Guérir les blessures de la vie

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GUÉRIR LES BLESSURES DE LA VIE

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Ouvrages du même auteur (chez le même Éditeur)

Les fantastiques capacités de votre cerveau

I S S N 1285-302X

I S B N 2-7339-0597-X

© 1999, by J a c q u e s G r a n c h e r , É d i t e u r Par is .

98, rue d e V a u g i r a r d 75006 Par i s

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Monique de Verdilhac

Guérir les blessures de la vie

Dessins de Claude Viel

J A C Q U E S J A C Q U E S

CRANCHER 98, RUE DE VAUGIRARD

75006 - PARIS

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INTRODUCTION

J'ai découvert au cours des séances qui vont suivre beau- coup plus de douleur, de solitude et parfois de désespoir que j'aurais jamais imaginé en rencontrer.

Mais au bouleversement de cette confrontation avec la détresse, a succédé un émerveillement qui ne s'est jamais tari. Des personnes qui vivaient la maladie, la drogue, le chômage, le deuil... et le plus souvent une douleur affective - ont pris le risque d'oser s'aventurer sur un chemin de guérison.

Dans leur dénuement elles espéraient encore, de façon ténue parfois, trouver un sens à leur vie ; et pour certaines d'entre elles, s'épanouir.

C'est dans les expériences proposées qu'elles ont com- mencé à recouvrer leurs ressources. De plus en plus de personnes semblent intéressées à devenir les véritables ac- teurs de leur histoire à venir.

Branchées sur leur propre écoute sensible, elles décou- vrent alors qu'aucune mauvaise étoile ne pourrait aliéner le futur - dans la mesure où elles s'en chargent et le fa- çonnent dans une vision, des perspectives nouvelles.

Le cerveau est aux commandes : ordinateur le plus per- formant qu'on puisse imaginer, il gère nos milliards de

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neurones - en fonction des données qu'il reçoit. Aventu- rier fabuleux, il ne demande qu'à être guidé vers les nou- veaux buts que nous lui proposons. Il est en son pouvoir de les informatiser. De les rendre opérationnels.

Pour en terminer avec le malheur, nous possédons les outils, toutes les ressources nécessaires. Il ne s'agit pas de propos magiques : cependant, pour s'en convaincre, faut-il tenter l'expérience.

La qualité de pensées positives, bénéfiques, transforme- ront nos fonctionnements habituels: magnétiques, elles attirent ce qui leur ressemble et s'inscrivent dans le circuit de nouveaux programmes. Leur impact lié aux désirs les plus sincères, les plus profonds peut être déterminant pour réorienter l'être tout entier vers la réalisation de ses nou- veaux objectifs.

Le corps est notre point d'amarrage. Il est aussi le seul instrument que nous possédions pour exprimer la gamme de nos sensations, de nos émotions : ses joies, ses souffran- ces. Il raconte notre histoire.

La relaxation, le souffle sur lequel on se branche pren- nent pouvoir sur la fatigue, le stress, l'angoisse ou l'inhibi- tion. La visualisation créatrice sur laquelle on voyage invente la vie. Elle mobilise les fonctions du cerveau - qui prend pour argent comptant ce que nous imaginons, éprouvons «comme si» nous vivions dans la réalité concrète la réalisation de ces nouveaux chemins de vie.

Alors le cerveau, toujours lui - à la condition de respec- ter les règles qui le gouvernent - les met en chantier: anticipe leur réalisation.

L'épanouissement, la guérison sont contenus en germe en chacun d'entre nous.

Ainsi l'entraînement au voyage intérieur concerne-t-il ceux qui souffrent, ceux qui désirent développer leur po- tentiel, accéder à leur harmonie.

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L'ouvrage commence sur une soirée d'adieux. Les per- sonnes dont il va être question viennent d'achever leur cycle d'entraînement. Mais sont-elles réellement décidées à se séparer?

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RENCONTRE

Romary étira ses longues jambes, bailla somptueuse- ment et me prit à partie.

«Avant qu'on se quitte, lève au moins un coin du voile : c'était du bluff, ou tu le pensais réellement quand tu as osé affirmer que j'avais en moi les moyens de m'en sortir ?

- J'en étais bien sortie, moi. » Sarah s'est rapprochée. «Dis-moi ce qui t'autorisait à croire en des capacités

qu'il t'était impossible de reconnaître dans l'état où j'étais. - J ' a i fait comme vous. Au moment où j'aurais pu som-

brer, quelqu'un - qui le tenait de quelqu'un - a mis sa main sous mon menton et m'a appris à nager. Ensuite j'ai posé les pieds sur un chemin que je ne connaissais pas. Il a fini par me ramener à ma source.

- Allez : c'est bien vous qui avez arrosé vos déserts et les avez fait pousser.

