Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la...

232
Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée Un projet conjoint du Centre international pour la réforme du droit criminel et la politique en matière de justice pénale et du Centre pour la prévention internationale du crime Nations Unies Office contre la drogue et le crime Vancouver Mars 2003

Transcript of Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la...

Page 1: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée Un projet conjoint du Centre international pour la réforme du droit criminel et la politique en matière de justice pénale et du

Centre pour la prévention internationale du crime Nations Unies Office contre la drogue et le crime

Vancouver Mars 2003

Page 2: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

___________________________________________________

________

Le Centre international pour la réforme du droit criminel et la politique en matière de justice pénale 1822 East Mall, Vancouver Colombie-Britannique Canada V6T 1Z1 http://www.icclr.law.ubc.ca

Ce projet a été rendu possible grâce à l’appui financier du

Ministère de la Justice Canada, du Ministère du Solliciteur général Canada, et

du programme de sécurité humaine du Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international du Canada.

Page 3: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

___________________________________________________________

Page 4: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

2 - Guide Legislative _______________________________________________________________________________

TABLE DES MATIÈRES

Chapitre 1 - Introduction .......................................................................................5

PARTIE 1

DROIT PÉNAL DE FOND Introduction ............................................................................................................ 15

Chapitre 2 - Incrimination de la participation à un groupe criminel organisé . 19

Chapitre 3 - Incrimination du blanchiment du produit du crime .....................35

Chapitre 4 - Incrimination et mesures contre la corruption .............................. 71

Chapitre 5 - Entrave à la justice ..........................................................................83

PARTIE 2

ÉLÉMENTS PROCÉDURAUX ET AUTRES MODIFICATIONS LÉGISLATIVES VISANT À ASSURER UNE INCRIMINATION EFFICACE

Chapitre 6 - Compétence ....................................................................................99

Chapitre 7 - Responsabilité des personnes morales .......................................... 111

Chapitre 8 - Poursuites judiciaires, jugement et sanctions ...............................121

Chapitre 9 - L'identification, la localisation, le gel ou la saisie et la confiscation du produit du crime ...................................................................... 129

Chapitre 10 – Protection des témoins et des victimes...................................... 147

PART 3

MESURES LÉGISLATIVES ET ADMINISTRATIVES POUR RENFORCER L’ASSISTANCE JUDICIAIRE ET LA COOPÉRATION INTERNATIONALE

ENTRE LES SERVICES DE DÉTECTION ET DE RÉPRESSION Chapitre 11 - Extradition .................................................................................... 169

Chapitre 12 - Entraide judiciaire ....................................................................... 187

Annexe 1 - Texte de la convention ........................................................................211 Annexe 2 - Liste des conditions d'avis de secrétaire général par États Parties .245 Annexe 3 - Liste d'experts ....................................................................................249

Page 5: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale
Page 6: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale
Page 7: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Introduction - 5 __________________________________________________________________

CHAPITRE 1

Introduction Objet du Guide législatif

L’objet principal du présent Guide est d’aider les États qui souhaitent ratifier la Convention des Nations Unies sur le Crime organisé transnational (la Convention) et rédiger des lois en vue de son application.

Le Guide a été rédigé surtout pour les décideurs politiques et pour les

législateurs des pays qui se préparent à ratifier et à appliquer la Convention, mais il vise aussi à servir de fondation pour les projets bilatéraux d’assistance technique et autres initiatives qui seront entrepris dans le cadre des initiatives internationales en vue de promouvoir la ratification et la mise en oeuvre de la Convention sur une base aussi large que possible

Le présent chapitre d’introduction explique la logique du Guide ainsi que les

objectifs, le Champ d’application, la structure et l’organisation de la Convention. Il donne quelques définitions et principes de base qui aideront le lecteur à s’orienter à travers le Guide et quelques idées générales relatives au processus de mise en oeuvre.

Le Guide reproduit les dispositions fondamentales de la Convention, et explique

les questions sur lesquelles chaque État Partie devra se pencher tout en offrant un vaste éventail d’options et d’exemples que les rédacteurs législatifs pourront envisager dans le cadre de leur travail en vue de se conformer à la Convention. Le Guide ne traite pas des articles qui n’entraînent aucune obligation sur le plan législatif.

Les personnes qui ont participé aux négociations relatives à la Convention

étaient très conscientes de la nécessité d’assurer une certaine souplesse aussi bien que de la cohérence et une certaine mesure d’harmonisation au niveau international. Dans cet esprit, le Guide énumère les points dont la mise en œuvre est soit obligatoire soit optionnelle pour les États Parties. Ce faisant, il établit un lien entre chaque article et chaque disposition et d’autres instruments régionaux, nationaux ou internationaux, et donne des exemples montrant comment les pays de traditions juridiques différentes ont pu mettre en œuvre la Convention.

Le Guide comprend trois parties traitant respectivement

(1) des questions de fond en droit pénal liées à l’incrimination de certaines infractions;

(2) des questions de procédure; et

(3) des mesures législatives et administratives pour améliorer l’aide en matière juridique et policière, ainsi que d’autres formes de coopération internationale.

Page 8: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

6 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

L’ordonnance des chapitres et leur structure interne suivent une logique

thématique plutôt que d’examiner les articles paragraphe par paragraphe, afin de faciliter la tâche des rédacteurs qui voudront peut-être axer leurs efforts sur des problèmes particuliers ou des questions particulières. Chaque chapitre débute par citer l’article (ou les articles) pertinent(s) de la Convention et est organisé de la façon suivante:

1. Introduction

2. Sommaire des exigences principales

3. Dispositions obligatoires

4. Questions facultatives

5. Renvois (à d’autres articles de la Convention ou à un des Protocoles ou à d’autres instruments internationaux)

6. Exemples de mise en oeuvre

7. Références à d’autres instruments pouvant être utiles, par exemple des modèles de lois, d’autres conventions des Nations Unies ou des traités et conventions adoptés dans le cadre d’organismes régionaux.

À la fin du Guide, en plus du texte intégral de la Convention, on trouvera un appendice qui énumère tous les cas où les États Parties sont tenus de faire rapport au Secrétaire général.

Objet de la Convention Dans le contexte d’une inquiétude croissante à l’égard des groupes criminels organisés et de leurs opérations qui ne connaissent plus les frontières nationales, un nombre croissant de pays ont envisagé d’adopter de nouvelles lois, mesures et stratégies pour tenter de régler ce problème. Lorsque les malfaiteurs, leurs victimes et les instruments ou produits du crime se situent dans plusieurs territoires administratifs ou circulent de l’un à l’autre, l’approche traditionnelle voulant que les services de détection et de répression agissent strictement au niveau local mène forcément à la frustration de leurs efforts. Lorsque les malfaiteurs sont cosmopolites, les interventions ne peuvent plus se confiner à l’action locale. Alors que les types de crimes transnationaux et de groupes criminels semblent augmenter, aucun pays n’est à l’abri. Les pays cherchent donc à s’entraider dans la lutte contre des infractions de plus en plus sophistiquées et dangereuses. Alors que les progrès rapides de la technologie, et la mobilité remarquable des mouvements transfrontaliers des gens, des capitaux et des biens sont exploités par des malfaiteurs ingénieux qui agissent seuls ou avec des associés, il devient difficile d’assurer le respect des lois. Alors que les criminels peuvent générer des profits colossaux à partir de leurs entreprises illicites, les déplacer et les dissimuler au regard des autorités, la communauté internationale devient leur victime de plusieurs façons..

Les processus politiques, les institutions démocratiques, les programmes

sociaux, le développement économique, et les droits de la personne, tout cela est miné par l’abondance des moyens et l’influence que les groupes criminels organisés

Page 9: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Introduction - 7 __________________________________________________________________

peuvent mettre en action. Est en jeu aussi l’intégrité du système financier, notamment dans les parties du monde qui regorgent des produits du crime. Les victimes et les témoins se trouvent intimidés et doublement lésés si justice n’est pas faite. Le message que cela transmet au public est que parfois, le crime paie vraiment, même lorsque les malfaiteurs sont attrapés et punis par des sanctions inadéquates.

Les accords et arrangements bilatéraux et régionaux montrent à quel point on se

rend compte que le problème des crimes transnationaux ne peut être réglé de façon efficace que par la collaboration et l’entraide entre les services de détection et de répression des États qui sont impliqués ou touchés. Des arrangements ponctuels, des traités d’aide judiciaire, et des traités d’extradition peuvent parfois donner des résultats positifs, mais ils ne suffisent pas à relever les défis actuels. Dans certains cas, le cadre législatif et procédural des différentes administrations est devenu trop complexe, surtout lorsque ces dernières doivent œuvrer ensemble.

Les conventions internationales sur certaines infractions données comme le

trafic de stupéfiants, le terrorisme, la corruption et le blanchiment d’argent, ont préparé le terrain en vue d’une meilleure coordination des efforts et d’une plus solide collaboration entre les pays1. Le besoin le plus pressant, toutefois, est de trouver une approche plus intégrée et mieux synchronisée, avec des mécanismes d’application valables qui doivent être adoptés aussi rapidement que possible.

La Convention est la réponse internationale à ce besoin d’adopter une approche

véritablement mondiale. Elle a pour but de promouvoir la coopération en matière de prévention aussi bien que de lutte contre le crime organisé transnational (Art.1). Elle cherche à augmenter le nombre de pays qui prennent des mesures efficaces contre le crime transnational et à forger et renforcer les liens qui permettent d’exercer les contrôles transfrontaliers. Elle respecte les différences et les spécificités des diverses traditions et cultures juridiques tout en promouvant un langage commun et en aidant à éliminer certains des éléments qui font obstacle à l’efficacité de la collaboration transnationale.

La Convention met l’accent sur les infractions qui facilitent les activités

profitables des groupes criminels organisés. Les actes plus directement liés à la réalisation concrète de profits illicites sont visés dans les trois Protocoles de la Convention.

• Le Protocole contre la fabrication et le trafic illicite des armes à feu, de leurs

pièces et de leurs munitions

• Le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants

• Le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer.

1 Par exemple, la Convention des Nations Unies de 1988 sur le trafic des stupéfiants ou la

Convention de l’OEA de 1996 contre la corruption. Plusieurs autres conventions internationales, régionales, et bilatérales sont mentionnées dans ce guide et sont énumérées dans la section des renvois de chaque chapitre.

Page 10: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

8 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

L’article 37 (2) de la Convention stipule qu’afin de devenir partie à un protocole, “un État ou une organisation régionale d’intégration économique doit être également partie à la Convention”. Les dispositions de tout Protocole à la Convention doivent être “interprétées conjointement avec la présente Convention, compte tenu de l’objet de ce Protocole” (Art. 37 (4)). Toutefois, les dispositions des différents Protocoles ne sont exécutoires pour les États Parties que si ces derniers sont aussi parties aux Protocoles.

La structure de la Convention Plus précisément, la Convention:

• Définit et normalise certains termes dont le sens varie selon le pays ou le cercle où ils sont utilisés.

• Exige que les États établissent certains crimes spécifiques.

• Exige l’introduction de mesures spécifiques visant à maîtriser le crime (par exemple, des mesures visant à la protection des victimes ou des témoins, etc.).

• Prévoit la confiscation des produits du crime.

• Encourage la coopération internationale (extradition, aide judiciaire, enquêtes conjointes etc.).

• Prévoit des mesures pour la formation du personnel, la recherche et l’échange de renseignements

• Encourage les politiques et les mesures préventives (voir l’article 31).

• Contient des dispositions de nature technique (signature, ratification etc.).

Terminologie et définitions

L’article 2 définit aux fins de la Convention un certain nombre de termes et expressions clefs qui se retrouvent tout au long du texte.

Page 11: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Introduction - 9 __________________________________________________________________

Article 2

Terminologie

Aux fins de la présente Convention:

a) L'expression "groupe criminel organisé" désigne un groupe structuré de trois personnes ou plus existant depuis un certain temps et agissant de concert dans le but de commettre une ou plusieurs infractions graves ou infractions établies conformément à la présente Convention, pour en tirer, directement ou indirectement, un avantage financier ou un autre avantage matériel;

b) L'expression "infraction grave" désigne un acte constituant une infraction passible d'une peine privative de liberté dont le maximum ne doit pas être inférieur à quatre ans ou d'une peine plus lourde;

c) L'expression "groupe structuré" désigne un groupe qui ne s'est pas constitué au hasard pour commettre immédiatement une infraction et qui n'a pas nécessairement de rôles formellement définis pour ses membres, de continuité dans sa composition ou de structure élaborée;

d) Le terme "biens" désigne tous les types d'avoirs, corporels ou incorporels, meubles ou immeubles, tangibles ou intangibles, ainsi que les actes juridiques ou documents attestant la propriété de ces avoirs ou les droits y relatifs;

e) L'expression "produit du crime" désigne tout bien provenant directement ou indirectement de la commission d'une infraction ou obtenu directement ou indirectement en la commettant;

f) Les termes "gel" ou "saisie" désignent l'interdiction temporaire du transfert, de la conversion, de la disposition ou du mouvement de biens, ou le fait d'assumer temporairement la garde ou le contrôle de biens sur décision d'un tribunal ou d'une autre autorité compétente;

g) Le terme "confiscation" désigne la dépossession permanente de biens sur décision d'un tribunal ou d'une autre autorité compétente;

h) L'expression "infraction principale" désigne toute infraction à la suite de laquelle un produit est généré, qui est susceptible de devenir l'objet d'une infraction définie à l'article 6 de la présente Convention;

i) L'expression "livraison surveillée" désigne la méthode consistant à permettre le passage par le territoire d'un ou de plusieurs États d'expéditions illicites ou suspectées de l'être, au su et sous le contrôle des autorités compétentes de ces États, en vue d'enquêter sur une infraction et d'identifier les personnes impliquées dans sa commission;

j) L'expression "organisation régionale d'intégration économique" désigne toute organisation constituée par des États souverains d'une région donnée, à laquelle ses États Membres ont transféré des compétences en ce qui concerne les questions régies par la présente Convention et qui a été dûment mandatée, conformément à ses procédures internes, pour signer, ratifier, accepter, approuver ladite Convention ou y adhérer; les références dans la présente Convention aux "États Parties" sont applicables à ces organisations dans la limite de leur compétence.

Champ d’application de la Convention On peut avoir recours à la Convention pour les types de crime suivants:

• Les infractions établies dans le droit interne de l’ État Partie en vertu des exigences des articles 5, 6, 8 et 23 de la Convention. C’est-à-dire les

Page 12: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

10 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

infractions relatives à la participation à un groupe criminel organisé, au blanchiment d’argent et à la corruption (Art. 3 (1) (a));

• Les infractions graves telles que définies ci-dessus si elles sont “transnationales” et si un “groupe criminel organisé” y a pris part. (Art. 2 (a) et (b) et Art. 3 (1) (b)). La “gravité” d’une infraction varie avec le temps et le lieu, mais aux fins de la Convention cela désigne toute infraction entraînant une peine privative de liberté pendant une période allant jusqu’à quatre ans ou plus. L’infraction est transnationale si

(a) elle est commise dans plus d’un État;

(b) elle est commise dans un seul État mais sa préparation, sa planification, sa direction ou son contrôle ont lieu en grande partie dans un autre État;

c) elle est commise dans un seul État mais avec la participation d’un groupe criminel organisé dont les activités criminelles se déroulent dans plus d’un État; ou

d) elle est commise dans un État mais avec des répercussions dans un autre État (Art. 3 (2)).

• Les infractions établies en vertu des Protocoles auxquels les États sont devenus parties Art. 1 (2)-(3) de chaque Protocole.

Mise en œuvre de la Convention Le processus qui régira l’application des exigences de la Convention différera

d’État à État. Pour commencer, les systèmes monistes pourraient ratifier la Convention et incorporer ses dispositions dans leur droit interne par publication officielle. Les systèmes dualistes devront sans doute recourir à des mesures législatives.

Lorsqu’ils s’efforceront de dégager les priorités et les obligations qui découlent

de la Convention, les rédacteurs devraient garder à l’esprit les lignes directrices suivantes.

Le texte de la Convention contient diverses sortes d’obligations comme suit : • Les obligations relatives à la législation • Les dispositions obligatoires sous conditions • Les dispositions qui exigent d’être envisagées – auxquelles il convient de

réfléchir sérieusement et que les États sont encouragés à adopter • Les lois facultatives • D’autres mesures Chaque fois que les expressions “ Il est exigé des États” ou “les États sont tenus

de” sont utilisées, il s’agit d’une disposition obligatoire. Lorsque ce n’est pas le cas, le Guide rappelle simplement que les États sont “requis d’envisager”, ce qui signifie que les États sont fortement encouragés à adopter une certaine mesure et à tâcher en toute diligence de voir si elle est compatible avec leur système juridique. Pour les

Page 13: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Introduction - 11 __________________________________________________________________

dispositions qui sont entièrement facultatives, le Guide utilisera l’expression “souhaiteront peut-être envisager…”. À l’occasion, les États sont “tenus de” choisir entre deux options (par exemple, dans le cas des infractions visées à l’article 5). Dans un tel cas, les États sont libres d’opter pour l’une ou l’autre ou pour les deux options.

En général, les articles de la Convention et des Protocoles décrivent des actes qui

doivent être incriminés par le droit interne, rendus punissables par des sanctions appropriées, et faire l’objet des différentes exigences régissant l’extradition, l’entraide judiciaire et autres formes d’aide et de coopération.

En plusieurs endroits, quand il s’agit d’incrimination, la Convention et les

Protocoles utilisent l’expression “des mesures législatives ou autres qui pourraient être nécessaires” Les “autres mesures” ne signifient pas que l’incrimination soit requise ou autorisée sans qu’il y ait législation. Ces mesures sont additionnelles et présupposent l’existence de lois2.

L’article 2(b) définit une “infraction grave” parce que c’est là un des éléments qui

déterminent le champ d’application de l’article 3. Puisque sa seule fonction est de déterminer si la Convention et les Protocoles s’appliquent, il n’est pas nécessaire que les États Parties en fassent la définition dans leur droit interne et la création de diverses définitions qui ne seraient pas forcément compatibles pourrait poser des problèmes. Les rédacteurs devraient, toutefois, revoir les infractions pénales existantes et s’assurer que celles auxquelles ils appliqueraient la Convention entrent bien dans la définition d’ “infraction grave”.

Il est recommandé aux rédacteurs de s’assurer de la compatibilité du libellé et de

la terminologie de la Convention avec les autres infractions définies par le droit interne, les définitions existantes et les autres usages législatifs avant de s’en remettre complètement au libellé et à la terminologie de la Convention. La Convention a été rédigée dans un but général et s’adresse aux gouvernements nationaux. Pour cette raison, le niveau d’abstraction est plus élevé que ce qui se retrouve normalement dans les lois nationales. Les rédacteurs devront donc être prudents et ne pas reproduire certains passages de la Convention textuellement. Ils sont encouragés au contraire à adopter l’esprit et le sens des différents articles. Pour les y aider, un certain nombre de Notes interprétatives sont citées à travers le Guide pour étoffer le contexte et donner une meilleure idée des intentions et des préoccupations des personnes qui ont négocié la Convention

Chaque État Partie doit “prendre les mesures nécessaires, y compris législatives

et administratives, conformément aux principes fondamentaux de son droit interne, pour assurer l’exécution de ses obligations en vertu de la présente Convention” (Art. 34 (1). Sinon, les nouvelles lois risquent de devenir lettre morte ou contestées comme anticonstitutionnelles, ce qui ferait obstacle à leur application interne et à la coopération internationale.

Les infractions internes correspondront normalement à celles de la Convention,

dont elles auront le nom et le champ d’application. Mais cela n’est pas le plus important. Il est souhaitable qu’elles s’en rapprochent le plus possible (par exemple pour faciliter la procédure d’extradition), mais cela n’est pas exigé tant et aussi

2 Voir les Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 9.

Page 14: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

12 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

longtemps que tous les actes visés par la Convention se trouvent eux-mêmes incriminés. Les pays pourront fort bien avoir des infractions qui sont de Champ d’application différente (par exemple, deux infractions ou plus dans le droit interne pour correspondre à une infraction de la Convention) surtout lorsque cela découle de lois préalables et de jurisprudence.

L’application peut se faire par de nouvelles lois ou par l’amendement de lois

existantes. Il convient d’insister sur le fait que si les infractions doivent comporter les

éléments de transnationalité et de crime organisé pour que la Convention et les dispositions de coopération internationale s’appliquent, ces éléments ne devraient pas être inclus dans l’infraction interne (Art.34 (2))3. Autrement dit, dans le droit interne, les infractions visées par la Convention : participation d’un groupe criminel organisé, corruption, blanchiment d’argent et entrave à au bon fonctionnement de la justice, et les infractions visées par les Protocoles: trafic illicite de personnes, trafic de migrants et trafic d’armes devraient s’appliquer que l’infraction soit transnationale ou purement interne4.

Le même principe s’applique à la participation à des groupes criminels organisés.

Les autorités devront prouver cette participation à la satisfaction d’un autre État Partie pour pouvoir invoquer les obligations d’assistance internationale et d’extradition, mais ne devraient pas avoir à prouver la participation d’un groupe criminel organisé dans le contexte de poursuites internes. Par exemple, les infractions liées au blanchiment d’argent ou à l’entrave à la justice devraient s’appliquer également, que l’infraction ait été commise par un individu seul ou par des individus associés à un groupe criminel organisé, et que cela puisse être prouvé ou non.

Pour être en conformité avec la Convention, les États Parties devront se plier aux

normes minimales établies par la Convention elle-même. Les États sont libres d’adopter des mesures plus strictes et plus sévères. (Art. 34 (3)). Si les lois du droit interne sont plus strictes et englobent plus que ce qui est requis, les dispositions

3 Une Note interprétative indique que “l’objet de ce paragraphe est, sans modifier le champ

d’application de la Convention décrit à l’article 3, d’indiquer clairement que l’élément transnational et l’implication d’un groupe criminel organisé ne doivent pas être considérés comme des éléments constitutifs de ces infractions aux fins d’incrimination. Le paragraphe a pour but d’indiquer aux États Parties que, lorsqu’ils appliquent la Convention, ils n’ont pas à inclure les éléments de transnationalité et d’implication d’un groupe criminel organisé dans l’incrimination du blanchiment du produit du crime (article 6), de la corruption (article 8) ou de l’entrave au bon fonctionnement de la justice (article 23), ni l’élément de transnationalité dans l’incrimination de la participation à un groupe criminel organisé (article 5) Cette disposition vise en outre à éclaircir la question pour les États parties et à les aider à se conformer aux articles de la Convention concernant l’incrimination, et ne devrait pas influencer en quoi que ce soit l’interprétation des articles concernant la coopération (articles 16, 18 et 27)” (A/55/383/Add.1, para 59).

4 Il est à noter qu’un contrevenant peut faire l’objet de procédures d’extradition relativement à une des quatre infractions de la Convention ou d’une autre infraction grave, même si l’infraction elle-même n’est pas de nature “transnationale”.

Page 15: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Introduction - 13 __________________________________________________________________

pertinentes devraient correspondre à peu près afin qu’il soit possible tirer parti des dispositions de la Convention relatives aux enquêtes et aux poursuites.

La Convention reconnaît que sa pleine application exigera une coopération et de

l’assistance technique. Et qu’en l’absence d’une pleine application de la part de presque tous les pays, ce ne sera pas un instrument efficace. Les États sont encouragés à demander l’aide du CIPC des Nations Unies.

Article 4

Protection de la souveraineté

1. Les États Parties exécutent leurs obligations au titre de la présente Convention d’une manière compatible avec les principes de l’égalité souveraine et de l’intégrité territoriale des États et avec celui de la non-intervention dans les affaires intérieures d’autres États.

2. Aucune disposition de la présente Convention n’habilite un État Partie à exercer sur le territoire d’un autre État une compétence et des fonctions qui sont exclusivement réservées aux autorités de cet autre État par son droit interne

Enfin, la Convention respecte et protège la souveraineté des États Parties (Voir

l’article 4). Par exemple, rien dans la Convention n’affecte le principe voulant que le droit interne d’un pays régisse:

• La description des infractions établies conformément à la Convention.

• Les défenses applicables.

• Les principes juridiques déterminant le caractère légal ou illégal d’un acte.

• Les poursuites et les peines (Art. 11(6)).

• Les sanctions appropriées en tenant compte de la gravité de l’infraction. (Art. 11(1)).

Page 16: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

14 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

PARTIE 1

DROIT PÉNAL DE FOND

Introduction Les États Parties sont requis de prendre un certain nombre de mesures législatives et administratives en vue de la mise en oeuvre de la présente Convention, tout en tenant compte de leurs principes juridiques fondamentaux (Art. 34 (1)).

Chaque État Partie prend les mesures nécessaires, y compris législatives et administratives, conformément aux principes fondamentaux de son droit interne, pour assurer l’exécution de ses obligations en vertu de la présente Convention. (Art. 34 (1))

Les États Parties devront établir ces infractions dans leur droit interne si cela

n’est déjà fait. Les États qui ont déjà des lois appropriées devront faire en sorte que les dispositions existantes se conforment aux exigences de la Convention, et au besoin amender leurs lois.

Les infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention sont établies dans le droit interne de chaque État Partie indépendamment de leur nature transnationale ou de l'implication d'un groupe criminel organisé comme énoncé au paragraphe 1 de l'article 3 de la présente Convention, sauf dans la mesure où, conformément à l'article 5 de la présente Convention, serait requise l'implication d'un groupe criminel organisé. (Art. 34 (2))

Certaines dispositions de fond du droit pénal devront être introduites dans le droit interne pour établir les infractions “relatives à la participation à un groupe criminel organisé”, “à une opération de blanchiment des produits du crime”, à la “corruption” et à “l’entrave à la justice”. Les quatre prochains chapitres de ce guide traiteront respectivement de chacune de ces questions.

Les actes qui constituent ces infractions sont essentiels aux opérations criminelles

sophistiquées, ils font que les criminels sont efficaces et génèrent des profits considérables qui leur permettent de rester eux-mêmes et de placer leurs gains illicites à l’abri des services de détection et de répression. Ils constituent donc la pierre angulaire d’un effort mondial coordonné en vue de lutter contre les formes bien organisées des marchés, des entreprises et des activités qui sont aux mains des malfaiteurs.

Page 17: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Droit pénal de fond - 15 __________________________________________________________________

Certains termes parmi ceux qui jouent un rôle central dans le présent Guide, comme “groupe criminel organisé”,”groupe structuré”, “infraction grave”, et “infraction principale”, sont définis à l’article 2. Le débat concernant la définition exacte de”crime organisé” se poursuit encore aujourd’hui. Pour cette raison, l’article 2 (a) est de la plus grande importance :

L’expression ‘groupe criminel organisé’ désigne un groupe structuré de trois personnes ou plus existant depuis un certain temps et agissant de concert dans le but de commettre une ou plusieurs infractions graves ou infractions établies conformément à la présente Convention pour en tirer, directement ou indirectement, un avantage financier ou un autre avantage matériel. (Art. 2 (a)).

Étant donné la diversité des méthodes utilisées et le risque d’incompatibilités, il est recommandé aux États Parties d’éviter d’introduire des définitions spécifiques pour “infraction grave”. Par ailleurs, ils peuvent invoquer la Convention lorsque les infractions sont “graves”, c’est-à-dire lorsqu’il s’agit d’infractions passibles d’une peine privative de liberté d’une durée de quatre ans ou plus (Art. 2(b)). Par conséquent, si les États Parties souhaitent instituer d’autres infractions transnationales en rapport avec les groupes criminels organisés dans le cadre de la Convention, (autrement dit, en plus des infractions visées par les articles 5, 6, 8 et 23) ils devraient veiller à ce que les sanctions prévues répondent aux conditions de la définition ci-dessus (voir Art. 3(1)(b)). Cela n’est évidemment pas obligatoire et les États sont libres d’en décider. La Convention introduit des normes minimales qui doivent être respectées, mais les États sont libres d’aller plus loin. D’après l’article 34(3), les lois internes des États peuvent être plus strictes et inclure des sanctions plus sévères, du moment que les types d’inconduite mentionnés plus haut sont incriminés.

Chaque État Partie peut adopter des mesures plus strictes ou plus sévères que celles qui sont prévues par la présente Convention afin de prévenir et de combattre la criminalité transnationale organisée. (Art. 34(3)).

L’incrimination des actes en question doit être établie par des lois pénales et non pas par d’autres mesures. Toute mesure qui serait prise devrait l’être en plus de la législation relative aux infractions pénales. La seule exception intervient au sujet des personnes morales, dont la responsabilité peut être pénale, civile ou administrative, compte tenu des principes juridiques internes (Art. 10(2)). Les rédacteurs devraient mettre l’accent sur le sens et sur l’esprit de la Convention plutôt que d’essayer tout simplement de traduire le texte de la Convention et de le reproduire verbatim dans de nouvelles lois ou des amendements. La formulation et l’application des nouvelles infractions, y compris les principes de défense et autres principes juridiques, sont laissés à la discrétion des États Parties (voir Art. 11(6)). Il faut donc qu’ils veillent à ce que les nouvelles règles soient compatibles avec la tradition juridique, les principes et le droit fondamental internes. Ils pourront ainsi éviter les conflits et l’incertitude qui pourraient survenir lors de l’interprétation des nouvelles dispositions par les tribunaux ou les magistrats.

Page 18: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

16 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Les infractions pénales établies par la Convention peuvent être appliquées en même temps que d’autres dispositions du droit interne ou celles qui sont introduites par les Protocoles (trafic de personnes, trafic de migrants, armes à feu). Il convient de faire en sorte que les nouvelles infractions pénales soient compatibles avec le droit interne en vigueur. Champ d’application La Convention s’applique lorsque les infractions sont de nature “transnationale” et impliquent un “groupe criminel organisé” (voir Art. 34(2)). Toutefois, il faut souligner que cela ne signifie pas que ces infractions doivent être introduites comme éléments de crime interne. Au contraire, les rédacteurs ne devraient pas les inclure dans la définition des infractions internes à moins que la Convention ou les Protocoles ne l’exigent spécifiquement (voir plus loin). La Convention n’exige pas des rédacteurs qu’ils les incluent dans les nouvelles infractions (ou les infractions amendées). Toute exigence de transnationalité ou de participation à des groupes criminels organisés compliquerait et gênerait inutilement le travail des services de détection et de répression. La seule exception à ce principe dans la Convention est l’infraction de “participation à un groupe criminel organisé” (la participation d’un groupe criminel organisé sera naturellement un élément de l’infraction interne). Même dans ce dernier cas, la transnationalité n’est pas requise au niveau national. D’autres exceptions sont introduites par les infractions des Protocoles, comme “le trafic illicite des migrants” (article 3 du Protocole sur le trafic illicite de migrants) et le trafic illicite d’armes à feu ((Art. 3(e), Art. 5 du Protocole sur les armes à feu). Punition des infractions et dissuasion La punition des infractions obligatoires établies par la Convention est laissée à la décision des États Parties, mais il convient que ces derniers prennent “en compte la gravité de l’infraction” (Art. 11(1)). En cette matière, la primauté du droit interne est affirmée par l’article 11(3). Les États Parties doivent toutefois s’assurer que la gravité de l’infraction et l’importance de créer un effet de dissuasion sont reflétées dans les pratiques et prises de décisions en matière de poursuites judiciaires, jugement et sanctions.

1. Chaque État Partie rend la commission d'une infraction établie conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention passible de sanctions qui tiennent compte de la gravité de cette infraction.

2. Chaque État Partie s'efforce de faire en sorte que tout pouvoir judiciaire discrétionnaire conféré par son droit interne et afférent aux poursuites judiciaires engagées contre des individus pour des infractions visées par la présente Convention soit exercé de façon à optimiser l'efficacité des mesures de détection et de répression de ces infractions, compte dûment tenu de la nécessité d'exercer un effet dissuasif en ce qui concerne leur commission.

3. S'agissant d'infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention, chaque État Partie prend les mesures appropriées conformément à son droit interne et compte dûment tenu des droits de la défense, pour faire en sorte que les conditions auxquelles sont

Page 19: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Droit pénal de fond - 17 __________________________________________________________________

subordonnées les décisions de mise en liberté dans l'attente du jugement ou de la procédure d'appel tiennent compte de la nécessité d'assurer la présence du défendeur lors de la procédure pénale ultérieure.

4. Chaque État Partie s'assure que ses tribunaux ou autres autorités compétentes ont à l'esprit la gravité des infractions visées par la présente Convention lorsqu'ils envisagent l'éventualité d'une libération anticipée ou conditionnelle de personnes reconnues coupables de ces infractions. (Convention, Art. 11, (1) to (4)).

En même temps que qu’ils s’assurent de produire l’effet de dissuasion visé, les

États se doivent d’encourager ceux qui ont participé à des groupes criminels organisés à coopérer et à prêter assistance aux services de détection et de répression (Art. 26). A cet effet, les États doivent envisager de créer la possibilité, dans les cas appropriés, d’accorder l’immunité ou d’alléger les peines imposées à l’égard de ces personnes. C’est une option dont l’adoption dépendra des principes juridiques fondamentaux de chaque État (Art. 26(3)). Il est important de noter que dans les pays où les poursuites judiciaires sont obligatoires pour toutes les infractions, de telles mesures pourraient faire appel à une démarche législative.

Enfin, tout ce qui précède s’applique aux infractions établies par les Protocoles

dont les États sont ou envisagent de devenir parties (Protocoles, Articles 1(3)).

Page 20: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

18 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

CHAPITRE 2

Incrimination de la participation à un groupe criminel

organisé

Article 5

Incrimination de la participation à un groupe criminel organisé

1. Chaque État Partie adopte les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d'infraction pénale, lorsque commis intentionnellement:

a) À l'un ou l'autre des actes suivants ou aux deux, en tant qu'infractions pénales distinctes de celles impliquant une tentative d'activité criminelle ou sa consommation:

i) Au fait de s'entendre avec une ou plusieurs personnes en vue de commettre une infraction grave à une fin liée directement ou indirectement à l'obtention d'un avantage financier ou autre avantage matériel et, lorsque le droit interne l'exige, impliquant un acte commis par un des participants en vertu de cette entente ou impliquant un groupe criminel organisé;

ii) À la participation active d'une personne ayant connaissance soit du but et de l'activité criminelle générale d'un groupe criminel organisé soit de son intention de commettre les infractions en question:

a. Aux activités criminelles du groupe criminel organisé;

b. À d'autres activités du groupe criminel organisé lorsque cette personne sait que sa participation contribuera à la réalisation du but criminel susmentionné;

b) Au fait d'organiser, de diriger, de faciliter, d'encourager ou de favoriser au moyen d'une aide ou de conseils la commission d'une infraction grave impliquant un groupe criminel organisé.

2. La connaissance, l'intention, le but, la motivation ou l'entente visés au paragraphe 1 du présent article peuvent être déduits de circonstances factuelles objectives.

3. Les États Parties dont le droit interne subordonne l'établissement des infractions visées à l'alinéa a i) du paragraphe 1 du présent article à l'implication d'un groupe criminel organisé veillent à ce que leur droit interne couvre toutes les infractions graves impliquant des groupes criminels organisés. Ces États Parties, de même que les États Parties dont le droit interne subordonne l'établissement des infractions visées à l'alinéa a i) du paragraphe 1 du présent article à la commission d'un acte en vertu de l'entente, portent cette information à la connaissance du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies au moment où ils signent la présente Convention ou déposent leurs instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation ou d'adhésion.

1. INTRODUCTION

La communauté internationale a reconnu que l’activité criminelle est souvent menée de façon organisée. On constate dans pratiquement tous les pays et parmi

Page 21: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination de la participation à un groupe criminel organisé - 19 __________________________________________________________________

tous les groupes ethniques une augmentation des opérations des groupes criminels, qui entraînent des conséquences financières et humaines désastreuses. Très souvent, les gens aident les groupes criminels organisés dans leur planification et dans l’exécution d’infractions graves sans toutefois participer à toutes les activités du groupe. Pour répondre à ce problème, de nombreux pays ont pris des mesures pour combattre les groupes criminels, leurs membres et leurs associés. Les méthodes adoptées par les pays varient en fonction de leur situation historique, politique et juridique. De manière générale, l’incrimination de la participation à des groupes criminels organisés s’est réalisée de deux façons. Les pays de common law ont instauré l’infraction de “complicité”, alors que les pays de droit civil ont instauré des infractions qui interdisent la participation à des organisations criminelles (associations de malfaiteurs). D’autres pays combinent ces méthodes ou interdisent tout bonnement de devenir membre d’organisations spécifiques. Cette dernière mesure est perçue par plusieurs comme étant problématique, car elle va à l’encontre de la tradition de “liberté d’association” dont jouissent de nombreux pays 5. Du fait que les groupes criminels traversent les frontières et fréquemment affectent plusieurs pays à la fois, la nécessité s’impose de coordonner et d’harmoniser les lois. Certaines initiatives ont déjà été prises dans ce sens à un niveau régional 6. Toutefois il s’agit là d’un problème qui n’est pas purement régional, mais qui exige une action efficace à l’échelle mondiale.

La Convention tente de répondre à ce besoin et incrimine les actes de ceux qui participent à des groupes criminels. On n’y trouve ni l’exigence ni l’intention de viser tout particulièrement les groupes ethniques qui sont fréquemment associés au crime organisé, mais plutôt une volonté de viser les activités criminelles commises par n’importe quel groupe de personnes. La Convention reconnaît l’équivalence des deux méthodes principales d’incrimination mentionnées plus haut et n’exige pas que l’on incrimine le fait d’être membre d’une organisation particulière. En même temps, elle vise aussi les personnes qui aident et facilitent la commission d’infractions graves par un groupe criminel organisé même si lesdites personnes n’ont pas participé activement à tous ses crimes. Les définitions que les États donneront de ces groupes peuvent être plus larges (par exemple, elles peuvent viser des groupes de moins de trois personnes) mais elles ne peuvent pas être plus étroites que la définition de l’article 2 (a) (Art.34(3)).

5 Voir: Criminalizing Participation in a Criminal Organization: The Experience of Selected Jurisdictions (Plecas, D., Préfontaine, D, Chin, V. and Y. Dandurand) www.icclr.law.ubc.ca . Voir également le Pacte international relatif aux droits civils et politiques Art. 22, adopté et ouvert à la signature, à la ratification et à l'adhésion par l'Assemblée générale dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966, en vigueur depuis le 23 mars 1976. Le document peur être consulté à l’endroit suivant : http://www.unhchr.ch/french/html/menu3/b/a_ccpr_fr.htm 6 Voir l’Action Conjointe de l ‘Union Européenne de 1998 (OJ L 351 du 21 décembre 1998 ) 98/733/JHA). http://europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/l33077.htm

Page 22: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

20 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Les mots “groupe structuré” doivent être pris au sens large de manière à inclure des groupes ayant une structure hiérarchique ou toute autre structure élaborée, aussi bien que les groupes non hiérarchiques où les rôles des membres ne sont pas définis de façon précise 7. La définition peut faire partie des nouvelles infractions de l’article 5 relatives à la participation à de tels groupes (voir plus loin) ou faire l’objet d’une autre disposition plus générale; cela dépendra des exigences sur le plan interne et de la structure des lois actuelles (à savoir, par exemple, si la même définition s’appliquera à d’autres infractions). Une des raisons pour lesquelles la définition met l’accent sur les auteurs de l’infraction plutôt que sur l’acte lui-même est que les groupes criminels font souvent passer leurs activités d’une région, d’une denrée ou d’un service à l’autre selon les profits qu’ils peuvent en retirer et selon le calcul qu’ils font des risques anticipés. Viser les groupes criminels plutôt que des actes particuliers offre donc une meilleure perspective Ce qui préoccupait les gouvernements, et ce qui a donné lieu à la Convention, était le fait que les criminels ont plus que jamais la possibilité de s’organiser en groupes sur une base transnationale. C’est ce qui explique que la Convention se limite aux questions concernant les groupes criminels organisés. Il n’a pas paru nécessaire de traiter des infractions commises par des individus. C’est aussi pourquoi une convention (et non pas un protocole) distincte est en voie d’élaboration pour traiter de la corruption : le nouvel instrument s’appliquera aux cas de corruption individuelle aussi bien qu’organisée.

La définition de “groupe criminel organisé” exclut également les groupes dont les activités ou les objectifs ne revêtent aucun caractère matériel, comme les groupes d’insurgés ou de terroristes. Mais la Convention pourrait s’appliquer malgré tout à des crimes commis par des groupes terroristes et aux liens entre le terrorisme et le crime organisé. 2. SOMMAIRE DES PRINCIPALES EXIGENCES Les États Parties sont requis de conférer aux actes ci-dessous le statut d’infractions pénales :

Soit Le fait de s’entendre avec une ou plusieurs personnes pour commettre une infraction grave en vue d’en tirer un avantage financier ou autre avantage matériel. Soit

7 Voir les Notes interprétatives pour les documents officiels (travaux préparatoires) des négociations sur la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée. (A/55/383/Add.1, para. 4). http://www.uncjin.org/Documents/Conventions/dcatoc/final_documents/383a1f.pdf .

Page 23: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination de la participation à un groupe criminel organisé - 21 __________________________________________________________________

La conduite d’une personne qui, tout en ayant connaissance des objectifs et de l’activité criminelle en général d’un groupe criminel organisé ou de son intention de commettre un crime, prend une part active: • aux activités criminelles du groupe criminel organisé; • à d’autres activités du groupe criminel organisé tout en sachant que sa

participation contribuera à la réalisation des objectifs criminels décrits plus haut.

Organiser, diriger, aider, conspirer, faciliter ou conseiller la commission d’un

crime impliquant un groupe criminel organisé. Les États qui exigent la participation de groupes criminels organisés pour l’infraction consistant à “s’entendre pour commettre une infraction grave” devront aussi s’assurer que leur droit interne couvre toutes les infractions graves impliquant des groupes criminels organisés. 3. DISPOSITIONS OBLIGATOIRES La Convention n’exige pas des États qu’ils introduisent une définition juridique de l’expression “groupe criminel organisé”. Elle établit par contre des normes et exige que les États Parties les observe. La Convention définit un «groupe criminel organisé”comme un groupe structuré de trois personnes ou plus qui existe pendant un certain temps et dont les membres se concertent dans le but de commettre des infractions graves dont ils retireront, directement ou indirectement, des avantages financiers ou matériels (Art. 2 (a)). Un “groupe structuré” n’est pas forcément une organisation ou une structure avec des membres permanents dont les rôles et fonctions sont bien définis. Il faut cependant que ce soit plus qu’un groupe “constitué par hasard pour commettre immédiatement une infraction” (Art. 2(c)). Cette norme a été adoptée pour éviter l’inclusion de crimes commis par des groupes formés au hasard. Cependant, elle inclut tous les cas de crime comportant un élément de préparation organisée. Les mots “infraction grave” s’appliquent aux infractions visées par la Convention et ses Protocoles aussi bien qu’à des infractions définies dans le droit national pour lesquelles la peine maximale est la privation de liberté pendant quatre ans ou plus (Art. 2(b)). La Convention s’appliquera aussi à d’autres infractions graves si elles sont de nature transnationale et sont commises par un groupe criminel organisé. Puisque ces infractions sont définies par le droit interne, les États sont libres de décider dans quels autres domaines ils souhaitent appliquer la Convention. Répétons que les États n’ont pas besoin de définir une “infraction grave” dans leur droit interne, car cela augmenterait le risque d’incompatibilités entre les différents pays.

Page 24: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

22 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Les États voudront peut-être toutefois revoir leurs lois pour s’assurer que les infractions généralement associées au crime organisé répondent aux critères des “infractions graves” et que la Convention s’y applique. Le passage de l’article 5 (1)(a)(i) “…une fin liée directement ou indirectement à l’obtention d’un avantage financier ou autre avantage matériel…” devrait être interprété dans un sens large afin de viser les infractions commises à des fins tangibles mais non monétaires, par exemple si elles sont motivées essentiellement “pour assouvissement sexuel, par exemple obtention ou échange de matériel par des membres de réseaux de pornographie juvénile, l’échange d’enfants par des réseaux de pédophiles ou le partage des coûts entre les membres du réseau” 8. Il n’est pas exigé que cette infraction comprenne des conspirations dont les objectifs n’ont strictement rien de matériel (par exemple des objectifs idéologiques). Les deux options de l’article 5(1)(a)(i) et (ii) ont été incluses pour tenir compte du fait que certains États ont des lois sur la conspiration, d’autres pas. Ces options permettent de prendre des mesures efficaces contre les groupe criminels organisés sans qu’il soit nécessaire d’introduire la “conspiration” dans les États qui n’ont pas cette notion dans leur système juridique. Ne pas oublier que, si cette infraction doit avoir l’élément de transnationalité pour que les dispositions de la Convention appelant à la coopération puissent être invoquées, cet élément ne doit pas être inclus dans l’infraction du droit interne (Art.34(2)). Dispositions pertinentes de la Convention La Convention introduit deux infractions obligatoires relatives à la participation à un groupe criminel organisé et permet d’en instituer une troisième si les rédacteurs des lois nationales le souhaitent. Les infractions pénales doivent être établies par la loi et non par “d’autres mesures”, lesquelles, si elles existent, s’ajoutent aux lois prescriptives9. S’agissant de personnes morales, les infractions peuvent être pénales, civiles ou administratives (Art. 10(2)). L’aspect mental pour toutes les infractions est qu’elles doivent être commises “intentionnellement”. D’après l’article 5(1), les États doivent établir l’une ou l’autre des infractions suivantes ou les deux.

La première infraction s’apparente au modèle de conspiration de la common law:

Le fait de s’entendre avec une ou plusieurs personnes en vue de commettre une infraction grave à une fin liée directement ou indirectement à

8 Notes interprétatives A/55/383/Ad.1, para. 3. 9 Voir Notes Interprétatives A/55/383/Ad.1, para. 9.

Page 25: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination de la participation à un groupe criminel organisé - 23 __________________________________________________________________

l’obtention d’un avantage financier ou autre avantage matériel et, lorsque le droit interne l’exige, impliquant un acte commis par un des participants en vertu de cette entente ou impliquant un groupe criminel organisé (Art. 5(1)(a)(i)).

Les éléments nécessaires de cette infraction sont l’entente internationale avec une

ou plusieurs personnes en vue de commettre une “infraction grave” à une fin liée directement à l’obtention d’un avantage financier ou autre avantage matériel. Cette infraction incrimine la simple entente en vue de commettre une infraction grave plutôt que des actes particuliers concrets accomplis en vue d’avantages financiers ou autres avantages matériels.

Toutefois, les États peuvent inclure dans le cadre de l’infraction un acte commis par l’un des participants en vertu de l’entente, ou la participation d’un groupe criminel organisé si le droit interne l’exige.

Si les États décident d’adopter cette option, ils doivent s’assurer que leurs lois internes traitent toutes les infractions auxquelles participent des groupes criminels organisés comme des “infractions graves” (Art.5(3) c’est-à-dire passibles d’une peine privative de liberté d’une durée allant jusqu’à quatre ans au moins (Art. 2(b))10.

La seconde option s’accorde mieux avec la tradition des pays de droit civil et des pays qui ne disposent pas de lois reconnaissant la notion de “conspiration” ou qui ne permettent pas l’incrimination de simples ententes en vue de commettre des infractions. Cette option vise à incriminer

“La participation active d’une personne ayant connaissance soit du but et de l’activité criminelle d’un groupe criminel organisé soit de son intention de commettre les infractions en question:

(a) aux activités criminelles du groupe criminel organisé; (b) à d’autres activités du groupe criminel organisé lorsque cette personne sait que sa participation contribuera à la réalisation du but criminel susmentionné” (Art. 5(1)(a)(ii)).

Ces “autres activités” peuvent ne pas constituer des infractions mais apporter un

appui aux activités et aux objectifs criminels du groupe.

Les deux infractions ci-dessus se distinguent de toute infraction consistant à tenter ou à exécuter une activité criminelle. Pour les deux options relatives à l’incrimination requise par la Convention, l’aspect mental requis est la connaissance de la nature criminelle du groupe ou d’au moins une de ses activités ou objectifs criminels. Dans le cas de la participation à des activités criminelles, l’aspect mental de l’activité en question s’appliquerait également, par exemple, lors d’une participation active à une abduction ou à une entrave à la justice.

10 Les mêmes considérations s’appliquent aux infractions prévues par les articles 6, 8 and 23 de la

Convention.

Page 26: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

24 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Dans les cas où la participation n’est pas à un acte criminel mais à une activité de soutien, il est nécessaire en plus de prouver avait connaissance du fait que sa participation contribuerait à la réalisation d’un objectif criminel du groupe. La “connaissance, l’intention, le but, la motivation ou l’entente” mentionnés plus haut “peuvent être déduits de circonstances factuelles objectives” (Art. 5(2)). Les rédacteurs voudront peut-être envisager d’établir des normes à ce sujet et d’énoncer clairement ce qu’il est nécessaire de prouver. Rappelons que la règle générale est que l’implication d’un groupe criminel organisé dans les infractions de fond est une des conditions à l’application de la présente Convention et qu’il n’est pas nécessaire de l’inclure dans les infractions pénales du droit national (Art.34(3)). Elle constitue néanmoins un élément pour l’infraction visée par le présent article. La règle s’applique aux trois autres infractions établies par la Convention, aux infractions des Protocoles et aux autres “infractions graves”. La règle voulant que la transnationalité ne soit pas un élément de l’infraction dans le droit national s’applique au présent article également.

En plus des infractions susmentionnées, les États Parties doivent criminaliser le “fait d’organiser, de diriger, de faciliter, d’encourager ou de favoriser la commission d’une infraction grave impliquant un groupe criminel organisé” (Art. 5(1)(b)). Ces activités doivent avoir un lien avec une “infraction grave”, pas seulement avec les activités d’un groupe criminel organisé. L’application de cet article nécessitera une démarche législative. Enfin, la Convention exige que les rédacteurs examinent de très près la gravité de cette infraction lorsqu’ils décideront des sanctions appropriées pour les coupables (Art. 11(1)), et qu’ils instaurent une longue période de prescription - surtout lorsque les auteurs présumés de l’infraction se dérobent à la justice (Art.11(5)). La Convention, toutefois, laisse aux États le soin de décrire les infractions visées par le présent article et d’appliquer leurs règles internes à l’égard de la défense et autres principes juridiques. Les infractions visées par la Convention seront “poursuivies et punies” conformément au droit interne des pays (Art. 11(6)). Il est à noter que la Convention encourage aussi les États Parties à envisager d’accorder l’immunité ou la clémence aux participants qui décident de coopérer avec les autorités (Art. 26(3)). Cette mesure est facultative et dépend des principes et traditions juridiques internes. Dans les pays où la poursuite des crimes est obligatoire, toutefois, cette disposition entraînerait une action législative. 4. QUESTIONS FACULTATIVES Les infractions motivées par des considérations politiques ou idéologiques ne font pas partie de l’objet de l’article 5. La Convention ne contient aucune exigence à l’égard de ces infractions. Toutefois, les États souhaiteront peut-être envisager la

Page 27: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination de la participation à un groupe criminel organisé - 25 __________________________________________________________________

question de savoir si certaines infractions, par exemple les actes liés au terrorisme, devraient être incluses dans la définition du crime organisé11. Les rédacteurs voudront peut-être aussi inclure l’élément mental d’ “aveuglement volontaire” ou d’autres actes qui contribueraient “vraisemblablement” à atteindre des objectifs criminels. Cela serait le cas de quelqu’un qui aurait facilement pu connaître la nature criminelle d’un groupe donné ou le fait qu’il facilitait probablement les activités criminelles du groupe mais n’avait pas fait les démarches raisonnables et prudentes qui s’imposaient pour s’informer Enfin, la Convention exige que les États établissent soit la première soit la deuxième des infractions visées à l’article 5(1)(a)). Les États voudront peut-être envisager d’introduire les deux infractions afin de couvrir différentes sortes de comportement12. 5. RENVOIS A la convention et aux protocoles • Article 2 (terminologie) • Article 10 (Personnes morales) • Article 11 (Poursuites judiciaires, jugement et sanctions) • Article 15 (Compétence) • Article 26 (Mesures propres à renforcer la coopération avec les services de

détection et de répression) • Article 31 (Prévention) • Article 34 (Application de la Convention) • Articles 19(3) de chaque Protocole A d’autres instruments • 1988 - Action conjointe des États membres de l’Union européenne • Entente internationale sur les droits civils et politiques 6. EXEMPLES DE MISE EN OEUVRE

Les exemples disponibles incluent la combinaison japonaise des types d’incrimination et l’inclusion par la Grèce du terrorisme dans le crime organisé. Le terrorisme est parfois l’une des infractions mentionnées spécifiquement dans les lois pertinentes comme étant le genre d’activité qui définit une organisation criminelle. Dans certains cas le fait que l’organisation participe à des actes terroristes constitue un facteur d’aggravation (pr. ex en Colombie) France

http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/ListeCodes

11 La Grèce, par exemple, a choisit de le faire. 12 Voir, par exemple, les dispositions pertinentes du droit pénal japonais.

Page 28: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

26 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Code pénal (Partie législative) Article 450-1 (Loi nº 2001-420 du 15 mai 2001 art. 45 Journal Officiel du 16 mai 2001) (Ordonnance nº 2000-916 du 19 septembre 2000 art. 3 Journal Officiel du 22 septembre 2000 en vigueur le 1er janvier 2002)

Constitue une association de malfaiteurs tout groupement formé ou entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un ou plusieurs crimes ou d'un ou plusieurs délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement.

Lorsque les infractions préparées sont des crimes ou des délits punis de dix ans d'emprisonnement, la participation à une association de malfaiteurs est punie de dix ans d'emprisonnement et de 150000 euros d'amende.

Lorsque les infractions préparées sont des délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement, la participation à une association de malfaiteurs est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende.

Fédération russe

Le Code pénal russe définit une “société criminelle”. L’article 35 (4) déclare :

“Une infraction sera censée avoir été commise par une société criminelle (une organisation criminelle) si elle a été exécutée par un groupe (ou une organisation) organisé cohésif créé dans le but de commettre des infractions graves ou particulièrement graves ou en combinant plusieurs groupes organisés créés dans le même but”

Pologne

Les dispositions du Code pénal polonais sur la notion de complicité sont les suivantes:

Article 18. § 1. Non seulement la personne qui a commis un acte prohibé par elle-même ou avec ou par arrangement avec une autre personne, mais aussi la personne qui a dirigé la commission d’un acte interdit par une autre personne ou qui a profité du fait qu’une autre personne lui était subordonnée et qu’elle lui a ordonné de commettre un tel acte interdit, sera tenue responsable de la commission de cet acte § 2. Quiconque, voulant qu’une autre personne commette un acte prohibé, induit cette personne à le faire, sera tenu coupable d’instigation. § 3. Quiconque, dans l’intention qu’une autre personne commette un acte prohibé, facilite par son comportement la commission de l’acte, notamment en fournissant l’instrument, le moyen de transport, ou en procurant des conseils ou de l’information, sera tenu responsable de complicité. En outre, quiconque, agissant à l’encontre du devoir juridique particulier d’empêcher l’acte prohibé, en facilite la commission par une autre personne du fait de cette omission, sera aussi tenu coupable de complicité

Page 29: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination de la participation à un groupe criminel organisé - 27 __________________________________________________________________

Article 19. § 1. Le tribunal imposera une peine pour avoir instigué et avoir été complice, dans les limites de la sanction prévue par la loi pour la commission de l’acte. § 2. Lorsqu’il déterminera de la peine pour complicité, le tribunal pourra envisager d’accorder une atténuation extraordinaire de la peine.

Le Code pénal polonais en ce qui a trait à la définition d’un “groupe organisé”:

Article 258. § 1. Quiconque participe à un groupe organisé ou à une association ayant pour but la commission d’infractions sera passible d’une peine privative de liberté d’une durée de 3 ans ou moins. § 2. Si le groupe ou l’association faisant l’objet du § 1 se caractérise comme une organisation armée, l’auteur de l’infraction sera passible d’une peine privative de liberté pouvant aller de 3 mois à 5 ans.. § 3. Quiconque organise le groupe ou l’association faisant l’objet du § 1 ou 2 or et mène ledit groupe ou ladite association sera passible d’une peine privative de liberté pouvant aller de 6 mois à 8 ans

Le Chili incrimine même le fait de ne pas déclarer aux autorités les activités d’une organisation criminelle (sauf s’il s’agit de parenté).

En Nouvelle Zélande, il n’est pas nécessaire d’être membre d’une organisation criminelle car il suffit pour les fins de l’incrimination d’avoir promu intentionnellement les activités de l’organisation. Plusieurs pays ont défini des infractions spécifiques concernant diverses façons de prêter assistance ou soutien financier à une organisation criminelle (Equateur, Colombie, Allemagne, Uruguay, Venezuela). Certaines lois visent les individus qui fournissent aux organisations des armes et des munitions (Equateur, Haïti, Colombie, Hongrie, Paraguay, Uruguay, Venezuela), les instruments du crime (Haïti), un lieu de rencontre (Equateur), ou tout autre service (Equateur, Paraguay). Aider les individus impliqués dans une organisation criminelle à échapper à la punition est parfois directement incriminé (Uruguay). Dans le cas de telles infractions, des exceptions sont parfois consenties à l’égard des membres de la famille immédiate, d’un conjoint ou d’autres parents (Venezuela, Chili).

Dans plusieurs pays, la participation à une organisation relativement importante est considérée comme circonstance aggravante : Italie, Uruguay A en ce qui a trait a la question de la preuve qui doit être exigée, il y a l’exemple de la Nouvelle Zélande où la loi précise que la preuve qu’une personne a été avertie en deux occasions au moins du fait qu’une bande était une bande criminelle suffit à établir la preuve que ladite personne savait qu’il s’agissait d’une bande criminelle. Le droit pénal du Canada combine la notion traditionnelle de conspiration de la common law (Art. 465) et de semblables infractions, (comme celle de former en commun l’intention d’accomplir un acte illégal (Art. 21), la complicité (Art. 21) et l’encouragement (Art. 22) d’une personne à commettre une infraction), avec des infractions relatives à l’association criminelle”. On lit dans le Code pénal du Canada :

Page 30: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

28 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

467.1 (1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

“infraction grave” Tout acte criminel -- prévu à la présente loi ou à une autre loi fédérale -- passible d'un emprisonnement maximal de cinq ans ou plus, ou toute autre infraction désignée par règlement.

“organisation criminelle” Groupe, quel qu'en soit le mode d'organisation :

a) composé d'au moins trois personnes se trouvant au Canada ou à l'étranger;

b) dont un des objets principaux ou une des activités principales est de commettre ou de faciliter une ou plusieurs infractions graves qui, si elles étaient commises, pourraient lui procurer -- ou procurer à une personne qui en fait partie --, directement ou indirectement, un avantage matériel, notamment financier.

La présente définition ne vise pas le groupe d'individus formé au hasard pour la perpétration immédiate d'une seule infraction.

(2) Pour l'application du présent article et de l'article 467.11, il n'est pas nécessaire, pour qu'il y ait facilitation d'une infraction, que la nature de celle-ci soit connue, ni que l'infraction soit réellement commise.

(3) Au présent article et aux articles 467.11 à 467.13, le fait de commettre une infraction comprend le fait de participer à sa perpétration ou de conseiller à une personne d'y participer.

(4) Le gouverneur en conseil peut, par règlement, désigner les infractions qui sont comprises dans la définition de “infraction grave” au paragraphe (1).

1997, ch. 23, art. 11; 2001, ch. 32, art. 27.

467.11 (1) Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de cinq ans quiconque sciemment, par acte ou omission, participe à une activité d'une organisation criminelle ou y contribue dans le but d'accroître la capacité de l'organisation de faciliter ou de commettre un acte criminel prévu à la présente loi ou à une autre loi fédérale.

(2) Dans une poursuite pour l'infraction prévue au paragraphe (1), le poursuivant n'a pas à établir les faits suivants :

a) l'organisation criminelle a réellement facilité ou commis un acte criminel;

b) la participation ou la contribution de l'accusé a accru la capacité de l'organisation criminelle de faciliter ou de commettre un acte criminel;

c) l'accusé connaissait la nature exacte d'un acte criminel susceptible d'avoir été facilité ou commis par l'organisation criminelle;

d) l'accusé connaissait l'identité de quiconque fait partie de l'organisation criminelle.

(3) Pour déterminer si l'accusé participe ou contribue à une activité d'une organisation criminelle, le tribunal peut notamment prendre en compte les faits suivants :

a) l'accusé utilise un nom, un mot, un symbole ou une autre représentation qui identifie l'organisation criminelle ou y est associée;

b) il fréquente quiconque fait partie de l'organisation criminelle;

c) il reçoit des avantages de l'organisation criminelle;

d) il exerce régulièrement des activités selon les instructions d'une personne faisant partie de l'organisation criminelle.

2001, ch. 32, art. 27.

Page 31: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination de la participation à un groupe criminel organisé - 29 __________________________________________________________________

467.12 (1) Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de quatorze ans quiconque commet un acte criminel prévu à la présente loi ou à une autre loi fédérale au profit ou sous la direction d'une organisation criminelle, ou en association avec elle.

(2) Dans une poursuite pour l'infraction prévue au paragraphe (1), le poursuivant n'a pas à établir que l'accusé connaissait l'identité de quiconque fait partie de l'organisation criminelle.

2001, ch. 32, art. 27.

467.13 (1) Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement à perpétuité quiconque fait partie d'une organisation criminelle et, sciemment, charge directement ou indirectement une personne de commettre une infraction prévue à la présente loi ou à une autre loi fédérale au profit ou sous la direction de l'organisation criminelle, ou en association avec elle.

(2) Dans une poursuite pour l'infraction prévue au paragraphe (1), le poursuivant n'a pas à établir les faits suivants :

a) une infraction, autre que celle prévue à ce paragraphe, a réellement été commise;

b) l'accusé a chargé une personne en particulier de commettre l'infraction;

c) l'accusé connaissait l'identité de toutes les personnes faisant partie de l'organisation criminelle.

2001, ch. 32, art. 27.

http://lois.justice.gc.ca/fr/C-46/19051.html

ETATS UNIS CODE DES ÉTATS-UNIS

Titre 18 - Crimes et procédure pénale Part 1 – Crimes, Chapitre 19 - Conspiration Sec. 371. (Conspiration en vue de commettre l’infraction de frauder les États-Unis) Si deux personnes ou plus conspirent soit de commettre une infraction contre les Etats-Unis, soit de frauder les États-Unis ou une de ses agences de quelque manière ou pour quelque motif que ce soit, et si l’une ou plusieurs de ces personnes agissent en vue de réaliser l’e but de cette conspiration, chacune recevra une amende en vertu du présent titre ou une peine d’emprisonnement ne dépassant pas 5 ans, ou les deux. Si, toutefois, l’infraction dont la commission est le but de la conspiration n’est qu’un délit, la peine infligée pour conspiration ne dépassera pas le maximum prévu pour un tel délit.

Page 32: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

30 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Titre 18 - Crimes et procédure pénale ; Part 1 - Infractions Chapitre 96 – Organisations corrompues et influencées par des gangsters Sec. 1962. (activités prohibées) (a) Il sera illégal pour toute personne ayant reçu un revenu quelconque

dérivant, directement ou indirectement, d’activités régulières de gangstérisme ou de la collecte d’une dette illégale à laquelle ladite personne a joué le rôle principal dans le sens visé par l’article 2, titre 18 du Code des États-Unis, d’utiliser ou d’investir ledit revenu ou le produit du revenu, pur acquérir un intérêt dans une entreprise, ou pour établir ou exploiter une entreprise qui se livre au commerce entre États américains ou au commerce extérieur, ou qui affecte ledit commerce. L’achat de titres mobiliers sur le marché ouvert dans le but d’investir et sans avoir l’intention d’influencer l’émetteur ou d’aider une autre personne à l’influencer ne sera pas illégal au titre de ce paragraphe si les valeurs mobilières de l’émetteur détenues par l’acheteur, par des membres de sa famille immédiate et par son ou ses complice(s) dans le contexte d’une activité de gangstérisme, ou la collecte d’une dette illégale après un tel achat ne se montent pas au total à un pour cent des valeurs mobilières restantes de quelque classe que ce soit et ne confère pas, de droit ou de fait, le pouvoir d’élire un directeur ou plusieurs dans l’entreprise de l’émetteur.

(b) Il sera illégal pour toute personne dans le contexte d’une activité de gangstérisme ou la collecte d’une dette illégale de faire l’acquisition ou de maintenir, directement ou indirectement, tout intérêt ou contrôle de toute entreprise qui est impliquée dans, ou des activités qui puissent affecter, le commerce entre les États américains ou avec l’ étranger.

(c) Il sera illégal pour toute personne employée dans ou associée à une entreprise engagée dans le commerce entre États américains ou avec l’étranger, ou dont les activités touchent à un tel commerce, d’exploiter ou de participer, directement ou indirectement , à l’exploitation de cette entreprise par le biais d’activités régulières de gangstérisme ou par la collecte de dettes illégales.

(d) Il sera illégal pour toute personne de conspirer à enfreindre l’une ou l’autre des dispositions des alinéas (a), (b), (c) du présent article.

Sec. 1963. (Sanctions pénales) (a) Quiconque enfreint aux dispositions de l’article 1962 du présent chapitre recevra une amende en vertu de ce titre ou une peine d’emprisonnement ne dépassant pas 20 ans (à vie si l’infraction découle d’une activité de gangstérisme pour laquelle la peine maximale inclut l’emprisonnement à vie) ou les deux, et remettra aux Etats-Unis, sans égard à une disposition quelconque du droit de l’État:

(1) tout intérêt que ladite personne a acquis ou conservé en infraction à l’article 1962 ;

(2) tout – (A) intérêt; (B) nantissement (C) revendication; ou (D) propriété ou droit contractuel de quelque sorte qui procure une source d’influence sur une entreprise que la personne a créée, exploitée, dirigée ou à laquelle elle a participé en infraction à l’article 1962 ; et

(3) tout bien consistant en bénéfices ou dérivés de bénéfices que la personne a obtenus, directement ou indirectement, d’activités de gangstérisme ou de la collecte illégale d’une dette en violation de l’article 1962.

Page 33: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination de la participation à un groupe criminel organisé - 31 __________________________________________________________________

Le tribunal, en déterminant la sentence pour une telle personne, ordonnera, en plus de toute peine qui sera infligée au titre du présent article, que la personne abandonne aux Etats-Unis tous les biens décrits dans le présent paragraphe. A la place de toute amende autorisée par le présent article, un défendeur qui dérive ses profits ou d’autres produits d’une infraction peut se voir infliger une amende qui ne dépassera pas le double du montant brut de ces profits ou autres produits de l’infraction.

(b) Les biens qui sont assujettis à une confiscation sont - (1) les biens immobiliers, y compris ce qui y pousse, ce qui y est attaché, ce qui se trouve dans le sol; et

(2) toute propriété personnelle tangible et intangible, y compris des droits, privilèges, intérêts, revendications et valeurs mobilières

7. AUTRES SOURCES

❏ L’action conjointe de l’UE (1998) sur la question de l’incrimination de la “participation à une organisation criminelle” :

Article 1: “Dans le contexte de cette Action conjointe, une organisation criminelle désignera une association structurée, établie pendant un certain temps, de plus de deux personnes, qui agissent de concert en vue de commettre des infractions qui sont punissables de privation de liberté ou d’une détention d’un maximum d’au moins 4 ans ou d’une peine plus sévère, que ces infractions soient une fin en elles-mêmes ou qu’elles soient un moyen d’obtenir des avantages matériels et, lorsqu’il y a lieu, d’influencer de manière impropre les autorités publiques dans leurs fonctions. Les infractions mentionnées au 1er paragraphe comprennent celles qui sont mentionnées à l’article 2 de la Convention Europol et dans son Annexe et qui son assujetties d’une peine équivalente au moins à celle qui figure au 1er paragraphe.

Article 2 de l’Action conjointe: “Pour aider à la lutte contre les organisations criminelles, chaque État Membre entreprendra, conformément à la procédure énoncée à l’article 6, de faire en sorte que l’une des deux actions décrites ci-dessous, ou les deux, fera (feront) l’objet d’une sanction pénale efficace, proportionnée et dissuasive :

(a) action par laquelle toute personne qui, intentionnellement et ayant connaissance soit des objectifs et des activités criminelles, soit de l’intention de l’organisation de commettre les infractions en question, prend une part active:

• Aux activités criminelles de l’organisation qui tombent sous le coup de l’article 1, même si cette personne ne participe pas à l’exécution de fait de ces infractions et, sous réserve des principes généraux du droit pénal de l’État Membre, même lorsque lesdites infractions ne sont pas réellement commises

• Aux autres activités de l’organisation en sachant en outre que sa participation contribuera à l’accomplissement des activités criminelles de l’organisation qui tombent sous le coup de l’article 1 ;

(b) action de toute personne qui consiste en une entente avec une autre personne ou plus en vue de planifier une activité qui, si elle est menée à bien, consistera à commettre des infractions tombant sous le coup de

Page 34: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

32 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

l’article 1, même si ladite personne ne participe pas à l’exécution de l’acte proprement dit.”

