Guide d'exposition des œuvres de Germain Bergeron

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GUIDE D’EXPOSITION Œuvres monumentales entre ciel et terre Du sculpteur Germain Bergeron Détail de l’œuvre Lulunatik, 1970 Une exposition de 14 œuvres monumentales en plein cœur de L’Assomption

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GUIDE D’EXPOSITION

Œuvres monumentalesentre ciel et terre

Du sculpteurGermain Bergeron

Détail de l’œuvre Lulunatik, 1970

Une exposition de14 œuvres monumentalesen plein cœur de L’Assomption

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NÉE DE LA RENCONTRE COUPDE CŒUR DE DEUX ARTISTES,VOILÀ QUE L’ŒUVRE DE L’UNDEVIENT MATIÈRE PREMIÈREPOUR L’AUTRE ET QUE PRENDFORME CETTE RÉALISATIONHORS DU COMMUN.

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UNE RENCONTRECOUP DE CŒUR

Germain Bergeron, sculpteur des années 60 dans la même mouvance que lesVaillancourt, Trudeau et Bélanger, crée des sculptures gigantesques faites à partir demétal recyclé.

Plusieurs sont installées dans des endroits publics au Canada : Vancouver, Calgary,Montréal et maintenant à L’Assomption.

En 2010, Germain Bergeron fait la rencontre de Robert Brulotte, designer inspiré etvisionnaire de L’Assomption, qui se passionne pour l’œuvre de Bergeron.

Robert Brulotte propose de revamper les œuvres que Bergeron entrepose chez lui afinde les mettre en valeur et de les exposer au public.

La folie était lancée et rejoint les leaders et gens d’affaires de L’Assomption à qui onpropose de créer une exposition des œuvres à ciel ouvert un peu partout dans lecentre-ville.

Ce sont donc 14 sculptures monumentales qui ont été restaurées et installées dans leQuartier des arts de L’Assomption.

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Né à Sainte-Perpétue-de-Nicolet en 1933, Germain Bergeron produit ses premières œuvres d’art au tournant desannées 60 alors qu’il enseigne au Collège Notre-Dame de Montréal. Il est à ce moment frère de la congrégation deSainte-Croix et côtoie le frère Jérôme Paradis, personnage bien connu au sein de la communauté culturelle pour sonouverture face aux nouvelles pratiques artistiques. Contrairement à ce que son passé clérical pourrait laisser présager,Bergeron ne voit pas en la religion un frein pour son art lorsque vient le temps de produire des créations originaleset souvent susceptibles de piquer la pudeur des plus conservateurs.

Parmi les créations que Bergeron présente à l’exposition universelle de 1967 à Montréal (année suivant son départde la vie religieuse), se distingue une immense armature de ferraille représentant le célèbre chevalier Don Quichotte,symbole de justice sociale, d’idéalisme et de comique. D’après Michel Vaïs, lorsque cette statue a été rendue publique,plusieurs n’arrivaient pas à croire qu’il s’agissait de l’œuvre d’un ancien ecclésiastique. La sculpture Don Quichottereprésente le chevalier et sa monture de manière disproportionnée et rachitique, donnant l’effet d’un dessin surl’horizon. Pour Bergeron, ce choix de personnage s’imposait pour l’Expo 67, qui avait pour thème « Terre desHommes ». Tous pouvaient se reconnaître dans cette figure mythique du combattant de la liberté et aspirant de l’idéal.

Près d’une décennie plus tard, en 1976, l’un des architectes de la station de métro Monk à Montréal, Marc Bélanger,lui confie la tâche de produire une œuvre pour la station qui ferait hommage aux travailleurs du métro décédés pendantsa construction. Bergeron opte plutôt pour une création qui honorera tous les travailleurs ayant participé à bâtir ceréseau souterrain et décide alors de produire Pic et Pelle : deux structures élancées, d’une hauteur de près de deux

GERMAIN BERGERON

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étages au milieu desquelles des milliers de personnes circulentchaque jour en se rendant au boulot. L’imposante stature decette œuvre, représentant des travailleurs à l’ouvrage, soulèvel’admiration du passant et monumentalise le travail ardu de toutouvrier.