«-Ose affirmer, Monique, que tu accorderais ce crédit à n'importe quel étranger qui frapperait à ta porte ?

- Eh, attendez. La magie, les illusions, ce n'est pas mon rayon. Mais qu'il entre, s'il décide de conduire lui-même son histoire à venir.

« - Arrête de nous bluffer », dit Pierre en riant.

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Il est ce soir comme un enfant repu de bien-être - loin de sa solitude, de la colère et du chagrin qu'il jetait avant sur sa vie perdue...

«Je ne savais même pas qu'on pouvait me regarder. M'apprivoiser... peut-être que le désir de vivre s'était épuisé.

- Je sais seulement que vous êtes venus jusque là. Et vous n'êtes plus repartis. »

Marjorie apporte des bougies neuves, des bouteilles - pendant que Loulou pose des feuilles de papier au milieu du cercle... pour signer une soirée mémorable.

Sarah, encore elle, prend un feutre orange. Fait sem- blant de broder l'espace. Etale ensuite une phrase qui prend toute la page blanche.

« Nous emporterons tous la clef que nous avons façon- née ici. Puisse-t-elle ouvrir d'autres prisons ! »

Maintenant, il faudrait partir. Mais Romary les tient encore en haleine sur le fil qu'il n'a pas lâché :

«Je te croirai si tu l'affirmes: avais-tu réalisé ma dé- tresse quand, pour la première fois, je suis venu vers toi ?

- En avais-tu toi-même mesuré la profondeur?» Marjorie fait le tour des personnes, à l'extérieur du cer-

cle. Secoue une épaule, frictionne une tête, tire deux oreil- les. « Eh, oh ! c'est pas une veillée funèbre. On a gagné : alors on va pas rejouer le match. Remettre ça. Y passer la nuit ! » Elle enclenche une cassette de tango argentin.

Le vent vient de tourner. On danse, on rit. Je regarde Marjorie ajouter quelques entrechats. Ronde et bouclée comme une enfant dont elle a retrouvé les traits. En dépit de son drame, elle n'a pas gâché son clin d'œil tendre à la vie.

«Si on racontait ce périple, qui nous croirait? - Mais aussi, qui serait tenté d'essayer ? » Séduite à la pensée de laisser des traces de son histoire,

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Sarah rêve tout haut... alors Loulou pointe un doigt vers le ciel qu'elle prend à témoin... met un châle sur sa tête, le croise sur sa poitrine, regarde le monde à travers un verre qu'elle tient entre les mains... «Je te vois, Sarah, tu avan- ces lentement vers une grande place vide. Tu portes une caisse d'oranges. Tu la poses par terre et dignement l'esca- lade. Tu as ouvert les bras - ouvert la bouche aussi pour annoncer la bonne nouvelle : une panacée, un remède mi- racle... à une demi-douzaine de pigeons : la guérison est en vous ! »

Pierre a mimé la scène. Les pigeons applaudissent. Les témoins s'envolent dans le rire, mais l'énergie retombe. Ils ne vont tout de même pas s'endormir là.

Une voix, un peu plus tard, émerge du silence: «on pourrait tout de même le raconter, ce périple ».

- Et par la même occasion l'enchâsser dans un mémo- randum? Il n'en n'est pas question...

- Juste se repasser le film, pour saisir en éclair notre cheminement. »

Je ne les regardai pas. Mon contrat avait été tenu jus- qu'à son terme. Nous en étions tous d'accord : j'avais fini de les accompagner. D'ailleurs, ils rassemblaient leurs af- faires pour partir. Pourtant, ils ne bougeaient pas.

« Monique, tu as dit un jour que le pain posé de l'autre côté de la vitrine ne nourrit pas celui qui a faim. Nous avons franchi avec toi le seuil de cette porte. Pourquoi les amis, les amis des amis n'auraient-ils pas le droit à ce pain ? »

Cette envie de transmettre leur expérience permettait au moins d'inventer une suite à leur rencontre. Mais aussi de drainer la tristesse d'une séparation.

A force d'idées à l'emporte-pièce, leur rêve se prenait au jeu. Prenait des allures de réalité. Mais ils tournaient en rond. S'ils racontaient cette histoire en l'écrivant, ne ris-

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quaient-ils pas de devenir prisonniers d'une aventure que les mots leur déroberaient ?

Comment revivre certaines séquences, en offrir leurs spontanéités, mais aussi la compréhension de leurs dérou- lements, les enjeux souvent indicibles ?

« Sans être guidés, tu nous vois parler d'espérance à ceux qui se seraient égarés, perdus ? »

Mes défenses avaient dû céder dans cette ambiance d'amitié, de musique et de nourritures surchauffées. La nuit était largement entamée quand je décidai de les ac- compagner.