(Action commune 98/733/JAI, du 21 décembre 1998, adoptée par le Conseil sur la base de l'article K.3 du traité sur l'Union européenne, relative à l'incrimination de la participation à une organisation criminelle dans les États membres de l'Union européenne.) http://europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/l33077.htm

Page 35: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 33 __________________________________________________________________

CHAPITRE 3

Incrimination du blanchiment du produit du crime

Article 6

Incrimination du blanchiment du produit du crime

1. Chaque État Partie adopte, conformément aux principes fondamentaux de son droit interne, les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d'infraction pénale, lorsque l'acte a été commis intentionnellement:

a) i) À la conversion ou au transfert de biens dont celui qui s'y livre sait qu'ils sont le produit du crime, dans le but de dissimuler ou de déguiser l'origine illicite desdits biens ou d'aider toute personne qui est impliquée dans la commission de l'infraction principale à échapper aux conséquences juridiques de ses actes;

ii) À la dissimulation ou au déguisement de la nature véritable, de l'origine, de l'emplacement, de la disposition, du mouvement ou de la propriété de biens ou de droits y relatifs dont l'auteur sait qu'ils sont le produit du crime;

b) et, sous réserve des concepts fondamentaux de son système juridique:

i) À l'acquisition, à la détention ou à l'utilisation de biens dont celui qui les acquiert, les détient ou les utilise sait, au moment où il les reçoit, qu'ils sont le produit du crime;

ii) À la participation à l'une des infractions établies conformément au présent article ou à toute autre association, entente, tentative ou complicité par fourniture d'une assistance, d'une aide ou de conseils en vue de sa commission.

2. Aux fins de l'application du paragraphe 1 du présent article:

a) Chaque État Partie s'efforce d'appliquer le paragraphe 1 du présent article à l'éventail le plus large d'infractions principales;

b) Chaque État Partie inclut dans les infractions principales toutes les infractions graves telles que définies à l'article 2 de la présente Convention et les infractions établies conformément à ses articles 5, 8 et 23. S'agissant des États Parties dont la législation contient une liste d'infractions principales spécifiques, ceux-ci incluent dans cette liste, au minimum, un éventail complet d'infractions liées à des groupes criminels organisés;

c) Aux fins de l'alinéa b, les infractions principales incluent les infractions commises à l'intérieur et à l'extérieur du territoire relevant de la compétence de l'État Partie en question. Toutefois, une infraction commise à l'extérieur du territoire relevant de la compétence d'un État Partie ne constitue une infraction principale que lorsque l'acte correspondant est une infraction pénale en vertu du droit interne de l'État où il a été commis et constituerait une infraction pénale en vertu du droit interne de l'État Partie appliquant le présent article s'il avait été commis sur son territoire;

d) Chaque État Partie remet au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies une copie de ses lois qui donnent effet au présent article ainsi qu'une copie de toute modification ultérieurement apportée à ces lois ou une description de ces lois et modifications ultérieures;

e) Lorsque les principes fondamentaux du droit interne d'un État Partie l'exigent, il peut être disposé que les infractions énoncées au paragraphe 1 du

Page 36: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

34 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

présent article ne s'appliquent pas aux personnes qui ont commis l'infraction principale;

f) La connaissance, l'intention ou la motivation, en tant qu'éléments constitutifs d'une infraction énoncée au paragraphe 1 du présent article, peuvent être déduites de circonstances factuelles objectives.

Article 7

Mesures de lutte contre le blanchiment d'argent

1. Chaque État Partie:

a) Institue un régime interne complet de réglementation et de contrôle des banques et institutions financières non bancaires, ainsi que, le cas échéant, des autres entités particulièrement exposées au blanchiment d'argent, dans les limites de sa compétence, afin de prévenir et de détecter toutes formes de blanchiment d'argent, lequel régime met l'accent sur les exigences en matière d'identification des clients, d'enregistrement des opérations et de déclaration des opérations suspectes;

b) S'assure, sans préjudice des articles 18 et 27 de la présente Convention, que les autorités administratives, de réglementation, de détection et de répression et autres, chargées de la lutte contre le blanchiment d'argent (y compris, quand son droit interne le prévoit, les autorités judiciaires) sont en mesure de coopérer et d'échanger des informations aux niveaux national et international, dans les conditions définies par son droit interne et, à cette fin, envisage la création d'un service de renseignement financier qui fera office de centre national de collecte, d'analyse et de diffusion d'informations concernant d'éventuelles opérations de blanchiment d'argent.

2. Les États Parties envisagent de mettre en oeuvre des mesures réalisables de détection et de surveillance du mouvement transfrontière d'espèces et de titres négociables appropriés, sous réserve de garanties permettant d'assurer une utilisation correcte des informations et sans entraver d'aucune façon la circulation des capitaux licites. Il peut être notamment fait obligation aux particuliers et aux entreprises de signaler les transferts transfrontières de quantités importantes d'espèces et de titres négociables appropriés.

3. Lorsqu'ils instituent un régime interne de réglementation et de contrôle aux termes du présent article, et sans préjudice de tout autre article de la présente Convention, les États Parties sont invités à prendre pour lignes directrices les initiatives pertinentes prises par les organisations régionales, interrégionales et multilatérales pour lutter contre le blanchiment d'argent.

4. Les États Parties s'efforcent de développer et de promouvoir la coopération mondiale, régionale, sous-régionale et bilatérale entre les autorités judiciaires, les services de détection et de répression et les autorités de réglementation financière en vue de lutter contre le blanchiment d'argent.

1. INTRODUCTION Le problème du blanchiment d’argent Plusieurs des activités des groupes criminels organisés internationaux visent l’accumulation de richesses par des moyens illégaux comme le trafic de stupéfiants, la contrebande, la fraude, etc. Pour pouvoir tirer profit de ces activités, ces groupes doivent camoufler l’origine illicite de leurs fonds. C’est ce qu’on appelle le blanchiment d’argent, dont la définition technique est la dissimulation ou le déguisement de l’origine illégale des produits du crime. Avec l’intensification des

Page 37: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 35 __________________________________________________________________

efforts déployés, tant au niveau national qu’au niveau international, pour déposséder les criminels de leurs gains illicites, les groupes criminels organisés cherchent de plus en plus à convertir ces gains en biens d’apparence légitime. Ils le font en plaçant ces fonds dans le système financier, en se livrant à diverses opérations afin de brouiller la piste de leur argent, et en intégrant l’argent dans l’économie légitime par le biais d’opérations en apparence légitimes. Les conséquences nuisibles du blanchiment d’argent sont innombrables. Malgré l’absence d’estimations précises, il est certain qu’une quantité appréciable de biens d’origine illégale pénètrent les économies petites et grandes. Il s’ensuit que l’influence et le pouvoir des groupes criminels organisés augmentent, tandis que l’autorité et l’intégrité des gouvernements et des grandes institutions publiques se trouvent compromises dans la même mesure. Si on lui laisse libre cours, le blanchiment d’argent risque de saper l’intégrité des systèmes politiques et judiciaires ainsi que la stabilité des secteurs financiers nationaux et internationaux. Il peut aussi corrompre le fonctionnement des entreprises et des marchés légitimes, entraver les politiques économiques et autres, fausser les conditions du marché et finalement entraîner de graves dangers systémiques. Par exemple, même si de rares institutions financières pratiquent le blanchiment d’argent, une telle activité peut miner l’intégrité de leurs fonctions et les mener au bord de l’effondrement, au risque de susciter de graves crises financières, surtout dans les pays qui sont relativement petits. Dans le contexte de la mondialisation, les criminels tirent parti de la facilité avec laquelle les capitaux se déplacent, des avances technologiques, de la mobilité accrue des personnes et des denrées, ainsi que de la considérable diversité des dispositions juridiques dans les diverses administrations. Il s’ensuit que les biens peuvent être transférés très rapidement d’un endroit à l’autre et, à la faveur des asymétries en matière juridique, se retrouver sous forme de biens légitimes qui sont dès lors à la disposition d’importants malfaiteurs et d’organismes criminels n’importe où au monde. Ces avoirs peuvent alors être utilisés pour mener d’autres opérations criminelles, récompenser des crimes passés et encourager des crimes futurs. Analyse raisonnée de ces articles Il est évident qu’une solution internationale au problème du blanchiment d’argent s’impose. Il faut absolument que les pays et les régions tentent d’harmoniser leurs méthodes, leurs normes et leurs systèmes juridiques afférents à ce crime, afin de se donner la possibilité de coopérer et de réprimer le blanchiment international des produits du crime. Les administrations dont les mécanismes de contrôle sont faibles ou inexistants facilitent la tâche des blanchisseurs d’argent. Aussi, la Convention vise t’elle à procurer à tous les pays une norme minimale à laquelle ils peuvent adhérer dans le cadre de leurs efforts pour contenir les produits du crime. Les dispositions de la Convention concernant la saisie, le gel et la confiscation des produits du crime représentent des mesures connexes importantes13.

13 Voir Articles 12, 13 et 14 concernant la saisie et la confiscation des produits du crime.

Page 38: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

36 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Combattre le blanchiment d’argent fait partie intégrante de la lutte contre le crime organisé transnational grave. Étant donné que l’un des principaux objectifs des groupes criminels organisés internationaux est le gain matériel, il est indispensable de les priver de ce gain. Cibler les profits et les finances des groupes criminels diminue leur motivation à participer à de telles activités et ébranle leurs opérations criminelles, leur croissance et leur expansion. De surcroît, combattre le blanchiment d’argent aide également à préserver l’intégrité des institutions financières, que celles-ci soient officielles ou non, et à protéger les opérations régulières du système financier international dans son ensemble. La Convention reconnaît ce lien étroit entre les activités du crime organisé et le blanchiment d’argent, et s’appuie pour en venir à bout sur des initiatives internationales préalables. Ces initiatives comportaient à la fois des mesures répressives et des mesures préventives, et la Convention suit le même schéma. S’agissant de la répression du blanchiment d’argent, quelque 167 États sont maintenant parties à la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes (la ‘Convention de Vienne”) qui réclame l’incrimination du blanchiment d’argent dans le contexte du trafic de stupéfiants. De nombreuses initiatives régionales ou des Nations Unies ont cherché à régler de tels problèmes en mettant l’accent sur des infractions criminelles ou sur des zones géographiques particulières14. Un effort analogue a été réalisé à l’égard du financement d’activités terroristes15. L’incrimination non seulement permet aux autorités nationales d’organiser la détection, la poursuite et la répression du crime, mais aussi elle procure un fondement légal à la coopération internationale entre les autorités policières, judiciaires et administratives, y compris entraide judiciaire et extradition. Suite à des initiatives nationales ou internationales, de nombreux pays disposent déjà de lois concernant le blanchiment d’argent. Toutefois, de nombreux États limitent les infractions visées au trafic de stupéfiants et à quelques autres crimes. La Convention stipule un élargissement de cette liste à “l’éventail le plus large d’infractions principales” y compris les infractions définies dans la Convention, les infractions définies dans les Protocoles, “un éventail complet d’infractions liées à des groupes criminels organisés” et toutes les infractions graves(Art. 6(2)(a) et (b)). Un des aspects les plus critiques du blanchiment d’argent est l’introduction de fonds illicites dans le système financier. Une fois ce fait accompli, il devient

14 La Convention des Nations Unies contre le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes, prête à être signée le 20 décembre 1988. Comme on le voit plus loin (sous le titre “infractions principales”), des conventions internationales plus récentes ont étendu l'obligation d'incriminer le blanchiment d'argent au-delà de ces infractions; voir aussi la Conférence ministérielle mondiale sur le crime organisé transnational tenue à Naples en novembre 1994; la session spéciale de l'Assemblée générale des Nations Unies à New York en juin 1998; Le Groupe d'action financière (GAFI) de l'OCDE au site; le Groupe Asie Pacifique; le GAFI des Caraïbes; la Déclaration des principes du Comité de Bâle sur les Règlements bancaires et pratiques de surveillance; le Conseil de l'Europe, l'Union européenne. 15 Voir la Convention internationale sur la répression du financement du terrorisme (2000) http://untreaty.un.org/french/terrorism/conv12.pdf . Voir aussi la Résolution 1373 du Conseil de sécurité en date du 28 septembre 2001, S/RES/1373 (2001).

Page 39: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 37 __________________________________________________________________

extrêmement difficile et même impossible d’en retrouver la trace. C’est pourquoi il est de la plus haute importance de faire en sorte que les groupes criminels organisés ne puissent faire ce premier pas, et de trouver des moyens de suivre le mouvement des avoirs. La coopération et l’harmonisation internationales sont, une fois de plus, indispensables.

Pour toutes ces raisons, l’article 7 introduit des mesures supplémentaires visant à prévenir de telles activités16 et à mobiliser l’aide des établissements financiers et autres pour empêcher l’introduction de fonds d’origine criminelle dans le système financier, pour détecter les opérations qui pourraient être d’origine criminelle et pour faciliter le dépistage des fonds faisant l’objet de ces opérations17. Les États se doivent d’adopter et d’intégrer dans leur infrastructure financière des mesures, par exemple des procédures permettant aux institutions financières de connaître leurs clients, d’enregistrer les opérations et de signaler les opérations suspectes aux autorités nationales. Ces procédures devraient faire partie d’un régime de réglementation complet qui faciliterait les rapports de coopération interne et internationale. De nombreux pays ont institué des “services de renseignements financiers” chargés de recueillir, analyser et échanger l’information pertinente selon les besoins et en conformité avec leurs lois. Il est demandé aux États Parties d’envisager la création de tels services, ce qui comporte l’engagement de ressources plus importantes. La Convention “invite” les États Parties à “prendre pour lignes directrices les initiatives pertinentes prises par les organisations régionales, interrégionales et multilatérales pour lutter contre le blanchiment d’argent”. Depuis l’entrée en vigueur de la Convention de Vienne en 1990, d’autres conventions et initiatives ont tenté d’encourager la coopération internationale pour combattre le blanchiment d’argent aux niveaux mondial et régional. Notons en particulier la création du Groupe d’action financière internationale (GAFI) en 1990 et la Convention du Conseil de l’Europe sur le blanchiment, la perquisition, la saisie et la confiscation des produits du crime (la Convention de Strasbourg ). Le financement du terrorisme est un nouveau sujet de préoccupation et des efforts internationaux ont été déployés en vue d’incriminer ces activités et d’empêcher le recours aux systèmes financiers à cette fin. Les mesures préventives sont basées sur les lois interdisant le blanchiment d’argent18. Les États sont invités à revoir les dispositions anti-blanchiment d’argent qu’ils ont déjà afin de s’assurer qu’elles se conforment à ces articles ainsi qu’aux articles traitant de l’identification, du gel et de la confiscation des produits du crime (Articles 12-14) et de la coopération internationale (Articles 16-19, 26-27). Les États qui entreprendront cette révision voudront peut-être saisir l’occasion pour adopter des

16 Voir aussi les articles 12, 13 et 14 concernant la saisie et la confiscation des avoirs criminels. 17 Ces mesures ont été recommandées par le Groupe d'action financière sur le blanchiment d'argent (GAFI) et d'autres organes similaires au niveau régional. 18 Voir en particulier la Convention internationale sur la suppression du financement du terrorisme (2000) qui incluse des dispositions relatives au blanchiment d’argent et les huit recommandations spéciales sur le financement du terrorisme du Groupe d'action financière sur le blanchiment d'argent (GAFI).

Page 40: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

38 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

dispositions et des lignes directrices provenant d’autres conventions internationales et d’autres initiatives qui sont en cours19.

19 Par exemple, ces mesures permettront aux États de s'aligner sur la Résolution 1373 (2001)du Conseil de sécurité des Nations Unies sur le financement du terrorisme. Voir aussi les mesures prises par le GAFI et qui vont dans le même sens http://www.fatf-gafi.org/TerFinance_fr.htm .

Page 41: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 39 __________________________________________________________________

2. SOMMAIRE DES PRINCIPALES EXIGENCES Article 6

Il exige que les États Parties incluent ce qui suit dans leur liste d’infractions: • La conversion ou le transfert des “produits du crime” (Art. 6(1)(a)(i)) • La dissimulation ou le déguisement de la nature, de l’origine, de

l’emplacement, de la disposition, du mouvement ou de la possession de “produits du crime” (Art. 6(1)(a)(ii))

Sous réserve des principes de base de leurs systèmes internes, les États doivent

aussi incriminer : • L’acquisition, la possession ou l’utilisation des “produits du crime” (Art.

6(1)(b)(i)) • La participation ou l’association à l’une ou l’autre des infractions mentionnées

plus haut, ou toute autre association, entente, tentative ou complicité par fourniture d’une assistance, d’une aide ou de conseils en vue de a commission (Art. 6(1)(b)(ii)).

Article 7

Il exige que les États Parties prennent des mesures supplémentaires. C’est-à-dire qu’ils doivent :

• Instituer un régime de réglementation et de contrôle des banques et des établissements financiers non bancaires, mettant l’accent sur les exigences en matière d’identification des clients, d’enregistrement des opérations et de déclaration des opérations suspectes.

• Faire en sorte que les autorités administratives, de réglementation, de

répression et autres soient en mesure de coopérer et d’échanger l’information aussi bien aux niveaux national qu’international.

• Développer et promouvoir la coopération mondiale, régionale, sous-régionale

et bilatérale entre les autorités judiciaires, les services de détection et de répression et les autorités chargées de la réglementation financière.

3. DISPOSITIONS OBLIGATOIRES

La Convention définit les “produits du crime” comme étant “tout bien provenant directement ou indirectement de la commission d’une infraction” (Art. 2(e)). “Le terme ‘biens’ désigne tous les types d’avoirs, corporels ou incorporels, meubles ou immeubles, tangibles ou intangibles, ainsi que les actes juridiques ou documents attestant la propriété de ces avoirs ou les droits y relatifs” (Art. 2(d)).

Les expressions “blanchiment des produits du crime” et “blanchiment d’argent” devraient être traitées comme étant synonymes20.

20 Voir Notes interprétatives, A/55/383/Add.1, para.10

Page 42: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

40 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Lorsque la Convention stipule que des “mesures législatives et autres” (Art.6(1))

sont nécessaires, cela signifie que certaines mesures peuvent être introduites par la loi. Les “autres”mesures sont supplémentaires et peuvent être introduites par des actes administratifs ou autres21.

Les dispositions de chaque article seront examinées l’une après l’autre, sous les titres “Incrimination” et “Mesures préventives”. Incrimination (Article 6) a. Les infractions Voir notamment la Convention internationale sur la suppression du financement du terrorisme, qui contient des dispositions détaillées sur le blanchiment d’argent, et les Huit recommandations spéciales du GAFI sur le financement du terrorisme. L’article 6 de la Convention exige que chaque État institue les quatre infractions ci-dessous concernant le blanchiment d’argent, “conformément aux principes fondamentaux de son droit interne” “lorsqu’elles sont commises intentionnellement”22.

Conversion ou transfert des produits du crime La première infraction liée au blanchiment d’argent est la “conversion ou le transfert des biens dont celui qui s’y livre sait qu’ils sont le produit du crime, dans le but de dissimuler ou de déguiser l’origine illicite desdits biens ou d’aider toute personne à échapper aux conséquences juridiques de ses actes” (Art 6(1)(a)(i)). L’État doit prendre des mesures législatives et d’autres mesures pour conférer à ces actes le caractère d’infraction pénale. L’expression “conversion ou transfert” englobe les cas où les avoirs financiers sont convertis sous une forme ou sous une autre (par ex. en utilisant des devises obtenues par des opérations illicites pour acheter un bien immobilier, ou vendre un bien immobilier qui a été acquis par des moyens illicites), et les cas où les mêmes avoirs sont transférés d’un endroit à un autre ou vers un territoire de juridiction différente, ou d’un compte bancaire à un autre. Pour ce qui est de l’aspect mental, la conversion ou le transfert doit être intentionnel, l’inculpé doit avoir eu connaissance au moment de la conversion ou du transfert, du fait que les biens sont le produit d’un crime, et ces actions doivent avoir été commises dans le but soit de dissimuler ou de déguiser leur origine criminelle (par exemple pour aider à empêcher leur découverte) soit d’aider une personne à échapper à toute responsabilité pénale pour le crime qui a donné lieu à ces produits.

21 Voir Notes interprétatives, A/55/383/Add.1, para. 9 22 Sauf pour la définition des infractions principales, le libellé de l'article 6, paragraphe 1 est analogue au libellé des dispositions correspondantes de la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et des substances psychotropes.

Page 43: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 41 __________________________________________________________________

Comme pour toutes les mesures stipulées par la Convention, il s’agit là d’exigences minimales, mais les États sont libres d’adopter des “mesures plus strictes ou plus sévères”(Art.34(3)). Les Notes interprétatives déclarent que les expressions “dissimuler ou déguiser” et “dissimulation ou déguisement” (utilisées au paragraphe suivant) devraient être comprises comme incluant le fait d’empêcher de découvrir l’origine illicite des biens.23 Cette note interprétative s’applique aux quatre actions devant être incriminées au titre de l’Article 6, paragraphes (1) (a) et (b).

Dissimulation ou déguisement de produits du crime La deuxième infraction liée au blanchiment d’argent est la “dissimulation ou le déguisement de la nature véritable, de l’origine, de l’emplacement, de la disposition, du mouvement ou de la propriété de biens ou de droits y relatifs dont l’auteur sait qu’ils sont le produit du crime”(Art. 6 (1)(a)(ii)). Cette infraction recouvre un nombre assez important d’éléments, notamment “la dissimulation ou le déguisement” de pratiquement tous les aspects ou tous les renseignements relatifs à ces biens. Ici, pour ce qui est de l,aspect mental requis, la “dissimulation ou le déguisement” doit être intentionnel et l’inculpé doit avoir eu au moment de son acte connaissance du fait que les biens sont le produit du crime. Cet aspect mental est moins strict que pour l’infraction précédente. Les rédacteurs (des lois) ne devraient donc pas exiger la preuve que le but de la dissimulation ou du déguisement était de frustrer le dépistage des biens ou de dissimuler leur véritable origine24. Les deux dernières infractions liées au blanchiment d’argent doivent être établies sous réserve des “principes fondamentaux” des systèmes juridiques des États.

Acquisition, détention ou utilisation des produits du crime La troisième infraction est “l’acquisition, la détention ou l’utilisation de biens dont celui qui les acquiert, les détient ou les utilise sait, au moment où il les reçoit, qu’ils sont le produit du crime”(Art. 6(1)(b)(i)). Cela reflète exactement les infractions de l’article 6(1)(a) (i) et (ii), puisque, alors que ces dernières dispositions attribuent la responsabilité à ceux qui procurent des produits illicites, ce paragraphe-ci l’attribue à ceux qui acquièrent, détiennent ou utilisent ces mêmes biens. L’aspect mental est le même que pour l’infraction visée à l’article 6(1)(a)(i): il doit y avoir intention d’acquérir, de détenir ou d’utiliser, et l’auteur de l’infraction doit avoir eu connaissance, au moment où il commettait cet acte, du fait que les biens étaient le produit du crime. La motivation précise de cet acte n’a aucune portée.

23 Notes interprétatives, A/55/383/Add.1para.11 24 Les Notes interprétatives précisent que la dissimulation de l'origine illicite est incluse, mais la dissimulation pour d'autres raisons, ou dans les cas où la raison n'en est pas claire, devrait aussi être incluse. (A/55/383/Add.1 para.11)

Page 44: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

42 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Participation à l’une des infractions établies conformément au présent article ou toute autre association, entente, tentative ou complicité par fourniture d’une assistance, d’une aide ou de conseils en vue de sa commission.

Le quatrième sous-groupe d’infractions concerne “la Participation à l’une des infractions établies conformément au présent article ou toute autre association, entente, tentative ou complicité par fourniture d’une assistance, d’une aide ou de conseils en vue de sa commission.” (Art. 6(1)(b)(ii)). Le sens de “tentative” n’est pas défini dans les Notes interprétatives à la Convention. Toutefois, les Notes pour les dispositions des protocoles, qui comprennent l’exigence d’incriminer les tentatives, ont été rédigées plus tard et indiquent que les tentatives sont “comprises dans certains pays comme incluant les actes perpétrés en préparation d’un acte criminel et ceux qui sont exécutés lors d’une tentative échouée de commettre l’infraction, si ces actes sont également jugés coupables et passibles de peine en vertu du droit interne”25. Les États Parties devraient consulter la manière dont ce genre d’infractions auxiliaires est traité dans leurs systèmes internes et s’assurer que les mêmes dispositions s’appliquent aux autres infractions visées par le présent article. La connaissance, l’intention ou la motivation requises pour ces infractions “peuvent être déduites de circonstances factuelles objectives” (Art. 6(2)(f)). Les rédacteurs pourraient veiller à ce que leurs dispositions relatives aux éléments de preuve permettent une telle déduction à partir de l’état mental plutôt que d’exiger des preuves directes, une confession par exemple, avant que l’état mental soit considéré comme étant prouvé (voir aussi plus loin la section concernant les questions optionnelles ) La Convention stipule que les rédacteurs doivent étudier de près la gravité de ces infractions lorsqu’ils décident des sanctions appropriées pour les individus ayant commis ces infractions (Art. 11(1)) et qu’ils instituent une longue période de prescription pour l’infraction – notamment lorsque les auteurs présumés de l’infraction se sont soustraits à la justice (Art. 11(5)). Toutefois, la Convention laisse aux États le soin de décrire les infractions visées par le présent article et d’appliquer leurs règles internes relativement aux moyens de défense et autres principes juridiques. Les infractions établies selon la Convention seront “poursuivies et punies conformément au” droit interne (Art. 11(6)). Il convient de souligner que, si le blanchiment d’argent doit comporter les éléments de transnationalité et de crime organisé pour que la Convention s’applique, ces éléments ne devraient pas être pris en compte lors de l’établissement des infractions dans le cadre du droit interne(Art.34(2)).

25. Voir Notes interprétatives A/55/383/Add.1, paras.70 et 95 et A/55/383/Add.3 (Notes pour le Protocole sur les armes à feu), para.6.

Page 45: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 43 __________________________________________________________________

Les États Parties doivent fournir au Secrétaire Général des Nations Unies des copies de leurs lois donnant effet au présent article (et de toute modification ultérieure aux dites lois) ou une description de ces lois. Ces documents devraient être remis à l’Office des drogues et du crime (Art. 6 (2) (d). b. Infractions principales

La Convention définit une “infraction principale” comme étant “une infraction à la suite de laquelle un produit est généré, qui est susceptible de” l’une ou l’autre des infractions liées au blanchiment d’argent définies à l’article 6 (Art. 2 (h))26.

De nombreux pays possèdent déjà des lois sur le blanchiment d’argent, mais la définition des infractions principales varie considérablement. Certains États limitent les infractions principales au trafic de stupéfiants, ou alors au trafic de stupéfiants et à quelques autres infractions. D’autres États ont inclus une liste exhaustive d’infractions principales dans leurs lois. D’autres encore définissent génériquement les infractions principales qui comprennent alors toutes les infractions, ou toutes les infractions graves, ou toutes les infractions passibles d’une peine dont le seuil est défini. L’article 6(2)(a) exige que les infractions liées au blanchiment d’argent s’appliquent “à l’éventail le plus large d’infractions principales” 27 Le paragraphe suivant exige que les infractions principales incluent les infractions établies par la Convention et les Protocoles (auxquels les États sont parties ou envisagent de devenir parties), ainsi que “toutes les infractions graves” (Art.6(2)(b))28. Les États qui limitent l’application des mesures relatives au blanchiment d’argent à une liste exhaustive d’infractions principales doivent modifier la liste en conséquence et “au minimum” inclure “un éventail complet d’infractions liées à des groupes criminels organisés”(Art. 6 (2)(b)). Une Note interprétative ajoute que l’expression “liées à des groupes criminels organisés” est censée désigner “des activités criminelles du type de celles que mènent les groupes criminels organisés” 29. Les infractions principales ne sont pas forcément des infractions commises exclusivement sur le territoire de l’État qui applique la Convention. Les États doivent prévoir d’inclure des infractions commises à l’intérieur d’un territoire relevant d’autres compétences, à condition que cet acte constitue une infraction là où

26 Pour la définition des infractions de blanchiment d'argent, les avoirs en question sont les “produits du crime”. Par contre, les dispositions concernant la saisie et la confiscation s'applique aux “instruments” aussi bien qu’aux produits, c’est à dire aux biens ayant servi ou étant destinés à servir à la commission du crime (Art.12(1)(b)). 27 Cf. Article 6 de la Convention du Conseil de l'Europe de 1990 et la Recommandation 5 du GAFI (1990). D'autres sources seront mentionnées plus tard. 28 Voir l'article 1(2)-(3) de chaque Protocole. Les "infractions graves" sont définies à l'article 2 (b) comme étant" un acte constituant une infraction passible d'une peine privative de liberté dont le maximum ne doit pas être inférieur à quatre ans ou d'une peine plus lourde". 29 Note interprétative A/55383/Add.1,para.12

Page 46: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

44 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

il a été commis aussi bien qu’à l’intérieur de l’État qui applique la Convention(Art.6(2)(c)). Autrement dit, il faut qu’il y ait double incrimination30. c. Situations dans lesquelles l’infraction principale et l’infraction liée au blanchiment d’argent ne peuvent s’appliquer au même individu Les constitutions ou les principes juridiques fondamentaux de certains États ne permettent pas que l’on intente des poursuites et que l’on inflige une peine à un même individu à la fois au chef d’une infraction principale et du produit du blanchiment d’argent obtenu par cette infraction (par exemple la Suède). La Convention reconnaît ce problème et autorise la non application des infractions liées au blanchiment d’argent à ceux qui ont commis l’infraction principale, mais seulement dans les pays dont les principes fondamentaux l’exigent (Art. 6(2)(e))31. Une Note interprétative explique que lors des négociations relatives à la Convention, les pays où il n’est pas permis de poursuivre et de punir une même personne pour une infraction principale et une infraction liée au blanchiment d’argent, ont “confirmé qu’ils ne refusaient pas l’extradition, l’entraide judiciaire ou la coopération à des fins de confiscation uniquement parce que la demande était fondée sur une infraction de blanchiment d’argent dont l’auteur était également celui de l’infraction principale”32. Mesures préventives (Article 7) L’article 7 énonce un certain nombre de mesures – dont certaines sont obligatoires, d’autres basées sur les “meilleurs efforts”, d’autres encore, facultatives – qui visent à garantir que les États Parties auront en place un régime juridique et administratif complet pour décourager et détecter le blanchiment d’argent. Dans l’ensemble, il s’agit de mettre en place un régime complet qui facilitera l’identification des activités de blanchiment d’argent et encouragera l’échange de renseignements à tout un éventail d’autorités ayant pour mission la lutte contre le blanchiment d’argent. Les institutions financières (et autres entités désignées) devront prendre des mesures pour empêcher l’introduction de fonds criminels dans le système financier et pour se procurer les moyens d’identifier et de dépister ces fonds lorsqu’ils se trouvent déjà dans le système, et aussi de découvrir à qui ils appartiennent afin de faciliter les arrestations et les poursuites judiciaires33.

30 Cela s'écarte de la Convention de 1990 sur le blanchiment, la perquisition, la saisie et la confiscation des produits du crime, dans laquelle l'article 6, para.2 a) déclare qu'il "n'est pas important que l'infraction principale relève ou non des compétences de la Partie en matière pénale". 31 Cette pratique est parfois appelée "auto-blanchiment". La Convention de Vienne de 1988 ne se prononce pas sur ce point. La Convention de Strasbourg de 1990 autorise les États à décider que les infractions de blanchiment d'argent ne s'appliquent pas aux personnes qui ont commis l'infraction principale (Article 6, paragraphe 2 b). 32 A/55/383/Add.1, para.13. Voir les articles 12,13,16 et 18 de la Convention. 33 Les dispositions de la Convention concernant l'identification, le dépistage et la confiscation des produits du crime et d'autres biens liés au crime font aussi partie des mesures d'ensemble requises pour mener à bien la lutte contre le blanchiment d'argent (Articles 12 à 14).

Page 47: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 45 __________________________________________________________________

Les pays qui ne participent pas en ce moment au Groupe d’action financière international où à d’autres organisations de lutte contre le blanchiment d’argent (voir paragraphe 3 ci-dessous) risquent de prendre plus de temps pour s’acquitter de ces obligations relatives à la législation, à la réglementation et à l’administration, que les États disposant déjà de structures de lutte contre le blanchiment d’argent. Par exemple, les mesures requises par cet article devront être intégrées dans l’infrastructure générale de chaque administration. Donc le temps requis pour la mise en oeuvre de ces mesures dépendra largement de la nature et de la complexité des institutions financières locales, et de la mesure dans laquelle elles se livrent à des opérations transfrontalières. Il s’agira de prêter attention au contexte spécifique et aux vulnérabilités particulières de chaque administration. Dans les pays qui n’ont pas actuellement de telles mesures en place, la mise en œuvre pourra se dérouler en même temps que le processus de ratification, du moment que les mesures requises dans le présent article seront en place lorsque la Convention entrera en vigueur dans l’État Partie en question. L’article 7 contient deux obligations importantes:

(i) instituer “un régime interne complet de réglementation et de contrôle” pour décourager le blanchiment d’argent (Art. 7 (1) (a)); et

(ii) s’assurer que les instances participant à la lutte contre le blanchiment d’argent aient la capacité de coopérer et d’échanger de l’information aux niveaux interne et international(Art. 7 (1) (b)). En outre, les États devront “envisager” de mettre en oeuvre des mesures pour surveiller les mouvements transfrontaliers d’espèces (Art. 7 (2)) et “s’efforcer” de développer et de promouvoir la coopération mondiale, régionale et bilatérale entre les instances appropriées en vue de combattre le blanchiment (Art. 7 (4)).

Comme il a été dit plus haut, la Convention s’appuie sur des initiatives internationales continues visant à lutter contre le blanchiment d’argent. Lorsqu’ils instituent un régime interne de réglementation et de contrôle, les États sont “invités à prendre pour lignes directrices les initiatives pertinentes prises par les organisations régionales, interrégionales et multilatérales pour lutter contre le blanchiment d’argent” (Art. 7 (3)). Une Note interprétative précise que “lors des négociations, les mots ‘initiatives pertinentes prises par les organisations régionales, interrégionales et multilatérales’ ont été compris comme désignant particulièrement les quarante recommandations du Groupe d’action financière […] et additionnellement d’autres initiatives en cours prises en vue de lutter contre le blanchiment d’argent par des organisations régionales, interrégionales ou multilatérales telles que le Groupe d’action financière des Caraïbes, le Commonwealth, le Conseil de l’Europe, le Groupe de lutte contre le blanchiment d’argent d’Afrique de l’Est et d’Afrique australe, l’Union européenne et l’Organisation des États américains”34. En fin de compte, les États sont libres de déterminer la meilleure façon d’appliquer cet article. Cependant, l’établissement de relations avec l’une des organisations de lutte contre le blanchiment d’argent serait important pour assurer une mise en œuvre efficace.

34 Notes interprétatives, A/55/383/Add.1, para. 17)

Page 48: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

46 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Les mesures obligatoires seront décrites ci-dessous sous deux rubriques: l’institution d’un régime de réglementation et le renforcement de la coopération interne et internationale. Cet article exige aussi que l’on envisage d’autres mesures, comme la création d’un service de renseignements financiers, qui seront examinées sous le titre “options qu’il convient d’envisager”.

A. Institution d’un régime de réglementation Il est exigé des États qu’ils instituent un régime interne de réglementation et de contrôle dans le cadre de leurs compétences, afin de décourager et de détecter les activités liées au blanchiment d’argent(Art. 7(1)(a)). Ce régime devra être “complet”, mais la nature précise et les éléments particuliers du régime sont laissés à la discrétion des États, à condition qu’ils exigent au minimum des banques et des institutions financières non-bancaires qu’elles assurent de façon efficace : • l’identification des clients • l’enregistrement des opérations et • la déclaration des opérations suspectes. Au sujet de ces mesures, les Notes interprétatives contiennent des précisions concernant les deux points suivants:

a. Les institutions sujettes à ces exigences

Les exigences s’appliquent aux banques, aux “institutions financières non-bancaires” (pr. ex. des compagnies d’assurances et des courtiers en valeurs mobilières) et «le cas échéant, à d’autres entités particulièrement exposées au blanchiment d’argent”Art. 7 (1)(a)). La Note interprétative ajoute que les mots ‘autres entités’ “peuvent être interprétés comme englobant les intermédiaires, qui dans certains pays peuvent comprendre des sociétés de courtage, d’autres intermédiaires boursiers, des bureaux de change ou des cambistes”35. Ainsi, ce régime devrait s’appliquer non seulement aux institutions bancaires mais à toutes les activités commerciales avec des chiffres d’affaires élevés et des volumes importants qui rendent probable l’existence de blanchiment d’argent. L’expérience montre que des activités de blanchiment d’argent ont eu lieu dans le secteur de l’immobilier et dans le commerce de denrées telles que l’or, les pierres précieuses et le tabac. En de nombreux endroits, la liste des institutions est augmentée de manière à inclure de telles entreprises et professions36. Plus récemment, on a prêté plus 35 A/55/383/Add.1, para. 14 36 voir, par exemple, GAFI, Révision des quarante recommandations du GAFI, Document Consultatif, Paris, May 2002, http://www.fatf-gafi.org/pdf/Review40_fr.pdf . Le GAFI propose d’étendre certaines prescriptions obligatoires des quarante Recommandations à plusieurs catégories d’entreprises et de professions non financières qui sont considérées par le GAFI comme étant plus vulnérables au blanchiment de capitaux : les casinos et les autres activités de jeux de hasard; les agents immobiliers et les marchands d’articles de grande valeur ; les prestataires de services aux sociétés et aux fiducies; les avocats ; les notaires ; les comptables et les auditeurs; les conseillers en placements financiers. L’Union Européenne a déjà pris l’initiative à cet égard (voir : Directive 2001/97/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 décembre 2001 modifiant la directive 91/308/CEE du Conseil

Page 49: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 47 __________________________________________________________________

d’attention aux “entreprises de services financiers” et aux “systèmes officieux de transfert des valeurs” comme hawala et hundi. Dans un nombre croissant de territoires administratifs ces entreprises font l’objet d’un régime de réglementation aux fins de détection du blanchiment d’argent et d’autres infractions37.

b. Opérations suspectes D’après les Notes interprétatives, les “opérations suspectes” peuvent comporter des “opérations inhabituelles qui, du fait de leur montant, de leurs caractéristiques et de leur fréquence, ne concordent pas avec l’activité commerciale du client, débordent du cadre des paramètres normalement acceptés sur le marché ou n’ont pas de fondement juridique clair, et qui pourraient constituer une activité illégale en général ou y être liées”38. Lorsqu’ils appliqueront l’article 7(3), les États voudront peut-être envisager les éléments suivants dans le contexte des mesures que le régime complet de réglementation doit inclure39:

c. Identification des clients Cela veut dire que les détenteurs de comptes bancaires dans les institutions bancaires et tous les individus parties à des opérations financières doivent être identifiés et documentés. Les dossiers devraient contenir suffisamment d’information pour que l’on puisse identifier toutes les parties et la nature de l’opération, identifier les avoirs précis qui font l’objet de l’opération et les montants ou valeurs en question, permettre de retrouver l’origine et la destination de tous les fonds ou autres avoirs engagés.

d. Enregistrement des opérations Cela signifie que les dossiers concernant le client et les opérations devraient être conservés pendant une période d’une durée minimale spécifiée40.

relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux - Déclaration de la Commission Journal officiel n° L 344 du 28/12/2001 p. 0076 - 0082. http://europa.eu.int/eur-lex/pri/fr/oj/dat/2001/l_344/l_34420011228fr00760081.pdf 37 Voir des exemple de réglementation fournis par l’Australie, l ‘Allemagne, Hong Kong, les Émirats Arabes Unis, le Royaume Uni, et les Etats Unis. 38 A/55/383/dd.1, para. 5. On peut comparer cette définition à celle qui se retrouve à l’article 18 de la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, qui elle-même s’inspire de la définition adoptée par le Groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux (GAFI), exige que les États adoptent “des réglementations qui imposent aux institutions financières l'obligation de signaler promptement aux autorités compétentes toutes les opérations complexes, inhabituelles, importantes, et tous les types inhabituels d'opérations, lorsqu'elles n'ont pas de cause économique ou licite apparente, sans crainte de voir leur responsabilité pénale ou civile engagée pour violation des règes de confidentialité si elles rapportent de bonne foi leurs soupçons”. http://untreaty.un.org/french/terrorism/conv12.pdf . 39 Les rédacteurs peuvent se référer aux Quarante recommandations du Groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux (GAFI) http://www.fatf-gafi.org/40Recs_fr.htm 40 Le Groupe d'action financière recommande que les dossiers soient conservés pendant 5 ans; pour les Parties à la Convention, cette rétention d'une durée de 5 ans est obligatoire (Article 18, par. 1(b) (iv).

Page 50: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

48 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

e. Déclaration des opérations suspectes

Définition des opérations qui doivent être signalées au Service de renseignements financiers ou à une autre instance désignée. Il convient de formuler des critères pour l’identification des opérations suspectes et de les revoir périodiquement en consultation avec des experts qui sont bien au courant des nouvelles méthodes ou des nouveaux réseaux utilisés par les blanchisseurs d’argent. Pouvoirs des autorités de réglementation ou du SRF relativement à l’inspection des dossiers et à la coopération des responsables des dossiers en vue de localiser et de consulter ces derniers. Il se peut que certains de ces dossiers soient protégés par des règles concernant la protection de la vie privée et par des lois sur la discrétion bancaire qui interdisent la divulgation des dossiers. Dans ce cas on pourra envisager des dispositions qui libèrent les institutions financières par rapport à ces exigences et à ces lois. Les rédacteurs devraient aussi s’assurer que les exigences en matière d’inspection et de divulgation soient rédigées de manière à protéger les institutions financières contre d’éventuelles poursuites civiles et autres réclamations du fait d’avoir divulgué le dossier d’un client aux autorités de réglementation et aux SRF.

f. Généralités L’inobservation de ces exigences devrait faire l’objet de sanctions pénales, civiles ou administratives en conformité avec les principes internes fondamentaux et avec les lois internes.

La mise en vigueur de telles mesures entraînera vraisemblablement une législation. En particulier, l’exigence voulant que les institutions financières divulguent les opérations suspectes et la protection de ceux qui divulguent ces renseignements en toute bonne foi devront faire l’objet de lois qui auront priorité sur les lois assurant le caractère secret des opérations bancaires. B. Coopération interne et internationale La convention exige que les autorités administratives, de réglementation et de détection et de répression ainsi que d’autres autorités nationales chargées de déployer leurs efforts pour lutter contre le blanchiment d’argent soient en mesure de coopérer à l’interne aussi bien qu’au niveau international. Cela comporte l’échange de renseignements “dans les conditions définies par leur droit interne”(Art. 7(1)(b)). Cela doit se faire sans imposer de limites ou sans déroger (“sans préjudice “) aux exigences de l’article 18 concernant l’entraide judiciaire et de l’article 27 concernant la coopération entre les services de détection et de répression. En outre, les États doivent “s’efforcer de développer et de promouvoir la coopération mondiale, régionale, sous-régionale et bilatérale entre les autorités judiciaires, les services de détection et de répression, et les autorités de réglementation financière en vue de lutter contre le blanchiment d’argent”(Art. 7(4)).

Page 51: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 49 __________________________________________________________________

À cette fin, la Convention n’ordonne pas aux États mais leur demande d’envisager d’instituer un “service de renseignements financiers” qui recueillerait, analyserait et diffuserait, selon le cas, les renseignements concernant d’éventuelles opérations de blanchiment d’argent (Art.7(1)(b); voir aussi plus bas). Dans le cadre de leurs efforts pour développer leur capacité à fournir une coopération internationale efficace, il est demandé aux États d’envisager la mise en vigueur de mesures qui leur permettront de surveiller le mouvement transfrontalier des espèces et autres titres négociables (voir Art. 7 (2) et l’option ci-dessous). Pour que cette coopération soit le moindrement possible, il convient de renforcer les capacités internes de détection, de collecte et d’interprétation de toute l’information pertinente. En gros, la Convention propose des rôles pour trois sortes d’instances pouvant prendre part à une stratégie de lutte contre le blanchiment d’argent et que les États pourraient envisager :

• Les services de réglementation responsables de la surveillance des institutions financières comme les banques ou les compagnies d’assurances. Ces services ont les pouvoirs d’inspecter les institutions financières et de faire respecter les règlements en imposant des remèdes ou des sanctions de caractère réglementaire ou administratif;

• Les services de détection et de répression, qui mènent les enquêtes criminelles, ont les pouvoirs d’enquêter ainsi que d’arrêter et de détenir les personnes soupçonnées d’infraction, et qui jouissent de garanties judiciaires ou autres;

• Les services de renseignements financiers (SRF)41, dont les pouvoirs se limitent normalement à recevoir des déclarations d’opérations et activités suspectes, à les analyser et à diffuser des rapports aux instances chargées des poursuites (certains SRF sont dotés de pouvoirs plus étendus).

Le pouvoir de chaque instance de coopérer avec d’autres services nationaux ou avec des services analogues dans d’autres pays se trouve habituellement spécifié dans les lois régissant chacune de ces instances. Si les États disposent de telles instances, il sera peut-être nécessaire de légiférer pour amender leur mandat ainsi que la répartition des tâches entre les différents services, conformément aux principes constitutionnels ou autres et au caractère particulier du secteur de services financiers de chaque État.

Certaines de ces mesures poseront peut-être un défi aux pays dont le secteur financier ne fait pas l’objet d’une forte réglementation, et il faudra peut-être créer des lois et toute une infrastructure administrative. Il est important de noter, toutefois, que ces dispositions ne visent pas seulement le blanchiment d’argent mais aussi la corruption (Art. 7). Elle renforcent aussi la confiance envers l’infrastructure financière qui est indispensable au développement social et économique.

La coordination des efforts et la coopération internationale sont aussi essentielles au problème du blanchiment d’argent qu’aux autres infractions visées par la Convention. Au-delà des mesures d’ordre général et des méthodes comme

41 Les SRF ne sont pas exigés par la Convention. Voir plus loin.

Page 52: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

50 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

l’extradition, l’entraide judiciaire, les enquêtes conjointes, etc. (voir les chapitres sur la coopération internationale ci-dessous), la Convention cherche à renforcer cette coordination et cette coopération. a. Options qu’il convient d’envisager

Deux groupes de mesures sont décrits ici, celles qui visent à contrôler les mouvements transfrontaliers de fonds et celles qui relèvent des Services de renseignements financiers. i. Contrôle des opérations transfrontalières

Dans le cadre de leurs efforts pour développer leur capacité à fournir une coopération internationale efficace, il est demandé aux États d’envisager sérieusement l’introduction de mesures pour le contrôle des mouvements transfrontaliers d’espèces et autres instruments monétaires. L’article 7 demande aux États d’envisager sérieusement la mise en œuvre de “mesures réalisables de détection et de surveillance du mouvement transfrontalier d’espèces et de titres négociables appropriés, sous réserve de garanties permettant d’assurer une utilisation correcte des informations et sans entraver d’aucune façon la circulation des capitaux licites. Il peut notamment être fait obligation aux particuliers et aux entreprises de signaler les transferts transfrontaliers de quantités importantes d’espèces et de titres négociables appropriés”(Art. 7(2)). De manière générale, les structures basées sur la surveillance ou le contrôle auront besoin de pouvoirs judiciaires donnant aux inspecteurs ou aux enquêteurs accès aux opérations transfrontalières, notamment lorsqu’on soupçonne une activité criminelle.

ii. Services de renseignements financiers (SRF) L’article 7(1)(b) demande aux États Parties d’envisager la création d’un “Service de renseignements financiers qui fera office de centre national de collecte, d’analyse et de diffusion d’informations concernant d’éventuelles opérations de blanchiment d’argent” (SRF). Depuis les années 1990, de nombreux pays ont créé ces services dans le cadre de leurs services policiers chargés de la réglementation ou d’autres autorités. Il existe parmi ces SRF une grande variété de structures, de responsabilités, de fonctions, d’affiliations à des ministères ou d’indépendance42.

Le groupe Egmont (l’association officieuse des SRF) a défini le SRF comme étant “une agence centrale nationale chargée (et lorsque cela est permis de demander), d’analyser et de communiquer aux autorités compétentes la divulgation de renseignements financiers: (i) concernant les produits soupçonnés du crime, ou (ii) tel que requis par la loi ou le règlement interne afin de lutter contre le blanchiment d’argent.”43

42 Les Notes interprétatives indiquent "que la création d'un service de renseignement financier préconisée par cet alinéa vaut lorsqu'un tel mécanisme n'existe pas encore". 43On trouvera le document d'information au site web du Groupe Egmont : http://www1.oecd.org/fatf/Ctry-orgpages/org-egmont_en.htm . L'énoncé des objectifs des Services de renseignements financiers du Groupe Egmont (La Haie, 3 juin 2001) peut être téléchargé à partir du même site web.

Page 53: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 51 __________________________________________________________________

La Convention ne stipule pas qu’un SRF soit créé par législation, mais il pourra être nécessaire malgré tout de légiférer pour rendre obligatoire la déclaration d’opérations suspectes au SRF et pour protéger les institutions financières qui divulguent ces renseignements en toute bonne foi. Dans la pratique, la grande majorité des SRF sont créés par le biais d’une loi. S’ils souhaitent rédiger une loi à cet effet, les États voudront peut-être tenir compte des éléments suivants:

• La mention spécifique des institutions soumises à l’obligation de déclarer les opérations suspectes et la définition des renseignements devant être communiqués au SRF.

• Les lois définissant les pouvoirs en vertu desquels le SRF peut exiger l’aide des institutions en question pour donner suite à des rapports incomplets ou insatisfaisants.

• L’autorisation au SRF de diffuser l’information aux services de détection et de répression lorsqu’il possède des preuves justifiant des poursuites judiciaires, et l’autorité accordée au SRF de communiquer, dans certaines conditions, des renseignements financiers à des agences étrangères.

• La protection du caractère privé des renseignements recueillis par le SRF, donc l’imposition de limites à l’utilisation de ces renseignements et la protection du SRF par rapport à des divulgations ultérieures.

• La définition des modalités de compte-rendu de la part du SRF et ses rapports avec les autres agences gouvernementales y compris les services de détection et de répression et les services de réglementation financière.

Les pays auront peut-être déjà établi des infractions liées au blanchiment d’argent et leurs moyens de contrôle peuvent au besoin être élargis ou modifiés de manière à les aligner sur les exigences des articles 6 et 7 (blanchiment d’argent) et des articles 12 à 14 (confiscation, saisie et disposition des produits du crime). Il faut noter que les mesures prises en conformité avec les articles 6 et 7 assurent également la conformité à d’autres conventions et initiatives (par exemple la Résolution 1373 (2001) du Conseil de Sécurité, la Convention internationale pour la suppression du financement du terrorisme et les huit recommandations spéciales du GAFI concernant le financement des activités terroristes). 4. QUESTIONS OPTIONNELLES Les États souhaiteront peut-être aussi envisager d’autres questions, qui sont entièrement facultatives, et qui concernent l’aspect mental d’une infraction liée au blanchiment d’argent. . Pour les infractions établies par l’article 6, la Convention exige qu’il y ait dol (dolus) (c’est à dire que l’auteur de l’infraction savait que les biens en question étaient le produit d’un crime). Les États peuvent élargir la définition de cette infraction de manière à englober les cas où l’auteur de l’infraction croyait (même à tort) que les fonds étaient le produit d’un crime (dolus eventualis). Certains pays ont inclus ce prolongement de la définition dans leur loi44. 44 Voir, par exemple, le code criminel Canadien, article 462.31(1), “…sachant et croyant”.

Page 54: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

52 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Dans les administrations de certains territoires ou dans certaines initiatives, l’élément mental requis est le fait que la personne “savait” ou “aurait dû savoir”. Ils font aussi appel à la notion d’”ignorance intentionnelle” ou d’”aveuglement volontaire”. D’autres autorisent, mais n’exigent pas, l’incrimination de blanchiment d’argent résultant de négligence45.

Il est possible d’obtenir plus de renseignements sur les lois, les règlements et les procédures concernant le blanchiment d’argent en consultant le Programme UN /ODC (Nations Unies - Office des drogues et du crime) contre le blanchiment d’argent46 et les sources citées plus bas. 5. RENVOIS

A la Convention et aux protocoles • article 2 • article 34(3) • article 11 • articles 12-14 (confiscation, saisie et disposition des produits du crime) • article 16 (extradition) • article18 (entraide judiciaire) • article 27 (coopération entre services de détection et de répression) • article 1(2)-(3) de chaque Protocole A d’autres instruments • Convention de 1990 sur le blanchiment, la perquisition, la saisie et la

confiscation des produits du crime • Résolution1373 (2001) du Conseil de Sécurité • Convention des Nations Unies contre le trafic illicite des stupéfiants et des

substances psychotropes,1998 • Convention internationale pour la suppression du financement du terrorisme 6. EXEMPLES DE MISE EN ŒUVRE Italie

http://www.imolin.org/lawitaly.htm (en Anglais) Article 648 (Recevoir des biens volés) Sauf dans les cas de participation à l’infraction [principale], toute personne qui acquiert, reçoit ou dissimule de l’argent ou des biens qui sont le produit d’une infraction pénale, ou en tous cas qui cherche à faciliter l’acquisition, la réception ou la dissimulation des dits biens dans le but d’en retirer profit à titre personnel ou pour d’autres personnes, sera passible d’emprisonnement pendant une période de 2 à 8 ans et d’une amende allant de 1 million de LIT à 20 millions de LIT.

45 Voir règlements models l’OEA de décembre 2002; les Commentaires sur la Convention de 1988, p. 84 (3.101) ; et l’article 6(3) de la Convention de 1990 du Conseil de l’Europe. 46 Voir le site de l’Office contre la drogue et le crime de l’ONU (ODC):

http://www.undcp.org/money_laundering.html

Page 55: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 53 __________________________________________________________________

La peine sera un emprisonnement de 6 ans ou moins et l’amende un maximum de 1 million de LIT si l’infraction n’est pas grave. Les dispositions du présent article s’appliqueront également lorsque la personne qui commet l’infraction dont l’argent ou les biens en question sont les produits n’est pas passible de poursuites ou ne peut faire l’objet d’une peine, ou lorsque l’infraction en question ne peut faire l’objet de poursuites. Article 648bis (Blanchiment d’argent) Sauf dans les cas de participation à l’infraction [principale], toute personne substituant ou transférant de l’argent, des biens ou des avoirs obtenus par le biais d’infractions pénales, ou toute personne cherchant à dissimuler le fait que lesdits argents, biens ou avoirs sont le produit de telles infractions, sera passible d’emprisonnement pour une période de 4 à 12 ans et d’une amende allant de 2 millions à 30 millions de LIT. La peine sera plus importante si l’infraction a été commise pendant l’exercice d’une activité professionnelle. La peine sera moins grande si l’argent, les biens ou les avoirs sont le produit d’une infraction pénale pour laquelle la peine encourue est l’emprisonnement pour une période de 5 ans ou moins. Le dernier paragraphe de l’article 648 s’appliquera. Article 648ter (Utilisation d’argent, de biens ou d’avoirs d’origine illégale) Sauf dans les cas de participation à l’infraction [principale] et dans les cas prévus à l’article 648 et 648 bis, toute personne utilisant pour des activités économiques ou financières de l’argent, des biens ou des avoirs obtenus au moyen d’une infraction pénale sera passible d’emprisonnement pour une période de 4 à 12 ans et d’une amende allant de 2 millions à 30 millions de LIT. La peine sera augmentée lorsque l’infraction a été commise lors de l’exercice d’une activité professionnelle. La peine sera diminuée conformément au paragraphe 2 de l’article 648. Le dernier paragraphe de l’article 648 s’appliquera.

Roumanie http://www.imolin.org/lawroman.htm (en Anglais) Suède http://www.imolin.org/lawswede.htm (en Anglais) Japon http://www.imolin.org/lawsjapan.htm (en Anglais) Fédération Russe http://www.imolin.org/lawruss.htm (en Anglais)

Page 56: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

54 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Chine http://www.imolin.org/lawchina.htm (en Anglais) EAU

http://www.emirates-banking.com/regulate.htm (en Anglais)

EU http://fincen.gov/ (en Anglais)

Canada Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, S.C. 2000, ch. 17. http://lois.justice.gc.ca/fr/P-24.501/85121.html

Pologne Voir les articles 106, 107 et 108 du Banking Act du 29 août 1997

http://www.gbld.org/xml/Poland/Poland_BA.doc and http://www.gbld.org/topicresults.aspx?country=29&topic=16 Brésil

CHAPITRE I - CRIMES DE BLANCHIMENT D’ARGENT OU DE DISSIMULATION DES AVOIRS, DES DROITS ET DES OBJETS DE VALEUR

Article 1 Dissimuler ou déguiser la vraie nature, l’origine, l’emplacement, la disposition, le mouvement ou la possession d’avoirs, de droits et d’objets de valeur qui proviennent directement ou indirectement des crimes suivants:

I. Le trafic illicite de stupéfiants et drogues analogues.

II. Le terrorisme;

III. La contrebande ou le trafic d’armes, de munitions ou de matériel utilisé pour les produire;

IV. Extorsion au moyen de l’abduction;

V. Des actes dirigés contre les pouvoirs publics, y compris des demandes directes ou indirectes de profits pour soi-même ou d’autres comme condition ou comme prix à payer en vue de la commission ou de l’omission d’un acte administratif quelconque ;

VI. Des actes dirigés contre le système financier brésilien ;

VII. Des actes commis par une organisation criminelle. Peine : incarcération (1) pour une période de 3 (trois) à 10 (dix) ans et amende. Paragraphe 1 La même peine s’appliquera à toute personne qui, afin de dissimuler ou de déguiser l’utilisation d’avoirs, de droits ou d’objets de valeur résultant de crimes énoncés dans le présent article:

I. les convertit en avoirs licites;

II. acquiert, reçoit, échange, troque, donne ou reçoit en garantie, met en sûreté, entrepose, transporte ou transfère de tels avoirs, droits et objets de valeur ;

III. importe ou exporte des biens à des prix qui ne correspondent pas à leur juste valeur. Paragraphe 2 La même peine s’applique aussi à toute personne qui:

Page 57: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 55 __________________________________________________________________

I. Par le moyen d’activités économiques ou financières utilise n’importe quels avoirs, droits et objets de valeur dont il ou elle sait qu‘ils proviennent des crimes mentionnés dans le présent article ; II. Prend part en connaissance de cause à un groupe, une association ou un bureau dont la raison d’être première ou secondaire est la commission de crimes qui font l’objet de la présente loi. I. Paragraphe 3 Les tentatives de commettre l’un ou l’autre des crimes mentionnés dans la présente loi sont passibles de sanctions conformément aux dispositions de l’article 14, unique paragraphe, du Code pénal. Paragraphe 4 La peine sera augmentée des deux tiers dans chacun des cas envisagés aux points I à VI du présent article lorsque le crime se répète régulièrement ou est commis par une organisation criminelle. Paragraphe 5 Dans l’éventualité où un inculpé ou son (sa) complice consent librement à coopérer avec les autorités en leur offrant de l’information qui mène à la détection d’une infraction et à l’identification de ceux qui en sont responsables, ou à la découverte d’avoirs, de droits et d’objets de valeur qui faisaient l’objet de l’infraction, la peine peut être réduite d’un ou de deux tiers. L’inculpé peut aussi recevoir l’autorisation de purger sa peine dans un système carcéral ouvert(2). Le juge peut aussi décider s’il faut infliger la peine ou la remplacer par une restriction des droits.

Lettonie

Loi sur la prévention du blanchiment des produits d’une activité criminelle (La loi a pris effet le 1er juin 1998) Article I Généralités

Paragraphe 1 Les termes suivants sont utilisés dans la présente loi : 1) opération financière (ou, plus loin, opération) :

a) recevoir des dépôts et autres fonds remboursables; b) prêts; c) transmettre de l’argent; d) émettre et offrir des instruments de paiement autres que des espèces; e) échanger des instruments des marchés monétaires (chèques, billets, certificats de placement) change de devises étrangères, contrats financiers et valeurs mobilières pour son propre compte ou celui de clients; f) opérations de fiducie; g) mise en sûreté et administration de titres, y compris administration de fonds d’investissement collectifs et de fonds de pension; h) émission de garanties et autres promesses écrites en vertu de quoi quelqu’un assume la responsabilité de créancier pour la dette d’un tiers; i) mise en sûreté de biens de valeur; j) émission de parts et services connexes; k) conseiller les clients au sujet des services financiers; l) servir d’intermédiaire sur le marché monétaire; m) offrir des renseignements concernant le règlement des dettes des clients;

Page 58: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

56 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

n) procurer des assurances; o) créer et maintenir une entreprise de loterie et de jeu; p) d’autres opérations analogues à celles qui sont décrites plus haut.

2) institution financière: une entreprise (une entreprise risquée) enregistrée auprès du Registraire des entreprises de la Lettonie, une succursale ou un bureau de représentation créé pour exécuter une ou plusieurs des opérations financières mentionnées dans la présente loi sauf la réception de placements et autres fonds remboursables, ou pour acquérir des fonds communs dans d’autres entreprises (entreprises à risque). Aux fins de la présente loi, les personnes physiques ou juridiques ou leurs associations dont l’activité financière consiste à mener, conseiller ou certifier des opérations financières seront aussi considérées comme étant des institutions financières. 3) ressources financières: espèces et autres instruments de paie, métaux précieux et valeurs mobilières telles que définies dans la loi de la République de Lettonie “sur les valeurs mobilières”. 4) client – une personne juridique ou physique ou leurs associations engagées dans au moins une opération financière auprès d’une institution financière. 5) institution de crédit – une banque, une association d’épargne et de prêt ou une succursale d’une banque étrangère. 6) liste d’indicateurs d’opérations inhabituelles – c’est une liste d’indicateurs approuvée par le Conseil des Ministres qui permet de désigner une opération comme étant un blanchiment de produits dérivés d’une activité criminelle (blanchiment d’argent) ou une tentative de blanchiment d’argent.

Paragraphe 2 (1) La présente loi détermine les responsabilités et les droits des institutions financières, des institutions de crédit et leur autorité en matière de contrôle et de surveillance visant à empêcher le blanchiment de produits dérivés d’une activité criminelle. La loi stipule aussi une procédure pour la création d’un Office pour la prévention du blanchiment de produits dérivés d’activités criminelles (ci-après l’Office de surveillance) et d’un Conseil consultatif, ainsi que leurs responsabilités et leurs droits. (2) La présente loi s’appliquera aussi à d’autres personnes juridiques ou naturelles ou à leurs associations qui dans le cadre de leurs activités professionnelles mènent, conseillent et certifient des opérations financières.

Paragraphe 3 La présente loi a pour but d’éliminer la possibilité d’utiliser le système financier letton aux fins de blanchiment de produits dérivés d’activités criminelles.

Paragraphe 4 Les produits dérivés d’activités criminelles sont des ressources financières et autres biens découlant des activités criminelles suivantes: 1) la distribution illégale de substances toxiques, très efficaces, narcotiques ou psychotropes; 2) le gangstérisme (activités criminelles liées à des gangs); 3) la contrebande; 4) le transport transfrontalier illégal de personnes; 5) la fabrication ou la distribution d’argent ou de titres de contrefaçon, ou la manipulation illégale de valeurs mobilières ou de documents d’espèces; 6) la saisie d’otages, les abductions; 7) l’empiétement sur des droits d’auteur et droits avoisinants;

Page 59: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 57 __________________________________________________________________

8) l’infraction sur la propriété, commise à grande échelle ou par un groupe organisé; 9) une entreprise non autorisée ou non enregistrée, une faillite imprudente, une fraude aux dépens d’une institution de crédit; 10) prendre ou donner des pots de vin ou servir d’intermédiaire à la corruption; 11) enfreindre aux règlements concernant l’importation, la fabrication ou la diffusion de matériel pornographique; 12) l’acquisition illégale, l’entreposage, l’utilisation, le transfert ou la destruction de matériaux radioactifs; 13) la fabrication ou la vente illégale (non autorisée) de dispositifs spéciaux, d’armes, de munitions et d’explosifs; 14) l’excision illégale et le commerce illégal d’organes internes et de tissus prélevés sur un corps humain vivant ou mort.

Paragraphe 5 On considère qu’il y a blanchiment de produits dérivés d’activités criminelles lorsque les activités suivantes sont commises dans l’intention de dissimuler ou de déguiser la provenance criminelle de ressources financières ou d’autres biens : 1) conversion de ressources financières ou d’autres biens en objets de valeur différents, changement de leur emplacement ou de leur titre; 2) dissimulation ou déguisement de la vraie nature , de l’origine, de l’emplacement, du placement, du mouvement ou du titre de ressources financières ou d’autres biens; 3) acquisition, possession ou utilisation de ressources financières ou d’autres biens en ayant pleine connaissance, au moment de leur acquisition, du fait qu’ils découlent d’une activité criminelle; 4) aide apportée à la commission des actes visés par les sous paragraphes 1 à 3 du présent paragraphe. Article II Identification du client

Paragraphe 6 Aucune institution financière ou de crédit n’aura le droit d’ouvrir un compte ou d’accepter d’assurer la garde de ressources financières avant d’avoir obtenu les renseignements ci-après concernant le client : 1) s’il s’agit d’un résident: a) dans le cas d’une personne juridique, les nom, domicile, numéro d’enregistrement et lieu d’enregistrement; b) dans le cas d’une personne physique, ses nom, prénoms, numéro d’identité; 2) s’il s’agit d’un non-résident, les données figurant sur le document d’identification délivré par le pays étranger d’où il provient :

a) dans le cas d’une personne juridique, le nom, domicile, numéro d’enregistrement et lieu d’enregistrement; b) dans le cas d’une personne physique, son nom, prénom, date de délivrance et numéro du document d’identification, ainsi que le nom de l’instance ayant délivré ce document.

Paragraphe 7 (1) Une institution financière ou de crédit identifiera également le client selon la procédure du paragraphe 6 dans le cas d’une autre opération financière si le volume d’une simple opération ou celui de plusieurs opérations évidemment liées entre elles dépasse 10 000 lats et si le client n’a pas été identifié lorsqu’il a ouvert le compte ou lorsqu’on a accepté d’assurer la garde de ses ressources financières.

Page 60: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

58 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

(2) Si le volume de l’opération n’est pas connu au moment de son exécution, le client devra être identifié dès que le volume aura été évalué, et s’il dépasse 10 000 lats. Quel que soit le volume de l’opération, une institution financière ou de crédit identifiera le client chaque fois qu’une opération est caractérisée par au moins l’un des indicateurs d’opérations inhabituelles ou lorsque des circonstances suspectes semblent indiquer que l’opération pourrait constituer du blanchiment d’argent ou une tentative de blanchiment.

Paragraphe 8 Lorsqu’une institution financière ou de crédit se rend compte ou soupçonne que des opérations comme celles mentionnées aux paragraphes 6 et 7 sont effectuées pour le compte d’un tiers, elle prendra des mesures raisonnables en vue d’obtenir l’identification de la personne en question.

Paragraphe 9 Les spécifications relatives à l’identification qui sont prescrites dans la présente loi ne s’appliqueront pas dans les cas suivants: 1) les opérations financières pour lesquelles le client d’une institution financière ou de crédit est l’un des suivants :

a) une institution financière ou de crédit qui a obtenu un permis de la République de Lettonie; b) une institution financière ou de crédit qui a obtenu un permis dans un pays figurant sur la liste des pays spécifiés par l’Office de surveillance. La liste comprend les pays où sont en vigueur des lois sur le blanchiment d’argent conformes à la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes ou à la Directive 91 308 Eec du Conseil de l’Europe sur la Prévention de l’utilisation d’un système financier dans le but de blanchir de l’argent.

