veille du départ, les amants ont rendez-vous au clair de lune. Rodolphe le sait déjà : il ne partira pas avec Emma et sa fille.

Rentré chez lui, Rodolphe écrit une longue lettre de rupture à Emma. Dès les premiers mots, la jeune femme comprend. Effondrée, elle s'enfuit au grenier où, dans un vertige, elle songe à se suicider. Redescendue pour le dîner, elle entend passer le tilbury de Rodolphe qui l'emporte loin de Yonville. Elle perd connaissance. "Une fièvre cérébrale" la cloue au lit pendant plus d'un mois. Charles veille en permanence sur elle, guettant les signes d'un rétablissement. Vers la mi-octobre, elle retrouve peu à peu la santé. Mais Charles l'emmène sous la tonnelle. Cette vision du banc, où elle donnait rendez-vous à son amant, provoque une rechute : " Elle eut un étourdissement, et dès le soir, sa maladie recommença, avec une allure plus incertaine, il est vrai, et des caractères plus complexes. Tantôt elle souffrait au coeur, puis dans la poitrine, dans le cerveau, dans les membres ; il lui survint des vomissements où Charles crut apercevoir les premiers symptômes d'un cancer."

Charles s'est beaucoup endetté pour soigner son épouse et aussi pour honorer les achats qu'elle avait réalisés pour sa fuite avec Rodolphe. Lheureux profite de la situation et se montre de plus en plus menaçant. Charles, trop inquiet du fait de l'état de santé d'Emma pour analyser la situation, lui emprunte de l'argent. Durant sa convalescence, madame Bovary reçoit des visites du curé et retrouve provisoirement la foi. Un jour, Homais, le pharmacien, conseille à Charles d'aller à Rouen avec son épouse écouter un opéra de Donizetti. Dès le lendemain, à huit heures, le couple part pour Rouen.

Les Bovary arrivent très tôt à l'opéra. Ils admirent la salle et le décor. Puis la représentation commence. Emma est subjuguée par le ténor Lagardy. Elle se passionne également pour le spectacle et trouve des similitudes entre le destin de Lucie de Lammemoor et le sien. À l'entracte, Charles, va chercher un rafraîchissement pour sa femme, et rencontre Léon. Le clerc vient saluer Emma dans la loge des Bovary. A la fin de la représentation, il emmène les Bovary au café. Là, Charles suggère à sa femme de rester seule un jour de plus à Rouen pour revoir l'opéra.

Troisième Partie

Cela faisait trois ans que Léon et Emma ne s'étaient pas revus. Le lendemain de leur rencontre à l'opéra, Léon se rend à l'Hôtel de la Croix-Rouge où Emma est descendue. Il lui confie tout l'amour qu'il a éprouvé pour elle. Durant une longue conversation, Emma et Léon évoquent Yonville, leurs peines, leurs rêves et leur souvenirs. Emma refuse de s'abandonner aux avances du clerc, mais elle accepte néanmoins de le retrouver le lendemain à la cathédrale. Après le départ de Léon, Emma

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écrit une lettre pour décliner le rendez-vous mais, ne connaissant pas l'adresse de Léon, décide de la lui remettre elle-même .

Le lendemain, Léon arrive le premier à la cathédrale. Lorsqu'Emma arrive à son tour, elle lui tend la lettre puis va s’agenouiller dans la chapelle de la Vierge. Il s'apprêtent ensuite à quitter la cathédrale, lorsque le Suisse se propose de leur faire visiter le monument. Impatient, Léon abrège la visite. Débarrassé de l'importun, il entraîne Emma hors de la cathédrale et lui propose une promenade en fiacre qui leur fait parcourir à vive allure Rouen et ses environs.

De retour à Yonville, Emma se rend chez Homais. Justin, l'apprenti a commis une faute grave et le pharmacien le sermonne sévèrement : pour faire les confitures, Justin a désobéi et est allé chercher une bassine dans la réserve où le pharmacien stocke l'arsenic. Entre deux reproches à Justin, Homais apprend sans ménagement à Emma que le père de Charles est mort. Madame Bovary est peu affectée par ce deuil, mais feint devant Charles d'éprouver du chagrin. Le lendemain, les Bovary, aidés de Mme Bovary mère, s'affairent pour préparer les obsèques. C'est alors que Lheureux, le marchand d'étoffes, se rend chez les Bovary. Il suggère à Emma d'obtenir une procuration de son mari pour gérer elle-même les revenus du couple. Emma suggère à Charles, qui accepte, de se rendre à Rouen, pour consulter Léon sur cette question.