Ils se sentaient prêts à y engager du temps. A courir le risque de se retrouver confrontés à certaines mémoires douloureuses du passé. Ils voulaient au moins compren- dre, intégrer les sens des étapes de cette gestation qui, pour certains, les avaient remis au monde.

Le tout serait enregistré sur cassette et, pourquoi pas, testé auprès d'amis.

Ces longs moments passés ensemble sont devenus livre à lire.

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PRATIQUER : MODE D'EMPLOI

LA MISE EN ROUTE. Avant tout, prenez soin de votre bien-être. Créez les conditions de votre sécurité : as- surez-vous qu'aucun bruit intempestif, aucune interven- tion ne viendra interrompre le processus dans lequel vous vous engagez.

• Commencez toujours par quitter la périphérie, le ci- néma du mental pour revenir à vous - à l'attention portée à votre corps en ses appuis, à la communication qui commence à s'établir avec vous-même dans les sensations éprouvées.

Comme le cerveau ne peut pas au même instant se bran- cher sur le mental et le ressenti, les pensées et les préoccu- pations commencent à s'estomper.

• La Respiration devient ce fil qui vous relie à vous- même au long de vos expériences. Le souffle va, vient et anime votre monde intérieur.

Les bruits extérieurs, les sollicitations s'estompent. Vous pouvez maintenant, et en toute sécurité, approfondir la relaxation; gagner les ondes Alpha. Dès que vous commencez à vous habiter, ni souvenir ni peur ne peuvent

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surgir sans votre assentiment. C'est vous, qui, consciem- ment, guidez le voyage.

• Ne prolongez jamais un mouvement, un exercice au- delà de votre bien-être.

LA REPRISE: passage obligé entre la détente et la reprise des activités antérieures. Il s'agit de faire transiter le système nerveux du parasympathique au sympathique : du repos à la re-mobilisation du tonus musculaire. Des cerveaux anciens en alpha, au cerveau cortical en bêta. Pas question d'embrouiller les fonctions du cerveau! Il vient de circuler sur les nouvelles pistes de ses neurotrans- metteurs - pour de nouveaux messages. Laissez-lui le temps de changer de longueurs d'ondes... Mobilisez lente- ment tout le corps et que ce soit un plaisir. Etirez-vous. Baillez. Attendez d'être complètement revenu au «ici et maintenant », dans le lieu où vous êtes, pour vous relever. Et taper des pieds.

LE BUREAU DES PLAINTES

• Plus fatigué, tendu, après une relaxation faite selon les « prescriptions » proposées qu'avant de vous y mettre ? Vous avez peut-être voulu trop bien faire au lieu de lâcher prise et faire confiance à votre organisme.

• Cela ne marche pas comme vous le voudriez ? L'atten- tion doit apprendre à se concentrer - et sur soi-même. Laissez-vous le temps de l'apprivoisement.

• Vous n'éprouvez que de l'ennui... Etiez-vous réelle- ment présent à vous-même? Les sensations annulent l'impression de vide, de désert. Ne quittez pas votre souffle. Il vous remplira.

La tête, les vœux pieux: ça va vite ! Mais le véritable changement, lui, nécessite un travail de pionnier. Laissez le temps au cerveau de changer de cap.

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LES PROGRAMMES PARTICULIERS • Si vous êtes empêché de vous mouvoir : inventez vos

moyens personnels pour réaliser les séquences propo- sées: avec une main, un doigt, les paupières, la lan- gue...

• Vous ne bougez pas du tout? Il vous suffit de lire plusieurs fois le texte. Puis d'expérimenter en imagi- naire. Le cerveau mettra en œuvre vos forces de gué- rison dans la même mesure qu'en esprit et dans le ressenti vous vous donnez d'éprouver.

• Vous n'arrivez pas à «voir» une couleur, à «enten- dre» couler un ruisseau, à imaginer ce qui n'est pas encore donné? Alors racontez tout haut à votre cer- veau ce que vous «voyez», ce que vous «entendez», comment vous vivez un moment de cette nouvelle his- toire. Peu à peu dans une entraide entre vous et vos cerveaux anciens, les sensations commenceront à émerger du brouillard.

ENREGISTREZ-VOUS • Il est difficile au début, d'enchaîner les séquences d'un

exercice sans avoir recours une ou plusieurs fois au texte qui les décrit - ce qui, en général, a pour effet de couper le processus.

Il n'est guère plus facile à la fois de pratiquer et de solliciter la mémoire pour se souvenir des enchaînements.

Alors ? Enregistrez-vous. • Préparez votre matériel. La touche de mise en marche

à portée de votre main. • Commencez à lire le texte à voix haute. Recommencez

jusqu'à ce que les modulations, l'amplitude, le débit et le rythme vous conviennent.