2) un membre enregistré d’une bourse qui est membre de la Fédération internationale des Bourses de Valeurs et qui est établie dans un État membre de l’UE ou d’un autre pays spécifié par les Services de surveillance; 3) des compagnies d’assurance (assureurs) chez qui la prime régulière du client au cours d’une année ne dépasse pas 500 lats ou lorsqu’une prime unique (payée en une seule fois) ne dépasse pas 1 500 lats quel que soit le montant de l’assurance;

Paragraphe 10 (1) Lorsqu’elle identifie un client selon la procédure énoncée au paragraphe 6, une institution financière ou de crédit conservera des exemplaires des documents d’identification pendant 5 ans au moins après que sa relation avec le client ait pris fin. (2) Lorsqu’elle identifie un client selon la procédure énoncée aux paragraphes 7 et 8, une institution financière ou de crédit conservera des exemplaires des documents d’identification et des dossiers d’une opération pendant 5 ans au moins après la date de l’opération. Cette condition s’applique aussi aux documents d’identité du tiers mentionné au paragraphe 8 si ces documents ont été obtenus. Article III Déclaration d’opérations financières inhabituelles et suspectes

Paragraphe 1 (1) Les institutions financières et de crédit seront dans l’obligation de: 1) déclarer sans délai à l’Office de surveillance toute opération financière caractérisée par au moins un des indicateurs d’opérations inhabituelles. La liste des indicateurs d’opérations inhabituelles est établie par l’Office de

Page 61: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 59 __________________________________________________________________

surveillance en tenant compte des propositions du Conseil consultatif, et elle est approuvée par le Conseil des Ministres; 2) sur demande par écrit de l’Office de surveillance, leur procurer promptement tout renseignement supplémentaire dont cet Office peut avoir besoin pour pouvoir fonctionner convenablement en application de la loi. Les dirigeants et les employés des institutions financières et de crédit seront aussi dans l’obligation de déclarer à l’Office de surveillance tout élément factuel dont ils ont pris connaissance et qui ne figure pas sur la liste des indicateurs d’opérations inhabituelles mais que, du fait d’autres circonstances, ils soupçonnent d’être lié à un blanchiment d’argent ou à une tentative de blanchiment.

Paragraphe 12 Le rapport communiqué à l’Office de surveillance par une institution financière ou de crédit contiendra, si possible, les renseignements suivants : 1) l’identification du client; 2) une copie du document d’identification du client; 3) une description de l’opération menée ou proposée, y compris la destination de l’argent et le volume de l’opération, et le lieu et la date de l’opération ou de sa proposition; 4) des preuves montrant que l’opération est suspecte ou peut être considérée comme inhabituelle selon la liste des indicateurs d’opérations inhabituelles;

Paragraphe 13 L’information divulguée en conformité aux spécifications de la présente loi sera utilisée par l’Office de surveillance aux seules fins d’exercer ses fonctions telles que décrites dans la présente loi. Tout employé de l’Office de surveillance qui utilise ces renseignements à des fins autres que celles qui sont décrites plus haut ou qui les divulgue à des personnes non autorisées fera l’objet de poursuites judiciaires pénales comme il est stipulé dans la loi.

Paragraphe 14 Ni une institution financière ou de crédit, ni ses dirigeants ni ses employés, ne sont habilités à informer le client ou un tiers du fait que son opération (ou ses opérations) a (ont) fait l’objet d’une déclaration à l’Office de surveillance.

Paragraphe 15 Une personne qui aura déclaré un acte de blanchiment d’argent à l’Office de surveillance ne fera pas l’objet d’une enquête préliminaire.

Paragraphe 16 Lorsqu’une déclaration envoyée à l’Office de surveillance par une institution financière ou de crédit (ou par un des ses dirigeants ou de ses employés) est en conformité avec la présente loi, l’institution financière ou de crédit ne se trouvera pas en position de responsabilité juridique ou matérielle, que le blanchiment d’argent ait été prouvé comme fait ou non lors de l’enquête préliminaire ou au tribunal, et quels que soient les termes du contrat signé entre l’institution financière ou de crédit et un client.

Article IV Éviter les opérations financières suspectes

Paragraphe 17 Les institutions financières et de crédit éviteront de se livrer à toute opération qu’elles soupçonnent d’être liée à du blanchiment d’argent ou à une tentative de blanchiment.

Paragraphe 18

Page 62: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

60 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Lorsqu’une institution financière ou de crédit ne peut éviter de procéder à une opération suspecte ou lorsque le fait de l’éviter risque de renseigner les personnes impliquées dans du blanchiment d’argent et de les aider à échapper aux conséquences judiciaires de leurs activités, l’institution aura le droit de mener ladite opération, qu’elle déclarera ensuite à l’Office de surveillance conformément à la procédure faisant l’objet du paragraphe 12 de la présente loi.

Paragraphe 19 Lorsqu’une institution financière ou de crédit a évité de procéder à une opération décrite au paragraphe 17 de la présente loi, ce fait ou le fait d’avoir retardé l’opération ne mettra pas l’institution (ou ses dirigeants et ses employés) en position de responsabilité juridique ou matérielle, quelles que soient les conséquences découlant de l’utilisation de l’information divulguée. Article V Procédures internes de contrôle des institutions financières et de crédit.

Paragraphe 20 (1) Afin de se conformer aux exigences de la présente loi, les institutions financières et de crédit institueront des procédures internes de contrôle et veilleront à leur mise en œuvre. (2) Les institutions financières et de crédit veilleront à ce que leurs employés connaissent les exigences de la présente loi. Les employés seront formés à déceler les indicateurs d’opérations financières inhabituelles et suspectes et agiront conformément aux procédures internes. (3) Les institutions financières et de crédit seront dans l’obligation de désigner une unité ou une personne (ou des personnes) qui sera (seront) directement responsable(s) du respect de la présente loi par l’institution financière ou de crédit, et de prendre contact avec l’Office de surveillance. Le nom de ladite personne (ou desdites personnes) sera communiqué à l’Office de surveillance et aux instances chargées de la surveillance et du contrôle de l’institution.

Paragraphe 21 (1) Ni les institutions financières et de crédit, leurs instances de surveillance et de contrôle, ni l’Office de surveillance ni leurs dirigeants et employés ne seront habilités à divulguer à des tiers des renseignements concernant les personnes ou les unités qui ont été désignées pour rester en contact avec l’Office de surveillance. (2) L’Office de surveillance ne sera pas autorisé à divulguer des renseignements concernant les personnes qui lui ont déclaré des opérations financières inhabituelles ou suspectes. Cette restriction ne s’applique pas aux situations qui font l’objet du paragraphe 33 de la présente loi. Article VI Responsabilités des instances de surveillance et de contrôle des institutions financières et de crédit

Paragraphe 22 Les instances de surveillance et de contrôle des institutions financières et de crédit seront dans l’obligation d’aviser l’Office de surveillance de tout fait dont ils auront pris connaissance lors d’examens et d’inspections, si ce fait correspond aux indicateurs d’opérations inhabituelles et n’a pas été déclaré à l’Office de surveillance par l’institution financière ou de crédit.

Paragraphe 23

Page 63: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 61 __________________________________________________________________

Les instances de surveillance et de contrôle des institutions financières et de crédit seront habilitées à aviser l’Office de surveillance de tout fait dont ils auront pris connaissance lors d’examens et d’inspections même si ce fait ne correspond pas aux indicateurs d’opérations inhabituelles, si par ailleurs il peut être soupçonné d’un lien avec du blanchiment d’argent ou une tentative de blanchiment.

Paragraphe 24 Ni les instances de surveillance et de contrôle ni leurs employés ne seront autorisés à informer les clients d’une institution financière ou de crédit ou des tiers du fait que l’Office de surveillance a reçu une déclaration selon la procédure stipulée aux paragraphes 11, 12,22 et 23 de la présente loi.

Paragraphe 25 Une déclaration à l’Office de surveillance conformément à la procédure stipulée dans le présent article ne constituera pas une divulgation d’information confidentielle et donc ne mettra pas les instances de surveillance et de contrôle (ou leurs employés) en position de responsabilité juridique ou matérielle, que le blanchiment d’argent ait été prouvé comme fait ou non lors de l’enquête préliminaire ou devant le tribunal.

Paragraphe 26 Sur demande de la part de l’Office de surveillance, les instances de surveillance et de contrôle des institutions financières et de crédit seront dans l’obligation de prêter toute aide méthodologique dont l’Office pourrait avoir besoin afin de pouvoir fonctionner conformément à la présente loi. Article VII L’Office pour la prévention du blanchiment des produits dérivés d’activités criminelles (l’Office de surveillance)

Paragraphe 27 L’Office pour la prévention du blanchiment des produits dérivés d’activités criminelles (l’Office de surveillance) est une agence d’État créée spécialement et qui, en conformité avec la présente loi, exerce un contrôle des opérations financières inhabituelles et suspectes, acquiert, reçoit, enregistre, traite, résume, emmagasine, analyse l’information et la communique aux organes chargés de l’enquête judiciaire préliminaire et au tribunal selon le cas, en vue de prévenir, de détecter et d’enquêter ou de porter devant le tribunal un acte de blanchiment d’argent ou une tentative de blanchiment, ou toute autre activité criminelle liée au blanchiment d’argent.

Paragraphe 28 (1) L’Office de surveillance est une personne juridique sous la tutelle du Bureau du Procureur de la République de Lettonie. Cette tutelle est exercée directement par le Procureur général et par les procureurs avec autorisation spéciale. Le règlement intérieur de l’Office est approuvé par le Conseil du Procureur général. (2) L’Office de surveillances est financé à partir du budget de l’État. La structure organisationnelle et la taille de l’Office sont déterminées par le Procureur général en tenant compte des fonds qui lui sont alloués. (3) Le Directeur de l’Office de surveillance jouit d’un mandat de quatre ans. Il est nommé ou renvoyé par le Procureur général. Le Directeur ne peut être renvoyé que pour avoir commis une infraction en violation directe à la loi; pour avoir accompli sa tâche de façon négligente ou d’une manière qui a

Page 64: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

62 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

entraîné de graves conséquences; et pour conduite honteuse incompatible avec sa position. (4) Les employés de l’Office de surveillance sont embauchés ou renvoyés par le Directeur de l’office. Les salaires du personnel sont déterminés par le Conseil des Ministres. (5) Le Directeur et les employés de l’Office de surveillance sont tenus de se conformer aux exigences de la “loi sur les secrets d’État” lorsqu’il s’agit d’obtenir des permissions spéciales pour avoir accès à des renseignements de caractère hautement confidentiel. Leur respect de ces exigences est examiné et vérifié par le Bureau de la Défense constitutionnelle.

Paragraphe 29 L’Office de surveillance assume les responsabilités suivantes: 1) recevoir, rassembler, emmagasiner et analyser les rapports des institutions financières et de crédit et toute autre information afin de déterminer si cette dernière peut constituer une preuve de blanchiment d’argent ou de tentative de blanchiment. 2) procurer aux instances qui mènent l’enquête préliminaire et au tribunal tout renseignement pertinent en vue de prévenir, détecter, enquêter ou poursuivre devant le tribunal le fait ou la tentative de blanchiment d’argent ou tout autre acte criminel lié au blanchiment d’argent; 3) analyser la qualité de l’information reçue et l’efficacité de son utilisation, et communiquer les résultats aux institutions financières et de crédit; 4) procéder à une analyse et à une étude des moyens utilisés pour le blanchiment d’argent ou la tentative de blanchiment et améliorer les méthodes visant à prévenir et à détecter de telles activités; 5) conformément à la procédure énoncée dans la présente loi, coopérer avec les institutions internationales engagées dans la lutte contre le blanchiment d’argent et les tentatives de blanchiment.

Paragraphe 30 L’Office de surveillance prendra les mesures administratives, techniques et organisationnelles qui s’imposent pour garantir le caractère confidentiel de l’information et pour empêcher tout accès non autorisé à l’information ainsi que toute tentative de la manipuler, de la diffuser ou de la détruire. La procédure relative à l’enregistrement, à l’entreposage et à la destruction des renseignements communiqués à l’Office de surveillance sera déterminée par le Conseil du Procureur général en tenant compte des recommandations du Conseil consultatif. Les renseignements concernant les opérations financières seront conservés par l’Office de surveillance pendant 5 ans au moins.

Paragraphe 31 Toutes les institutions d’État seront dans l’obligation de fournir des renseignements à l’Office de surveillance selon la procédure établie par le Conseil des Ministres et de manière à permettre à l’Office d’accomplir sa tâche. Article VIII Coopération entre l’Office de surveillance et les institutions d’État

Paragraphe 32 De sa propre initiative, l’Office de surveillance peut procurer des renseignements aux instances qui mènent l’enquête judiciaire préliminaire ou au tribunal, si de tels renseignements portent raisonnablement à supposer que la personne en question s’est livrée à du blanchiment d’argent afin de déguiser ou de dissimuler l’acquisition illégale de ressources financières ou d’autres biens.

Page 65: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 63 __________________________________________________________________

Paragraphe 33 I) lorsque, avec l’assentiment du Procureur général ou des procureurs dotés de pouvoirs spéciaux, les personnes autorisées à faire du travail d’enquête sur le terrain, les instances chargées de l’enquête préliminaire, ou le tribunal ont demandé des renseignements, l’Office de surveillance les leur fournira conformément aux dispositions de la présente loi dans les cas où l’activité pénale a entraîné au moins un des résultats suivants : 1) une poursuite criminelle a été engagée en temps voulu selon les instructions du Code pénal de la République de Lettonie; ou 2) le travail d’enquête sur le terrain a été amorcé en temps voulu selon les instructions du paragraphe 22 de la “loi sur le travail d’enquête sur le terrain” concernant les activités criminelles décrites au paragraphe 4 de la présente loi.

Paragraphe 34 Sur une demande de l’Office du Revenu à laquelle le Procureur général ou les procureurs dotés de pouvoirs spéciaux ont donné leur assentiment, l’Office de surveillance fournira les renseignements qui sont à sa disposition et qui sont requis pour l’examen des déclarations du revenu des fonctionnaires, selon les dispositions de la “Loi sur la prévention de la corruption” et dans les cas où l’on peut raisonnablement soupçonner que la personne a fourni de faux renseignements concernant ses biens ou son revenu.

Paragraphe 35 (1) La validité de la demande de renseignements sera la responsabilité de la personne qui la dépose et du procureur qui autorise la demande. (2) L’information fournie par l’Office de surveillance cesse d’être confidentielle lorsqu’une poursuite criminelle est engagée contre la personne en question. (3) Dans les cas spécifiés aux paragraphes 32 à 34 de la présente loi, l’Office de surveillance remettra toute la documentation au Procureur général ou aux procureurs dotés de pouvoirs spéciaux afin qu’ils les transmettent aux instances autorisées.

Paragraphe 36 (1) L’Office de surveillance ne sera habilité à utiliser les renseignements mis à sa disposition que dans le but énoncé dans la procédure établie par la présente loi et en conformité avec ladite procédure. (2) Les renseignements procurés par l’Office de surveillance au Procureur général et aux procureurs dotés de pouvoirs spéciaux et qui ont une portée sur la fonction de tutelle ne seront pas transmis aux instances chargées de l’enquête ni au tribunal, et ne seront pas utilisés aux fins de ces derniers. (3) Les institutions d’État spécifiées dans la présente loi qui ont obtenu de l’information de l’Office de surveillance ne seront autorisées à l’utiliser que dans le but pour lequel cette information a été demandée. Il est interdit de reproduire cette information ou de la placer dans des bases de données. Article IX Le Conseil consultatif de l’Office de surveillance

Paragraphe 37 Pour faciliter le travail de l’Office de surveillance et pour coordonner sa coopération avec les instances de détection et de répression, un Conseil consultatif sera créé et chargé des tâches suivantes :

Page 66: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

64 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

1) coordonner la coopération entre les institutions d’État et les institutions financières et de crédit dans le but de mettre à effet les dispositions de la présente loi; 2) élaborer des recommandations à l’Office de surveillance concernant l’exercice de ses fonctions telles que stipulées dans la présente loi; 3) rédiger et présenter à l’Office de surveillance des propositions visant à amender ou à compléter la liste des opérations inhabituelles; 4) sur demande du Procureur général ou de sa propre initiative, renseigner ce dernier sur l’efficacité du travail de l’Office de surveillance et offrir des propositions visant à améliorer son rendement.

Paragraphe 38 (1)Le Conseil consultatif se composera d’un représentant de chacune des instances suivantes:

1) le Ministre des Finances, 2) le Ministre de l’Intérieur, 3) le Ministre de la Justice, 4) la Banque de Lettonie, 5) La Commission du Marché des valeurs mobilières, 6) l’Association des banques commerciales, 7) l’Association des assureurs, 8) la Cour suprême.

(2) Les réunions du Conseil consultatif seront présidées par le Procureur général. (3) Le Directeur de l’Office de surveillance et des experts seront invités à participer aux réunions du Conseil consultatif. (4) Le travail de secrétariat du Conseil consultatif sera fourni par l’Office de surveillance. Article X Échange international de l’information

Paragraphe 39 (1) L’Office de surveillance sera autorisé, de sa propre initiative ou sur demande, à échanger librement l’information avec les instances étrangères autorisées dont les responsabilités sont analogues à celles que définit le paragraphe 27 de la présente loi, et sous réserve des conditions suivantes :

1) le caractère confidentiel des données sera garanti et les données ne seront utilisées qu’à des fins mutuellement consenties; 2) il sera garanti que l’information sera utilisée pour prévenir et détecter uniquement les types d’activités criminelles spécifiés au paragraphe 4 de la présente loi.

(2) l’information dont dispose l’Office de surveillance sera procurée aux instances étrangères d’enquête et aux tribunaux étrangers en temps voulu comme le prescrivent les ententes internationales de coopération en matière de causes criminelles, par le biais des institutions d’État de la République de Lettonie spécifiées dans lesdites ententes, et seulement à l’égard des infractions qui font l’objet du paragraphe 4 de la présente loi et qui sont passibles de poursuites pénales dans le cadre du Droit letton.

7. AUTRES INFORMATIONS

Les Quarante Recommandations du GAFI http://www.fatf-gafi.org/40Recs_fr.htm et la proposition de Révision des quarante recommandations http://www.fatf-gafi.org/40RecsReview_fr.htm

Page 67: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination du blanchiment du produit du crime - 65 __________________________________________________________________

Organisation des Etats Américains (OEA) - Commission interaméricaine de

lutte contre l’abus des drogues, Règlements modèles concernant les infractions liées au trafic illicite de stupéfiants et infractions connexes. En Anglais : http://www.oea.org/default_fr.htm.

OEA, le “Manual de Apoyo Para la Tipificación del Delito de Lavado” (en espagnol).

La Convention du Conseil de l’Europe sur le blanchiment, la perquisition, la

saisie et la confiscation des produits du crime (en vigueur depuis 1993). Elle exige que les États confisquent les moyens instrumentaux et les produits ou, ce qui est important, une valeur correspondant à celle des produits du crime.

La Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de

substances psychotropes, 1988. Une loi modèle des Nations Unies qui offre un outil législatif conçu pour

faciliter la rédaction de dispositions législatives spécialement adaptées par des pays qui souhaitent posséder une loi pour lutter contre le blanchiment d’argent ou moderniser leurs lois à cet égard. La loi modèle incorpore les dispositions les plus pertinentes des lois nationales et les modifie, les renforce ou les complète à la lumière de ce qui se pratique dans les États en matière de lutte contre le blanchiment. Elle propose aussi des dispositions novatrices visant à améliorer l’efficacité des mesures préventives et punitives à l’égard du blanchiment d’argent et offre aux États des mécanismes juridiques appropriés concernant la coopération internationale qui sont de grande importance stratégique et pratique. (http://www.imolin.org/ml99fre.htm).

La loi modèle des Nations Unies sur le blanchiment, la confiscation et la

coopération internationale en rapport avec les produits du crime (pour les systèmes de droit civil) http://www.undcp.org/money_laundering.html. Voir aussi le répertoire de législations http://www.undcp.org/odccp/legislation.html

La loi modèle du Commonwealth pour l’interdiction du blanchiment d’argent http://www.apgml.org/Index_files/Commonwealth_Model Law.pdf

Page 68: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

66 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

CHAPITRE 4

Incrimination et mesures contre la corruption

Article 8

Incrimination de la corruption

1. Chaque État Partie adopte les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d'infraction pénale, lorsque les actes ont été commis intentionnellement:

a) Au fait de promettre, d'offrir ou d'accorder à un agent public, directement ou indirectement, un avantage indu, pour lui-même ou pour une autre personne ou entité, afin qu'il accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte dans l'exercice de ses fonctions officielles;

b) Au fait pour un agent public de solliciter ou d'accepter, directement ou indirectement, un avantage indu pour lui-même ou pour une autre personne ou entité, afin d'accomplir ou de s'abstenir d'accomplir un acte dans l'exercice de ses fonctions officielles.

2. Chaque État Partie envisage d'adopter les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d'infraction pénale aux actes visés au paragraphe 1 du présent article impliquant un agent public étranger ou un fonctionnaire international. De même, chaque État Partie envisage de conférer le caractère d'infraction pénale à d'autres formes de corruption.

3. Chaque État Partie adopte également les mesures nécessaires pour conférer le caractère d'infraction pénale au fait de se rendre complice d'une infraction établie conformément au présent article.

4. Aux fins du paragraphe 1 du présent article et de l'article 9 de la présente Convention, le terme "agent public" désigne un agent public ou une personne assurant un service public, tel que ce terme est défini dans le droit interne et appliqué dans le droit pénal de l'État Partie où la personne en question exerce cette fonction.

Article 9

Mesures contre la corruption

1. Outre les mesures énoncées à l'article 8 de la présente Convention, chaque État Partie, selon qu'il convient et conformément à son système juridique, adopte des mesures efficaces d'ordre législatif, administratif ou autre pour promouvoir l'intégrité et prévenir, détecter et punir la corruption des agents publics.

2. Chaque État Partie prend des mesures pour s'assurer que ses autorités agissent efficacement en matière de prévention, de détection et de répression de la corruption des agents publics, y compris en leur donnant une indépendance suffisante pour empêcher toute influence inappropriée sur leurs actions.

1. INTRODUCTION Les groupes criminels organisés qui cherchent à s’enrichir et à obtenir d’autres gains matériels par des moyens illicites ont régulièrement recours à la corruption

Page 69: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination et mesures contre la corruption - 67 __________________________________________________________________

pour influencer les gouvernements et les politiques de détection et de répression. Leur objectif principal est de réduire les coûts de leur entreprise illégale. La neutralisation des pratiques de contrôle est un moyen efficace pour parvenir à ces fins, et les groupes criminels y ont recours pour tenter de se protéger et de détourner l’attention des autorités vers leurs concurrents. Les effets de la corruption dépassent de loin la simple facilitation de crimes graves. Du fait que des agents publics se compromettent et agissent à l’encontre du bien public qu’ils sont censés promouvoir, la pratique de la corruption est fondamentalement contraire aux principes démocratiques et éthiques et démoralise le public lorsqu’il en prend connaissance. Lorsque la corruption atteint les niveaux élevés du gouvernement, elle fausse les relations entre États et mine la qualité de vie des populations car elle entrave le progrès économique et social des sociétés et enfreint aux droits les plus fondamentaux de la personne. Si les conséquences politiques et économiques sont nombreuses, il y en a d’autres qui rejoignent la lutte contre le crime transnational grave. D’un côté la corruption alimente la demande en marchés illicites comme l’immigration illicite, le trafic des personnes et des armes à feu (qui font l’objet des Protocoles). D’un autre côté, les agents officiels corrompus peuvent fort bien faire obstacle à la justice (Art.23), intimider des témoins, des victimes ou par d’autres manières faire obstacle aux processus de coopération internationale que la présente Convention cherche à promouvoir (Art. 24 à 26), notamment en refusant extrader des criminels transnationaux graves (Art.15). Aucun pays n’est resté à l’abri des pratiques corrompues, à un niveau ou à un autre. La communauté internationale et le grand public dans toutes les sociétés exigent constamment plus de transparence et de responsabilité de la part de ceux qui occupent des postes officiels. C’est pourquoi depuis quelques années de nombreuses initiatives nationales, régionales et internationales ont mis l’accent sur divers aspects de la corruption. : citons la Convention pénale du Conseil de l’Europe sur la corruption47, en vigueur depuis le mois de juillet 2002, et la Convention interaméricaine contre la corruption, signée en 199648. Depuis l’OCDE et la Banque mondiale jusqu’à l’Union européenne et les organisations non gouvernementales, pratiquement toutes les grandes instances se sont préoccupées de ce problème49. Les Nations Unies se sont distinguées en la matière car déjà en 1966 elles adoptaient la Déclaration contre la corruption dans les affaires transnationales. En 1996, elles adoptaient le Code international de conduite des agents de la fonction publique50. Plus récemment, l’ONU a publié un Plan d’action pour la mise en œuvre de la Déclaration de Vienne sur le crime et la justice ainsi qu’un Manuel de politique

47 Voir le texte de la Convention pénale sur la corruption du Conseil de l’Europe (27 janvier, 1999): http://conventions.coe.int/Treaty/FR/CadreListeTraites.htm. Il existe également une Convention civile sur la corruption qui peut être consultée au même endroit: 48 Voir: http://www.oas.org/juridico/fran%C3%A7ais/b-58.htm 49 Voir les suggestions offertes à la fin du présent chapitre. 50 La Déclaration adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies en décembre 1996 incluait le Code international. (Résolution 51/59). Le texte peut être téléchargé à partir de l’endroit suivant: http://www.un.org/french/documents/ga/res/51/a51r059f.pdf

Page 70: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

68 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

anti-corruption51. Plus important, une autre Convention mondiale de l’ONU contre la corruption est en cours de négociation, en tenant compte du fait qu’une part importante de ce problème très complexe n’implique pas forcément les groupes criminels organisés52. La Convention ne peut donc pas laisser de côté cet élément crucial qu’est le crime organisé transnational. Tandis que de nombreux États participent aux initiatives mentionnées plus haut, beaucoup d’autres ne le font pas. La Convention reconnaît qu’il n’est pas possible de lutter efficacement contre un crime aussi grave à moins que tous ceux qui contribuent à l’effort mondial adoptent activement des mesures pour harmoniser leurs lois et incriminer de telles pratiques.

Suivant le modèle d’autres initiatives, la Convention établit trois types d’infraction: ce qui pourrait être appelé de la “corruption active” (donner des pots de vin, par exemple); la corruption “passive” (par exemple, accepter des pots de vin) et la “participation à la corruption” (Art.8). En plus de ces infractions obligatoires, il est demandé aux États d’envisager d’autres formes de corruption, notamment celle des agents publics étrangers53. La Convention exige aussi l’introduction de mesures législatives et autres en vue de prévenir les pratiques corrompues et de renforcer la détection et la reddition des comptes. Les États qui sont déjà parties à certaines des initiatives mentionnées plus haut auront peut-être peu à changer afin d’appliquer le présent article de la Convention. 2. SOMMAIRE DES EXIGENCES LES PLUS IMPORTANTES

Infractions obligatoires – Corruption active • Le fait de promettre, d’offrir ou d’accorder à un agent public un

avantage indu ou l’inciter à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte dans l’exercice de ses fonctions officielles – législation requise

– Corruption passive • Le fait pour un agent public de solliciter ou d’accepter un avantage

indu afin d’accomplir ou de s’abstenir d’accomplir un acte dans l’exercice de ses fonctions officielles – législation requise

– Participation en tant que complice à l’une ou l’autre des infractions ci-dessus – mesures requises

Infractions facultatives

51 Voir le site web de l ‘office contre la drogue et le crime : http://www.odccp.org/odccp/corruption.html 52 Pour se mettre au fait des plus récents développements, on peut consulter: http://www.odccp.org/odccp/crime_cicp_documentation.html 53 Voir également la Convention de l ‘Organisation de coopération et de développement économique (OECD) adoptée en janvier 1997, Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales. http://www.oecd.org/FR/document/0,,FR-document-88-nodirectorate-no-6-18105-31--no-,00.html

Page 71: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination et mesures contre la corruption - 69 __________________________________________________________________

– Corruption de fonctionnaires étrangers ou internationaux – Autres formes de corruption

Mesures législatives ou autres afin

– de promouvoir l’intégrité – d’empêcher, de détecter et de punir la corruption d’agents publics – de garantir que les responsables agiront de façon effective – selon le cas et en conformité avec le système juridique

Accorder aux instances chargées de la lutte contre la corruption

suffisamment d’indépendance pour décourager des influences indues. 3. DISPOSITIONS OBLIGATOIRES La définition d’un “agent public” est laissée à la discrétion des États Parties. Selon l’article 8 “Aux fins du paragraphe 1 du présent article et de l’article 9 de la présente Convention, le terme “agent public” désigne un agent public ou une personne assurant un service public, tel que ce terme est défini dans le droit interne et appliqué dans le droit pénal de l’État Partie où la personne en question exerce cette fonction” (Art.8(4)). La notion d’une “personne qui assure un service public” s’applique à certains systèmes juridiques donnés. La raison pour laquelle cet article le mentionne est que les négociateurs souhaitaient faciliter la coopération entre les États qui ont cette notion dans leur système juridique et ceux qui ne l’ont pas54. Donc, les infractions qui sont obligatoires aux termes de l’article 8 (1) concernent seulement les agents publics nationaux qui acceptent ou sollicitent des pots de vin. La question de la corruption faisant intervenir des représentants d’autres pays (“agents publics étrangers”) et les fonctionnaires internationaux est traitée à l’article 8 (2), qui demande seulement aux États d’envisager sérieusement l’introduction d’une telle infraction.

La Convention ne traite pas de questions relatives à la corruption dans le secteur privé. Dispositions pertinentes de la Convention La Convention exige l’établissement de trois infractions liées à la corruption : corruption active, corruption passive et participation. a- Incrimination L’article 8(1) exige l’établissement de deux infractions relatives à la corruption: corruption “active” et “passive”. L’incrimination de la participation à ces infractions est exigée en vertu de l’article 8(3).

54 Voir les Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 19. http://www.uncjin.org/Documents/Conventions/dcatoc/final_documents/383a1f.pdf

Page 72: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

70 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

i) - Corruption active

La première infraction que les États Parties doivent établir est la suivante: “Le fait de promettre, d’offrir ou d’accorder à un agent public, directement ou indirectement, un avantage indu, pour lui-même ou pour une autre personne ou entité, afin qu’il accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte dans l’exercice de ses fonctions officielles.(Art. 8 (1)(a)). Les éléments nécessaires de cette infraction sont le fait de promettre, d’offrir ou d’accorder quelque chose à un agent public. L’infraction doit comprendre les cas où ce qui est offert n’est pas forcément un cadeau ou quelque chose de tangible. Ainsi, un “avantage indu” peut être quelque chose de tangible ou d’intangible. Il n’est pas nécessaire que l’avantage indu soit immédiatement ou directement accordé à un agent public de l’État. Il peut être “promis,offert ou accordé directement ou indirectement”. Un cadeau, une concession ou tout autre “avantage” peut être accordé à une autre personne, par exemple un parent ou une organisation politique. L’avantage indu ou le pot de vin doit viser à influencer l’agent public dans l’exercice de ses fonctions. Pour ce qui est de l’aspect mental qui est requis pour cette infraction, il faut que l’acte ait été intentionnel. En outre, il faut établir un lien entre l’offre ou l’avantage et le fait d’inciter l’agent public à commettre ou à s’abstenir de commettre un acte dans l’exercice de ses fonctions officielles. Dans les cas où il y a eu uniquement l’offre d’un pot de vin, (c.à d. les cas où le pot de vin n’a pas été accepté et n’aurait donc pu influencer la conduite de l’agent) le lien en question doit être le fait que l’inculpé avait l’intention non seulement d’offrir un pot de vin mais aussi d’influencer la conduite de l’agent à qui il était offert, que ce résultat ait été atteint ou non.

ii)- Corruption passive

La deuxième infraction que les États doivent introduire par législation est la corruption passive: “Le fait pour un agent public de solliciter ou d’accepter, directement ou indirectement, un avantage indu, pour lui-même ou pour une autre personne ou entité, afin qu’elle accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte dans l’exercice de ses fonctions officielles” (Art.8(1)(b)). Cette infraction est une version “passive” de la première. Les éléments nécessaires en sont le fait de solliciter ou d’accepter un pot de vin. Il faut aussi que le lien avec la conduite de l’agent public soit établi. Comme dans le cas de la première infraction, l’avantage indu peut s’adresser à l’agent public ou à une autre personne ou entité. C’est l’agent public lui-même ou un intermédiaire qui doit solliciter ou accepter (“directement ou indirectement”). L’aspect mental est seulement l’intention de solliciter ou d’accepter l’avantage indu dans le but de modifier sa propre conduite dans l’exercice de ses fonctions officielles.

iii)- Participation à des infractions de corruption

Page 73: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination et mesures contre la corruption - 71 __________________________________________________________________

Les États sont requis d’adopter d’autres dispositions, dans la mesure où cela est nécessaire, afin de garantir que la complicité avec les infractions précédentes soit également incriminée (Art. 8(3)). Alors que les deux premières infractions font appel à une législation, il est possible de conférer à la participation à la corruption le caractère d’infraction pénale par le biais d’autres mesures basées sur la tradition interne des États. Les complices peuvent prendre une part active au moment d’offrir ou de recevoir, ou peuvent jouer le simple rôle d’intermédiaires. iv)- Autres infractions Outre les trois infractions obligatoires décrites plus haut, la Convention exige aussi des États qu’ils envisagent d’établir d’autres infractions concernant les agents publics étrangers ou les fonctionnaires des organisations internationales ainsi que d’autres formes de corruption(Art. 8 (2); voir plus loin). Comme pour toutes les infractions de la Convention, les rédacteurs sont requis d’examiner de très près la gravité de ces infractions lorsqu’ils décident des sanctions appropriées devant s’appliquer aux auteurs des infractions (Art. 11(1)) et d’instituer une longue période de prescription – notamment pour les cas où les auteurs présumés d’une infraction se soustraient à la justice. (Art. 11(5)). Pour ce qui est des personnes morales, les infractions et la responsabilité peuvent être de nature pénale, civile ou administrative (Art. 10(2)). Toutefois, la Convention laisse aux États le soin de décrire les infractions visées par le présent article et d’appliquer leurs règlements internes en matière de défense et d’autres principes juridiques. Les infractions de la Convention seront “poursuivies et punies conformément” au droit interne(Art. 11(6)). Les Notes interprétatives indiquent que “l’obligation imposée par le présent article n’était pas censée concerner les actions d’une personne qui a agi sous une contrainte ou une intimidation telle que celle-ci constitue une excuse absolue”55. Encore une fois, il convient de souligner que si la Convention s’applique dans les cas où le blanchiment d’argent comporte les éléments de transnationalité et de crime organisé, les infractions doivent être établies dans le droit interne des États indépendamment de ces deux éléments (Art.34(2)). b. Mesures de lutte contre la corruption L’article 9 contient des dispositions assez générales concernant les politiques anti-corruption. Des négociations sont en cours pour une nouvelle Convention qui portera spécifiquement sur la corruption. Il est important de se tenir au courant de l’évolution de la situation, car avec la mise en application de cette Convention des exigences plus détaillées et plus complètes lui seront vraisemblablement apportées56.

55 A/55/383/Add.1, para.18. 56 Le site de l’ONU traitant de la corruption est le suivant :

Page 74: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

72 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

En plus des mesures législatives et autres de l’article 8, les États doivent adopter des mesures visant à promouvoir l’intégrité et à empêcher, détecter et punir la corruption des agents publics. À cette fin, l’article 9 (1) charge les États de “prendre des mesures efficaces d’ordre législatif, administratif ou autre”, “selon qu’il convient et conformément à (leur) système juridique”. De plus, la Convention exige que les États “prennent des mesures pour s’assurer que (leurs) autorités agissent efficacement en matière de prévention, de détection et de répression de la corruption des agents publics y compris en leur donnant une indépendance suffisante pour empêcher toute influence inappropriée sur leurs actions” (Art. 9 (2). c. Autres changements à envisager La Convention exige que les États envisagent sérieusement d’établir une infraction de corruption à l’égard des agents publics étrangers et des fonctionnaires des organisations internationales. Selon l’article 8(2), les États doivent envisager d’appliquer les infractions visées à l’article 8(1) aux actes impliquant un agent public étranger ou un fonctionnaire international. Les États doivent aussi envisager d’incriminer d’autres formes de corruption conformément à leurs principes juridiques fondamentaux et en tenant compte de leur contexte historique. Lors des négociations en cours au sujet de la nouvelle convention sur la corruption, des définitions ont été proposées pour l’expression “agent d’une organisation internationale”; certaines des définitions proposées pour “agent public” ou “personne servant dans une administration publique” incluaient les représentants ou les employés d’organisations internationales publiques57. 4. QUESTIONS OPTIONNELLES Dans le contexte des nombreuses initiatives anti-corruption internationales qui sont actuellement en cours et des négociations des Nations Unies en vue de la Convention sur la corruption à venir, la plupart des États auront vraisemblablement déjà toute une gamme de politiques et de pratiques de bonne gouvernance. Les exemples ci-dessous donnent une bonne idée des options qui pourraient être envisagées :

S’assurer que les pouvoirs juridiques qui existent pour la conduite des enquêtes criminelles s’étendent à tout un éventail d’infractions de corruption et d’actes liés à la corruption.

http://www.odccp.org/odccp/corruption.html 57 Voir également l’article 9 de la Convention pénale sur la corruption du Conseil de l’Europe qui stipule qu’il est nécessaire que : «Chaque Partie adopte les mesures législatives et autres qui se révèlent nécessaires pour ériger en infraction pénale, conformément à son droit interne, les actes mentionnés aux articles 2 et 3 lorsqu’ils impliquent toute personne qui a la qualité de fonctionnaire ou d’agent contractuel, au sens du statut des agents, de toute organisation publique internationale ou supranationale dont la Partie est membre, ainsi que toute personne, qu’elle soit détachée ou non auprès d’une telle organisation, qui exerce des fonctions correspondant à celles desdits fonctionnaires ou agents”.

Page 75: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination et mesures contre la corruption - 73 __________________________________________________________________

Instituer un service de lutte contre la corruption ou élargir le mandat des instances qui existent déjà, par exemple des bureaux nationaux de vérification ou d’autres agences de vigilance pour garantir la surveillance de toutes les formes de corruption.

Accorder une certaine mesure d’indépendance et d’autonomie à ces services afin qu’ils puissent accomplir leur tâche sans entrave (l’institution de ces services devra dans certains cas faire l’objet d’une loi)

Garantir à ces services la possibilité de recourir non seulement à des sanctions pénales mais aussi à d’autres sanctions et mesures.

Envisager l’introduction d’un code de déontologie pour les agents publics.

Introduire des critères très sévères pour la sélection des membres de la magistrature, une formation de haute qualité et des sanctions disciplinaires en cas d’inconduite.

Enfin, les États souhaiteront peut-être élargir les infractions de corruption à la corruption dans le secteur privé ou à des infractions allant plus loin que les pots de vin. Ils sont naturellement libres de le faire (Art.34), mais n’obtiendront pas forcément la coopération internationale au-delà des infractions faisant l’objet de l’article 8. 5. RENVOIS A la Convention et aux protocoles

• Article 16 (Extradition) • Article 23 (Entrave à la justice) • Articles 6-7 (Blanchiment d’argent) • Article 10 (Responsabilité des personnes morales) • Article 24 (Protection des témoins) • Article 18 (Coopération internationale) • Infractions visées par les Protocoles

A d’autres instruments

• OEA - Convention interaméricaine contre la corruption (1996) • Convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption des agents publics

étrangers dans les affaires internationales (1997) • Convention pénale du Conseil de l’Europe au sujet de la corruption • Déclaration des Nations Unies contre la corruption dans les affaires

internationales • Code international de conduite des agents de la fonction publique (ONU) • Plan d’action de l’ONU pour la mise en oeuvre de la Déclaration de Vienne sur

le crime et la justice • Convention mondiale de l’ONU sur la corruption (en cours de négociations)

6. EXEMPLES DE MISE EN OEUVRE Hong Kong

Page 76: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

74 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

(Commission indépendante contre la corruption ICAC) – http://www.icac.org.hk/eng/main/ (cliquer sur “anti-bribery legislation” pour voir les dispositions pertinentes dans leur version anglaise)

Singapore

Cap. 224. 25/81. Peines infligées en cas de corruption. 5. Toute personne qui, seule ou de concert avec une autre personne - (a) par le biais de la corruption sollicite ou reçoit ou accepte de recevoir, pour elle-même ou pour un autre; ou (b) par le biais de la corruption donne, promet ou offre à toute autre personne, soit pour ladite personne soit pour un tiers Un pot de vin à titre d’incitation ou de récompense, ou afin d’obtenir que -

(i)toute personne accomplisse ou s’abstienne d’accomplir quoi que ce soit en relation avec une affaire ou une opération quelconque, réelle ou proposée; ou

(ii)tout membre, agent ou employé d’un organisme public accomplisse ou s’abstienne d’accomplir quoi que ce soit en relation avec une affaire ou une opération quelconque qui relève de cet organisme, Sera coupable d’une infraction et passible d’une amende ne dépassant pas 100 000$ ou d’une période d’emprisonnement ne dépassant pas 5 ans, ou des deux.

Kenya

Projet de loi sur la lutte contre la corruption et les crimes économiques, 2003: http://www.lawafrica.com/Bills/Bills.asp (ou http://www.lawafrica.com/Bills/poeb2003/poeb_toc.asp)

États Unis

Loi sur les pratiques de corruption étrangères de 1977 ("FCPA"), 15 U.S.C. §§ 78dd-1, et seq.

8. AUTRES SOURCES

Pour un inventaire des mesures spécifiques, consulter le Manuel de l’ONU sur la corruption et le Répertoire des mesures pratiques de lutte contre la corruption des Nations Unies58. http://www.odccp.org/odccp/corruption.html

Les rédacteurs voudront peut-être se tenir au courant des efforts déployés par les États membres de l’ONU en vue de rédiger la Convention des Nations

58 Ces textes peuvent être téléchargés au: http://www.odccp.org/odccp/corruption.html .

Page 77: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Incrimination et mesures contre la corruption - 75 __________________________________________________________________

Unies pour la lutte contre la corruption59. http://www.odccp.org/odccp/corruption.html et http://www.odccp.org/odccp/crime_cicp_documentation.html

On pourra se procurer de la documentation concernant le développement des stratégies anti-corruption nationales en consultant le Programme mondial de lutte contre la corruption de l’ONU, Office contre les drogues et le crime (ODC), au site : http://www.undcp.org/corruption.html

Le texte de l’article 8 est semblable (mais non pas identique) à celui des

infractions établies par des instruments internationaux comme : • La Convention interaméricaine contre la corruption (1996, res.1398) • La Convention de l’OCDE pour la lutte contre la corruption des agents

publics étrangers dans les affaires internationales, 199760.

Les pays qui ont mis en vigueur ces instruments peuvent déjà se trouver en conformité avec la présente Convention ou n’avoir à introduire que des changements mineurs pour assurer sa mise en application.

Déclaration de l’ONU contre la corruption dans les affaires internationales

(adoptée par l’Assemblée générale en décembre 1996; Résolution 51/191). [elle concerne la corruption dans les secteurs privé et public, demande des formes d’incrimination, notamment pour les agents publics étrangers, des mesures, la coopération]: http://www.un.org/documents/ga/res/51/a51r191.htm

Code internationale de conduite des agents de la fonction publique des

Nations Unies (adopté par l’Assemblée générale en décembre 19966; voir Résolution 51/59, annexe). http://www.un.org/french/documents/ga/res/51/a51r059f.pdf

Manuel de l’ONU sur les politiques anti-corruption

http://www.unodc.org/pdf/crime/gpacpublications/manual.pdf

Plan d’action de l’ONU pour la mise en œuvre de la Déclaration de Vienne sur le crime et la justice.

Action conjointe de l’UE du 22 décembre 1998 sur la corruption dans le

secteur privé (secteur privé uniquement, corruption active et passive): http://europa.eu.int/scadplus/printversion/fr/lvb/l33074.htm

Convention de l’UE sur la lutte contre la corruption concernant des agents publics des Communautés européennes ou des agents publics des États membres (exige l’incrimination de la corruption et des infractions qui s’y rattachent) http://europa.eu.int/scadplus/printversion/fr/lvb/l33027.htm

59 En ce qui a trait aux mandats et termes de référence, veuillez consulter les résolutions suivantes:

GA/RES/54/188, 55/61, 55/188, et 56/260. Pour les textes les plus récents et un aperçu du progrès des négociations voir: http://www.odccp.org/crime_cicp_documentation.html

60 DAFFE/IME/BR (97)20.

Page 78: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

76 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Convention de l’UE sur la protection des intérêts financiers et Protocoles qui s’y rattachent (le premier Protocole traite de la corruption active et passive) http://europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/l33019.htm

Conseil de l’Europe; Protocole additionnel à la Convention pénale sur la corruption: http://conventions.coe.int/Treaty/FR/cadreprojets.htm

SADC (Southern African Development Community) Protocole sur la

Corruption http://www.10iacc.org/download/workshops/cs52d.pdf

Conseil de l’Europe, les Vingt principes directeurs pour la lutte contre la

corruption(1997): http://cm.coe.int/ta/res/1997/f97x24.htm

Conseil de l’Europe. La Convention civile sur la corruption (active-passive, publique et privée; des non-membres ont participé à la rédaction et peuvent adhérer sous certaines conditions) télécharger au site : http://conventions.coe.int/treaty/FR/WhatYouWant.asp?NT=173&CM=8&DF=

Conseil de l’Europe. Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la

saisie et à la confiscation des produits du crime : http://conventions.coe.int/treaty/FR/WhatYouWant.asp?NT=141&CM=8&DF=

OEA, La Convention interaméricaine contre la corruption

http://www.oas.org/juridico/english/Treaties/b-58.html

Banque mondiale : http://www1.worldbank.org/publicsector/anticorrupt/

D’autres ressources sont également disponibles au Centre Utstein de

ressources contre la corruption : http://www.u4.no

Page 79: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entrave à la justice - 77 __________________________________________________________________

CHAPITRE 5

Entrave à la justice

Article 23

Incrimination de l'entrave au bon fonctionnement de la justice

Chaque État Partie adopte les mesures législatives et autres qui sont nécessaires pour conférer le caractère d'infraction pénale, lorsque les actes ont été commis intentionnellement:

a) Au fait de recourir à la force physique, à des menaces ou à l'intimidation ou de promettre, d'offrir ou d'accorder un avantage indu pour obtenir un faux témoignage ou empêcher un témoignage ou la présentation d'éléments de prévue dans une procédure en rapport avec la commission d'infractions visées par la présente Convention;

b) Au fait de recourir à la force physique, à des menaces ou à l'intimidation pour empêcher un agent de la justice ou un agent des services de détection et de répression d'exercer les devoirs de leur charge lors de la commission d'infractions visées par la présente Convention. Rien dans le présent alinéa ne porte atteinte au droit des États Parties de disposer d'une législation destinée à protéger d'autres catégories d'agents publics.

1. INTRODUCTION

Les groupes criminels organisés maintiennent ou augmentent leur richesse, leur pouvoir et leur influence en tâchant de porter atteinte aux systèmes judiciaires. Il ne peut pas y avoir de justice si les juges, les jurés, les témoins et les victimes sont intimidés, menacés ou corrompus. On ne peut compter sur aucune coopération internationale si des intervenants aussi importants pour l’enquête et l’application de la loi sont insuffisamment protégés pour pouvoir librement jouer leurs rôles et donner leurs témoignages. Aucune infraction grave ne peut être détectée et punie si les preuves ne peuvent être entendues au tribunal. C’est la légitimité de tout l’appareil de détection et de répression, au niveau local comme au niveau mondial, qui est en jeu et qui doit être protégée contre la puissante influence corruptive des groupes criminels organisés transnationaux. La Convention elle-même sera vite lettre morte à moins que l’on ne mette en place des mesures qui garantiront l’intégrité du processus judiciaire. Des personnes innocentes seront punies à tort et les coupables s’en tireront à bon compte si le cours de la justice se voit dévié par d’habiles manipulateurs associés aux groupes criminels. Comme il a été dit plus haut, la Convention porte en premier lieu sur les infractions qui tendent à faciliter la commission d’autres infractions graves transnationales. Les infractions génératrices de profits pour les groupes criminels organisés font l’objet surtout des Protocoles, ainsi que les “infractions graves”. Il est donc approprié et nécessaire que le présent article traite de l’entrave à la justice, ce

Page 80: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

78 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

en quoi il complète les dispositions relatives aux problèmes qui y sont étroitement liés : la corruption, la protection des témoins et des victimes, et la coopération internationale. Ainsi, la Convention exige que les États Parties incriminent de façon très spécifique le recours à l’incitation, aux menaces ou à la force pour empêcher les témoins et les agents officiels de jouer leur rôle, qui serait de procurer des preuves et des témoignages exacts. 2. SOMMAIRE DES EXIGENCES LES PLUS IMPORTANTES L’article 23 exige l’établissement des deux infractions pénales suivantes:

Le recours à la force physique, aux menaces ou à l’intimidation, ou la promesse, l’offre ou l’octroi d’un avantage indu • pour inciter à un faux témoignage; ou • pour intervenir de manière à entraver un témoignage ou la déposition de

preuves lors de la procédure, en rapport avec les infractions visées par la Convention (Art.23(a)).

Le recours à la force physique, aux menaces ou à l’intimidation

• pour gêner dans l’exercice de ses fonctions officielles un juge ou un agent des services de détection et de répression

• en rapport avec les infractions visées par la Convention (Art.23(b)) 3. DISPOSITIONS OBLIGATOIRES La Convention exige que les États établissent deux infractions pénales. La première porte sur les efforts visant à influencer des témoins éventuels et d’autres personnes qui sont en mesure de fournir aux autorités des éléments de preuve pertinents. Cette infraction incrimine notamment le “fait de recourir à la force physique, aux menaces ou à l’intimidation ou de promettre, d’offrir ou d’accorder un avantage indu pour obtenir un faux témoignage ou empêcher un témoignage ou la présentation d’éléments de preuve dans une procédure en rapport avec la commission d’infractions visées par la présente Convention” (Art, 23 (a)). Les entraves au processus judiciaire peuvent prendre la forme de corruption ou de diverses formes d’intimidation. Cette infraction comporte les incitations positives aussi bien que négatives. Les éléments de cette infraction sont les menaces, le recours réel à la force et toutes sortes d’intimidation ainsi que la promesse, l’offre ou l’octroi d’un «avantage indu”aux personnes qui ont été invitées à témoigner ou à fournir des éléments de preuve lors d’une procédure concernant une infraction visée par la Convention. Le recours à la force, aux menaces et aux incitations à porter faux témoignage peut avoir lieu à n’importe quel moment avant le procès, que la procédure formelle soit déjà en cours ou non. Donc le terme “procédure” doit recevoir une interprétation assez large pour englober toutes les démarches officielles

Page 81: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entrave à la justice - 79 __________________________________________________________________

gouvernementales, y compris les démarches qui précèdent le procès proprement dit61. Les États sont requis d’appliquer cette infraction à toutes les procédures concernant les infractions “visées par la Convention”. Cela comprend les trois autres infractions principales de la Convention, les infractions des Protocoles (auxquels les États ont l’intention d’être parties), et les “infractions graves” (c’est à dire qui sont passibles de privation de liberté pendant un maximum de quatre ans ou plus) en vertu du droit interne.

La conduite doit être internationale – cela inclut l’intention d’offrir des avantages ou de menacer et le recours à la force aussi bien que l’intention d’inciter à de faux témoignages ou d’empêcher un témoignage ou la déposition de preuves. Les États ne sont pas obligés de pénaliser un comportement associé à un état mental diminué. Il se peut que les lois de certains États ne visent pas les cas où une personne a le droit de ne pas témoigner, et un avantage indu est accordé à cette personne si elle se prévaut de ce droit62. La seconde infraction que les États doivent établir incrimine le fait d’entraver les fonctions des agents de la justice ou des services de détection et de répression. “Le recours à la force physique, à des menaces ou à l’intimidation pour empêcher un agent de la justice ou un agent des services de détection et de répression d’exercer les devoirs de leur charge lors de la commission d’infractions visées par la présente Convention” (Art. 23(b)). L’élément de corruption ne figure pas dans ce paragraphe parce que les agents de la justice et des services de détection et de prévention sont censés être des agent publics, dont la corruption serait déjà traitée à l’article 8. Ici encore, l’élément d’intention est nécessaire et il n’y a pas obligation d’inclure un comportement dû à un état mental diminué. Toutefois, l’intention dans le cas de cette infraction doit être d’empêcher l’exercice des tâches officielles plutôt que le témoignage ou la présentation d’éléments de preuve. “Des mesures législatives ou autres” s’imposent pour l’établissement de ces deux infractions. Comme pour les autres infractions visées par la Convention, les “autres” mesures, quelles qu’elles soient, devront s’ajouter à la législation63. De fait, ces deux infractions de base relatives aux entraves à la justice viennent appuyer les autres mesures exigées par la Convention pour la protection des victimes et des témoins (voir Articles 24-25; chapitre 11 du présent manuel). Les États Parties peuvent disposer, pour protéger les autres agent publics et garantir l’intégrité du système judiciaire, de lois et de mesures qui vont au-delà des exigences de la présente Convention.

61 Voir les Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 46. Toutefois, cet article n’a pas à être mis en vigueur en regard des poursuites privées entreprises à l’égard de conduites visées par la Convention (par exemple, un processus de d’arbitrage) 62 Voir les Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 47. 63 Voir les Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 9.

Page 82: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

80 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Les pays où les infractions revêtent un caractère plus général, par exemple des infractions consistant à tenter d’empêcher les enquêtes criminelles ou les procédures pénales de quelque manière que ce soit, et celles qui concernent la corruption des agents publics, se trouveront possiblement en conformité parfaite ou partielle avec le présent article. Comme dans le cas des infractions précédentes, la Convention exige que les rédacteurs étudient de très près la gravité de cette infraction lorsqu’ils décideront des sanctions appropriées pour ceux qui en sont coupables (Art. 11(1)). La Convention, toutefois, laisse aux États le soin de décrire les infractions qui relèvent du présent article et d’appliquer leurs règles internes quant à la défense et aux autres principes juridiques. Les infractions visées par la présente Convention seront “poursuivies et punies conformément” au droit interne (Art. 11(6)). Il convient de souligner encore une fois que, si l’entrave à la justice doit comporter la transnationalité et le crime organisé pour que la présente Convention et les dispositions de coopération internationale s’appliquent, aucun ces éléments ne devrait faire partie de l’infraction dans le cadre du droit interne (Art.34(2)). 4. QUESTIONS OPTIONNELLES Il convient de réitérer que le présent article, comme tous ceux de la Convention, ne contient que des normes minimales. Ainsi, les États Parties sont libres d’adopter des mesures “plus strictes ou plus sévères”, par exemple d’inclure dans les infractions un plus grand nombre d’entraves, de procédures, ou d’agents publics. L’article 23(b) autorise clairement l’adoption de lois ou de mesures visant à protéger d’autres catégories d’agents publics que ceux qui sont mentionnés dans la présente Convention. 5. RENVOIS A la Convention

• article 11 (Poursuites judiciaires, jugement et sanctions) • articles 8-9 (Corruption) • articles 24-25 (Protection des témoins et victimes) • article 16 (Extradition) • article 18 (Entraide mutuelle) • article 34(2) (Création d’infraction dans la loi interne)

6. EXEMPLES DE MISE EN OEUVRE

USA 18 U.S.C. §§ 1501 à 1518; tous les articles peuvent être téléchargés au site: http://www4.law.cornell.edu/uscode/18/pIch73.html Les infractions principales sont les suivantes:

Page 83: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entrave à la justice - 81 __________________________________________________________________

Art. 1503. – Influencer ou porter atteinte à la personne d’un agent ou d’un juré

(a) Quiconque a recours à la corruption, à la menace ou à la force, ou qui par lettre ou toute autre forme de communication contenant des menaces s’efforce d’influencer, d’intimider ou d’empêcher un juré ou un agent dans l’un ou l’autre des tribunaux des États-Unis ou un agent de service lors d’un examen ou de toute autre procédure devant un juge d’instance ou le juge chargé de l’inculpation (committing magistrate) des États-Unis dans l’exercice de ses fonctions; quiconque inflige à un juré des dommages corporels ou matériels en raison d’un verdict ou d’une inculpation auquel ledit juré a donné son assentiment, ou du seul fait qu’il ait servi de juré; ou quiconque inflige des dommages corporels ou matériels à un agent ou à un juge d’instance ou (committing magistrate) du fait qu’il ait exercé ses fonctions, ou par la corruption ou des menaces ou par la force, ou par une lettre ou autre forme de communication de menace influence, entrave, ou empêche l’administration de la justice, sera puni comme prévu au paragraphe (b). Si l’infraction visée par le présent article se produit en rapport avec le procès d’une cause criminelle, et si l’acte enfreignant le présent article comprend la menace de violence physique, la durée d’incarcération qui sera imposée pour cette infraction sera plus longue que ne le prévoit par ailleurs la loi ou que la durée maximale pouvant être imposée pour toute autre infraction liée à cette cause.

(b) Peine infligée pour une infraction visée par le présent article : (1) en cas de meurtre, la peine prévue aux articles 1111 et 1112; (2) en cas de tentative de meurtre, ou dans le cas où l’infraction visait un juré et où il y a accusation d’un délit de classe A ou B, emprisonnement de 20 ans ou moins, une amende en vertu de la présente loi, ou les deux ; et (3) dans tout autre cas, emprisonnement pour 10 ans ou moins, une amende en vertu de la présente loi ou les deux.

Art. 1510. – Entraves aux enquêtes criminelles (a) Quiconque s’efforce à dessein et au moyen de la corruption d’entraver, de retarder ou d’empêcher la communication par une personne quelle qu’elle soit d’information concernant une infraction à une loi pénale des États-Unis à une personne chargée d’une enquête criminelle sera passible d’une amende en vertu de la présente loi ou d’un emprisonnement ne dépassant pas 5 ans, ou des deux.

(b) (1) Quiconque, en tant que représentant d’une institution financière, dans l’intention d’entraver la procédure judiciaire, communique directement ou indirectement à une autre personne l’existence ou la teneur d’une assignation à procurer les dossiers de la même institution financière, ou de l’information qui a été procurée au grand jury suite à cette assignation, sera passible d’une amende en vertu de la présente loi ou d’un emprisonnement ne dépassant pas 5 ans, ou des deux. (2) Quiconque, en tant que représentant d’une institution financière, informe directement ou indirectement:

(a) un client de ladite institution financière du fait que ses dossiers ont fait l’objet d’une assignation de la part du grand jury;

Page 84: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

82 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

(b) ou toute autre personne nommée dans ladite assignation; de l’existence ou de la teneur de ladite assignation ou de l’information qui a été procurée au grand jury en réponse à ladite assignation, sera passible d’une amende en vertu d la présente loi ou d’un emprisonnement ne dépassant pas un an, ou des deux.

(3) Tels qu’utilisés dans le présent paragraphe - (a) le terme “un représentant d’une institution financière” désigne un dirigeant, un directeur, un partenaire, un employé, un agent ou un avocat travaillant pour ladite institution; (b) l’expression “assignation à procurer les dossiers” désigne une assignation de la part d’un grand jury fédéral ou de la part du Ministère de la Justice (en vertu de l’article 3486 du titre 18), à procurer les dossiers d’un client qui ont servi à l’infraction ou à la complicité à l’infraction.

(i) articles 215, 656, 657, 1005, 1006, 1007, 1014, 1344, 1956, 1957, ou chapitre 53 du titre 31; ou (ii) article 1341 ou 1343 concernant une institution financière.

(c) Telle qu’utilisée dans le présent article, l’expression “personne chargée d’une enquête criminelle” désigne toute personne dûment autorisée par un ministère, une agence ou les forces armées des États-Unis à mener ou à participer à des enquêtes ou à des poursuites pour infractions aux lois pénales des États-Unis. (d) (1) Quiconque -

(a) agissant en tant que dirigeant, directeur, agent ou employé d’une personne engagée dans une entreprise d’assurances dont les activités ont une portée sur le commerce entre les États américains, (b) est engagé dans une entreprise d’assurances dont les activités ont une portée sur le commerce entre les États américains ou prend part (autrement que comme assuré ou bénéficiaire d’une police d’assurance) à une opération concernant l’exploitation de ladite entreprise, dans l’intention d’entraver une procédure judiciaire, informe directement ou indirectement une autre personne de l’existence ou de la teneur d’une assignation à procurer des dossiers de la personne engagée dans ladite entreprise ou de l’information qui a été procurée au grand jury fédéral suite à ladite assignation, sera passible d’une amende aux termes du présent titre ou d’un emprisonnement ne dépassant pas 5 ans, ou des deux.

2) Tel qu’utilisée au paragraphe (1), l’expression “assignation à procurer des dossiers” désigne une assignation de la part d’un grand jury fédéral à procurer des dossiers dans le cas d’une infraction ou d’une complicité d’infraction, article 1033 sous le présent titre.

Art. 1512. – Subornation d’un témoin, d’une victime ou d’un informateur (a) 1) Quiconque tue ou tente de tuer une autre personne avec l’intention -

(a) d’empêcher la présence ou le témoignage d’une personne quelconque à une procédure officielle ;

Page 85: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entrave à la justice - 83 __________________________________________________________________

(b) d’empêcher la présentation d’un dossier, d’un document ou de tout autre objet lors d’une procédure officielle; ou (c) d’empêcher une personne quelconque de communiquer avec un agent des services de détection et de répression ou avec un juge des Etats-Unis concernant la commission ou une tentative de commission d’une infraction fédérale ou d’une infraction aux conditions de liberté conditionnelle ou de liberté surveillée ou de mise en liberté en attendant la procédure judiciaire ; sera puni en vertu du paragraphe (2).

(2) La peine prévue pour une infraction définie dans le présent paragraphe est la suivante :

(a) dans un cas de meurtre (tel que défini à l’article 1111) la peine de mort ou emprisonnement à vie, et dans le cas de tout autre meurtre, la peine prévue à l’article 1112 ; et (b) dans le cas d’une tentative, emprisonnement pendant une période ne dépassant pas 20 ans. (c) Quiconque a recours à l’intimidation ou à la force physique ; menace, ou persuade par la corruption une autre personne, ou tente de le faire, ou se livre à une conduite trompeuse envers une autre personne dans l’intention -

(1) d’influencer, de retarder ou d’empêcher le témoignage de toute personne lors d’une procédure officielle ; (2) de faire en sorte qu’une personne - (a) s’abstienne de porter témoignage ou de fournir un dossier ou un document, ou tout autre objet, lors d’une procédure officielle; (b) altère, détruise, mutile ou dissimule un objet dans l’intention d’en détruire l’intégrité ou de le rendre inutilisable lors d’une procédure officielle; (c) échappe au processus judiciaire ayant intimé à ladite personne de comparaître comme témoin ou de procurer un dossier, un document ou tout autre objet lors d’une procédure officielle; ou (d) s’abstienne de se présenter à une procédure officielle à laquelle ladite personne a été convoquée par démarche judiciaire; ou (3) entrave, retarde ou empêche la communication à un membre des services de détention et de répression ou à un juge des Etats-Unis des renseignements concernant la commission ou la commission possible d’une infraction fédérale ou de l’infraction à des conditions de liberté sous surveillance, de liberté conditionnelle ou de remise en liberté en attendant la procédure judiciaire; recevra une amende en vertu du présent article ou une peine d’emprisonnement ne dépassant pas dix ans, ou les deux. (c) Quiconque harcèle intentionnellement une autre personne et de ce fait entrave, retarde, empêche ou dissuade toute personne :

(1) de se présenter ou de témoigner lors d’une procédure officielle; (2) d’informer un membre des services de détection et de répression ou un juge des États-Unis de la commission ou de la commission possible d’une infraction fédérale ou d’une infraction à des conditions de liberté conditionnelle, de liberté sous surveillance ou de remise en liberté en attendant la procédure officielle ; (3) d’arrêter ou de chercher à arrêter une autre personne en rapport avec une infraction fédérale; ou (4) d’agir de telle sorte que des poursuites criminelles ou qu’une procédure de révocation de liberté conditionnelle ou de liberté sous surveillance seront recherchées ou instituées, ou

Page 86: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

84 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

de prêter assistance lors de ces poursuites ou de cette procédure; ou tente de le faire, sera passible d’une amende aux termes du présent titre ou d’une peine de prison ne dépassant pas un an, ou des deux.

(d) Dans le cas d’un procès pour une infraction visée par le présent article, un élément de défense positif, au sujet duquel le défendant assume le fardeau de la preuve en procurant suffisamment d’éléments de preuve, consiste à invoquer le fait que la conduite en question était strictement légale et que la seule intention du défendant était d’encourager, d’induire ou d’inciter l’autre personne à témoigner honnêtement. (e) Aux fins du présent article -

(1) il n’est pas nécessaire qu’une procédure officielle ait été prévue ou sur le point d’avoir lieu au moment ou l’infraction a été commise; et (2) il n’est pas nécessaire que le témoignage, le dossier ou le document, ou tout autre objet, soit admissible comme élément de preuve ou n’ait pas fait l’objet d’une motion de privilège.

(f) Lors d’un procès pour une infraction visée par le présent article, il n’est pas nécessaire de prouver un état d’esprit pour invoquer les circonstances suivantes:

(1) la procédure officielle devant un juge, un tribunal, un magistrat (magistrate, judge), un grand jury ou une agence gouvernementale est en fait devant un juge ou un tribunal des États-Unis, un magistrat des États-Unis, un juge de faillite (bankruptcy judge), un grand jury fédéral ou une agence du Gouvernement des États-Unis; (2) le juge est un juge des États-Unis ou le membre des services de détection et de répression est un agent ou un employé du Gouvernement fédéral ou une personne autorisée à agir pour ou au nom du Gouvernement fédéral ou servant le Gouvernement fédéral comme conseiller ou consultant.

(g) Il existe des compétences fédérales en matière juridique pour une infraction visée par le présent article. (h) Un procès découlant du présent article ou de l’article 1503 peut être institué dans le district où la procédure officielle (qu’elle soit en cours ou sur le point d’avoir lieu) devait se dérouler ou dans le district dans lequel ont été commis les actes qui constituent l’infraction alléguée. (i) Si l’infraction visée par le présent article est commise en rapport avec un procès une affaire criminelle, la période d’emprisonnement maximale sera plus longue que celle que prévoit autrement la loi, ou la période maximale qui aurait pu être imposée pour toute infraction déterminée dans une telle affaire. Art. 1515. – Définitions pour certaines dispositions; disposition générale (a) Tels qu’utilisés dans les articles 1512 et 1513 de la présente loi et dans le présent article -

(1) l’expression “procédure officielle” désigne - (a) un procès devant un juge ou un tribunal des États-Unis, un juge magistrat (magistrate judge), un juge de faillite (bankruptcy judge), un juge de la Cour fiscale (Tax Court) des États-Unis, un juge de première instance de la Tax Court des États-Unis, un juge de la United States Court of Federal claims, ou un grand jury fédéral.

Page 87: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entrave à la justice - 85 __________________________________________________________________

(b) une procédure devant le Congrès ; (c) une procédure devant une agence du Gouvernement fédéral qui est autorisée de par la loi; ou (d) une procédure impliquant une entreprise d’assurances dont les activités ont une portée sur le commerce entre États américains, devant tout représentant officiel ou agence de réglementation des assurances ou devant tout agent ou inspecteur nommé par ledit représentant officiel ou ladite agence pour examiner les affaires de toute personne exploitant une entreprise d’assurances dont les activités ont une portée sur le commerce entre États américains.

(2) l’expression “force physique” désigne un acte physique dirigé contre un autre, y compris la réclusion forcée. (3) l’expression “conduite trompeuse” signifie:

(a) faire une fausse déclaration en connaissance de cause; (b) omettre intentionnellement certains renseignements dans une déclaration de sorte qu’une partie de ladite déclaration est trompeuse, ou intentionnellement dissimuler un fait matériel de sorte que ladite déclaration crée une fausse impression; (c) dans l’intention d’induire en erreur, présenter en toute connaissance de cause, et inviter à y faire foi, un document écrit ou enregistré qui est faux, falsifié, altéré ou de toute autre manière manque d’authenticité; (d) dans l’intention d’induire en erreur, présenter en toute connaissance de cause, et inviter à y faire foi, un échantillon, un spécimen, une carte, une photo, la marque d’une limite territoriale, ou tout autre objet qui présente un aspect matériel trompeur; (e) en toute connaissance de cause avoir recours à une ruse, un plan, ou un expédient dans l’intention d’induire en erreur;

(4) Le terme “membre des services de détection et de répression” désigne un agent ou un employé du Gouvernement fédéral, ou une personne autorisée à agir pour ou au nom du Gouvernement fédéral ou qui sert auprès du gouvernement fédéral comme conseiller ou consultant -

(a) qui est autorisé d’après la loi à participer ou à superviser la prévention, la détection, l’enquête ou la poursuite d’une infraction; ou (b qui sert d’agent de liberté conditionnelle ou d’agent des services avant procès en vertu de la présente loi ;

(5)l’expression “dommages corporels” désigne - (a) une coupure, une abrasion, une contusion, une brûlure ou la défiguration; (b) une douleur physique; (c) une maladie; (d) la dégradation du fonctionnement d’un membre, d’un organe ou d’une faculté mentale; ou (e) toute autre lésion corporelle, qu’elle soit temporaire ou non; et

(6) l’expression “persuade par la corruption” n’inclut pas une conduite qui serait une conduite trompeuse.