Emma reste trois jours à Rouen avec son amant. Puis ils décident d'utiliser la nourrice pour échanger leurs correspondances. Mais impatient de revoir sa maîtresse, Léon vient à Yonville. Il dîne au Lion d'Or et rend visite aux Bovary. Les deux amants souhaiteraient se revoir régulièrement. Emma fait la promesse à Léon de venir le voir une fois par semaine. Elle engage également de nouvelles dépenses auprès de Lheureux. Elle réussit à convaincre Charles de lui permettre de se rendre une fois par semaine à Rouen, le jeudi, pour y prendre des leçons de piano.

Chaque jeudi , Emma retrouve Léon et les semaines s'écoulent selon un rite immuable : il y a le lever silencieux d'Emma afin de ne pas réveiller Charles, le départ d'Yonville au petit matin à bord de l'Hirondelle, la route, la ville de Rouen qui s'éveille, la chambre douillette des rendez-vous, puis le retour et la rencontre d'un horrible aveugle, qui lui cause à chaque fois une terrible peur . Rouen devient le symbole du plaisir qu'elle découvre dans les bras de Léon. La passion qu'éprouve Emma pour le jeune homme réveille en elle des désirs de luxe. Elle accumule les dépenses d'habillement.

Elle prend aussi l'habitude de mentir afin de pas dévoiler les motifs réels de ses voyages à Rouen. Mais un jour, Lheureux la découvre au bras de Léon. Il profite de la situation pour la forcer à rembourser ses dettes . Il lui fait vendre la propriété de Barneville dont son mari a hérité. Il lui fait également signer de nouveaux billets d'ordre. Charles, de son côté, en signe lui aussi. La situation financière du couple est de plus en plus dramatique. Madame Bovary mère qu'on a appelé à la rescousse détruit la procuration qui avait été accordée à Emma, ce qui provoque une crise de nerfs de sa belle-fille. Charles ne résiste pas très longtemps et signe rapidement une nouvelle procuration à son épouse. Un soir, Emma reste à Rouen. Charles s'y rend en pleine nuit et ne retrouve sa femme qu'à l'aube. Elle indique alors à Charles que cette liberté lui est indispensable. Dès lors, Emma va à Rouen quand bon lui semble. Léon est de plus en plus subjugué par l'attitude de sa maîtresse. Mais ces visites fréquentes le dérangent dans son travail .

Un jeudi, Homais prend la diligence pour Rouen en même temps qu'Emma. Il est invité par Léon et souhaite mettre à profit ce voyage pour revoir les lieux de sa jeunesse. Le clerc doit subir le

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bavardage du pharmacien pendant de longues heures. Il ne parvient pas à lui fausser compagnie. Emma, furieuse, quitte l'hôtel où elle l'attend et éprouve beaucoup de mépris pour le manque de courage dont a fait preuve son amant. Cet incident met en lumière les défauts du jeune homme. Dès lors sa passion faiblit. Une menace de saisie l'oblige à trouver de toute urgence de l'argent : elle se fait payer des honoraires de son mari, vend de vieilles choses, emprunte à tout le monde, et engage même un cadeau de noces au mont-de-piété. De son côté Léon, sermonné par son patron et ne souhaitant pas se compromettre au moment de devenir premier clerc, se détache progressivement d'Emma. La jeune femme, elle aussi un peu lasse, n'a pas le courage de le quitter. Un soir, en rentrant à Yonville après une nuit passée au bal masqué de la mi-carême, elle apprend que ses meubles vont être saisis. Lheureux à qui elle rend visite se montre intraitable et cynique.

"Elle fut stoïque, le lendemain, lorsque Maître Hareng, l'huissier, avec deux témoins, se présenta chez elle pour faire le procès-verbal de la saisie". Cette situation la contraint à quémander , par tous les moyens , de l'aide . Dès le dimanche , elle se rend à Rouen, mais les banquiers sont ou à la campagne ou en voyage. Puis elle sollicite Léon qui ne lui fait qu'une vague promesse . De retour à Yonville , elle se rend chez Maître Guillaumin qui à défaut de l'aider lui fait des avances. Emma est outrée et va trouver Binet qui s'esquive. Elle va ensuite chez la mère Rollet et attend , en vain, l'arrivée de Léon. Il ne reste plus que Rodolphe, son premier amant.

