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André CHARDONNET – Dominique THIBAUDON Le guide du PDCA de Deming PROGRÈS CONTINU ET MANAGEMENT © Éditions d’Organisation, 2003 ISBN : 2-7081-2839-6

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André CHARDONNET – Dominique THIBAUDON

Le guide du PDCAde DemingPROGRÈS CONTINUET MANAGEMENT

© Éditions d’Organisation, 2003 ISBN : 2-7081-2839-6

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Chapitre 1La philosophie de Deming

« Cultive-toi sur le modèle de l’homme de bien, non sur celui

de l’homme de peu »

Confucius, Livre VI-11.

1. Faire connaissance avec Deming ..................................................... 41.1. Ce prophète des temps modernes .................................................... 41.2. Sa philosophie ..................................................................................... 51.3. Son influence en Europe .................................................................... 6

2. Approfondir sa doctrine ...................................................................... 72.1. Le système de connaissance approfondie de l’organisation .......... 72.2. Voir l’activité en tant que système .................................................... 82.3. Comprendre les variations dans l’organisation ................................ 92.4. Progresser dans le management des hommes ................................ 10

3. Analyser ses recommandations ........................................................ 103.1. Panorama des quatorze points de Deming ..................................... 113.2. Obligations commentées du management d’après Deming... ...... 12

4. Constater le retour en force de 4 principes de Deming .......... 174.1. L’approche processus (1950) ............................................................. 184.2. La cybernétique « PDCA » (1950) ...................................................... 204.3. L’usage des statistiques et la théorie des variations ....................... 204.4. La psychologie des collaborateurs ..................................................... 22

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1. FAIRE CONNAISSANCE AVEC DEMING1

1.1. Ce prophète des temps modernesWilliam Edwards Deming est le célèbre qualiticien américain né en 1900 etdécédé en décembre 1993. Docteur ès sciences de l’Université de Yale, en1928, il se spécialise dans les statistiques.

En 1935, il rencontre le fameux statisticien Shewhart, inventeur de la « cartede contrôle ». Ce personnage était connu de Deming car il était l’auteur d’unouvrage reconnu, Economic Control of Quality of Manufactured Product.C’est pour Deming l’occasion d’étudier en détail la théorie de la stabilité dessystèmes. En effet, Shewhart la conçoit non seulement comme une applica-tion mathématique pour l’étude des processus industriels mais aussi commeune organisation du management de l’époque. En 1938, conseiller scientifi-que au Bureau national du recensement, il fait appliquer ces principesd’échantillonnage et, en 1942, il est détaché au ministère de la Guerre poury enseigner les méthodes de Shewhart aux industriels afin d’améliorer laqualité des matériels militaires. Il y délivre ses cours pendant toute la duréede la guerre.

À l’issue de la Seconde Guerre mondiale, en 1946, il participe à une missionau Japon. Le « Department of Defense » lui demande une étude économiqueen vue de faire repartir les rouages industriels du Japon. Au cours de cevoyage, il tombe amoureux de ce pays. À Tokyo, il rencontre des statisticienset des fondateurs de la JUSE, la grande association des ingénieurs japonais.C’est ainsi que Deming, invité par cette association, donne une série de coursaux plus hauts dirigeants de l’industrie japonaise en 1950.

Jusqu’en 1980, Deming se rendra vingt fois au Japon et sera le témoin de laformidable mutation qu’il a contribué à déclencher. En 1960, l’empereurHirohito lui remet, ainsi qu’à un de ses collègues, le docteur ingénieur JosephJuran, la médaille du Trésor sacré. Enfin, le Japon donnera son nom au PrixQualité pour les industriels japonais : le « Deming Prize ».

On pourrait même penser, au vu de la signification en mandarin des deuxsyllabes qui composent « Deming », que ce personnage était prédestiné à êtreaccepté dans cette partie du monde.

1. Pour faire plus connaissance avec William Edwards Deming, vous pouvez consulter le site internethttp://www.deming.org aux USA (The W. Edwards Deming Institute) ou en France http://fr-deming.orgpour l’Association Française Edwards Deming.

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« dé » en chinois : vertu, moralité, cœur, volonté(ce qui accompagne la voie, le « tao »)

« te » (en japonais : voie, aide)

« míng » en chinois : lumineux, clair, distinct(éclairement au sens d’intelligence des choses)

« min » (en japonais : même signification)

Figure 1.1. Un nom prédestiné pour le Japon et la Chine

Pendant tout ce temps, toutefois, ce « prophète des temps modernes » resteinconnu dans son pays. Pourtant, en 1975, les économistes sont formels, laqualité des produits japonais de grande diffusion a dépassé la qualité desproduits occidentaux et américains.

En juin 1980, la chaîne de télévision NBC diffuse un programme intitulé« Et si le Japon y arrive, pourquoi pas nous ? ». On y relate que MonsieurDeming, un ex-professeur de mathématiques, responsable de l’améliorationde la qualité d’un grand nombre de produits japonais, vit aux États-Unis dansune petite maison de Washington. Aussitôt, cette émission rencontre un fortimpact et Deming devient célèbre, aux États-Unis, du jour au lendemain. En1982, il édite son fameux ouvrage Out of the Crisis.

Au cours de la décennie 1980, il devient conférencier international et forme,grâce à ses séminaires de quatre jours, plus de 50 000 cadres supérieurs pourla plupart américains. Les Anglo-Saxons se mettront très vite à l’applicationde ses préceptes, mais les autres Européens seront plus réticents à son ensei-gnement.

1.2. Sa philosophiePour faire comprendre sa conception du management, Deming n’a de cessed’étayer sa théorie avec de multiples exemples concrets vécus. Dans sonenseignement, il se focalise toujours sur deux éléments : le client et l’individudans l’entreprise.

Sa réflexion est, bien sûr, nourrie de centaines d’observations collectées aucours des quarante années passées au contact des industriels japonais, amé-ricains et européens.

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Sa philosophie qu’il caractérise en une phrase : « Pour aller vers un nouveaustyle de management », s’appuie sur deux démarches fondamentales :

Acquérir des connaissances approfondies du fonctionnement des organi-sations, pour en comprendre les principes ; il appelle cela « System ofProfound Knowledge ».Se doter de bonnes pratiques de management, qu’il résume en quatorzepoints, « Fourteen Points », ceux-ci n’étant qu’une mise en application desthèmes du système de connaissance approfondi qu’il propose.

1.3. Son influence en EuropeÀ l’invitation de Jean-Marie Gogue, il viendra plusieurs fois en Europe. EnFrance, ses conférences n’auront pas un grand retentissement, seuls lesAnglais lui feront honneur et lui permettront de former plus de 8000 mana-gers.

Certains ont dit qu’en France la langue anglaise a constitué une barrière à ladiffusion de ces thèses, ce que nous ne croyons pas ; nous pensons plutôtque les dirigeants français n’étaient pas prêts à écouter des préceptes quin’étaient pas ceux de la culture des années 1980. Toujours est-il que Demingne fera qu’une seule conférence à Paris, en novembre 1989.

Un collègue de Deming au Japon, le docteur Joseph Juran, lui aussi qualiti-cien et conférencier, a été bien mieux accueilli dans notre pays. Moinsconceptuels et plus pragmatiques que ceux de Deming, ses principes d’assu-rance qualité collaient tout à fait aux idées qui avaient cours en France, àsavoir, mettre des systèmes qualité en place pour surveiller la qualité desproduits et des process.

Pour notre part, nous sommes reconnaissants à Deming, de culture américainepar éducation, de culture japonaise par expérience et de culture occidentalepar réflexion, de nous avoir transmis, comme l’a fait Descartes à son époque,le bon « discours sur le management » au travers de ses célèbres « Quatorzepoints ».

Le Mouvement Français pour la Qualité, des auteurs comme J.-M. Gogue,ou d’autres qualiticiens, ont été porteurs de ce fameux cycle de l’améliorationcontinue, ce qui fait qu’aujourd’hui, le management par le « Cycle PDCA »est relativement connu, même si on en parle encore peu dans les écoles demanagement.

On découvre aujourd’hui que ce concept fondamental est un principe deconduite managériale très simple et universel, comme le sont souvent lesgrandes lois. Le cycle de Deming est aussi un outil puissant dont l’ombreportée sur le management devient un formidable principe d’action, applicableaussi bien aux systèmes qu’aux hommes.

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2. APPROFONDIR SA DOCTRINE

2.1. Le « système de connaissance approfondie »de l’organisation

Pour Deming, la voie de l’amélioration dans l’entreprise passe par un travailde réflexion requérant quelque recul avec les pratiques et par la transforma-tion de son fonctionnement. Les points qu’il aborde convergent toujours versune double réflexion d’analyse du management : sur l’organisation en tantque système et sur le personnel en tant qu’individus.