Malgré le format souvent imposant des œuvres de GermainBergeron, une profonde humilité se dégage de ces structuresfigées dans une mobilité poétique. Comme pour ses pairs ArmandVaillancourt et Yves Trudeau (pour ne nommer qu’eux), l’amourde l’Homme et l’engagement social de l’artiste émanent de sessculptures. Comme l’a écrit Réa Montbizon : « Avec des moyenslimités, il parvient à construire les caractéristiques essentielles denos faiblesses humaines : vanité, orgueil, sybaritisme et faste. »Le métal, ce matériel froid, rigide et grinçant, devient, par lesmains de Bergeron, d’une gracieuse souplesse réchauffant lesesprits dans une valse que chacun peut diriger à son gré.Mystérieuses dans leur forme, quelquefois gênantes par leursatouts, ces sculptures finissent inévitablement par faire en sortequ’un sourire s’esquisse sur le visage de celui qui les regarde,rendant ainsi le passant complice de l’artiste.

Dans le cadre du projet « Oeuvres monumentales entre ciel etterre », 14 œuvres de Bergeron sont installées dans divers lieuxdu Quartier des Arts de L’Assomption. Libres au grand air, cessculptures se donnent à chacun et permettent de s’adonner àune aventure culturelle et historique en milieu urbain. Les marcheursde tous genres apprécieront sans doute les rêveries et les émotionsauxquelles font place ces nobles sculptures de fer.

AVEC DES MOYENS LIMITÉS, IL PARVIENT À CONSTRUIRE LESCARACTÉRISTIQUES ESSENTIELLES DE NOS FAIBLESSES HUMAINES :VANITÉ, ORGUEIL, SYBARITISME ET FASTE. LE MÉTAL, CE MATÉRIELFROID, RIGIDE ET GRINÇANT, DEVIENT, PAR LES MAINS DE BERGERON,D’UNE GRACIEUSE SOUPLESSE RÉCHAUFFANT LES ESPRITS DANS UNEVALSE QUE CHACUN PEUT DIRIGER À SON GRÉ.

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CONTEXTE HISTORIQUESur les plans tant social que culturel, les années 60 et 70 sont pour le Québec une période riche en trans-formations et en bouleversements. L’accession au pouvoir du gouvernement de Jean Lesage à la tête duQuébec, dans la nuit du 4 au 5 juillet 1960, met fin à un règne politique de plus de 15 ans de l’Unionnationale (longtemps dirigée par Maurice Duplessis) et fait entrer la province dans ce que l’histoire anommé « la Révolution tranquille ». Socialement, cette révolution implique la remise en question desvaleurs conservatrices jusqu’alors prédominantes. Une libéralisation accrue de la société s’amorce, ce quinotamment permettra l’épanouissement du secteur culturel québécois.

En 1948, un groupe d’artistes et d’intellectuels appelé « les Automatistes » fait paraître un manifesteintitulé Refus global. Ce manifeste, écrit par Paul-Émile Borduas et cosigné par sept femmes et huithommes, est en quelque sorte un appel à la population dans lequel on prône l’abandon d’un Québectraditionnel dirigé par un clergé trop puissant. Les signataires souhaitent embrasser l’avenir; briser leschaînes de la tradition et libérer la créativité. Condamnées par les autorités et censurées par la presse, lesidées inhérentes au manifeste seront étouffées tout au long de la décennie qui allait suivre. Cependant, lecontexte socio-historique des années 60 et 70 sera favorable à leur éclosion, ce qui participera à uneeffervescence artistique sans précédent dans l’histoire du Québec.

De nombreux artistes de cette période délaissent les médiums traditionnels, tels que la peinture, pour setourner vers la création de happenings, comme avec Serge Lemoyne, ou encore d’environnements artistiquesau sein desquels le spectateur peut évoluer et participer à la création, tel que c’était le cas avec les « Mous-seauthèques », des environnements multimédias aux allures de discothèques créés par Jean-Paul Mousseau.Il y a, au coeur des pratiques artistiques de l’époque, la volonté de rendre l’art accessible en le faisantsortir de ses lieux ordinaires, représentés entre autres par la galerie et le musée. Le désir de favoriser sadémocratisation, par exemple en faisant entrer l’art dans le quotidien par diverses stratégies de diffusion,anime également les acteurs de la création des années 60 et 70.