"Elle se demandait tout en marchant : " Que vais-je dire ? Par où commencerai-je ? " Et, à mesure qu'elle avançait, elle reconnaissait les buissons, les arbres, les joncs marins sur la colline, le château là-bas. Elle se retrouvait dans les sensations de sa première tendresse, et son pauvre cœur comprimé s'y dilatait amoureusement. Un vent tiède lui soufflait au visage ; la neige, se fondant, tombait goutte à goutte des bourgeons sur l'herbe." Mais Rodolphe n'a pas ces 3000 francs dont elle a besoin. Désespérée, Emma explose de colère : " Mais, moi, je t'aurais tout donné, j'aurais tout vendu, j'aurais travaillé de mes mains, j'aurais mendié sur les routes, pour un sourire, pour un regard, pour t'entendre dire : " Merci ! " Et tu restes là tranquillement dans ton fauteuil, comme si déjà tu ne m'avais pas fait assez souffrir ? " Elle lui reproche son égoïsme et s'en va, bouleversée :" Elle sortit. Les murs tremblaient, le plafond l'écrasait ; et elle repassa par la longue allée, en trébuchant contre les tas de feuilles mortes que le vent dispersait".

Sur le chemin du retour, elle est victime d'hallucinations. Arrivée à Yonville, elle court chez Homais et force Justin à lui donner les clés de la réserve. Elle avale de l'arsenic, puis rentre chez elle. Elle rédige une lettre et demande à Charles de ne l’ouvrir que le lendemain : "Tu la liras demain ; d'ici là, je t'en prie, ne m'adresse pas une seule question !... Non, pas une !" Puis elle se met au lit. Les premiers symptômes de l'empoisonnement surviennent rapidement. Charles, paniqué, ne sait que faire. Homais propose une analyse. Emma souhaite revoir sa fille . Arrivent ensuite le docteur Canivet puis le docteur Larivière. Il est trop tard pour la sauver. Madame Bovary reçoit l'extrême-onction, puis elle pleure en se regardant dans un miroir. Elle entend au dehors la chanson de l'aveugle rencontré maintes fois lors de ses escapades à Rouen. Puis c'est l'agonie et la mort: " Et Emma se mit à rire, d'un rire atroce, frénétique, désespéré, croyant voir la face hideuse du misérable, qui se dressait dans les ténèbres éternelles comme un épouvantement.

Il souffla bien fort ce jour-là.

Et le jupon court s'envola !

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Une convulsion la rabattit sur le matelas. Tous s'approchèrent. Elle n'existait plus. "

Charles est effondré. Il organise avec peine les funérailles. Homais critique ces dispositions, mais Bovary lui répond sèchement : " Est-ce que cela vous regarde ? Laissez-moi ! vous ne l'aimiez pas ! Allez-vous-en !" Lors de la veillée funèbre Homais et l'abbé Bournisien discutent âprement de questions "théologiques", puis ils s'endorment. Arrive au petit matin Mme Bovary mère, puis d'autres visiteurs. Charles souhaite garder d'Emma une mèche de cheveux. La jeune femme est alors mise en bière. Puis c'est l'arrivée du père Rouault à Yonville. Il s'évanouit en voyant les draps noirs.

Les obsèques religieuses ont lieu par une belle journée de printemps. La cérémonie est interminable : " On chantait, on s'agenouillait, on se relevait, cela n'en finissait pas !". Le cortège se rend ensuite au cimetière en empruntant des chemins de campagne. Ce soir-là, Charles veille en pensant à sa femme disparue. Rodolphe et Léon dorment tranquillement. Il en est un autre qui ne trouve pas le sommeil et qui est inconsolable, c'est Justin.