• Appuyez la touche enregistrement. Lisez lentement, pénétré des images, des sensations, des émotions évo- quées. Ni voix terne, ni trémolos.

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Mais quel réconfort serait une voix amicale enregistrée et qui vous accompagne

Les jeux, les expériences ont pour objectif de créer de nouveaux espaces - que chacun de nous peut explorer, découvrir. Branchée sur les champs d'Energie, notre pro- pre puissance s'éveille ; dévoile les ressources qu'en poten- tiel nous possédions mais dont nous doutions : premier pas risqué dans l'inconnu, puisqu'elles ne se révèlent qu'au moment où nous provoquons leur apparition en les éprou- vant. Elles donnent pouvoir aux personnes qui souffrent, se sentent enchaînées de se délivrer.

L'âge, l'expérience douloureuse - et parfois jusqu'au point de non-retour que l'on croit avoir atteint - ne peu- vent entraver le chemin vers l'authentique guérison : celle du cœur, de l'esprit - souvent celle du corps. Il n'est jamais trop tard pour transformer le destin. Le passé n'est jamais si lourd qu'il puisse condamner l'avenir... Juste après le pas où dans le désert on s'est définitivement arrêté parce qu'aucun secours ne s'inscrivait à l'horizon, juste après lui regardez, dissimulé derrière un repli, le puits d'eau fraîche.

Ne confondons plus le temps d'hier avec celui d'au- jourd'hui.

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LES VOYAGEURS DE L'ESPACE

Nous nous sommes retrouvés à six. Mais ce soir-là, le moteur qui les avait propulsés jusqu'à cette pièce tournait au ralenti. Étaient-ils réellement prêts à réinvestir ce passé pour en témoigner? Ils avaient eux-mêmes encore besoin d'un peu de temps et d'attention pour exorciser ensemble les blessures anciennes.

Romary disait : « Comment aurais-je pu imaginer mon corps devenu jardin fleuri, lui qui était une forteresse vide au milieu de champs minés?...» Et Loulou: «s'ouvrir au souffle, à la confiance, quand je ne comprenais même plus à quoi on jouait... »

Quand ils eurent fini de s'exprimer, une bonne moitié de la soirée était consommée. Peut-être allions-nous en rester là.

Et puis le vent tourna. Ils commencèrent à s'étirer, quit- tèrent positions et silence prostrés. Réinvestirent le présent en plaisantant. «Monique qui prétendait faire sortir le mauvais de moi comme un lapin d'un haut-de-forme...»

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Nous, les victimes d'un épisode de science fiction: et le code secret écrit en chinois...

Oui, ils tenaient à leur projet, mais pour l'instant en avaient perdu le fil.

Le fil les attendait à l'entrée de leur propre territoire. Et je les invitai à s'installer confortablement.

• Peut-être avez-vous un jardin. Du moins connais- sez- vous un lieu où poussent des arbres ? Imaginez leur essence, leur forme. Marchez vers eux. Choisis- sez celui qui vous attire. Approchez-vous de lui. Plus près. Imaginez que vos pieds s'appuient sur ses racines. Jambes et ventre s'étirent contre le tronc. Vous l'enlacez de vos bras. Serrez, serrez votre corps sur lui. Sentez l'écorce sur votre peau, peut-être au travers de vos vêtements.

L'écorce cerne et contient l'arbre. La peau cerne et contient le corps. Dans son espace délimité, l'ar- bre est chez lui. Dans celui qui vous est personnel vous êtes chez vous. Le risque d'une confusion est impossible.

Toujours en imaginaire, vous reconnaissez cette personne qui avance dans votre direction. Vous vous serrez la main, vous vous embrassez peut- être... Je peux aller chez toi, tu peux venir chez moi sans pour autant confondre nos territoires ou diluer nos limites. Si je suis conscient d'habiter chez moi qui pourrait m'envahir, me chasser?...

En même temps, sentez votre respiration soulever et abaisser le ventre, la poitrine. Posez sur eux vos mains. Vous résidez là - au cœur d'un mouvement, d'une présence que jamais rien ni personne ne pourra vous dérober. • L'arbre, la personne rencontrés étaient créés par vos yeux intérieurs. Maintenant, dans un mouve-

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ment très lent, soulevez réellement vos mains. Fai- tes-les bouger devant vous. Posez-les sur le visage. Pianotez sur les jambes avec tous les doigts. Vos propres sensations vous raccordent à vous-même.

Ouvrez la main droite sur le genou droit : paume ouverte tournée vers l'extérieur. Suivez du regard sa forme découpée sur la surface où elle s'appuie. Ensuite, voyez le dessin formé par l'espace entre les doigts que vous n'avez pas bougés. Déplacez vos yeux des doigts au support : le genou. Revenez au doigt. Tantôt vous considérez le fond, tantôt la forme !