(b) Tel qu’utilisé dans l’article 1505, le terme “par la corruption” signifie agir dans un but inconvenant, soit personnellement ou par influence sur un autre, y compris faire une déclaration fausse ou portant à malentendu, ou s’abstenir de procurer un document ou

Page 88: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

86 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

toute autre type de renseignement, ou le dissimuler, l’altérer ou le détruire. (c) Le présent chapitre n’interdit pas et ne punit pas la fourniture de services juridiques légaux et de bonne foi en rapport avec ou en anticipation d’une procédure officielle.

Canada

Voir le Code Criminel du Canada, articles 139 (entrave à la justice) et 423 (intimidation). http://lois.justice.gc.ca/fr/C-46/index.html Une nouvelle infraction a été créée récemment concernant l’intimidation de personnes associées au système judiciaire ou d’autres personnes dans le but de nuire à l’administration de la justice ou l’intimidation de journalistes http://lois.justice.gc.ca/fr/C-46/18816.html : 423.1 (1) Il est interdit, sauf autorisation légitime, de commettre un acte visé au paragraphe (2) dans l'intention de provoquer la peur: a) soit chez un groupe de personnes ou le grand public en vue de nuire à l'administration de la justice pénale; b) soit chez une personne associée au système judiciaire en vue de lui nuire dans l'exercice de ses attributions; c) soit chez un journaliste en vue de lui nuire dans la diffusion d'information relative à une organisation criminelle. Actes interdits (2) Constitue un acte interdit aux termes du paragraphe (1) le fait, selon le cas : a) d'user de violence envers la personne associée au système judiciaire, un journaliste ou l'une de leurs connaissances ou de détruire ou d'endommager les biens de l'une de ces personnes; b) de menacer de commettre, au Canada ou à l'étranger, l'un des actes mentionnés à l'alinéa a); c) de suivre une telle personne ou une de ses connaissances avec persistance ou de façon répétée, notamment la suivre désordonnément sur une grande route; d) de communiquer de façon répétée, même indirectement, avec une telle personne ou une de ses connaissances; e) de cerner ou surveiller le lieu où une telle personne ou une de ses connaissances réside, travaille, étudie, exerce son activité professionnelle ou se trouve. Peine (3) Quiconque contrevient au présent article est coupable d'un acte criminel passible d'un emprisonnement maximal de quatorze ans. S.C. 2001, ch. 32, art. 11.

France

CODE PENAL (Partie Législative) http://admi.net/code/index-CPENALLL.html

Page 89: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entrave à la justice - 87 __________________________________________________________________

Article 434-8 Ordonnance no. 2000-916 du 19th septembre 2000, article 3 Journal officiel du 22 septembre 2000, entrant en vigueur le 1 janvier 2002. Toute menace ou tout acte d'intimidation commis envers un magistrat, un juré ou toute autre personne siégeant dans une formation juridictionnelle, un arbitre, un interprète, un expert ou l'avocat d'une partie en vue d'influencer son comportement dans l'exercice de ses fonctions est puni de trois ans d'emprisonnement et de € 45,000 d'amende. Article 434-9 (Loi n° 2000-595 du 30 juin 2000 art. 1 Journal Officiel du 1er juillet 2000) Le fait, par un magistrat, un juré ou toute autre personne siégeant dans une formation juridictionnelle, un arbitre ou un expert nommé soit par une juridiction, soit par les parties, ou une personne chargée par l'autorité judiciaire d'une mission de conciliation ou de médiation, de solliciter ou d'agréer, sans droit, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour l'accomplissement ou l'abstention d'un acte de sa fonction, est puni de dix ans d'emprisonnement et de €150,000 d'amende. Le fait de céder aux sollicitations d'une personne visée à l'alinéa précédent, ou de proposer des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques afin d'obtenir d'une de ces personnes l'accomplissement ou l'abstention d'un acte de sa fonction est puni des mêmes peines. Lorsque l'infraction définie au premier alinéa est commise par un magistrat au bénéfice ou au détriment d'une personne faisant l'objet de poursuites criminelles, la peine est portée à quinze ans de réclusion criminelle et à € 225,000 d'amende. Article 434-11 Ordonnance no. 2000-916 du 19th septembre 2000, article 3 Journal officiel du 22 septembre 2000, entrant en vigueur le 1 janvier 2002. Le fait, pour quiconque connaissant la preuve de l'innocence d'une personne détenue provisoirement ou jugée pour crime ou délit, de s'abstenir volontairement d'en apporter aussitôt le témoignage aux autorités judiciaires ou administratives est puni de trois ans d'emprisonnement et de € 45,000 d'amende. Toutefois, est exempt de peine celui qui apportera son témoignage tardivement, mais spontanément. Sont exceptés des dispositions du premier alinéa: 1. L'auteur ou le complice de l'infraction qui motivait la poursuite, ses parents en ligne directe et leurs conjoints, ainsi que ses frères et soeurs et leurs conjoints; 2. Le conjoint de l'auteur ou du complice de l'infraction qui motivait la poursuite, ou la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui. Sont également exceptées des dispositions du premier alinéa les personnes astreintes au secret dans les conditions prévues par l'article 226-13.

Page 90: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

88 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Article 434-15 Le fait d'user de promesses, offres, présents, pressions, menaces, voies de fait, manoeuvres ou artifices au cours d'une procédure ou en vue d'une demande ou défense en justice afin de déterminer autrui soit à faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation mensongère, soit à s'abstenir de faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation, est puni de trois ans d'emprisonnement et de € 45,000 d'amende, même si la subornation n'est pas suivie d'effet. Article 434-15 Le fait d'user de promesses, offres, présents, pressions, menaces, voies de fait, manoeuvres ou artifices au cours d'une procédure ou en vue d'une demande ou défense en justice afin de déterminer autrui soit à faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation mensongère, soit à s'abstenir de faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende, même si la subornation n'est pas suivie d'effet.

Page 91: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Éléments procéduraux et autres modifications législatives - 89 __________________________________________________________________

Page 92: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

90 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

PARTIE 2

ÉLÉMENTS PROCÉDURAUX ET AUTRES MODIFICATIONS LÉGISLATIVES VISANT

À ASSURER UNE INCRIMNATION EFFICACE

Page 93: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Compétence - 91 __________________________________________________________________

Page 94: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

92 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

CHAPITRE 6

Compétence

Article 15

Compétence 1. Chaque État Partie adopte les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l'égard des infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention dans les cas suivants:

a) Lorsque l'infraction est commise sur son territoire; ou

b) Lorsque l'infraction est commise à bord d'un navire qui bat son pavillon ou à bord d'un aéronef immatriculé conformément à son droit interne au moment où ladite infraction est commise.

2. Sous réserve de l'article 4 de la présente Convention, un État Partie peut également établir sa compétence à l'égard de l'une quelconque de ces infractions dans les cas suivants:

a) Lorsque l'infraction est commise à l'encontre d'un de ses ressortissants;

b) Lorsque l'infraction est commise par un de ses ressortissants ou par une personne apatride résidant habituellement sur son territoire; ou

c) Lorsque l'infraction est:

i) Une de celles établies conformément au paragraphe 1 de l'article 5 de la présente Convention et est commise hors de son territoire en vue de la commission, sur son territoire, d'une infraction grave;

ii) Une de celles établies conformément à l'alinéa b ii) du paragraphe 1 de l'article 6 de la présente Convention et est commise hors de son territoire en vue de la commission, sur son territoire, d'une infraction établie conformément aux alinéas a i) ou ii), ou b i) du paragraphe 1 de l'article 6 de la présente Convention.

3. Aux fins du paragraphe 10 de l'article 16 de la présente Convention, chaque État Partie adopte les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l'égard des infractions visées par la présente Convention lorsque l'auteur présumé se trouve sur son territoire et qu'il n'extrade pas cette personne au seul motif qu'elle est l'un de ses ressortissants.

4. Chaque État Partie peut également adopter les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l'égard des infractions visées par la présente Convention lorsque l'auteur présumé se trouve sur son territoire et qu'il ne l'extrade pas.

5. Si un État Partie qui exerce sa compétence en vertu du paragraphe 1 ou 2 du présent article a été avisé, ou a appris de toute autre façon, qu'un ou plusieurs autres États Parties mènent une enquête ou ont engagé des poursuites ou une procédure judiciaire concernant le même acte, les autorités compétentes de ces États Parties se consultent, selon qu'il convient, pour coordonner leurs actions.

6. Sans préjudice des normes du droit international général, la présente Convention n'exclut pas l'exercice de toute compétence pénale établie par un État Partie conformément à son droit interne.

1. INTRODUCTION

Page 95: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Compétence - 93 __________________________________________________________________

Il existe cinq principes sur lesquels un tribunal national peut se fonder pour décider de sa compétence. Ce sont 1) la territorialité 2) la nationalité 3) la compétence protectrice 4) l’universalité et 5) la personnalité passive (la victime). Alors que certains de ces principes sont plus largement acceptés et appliqués que d’autres, les facteurs qui déterminent la compétence sont généralement le lieu (locus) du crime, la nationalité de l’auteur du crime ou de la victime, et le type de loi à laquelle il a été fait infraction. Dans le contexte de la mondialisation, les criminels essaient fréquemment d’échapper aux lois ou aux régimes nationaux et internationaux en fragmentant leurs opérations et en se livrant à leurs actes sur les territoires de plusieurs États. La communauté internationale a pour principal souci de ne pas laisser de crime grave impuni et de s’assurer que tous les éléments du crime sont punis où qu’ils aient été commis. Les lacunes qui existent en matière de compétence et qui permettent aux fugitifs de trouver des havres de salut doivent être réduites ou éliminées. Un autre problème est que les divers éléments d’un crime peuvent avoir été commis dans plusieurs États différents qui ont tous compétence. Plutôt que de se trouver dans une situation telle que les différentes parties d’une infraction se verront traitées dans des territoires de compétences différentes, il est préférable, du point de vue des États comme de celui des défendeurs, de rechercher à traiter des accusations apparentées dans un seul État ou lors d’un seul procès. Il est donc indispensable que les États jouissent de l’autorité juridique d’assumer les compétences relatives aux crimes qui font l’objet de la Convention et des Protocoles dans un certain nombre de circonstances. Ou alors, ils devraient être en mesure de coopérer avec les États qui ont déjà exercé leurs compétences à l’égard de ces infractions. La Convention contient une série de mesures visant à faciliter une coopération aisée et efficace entre les États dans lesquels des crimes graves transnationaux sont commis par des groupes criminels organisés. La transnationalité de l’infraction est une condition sine qua non à l’application de la Convention (Art. 3). Donc en fait les États Parties sont tenus en vertu de l’article 3 de faire enquête sur les infractions transnationales visées par la Convention, tant que ces infractions ont été commises entièrement ou partiellement sur leur territoire, et de prêter assistance aux autres États lorsque ces derniers en font la demande. Toutefois, c’est l’article 15 de la Convention qui traite de la compétence à poursuivre et à punir ces infractions. D’autres articles ensuite fournissent un cadre pour la coopération avec les États qui ont déjà exercé une telle compétence. Il faut s’attendre à ce que dans certains cas un grand nombre d’États Parties soient appelés à coopérer pour l’enquête, mais à ce que quelques uns seulement soient en mesure de poursuivre en fait les criminels. La Convention exige des États qu’ils établissent leur compétence juridique lorsque les infractions sont commises sur leur territoire ou à bord de navires ou d’avions immatriculés conformément à leur droit interne64. Il est aussi exigé des

64 Voir la Convention de l’ONU de 1982 , Convention des Nations Unies sur le droit de la mer en vigueur depuis Novembre 1994. http://www.un.org/french/law/los/unclos/closindx.htm (spécialement les articles 27, 92 (1), 94, 97.

Page 96: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

94 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

États qu’ils établissent leur compétence dans les cas où ils ne peuvent pas extrader une personne pour des raisons de nationalité. Dans ces cas, le principe général aut dedere aut judicare (extrader ou poursuivre) s’appliquerait (Articles15(3) et 16(10)). En outre, les États sont invités à envisager d’établir leur compétence dans les cas où leurs ressortissants sont pris comme victimes, où l’infraction est commise par un ressortissant ou une personne apatride résidant sur leur territoire, ou si l’infraction est liée à des infractions graves et à du blanchiment d’argent ayant été planifiés ou exécutés sur leur territoire(Art. 15 (2)). La raison principale pour laquelle ils ont intérêt à étendre leur compétence à ces domaines est que cela leur permet de s’assurer que les criminels qui portent préjudice à leurs ressortissants ou à leurs intérêts nationaux ne restent pas impunis. Des dispositions analogues à celles de la présente Convention figurent dans d’autres instruments internationaux comme la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes (1988)65, la Convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption des agents publics étrangers dans les transactions internationales (1997)66 et la Convention interaméricaine sur la corruption (1996)67. Un certain nombre d’États, ayant déjà promulgué des lois à titre de parties à ces Conventions, n’auront peut-être pas besoin d’introduire des modifications très importantes afin de se conformer aux exigences de la présente Convention. 2. SOMMAIRE DES EXIGENCES PRINCIPALES Compétence obligatoire • Chaque État Partie doit être en mesure d’imposer sa compétence à l’égard des infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 lorsque ces infractions ont lieu :

(a) sur son territoire; (b) à bord d’un navire qui bat son pavillon; (c) à bord d’un avion immatriculé conformément à son droit interne (Article 15(1)). Une législation pourrait être nécessaire.

De plus, les États doivent pouvoir imposer leur compétence • (Dans les cas où un criminel présumé se trouve sur leur territoire et où ils ne l’extradent pas au motif uniquement qu’il s’agit d’un ressortissant de ce territoire– voir Art. 16 (10)) à l’égard d’actes commis même en dehors de leur territoire dans les conditions suivantes :

(a) des infractions établies conformément aux articles 5,6, 8 et 23 lorsque des groupes criminels organisés y sont impliqués;

65 Voir les dispositions concernant la compétence des états dans la Convention de 1988 Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, article 4. 66 Voir l’article 4 de cette convention (ainsi que le texte à la fin du présent chapitre). 67 Voir l’article V de cette convention (ainsi que le texte à la fin du présent chapitre).

Page 97: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Compétence - 95 __________________________________________________________________

(b) une infraction grave où est impliqué un groupe criminel organisé, à condition que l’infraction pour laquelle l’extradition est demandée soit punissable selon le droit interne aussi bien de l’État Partie qui en fait la demande et de l’État Partie qui en reçoit la demande..

(c) les infractions aux Protocoles auxquels les États sont ou ont l’intention de devenir parties(Article 15(3)).

Si les États ont déjà établi leur compétence à l’égard de tels actes, ils doivent cependant s’assurer qu’ils ont bien compétence pour les actes commis à l’intérieur comme à l’extérieur de leur territoire par un de leurs ressortissants. Une législation sera donc peut-être nécessaire. • Chaque État Partie doit, selon qu’il convient, consulter les autres États Parties dont ils sait qu’ils ont aussi établi leur compétence à l’égard de ces mêmes actes, afin qu’ils puissent coordonner leurs actions. (Article 15(5)) 3. DISPOSITIONS OBLIGATOIRES La Convention cherche à faire en sorte que chaque État Partie ayant à traiter d’une infraction à caractère transnational et organisé aura la compétence voulue. Les criminels ne devraient pouvoir trouver aucun abri contre les enquêtes et les poursuites. Il est exigé des États qu’ils établissent leur compétence dans les cas où l’infraction est de fait commise sur leur territoire et à bord de navires battant leur pavillon ou d’avions immatriculés dans leur territoire. Ils doivent aussi avoir la compétence voulue pour poursuivre des infractions commises en dehors de leur territoire, si le criminel est un de leurs ressortissants qui ne peut pas être extradé pour cette raison aux fins de poursuites judiciaires - aut dedere aut judicare (Art.15(3) et 16(10)). Dispositions pertinentes de la Convention L’article 15 (1) stipule que les États doivent établir leur compétence sur la base du principe territorial. Le paragraphe exige que chaque État Partie établisse sa compétence à l’égard des infractions qui font l’objet des articles 5, 6, 8 et 23, lorsque ces infractions sont commises :

(a) sur son territoire; (b) à bord d’un navire battant son pavillon; (c) à bord d’un avion immatriculé conformément à son droit interne.

Les États Parties dont la compétence en matière pénale ne s’étend pas actuellement à tous les actes punissables en vertu des articles 5,6,8 et 23 lorsqu’ils sont commis sur leur territoire ou à bord des navires ou avions décrits ci-dessus, devront ajouter à leur régime actuel de compétence. Pour ce faire, ils pourront se guider sur les lois dont le paragraphe 6 (ci-dessous) donne les références. Il convient de souligner que l’obligation d’établir compétence ne dépend pas des facteurs énoncés à l’article 3 (Champ d’application), c’est-à-dire de la

Page 98: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

96 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

transnationalité ou de la participation d’un groupe criminel organisé. D’après l’article 34 (2), ces facteurs ne doivent pas être pris en compte lorsqu’il s’agit d’établir des infractions pénales (sauf dans la mesure où l’article 5, à ses propres fins, exige qu’il y ait participation d’un groupe criminel organisé). Article 15 (3). La Convention exige aussi que les États puissent exercer leur compétence à l’égard d’infractions commises en dehors de leur territoire par leurs propres ressortissants, lorsque l’extradition leur est refusée pour raison de nationalité.

“Aux fins du paragraphe 10 de l’article 16 de la présente Convention, chaque État Partie adopte les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l’égard des infractions visées par la présente Convention lorsque l’auteur présumé se trouve sur son territoire et qu’il n’extrade pas cette personne au seul motif qu’elle est l’un de ses ressortissants.” (Art. 15 (3)).

Cette disposition demande aux États d’exercer leur compétence à l’égard des “infractions visées par la présente Convention” afin de pouvoir satisfaire à leur obligation énoncée à l’article 16(10), qui est de soumettre l’affaire à ses autorités compétentes aux fins de poursuites si l’extradition a été refusée en raison de la nationalité de l’auteur de l’infraction. Afin de bien comprendre la nature de l’obligation imposée par ce paragraphe, il convient d’examiner un certain nombre de facteurs : Premièrement, le paragraphe 1 exige déjà des États Parties qu’ils établissent leur compétence à l’égard des infractions commises sur leur territoire et à bord de leurs navires et de leurs avions. Le présent paragraphe demande aux États d’aller plus loin et d’établir leur compétence à l’égard d’infractions commises à l’étranger par leurs ressortissants. Étant donné que la plupart des demandes d’extradition qui entraîneraient une application du présent paragraphe concerneraient vraisemblablement des actes commis dans un autre pays, cette application est un élément indispensable de l’obligation. Deuxièmement, l’obligation d’établir leur compétence à l’égard d’infractions commises à l’étranger se limite à l’établissement de la compétence de l’État Partie envers ses ressortissants lorsque l’extradition a été refusée pour raison de nationalité. Ce paragraphe n’oblige pas les États Parties à établir leur compétence à l’égard d’infractions commises par des non ressortissants. Troisièmement, la compétence doit être étendue aux infractions “visées par la présente Convention”. Cela désigne non seulement les infractions établies en conformité avec les articles 5,6,8 et 23 mais aussi toutes les autres infractions visées par l’article 16(10). C’est-à-dire, les “infractions graves” auxquelles participent des groupes criminels organisés et qui peuvent être de nature transnationale, ou alors les cas où la personne recherchée se trouve dans l’État qui a reçu la demande (ce qui sera le cas si l’extradition est refusée pour raison de nationalité). Donc, chaque État Partie qui n’extrade pas ses ressortissants doit établir sa compétence à l’égard :

Page 99: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Compétence - 97 __________________________________________________________________

(1) des actes énoncés aux articles 5,6,8 et 23 lorsqu’ils sont commis à l’étranger par ses ressortissants;

(2) d’une infraction grave (telle que définie à l’article 2 (b) ) en vertu de son droit interne et commise à l’étranger, à laquelle a participé un groupe criminel organisé; et

(3) des infractions établies par les Protocoles auxquels l’État est ou a l’intention de devenir partie.

Article 15 (5). D’autres obligations spécifiques découlent du présent article concernant la coordination des efforts lorsque plus d’un État enquête sur une infraction donnée:

“Si un État Partie qui exerce sa compétence en vertu du paragraphe 1 ou 2 du présent article a été avisé, ou a appris de toute autre façon, qu’un ou plusieurs autres États Parties mènent une enquête ou ont engagé des poursuites ou une procédure judiciaire concernant le même acte, les autorités compétentes de ces États Parties se consultent, selon qu’il convient, pour coordonner leurs actions.”

Ainsi, la Convention exige des États qui apprennent que d’autres États Parties ont engagé une enquête ou des poursuites au sujet des mêmes infractions, qu’ils entrent en consultation avec les pays en question,selon qu’il convient, pour coordonner leurs actions. Dans certains cas, la coordination aura pour résultat que l’un des pays laissera un autre pays en charge de l’enquête ou des poursuites. Dans d’autres cas, les pays concernés pourront faire valoir leurs intérêts respectifs en échangeant l’information qu’ils auront recueillie. Dans d’autres cas encore, les États peuvent consentir à poursuivre certains individus ou certaines infractions alors que les autres individus ou infractions seront laissés à d’autres pays intéressés. Cette obligation de consulter est de nature opérationnelle et n’exige pas l’introduction de lois particulières dans le droit interne des pays. Il faut noter que l’expression “selon qu’il convient” offre la possibilité de ne pas engager de consultations si cela ne semble pas souhaitable. Toutefois, dans de nombreux cas, la conduite d’enquêtes et la poursuite de criminels graves dépendront pour réussir d’une coordination rapide des efforts entre les autorités nationales, et la coordination entre les États Parties peut permettre de saisir à temps certains éléments de preuve qui sont susceptibles de disparaître68. 4. DISPOSITIONS OPTIONNELLES En dehors de la compétence obligatoire traitée plus haut, la Convention encourage les États Parties à envisager d’établir leur compétence dans d’autres circonstances, notamment lorsqu’il a été porté atteinte à leur intérêt national. L’article 15 (2) énonce un certain nombre de cas dans lesquels les États Parties pourront imposer leur compétence, par exemple

68 Voir les Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para 27.

Page 100: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

98 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

(1) si l’infraction est commise envers un de leurs ressortissants (a) ou envers une personne qui réside habituellement sur leur territoire69;

(2) si l’infraction est commise par un de leurs ressortissants ou par une personne qui réside habituellement sur leur territoire (b);

(3) si l’infraction est commise en dehors de leur territoire par un groupe criminel organisé en vue de la commission d’une infraction grave sur leur territoire ((c)(i)); ou

(4) si l’infraction consiste à participer en dehors de leur territoire à une opération de blanchiment d’argent en vue de blanchir les produits du crime sur leur territoire ((c)(ii)).

L’article 15 (4) énonce une autre raison non obligatoire pour laquelle les États Parties souhaiteront peut-être établir leur compétence. À l’encontre de la compétence obligatoire prévue au paragraphe 3 pour permettre à un État de poursuivre ses ressortissants sur son propre territoire plutôt que de les extrader, le paragraphe 4 autorise l’établissement de sa compétence à l’égard de personnes que l’État en ayant reçu la demande refuse d’extrader pour d’autres raisons. Les États qui souhaitent établir ces bases de compétence pourront se guider sur les lois mentionnées plus loin (section 6). Enfin, la Convention indique clairement que cette liste de raisons pour l’exercice de toute compétence n’est pas exhaustive. Les États Parties peuvent établir d’autres fondements à leur compétence sans préjudice des normes du droit international général et conformément à leur droit interne:

“Sans préjudice des normes du droit international général, la présente Convention n’exclut pas l’exercice de toute compétence pénale établie par un État Partie conformément à son droit interne” (Art. 15 (6)).

L’intention ici n’est pas d’altérer les règles générales relatives à la compétence mais d’inviter les États Parties à étendre leur compétence pour faire en sorte que les crime graves transnationaux des groupes criminels organisés n’échappent pas aux poursuites en raison de lacunes dans le domaine des compétences.

5. RENVOIS A la Convention • Article 3 (Champ d’application) • Article 5 (a) (Participation à des groupes criminels organisés) • Article 6 (Blanchiment des produits du crime)

69 Selon les Notes interprétatives :”les États parties devraient prendre en considération la nécessité d’accorder une protection éventuelle, pouvant découler de l’établissement de leur compétence à l’égard de personnes apatrides pouvant être des résidents habituels ou permanents sur leur territoire.” A/55/383/Add.1, para. 26. http://www.uncjin.org/Documents/Conventions/dcatoc/final_documents/383a1f.pdf .

Page 101: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Compétence - 99 __________________________________________________________________

• Article 16 (10) (Extradition) • Article 18 (Entraide juridique)

A d’autres instruments • 1988 – Convention des Nations Unies sur le trafic illicite des stupéfiants et des

substances psychotropes. • 1996 Convention interaméricaine sur la corruption. • 1997 Convention de l’OCDE relative à la lutte contre la corruption dans des

transactions commerciales internationales. 6. EXEMPLES DE MISE EN OEUVRE Les États Parties qui devront modifier leur régime de compétence pénale afin qu’il se conforme au présent article pourront se guider, entre autres, sur les exemples suivants:

Albanie Code pénal allemand http://wings.buffalo.edu/law/bclc/germind.htm

Japon

Code pénal Japonais http://arapaho.nsuok.edu/~dreveskr/jap.html-ssi ou http://www.law.tohoku.ac.jp/tohokulaw2.html

Pologne

“Chapitre XIII. Responsabilité à l’égard d’infractions commises à l’étranger

Article 109. Le droit pénal polonais s’appliquera aux citoyens polonais qui ont commis une infraction à l’étranger.

Article 110.

§ 1. Le droit pénal polonais s’appliquera aux étrangers qui ont commis une infraction à l’étranger à l’encontre des intérêts de la République polonaise, d’un citoyen polonais, d’une personne morale polonaise ou d’une organisation polonaise n’ayant pas le statut de personne morale.

§ 2. Le droit pénal polonais s’appliquera aux étrangers dans le cas de la commission à l’étranger d’une infraction autre que celles visées au § 1, si, en vertu du droit pénal polonais, ladite infraction est passible d’une peine de privation de liberté pendant 2 ans et si l’auteur de l’infraction reste sur le territoire de la République polonaise et qu’aucune décision d’extradition n’ait été prise.

Article 111.

§ 1. La responsabilité à l’égard d’un acte commis à l’étranger est soumise, cependant, à la condition que la responsabilité pour un tel acte est également reconnue comme infraction par le droit en vigueur au lieu où il a été commis.

Page 102: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

100 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

§2. S’il existe une différence entre le droit pénal polonais et le droit en vigueur au lieu de la commission, le tribunal peut tenir compte de cette différence en faveur de l’auteur de l’infraction.

§ 3. La condition énoncée au paragraphe § 1 ne s’appliquera pas à un agent public polonais qui, alors qu’il était en fonction à l’étranger, a commis là-bas une infraction liée à l’exercice de ses fonctions, ni à une personne qui a commis une infraction en un lieu qui ne se trouve sous la compétence d’aucune autorité d’État.

Article 112. Quelles que soient les dispositions en vigueur au lieu de la commission de l’infraction, le droit pénal polonais s’appliquera à un citoyen polonais ou à un étranger dans les cas suivants:

1) une infraction à l’encontre de la sécurité interne ou externe de la République de Pologne;

2) une infraction à l’encontre de services ou d‘agents publics polonais;

3) une infraction à l’encontre des intérêts économiques essentiels de la Pologne ;

4) une infraction de fausse déposition faite à un service polonais.

Article 113. Quels que soient les règlements en vigueur au lieu de la commission de l’infraction, le code pénal polonais s’appliquera à un citoyen polonais ou à un étranger à l’égard de qui une décision d’extradition a été prise, dans le cas où a été commise à l’étranger une infraction que la République polonaise est dans l’obligation de poursuivre en vertu d’ententes internationales.”

7. AUTRES INSTRUMENTS

Convention des Nations Unies sur le trafic illicite de stupéfiants et

de substances psychotropes (1988)

Article 4 - COMPETENCE “1. Chaque partie:

a) Adopte les mesures nécessaires pour établir sa compétence en ce qui concerne les infractions qu'elle a établies conformément au paragraphe 1 de l'article 3 lorsque:

i) L'infraction a été commise sur son territoire ; ii) L'infraction a été commise à bord d'un navire battant son pavillon ou d'un aéronef immatriculé conformément à sa législation au moment où l'infraction a été commise;

b) Peut adopter les mesures nécessaires pour établir sa compétence en ce qui concerne les infractions qu'elle a établies conformément au paragraphe 1 de l'article 3 lorsque: i) l'infraction a été commise par un de ses nationaux ou par une

personne résidant habituellement sur son territoire; ii) l'infraction a été commise à bord d'un navire contre lequel

cette partie a été autorisée à prendre des mesures appropriées en vertu de l'article 17, sous réserve que cette compétence ne soit exercée que sur la base des accords ou arrangements visés aux paragraphes 4 et 9 dudit article ;

Page 103: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Compétence - 101 __________________________________________________________________

iii) l'infraction est l'une de celles qui sont établies conformément à l'alinéa c) iv) du paragraphe 1 de l'article 3 et a été commise hors de son territoire en vue de la commission sur son territoire d'une des infractions établies conformément au paragraphe 1 de l'article 3.

2. Chaque partie : a) Adopte aussi les mesures nécessaires pour établir sa compétence en

ce qui concerne les infractions qu'elle a établies conformément au paragraphe 1 de l'article 3 lorsque l'auteur présumé de l'infraction se trouve sur son territoire et qu'elle ne l'extrade pas vers le territoire d'une autre partie au motif :

i) Que l'infraction a été commise sur son territoire ou à bord d'un navire battant son pavillon ou d'un aéronef immatriculé conformément à sa législation au moment où l'infraction a été commise, ou

ii) Que l'infraction a été commise par un de ses nationaux b) Peut aussi adopter les mesures nécessaires pour établir sa

compétence en ce qui concerne les infractions qu'elle a établies conformément au paragraphe 1 de l'article 3 lorsque l'auteur présumé de l'infraction se trouve sur son territoire et qu'elle ne l'extrade pas vers le territoire d'une autre partie.

3. La présente Convention n'exclut l'exercice d'aucune compétence en matière pénale établie par une partie conformément à son droit interne.”

1997 OECD Convention sur la lutte contre la corruption d’agents

publics étrangers dans les transactions commerciales internationales:

“Article 4 - Compétence 1. Chaque partie prend les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l'égard de la corruption d'un agent public étranger lorsque l'infraction est commise en tout ou partie sur son territoire. 2. Chaque partie ayant compétence pour poursuivre ses ressortissants à raison d'infractions commises à l'étranger prend les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l'égard de la corruption d'un agent public étranger selon les mêmes principes. 3. Lorsque plusieurs parties ont compétence à l'égard d'une infraction présumée visée dans la présente convention, les parties concernées se concertent, à la demande de l'une d'entre elles, afin de décider quelle est celle qui est la mieux à même d'exercer les poursuites. 4. Chaque partie examine si le fondement actuel de sa compétence est efficace pour lutter contre la corruption d'agents publics étrangers ; si tel n'est pas le cas, elle prend les mesures correctrices appropriées.”

Convention interaméricaine sur la corruption (1996)

Article V: Compétence “1. Chaque État Partie adoptera les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l’égard des infractions qu’il a établies conformément à la présente Convention lorsque les infractions en question sont commises sur son territoire.

2. Chaque État Partie adoptera les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l’égard des infractions qu’il a établies conformément à la présente Convention lorsque ces offenses sont commises par un de ses

Page 104: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

102 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

ressortissants ou par une personne qui réside habituellement sur son territoire.

3. Chaque État Partie adoptera les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l’égard des infractions qu’il a établies conformément à la présente Convention lorsque l’auteur présumé de l’infraction se trouve sur son territoire et qu’il n’extrade pas ladite personne vers un autre pays en raison de la nationalité de l’auteur présumé. 4. La présente Convention d’exclut pas l’application de toute règle de compétence pénale établie par un État Partie en vertu de son propre droit pénal.”

Page 105: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Responsabilité des personnes morales - 103 __________________________________________________________________

CHAPITRE 7

Responsabilité des personnes morales

Article 10

Responsabilité des personnes morales

1. Chaque État Partie adopte les mesures nécessaires, conformément à ses principes juridiques, pour établir la responsabilité des personnes morales qui participent à des infractions graves impliquant un groupe criminel organisé et qui commettent les infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention.

2. Sous réserve des principes juridiques de l'État Partie, la responsabilité des personnes morales peut être pénale, civile ou administrative.

3. Cette responsabilité est sans préjudice de la responsabilité pénale des personnes physiques qui ont commis les infractions.

4. Chaque État Partie veille, en particulier, à ce que les personnes morales tenues responsables conformément au présent article fassent l'objet de sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives de nature pénale ou non pénale, y compris de sanctions pécuniaires.

1. INTRODUCTION

Des crimes graves et complexes sont souvent commis par le biais ou sous le couvert de personnes morales, comme des sociétés ou des organismes caritatifs. La structure complexe d’une société peut en dissimuler l’appartenance véritable, les clients ou les opérations particulières liées à des crimes allant de la contrebande au blanchiment d’argent et à la corruption. Certains des cadres peuvent résider en dehors du pays où l’infraction a été commise, et la responsabilité d’un e personne ou d’une autre peut s’avérer difficile à prouver. C’est pourquoi on peut remarquer une adhésion de plus en plus répandue au point de vue voulant que la seule façon de se débarrasser de ce moyen et de cette protection dont jouissent les groupes criminels organisés est d’introduire la notion de responsabilité des personnes morales. La responsabilité pénale d’une personne morale peut aussi servir à la dissuasion, en partie parce que l’ “atteinte à la réputation” peut s’avérer très coûteuse et en partie parce que cette mesure pourrait jouer le rôle de catalyseur en vue d’obtenir que de meilleures structures de gestion et de supervision mènent vers le respect des lois.

Le principe selon lequel les sociétés ne peuvent pas commettre de crime (societas

delinquere non potest) était autrefois universellement accepté. Ce principe a changé, pour commencer, dans certains systèmes de common law. Aujourd’hui, ce très vieux débat qui était de savoir si les personnes morales peuvent avoir une responsabilité pénale est passé à la question de décider comment définir cette dernière et la réglementer.

Il subsiste des préoccupations concernant l’attribution de l’intention et de la

culpabilité, la détermination du degré de culpabilité collective et le type de preuves qui seraient requises pour pouvoir pénaliser les sociétés ainsi que les sanctions qui

Page 106: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

104 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

seraient appropriées, afin d’éviter de punir des personnes innocentes. Partout, les décideurs politiques suivent le débat qui se poursuit sur des questions telles que la connaissance collective, la réglementation des contrôles internes des sociétés, la reddition des comptes et la responsabilité sociale, ou l’application de la négligence et autres normes.

Néanmoins, les législatures nationales70 et les instruments internationaux71

ajoutent de plus en plus souvent à la responsabilité des personnes physiques des dispositions spécifiques concernant la responsabilité des sociétés. En même temps, les régimes juridiques nationaux restent très variés quant à la responsabilité des sociétés. Certains États ont recours à des sanctions pénales s’appliquant à l’organisation elle-même, par exemple des amendes, confiscation de biens ou privation de droits juridiques, alors que d’autres font appel à des mesures non pénales ou “quasi-pénales”.72 Le problème principal tourne autour des modalités de reddition des comptes et du type de sanctions qui peuvent être imposées à des personnes morales, et les différentes tentatives d’harmonisation qui ont été faites avant la présente Convention témoignent de la diversité des points de vue73.

Par exemple, en annexe à la Résolution 1994/15 du Conseil économique et social sur le rôle du droit pénal envers la protection de l’environnement, figure la recommandation suivante: “(g) Il conviendrait d’encourager une acceptation plus large à l’idée d’imposer aux sociétés des amendes pénales ou non pénales ou d’autres mesures dans les territoires administratifs dont les systèmes juridiques ne reconnaissent pas la responsabilité pénale des sociétés”74. Un principe analogue se retrouve dans la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection de l’environnement par le droit pénal (1998)75. 70 Au départ, c’était surtout les pays de la tradition de common law qui ont établi une responsabilité pénale pour les personnes morales. Aujourd’hui, toutefois, plusieurs pays de l’extérieur de cette tradition juridique ont emboîté le pas et ont adopté des changements dans cette direction. Voir le Code criminel australien (1995) Partie 2.5 : Corporate Criminal Responsibility; 1976 le Code pénal des Pays Bas, article 51 ; le nouveau Code pénal français, Article 121(2), 71 Voir l’article 2 de la Convention de 1997 de l’OCDE (Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions internationales). Chaque Etat Parties doit : “Chaque Partie prend les mesures nécessaires, conformément à ses principes juridiques, pour établir la responsabilité des personnes morales en cas de corruption d'un agent public étranger”. 72 Voir, par exemple, l’exemple de l’Allemagne en ce qui a trait aux personnes dont la conduite peut entraîner une responsabilité de la personne morale. §30 Ordnungswidrigkeitengesetz 73 Le 7ième Congrès des Nations Unies sur la prévention du crime et le traitements des délinquants (Milan, 1985) enjoint les Etats membres à prendre action pour traiter de la responsabilité des instituions, compagnies et corporations et prévenir leur implication dans des activités criminelles. Les Principes directeurs relatifs à la prévention du crime et a la justice pénale dans le contexte du développement et d'un nouvel accord économique international (A/RES/40.32). 74 Voir les Recommandations concernant le rôle du droit pénal dans la protection de l’environnement Résolution du Conseil économique et social ECOSOC Résolution 1994/15. 75 L’article 9 propose que les Etats Parties adoptent : “les mesures appropriées qui pourraient être nécessaires pour infliger des sanctions et mesures pénales ou administratives aux personnes morales pour le compte desquelles une infraction visée aux articles 2 ou 3 a été commise par leurs organes, un membre de leurs organes ou d'autres représentants” Conseil de l’Europe. Convention sur la protection de l'environnement par le droit pénal (Novembre 1998).

Page 107: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Responsabilité des personnes morales - 105 __________________________________________________________________

Parmi les initiatives internationales relatives au blanchiment d’argent citons la 6ème Recommandation du GAFI 76 et les Règlements modèles de l’OEA concernant les infractions de blanchiment liées au trafic illicite et infractions connexes77. Les infractions de corruption ont fait l’objet d’efforts analogues, par exemple de la part de l’OCDE78 et de l’Union européenne79.

En se basant sur de telles initiatives, la Convention exige que la responsabilité à l’égard des infractions soit établie à la fois pour les personnes “physiques” ou biologiques et pour les personnes “morales”. L’article 10 exige que les États Parties prennent les mesures nécessaires, en conformité avec leurs principes fondamentaux, pour établir la responsabilité corporative. Cette responsabilité peut être de nature pénale, civile ou administrative, et peut donc s’adapter aux divers systèmes et approches juridiques. En même temps, la Convention exige que les sanctions qui seront introduites, quelles qu’elles soient, (monétaires ou autres) soient “efficaces, proportionnées et dissuasives” afin que l’objectif d’ensemble, qui est la dissuasion, puisse être atteint.

76 “Dans la mesure du possible, la responsabilité pénale des sociétés elles-mêmes, et non pas seulement celle de leurs salariés, devrait pouvoir être mise en cause”. Recommandation no. 6 du GAFI. http://www.fatf-gafi.org/pdf/40Rec_fr.pdf 77 Voir en particulier l’article 15 de la Convention de l’OEA (Il est cité à la fin du présent chapitre. 78 Voir la Convention de l’OCDE de 1997, Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions internationales. Elle oblige les Etats Parties à introduire dans leur lois la possibilité d’imposer des sanctions monétaire non pénales aux personnes morales qui offrent des a des agents public étrangers. 79 Voir le Livre vert sur la protection des intérêts financiers communautaires et la création d'un Procureur européen. Commission des Communautés européennes. Bruxelles, 11 décembre 2001 (COM (2001) 715 final). Le document rappelle certaines initiatives déjà prises pour encourager une certaine harmonisation des règles relatives à la responsabilité, en ce qui concerne d’une part les chefs d’entreprise, d’autre part les personnes. Le livre vert suggère également que :

Sur cette base, les chefs d'entreprise ou toute personne ayant le pouvoir de décision ou de contrôle au sein d'une entreprise devraient pouvoir être déclarés pénalement responsables selon les principes définis par leur droit interne, en cas de fraude, de corruption et de blanchiment du produit de ces dernières, commis par une personne soumise à leur autorité et pour le compte de l'entreprise. De même, les personnes morales devraient être tenues pour responsables de la commission, de la participation (en qualité de complice ou d'instigateur) ou de la tentative d’un fait de fraude, de corruption active et de blanchiment de capitaux, commis pour leur compte par toute personne qui exerce un pouvoir de direction en leur sein. Leur responsabilité devrait également être prévue lorsque le défaut de surveillance ou de contrôle de la part d'une personne ci-dessus visée a rendu possible la commission de ces faits pour le compte de ladite personne morale par une personne soumise à son autorité. La responsabilité de la personne morale ainsi envisagée n'exclut pas la responsabilité pénale des personnes physiques auteurs, instigateurs ou complices du fait de fraude, de corruption active ou de blanchiment de capitaux. http://europa.eu.int/eur-lex/fr/com/gpr/2001/com2001_0715fr01.pdf .

Page 108: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

106 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

2. SOMMAIRE DES EXIGENCES LES PLUS IMPORTANTES

L’article 10 exige l’établissement de la responsabilité des personnes morales dans le respect des principes juridiques de l’État

• Pour participation à des infractions graves impliquant une groupe criminel organisé,et

• Pour les infractions établies conformément aux articles 5,6,8 et 23 • Pour les infractions des Protocoles (dans la mesure ou les États en sont ou

envisagent d’en devenir parties (Articles 1(3)) • La responsabilité peut être de nature criminelle, civile ou administrative • Les sanctions doivent être efficaces, proportionnées et dissuasives

3. DISPOSITIONS OBLIGATOIRES L’article 10 (1) exige que tout État Partie “adopte les mesures nécessaires , conformément à ses principes juridiques, pour établir la responsabilité des personnes morales qui participent à des infractions graves impliquant un groupe criminel organisé et qui commettent des infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention”. Donc, l’obligation d’imposer la responsabilité des personnes morales est obligatoire, dans la mesure ou elle est conforme aux principes juridiques de chaque État, dans trois sortes de cas:

• Premièrement, la participation à des “infractions graves” impliquant un “groupe criminel organisé”80.

• Deuxièmement, les infractions établies par les États Parties en application des articles 5, 6, 8 et 23.

• Troisièmement, les infractions établies par tout Protocole auquel l’État est ou a l’intention de devenir partie(voir Art. 1 (3) de chaque Protocole).

Le paragraphe suivant déclare que “Sous réserve des principes juridiques de l’État Partie, la responsabilité des personnes morales peut être pénale, civile ou administrative(Art.10(2)) Comme il a été dit plus haut, ce paragraphe est compatible avec les autres initiatives internationales qui reconnaissent et s’adaptent à la diversité des approches adoptées par différents systèmes juridiques au sujet de la responsabilité des personnes morales. Ainsi, il n’y a pas obligation d’établir une responsabilité pénale si cela va à l’encontre des principes juridiques de chaque État. Dans ce dernier cas, une forme de responsabilité civile ou administrative suffira à répondre à cette exigence (voir plus loin des exemples de mesures non pénales qui peuvent être adoptées).

80 Les expressions “infraction grave” et “groupe criminel organisé” sont définies à l’article 2 (a) et (b). En pratique, l’inclusion d’une infraction dans la catégorie des “infractions grave” dépend de la façon dont l’infraction est punissable en vertu du droit interne. Un Etat désireux de voir la Convention s’appliquer à une certaine infraction doit s’assurer que la peine prévue pour cette infraction est, en droit interne, d’au moins quatre ans d’emprisonnement.

Page 109: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Responsabilité des personnes morales - 107 __________________________________________________________________

En vertu de l’article 10 (3), la responsabilité des personnes morales doit être établie “sans préjudice de la responsabilité pénale des personnes physiques qui ont commis les infractions”. La responsabilité des personnes physiques qui ont commis les actes en question s’ajoute donc à toute responsabilité corporative et ne doit pas être influencée par cette dernière. Lorsqu’un individu commet des crimes pour le compte d’une personne morale, il doit être possible de poursuivre et de punir les deux. Enfin, la Convention exige que les États “veillent à ce que les personnes morales tenues responsables conformément au présent article fassent l’objet de sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives de nature pénale ou non pénale, y compris des sanctions monétaires” (Art. 10 (4)). C’est là une disposition spécifique qui complète la disposition plus générale de l’article11(1) selon lequel les sanctions doivent tenir compte de la gravité des infractions. Chacun sait que l’enquête et les poursuites relatives aux crimes organisés transnationaux prennent beaucoup de temps. Par conséquent, les États dont les systèmes juridiques prévoient des périodes de prescription doivent veiller à ce que dans le cas d’infractions visées par la présente Convention et aux Protocoles auxquels ils sont parties, ces périodes de prescription soient assez longues, toujours compte tenu de leur droit interne et de leurs principes fondamentaux (Art. 11 (5))81. Alors que les dispositions de l’article 11 s’appliquent aux personnes physiques aussi bien qu’aux personnes morales, l’article 10 ne s’applique qu’aux personnes morales. La sanction la plus fréquemment utilisée est l’amende, qui est parfois dite pénale, et parfois non pénale82 , parfois encore l’amende peut être hybride83. Parmi les autres formes de sanctions notons la mainmise et la confiscation84, la restitution ou même la fermeture de la personne morale. Les États souhaiteront peut-être en outre envisager des sanctions non monétaires comme elles existent dans certains territoires administratifs, par exemple le retrait de certains avantages, l’interdiction de certaines activités, la publication de la sentence, la désignation d’un fiduciaire et la réglementation des structures de la société. 85 L’obligation de veiller à ce que les personnes morales fassent l’objet de sanctions entraîne l’obligation d’instituer ces dernières par législation et ne doit pas empiéter sur l’indépendance de la magistrature ni sur la discrétion de cette dernière en matière de jugement. Enfin, il ne faut pas oublier que la Convention exige l’entraide “la plus large possible, autant que les lois, traités, accords et arrangements pertinents de l’État

81 Voir le chapitre 8 du présent guide. 82 Voir, par exemple, les dispositions adoptées par la Bulgarie, la Pologne et l ‘Allemagne. 83 Voir, par exemple, les dispositions adoptées par l’Espagne et la Suisse. 84 Voir les articles 12 à 14 de la Convention qui traitent des confiscations, saisies et dispositions du

produit du crime ou des biens confisqués, ainsi que le Chapitre 9 du présent guide traitant de ces mêmes questions.

85 Voir, par exemple, les dispositions prévues par les lois de la France, l”Espagne et les Pays Bas.

Page 110: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

108 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Partie requis le permettent”, dans les cas où la personne morale est assujettie à une responsabilité pénale, civile ou administrative(Art. 18(2))86. 4. REFERENCES

• Article 2 (Définitions) • Article 11 (Poursuites, arbitrage et sanctions) • Articles 12, 13, 14 (Identification, dépistage, gel ou saisie des avoirs et

confiscation des produits du crime) • Article 18(2) (entraide juridique) • OCDE – Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics

étrangers dans les transactions commerciales internationales (1997) • FATF Recommandation 6 • Organisation des États américains, Règlements modèles concernant les

infractions de blanchiment liées au trafic illicite et infractions connexes • Conseil de l’Europe, Convention sur la protection de l’environnement par le

droit pénal (1998) • Conseil économique et social, Résolution 1994/15 sur le rôle du droit pénal

dans la protection de l’environnement • Principes directeurs pour la prévention du crime et la justice pénale dans le

contexte du développement et d’un nouvel ordre économique international, A/RES/40/32

• Livre vert sur la protection par le droit pénal des intérêts financiers de la Communauté et l’institution d’un procureur européen, COM (2001) 715 final

5. EXEMPLES DE MISE EN OEUVRE Les extraits ci-après, utilisés dans les pays de droit civil, viennent du Groupe de travail de l’OCDE sur la corruption dans les transactions commerciales internationales (CIME) RÈGLES DE RESPONSABILITÉ DES SOCIÉTÉS DANS LES ADMINISTRATIONS DE DROIT CIVIL DAFFE/ IME/ BR (2000)23

“Modèle 1: Un acte de la direction vu comme inconduite de la part de l’entreprise La plupart des pays, et aussi les ébauches de lois de la plupart des pays européens, s’en tiennent à l’idée d’identifier l’entreprise avec les personnes en charge et imputent la responsabilité des personnes en charge à la personne morale.

Modèle 2: Société défectueuse, (Organisation défectueuse de l’entreprise) L’idée de ce deuxième modèle est la suivante: un incident, par exemple un cas de corruption dans une affaire de l’entreprise, est associé à des

86 Le texte complet de l’article 18 (2) est le suivant : " L'entraide judiciaire la plus large possible est accordée, autant que les lois, traités, accords et arrangements pertinents de l'État Partie requis le permettent, lors des enquêtes, poursuites et procédures judiciaires concernant des infractions dont une personne morale peut être tenue responsable dans l'État Partie requérant, conformément à l'article 10 de la présente Convention." Voir également le chapitre 12 du présent guide.

Page 111: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Responsabilité des personnes morales - 109 __________________________________________________________________

déficiences au niveau de la société. Quelquefois, comme en Australie, la loi met l’accent sur une culture corporative défectueuse qui encourage la commission de certaines infractions. (Art. 12.2 Loi sur le Code pénal,1995). Dans le contexte européen, la responsabilité spéciale des entreprises est de plus en plus fondée sur l’organisation défectueuse de la société. Avec ces formes de responsabilité pour l’inconduite il n’est plus question d’imputer la responsabilité à des subordonnés mais plutôt de rejeter le blâme sur l’aspect organisation de l’entité elle-même, accusée par exemple d’avoir négligé son devoir, en tant qu’organisation, de veiller à trouver un équilibre acceptable étant donné les possibilités de dangers qui existent dans l’exploitation d’un système complexe. Cette approche souligne que la responsabilité pénale d’une entreprise signifie une responsabilité spéciale de la personne morale et n’a rien à voir avec les responsabilités des personnes physiques Modèle 3: Stricte responsabilité (le principe de la cause) Avec cette notion de responsabilité, la preuve de déficiences réelles dans l’organisme corporatif qui causeraient ou faciliteraient des infractions n’a plus de raison d’être. La création d’une organisation avec des structures d ‘exploitation complexes qui comportent des dangers intrinsèques est jugée suffisante pour imputer les conséquences dangereuses à l’entreprise dont les activités sont la source …”

À titre d’exemples de lois nationales, voir entre autres les cas suivants :

Australie

La loi sur le Code pénal australien de 1995 contient le traitement le plus complet de la responsabilité pénale des sociétés. Le chapitre qui traite spécialement de ce sujet est cité plus bas. Le code tout entier peut être téléchargé au site : www.ausimm.com.au/ohs/crimcode.pdf

Chine Article 30 du Code pénal chinois: “Toute compagnie, entreprise, institution, organe de l’État ou organisation qui présente un danger pour la société, ce qui est prescrit par la loi comme étant un crime commis par une unité, en portera la responsabilité pénale.”

France CODE PÉNAL (Partie Législative) Article 121-2 (Loi nº 2000-647 du 10 juillet 2000 art. 8 Journal Officiel du 11 juillet 2000) Les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7 et dans les cas prévus par la loi ou le règlement, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants. Toutefois, les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions commises dans l'exercice d'activités susceptibles de faire l'objet de conventions de délégation de service public.

Page 112: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

110 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

La responsabilité pénale des personnes morales n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article 121-3. (…) [exemple de responsabilité pénale pour “discrimination”] : Article 225-4 Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des infractions définies à l'article 225-2. Les peines encourues par les personnes morales sont : 1º L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;

2º Les peines mentionnées aux 2º, 3º, 4º, 5º, 8º et 9º de l'article 131-39. L'interdiction mentionnée au 2º de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise.

Danemark 1993 Loi sur les mesures pour empêcher le blanchiment d’argent. “Paragraphe 2. Si l’infraction (de blanchiment d’argent) est commise par une compagnie à responsabilité limitée, une compagnie d’actions (anpartsselskab) ou une autre compagnie semblable, une amende peut être imposée à la compagnie en tant que telle.”

7. AUTRES SOURCES D’INFORMATION

Convention pénale sur la corruption du Conseil de l’Europe http://conventions.coe.int/Treaty/FR/Treaties/Html/173.htm

Article 18 – Responsabilité des personnes morales 1 Chaque partie adopte les mesures législatives et autres qui se révèlent nécessaires pour s’assurer que les personnes morales puissent être tenues pour responsables des infractions de corruption active, de trafic d’influence et de blanchiment de capitaux établies en vertu de la présente Convention, lorsqu’elles sont commises pour leur compte par toute personne physique, agissant soit individuellement, soit en tant que membre d’un organe de la personne morale, qui exerce un pouvoir de direction en son sein, sur les bases suivantes: – un pouvoir de représentation de la personne morale; ou – une autorité pour prendre des décisions au nom de la personne morale; ou – une autorité pour exercer un contrôle au sein de la personne morale;

Page 113: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Responsabilité des personnes morales - 111 __________________________________________________________________

ainsi que de la participation d’une telle personne physique en qualité de complice ou d’instigatrice à la commission des infractions mentionnées ci-dessus.

2 Abstraction faite des cas déjà prévus au paragraphe 1, chaque partie prend les mesures nécessaires pour s’assurer qu’une personne morale puisse être tenue pour responsable lorsque l’absence de surveillance ou de contrôle de la part d’une personne physique visée au paragraphe 1 a rendu possible la commission des infractions mentionnées au paragraphe 1 pour le compte de ladite personne morale par une personne physique soumise à son autorité.

3 La responsabilité de la personne morale en vertu des paragraphes 1 et 2 n’exclut pas les poursuites pénales contre les personnes physiques auteurs, instigatrices ou complices des infractions mentionnées au paragraphe 1.

Organisation des États américains (OEA) Loi modèle sur

l’enrichissement illicite et la corruption transnationale: http://www.oas.org/

2 .Une société domiciliée dans un pays et qui commet le crime de corruption transnationale sera passible d’une amende de (…) sans que cela ait un effet sur les autres sanctions requises par la loi.

Règlements modèles de l’OEA concernant les infractions de blanchiment

liées au trafic illicite et infractions connexes (amendés récemment pour tenir compte du financement du terrorisme). http://www.cicad.oas.org/en/?/Lavado_Activos/eng/MODEL_REGUALTIONS.htm (en anglais)

Page 114: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

112 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

CHAPITRE 8

Poursuites judiciaires, jugement et sanctions

Article 11

Poursuites judiciaires, jugement et sanctions

4. Chaque État Partie rend la commission d’une infraction établie conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention passible de sanctions qui tiennent compte de la gravité de cette infraction.

5. Chaque État Partie s’efforce de faire en sorte que tout pouvoir judiciaire discrétionnaire conféré par son droit interne et afférent aux poursuites judiciaires engagées contre des individus pour des infractions visées par la présente Convention soit exercé de façon à optimiser l’efficacité des mesures de détection et de répression de ces infractions, compte dûment tenu de la nécessité d’exercer un effet dissuasif en ce qui concerne leur commission.

6. S’agissant d’infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention, chaque État Partie prend les mesures appropriées conformément à son droit interne et compte dûment tenu des droits de la défense, pour faire en sorte que les conditions auxquelles sont subordonnées les décisions de mise en liberté dans l’attente du jugement ou de la procédure d’appel tiennent compte de la nécessité d’assurer la présence du défendeur lors de la procédure pénale ultérieure.

7. Chaque État Partie s’assure que ses tribunaux ou autres autorités compétentes ont à l’esprit la gravité des infractions visées par la présente Convention lorsqu’ils envisagent l’éventualité d’une libération anticipée ou conditionnelle de personnes reconnues coupables de ces infractions.

8. Lorsqu’il y a lieu, chaque État Partie détermine, dans le cadre de son droit interne, une période de prescription prolongée au cours de laquelle des poursuites peuvent être engagées du chef d’une des infractions visées par la présente Convention, cette période étant plus longue lorsque l’auteur présumé de l’infraction s’est soustrait à la justice.

6. Aucune disposition de la présente Convention ne porte atteinte au principe selon lequel la définition des infractions établies conformément à celle-ci et des moyens juridiques de défense applicables ainsi que d’autres principes juridiques régissant la légalité des incriminations relève exclusivement du droit interne d’un État Partie et selon lequel lesdites infractions sont poursuivies et punies conformément au droit de cet État Partie.

1. INTRODUCTION Harmoniser les dispositions juridiques sur les crimes transnationaux commis par des groupes organisés, détecter les infractions, identifier et arrêter les coupables, permettre l’exercice des compétences, faciliter la coordination aisée des efforts nationaux et internationaux, toutes ces mesures sont indispensables à une stratégie mondiale concertée contre les infractions graves. Pourtant, ces mesures ne suffisent pas. Une fois que toutes les actions énumérées ci-dessus ont eu lieu, il s’agit de veiller à ce que les poursuites, le traitement et la condamnation des criminels dans le monde entier soient comparativement (symétriques?) et à la mesure du tort qu’ils ont causé et aussi des bénéfices qu’ils ont retirés de leurs activités criminelles.

Page 115: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Poursuites judiciaires, jugement et sanctions - 113 __________________________________________________________________

Les peines prévues pour les mêmes crimes divergent considérablement d’un pays à un autre, en fonction des différentes traditions, priorités et politiques nationales. Il est donc indispensable de veiller à ce que la communauté internationale applique pour le moins un niveau minimal de dissuasion pour éviter de laisser à penser que le “crime paie” parfois, même lorsque ceux qui les commettent sont condamnés. Autrement dit, les sanctions doivent clairement avoir plus de poids que les bénéfices du crime. Donc, en plus d’harmoniser leurs dispositions importantes, les États ont intérêt à fournir un effort analogue à l’égard des questions concernant les poursuites, le jugement et la punition.

C’est ce que certaines initiatives internationales ont cherché à faire à l’égard de certaines infractions particulières, notamment la Convention des Nations Unies sur le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes de décembre 198887. L’article 11 concerne cet aspect important de la lutte contre le crime organisé transnational dans le contexte des infractions visées par la Convention, et il complète les dispositions relatives à la responsabilité des personnes morales (Art. 10) et à la saisie et la confiscation des produits du crime (voir Articles 12 à14). Le présent article exige que les États Parties examinent sérieusement la gravité des infractions visées par la Convention lorsqu’ils décideront de la punition appropriée et de la possibilité d’accorder une remise en liberté ou une libération conditionnelle anticipée. Il exige aussi que les États fassent un effort pour s’assurer que tous les pouvoirs discrétionnaires dont ils disposent en vertu de leur droit interne soient mobilisés pour dissuader des infractions visées par la Convention, des infractions établies par les Protocoles (dont ils sont ou ils ont l’intention de devenir parties), et des “infractions graves”88. On s’attend fréquemment à ce que les criminels transnationaux fuient le pays où ils font l’objet de poursuites judiciaires. Pour cette raison, la Convention demande aux États de prendre des mesures pour s’assurer que ceux qui sont accusés des quatre infractions principales de la Convention89 comparaîtront lors des procédures pénales prévues, conformément à leur droit interne et aux droits de la défense. Cela est en rapport avec les décisions concernant la mise en liberté du défendeur avant le procès ou la procédure d’appel. Enfin, le présente article aborde la question des périodes de prescription. De manière générale il s’agit de limites concernant le temps qui peut s’écouler avant que soit initiée la procédure contre le défendeur. De nombreux États ne disposent pas de telles lois, tandis que d’autres les appliquent à tous les cas ou avec de rares exceptions. Lorsque ces lois existent, elles ont pour objet de décourager toute procrastination de la part des autorités chargées des poursuites90 , de prendre en compte les droits des défendeurs, et de servir l’intérêt public en menant les procédures à conclusion et en rendant promptement justice. De longs délais s’accompagnent souvent de la perte d’éléments de preuve, de défaillances de

87La Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et substances psychotropes peut être téléchargé à partir de: http://www.oas.org/juridico/MLA/fr/int/vienne88.html 88 C’est-à-dire les infractions pour lesquelles la peine possible prévue par le droit interne est d’au moins quatre ans (article 2(b). 89 En vertu des articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention. 90 Ou de la part du plaignant dans les affaires de nature civile.

Page 116: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

114 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

mémoire, de changement dans la loi ou dans le contexte social, et augmentent les possibilités d’injustice. Il faut cependant trouver un équilibre entre les différents intérêts en jeu, et la période de prescription varie considérablement de pays a pays. Mais il ne faut pas que les infractions graves restent impunies, même s’il faut plus de temps pour traduire les criminels graves en justice. Cela est particulièrement vrai dans le cas de fugitifs, car alors les retards encourus pour initier la procédure ne dépendent plus des autorités. C’est pourquoi la Convention exige que les États ayant des périodes de prescription établissent de longues périodes pour toutes les infractions visées par la Convention91 et de périodes encore plus longues pour les auteurs présumés d’infractions qui se soustraient à la justice. 2. SOMMAIRE DES PRINCIPALES EXIGENCES

La Convention exige des États Parties • Qu’ils veillent à ce que les infractions visées par la Convention donnent lieu à

des sanctions adéquates, compte tenu de la gravité de chaque infraction (Art. 11(1)).

• Qu’ils veillent à ce que tous les pouvoirs discrétionnaires à leur disposition ont été exercés afin de maximiser l’efficacité de la détection, de la répression et de la dissuasion [Art. 11(2)).

• Qu’ils prennent les mesures nécessaires à assurer la présence des défendeurs aux procédures (Art 11(3).

• Qu’ils examinent la gravité des quatre infractions principales de la Convention lorsqu’ils envisagent d’accorder une mise en liberté ou une libération conditionnelle (Art. 11(4)).

• Qu’ils instaurent, selon qu’il convient, de longues périodes de prescription relativement au commencement de la procédure pour les infractions de la Convention, notamment lorsque “l’auteur présumé de l’infraction s’est soustrait à la justice” (Art. 11(5)).

3. DISPOSITIONS OBLIGATOIRES

Les dispositions du présent article seront examinées sous les titres : bien-fondé des sanctions, poursuites, jugements, et périodes de prescription.

Bien-fondé des sanctions

D’après l’article 11 (1), “ Chaque État Partie rend la commission d’une infraction établie conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention passible de sanctions qui tiennent compte de la gravité de cette infraction”.

Il s’agit là d’une disposition générale voulant que les sanctions tiennent compte de la gravité des infractions. Le paragraphe s’applique aux quatre types

91 C’est-à-dire, incluant les infractions prévues par les Protocoles ainsi que les “infractions graves”.

Page 117: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Poursuites judiciaires, jugement et sanctions - 115 __________________________________________________________________

d’incrimination requis par la Convention et aux infractions établies par les Protocoles auxquels un État est ou envisage de devenir partie92. Les peines pour “infractions graves” relevant du droit interne sont laissées à la discrétion des législateurs. Il est réitéré que s’ils souhaitent que la Convention s’applique à de telles infractions, ces dernières doivent être assujetties d’une peine d’emprisonnement de quatre ans ou plus.93. En même temps, les rédacteurs devraient garder à l’esprit d’autres ramifications possibles de leurs décisions concernant les sanctions appropriées. Par exemple, là où la peine de mort ou l’emprisonnement à vie est possible pour une infraction donnée, cela porterait atteinte à la coopération internationale car certains États pourraient refuser l’extradition ou l’entraide juridique dans de telles conditions.

Cette exigence est générale et s’applique aussi bien aux personnes physiques qu’aux personnes morales. Comme il est dit au chapitre 7 du présent Guide, il existe d’autres dispositions plus spécifiques concernant les personnes morales à l’article10 (4), qui demande aux États de “veiller à ce que les personnes morales tenues responsables conformément au présent article fassent l’objet de sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives de nature pénale ou non pénale, y compris des sanctions pécuniaires”.

Afin de se conformer à l’obligation de veiller à ce que les personnes morales fassent l’objet de sanctions appropriées, une législation est nécessaire. La mise en œuvre de cette disposition n’implique un empiétement ni sur l’indépendance ni sur les pouvoirs discrétionnaires de la magistrature pour ce qui est du jugement. Les sanctions peuvent être pénales, civiles ou administratives94, mais les rédacteurs doivent veiller à ce qu’elles soient à la fois proportionnées et suffisamment sévères pour avoir un effet de dissuasion. Ainsi, si une personne morale reçoit une amende, cette dernière devra être “dissuasive”. Enfin, il faut noter que les États sont invités à encourager les personnes qui participent à des groupes criminels organisés à coopérer avec les autorités des services de détection et de répression, et à envisager d’offrir dans une telle éventualité l’immunité ou la clémence, conformément à leurs principes juridiques fondamentaux (Art. 26).

Poursuites La Convention exige que chaque État “s’efforce de faire en sorte que tout pouvoir judiciaire discrétionnaire conféré par son droit interne et afférent aux poursuites judiciaires engagées contre des individus pour des infractions visées par la présente Convention soit exercé de façon à optimiser l’efficacité des mesures de détection et de répression de ces infractions, compte dûment tenu de la nécessité d’exercer un effet dissuasif en ce qui concerne leur commission” (Art. 11 (2).

92 Voir l’article 1 (3) de chacun des trois Protocoles.. 93 Par exemple, voir l’article 3 (4) (a) de la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et substances psychotropes de 1988 : “punissables de sanctions tenant compte de leur gravité, telles que l'emprisonnement ou d'autres peines privatives de liberté, l'imposition d'amendes et la confiscation”. 94 Voir l’article 10 (2).

Page 118: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

116 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Cette disposition vise les pouvoirs judiciaires discrétionnaires en matière de poursuites qui existent dans plusieurs États. Ces États doivent s’efforcer de promouvoir au maximum l’application de la loi afin de décourager la commission des quatre infractions principales de la Convention, des infractions des Protocoles (dans la mesure où les États en sont parties) et des “infractions graves”.

Jugement

À l’égard des infractions visées aux articles 5, 6, 8 et 23, la Convention exige que chaque État prenne “ les mesures appropriées conformément à son droit interne et compte dûment tenu des droits de la défense, pour faire en sorte que les conditions auxquelles sont subordonnées les décisions de mise en liberté dans l’attente d’un jugement ou de la procédure d’appel tiennent compte de la nécessité d’assurer la présence du défendeur lors de la procédure pénale ultérieure” (Art 11(3)). Les opérations illégales auxquelles se livrent de nombreux groupes criminels transnationaux génèrent des profits importants. Par conséquent les défendeurs peuvent disposer de sommes considérables qui leur permettent de payer un cautionnement et d’éviter l’incarcération en attendant leur procès ou la procédure d’appel. L’effet dissuasif du cautionnement s’en trouve proportionnellement diminué, ce qui porte atteinte au bon fonctionnement de la détection et de la répression. C’est pourquoi l’article11 (3) met l’accent sur le risque posé par le recours imprudent à la mise en liberté avant un procès et avant une procédure d’appel, et demande à chaque État de prendre des mesures appropriées, compte dûment tenu de leur droit interne et des droits des défendeurs, pour s’assurer que ces derniers ne se déroberont pas à la justice. La Convention encourage aussi un régime post-condamnation plus strict en exigeant de chaque État qu’il “s’assure que les tribunaux ou autres autorités compétentes ont à l’esprit la gravité des infractions visées par la présente Convention lorsqu ‘ils envisagent l’éventualité d’une libération anticipée ou conditionnelle de personnes reconnues coupables de ces infractions” (Art. 11 (4)).

De nombreuses administrations autorisent la mise en liberté anticipée ou conditionnelle de criminels incarcérés, tandis que d‘autres interdisent complètement cette pratique. La Convention ne demande pas aux États d’introduire un tel programme si cela n’est pas prévu dans leur système95. Elle exhorte cependant les États qui ont un régime de liberté anticipée ou conditionnelle à envisager de prolonger la période requise pour l’admissibilité, compte tenu de la gravité des infractions visées par la Convention96. Période de prescription

95 Voir les Notes interprétatives, A/55/383/Add.1, par. 20. 96 Ceci peut être accompli en considérant des circonstances aggravantes qui peuvent être définies soit par le droit interne, soit par d’autres conventions. Voir par exemple, l’article 6 du Protocole contre le trafic de migrants par terre, air et mer additionnel à la Convention, ou l’article 3 (7) de la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et substances psychotropes de 1988.