Ainsi, l’art devient pour plusieurs artistes un vecteur politique, une façon de s’impliquer socialement. L’art,souvent perçu comme une forme d’élitisme lorsqu’il est restreint au jeu entre artiste, collectionneur et critique,sort dans la rue pour que tous puissent en jouir. La culture populaire devient une source d’inspiration pourla création, que ce soit sous forme de dérision des icônes conservatrices ou pour participer à la valorisationd’une identité nationale. Les structures monumentales créées par Germain Bergeron, dont plusieurs peuventêtre vues dans la ville de L’Assomption, viennent s’inscrire dans cet esprit de liberté et d’accessibilité àl’art. Repérables de loin, ces œuvres de métal recyclé sont conçues pour être expérimentées par tous ceuxqui ont la chance de croiser leur chemin. Trop imposantes pour être enfermées dans les voûtes d’un musée,les sculptures de Bergeron se donnent au plaisir de chacun et représentent encore à ce jour cet esprit del’art pour tous.

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L’ANGE DUJUGEMENT DERNIER

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1978

Mécènes :

Construction Gestion Frédélie inc.et Brûlerie du Roy à L’Assomption

Ô-MIRODALI CASS-Ô

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1990

Mécène :

Hebdo Rive Nord

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À la sortie du Théâtre Hector-Charland, un guide d’exposition en main,on aperçoit à gauche la sculpture d’un ange qui, au premier abord, sembled’une grande douceur. De longues jambes fines, une délicate poitrine,une courte robe rouge et une auréole, la féminité de cet ange de fer lerend d’une sensualité particulière. Toutefois, la Bible présente les angescomme étant des êtres asexués, ou du moins comme des « fils de Dieupuisqu’ils sont fils de la résurrection » [Luc, 20, 36]. Voilà un premierélément venant chambarder les interprétations possibles de cette œuvre.Le titre de cette sculpture, L’Ange du jugement dernier, référant au thèmebiblique du jugement [Matthieu, 25, 31-46], qui fut entre autres reprispar Michel-Ange pour peindre le mur de l’autel de la chapelle Sixtine àRome, vient à nouveau perturber la lecture de l’œuvre. En effet, cet épisodecorrespondrait au moment où Dieu, le jour du Jugement, aidé de sesanges, séparera les Hommes ayant mérité la vie éternelle de ceux méritantle châtiment éternel. Pourquoi, à première vue, tant de douceur pourreprésenter un ange devant accomplir une tâche aussi ingrate? Lesinterrogations persistent lorsqu’on prend conscience des pièces deferraille utilisées pour composer la structure : la tête d’une broyeuseagricole en guise de robe, une hélice lui servant d’ailes et le différentield’un véhicule comme cou et tête du personnage. En utilisant cet attirailmécanique pour construire un ange aussi charmant, Bergeron arrive àreprésenter la violente scission découlant de cet épisode biblique :bonheur infini pour les uns, souffrance à jamais pour les autres.

Les œuvres de Germain Bergeron, par leurs formes excentriques etdémesurées, paraissent souvent comme des rêveries insolites, des piècestotalement surréalistes. Eh bien l’œuvre intitulée Ô-Miro Dali Cass-Ô,que l’on retrouve du côté est du Théâtre Hector-Charland à l’intersection de larue Sainte-Anne et du boulevard de l’Ange-Gardien, ne fait pas exceptionà la règle! Le titre lui-même rappelle les noms de Joan Miró et de SalvadorDali, deux artistes ayant pendant un temps été liés au mouvementsurréaliste. Le procédé de création surréaliste consiste essentiellementà utiliser, peindre, sculpter, écrire, etc., tout ce qui vient à l’esprit sans yexercer de contrôle raisonnable visant à en donner une explicationlogique. Le rêve, la sexualité, la spiritualité ainsi que plusieurs autresthèmes échappant à la raison ou étant des éléments tabous de la sociétéy sont explorés. La présente œuvre de Bergeron est grandement inspiréede cette exploration exempte de contrôle raisonnable. Par exemple, unetête et un corps aux formes triangulaires cohabitent avec la rondeur descuisses et des bottes du personnage, une dualité formelle quelque peudéstabilisante pour l’oeil de celui qui regarde. Cette sculpture faitégalement rivaliser le masculin et le féminin, alors que le visage dupersonnage est muni d’une longue moustache et que les lignes trèssuggestives de ses cuisses rejoignent un triangle inversé pouvant êtreassocié à un sexe féminin. Avec cette sculpture à l’allure théâtrale etexcentrique tirée de son imagination, Bergeron permet au spectateurde donner lui-même du sens à cette organisation hétérogène, d’en tirerses propres conclusions. Enfin, tout n’est pas noir ou blanc...