Dès le lendemain, Les affaires d'argent recommencent. Les créanciers se déchaînent sur le pauvre Bovary, mais celui-ci refuse de vendre les meubles ayant appartenu à Emma. " Alors chacun se mit à profiter." : Mademoiselle Lempereur réclame six mois de leçons, Félicité, la bonne, le quitte en emportant la garde-robe d'Emma... Léon se marie. Charles retrouve au grenier la preuve de l'infidélité d'Emma : la lettre de Rodolphe. Il est fou de douleur. Il souhaite pourtant qu'Emma bénéficie d'un superbe monument funéraire. il se fâche définitivement avec sa mère. Un autre jour, il découvre les lettres de Léon, ce qui ne lui laisse plus aucun espoir quant à la fidélité d'Emma. Un jour d'août il rencontre Rodolphe. Il parle volontiers avec lui et ne semble pas lui en vouloir. Il meurt, le lendemain, sur le banc du jardin, sous la tonnelle. Berthe est recueillie par une tante du père Rouault. Il lui faut travailler comme ouvrière dans une filature. Homais, lui, est comblé : "il vient de recevoir la croix d'honneur".

Quelques jugements sur l'oeuvre de Gustave Flaubert

"... Madame Bovary se donne ; emportée par les sophismes de son imagination, elle se donne magnifiquement, généreusement, d'une manière toute masculine, à des drôles qui ne sont pas égaux , exactement comme des poètes se livrent à des drôlesses... cette femme, en réalité est très sublime dans son espèce , dans son petit milieu et en face de son petit horizon... en somme, cette femme est vraiment grande , elle est surtout pitoyable , et malgré la dureté systématique de l'auteur, qui a fait tous ses efforts pour être absent de son œuvre et pour jouer la fonction d'un montreur de marionnettes, toutes les femmes intellectuelles lui sauront gré d'avoir élevé la femelle à une si haute puissance , si loin de l'animal pur et si près de l'homme idéal, et de l'avoir fait participer à ce double caractère de calcul et de rêverie qui constitue l'être parfait"."

Charles Baudelaire, l'Artiste, 18 octobre 1857

"Ce qui jusqu'à Flaubert était action devient impression. Les choses ont autant de vie que les hommes , car c'est le raisonnement qui après coup assigne à tout phénomène visuel des causes extérieures , mais dans l'impression première que nous recevons cette cause n'est pas impliquée". "

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Marcel Proust, janvier 1920.

" L'histoire que Flaubert nous raconte est celle de la médiocrité ; et cette déception que nous éprouvons , c'est le moment où nous découvrons que le réel est aussi le médiocre , l'ennui. mais c'est aussi ce que nous rêvons d'abord. Et le romanesque réside en ce mouvement qui va du rêve au réel de la rencontre, à l'échec, de ce que pourrait être notre vie à ce qu'elle est. Le roman de Bovary n'est-il pas en fin de compte l'histoire du réel , c'est à dire le surgissement d'un éternel ennui ? "

G Bollème, La Leçon de Flaubert, Julliard, 1964

Extraits de la correspondance de Gustave Flaubert

" J'ai le regard penché sur les mousses de moisissure de l'âme. Il y loin de là aux flamboiements mythologiques et théologiques de Saint Antoine. Et de même que le sujet est différent, j'écris dans un tout autre procédé. Je veux qu'il n'y ait pas dans mon livre un seul mouvement, ni une seule réflexion de l'auteur."

A Louise Colet, 8 février 1852

" Toute la valeur de mon livre, s'il en a une, sera d'avoir su marcher droit sur un cheveu, suspendu entre le double abîme du lyrisme et du vulgaire (que je veux fondre dans une analyse narrative). "

A Louise Colet, 20 mars 1852

" Croyez-vous donc que cette ignoble réalité, dont la reproduction vous dégoûte, ne me fasse tout autant qu'à vous sauter le coeur ? Si vous me connaissiez davantage, vous sauriez que j'ai la vie ordinaire en exécration. Je m'en suis toujours, personnellement, écarté autant que j'ai pu. - Mais esthétiquement j'ai voulu, cette fois, et rien que cette fois, la pratiquer à fond. Aussi ai-je pris la chose d'une manière héroïque, j'entends minutieuse, en acceptant tout, en disant tout, en peignant tout (expression ambitieuse). "

A Léon Laurent-Pichat, 2 octobre 1856

" On me croit épris du réel, tandis que je l'exècre. C'est en haine du réalisme que j'ai entrepris ce roman. Mais je n'en déteste pas moins la fausse idéalité, dont nous sommes bernés par le temps qui

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court. "