Page 119: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Poursuites judiciaires, jugement et sanctions - 117 __________________________________________________________________

En vertu de l’article 11 (5), “ Lorsqu’il y a lieu, chaque État Partie détermine, dans le cadre de son droit interne, une période de prescription prolongée au cours de laquelle des poursuites peuvent être engagées du chef d’une des infractions visées par la présente Convention, cette période étant plus longue lorsque l’auteur présumé de l’infraction s’est soustrait à la justice”.

Comme il a été dit dans l’introduction au présent chapitre, de nombreux pays

n’ont pas à l’égard des infractions pénales de période de prescription après laquelle il ne peut être engagé de poursuites pour ces mêmes infractions. D’autres pays déterminent une période de prescription générale pour le commencement de la procédure, qui peut s’appliquer à tous les crimes, avec quelques exceptions clairement définies. Le souci, ici est de trouver un équilibre entre l’intérêt qu’il y a à rendre promptement justice et mener une affaire à sa fin, et à faire preuve d’impartialité à l’égard des victimes et des défendeurs. De nombreux systèmes juridiques et des Conventions internationales contiennent aussi des dispositions prévoyant le commencement de la procédure sans délais indus97. Le présent article n’exige pas que les États n’ayant pas de régime de période de prescription en institue un. Il ne s’applique qu’aux administrations qui en prévoient – d’où l’expression “lorsqu’il y a lieu”98. Dans les territoires de ces administrations, les rédacteurs devront établir des périodes assez longues dans le cas d’infractions visées par la Convention et par les Protocoles auxquels ils sont parties, conformément à leur droit interne et à leurs principes fondamentaux.

Parmi ces pays, le moment où la période débute varie beaucoup ainsi que la façon dont le temps est compté. Par exemple, dans certains pays les limites de temps ne commencent pas avant :

• Que la commission de l’infraction soit connue (par exemple, lorsqu’une plainte est déposée ou que l’infraction est découverte ou déclarée); ou,

• Que la personne accusée ait été arrêtée ou extradée et peut être forcée de comparaître devant le tribunal.

En outre, dans certains systèmes, les limites de temps peuvent être interrompues ou prolongées si l’intimé s’enfuit ou manque de se présenter au cours de la procédure. La Convention exige que les rédacteurs prévoient une période de prescription plus longue pour les cas où un criminel présumé échappe à la justice. La période prolongée est jugée nécessaire si les auteurs présumés des infractions prennent des mesures concrètes pour s’enfuir ou d’une autre manière évitent de se

97 Voir l’exemple du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (G.A. rés. 2200A (XXI),

21 U.N. GAOR Suppl. (No. 16) à 52, U.N. Doc. A/6316 (1966), 999 U.N.T.S. 171, en vigueur depuis le 23 mars 1976), Article14(3)(c): “Toute personne accusée d'une infraction pénale a droit, en pleine égalité, au moins aux garanties suivantes: (...) c) A être jugée sans retard excessif”. http://www.unhchr.ch/french/html/menu3/b/a_ccpr_fr.htm

98 Une disposition similaire se retrouve relativement aux infractions relatives aux stupéfiants à l’intérieur de la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et substances psychotropes de 1988, article 3(8) : Lorsqu'il y a lieu, chaque Partie détermine dans le cadre de son droit interne une période de prescription prolongée au cours de laquelle des poursuites peuvent être engagées du chef d'une des infractions établies conformément au paragraphe 1 du présent article. Cette période sera plus longue lorsque l'auteur présumé de l'infraction s'est soustrait à la justice.”

Page 120: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

118 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

présenter au cours de la procédure. Il faut noter aussi que dans de nombreux pays il n’est pas permis de juger quelqu’un in absentia.

Tous ces facteurs devraient être pris en compte au moment de déterminer la période de prescription, et les pays qui prévoient de telles périodes devraient les prolonger en prévision des cas où l’intimé a évité de comparaître. Dans de tels cas, le délai prolongé, qui peut rendre la tâche de la défense plus difficile, est justifié du fait de l’inconduite de l’intimé.

4. RENVOIS

A la Convention et aux protocoles • Article 2 (Définitions) • Articles 5, 6, 8, 23 (Infractions de la Convention) • Article 10 (Responsabilité des personnes morales) • Articles 12-14 (Confiscation et saisie des produits du crime) • Article 26 (Mesures propres à renforcer la coopération avec les services de

détection et de répression) • Articles 1 (3) de chaque Protocole • Article 6(3) du Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, aire

et mer A d’autres instruments • Convention des Nations Unies sur le trafic illicite de stupéfiants et de

substances psychotropes (1988) http://www.oas.org/juridico/MLA/fr/int/vienne88.html

• Les règles de Tokyo. • Entente internationale sur les droits civils et politiques (G.A. rés. 2200A

(XXI), 21 U.N. GAOR Suppl. (No. 16) à 52, U.N. Doc. A/6316 (1966), 999 U.N.T.S. 171, entrée en vigueur le 23 Mars 1976), Article14(3)(c). http://www.unhchr.ch/french/html/menu3/b/a_ccpr_fr.htm

5. EXEMPLES DE MISE EN OEUVRE

Une longue liste des différentes lois nationales et périodes de prescription peut être téléchargée au site:

http://www.undcp.org/odccp/legal_library/index-keyword-114.html

Page 121: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

La confiscation et la saisie du produit du crime - 119 __________________________________________________________________

CHAPITRE 9

L'identification, la localisation, le gel, la saisie et la confiscation du produit du crime

Article 12 Confiscation et saisie

1. Les États Parties adoptent, dans toute la mesure possible dans le cadre de leurs systèmes juridiques nationaux, les mesures nécessaires pour permettre la confiscation:

a) Du produit du crime provenant d'infractions visées par la présente Convention ou de biens dont la valeur correspond à celle de ce produit;

b) Des biens, des matériels et autres instruments utilisés ou destinés à être utilisés pour les infractions visées par la présente Convention.

2. Les États Parties adoptent les mesures nécessaires pour permettre l'identification, la localisation, le gel ou la saisie de tout ce qui est mentionné au paragraphe 1 du présent article aux fins de confiscation éventuelle.

3. Si le produit du crime a été transformé ou converti, en partie ou en totalité, en d'autres biens, ces derniers peuvent faire l'objet des mesures visées au présent article en lieu et place dudit produit.

4. Si le produit du crime a été mêlé à des biens acquis légitimement, ces biens, sans préjudice de tous pouvoirs de gel ou de saisie, peuvent être confisqués à concurrence de la valeur estimée du produit qui y a été mêlé.

5. Les revenus ou autres avantages tirés du produit du crime, des biens en lesquels le produit a été transformé ou converti ou des biens auxquels il a été mêlé peuvent aussi faire l'objet des mesures visées au présent article, de la même manière et dans la même mesure que le produit du crime.

6. Aux fins du présent article et de l'article 13 de la présente Convention, chaque État Partie habilite ses tribunaux ou autres autorités compétentes à ordonner la production ou la saisie de documents bancaires, financiers ou commerciaux. Les États Parties ne peuvent invoquer le secret bancaire pour refuser de donner effet aux dispositions du présent paragraphe.

7. Les États Parties peuvent envisager d'exiger que l'auteur d'une infraction établisse l'origine licite du produit présumé du crime ou d'autres biens pouvant faire l'objet d'une confiscation, dans la mesure où cette exigence est conforme aux principes de leur droit interne et à la nature de la procédure judiciaire et des autres procédures.

8. L'interprétation des dispositions du présent article ne doit en aucun cas porter atteinte aux droits des tiers de bonne foi.

9. Aucune disposition du présent article ne porte atteinte au principe selon lequel les mesures qui y sont visées sont définies et exécutées conformément au droit interne de chaque État Partie et selon les dispositions dudit droit.

Article 13

Coopération internationale aux fins de confiscation 1. Dans toute la mesure possible dans le cadre de son système juridique national, un État Partie qui a reçu d'un autre État Partie ayant compétence pour connaître d'une infraction visée par la présente Convention une demande de confiscation du produit du crime, des biens, des matériels ou autres instruments visés au paragraphe 1 de l'article 12 de la présente Convention, qui sont situés sur son territoire:

a) Transmet la demande à ses autorités compétentes en vue de faire prononcer

Page 122: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

120 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

une décision de confiscation et, si celle-ci intervient, la faire exécuter; ou

b) Transmet à ses autorités compétentes, afin qu'elle soit exécutée dans les limites de la demande, la décision de confiscation prise par un tribunal situé sur le territoire de l'État Partie requérant conformément au paragraphe 1 de l'article 12 de la présente Convention, pour ce qui est du produit du crime, des biens, des matériels ou autres instruments visés au paragraphe 1 de l'article 12 situés sur le territoire de l'État Partie requis.

2. Lorsqu'une demande est faite par un autre État Partie qui a compétence pour connaître d'une infraction visée par la présente Convention, l'État Partie requis prend des mesures pour identifier, localiser et geler ou saisir le produit du crime, les biens, les matériels ou les autres instruments visés au paragraphe 1 de l'article 12 de la présente Convention, en vue d'une éventuelle confiscation à ordonner soit par l'État Partie requérant, soit comme suite à une demande formulée en vertu du paragraphe 1 du présent article, par l'État Partie requis.

3. Les dispositions de l'article 18 de la présente Convention s'appliquent mutatis mutandis au présent article. Outre les informations visées au paragraphe 15 de l'article 18, les demandes faites conformément au présent article contiennent:

a) Lorsque la demande relève de l'alinéa a du paragraphe 1 du présent article, une description des biens à confisquer et un exposé des faits sur lesquels se fonde l'État Partie requérant qui permettent à l'État Partie requis de faire prononcer une décision de confiscation dans le cadre de son droit interne;

b) Lorsque la demande relève de l'alinéa b du paragraphe 1 du présent article, une copie légalement admissible de la décision de confiscation rendue par l'État Partie requérant sur laquelle la demande est fondée, un exposé des faits et des informations indiquant dans quelles limites il est demandé d'exécuter la décision;

c) Lorsque la demande relève du paragraphe 2 du présent article, un exposé des faits sur lesquels se fonde l'État Partie requérant et une description des mesures demandées.

4. Les décisions ou mesures prévues aux paragraphes 1 et 2 du présent article sont prises par l'État Partie requis conformément à son droit interne et selon les dispositions dudit droit, et conformément à ses règles de procédure ou à tout traité, accord ou arrangement bilatéral ou multilatéral le liant à l'État Partie requérant.

5. Chaque État Partie remet au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies une copie de ses lois et règlements qui donnent effet au présent article ainsi qu'une copie de toute modification ultérieurement apportée à ces lois et règlements ou une description de ces lois, règlements et modifications ultérieures.

6. Si un État Partie décide de subordonner l'adoption des mesures visées aux paragraphes 1 et 2 du présent article à l'existence d'un traité en la matière, il considère la présente Convention comme une base conventionnelle nécessaire et suffisante.

7. Un État Partie peut refuser de donner suite à une demande de coopération en vertu du présent article dans le cas où l'infraction à laquelle elle se rapporte n'est pas une infraction visée par la présente Convention.

8. L'interprétation des dispositions du présent article ne doit en aucun cas porter atteinte aux droits des tiers de bonne foi.

9. Les États Parties envisagent de conclure des traités, accords ou arrangements bilatéraux ou multilatéraux afin de renforcer l'efficacité de la coopération internationale instaurée aux fins du présent article.

Article 14

Disposition du produit du crime ou des biens confisqués

Page 123: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

La confiscation et la saisie du produit du crime - 121 __________________________________________________________________

1. Un État Partie qui confisque le produit du crime ou des biens en application de l'article 12 ou du paragraphe 1 de l'article 13 de la présente Convention en dispose conformément à son droit interne et à ses procédures administratives.

2. Lorsque les États Parties agissent à la demande d'un autre État Partie en application de l'article 13 de la présente Convention, ils doivent, dans la mesure où leur droit interne le leur permet et si la demande leur en est faite, envisager à titre prioritaire de restituer le produit du crime ou les biens confisqués à l'État Partie requérant, afin que ce dernier puisse indemniser les victimes de l'infraction ou restituer ce produit du crime ou ces biens à leurs propriétaires légitimes.

3. Lorsqu'un État Partie agit à la demande d'un autre État Partie en application des articles 12 et 13 de la présente Convention, il peut envisager spécialement de conclure des accords ou arrangements prévoyant:

a) De verser la valeur de ce produit ou de ces biens, ou les fonds provenant de leur vente, ou une partie de ceux-ci, au compte établi en application de l'alinéa c du paragraphe 2 de l'article 30 de la présente Convention et à des organismes intergouvernementaux spécialisés dans la lutte contre la criminalité organisée;

b) De partager avec d'autres États Parties, systématiquement ou au cas par cas, ce produit ou ces biens, ou les fonds provenant de leur vente, conformément à son droit interne ou à ses procédures administratives.

1. INTRODUCTION L’incrimination d’actes qui génèrent des avantages illicites importants ne suffit ni à punir ni à décourager les groupes criminels organisés. Même lorsqu’ils sont inculpés et déclarés coupables, certains de ces malfaiteurs pourront encore jouir de leurs gains illicites pour leur usage personnel et pour poursuivre leurs entreprises criminelles. En dépit de certaines sanctions, il n’en reste pas moins que dans de telles circonstances, on peut penser que “le crime est payant”.

Il est nécessaire d’instaurer des mesures pratiques pour empêcher les malfaiteurs de profiter de leurs crimes. L’une des méthodes les plus sûres consiste à faire en sorte que les pays aient des régimes sévères de confiscation permettant l’identification, le gel, la saisie et la confiscation des fonds et des biens illicitement acquis. Des mécanismes internationaux de coopération s’imposent aussi afin que les pays puissent exécuter les décrets de gel et de confiscation à l’étranger et pour régir l’utilisation des produits et des biens confisqués..

Les méthodes utilisées par les différents systèmes juridiques varient considérablement. Certains optent pour un”système fondé sur les biens”, d’autres pour un “système fondé sur la valeur” alors que d’autres combinent les deux. Le premier système prévoit la confiscation des biens qui sont soit le produits soit les instruments du crime. Le second prévoit la détermination de la valeur des produits et instruments du crime et la confiscation d’une valeur équivalente. Certains États autorisent la confiscation de la valeur dans certaines conditions (par exemple, si les produits eux-mêmes ont été utilisés, détruits ou dissimulés par les malfaiteurs)99.

99 Article 19 du Livre vert de l’Union européenne prévoit la confiscation du prix ou du produit du

crime ainsi que la possibilité de confisquer un montant équivalent d’argent si la première option n’est pas faisable (Livre vert sur la protection des intérêts financiers de la Communauté dans le droit pénal et l’institution d’un procureur européen, COM (2001) 715 final).

Page 124: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

122 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

D’autres différences portent sur la gamme d’infractions qui peuvent donner lieu

à confiscation, sur l’impératif d’une condamnation préalable100, sur la norme de la preuve (qui se situe au niveau pénal ou ;a un niveau civil plus bas)101, sur les règles concernant la possibilité de confiscation des biens d’un tiers, et sur le pouvoir de confisquer les produits ou les instruments du crime.

Le besoin d’intégration et la nécessité d’amorcer une approche plus globale sont clairs. C’est pourquoi la Convention consacre trois articles à la question102. Les articles12, 13, et 14 concernent les aspects internes et internationaux de l’identification, du gel et de la confiscation des produits et des instruments du crime103. Les termes “biens”, “produits du crime”, “gel”, “saisie”, “confiscation” et “infraction principale” sont définis à l’article 2.

(d) “Biens” désigne tous les types d’avoirs, corporels ou incorporels, meubles ou immeubles, tangibles ou intangibles ainsi que les actes juridiques ou documents attestant la propriété de ces avoirs ou les droits y relatifs.

(e) “Produit du crime” désigne tout bien provenant directement ou indirectement de la commission d’une infraction ou obtenu directement ou indirectement en la commettant.

(f) “ Gel” or “saisie” désigne l’interdiction temporaire du transfert, de la disposition ou du mouvement de biens, ou le fait d’assumer temporairement la garde ou le contrôle de biens sur décision d’un tribunal ou d’une autre autorité compétente.

(g)“Confiscation”, désigne la dépossession permanente de biens sur décision d’un tribunal ou d’une autre autorité compétente.

(h)“Infraction principale” désigne toute infraction à la suite de laquelle un produit est généré, qui est susceptible de devenir l’objet d’une infraction définie à l’article 6 de la présente Convention.”

100 Certains pays permettent la confiscation sans qu’il y ait eu condamnation, si le défendeur est

fugitif pendant un certain temps et s’il est prouvé d’après la norme civile que les biens sont le produit ou l’instrument du crime. D’autres pays autorisent une ordonnance par le biais de procédures civiles ou criminelles (par exemple, USA ou Allemagne).

101 Certaines administrations prévoient un pouvoir discrétionnaire pour renverser le fardeau de la preuve, auquel cas les auteurs d’infractions doivent démontrer que les biens sont d’origine légale (Hong Kong).

102 Le présent guide a pour but d’aider les rédacteurs de lois nationales en présentant les procédures de base qui doivent être suivies plutôt que d’expliquer en détail les questions complexes qui s’y rattachent. (comme l’administration des avoirs confisqués, la façon de le faire, les garde-fous qui devraient être introduits, etc.) La plupart de ces points font partie de discussions bien plus détaillées portant sur la tenue des dossiers, les privilèges client-avocat, et les conditions dans lesquelles quels dossiers peuvent être saisis, les conditions de déclaration, etc. .

103 Les rédacteurs dans les États qui ont l’intention de devenir parties au Protocole sur la fabrication et le trafic illicites des armes à feu, de leurs pièces et éléments et de leurs munitions noteront que le Protocole établit des principes additionnels pour la confiscation des armes à feu, et la destruction de ces mêmes armes comme méthode préconisée pour en disposer. (voir plus loin , et surtout consulter le Protocole, article 6, et le guide législatif au Protocole)

Page 125: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

La confiscation et la saisie du produit du crime - 123 __________________________________________________________________

L’article 12 exige que les États Parties adoptent des mesures, autant que possible dans le cadre de leur système juridique, permettant la confiscation des produits ou d’une valeur équivalente à celle des produits et instruments des infractions visées par la Convention104 Il oblige aussi chaque État Partie à habiliter les tribunaux ou autres autorités compétentes à ordonner la remise de dossiers bancaires et d’autres éléments de preuve afin de faciliter l’identification, le gel et la confiscation. L’article 13 ensuite établit des procédures pour la coopération internationale en matière de confiscation. Ce sont là des pouvoirs importants, car les malfaiteurs cherchent fréquemment à mettre les produits et les instruments de leurs crimes en sûreté à l’étranger afin de déjouer les efforts de dépistage et de contrôle exercés par les services de détection et de répression. Un État Partie qui reçoit une demande d’un autre État Partie est tenu en vertu de cet article de prendre des mesures particulières pour identifier, dépister, geler ou saisir les produits d’un crime en vue de leur confiscation. L’article 13 décrit également la manière sont les demandes doivent être rédigées, présentées et exécutées.

Finalement, l’article 14 traite de la dernière étape du processus de confiscation: la disposition des avoirs confisqués. Il est demandé aux États Parties de donner la priorité aux demandes d’autres États Parties visant la restitution desdits avoirs à titre de dédommagement aux victimes ou de restitution à leurs propriétaires légitimes. Les États Parties sont aussi encouragés à envisager d’inclure un accord ou un arrangement en vertu duquel le produit du crime peut être versé aux Nations Unies pour financer les activités d’assistance technique dans le cadre de la Convention, ou pour qu’il soit partagé avec les autres États Parties qui ont aidé à la confiscation Des dispositions détaillées semblables à celles de la présente Convention figurent dans la Convention des Nations Unies (1988) sur le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes105, dans la Convention internationale sur la suppression du financement du terrorisme106 et dans la Convention du Conseil de l’Europe (1990) sur le blanchiment, le dépistage, la saisie et la confiscation des produits du crime. Les pays qui ont promulgué des lois en exécution de leurs obligations en tant que parties à ces conventions n’auront peut-être pas besoin de leur apporter des amendements importants pour satisfaire aux exigences de la présente Convention. En outre, les Quarante recommandations du Groupe d’action financière (GAFI) pourront guider les pays à formuler des méthodes d’identification, de dépistage, de saisie et de confiscation des produits du crime.

Par ailleurs, la mise en oeuvre des dispositions de la présente Convention permettrait aux États de mieux se conformer aux autres conventions. 2. SOMMAIRE DES EXIGENCES PRINCIPALES

104 L’expression “autant que possible dans le cadre de leur système juridique” reconnaît la diversité

des moyens utilisés par les différents systèmes juridiques pour s’acquitter des obligations imposées par cet article. Quoiqu ‘il en soit, les pays devraient avoir d’une manière ou d’une autre la capacité de se conformer aux dispositions de l’article 12.

105 Article 5 de la Convention de 1988 . 106 Voir aussi la résolution1373 (2001) du Conseil de sécurité..

Page 126: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

124 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Article 12

Les États Parties doivent, dans la mesure du possible étant donné leur droit interne, se procurer le cadre juridique nécessaire pour permettre

La confiscation des produits du crime dérivés d’infractions visées par la Convention107 ou de biens dont la valeur correspond à celles desdits produits.(Article 12(1)(a)).

La confiscation des biens, équipements ou autres instruments utilisés ou

destinés à être utilisés pour la commission d’infractions visées par la Convention (Article 12(1)(b)).

L’identification, le dépistage, et le gel ou la saisie des produits ou des

instruments d’une infraction visée par la Convention, aux fins de leur confiscation. (Art. 12(2)).

L’application des pouvoirs de confiscation à des biens transformés ou

convertis et à des produits qui ont été mêlés à des biens obtenus par des moyens légitimes (ou à la valeur des produits en question), ainsi qu’aux avantages ou aux revenus dérivés de ces produits (Art. 12(3) -(5)).

Le pouvoir des tribunaux ou d’autres autorités compétentes d’ordonner que

les dossiers bancaires, financiers ou commerciaux soient rendus disponibles ou saisis. Le secret bancaire ne sera pas un motif légitime au refus d’obéir. (Art. 12(6)).

Article 13

Un État Partie est tenu, dans la mesure du possible compte tenu de son système juridique:

De remettre à ses autorités compétentes une demande de confiscation

envoyée par un autre État Partie, afin d’obtenir une ordonnance de confiscation et de l’exécuter.

De remettre à ses autorités compétentes, en vue de l’exécuter, la

demande d’un autre État Partie d’identifier, de dépister, de geler ou de saisir les produits d’un crime, les biens ou les instruments relatifs aux infractions visées par la Convention aux fins de leur confiscation. (Art. 13 (1) et (2)).

De procurer au Secrétaire général des Nations Unies des copies de ses

lois et règlements qui donnent effet à l’article 13 (Art. 13(5).

107 C’est-à-dire les infractions visées par les articles 5, 6, 8 et 23, les infractions visées par les

Protocoles auxquels les États sont ou ont l’intention de devenir parties, et les “infractions graves”.

Page 127: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

La confiscation et la saisie du produit du crime - 125 __________________________________________________________________

L’article 13 indique aussi quels genres d’information sont nécessaires pour les différents types de demandes. (Art. 13(3)(a – c)).

3. DISPOSITIONS OBLIGATOIRES

Les rédacteurs qui ont l’intention de ratifier et d’appliquer le Protocole sur la fabrication et le trafic illicite d’armes à feu, de leurs pièces et éléments et de leurs munitions noteront que le Protocole modifie les principes de base concernant le dépistage et la disposition, car il tient compte de la nature des armes à feu.

L’article 6 de ce Protocole ajoute quelques principes relatifs à la confiscation des

armes à feu et établit la destruction desdites armes à feu comme méthode de disposition préconisée. Il définit aussi le “dépistage” tel qu’il s’applique aux armes à feu et contient une obligation spécifique d’aider au dépistage.(Art. 3 (f) et 12 (4))108.

Dans la mesure où les armes à feu étaient soit le produit du crime soit son

instrument, toutefois, ils relèveraient aussi des articles 12 à 14 de la Convention (par exemple, pour les cas où les États sont parties à la Convention mais non au Protocole).

Champ d’application

Les articles 12 à 14 concernent toutes les infractions “visées par la Convention”. Cela inclut les infractions établies par la Convention, d’autres “infractions graves” et les infractions établies par les Protocoles auxquels les États deviennent parties. Étant donné que ces dispositions s’appliquent à l’infraction de blanchiment des produits du crime établie par la Convention (Art.6), leur applicabilité s’étend aussi indirectement à “l’éventail le plus large d’infractions principales” (voir Art.6(2)(a)-(c)).

Comme pour la plupart des autres demandes impératives de la Convention, ces

articles déterminent des normes minimales pour tous les États Parties. Les rédacteurs sont libres d’étendre les dispositions à d’autres infractions ( Art.34(3)), en décrétant les pouvoirs applicables soit à toutes les autres infractions pénales, soit à toutes les infractions visées par les lois de leur État régissant la confiscation109.

Les obligations premières de créer des pouvoirs qui permettront la confiscation

et la saisie sont inscrites à l’article 12. Pour ajouter d’autres exigences ou pour d’autres directives en matière de législation, on pourra consulter l’article 13 qui traite surtout de la coopération internationale et l’article 14 qui traite de la disposition des biens et autres produits du crime.

Produits ou biens passibles de saisie ou de confiscation – Articles 12(1), (3), (4) et (5)

108 Voir le Guide législatif au Protocole. 109 À condition que ces lois répondent à cette exigence minimale.

Page 128: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

126 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

L’obligation fondamentale de permettre la confiscation et la saisie se trouve à l’article 12 (1), (3), (4) et (5), tandis que les pouvoirs en matière de procédure lorsqu’il s’agit de dépister les avoirs et d’y avoir accès sont traités dans les paragraphes suivants

L’article 12(1)(a) exige que les États Parties rendent possible, dans la plus grande mesure possible compte tenu de leur droit interne, la confiscation:

des produits du crime dérivés d’infractions visées par la Convention ou de biens dont la valeur correspond à celle desdits produits.

de biens, d’équipement ou d’autres instruments utilisés ou destinés à être utilisés pour la commission d’infractions visées par la Convention.

Une Note interprétative souligne que ‘les termes “utilisés ou destinés à être

utilisés” désignent une intention qui, de par sa nature, pourrait être considérée comme un équivalant à une tentative d’infraction’110.

Les paragraphes 3 et 4 visent les cas où les produits ou les instruments ne sont

pas immédiatement discernables du fait que les malfaiteurs en ont rendu la détection difficile en les mêlant à des produits légitimes ou en les convertissant sous d’autres formes. Ces paragraphes exigent des États Parties qu’ils rendent possible la confiscation de biens résultant de la conversion de ces produits ainsi que de ceux auxquels les produits du crime ont été mêlés, à concurrence de la valeur estimée du produit du crime.

L’article 12 (5) exige en outre que l’État fasse en sorte que le revenu ou tout autre

profit dérivé de l’investissement des produits du crime soit aussi passible de confiscation. Une Note interprétative. Indique que “les termes ’autres avantages’ doivent englober les avantages matériels ainsi que les droits légaux, titres et créances opposables à des tiers qui peuvent faire l’objet ‘une confiscation”111.

De nombreux pays ont déjà de telles mesures à l’égard des infractions

concernant les stupéfiants, du fait d’avoir ratifié la Convention de Vienne de l988. Ils devront revoir ces lois pour déterminer s’il est besoin de les amender afin d’y englober le nombre plus grand des infractions visées par la présente Convention.

Obligations d’instaurer des pouvoirs en matière de procédure– Article 12 (2) et (6)

Les capacités d’enquête qui sont requises pour appliquer à fond les dispositions

des articles 12 à 14 dépendront en grande partie d’éléments non législatifs. Il faudra par exemple s’assurer que les services de détection et de répression ainsi que les procureurs aient reçu une formation adéquate et disposent de ressources suffisantes. Dans la plupart des cas, cependant, il faudra des lois pour garantir l’existence de pouvoirs adéquats en matière de dépistage et d’autres éléments d’enquête permettant de localiser et d’identifier les avoirs, et d’établir leur lien avec les crimes appropriés. Lorsque les malfaiteurs se rendent compte qu’ils font l’objet d’une

110 A/55/383/Add.1, par.22. 111 A/55/383/Add.1, par. 23.

Page 129: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

La confiscation et la saisie du produit du crime - 127 __________________________________________________________________

enquête ou qu’ils font face à une inculpation, ils chercheront à dissimuler leurs biens et à les mettre à l’abri des actions policières. S’ils n’ont pas la possibilité de dépister ces biens à mesure que les criminels les déplacent, les services de détection et de répression verront leurs efforts sans succès.

Les mesures législatives qui sont requises par l’article12(2) et (6) comprennent :

• “Les mesures nécessaires pour permettre l’identification , la localisation, le gel ou la saisie” des produits ou autres biens”. (Art.12(2); et

• Des mesures pour “habiliter les tribunaux ou autres autorités compétentes à ordonner la production ou la saisie de documents bancaires, financiers ou commerciaux” (Art.12(6)) L’article 12(6) établit les exigences en matière de droit procédural dans le but de

faciliter l’exécution des autres dispositions de cet article. Il exige que les États Parties s’assurent que les documents “bancaires” ou “financiers”, comme ceux d’autres compagnies offrant des services financiers, et “commerciaux”, comme les documents de transactions immobilières ou les documents des entreprises d’expédition, des transporteurs et assureurs de marchandises, puissent être produits sur ordonnance ou obtenus en effectuant une perquisition et une saisie ou par d’autres moyens qui les mettent à la disposition des services de détection et de répression aux fins de mener à bien les mesures exigées par cet article. Le même paragraphe établit le principe que le secret bancaire ne peut pas être invoqué par les États comme excuse pour ne pas appliquer les dispositions du paragraphe. Comme on le verra plus loin, la Convention établit la même règle à l’égard de l’entraide judiciaire ( Art.18(8) et le Chapitre 12 du présent Guide).

Encore une fois, ces mesures sont très semblables à celles de la Convention de

Vienne de 1988. Donc de nombreux États ont déjà ces mesures en place, tout au moins pour ce qui concerne les stupéfiants, du fait d’avoir ratifié cette Convention. Ces États devront revoir leurs lois pour s’assurer qu’elles visent le nombre plus grand des infractions visées par la présente Convention. Dispositions permettant la saisie

Les dispositions juridiques permettant la saisie ne sont pas spécifiées dans le détail, mais peuvent inclure les éléments suivants selon le cadre législatif dans lequel elles vont s’inscrire:

• L’habilitation à autoriser la saisie et ordonner la confiscation sur preuve qu’une infraction visée par la Convention a été commise et que les produits devant être saisis sont le résultat de cette infraction.

• L’habilitation à autoriser la saisie et à ordonner la confiscation sur preuve qu’une infraction visée par la Convention a été commise ou a été planifiée et que les biens devant être saisis ont été utilisés ou étaient destinés à être utilisés pour commette ladite infraction..

• L’habilitation à conclure que le crime dont les produits sont dérivés a été commis, dans les cas où cela n’a pas été fait dans le cadre de poursuites

Page 130: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

128 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Les ordonnances restrictives de gel et de saisie sont les mêmes mesures. Les pays les ont séparées avec des modalités différentes. Les rédacteurs sont libres de décider quel modèle ils veulent suivre.

Personnes pouvant faire l’objet de saisie ou de confiscation

L’art.12(7) exige que les attentes impératives concernant la saisie ou la

confiscation soient interprétées comme ne portant pas atteinte aux droits des tiers “de bonne foi”, ce qui au minimum exclut les personnes n’ayant aucune connaissance de l’infraction ou aucun lien avec son (ses) auteur(s). Cela peut aussi exclure “l’ignorance volontaire” dans chaque cas.

Une Note interprétative souligne que “l’interprétation de l’article 12 devrait tenir

compte du principe de droit international selon lequel un bien appartenant à un État étranger et utilisé à des fins non commerciales ne peut être confisqué sans l’autorisation dudit État”112. Toutefois, il s’agit là de limites à l’obligation d’adopter des lois et non pas de contraintes à ce que les législatures voudront en fait décréter. Les législateurs pourront envisager de prévoir des procédures contre toute personne en possession du produit du crime ou de biens, dispositions qui excluent certaines catégories de personnes n’ayant aucun lien avec le crime ou avec son auteur, ou alors des procédures in rem contre les produits ou les biens eux-mêmes.

Exigences de coopération internationale – Article 13

L’article 13 met de l’avant divers mécanismes visant à améliorer la coopération

internationale en matière de confiscation. Comme on l’a vu plus haut, les malfaiteurs cherchent fréquemment à placer les produits et les instruments de leurs crimes en sûreté à l’étranger. Il faut donc trouver des mécanismes qui garantiront que les malfaiteurs ne soient pas en mesure de tirer parti des frontières nationales et des divergences entre les différents systèmes juridiques afin de conserver les avantages illégaux qui leur permettent de maintenir le bon fonctionnement de leurs entreprises criminelles même s’ils font l’objet de poursuites et s’ils sont trouvés coupables.

L’article 13 (1) exige que les États Parties qui reçoivent une demande de

confiscation de la part d’un autre État Partie prennent l’une de deux mesures, autant que possible compte tenu de leur système juridique. L’État Partie requis doit soit remettre directement à ses autorités compétentes, pour exécution, une ordonnance délivrée par l’État Partie requérant (alinéa b)), soit remettre la demande à ses autorités compétentes afin d’obtenir d’elles une ordonnance de confiscation que l’État requis serait tenu d’exécuter si elle était accordée (alinéa a).

La Convention prévoit ces deux possibilités afin d’accorder une certaine

souplesse à la façon dont les États doivent exécuter les demandes de confiscation d’autres États. Certains pays font appel à un système de confiscation en vertu duquel un bien spécifique est dépisté comme dérivant d’une infraction ou comme

112 La même Note ajoute que “la Convention n’a pas pour objet d’imposer des restrictions aux

règles régissant l’immunité diplomatique ou l’immunité des États, ainsi que celle des organisations internationales” A/55/383/Add.1, para. 21.

Page 131: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

La confiscation et la saisie du produit du crime - 129 __________________________________________________________________

ayant servi à la commission de cette infraction. D’autres pays utilisent un système “fondé sur la valeur”: la valeur des produits ou instruments est calculée et des biens d’une valeur équivalente sont confisqués. Des problèmes surviennent lorsqu’un pays utilisant un système fait une demande à un pays utilisant l’autre système, à moins que le droit interne du pays requis ne soit conçu de manière à comporter suffisamment de souplesse. Les exemples de lois cités plus loin pourront être utiles pour concevoir des lois internes qui accordent une telle souplesse.

L’article 13 (2) exige que le recours aux pouvoirs qui ont été établis en vertu de

l’article 12 en matière judiciaire et en matière d’enquête s’applique aussi aux cas qui découlent d’une demande faite par un autre État Partie113. Sous réserve du droit interne et des traités applicables, les États sont tenus de donner suite à la demande d’un autre État Partie.

À cette fin, le paragraphe 3 stipule qu’il est possible d’avoir recours aux

dispositions de l’article 18 de la Convention (entraide judiciaire) pour produire les éléments de preuve et les renseignements nécessaires aux fins de l’identification, du dépistage, du gel ou de la saisie et de la confiscation visés par le présent article, et il établit la teneur des demandes à cet effet. En vertu du paragraphe 7, il n’y a cependant pas d’obligation de coopérer si l’aide recherchée ne concerne pas une infraction visée par la Convention.

En outre, comme dans le cas de l’article 12,(8), les mesures de coopération

internationale énoncées dans l’article ne devraient pas être interprétées comme portant atteinte aux droit de tiers de bonne foi.

Les rédacteurs devraient s’assurer que l’admissibilité des divers documents

(énumérés à l’art.13 (3)) ne sera pas en question lorsqu’ils seront déposés par un autre État à l’appui d’une demande de dépistage, de saisie ou de confiscation

De plus, les autorités judiciaires devraient être habilitées à reconnaître les

conclusions, jugements et ordonnances d’un tribunal étranger concernant les éléments essentiels menant à la saisie et à la confiscation, y compris toute conclusion qu’une infraction a été planifiée ou commise, ou la découverte de faits concernant des liens entre les produits ou les biens et toute infraction pertinente ou tout auteur ou auteur présumé pertinent, ainsi que les ordonnances à l’égard des pouvoirs d’enquête, de la saisie et de la confiscation.

Les exigences de l’article 13 sont aussi sous réserve des dispositions de tout traité

bilatéral ou multilatéral en vigueur dans les États Parties concernés. La Convention déclare que la décision à l’égard d’une demande de coopération

faite en vertu du paragraphe 1 ou 2 dépend en fin de compte du droit interne du pays requis ou de tout traité ou convention auquel (à laquelle) les États requis et requérant sont parties. (Art. 13 (4)). Les rédacteurs devront consulter de tels instruments et toute loi visant à les appliquer afin d’éviter les incompatibilités et

113 Une Note interprétative indique que “les références au paragraphe 1 de l’article 12 devraient être

comprises comme renvoyant également aux paragraphes 3 à 5 de l’article 12” (A/55/383/Add.1, para. 24), lorsque le produit du crime a été converti en un autre bien ou mêlé à des fonds découlant d’activités légales.

Page 132: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

130 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

pour s’assurer que toute procédure actuelle qui s’avère plus expéditive ou plus large que celles de l’article 13 ne se trouvent pas diminuée par les nouveaux amendements législatifs.

De nombreux pays ont déjà ces mesures en place, du moins à l’égard des

infractions liées aux stupéfiants, du fait de leur ratification de la Convention de Vienne de 1988. Ils devront revoir leur cadre juridique pour déterminer s’il est besoin de l’amender afin de l’appliquer aux différentes catégories d’infractions visées par la présente Convention et s’il comporte suffisamment de souplesse pour leur permettre d’assister les États Parties qui ont un système de confiscation différent du leur. 4. QUESTIONS FACULTATIVES

Le fardeau de la preuve

Lorsqu’ils créeront les pouvoirs judiciaires pour ordonner la saisie et la

confiscation, les rédacteurs de lois nationales devraient prendre en compte les questions relatives au fardeau de la preuve applicable. Dans certains systèmes, la confiscation est traitée comme une question civile, avec la norme associée de “la balance des probabilités”. Dans d’autres, la confiscation est considérée comme une peine criminelle à laquelle il convient d’appliquer la norme plus élevée “au-delà de tout doute raisonnable”. Dans certains cas, cette dernière norme pourra être exigée pour des raisons de constitutionalité et de droits de la personne.

Dans une certaine mesure, tout dépend s’il y a déjà eu un ou plusieurs

jugement(s) où la personne a été déclarée coupable dans le cadre de poursuites pénales. . Puisque dans ce cas il y a eu jugement qu’un crime a été commis sur la base d’une norme de preuve plus élevée, la norme civile plus basse peut s’appliquer dans toutes les procédures ultérieures de confiscation quant à la question de savoir si les biens en question ont été dérivés de l’infraction commise ou s’ils ont servi ou étaient destinés à servir à sa commission.

L’article 12(7) permet de faire passer le fardeau de la preuve au défendeur pour

qu’il démontre que les produits présumés d’un crime venaient en fait d’une source légitime. Certains pays ont des contraintes de nature constitutionnelle ou autres à l’égard de ce déplacement du fardeau de la preuve, aussi les pays ne sont-ils requis d’envisager cette mesure que si elle s’accorde avec leur droit interne.

De même, les rédacteurs voudront peut-être envisager d’adopter la pratique,

courante dans certains systèmes juridiques, de ne pas exiger une condamnation criminelle avant d’obtenir une ordonnance de confiscation, mais de prévoir la confiscation en se fondant sur des fardeaux de preuve moins exigeants114.

Tiers

114 Par exemple le droit britannique et le droit irlandais prévoient un tel système, avec un fardeau de

preuve plus bas pour la privation de biens que pour la privation de liberté.

Page 133: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

La confiscation et la saisie du produit du crime - 131 __________________________________________________________________

L’article 12 (8) note que les dispositions de l’article 12 ne doivent pas être interprétées comme portant atteinte aux droits des tiers de bonne foi. Le système de confiscation constitue une ingérence intentionnelle dans les intérêts économiques des individus. Pour cette raison il faut prendre bien soin de s’assurer que les systèmes élaborés par les États Parties maintiennent les droits des tiers de bonne foi qui pourraient avoir un intérêt dans les biens en question Ajustement aux divers systèmes

L’article 12 (9) reconnaît que du fait de grandes divergences entre les différents systèmes juridiques internes, les États Parties ne sont pas tenus d’appliquer les dispositions de l’article 12 selon une formule particulière (par exemple en adoptant textuellement le libellé de l’article), mais qu’ils ont la possibilité d’exécuter leurs obligations d’une manière compatible avec leur cadre juridique interne Traités additionnels

L’article13 (9) encourages les États Parties à envisager de conclure des traités,

des ententes ou des arrangements pour renforcer l’efficacité de la coopération internationale.

Disposition du produit du crime ou des biens confisqués (Article 14)

L’article 14 régit la disposition des produites du crime et des biens confisqués

mais n’impose pas d’exigences absolues. De manière générale, la disposition est régie par “le droit et les procédures administratives internes” Toutefois, les paragraphes 2 et 3 demandent que les États envisagent des options spécifiques pour ce qui est de la disposition.

L’article14 (2) exige que l’on “envisage à titre prioritaire” de restituer les produits

du crime ou les biens à un État requérant pour l’indemnisation des victimes ou pour restitution aux victimes. Pour la plupart des systèmes de confiscation, l’objectif principal est de restituer aux victimes les biens qui leur ont été pris par les malfaiteurs, et il est très utile de prévoir une procédure, dans le droit interne, qui permet le partage des avoirs confisqués entre les victimes nationales et étrangères ( Art. 24-25 et Chapitre 10 du présent Guide).

L’article14 (3)(a) demande que l’on “envisage spécialement” de verser le produit

du crime ou les biens confisqués au Fonds des Nations Unies pour la prévention du crime et pour la justice criminelle, en vue de la lutte contre le crime organisé ( Art.30 (2)(c) et GA/RES/55/25, para.9).

L’article14 (3)(b) demande le partage avec d’autres États Parties

systématiquement ou au cas par cas115. Le partage des avoirs est une arme puissante et encore peu utilisée contre le crime organisé. Il peut encourager une plus solide coopération entre les services de détection et de répression lorsqu’il s’agit de

115 Une Note interprétative indique que “lorsque cela est possible, les États Parties détermineront

s’il convient, dans le respect des garanties individuelles inscrites dans leur droit interne, d’utiliser les biens confisqués pour couvrir le coût de l’assistance fournie en application du paragraphe 2 de l’article 14” (A/55/383/Add.1, para. 25).

Page 134: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

132 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

dépister, geler et confisquer les produits du crime, puisque les autorités étrangères qui ont prêté assistance menant à la confiscation peuvent recevoir une partie des fonds, qui seront officiellement utilisés pour la lutte contre le crime. Des ententes entre un certain nombre d’États prévoient déjà à leur avantage mutuel une telle disposition des avoirs confisqués et les pays sont encouragés à introduire ce mécanisme.

Dans certains pays, de telles dispositions pourront entraîner des amendements

législatifs ou des ententes internationales qui rendront ces options possibles et créeront des procédures permettant de les envisager le cas échéant. 5. RENVOIS

Dans la Convention • Article 2 (Terminologie) • Article 6 (Incrimination du blanchiment des produits du crime) • Article 18 (Entraide judiciaire) • Articles 24-25 (Protection des victimes du crime) • Article 34 • Protocole sur la fabrication et le trafic illicite des armes à feu, de leurs pièces

et éléments et de leurs munitions. Autres instruments • Livre vert - Protection des intérêts financiers de la Communauté en droit

pénal et Institution d’un procureur européen, COM (2001) 715 final

• Convention des Nations Unies sur le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes (1988)

• Convention du Conseil de l’Europe sur le blanchiment, le dépistage, la saisie et la confiscation des produits du crime (1990)

• Les Quarante recommandations du Groupe d’action financière (GAFI)

• Convention internationale sur la suppression du financement du terrorisme

• Résolution du Conseil de sécurité1373 (2001)

• GA/RES/55/25, para.9

6. EXEMPLES DE MISE EN OEUVRE

Albanie Code pénal, Article 36 Confiscation des moyens de commettre des actes criminels La Confiscation est nécessairement décidée par le tribunal contre les personnes ayant commis des actes criminels, et elle consiste en la saisie et le transfert, en faveur de L’État, des moyens qui ont servi ou qui ont été choisis pour servir à commettre un acte criminel, ainsi que des objets, de l’argent et de tout autre bien résultant d’un acte criminel ou de toute récompense donnée ou promise pour la commission de cet acte

Page 135: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

La confiscation et la saisie du produit du crime - 133 __________________________________________________________________

Algérie

Art. 93 - La rétribution reçue par le coupable ou le montant de sa valeur, lorsque la rétribution n’a pu être saisie, est déclaré au Trésor par le jugement.

La confiscation de l’objet du crime ou du délit et des objets et instruments, ayant servi à la commettre, est prononcée.

Art. 133 - Il n’est jamais fait restitution au corrupteur des choses qu’il a livrées ou de leur valeur; elles doivent être confisquées et déclarées acquises au Trésor par le jugement.

Australie

Loi sur les produits du crime 1991, http://www.austlii.edu.au/au/legis/act/consol_act/poca1991160/index.html (en anglais)

Autriche

En matière de confiscation: Les articles 20 (a)(b)(c) du Code pénal autrichien, ainsi que les articles 144a et 445 du Code de procédure pénale. En matière de d’extradition et d’assistance mutuelle : voir les articles 50 et 64 de la Loi sur l’extradition et l’assistance mutuelle. http://www.ris.bka.gv.at/ (en anglais)

Botswana http://www.unodc.org/odccp/legal_library/bw/legal_library_1994-09-12_1994-44.html (en anglais)

Allemagne

Code pénal, Titre septième, sections 73 to 74 (f). http://www.bmj.bund.de/fra/service/droit_federal/?sid=7a0

5716fb9b156d12210308303c85b5a Nouvelle Zélande

http://www.unodc.org/unodc/legal_library/nz/legal_library_1993-03-01_1992-38.html

Pologne http://www.imolin.org/lawpolan.htm (en anglais) 7. AUTRES SOURCES D’INFORMATION

Les États Parties qui entrevoient conclure des accords ou d`autres arrangements

bilatéraux ou multilatéraux pour permettre ou favoriser le recours à des techniques d'enquête spéciales dans le cadre de la coopération internationale, telles que la surveillance électronique, les opérations d'infiltration ou les livraisons surveillées (aux fins de la mise en œuvre des paragraphes 2,3 et 4 de l'article 20) peuvent se référer inter alia à:

❏ Convention Européenne d'entraide Judiciaire En Matière Pénale http://ue.eu.int/ejn/entraide1fr.html

Page 136: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

134 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Les États Parties qui désirent aller au-delà de l'autorité qui existent en vertu de

l'article 20 lui-même et qui considèrent adopter des lois nationales pour favoriser une telle coopération même en l'absence d'accord ou d'arrangements bilatéraux ou multilatéraux peuvent se référer à inter alia:

❏ ONU Modèle de législation sur le blanchiment, la confiscation et la coopération internationale en matière de produits du crime (1999) http://www.imolin.org/ml99fre.htm

❏ Conseil de l’Europe Convention relative au blanchiment, au

dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime http://conventions.coe.int/treaty/FR/WhatYouWant.asp?NT=141

❏ Action Commune du 3 décembre 1998 adoptée par le Conseil sur la

base de l'article K.3 du traité sur l'Union européenne, concernant l'identification, le dépistage, le gel ou la saisie et la confiscation des instruments et des produits du crime http://europa.eu.int/eur-lex/pri/fr/oj/dat/1998/l_333/l_33319981209fr00010003.pdf

❏ Des suggestions pratiques, mais si elles ne sont pas nouvelles,

peuvent être obtenues en considérant le Commentaire sur la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, Publications des Nations Unies Publication No. E.98.XI.5, ISBN 92-1-148106-6

Page 137: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Protection des témoins et des victimes - 135 __________________________________________________________________

CHAPITRE 10

Protection des témoins et des victimes

Article 24 Protection des témoins

1. Chaque État Partie prend, dans la limite de ses moyens, des mesures appropriées pour assurer une protection efficace contre des actes éventuels de représailles ou d'intimidation aux témoins qui, dans le cadre de procédures pénales, font un témoignage concernant les infractions visées par la présente Convention et, le cas échéant, à leurs parents et à d'autres personnes qui leur sont proches.

2. Les mesures envisagées au paragraphe 1 du présent article peuvent consister notamment, sans préjudice des droits du défendeur, y compris du droit à une procédure régulière:

a) À établir, pour la protection physique de ces personnes, des procédures visant notamment, selon les besoins et dans la mesure du possible, à leur fournir un nouveau domicile et à permettre, le cas échéant, que les renseignements concernant leur identité et le lieu où elles se trouvent ne soient pas divulgués ou que leur divulgation soit limitée;

b) À prévoir des règles de preuve qui permettent aux témoins de déposer d'une manière qui garantisse leur sécurité, notamment à les autoriser à déposer en recourant à des techniques de communication telles que les liaisons vidéo ou à d'autres moyens adéquats.

3. Les États Parties envisagent de conclure des arrangements avec d'autres États en vue de fournir un nouveau domicile aux personnes mentionnées au paragraphe 1 du présent article.

4. Les dispositions du présent article s'appliquent également aux victimes lorsqu'elles sont témoins.

Article 25 Octroi d'une assistance et d'une protection aux victimes

1. Chaque État Partie prend, dans la limite de ses moyens, des mesures appropriées pour prêter assistance et accorder protection aux victimes d'infractions visées par la présente Convention, en particulier dans les cas de menace de représailles ou d'intimidation.

2. Chaque État Partie établit des procédures appropriées pour permettre aux victimes d'infractions visées par la présente Convention d'obtenir réparation.

3. Chaque État Partie, sous réserve de son droit interne, fait en sorte que les avis et préoccupations des victimes soient présentés et pris en compte aux stades appropriés de la procédure pénale engagée contre les auteurs d'infractions, d'une manière qui ne porte pas préjudice aux droits de la défense.

Article 26

Mesures propres à renforcer la coopération avec les services de

Page 138: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

136 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

détection et de répression

1. Chaque État Partie prend des mesures appropriées pour encourager les personnes qui participent ou ont participé à des groupes criminels organisés:

a) À fournir des informations utiles aux autorités compétentes à des fins d'enquête et de recherche de preuves sur des questions telles que:

i) L'identité, la nature, la composition, la structure ou les activités des groupes criminels organisés, ou le lieu où ils se trouvent;

ii) Les liens, y compris à l'échelon international, avec d'autres groupes criminels organisés;

iii) Les infractions que les groupes criminels organisés ont commises ou pourraient commettre;

b) À fournir une aide factuelle et concrète aux autorités compétentes, qui pourrait contribuer à priver les groupes criminels organisés de leurs ressources ou du produit du crime.

2. Chaque État Partie envisage de prévoir la possibilité, dans les cas appropriés, d'alléger la peine dont est passible un prévenu qui coopère de manière substantielle à l'enquête ou aux poursuites relatives à une infraction visée par la présente Convention.

3. Chaque État Partie envisage de prévoir la possibilité, conformément aux principes fondamentaux de son droit interne, d'accorder l'immunité de poursuites à une personne qui coopère de manière substantielle à l'enquête ou aux poursuites relatives à une infraction visée par la présente Convention.

4. La protection de ces personnes est assurée comme le prévoit l'article 24 de la présente Convention.

5. Lorsqu'une personne qui est visée au paragraphe 1 du présent article et se trouve dans un État Partie peut apporter une coopération substantielle aux autorités compétentes d'un autre État Partie, les États Parties concernés peuvent envisager de conclure des accords ou arrangements, conformément à leur droit interne, concernant l'éventuel octroi par l'autre État Partie du traitement décrit aux paragraphes 2 et 3 du présent article.

1. INTRODUCTION

Deux des chapitres précédents ont mis l’accent sur l’importance des efforts à déployer pour empêcher les criminels organisés transnationaux d’ébranler l’intégrité du processus de justice pénale et de trouver abri, pour eux-mêmes et pour leurs profits, contre les actions des services de détection et de répression. Nous avons examiné la nécessité de répondre avec efficacité à une variété d’actes liés à la corruption officielle et qui font entrave au bon fonctionnement de la justice. Nous avons vu aux chapitres 4 et 5 que la Convention contient un certain nombre de dispositions concernant les mesures que les États peuvent prendre à cet égard.

L’article 24 ajoute à ces dispositions la question des témoins et exige que les

États prennent des mesures appropriées contre l’éventualité de représailles ou d’intimidation. Il encourage à cet égard l’institution de règles concernant les procédures et les pièces à conviction, afin de renforcer les mesures de protection.

Page 139: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Protection des témoins et des victimes - 137 __________________________________________________________________

Mais pour que justice soit vraiment faite, il convient de prêter attention tout spécialement aux victimes du crime. Elles peuvent servir de témoins aussi, mais leur protection est particulièrement importante étant donné les torts très graves qu’elles risquent de subir aux mains des criminels organisés transnationaux. Les articles de journaux, les rapports des gouvernements et les recherches universitaires abondent en récits concernant les centaines de milliers de personnes qui chaque année sont les victimes de trafiquants de personnes ou d’organes humains et d’autres criminels transnationaux. Partout des hommes, des femmes et des enfants sont soumis à des travaux forcés et à d’autres formes d’exploitation économique, physique et sexuelle. Un cri d’appel pour mettre fin à ces formes contemporaines d’esclavage retentit à travers le monde entier.

Les droits des victimes du crime ont longtemps été négligés, mais récemment

plusieurs initiatives ont été prises, non seulement pour leur donner place dans la démarche judiciaire mais aussi relativement à la réparation, au dédommagement et aux mesures d’aide pour assurer leur pleine récupération116. Le terrorisme transnational est venu ajouter, bien sûr, ses propres formes de victimisation et a suscité de vives réactions internationales117.

La Convention reconnaît l’importance d’alléger l’impact des crimes organisés

transnationaux sur les personnes et sur les groupes vulnérables, et elle exige que les États prennent des mesures pour protéger les victimes contre les représailles et l’intimidation et pour introduire des procédures relatives à l’indemnisation et à la restitution.. En outre, les États devront tenir compte de la présence et du point de vue des victimes, conformément à leurs principes juridiques internes et dans le souci de respecter les droits des défendeurs.

Très important, deux des Protocoles à la présente Convention concernent tout

particulièrement la protection des victimes. Le Protocole contre la criminalité organisée transnationale visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, prévoit l’incrimination et la prévention de la traite des personnes (Protocole, Art.5), ainsi que l’assistance aux victimes, leur protection et leur rapatriement (Art.6, 8 et 9.1). Le Protocole contre le trafic illicite des migrants par terre, air et mer vise aussi la protection des migrants et le droit des réfugiés (Protocole, Art. 16 et 19)118.

116 Voir par exemple le Plan d’action du Conseil et la Commission sur la meilleure façon

d’appliquer les dispositions du traité d’Amsterdam sur une Zone de liberté, de sécurité et de justice. (OJ C19/1 23.1.99 adopté on 3.12.98); La Déclaration des principes fondamentaux de justice pour les victimes du crime et des abus de pouvoir, adoptée par la résolution 40/34 de l’Assemblée générale le 29 Novembre 1985 (http://mapage.noos.fr/institut-victimologie/R%E9s%2040-34%20ONU.pdf); La Convention relative aux droits de l'enfant (http://www.unicef.org/french/crc/crc.htm); La Convention européenne sur le dédommagement des victimes de crimes violents ETS No. : 116: (http://conventions.coe.int/Treaty/FR/WhatYouWant.asp?NT=116 ); Les victimes du crime dans l’Union européenne: réflexion sur les normes et les actions: (http://europa.eu.int/comm/justice_home/pdf/com1999-349-en.pdf)

117 Résolution du Conseil de sécurité1373 (2001). 118 Voir les Guides à ces deux Protocoles concernant la façon d’appliquer ces exigences

additionnelles, pour les États qui ont l’intention d’y devenir parties.

Page 140: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

138 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Enfin, le processus d’enquête, de détection et de répression à l’égard des groupes criminels transnationaux sophistiqués serait très avantagé par la coopération des membres de ces groupes et d’autres participants. Cela est vrai aussi pour la prévention des infractions graves et pour la protection de victimes éventuelles lorsque des renseignements de sources internes mènent à l’échec d’une tentative d’opération criminelle.

Il s’agit là de témoins bien particuliers, car ils sont eux-mêmes passibles de

poursuites du fait de leur participation directe ou indirecte à un groupe criminel organisé. Certains pays ont tenté de promouvoir la coopération de tels témoins en leur offrant, à certaines conditions, l’immunité par rapport aux poursuites et une relative clémence selon des modes qui varient de pays à pays.

La Convention exige que les États prennent des mesures pour encourager cette

forme de coopération conformément à leurs principes juridiques fondamentaux. Les mesures elles-mêmes sont laissées à la discrétion des États, à qui il est demandé, mais sans obligation, d’adopter des dispositions d’immunité et de clémence 2. SOMMAIRE DES EXIGENCES PRINCIPALES Articles 24-25 Les États sont tenus :

D accorder une protection efficace aux témoins, compte tenu des moyens disponibles, par le biais de :

o Protection physique o Changement de domicile au pays ou à l’étranger o Dispositions spéciales pour la déposition de preuves.

D’envisager des accords pour faciliter le changement de domicile.. De prêter assistance, dans les limites de leurs moyens, avec des procédures

permettant aux victimes de réclamer indemnisation et restitution. De donner aux victimes la possibilité de faire valoir leur opinion et leurs

préoccupations au moment opportun des procédures pénales et sous réserve du droit interne..

Les deux articles s’appliquent aux victimes qui sont aussi témoins. Article 26 Les États sont tenus: De prendre des mesures appropriées pour encourager les personnes qui

participent ou ont participé à des groupes criminels organisés: 1(a) À procurer des renseignements aux fins de l’enquête et à titre de

preuve. 1(b) De prêter une aide factuelle et concrète qui contribuera à

priver les groupes criminels organisés de leurs ressources ou du produit de leurs crimes

À envisager d’offrir la possibilité d’alléger la punition de personnes inculpées qui coopèrent pleinement.

À envisager la possibilité d’accorder l’immunité par rapport aux poursuites à une personne qui coopère pleinement (cela pourrait exiger une législation spéciale

Page 141: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Protection des témoins et des victimes - 139 __________________________________________________________________

dans les systèmes qui ne prévoient pas de pouvoirs discrétionnaires en matière de poursuites).

L’application de cet article peut exiger :

De nouvelles lois pour permettre la déposition de preuves sous forme incognito où à partir d’un lieu éloigné (preuve par vidéo)

De nouvelles lois créant les pouvoirs de cacher l’identité des personnes, d’établir des mesures de sécurité, etc.

De nouvelles lois qui élargissent les programmes existants de protection des témoins de manière à inclure les témoins étrangers et les personnes qui sont témoins dans toutes les procédures reliées à la Convention.

3. DISPOSITIONS OBLIGATOIRES

La Convention reconnaît l’importance de la protection des victimes et des témoins comme une fin en soi mais aussi comme moyen de s’assurer la bonne volonté et la coopération des témoins lorsqu’il s’agit de rapporter un crime et de procurer les preuves nécessaires pour poursuivre et condamner les malfaiteurs

Les articles 24 et 25 traitent respectivement et séparément des victimes

(assistance et protection) et des témoins (protection seulement) Les obligations portant sur la protection des témoins sont plus larges, mais elles

s’appliquent aussi aux personnes qui sont à la fois victimes et témoins (Art.24 (4)), et elles s’appliqueront donc toujours également aux victimes.

Protection des témoins Chaque État Partie prendra les mesures appropriées, dans les limites de ses

moyens, pour offrir une protection efficace contre les représailles et l’intimidation des témoins qui font des dépositions relatives à des infractions visées par la Convention lors de procédures pénales et, s’il y a lieu, assurera la protection de leur famille et d’autres personnes qui leur sont proches. Ces mesures pourront consister :

(a) À instaurer des procédures pour la protection physique de ces personnes,

comme un changement de domicile, et autorisant des limites à la divulgation de renseignements tels que leur nom et l’endroit où elles se trouvent.

(b) À instaurer des règles relatives à la déposition de preuves pour faire en sorte que le témoignage puisse être donné en toute sécurité par le témoin.

Ces dispositions sont impératives, mais seulement “dans les limites des moyens”

de l’État Partie concerné. De nombreux éléments d’un programme de protection des témoins sont de

nature administrative ou opérationnelle, mais les éléments ci-dessous pourront appeler des mesures législatives:

Page 142: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

140 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Les pouvoirs législatifs, ou législatifs par délégation, qui peuvent être requis pour assurer le caractère confidentiel de l’identité des témoins, et pour faciliter la création de nouvelles identités et la délivrance de nouveaux papiers d’identité de manière sûre et confidentielle. Cela pourrait inclure les pouvoirs de conclure des arrangements avec d’autres pays pour permettre un changement transfrontalier de domicile

Des amendements aux lois concernant la preuve et la procédure pénale, pour faire en sorte que les tribunaux soient habilités à permettre la déposition de témoignages sans mettre les témoins en danger et sans révéler leur identité, par exemple en utilisant des écrans protecteurs ou des liaisons vidéo (voir aussi la Convention Art.18(18) et le Protocole contre le trafic illicite des personnes Art.6(1)).

Noter que l’obligation consiste à prendre les “mesures appropriées”, ce qui signifie que les mesures prises varieront vraisemblablement selon le droit et les principes internes. La promulgation de lois devrait donc créer les pouvoirs requis pour la protection des témoins, mais sans créer d’obligation absolue de le faire dans des cas spécifiques.

Pour réglementer l’exercice des pouvoirs discrétionnaires officiels dans de tels cas, il est conseillé d’avoir recours à une subrogation législative sous forme de règlements ou de directives régissant ce qui suit:

o Les procédures à suivre pour déterminer qui est un “témoin” afin de décider si le programme doit être utilisé ou non;;

o Les procédures à suivre pour l’évaluation des risques ou des menaces;

o Les garanties, pour empêcher l’abus des pouvoirs discrétionnaires et des fonds;

o Les exigences en matière de sécurité des personnes et de l’information; et

o Dans le cas de témoins qui sont ou pourraient être aussi des malfaiteurs, des limites et des garde-fous pour protéger les membres du public de futures infractions éventuelles.

Dans les pays où la Convention et le Protocole contre le trafic illicite des personnes sont mis en oeuvre, les législateurs devraient envisager d’élargir l’application de quelque ou de toutes les mesures ci-dessus aux personnes qui sont victimes du trafic L’article 8(2) de ce Protocole stipule que tout rapatriement des victimes doit être assuré “compte dûment tenu de la sécurité de la personne…” et cette exigence s’applique aux victimes qui n’ont pas servi de “témoins”. Elle s’applique aussi au pays où la victime est rapatriée, soit comme ressortissant soit comme résident permanent, même si la victime n’a pas témoigné ou l’a fait dans un autre pays119.

Étendue de la protection offerte et signification de “témoin”

119 Pour plus de détails, consulter le Protocole Art.7-8 et le Guide à ce Protocole.

Page 143: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Protection des témoins et des victimes - 141 __________________________________________________________________

Le terme “témoin” n’est pas défini, mais l’article 24 limite le type de témoins qui font l’objet des obligations aux “témoins qui, dans le cadre de procédures pénales, font un témoignage concernant les infractions visées par la Présente Convention et, le cas échéant, à leurs parents et à d’autres personnes qui leur sont proches “

Une interprétation étroite de cette disposition indiquerait que l’article ne

s’applique que lorsque le témoignage a vraiment eu lieu, mais l’exigence de protéger les témoins de représailles “éventuelles” peut prêter à une interprétation plus large

L’expérience des pays qui ont des programmes de protection des témoins semble

indiquer qu’une approche plus large à l’application de cette exigence sera nécessaire pour garantir suffisamment de protection aux témoins qui sont disposés à coopérer lors des enquêtes et poursuites. En plus des témoins qui ont déposé en fait, les programmes de protection devraient généralement chercher à élargir la protection aux cas suivants :

À toutes les personnes qui coopèrent ou qui prêtent assistance lors des enquêtes, jusqu’à ce qu’il soit clair qu’elles ne seront pas appelées à témoigner;

Aux personnes qui fournissent des renseignements pertinents mais non pas nécessaires en tant que témoignes ou qui ne seront pas utilisés au tribunal par souci pour la sécurité de l’informateur ou d’autres personnes.

Les législateurs voudront donc peut-être rendre les dispositions applicables à

“…toute personne qui a ou qui pourrait avoir..” des renseignements qui sont ou peuvent être pertinents à l’enquête ou aux poursuites concernant une infraction visée par la Convention, que cela soit mis de l’avant comme élément de preuve ou non.

Noter aussi que cette obligation est élargie de manière à inclure la protection des

personnes qui participent ou ont participé aux activités d’un groupe criminel organisé pour ensuite prêter leur coopération et leur aide aux services de détection et de répression, qu’ils soient “témoins” ou non Art.26(4)).

Limites constitutionnelles: confrontation et divulgation

Dans le contexte des exigences constitutionnelles ou autres exigences juridiques ou légales d’un État Partie, deux contraintes peuvent exister concernant les mesures à prendre pour la mise en œuvre de cet article. Il s’agit dans les deux cas des droits fondamentaux des personnes accusées d’infractions, et l’article 24(2) indique que les mesures adoptées doivent l’être “sans préjudice des droits du défendeur”.

Dans certains pays, la déposition de preuves sans la présence physique du témoin ou en dissimulant sa véritable identité aux médias et à l’inculpé doit pouvoir être réconciliée avec les règles constitutionnelles ou autres qui permettent à l’inculpé de confronter ses accusateurs.

Dans certains pays, les exigences constitutionnelles, juridiques et légales de base incluent l’exigence que tous les renseignements en la possession des procureurs, ou tout renseignement susceptible de disculper l’accusé, doivent

Page 144: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

142 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

être divulgués pour permettre à la défense de faire son travail de façon adéquate. Ces renseignements peuvent inclure des données personnelles ou l’identité des témoins afin de permettre un contre-interrogatoire.

Dans les cas où ces intérêts sont en conflit avec les mesures prises pour protéger l’identité des témoins ou d’autre information pouvant compromettre leur sécurité, les tribunaux peuvent être appelés à improviser des solutions appropriées à chaque cas pour répondre à la nécessité fondamentale de respecter les droits de l’inculpé tout en ne divulguant pas d’information suffisante pour permettre d’identifier des sources sensibles ou de mettre ainsi en danger les témoins et les informateurs. Il peut y avoir lieu d’envisager des lois instituant et restreignant les pouvoirs discrétionnaires de la magistrature dans de tels cas. On pourra envisager les options suivantes :

Des limites statutaires aux obligations de divulgation, applicables lorsqu’un certain niveau de risque a été vérifié;

La magistrature peut exercer sa discrétion à l’égard des documents écrits, et décider ce qui n’a pas besoin d’être divulgué et qui peut donc en être effacé; et,

Des audience à huis clos dans les cas de dépositions délicates, excluant les médias et autres observateurs.

Certains éléments de la protection des témoins peuvent avoir un rapport étroit avec l’infraction et l’entrave au fonctionnement de la justice (Art. 23), notamment le recours aux menaces, à la force et à l’intimidation envers les témoins (voir le Chapitre 5 du présent Guide).

Octroi d’une assistance et d’une protection aux victimes

L’article 25 (1) exige que chaque État prenne “dans la limite de ses moyens, des

mesures appropriées pour prêter assistance et accorder protection aux victimes d’infractions visées par la présente Convention, en particulier dans les cas de menaces, de représailles ou d’intimidation”.

De manière générale, les exigences concernant la protection des victimes seront

subsumées dans les lois prévoyant la protection des témoins. L’art.24(4) exige que les États Parties fassent en sorte que toutes ces formes de protection s’appliquent à toutes les victimes qui sont également témoins, mais pour répondre aux exigences de l’article 25, les législateurs devront les étendre aux victimes qui ne sont pas témoins ou adopter des dispositions parallèles à l’égard des victimes et des témoins. De toute manière, les impératifs seront les mêmes, et l’article 25 comme l’article 24 fait spécifiquement référence à des cas éventuels de “représailles ou d’intimidation”.

En plus des exigences concernant la protection des victimes, l’article 25 exige

aussi des mesures visant à leur “prêter assistance”120.