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TRANSIRE

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1978

Mécène :

C.E. Malouin & Fils inc.

LA BALLERINE

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1969

Mécènes :

Bistro L’Ange cornu etMarché de Noël de L’Assomption

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En quittant Ô-Miro Dali Cass-Ô, on aperçoit une grande structure decouleur terre se trouvant tout au fond de la rue Saint-Joachim. De près, lapose de cette sculpture aux formes minces et ouvertes laisse croire enun Christ en croix. En effet, les bras à l’horizontale, les pieds superposés,les côtes saillantes et la forme circulaire qui surplombe la tête (formerappelant une couronne d’épines) appuient cette observation. Cependant,si Transire est bien une représentation du Christ, elle n’a rien à voir avecce à quoi la chrétienté a habitué ses croyants, à commencer par son sexeapparent. À part quelques exceptions, la pudeur de l’Église a toujoursimpliqué que l’on recouvre le sexe du Christ sur la croix comme danstoute autre représentation. Ainsi, les représentations de Jésus crucifiésont toujours pourvues ne serait-ce que d’un mince morceau de draperiepour cacher son sexe, et ce, même si les crucifiés de l’époque romaineétaient dans une complète nudité. Autre fait inhabituel pour ce genrede représentation : le visage du personnage est complètement lisse;aucun trait ne suggère l’apparence du Fils de Dieu, laissant ainsi toutela place à l’imagination du spectateur pour compléter l’image. Si cettestructure aux apparences de construction en pâte à modeler est réel-lement une représentation du Christ osée par un ancien frère de lacongrégation de Sainte-Croix, il s’agit certainement de l’une des repré-sentations du Fils de Dieu les plus humbles à avoir été produites.

En revenant au boulevard de l’Ange-Gardien, on tourne à droite poursurprendre une ballerine semblant faire ses échauffements. Élancée etde la même hauteur que l’immeuble auquel elle fait dos, elle jette unregard surpris à celui qui la découvre et l’observe des pieds à la tête.Son visage triangulaire et ses yeux globuleux témoignent de l’état destupéfaction dans lequel elle paraît être, saisie par la gêne de se faireépier pendant son exercice. Cet étonnement de la danseuse est d’autantplus étrange qu’elle pourrait broyer le passant d’un simple mouvementde « tour piqué ». Ses seins à la vue de tous ajoutent au sentimentd’embarras qui émane de la sculpture, une timidité susceptible d’entraînerun certain malaise chez celui qui la regarde. De couleur écarlate, cettefemme de fer aux longs cheveux en boyaux tient en précaire équilibresur sa jambe droite, comme si elle hésitait entre terminer sa figured’arabesque et reposer son pied gauche au sol. Ces éléments réunisfont en sorte que, malgré sa petitesse comparativement à la taillecolossale de La Ballerine, l’observateur domine la sculpture. Cependant,même s’il a le dessus de la situation, le spectateur se sentira voyeurdevant cette structure immobile qui s’offre à tous malgré elle.

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LE ZYGOTEGIGOTE

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1971

Mécènes :

Chez Mariki’Art etGinette Lafortune

MA MAIN

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1982

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À quelques pas de La Ballerine, une étrange créature de ferraille attendle marcheur. Il s’agit de Le Zygote gigote, une sculpture aux alluresd’hybride ressemblant à la fois à un papillon désarticulé et à un humanoïdesurexcité. Zygote est d’ailleurs le nom donné à un être vivant lors de sonpremier stade de développement à lasuite de la fécondation, un être quipourrait très bien ici résulter d’un croisement d’espèces. Ce personnageaux couleurs verte, rouge et ocre semble directement provenir d’un récitde science-fiction. Haut sur pattes, affublé de petits bras et d’un tronccourt et trapu soutenant une large tête symétrique à son appendice dorsal,cet être fantastique semble vouloir s’animer et interagir avec tous ceuxqu’il croise. Comme l’a écrit Guy Robert à propos des créatures imagi-naires de Bergeron : « La fantaisie [...] balaie de sa brise rafraîchissantela rouille des rebuts [...]. » Cet être est-il surpris, heureux ou angoisséde se faire observer? Difficile à dire, mais il est évident qu’il est débordantd’excitation. Justement, les pièces mécaniques choisies par GermainBergeron pour constituer le corps de cette créature, telles que les biellesservant de bras et de cuisses, transmettent véritablement l’idée demouvement, l’effet de gigotement du zygote, comme le mentionne sontitre. De plus, le spectateur pourra avoir l’impression que si cette sculpturese mettait réellement à bouger, un tintamarre foudroyant, causé par lefrottement du métal, résonnerait partout dans la ville. Amusant etintrigant, cet assemblage de ferraille alimentera l’imagination de tous.