Deming explique bien évidemment l’activité et l’organisation de façon « sys-témique », en se focalisant sur l’étude des variations de données et du systèmede production. L’approche qu’il recommande, pour le rôle et le comportementde l’individu dans ce système, ne peut être que managériale, psychologiqueet d’amélioration du savoir.

Quatre parties interdépendantes sont développées dans cette méthode deconnaissance approfondie, qu’il dénomme « The profound knowledge ». Sinous essayons de les résumer en quelques lignes, nous découvrons une pro-gression de la réflexion qui va du système à l’individu. Deming nous obligeà parcourir l’entreprise en étendue et en profondeur.

a) L’activité de l’entreprise et son organisation est un système dédié à lasatisfaction du client pour sa propre pérennité. Le système de managementen est le moteur principal.

b) Tout système est sujet à des variations qu’il s’agit d’observer et dont ilfaut tirer parti. L’analyse statistique permet de trier entre les causes spécialeset les causes communes de variations afin d’apporter les solutions appropriéesaux problèmes à résoudre.

c) L’adéquation des compétences aux activités est une exigence constante.De ce fait, le savoir de l’entreprise est à renouveler sans cesse. Il faut doncformer les individus, développer leurs connaissances et capitaliser le savoiret le savoir-faire, pour tous les niveaux hiérarchiques de l’entreprise.

d) L’accélération des changements culturels et socio-techniques provoquedes inadaptations et des réactions chez les employés. Elles sont néfastes àl’activité et augmentent le stress. Une nouvelle mission du managementconsiste à écouter ces nouveaux besoins et à y apporter des solutions.

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Figure 1.2. The Deming System of profound knowledge1

On peut donc résumer la philosophie de Deming en deux idées majeures,s’appuyant sur deux composantes du savoir : la compréhension et la connais-sance.

Il est nécessaire de bien comprendre les mécanismes fondamentaux del’entreprise (qu’il dénomme système) et de bien prendre en compte lapsychologie des employés.Il est essentiel d’être compétent, sans être un expert, dans la théorie des varia-tions et des méthodes d’acquisition du savoir, pour leur mise en pratique.

Dans notre culture cartésienne, nous pourrions dire qu’il faut un peu de savoiret beaucoup de savoir-faire, ça évite l’intellectualisme.

2.2. Voir l’activité en tant que systèmeDans son ouvrage Out of the Crisis, paru en 1982, Deming fait état descommunications qu’il a exposées au Japon en 1950 et explique « pourquoil’amélioration qualité a pour résultat une réaction en chaîne » :2

Improve qualitycosts decrease (less rework, fewer delays)capture the market with better quality and lower pricestay in businessprovide jobs and more jobs...

1. Source : W. Edwards Deming, « The New Economics », Massachusetts Institute of Technology – MITPress Editeur, 1997. Reproduction autorisée.2. Source : « Hors de la crise », Editions Economica, 1991, Traduction Jean-Marie Gogue de l’ouvrage« Out of the Crisis », W. Edwards Deming.

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Figure 1.3. Réaction en chaîne

L’amélioration de la qualité dans le système, assure-t-il, a pour conséquenceune diminution des coûts de production (moins de rebuts et de retards). Laproductivité augmente ainsi que la satisfaction des clients grâce à une meil-leure qualité. La fidélisation des clients et des prix plus faibles permettentde gagner de nouvelles parts de marché. L’entreprise reste compétitive surle marché et elle peut créer de nouveaux emplois.

Deming a particulièrement insisté sur le fait que l’activité devait êtrecomprise comme un système et la production comme un processus. Ceconcept simple a permis aux Japonais de capturer de nouveaux marchéspendant plus de vingt ans.

2.3. Comprendre les variations dans l’organisationCette démarche a pour objet de parvenir à comprendre comment créer unproduit et un service afin de réaliser une croissance continue, d’innover etd’accroître ses parts de marché. Il est parfaitement légitime de rechercher àproposer plus de produits avec des flux plus tendus mais il faut que lescapacités et l’organisation industrielle suivent en « coûts, qualité, flux et tenuedes délais », sinon le système global perd de l’efficacité. Selon Deming, cechangement passe par la prise en compte de « la théorie des variations »,pour gérer les événements aléatoires. Une coopération intelligente avec sesconcurrents, et non pas une concurrence exacerbée, peut être vitale pour laréussite de l’entreprise et l’intérêt du client.

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2.4. Progresser dans le management des hommesLes managers doivent donc explorer les causes des problèmes et des erreurs,et amener l’organisation à opérer des changements dans le système, ens’appuyant sur le personnel. Il faut rendre aux collaborateurs leur autonomie(ce qui ne veut pas dire indépendance, mais interdépendance) et fierté dansle travail accompli.

Comme bon nombre de dirigeants le font aujourd’hui, il s’agit de remplacerles évaluations individuelles annuelles – ces examens de fin d’année – pardes entretiens d’évaluation des performances et de développement des compé-tences, ce dernier complété d’un accompagnement individuel. La clé de cechangement, c’est la psychologie. Aujourd’hui, des entreprises n’hésitent pasà recourir à des psychosociologues dans leur démarche de changement deculture ou pour le développement de l’autonomie dans l’entreprise. Les orga-nisations sont devenues matricielles, les projets transverses télescopent lesmétiers et les managers doivent négocier avec les spécialistes. Au carrefourde tout cela, les opérateurs essaient de trouver leur place. Quel développe-ment de l’autonomie leur est-il réservé ? Comment sont-ils accompagnés dansces changements ?

Les démarches de développement des connaissances et de « coaching »apportent une première réponse. Deming faisait remarquer, suite à ses obser-vations sur le management japonais, l’importance du fonctionnement « auconsensus » ou « bottom-up ».

Des spécialistes de ces questions en psychosociologie d’entreprise expli-quent, comme Deming, l’importance que revêt, dans tout changement, laprise en compte du point de vue psychologique des individus. Il s’agit deparer aux risques de rejets ou de retour très rapide aux états antérieurs, pou-vant occasionner une perte de crédibilité du changement et une régression enmatière de confiance dans le management. Nous reviendrons sur ce pointdans la deuxième partie de cet ouvrage.

3. ANALYSER SES RECOMMANDATIONS

« Cette nouvelle efficacité que je vous propose », annonce Deming, « s’adresseà tous ceux qui vivent sous la tyrannie d’un style de management dominant ».De ce « Système de connaissance approfondi » découlent quatorze points debonnes pratiques managériales. Les thèmes abordés constituent une aide à laréflexion au niveau stratégique et un outil d’ouverture au changement. En voiciune traduction avec des commentaires extraits de son livre.

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3.1. Panorama des quatorze points de Deming1

Nous allons tout d’abord laisser la parole à William Edwards Deming, enanglais, nous commenterons ensuite en français.

DEMING’s fourteen points

1 Create constancy of purpose towards improvement of product and service.

2 Adopt the new philosophy. We are in a new economic age. Westernmanagement must awaken to the challenge, must learn theirresponsibilities, and take on leadership for change.

3 Cease dependence on inspection to achieve quality. Eliminate the need forinspection on a mass basis by building quality into the product in the firstplace.

4 End the practice of awarding business on the basis of price tag. Instead,minimize total cost. Move towards a single supplier for any one item, on along-term relationship of loyalty and trust.

5 Improve constantly and forever the system of production and service, toimprove quality and productivity, and thus constantly decrease costs.

6 Institute training on the job.

7 Everybody must accomplish personal transformation to adopt the principleof system.

8 Drive out fear, so that everyone may work effectively for the company.

9 Break down barriers between departments. People in research, design, salesand production must work as a team, to foresee problems of productionand in use that may be encountered with the product or service.

10 Eliminate slogans, exhortations, and targets for the work force asking forzero defects and new levels of productivity.

11a Eliminate work standards (quotas). Substitute leadership.

11b Eliminate management by objective. Eliminate management by numbers.

12a Remove barriers that rob people of their right to pride of workmanship.

12b This means, inter alia, abolishment of the annual or merit rating and ofmanagement by objective, management by the numbers.

13 Institute a vigorous program of education and self-improvement.

14 Everybody in the company will work to accomplish the transformation. Thetransformation is everybody’s job.

Figure 1.4. Deming’s fourteen points

1. Source : W. Edwards Deming, « Out of the Crisis », Massachusetts Institute of Technology – MITPress Editeur, 1992. Reproduction autorisée.

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Pour Deming, il s’agit là d’une suite de points essentiels qu’il est importantde ne pas oublier : « Il ne faut pas chercher de chronologie de priorités danscette suite, ils sont tous d’égale importance, même s’il faut travailler beau-coup plus sur certains, par exemple l’étude des variations. »

Ces quatorze points sont relatifs, dit-il, « aux maladies mortelles du mana-gement ». Il répétera sans cesse que ce n’est pas là prêcher une nouvellemorale mais, au contraire, apprendre à maîtriser en permanence la qualitédes produits et des services pour donner aux clients la meilleure satisfactionpossible et que l’on n’y parvient pas à coup d’exhortations ni à coup d’objec-tifs arbitraires.