Posez la main sur un papier, une étoffe: deux espaces, deux formes: vous et ce qui n'est pas vous. Il suffit de lever la main pour le confirmer : vous et l'étranger.

Essayez avec la main gauche. L'intention, maintenant, est de poser l'un après

l'autre les doigts de la main droite dans la paume de la main gauche. Suivez le déplacement de chacun de vos doigts. Sentez sa présence. Reconnaissez qu'il vous appartient. Non pas dans la tête, mais dans le contact avec les pulpes.

Lâchez, secouez. Détendez la main. L'autre main. Enfin, frottez les deux médius l'un contre l'autre

pour bien les personnaliser. Ensuite éloignez vos mains l'une de l'autre, aussi loin que vous le pou- vez. Les yeux fermés, suivez et sentez leur lent dé- placement quand ils se rapprochent. Les médius pointent en avant, comme des radars: souples et fermes - jusqu'à ce qu'ils se rejoignent légèrement. Recommencez à éloigner et à rapprocher les mé- dius. Cette fois ils sont deux amis que la rencontre réjouit, émeut à l'avance. Goûtez les fruits sensibles de ce contact.

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Arrêtez de laisser les autres, le malheur peser sur votre vie. En disposer. Cessez d'attendre leur verdict pour avoir le droit d'exister. Et portez à vous-même un sentiment bienveillant. Souhaitez qu'en vous naisse la paix.

Ils prenaient leur temps pour revenir au monde exté- rieur. Savouraient encore les sensations retrouvées à l'ins- tant où ils les parcouraient.

J'en profitai pour leur rappeler que la vie ne dispose que d'un seul instrument pour s'exprimer: le corps. «Tout ce que nous ressentons, manifestons - que ce soit physique ou affectif, emprunte ce véhicule. C'est à lui que nous devons la sensation et même la conscience d'exister. L'identité reste floue si nous la coupons de notre ressenti. Vous avez appris comment y résider en toute sécurité. Vous accorder aux partitions que vous créez et décidez vous-même de jouer. »

« Attends, Monique. Ne va pas trop vite. Rien n'est défi- nitivement acquis - en tout cas pour moi. Les vieux réflexes d'impuissance, l'impression d'être projeté hors de moi re- viennent parfois comme les marées du Mont Saint Michel... »

«Et moi, longtemps, j'ai pris le murmure de tes paroles pour de pieux encouragements, dérisoires. Et pourtant, presque malgré moi tu as semé ce qu'aujourd'hui je reven- dique : tu disais que la réalité à venir n'est pas enclose dans le passé... et même si elle fut altérée, empêchée, jamais rien n'est définitivement joué...

Un jour le brouhaha de ma tête, les battements désor- donnés du cœur ont baissé d'intensité. J'ai entendu : sous l'arbre de ton jardin l'espace est bien cadré. Mais le reste du monde est hors de ta portée. Alors, monte sur la col- line. Tes yeux balaieront un paysage inexploré. »

Oser relever le défi d'y croire c'est se confronter à une vision nouvelle de soi, du monde qui nous entoure. On ne

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peut plus prendre l'horizon borné pour son univers tout entier.

Mais il faut du temps pour prendre soin de soi comme de son bien le plus précieux. Au début, le désir d'émerger de son mal-être contient le piège : celui du doute qui met en péril la réussite même du projet.

Un musicien, un peintre, un guide de montagne n'ont-ils pas commencé par articuler les mots, les couleurs, les pas - et longtemps cheminé, jusqu'à découvrir que le but était en eux.

Ils venaient de cerner leur territoire. Désiraient mainte- nant revivre un des premiers exercices dans lesquels ils avaient commencé à l'investir.

Tous, nous avons reçu deux cadeaux de vie: l'esprit, le cœur qui donnent à l'existence son véritable sens et le corps qui, lui, manifeste tout les aléas de notre périple humain - unique témoin de notre histoire.

• Adoptez une position confortable et détendue, ob- servez la manière dont votre corps s'est spontané- ment installé, dans la forme unique qui est la sienne. L'espace qu'il occupe lui appartient en propre. Sen- tez sa densité, sa fermeté au contact des surfaces sur lesquelles il repose (sol, matelas, chaise...). Entrez dans la sensation de chaque partie du corps qui touche ce qui lui est étranger. Laissez-vous peser consciemment sur cette terre qui vous attracte et assure votre sécurité.

Êtes-vous tendu et en défense, lâché n'importe comment ou bien agréablement disposé ? Obser- vez-vous sans porter de jugement. La seule valeur, l'unique mesure devient ce que vous éprouvez dans cet instant.