En poursuivant sa marche sur le boulevard, à mi-chemin entre les ruesSainte-Anne et Saint-Joseph, on retrouve l’œuvre intitulée Ma main. Cettesculpture monochrome de couleur verte est constituée de trois élémentsdistincts facilement identifiables, à commencer par une roue en acierservant de base à l’ensemble. Ce qui paraît être un essieu est soudé surcette roue en guise de piédestal à la pièce de résistance de l’œuvre :l’extrémité dentelée d’une pelle d’excavation mécanique. Cette pièce,rappelant la forme d’une main par les cinq dents qui la composent, estplus large que haute et semble usée dans ses articulations qui semblentfigées. Une inflexibilité et une dureté se dégagent de cette pelle dentelée,alors que Bergeron a produit tant d’oeuvres où la ferraille, malgré safermeté, a un aspect si malléable. Des cinq sens, celui qui peut noussembler le plus réel, le plus tangible, est certainement le toucher. C’estavant tout avec les mains que l’on touche, que l’on salue les gens etcaresse les visages... Dans le monde réel, on peut difficilement imaginerquiconque souhaiter tenir dans les siennes cette main glaciale et tranchante.Toutefois, cette pièce aux allures de trésor archéologique réchauffe lesesprits par son incohérence.

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L’ENCEINTE

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1975

Mécène :

Desjardins Caisse Pierre-Le Gardeur

LE RETOURDU GRAND

MONARQUE

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1985

Mécène :

Collège de l’Assomption

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De l’autre côté du boulevard de l’Ange-Gardien, on retrouve ce qui sembleêtre la représentation d’un individu appuyé nonchalamment contre lemur d’un édifice. La posture du personnage, mains croisées sur le ventreet tête légèrement inclinée, laisse croire qu’il se trouve dans un momentd’interrogation. La forme circulaire de la tête, assise sur un corps auxarêtes multiples et au format disproportionné, est dirigée de façon à ceque le regard du personnage soit posé sur son abdomen, au milieu duquelse trouvent deux ouvertures. Curieux de voir ce qui s’y trouve, on montesur le socle de l’œuvre pour y découvrir ce qui ressemble au curieuxfœtus d’un enfant de fer. Cette découverte, passablement troublante,peut provoquer un mouvement de recul de la part de l’observateur chezqui les interrogations fusent : est-ce l’image métaphorique d’une femmeadmirant sa progéniture? Celle d’une future mère pensant à l’être qu’ellemettra bientôt au monde? Ou plutôt la troublante représentation de laperte de l’enfant qu’elle portait? Une beauté déroutante se dégage decette œuvre, une sorte de fragilité contredisant la rigidité du matérielqui la compose. Celle-ci est d’autant plus forte lorsqu’on prend connais-sance du titre : L’Enceinte. En effet, l’utilisation de l’article « L’ » dans letitre met l’accent sur la situation particulière du personnage représenté.Cette particularité sémantique indique en quelque sorte l’idée que cettefemme au ventre habité est pointée du doigt, comme s’il y avait quelquechose d’illégitime dans sa situation. Malaise et compassion se mêlentalors à la composition ludique de la pièce de ferraille, ouvrant la voie àde nombreuses interprétations.