Voyons ces quatorze points, auxquels nous ferons appel très souvent, tout aulong de ce livre et pour lesquels nous donnons nos interprétations. Demingnous dit qu’il ne suffit pas de faire des efforts pour résoudre les problèmes.Il faut agir sur plusieurs niveaux et dans plusieurs directions à la fois. Pourcela, il nous propose 14 points, un peu comme Philip Crosby suggérait, en1985, un programme pour nous vacciner contre le virus de la non-qualité.

3.2. Obligations commentées du management d’aprèsDeming...

3.2.1. Avoir des buts constants d’amélioration des produits etdes services

– le client est le point focal de l’activité– les enjeux de l’activité sont les objectifs du management– la politique qualité et productivité est le levier de l’innovation– les buts constants d’amélioration sont reportés le plus en amont possible,

vers la conception des produits et des services– l’allocation des ressources en recherche et en formation doit être suffisam-

ment budgétée

3.2.2. Adopter une nouvelle philosophie du changement

– les décennies actuelles s’inscrivent dans un contexte économique àcontraintes fortes, et soumis à la mondialisation

– le management doit prendre conscience de ce challenge– le management a de nouvelles responsabilités, plus étendues– le management doit s’engager comme leader du changement– le management doit voir la satisfaction de ses clients au travers de la tenue

des délais et de la conformité

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3.2.3. Alléger les systèmes de contrôle– le niveau qualité des produits ne peut pas dépendre de la sévérité des

contrôles– les contrôles sont à ramener le plus en amont possible dans le cycle de vie– les auto-contrôles sont préférables aux services Contrôle dédiés– les inspections de routine sont coûteuses car trop tardives– les inspections de routine sont redondantes et peu efficaces– préférer les démarches de conception robustes basées sur la capabilité– introduire les mesures statistiques dès la conception pour avoir accès aux

analyses de variabilités

3.2.4. Mettre fin aux pratiques de sélection par les coûts

– ne pas prendre en compte le seul coût d’achat mais le coût d’acquisitionglobal

– la concurrence par les prix est une vue restrictive– la pratique de sélection des fournisseurs par les prix est une mauvaise

pratique– préférer des démarches de coopération et de relation à long terme avec les

fournisseurs, avec des contrats de progrès et des approvisionnements enassurance qualité fiabilisée

– pratiquer des politiques fournisseurs sélectives selon un principe de sourceunique

– une direction des achats doit être à fort niveau de compétences– les fournisseurs doivent être évalués sur la base des 14 points

3.2.5. Améliorer constamment tous les processus

– la cartographie des processus de production est nécessaire– l’entreprise peut tirer avantage à mieux connaître ses processus supports– la qualité des produits est principalement déterminée dès la conception– les processus doivent être en état de maîtrise « Sept M »1 ; confère chapi-

tre 5, § 1.3 « Les sept outils de travail en groupe »– l’avantage des processus mis sous système Kanban et JAT est d’imposer

une discipline au dispositif de production

3.2.6. Mettre en œuvre un système de formation adapté

... et répondre aux questions suivantes :

– pourquoi faut-il mieux connaître sa société, ses clients, ses fournisseurs ?– comment mieux discerner les problèmes qui privent les employés de la

possibilité d’être satisfaits de leur travail, et donc de reconnaissance ?

1. « Machines, Milieu, Matières premières, Main-d’œuvre, Méthodes, Mesures et données, Manage-ment ».

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– comment être plus pédagogue vis-à-vis des dyslexiques, des dysphasiqueset des dysorthographiques ?

– comment mettre en concordance formation professionnelle et besoins desclients ?

– comment transformer l’investissement formation en valeur ajoutée voireen actif du bilan ?

– pourquoi améliorer la compréhension des processus et comment renforcerla connaissance de leurs variations ?

– comment rendre le personnel davantage co-acteur sur les processus ?– comment améliorer l’efficacité des actions d’amélioration et des résolu-

tions de problèmes par l’utilisation plus systématique de méthodes etd’outils ?

– comment maintenir à niveau les compétences compte tenu des change-ments dans les techniques de production ?

3.2.7. Développer le leadership et l’accompagnement pratique

– le management ne consiste plus à commander et à contrôler mais à diriger,entraîner et accompagner. L’action de déploiement est essentielle

– l’encadrement a pour mission de donner au personnel toute l’aide néces-saire pour que les processus soient les plus efficaces

– le management doit travailler sur les sources d’amélioration et sur lesprojets concernant la qualité des produits et des services

3.2.8. Faire disparaître les craintes, encourager une réellecommunication

... en s’attaquant à :

– la peur du changement et de ses conséquences– la peur de prendre de nouvelles délégations, par exemple, de faire son

auto-contrôle alors qu’il y avait auparavant des contrôleurs– la peur, pour des ouvriers, de ne pas réussir une formation, et, pour les

plus âgés, de ne pas comprendre assez vite– la peur d’une formation, pour certains cadres, qui les oblige à se remettre

en question– la peur des relations internes contractualisées : la peur d’être le client de

quelqu’un d’autre dans l’entreprise (alors qu’il n’y a pas de peur d’êtrefournisseur)

– mais aussi la crainte de ne rien voir changer une fois les actions de for-mation et de sensibilisation passées

– la crainte de s’exprimer alors qu’on n’a pas été écouté depuis des mois,des années, ou de dire quelque chose qui se retourne contre soi

– la crainte d’avoir un entretien individuel où seul le chef s’exprime– la crainte d’une communication unilatérale– la crainte de ne plus avoir de chef dans une organisation matricielle– la crainte de parler dans une démarche d’autonomie

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– la crainte de prendre des responsabilités– la crainte d’être en position plus risquée...

3.2.9. Renverser les barrières entre services et favoriser le tra-vail d’équipe

– barrières entre services techniques et services de production– barrières entre services de production et services supports– barrières dans la circulation des informations– barrières dans les mentalités pour le travail en projet– barrières géographiques naturelles entre les bureaux et les ateliers– barrières pour le travail en équipe quand l’évaluation annuelle se fait au

mérite– barrières dans l’activité de travail en équipe, car ceux qui aident sont quel-

quefois moins bien notés que ceux qui ne font que leur travail– barrières entre services pour les stocks

3.2.10. Éliminer les slogans et les exhortations

– remplacer les slogans qui incitent à augmenter la productivité par des plansd’actions clairs

– les exhortations au zéro défaut ne sont que du verbiage si elles ne sont pasaccompagnées de plans d’actions et de méthodes pour améliorer et changer

– éliminer les affichages ridicules aux yeux du personnel, notamment ceuxqui sont en contradiction avec la réalité quotidienne. Deming soutient queles exhortations et les affiches n’engendrent que des frustrations et desressentiments

– ce sont les « Sept M » qui sont responsables de la qualité des produits etdes services, les opérateurs ne sont pas les seuls en cause

– les tableaux de bord et les indicateurs tenus par les opérateurs doiventdevenir leur propriété

– les objectifs clairs promeuvent la responsabilisation, qui, elle-même,entraîne une bonne conduite managériale et un personnel motivé

– ne pas oublier que 80 % de la non-qualité d’une entreprise provientd’actions de management

3.2.11. Éliminer les quotas de production pour les ateliers etles objectifs chiffrés sans méthode, pour les cadres

– Deming insiste beaucoup sur ce point qui renvoie les managers à leurschères études de management (techniques traditionnelles)

– les quotas et les objectifs chiffrés sont un management par la crainte– Deming explique qu’il est futile d’établir des objectifs et des quotas basés

sur les moyennes, quand il est tellement aisé de faire mieux– les quotas et les rendements sont une barrière au progrès continu

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– les entreprises qui fonctionnent aux quotas créent des postes fictifs quientrent dans le calcul des quotas

– il faut bien des objectifs chiffrés pour les cadres, mais ont-ils vraiment unsens en recherche et développement ? en productivité ? en coûts de garan-tie ? si l’on ne fixe pas les règles du jeu pour les établir

– quelle crédibilité peut-on attribuer à des objectifs chiffrés sans méthode niallocation de moyens pour les atteindre ?