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Soyez patient. Ne regardez pas votre montre. Vous êtes déjà en chemin.

Glissez un doigt de la main droite tout au long des lisières de votre peau : de la plante des pieds au sommet de la tête. Puis, à l'aide d'un doigt de la main gauche, parcourez les frontières à gauche. Ressentez ainsi vos formes qui délimitent votre es- pace. Personne ne peut prendre votre place ni vous confondre avec un autre, si vous l'occupez cons- ciemment - pas plus que sur une carte on pourrait prendre l'Equateur pour le Groenland.

Écartez doucement les bras, les jambes. Prenez davantage de place : toute votre place. Sentez-vous exister jusqu'au bout des doigts des mains, des doigts des pieds.

Pas la peine de toujours serrer et vivre sur un pied de guerre. Abaisser et lever le pont-levis vous ap- partient.

Bougez-les pour bien les percevoir : vous êtes chez vous. A nouveau, bougez en ramenant vos membres contre le corps ; les écartant ensuite : plusieurs fois - jusqu'à ressentir une liberté issue de ce double mou- vement.

Un ennemi, un importun à l'horizon ? Fermez les issues avec les bras et les jambes contre la colonne vertébrale: axe de votre édifice. Ouvrez-les pour l'ami. Choisissez vos invités. Qu'on n'entre pas chez vous comme dans un moulin. Alors, en toute sécurité vous pouvez ouvrir vos fenêtres, cultiver votre jardin.

Vous êtes aussi cette fleur qui ouvre sa corolle quand le soleil vient lui chauffer le cœur. Sur une inspiration lente, laissez les quatre membres s'écar- ter. Chaque inspiration les ouvre davantage - jus-

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qu'à former une fleur aux cinq pétales en forme d'étoile (la tête et les membres).

Mais aux approches du soir, la fleur se referme sur ses pétales pour engranger les richesses du jour : vos richesses. Alors, laissez-vous refermer autour du centre de votre être - là où ça respire. • Maintenant, progressivement et sans à-coups, vous allez remobiliser le tonus musculaire et ner- veux:

Remuez pieds et mains, consciemment. Bercez la tête à droite, à gauche, plusieurs fois,

très délicatement.

Bougez avec précautions votre corps dans tous les sens.

Baillez en vous étirant doucement - dans une sensation de plaisir.

Brusquer cette reprise, c'est prendre le risque de froisser un muscle ; d'être pris de vertige.

Mon corps, cet inconnu

Le voilà donc, ce point d'amarrage : le corps fondation et clef de voûte de votre édifice qui abrite un trésor auquel aucun pilleur ni voleur n'a accès.

« Selon toi, le corps raconte notre histoire. Tu peux en dire davantage ? »

La physiologie et le psychisme scellent leur alliance bien avant notre naissance. Le bébé, certes, ne fait pas de commentaire, ne porte aucun jugement sur la qualité de réception qu'on lui réserve. Il ne pense pas. N'a aucune conscience de sa présence au monde. Mais il éprouve avec intensité bien-être ou souffrance. Un goût de bonheur, de

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malheur s'inscrit à chaque instant dans la mémoire de ses cellules : il est trop petit pour conscientiser. Et voilà perdue dans les lointains l'origine de beaucoup de peurs, méfian- ces, visions négatives sur soi et le monde. Pour d'autres, le goût des rencontres, des expérience nées dans une confiance indéfectible bousculent les obstacles qui pour- raient freiner l'élan.

Le caractère n'est qu'une partie prenante de nos com- portements douloureux, inadaptés ou réussis. Le cerveau a engrangé et mémorisé des «scénarios» en grande partie imposés.

La qualité des soins corporels, de la nourriture sont intimement liés à la chaleur, la tendresse de ceux qui les donnent. Rien ne lui est encore personnel : cire molle sur laquelle s'inscrivent ses premières impressions. Si le tout- petit est projeté dans une expérience qui entraîne angoisse et souffrance, il peut ressentir l'environnement et son pro- pre corps comme hostiles, menaçants. Parfois il l'endort, le glace ou le déserte pour ne plus rien éprouver. Ah, les bébés trop sages ! Parfois ils crient et appellent à l'atten- tion, à la présence rassurante - que les adultes, trop sou- vent, décryptent comme caprice.

Si les événements, les êtres qui l'entourent - ou lui man- quent - n'accompagnent pas son évolution dans la sécurité d'une relation protectrice, aimante, l'enfant peut s'égarer. Perdre un chemin naturel d'ouverture, se considérer lui- même comme impuissant à y sculpter sa place : sa bonne place. Ce que nous cernons d'un enfant n'en n'est souvent que la part manifestée, forgée par les expériences aux- quelles il a été confronté. Stimulé, cadré et protégé, le voilà encouragé à découvrir le monde. C'est dans le creu- set de ce corps sensible qu'il commence à fonder les bases de son histoire, à initier son identité. De moins en moins confondu et dépendant, il ébauche des frontières avec ce qui n'est pas lui : dont il se démarque.