Un peu plus à l’est sur le boulevard de l’Ange-Gardien, face au Collègede l’Assomption, une impériale statue de fer attend le visiteur au milieudes arbres. Intitulée Le retour du grand monarque, cette œuvre filiformede Germain Bergeron se donne en paradoxe à son visiteur. En effet, samorphologie ludique, faisant penser à un dessin animé à saveur comique,détonne avec le titre, lequel, de prime abord, devrait imposer le respecthiérarchique. Muni de courtes jambes, d’un long corps courbé et d’uncou si étiré qu’on sent qu’il pourrait rompre à tout instant, ce personnagedistordu transmet l’impression de sa désuétude. Sa tête voutée fixe lesol et ne communique pas la fierté et la force que devrait normalementdégager un monarque. Malgré tout, il tient fermement son sceptre danssa main gauche et une croix est fixée à son avant-bras droit, un peucomme si elle y était tatouée. La base triangulaire servant de socle àl’œuvre est dotée de trois roues dont aucune ne se dirige dans la mêmedirection, de sorte que l’unique mouvement que ce « char royal » pour-rait faire serait un mouvement circulaire infini. Cette idée de rotationest-elle là pour permettre aux sujets du roi de l’admirer sous tous sesaspects, telle une icône, ou plutôt pour signifier son incapacité à allerde l’avant? La réponse semble évidente, et la dérision d’un personnagequi, historiquement, avait tous les pouvoirs, brise les chaînes du passépar son ironie et se rit de cette hiérarchie désormais archaïque.

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WOPÉTAL

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1967

LULUNATIK

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1970

Mécène :

Cégep régional de Lanaudière à L’Assomption

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Quelques mètres plus loin, toujours sur le boulevard de l’Ange-Gardien,un être de nature inconnue est juché sur son perchoir et guette le passant.La sculpture de Germain Bergeron intitulée Wopétal fait partie desdifférents bestiaires, c’est-à-dire des créatures étranges et mystiquessouvent imaginaires que l’artiste a su créer. À ce sujet, Guy Robert aécrit que par l’exploration que fait Bergeron du répertoire bestiaire,« l’oiseau devient le dépositaire de nos rêves de vol, d’évasion etd’ailleurs, et évoque le mythe d’Icare », cet homme de la mythologiegrecque qui était parvenu à voler grâce à des ailes de cire qui ontmalheureusement fondu lorsqu’il s’est trop approché du Soleil. Lacréature que Bergeron appelle Wopétal a peut-être des allures d’oiseau,mais ne semble guère pouvoir s’envoler avec ses ailes trop courtes etses énormes pattes. Cependant, même si elle ne pouvait s’envoler, cettebête semblant provenir de la préhistoire pourrait sans doute survivredans un monde des plus barbares grâce à sa carrure tranchante et àson bec acéré. Étrangement, ce qui aurait pu être en d’autres cas lesymbole de la virilité et de la puissance de l’animal, son sexe masculindevient ici la zone de son corps la plus fragile, la plus exposée aux attaquesennemies en pendouillant ainsi dans le vide.

À l’entrée principale du Cégep régional de Lanaudière sur la rue Dorval,un personnage farfelu aux couleurs vives accueille les étudiants. De lamême lignée de personnages de science-fiction que Le Zygote gigote,l’œuvre de Bergeron intitulée Lulunatik est à la fois intrigante et amusante.Comme son titre le suggère par son jeu de mots, la présente sculpturelaisse présager une personnalité instable par les éléments qui la compo-sent. Les pièces circulaires de couleurs rouge, orange et jaune, formanttoute la partie inférieure de son corps, semblent lui permette de tournoyerdans tous les sens. Ces mêmes pièces paraissent pouvoir s’emboîter lesunes dans les autres, telles des poupées russes, afin que Lulunatik arriveà se baisser et à s’élever comme il le souhaite. L’idée que sa tête, forméed’un différentiel automobile, balancerait au moindre contact est transmisepar le fait qu’elle est supportée par un cou construit d’un ressort en spirale.Ses oreilles, faites de cette même pièce, accentuent cette impressiond’instabilité. Finalement, l’hélice qui lui sert de chapeau, ou peut-êtrede générateur d’énergie, vient compléter l’idée de motricité si présentedans l’œuvre. Avec ses apparences de vire-vent vire-poche, ses grandsyeux et son nez jaune, ses pièces colorées et rigolotes ainsi que sesallures d’extra-terrestre débordant d’énergie, Lulunatik est un personnageludique et attachant que plusieurs aimeraient bien ramener à la maison.

Page 12: Guide d'exposition des œuvres de Germain Bergeron

HALTÉROPHILE

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1968

Mécène :

Supermarché IGA CrevierL’Assomption inc.