– Deming invite les dirigeants à fixer plutôt des objectifs sur la réductiondes variabilités du système et à inciter les cadres à exploiter tout le poten-tiel de ce dernier

– Il recommande aux cadres dirigeants de s’occuper du système sur le longterme plutôt que de fixer des objectifs au personnel sur le court terme

3.2.12. Supprimer tous les obstacles à la fierté du travail

– les quotas, qui sont une incitation à produire des produits défectueux– l’évaluation des performances, l’estimation au mérite– les causes de non-qualité identifiées que l’on ne supprime pas et le gas-

pillage qui s’ensuit– les produits réalisés mais non conformes car il faut avant tout « tenir le

rendement »– les défauts de communication (dont certains frôlent la faute profession-

nelle)– le travail de mauvaise qualité ou inutile– la non-reconnaissance

3.2.13. Favoriser « l’éducation » et l’amélioration de chacun

– Deming rappelle qu’il n’y a pas, en général, de pénurie de gens valables,seulement peut-être sur des postes très pointus...

– le progrès est toujours fondé sur la connaissance : l’éducation et la forma-tion doivent donc être continues et adaptées

– tout le management de l’entreprise a besoin d’une plus-value culturelleappelée par Deming « une nouvelle éducation » et doit notamment amé-liorer son savoir sur la connaissance approfondie du système, « the pro-found knowledge »

– encourager les efforts culturels pour le plus grand nombre en combinantla formation professionnelle et la formation plus générale

– l’entreprise a besoin de personnel qui s’instruise constamment, le person-nel étant considéré comme sa vraie richesse

3.2.14. S’assurer du déploiement de la démarche d’améliora-tion et de l’implication de chacun dans le processus de change-ment

– Deming pense qu’une direction doit s’engager sur une charte basée sur lespoints précédents

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– un noyau dur de managers est le vecteur nécessaire pour s’attaquer auxmaladies mortelles qui affectent les entreprises

– la formation et l’éducation sont les moyens qui permettront la mise enœuvre du changement

– la direction doit exercer son leadership dans la voie du changement et dansle suivi de sa mise en œuvre

– une des raisons d’être de la direction est d’amener l’entreprise à progresser– « Commencer, dit Deming, à construire le plus tôt possible, mais sans trop

se presser, une organisation qui guidera une amélioration continue de laqualité. »

– « Le cycle PDCA est une procédure très utile pour tous, pour suivre l’amé-lioration à toutes les étapes dans tous les processus. »

« I know you believe you understand what you think I said, but I am not

sure you realize that what you heard is not what I meant. »

Je sais que vous croyez que vous comprenez ce que vous pensez que j’ai

dit, mais je ne suis pas sûr que vous réalisez que ce que vous avez

entendu n’est pas ce que je voulais dire.

4. CONSTATER LE RETOUR EN FORCE DE 4 PRINCIPESDE DEMING

Figure 1.5. Retour en force des 4 principes de Deming

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L’approche processus proposée par la nouvelle norme ISO 9000 version 2000remet au goût du jour l’activité technique et industrielle, en redécouvrant lesystème de Deming.

La méthodologie « Six sigma » reprend à la fois la cybernétique PDCA etl’emploi des techniques statistiques avec l’aide d’outils logiciels faciles etadaptés.

Enfin, la psychologie des acteurs n’est plus à négliger avec les effets induitspar les changements rapides dans les entreprises ou dans les organismes. Ily a des changements de culture qui doivent être opérés avec du « coaching ».Cet accompagnement du personnel et de l’encadrement est particulièrementintéressant pour aider au fonctionnement des organisations matricielles etpour adapter le travail en équipe (team-building). Voilà les nouvelles pers-pectives qui s’offrent à nous dans ces entreprises qui désirent réagir plus viteet rester dans la compétition et sur le marché.

4.1. L’approche processus (1950)

Figure 1.6. Activité de production considérée comme un système1

Ce graphique fait apparaître pour la première fois « la production » comme unsystème. Deming dit l’avoir utilisé, en 1950, pour expliquer à des directeursgénéraux japonais la nécessité d’améliorer la qualité sur toute la ligne de pro-duction depuis les matières premières jusqu’aux client et utilisateur final.

1. Source : W. Edwards Deming, « The New Economics » – MIT Press Editeur, 1997. Reproductionautorisée.

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Ce « flugramme » ne vous rappelle-t-il pas quelque chose ?

« Ah si, mais c’est... bien sûr ! », un schéma de processus type !

Examinez attentivement les dépliants des consultants en organisation indus-trielle : vous y retrouverez ce graphique qui sert de trame à leur présentationquand ils vous expliquent et vous décrivent les flux de la Supply Chain dudernier progiciel « ERP »1 pour lequel ils sont censés vous aider à faire lechoix d’investissement.

Deming commentait ainsi ce diagramme de processus de production :

« C’est ce diagramme des flux qui donne le départ de l’amélioration. Sur lapartie gauche, les matières premières et les équipements ; j’ai expliqué qu’ilétait nécessaire de travailler avec les fournisseurs sur le long terme pouraméliorer la qualité et réduire le prix de ces produits, dans un esprit deconfiance et de loyauté en les considérant comme des partenaires... »

« Le client est le point le plus important de la ligne de production, la qualitéa pour but de satisfaire les besoins du client, présents et futurs... »

Voyons comment Deming évoque sa pédagogie :

« Les directeurs apprenaient quelles étaient leurs responsabilités en matièred’amélioration à tous les stades, les ingénieurs apprenaient les leurs. Ils appre-naient des méthodes simples mais puissantes permettant de détecter l’exis-tence des causes des variations spéciales. »

« Ils apprenaient que l’amélioration continue des processus est essentielle...L’amélioration de la qualité devint, dès lors, pour les Japonais à qui j’ensei-gnais ces concepts, un impératif général, comprenant toutes les activitésindustrielles : les études de marché, la conception, les approvisionnements,l’instrumentation, l’industrialisation, la production et la distribution. »

Aujourd’hui, on se situe complètement dans cette optique : les ERP ont prispossession des grandes entreprises, l’ISO 9000 vient de s’organiser sur les« processus orientés clients ».

Plus de vingt ans après la lecture de cette phrase majeure « ... ils apprenaientque l’amélioration continue des processus est essentielle », l’ISO 9001 vientde la faire sienne et de la porter au rang de norme internationale. Après ceconstat pourra-t-on encore écouter sans réagir ceux qui disent, à propos deDeming, « c’est dépassé ! » ou bien « c’est du passé » ou encore ceux qui lequalifient de « has been ».

Dans son dernier livre The New Economics for Industry, Government, Edu-cation, Deming présente cette démarche comme une méthode d’améliora-

1. ERP : Enterprise Resource Planning (planification des ressources de l’entreprise).

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tion : elle correspond au besoin minimal de culture managériale, pour fairedes progrès au niveau de l’organisation des entreprises et changer le mana-gement au niveau des hommes.

4.2. La cybernétique « PDCA » (1950)Dès 1950, Deming introduit la dynamique de l’amélioration continue, qu’ilavait découverte dans le principe des études statistiques dans le cycle deShewhart. Le Japon l’a retenu sous le nom de « cycle PDCA de Deming ».

C’est bien plus tard en Amérique, et maintenant en Europe, que l’on a décou-vert toute la puissance de cet outil très simple et porteur d’une méthode.

Figure 1.7. La cybernétique PDCA

Le terme de « cycle » suggère qu’à l’issue du contrôle des résultats, si l’objec-tif n’est pas atteint, il y a lieu d’interpréter les écarts et de comprendre lestendances. Le cycle se déroule une nouvelle fois avec un nouvel objectif,jusqu’à ce que soient atteints et compris les nouveaux résultats.

4.3. L’usage des statistiques et la théorie desvariations

Nous avons repris ci-après le dessin très simple de la « carte de contrôle »que Deming a présentée dans toutes ses conférences. Que veut-il nous fairedécouvrir dans ce schéma ? Pourquoi insiste-t-il tant sur la théorie des varia-tions ?

« Il y a deux erreurs fréquentes, écrit-il, dans l’attribution d’un défaut et dansla prise de décision pour améliorer une situation. »

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Erreur no1 :« Réagir à un résultat comme s’il provenait d’une cause spéciale, alorsqu’il vient en réalité d’une cause commune de variation. »

Erreur no2 :« Traiter un résultat comme s’il venait d’une cause commune de varia-tion, alors qu’il provient en fait d’une cause spéciale de variation. »

La réflexion sur la variance doit précéder la réflexion sur la démarche réactiveet le traitement des actions. Tout processus a des données de sortie mesura-bles qui permettront au produit d’entrer dans des limites contractuelles : lesspécifications. Au-delà des limites supérieure et inférieure de contrôle, cal-culées statistiquement et inhérentes au procédé, il y a lieu d’intervenir pourramener le processus à l’intérieur des limites. Il faut faire ressortir les causescommunes des causes spéciales.

Figure 1.8. Causes communes

� La première des précautions est de vérifier qu’il n’y a rien d’anormal auniveau du processus, ce qui dans la plupart des cas entraîne un résultat« normal », la loi de distribution autour de la moyenne étant gaussienne.On dit alors que le processus est sous contrôle statistique, c’est le fonde-ment du SPC (Statistical Process Control) : la maîtrise statistique des pro-cédés.