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Le petit enfant découvre les ressources dont il a besoin pour affronter une réalité de plus en plus vaste, s'il y est accompagné, pour que l'épreuve ne le déborde pas. Il ap- prend à défier une adversité à sa mesure. Triomphe au terme des péripéties initiatrices - s'il retrouve des bras protecteurs.

Arrive un moment où il doit confronter les exigences de l'environnement. Occasion pour lui de faire émerger de nouvelles forces constructives ou de s'y opposer. De deve- nir parfois l'objet d'une soumission passive jusqu'à aban- donner ses désirs personnels. Tout est entre les mains fermées et tendues ou castrantes, laxistes des adultes.

Certains événements risquent d'être déterminants: la naissance d'un autre enfant, le décès d'un parent ou la séparation peuvent mettre en cause sa propre valeur. Qui est-il pour être trahi, abandonné, laissé pour compte ? à moins que des bras le serrent fort pour l'aider à traverser l'inéluctable. Renforcent sa certitude d'être précieux.

Les enfants réellement aimés peuvent eux aussi ressentir, sans pouvoir le verbaliser, de l'angoisse, du chagrin. Ils les manifestent dans des gestes, des comportements dont on ne saisit pas la signification. Le petit insiste ou se retire sur des positions retranchées. La communication est alors dé- viée. Souvent, il se prend à rêver. Dans un univers où il fait sa place il vit ce qui était empêché.

Cependant, le réservoir des richesses potentielles dont chacun est doté à la naissance ne s'est jamais vidé. S'il n'y a pas eu accès, l'adulte peut hélas nier les posséder. Autant dire que, pour lui, elles n'existent pas. Et pour- tant...

Notre cerveau, la plus performante des machines élec- tromagnétiques, a enregistré sur les disquettes de la mé- moire tous les instants de notre existence: que nous en ayons - ou non - été conscients. Les messages imprimés

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passent et repassent, sans tenir compte du temps écoulé. Si nous n'avons pas changé, nous ressemblons encore à cet enfant innocent capable de bonheur ou bien menacé et démuni : incapable peut-être de transformer un destin qui semble tracé, inéluctable - projeté sur demain comme si on était hier.

Le cerveau est informé de tout ce qui se passe chez son propriétaire. De la périphérie au sentiment le plus pro- fond, rien ne lui échappe. Les antennes qui le renseignent sont les organes des sens: instruments fondamentaux de son tableau de bord. Mais il est aussi en son pouvoir de recevoir et d'informatiser des données nouvelles. De se diriger vers une manière nouvelle de concevoir et d'enga- ger sa vie.

Cependant belles théories, rêves illusoires, opinions et témoignages d'autres personnes n'entrent pas dans ses programmes. Il a besoin que nous nous y investissions. Se créer de nouvelles perspectives, goûter en imaginaire les fruits de cette transformation avant qu'ils apparais- sent : à certaines conditions, le cerveau prend pour argent comptant.

Cela lui est bien égal, que vous viviez l'expérience dans la réalité concrète ou imaginaire. Ce qui compte pour lui, c'est la traduction dans l'organisme des désirs, pensées, sentiments que vous avez décidé de vous donner.

Nous ne sommes pas enfermés dans la prison d'un or- ganisme structuré une fois pour toutes. En fait, il ne cesse de déménager et d'emménager. Plus de 90 % des milliards de nos cellules ont vu le jour entre hier et il y a quelques mois. Si nous n'avons pas l'impression de chamboule- ments - deuil et renaissance en continu, c'est qu'elles ré- pètent indéfiniment les modèles qui les ont précédées: bénéfiques ou maléfiques. Se constituant en réseaux de prédictions inconscientes, cellules et organes perpétuent

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et investissent un futur cloné. Nous avons le tort de les prendre pour irréversibles !

Chaque espèce vivante, tous ses composants gardent la mémoire de son organisation spécifique originelle: nais- sance, croissance, épanouissement harmonieux relèvent d'un ordre que seules des interventions extérieures peuvent perturber, dévier. Si vous plantez un gland, n'espérez pas manger des poires — mais aussi, une seule feuille de ce chêne contient le programme génétique tout entier.

Chaque cellule d'un être humain contient son pro- gramme. La qualité qui lui est particulière tient dans la conscience qu'il en a. Ainsi peut-il retrouver l'harmonie originelle s'il la restaure en lui-même.