LE GOLFEUR

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1992

Mécènes :

Les familles BorjaBrulotteCharestDupontLaurier

Roy

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En poursuivant sa marche sur la rue Dorval, à l’entrée du stationnementdu complexe sportif, on rencontre un haltérophile géant en pleine action.La finesse du personnage, construit à partir de formes minces et cylin-driques, contraste avec le sport exigeant qu’il pratique. Les jambes enposition de fente, les bras pliés, le dos courbé et la tête regardant versle ciel, l’athlète est capturé par l’artiste dans le dernier mouvement deson épaulé-jeté, l’un des deux mouvements évalués lors d’une épreuved’haltérophilie. Cette étape de l’exercice, précédant l’extension complètedu corps avec les bras en flèche vers le haut, correspond au moment oùles membres de l’haltérophile sont le plus en torsion, formant ainsi unensemble de diagonales exprimant toute la difficulté de l’activité. Figé danscette position, Haltérophile de Bergeron relève du dessin d’observation,alors que l’artiste est parvenu à saisir en détail la complexité du mou-vement. Constatant que la barre plie sous le poids des disques, l’instantsemble pénible pour l’athlète et on se demande s’il arrivera à compléterson levé ou si la barre, qu’il n’est pas encore tout à fait parvenu àempoigner, lui glissera des mains. La précarité de la situation invitel’observateur à compléter la scène par sa propre imagination. Souhaitons-lui quand même de réussir son levé...

Toujours dans le stationnement du centre sportif, tout près de la rue Sainte-Anne, un second athlète en pleine action attend qu’on l’observe. Encoreune fois, Le Golfeur créé par Germain Bergeron témoigne de la qualitéde ses observations quant à la complexité de l’élan du golfeur. En effet,la structure d’acier présente un joueur gaucher complétant l’exécutionde son mouvement. En premier lieu, il est possible de constater que lepersonnage exécute bien son transfert de poids alors que son pied droitest à plat et que sa jambe gauche, légèrement fléchie, se termine parun pied en pointé. Sa tête et ses hanches, bien droites, regardent versla cible, tandis que son torse et ses épaules indiquent qu’il est en toutefin de rotation. Dans cette grande structure, les lignes parfois déforméeset disproportionnées côtoient l’élégance et le chic souvent associés à cesport. Cependant, il est intéressant de noter la touche humoristique propreà Bergeron qui a représenté son golfeur avec des fesses rebondies. Legolf, considéré comme un sport mondain, connaît une réglementationstricte, particulièrement en ce qui a trait à l’habillement de ses adeptes.En représentant son golfeur avec un tel fessier, l’artiste se moquedélicatement de cet orgueil propre à la race humaine quant à certainsaspects de nos vies.

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PIETÀ

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1977

Mécène :

Aux Jardins de la rivière

L’ANGE

Médium :

Métal recycléAnnée de création :

1984

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En quittant le centre sportif, on tourne à gauche sur la rue Sainte-Annepour ensuite se diriger vers la droite sur Saint-Étienne. Deux rues plus loin,au parc LeSueur, est installée Pietà, une œuvre dont le titre se rapporteau thème chrétien de la Vierge pleurant son enfant mort sur la croix. Denombreux artistes de la Renaissance, tels Raphaël vers 1505, ont utiliséce thème de la Vierge de pitié, tant en peinture qu’en sculpture. Tradi-tionnellement, ce thème présente la Vierge Marie habillée d’une grandetunique cachant l’ensemble de son corps. Sur ses genoux repose le corpsdu Christ que ses persécuteurs viennent de descendre de la croix. Elle letient dans ses bras alors qu’il a les yeux fermés, donnant l’impressionqu’il dort d’un profond sommeil. De plus, il est systématiquement habilléd’un cache-sexe (périzonium) en raison de la pudeur traditionnelle del’Église. Ce que Bergeron a décidé de faire avec sa Pietà est essentiellementle contraire! Tout d’abord, on remarque que Marie, le personnageagenouillé, n’a pas de bras pour tenir son fils, alors que son corps defer, entièrement nu, dévoile de petits seins ainsi que son sexe. Elle regardeJésus, avec des yeux sortis de leur orbite, posé sur sa cuisse gauche dansune posture témoignant de la souffrance qu’il a endurée. Le rendu deson visage donne à voir une bouche grande ouverte, et contrairementaux représentations habituelles, ses yeux semblent être restés ouverts.Connaissant le passé ecclésiastique de Bergeron, on devine que sonsouhait n’était pas de porter en dérision cette scène de souffrance. Aveccette simplicité de représentation, il réussit plutôt à humaniser l’enfantde Dieu et sa mère tels qu’ils auraient existé.