En jouant sur les mots et en langage direct, on peut dire : « un processusnormal donne une loi normale ».

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� Le deuxième point important est de bien distinguer, dans les variations,celles qui sont issues de causes communes et celles qui sont issues decauses spéciales.1

Sont de « causes communes » les variations qui occasionnent desdéfauts ou des erreurs dus au hasard et provenant du système. En cela,elles provoquent des variations aléatoires autour d’une moyenne. Elless’inscrivent dans les limites de la dispersion naturelle.Sont de « causes spéciales », celles dont la dispersion est identifiableet qui ont leur origine dans un événement passager ou accidentel etdifficilement prévisible.

Dès lors, nous voyons que les modes d’actions sur les processus ne serontpas du tout les mêmes selon les causes, d’où l’intérêt de la maîtrise statistiquedes procédés par cartes de contrôle.

Le message transmis par Deming est simple. En mécanique, il est assez facilede comprendre le sens donné au mot « variations », une machine ne fonctionnantbien qu’avec des jeux et des frottements. Il en est de même pour un processusde production : les variations sur les différents paramètres engendrent des résul-tats fluctuants sur les caractéristiques des produits, les délais et les coûts.

Si nous grimpons d’un cran dans le domaine des variations alors nous parvenonsau niveau expliqué par Deming, celui de l’entreprise en tant que système. Demingmet en évidence dans notre esprit les paradigmes et les fausses idées qui jettentla confusion entre les causes communes et les causes spéciales.

Il nous fait remarquer que, tant que les processus ne sont pas mis sous contrôlestatistique et que l’on ne suit pas les données par des cartes de suivi et des cartesde contrôle, il est difficile de comprendre nos erreurs de jugements. Comme ilsait avec quelle prudence il faut parler de méthodes statistiques aux dirigeants,il évite de trop rentrer dans les détails. S’il devait en parler aujourd’hui, aprèsl’avènement du phénomène « Six Sigma », ce serait sûrement avec moins deprudence. Mais dans son héritage il recommande tout simplement l’usage desstatistiques descriptives et des fonctions probabilistes, les quatre opérationsdonc ! « Faites parler les graphiques et les cartes de contrôles. »

4.4. La psychologie des collaborateursDeming évoque dans son enseignement (ses conférences et ses livres) lesfreins à toute démarche d’amélioration et les pertes d’efficacité dus àl’absence d’approche psychologique, à tous les niveaux, des collaborateursde l’entreprise.

L’erreur fondamentale est de considérer, dit-il, les employés comme une« marchandise » qui se vend ou qui s’achète (l’intérim) ou comme une simpleressource dont on s’attache la contribution selon l’importance du moment.

1. Source : « Hors de la crise », Editions Economica, 1991, Traduction Jean-Marie Gogue de l’ouvrage« Out of the Crisis », W. Edwards Deming.

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Les entreprises doivent revoir leur point de vue et leurs valeurs. Le personneln’est pas seulement une valeur économique, il est une valeur humaine etdonc une richesse pour l’entreprise. Considéré comme tel, il devient alors unlevier du progrès continu et un moteur du changement.

Nous résumons dans la figure ci-après la « carte mentale » de Deming syn-thétisée à partir de son enseignement.

Figure 1.9. Psychologie des employés

Quelques phrases tirées du livre de Deming, Hors de la crise, traduit parJean-Marie Gogue, reflètent assez bien le point de vue des « ouvriers » etl’attitude que devrait avoir l’encadrement par rapport à la qualité.

« Tous les ouvriers savent pourquoi la productivité augmente quand laqualité s’améliore : moins de retouches, moins de gaspillage, il n’y a pasde meilleure réponse... »

« Pour un ouvrier, faire de la qualité veut dire que sa performance luidonne satisfaction, le rend fier d’un travail bien fait. »

« Les ingénieurs doivent pouvoir discerner les problèmes qui privent lesouvriers de la possibilité d’être satisfaits de leur travail. »

« Le management doit faire disparaître les craintes et les peurs dont ledénominateur commun est la performance dégradée. Faire attention àla perversité du management par les chiffres. »

« Les ingénieurs et cadres sont capables d’affronter toutes sortes de pro-blèmes sauf les problèmes humains où ils semblent frappés de paralysie.Ils se réfugient alors dans des groupes de travail pour y trouver dessolutions. »

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André CHARDONNET – Dominique THIBAUDON

Le guide du PDCAde DemingPROGRÈS CONTINUET MANAGEMENT

© Éditions d’Organisation, 2003 ISBN : 2-7081-2839-6

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Chapitre 3Des applications multiples du cycle PDCA

« Il ne faut pas essayer de forcer le résultat, tout excès est

vain »

Zhuang Zi.

1. S’intéresser au PDCA ............................................................................ 541.1. Le caractère fractal du PDCA ............................................................. 541.2. Déclinaison fractale de chacune des phases PDCA ......................... 551.3. Intégration des PDCA dans l’organisation. ...................................... 571.4. Partage de la pratique du PDCA ....................................................... 58

2. Retrouver le PDCA dans les normes ISO ....................................... 592.1. Le PDCA de la série des normes ISO ................................................ 592.2. Le PDCA du système de management de la qualité ....................... 602.3. Le PDCA de la norme environnementale ISO 14001 ...................... 632.4. Modèle PDCA d’un système de management QSE ........................ 64

3. S’approprier un modèle pour bien manager ............................... 653.1. PDCA du rôle du manager dans la démarche d’amélioration ....... 653.2. L’efficacité managériale en PDCA huit phases ................................. 663.3. PDCA de la « stratégie de percée Six Sigma » .................................. 673.4. Description du cycle PDCA de « l’IRQM » ........................................ 683.5. PDCA – Qualité totale – Balanced Scorecard ................................... 69

4. Réfléchir « risques et objectifs » pour manager .......................... 704.1. Les dimensions PDCA dans l’approche du risque ........................... 704.2. Les objectifs PDCA dans le management ......................................... 72

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1. S’INTÉRESSER AU PDCA

1.1. Le caractère fractal du PDCA

Figure 3.1. PDCA « gigognes »

Cette représentation schématique de PDCA « gigognes » qui montre un petitPDCA faisant tourner une grande roue PDCA sur la pente du progrès estextraite d’un livre de Michel Périgord1. Les Japonais, confie-t-il, lui ont sou-vent répété la phrase suivante, à propos de cette roue de Deming :

« Nous commençons par améliorer ce que nous savons faire mais pas encoresuffisamment bien, ensuite nous innoverons, mais pas l’inverse. »

Cela rend bien compte d’un trait de la culture nipponne : les Japonais fontd’abord tourner de petites roues, avant d’en faire tourner de plus grandes.Chacun doit faire de petites réalisations concrètes en PDCA et c’est l’ensem-ble de la collectivité qui fait tourner une grande roue pour l’amélioration enmode PDCA.

Le concept de démultiplication du cycle PDCA est dû à un élève japonaisdu docteur Joseph Juran, Y. Kondo2, avec qui il a travaillé sur les techniquesd’audits.

1. Réussir la qualité totale, Michel PÉRIGORD, Éditions d’Organisation, 1987.2. Y. Kondo, description issue du Quality Control Handbook Fifth, édité par Dr Joseph Juran.

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Michel Périgord a imaginé que dans un PDCA on pouvait inscrire d’autresPDCA venant s’insérer dans chacune des parties, à l’image des « poupéesgigognes », chaque petit PDCA venant contribuer à un PDCA plus grand.

Dans ce cadre, il explique qu’il faut voir un petit PDCA comme un engrenage« moteur » à l’intérieur d’un autre engrenage, plus grand, qui l’entraîne dansle même sens de rotation mais avec un couple très important, comme, enmécanique, un « satellite fait tourner une couronne dentée ».

Nous livrons à votre réflexion que la vitesse de rotation de la grande rouepeut se situer au-delà des possibilités de « pédalage » des petites !

Nous pourrions nous laisser à penser que chaque individu dans l’entreprisefait tourner son propre PDCA afin de faire tourner chaque fonction, quielle-même ferait tourner une finalité ou une activité dans un processus, ainside suite. Cette vision n’est pas si éloignée que ça de la réalité.

La déclinaison de l’autonomie, par exemple, répond bien à ce principe. Dansune équipe autonome, le fonctionnement s’appuie sur des activités déléguéesà des opérateurs appelés « animateurs ». Un animateur est chargé de fairevivre l’activité qui lui est déléguée et de la promouvoir au sein de l’équipe.Son PDCA « animation » entraîne le bon fonctionnement du cycle PDCA« équipe autonome », ce dernier assurant la marche régulière du PDCA« unité de production » pour la réalisation des produits conformément auxobjectifs.