Nous en étions à la deuxième rencontre. Ce soir-là, ils désiraient s'entraîner à substituer leur propre vision à celle du passé, au regard des autres. Il fallait donc qu'ils pren- nent pour repaire leur propre territoire.

• Assurez-vous qu'étendus vous pouvez largement mouvoir bras et jambes. Prenez le temps de sentir les parties du corps au contact de la surface sur laquelle il repose - dans l'enveloppe protectrice de la peau...

Soufflez doucement vos tensions sur quelques ex- pirations profondes et tranquilles. Entrouvrez les mâchoires ; desserrez les dents ; touchez avec la lan- gue le palais supérieur.

Les mains lâchent ce qu'elles tenaient enfermé. La terre vous attracte et vous accueille. Laissez- vous aller.

L'air soulève poitrine et ventre à l'inspiration.

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Alors, dans notre trou à rats, nous avons mis nos pas dans les siens. Nous quittions les rivages empoisonnés. Nos voyages nous entraînaient parfois au sommet d'une montagne sacrée. Parfois nous embarquions sur un déri- veur. Nous ne connaissions la voile ni les vents - pas plus que les glaces ou les déserts. Mais les êtres, les animaux rencontrés y pourvoyaient.

Dans la cabane, la lourdeur morne qui avait tendance à s'installer s'évaporait.

Notre faiblesse engendra nos plus beaux songes - puisés probablement à la mémoire humaine. Nos découvertes, la beauté des rencontres remplissaient le cœur: nous soi- gnions aussi les enfants, les animaux, creusions des puits. On s'y aimait.

Et puis, et puis on ne sait plus. Nous nous sommes retrouvés dans un hôpital. Et nous n'étions plus que deux.

Requinqués, nous avons embarqué comme garçons de cabine - avec un unique objectif : en direct réaliser nos songes les plus précieux. Là-bas nous avons pu commen- cer à les vivre - accueillis comme des fils, des frères.

Au bout de deux ans il a fallu rentrer. Mais nous n'arri- vions plus à faire surface, ni à rêver. Avec vous, nous avons retrouvé un nouveau port. Voilà.

Romary marche autour de nous mais ne nous voit pas. - Il restait encore un prisonnier que je n'avais pu libérer.

Pas sûr que j'avais envie d'ouvrir la porte. La présence en moi de ceux qui avaient failli gâcher ma vie me fascinait encore. J'inventais des scénarios de vengeance, de répara- tion.. Le ressentiment produirait une jouissance destruc- trice qui perdait dans les brumes un morceau de mon continent ensoleillé. En fait, c'est eux qui écrasaient encore mon adolescence. Il fallait absolument les écarter de mon chemin. Leur pardonner ? J'en étais incapable mais termi- ner, régler les comptes, ça oui.

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Une nuit après une soirée passée ici, je n'arrivais pas à dormir. N'arrêtais pas de déménager mon oreiller. Mes prédateurs prenaient toute la place. Alors je l'ai envoyé valser d'un coup de poing. L'ai poursuivi à coups de pieds. Ah ça oui je les ai cognés, pilés, jetés. J'ai hurlé des injures, sorti tout ce qui macérait en moi.. L'oreiller a fini par rendre le dernier soupir. Les plumes créaient autour de moi un ballet fantastique. Repu d'énergie nou- velle, j'ai rigolé. Me suis endormi par terre.

La lune énorme m'a réveillé. Alors j'ai ouvert la porte. Les ai poussés dehors. Les ai vus s'éloigner dans la lumière du petit matin. Ils m'avaient quitté.

Allez, venez maintenant. Il faut danser notre rêve. Ro- mary se secoue. Vérifie le bon fonctionnement de l'en- semble. Accorde une attention particulière à sa cheville - qui ne semble pas avoir gardé le souvenir de sa collision.

Debout, il cherche ses appuis dans un équilibre qu'il conquiert lentement. Les mains sur la poitrine, il semble méditer. Et puis son corps commence à bouger. Tourne sur lui-même. Il déploie ses bras. On dirait qu'avec ses mains il se met à sculpter l'espace ; qu'il repousse le passé au-delà des limites où il le tenait encore prisonnier.

Le rythme le prend. Il improvise, créateur de sa musique intérieure. Maintenant il bat des mains, nous invite à notre danse. Et voilà que nous lâchons les frontières ordinaires : aventuriers cette nuit d'un inconnu que nous explorons, investissons d'intimité, de tendresse.

Nous n'avions plus envie de partir.

Encore essoufflée, Marjorie interpella Sergio: « - Tu permets ? Il se contente de sourire. Elle le regarde comme si nous n'existions pas et pourtant, n'est-ce pas à nous qu'elle s'exprimait?

— Au début tu m'impressionnais avec ton costume et ta