A Edma Roger des Genettes, 30 octobre 1856

" Madame Bovary n'a rien de vrai. C'est une histoire totalement inventée ; je n'y ai rien ni de mes sentiments, ni de mon existence. L'illusion (s'il y en a une) vient au contraire de l'impersonnalité de l'oeuvre. C'est un de mes principes, qu'il ne faut pas s'écrire. L'artiste doit être dans son oeuvre comme Dieu dans la création, invisible et tout puissant ; qu'on le sente partout, mais qu'on ne le voie pas. "

A Mlle Leroyer de Chantepie, 18 mars 1857

" Quand j'écrivais l'empoisonnement de Madame Bovary j'avais si bien le goût de l'arsenic dans la bouche, j'étais si bien empoisonné moi-même que je me suis donné deux indigestions coup sur coup, - deux indigestions réelles, car j'ai vomi tout mon dîner."

A Hippolyte Taine, 20 novembre 1866

Quelques citations de madame Bovary

" Qui donc écartait, à tant de distance, le matin d'avant-hier et le soir d'aujourd'hui ? Son voyage à la Vaubyessard avait fait un trou dans sa vie, à la manière de ces grandes crevasses qu'un orage, en une seule nuit, creuse quelquefois dans les montagnes "

première partie, Chapitre 9

"Quant à Emma, elle ne s'interrogea point pour savoir si elle l'aimait. L'amour, croyait-elle, devait arriver tout à coup, avec de grands éclats et des fulgurations, -- ouragan des cieux qui tombe sur la vie, la bouleverse, arrache les volontés comme des feuilles et emporte à l'abîme le cœur entier. Elle ne savait pas que, sur la terrasse des maisons, la pluie fait des lacs quand les gouttières sont bouchées, et elle fût ainsi demeurée en sa sécurité, lorsqu'elle découvrit subitement une lézarde dans le mur. "

deuxième partie, Chapitre 4

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" Il s'était tant de fois entendu dire ces choses, qu'elles n'avaient pour lui rien d'original. Emma ressemblait à toutes les maîtresses ; et le charme de la nouveauté, peu à peu tombant comme un vêtement, laissait voir à nu l'éternelle monotonie de la passion, qui a toujours les mêmes formes et le même langage."

deuxième partie, Chapitre 12

" Vous profitez impudemment de ma détresse, monsieur ! Je suis à plaindre, mais pas à vendre ! "

troisième partie , Chapitre 7, Emma à Maître Guillaumin,

"...comme si la plénitude de l'âme ne débordait pas quelquefois par les métaphores les plus vides, puisque personne, jamais, ne peut donner l'exacte mesure de ses besoins, ni de ses conceptions, ni de ses douleurs, et que la parole humaine est comme un chaudron fêlé où nous battons des mélodies à faire danser les ours, quand on voudrait attendrir les étoiles. "

deuxième partie, Chapitre 12

" car tout bourgeois, dans l'échauffement de sa jeunesse, ne fût-ce qu'un jour, une minute, s'est cru capable d'immenses passions, de hautes entreprises. Le plus médiocre libertin a rêvé des sultanes ; chaque notaire porte en soi les débris d'un poète. "

troisième partie, Chapitre 6

"Il ne faut pas toucher aux idoles : la dorure en reste aux mains "

troisième partie, Chapitre 6

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Quelques citations de Flaubert sur l’art

« Il y a en moi, littérairement parlant, deux bonshommes distincts : un qui est épris de gueulades, de lyrisme, de grands vols d’aigle, de toutes les sonorités de la phrase et des sommets de l’idée ; un autre qui fouille et creuse le vrai tant qu’il peut, qui aime à accuser le petit fait aussi puissamment que le grand, qui voudrait vous faire sentir presque matériellement les choses qu’il reproduit ; celui-là aime à rire et se plaît dans les animalités de l’homme. »

(À Louise Colet, 16 janvier 1852)

« La passion ne fait pas les vers. – Et plus vous serez personnel, plus vous serez faible. »

(À propos de Musset) (à Louise Colet, 5-6 juillet 1852)

« Je regarde comme très secondaire le détail technique, le renseignement local, enfin le côté historique et exact des choses. Je recherche par-dessus tout, la Beauté, dont mes compagnons sont médiocrement en quête. »

(À George Sand, décembre 1875)

« Il ne s’agit pas seulement de voir, il faut arranger et fondre ce que l’on a vu. La Réalité, selon moi, ne doit être qu’un tremplin. Nos amis sont persuadés qu’elle constitue tout l’Art. »