On peut alors parler du caractère fractal du PDCA, applicable à tous lesniveaux de l’entreprise où chacun devrait se considérer comme une petiteroue motrice et se sentir porteur d’un tout de l’entreprise pour la mise enœuvre des objectifs majeurs de l’entreprise.

1.2. Déclinaison fractale de chacune des phases PDCA

Cas d’une action de formation

Les différentes phases successives du PDCA ont chacune un but :

[PLAN] préparer la formation[DO] réaliser la formation[CHECK] évaluer la formation[ACT] combler les écarts, modifier...

Étudions le cas d’application de la phase « PLAN » que nous allons décom-poser à partir d’un autre PDCA plus détaillé, pour la préparation de la for-mation.

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Des applications multiples du cycle PDCA

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Figure 3.2. Action de formation

Sans en passer par ses déclinaisons multiples, pourrait-on assurer que l’onn’a rien oublié ?

Il est évident qu’une telle décomposition permet de hiérarchiser les déclinai-sons des tâches. Dans le cycle « mère », les expressions formalisent des fina-lités, dans le cycle « fractal » elles précisent des objectifs. En effet, il estsouvent important de pousser plus avant afin de pouvoir identifier les acteurs.

Déclinons le cycle PDCA de la phase « préparer la formation » :

� prendre en compte les attentes et définir les objectifs opérationnels et péda-gogiques en fonction des besoins

� apporter les réponses « Qui, Quoi, Où, Quand, Comment et Pourquoi »� évaluer la cohérence et la pertinence pour atteindre les objectifs� critiquer la conception et apporter les retouches éventuelles.

Nous pouvons constater que ce nouveau PDCA, plus précis, est rédigé sousforme de propositions opérationnelles (presque des objectifs). Il faut porterun grand soin à la rédaction de ce deuxième PDCA car il conditionne l’effi-cacité du premier.

Si nous poussons un peu plus la déclinaison d’un PDCA pour la partie« apporter les réponses en termes QQOQCP », alors les nouvelles proposi-tions deviennent plus précises, concernant les tâches à réaliser :

� préparer le questionnaire et les check-lists et identifier dans les listes despersonnes compétentes, les personnes disponibles

� lancer les convocations ; louer les moyens matériels et la salle� vérifier la logistique, le matériel, et que la salle est bien retenue pour la

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bonne date ; vérifier que les intervenants ont confirmé, ont bien pris encompte le programme, les contraintes de projection et compris les objectifsde la formation

� une conférence téléphonique est prévue pour répondre aux dernières ques-tions.

Le troisième PDCA est une déclinaison très détaillée des tâches à effectuer.Il doit être pensé en termes de coûts et de délais.

Ce n’est donc pas aussi simple, mais très efficace pour bien gérer les risqueset préparer le planning.

Êtes-vous prêt à décliner l’une des trois autres phases ? Quelle phrase cléécririez-vous dans chaque case PDCA, pour la caractériser ? Laquelle est laplus difficile ?

1.3. Intégration des PDCA dans l’organisationLes PDCA de management (les plus intéressants) doivent se retrouver surchacun des processus. Ce sont eux qui vont donner la dynamique aux activitésen tant que système.

Dans une organisation un tant soit peu dirigée, les cycles PDCA sont natu-rellement présents dans le fonctionnement, la gestion et les processus.

Comme ce sont des cycles, les phases reviennent régulièrement à desmoments particuliers de la vie de l’entreprise et de la vie du produit.

Même s’ils ne sont pas matérialisés en tant que tels, les cycles PDCA sontdonc facilement repérables, par la présence des revues ou des réunions devérification, lors des phases ACT ou CHECK. Une revue est un indice defonctionnement en mode PDCA sous-jacent.

Dans une entreprise de type PME, on peut facilement dénombrer une ving-taine de types de « Revues » ou de « Réunions de feed-back » représentantautant de cycles PDCA.

Voyons quelques exemples de « Revues » représentatives

• Revues de direction, chaque fois que le comité de direction en sent lanécessité mais le plus souvent dans les phases suivantes :

PLAN : politique, clients, budget, schéma directeur, objectifs...DO : suivi des activités courantes commerciales, techniques et indus-trielles. État des événements de la vie de l’entreprise.CHECK : point mensuel de contrôle de gestion et des activités desservices supports.

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Des applications multiples du cycle PDCA

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ACT : états et bilans semestriels ou annuels pour les activités, les résul-tats et le personnel (entretiens annuels et people’s review), pour endégager les grandes décisions.

• Revues de processus : le propriétaire du processus prévoit de les réaliserselon un mode prédéfini avec les acteurs et les clients du processus, sescollaborateurs et le comité de direction. Le cycle PDCA sous-jacent est ledéploiement des objectifs, l’accompagnement terrain en temps réel et encontinu, les vérifications et le contrôle managérial nécessaire, etc. Il fait despoints de synthèses à intervalles réguliers et une « Revue formelle » pourrevoir les points d’amélioration du processus afin de le rendre plus efficace.Nous avons inséré une fiche outil « Revue de processus » dans le chapitre 6.

Tous les actes formels et figés retenus dans l’organisation d’une grande entre-prise peuvent être ainsi décrits. Par exemple :

Revues du plan industriel et commercial (PIC)Revues du plan de production (PDP)Revues des plans de charges (CBN)Revues budgétaires et de gestion mensuellesRevues de production mensuelleRevues d’étude et de développementRevues de la satisfaction clientRevues de contratsRevues de projetsRevues de déclinaison des objectifs majeursRevues des plans d’actions stratégiquesRevues des indicateurs du tableau de bord CodirRevues de direction qualité (audits et bilan qualité)Revues d’auto-évaluation EFQMRevues de développement du personnel (People’s Review)

1.4. Partage de la pratique du PDCA

• Les managers doivent diriger les activités en mode PDCA :Plan (planifier) – Do (déployer) – Check (comprendre) – Act (améliorer)

• Les opérateurs en équipe autonome doivent appliquer le principed’action PAVR pour réaliser leurs tâches et maintenir leur poste au bonniveau de compétence et de polyvalence : Prévoir – Agir – Vérifier – Réa-gir.

Le personnel fait donc du PDCA, comme « monsieur Jourdain », sans lesavoir. Il faut donc que l’organisation lui permette de les reconnaître et qu’ilapprenne à identifier les phases du fonctionnement cyclique, ce qui valoriseson action qualité.

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L’important pour chacun est de bien percevoir dans quel cycle il est impliquéet d’être sensibilisé aux phases amont et aval de celle où il œuvre couram-ment. C’est la base de l’appropriation et de « l’éducation PDCA » par lepersonnel.

Pour les besoins d’une représentation commune, nous avons regroupé dans« le cycle vertueux du PDCA » le modèle de management et le principed’action.

2. RETROUVER LE PDCA DANS LES NORMES ISO

2.1. Le PDCA de la série des normes ISO

Figure 3.3. PDCA des normes ISO

La déclinaison classique des normes, dans ce cycle, montre le principe decohérence attaché à l’ensemble des 4 normes :

(A) « J’apprends et je décide »... J’apprends l’organisation des normesISO 9000, les principes essentiels, et je décide leur mise en œuvre : 1 heuredans une vie !

(P) « Je construis »... le système de management de la qualité sur la base desrecommandations de l’ISO 9004. Cette dernière constitue le référentiel, parexcellence, pour l’amélioration des performances. À mettre dans le cursusde manager.

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(D) « Je démontre »... Les exigences de la norme ISO 9001 ont plus de 10ans d’expérience. Comme les bons whiskies, elles commencent à être « buva-bles ».

(C) « Je vérifie pour améliorer »... La qualité des audits, décrite par l’ISO19011, n’est plus à démontrer quand ils sont bien conduits. Ils ont même desvertus pédagogiques en plus de leur force managériale. Enfin, ils sont géné-ralisables (qualité, sécurité, environnement).

2.2. Le PDCA du système de management de la qualité

-

Figure 3.4. PDCA du SMQ

Le système de management qualité ISO 9001 : 2000 permet de mettre de lasimplicité dans la complexité de l’organisation.

L’« IQM »1 le rappelait déjà en 1994 :

« Il y a en effet nécessité d’organiser le management du progrès dans l’entre-prise car il ne suffit pas d’avoir de bonnes idées et une bonne politique,encore faut-il être capable de les mettre en œuvre effectivement. »

Le modèle structuré de l’ISO 9001 : 2000 répond à cette formule et rap-pelle le principe de cette organisation, comme le montre le schéma pré-senté plus haut :

1. Institut Qualité Management, « Cahiers Qualité Management », no1 de juin 1994.

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– Partie droite : « Les processus qui créent de la valeur pour le client etpour tous ceux qui ont un intérêt dans leur développement et à leurréussite. »

– Partie gauche : « Les systèmes de contrôle où chaque niveau inférieurjustifie son existence à chaque niveau supérieur, qui, en contrepartie,lui donne son sens. »

C’est le fonctionnement de cet ensemble qui constitue le managementde l’entreprise.