120 Voir aussi le Protocole contre le trafic illicite des personnes, Art.6-8, qui contient des exigences additionnelles à l’égard des victimes du trafic.

Page 145: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Protection des témoins et des victimes - 143 __________________________________________________________________

Page 146: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

144 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Dédommagement ou réparation L’article 25(2) exige que des “mesures appropriées” soient au moins prises pour

permettre aux victimes d’obtenir réparation. Il n’exige pas que l’on garantisse dédommagement ou restitution, mais des mesures législatives ou autres doivent être prises pour prévoir des procédures qui permettront de faire une demande ou une revendication121.

Dans la plupart des cas, une loi sera nécessaire pour instaurer les procédures qui

s’imposent si elles n’existent pas déjà. Les pays ont souvent mis en place un ou plusieurs des mécanismes suivants pour obtenir dédommagement ou restitution :

• Des dispositions qui permettent aux victimes de poursuivre les malfaiteurs ou d’autres personnes pour dommages civils en vertu de torts statutaires ou de droit commun.

• Des dispositions permettant aux cours pénales d’accorder des dommages ou d’ordonner des dédommagements ou une restitution de la part des personnes déclarées coupables d’infractions.

• Des dispositions créant des fonds spéciaux ou des programmes qui permettront aux victimes de réclamer à l’État des indemnisations pour lésions ou dommages encourus suite à une infraction pénale.

Dans de nombreux pays, une ou plusieurs de ces options existent déjà. Les programmes existant déjà n’ont pas à être touchés par la mise en oeuvre de la Convention, mais il est possible que des amendements s’avèrent nécessaires pour garantir que toutes les infractions visées par la Convention et ses Protocoles puissent donner lieu à revendication au titre d’au moins une de ces options.

Les pays qui ne disposent d’aucune de ces options sont tenus d’en établir au

moins une et demeurent libres d’en adopter plusieurs Participation des victimes à la procédure pénale

L’article 25(3) exige que les victimes reçoivent la possibilité d’exprimer leurs

“avis et préoccupations” au cours de la procédure pénale. Dans les États où cette possibilité n’existe pas encore, des amendements aux lois régissant les procès pourront être requis. Ces mesures législatives devraient prendre en compte ce qui suit:

L’obligation ne s’applique qu’aux victimes d’infractions visées par la Convention, à savoir les quatre infractions établies par la Convention, les infractions additionnelles établies par les Protocoles et les autres “infractions graves” telles que définies à l’article 2 (b), à condition que ces infractions soient transnationales et qu’un groupe criminel organisé y soit impliqué (Art. 3).

121 L’Art.6 (4) du Protocole contre le trafic des personnes, qui a été rédigé plus tard que

l’article.25(2), est plus clair et parle de “mesures qui offrent aux victimes du trafic de personnes la possibilité d’obtenir réparation”.

Page 147: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Protection des témoins et des victimes - 145 __________________________________________________________________

Il reviendrait normalement au tribunal qui entend l’affaire ou qui mène la procédure de décider si une personne ayant demandé à faire valoir son avis ou ses préoccupations est une “victime” ou non de l’infraction en cause. S’il devait être donné à une victime la possibilité de comparaître avant que le tribunal ne se soit prononcé quant à savoir si une infraction a vraiment été commise et si l’inculpé est déclaré coupable, la loi devrait permettre au tribunal d’autoriser la participation en raison des revendications de la victime mais sans que le résultat n’influence en quoi que ce soit le jugement final. Si la victime n’est autorisée à comparaître que dans l’éventualité où l’inculpé est déclaré coupable, que ce soit avant ou après la sentence, cette question ne se posera pas.

La loi devrait permettre que la victime puisse s’exprimer sous une forme ou une autre et exiger que le tribunal prenne sa déposition en considération..

L’obligation est de permettre que les préoccupations soient “présentées”, ce qui inclut des soumissions par écrit ou des déclarations verbales. Ces dernières sont plus efficaces si la victime est capable de s’exprimer de façon convaincante. La victime n’est habituellement pas préparée ou représentée par un avocat, et il se peut que des renseignements qui ne sont pas admissibles soient dévoilés à ceux qui décident des questions de fait. Cela est un souci en particulier lorsque le procès fait intervenir des personnes non averties en matière juridique comme des jurés, et lorsque les déclarations sont faites avant la détermination finale de culpabilité.

L’obligation est de permettre la participation à des “stades appropriés” et “d’une manière qui ne porte pas préjudice aux droits de la défense”. Il faudra donc peut-être prendre des précautions pour faire en sorte que la victime ne dévoile pas d’information qui a été exclue comme élément de preuve parce qu’il a été enfreint aux droits de la défense ou qu’elle a été jugée préjudiciable au droit fondamental à un procès juste et équitable. De nombreux pays qui autorisent les victimes à comparaître (autrement que comme témoins) estiment que le “stade approprié” est après la condamnation. Si le témoignage de la victime est nécessaire, elle sera convoquée comme témoin ordinaire. Si l’inculpé est acquitté, les déclarations de la victime deviennent sans effet. Si l’inculpé est reconnu coupable, toutefois, l’information fournie par la victime a souvent une influence sur la sentence.

Une Note interprétative indique que “cet article vise essentiellement la protection physique des victimes, mais que le Comité spécial était néanmoins conscient de la nécessité de protéger les droits des personnes reconnus par le droit international applicable”122.

Coopération entre les personnes impliquées dans le crime organisé et les services de détection et de répression

122 A/55/383/Add.1, para 48.

Page 148: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

146 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

D’après l’article 26, chaque État Partie prendra des mesures appropriées pour encourager les personnes qui participent ou ont participé à des groupes criminels organisés:

❏ À fournir des renseignements qui seront utiles aux autorités chargées d’enquêter et de recueillir des pièces à conviction sur diverses affaires;

❏ À apporter aux autorités compétentes une aide concrète et factuelle apte à contribuer à priver les groupes criminels organisés de leurs ressources ou des produits de leurs crimes.

De manière générale, les incitations et protections requises pour encourager les personnes impliquées dans le crime organisé à aider les enquêteurs ou les procureurs peuvent être offertes sans avoir recours à une autorité législative, mais certaines dispositions devront faire l’objet de lois si ce n’est déjà le cas. Les États Parties sont tenus de prendre des “mesures appropriées” mais la teneur de ces mesures est laissée aux rédacteurs nationaux (voir plus loin).

Exigence d’envisager l’allégement de la peine et l’immunité

Les États sont tenus d’envisager les options d’immunité et d’allégement de la peine pour ceux qui coopèrent comme l’indiquent les paragraphes (2) et (3) de l’article 26. L’expérience de certains pays a mis en relief les mérites de telles dispositions dans le contexte de la lutte contre les groupes criminels organisés importants123. C’est pourquoi la Convention encourage l’adoption de telles options, compte tenu des principes fondamentaux du droit interne et des exigences de la Convention concernant des sanctions adéquates et dissuasives pour les auteurs d’infractions graves124.

Parmi les mesures législatives à envisager on notera les suivantes: Les juges peuvent demander l’autorité spécifique d’alléger les sentences pour

les personnes coupables d’infractions mais qui ont coopéré, et des exceptions peuvent être faites à des peines qui normalement sont assujetties à un minimum obligatoire. Il conviendra de traiter avec beaucoup de prudence les dispositions qui obligent les juges à imposer des peines plus légères, car elles peuvent soulever des inquiétudes à l’égard de l’indépendance de la magistrature et ouvrir la porte à la corruption possible des procureurs.

La possibilité d’accorder l’immunité des poursuites(Art.26(3)), si elle est envisagée, pourra exiger une loi, soit pour créer des pouvoirs discrétionnaires de ne pas poursuivre dans les cas appropriés soit de structurer à cet effet la discrétion des pouvoirs s’ils existent déjà. Il faudra peut-être prévoir une sorte d’examen judiciaire et de ratification pour instituer les modalités des arrangements officieux possibles et faire en sorte que la décision d’accorder l’immunité soit exécutoire.

La protection physique et la sécurité des personnes qui coopèrent sont les mêmes que pour les témoins en vertu de l’article 24, et sont spécifiquement reliées à l’article 24 par le paragraphe 4 de l’article 26.

123 Par exemple, voir l’expérience italienne. 124 Voir l’article 11 et le chapitre 8 de ce guide.

Page 149: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Protection des témoins et des victimes - 147 __________________________________________________________________

Lorsqu’une personne peut fournir des renseignements importants à plus d’un État dans le but de combattre le crime organisé, l’article 26(5) encourage les États Parties à envisager la possibilité d’arriver à une entente concernant l’allégement de la peine ou l’immunité de ladite personne pour ce qui est des accusations qui pourraient être portées contre elles dans ces autres États.

Enfin, une Note interprétative indique que “les mots alléger la peine`pourraient

viser non seulement l’allégement prescrit mais aussi l’allégement de facto”125. 4. QUESTIONS FACULTATIVES

Sous réserve des principes juridiques internes et des droits de la défense, l’article 24(2) autorise l’adoption de mesures comme suit:

• Établir des procédures pour la protection physique de ces personnes, par exemple dans la mesure du possible et si cela est nécessaire, leur procurer un changement de domicile et, s’il y a lieu, la non divulgation ou des limites à la divulgation des renseignements sur leur identité et sur le lieu où ils se trouvent.

• Prévoir des règles concernant les pièces à conviction qui permettent que les dépositions de témoins puissent se faire à l’aide des technologies de la communication comme les liaisons vidéo ou à l’aide d’autres moyens adéquats.

L’article 24(3) encourage, mais n’oblige pas les États à conclure des ententes ou

arrangements pour offrir un domicile dans d’autres pays aux témoins, à leur parenté et à d’autres personnes qui leur sont proches, qui ont témoigné ou témoigneront au sujet des infractions visées par la Convention, et qui ont besoin d’être protégés contre une intimidation ou des menaces de représailles éventuelles.

5. RENVOIS La Convention et ses Protocoles • Articles 5 et 6 (Corruption) • Article 11 (Poursuites judiciaires, jugement et sanctions • Article 23 (Entrave au bon fonctionnement de la justice) • Protocole pour prévenir, supprimer et punir le trafic illicite de personnes,

particulièrement des femmes et des enfants • Protocole contre le trafic de migrants par terre, air et mer

Autres instruments • Convention sur les droits de l’enfant

• Convention européenne sur l’indemnisation des victimes de crimes violents ETS No. : 116 ; http ://conventions.coe.int/Treaty/EN/cadreprincipal.htm

125 A/55/383/Add.1, para. 49.

Page 150: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

148 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

• Déclaration des principes fondamentaux de la justice pour les victimes du crime et des abus de pouvoir, Adoptée par résolution de l’ Assemblée générale des Nations Unies 40/34 du 29 Novembre 1985

• Les victimes du crime dans l’Union européenne, Réflexions sur les normes et les actions

• Résolution1373 (2001) du Conseil de sécurité 6. EXEMPLES DE MISE EN ŒUVRE

Dans plusieurs pays, un individu peut éviter une condamnation ou une peine s’il

signale les activités d’une organisation criminelle aux autorités (Costa Rica, la République dominicaine). Dans d’autres cas, le fait de rapporter les activités de l’organisation aux autorités peut être vu comme un facteur favorable à l’allégement de la peine au moment où le juge prononce la sentence (Paraguay

Albanie Code pénal, Article 311 Menace pour imposer le silence

Une menace faite à la victime d’un acte criminel pour qu’elle ne fasse pas de rapport ou de plainte, ou pour qu’elle retire son rapport ou sa plainte constitue une infraction criminelle et est passible d’une amende ou d’emprisonnement pour un maximum de deux ans

Article 79

Meurtre d’une victime en raison de ses fonctions particulières

Le meurtre:

(…) c) d’un député, d’un juge, d’un procureur, d’un avocat, d’un policier, d’un officier militaire, d’un employé de l’État pendant la période de travail ou à cause du travail qu’il effectue, à condition que les fonctions de la victime soient évidentes ou bien connues;

d) de la personne qui a rapporté l’acte criminel, du témoin, de la personne ayant subi des dommages ou de toute autre partie au procès,

sera puni par l’emprisonnement à vie ou par la peine de mort. Canada:

Loi sur le Programme de protection des témoins 1996, ch. 15 (Loi instaurant un programme de protection pour certaines personnes dans le cadre de certaines enquêtes ou poursuites) (…) DÉFINITIONS

2. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

“accord de protection “ Accord conclu aux termes de l'alinéa 6(1)c).

“bénéficiaire “ Personne protégée en vertu du programme.

Page 151: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Protection des témoins et des victimes - 149 __________________________________________________________________

“commissaire “ Le commissaire de la Gendarmerie royale du Canada.

“Gendarmerie “ La Gendarmerie royale du Canada.

“ministre “ Le solliciteur général du Canada.

“programme “ Le programme de protection des témoins instauré par l'article 4.

“protection “ La protection peut comprendre le déménagement, le logement, le changement d'identité de même que l'assistance psychologique et le soutien financier nécessaires à ces fins ainsi qu'à toutes celles visant à assurer la sécurité du bénéficiaire ou à en faciliter la réinstallation ou l'autonomie.

“témoin“ Personne qui :

a) soit a fourni ou accepté de fournir des renseignements ou des éléments de preuve dans le cadre d'une enquête ou d'une poursuite relative à une infraction -- ou y a participé ou a accepté d'y participer -- et, de ce fait, peut avoir besoin de protection, sa sécurité étant mise en danger;

b) soit, en raison de ses liens avec la personne visée à l'alinéa a) et pour les motifs qui y sont énoncés, peut également avoir besoin de protection.

OBJET 3. La présente loi a pour objet de promouvoir le respect de la loi en facilitant la protection des personnes qui, directement ou indirectement, contribuent à la faire appliquer dans le cadre, selon le cas :

a) des activités de la Gendarmerie ne résultant pas d'un arrangement conclu en vertu de l'article 20 de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada;

b) des activités d'un organisme chargé de l'application de la loi ou d'un tribunal pénal international, avec lequel un accord ou un arrangement a été conclu en vertu de l'article 14.

PROGRAMME DE PROTECTION DES TÉMOINS 4. Est instauré le programme de protection des témoins, administré par le commissaire.

5. Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, le commissaire peut désigner les bénéficiaires et déterminer l'étendue de la protection qui leur est accordée.

6. (1) Pour pouvoir bénéficier du programme, un témoin doit :

a) faire l'objet d'une recommandation de la part d'un organisme chargé de l'application de la loi ou d'un tribunal pénal international;

b) fournir au commissaire, conformément aux règlements afférents, les renseignements sur ses antécédents personnels de nature à lui permettre de prendre en compte les facteurs énoncés à l'article 7 à son sujet;

c) conclure avec le commissaire ou faire conclure en son nom un accord établissant les obligations de chaque partie.

Page 152: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

150 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

(2) Par dérogation au paragraphe (1), le commissaire peut, en situation d'urgence, fournir une protection pendant une période maximale de quatre-vingt-dix jours à une personne avec laquelle un accord de protection n'a pas été conclu.

7. Pour désigner les bénéficiaires du programme, le commissaire tient compte des facteurs suivants :

a) la nature du risque encouru par le témoin pour sa sécurité;

b) le danger résultant pour la collectivité de son admission au programme;

c) son rôle dans l'enquête ou la poursuite et la nature de celle-ci;

d) la valeur de sa participation ou des renseignements ou des éléments de preuve qu'il a fournis ou accepté de fournir;

e) sa capacité à s'adapter au programme eu égard à sa maturité, son jugement ou ses autres caractéristiques personnelles ainsi qu'à ses liens familiaux;

f) le coût de la protection dans le cadre du programme;

g) les autres formes possibles de protection que le programme;

h) tous autres facteurs qu'il estime pertinents.

8. L'accord de protection est réputé comporter l'obligation:

a) pour le commissaire, de prendre les mesures raisonnables pour assurer au bénéficiaire la protection visée à l'accord;

b) pour le bénéficiaire :

(i) de fournir les renseignements ou les éléments de preuve requis dans le cadre de l'enquête ou de la poursuite qui a rendu nécessaire la protection, ou d'y participer dans la mesure requise,

(ii) de s'acquitter de ses obligations financières légales, à l'exception de celles qui incombent expressément au commissaire,

(iii) de s'acquitter de ses obligations juridiques, notamment celles qui concernent la garde des enfants et le versement d'une pension alimentaire à leur égard,

(iv) de s'abstenir de participer à une activité qui constitue une infraction à une loi fédérale ou qui compromet le programme ou sa sécurité ou celle d'un autre bénéficiaire,

(v) d'exécuter les demandes ou instructions que peut valablement formuler le commissaire au sujet de sa protection et de ses obligations.

9. (1) Le commissaire peut mettre fin à la protection d'un bénéficiaire dans les cas où il est démontré que :

a) des renseignements importants touchant à l'admission au programme de celui-ci ne lui ont pas été communiqués ou l'ont été d'une façon erronée;

Page 153: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Protection des témoins et des victimes - 151 __________________________________________________________________

b) l'intéressé a, délibérément et gravement, contrevenu aux obligations énoncées dans l'accord de protection.

(2) Avant de mettre fin à la protection d'un bénéficiaire, le commissaire prend les mesures utiles pour l'en informer et lui donner la possibilité de présenter des observations.

10. Le commissaire communique par écrit, respectivement à l'organisme chargé de l'application de la loi ou au tribunal pénal international qui a recommandé l'admission, ou au témoin si celle-ci a été recommandée par la Gendarmerie, et au bénéficiaire, les motifs de sa décision de refuser à un témoin le bénéfice du programme ou de mettre fin à la protection d'un bénéficiaire sans son consentement.

PROTECTION DE L'IDENTITÉ 11. (1) Il est interdit de communiquer sciemment, directement ou indirectement, des renseignements au sujet du lieu où se trouve un ancien ou actuel bénéficiaire ou de son changement d'identité.

(2) Le paragraphe (1) ne s'applique pas :

a) au bénéficiaire ou à l'ancien bénéficiaire qui communique un renseignement à son sujet dans le cas où cette communication ne met pas en danger la sécurité d'un autre bénéficiaire ou ancien bénéficiaire et ne risque pas de nuire à l'intégrité du programme;

b) à la personne qui communique des renseignements qu'elle a obtenus d'un bénéficiaire ou d'un ancien bénéficiaire dans le cas où cette communication ne met pas en danger la sécurité du bénéficiaire ou de l'ancien bénéficiaire, ou d'un autre bénéficiaire ou ancien bénéficiaire et ne risque pas de nuire à l'intégrité du programme.

(3) Le commissaire peut toutefois communiquer les renseignements visés au paragraphe (1) dans les cas suivants :

a) le bénéficiaire y consent;

b) celui-ci les a déjà communiqués ou a provoqué leur communication par ses actes;

c) l'intérêt public l'exige notamment pour prévenir la perpétration d'une infraction grave, pour la sécurité ou la défense nationale ou parce qu'il y a des raisons de croire que le bénéficiaire a été mêlé à la perpétration d'une infraction grave ou qu'il peut fournir des renseignements ou des éléments de preuve importants à cet égard;

d) leur communication est essentielle pour établir l'innocence d'une personne dans le cadre d'une poursuite criminelle.

(4) Quiconque obtient des renseignements dans le cadre du présent article n'est pas autorisé à les communiquer à autrui.

(5) Avant de procéder à la communication dans les cas visés aux alinéas (3)b), c) ou d), le commissaire prend les mesures utiles pour en informer l'intéressé et lui donner la possibilité de présenter des observations.

(6) Le paragraphe (5) ne s'applique pas si le commissaire estime que la notification aurait pour conséquence d'entraver l'enquête relative à une infraction.

Page 154: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

152 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

12. Pour décider s'il peut y avoir communication, le commissaire tient compte des facteurs suivants :

a) les raisons qui la motivent;

b) le danger ou les conséquences néfastes pour l'intéressé et l'intégrité du programme;

c) la probabilité que les renseignements servent seulement à la fin prévue;

d) la possibilité de satisfaire par d'autres moyens le besoin qui motive la communication;

e) l'existence de moyens efficaces pour empêcher qu'elle ne se reproduise.

13. La personne qui soutient que sa nouvelle identité, acquise dans le cadre du programme, est et a toujours été sa seule identité n'encourt aucune sanction de ce fait.

ACCORDS ET ARRANGEMENTS 14. (1) Le commissaire peut conclure un accord :

a) avec un organisme chargé de l'application de la loi, pour permettre l'admission au programme d'un témoin participant aux activités de celui-ci;

b) avec le procureur général d'une province pour laquelle un arrangement a été conclu en vertu de l'article 20 de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, pour permettre l'admission au programme d'un témoin participant aux activités de la Gendarmerie dans cette province;

c) avec une autorité provinciale, pour obtenir des documents ou autres renseignements nécessaires à la protection du bénéficiaire.

(2) Le ministre peut conclure un arrangement réciproque avec un gouvernement étranger pour permettre l'admission au programme d'un témoin participant aux activités d'un organisme de celui-ci chargé de l'application de la loi; un tel témoin ne peut toutefois être admis au Canada sans le consentement du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et ne peut être admis au programme sans le consentement du ministre.

(3) Le ministre peut conclure un arrangement avec un tribunal pénal international pour permettre l'admission au programme d'un témoin participant aux activités du tribunal; un tel témoin ne peut toutefois être admis au Canada sans le consentement du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et ne peut être admis au programme sans le consentement du ministre.

7. AUTRE INFORMATION

Le modèle UNODC des Nations Unies sur la protection des témoins – Bill 2000- peut être consulté au site : http://www.unodc.org/pdf/lap_witness-protection_2000.pdf et le commentaire: http://www.unodc.org/pdf/lap_witness-protection_commentary.pdf (en anglais)

Page 155: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Mesures Législatives et Administratives - 153 __________________________________________________________________

Page 156: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

154 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

PARTIE 3

MESURES LÉGISLATIVES ET ADMINISTRATIVES POUR RENFORCER

L’ASSISTANCE JUDICIAIRE ET LA COOPÉRATION INTERNATIONALE ENTRE LES

SERVICES DE DÉTECTION ET DE RÉPRESSION

Page 157: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Extradition - 155 __________________________________________________________________

Page 158: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

156 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

CHAPITRE 11

Extradition

Article 16 Extradition

1. Le présent article s'applique aux infractions visées par la présente Convention ou dans les cas où un groupe criminel organisé est impliqué dans une infraction visée à l'alinéa a ou b du paragraphe 1 de l'article 3 et que la personne faisant l'objet de la demande d'extradition se trouve sur le territoire de l'État Partie requis, à condition que l'infraction pour laquelle l'extradition est demandée soit punissable par le droit interne de l'État Partie requérant et de l'État Partie requis. 2. Si la demande d'extradition porte sur plusieurs infractions graves distinctes, dont certaines ne sont pas visées par le présent article, l'État Partie requis peut appliquer également cet article à ces dernières infractions. 3. Chacune des infractions auxquelles s'applique le présent article est de plein droit incluse dans tout traité d'extradition en vigueur entre les États Parties en tant qu'infraction dont l'auteur peut être extradé. Les États Parties s'engagent à inclure ces infractions en tant qu'infractions dont l'auteur peut être extradé dans tout traité d'extradition qu'ils concluront entre eux. 4. Si un État Partie qui subordonne l'extradition à l'existence d'un traité reçoit une demande d'extradition d'un État Partie avec lequel il n'a pas conclu pareil traité, il peut considérer la présente Convention comme la base légale de l'extradition pour les infractions auxquelles le présent article s'applique. 5. Les États Parties qui subordonnent l'extradition à l'existence d'un traité:

a) Au moment du dépôt de leur instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion à la présente Convention, indiquent au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies s'ils considèrent la présente Convention comme la base légale pour coopérer en matière d'extradition avec d'autres États Parties; et b) S'ils ne considèrent par la présente Convention comme la base légale pour coopérer en matière d'extradition, s'efforcent, s'il y a lieu, de conclure des traités d'extradition avec d'autres États Parties afin d'appliquer le présent article.

6. Les États Parties qui ne subordonnent pas l'extradition à l'existence d'un traité reconnaissent entre eux aux infractions auxquelles le présent article s'applique le caractère d'infraction dont l'auteur peut être extradé. 7. L'extradition est subordonnée aux conditions prévues par le droit interne de l'État Partie requis ou par les traités d'extradition applicables, y compris, notamment, aux conditions concernant la peine minimale requise pour extrader et aux motifs pour lesquels l'État Partie requis peut refuser l'extradition. 8. Les États Parties s'efforcent, sous réserve de leur droit interne, d'accélérer les procédures d'extradition et de simplifier les exigences en matière de preuve y relatives en ce qui concerne les infractions auxquelles s'applique le présent article. 9. Sous réserve des dispositions de son droit interne et des traités d'extradition qu'il a conclus, l'État Partie requis peut, à la demande de l'État Partie requérant et s'il estime que les circonstances le justifient et qu'il y a urgence, placer en détention une personne présente sur son territoire dont l'extradition est demandée ou prendre à son égard toutes autres mesures appropriées pour assurer sa présence lors de la procédure d'extradition. 10. Un État Partie sur le territoire duquel se trouve l'auteur présumé de l'infraction, s'il

Page 159: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Extradition - 157 __________________________________________________________________

n'extrade pas cette personne au titre d'une infraction à laquelle s'applique le présent article au seul motif qu'elle est l'un de ses ressortissants, est tenu, à la demande de l'État Partie requérant l'extradition, de soumettre l'affaire sans retard excessif à ses autorités compétentes aux fins de poursuites. Lesdites autorités prennent leur décision et mènent les poursuites de la même manière que pour toute autre infraction grave en vertu du droit interne de cet État Partie. Les États Parties intéressés coopèrent entre eux, notamment en matière de procédure et de preuve, afin d'assurer l'efficacité des poursuites. 11. Lorsqu'un État Partie, en vertu de son droit interne, n'est autorisé à extrader ou remettre de toute autre manière l'un de ses ressortissants que si cette personne est ensuite renvoyée dans cet État Partie pour purger la peine prononcée à l'issue du procès ou de la procédure à l'origine de la demande d'extradition ou de remise, et lorsque cet État Partie et l'État Partie requérant s'accordent sur cette option et d'autres conditions qu'ils peuvent juger appropriées, cette extradition ou remise conditionnelle est suffisante aux fins de l'exécution de l'obligation énoncée au paragraphe 10 du présent article. 12. Si l'extradition, demandée aux fins d'exécution d'une peine, est refusée parce que la personne faisant l'objet de cette demande est un ressortissant de l'État Partie requis, celui-ci, si son droit interne le lui permet, en conformité avec les prescriptions de ce droit et à la demande de l'État Partie requérant, envisage de faire exécuter lui-même la peine qui a été prononcée conformément au droit interne de l'État Partie requérant, ou le reliquat de cette peine. 13. Toute personne faisant l'objet de poursuites en raison de l'une quelconque des infractions auxquelles le présent article s'applique se voit garantir un traitement équitable à tous les stades de la procédure, y compris la jouissance de tous les droits et de toutes les garanties prévus par le droit interne de l'État Partie sur le territoire duquel elle se trouve. 14. Aucune disposition de la présente Convention ne doit être interprétée comme faisant obligation à l'État Partie requis d'extrader s'il a de sérieuses raisons de penser que la demande a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir une personne en raison de son sexe, de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son origine ethnique ou de ses opinions politiques, ou que donner suite à cette demande causerait un préjudice à cette personne pour l'une quelconque de ces raisons. 15. Les États Parties ne peuvent refuser une demande d'extradition au seul motif que l'infraction est considérée comme touchant aussi à des questions fiscales. 16. Avant de refuser l'extradition, l'État Partie requis consulte, le cas échéant, l'État Partie requérant afin de lui donner toute possibilité de présenter ses opinions et de donner des informations à l'appui de ses allégations. 17. Les États Parties s'efforcent de conclure des accords ou arrangements bilatéraux et multilatéraux pour permettre l'extradition ou pour en accroître l'efficacité.

Page 160: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

158 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

1. INTRODUCTION

La facilité des voyages de pays à pays offre aux auteurs d’infractions graves qui recherchent un havre sûr une autre façon de se soustraire aux poursuites et à la justice. Les auteurs de crimes transnationaux n’ont pas forcément besoin de se rendre dans le pays où se trouve leur victime. Cela pose un énorme défi aux services de détection et de répression qui s’efforcent d’amener les criminels à la justice. La diffusion de l’information concernant les personnes recherchées peut se faire rapidement par le biais d’organismes comme Interpol. Toutefois, les procédures judiciaires nécessaires à l’arrestation et au transfert des fugitifs à partir du pays où ils se trouvent sont longues, encombrantes et complexes.

L’extradition est une procédure formelle et généralement fondée sur des traités visant le retour ou l’envoi de fugitifs vers le pays qui les recherche126. Depuis le 19ème siècle, les États ont signé des traités bilatéraux d’extradition dans un effort de retirer aux criminels graves la possibilité de trouver refuge. Les dispositions des traités varient selon les pays et ne visent pas toujours les mêmes infractions.

Dans la plupart des cas, les demandes d’extradition ont été refusées pour les motifs suivants :

• La personne recherchée est un ressortissant du pays requis127

• Exception est faite pour “infraction politique”

• Les poursuites peuvent être basées sur des motifs discriminatoires

• Les infractions sont de caractère militaire ou fiscal

• Il y a déjà eu condamnation ou acquittement pour la même infraction (double incrimination)

• La période de prescription est terminée

• Il y a eu amnistie ou pardon

• L’immunité contre les poursuites a été accordée ; ou

• A cause de la peine possible prévue pour cette infraction dans le pays demandeur (par exemple la peine de mort ou l’emprisonnement à vie).

Une autre difficulté à laquelle les services de détection et de répression sont

souvent confrontés vient de l’absence de double criminalité. Sur la base du principe aut dedere aut judicare, l’état requis devrait ou bien extrader l’auteur présumé de l’infraction, ou bien le poursuivre lui-même (par exemple dans le cas de ses propres ressortissants qui ne peuvent être extradés). Toutefois cela est impossible

126 Dans certains cas l’extradition peut être volontaire et en l’absence d’un traité entre les États

concernés. Mais cela ne se produit que rarement.. 127 Dans de nombreux pays de droit civil, les principes juridiques fondamentaux n’admettent pas

l’extradition de leurs propres ressortissants.

Page 161: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Extradition - 159 __________________________________________________________________

lorsqu’une demande d’extradition est faite au sujet d’un acte qui ne constitue pas une infraction dans le pays requis128.

Dans le passé, les traités contenaient souvent une liste des infractions auxquelles ils s’appliquaient, et cela créait des difficultés chaque fois qu’un nouveau crime faisait son apparition du fait de progrès technologiques ou d’autres changements sur la scène économique ou sociale. C’est pourquoi les traités les plus récents se fondent sur la notion de double criminalité, qui s’applique lorsque les mêmes actes sont incriminés à la fois dans les États requérants et dans les États requis, et que les sanctions prévues pour ces actes vont plus loin qu’un certain seuil bien défini (par exemple la privation de liberté pendant un an).

De la sorte, les autorités n’ont pas besoin de constamment actualiser leurs traités pour tenir compte de nouvelles infractions imprévues. Cette évolution de la situation a donné lieu à la nécessité de fournir un modèle pour les traités d’extradition, d’où le traité Modèle des Nations Unies129. Mais justement au moment où les États s’affairent à amender leurs traités, dont certains sont déjà anciens, ou à en signer de nouveaux, apparaissent des Conventions créant des infractions particulières et contenant de nouvelles dispositions relatives à l’extradition ainsi qu’à la compétence juridique et à l’entraide judiciaire. À titre d’exemple notons la Convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers au cours de transactions commerciales internationales130.

En outre, la nécessité d’adopter une approche multilatérale a donné lieu à plusieurs initiatives régionales comme la Convention interaméricaine sur l’extradition131, la Convention du Conseil de l’Europe sur l’extradition132, La Convention de la Communauté économique des États d’Afrique occidentale sur l’extradition (1994) et d’autres133.

La présente Convention établit une norme minimale134 et offre de nouvelles perspectives en matière d’extradition, mais on s’attend surtout à ce qu’elle procure 128 La présente Convention mentionne toute une série de questions relatives à la coopération internationale, y compris la nécessité de permettre d’établir une compétence pour les infractions de la Convention (Art. 15; voir le chapitre 6 du présent Guide), l’entraide judiciaire (Article 18; voir le chapitre 12 du présent Guide), et les articles 17, 19, 20, 27 (voir le chapitre 13 du présent Guide). 129 Traité Modèle de l’ONU sur l’extradition (A/RES/45/116); télécharger au site: http://droit.francophonie.org/bj/TexteHTM/ONU/ONUX0016.htm 130 Voir Article 10 de la Convention de l’OCDE. 131 Peut être téléchargé au site: http://www.oas.org/juridico/english/treaties/b-47(1).html (en anglais) 132 Peut être téléchargé au site: http://conventions.coe.int/treaty/FR/WhatYouWant.asp?NT=024 133 Voir aussi le Plan du Commonwealth pour le retour des criminels fugitifs (1966), la Convention de la Ligue arabe sur l’entraide judiciaire en matière pénale (1983), et la Convention de l’Union européenne qui se base sur l’Article K.3 du Traité de l’Union européenne, concertant une procédure simplifiée d’extradition entre les États Membres de l’Union européenne Journal Officiel C 078, 30/03/1995 P. 0002 – 0010. Télécharger la version anglaise au site suivant: http://ue.eu.int/ejn/data/vol_a/4a_convention_protocole_accords/extradition/c-078-30031995-1-1-fr.html 134 La Convention encourage les États à aller au-delà de cette norme dans leurs ententes bilatérales ou régionales sur l’extradition, afin de compléter les dispositions de l’Article 16. (Voir aussi Art.34 (3) sur des mesures plus sévères).

Page 162: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

160 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

un code de règles et de pratiques relatives à l’extradition pour les nombreux États qui n’en ont pas actuellement.

Ces règles sont en majorité administratives ou procédurales, et font appel à la création ou à l’expansion des capacités de découvrir, d’arrêter, de détenir et d’extrader sur demande ainsi que de la capacité à faire les vérifications nécessaires et à mener les procédures judiciaires. Il pourrait s’avérer judicieux de déterminer certaines de ces règles avant de procéder à la ratification, même s’il n’est pas requis de le faire.

Certaines démarches législatives pourront cependant s’avérer nécessaires.

Dépendant de la mesure dans laquelle le droit interne et les traités déjà en vigueur traitent de l’extradition, cette démarche pourra consister à créer tout un cadre nouveau pour l’extradition ou au contraire à apporter quelques expansions ou amendements afin d’inclure de nouvelles infractions, ou encore à modifier la teneur des règles existantes ou la procédure afin d’entrer en conformité avec la Convention

Lorsqu’ils rédigeront les changements législatifs, les rédacteurs devraient noter que l’intention de la Convention est d’assurer le traitement équitable de ceux dont on recherche l’extradition et l’application de tous les droits et toutes les garanties qui sont applicables dans l’État Partie ayant reçu la demande d’extradition135.

La disposition d’extradition fait l’objet de règles d’application un peu plus

étroites, tenant compte de la possibilité, le cas échéant, de faire appel à d’autres formes de coopération internationale pour enquêter sur une affaire lorsque l’extradition est refusée (par exemple en raison du droit interne ou d’autres traités en vigueur)136.

De manière générale, les dispositions d’extradition sont conçues pour faire en sorte que la Convention appuie et complète les ententes d’extradition qui existent déjà, et ne s’en écarte pas.

En cas de double incrimination, les auteurs présumés d’infractions peuvent être extradés pour une des infractions de la Convention, une infraction des Protocoles auxquels les États sont Parties ou pour une “infraction grave”, même si l’infraction n’est pas de nature “transnationale”137. Pour ces infractions, les États Parties doivent “extrader ou poursuivre” leurs propres ressortissants. Si l’extradition est refusée pour motif de nationalité seulement, les poursuites doivent être engagées aussi rapidement que possible138.

L’article 16 a une application qui dépasse la portée générale - les infractions visées par la Convention qui impliquent un groupe criminel organisé – si l’auteur présumé se trouve sur le territoire de l’État Partie requis.

135 Article 16(13). 136 Article16(7). 137 Article 16(1). 138 Les États parties sont tenus d’établir leur compétence pour enclencher une poursuite, même si l’infraction a eu lieu ailleurs (Art.15(3) et Chapitre 6 du présent Guide).

Page 163: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Extradition - 161 __________________________________________________________________

2. SOMMAIRE DES PRINCIPALES EXIGENCES ❏ (Article 16(1), (3)): Les États Parties doivent s’assurer que les infractions

suivantes sont déclarées passibles d’extradition dans tout traité d’extradition entre eux:

(a) les infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23, qui sont transnationales et dans lesquelles un groupe criminel organisé est impliqué;

(b) une infraction grave qui est transnationale et dans laquelle un groupe criminel organisé est impliqué;

(c) les infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23, auxquelles un groupe criminel organisé est impliqué, et lorsque la personne qui doit être extradée se trouve sur le territoire de l’État requis ; et

(d) une infraction grave dans laquelle un groupe criminel organisé est impliqué et lorsque la personne devant être extradée se trouve sur le territoire de l’État requis;

à condition que l’infraction pour laquelle l’extradition a été demandée soit punissable en vertu du droit interne de l’État requérant comme de l’État requis. Une démarche législative ne sera nécessaire que si les traités sont subordonnés à la loi d’extradition interne.

❏ Sont jugées passibles d’extradition les infractions établies par les Protocoles

auxquels les États sont ou ont l’intention de devenir parties.

❏ (Article 16(5)): Les États Parties qui exigent l’existence d’un traité pour accéder à une demande d’extradition doivent faire savoir au Secrétaire Général des Nations Unies s’ils permettront que la Convention soit utilisée comme base à un traité d’extradition..

❏ (Article 16(1), (6)): Les États Parties qui disposent de lois d’extradition doivent s’assurer que les infractions décrites au point 1 ci-dessus seront jugées passibles d’extradition au titre de ces lois. Une démarche législative peut s’avérer nécessaire si la loi en existence n’est pas assez large.

❏ (Article 16(10)): Un État Partie qui refuse d’accorder une demande d’extradition au motif que le fugitif est son ressortissant, soumettra l’affaire à des poursuites judiciaires internes. Ce faisant, il fera en sorte que la décision d’entamer des poursuites et toutes poursuites ultérieures soient effectuées avec la même diligence que dans le cas d’une infraction grave interne, et il coopérera avec l’État Partie requérant en vue d’assurer l’efficacité des poursuites. Une démarche législative peut s’imposer si la loi en vigueur ne permet pas qu’un étranger obtienne des preuves qui serviront à sa procédure interne`.

Page 164: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

162 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

❏ (Article 16(13)): Chaque État Partie doit garantir le traitement juste et équitable des personnes qui font face à des procédures d’extradition en vertu du présent article, y compris l’exercice de tous les droits et garanties prévus par son droit interne. Une démarche législative pourra être nécessaire s’il n’existe pas de procédures d’extradition spécifiques internes.

❏ (Article 16(15)): Chaque État Partie doit faire en sorte de ne pas refuser l’extradition au seul motif que l’infraction pour laquelle extradition a été demandée est aussi perçue comme comportant des aspects de fiscalité. Une démarche législative pourra être nécessaire si les lois ou les traités en vigueur sont en contradiction.

❏ (Article 16(16)): Avant de refuser une extradition, l’État Partie requis doit, s’il y a lieu, consulter l’État requérant afin de lui donner la possibilité de procurer des renseignements et ses points de vue en la matière.

3. DISPOSITIONS OBLIGATOIRES Champ d’application - Article 16 (1)

Ce paragraphe détermine le champ d’application de l’obligation d’extrader. L’extradition doit être accordée dans le cas où “ un groupe criminel organisé est impliqué dans une infraction visée à l’alinéa a) ou b) du paragraphe 1 de l’article 3 et (si) la personne faisant l’objet de la demande d’extradition se trouve sur le territoire de l’État Partie requis, à condition que l’infraction pour laquelle l’extradition est demandée soit punissable par le droit interne de l’État Partie requérant et de l’État Partie requis”. Cette formulation peut paraître compliquée, mais en fait elle comprend plusieurs éléments clés faciles à discerner.

Au départ, l’obligation d’extradition s’applique aux “infractions visées par la

présente Convention”, autrement dit, au titre de l’article 3 (champ d’application):

(a) aux infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 qui sont “transnationales” (défini à l’article 3(2)) et dans lesquelles un “groupe criminel organisé” (défini à l’article 2 a)) est impliqué;

(b) à une “infraction grave” (définie à l’article 2 b))qui est transnationale et

dans laquelle un groupe criminel organisé est impliqué ; (c) aux infractions des Protocoles qui sont considérées être des infractions de

la Convention au titre de l’article 1 (3) de chaque Protocole.

L’obligation d’extradition s’applique aussi “ lorsqu’une infraction visée à l’alinéa a) ou b) du paragraphe 1 de l’article 3 implique un groupe criminel organisé et que la personne faisant l’objet de la demande d’extradition se trouve sur le territoire de l’État Partie requis”, à savoir :

Page 165: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Extradition - 163 __________________________________________________________________

(a) des infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23, lorsque la personne qui doit être extradée se trouve sur le territoire de l’État Partie requis et lorsqu’un groupe criminel organisé y a pris part ; et

(b) une “infraction grave” si la personne devant être extradée se trouve sur le

territoire de l’État Partie requis et si un groupe organisé y a pris part.

Enfin, l’obligation d’extradition s’applique “à condition que l’infraction pour laquelle l’extradition est demandée soit punissable par le droit interne de l’État Partie requérant et de l’État Partie requis” Cette exigence de double incrimination sera automatiquement satisfaite lorsqu’il s’agit des infractions visées aux articles 6, 8 et 23 puisque tous les États Parties sont obligés d’incriminer une telle conduite. Toutefois, pour ce qui est des demandes relatives à des infractions de l’article 5 ou “infractions graves”, à propos desquelles les États Parties ne sont pas tous obligés d’incriminer les mêmes actes, il n’y a pas d’obligation d’extrader à moins que l’exigence de double incrimination ait été satisfaite. Infractions passibles d’extradition en vertu de traités d’extradition -Art.16 (3)

Ce paragraphe oblige les États Parties à considérer les infractions décrites au paragraphe 1 comme étant automatiquement incluses dans tous les traités d’extradition qui existent entre eux. De plus, les parties s’engagent à les inclure dans tous les traités d’extradition qu’ils signeront entre eux à l’avenir.

En vertu de ce paragraphe, les infractions sont automatiquement incorporées

par référence dans les traités d’extradition. Par conséquent il ne devrait normalement pas être nécessaire de les amender. Cependant, si les traités sont considérés comme étant subordonnés aux statuts d’extradition internes en vertu du système juridique d’un pays particulier, et si le statut en vigueur n’est pas assez large pour inclure toutes les infractions visées par le paragraphe 1, il pourra être nécessaire d’amender les lois existantes. Notification relative à l’application ou la non-application du paragraphe 4 (intéresse les pays qui subordonnent l’extradition à l’existence d’un traité) - Article 16 (5)

Ce paragraphe ne s’applique pas aux États Parties qui peuvent extrader vers d’autres pays dans le cadre de leurs lois ( Art. 16 (6) plus loin). Il s’applique seulement aux États Parties qui subordonnent l’extradition à l’existence d’un traité. Ces pays doivent indiquer au Secrétaire Général des Nations Unies s’ils considèrent ou non la Convention comme base légale en matière d’extradition. Ils doivent aussi, lorsqu’il y a lieu, conclure des traités d’extradition afin d’élargir le nombre d’États Parties où les fugitifs peuvent être extradés conformément au présent article.

Les États Parties qui envisagent d’élargir leur réseau de traités d’extradition bilatéraux pourront se guider sur les instruments indiqués dans la dernière partie du présent chapitre.

Page 166: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

164 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Extradition fondée sur un statut (intéresse les pays qui accordent l’extradition par statut) - Article 16 (6)

Ce paragraphe exige des États Parties qui ne requièrent pas de traité pour l’extradition (les États Parties qui accordent l’extradition dans le cadre d’un statut) qu ‘ils incluent les infractions décrites au paragraphe 1 comme étant passibles d’extradition dans leur statut en vigueur régissant l’extradition internationale en l’absence d’un traité.

Ainsi, lorsque le statut régissant l’extradition internationale qui est en vigueur dans un État Partie donné n’a pas une portée assez large pour couvrir les infractions décrites au paragraphe 1, l’État sera requis d’adopter une loi qui élargira le champ d’application du statut existant à ces autres infractions.

Les États Parties qui envisagent d’établir un régime d’extradition par le biais d’un statut pourront se guider sur les modèles statutaires qui figurent dans la dernière partie du présent chapitre Conditions d’extradition - Article 16 (7)

Ce paragraphe indique que les motifs de refus et les autres conditions relatives à l’extradition (comme la peine minimale requise pour qu’une infraction soit jugée passible d’extradition) sont régis par le traité d’extradition en vigueur entre les États requérant et requis, ou sinon par les lois de l’État requis. Le paragraphe n’impose donc aucune exigence d’application qui soit distincte des termes des lois internes et des traités d’extradition. Les systèmes et instruments statutaires qui figurent dans la dernière partie du présent chapitre offrent quelques exemples de conditions et de motifs de refus qui pourront être utiles. Poursuites lorsque le fugitif n’est pas extradé pour motif de nationalité - Article 16 (10)

Ce paragraphe stipule que lorsque un État Partie requis n’extrade pas une personne qui se trouve sur son territoire pour une infraction relevant du paragraphe 1 au motif que cette personne est un ressortissant, il

“est tenu, à la demande de l’État Partie requérant l’extradition, de soumettre l’affaire sans retard à ses autorités compétentes aux fins de poursuites. Lesdites autorités prennent leur décision et mènent les poursuites de la même manière que pour toute autre infraction grave en vertu du droit interne de cet État Partie. Les États Parties intéressés coopèrent entre eux, notamment en matière de procédure et de preuve, afin d’assurer l’efficacité des poursuites”.

Essentiellement, l’obligation de soumettre l’affaire aux fins de poursuites

internes comprend un certain nombre d’éléments:

(a) Une demande d’extradition concernant un infraction visée par le paragraphe 1 doit avoir été refusée parce que le fugitif est un ressortissant de l’État qui reçoit la demande ;

Page 167: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Extradition - 165 __________________________________________________________________

(b) L’État Partie demandant l’extradition doit avoir demandé à l’État requis de soumettre l’affaire à des poursuites internes;

(c ) L’État Partie qui a refusé l’extradition doit dès lors:

(i) soumettre l’affaire à ses autorités aux fins de poursuites sans retard indu;

(ii) prendre la décision et mener la procédure de la même manière que pour un infraction interne grave ; et

(iii) coopérer avec l’autre État Partie afin d’obtenir les éléments de preuve nécessaires et de toute autre manière assurer l ‘efficacité des poursuites.

De telles poursuites internes prennent beaucoup de temps et de ressources, car

l’infraction aura normalement été commise dans un autre pays. Il sera en général nécessaire d’obtenir tous les éléments de preuve à l’étranger et de s’assurer qu’ils se présentent sous une forme acceptable pour être introduits comme preuve dans les tribunaux de l’État Partie qui mène l’enquête et les poursuites.

Pour mener à bien ses poursuites, l’État Partie en question devra tout d’abord avoir une base juridique pour établir sa compétence à l’égard d’infractions commises à l’étranger comme le demande l’article 15(3) de la Convention139. De plus, une application efficace de l’article 10 exige qu’un pays menant des poursuites internes au lieu d’extrader possède des lois d’entraide judiciaire et des traités qui lui permettent d’obtenir les preuves de l’étranger. Au minimum, une application efficace de l’article 18140 devrait suffire. Les rédacteurs devraient aussi s’assurer que les lois internes permettent à ses tribunaux de valider les preuves obtenues de l’étranger pour pouvoir les utiliser dans le cours de la procédure141.

La mise en oeuvre du paragraphe 10 exige aussi que le personnel voulu et des

ressources budgétaires suffisantes soient affectées à l’effort qui sera consacré aux poursuites internes. Aussi, la Convention exige t’elle que l’enquête et les poursuites reçoivent le même degré de priorité que s’il s’agissait d’une infraction interne grave. Une note interprétative précise que “selon l’interprétation générale, les États Parties devraient aussi prendre en considération la nécessité d’éliminer, pour les auteurs de crimes odieux, toute possibilité de refuge susceptible d’exister dans des circonstances non visées au paragraphe 10. Plusieurs États ont indiqué qu’il convenait de chercher à réduire la fréquence de tels cas et d’autres ont estimé qu’il fallait dans de telles circonstances avoir recours au principe aut dedere aut judicare”142.

Une méthode optimale pour répondre à ces exigences est la “remise temporaire” d’un fugitif ( Art. 16 (11) et ci-dessous sous ‘Questions facultatives’).

139 Voir le chapitre 6 du présent Guide pour plus de détails sur la façon d’appliquer cette disposition. 140 Voir le chapitre 12 du présent Guide. 141 Voir, par exemple, la Loi canadienne sur l’entraide judiciaire en matière pénale. On pourra la télécharger au site : http://laws.justice.gc.ca/en/M-13.6/80295.html. 142 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para.31.

Page 168: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

166 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Garanties pour les personnes faisant l’objet d’un processus d’extradition - Article 16 (13)

Ce paragraphe exige qu’un État Partie traite de façon équitable un fugitif pendant la procédure d’extradition , notamment qu’il le laisse jouir de tous les droits et garanties qui figurent dans le droit de ce pays à l’égard d’une telle procédure. Essentiellement, ce paragraphe oblige les États Parties à garantir:

• qu’ils ont des procédures pour assurer le traitement équitable des fugitifs; et • que le fugitif aura la possibilité d’exercer les droits et les garanties prévus par

la loi. Paragraphe 15: Interdiction de refuser l’extradition pour motif d’infractions touchant à des questions fiscales ( contient des obligations spéciales)

Le paragraphe 15 indique que “Les États Parties ne peuvent refuser une demande d’extradition au seul motif que l’infraction est considérée comme touchant à des questions fiscales”. Les États Parties doivent donc faire en sorte que ce motif de refus ne puisse être invoqué au titre de ses lois et traités d’extradition.

Donc, lorsque les lois en vigueur d’un État Partie autorisent le refus pour un tel motif, il conviendrait d’amender les lois afin d’y remédier. Lorsqu’un tel motif de refus est inscrit dans les traités d’extradition d’un État Partie, le fait que ce même État devienne partie à la présente Convention – ou la promulgation d’amendements aux lois internes - devrait normalement entraîner une annulation des dispositions contraires pouvant se trouver dans des traités antérieurs. Il sera donc rare que des amendements de traités antérieurs s’avèrent nécessaires. Pour ce qui est des traités futurs, les États Partie n’incluront pas de tels motifs de refus. Paragraphe 16: Consultations avant de refuser l’extradition (Contient des obligations spéciales)

Le paragraphe 16 stipule que, le cas échéant, l’État Partie requis devra consulter l’État Partie requérant avant de refuser l’extradition. Ce processus permettra à l’État Partie requérant de fournir des renseignements supplémentaires ou des explications qui pourraient entraîner un résultat différent. Puisque dans certains cas un complément d’information peut mener à un résultat différent, l’obligation n’est pas catégorique et l’État Partie requis conserve un certaine mesure de discrétion pour déterminer si une telle démarche serait appropriée143.

143 Il conviendrait de préciser, dans les travaux préparatoires que l’expression “le cas échéant”, au

paragraphe 16 de l’article 16, s’entend et est interprété dans le sens d’une pleine coopération et qu’elle ne devrait influer, dans la mesure du possible, en rien sur le caractère impératif du paragraphe. Lorsqu’il applique ce paragraphe, l’État partie requis tient pleinement compte de la nécessité de traduire les auteurs des infractions en justice en recourant à l’extradition.

Page 169: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Extradition - 167 __________________________________________________________________

Paragraphe 17: Conclusion de nouvelles ententes et arrangements (aucune obligation spéciale)

Le paragraphe 17 demande aux États Parties de “s’efforcer de conclure des accords ou des arrangements bilatéraux et multilatéraux pour permettre l’extradition ou pour en accroître l’efficacité” . Les pays souhaitant élargir leur réseau de traités d’extradition sont invités à consulter les instruments décrits dans la dernière partie du présent chapitre, qui pourront s’avérer utiles comme exemples de traités. S’agissant “d’arrangements pour accroître l’efficacité des mesures d’extradition”, les pays souhaiteront peut-être examiner les dispositions relatives aux consultations dans les même traités

Changements à envisager:

❏ Accélération des procédures d’extradition - Article 16 (8)

Le paragraphe huit de l’article 16 stipule que les États Parties devront, sous réserve de leur droit interne, s’efforcer d’accélérer les procédures d’extradition et de simplifier les exigences en matière de preuves y relatives lorsqu’il s’agit d’infractions visées par le paragraphe 1. Dans la pratique moderne de l’extradition, la tendance est de simplifier les exigences de forme ainsi que les voies de transmission des demandes d’extradition et les normes relatives aux éléments de preuve. Les instruments qui font l’objet de la dernière partie du présent chapitre donnent à cet égard des exemples qui pourront être utiles.

Une Note interprétative indique que “ce paragraphe ne devrait pas être interprété comme portant atteinte d’une quelconque manière aux droits fondamentaux de la défense”144. D’après une autre Note interprétative, “à titre d’exemple de l’application de ce paragraphe, la possibilité de recourir à des procédures rapides et simplifiées, dans le respect du droit interne de l’État Partie requis, pour la remise de personnes recherchées à des fins d’extradition, sous réserve de l’accord de l’État Partie requis et du consentement de l’intéressé, étant entendu que ce consentement, qui devrait être donné volontairement et en pleine connaissance de cause, porterait sur les procédures simplifiées et non sur l’extradition”145.

❏ Détention en attendant la procédure d’extradition dans le pays requis 16 (9)

Le paragraphe 9 stipule que l’État Partie requis peut placer en détention un fugitif ou prendre d’autres mesures pour assurer sa présence aux fins d’extradition. Les dispositions concernant l’arrestation et la détention provisoire en attendant l’extradition font normalement partie des traités et des statuts, et les États Parties devraient s’assurer d’avoir la base légale nécessaire pour une telle détention. Toutefois, l’article n’impose pas d’obligation spécifique visant la détention des

144 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 29. 145 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 30.

Page 170: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

168 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

personnes dans certains cas particuliers. Les instruments qui figurent à la fin du présent chapitre donnent quelques exemples qui pourront être utiles à cet égard.

❏ Exécution d’une sentence étrangère lorsque l’extradition est refusée au motif de nationalité- Article 16 (12)

Ce paragraphe demande à un État Partie qui a refusé, au motif de nationalité,

d’accéder à la demande d’un autre État Partie voulant qu’il extrade un fugitif afin que ce dernier serve sa peine, d’envisager d’exécuter lui-même la sentence. Toutefois, le paragraphe n’impose à un État Partie aucune obligation de créer par législation le cadre juridique qui lui permettrait de le faire, ni de le faire en réalité dans certaines circonstances particulières.

Une Note interprétative indique que cette mesure serait prise “sans préjudice du principe ne bis in idem”146. 4. QUESTIONS FACULTATIVES

Application Facultative A D’autres Infractions - Article 16 (2) Ce paragraphe autorise les États Parties à appliquer l’article d’extradition à des infractions autres que celles qui sont visées au paragraphe 1. Les États Parties ne sont pas dans l’obligation d’extrader pour d’autres infractions, mais ils sont encouragés à le faire.

Une Note interprétative indique que ce paragraphe a pour objet “de servir

d’instrument aux États Parties souhaitant se prévaloir des possibilités qu’il offre et non d’élargir indûment le champ d’application de l’article 16”147. Extradition fondée sur la présente Convention - Article 16 (4) et (5) (b)

Ce paragraphe autorise, mais n’oblige pas, les États Parties à utiliser la Convention comme base légale pour une extradition si l’extradition ne peut se faire que dans le cadre d’un tel traité. Sinon, les États devraient chercher à conclure des “traités d’extradition avec d’autres États Parties afin d’appliquer le présent article” (Art. 16 (5)(b)). Extradition conditionnelle afin de satisfaire au paragraphe 10 - Article 16 (11)

Plutôt que de poursuivre un ressortissant au lieu de l’extrader comme le demande le paragraphe 10, le paragraphe 11 propose l’option de remettre le fugitif à titre provisoire à l’État Partie qui demande l’extradition à la seule fin de tenir le procès, après quoi la sentence serait servie dans l’État Partie qui a refusé

146 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para.32. 147 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 28.

Page 171: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Extradition - 169 __________________________________________________________________

l’extradition. Si cette option est exercée, elle est sujette aux obligations du paragraphe 10. La Convention n’impose aucune obligation d’extrader s’il existe des raisons solides de croire que le fugitif sera l’objet de discrimination- Article 16 (14) Il est dit dans ce paragraphe que “Aucune disposition de la présente Convention ne doit être interprétée comme faisant obligation à l’État Partie requis d’extrader s’il a de sérieuses raisons de penser que la demande a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir une personne en raison de son sexe, de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son origine ethnique ou de ses opinions politiques, ou que donner suite à cette demande causerait un préjudice à cette personne pour l’une quelconque de ces raisons”

Cette disposition laisse la possibilité de refuser l’extradition pour ces motifs, à moins que le motif de refus ne soit pas prévu dans le traité d’extradition en vigueur dans le pays requérant ou dans son droit interne régissant l’extradition en l’absence d’un traité148. 5. RENVOIS A la Convention

• Article 15 (Compétence) • Article 18 (Entraide judiciaire) • Article 17 (Transfert des personnes condamnées) • Article 19 (Enquêtes conjointes) • Article 20 (Techniques d’enquête spéciales) • Article 27 (Coopération entre les services de détection et de répression) • Article 34 (Application de la Convention)

148 Une Note interprétative indique que “lors des consultations informelles qui se sont tenues pendant la 8ème session du Comité Ad Hoc, la délégation de l’Italie a proposé d’insérer la disposition suivante après le paragraphe 8: “ Sans préjudice à l’utilisation d’autres motifs de refus, l’État requis ne peut refuser d’extrader au motif qu’une décision a été prise in absentia que s’il n’est pas prouvé que l’affaire a été jugée avec les mêmes garanties que si le défendeur avait été présent et qu’il (ou elle), sachant que le procès devait avoir lieu, s’est délibérément soustrait(e) à l’arrestation ou a délibérément négligé de se présenter au procès. Toutefois, si une telle preuve n’est pas fournie, l’extradition ne peut être refusée si l’État requérant donne l’assurance, à la satisfaction de l’État requis, que la personne dont il demande l’extradition aura droit à un nouveau procès auquel ses droits à la défense seront garantis.” Lors des discussions qui ont suivi, plusieurs délégations ont exprimé la crainte que cette disposition ne soit pas compatible avec les principes fondamentaux de leurs systèmes juridiques respectifs. La délégation de l’Italie a retiré sa proposition lors de la 9ème session du Comité Ad Hoc étant entendu que, lorsqu’il envisage une extradition suite à une sentence prononcée in absentia, l’État partie requis chercherait dûment à savoir si la personne dont l’extradition a été demandée a été condamnée à la suite d’un procès équitable, par exemple, si le défendeur a reçu ou non l’assurance qu’il (elle) jouirait des mêmes garanties que si il ou elle avait été présent(e) au procès et s’était volontairement soustrait(e) à la justice ou si il (elle) avait droit à un nouveau procès (A/55/383/Add.1, para.34).

Page 172: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

170 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

A d’autres instruments • ONU – Modèle de Traité d’extradition • Convention inter-américaine sur l’extradition • Plan du Commonwealth pour la reddition de criminels fugitifs (1966) • Convention de la Ligue arabe sur l’entraide en matière pénales (1983) • Convention basée sur l’article K.3 du traité de l’Union européenne pour

simplifier la procédure d’extradition entre les États membres de l’Union européenne.

• Convention d’extradition de la Communauté économique des États d’Afrique occidentale(1994)

• Convention européenne sur l’extradition 6. EXEMPLES DE MISE EN ŒUVRE Les États Parties qui envisagent d’établir un régime d’extradition dans le cadre d’une législation en application de cet article pourront se guider, entre autres sur :

• Le Modèle des Nations Unies (1998) http://www.imolin.org/ex98.htm

• La Loi canadienne sur l’extradition Act, S.C. 1999, c. 18, peut être

téléchargée au site: http://laws.justice.gc.ca/en/e-23.01/55322.html

• La Loi coréenne sur l’extradition de 1988.

Les États Parties qui souhaitent élargir leur réseau de traités d’extradition bilatéraux en application de cet article pourront se guider, entre autres, sur:

• Le Traité modèle des Nations Unies sur l’extradition

(A/RES/45/116) et son guide d’interprétation http://www.un.org/documents/ga/res/45/a45r116.htm

• La Convention européenne sur l’extradition; télécharger au site:

http://ue.eu.int/ejn/extraditionen.html • La Convention européenne sur l’extradition, ETS No. : 024;

télécharger au site : http://conventions.coe.int/Treaty/EN/WhatYouWant.asp?NT=024

• Le Traité d’extradition entre les É-U et l’Argentine

• Le Traité d’extradition entre les É-U et la Lithuanie. Télécharger au

site: http://www.3.lrs.lt/c-bin/eng/preps2 ?Condition1=161503&Condition2+

• Le Code Pénal Albanien

http://pbosnia.kentlaw.edu/resources/legal/albania/crim_code.htm

Article 11

Page 173: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Extradition - 171 __________________________________________________________________

Extradition

L’extradition ne peut être accordée que lorsqu’elle est explicitement prévue dans des traités internationaux auxquels l’Albanie est partie.

L’extradition sera accordée lorsque l’acte criminel qui fait l’objet de la demande d’extradition est considéré comme tel aussi bien dans le droit albanais que dans le droit étranger.

L’extradition ne sera pas accordée :

a) si la personne devant être extradée est un citoyen albanais, à moins que le traité ne stipule autrement;

b) si l’acte criminel faisant l’objet de la demande d’extradition est de nature politique ou militaire ;

c) si l’on peut raisonnablement penser que la personne faisant l’objet de la demande d’extradition sera persécutée, punie ou recherchée en raison de ses attaches politiques, religieuses, nationales, raciales ou ethniques

d) si la personne dont l’extradition est recherchée a été jugée par un tribunal albanais compétent pour l’acte criminel en raison duquel l’extradition a été demandée.

Et les dispositions pertinentes du Code albanais de procédure criminelle : TITRE X (Relations avec les autorités étrangères en matière de compétences), CHAPITRE I (Extradition), SECTION I (Extradition à l’étranger), Articles 488-499), le tout pouvant être téléchargé au site: http://pbosnia.kentlaw.edu/resources/legal/albania/crim_pro.htm.

Page 174: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

172 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Page 175: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entraide judiciaire - 173 __________________________________________________________________

CHAPITRE 12

Entraide judiciaire

Article 18

Entraide judiciaire

1. Les États Parties s'accordent mutuellement l'entraide judiciaire la plus large possible lors des enquêtes, poursuites et procédures judiciaires concernant les infractions visées par la présente Convention, comme prévu à l'article 3, et s'accordent réciproquement une entraide similaire lorsque l'État Partie requérant a des motifs raisonnables de soupçonner que l'infraction visée à l'alinéa a ou b du paragraphe 1 de l'article 3 est de nature transnationale, y compris quand les victimes, les témoins, le produit, les instruments ou les éléments de preuve de ces infractions se trouvent dans l'État Partie requis et qu'un groupe criminel organisé y est impliqué.

2. L'entraide judiciaire la plus large possible est accordée, autant que les lois, traités, accords et arrangements pertinents de l'État Partie requis le permettent, lors des enquêtes, poursuites et procédures judiciaires concernant des infractions dont une personne morale peut être tenue responsable dans l'État Partie requérant, conformément à l'article 10 de la présente Convention.

3. L'entraide judiciaire qui est accordée en application du présent article peut être demandée aux fins suivantes:

a) Recueillir des témoignages ou des dépositions;

b) Signifier des actes judiciaires;

c) Effectuer des perquisitions et des saisies, ainsi que des gels;

d) Examiner des objets et visiter des lieux;

e) Fournir des informations, des pièces à conviction et des estimations d'experts;

f) Fournir des originaux ou des copies certifiées conformes de documents et dossiers pertinents, y compris des documents administratifs, bancaires, financiers ou commerciaux et des documents de sociétés;

g) Identifier ou localiser des produits du crime, des biens, des instruments ou d'autres choses afin de recueillir des éléments de preuve;

h) Faciliter la comparution volontaire de personnes dans l'État Partie requérant;

i) Fournir tout autre type d'assistance compatible avec le droit interne de l'État Partie requis.

4. Sans préjudice de son droit interne, les autorités compétentes d'un État Partie peuvent, sans demande préalable, communiquer des informations concernant des affaires pénales à une autorité compétente d'un autre État Partie, si elles pensent que ces informations pourraient l'aider à entreprendre ou à conclure des enquêtes et des poursuites pénales, ou amener ce dernier État Partie à formuler une demande en vertu de la présente Convention.

5. La communication d'informations conformément au paragraphe 4 du présent article se fait sans préjudice des enquêtes et poursuites pénales dans l'État dont les autorités compétentes fournissent les informations. Les autorités compétentes qui reçoivent ces informations accèdent à toute demande tendant à ce que lesdites informations restent confidentielles, même temporairement, ou à ce que leur utilisation soit assortie de restrictions. Toutefois, cela n'empêche pas l'État Partie qui reçoit les informations de révéler, lors de la procédure judiciaire, des informations à la décharge d'un prévenu. Dans ce dernier cas, l'État Partie qui reçoit les informations avise l'État Partie qui les communique avant la révélation et, s'il lui en est fait la demande, consulte ce dernier. Si, dans un cas exceptionnel, une notification préalable n'est pas possible, l'État Partie qui

Page 176: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

174 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

reçoit les informations informe sans retard de la révélation l'État Partie qui les communique.

6. Les dispositions du présent article n'affectent en rien les obligations découlant de tout autre traité bilatéral ou multilatéral régissant ou devant régir, entièrement ou partiellement, l'entraide judiciaire.

7. Les paragraphes 9 à 29 du présent article sont applicables aux demandes faites conformément au présent article si les États Parties en question ne sont pas liés par un traité d'entraide judiciaire. Si lesdits États Parties sont liés par un tel traité, les dispositions correspondantes de ce traité sont applicables, à moins que les États Parties ne conviennent d'appliquer à leur place les dispositions des paragraphes 9 à 29 du présent article. Les États Parties sont vivement encouragés à appliquer ces paragraphes s'ils facilitent la coopération.

8. Les États Parties ne peuvent invoquer le secret bancaire pour refuser l'entraide judiciaire prévue au présent article.

9. Les États Parties peuvent invoquer l'absence de double incrimination pour refuser de donner suite à une demande d'entraide judiciaire prévue au présent article. L'État Partie requis peut néanmoins, lorsqu'il le juge approprié, fournir cette assistance, dans la mesure où il le décide à son gré, indépendamment du fait que l'acte constitue ou non une infraction conformément au droit interne de l'État Partie requis.

10. Toute personne détenue ou purgeant une peine sur le territoire d'un État Partie, dont la présence est requise dans un autre État Partie à des fins d'identification ou de témoignage ou pour qu'elle apporte de toute autre manière son concours à l'obtention de preuves dans le cadre d'enquêtes, de poursuites ou de procédures judiciaires relatives aux infractions visées par la présente Convention, peut faire l'objet d'un transfert si les conditions ci-après sont réunies:

a) Ladite personne y consent librement et en toute connaissance de cause;

b) Les autorités compétentes des deux États Parties concernés y consentent, sous réserve des conditions que ces États Parties peuvent juger appropriées.

11. Aux fins du paragraphe 10 du présent article:

a) L'État Partie vers lequel le transfert est effectué a le pouvoir et l'obligation de garder l'intéressé en détention, sauf demande ou autorisation contraire de la part de l'État Partie à partir duquel la personne a été transférée;

b) L'État Partie vers lequel le transfert est effectué s'acquitte sans retard de l'obligation de remettre l'intéressé à la garde de l'État Partie à partir duquel le transfert a été effectué, conformément à ce qui aura été convenu au préalable ou à ce que les autorités compétentes des deux États Parties auront autrement décidé;

c) L'État Partie vers lequel le transfert est effectué ne peut exiger de l'État Partie à partir duquel le transfert est effectué qu'il engage une procédure d'extradition pour que l'intéressé lui soit remis;

d) Il est tenu compte de la période que l'intéressé a passée en détention dans l'État Partie vers lequel il a été transféré aux fins du décompte de la peine à purger dans l'État Partie à partir duquel il a été transféré.