(À Ivan Tourgueniev, 8 décembre 1877. « Nos amis » : Daudet, E. de Goncourt, Zola)

« Ce qui me semble beau, ce que je voudrais faire, c’est un livre sur rien, un livre sans attache extérieure, qui se tiendrait de lui-même par la force interne de son style, comme la terre sans être soutenue se tient en l’air, un livre qui n’aurait presque pas de sujet ou du moins où le sujet serait presque invisible, si cela se peut. Les œuvres les plus belles sont celles où il y a le moins de matière. […] C’est pour cela qu’il n’y a ni beaux ni vilains sujets et qu’on pourrait presque établir comme

Illustration 6: couverture Madame Bovary

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axiome, en se plaçant au point de vue de l’Art pur, qu’il n’y en a aucun, le style étant à lui seul une manière absolue de voir les choses. »

(À Louise Colet, 16 janvier 1852)

« Enfin, je tâche de bien penser pour bien écrire ; mais c’est bien écrire qui est mon but, je ne le cache pas. »

(À George Sand, décembre 1875)

« Je crois que l’arrondissement de la phrase n’est rien. Mais que bien écrire est tout, parce que “bien écrire, c’est à la fois bien sentir, bien penser et bien dire” (Buffon). […] Enfin, je crois la Forme et le Fond deux subtilités, deux entités qui n’existent jamais l’une sans l’autre. Ce souci de la Beauté extérieure que vous me reprochez est pour moi une méthode. Quand je découvre une mauvaise assonance ou une répétition dans une de mes phrases, je suis sûr que je patauge dans le Faux ; à force de chercher, je trouve l’expression juste qui était la seule, et qui est, en même temps, l’harmonieuse ; le mot ne manque jamais quand on possède l’idée. »

(À George Sand, 10 mars 1876)

« Une bonne phrase de prose doit être comme un bon vers, inchangeable, aussi rythmée, aussi sonore. »

(À Louise Colet, 22 juillet 1852)

« J’éclate de colères et d’indignations rentrées. Mais dans l’idéal que j’ai de l’Art, je crois qu’on ne doit rien montrer, des siennes, et que l’Artiste ne doit pas plus apparaître dans son œuvre que Dieu dans la nature. L’homme n’est rien, l’œuvre tout ! »

(À George Sand, décembre 1875)

« On peut juger de la bonté d’un livre à la vigueur des coups de poing qu’il vous a donnés et à la longueur de temps qu’on est ensuite à en revenir. »

(À Louise Colet, 15 juillet 1853)

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Index des illustrationsIllustration 1: Gustave Flaubert............................................................................................................1Illustration 2: portrait par Eugène Giraud............................................................................................2Illustration 3: Salamnbô, peinture par Gaston Bussière, 1907.............................................................5Illustration 4: Emile Zola....................................................................................................................13Illustration 5: Henry James.................................................................................................................16Illustration 6: couverture Madame Bovary.........................................................................................28Illustration 7: portrait de Gustave Flaubert........................................................................................30

Table des matièresIntroduction..........................................................................................................................................1Sommaire..............................................................................................................................................1Biographie............................................................................................................................................2Les quatre piliers de l'œuvre flaubertienne...........................................................................................4

Madame Bovary...............................................................................................................................5Salammbô........................................................................................................................................5Bouvard et Pécuchet........................................................................................................................6

Illustration 7: portrait de Gustave Flaubert

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Œuvres..................................................................................................................................................7 Romans...........................................................................................................................................7Lettres..............................................................................................................................................7Recueils............................................................................................................................................8

Bibliographie........................................................................................................................................8Un point sur l'Éducation Sentimentale.................................................................................................8

Résumé.............................................................................................................................................8Critique de l'Education sentimentale par George Sand...................................................................9L'Education sentimentale vue par Emile Zola..............................................................................13L'Education sentimentale vue par Henry James............................................................................16

Un point sur Madame Bovary............................................................................................................17Résumé du roman..........................................................................................................................17

Première Partie..........................................................................................................................17Deuxième Partie........................................................................................................................18Troisième Partie........................................................................................................................21

Quelques jugements sur l'oeuvre de Gustave Flaubert..................................................................24Extraits de la correspondance de Gustave Flaubert.......................................................................25