À ce stade de modélisation, il n’est peut-être pas inutile de rappeler quelquesdéfinitions. Quand on parle de système de management, mieux vaut biencomprendre ce que signifient ces deux termes, d’une part, isolément et,d’autre part, quand ils sont associés.

Système : ensemble d’éléments corrélés ou interactifs

Management : activités coordonnées pour orienter et contrôler un orga-nisme

Système de management : se définit dès lors comme un système permet-tant d’établir une politique et des objectifs, et de les accomplir.

Système de management qualité (SMQ) : il doit donc permettre d’orien-ter et de contrôler une entreprise sur le plan qualité.

Pour une question de facilité de langage, nous appellerons ce dernier aussibien « système qualité » car, pour nous, il n’y a pas de différence entre « sys-tème qualité » et « système de management qualité ».

Derrière le concept de système de management de la qualité, se trouvel’ensemble des ressources, procédures, processus et objectifs nécessaires aumanagement de la qualité.

Mais cela est bien insuffisant, car c’est la mise en œuvre du PDCA qui vapermettre d’instaurer la dynamique. Faire tourner « la roue de Deming »,c’est ce qui va permettre de progresser et de s’élever. Chacun est invité à yapporter sa contribution.

La direction, de par sa compréhension du système, définit sa stratégie :

Le Codir définit la politique et les objectifs, alloue les ressources néces-saires pour les atteindre. Dans cette phase « Plan », la question de la per-tinence, c’est-à-dire de la juste relation entre les objectifs et les moyens,prend toute son importance :– soit on est à ressources constantes, et on parle alors d’adaptation des

objectifs aux moyens. C’est souvent le cas de la production qui setrouve souvent placée dans un champ de contraintes ;

– soit on est à ressources variables, et on définit les moyens pertinents etadaptés aux objectifs. Dans le contexte des études et du développement,c’est souvent le cas.

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Le Codir déploie la réalisation en phase « Do » ; pour cela, il incite,communique, accompagne et suit les activités.Le Codir contrôle au sens noble du terme. Il vérifie que l’on avance biencomme prévu. Voilà tout le sens de la phase « Check ».Le Codir prend les décisions en « Revue » de direction, à la lumière desrésultats et au vu des bilans et synthèses. Cette phase « Act » est vraimenttrès importante puisqu’elle occasionne des modifications du système, desévolutions nécessaires, des ressources nouvelles, des objectifs pour le cyclesuivant, et, tout cela, à la réflexion des évolutions du marché, de la satis-faction des clients et des exigences nouvelles (normatives ou réglemen-taires).

Le Service qualité s’inscrit aussi dans cette dynamique de par sa « raisond’être » même et au travers d’actions appropriées.

Il en est de même pour les responsables opérationnels.

Dans aucune entreprise il n’y a de « Superman ». Chaque personne a encharge de « pousser » la « Roue de Deming » sur les pentes de l’améliorationcontinue. Il faut gagner « en ordonnée » sur le plan de la compétitivité ettenir sur la durée, « en abscisse », pour assurer la pérennité. C’est la plusgrande pente possible qui est visée.

Figure 3.5. PDCA de la « Roue de Deming ».

L’ISO 9001 n’est évidemment pas une cale mais bien un levier pour managerle progrès continu !

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2.3. Le PDCA de la norme environnementale ISO 14001

Figure 3.6. PDCA de la norme ISO 14001

La prise de conscience de la question de « l’environnement » dans les paysindustrialisés et les grandes industries les a conduits à légiférer en la matière.À défaut de parvenir dans l’immédiat à des accords internationaux, desrecommandations ont précédé les lois.

Des chartes de bonne conduite sont apparues çà et là, des interdictions sontmême tombées brutalement. Souvenons-nous de celle sur les chlorofluoro-carbones (CFC) pour protéger la couche d’ozone.

Pertinents ou non, les règlements ont toujours leur bien-fondé et ont amenéprogressivement les entreprises polluantes à prendre des mesures correctiveset préventives. Non seulement celles-ci ont des comptes à rendre vis-à-visdes instances réglementaires (obligations de résultats) mais elles sont invitées(obligations de moyens) à mettre en œuvre des démarches préconisées parla norme internationale ISO 14001. Il est même possible de se faire certifierpar un organisme accrédité.

La norme ISO 14001, de mise en œuvre d’un « Système de managementenvironnemental », suit le même principe PDCA que la norme ISO 9001 :2000, mais les obligations en sont plus coercitives.

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2.4. Modèle PDCA d’un système de management QSE

Figure 3.7. Système de management « QSE »

Le PDCA sous-tend tout système de management, a fortiori, celui de la qua-lité, sécurité et environnement. Cette représentation a un double intérêt. D’unepart, elle montre bien l’implication de la direction dans la phase « ACT ».D’autre part, elle donne naturellement les huit points à mettre à l’ordre dujour d’une « Revue de direction » portant sur le SMQ.

Ce système ne nous est pas inconnu puisqu’il introduit « la séparation despouvoirs législatifs et exécutifs ». Les activités de la direction et celles desopérationnels et supports (dont le service qualité) sont clairement différen-ciées. Ce modèle est issu d’une représentation de la Cogema.

Faire vivre un système d’amélioration continu tel que celui-ci, pour viser leniveau d’excellence, nécessite la mise en œuvre de 4 principes de base :

[penser P] ➞ Principe d’ajustement pour assurer la COHÉRENCE[penser D] ➞ Principe de maturité pour atteindre la MAÎTRISE[penser C] ➞ Principe d’efficacité pour garantir le RÉSULTAT[penser A] ➞ Principe d’amélioration pour accroître la COMPÉTITIVITÉ

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Page 37: Guide Pdca

3. S’APPROPRIER UN MODÈLE POUR BIEN MANAGER

3.1. PDCA du rôle du manager1 dans la démarched’amélioration

Figure 3.8. PDCA du rôle du manager

« Phase A » ➞ Agir en connaissance de causes et dans un souci d’amélio-ration, décider les objectifs par rapport aux enjeux et le budget par rapportaux résultats...

« Phase P » ➞ Prévoir, planifier, préparer... en regard des risques, activités,ressources, moyens, objectifs de management, dispositifs d’évaluation...

« Phase D » ➞ Mettre en œuvre, déployer, accompagner... toutes les actionsde formation, réalisation du produit, mise en œuvre des actions de progrès...

« Phase C » ➞ Mesurer, analyser, comprendre... à partir des données fac-tuelles des résultats, indicateurs qualité, rendements, indicateurs de progrèset de gestion, et à nouveau passer par la « Phase A »

L’entreprise Cogema en a fait une déclinaison intéressante, résultat de brains-tormings réalisés avec trente groupes de cadres, lors de séminaires sur « lemanagement de la qualité » que nous avons animés en 1998-99 (voir la fichepratique au chapitre 8).

1. ... Il faut dire « manageur » maintenant car ce n’est plus le cadre, paraît-il, qui fait le chef-d’œuvre !

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3.2. L’efficacité managériale en PDCA huit phases

Figure 3.9. Management en PDCA huit phases

L’analyse plus poussée du 2e modèle de Deming nous a conduits à montrerque certaines activités dans les phases sont plutôt de type organisation etmanagement (MGT) et d’autres plutôt de type réalisation (ACTION)...

Le modèle du « Management efficace » proposé est donc obtenu par unesuite alternée d’actes de management et d’actions de réalisation, d’où nouspouvons tirer quelques règles de bonne pratique :

– mener les actions correctives avant d’introduire les innovations,– planifier et organiser le développement avant de préparer le déploiement

de l’action proprement dite,– déployer l’action de formation, de communication et d’accompagnement

avant de lancer la réalisation elle-même,– être sûr d’avoir bien mesuré, avant de tirer des conclusions. La méthode

Six Sigma a montré que la mesure ou sa validité était le maillon faible(30 % des mesures sur les activités en Six Sigma auraient une valeur dutest de validité insuffisante, c’est-à-dire un pourcentage GRR1 trop élevé).

1. « GRR » : Gage Reproductibility & Repeatability (méthodologie Six Sigma).

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3.3. PDCA de la « stratégie de percée Six Sigma »

Figure 3.10. PDCA de la stratégie Six Sigma

Pour bien atteindre un bon niveau de compétitivité, les industriels américainsde l’électronique des semi-conducteurs ont développé une démarche straté-gique de progrès visant le « Zéro défaut », c’est-à-dire la capabilité Six Sigmades processus. Celle-ci a été déclinée en huit phases par Mikel Harry etRichard Schroeder, en 1985, sous la dénomination « Six Sigma BreakthroughStrategy »1. Nous l’avons représentée selon le cycle PDCA de Deming.