12. À moins que l'État Partie à partir duquel une personne doit être transférée en vertu des paragraphes 10 et 11 du présent article ne donne son accord, ladite personne, quelle que soit sa nationalité, ne sera pas poursuivie, détenue, punie ou soumise à d'autres restrictions à sa liberté de mouvement sur le territoire de l'État Partie vers lequel elle est transférée à raison d'actes, d'omissions ou de condamnations antérieurs à son départ du territoire de l'État Partie à partir duquel elle a été transférée.

13. Chaque État Partie désigne une autorité centrale qui a la responsabilité et le pouvoir de recevoir les demandes d'entraide judiciaire et, soit de les exécuter, soit de les transmettre aux autorités compétentes pour exécution. Si un État Partie a une région ou un territoire spécial doté d'un système d'entraide judiciaire différent, il peut désigner une

Page 177: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entraide judiciaire - 175 __________________________________________________________________

autorité centrale distincte qui aura la même fonction pour ladite région ou ledit territoire. Les autorités centrales assurent l'exécution ou la transmission rapide et en bonne et due forme des demandes reçues. Si l'autorité centrale transmet la demande à une autorité compétente pour exécution, elle encourage l'exécution rapide et en bonne et due forme de la demande par l'autorité compétente. L'autorité centrale désignée à cette fin fait l'objet d'une notification adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies au moment où chaque État Partie dépose ses instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation ou d'adhésion à la présente Convention. Les demandes d'entraide judiciaire et toute communication y relative sont transmises aux autorités centrales désignées par les États Parties. La présente disposition s'entend sans préjudice du droit de tout État Partie d'exiger que ces demandes et communications lui soient adressées par la voie diplomatique et, en cas d'urgence, si les États Parties en conviennent, par l'intermédiaire de l'Organisation internationale de police criminelle, si cela est possible.

14. Les demandes sont adressées par écrit ou, si possible, par tout autre moyen pouvant produire un document écrit, dans une langue acceptable pour l'État Partie requis, dans des conditions permettant audit État Partie d'en établir l'authenticité. La ou les langues acceptables pour chaque État Partie sont notifies au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies au moment où ledit État Partie dépose ses instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation ou d'adhésion à la présente Convention. En cas d'urgence et si les États Parties en conviennent, les demandes peuvent être faites oralement, mais doivent être confirmées sans délai par écrit.

15. Une demande d'entraide judiciaire doit contenir les renseignements suivants:

a) La désignation de l'autorité dont émane la demande;

b) L'objet et la nature de l'enquête, des poursuites ou de la procédure judiciaire auxquelles se rapporte la demande, ainsi que le nom et les fonctions de l'autorité qui en est chargée;

c) Un résumé des faits pertinents, sauf pour les demandes adressées aux fins de la signification d'actes judiciaires;

d) Une description de l'assistance requise et le détail de toute procédure particulière que l'État Partie requérant souhaite voir appliquée;

e) Si possible, l'identité, l'adresse et la nationalité de toute personne visée; et

f) Le but dans lequel le témoignage, les informations ou les mesures sont demandés.

16. L'État Partie requis peut demander un complément d'information lorsque cela apparaît nécessaire pour exécuter la demande conformément à son droit interne ou lorsque cela peut faciliter l'exécution de la demande.

17. Toute demande est exécutée conformément au droit interne de l'État Partie requis et, dans la mesure où cela ne contrevient pas au droit interne de l'État Partie requis et lorsque cela est possible, conformément aux procédures spécifiés dans la demande.

18. Lorsque cela est possible et conforme aux principes fondamentaux du droit interne, si une personne qui se trouve sur le territoire d'un État Partie doit être entendue comme témoin ou comme expert par les autorités judiciaires d'un autre État Partie, le premier État Partie peut, à la demande de l'autre, autoriser son audition par vidéoconférence s'il n'est pas possible ou souhaitable qu'elle comparaisse en personne sur le territoire de l'État Partie requérant. Les États Parties peuvent convenir que l'audition sera conduite par une autorité judiciaire de l'État Partie requérant et qu'une autorité judiciaire de l'État Partie requis y assistera.

19. L'État Partie requérant ne communique ni n'utilise les informations ou les éléments de preuve fournis par l'État Partie requis pour des enquêtes, poursuites ou procédures judiciaires autres que celles visées dans la demande sans le consentement préalable de l'État Parties requis. Rien dans le présent paragraphe n'empêche l'État Partie requérant de révéler, lors de la procédure, des informations ou des éléments de preuve à décharge. Dans ce dernier cas, l'État Partie requérant avise l'État Partie requis avant la révélation

Page 178: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

176 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

et, s'il lui en est fait la demande, consulte l'État Partie requis. Si, dans un cas exceptionnel, une notification préalable n'est pas possible, l'État Partie requérant informe sans retard l'État Partie requis de la révélation.

20. L'État Partie requérant peut exiger que l'État Partie requis garde le secret sur la demande et sa teneur, sauf dans la mesure nécessaire pour l'exécuter. Si l'État Partie requis ne peut satisfaire à cette exigence, il en informe sans délai l'État Partie requérant.

21. L'entraide judiciaire peut être refusée:

a) Si la demande n'est pas faite conformément aux dispositions du présent article;

b) Si l'État Partie requis estime que l'exécution de la demande est susceptible de porter atteinte à sa souveraineté, à sa sécurité, à son ordre public ou à d'autres intérêts essentiels;

c) Au cas où le droit interne de l'État Partie requis interdirait à ses autorités de prendre les mesures demandées s'il s'agissait d'une infraction analogue ayant fait l'objet d'une enquête, de poursuites ou d'une procédure judiciaire dans le cadre de sa propre compétence;

d) Au cas où il serait contraire au système juridique de l'État Partie requis concernant l'entraide judiciaire d'accepter la demande.

22. Les États Parties ne peuvent refuser une demande d'entraide judiciaire au seul motif que l'infraction est considérée comme touchant aussi à des questions fiscales.

23. Tout refus d'entraide judiciaire doit être motivé.

24. L'État Partie requis exécute la demande d'entraide judiciaire aussi promptement que possible et tient compte dans toute la mesure possible de tous délais suggérés par l'État Partie requérant et qui sont motivés, de préférence dans la demande. L'État Partie requis répond aux demandes raisonnables de l'État Partie requérant concernant les progrès faits dans l'exécution de la demande. Quand l'entraide demandée n'est plus nécessaire, l'État Partie requérant en informe promptement l'État Partie requis.

25. L'entraide judiciaire peut être différée par l'État Partie requis au motif qu'elle entraverait une enquête, des poursuites ou une procédure judiciaire en cours.

26. Avant de refuser une demande en vertu du paragraphe 21 du présent article ou d'en différer l'exécution en vertu de son paragraphe 25, l'État Partie requis étudie avec l'État Partie requérant la possibilité d'accorder l'entraide sous réserve des conditions qu'il juge nécessaires. Si l'État Partie requérant accepte l'entraide sous réserve de ces conditions, il se conforme à ces dernières.

27. Sans préjudice de l'application du paragraphe 12 du présent article, un témoin, un expert ou une autre personne qui, à la demande de l'État Partie requérant, consent à déposer au cours d'une procédure ou à collaborer à une enquête, à des poursuites ou à une procédure judiciaire sur le territoire de l'État Partie requérant ne sera pas poursuivi, détenu, puni ou soumis à d'autres restrictions à sa liberté personnelle sur ce territoire à raison d'actes, d'omissions ou de condamnations antérieurs à son départ du territoire de l'État Partie requis. Cette immunité cesse lorsque le témoin, l'expert ou ladite personne ayant eu, pour une période de quinze jours consécutifs ou pour toute autre période convenue par les États Parties, à compter de la date à laquelle ils ont été officiellement informés que leur présence n'était plus requise par les autorités judiciaires, la possibilité de quitter le territoire de l'État Partie requérant, y sont néanmoins demeurés volontairement ou, l'ayant quitté, y sont revenus de leur plein gré.

28. Les frais ordinaires encourus pour exécuter une demande sont à la charge de l'État Partie requis, à moins qu'il n'en soit convenu autrement entre les États Parties concernés. Lorsque des dépenses importantes ou extraordinaires sont ou se révèlent ultérieurement nécessaires pour exécuter la demande, les États Parties se consultent pour fixer les conditions selon lesquelles la demande sera exécutée, ainsi que la manière dont les frais seront assumés.

29. L'État Partie requis:

Page 179: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entraide judiciaire - 177 __________________________________________________________________

a) Fournit à l'État Partie requérant copies des dossiers, documents ou renseignements administratifs en sa possession et auxquels, en vertu de son droit interne, le public a accès;

b) Peut, à son gré, fournir à l'État Partie requérant intégralement, en partie ou aux conditions qu'il estime appropriées, copies de tous dossiers, documents ou renseignements administratifs en sa possession et auxquels, en vertu de son droit interne, le public n'a pas accès.

30. Les États Parties envisagent, s'il y a lieu, la possibilité de conclure des accords ou des arrangements bilatéraux ou multilatéraux qui servent les objectifs et les dispositions du présent article, leur donnent un effet pratique ou les renforcent.

1. INTRODUCTION

Dans le contexte de la mondialisation, les autorités nationales ont de plus en plus besoin de l’aide d’autres pays pour mener à bien les enquêtes, les poursuites, et le châtiment des malfaiteurs, surtout de ceux qui ont commis des infractions transnationales. La capacité pour un pays d’établir sa compétence et d’assurer la présence du malfaiteur présumé sur son territoire est un pas important, mais ce n’est pas tout.

La mobilité internationale des malfaiteurs et leur connaissance de la technologie

sont deux des facteurs qui rendent plus que jamais nécessaire la collaboration entre les services de détection et de répression et entre les autorités judiciaires, ainsi que l’aide à l’État qui a établi sa compétence en la matière.

Pour atteindre ces objectifs, les États ont eu recours à des Traités d’entraide

judiciaire en matière pénale. Les traités d’entraide judiciaire donnent habituellement une liste des infractions visées par le traité, le genre d’assistance que les États consentent à se prêter, les droits des États requérant et requis relativement à l’envergure et au type de coopération, les droits des malfaiteurs présumés, et les procédures à suivre pour faire ou pour examiner une demande.

Ces instruments bilatéraux appuient le travail des services de détection et de

répression de plusieurs façons. Ils permettent aux autorités d’obtenir à l’étranger des éléments de preuve selon une procédure qui est admissible d’après leur droit interne149. Ils ajoutent à d’autres arrangements concernant l’échange de renseignements (par exemple par l’intermédiaire d’ Interpol, de rapports police à police, d’aide judiciaire ou de commissions rogatoires). Ils permettent aussi de résoudre certaines complications entre pays qui ont des traditions juridiques différentes et dont certains limitent l’aide aux autorités judiciaires plutôt qu’aux procureurs150.

Certains traités d’entraide judiciaire ont donné d’excellents résultats. Cependant,

dans la plupart des cas, la pratique montre qu’il y a encore beaucoup à améliorer. 149 Par exemple, dans le cadre d’un traité d’entraide judiciaire, des témoins peuvent être convoqués, des personnes retrouvées, des documents et autres éléments de preuve fournis, et des mandats rendus. 150 Le Traité d’entraide judiciaire entre Argentine et les États-Unis, par exemple, a été très utile à cet égard.

Page 180: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

178 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Pour commencer, les procédures s’avèrent souvent trop longues et incommodes. Il y a eu aussi des cas où les demandes d’aide n’ont jamais reçu de réponse151. Donc, et surtout lorsqu’il s’agit de criminels transnationaux, ce mécanisme est insuffisant. Une fois que tous les éléments d’information et de preuve et tous les témoins ont finalement été rassemblés, il est souvent trop tard pour faire intervenir la loi contre ces malfaiteurs.

L’effort international de lutte contre les infractions graves doit être soutenu par un

instrument multilatéral qui puissent aussi accélérer le processus d’entraide. Des efforts ont été déployés à l’égard de certaines infractions spécifiques. En

1988, par exemple, la Convention des Nations Unies sur le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes152, la Convention du Conseil de l’Europe sur le blanchiment, le dépistage, la saisie et la confiscation des produits du crime153, la Convention sur l’entraide en matière pénale entre les États membres de l’Union européenne (2000)154, la Convention inter-américaine sur la lutte contre la corruption (1996)155 et la Convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption des agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales156. Il y a eu aussi des initiatives régionales comme l’entente d’application de Schengen157, la Convention européenne sur l’entraide en matière pénale158, la Convention interaméricaine sur l’entraide en matière pénale159 et la Convention de la Ligue arabe sur l’entraide judiciaire (1983).

À la lumière de cette cacophonie juridique, il est clair qu’une Convention

internationale offrant une approche intégrée et mondiale s’impose. La présente Convention s’appuie sur les initiatives mentionnées plus haut, demande “une entraide judiciaire la plus large possible lors des enquêtes, poursuites et procédures

151 Par exemple, une grande partie des demandes de magistrats italiens pour une entraide judiciaire en matière de corruption lors de leur «opération mains propres” (Mani pulite) sont demeurées sans réponse.

152 Article 7 de cette Convention. Peut être téléchargé au site: http://www.oas.org/juridico/MLA/fr/int/vienne88.html

153 Articles 8, 9 et 10 de cette Convention. Peuvent être téléchargés au site : http://conventions.coe.int/Treaty/FR/Treaties/Html/141.htm. 154 Journal Officiel C 379, 29/12/2000 P. 0007 – 0029; télécharger au site:

http://europa.eu.int/smartapi/cgi/sga_doc?smartapi!celexapi!prod!CELEXnumdoc&lg=EN&numdoc=42000A0712(01)&model=guichett

155 Article XIV de cette Convention. Télécharger au site : www.oas.org (lien pour les traités). 156 Article 9. 157 Souvent appelée la Convention Shengen, qui lie tous les États Membres de l’Union sauf le

Royaume Uni et l’Irlande. Voir aussi l’Entente entre la Communauté européenne et les Etats-Unis ( 1996) sur la coopération douanière et l’entraide en matières douanières, notamment le Titre IV (Articles 11 et suivants.). L’entente peut être téléchargée au site:: http://www.eurunion.org/partner/agreemen.htm.

158 La version anglaise de cette Convention et des deux Protocoles se trouve au site web: http://conventions.coe.int/Treaty/FR/Treaties/Html/030.htm.

159 Cette Convention peut être téléchargée au site: http://www.oas.org/juridico/MLA/fr/int/oas55.html

Page 181: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entraide judiciaire - 179 __________________________________________________________________

judiciaires concernant les infractions visées par la présente Convention, comme prévu à l’article 3”, et élargit le champ d’application à toutes les infractions visées par la Convention (voir l’article 3). Cela comprend les infractions visées par les articles 5, 6, 8 et 23 de la Convention, les infractions établies par les protocoles additionnels auxquels les États deviennent parties, ainsi que les “infractions graves” transnationales dans lesquelles un groupe criminel organisé est impliqué160.

L’aide judiciaire peut être demandée aux fins de recueillir des éléments de

preuve ou des déclarations, pour le service de documents juridiques, pour des perquisitions et saisies, pour l’examen d’objets et de sites, pour des renseignements, des preuves, des opinions d’experts, des documents et dossiers, pour retrouver la trace de produits du crime, faciliter la comparution de témoins, et toute autre forme d’aide qui ne soit pas interdite par le droit interne. L’article s’applique aussi à la coopération internationale en matière d’identification, de dépistage et de saisie des produits du crime, de biens et d’instruments ayant servi au crime, en vue de leur confiscation (Art. 13).

Dans le passé, les efforts pour améliorer l’entraide judiciaire internationale ont

souvent été frustrés non seulement par la lenteur et l’inefficacité qui rendent l’application des traités et des conventions problématique, mais aussi par toutes sortes d’obstacles juridiques. L’aide a souvent été refusée dans des cas d’infractions non admissibles pour l’extradition, pour absence de double incrimination, et pour incompatibilité avec le droit interne. Par exemple, certains pays ont refusé l’aide judiciaire pour certaines infractions de nature politique et fiscale qui n’étaient pas punissables dans l’État requis, dans des cas où l’auteur de l’infraction a déjà été condamné ou acquitté (sur le principe non bis in idem ), ou lorsque les procédures du pays étranger vont à l’encontre de certaines normes internationales comme l’Entente internationale sur les droits civiques et politiques161.

La Convention reconnaît la diversité des systèmes juridiques et autorise les États

à refuser l’entraide judiciaire dans certaines conditions ( Art. 18 (21) et description plus bas). Mais elle dit clairement aussi que l’aide ne peut pas être refusée au motif du secret bancaire (Art. 18 (8)) ou lorsqu’il est jugé que les infractions comportent des aspects de fiscalité (Art. 18 (22)). Il est exigé des États qu’ils communiquent les raisons de leur refus de porter assistance. Sinon, les États doivent accéder aux demandes aussi rapidement que possible et tenir compte des échéances auxquelles les autorités de l’État requérant ont à faire face (par exemple l’expiration d’une période de prescription) 2. SOMMAIRE DES PRINCIPALES EXIGENCES

160 D’après l’article 2, les “infractions graves” sont celles qui sont passibles de privation de liberté

pendant un maximum d’au moins quatre ans ou plus. La peine est définie par le droit interne. Donc les législateurs et rédacteurs qui souhaitent appliquer la présente Convention doivent s’assurer que la sanction qu’ils prévoient répond à ces critères.

161 Voir aussi la Convention européenne sur la protection des droits de la personne et les libertés fondamentales.

Page 182: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

180 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

❏ Article 18(1), (3): Tous les États Parties doivent garantir l’entraide judiciaire la plus large possible, comme il est prévu au paragraphe 3, lors des enquêtes, poursuites, et procédures judiciaires relatives aux infractions suivantes:

(a) les infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23, qui sont transnationales et où des groupes criminels organisés sont impliqués;

(b) les infractions graves qui sont transnationales et où des groupes criminels organisés sont impliqués;

(c) les infractions visées par les articles 5, 6, 8 et 23 où sont impliqués des groupes criminels organisés et lorsqu’il y a des motifs raisonnables de soupçonner que les victimes, les témoins, les produits du crime, les instruments du crime ou les preuves relatives aux dites infractions se trouvent dans l’État Partie requis ; et

(d) les infractions graves auxquelles ont pris part des groupes criminels organisés et lorsqu’il y a des motifs raisonnables de soupçonner que les victimes, les témoins, les produits et les instruments du crime ou les preuves relatives aux dites infractions se trouvent dans l’État Partie requis ;

❏ Article 18(2): Tous les États Parties doivent procurer de l’aide judiciaire pour les enquêtes, les poursuites et les procédures judiciaires relatives aux infractions dont une personne morale peut être tenue responsable en vertu de l’article 10.

❏ Article 18(8): Chaque État Partie doit faire en sorte de ne pas refuser de l’entraide judiciaire en invoquant le secret bancaire. Une démarche législative pourra être nécessaire si les lois ou les traités en vigueur régissant l’entraide judiciaire sont en contradiction avec les dispositions de la Convention.

❏ Article 18(7), (9)-(29): Chaque État Partie doit avoir recours aux paragraphes 9 à 29 pour déterminer les modalités d’une entraide judiciaire en l’absence d’un traité d’entraide judiciaire avec un autre État Partie. Une démarche législative pourra être nécessaire si le droit interne en vigueur qui régit l’entraide judiciaire est incompatible avec les termes de ces paragraphes (et si le droit interne a préséance sur les traités).

3. DISPOSITIONS OBLIGATOIRES

Champ d’application - Article 18 (1)

L’article 18 (1) établit le champ d’application de l’obligation de fournir une entraide judiciaire.

Pour commencer, les États Parties sont requis de s’accorder “ l’entraide judiciaire

la plus large possible lors des enquêtes, poursuites et procédures judiciaires concernant les infractions visées par la Convention “ selon l’article 3. Ainsi, chaque État Partie doit s’assurer que ses traités d’entraide judiciaire et ses lois permettent

Page 183: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entraide judiciaire - 181 __________________________________________________________________

l’aide nécessaire à la coopération en matière d’enquêtes, de poursuites et de procédures judiciaires. Les mots “poursuites judiciaires”. désignent autre chose que les enquêtes et les poursuites et ont une connotation différente. Étant donné que cette expression n’est pas définie dans la Convention, les États Parties ont toute discrétion pour déterminer dans quelle mesure ils souhaitent accorder de l’aide à l’égard de ces procédures, mais l’aide devrait au moins être disponible pour certaines parties de la procédure pénale qui dans certains pays ne font pas partie du procès proprement dit, par exemple l’instruction, la procédure de détermination de la peine, et la procédure relative au cautionnement. Ces enquêtes, poursuites et procédures judiciaires doivent porter sur les “infractions visées au paragraphe 3 de la Convention”. Cela désigne :

(a) les infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 , lorsqu’elles sont transnationales (terme défini à l’article 3(2)) et auxquelles a participé un “groupe criminel organisé” (défini à l’article 2(a)); et (b) “les infractions graves” (tel que définies à l’article 2(b)) qui sont transnationales et où un groupe criminel organisé est impliqué

En outre, les États Parties sont obligés par le paragraphe 1 de “ s’accorder réciproquement une entraide similaire lorsque l’État Partie requérant a des motifs raisonnables de soupçonner que l’infraction visée à l’alinéa a)ou b) du paragraphe 1 de l’article 3 est de nature transnationale, y compris quand les victimes, les témoins, le produit, les instruments ou les éléments de preuve de ces infractions se trouvent dans l’État Partie requis et qu’un groupe criminel organisé y est impliqué”. Cela signifie que l’obligation d’accorder une entraide judiciaire s’applique aussi dans le cas:

(c) d’infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 lorsqu’il y a des motifs raisonnables de soupçonner que les victimes, les témoins, le produit, les instruments et les éléments de preuve de ces infractions se trouvent dans l’État Partie requis et qu’un groupe criminel organisé y est impliqué ; et

(d) d’infractions graves, lorsqu’il est justifié de penser que les victimes, les témoins, le produit, les instruments et les éléments de preuve peuvent se trouver dans l’État Partie requis et qu’un groupe criminel organisé y est impliqué.

Si les lois et les traités concernant l’entraide judiciaire qui sont en vigueur dans un État Partie ne sont pas assez larges pour s’appliquer à toutes les infractions visées au paragraphe 1, il pourra être nécessaire d’amender les lois

Lorsqu’ils rédigent des lois qui détermineront le pouvoir de donner suite à des

demandes d’aide, les législateurs devraient noter que le critère s’appliquant aux demandes et aux mesures d’entraide judiciaire est un peu plus large que la plupart des critères s’appliquant aux autres obligations de la Convention et des Protocoles.

D’après l’article 3, la Convention s’applique lorsque l’infraction en question est

“transnationale” et qu’un groupe criminel organisé y est impliqué. Par contraste, l’article18(1), exige que l’entraide judiciaire soit accordée lorsqu’un État Partie requérant a “des motifs raisonnables de soupçonner que l’infraction….est de nature transnationale…..et qu’un groupe criminel organisé y est impliqué.”

Ces règles sont moins exigeantes à l’égard de la preuve car elles visent à faciliter les demandes d’aide judiciaire aux fins de déterminer si les éléments de

Page 184: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

182 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

transnationalité et de crime organisé sont présents et si une coopération internationale s’avère nécessaire et peut être demandée en vertu de la Convention, en vue d’enquêtes ou de poursuites ultérieures ou d’extradition. Il est important que cette norme soit reproduite dans les lois internes qui seront adoptées.

Les États Parties pourront se guider sur les lois et les instruments qui font l’objet

de la dernière partie du présent chapitre. Entraide judiciaire lors de procédures concernant des personnes morales - Article 18 (2)

L’article 18 (2) stipule que l’entraide judiciaire devra être fournie dans la plus

grande mesure possible en vertu des lois, des traités, des ententes et arrangements en vigueur dans les cas d’enquêtes, de poursuites et de procédures judiciaires relatives aux infractions dont une personne morale peut être tenue responsable conformément à l’article 10162.

Ainsi, un État Partie devrait être habilité à fournir une certaine entraide judiciaire

dans le cas d’enquêtes, de poursuites et de procédures judiciaires concernant la conduite d’une personne morale. Ici encore, les États Parties peuvent exercer leurs pouvoirs discrétionnaires, jusqu’à un certain point, pour décider dans quelle mesure ils veulent accorder leur aide. Lorsqu’un État Partie n’a pas l’autorité d’offrir de l’aide en matière d’enquête, de poursuites ou de procédure judiciaire contre une personne morale, il devrait envisager d’amender ses lois.

Une Note interprétative souligne que l’expression “procédures judiciaires” figurant

au paragraphe 2 de l’article 18 renvoie à l’affaire pour laquelle l’entraide judiciaire est demandée et ne doit pas être interprétée comme portant atteinte de quelque façon que ce soit à l’indépendance du pouvoir judiciaire”163.

Buts dans lesquels l’entraide judiciaire doit être fournie - Article 18(3)

L’article18 (3) donne la liste suivante des cas spécifiques dans lesquels un État Partie doit être en mesure d’accorder de l’entraide judiciaire. Il doit pouvoir aider à:

• Recueillir des témoignages ou des dépositions • Signifier des actes judiciaires; • Effectuer des perquisitions et des saisies, ainsi que des gels; • Examiner des objets et visiter des lieux; • Fournir des informations, des pièces à conviction et des estimations ; • Fournir des originaux ou des copies certifiées conformes de documents et

dossiers pertinents, y compris des documents administratifs, bancaires, financiers ou commerciaux et des documents de sociétés;

162 Voir aussi le chapitre 7 du présent Guide. 163 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para.36.

Page 185: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entraide judiciaire - 183 __________________________________________________________________

• Identifier ou localiser des produits du crime, des biens, des instruments ou d’autres choses afin de recueillir des éléments de preuve;

• Faciliter la comparution volontaire des personnes dans l’État Partie requérant ;

• Fournir tout autre type d’assistance compatible avec le droit interne de l’État Partie requis.

Il est nécessaire de satisfaire à une demande conformément au droit interne de l’État requis et, dans la mesure où cela ne va pas à l’encontre du droit interne de l’État requis et chaque fois où cela est possible, conformément aux procédures spécifiées dans la demande. Les États Parties sont invités à revoir leurs traités actuels d’entraide judiciaire pour s’assurer que ces sources de pouvoir judiciaire sont assez larges pour répondre à toutes les formes de coopération énumérées plus haut. De manière générale, les traités d’entraide judiciaire prévoient ces formes de coopération. Dans les rares cas où une forme de coopérations figurant sur la liste n’est pas prévue, (notamment dans les pays où les traités sont subordonnés aux lois internes concernant l’extradition) les États Parties devraient compléter lesdits traités d’entraide judiciaire par d’autres formes de coopération. Ou bien alors, dans le cadre de certains systèmes juridiques, une mesure d’amendement des lois ou autre mesure pourrait être nécessaire.

Dans la plupart des cas, le droit interne accorde déjà des pouvoirs aux tribunaux,

aux procureurs, aux agents des services de détection et de répression et aux agents d’autres services, qui leur permettent de fournir les formes d’aide mentionnées plus haut. Si ce n’est pas le cas, il conviendra de créer ces pouvoirs. S’ils existent déjà, des amendements pourraient être nécessaires pour s’assurer que ces pouvoirs sont à même d’être utilisés dans les cas d’entraide judiciaire. Par exemple, si les pouvoirs de perquisition et de saisie se limitent aux cas où les autorités judiciaires sont satisfaites qu’une infraction interne a été commise et que la recherche de preuves est justifiée, il faudrait amender ces pouvoirs pour autoriser des mandats de perquisition pour faciliter la recherche, dans le cas d’infractions présumées commises à l’étranger, d’éléments de preuve qui se trouvent, selon qu’il y a lieu de croire, sur le territoire de l’État étranger.

Selon les lois en vigueur, des modifications législatives pourraient être nécessaires:

❏ Les pouvoirs judiciaires d’effectuer des perquisitions, des saisies, des inspections, des examens ou des analyses de médecine légale ou autres, ainsi que les pouvoirs d’enquête en général, pourraient avoir besoin d’être élargis de manière à inclure les cas où aucune infraction interne n’est présumée mais ou un autre État Partie demande assistance. Des amendements analogues pourraient être requis pour d’autres mesures, par exemple concernant la surveillance(Art.20(1),(2)), si le pays requis est également disposé à fournir une aide judiciaire dans ces domaines.

❏ Les lois qui établissent des normes s’appliquant aux pièces à conviction

ainsi que d’autres normes relatives à l’examen des documents ou des dossiers et à la certification d’authenticité et aux procédures qui s’y appliquent devront peut-être faire l’objet d’une révision.

Page 186: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

184 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

En l’absence d’un traité d’entraide judiciaire, les États Parties qui souhaitent être en mesure de fournir et de recevoir de l’aide judiciaire pourront se prévaloir du mécanisme offert dans le contexte des dispositions des paragraphes 7, et 9 à 29. Les exigences relatives à la mise en oeuvre de ce mécanisme sont décrites ci-dessous.

Exigences relatives au secret, à la notification, à l’utilisation et à la divulgation

Les États requis et requérant sont astreints aux obligations suivantes concernant l’aide, lorsqu’elle est fournie sans qu’il y ait eu demande (Art.18(4) et (5) voir plus loin sous le titre Questions facultatives) et lorsqu’elle est accordée en réponse à une demande (Art.18(19)):

❏ La demande elle-même doit rester confidentielle si l’État requérant le demande spécifiquement, à moins qu’il ne puisse y être donné suite sans divulgation (Art.18(20)).

❏ L’information ou l’assistance fournie doit rester confidentielle sur demande de l’État qui la communique (Art.18(4) et (5)).

L’État requis doit informer l’État requérant que les critères relatifs au secret qui

s’appliquent normalement ne peuvent pas être respectés parce que:

❏ Une demande qui a été faite ou la nature de la demande doit être divulguée afin que l’on puisse donner suite à la demande ; (Art.18(20));

❏ Les renseignements fournis à titre volontaire doivent être divulgués aux personnes accusées parce qu’ils pourraient être de nature à la disculper (il convient alors d’envoyer notification avant de procéder à la divulgation, si possible) (Art.18(5),(19).

En général, un État qui fournit des renseignements ou de l’aide soit à titre

volontaire soit sur demande, peut imposer des restrictions quant à leur utilisation.

❏ Des restrictions d’ordre général peuvent être imposées quant à l’utilisation de renseignements qui sont fournis à titre volontaire (Art.18(5)).

En outre, l’article 18(19) stipule que “L’État Partie requérant ne communique ni n’utilise les informations ou les éléments de preuve fournis par l’État Partie requis pour des enquêtes, poursuites ou procédures judiciaires autres que celles visées dans la demande sans le consentement préalable de l’État Partie requis…” (Art.18(19)).

Normalement, les obligations à l’Égard du secret, de la divulgation, de la

notification et de l’utilisation ne sont pas absolues, étant donné que lorsque l’information a été communiquée à un État requérant, cet État peut être contraint à des obligations juridiques et constitutionnelles contraires, y compris l’obligation de divulguer toute l’information, ou toute l’information qui pourrait servir à disculper les personnes accusées d’avoir commis les infractions. Les États Parties sont requis toutefois de répondre aux obligations dans toutes les autres circonstances, ce qui pourra entraîner l’adoption ou l’amendement de lois comme suit:

Page 187: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entraide judiciaire - 185 __________________________________________________________________

❏ Loi demandant à ceux qui reçoivent des demandes de l’Étranger de ne pas les divulguer sauf lorsque la loi l’exige, dans la mesure nécessaire pour donner suite à la demande ou lorsque l’État requérant l’autorise.

❏ Introduction d’infractions pour divulgation inappropriée.

Dans certains pays, cela pourra signifier que les demandes de l’étranger devront être incluses dans les dispositions législatives protégeant l’information recueillie au cours d’enquêtes internes. Des infractions relatives à l’entrave aux enquêtes pénales pourraient dans certains cas s’appliquer. Mais les rédacteurs législatifs devraient garder à l’esprit que cette attente impérative de la Convention concerne la divulgation sans autorisation, que cela ait été préjudiciable ou non, alors que les infractions consistant à faire entrave ou autres peuvent exiger qu’il soit démontré qu’il y a eu préjudice réel envers l’enquête ou les poursuites. Dans les cas impliquant la Convention, le préjudice peut consister en une perte de confiance entre les États Parties concernés, la perte pour l’État requis, du caractère secret normalement prévu pour ces renseignements, ou des dommages à d’autres intérêts.

❏ Promulguer des lois exigeant que ceux qui sont en possession d’information ou qui ont fourni de l’aide suite à une demande de l’étranger ne le divulguent pas sauf lorsque la loi l’exige ou lorsque l’État requérant l’autorise.

❏ Introduire des infractions pour divulgation inappropriée. Des restrictions analogues s’appliquent à la divulgation à la fois du fait qu’il y a eu une demande et que des renseignements ont été communiqués en réponse à cette demande, mais pour ce qui est des renseignements réels ou de l’aide réellement donnée, il sera peut-être nécessaire d’accorder un peu plus de marge quant au niveau de secret à garder. Par exemple, de manière générale, des renseignements qui étaient du domaine public dans l’État les ayant fournis n’auraient pas à être tenus secrets. Par ailleurs, des renseignements de nature particulièrement délicate, par exemple obtenus par écoute téléphonique ou autre forme de surveillance électronique (non requis mais encouragé par l’Art.20(2) et (4)), pourraient faire l’objet d’une protection additionnelle dans le droit interne ou dans les ententes bilatérales adoptées en vertu de l’article 20.

❏ Promulguer une loi mettant l’information fournie au titre de l’article 18 à l’abri de poursuites juridiques ou judiciaires en raison d’utilisation non autorisée par l’État requis ou se situant en dehors du champ d’application de la Convention.

Une fois entre les mains de l’État requérant, l’information peut faire, relativement à la divulgation, l’objet d’exigences constitutionnelles ou autres qui se situent en dehors de le champ d’application de la Convention (pr. ex. poursuites de droit civil ou infractions non couvertes par la Convention). Une mesure législative pourra donc être nécessaire pour faire en sorte que les tribunaux aient une base légale pour refuser ces demandes dans les cas où l’État qui fournit l’information n’autorise pas une telle utilisation.

Une loi instituant des procédures pour déterminer si l’information ou l’aide en question était de nature à disculper les personnes visées.

L’article 18 (5) et (19) exige que l’information ne soit pas divulguée à moins qu’elle

Page 188: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

186 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

soit de nature à disculper. Dans certains systèmes, tous les renseignements dont disposent les procureurs sont jugés offrir une possibilité de disculpation et doivent être divulgués, après qu’on en ait retiré certains éléments, s’il le faut, afin de protéger les sources ou un autre élément d’information particulièrement délicat. Dans d’autres systèmes juridiques, on peut avoir à instituer des procédures pour déterminer quels renseignements doivent être divulgués, à moins que cela ne soit laissé à la discrétion des procureurs. Dans certains cas, les États Parties jugeront peut-être nécessaire, ou souhaitable, d’établir des procédures à cette fin en vue de limiter les divulgations et les notifications et autres obligations relevant de la Convention

Procédure à suivre en l’absence d’un traité - Article 18 (7)

L’article 18 (7) stipule que, lorsqu’il n’y a pas de traité d’entraide judiciaire entre

un État Partie qui recherche la coopération et l’État Partie à qui il est demandé de coopérer, les règles d’entraide judiciaire établies aux paragraphes 9 à 29 s’appliquent pour les sortes de coopération énumérées au paragraphe 3. Par contre, si un traité d’entraide judiciaire est en vigueur entre les États Parties en question, les règles du traité s’appliquent à moins qu’ils ne s’entendent pour appliquer les paragraphes 9 à 29.

Pour de nombreux États Parties dont les systèmes juridiques autorisent

l’application directe des traités, aucune démarche législative ne sera nécessaire. Si le système juridique d’un État Partie n’autorise pas l’application directe de ces paragraphes, il pourra être nécessaire de légiférer pour garantir qu’en l’absence d’un traité d’entraide judiciaire les termes des paragraphes 9 à 29 s’appliquent aux demandes faites en vertu de la présente Convention, plutôt que des règles qui autrement s’appliqueraient. Un statut habilitant peut être formulé de manière assez générale, disant simplement que dans les cas qui tombent sous l’article 18 et en l’absence d’un traité d’entraide judiciaire, les règles des paragraphes 9 à 29 doivent s’appliquer.

Les États Parties sont fortement encouragés, mais non pas obligés, à appliquer tout

paragraphe situé entre 9 et 29 si cela facilite mieux la coopération que les termes d’un traité d’entraide judiciaire qu’ils ont signé et qui est en vigueur.

Prohibition frappant le refus d’une entraide judiciaire au motif du secret bancaire - Article 18 (8)

L’article 18 (8) stipule que “Les États Parties ne peuvent invoquer le secret

bancaire pour refuser l’entraide judiciaire prévue au présent article.” Il faut noter que ce paragraphe n’est pas inclus parmi les paragraphes qui ne s’appliquent qu’en l’absence d’un traité d’entraide judiciaire. Au contraire, les États Parties sont obligés de s’assurer que ce motif de refus ne puisse pas être invoqué en vertu de leurs lois relatives à l’entraide judiciaire ou de leurs traités.

Ainsi, lorsque les lois en vigueur dans un État Partie autorisent un tel motif de

refus, elles devront être amendées pour y remédier. Lorsqu’un tel motif de refus est

Page 189: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entraide judiciaire - 187 __________________________________________________________________

inclus dans les traités d’entraide judiciaire d’un État Partie, le fait même que ce pays devienne partie à la Convention devrait automatiquement, de par le droit des traités, annuler les dispositions des traités qui sont contraires à la Convention. Si le système juridique d’un État Partie prévoit que les traités ne s’appliquent pas directement, il pourra être nécessaire d’amender le droit interne pour y remédier. Les lois bancaires devront peut-être aussi être amendées afin de protéger les banques et leur personnel contre une responsabilité civile éventuelle en matière de tort ou de contrat pour avoir divulgué des renseignements quand ils en ont reçu l’ordre en réponse à une demande d’entraide judiciaire. Des mesures semblables seront aussi peut-être nécessaires à l’égard des impôts et autres dossiers de nature fiscale, bien que cela ne soit pas obligatoire.

Une Note interprétative signale “que ce paragraphe n’est pas incompatible avec les

paragraphes 17 et 21 du présent article”164.

Mesures devant être appliquées en l’absence d’un traité - Article 18 (9-29) Pour ce qui est des mesures qu’il pourrait être nécessaire de prendre en application

des paragraphes 9 à 29, lesquels associent certaines conditions à l’obligation de coopérer qui doivent être respectées en l’absence d’un traité d’entraide judiciaire entre les États Parties concernés, voir plus haut la discussion du paragraphe 7. Les États Parties appliqueront généralement ces paragraphes directement là où ils sont pertinents à une demande particulière d’aide, soit parce que d’après leur système juridique les termes de la Convention peuvent être appliqués directement, soit par suite d’une autorité obtenue par législation dans les pays qui ne prévoient pas l’application directe des traités.

Il sera utile cependant de tenir compte des Notes interprétatives relatives à

certains de ces paragraphes. S’agissant du transfert des personnes détenues ou purgeant une peine vers un

autre État Partie (18 (10) (b)), “entre autres conditions qu’ils établissent pour le transfert d’une personne, les États Parties peuvent décider que l’État Partie requis peut se faire représenter lors des auditions de témoins effectuées sur le territoire de l’État Partie requérant”165.

Les frais associés à ces transferts de personnes (Art. 18 (10) et (11)) “ seraient

généralement considérés comme extraordinaires”. La Note indique aussi que “il est entendu que les pays en développement peuvent avoir des difficultés à assumer même certains frais ordinaires et qu’il devrait leur être fournie une assistance appropriée pour leur permettre de se conformer aux exigences du présent article”166.

La Convention exige que chaque État Partie désigne une autorité centrale habilitée

à recevoir et à exécuter les demandes d’entraide judiciaire ou à les transmettre aux autorités compétentes à cet effet. Cette autorité centrale peut n’être pas la même aux différentes étapes des procédures pour lesquelles l’entraide judiciaire a été demandée.

164 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 38. 165 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para.39. 166 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 43. Voir aussi l’article 18 (28).

Page 190: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

188 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

En outre, la Note indique que “ce paragraphe n’a pas pour but de créer des difficultés aux pays ayant des autorités centrales différentes selon qu’il s’agit de recevoir ou de formuler des demandes”167.

Refus d’entraide judiciaire Selon le paragraphe 21, l’entraide judiciaire peut être refusée :

❏ Si la demande n’est pas faite conformément aux dispositions du présent article;

❏ Si l’État Partie requis estime que l’exécution de la demande est susceptible de porter atteinte à sa souveraineté, à sa sécurité, à son ordre public ou à d’autres intérêts essentiels ;

❏ Au cas où le droit interne de l’État Partie requis interdirait à ses autorités de prendre les mesures demandées s’il s’agissait d’une infraction analogue ayant fait l’objet d’une enquête, de poursuites ou d’une procédure judiciaire dans le cadre de sa propre compétence;

❏ Au cas où il serait contraire au système juridique de l’État Partie requis concernant l’entraide judiciaire d’accéder à la demande.

Une Note interprétative souligne que la disposition de ce paragraphe “n’a pas

pour objet d’encourager le refus de l’entraide pour une raison quelconque, mais doit être interprété comme ne retenant comme critère minimum que les principes fondamentaux du droit interne de l’État requis.” Plus loin elle ajoute que “les clauses proposées concernant les motifs de refus d’une demande afin de poursuivre ou de punir une personne en raison de son sexe, de sa race, de sa religion, de sa nationalité ou de ses opinions politiques, ainsi que l’exception prévue pour infraction politique, ont été supprimées parce qu ‘il a été jugé qu’elles étaient suffisamment prises en compte par les mots ‘intérêts essentiels’ figurant à l’alinéa b) du paragraphe 21”.168.

Le fait qu’un élément d’information soit protégé par le “secret bancaire” ou que des

infractions portent sur des “questions de caractère fiscal” ne saurait justifier le refus de fournir une entraide judiciaire Art.18(8) et (22). Cela signifie que les lois bancaires et les lois établissant les pouvoirs juridiques des autorités mentionnées plus haut devront peut-être subir un amendement visant à garantir que les demandes relatives à une enquête aient priorité sur le secret bancaire. Les lois bancaires devront peut-être aussi être amendées afin de dégager les banques et leur personnel de toute responsabilité civile suite à une divulgation dont ils ont reçu l’ordre en réponse à une demande d’entraide judiciaire. Des mesures semblables pourraient être nécessaires ou souhaitables à l’égard de dossiers concernant les impôts et autres questions de nature fiscale, bien que cela ne soit pas obligatoire.

167 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 40. 168 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 42.

Page 191: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entraide judiciaire - 189 __________________________________________________________________

Questions à envisager Paragraphe 30: Conclusion de nouvelles ententes et de nouveaux arrangements (Pas d’obligations spéciales)

Le paragraphe 30 demande aux États Parties d’ “envisager, s’il y a lieu, la

possibilité de conclure des accords ou des arrangements bilatéraux ou multilatéraux qui servent les objectifs et les dispositions du présent article, leur donnent un effet pratique ou les renforcent”. Les pays qui souhaitent élargir leur réseau de traités d’extradition sont invités à consulter les instruments énumérés à la fin du présent chapitre. 4. QUESTIONS FACULTATIVES Communication spontanée de renseignements

Les paragraphes (4) et (5) de l’article 18 donnent à un État Partie une base juridique pour transmettre à un autre État Partie des renseignements ou des éléments de preuve qu’il juge importants pour lutter contre les infractions qui font l’objet de la présente Convention, même l’autre pays n’a formulé aucune demande d’aide et s’il ignore complètement l’existence desdits renseignements ou éléments de preuve. Toutefois, il n’y a aucune obligation de ce faire dans un cas donné ou un autre. Pour les États Parties dont le système juridique autorise l’application directe des traités, ces paragraphes les autorisent à transmettre les renseignements de leur propre chef, si une telle transmission n’est pas possible selon le droit interne, et il ne sera pas nécessaire de légiférer à ce sujet.

Si un État Partie ne dispose pas déjà d’une base juridique interne pour de telles

communications spontanées, et si du fait de son système juridique les termes de ces paragraphes ne peuvent pas s’appliquer directement, l’État est fortement encouragé, mais non pas obligé, à prendre les mesures nécessaires pour établir cette base juridique.

Une Note interprétative déclare que “ a) lorsqu’un État Partie envisage de

communiquer spontanément des informations de nature particulièrement sensible ou envisage d’assortir de restrictions rigoureuses leur utilisation, il est jugé souhaitable qu’il consulte auparavant l’État qui doit recevoir éventuellement ces informations; b) lorsqu’un État Partie qui reçoit des informations conformément à cette disposition est déjà en possession d’informations similaires, il n’est pas tenu d’observer les restrictions que lui impose l’État qui les lui a communiquées”.169

Clause de protection pour les traités d’entraide judiciaire (pas d’obligations spéciales) Article 18 (6)

Ce paragraphe indique simplement que cet article n’empêche ni n’affecte les obligations indépendantes qui peuvent découler d’autres traités régissant l’entraide

169Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para.37.

Page 192: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

190 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

judiciaire. En même temps, devenir partie à la présente Convention donne lieu à des obligations distinctes auxquelles les Etats Parties doivent se conformer entre eux.

Témoignage par lien vidéo

Cette disposition n’est pas obligatoire. Noter aussi l’article18(28) qui prévoit des consultations concernant les dispositions à prendre pour défrayer les dépenses “importantes ou extraordinaires” relatives à une entraide judiciaire.

L’article18(18) exige que les États Parties s’arrangent “lorsque cela est possible et

conforme aux principes fondamentaux du droit interne…” pour avoir recours à des vidéoconférences comme moyen d’obtenir des preuves par témoignage viva voce dans les cas où il n’est pas possible ni souhaitable qu’un témoin ait à se déplacer. Cela pourrait entraîner les changements législatifs suivants:

❏ Des pouvoirs législatifs permettant aux autorités d’obliger un témoin à comparaître, d’assermenter et d’attribuer une responsabilité pénale aux témoins qui refusent de coopérer (par exemple un outrage au tribunal ou une autre infraction semblable).

❏ Des amendements aux règles concernant les pièces à évidence afin de permettre le recours à la présentation de preuves par lien vidéo et de fixer les normes techniques en matière de fiabilité et de vérification (par exemple l’identification du témoin).

❏ Élargissement des infractions de faux témoignages afin de garantir:

• qu’un témoin se trouvant dans le pays mais qui donne un faux témoignage lors d’une procédure judiciaire à l’étranger soit tenu criminellement responsable;

• qu’un témoin se trouvant à l’étranger mais qui donne un faux témoignage devant un tribunal interne ou lors d’une procédure par lien vidéo soit tenu criminellement responsable;

• l’élargissement de la loi relative à l’extradition pour s’assurer que les personnes accusées d’avoir donné un faux témoignage par lien vidéo puissent être extradées, soit du pays ou vers le pays, selon le cas; et/ou

• qu’un témoin ayant menti puisse être extradé pour avoir donné un faux témoignage devant le tribunal étranger.

Lors du débat concernant cette proposition, la délégation de l’Italie a fait une

proposition au sujet des questions faisant l’objet de ce paragraphe170. Il en a été retenu les passages suivants à titre de lignes directrices pour l’application de ce paragraphe de l’article 18:

“(a) L’autorité judiciaire de l’État Partie requis sera responsable de

l’identification de la personne devant être entendue et devra après l’audience rédiger un procès-verbal indiquant la date et le lieu de l’audience et la nature du serment. La conduite de l’audience se fera sans qu’il soit exercé de pressions physiques ou mentales sur la personne interrogée ;

170 Document A/AC.254/5/Add.23.

Page 193: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entraide judiciaire - 191 __________________________________________________________________

(b) Si l’autorité judiciaire de l’État Partie requis estime que lors de l’audience les principes fondamentaux du droit de cet État n’ont pas été respectés, il a l’autorité d’interrompre l’audience ou, si possible, de s’arranger pour qu’elle se poursuive dans le respect de ces principes

(c) Au besoin, la personne devant être entendue et l’autorité judiciaire recevront l’aide d’un interprète ;

(d) La personne devant être entendue peut se prévaloir du droit de ne pas témoigner comme le prévoit le droit interne de l’État requis ou de l’État requérant ; en cas de faux témoignage, le droit interne de l’État requis s’applique ;

(e) Tous les coûts d’une vidéoconférence seront défrayés par l’État Partie requérant, qui peut aussi fournir l’équipement technique nécessaire.”171.

Pour ce qui est du dernier point concernant les coûts, il y a une Note

supplémentaire disant que ces coûts seraient “considérés comme extraordinaires” et soulignant que “ les pays en développement peuvent avoir des difficultés à assumer même certains frais ordinaires et qu’il devrait leur être fourni une assistance appropriée pour leur permettre de se conformer aux exigences du présent article”172.

5. RENVOIS A la Convention

• Article 2 (Terminologie) • Article 3 (Champ d’application) • Article 10 (Responsabilité des personnes morales) • Article 13 (Coopération internationale aux fins de confiscation). • Article 20 (Techniques d’enquêtes spéciales)

A d’autres instruments

• Convention des Nations Unies sur le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes (1988)

• Convention du Conseil de l’Europe sur le blanchiment, le dépistage, la saisie et la confiscation des produits du crime (1990)

• Convention interaméricaine sur la corruption (1996) • Convention interaméricaine sur l’entraide judiciaire en matière pénale

(1992) • Convention européenne sur l’entraide judiciaire en matière pénale (1959)

(http://conventions.coe.int/Treaty/EN/WhatYouWant.asp?NT=030) • Accord d‘application Schengen • Convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption d’agents publics

étrangers dans les transactions commerciales internationales (1997) • Convention des États membres de l’Union européenne (29 mai 2000) sur

l’entraide en matière pénale • Convention de la Ligue arabe sur l’entraide en matière pénale (1983).

171 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 41. 172 Notes interprétatives A/55/383/Add.1, para. 43.

Page 194: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

192 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

• Entente internationale sur les droits civiques et politiques (1966) • Convention européenne sur la protection des droits de la personne et des

libertés fondamentales (1950) 6. EXEMPLES DE MISE EN ŒUVRE

Les États Parties qui envisagent, en l’absence d’un traité d’entraide judiciaire,

d’instaurer ou de modifier un régime d’entraide judiciaire en application du présent article pourront se guider, entre autres, sur les exemples suivants :

Canada Loi sur l’entraide judiciaire en matière pénale. R.S.C. 1985, c. 30 (4th Supp.), s. 1, peut être téléchargé au site: http://laws.justice.gc.ca/fr/M-13.6/

Allemagne

Gesetz über die internationale Rechtshilfe in Strafsachen: http://jurcom5.juris.de/bundesrecht/irg/gesamt.pdf

Suisse

Loi fédérale sur l’entraide internationale en matière pénale 351.1; en français: http://www.admin.ch/ch/f/rs/351_1/index.html] Bundesgesetz über internationale Rechtshilfe in Strafsachen 351.1] En allemand: http://www.admin.ch/ch/d/sr/351_1/index.html]

Royaume Uni

Une description des procédures existe en anglais, français, allemand et italien au site web: http://www.homeoffice.gov.uk/oicd/jcu/guidelns.htm

Thaïlande Act on Mutual Assistance in Criminal Matters, B.E. 2535 http://www.amlo.go.th/Law/Mutual%20Assistance%20in%20Criminal%20Matters%20BE2535.htm

7. AUTRES SOURCES D’INFORMATION

Un certain nombre de conventions ont été nommées plus haut. Les États Parties qui envisagent d’élargir leur réseau de traités bilatéraux ou multilatéraux d’entraide judiciaire en application du présent article pourront se guider sur les exemples suivants, entre autres:

❏ Le traité modèle révisé des Nations Unies sur l’entraide judiciaire en matière

pénale et son guide d’interprétation, ainsi que le Projet de loi modèle des Nations Unies sur les preuves étrangères. (1998); www.unodc.org.

❏ La Convention inter-américaine sur l’entraide judiciaire en matière pénale;

Page 195: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Entraide judiciaire - 193 __________________________________________________________________

http://www.oas.org/

❏ Le traité d‘entraide judiciaire Grèce-Etats-Unis

❏ Convention du Conseil de l’Europe de 1959 avec son premier et son second Protocoles (le dernier datant de 2001),

❏ Convention de l’UE de 2000, avec protocole additionnel en 2001

❏ Plan du Commonwealth (Concernant l’entraide judiciaire en matière pénale à l’intérieur du Commonwealth)

❏ Convention sur l’entraide judiciaire en matière pénale de la Communauté économique des États d’Afrique occidentale (July 1992)

❏ Convention du Conseil de l’Europe sur le blanchiment, le dépistage, la saisie et la confiscation des produits du crime

Page 196: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

194 - Guide législatif _______________________________________________________________________________

Page 197: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 195 __________________________________________________________________

Annexe 1

Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée

Article premier Objet

L’objet de la présente Convention est de promouvoir la coopération afin de prévenir et de combattre plus efficacement la criminalité transnationale organisée.

Article 2 Terminologie

Aux fins de la présente Convention:

a) L’expression “groupe criminel organisé” désigne un groupe structuré de trois personnes ou plus existant depuis un certain temps et agissant de concert dans le but de commettre une ou plusieurs infractions graves ou infractions établies conformément à la présente Convention, pour en tirer, directement ou indirectement, un avantage financier ou un autre avantage matériel;

b) L’expression “infraction grave” désigne un acte constituant une infraction passible d’une peine privative de liberté dont le maximum ne doit pas être inférieur à quatre ans ou d’une peine plus lourde;

c) L’expression “groupe structuré” désigne un groupe qui ne s’est pas constitué au hasard pour commettre immédiatement une infraction et qui n’a pas nécessairement de rôles formellement définis pour ses membres, de continuité dans sa composition ou de structure élaborée;

d) Le terme “biens” désigne tous les types d’avoirs, corporels ou incorporels, meubles ou immeubles, tangibles ou intangibles, ainsi que les actes juridiques ou documents attestant la propriété de ces avoirs ou les droits y relatifs;

e) L’expression “produit du crime” désigne tout bien provenant directement ou indirectement de la commission d’une infraction ou obtenu directement ou indirectement en la commettant;

f) Les termes “gel” ou “saisie” désignent l’interdiction temporaire du transfert, de la conversion, de la disposition ou du mouvement de biens, ou le fait d’assumer temporairement la garde ou le contrôle de biens sur décision d’un tribunal ou d’une autre autorité compétente;

g) Le terme “confiscation” désigne la dépossession permanente de biens sur décision d’un tribunal ou d’une autre autorité compétente;

h) L’expression “infraction principale” désigne toute infraction à la suite de laquelle un produit est généré, qui est susceptible de devenir l’objet d’une infraction définie à l’article 6 de la présente Convention;

i) L’expression “livraison surveillée” désigne la méthode consistant à permettre le passage par le territoire d’un ou de plusieurs États d’expéditions illicites ou

Page 198: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

196 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

suspectées de l’être, au su et sous le contrôle des autorités compétentes de ces États, en vue d’enquêter sur une infraction et d’identifier les personnes impliquées dans sa commission;

j) L’expression “organisation régionale d’intégration économique” désigne toute organisation constituée par des États souverains d’une région donnée, à laquelle ses États membres ont transféré des compétences en ce qui concerne les questions régies par la présente Convention et qui a été dûment mandatée, conformément à ses procédures internes, pour signer, ratifier, accepter, approuver ladite Convention ou y adhérer; les références dans la présente Convention aux «États Parties” sont applicables à ces organisations dans la limite de leur compétence.

Article 3 Champ d’application

1. La présente Convention s’applique, sauf disposition contraire, à la prévention, aux enquêtes et aux poursuites concernant:

a) Les infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention; et

b) Les infractions graves telles que définies à l’article 2 de la présente Convention;

lorsque ces infractions sont de nature transnationale et qu’un groupe criminel organisé y est impliqué.

2. Aux fins du paragraphe 1 du présent article, une infraction est de nature transnationale si:

a) Elle est commise dans plus d’un État;

b) Elle est commise dans un État mais qu’une partie substantielle de sa préparation, de sa planification, de sa conduite ou de son contrôle a lieu dans un autre État;

c) Elle est commise dans un État mais implique un groupe criminel organisé qui se livre à des activités criminelles dans plus d’un État; ou

d) Elle est commise dans un État mais a des effets substantiels dans un autre État.

Article 4 Protection de la souveraineté

1. Les États Parties exécutent leurs obligations au titre de la présente Convention d’une manière compatible avec les principes de l’égalité souveraine et de l’intégrité territoriale des États et avec celui de la non-intervention dans les affaires intérieures d’autres États.

Page 199: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 197 __________________________________________________________________

2. Aucune disposition de la présente Convention n’habilite un État Partie à exercer sur le territoire d’un autre État une compétence et des fonctions qui sont exclusivement réservées aux autorités de cet autre État par son droit interne.

Article 5 Incrimination de la participation à un groupe criminel organisé

1. Chaque État Partie adopte les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d’infraction pénale, lorsque commis intentionnellement:

a) À l’un ou l’autre des actes suivants ou aux deux, en tant qu’infractions pénales distinctes de celles impliquant une tentative d’activité criminelle ou sa consommation:

i) Au fait de s’entendre avec une ou plusieurs personnes en vue de

commettre une infraction grave à une fin liée directement ou indirectement à l’obtention d’un avantage financier ou autre avantage matériel et, lorsque le droit interne l’exige, impliquant un acte commis par un des participants en vertu de cette entente ou impliquant un groupe criminel organisé;

ii) À la participation active d’une personne ayant connaissance soit du but et de l’activité criminelle générale d’un groupe criminel organisé soit de son intention de commettre les infractions en question:

a. Aux activités criminelles du groupe criminel organisé;

b. À d’autres activités du groupe criminel organisé lorsque cette personne sait que sa participation contribuera à la réalisation du but criminel susmentionné;

b) Au fait d’organiser, de diriger, de faciliter, d’encourager ou de favoriser au moyen d’une aide ou de conseils la commission d’une infraction grave impliquant un groupe criminel organisé.

2. La connaissance, l’intention, le but, la motivation ou l’entente visés au paragraphe 1 du présent article peuvent être déduits de circonstances factuelles objectives.

3. Les États Parties dont le droit interne subordonne l’établissement des infractions visées à l’alinéa a i) du paragraphe 1 du présent article à l’implication d’un groupe criminel organisé veillent à ce que leur droit interne couvre toutes les infractions graves impliquant des groupes criminels organisés. Ces États Parties, de même que les États Parties dont le droit interne subordonne l’établissement des infractions visées à l’alinéa a i) du paragraphe 1 du présent article à la commission d’un acte en vertu de l’entente, portent cette information à la connaissance du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies au moment où ils signent la présente Convention ou déposent leurs instruments de ratification, d’acceptation ou d’approbation ou d’adhésion.

Article 6 Incrimination du blanchiment du produit du crime

Page 200: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

198 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

1. Chaque État Partie adopte, conformément aux principes fondamentaux de son droit interne, les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d’infraction pénale, lorsque l’acte a été commis intentionnellement:

a) i) À la conversion ou au transfert de biens dont celui qui s’y livre sait qu’ils sont le produit du crime, dans le but de dissimuler ou de déguiser l’origine illicite desdits biens ou d’aider toute personne qui est impliquée dans la commission de l’infraction principale à échapper aux conséquences juridiques de ses actes;

ii) À la dissimulation ou au déguisement de la nature véritable, de l’origine, de l’emplacement, de la disposition, du mouvement ou de la propriété de biens ou de droits y relatifs dont l’auteur sait qu’ils sont le produit du crime;

b) et, sous réserve des concepts fondamentaux de son système juridique:

i) À l’acquisition, à la détention ou à l’utilisation de biens dont celui qui les acquiert, les détient ou les utilise sait, au moment où il les reçoit, qu’ils sont le produit du crime;

ii) À la participation à l’une des infractions établies conformément au présent article ou à toute autre association, entente, tentative ou complicité par fourniture d’une assistance, d’une aide ou de conseils en vue de sa commission.

2. Aux fins de l’application du paragraphe 1 du présent article:

a) Chaque État Partie s’efforce d’appliquer le paragraphe 1 du présent article à l’éventail le plus large d’infractions principales;

b) Chaque État Partie inclut dans les infractions principales toutes les infractions graves telles que définies à l’article 2 de la présente Convention et les infractions établies conformément à ses articles 5, 8 et 23. S’agissant des États Parties dont la législation contient une liste d’infractions principales spécifiques, ceux-ci incluent dans cette liste, au minimum, un éventail complet d’infractions liées à des groupes criminels organisés;

c) Aux fins de l’alinéa b, les infractions principales incluent les infractions commises à l’intérieur et à l’extérieur du territoire relevant de la compétence de l’État Partie en question. Toutefois, une infraction commise à l’extérieur du territoire relevant de la compétence d’un État Partie ne constitue une infraction principale que lorsque l’acte correspondant est une infraction pénale en vertu du droit interne de l’État où il a été commis et constituerait une infraction pénale en vertu du droit interne de l’État Partie appliquant le présent article s’il avait été commis sur son territoire;

d) Chaque État Partie remet au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies une copie de ses lois qui donnent effet au présent article ainsi qu’une copie de toute modification ultérieurement apportée à ces lois ou une description de ces lois et modifications ultérieures;

e) Lorsque les principes fondamentaux du droit interne d’un État Partie l’exigent, il peut être disposé que les infractions énoncées au paragraphe 1 du présent article ne s’appliquent pas aux personnes qui ont commis l’infraction principale;

Page 201: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 199 __________________________________________________________________

f) La connaissance, l’intention ou la motivation, en tant qu’éléments constitutifs d’une infraction énoncée au paragraphe 1 du présent article, peuvent être déduites de circonstances factuelles objectives.

Article 7 Mesures de lutte contre le blanchiment d’argent

1. Chaque État Partie:

a) Institue un régime interne complet de réglementation et de contrôle des banques et institutions financières non bancaires, ainsi que, le cas échéant, des autres entités particulièrement exposées au blanchiment d’argent, dans les limites de sa compétence, afin de prévenir et de détecter toutes formes de blanchiment d’argent, lequel régime met l’accent sur les exigences en matière d’identification des clients, d’enregistrement des opérations et de déclaration des opérations suspectes;

b) S’assure, sans préjudice des articles 18 et 27 de la présente Convention, que les autorités administratives, de réglementation, de détection et de répression et autres, chargées de la lutte contre le blanchiment d’argent (y compris, quand son droit interne le prévoit, les autorités judiciaires) sont en mesure de coopérer et d’échanger des informations aux niveaux national et international, dans les conditions définies par son droit interne et, à cette fin, envisage la création d’un service de renseignement financier qui fera office de centre national de collecte, d’analyse et de diffusion d’informations concernant d’éventuelles opérations de blanchiment d’argent.

2. Les États Parties envisagent de mettre en oeuvre des mesures réalisables de détection et de surveillance du mouvement transfrontière d’espèces et de titres négociables appropriés, sous réserve de garanties permettant d’assurer une utilisation correcte des informations et sans entraver d’aucune façon la circulation des capitaux licites. Il peut être notamment fait obligation aux particuliers et aux entreprises de signaler les transferts transfrontières de quantités importantes d’espèces et de titres négociables appropriés.

3. Lorsqu’ils instituent un régime interne de réglementation et de contrôle aux termes du présent article, et sans préjudice de tout autre article de la présente Convention, les États Parties sont invités à prendre pour lignes directrices les initiatives pertinentes prises par les organisations régionales, interrégionales et multilatérales pour lutter contre le blanchiment d’argent.

4. Les États Parties s’efforcent de développer et de promouvoir la coopération mondiale, régionale, sous-régionale et bilatérale entre les autorités judiciaires, les services de détection et de répression et les autorités de réglementation financière en vue de lutter contre le blanchiment d’argent.

Article 8 Incrimination de la corruption

1. Chaque État Partie adopte les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d’infraction pénale, lorsque les actes ont été commis intentionnellement:

Page 202: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

200 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

a) Au fait de promettre, d’offrir ou d’accorder à un agent public, directement ou indirectement, un avantage indu, pour lui-même ou pour une autre personne ou entité, afin qu’il accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte dans l’exercice de ses fonctions officielles;

b) Au fait pour un agent public de solliciter ou d’accepter, directement ou indirectement, un avantage indu pour lui-même ou pour une autre personne ou entité, afin d’accomplir ou de s’abstenir d’accomplir un acte dans l’exercice de ses fonctions officielles.

2. Chaque État Partie envisage d’adopter les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d’infraction pénale aux actes visés au paragraphe 1 du présent article impliquant un agent public étranger ou un fonctionnaire international. De même, chaque État Partie envisage de conférer le caractère d’infraction pénale à d’autres formes de corruption.

3. Chaque État Partie adopte également les mesures nécessaires pour conférer le caractère d’infraction pénale au fait de se rendre complice d’une infraction établie conformément au présent article.

4. Aux fins du paragraphe 1 du présent article et de l’article 9 de la présente Convention, le terme “agent public” désigne un agent public ou une personne assurant un service public, tel que ce terme est défini dans le droit interne et appliqué dans le droit pénal de l’État Partie où la personne en question exerce cette fonction.

Article 9 Mesures contre la corruption

1. Outre les mesures énoncées à l’article 8 de la présente Convention, chaque État Partie, selon qu’il convient et conformément à son système juridique, adopte des mesures efficaces d’ordre législatif, administratif ou autre pour promouvoir l’intégrité et prévenir, détecter et punir la corruption des agents publics.

2. Chaque État Partie prend des mesures pour s’assurer que ses autorités agissent efficacement en matière de prévention, de détection et de répression de la corruption des agents publics, y compris en leur donnant une indépendance suffisante pour empêcher toute influence inappropriée sur leurs actions.

Article 10 Responsabilité des personnes morales

1. Chaque État Partie adopte les mesures nécessaires, conformément à ses principes juridiques, pour établir la responsabilité des personnes morales qui participent à des infractions graves impliquant un groupe criminel organisé et qui commettent les infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention.

2. Sous réserve des principes juridiques de l’État Partie, la responsabilité des personnes morales peut être pénale, civile ou administrative.

3. Cette responsabilité est sans préjudice de la responsabilité pénale des personnes physiques qui ont commis les infractions.

Page 203: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 201 __________________________________________________________________

4. Chaque État Partie veille, en particulier, à ce que les personnes morales tenues responsables conformément au présent article fassent l’objet de sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives de nature pénale ou non pénale, y compris de sanctions pécuniaires.

Article 11 Poursuites judiciaires, jugement et sanctions

1. Chaque État Partie rend la commission d’une infraction établie conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention passible de sanctions qui tiennent compte de la gravité de cette infraction.

2. Chaque État Partie s’efforce de faire en sorte que tout pouvoir judiciaire discrétionnaire conféré par son droit interne et afférent aux poursuites judiciaires engagées contre des individus pour des infractions visées par la présente Convention soit exercé de façon à optimiser l’efficacité des mesures de détection et de répression de ces infractions, compte dûment tenu de la nécessité d’exercer un effet dissuasif en ce qui concerne leur commission.

3. S’agissant d’infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention, chaque État Partie prend les mesures appropriées conformément à son droit interne et compte dûment tenu des droits de la défense, pour faire en sorte que les conditions auxquelles sont subordonnées les décisions de mise en liberté dans l’attente du jugement ou de la procédure d’appel tiennent compte de la nécessité d’assurer la présence du défendeur lors de la procédure pénale ultérieure.

4. Chaque État Partie s’assure que ses tribunaux ou autres autorités compétentes ont à l’esprit la gravité des infractions visées par la présente Convention lorsqu’ils envisagent l’éventualité d’une libération anticipée ou conditionnelle de personnes reconnues coupables de ces infractions.

5. Lorsqu’il y a lieu, chaque État Partie détermine, dans le cadre de son droit interne, une période de prescription prolongée au cours de laquelle des poursuites peuvent être engagées du chef d’une des infractions visées par la présente Convention, cette période étant plus longue lorsque l’auteur présumé de l’infraction s’est soustrait à la justice.

6. Aucune disposition de la présente Convention ne porte atteinte au principe selon lequel la définition des infractions établies conformément à celle-ci et des moyens juridiques de défense applicables ainsi que d’autres principes juridiques régissant la légalité des incriminations relève exclusivement du droit interne d’un État Partie et selon lequel lesdites infractions sont poursuivies et punies conformément au droit de cet État Partie.

Article 12 Confiscation et saisie

1. Les États Parties adoptent, dans toute la mesure possible dans le cadre de leurs systèmes juridiques nationaux, les mesures nécessaires pour permettre la confiscation:

a) Du produit du crime provenant d’infractions visées par la présente Convention ou de biens dont la valeur correspond à celle de ce produit;

Page 204: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

202 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

b) Des biens, des matériels et autres instruments utilisés ou destinés à être utilisés pour les infractions visées par la présente Convention.