En quittant le parc Le Sueur, on monte la rue Notre-Dame jusqu’à la rueSt-Pierre pour découvrir la dernière sculpture du parcours, située devantla Maison de la culture et qui s’intitule L’Ange. Le mot « ange » possèdeune connotation généralement douce, référant à un être divin et pro-tecteur. Les anges sont idéalisés par le commun des mortels, de tellesorte qu’ils sont métaphoriquement mis sur un piédestal afin que l’onpuisse mieux les admirer. L’Ange de Bergeron est aussi sur un piédestal,bien réel celui-là, mais ressemblant plutôt à un perchoir duquel cepersonnage ténébreux pourra s’élancer pour punir les fautifs. Sans braset sans visage, auréolé d’une lame de scie circulaire et prêt à sauter surles brebis égarées, cet ange impose la crainte plutôt que la quiétude.Dans son dos, ce que l’on peut voir comme étant ses ailes ressemble àune anse qu’un être supérieur pourrait empoigner pour mieux contrôlerce personnage à l’auréole tranchante. Malgré ses allures de réverbère,on doute de la capacité de cet être à illuminer les âmes. Ne serait-il pasplutôt un mauvais ange? Un démon, comme les anges du mal sontdéfinis dans la Bible? En fait, la différence entre ange et démon tientdans une délicate conception impliquant, comme tant d’autres choses,que l’un nécessite l’existence de l’autre pour se définir. À ses côtés,sommes-nous en mesure de dire ce que l’on est?

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Boulevard de l’Ange-Gardien

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Collège del’Assomption

Cégeprégional de

Lanaudière àL’Assomption

ThéâtreHector-

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PARCOURS DEL’EXPOSITION

L’Ange du jugement dernier

2 Ô-Miro Dali Cass-ô

3 Transire

4 La Ballerine

5 Le Zygote gigote

6 Ma Main

7 L’Enceinte

8 Le Retour du grand monarque

9 Wopétal

10 Lulunatik

11 Haltérophile

12 Le Golfeur

13 Pietà

14 L’Ange

Page 15: Guide d'exposition des œuvres de Germain Bergeron

Remerciements

M. Germain BergeronMme Nicole Mercier

Mmes Sophie et Roxanne BergeronM. Robert Brulotte

M. Winston McQuadeM. François Renaud

Le ministère de la Culture et des Communications du QuébecLa Ville de L’AssomptionLa MRC de L’AssomptionXstrata Cooper Canada

Les 20 mécènes :Bistro L’Ange cornu, Brûlerie du Roy à L’Assomption,

Cégep régional de Lanaudière à L’Assomption, Chez Marikit’Art,Collège de l’Assomption, Corporation Hector-Charland,

Caisse Desjardins Pierre-Le Gardeur,Les familles Borja, Brulotte, Charest, Dupont, Laurier et Roy,

Gestion Frédélie inc., Ginette Lafortune,Hebdo Rive Nord, Les Jardins de la rivière,

Malouin CE & Fils inc., Marché de Noël de L’Assomption,Supermarché IGA Crevier L’Assomption inc.

Suivez L’Art en plein air à L’Assomption sur

BIBLIOGRAPHIE :

Paul-Émile Borduas, Refus global et autres écrits, Montréal, Éditions Typo, 2010 (1948), 301 p.

Réjean-Bernard Cormier, « Des artistes de leur temps », ETC, n° 48, 1999-2000, p. 35-37.

André Martin, « Frère Jérôme : De l’art de la pédagogie et de la pédagogie de l’art », Vie des Arts, vol. 25, n° 99, 1980.

Réa Montbizon et Claude-Lyse Gagnon, « À Montréal », Vie des Arts, n° 44, 1966, p. 88-89.

Guy Robert, Bergeron aède de la ferraille, Montréal, Association des sculpteurs du Québec, 1972.

Marcel Saint-Pierre, « A Quebec art scenic tour and his ‘contradictions itinérantes’ », Québec Underground, 1962-1972, tome 2, Les Éditions Médiart, Montréal, 1973, p. 448-471.

Michel Vaïs, « Don Quichotte et l’invention artistique », Jeu : revue de théâtre, n° 89, (4) 1998.

« Les artistes du métro de Montréal : Germain Bergeron », Métro, 28 octobre 2003, p. 9.

Rédacteur : Pierre-Charles Monahan / Correctrice : Sylvie Lemay / Photographe : Arsénio Corôa / Conception et mise en page : Anne-Marie Charest

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