... Partir d’un état de situation« D » Définir les plans à mettre en place pour les améliorer« M » Mesurer les activités gérées par les plans, identifier les CTQ2

« A » Analyser les écarts de façon comparative« I » Améliorer les facteurs clés afin d’atteindre les objectifs« C » Maîtriser les caractéristiques CTV3 de la structure

... Rationaliser et intégrer les meilleures pratiques dans la planificationstratégique.

En deçà de la démarche stratégique, la méthode Six Sigma de résolution deproblème se limite aux phases formelles « DMAIC », et, pour la conception« Design For Six Sigma », aux phases « DMADV » où les phases« Improve & Control » sont remplacées par « Design & Verify ».

1. Six Sigma, The Breakthrough Management Strategy Revolutionizing the World’s Top Corporationsby Mikel Harry and Richard Schroeder Editeur : The Doubleday Broadway Publishing Group – NY.2. CTQ : Critical To Quality, caractéristique qualité du produit, critique pour le client.3. CTV : Critical To Value, caractéristique d’une fonction critique pour le client et le fournisseur.

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3.4. Description du cycle PDCA de « l’IRQM »1

Figure 3.11. Cycle PDCA proposé par l’IRQM

Les appropriations de ces méthodes par les entreprises ont été nombreusesdans les années 1990. L’IRQM présentait cette application très spécifique aumétier de l’automobile. Dans ce concept de cycle PDCA, on trouve tous lesingrédients d’un système de planification, de mise en œuvre, de contrôle etd’analyse des actions de progrès fondés sur la résolution des problèmes :cette caractéristique est essentielle.

En France, comme au Japon, les constructeurs automobiles, ont mis très viteen application le cycle PDCA pour leur démarche d’amélioration continue.Ils ont beaucoup fait progresser sa crédibilité chez les autres industriels depar leur position de leaders, montrant ainsi que le PDCA allait bien au-delàd’une simple représentation schématique destinée aux cours de formationqualité ou aux conférences sur la compétitivité.

Ainsi, Valeo utilise couramment le PDCA transposé en méthode de résolutionde problème. « On va faire un PDCA » est synonyme chez Valeo de « on varésoudre un problème en groupe avec la méthode PDCA ».

1. L’Institut Renault de la qualité et du management (IRQM) a beaucoup influencé la démarche de qualitétotale en France. Cet organisme a formé de nombreux ingénieurs qualité.

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3.5. PDCA – Qualité totale – Balanced Scorecard

Figure 3.12. TQM – PDCA – BSC

En 1992, l’Institut Renault de la qualité mettait la qualité totale « au cœurdu changement ». Par la voix du P-DG de Renault, R. H. Levy, la démarchequalité totale se devait d’être un recentrage pour l’entreprise. Cette dynami-que de progrès continu pouvait se résumer sur les quatre axes de la « Qualitétotale », dont les grands principes sont rappelés dans l’ouvrage Au cœur duchangement1, articulés autour du PDCA de Deming :

la primauté du clientl’efficience économiquel’amélioration des processusl’adhésion des hommes

Il est remarquable de noter que ces mêmes quatre axes sont ceux qui ont étéretenus comme base pour l’établissement du tableau de bord prospectif(Balanced Scorecard) de la Business Harvard School en 1996 auquel nousavons consacré un long développement au chapitre 5.

1. Au cœur du changement, Pierre Jocou (ex-directeur qualité chez Renault) et Frederic Lucas, Dunod,1992.

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4. RÉFLÉCHIR « RISQUES ET OBJECTIFS »POUR MANAGER

4.1. Les dimensions PDCA dans l’approche du risque1

L’Institut Européen de Cindyniques2 étudie les approches globales des scien-ces du danger et des risques. Sous cet angle, les sciences et techniques del’ingénieur couvrent notamment les domaines de la « sûreté de fonctionne-ment » et de la sécurité.

Par le biais des sciences humaines, la cindynique aborde par ailleurs la totalitédes phénomènes d’un système et de ses variabilités à travers les métiers, lespartenaires et toutes les sciences.

Figure 3.13. Dimensions PDCA dans l’approche du risque

L’amélioration continue, qui est une forme de dynamique de progrès,analyse le pourquoi et le comment via le « Retour d’EXpérience », REX,entre le modèle et la réalisation, afin de minimiser les risques ; on consi-dère en effet le processus et pas le résultat. Cette approche propose qua-tre types de dimensions du risque à prendre en compte autour des fina-lités d’entreprise.

1. Selon l’excellent article de Claude Frantzen (président de l’Institut Européen de Cindyniques), « Lacindynique : une approche conceptuelle de l’étude des dangers », paru dans le revue du MFQ, Qualité enmouvement, no 52 (décembre 2001), dossier spécial « Management des risques ».2. IEC 9, rue de Rocroy 75010 Paris, http://www.Cindynics.org.

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Nous en avons reporté les principales dimensions dans le modèle PDCA deDeming pour illustrer une fois encore le bien-fondé de l’approche proposée.

L’hyperespace du danger, selon Claude Frantzen, consiste en un regard posésur les dangers et les risques selon cinq dimensions différentes : les faits, lesmodèles, les valeurs, les règles et les finalités :

� dimension des faits de mémoire, de l’histoire et des statistiques� dimension des systèmes de valeurs (buts, vision)� dimension des objectifs (survie de l’entreprise, protection du client, etc.)� dimension des représentations et modèles élaborés à partir de faits� dimension des normes, règles, codes de déontologie (obligatoire ou de libre

adhésion), contrôles a priori ou non...

En combinant ces différentes dimensions, on obtient des domaines d’étudeet de réflexion familiers, représentés sur la figure précédente selon deuxaxes :

la dimension des faits et celle des modèles se combinent dans le retourd’expérience, technique de base des gestionnaires de risques de grandesentreprises,la dimension des objectifs, celle des normes et celle des valeurs se combi-nent dans le domaine de l’éthique.

Cette représentation, dit-il, devrait réconcilier les ingénieurs, qui représententle monde technique, et les psychosociologues pour ce qui est des scienceshumaines. On constate actuellement une rupture entre les ingénieurs qui pen-sent « yaka » puisqu’ils se situent sur l’axe téléologique (les objectifs) et lespsychosociologues qui disent « ils sont comme ça » en se plaçant sur l’axedes résistances au changement.

Du chef d’entreprise à l’expert extérieur, en passant par l’ingénieur sécuritéjusqu’aux managers et le personnel, chacun possède son propre regard surla sûreté. Le management des risques s’effectue alors selon des cycles concen-triques, dont le plus grand est celui du dirigeant.

Dans cette approche, l’homme est trop souvent considéré comme « le maillonfaible ». En effet, les indicateurs de productivité sont très parlants, mais ceuxde la sûreté et de la sécurité ne se mesurent pas autrement qu’en termes devigilance, dixit Claude Frantzen dans son article.

Nous reviendrons en détail sur ces points au chapitre 9.

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4.2. Les objectifs PDCA dans le management

Figure 3.14. Les objectifs PDCA dans le management

En modèle PDCA, leur discrimination permet une meilleure déclinaison desobjectifs majeurs dans les différents services :

Objectifs majeurs :Les objectifs stratégiques que l’on ne doit pas rater pour l’entreprise : ilsengagent la direction. Qu’ils soient collectifs ou individuels, ils font l’objetd’une lettre de cadrage de la direction et d’un plan budgétaire à moyen terme.

Objectifs individuels1 :À répartir et à s’approprier par direction et par service. Ils contribuent auxobjectifs majeurs aux différents niveaux de l’encadrement. Ils doivent fairel’objet d’une déclinaison aux collaborateurs de rang N-1 et N-2.

Objectifs permanents :Ce sont ceux inscrits dans la description de poste ou la définition de fonc-tion et qui font l’objet du contrat de travail (mission, tâches principales,etc.).

Objectifs chiffrés :Comme les objectifs majeurs, ils doivent être absolument tenus. Ils sontsuivis régulièrement par la direction générale avec des indicateurs decontrôle de gestion. On retrouve souvent parmi ceux-ci : la prise decommande, le chiffre d’affaires, (MARGE, REX, EBIT, ROCE, etc.).

1. Bien sûr, ces objectifs sont SMART : [S] Spécifique, simple, pertinent, bien adapté ; [M] Mesurablepar un indicateur significatif ; [A] Accepté, négocié et contractuel ; [R] Réaliste, réalisable compte tenudes moyens et ressources disponibles ; [T] Temporel, au sens de tenue du délai et du jalonnement.

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