2. Les États Parties adoptent les mesures nécessaires pour permettre l’identification, la localisation, le gel ou la saisie de tout ce qui est mentionné au paragraphe 1 du présent article aux fins de confiscation éventuelle.

3. Si le produit du crime a été transformé ou converti, en partie ou en totalité, en d’autres biens, ces derniers peuvent faire l’objet des mesures visées au présent article en lieu et place dudit produit.

4. Si le produit du crime a été mêlé à des biens acquis légitimement, ces biens, sans préjudice de tous pouvoirs de gel ou de saisie, peuvent être confisqués à concurrence de la valeur estimée du produit qui y a été mêlé.

5. Les revenus ou autres avantages tirés du produit du crime, des biens en lesquels le produit a été transformé ou converti ou des biens auxquels il a été mêlé peuvent aussi faire l’objet des mesures visées au présent article, de la même manière et dans la même mesure que le produit du crime.

6. Aux fins du présent article et de l’article 13 de la présente Convention, chaque État Partie habilite ses tribunaux ou autres autorités compétentes à ordonner la production ou la saisie de documents bancaires, financiers ou commerciaux. Les États Parties ne peuvent invoquer le secret bancaire pour refuser de donner effet aux dispositions du présent paragraphe.

7. Les États Parties peuvent envisager d’exiger que l’auteur d’une infraction établisse l’origine licite du produit présumé du crime ou d’autres biens pouvant faire l’objet d’une confiscation, dans la mesure où cette exigence est conforme aux principes de leur droit interne et à la nature de la procédure judiciaire et des autres procédures.

8. L’interprétation des dispositions du présent article ne doit en aucun cas porter atteinte aux droits des tiers de bonne foi.

9. Aucune disposition du présent article ne porte atteinte au principe selon lequel les mesures qui y sont visées sont définies et exécutées conformément au droit interne de chaque État Partie et selon les dispositions dudit droit.

Article 13 Coopération internationale aux fins de confiscation

1. Dans toute la mesure possible dans le cadre de son système juridique national, un État Partie qui a reçu d’un autre État Partie ayant compétence pour connaître d’une infraction visée par la présente Convention une demande de confiscation du produit du crime, des biens, des matériels ou autres instruments visés au paragraphe 1 de l’article 12 de la présente Convention, qui sont situés sur son territoire:

a) Transmet la demande à ses autorités compétentes en vue de faire prononcer une décision de confiscation et, si celle-ci intervient, la faire exécuter; ou

b) Transmet à ses autorités compétentes, afin qu’elle soit exécutée dans les limites de la demande, la décision de confiscation prise par un tribunal situé sur le territoire de l’État Partie requérant conformément au paragraphe 1 de l’article 12 de la présente Convention, pour ce qui est du produit du crime, des biens, des

Page 205: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 203 __________________________________________________________________

matériels ou autres instruments visés au paragraphe 1 de l’article 12 situés sur le territoire de l’État Partie requis.

2. Lorsqu’une demande est faite par un autre État Partie qui a compétence pour connaître d’une infraction visée par la présente Convention, l’État Partie requis prend des mesures pour identifier, localiser et geler ou saisir le produit du crime, les biens, les matériels ou les autres instruments visés au paragraphe 1 de l’article 12 de la présente Convention, en vue d’une éventuelle confiscation à ordonner soit par l’État Partie requérant, soit comme suite à une demande formulée en vertu du paragraphe 1 du présent article, par l’État Partie requis.

3. Les dispositions de l’article 18 de la présente Convention s’appliquent mutatis mutandis au présent article. Outre les informations visées au paragraphe 15 de l’article 18, les demandes faites conformément au présent article contiennent:

a) Lorsque la demande relève de l’alinéa a du paragraphe 1 du présent article, une description des biens à confisquer et un exposé des faits sur lesquels se fonde l’État Partie requérant qui permettent à l’État Partie requis de faire prononcer une décision de confiscation dans le cadre de son droit interne;

b) Lorsque la demande relève de l’alinéa b du paragraphe 1 du présent article, une copie légalement admissible de la décision de confiscation rendue par l’État Partie requérant sur laquelle la demande est fondée, un exposé des faits et des informations indiquant dans quelles limites il est demandé d’exécuter la décision;

c) Lorsque la demande relève du paragraphe 2 du présent article, un exposé des faits sur lesquels se fonde l’État Partie requérant et une description des mesures demandées.

4. Les décisions ou mesures prévues aux paragraphes 1 et 2 du présent article sont prises par l’État Partie requis conformément à son droit interne et selon les dispositions dudit droit, et conformément à ses règles de procédure ou à tout traité, accord ou arrangement bilatéral ou multilatéral le liant à l’État Partie requérant.

5. Chaque État Partie remet au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies une copie de ses lois et règlements qui donnent effet au présent article ainsi qu’une copie de toute modification ultérieurement apportée à ces lois et règlements ou une description de ces lois, règlements et modifications ultérieures.

6. Si un État Partie décide de subordonner l’adoption des mesures visées aux paragraphes 1 et 2 du présent article à l’existence d’un traité en la matière, il considère la présente Convention comme une base conventionnelle nécessaire et suffisante.

7. Un État Partie peut refuser de donner suite à une demande de coopération en vertu du présent article dans le cas où l’infraction à laquelle elle se rapporte n’est pas une infraction visée par la présente Convention.

8. L’interprétation des dispositions du présent article ne doit en aucun cas porter atteinte aux droits des tiers de bonne foi.

9. Les États Parties envisagent de conclure des traités, accords ou arrangements bilatéraux ou multilatéraux afin de renforcer l’efficacité de la coopération internationale instaurée aux fins du présent article.

Article 14

Page 206: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

204 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

Disposition du produit du crime ou des biens confisqués

1. Un État Partie qui confisque le produit du crime ou des biens en application de l’article 12 ou du paragraphe 1 de l’article 13 de la présente Convention en dispose conformément à son droit interne et à ses procédures administratives.

2. Lorsque les États Parties agissent à la demande d’un autre État Partie en application de l’article 13 de la présente Convention, ils doivent, dans la mesure où leur droit interne le leur permet et si la demande leur en est faite, envisager à titre prioritaire de restituer le produit du crime ou les biens confisqués à l’État Partie requérant, afin que ce dernier puisse indemniser les victimes de l’infraction ou restituer ce produit du crime ou ces biens à leurs propriétaires légitimes.

3. Lorsqu’un État Partie agit à la demande d’un autre État Partie en application des articles 12 et 13 de la présente Convention, il peut envisager spécialement de conclure des accords ou arrangements prévoyant:

a) De verser la valeur de ce produit ou de ces biens, ou les fonds provenant de leur vente, ou une partie de ceux-ci, au compte établi en application de l’alinéa c du paragraphe 2 de l’article 30 de la présente Convention et à des organismes intergouvernementaux spécialisés dans la lutte contre la criminalité organisée;

b) De partager avec d’autres États Parties, systématiquement ou au cas par cas, ce produit ou ces biens, ou les fonds provenant de leur vente, conformément à son droit interne ou à ses procédures administratives.

Article 15 Compétence

1. Chaque État Partie adopte les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l’égard des infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention dans les cas suivants:

a) Lorsque l’infraction est commise sur son territoire; ou

b) Lorsque l’infraction est commise à bord d’un navire qui bat son pavillon ou à bord d’un aéronef immatriculé conformément à son droit interne au moment où ladite infraction est commise.

2. Sous réserve de l’article 4 de la présente Convention, un État Partie peut également établir sa compétence à l’égard de l’une quelconque de ces infractions dans les cas suivants:

a) Lorsque l’infraction est commise à l’encontre d’un de ses ressortissants;

Page 207: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 205 __________________________________________________________________

b) Lorsque l’infraction est commise par un de ses ressortissants ou par une personne apatride résidant habituellement sur son territoire; ou

c) Lorsque l’infraction est:

i) Une de celles établies conformément au paragraphe 1 de l’article 5 de la présente Convention et est commise hors de son territoire en vue de la commission, sur son territoire, d’une infraction grave;

ii) Une de celles établies conformément à l’alinéa b ii) du paragraphe 1 de l’article 6 de la présente Convention et est commise hors de son territoire en vue de la commission, sur son territoire, d’une infraction établie conformément aux alinéas a i) ou ii), ou b i) du paragraphe 1 de l’article 6 de la présente Convention.

3. Aux fins du paragraphe 10 de l’article 16 de la présente Convention, chaque État Partie adopte les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l’égard des infractions visées par la présente Convention lorsque l’auteur présumé se trouve sur son territoire et qu’il n’extrade pas cette personne au seul motif qu’elle est l’un de ses ressortissants.

4. Chaque État Partie peut également adopter les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l’égard des infractions visées par la présente Convention lorsque l’auteur présumé se trouve sur son territoire et qu’il ne l’extrade pas.

5. Si un État Partie qui exerce sa compétence en vertu du paragraphe 1 ou 2 du présent article a été avisé, ou a appris de toute autre façon, qu’un ou plusieurs autres États Parties mènent une enquête ou ont engagé des poursuites ou une procédure judiciaire concernant le même acte, les autorités compétentes de ces États Parties se consultent, selon qu’il convient, pour coordonner leurs actions.

6. Sans préjudice des normes du droit international général, la présente Convention n’exclut pas l’exercice de toute compétence pénale établie par un État Partie conformément à son droit interne.

Article 16 Extradition

1. Le présent article s’applique aux infractions visées par la présente Convention ou dans les cas où un groupe criminel organisé est impliqué dans une infraction visée à l’alinéa a ou b du paragraphe 1 de l’article 3 et que la personne faisant l’objet de la demande d’extradition se trouve sur le territoire de l’État Partie requis, à condition que l’infraction pour laquelle l’extradition est demandée soit punissable par le droit interne de l’État Partie requérant et de l’État Partie requis.

2. Si la demande d’extradition porte sur plusieurs infractions graves distinctes, dont certaines ne sont pas visées par le présent article, l’État Partie requis peut appliquer également cet article à ces dernières infractions.

3. Chacune des infractions auxquelles s’applique le présent article est de plein droit incluse dans tout traité d’extradition en vigueur entre les États Parties en tant qu’infraction dont l’auteur peut être extradé. Les États Parties s’engagent à inclure ces infractions en tant qu’infractions dont l’auteur peut être extradé dans tout traité d’extradition qu’ils concluront entre eux.

Page 208: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

206 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

4. Si un État Partie qui subordonne l’extradition à l’existence d’un traité reçoit une demande d’extradition d’un État Partie avec lequel il n’a pas conclu pareil traité, il peut considérer la présente Convention comme la base légale de l’extradition pour les infractions auxquelles le présent article s’applique.

5. Les États Parties qui subordonnent l’extradition à l’existence d’un traité:

a) Au moment du dépôt de leur instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion à la présente Convention, indiquent au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies s’ils considèrent la présente Convention comme la base légale pour coopérer en matière d’extradition avec d’autres États Parties; et

b) S’ils ne considèrent par la présente Convention comme la base légale pour coopérer en matière d’extradition, s’efforcent, s’il y a lieu, de conclure des traités d’extradition avec d’autres États Parties afin d’appliquer le présent article.

6. Les États Parties qui ne subordonnent pas l’extradition à l’existence d’un traité reconnaissent entre eux aux infractions auxquelles le présent article s’applique le caractère d’infraction dont l’auteur peut être extradé.

7. L’extradition est subordonnée aux conditions prévues par le droit interne de l’État Partie requis ou par les traités d’extradition applicables, y compris, notamment, aux conditions concernant la peine minimale requise pour extrader et aux motifs pour lesquels l’État Partie requis peut refuser l’extradition.

8. Les États Parties s’efforcent, sous réserve de leur droit interne, d’accélérer les procédures d’extradition et de simplifier les exigences en matière de preuve y relatives en ce qui concerne les infractions auxquelles s’applique le présent article.

9. Sous réserve des dispositions de son droit interne et des traités d’extradition qu’il a conclus, l’État Partie requis peut, à la demande de l’État Partie requérant et s’il estime que les circonstances le justifient et qu’il y a urgence, placer en détention une personne présente sur son territoire dont l’extradition est demandée ou prendre à son égard toutes autres mesures appropriées pour assurer sa présence lors de la procédure d’extradition.

10. Un État Partie sur le territoire duquel se trouve l’auteur présumé de l’infraction, s’il n’extrade pas cette personne au titre d’une infraction à laquelle s’applique le présent article au seul motif qu’elle est l’un de ses ressortissants, est tenu, à la demande de l’État Partie requérant l’extradition, de soumettre l’affaire sans retard excessif à ses autorités compétentes aux fins de poursuites. Lesdites autorités prennent leur décision et mènent les poursuites de la même manière que pour toute autre infraction grave en vertu du droit interne de cet État Partie. Les États Parties intéressés coopèrent entre eux, notamment en matière de procédure et de preuve, afin d’assurer l’efficacité des poursuites.

11. Lorsqu’un État Partie, en vertu de son droit interne, n’est autorisé à extrader ou remettre de toute autre manière l’un de ses ressortissants que si cette personne est ensuite renvoyée dans cet État Partie pour purger la peine prononcée à l’issue du procès ou de la procédure à l’origine de la demande d’extradition ou de remise, et lorsque cet État Partie et l’État Partie requérant s’accordent sur cette option et d’autres conditions qu’ils peuvent juger appropriées, cette extradition ou remise

Page 209: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 207 __________________________________________________________________

conditionnelle est suffisante aux fins de l’exécution de l’obligation énoncée au paragraphe 10 du présent article.

12. Si l’extradition, demandée aux fins d’exécution d’une peine, est refusée parce que la personne faisant l’objet de cette demande est un ressortissant de l’État Partie requis, celui-ci, si son droit interne le lui permet, en conformité avec les prescriptions de ce droit et à la demande de l’État Partie requérant, envisage de faire exécuter lui-même la peine qui a été prononcée conformément au droit interne de l’État Partie requérant, ou le reliquat de cette peine.

13. Toute personne faisant l’objet de poursuites en raison de l’une quelconque des infractions auxquelles le présent article s’applique se voit garantir un traitement équitable à tous les stades de la procédure, y compris la jouissance de tous les droits et de toutes les garanties prévus par le droit interne de l’État Partie sur le territoire duquel elle se trouve.

14. Aucune disposition de la présente Convention ne doit être interprétée comme faisant obligation à l’État Partie requis d’extrader s’il a de sérieuses raisons de penser que la demande a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir une personne en raison de son sexe, de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son origine ethnique ou de ses opinions politiques, ou que donner suite à cette demande causerait un préjudice à cette personne pour l’une quelconque de ces raisons.

15. Les États Parties ne peuvent refuser une demande d’extradition au seul motif que l’infraction est considérée comme touchant aussi à des questions fiscales.

16. Avant de refuser l’extradition, l’État Partie requis consulte, le cas échéant, l’État Partie requérant afin de lui donner toute possibilité de présenter ses opinions et de donner des informations à l’appui de ses allégations.

17. Les États Parties s’efforcent de conclure des accords ou arrangements bilatéraux et multilatéraux pour permettre l’extradition ou pour en accroître l’efficacité.

Article 17 Transfert des personnes condamnées

Les États Parties peuvent envisager de conclure des accords ou arrangements bilatéraux ou multilatéraux relatifs au transfert sur leur territoire de personnes condamnées à des peines d’emprisonnement ou autres peines privatives de liberté du fait d’infractions visées par la présente Convention afin qu’elles puissent y purger le reste de leur peine.

Article 18 Entraide judiciaire

1. Les États Parties s’accordent mutuellement l’entraide judiciaire la plus large possible lors des enquêtes, poursuites et procédures judiciaires concernant les infractions visées par la présente Convention, comme prévu à l’article 3, et s’accordent réciproquement une entraide similaire lorsque l’État Partie requérant a des motifs raisonnables de soupçonner que l’infraction visée à l’alinéa a ou b du paragraphe 1 de l’article 3 est de nature transnationale, y compris quand les victimes, les témoins, le produit, les instruments ou les éléments de preuve de ces infractions se trouvent dans l’État Partie requis et qu’un groupe criminel organisé y est impliqué.

Page 210: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

208 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

2. L’entraide judiciaire la plus large possible est accordée, autant que les lois, traités, accords et arrangements pertinents de l’État Partie requis le permettent, lors des enquêtes, poursuites et procédures judiciaires concernant des infractions dont une personne morale peut être tenue responsable dans l’État Partie requérant, conformément à l’article 10 de la présente Convention.

3. L’entraide judiciaire qui est accordée en application du présent article peut être demandée aux fins suivantes:

a) Recueillir des témoignages ou des dépositions;

b) Signifier des actes judiciaires;

c) Effectuer des perquisitions et des saisies, ainsi que des gels;

d) Examiner des objets et visiter des lieux;

e) Fournir des informations, des pièces à conviction et des estimations d’experts;

f) Fournir des originaux ou des copies certifiées conformes de documents et dossiers pertinents, y compris des documents administratifs, bancaires, financiers ou commerciaux et des documents de sociétés;

g) Identifier ou localiser des produits du crime, des biens, des instruments ou d’autres choses afin de recueillir des éléments de preuve;

h) Faciliter la comparution volontaire de personnes dans l’État Partie requérant;

i) Fournir tout autre type d’assistance compatible avec le droit interne de l’État Partie requis.

4. Sans préjudice de son droit interne, les autorités compétentes d’un État Partie peuvent, sans demande préalable, communiquer des informations concernant des affaires pénales à une autorité compétente d’un autre État Partie, si elles pensent que ces informations pourraient l’aider à entreprendre ou à conclure des enquêtes et des poursuites pénales, ou amener ce dernier État Partie à formuler une demande en vertu de la présente Convention.

5. La communication d’informations conformément au paragraphe 4 du présent article se fait sans préjudice des enquêtes et poursuites pénales dans l’État dont les autorités compétentes fournissent les informations. Les autorités compétentes qui reçoivent ces informations accèdent à toute demande tendant à ce que lesdites informations restent confidentielles, même temporairement, ou à ce que leur utilisation soit assortie de restrictions. Toutefois, cela n’empêche pas l’État Partie qui reçoit les informations de révéler, lors de la procédure judiciaire, des informations à la décharge d’un prévenu. Dans ce dernier cas, l’État Partie qui reçoit les informations avise l’État Partie qui les communique avant la révélation et, s’il lui en est fait la demande, consulte ce dernier. Si, dans un cas exceptionnel, une notification préalable n’est pas possible, l’État Partie qui reçoit les informations informe sans retard de la révélation l’État Partie qui les communique.

6. Les dispositions du présent article n’affectent en rien les obligations découlant de tout autre traité bilatéral ou multilatéral régissant ou devant régir, entièrement ou partiellement, l’entraide judiciaire.

Page 211: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 209 __________________________________________________________________

7. Les paragraphes 9 à 29 du présent article sont applicables aux demandes faites conformément au présent article si les États Parties en question ne sont pas liés par un traité d’entraide judiciaire. Si lesdits États Parties sont liés par un tel traité, les dispositions correspondantes de ce traité sont applicables, à moins que les États Parties ne conviennent d’appliquer à leur place les dispositions des paragraphes 9 à 29 du présent article. Les États Parties sont vivement encouragés à appliquer ces paragraphes s’ils facilitent la coopération.

8. Les États Parties ne peuvent invoquer le secret bancaire pour refuser l’entraide judiciaire prévue au présent article.

9. Les États Parties peuvent invoquer l’absence de double incrimination pour refuser de donner suite à une demande d’entraide judiciaire prévue au présent article. L’État Partie requis peut néanmoins, lorsqu’il le juge approprié, fournir cette assistance, dans la mesure où il le décide à son gré, indépendamment du fait que l’acte constitue ou non une infraction conformément au droit interne de l’État Partie requis.

10. Toute personne détenue ou purgeant une peine sur le territoire d’un État Partie, dont la présence est requise dans un autre État Partie à des fins d’identification ou de témoignage ou pour qu’elle apporte de toute autre manière son concours à l’obtention de preuves dans le cadre d’enquêtes, de poursuites ou de procédures judiciaires relatives aux infractions visées par la présente Convention, peut faire l’objet d’un transfert si les conditions ci-après sont réunies:

a) Ladite personne y consent librement et en toute connaissance de cause;

b) Les autorités compétentes des deux États Parties concernés y consentent, sous réserve des conditions que ces États Parties peuvent juger appropriées.

11. Aux fins du paragraphe 10 du présent article:

a) L’État Partie vers lequel le transfert est effectué a le pouvoir et l’obligation de garder l’intéressé en détention, sauf demande ou autorisation contraire de la part de l’État Partie à partir duquel la personne a été transférée;

b) L’État Partie vers lequel le transfert est effectué s’acquitte sans retard de l’obligation de remettre l’intéressé à la garde de l’État Partie à partir duquel le transfert a été effectué, conformément à ce qui aura été convenu au préalable ou à ce que les autorités compétentes des deux États Parties auront autrement décidé;

c) L’État Partie vers lequel le transfert est effectué ne peut exiger de l’État Partie à partir duquel le transfert est effectué qu’il engage une procédure d’extradition pour que l’intéressé lui soit remis;

d) Il est tenu compte de la période que l’intéressé a passée en détention dans l’État Partie vers lequel il a été transféré aux fins du décompte de la peine à purger dans l’État Partie à partir duquel il a été transféré.

12. À moins que l’État Partie à partir duquel une personne doit être transférée en vertu des paragraphes 10 et 11 du présent article ne donne son accord, ladite personne, quelle que soit sa nationalité, ne sera pas poursuivie, détenue, punie ou soumise à d’autres restrictions à sa liberté de mouvement sur le territoire de l’État Partie vers lequel elle est transférée à raison d’actes, d’omissions ou de condamnations antérieurs à son départ du territoire de l’État Partie à partir duquel elle a été transférée.

Page 212: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

210 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

13. Chaque État Partie désigne une autorité centrale qui a la responsabilité et le pouvoir de recevoir les demandes d’entraide judiciaire et, soit de les exécuter, soit de les transmettre aux autorités compétentes pour exécution. Si un État Partie a une région ou un territoire spécial doté d’un système d’entraide judiciaire différent, il peut désigner une autorité centrale distincte qui aura la même fonction pour ladite région ou ledit territoire. Les autorités centrales assurent l’exécution ou la transmission rapide et en bonne et due forme des demandes reçues. Si l’autorité centrale transmet la demande à une autorité compétente pour exécution, elle encourage l’exécution rapide et en bonne et due forme de la demande par l’autorité compétente. L’autorité centrale désignée à cette fin fait l’objet d’une notification adressée au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies au moment où chaque État Partie dépose ses instruments de ratification, d’acceptation ou d’approbation ou d’adhésion à la présente Convention. Les demandes d’entraide judiciaire et toute communication y relative sont transmises aux autorités centrales désignées par les États Parties. La présente disposition s’entend sans préjudice du droit de tout État Partie d’exiger que ces demandes et communications lui soient adressées par la voie diplomatique et, en cas d’urgence, si les États Parties en conviennent, par l’intermédiaire de l’Organisation internationale de police criminelle, si cela est possible.

14. Les demandes sont adressées par écrit ou, si possible, par tout autre moyen pouvant produire un document écrit, dans une langue acceptable pour l’État Partie requis, dans des conditions permettant audit État Partie d’en établir l’authenticité. La ou les langues acceptables pour chaque État Partie sont notifies au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies au moment où ledit État Partie dépose ses instruments de ratification, d’acceptation ou d’approbation ou d’adhésion à la présente Convention. En cas d’urgence et si les États Parties en conviennent, les demandes peuvent être faites oralement, mais doivent être confirmées sans délai par écrit.

15. Une demande d’entraide judiciaire doit contenir les renseignements suivants:

a) La désignation de l’autorité dont émane la demande;

b) L’objet et la nature de l’enquête, des poursuites ou de la procédure judiciaire auxquelles se rapporte la demande, ainsi que le nom et les fonctions de l’autorité qui en est chargée;

c) Un résumé des faits pertinents, sauf pour les demandes adressées aux fins de la signification d’actes judiciaires;

d) Une description de l’assistance requise et le détail de toute procedure particulière que l’État Partie requérant souhaite voir appliquée;

e) Si possible, l’identité, l’adresse et la nationalité de toute personne visée; et

f) Le but dans lequel le témoignage, les informations ou les mesures sont demandés.

16. L’État Partie requis peut demander un complément d’information lorsque cela apparaît nécessaire pour exécuter la demande conformément à son droit interne ou lorsque cela peut faciliter l’exécution de la demande.

17. Toute demande est exécutée conformément au droit interne de l’État Partie requis et, dans la mesure où cela ne contrevient pas au droit interne de l’État Partie

Page 213: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 211 __________________________________________________________________

requis et lorsque cela est possible, conformément aux procédures spécifies dans la demande.

18. Lorsque cela est possible et conforme aux principes fondamentaux du droit interne, si une personne qui se trouve sur le territoire d’un État Partie doit être entendue comme témoin ou comme expert par les autorités judiciaires d’un autre État Partie, le premier État Partie peut, à la demande de l’autre, autoriser son audition par vidéoconférence s’il n’est pas possible ou souhaitable qu’elle comparaisse en personne sur le territoire de l’État Partie requérant. Les États Parties peuvent convenir que l’audition sera conduite par une autorité judiciaire de l’État Partie requérant et qu’une autorité judiciaire de l’État Partie requis y assistera.

19. L’État Partie requérant ne communique ni n’utilise les informations ou les éléments de preuve fournis par l’État Partie requis pour des enquêtes, poursuites ou procédures judiciaires autres que celles visées dans la demande sans le consentement préalable de l’État Partie requis. Rien dans le présent paragraphe n’empêche l’État partie requérant de révéler, lors de la procédure, des informations ou des éléments de preuve à décharge. Dans ce dernier cas, l’État partie requérant avise l’État Pprtie requis avant la révélation et, s’il lui en est fait la demande, consulte l’État partie requis. Si, dans un cas exceptionnel, une notification préalable n’est pas possible, l’État partie requérant informe sans retard l’État partie requis de la révélation.

20. L’État partie requérant peut exiger que l’État partie requis garde le secret sur la demande et sa teneur, sauf dans la mesure nécessaire pour l’exécuter. Si l’État partie requis ne peut satisfaire à cette exigence, il en informe sans délai l’État partie requérant.

21. L’entraide judiciaire peut être refusée:

a) Si la demande n’est pas faite conformément aux dispositions du présent article;

b) Si l’État Partie requis estime que l’exécution de la demande est susceptible de porter atteinte à sa souveraineté, à sa sécurité, à son ordre public ou à d’autres intérêts essentiels;

c) Au cas où le droit interne de l’État Partie requis interdirait à ses autorités de prendre les mesures demandées s’il s’agissait d’une infraction analogue ayant fait l’objet d’une enquête, de poursuites ou d’une procédure judiciaire dans le cadre de sa propre compétence;

d) Au cas où il serait contraire au système juridique de l’État Partie requis concernant l’entraide judiciaire d’accepter la demande.

22. Les États Parties ne peuvent refuser une demande d’entraide judiciaire au seul motif que l’infraction est considérée comme touchant aussi à des questions fiscales.

23. Tout refus d’entraide judiciaire doit être motivé.

24. L’État Partie requis exécute la demande d’entraide judiciaire aussi promptement que possible et tient compte dans toute la mesure possible de tous délais suggérés par l’État Partie requérant et qui sont motivés, de préférence dans la demande. L’État Partie requis répond aux demandes raisonnables de l’État Partie requérant concernant les progrès faits dans l’exécution de la demande. Quand l’entraide demandée n’est plus nécessaire, l’État Partie requérant en informe promptement l’État Partie requis.

Page 214: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

212 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

25. L’entraide judiciaire peut être différée par l’État Partie requis au motif qu’elle entraverait une enquête, des poursuites ou une procédure judiciaire en cours.

26. Avant de refuser une demande en vertu du paragraphe 21 du présent article ou d’en différer l’exécution en vertu de son paragraphe 25, l’État Partie requis étudie avec l’État Partie requérant la possibilité d’accorder l’entraide sous réserve des conditions qu’il juge nécessaires. Si l’État Partie requérant accepte l’entraide sous réserve de ces conditions, il se conforme à ces dernières.

27. Sans préjudice de l’application du paragraphe 12 du présent article, un témoin, un expert ou une autre personne qui, à la demande de l’État Partie requérant, consent à déposer au cours d’une procédure ou à collaborer à une enquête, à des poursuites ou à une procédure judiciaire sur le territoire de l’État Partie requérant ne sera pas poursuivi, détenu, puni ou soumis à d’autres restrictions à sa liberté personnelle sur ce territoire à raison d’actes, d’omissions ou de condamnations antérieurs à son départ du territoire de l’État Partie requis. Cette immunité cesse lorsque le témoin, l’expert ou ladite personne ayant eu, pour une période de quinze jours consécutifs ou pour toute autre période convenue par les États Parties, à compter de la date à laquelle ils ont été officiellement informés que leur présence n’était plus requise par les autorités judiciaires, la possibilité de quitter le territoire de l’État Partie requérant, y sont néanmoins demeurés volontairement ou, l’ayant quitté, y sont revenus de leur plein gré.

28. Les frais ordinaires encourus pour exécuter une demande sont à la charge de l’État Partie requis, à moins qu’il n’en soit convenu autrement entre les États Parties concernés. Lorsque des dépenses importantes ou extraordinaires sont ou se révèlent ultérieurement nécessaires pour exécuter la demande, les États Parties se consultent pour fixer les conditions selon lesquelles la demande sera exécutée, ainsi que la manière dont les frais seront assumés.

29. L’État Partie requis:

a) Fournit à l’État Partie requérant copies des dossiers, documents ou renseignements administratifs en sa possession et auxquels, en vertu de son droit interne, le public a accès;

b) Peut, à son gré, fournir à l’État Partie requérant intégralement, en partie ou aux conditions qu’il estime appropriées, copies de tous dossiers, documents ou renseignements administratifs en sa possession et auxquels, en vertu de son droit interne, le public n’a pas accès.

30. Les États Parties envisagent, s’il y a lieu, la possibilité de conclure des accords ou des arrangements bilatéraux ou multilatéraux qui servent les objectifs et les dispositions du présent article, leur donnent un effet pratique ou les renforcent.

Article 19 Enquêtes conjointes

Les États Parties envisagent de conclure des accords ou arrangements bilatéraux ou multilatéraux en vertu desquels, pour les affaires qui font l’objet d’enquêtes, de poursuites ou de procédures judiciaires dans un ou plusieurs États, les autorités compétentes concernées peuvent établir des instances d’enquêtes conjointes. En l’absence de tels accords ou arrangements, des enquêtes conjointes peuvent être

Page 215: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 213 __________________________________________________________________

décidées au cas par cas. Les États Parties concernés veillent à ce que la souveraineté de l’État Partie sur le territoire duquel l’enquête doit se dérouler soit pleinement respectée.

Article 20 Techniques d’enquête spéciales

1. Si les principes fondamentaux de son système juridique national le permettent, chaque État Partie, compte tenu de ses possibilités et conformément aux conditions prescrites dans son droit interne, prend les mesures nécessaires pour permettre le recours approprié aux livraisons surveillées et, lorsqu’il le juge approprié, le recours à d’autres techniques d’enquête spéciales, telles que la surveillance électronique ou d’autres formes de surveillance et les opérations d’infiltration, par ses autorités compétentes sur son territoire en vue de combattre efficacement la criminalité organisée.

2. Aux fins des enquêtes sur les infractions visées par la présente Convention, les États Parties sont encouragés à conclure, si nécessaire, des accords ou arrangements bilatéraux ou multilatéraux appropriés pour recourir aux techniques d’enquête spéciales dans le cadre de la coopération internationale. Ces accords ou arrangements sont conclus et appliqués dans le plein respect du principe de l’égalité souveraine des États et ils sont mis en oeuvre dans le strict respect des dispositions qu’ils contiennent.

3. En l’absence d’accords ou d’arrangements visés au paragraphe 2 du présent article, les décisions de recourir à des techniques d’enquête spéciales au niveau international sont prises au cas par cas et peuvent, si nécessaire, tenir compte d’ententes et d’arrangements financiers quant à l’exercice de leur compétence par les États Parties intéressés.

4. Les livraisons surveillées auxquelles il est décidé de recourir au niveau international peuvent inclure, avec le consentement des États Parties concernés, des de leur acheminement, sans altération ou après soustraction ou remplacement de la totalité ou d’une partie de ces marchandises.

Article 21 Transfert des procédures pénales

Les États Parties envisagent la possibilité de se transférer mutuellement les procédures relatives à la poursuite d’une infraction visée par la présente Convention dans les cas où ce transfert est jugé nécessaire dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice et, en particulier lorsque plusieurs juridictions sont concernées, en vue de centraliser les poursuites.

Article 22 Établissement des antécédents judiciaires

Chaque État Partie peut adopter les mesures législatives ou autres qui sont nécessaires pour tenir compte, dans les conditions et aux fins qu’il juge appropriées, de toute condamnation dont l’auteur présumé d’une infraction aurait antérieurement fait l’objet dans un autre État, afin d’utiliser cette information dans

Page 216: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

214 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

le cadre d’une procédure pénale relative à une infraction visée par la présente Convention.

Article 23 Incrimination de l’entrave au bon fonctionnement de la justice

Chaque État Partie adopte les mesures législatives et autres qui sont nécessaires pour conférer le caractère d’infraction pénale, lorsque les actes ont été commis intentionnellement:

a) Au fait de recourir à la force physique, à des menaces ou à l’intimidation ou de promettre, d’offrir ou d’accorder un avantage indu pour obtenir un faux témoignage ou empêcher un témoignage ou la présentation d’éléments de prévue dans une procédure en rapport avec la commission d’infractions visées par la présente Convention;

b) Au fait de recourir à la force physique, à des menaces ou à l’intimidation pour empêcher un agent de la justice ou un agent des services de détection et de répression d’exercer les devoirs de leur charge lors de la commission d’infractions visées par la présente Convention. Rien dans le présent alinéa ne porte atteinte au droit des États Parties de disposer d’une législation destinée à protéger d’autres catégories d’agents publics.

Article 24 Protection des témoins

1. Chaque État Partie prend, dans la limite de ses moyens, des mesures appropriées pour assurer une protection efficace contre des actes éventuels de représailles ou d’intimidation aux témoins qui, dans le cadre de procédures pénales, font un témoignage concernant les infractions visées par la présente Convention et, le cas échéant, à leurs parents et à d’autres personnes qui leur sont proches.

2. Les mesures envisagées au paragraphe 1 du présent article peuvent consister notamment, sans préjudice des droits du défendeur, y compris du droit à une procédure régulière:

a) À établir, pour la protection physique de ces personnes, des procédures visant notamment, selon les besoins et dans la mesure du possible, à leur fournir un nouveau domicile et à permettre, le cas échéant, que les renseignements concernant leur identité et le lieu où elles se trouvent ne soient pas divulgués ou que leur divulgation soit limitée;

b) À prévoir des règles de preuve qui permettent aux témoins de déposer d’une manière qui garantisse leur sécurité, notamment à les autoriser à déposer en recourant à des techniques de communication telles que les liaisons vidéo ou à d’autres moyens adéquats.

3. Les États Parties envisagent de conclure des arrangements avec d’autres États en vue de fournir un nouveau domicile aux personnes mentionnées au paragraphe 1 du présent article.

4. Les dispositions du présent article s’appliquent également aux victimes lorsqu’elles sont témoins.

Page 217: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 215 __________________________________________________________________

Article 25 Octroi d’une assistance et d’une protection aux victimes

1. Chaque État Partie prend, dans la limite de ses moyens, des mesures appropriées pour prêter assistance et accorder protection aux victimes d’infractions visées par la présente Convention, en particulier dans les cas de menace de représailles ou d’intimidation.

2. Chaque État Partie établit des procédures appropriées pour permettre aux victimes d’infractions visées par la présente Convention d’obtenir réparation.

3. Chaque État Partie, sous réserve de son droit interne, fait en sorte que les avis et préoccupations des victimes soient présentés et pris en compte aux stades appropriés de la procédure pénale engagée contre les auteurs d’infractions, d’une manière qui ne porte pas préjudice aux droits de la défense.

Article 26 Mesures propres à renforcer la coopération avec les services de détection et de répression

1. Chaque État Partie prend des mesures appropriées pour encourager les personnes qui participent ou ont participé à des groupes criminels organisés:

a) À fournir des informations utiles aux autorités compétentes à des fins d’enquête et de recherche de preuves sur des questions telles que:

i) L’identité, la nature, la composition, la structure ou les activités des groupes criminels organisés, ou le lieu où ils se trouvent;

ii) Les liens, y compris à l’échelon international, avec d’autres groupes criminels organisés;

iii) Les infractions que les groupes criminels organisés ont commises ou pourraient commettre;

b) À fournir une aide factuelle et concrète aux autorités compétentes, qui pourrait contribuer à priver les groupes criminels organisés de leurs ressources ou du produit du crime.

2. Chaque État Partie envisage de prévoir la possibilité, dans les cas appropriés, d’alléger la peine dont est passible un prévenu qui coopère de manière substantielle à l’enquête ou aux poursuites relatives à une infraction visée par la présente Convention.

3. Chaque État Partie envisage de prévoir la possibilité, conformément aux principes fondamentaux de son droit interne, d’accorder l’immunité de poursuites à une personne qui coopère de manière substantielle à l’enquête ou aux poursuites relatives à une infraction visée par la présente Convention.

4. La protection de ces personnes est assurée comme le prévoit l’article 24 de la présente Convention.

5. Lorsqu’une personne qui est visée au paragraphe 1 du présent article et se trouve dans un État Partie peut apporter une coopération substantielle aux autorités compétentes d’un autre État Partie, les États Parties concernés peuvent envisager de conclure des accords ou arrangements, conformément à leur droit interne,

Page 218: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

216 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

concernant l’éventuel octroi par l’autre État Partie du traitement décrit aux paragraphes 2 et 3 du présent article.

Article 27 Coopération entre les services de détection et de répression

1. Les États Parties coopèrent étroitement, conformément à leurs systèmes juridiques et administratifs respectifs, en vue de renforcer l’efficacité de la détection et de la répression des infractions visées par la présente Convention. En particulier, chaque État Partie adopte des mesures efficaces pour:

a) Renforcer ou, si nécessaire, établir des voies de communication entre ses autorités, organismes et services compétents pour faciliter l’échange sûr et rapide d’informations concernant tous les aspects des infractions visées par la présente Convention, y compris, si les États Parties concernés le jugent approprié, les liens avec d’autres activités criminelles;

b) Coopérer avec d’autres États Parties, s’agissant des infractions visées par la présente Convention, dans la conduite d’enquêtes concernant les points suivants:

i) Identité et activités des personnes soupçonnées d’implication dans lesdites infractions, lieu où elles se trouvent ou lieu où se trouvent les autres personnes concernées;

ii) Mouvement du produit du crime ou des biens provenant de la commission de ces infractions;

iii) Mouvement des biens, des matériels ou d’autres instruments utilisés ou destinés à être utilisés dans la commission de ces infractions;

c) Fournir, lorsqu’il y a lieu, les pièces ou quantités de substances nécessaires à des fins d’analyse ou d’enquête;

d) Faciliter une coordination efficace entre les autorités, organismes et services compétents et favoriser l’échange de personnel et d’experts, y compris, sous réserve de l’existence d’accords ou d’arrangements bilatéraux entre les États Parties concernés, le détachement d’agents de liaison;

e) Échanger, avec d’autres États Parties, des informations sur les moyens et procédés spécifiques employés par les groupes criminels organisés, y compris, s’il y a lieu, sur les itinéraires et les moyens de transport ainsi que sur l’usage de fausses identités, de documents modifiés ou falsifiés ou d’autres moyens de dissimulation de leurs activités;

f) Échanger des informations et coordonner les mesures administratives et autres prises, comme il convient, pour détecter au plus tôt les infractions visées par la présente Convention.

2. Afin de donner effet à la présente Convention, les États Parties envisagent de conclure des accords ou des arrangements bilatéraux ou multilatéraux prévoyant une coopération directe entre leurs services de détection et de répression et, lorsque de tels accords ou arrangements existent déjà, de les modifier. En l’absence de tels accords ou arrangements entre les États Parties concernés, ces derniers peuvent se

Page 219: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 217 __________________________________________________________________

baser sur la présente Convention pour instaurer une coopération en matière de détection et de répression concernant les infractions visées par la présente Convention. Chaque fois que cela est approprié, les États Parties utilisent pleinement les accords ou arrangements, y compris les organisations internationales ou régionales, pour renforcer la coopération entre leurs services de détection et de répression.

3. Les États Parties s’efforcent de coopérer, dans la mesure de leurs moyens, pour faire face à la criminalité transnationale organisée perpétrée au moyen de techniques modernes.

Article 28 Collecte, échange et analyse d’informations sur la nature de la criminalité organisée

1. Chaque État Partie envisage d’analyser, en consultation avec les milieux scientifiques et universitaires, les tendances de la criminalité organisée sur son territoire, les circonstances dans lesquelles elle opère, ainsi que les groupes professionnels et les techniques impliqués.

2. Les États Parties envisagent de développer leurs capacités d’analyse des activités criminelles organisées et de les mettre en commun directement entre eux et par le biais des organisations internationales et régionales. À cet effet, des définitions, normes et méthodes communes devraient être élaborées et appliqués selon qu’il convient.

3. Chaque État Partie envisage de suivre ses politiques et les mesures concrètes prises pour combattre la criminalité organisée et d’évaluer leur mise en oeuvre et leur efficacité.

Article 29 Formation et assistance technique

1. Chaque État Partie établit, développe ou améliore, dans la mesure des besoins, des programmes de formation spécifiques à l’intention du personnel de ses services de détection et de répression, y compris des magistrats du parquet, des juges d’instruction et des agents des douanes, ainsi que d’autres personnels charges de prévenir, de détecter et de réprimer les infractions visées par la présente Convention. Ces programmes peuvent prévoir des détachements et des échanges de personnel. Ils portent en particulier, dans la mesure où le droit interne l’autorise, sur les points suivants:

a) Méthodes employées pour prévenir, détecter et combattre les infractions visées par la présente Convention;

b) Itinéraires empruntés et techniques employées par les personnes soupçonnées d’implication dans des infractions visées par la présente Convention, y compris dans les États de transit, et mesures de lutte appropriées;

c) Surveillance du mouvement des produits de contrebande;

d) Détection et surveillance du mouvement du produit du crime, des biens, des matériels ou des autres instruments, et méthodes de transfert, de

Page 220: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

218 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

dissimulation ou de déguisement de ce produit, de ces biens, de ces matériels ou de ces autres instruments, ainsi que les méthodes de lutte contre le blanchiment d’argent et contre d’autres infractions financières;

e) Rassemblement des éléments de preuve;

f) Techniques de contrôle dans les zones franches et les ports francs;

g) Matériels et techniques modernes de détection et de répression, y compris la surveillance électronique, les livraisons surveillées et les opérations d’infiltration;

h) Méthodes utilisées pour combattre la criminalité transnationale organisée perpétrée au moyen d’ordinateurs, de réseaux de télécommunication ou d’autres techniques modernes; et

i) Méthodes utilisées pour la protection des victimes et des témoins.

2. Les États Parties s’entraident pour planifier et exécuter des programmes de recherche et de formation conçus pour échanger des connaissances spécialisées dans les domaines visés au paragraphe 1 du présent article et, à cette fin, mettent aussi à profit, lorsqu’il y a lieu, des conférences et séminaires régionaux et internationaux pour favoriser la coopération et stimuler les échanges de vues sur les problèmes communs, y compris les problèmes et besoins particuliers des États de transit.

3. Les États Parties encouragent les activités de formation et d’assistance technique de nature à faciliter l’extradition et l’entraide judiciaire. Ces activités de formation et d’assistance technique peuvent inclure une formation linguistique, des détachements et des échanges entre les personnels des autorités centrales ou des organismes ayant des responsabilités dans les domaines visés.

4. Lorsqu’il existe des accords ou arrangements bilatéraux et multilatéraux en vigueur, les États Parties renforcent, autant qu’il est nécessaire, les masures prises pour optimiser les activités opérationnelles et de formation au sein des organisations internationales et régionales et dans le cadre d’autres accords ou arrangements bilatéraux et multilatéraux en la matière.

Article 30 Autres mesures: application de la Convention par le développement économique et l’assistance technique

1. Les États Parties prennent des mesures propres à assurer la meilleure application possible de la présente Convention par la coopération internationale, compte tenu des effets négatifs de la criminalité organisée sur la société en général, et sur le développement durable en particulier.

2. Les États Parties font des efforts concrets, dans la mesure du possible, et en coordination les uns avec les autres ainsi qu’avec les organisations régionales et internationales:

a) Pour développer leur coopération à différents niveaux avec les pays en développement, en vue de renforcer la capacité de ces derniers à prévenir et combattre la criminalité transnationale organisée;

b) Pour accroître l’assistance financière et matérielle à fournir aux pays en développement afin d’appuyer les efforts qu’ils déploient pour lutter

Page 221: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 219 __________________________________________________________________

efficacement contre la criminalité transnationale organisée et de les aider à appliquer la présente Convention avec succès;

c) Pour fournir une assistance technique aux pays en développement et aux pays à économie en transition afin de les aider à répondre à leurs besoins aux fins de l’application de la présente Convention. Pour ce faire, les États Parties s’efforcent de verser volontairement des contributions adéquates et régulières à un compte établi à cet effet dans le cadre d’un mécanisme de financement des Nations Unies. Les États Parties peuvent aussi envisager spécialement, conformément à leur droit interne et aux dispositions de la présente Convention, de verser au compte susvisé un pourcentage des fonds ou de la valeur correspondante du produit du crime ou des biens confisqués en application des dispositions de la présente Convention;

d) Pour encourager et convaincre d’autres États et des institutions financières, selon qu’il convient, de s’associer aux efforts faits conformément au présent article, notamment en fournissant aux pays en développement davantage de programmes de formation et de matériel moderne afin de les aider à atteindre les objectifs de la présente Convention.

3. Autant que possible, ces mesures sont prises sans préjudice des engagements existants en matière d’assistance étrangère ou d’autres arrangements de coopération financière aux niveaux bilatéral, régional ou international.

4. Les États Parties peuvent conclure des accords ou des arrangements bilatéraux ou multilatéraux sur l’assistance matérielle et logistique, en tenant compte des arrangements financiers nécessaires pour assurer l’efficacité des moyens de coopération internationale prévus par la présente Convention et pour prévenir, détecter et combattre la criminalité transnationale organisée.

Article 31 Prévention

1. Les États Parties s’efforcent d’élaborer et d’évaluer des projets nationaux ainsi que de mettre en place et de promouvoir les meilleures pratiques et politiques pour prévenir la criminalité transnationale organisée.

2. Conformément aux principes fondamentaux de leur droit interne, les États Parties s’efforcent de réduire, par des mesures législatives, administratives ou autres appropriées, les possibilités actuelles ou futures des groupes criminels organisés de participer à l’activité des marchés licites en utilisant le produit du crime. Ces mesures devraient être axées sur:

a) Le renforcement de la coopération entre les services de détection et de répression ou les magistrats du parquet et entités privées concernées, notamment dans l’industrie;

b) La promotion de l’élaboration de normes et procédures visant à préserver l’intégrité des entités publiques et des entités privées concernées, ainsi que de codes de déontologie pour les professions concernées, notamment celles de juriste, de notaire, de conseiller fiscal et de comptable;

c) La prévention de l’usage impropre par les groupes criminels organisés des procédures d’appel d’offres menées par des autorités publiques ainsi

Page 222: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

220 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

que des subventions et licences accordées par des autorités publiques pour une activité commerciale;

d) La prévention de l’usage impropre par des groupes criminels organisés de personnes morales; ces mesures pourraient inclure:

i) L’établissement de registres publics des personnes morales et physiques impliquées dans la création, la gestion et le financement de personnes morales;

ii) La possibilité de déchoir les personnes reconnues coupables d’infractions visées par la présente Convention, par décision de justice ou par tout moyen approprié, pour une période raisonnable, du droit de diriger des personnes morales constituées sur leur territoire;

iii) L’établissement de registres nationaux des personnes déchues du droit de diriger des personnes morales; et

iv) L’échange d’informations contenues dans les registres mentionnés aux sous-alinéas i) et iii) du présent alinéa avec les autorités compétentes des autres États Parties.

3. Les États Parties s’efforcent de promouvoir la réinsertion dans la société des personnes reconnues coupables d’infractions visées par la présente Convention.

4. Les États Parties s’efforcent d’évaluer périodiquement les instruments juridiques et les pratiques administratives pertinents en vue de déterminer s’ils comportent des lacunes permettant aux groupes criminels organisés d’en faire un usage impropre.

5. Les États Parties s’efforcent de mieux sensibiliser le public à l’existence, aux causes et à la gravité de la criminalité transnationale organisée et à la menace qu’elle représente. Ils peuvent le faire, selon qu’il convient, par l’intermédiaire des médias et en adoptant des mesures destinées à promouvoir la participation du public aux activités de prévention et de lutte.

6. Chaque État Partie communique au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies le nom et l’adresse de l’autorité ou des autorités susceptibles d’aider les autres États Parties à mettre au point des mesures de prévention de la criminalité transnationale organisée.

7. Les États Parties collaborent, selon qu’il convient, entre eux et avec les organisations régionales et internationales compétentes en vue de promouvoir et de mettre au point les mesures visées dans le présent article. À ce titre, ils participent à des projets internationaux visant à prévenir la criminalité transnationale organisée, par exemple en agissant sur les facteurs qui rendent les groupes socialement marginalisés vulnérables à l’action de cette criminalité.

Article 32 Conférence des Parties à la Convention

1. Une Conférence des parties à la Convention est instituée pour améliorer la capacité des États Parties à combattre la criminalité transnationale organisée et pour promouvoir et examiner l’application de la présente Convention.

Page 223: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 221 __________________________________________________________________

2. Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies convoquera la Conférence des parties au plus tard un an après l’entrée en vigueur de la présente Convention. La Conférence des parties adoptera un règlement intérieur et des règles régissant les activités énoncées aux paragraphes 3 et 4 du présent article (y compris des règles relatives au financement des dépenses encourues au titre de ces activités).

3. La Conférence des parties arrête des mécanismes en vue d’atteindre les objectifs visés au paragraphe 1 du présent article, notamment:

a) Elle facilite les activités menées par les États Parties en application des articles 29, 30 et 31 de la présente Convention, y compris en encourageant la mobilisation de contributions volontaires;

b) Elle facilite l’échange d’informations entre États Parties sur les caractéristiques et tendances de la criminalité transnationale organisée et les pratiques efficaces pour la combattre;

c) Elle coopère avec les organisations régionales et internationales et les organisations non gouvernementales compétentes;

d) Elle examine à intervalles réguliers l’application de la présente Convention;

e) Elle formule des recommandations en vue d’améliorer la présente Convention et son application;

4. Aux fins des alinéas d et e du paragraphe 3 du présent article, la Conférence des parties s’enquiert des mesures adoptées et des difficultés rencontrées par les États Parties pour appliquer la présente Convention en utilisant les informations que ceux-ci lui communiquent ainsi que les mécanismes complémentaires d’examen qu’elle pourra établir.

5. Chaque État Partie communique à la Conférence des parties, comme celle-ci le requiert, des informations sur ses programmes, plans et pratiques ainsi que sur ses mesures législatives et administratives visant à appliquer la présente Convention.

Article 33 Secrétariat

1. Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies fournit les services de secrétariat nécessaires à la Conférence des parties à la Convention.

2. Le secrétariat:

a) Aide la Conférence des parties à réaliser les activités énoncées à l’article 32 de la présente Convention, prend des dispositions et fournit les services nécessaires pour les sessions de la Conférence des Parties;

b) Aide les États Parties, sur leur demande, à fournir des informations à la Conférence des Parties comme le prévoit le paragraphe 5 de l’article 32 de la présente Convention; et

c) Assure la coordination nécessaire avec le secrétariat des organisations régionales et internationales compétentes.

Article 34

Page 224: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

222 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

Application de la Convention

1. Chaque État Partie prend les mesures nécessaires, y compris législatives et administratives, conformément aux principes fondamentaux de son droit interne, pour assurer l’exécution de ses obligations en vertu de la présente Convention.

2. Les infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention sont établies dans le droit interne de chaque État Partie indépendamment de leur nature transnationale ou de l’implication d’un groupe criminel organisé comme énoncé au paragraphe 1 de l’article 3 de la présente Convention, sauf dans la mesure où, conformément à l’article 5 de la présente Convention, serait requise l’implication d’un groupe criminel organisé.

3. Chaque État Partie peut adopter des mesures plus strictes ou plus sévères que celles qui sont prévues par la présente Convention afin de prévenir et de combattre la criminalité transnationale organisée.

Article 35 Règlement des différends

1. Les États Parties s’efforcent de régler les différends concernant l’interprétation ou l’application de la présente Convention par voie de négociation.

2. Tout différend entre deux États Parties ou plus concernant l’interprétation ou l’application de la présente Convention qui ne peut être réglé par voie de négociation dans un délai raisonnable est, à la demande de l’un de ces États Parties, soumis à l’arbitrage. Si, dans un délai de six mois à compter de la date de la demande d’arbitrage, les États Parties ne peuvent s’entendre sur l’organisation de l’arbitrage, l’un quelconque d’entre eux peut soumettre le différend à la Cour internationale de Justice en adressant une requête conformément au Statut de la Cour.

3. Chaque État Partie peut, au moment de la signature, de la ratification, de l’acceptation ou de l’approbation de la présente Convention ou de l’adhésion à celle-ci, déclarer qu’il ne se considère pas lié par le paragraphe 2 du présent article. Les autres États Parties ne sont pas liés par le paragraphe 2 du présent article envers tout État Partie ayant émis une telle réserve.

4. Tout État Partie qui a émis une réserve en vertu du paragraphe 3 du présent article peut la retirer à tout moment en adressant une notification au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.

Article 36 Signature, ratification, acceptation, approbation et adhésion

1. La présente Convention sera ouverte à la signature de tous les États du 12 au 15 décembre 2000 à Palerme (Italie) et, par la suite, au Siège de l’Organisation des Nations Unies, à New York, jusqu’au 12 décembre 2002.

2. La présente Convention est également ouverte à la signature des organisations régionales d’intégration économique à la condition qu’au moins un État membre d’une telle organisation ait signé la présente Convention conformément au paragraphe 1 du présent article.

3. La présente Convention est soumise à ratification, acceptation ou approbation. Les instruments de ratification, d’acceptation ou d’approbation seront déposés

Page 225: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 1 - 223 __________________________________________________________________

auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies. Une organisation régionale d’intégration économique peut déposer ses instruments de ratification, d’acceptation ou d’approbation si au moins un de ses États membres l’a fait. Dans cet instrument de ratification, d’acceptation ou d’approbation, cette organisation déclare l’étendue de sa compétence concernant les questions régies par la présente Convention. Elle informe également le dépositaire de toute modification pertinente de l’étendue de sa compétence.

4. La présente Convention est ouverte à l’adhésion de tout État ou de toute organisation régionale d’intégration économique dont au moins un État membre est partie à la présente Convention. Les instruments d’adhésion sont déposés auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies. Au moment de son adhésion, une organisation régionale d’intégration économique déclare l’étendue de sa compétence concernant les questions régies par la présente Convention. Elle informe également le dépositaire de toute modification pertinente de l’étendue de sa compétence.

Article 37 Relation avec les protocoles

1. La présente Convention peut être complétée par un ou plusieurs protocoles.

2. Pour devenir partie à un protocole, un État ou une organisation régionale d’intégration économique doit être également partie à la présente Convention.

3. Un État Partie à la présente Convention n’est pas lié par un protocole, moins qu’il ne devienne partie audit protocole conformément aux dispositions de ce dernier.

4. Tout protocole à la présente Convention est interprété conjointement avec la présente Convention, compte tenu de l’objet de ce protocole.

Article 38 Entrée en vigueur

1. La présente Convention entrera en vigueur le quatre-vingt-dixième jour suivant la date de dépôt du quarantième instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion. Aux fins du présent paragraphe, aucun des instruments déposés par une organisation régionale d’intégration économique n’est considéré comme un instrument venant s’ajouter aux instruments déjà déposés par les États membres de cette organisation.

2. Pour chaque État ou organisation régionale d’intégration économique qui ratifiera, acceptera ou approuvera la présente Convention ou y adhérera après le dépôt du quarantième instrument pertinent, la présente Convention entrera en vigueur le trentième jour suivant la date de dépôt de l’instrument pertinent par ledit État ou ladite organisation.

Article 39 Amendement

Page 226: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

224 – Text de la Convention _______________________________________________________________________________

1. À l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente Convention, un État Partie peut proposer un amendement et en déposer le texte auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies. Ce dernier communique alors la proposition d’amendement aux États Parties et à la Conférence des Parties à la Convention en vue de l’examen de la proposition et de l’adoption d’une décision. La Conférence des Parties n’épargne aucun effort pour parvenir à un consensus sur tout amendement. Si tous les efforts en ce sens ont été épuisés sans qu’un accord soit intervenu, il faudra, en dernier recours, pour que l’amendement soit adopté, un vote à la majorité des deux tiers des États Parties présents à la Conférence des Parties et exprimant leur vote.

2. Les organisations régionales d’intégration économique disposent, pour exercer, en vertu du présent article, leur droit de vote dans les domaines qui relevant de leur compétence, d’un nombre de voix égal au nombre de leurs États membres parties à la présente Convention. Elles n’exercent pas leur droit de vote si leurs États membres exercent le leur, et inversement.

3. Un amendement adopté conformément au paragraphe 1 du présent article est soumis à ratification, acceptation ou approbation des États Parties.

4. Un amendement adopté conformément au paragraphe 1 du présent article entrera en vigueur pour un État Partie quatre-vingt-dix jours après la date de dépôt par ledit État Partie auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies d’un instrument de ratification, d’acceptation ou d’approbation dudit amendement.

5. Un amendement entré en vigueur a force obligatoire à l’égard des États Parties qui ont exprimé leur consentement à être liés par lui. Les autres États Parties restent liés par les dispositions de la présente Convention et tous amendements antérieurs qu’ils ont ratifiés, acceptés ou approuvés.

Article 40 Dénonciation

1. Un État Partie peut dénoncer la présente Convention par notification écrite adressée au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies. Une telle dénonciation prend effet un an après la date de réception de la notification par le Secrétaire général.

2. Une organisation régionale d’intégration économique cesse d’être partie à la présente Convention lorsque tous ses États membres l’ont dénoncée.

3. La dénonciation de la présente Convention conformément au paragraphe 1 du présent article entraîne la dénonciation de tout protocole y relatif.

Article 41 Dépositaire et langues

1. Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies est le dépositaire de la présente Convention.

2. L’original de la présente Convention, dont les textes anglais, arabe, chinois, espagnol, français et russe font également foi, sera déposé auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies. EN FOI DE QUOI, les plénipotentiaires soussignés, à ce dûment autorisés par leurs gouvernements respectifs, ont signé la présente Convention.

Page 227: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 2 - 225 __________________________________________________________________

Annexe 2 Liste des conditions d'avis de secrétaire général par

États Parties

Ce qui suit est une liste des avis que l’Etats Parties sont requis de donner au Secrétaire général:

Article 5 (Incrimination de la participation à un groupe criminel organisé)

3. Les États Parties dont le droit interne subordonne l'établissement des infractions visées à l'alinéa a i) du paragraphe 1 du présent article à l'implication d'un groupe criminel organisé veillent à ce que leur droit interne couvre toutes les infractions graves impliquant des groupes criminels organisés. Ces États Parties, de même que les États Parties dont le droit interne subordonne l'établissement des infractions visées à l'alinéa a i) du paragraphe 1 du présent article à la commission d'un acte en vertu de l'entente, portent cette information à la connaissance du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies au moment où ils signent la présente Convention ou déposent leurs instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation ou d'adhésion.

Article 6 (Incrimination du blanchiment du produit du crime)

2… (c) Aux fins de l'alinéa b, les infractions principales incluent les infractions commises à l'intérieur et à l'extérieur du territoire relevant de la compétence de l'État Partie en question. Toutefois, une infraction commise à l'extérieur du territoire relevant de la compétence d'un État Partie ne constitue une infraction principale que lorsque l'acte correspondant est une infraction pénale en vertu du droit interne de l'État où il a été commis et constituerait une infraction pénale en vertu du droit interne de l'État Partie appliquant le présent article s'il avait été commis sur son territoire;

Article 13 (Coopération internationale aux fins de confiscation)

5. Chaque État Partie remet au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies une copie de ses lois et règlements qui donnent effet au présent article ainsi qu'une copie de toute modification ultérieurement apportée à ces lois et règlements ou une description de ces lois, règlements et modifications ultérieures.

Article 16 (Extradition)

5. Les États Parties qui subordonnent l'extradition à l'existence d'un traité: a) Au moment du dépôt de leur instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion à la présente Convention, indiquent au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies s'ils

Page 228: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

226 – Avis nécessaires _______________________________________________________________________________

considèrent la présente Convention comme la base légale pour coopérer en matière d'extradition avec d'autres États Parties; et …

Article 18 (Entraide judiciaire)

13. Chaque État Partie désigne une autorité centrale qui a la responsabilité et le pouvoir de recevoir les demandes d'entraide judiciaire et, soit de les exécuter, soit de les transmettre aux autorités compétentes pour exécution. Si un État Partie a une région ou un territoire spécial doté d'un système d'entraide judiciaire différent, il peut désigner une autorité centrale distincte qui aura la même fonction pour ladite région ou ledit territoire. Les autorités centrales assurent l'exécution ou la transmission rapide et en bonne et due forme des demandes reçues. Si l'autorité centrale transmet la demande à une autorité compétente pour exécution, elle encourage l'exécution rapide et en bonne et due forme de la demande par l'autorité compétente. L'autorité centrale désignée à cette fin fait l'objet d'une notification adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies au moment où chaque État Partie dépose ses instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation ou d'adhésion à la présente Convention. Les demandes d'entraide judiciaire et toute communication y relative sont transmises aux autorités centrals désignées par les États Parties. La présente disposition s'entend sans préjudice du droit de tout État Partie d'exiger que ces demandes et communications lui soient adressées par la voie diplomatique et, en cas d'urgence, si les États Parties en conviennent, par l'intermédiaire de l'Organisation internationale de police criminelle, si cela est possible. 14. Les demandes sont adressées par écrit ou, si possible, par tout autre moyen pouvant produire un document écrit, dans une langue acceptable pour l'État Partie requis, dans des conditions permettant audit État Partie d'en établir l'authenticité. La ou les langues acceptables pour chaque État Partie sont notifies au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies au moment où ledit État Partie dépose ses instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation ou d'adhésion à la présente Convention. En cas d'urgence et si les États Parties en conviennent, les demandes peuvent être faites oralement, mais doivent être confirmées sans délai par écrit.

Article 31 (Prévention)

6. Chaque État Partie communique au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies le nom et l'adresse de l'autorité ou des autorités susceptibles d'aider les autres États Parties à mettre au point des mesures de prévention de la criminalité transnationale organisée.

Article 35 Règlement des différends

4. Tout État Partie qui a émis une réserve en vertu du paragraphe 3 du présent article peut la retirer à tout moment en adressant une notification au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Page 229: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 2 - 227 __________________________________________________________________

Article 36 (Signature, ratification, acceptation, approbation et adhésion)

3. La présente Convention est soumise à ratification, acceptation ou approbation. Les instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation seront déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. Une organisation régionale d'intégration économique peut déposer ses instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation si au moins un de ses États membres l'a fait. Dans cet instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation, cette organisation déclare l'étendue de sa compétence concernant les questions régies par la présente Convention. Elle informe également le dépositaire de toute modification pertinente de l'étendue de sa compétence. 4. La présente Convention est ouverte à l'adhésion de tout État ou de toute organisation régionale d'intégration économique dont au moins un État Membre est partie à la présente Convention. Les instruments d'adhésion sont déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. Au moment de son adhésion, une organisation régionale d'intégration économique déclare l'étendue de sa compétence concernant les questions régies par la présente Convention. Elle informe également le dépositaire de toute modification pertinente de l'étendue de sa compétence.

Article 39 (Amendement)

1. À l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur de la présente Convention, un État Partie peut proposer un amendement et en déposer le texte auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. Ce dernier communique alors la proposition d'amendement aux États Parties et à la Conférence des Parties à la Convention en vue de l'examen de la proposition et de l'adoption d'une décision. La Conférence des Parties n'épargne aucun effort pour parvenir à un consensus sur tout amendement. Si tous les efforts en ce sens ont été épuisés sans qu'un accord soit intervenu, il faudra, en dernier recours, pour que l'amendement soit adopté, un vote à la majorité des deux tiers des États Parties présents à la Conférence des Parties et exprimant leur vote.

4. Un amendement adopté conformément au paragraphe 1 du présent article entrera en vigueur pour un État Partie quatre-vingt-dix jours après la date de dépôt par ledit État Partie auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies d'un instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation dudit amendement.

Article 40 (Dénonciation)

1. Un État Partie peut dénoncer la présente Convention par notification écrite adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. Une telle dénonciation prend effet un an après la date de réception de la notification par le Secrétaire général.

Page 230: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

228 – Liste d’experts _______________________________________________________________________________

Annexe 3 Liste d’experts

Le Centre international pour la réforme du droit criminel et la politique en matière de justice pénale et le Centre pour la prévention internationale du crime remercient sincèrement les experts suivants pour leur généreuse contribution à l’élaboration du présent guide. Yvon DANDURAND Directeur du projet Doyen, Recherche et Relations avec l’industrie University College of the Fraser Valley, et Associé senior Centre international pour la réforme du droit criminel et la politique en matière de justice pénale Dimitri VLASSIS Codirecteur du projet Chargé de prévention du crime et de justice pénale Centre pour la prévention internationale du crime Office contre la drogue et le crime, Nations Unies Nikos PASSAS Professeur Checheur - Rédacteur Northeastern University College of Criminal Justice, Boston U.S.A. Eugenio María CURIA Conseiller juridique en chef Ministry of Foreign Affairs, International Trade and Worship Argentine Linda CONINGS Conseillère adjointe Service de la politique criminelle Ministère de la justice Belgique Julien DERUFFE Ministère des affaires étrangères Sous-direction de la Sécurité France Louis FORGET Conseiller Département des affaires juridiques Fond monétaire international Freddy GAZAN

Page 231: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

Annexe 3 - 229 __________________________________________________________________

Conseiller général adjoint à la politique criminelle Service de la politique criminelle Ministère de la justice Belgique Frances GORDON Directrice Centre international pour la réforme du droit criminel et la politique en matière de justice pénale Kenneth HARRIS Associate Director Office of International Affairs U.S. Department of Justice USA Joel HERNANDEZ Consultor Jurídico Adjunto (Conseiller juridique adjoint) Secrétariat des affaires extérieures Mexique Egbe HILLMANN Magistrat Chargé de Mission à la Présidence de la République, Secrétariat Général Cameroun Mathew JOSEPH Deputy Senior State Counsel International Affairs Division Attorney-General's Chambers Singapour Jean- Paul LABORDE Chef, Convention et affaires juridiques Chargé de prévention du crime et de justice pénale Centre pour la prévention internationale du crime Office contre la drogue et le crime, Nations Unies Delphine LIDA Ministère des affaires étrangères Sous-Direction de la Sécurité France Sabine-Anne MINAZZOLI Magistrat Direction des Services Judiciaires Monaco Gioacchino POLIMENI Conseiller juridique Mission permanente de l’Italie auprès des organismes internationaux à Vienne

Page 232: Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la ... · Guide législatif pour appuyer la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

230 – Liste d’experts _______________________________________________________________________________

Italie Daniel C. PRÉFONTAINE, QC Professeur de droit, Faculté de droit, UBC, et Associé senior, Centre international pour la réforme du droit criminel et la politique en matière de justice pénale Christopher RAM Centre pour la prévention internationale du crime Office contre la drogue et le crime, Nations Unies Janusz RYDZKOWSKI Directeur, Ministère des affaires étrangères Pologne Abdellatif SAADI Ministre plénipotentiaire Représentant Mission permanente du Royaume du Maroc aux Nations Unies Maroc Carole SHEPPARD Conseillère, Groupe d’assistance internationale Section du droit pénal Ministère de la Justice Canada Canada Shalin M. SUGUNASIRI Conseiller, Section du droit pénal Ministère de la Justice Canada Canada

Hirokazu URATA Division des affaires internationales Bureau des affaires criminelles Ministère de la justice Japon Secrétariat Vivienne CHIN Associée, Coordinatrice du projet Centre international pour la réforme du droit criminel et la politique en matière de justice pénale